Buzbuz #30

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MAG AZINE G RAT UIT RÉUNIONNAIS - #30 - AV R I L /M A I 2016

ANTONIN CELUI QUI CHERCHE LE TRIATHLON C’ÉTAIT MIEUX AVANT? DERRIÈRE LES RIDEAUX LA VIE AVEC QUINZE DOIGTS

LES SOUCOUPES

ON LES ATTEND TOUJOURS


NOS PROGRAMMES SONT À DÉVORER !

Juste après la diffusion US

GAME OF THRONES saison 6 inédite dès le 26 avril 100% cinéma séries

En Avril sur

CHAMPIONNAT DU MONDE MOTOGP en direct et en exclusivité sur

X-MEN : DAYS OF FUTURE PAST

LES ANIMAUX DÉRAILLENT

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www w.pa ara abollerreu unio on.co om Télévision . Internet . Téléphone UNDERWORLD 4 NOUVELLE ÈRE © 2012 Lakeshore Entertainment. LES ANIMAUX DÉRAILLENT © Tous droits réservés National Geographic Channels. X-MEN TM & © 2013 Marvel & Subs. TM and © 2013 Twentieth Century Fox Film Corporation. All rights reserved. MOTOGP © Crédit Photo : Getty Images. GAME OF THRONES © 2016 Home Box Office, Inc. All rights reserved. HBO ® and all related programs are the property of Home Box Office, Inc. Photographies non contractuelles.


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ÉDITO

LES PÉTRELS DÉTESTENT-ILS LE FOOT? Il pleut des chats et des chiens en Angleterre, et des pétrels à Cilaos. C’est comme ça : l’année dernière, en plein match de foot dans le cirque, des dizaines et des dizaines de pétrels sont tombés sur les terrains et aux alentours, ce qui a interrompu les matchs. Depuis quelques années, la plupart des communes réunionnaises (pas toutes, n’abusons pas) éteignent donc leur éclairage public en avril, histoire de ne plus déboussoler ces pauvres piafs qui, justement à cette époque, prennent le chemin de l’océan. Non contents de planquer leurs nids, de se faire manger leurs petits par les chats (qui ne sont pourtant pas les plus malins des animaux non plus), voilà qu’ils empêchent en plus les championnats de foot de se dérouler normalement. Ces oiseaux-là ne respectent rien, à se demander ce qu’ils font le dimanche s’ils ne regardent pas Téléfoot. Lorsque vous lirez donc ces lignes, sachez qu’à partir de 20 heures, si les routes, stades et autres lieux publics nécessitant de l’éclairage son éteints, c’est pour aider deux ou trois bêtes à plumes à faire la différence entre un crâne de footballeur et l’océan. Et comme, en plus de ne pas être très futé, le pétrel n’est pas très habile, il faut l’aider à repartir. Car malgré sa propension à être attiré par les terrains de sport, il ne faut pas shooter dedans, ce n’est pas un ballon. Il faut prendre une boîte à chaussures, virer les crampons qu’il y a dedans, faire des trous (dans la boîte, pas dans le pétrel) et appeler la SEOR au 02 62 20 46 65. Ils ne vous expliqueront pas comment le mariner avant de le faire cuire, mais ils l’aideront à repartir vers la mer. Il est en effet impensable de garder chez nous une bestiole qui ne connaît pas Dimitri Payet. LA R ÉDACT I ON

COUVERTURE

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Modèle : Gaëlle Stylisme : Catherine Grégoire Maquillage : Institut Citron vert (Cynthia) Photo : Romain Philippon Assistante : Marine Blouson et accessoires : Studio Universal

BuzBuz Magazine Ludovic Benard Tél. 0692 13 60 08 contact@buzbuz.re

BUZBUZ MAGAZINE Bimestriel N°30 Avril - mai 2016

DIRECTION DE LA PUBLICATION Pascal Peloux

RÉDACTION EN CHEF

SARL au capital de 8250 euros 1, rue Claude Monet - Apt n°5 97490 Sainte-Clotilde 0692 55 99 98 contact@buzbuz.re

Loïc Chaux

RÉDACTION Anne Chans, Laurent Perrin, Marianne Lenoir, Livy, Loïc Chaux

DIRECTION ARTISTIQUE GRAPHISME Pascal Peloux Stagiaire : Maréva Victoire

PHOTOGRAPHIE Gwael Desbont, Romain Philippon

IMPRESSION Graphica

www.buzbuz.re ISSN 2114-4923 Dépôt Légal : 6183 Toute reproduction même partielle est interdite.

VOUS SOUHAITEZ FAIRE CONNAÎTRE UNE BONNE ADRESSE, UN BON PLAN, UNE NOUVEAUTÉ. N’HÉSITEZ PAS À NOUS ENVOYER UN COURRIEL À L’ADRESSE SUIVANTE : CONTACT@BUZBUZ.RE


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LE NEZ DE H O RS TEXTES MARIANNE RENOIR, LIVY PHOTOS GWAEL DESBONT

IL N’EST JAMAIS TROP TARD C’est une adresse gourmande à découvrir d’urgence : Enfin ! Le Fromager. Après avoir rencontré les Réunionnais en sillonnant l’Île, Manuel a lancé il y a quelques mois sa fromagerie avec, pour leitmotiv, “donner accès aux fromages du terroir aux réunionnais”. Chez lui, que des fromages AOP au lait cru, quelques petites charcuteries basques, des confitures locales et quelques bonnes bouteilles de vin : Etivaz, Brin d’amour, Burrata di bufala… Plus de quatre-vingts références de fromages dans sa vitrine, en permanence. Et depuis mars, la fromagerie vous propose son bar à fromages, avec des formules de planches garnies de trois, quatre ou cinq fromages à partir de dix euros. Alors, on récapitule : du bon fromage (oui, oui, on a goûté), des petits prix et un accueil très sympathique. Et ça, on adore… ENFIN ! LE FROMAGER, 8 RUE VICTOR-LE-VIGOUREUX, SAINT-PIERRE. OUVERTURE : DU MARDI AU JEUDI, 10H – 18H30 ; LES VENDREDI ET SAMEDI, 9H – 19H. TÉL. : 0692 46 01 13.

BARISTA CYLINDRÉE

À CÔTÉ DU THÉÂTRE, UN BAR… Alors, bande de petits curieux, il vous en faut, des endroits originaux pour descendre un verre et manger un bout ? En voici un : le Kabaret Sat Maron. Il s’agit en fait du bar – appelons-le bistrot, plutôt, avec tout ce que le mot a de valeurs – accolé au théâtre du Grand-Marché. Des p’tits vins pas communs, des expos, parfois des concerts, un joli mur en bois, des salades préparées sur place, et voilà un méchant lieu juste sous le fer forgé du Grand-Marché. Attention : ce n’est ouvert que les soirs de spectacles ; mais quand on dit ouvert, en revanche, c’est avant et après. On peut donc y traîner un peu,et tailler en plus le bout de gras avec les artistes. KABARET SAT MARON, THÉÂTRE DU GRAND-MARCHÉ, SAINT-DENIS. OUVERTURE : LES SOIRS DE SPECTACLES. TÉL. : 0262 20 96 36.

Le thé blanc serait un meilleur antioxydant que le thé vert. La tisane peut se boire glacée, et inutile d’être malade pour s’en préparer une tasse... En sirotant un surprenant Chai tea avec Sonia, nous avons appris pas mal de choses sur les cafés et thés de l’océan Indien. C’est tout l’objectif de cette barista itinérante : à bord de son tuk tuk, Sonia sillonne La Réunion pour enseigner de nouvelles façons de consommer. Et pour prouver que les îles Vanille regorgent de produits d’excellence, comme le café Bourbon pointu ou l’infusion à l’hibiscus. Même dans la préparation, Sonia ne fait rien comme les autres et sublime ses boissons chaudes en travaillant leur mousse. Un petit cœur délicatement dessiné sur notre café, il ne nous en faut pas plus pour craquer. LE BARISTARUN TIROUTUKTUK, 65 RUE JEAN-CHATEL, SAINT-DENIS. OUVERTURE : LES MERCREDI, VENDREDI ET SAMEDI, 12H-18H ; LE TROISIÈME DIMANCHE DU MOIS, 14H30-18H. AU TÉAT PLEIN AIR, SAINT-GILLES : LE DIMANCHE, 8H-12H. AU MARCHÉ BIO DE L’ÉPERON : LE DEUXIÈME SAMEDI DU MOIS, 7H30-11H. TÉL. : 0692 47 04 68.


LA BOÎTE NOIRE

BOUTIQUE ÉPHÉMÈRE —— ART ~ LUXE ~ PERFORMANCE ——

DU 26 MAI AU 18 JUIN À L’AKOYA HÔTEL***** DU JEUDI AU LUNDI ~ DE 14 H À 22 H contact@kriko.re ~T +262 692 20 45 48

KRIKO cabinet de curiosité

6 IMPASSE DES GOÉLANDS, LA SALINE-LES-BAINS


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TOUT COSY Sylvie est créatrice de mode et styliste ; elle a ouvert il y a tout juste un an sa boutique pour vendre sa marque Brindille Brand, mais pas que… On y retrouve également des créateurs de La Réunion, de l’Afrique du Sud, de Madagascar… de l’océan Indien en général. Vêtements, bijoux, chaussures, décoration, que des trésors pour le plaisir des femmes et des enfants. Ce concept store se trouve à Saint-Leu et les clientes viennent de toute l’Île pour se faire plaisir. Pour suivre l’actualité de la boutique, n’hésitez pas à vous connecter à son Facebook, pour être les premiers avertis, par exemple de l’arrivée prochaine de la marque de maroquinerie Sabrina… LA PETITE BRINDILLE, 19 BOULEVARD BONNIER, SAINT-LEU. OUVERTURE : DU MARDI AU SAMEDI, 10H-12H30 // 14H30-18H00. TÉL. : 0692 95 72 43.

LA BONNE ALTERNATIVE

NOUVELLE SIGNATURE L’emblématique sex-shop de Saint-Denis s’est refait une beauté et affiche désormais deux cygnes sensuellement enlacés sur sa devanture ainsi qu’un nouveau logo. Une métamorphose que l’on doit au street artist Gorg One, qui s’est d’ailleurs inspiré de la mythologie grecque : l’histoire de Jupiter ayant pris l’apparence d’un cygne pour séduire la belle Léda. On en a aussi profité pour jeter un œil à l’intérieur. Une large variété de lingerie, accessoires érotiques, romans et BD occupe toujours les rayons. Sans oublier les cabines vidéo qui continuent de résister face à leur principal concurrent, Internet. Il paraît que nous ne sommes pas les seuls à apprécier la nouvelle déco, les habitants du quartier aussi ! EROTIC SHOP, 15 RUE AMIRAL-LACAZE, SAINT-DENIS. OUVERTURE : DU LUNDI AU SAMEDI, 9H30-20H. TÉL. : 0262 41 15 05.

On s’est un peu perdus dans les chemins de l’îlet Coco mais ça valait le coup. Au bord de la Rivière des Marsouins, on a découvert un discret domaine de trois hectares - rien que ça ! - comme parfaite alternative au week-end à la plage. Les Bénédictins connaissent déjà le restaurant traditionnel créole Les Letchis, installé depuis vingt-cinq ans, mais peut-être pas la Plantation River Beach, à quelques mètres seulement. La carte “esprit brasserie” offre un choix entre grillades, salades, burgers ou encore légines grillées... De quoi prendre des forces avant une séance de rafting. À moins que l’on préfère se prélasser sur un transat tout l’après-midi. On peut même prolonger le plaisir en soirée et déguster un bon rhum Plantation avant de prendre, presqu’à regret, le chemin du retour. PLANTATION RIVER BEACH, 42 ÎLET DANCLAS, SAINT-BENOÎT. OUVERTURE : LE VENDREDI, 17H-00H ; LES SAMEDI ET DIMANCHE, 11H-00H. HORAIRES MODULABLES SELON LA DEMANDE. TÉL. : 0692 23 30 40.


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Déco

APÉRITIFS IBÉRIQUES

Cadeaux

Audio Mode

L’appétit vient en mangeant... des tapas. On a tendance à l’oublier, mais lles tapas sont une invitation au dîner et non son substitut. La société d’importation de pr produits alimentaires aux saveurs espagnoles Tajo a donc décidé de nous le rappeler en organisant un Urban Tapas Tour, une à plusieurs fois par mois dans les bars, restos et hôtels. On y picore du vrai jambon Serrano, du fromage Manchego et quelques poivrons piquillos, mais aussi des légumes et du poisson servis en ramequin, en mini sandwichs ou accompagnés d’une tranche de pain. Les tapas, c’est aussi l’occasion d’un moment de partage dans une ambiance festive. On ne s’est donc pas gênés ce soir-là pour partager nos petites portions avec les voisins de table au son des Clandestines. URBAN TAPAS TOUR, DE SAINTE-MARIE À SAINT-PIERRE. POUR LES DATES,VOIR SUR FACEBOOK. TÉL. : 0692 26 64 01.

Kids Ki ids Vaisselle

91 rue e François de Mahy - st Pierre 02 62 27 66 96 casa saba

À GÉOMÉTRIE VARIABLE

Un tatouage appartient-il à celui qui le portera toute sa vie ou à celui qui l’a réalisé ? ““Aux deux x”, vous répondra Mathias. Si l’ancien graffeur s’exprime désormais désorma sur des deux”, supports bien moins éphémères, pas question pour lui de ne pas pouvoir y intégrer son univers. À Carry Graphik, un tatouage se construit à deux. On apprend à connaître l’autre autour d’un café, à cerner ses envies et à trouver des compromis. Inutile, donc, de débarquer avec le symbole de l’infini comme projet. Les bases géométriques, la symétrie et le dotwork, voilà ce qui fait vibrer Mathieu et ses aiguilles. Il nous a aussi confié être super inspiré par faune et flore locales. Un skull de tête de cabri, ça vous tente ? CARRY GRAPHIK TATTOO, 60 CHEMIN DUBUISSON, SAINT-LEU. OUVERTURE : LES MARDI, JEUDI ET VENDREDI, 9H15-12H // 13H-17H30 ; LE MERCREDI, 9H15-12H // 13H-15H ; LE SAMEDI, 9H15-12H // 13H-17H. TÉL. : 0692 88 06 27.

CÉCILE JEANNE 27 avenue de la victoire saint-denis 02 62 479 029


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EN BOUTIQUE COMME EN CUISINE, Y’A SIMONE ! À l’entrée de Terre-Sainte, depuis février, un joli café décoré avec goût et branché vous accueille pour déguster des mets aux saveurs venues d’ailleur : bienvenue au Café Simone (le petit dernier des boutiques Chez Simone). C’est ainsi que la salade Izaac, les bouchées Moïse et l’accompagnement Ginette – entre autres – vous feront voyager. L’originalité tient dans le menu : des petites cartes individuelles à compléter (prénom, numéro de la table et choix des plats et boissons) et à remettre au serveur. Le petit truc en plus : les eaux vitaminées servies dans des Mason Jar (vous savez, ces gros bocaux en verre)… Il ne nous reste plus qu’à tester le brunch du dimanche. CAFÉ SIMONE, 25 RUE AMIRAL-LACAZE, SAINT-PIERRE. OUVERTURE : DU MARDI AU DIMANCHE, 12H - 14H. TÉL. : 0262 61 63 58.

POUR ÊTRE BELLE COMME UNE NYMPHE DES EAUX DOUCES ! UN ZISTOIR D’FAMI Bienvenue au Zinzin, le café-théâtre de Grand-Bois : un lieu convivial où c’est la famille Pounia qui accueille. Véritable lieu alternatif, on peut venir y boire un verre, lire, se détendre, écouter de la musique et profiter de la collection personnelle de vinyles de la famille. Mais c’est aussi une salle de réception, une table et chambre d’hôtes avec dîners-concerts et, en cuisine, Gilbert le papa et Nadine la grandmère. Au menu, une cuisine typique : des carris oubliés, genre le rougail gratons, et toujours des produits frais et locaux. On peut aussi venir faire des stages de danse, de musique, de yoga… Le Zinzin est un lieu chargé d’émotions, un lieu qui a une âme, un état d’esprit. LE ZINZIN, 153 AVENUE DANIEL-RAMIN, SAINT-PIERRE (GRAND-BOIS). OUVERTURE : DU MARDI AU SAMEDI, 10H - 19H00. TÉL. : 0692 76 51 15.

Rendez-vous chez Naiade, une boutique du centre-ville de SaintPierre qui, aux premiers abords a une allure plutôt classique… Mais vous y trouverez des petites pépites de la mode. Ici, toutes les femmes sont mises à l’honneur : les chics, les bohèmes, les classiques pourront dénicher la pièce mode qu’il leur faut. Bijoux, sacs, chaussures, vêtements, tout y est. Côté prix, c’est du “moyen de gamme” ; pas besoin de se ruiner pour être belle. Ce qui nous a plu, les sacs IKKS et surtout la collection de chaussures MellowYellow… le plus dur, c’est de choisir. NAIADE, 13B RUE VICTOR-LE-VIGOUREUX, SAINT-PIERRE. OUVERTURE : DU MARDI AU SAMEDI, 9H -12H // 14H - 18H. TÉL. : 0262 01 30 40.


Rafale - Dassault Aviation


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ART, C ULT URE URBA I N E E T M ULT I M ED I A TEXTES LIVY, ANNE CHANS, LOÏC CHAUX PHOTOS ROMAIN PHILIPPON, GWAEL DESBONT

FLEGME ACTIF ILS REBONDISSENT PARTOUT, LES NEW GRAVITY, DES ESPLANADES PUBLIQUES AUX SCÈNES DE THÉÂTRE. CES ADEPTES DU PARKOUR ONT TROUVÉ UNE PASSION QUI RYTHME LEURS VIES. ET ÇA MARCHE POUR EUX.

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l a la voix grave. Il s’exprime calmement, pose ses mots et bouge avec nonchalance. Pourtant, Kreess, des New Gravity, ne tient pas en place : tout au long de notre rencontre, il se balancera sur ses jambes, s’étirera et ne s’assoira pas. New Gravity est une jolie histoire, qui date de sept ans. En 2009, huit amis dionysiens décident de passer un cap. Ils se réunissaient pour faire du sport, oui, mais pour s’amuser, pour le “fun”, comme ils disent. Depuis cette date, c’est un chemin de vie ; de cette pratique, il était possible de faire quelque chose de plus grand. Le crew New Gravity, vous pouvez facilement le rencontrer : il s’exerce au parkour (acrobaties avec le mobilier urbain, comme nous vous l’expliquions dans un précédent BuzBuz) tous les samedis et mercredis sur le parvis du Teat Champ-Fleuri. Kreess tient d’ailleurs à rappeler que sans la chance offerte par l’institution, lui et ses camarades n’auraient pas le succès qu’ils ont aujourd’hui ; ils seraient peut-être restés à l’extérieur. Ils y ont notamment suivi un atelier avec les mythiques acteurs du film Yamakasi, une référence pour le crew et d’ailleurs pour toute une génération ayant découvert avec eux l’art du sport acrobatique urbain. Le jeune homme de dix-neuf ans, modeste, précise que leur succès – ils commencent à bien remplir les salles - ne leur

monte pas à la tête, bien au contraire ; New Gravity s’accroche plus que jamais à son mojo, humble : “On commence ensemble, on finit ensemble.” Kreess et les autres sont passionnés par ce qu’ils font. S’ils reconnaissent que pour pratiquer, il faut de la souplesse et de bonnes articulations, ils précisent que c’est surtout leur mental, leur moteur. La bonne nouvelle, c’est qu’ils assurent que le parkour a endurci le leur. Et Kreess nous a paru un bon exemple : de l’adolescent qui se demandait ce qu’il allait faire de sa vie, il est devenu le jeune homme dont le sport sera aussi bien le parcours professionnel qu’associatif. Avec, cerise le gâteau, la possibilité bientôt de rentrer en résidence à la Cité des Arts, dont le béton lisse ne peut qu’être un appel à de nouvelles figures.


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LIKE A ROLLING GALET ROCK & BD, UNE EXPO QUI NOUS RAPPELLE QU’IL Y A UN NIVEAU DE FOU CHEZ LES GRAPHISTES, ILLUSTRATEURS ET DESSINATEURS LOCAUX. ET ON PÈSE NOS MOTS.

Non, mais c’est qui, ce Guillaume Plantevin ? Et Abel Técher ? Emma Cezerac ? Et Shor’Eze, il est foutu de faire ça, aussi ? Il y a des fois où on sent un peu bêtes, parce qu’on ne connaît pas assez de monde, et qu’on a l’impression d’être passés à côté d’un paquet de trucs. Ça vaut donc le coup de sortir boire des coups les soirs, et se rattraper. Ce qu’on a fait – et plutôt bien – au Rock à la Buse,

SUR LA TOILE...

Y FO KASSE LÉ KUI DAN LA VIE Voilà le slogan du site web locanardlenoir. com. Ici, on ne se prend pas au sérieux : satirique, humoristique, drôle et même provocateur, le ton est donné. Les articles portent sur l’actualité locale, inspirés de fait réels ou complètement inventés mais toujours dans l’objectif de vous décrocher un sourire et vous faire passer un bon moment. Ce n’est pas toujours de très bon goût, mais il faut quand même noter l’initiative.

SITE DE RENCONTRES... POUR TROUVER UN JOB Tout nouveau dans le paysage local, voici BeamJobs.com, un site de rencontres… mais pour l’emploi. Le job de BeamJobs, c’est de se faire rencontrer des candidats qui recherchent un travail et des recruteurs qui veulent la perle rare grâce au principe du “matching”, comme sur les sites de rencontre. Cette idée de Anne-Laure Payet n’est pas que sur Internet : elle propose aussi des événements IRL.

ACTUS MÉTÉO 974

POUR RÉFLÉCHIR SEREINEMENT

En voilà une page Facebook bien utile et qui mérite d’être présentée pour ceux qui ne la connaissent pas encore : Actus Météo 974. À la base, ce sont deux copains, Franck et Alexandre, passionnés de météo et qui ont eu la brillante idée de partager leur passion en créant en 2010 une page Facebook qui donne les tendances et prévisions météorologiques à la Réunion et la zone Sud-Ouest de l’océan Indien. De plus, en cas d’événements d’envergure à La Réunion, ils donnent des infos spéciales dédiées.

C’est un tout nouveau site d’info payant consacré aux grands reportages. Sur Spicee. com, on retrouve des enquêtes bien fichues réalisées dans le monde entier. Mais surtout, et c’est un peu ce qui les a fait connaître récemment, ils ont créé une rubrique appelée “Conspi Hunter”, qui travaille sur les théories du complot et leur mode de fonctionnement. Passionnant.

en mars, à la Cité des Arts. Outre les plutôt bonnes performances des groupes invités et le manque trop rapide de binouzes au bar, on a donc retenu (et notre banquière aussi) cette expo hallucinante, Rock & BD. Les illustrateurs locaux avaient été chargés, sous la houlette d’Hippolyte et de Fegré, de dessiner les affiches qui auraient pu annoncer des concerts de légendes du rock à La Réunion. Deep Purple au Cap la Houssaye, Elvis au Chaudron, les Beach Boys à Trois-Bassins… On aimerait pouvoir tous les nommer. Mais comme lorsqu’il a fallu en acheter, le choix est trop compliqué, on a choisi au pif. Parce qu’en plus, et c’est assez rare dans les expos pour être souligné : l’expo est homogène, excellente du début à la fin. Et le petit grain de sel en plus, la mise en vidéo du travail par Romain Philippon vient déposer une cerise bien goûteuse sur ce gâteau délicieux. Le pire, c’est qu’on ne dit pas ça parce que c’est des copains de BuzBuz, juste parce qu’on a trouvé ça énorme.


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CU LTU RE POP RECUEILLI PAR LAURENT PERRIN PHOTO ROMAIN PHILIPPON

Tu animais les émissions avec Karine Lallemand. Comment est-elle ? C’est une super collaboratrice. Je m’étais dit : “Je suis un garçon, il faut une fille ; je suis déjà un peu vieux, il faut une jeune ; et je suis moche, il faut qu’elle soit mignonne !” Karine était alors hôtesse d’accueil au Théâtre Fourcade. Elle était très jeune et pas formée, mais avait beaucoup de volonté.

NE L’APPELEZ SURTOUT PAS DOROTHÉE IL N’A PAS EU BESOIN DE SÉGOLÈNE ROYAL ET DE SON RAS-LE-BOL DES BÉBÉS ZAPPEURS POUR SAVOIR QUE LES DESSINS ANIMÉS JAPONAIS ÉTAIENT VIOLENTS. POUR PARER À CE FLOT D’HÉMOGLOBINE, HUBERT HESS AVAIT MIS AU POINT SA PROPRE RECETTE.

Dans les années quatre-vingt-dix, Hubert Hess a présenté les émissions pour enfants sur RFO puis Antenne, marquant une génération entière de Réunionnais. Comment t’es-tu retrouvé présentateur d’émissions pour enfants ? Dans les années soixante-dix, on avait monté un groupe de folk avec mon frère. J’ai ensuite intégré l’École Normale, où j’ai réalisé un trente-trois tours de chansons pour enfants, dont Le Petit Poisson, encore chanté dans les écoles. Instituteur, je montais des spectacles. Et on m’a contacté pour Marmaillages. Puis Marmaillheure et Zanimé. Quelle était alors ta recette ? Entre les dessins-animés que diffusaient les chaînes, nous animions avec Karine des rubriques comme le Docteur Profou, une sorte de savant fou, Achille la marionnette, ou encore des séquences bricolage, cuisine, et le fameux “Jeu minute”, qui devait durer pile une minute.

Que pensais-tu personnellement des dessins-animés que vous présentiez, genre Dragon Ball Z, les Chevaliers du Zodiaque ? Je les trouvais très violents. Bien sûr, je ne l’ai pas dit à l’époque, pour ne pas cracher dans la soupe. Mais je trouvais effectivement que les valeurs de courage, d’amitié, d’amour, que l’on pouvait y trouver, étaient effacées par la violence. Mais on n’avait pas le choix. Et en plus, les enfants aimaient ça ! Quelles astuces as-tu déployées pour compenser cette part de violence ? Dans les séquences que nous produisions et qui étaient diffusées entre les dessins animés, nous faisions en sorte de transmettre un message éducatif, de faire passer des valeurs de respect, de gentillesse, de tolérance. Mais pas de façon trop évidente, en les emballant, en quelque sorte. Où allais-tu chercher ton inspiration, plus chez Dorothée ou Jacques Poustis (auteur local de chansons pour enfants, NDLR) ? C’est une blague ! Ça m’énervait que les médias m’appellent la “Dorothée péi”. Ce n’est pas du tout le même esprit. On ne faisait pas la même chose. Avec un copain, on a souhaité la voir à la fin d’un concert à La Réunion : on a été refoulés. Poustis est un ami. Il m’a proposé récemment de monter un nouveau spectacle. Quel effet ça fait de savoir qu’on a marqué toute une génération de marmailles ? C’est très touchant. Quand je sors, on vient régulièrement me demander des autographes. On me remercie. Certains s’enfuient en courant et en pleurant ! On me dit : “Vous avez bercé notre enfance, si vous faites un spectacle, on viendra vous voir… avec nos enfants.” C’est très émouvant. On peut donc espérer le retour du clown-parolier Hubert Hess ? Je conserve un petit studio et j’ai toujours un projet dans mon chapeau. Restez réveillés, les enfants !


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DERRIÈRE LA PUB

PAS LÀ (QUE) POUR RIGOLER

PAS DE CAMPAGNE PRÉCISE, CETTE FOIS-CI, MAIS UN TOUR À LA JOURNÉE PORTES OUVERTES DES MEMBRES DE L’ASSOCIATION DES AGENCES CONSEILS EN COMMUNICATION (AACC), POUR VÉRIFIER SI LES GENS DE LA PUB SONT BIEN DES GRANDS ADOS EN JEANS-BASKETS QUI ONT UN BOULOT RIGOLO. EH BIEN PAS TROP, EN FAIT. RECUEILLI PAR LOÏC CHAUX PHOTO GWAEL DESBONT

Octave Parango et Don Draper ont sûrement rameuté tout un tas de jeunes vers les études de pub. Nous avons profité de la journée portes ouvertes de l’AACC Réunion destinée justement aux étudiants pour demander aux pubards locaux quelques précisions sur leur métier, s’il est comme à la télé.

C’est quand même cool, les métiers de la pub, non ? Jessica, Young & Rubicam : Tu dis ça parce qu’il y a des baby foot dans les agences ? C’est la partie émergée de l’iceberg, ça. De l’extérieur, il y a un côté cool, oui. Mais dans les coups de rush, on ne rigole plus. Rendre tout en temps et en heure, se demander si on va réussir, faire murir une idée, c’est du boulot. On ne se pointe pas tous les jours à l’agence à onze heures, si c’est ce que tu veux savoir. C’était peut-être comme ça il y a quelques années, ce n’est plus le cas. La créativité, le travail d’équipe, ça demande de l’investissement, de l’ouverture, même quand on n’est pas au bureau.

“Brief”, “packaging”, “Asap”, “usual”… Faut forcément mélanger l’anglais et le français, pour travailler dans la pub ? Jessica, Y&R : Quoi, il est pas beau, mon accent ? Une campagne, c’est dix minutes de réflexion ? Thierry, Facto Saatchi & Saatchi : Ah ah, si seulement… Les idées peuvent venir très vite, c’est sûr. Mais il faut ensuite arriver à les expliquer, à les vendre au client. Créer une vrai histoire, ça demande quand même de faire travailler les neurones. Et puis il faut aussi l’intégrer, l’imaginer dans les supports, peut-être aussi parvenir à surprendre l’annonceur. Non, et puis, être créatif, ça vient pas comme ça, ça demande énormément de travail. D’ailleurs, travailler ici à La Réunion dans la pub a cela de particulier : il faut être très réactif et créatif. C’est donc de la préparation en amont. Pour faire de la pub, de toute façon, Facebook, ça suffit… Jérôme, Cahri : Si tu veux aller sur le terrain des nouveaux modes de communication, les réseaux sociaux, ça ne suffit pas. Pendant les portes ouvertes, on travaille avec les étudiants sur les objets connectés. Ça marche

pas mal en Métropole, il y a encore un manque à La Réunion, mais ça va venir. Dans ce domaine, il y a toute une mécanique qui se met en place, nouvelle et très intéressante. Et de toute façon, s’occuper d’une page Facebook correctement, ce n’est pas si simple. La communication digitale, c’est un métier. Y a encore du boulot, dans la pub ? Fabrice, Facto Saatchi & Saatchi, président de l’AACC Outre-mer : Notre domaine s’enrichit constamment de nouveaux métiers, notamment en ce qui concerne les agences en communication digitale. Et dans tous les cas, quels que soient les métiers, on a envie de voir des jeunes motivés, travailleurs, qui s’ouvrent au monde, s’informent… Est-ce qu’il y a du travail pour les jeunes à La Réunion ? Je vais te dire : quand on a un stagiaire qui fait du bon boulot, qui s’investit, on n’a pas envie de le perdre, alors, on le garde.


CHEF-D’OEUVRE R E B O O S T E Des feux arrière rouge dans les tons de la carrosserie avec des inserts chromĂŠs. C’est juste une des nombreuses touches de mode qui font de la nouvelle Fiat 500, une voiture encore plus brillante. Brille baby, brille.

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DERRIÈRE LA PO RT E

AVANT QUE LE RIDEAU SE LÈVE LA RUBRIQUE “ DE RR IÈ R E LA PORTE ” , C’E S T VIS IT E R LE S COULIS S E S . CE T T E F O IS , NOUS NOUS S OMME S P R IS A U MOT : NOUS AV ON S T R A ÎN É NOS GUÊ TRE S DA NS D E S COULIS S E S , DE S V R A IE S , CE LLE S DU THÉ Â TRE D U GRA ND- MA RCHÉ . TEXTE LOÏC CHAUX PHOTO GWAEL DESBONT

“VOUS ÊTES TROP SÉRIEUX ! LÂCHEZ-VOUS !”

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rendre un billet pour voir une œuvre au Grand-Marché – ou, d’ailleurs, dans n’importe quelle scène locale, c’est se pointer quelques minutes en avance, trouver un siège, et fixer pendant quelques instants un lourd rideau. Ces instants, pour le public, ont bien peu d’importance : il a payé pour le voir s’ouvrir, le rideau. Fragments d’un corps incertain, de la compagnie Danses en l’R, vous l’avez peut-être vu ou, du moins, lu quelques lignes à son sujet. Nous sommes justement allés voir l’“avant”, ce que le public n’a pas vu. Il a fallu être discret : le processus qui se met en place jusqu’à la représentation est complexe, la troupe soudée et complice. Les danseurs Eric Languet et Wilson Payet, avec la chorégraphe Marriya Evrard, semblent former un trio, un vrai.

Dans l’après-midi, à quelques heures de l’ouverture du rideau, le fond musical est composé de Barbara, Rone ou des Daft Punk. Étirements, discussions… “Vous êtes comment ?”, questionne Marriya. Apparemment, tout va bien. Il s’agit d’un spectacle de danse : le corps va être mis à rude épreuve, les deux danseurs font craquer leurs articulations, enchaînent abdos, pompes, exercices de proprioception. “Vous êtes trop sérieux ! Lâchez-vous !”, reproche Marriya, qui leur fera faire, plus tard, des exercices où il s’agit de rire à gorges déployées pour détendre le diaphragme et se détendre un peu tout court. Le spectacle est ensuite presque joué dans son intégralité. Derniers réglages du décor, du son – avec les techniciens, du fauteuil de Wilson – handicapé moteur. Pause, puis attente. Un moment lourd. Le public arrive, dehors. Dedans… “Je déteste ces moments-là”, avouera plus tard Éric Languet. On le voit faire les cent pas entre la scène et les coulisses, torse nu, toussant si fort que, parfois, il vomit. Pas cette fois-là. Wilson pianote un peu sur son portable, on entend le “pschitt” de son déo. Marriya les encourage, a un sourire qui détend, mais les danseurs semblent un peu ailleurs. Peut-être pensent-ils encore à ce qui n’a pas marché dans les derniers réglages. Peut-être aussi au public, qui commence à s’installer. Ou pas : “Il ne faut surtout pas tenter de savoir ce qui se passe derrière, tu n’as pas à être esclave de ceux qui viennent te voir. Qu’ils soient cinq ou six cents, tu dois jouer au mieux, te préparer au mieux : respectons le fait qu’ils ont éteint la télé pour venir te voir, qui qu’ils soient.” Le public s’est installé, il murmure. De derrière le lourd rideau, on entend des bribes. Puis les lumières s’éteignent, les artistes ont pris place, ils sont seuls. Dans quelques secondes, ils feront face à leur public, nous serons de l’autre côté.


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ANTONI N BLAI S O N


P ORTRA IT

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Chercheur

NI CACHÉ, NI TCHATCHEUR

ANTONIN VOULAIT TRAVAILLER SUR CE QUI LE PASSIONNE DEPUIS TOUT PETIT : LES GRANDS PRÉDATEURS. ET LE VOILÀ À LA RÉUNION, PAR HASARD, EN PLEINE PÉRIODE D’ATTAQUES DE REQUINS… TEXTE LOÏC CHAUX PHOTO ROMAIN PHILIPPON

I

l est discret, Antonin Blaison. On le soupçonnerait même assez gentil. La trentaine, gaillard – encore plus depuis qu’il a mis de côté le terrain pour bûcher sur sa thèse, il nous a fait noircir la moitié d’un carnet en deux heures et demi. Né à Pondichéry, adopté par un couple de Français, il a grandi et étudié en Métropole : “Je voulais travailler avec les animaux. Pendant les vacances scolaires, j’avais assisté des vétérinaires ; j’ai su que j’étais plus attiré par le comportement que la médecine.” À Rouen, il intègre une école d’ingé en agriculture, à la formation farcie de stages : les dauphins en Corse, les chevaux dans des haras irlandais, les bovins à l’Inra, les lycaons du zoo d’Amnéville, la spiruline en Argentine… et les requins pèlerins en Bretagne. “Je découvre qu’on ne connaît pas grand-chose aux requins : ils sont très difficiles à observer, les temps où ils sont visibles sont très courts.“ Il met en place des études, les présente dans des conférences, se fait des contacts précieux pour la suite. On lui parle de l’ouverture d’un labo, en Afrique du Sud, consacré aux grands requins blancs. “Moi qui voulais travailler sur les grands prédateurs, j’ai la possibilité de le faire sur le roi de tous !” Le voilà à Mossel Bay : “J’ai eu plein de choses à faire, je sortais tous les jours en mer. Mon mémoire portant sur la relation proie – prédateur, j’étudiais aussi le comportement des otaries. À mon retour, je parlais anglais, j’avais participé à plein d’études.”

La suite, un retour en Af’ Sud, des conférences, encore. La rencontre de Bernard Seret, biologiste au Muséum national d’histoire naturelle et à l’Institut de recherche et de développement (IRD), qui lui propose des travaux en Bretagne, sur des requins plus petits. Puis Antonin se lance dans la préparation d’une thèse sur les requins de récif aux Îles Éparses. Galères de financement et d’organisation retardent le projet,

“ON BOSSAIT COMME DES MALADES, ÇA N’AVANÇAIT PAS ASSEZ VITE.” et le hasard le fait atterrir à La Réunion en septembre 2011, en prévision de son départ dans les Taaf. Quelques jours avant l’attaque sur Matthieu Schiller : “L’État a tout de suite besoin d’un spécialiste, j’ai une réunion avec le sous-préfet de l’époque, j’abandonne ma thèse pour les rejoindre.” C’est parti : “Les médias, la population, demandaient une solution très rapide, ce n’était pas possible. Il fallait déterminer des protocoles, former des équipes ; les bouledogues réunionnais, on ne connaissait rien sur eux.” Et puisqu’il répond aux journalistes qui l’assomment de questions et apparaît dans les

médias, il devient une cible auprès des associations prônant la pêche des requins, jugeant le travail des scientifique trop lent : “On m’a reproché un paquet de choses… Une, parmi d’autres, c’est quand ils ont su que j’avais donné des prénoms aux requins marqués. On m’accusait de les humaniser ! Un prénom, on le retient mieux qu’un code, c’est juste plus pratique…” Il fait avec la pression et voit le travail des scientifiques remis en cause : “On passait des journées entières en mer, on bossait comme des malades, on prenait des risques et ça n’avançait pas assez vite. Tout le monde voulait des résultats, quand certaines personnes estimaient qu’il fallait pêcher pour résoudre le problème. Oui, j’ai dit que je pensais que la pêche n’était pas la meilleure solution ; mais si on vient me prouver que je me trompe, il n’y a pas de souci ! Moi, j’avais un truc à faire : marquer des requins et apporter des infos. Le but est de trouver des solutions en méttant de côté les avis personnels.” Un peu sorti de la tempête, Antonin en est aujourd’hui à la rédaction de sa thèse consacrée à “L’écologie comportementale des requins bouledogues à La Réunion”. Forcément attendue par le milieu ? “Peut-être, mais il y a beaucoup de questions qui ne seront pas abordées. L’estimation de la population, ce qui se passait avant 2011… Tout simplement parce qu’on ne sait pas. Et ne pas savoir, ce n’est pas être idiot.” On avait bien compris qu’Antonin Blaison ne l’était pas.


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MICRO- T RO T T ’ RECUEILLI PAR MARIANNE RENOIR PHOTOS ROMAIN PHILIPPON

AVEC QUINZE DOIGTS, VOUS FERIEZ QUOI ? LE FRONT DE MER SAINT-PIERROIS EST BIEN PAISIBLE, LE MARDI MATIN. ON A TOUT DE MÊME CROISÉ QUELQUES PROMENEURS PROFITANT D’UN WEEK-END PROLONGÉ ET DES VACANCIERS EN PLEINE SÉANCE DE BRONZETTE. IL N’EMPÊCHE QUE CE JOUR-LÀ, LES PLAGISTES SE COMPTAIENT SUR LES DOIGTS D’UNE MAIN. D’AILLEURS, S’ILS EN AVAIENT QUINZE, DE DOIGTS... 1

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1 - Alexandre “J’apprendrais le langage des signes ou le langage parlé complémenté.” 2 - Alexandre et Lucille “On pourrait créer de nouvelles gammes à la guitare et l’alto, ou utiliser deux ordinateurs. Avoir quinze doigts remettrait en question toute l’humanité et notre comportement.”

3 - Jean “Quel intérêt ? J’ai beau réfléchir, je ne pense pas que ce soit utile. Ceux qu’on a suffisent amplement.” 3 - Ti Tang “Je me roulerais des pétards encore plus gros !”

5 - Danny, Landry et Léa “On écrirait plus vite des SMS, on se coifferait plus vite, on mangerait plus vite avec les mains et s’amuserait avec à mettre des vernis différents.”


M I C R O- T RO TT’

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6 - Maëva “Je serais plus efficace au travail, les soins du visage et des pieds iraient plus vite. Les massages aussi... et les clients en profiteraient.” 7 - Cazy et Karen “J’inventerais une guitare à quinze cordes ou je commercialiserais des gants à quinze doigts. ” “Je bosserais pour Marc Dorcel.”

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8 - Émeline “Ça me serait très utile dans l’hôtellerierestauration pour répondre aux mails et aux appels en même temps ou porter plus de verres et de plats à la fois.” 9 - Philippe “Je m’en servirais pour nager encore plus vite.”

10 - Gaëtan “Je trouverais une femme adaptée...” 11 - Céline “J’inventerais une nouvelle discipline et deviendrais pianiste-peintre.”

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SOCIÉT É


S O CIÉ TÉ

L’INVASION DES SOUCOUPES VOLANTES N’A PAS EU LIEU UNE DISCOTHÈQUE, DES UNES DE JOURNAUX ET DES HEURES DE DISCUSSIONS À LA RADIO : C’EST PEU DE DIRE QUE LES OBSERVATIONS DE QUIDAMS ATTRIBUÉES PAR LES TÉMOINS ET LES MÉDIAS À DES VISITES EXTRATERRESTRES ONT PRIS UNE PLACE À PART ENTIÈRE DANS NOTRE FOLKLORE LOCAL. TEXTES LOÏC CHAUX ILLUSTRATIONS HÉLÈNE MOIGNARD

PLAINE-DES-CAFRES, 1968

N

otre David Vincent à nous s’appelle Luce Fontaine. Luce Fontaine ne cherchait pas “un raccourci que jamais il ne trouva”, il n’était pas architecte non plus. Mais selon Le Quotidien paru début août 1968, ce cultivateur de la Plainedes-Cafres, parti un matin ramasser de l’herbe pour ses lapins aux environs du 21e kilomètre, raconta aux gendarmes une histoire digne de l’intro des Envahisseurs : “À vingt-cinq mètres environ, j’ai aperçu pendant une quinzaine de secondes un objet de forme ovoïde stationné à quatre ou cinq mètres au-dessus du sol. L’objet émettait une lumière crue semblable à celle d’un arc électrique. […] Sa partie centrale était transparente. […] J’ai pu tout de même distinguer, derrière un écran de couleur bleue, deux personnages qui m’ont paru mesurer quatre-vingt-dix centimètres environ. Les deux “individus” étaient revêtus d’un scaphandre.” Puis, le lendemain, toujours aux gendarmes : “L’appareil ressemblait à deux assiettes superposées de couleur blanchâtre, brillantes comme de l’aluminium. À l’intérieur, j’ai vu deux “babas Michelin” (des petits Bibendums, NDLR) dont l’un me tournait le dos.” Les gendarmes, venus sur les lieux avec des “compteurs Geiger”, noteront “huit points radioactifs sur des touffes d’herbes, des galets”, ainsi que sur les “vêtements de monsieur

PARTI POUR RAMASSER DE L’HERBE POUR LES LAPINS, LUCE VIT DES BIBENDUMS RADIOACTIFS. Fontaine”. Pour résumer, donc : un monsieur, dont les proches vont rapidement préciser qu’il fréquente les bals et qu’il n’y boit pas que de l’eau, raconte une histoire dans laquelle apparaissent des Bibendums – image de la marque Michelin, déjà bien présente à La Réunion – et une soucoupe volante – nous y reviendrons plus tard. Le tout enrobé de mesures de radioactivité faites par des gendarmes qui, en 1968 à La Réunion, ne devaient pas avoir de grandes compétences dans le domaine – notamment de sa présence dans la nature de manière naturelle, et d’un saignement de nez qui aurait duré quelque temps… Il n’en fallait pas plus pour que l’histoire prenne sa place aux côtés de Grand-Mère Kalle et de Sitarane. Avec, en cadeau bonus, et quelques années plus tard, la construction d’une discothèque sur les lieux, la bien-nommée Soucoupe Volante. Oui, celle qui est diffusée en direct sur Exo FM le dimanche.

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SOCIÉT É

S A I N T - B E N O Î T, 2 0 1 4

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Premier témoignage du genre dans la presse locale, il ouvrira la voie à d’autres, qui feront la joie des journaux puis de radio Free Dom : la soucoupe de Petite-Île en 1975, les géants de Saint-Gilles aux yeux globuleux en 1980, le vaisseau brillant de Saint-Pierre en 1981, la boule de feu du Chaudron en 1992… L’histoire d’amour entre notre île et les extraterrestres sera telle que Jean Miguère, connu en Métropole pour avoir, selon lui, discuté avec des civilisations venues d’une autre planète en 1969, effectuera quatre visites dans l’Île pour des conférences rémunérées. Et encore très récemment, en 2014, un élu de Sainte-Rose faisait la une du Journal de l’Île et l’ouverture du JT d’Antenne Réunion, assurant avoir vu à Saint-Benoît “un Ovni venir de loin, de l’horizon”, photos floues, vidéo obscure et tremblotante, et témoignages – contradictoires – de la famille et des dalons à l’appui. Dans le milieu des amateurs de Phénomènes aérospatiaux non identifiés (PAN), La Réunion semble jouir d’une assez bonne réputation. Christian Comtesse est l’ancien responsable des Repas ufologiques, une des grosses associations françaises dans le domaine. Il dit : “En effet, La Réunion est assez réputée dans le milieu français. Il y a beaucoup de cas très connus en France qui sont originaires de chez vous. L’observation de 1968 est par exemple un cas d’école. De manière générale, les îles volcaniques sont d’ailleurs très concernées.” Nous avons rencontré, à La Réunion, un homme proche justement du milieu, et qui s’intéresse à ce genre de phénomènes. Laurent affirme avoir été témoin, dans sa jeunesse en Métropole, du passage d’un vaisseau inconnu. Depuis, il se passionne pour le sujet, et devrait créer sous peu une antenne des Repas ufologiques. Avant toute chose, il précise : “Il faut faire très attention, les gens voient des “Ovnis” partout, il faut quand même faire attention. Souvent, ce sont des phénomènes explicables. La nuit, on peut confondre beaucoup de choses.”

À SAINT-BENOÎT EN 2014, UNE PHOTO D’“OVNI” PARTICULIÈREMENT FLOUE ET PRISE DE NUIT.

Cependant, il pense bel et bien que La Réunion a reçu des “visites”, et il explique pourquoi : l’île serait “proche d’une faille dans la croûte terrestre”, ce qui favoriserait justement les observations ; il pense, en effet, que ces “visites” réunionnaises seraient plutôt issues d’un peuple vivant au centre de la Terre, et que nous nous trouvons près d’un “passage”. Avant d’émettre des hypothèses sur la fréquence d’un phénomène, il peut s’avérer utile de l’étudier, justement, cette fréquence. Et si la littérature sur Internet est foisonnante, les informations les plus sérieuses et sourcées qu’on puisse trouver proviennent du Groupe d’études et d’informations sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés (Geipan), un des services du Centre national d’études spatial (Cnes). Il collecte, classe et analyse l’ensemble des témoignages concernant les PAN en France, en lien avec scientifiques et organismes publics. L’analyse de leurs données est très décevante pour La Réunion : avec un peu plus d’une trentaine d’observations en quarante ans, elle se retrouve dans la moyenne, loin de la Haute-Garonne, des Bouches-du-Rhône et du Nord, qui en comptent le double. “Le Geipan ne répertorie pas tous les cas, tous les témoignages, conteste Laurent. On ne peut vraiment pas tirer de conclusions de ses chiffres.” Christian Comtesse abonde : “Je connais leurs méthodes d’enquête, ils ne travaillent pas comme nous, et concluent souvent trop rapidement. Nous recueillons beaucoup plus de témoignages.” Soit.


S O CIÉ TÉ

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Revenons donc à ces “observations”, qui démontreraient des visites d’êtres intelligents venus d’ailleurs que de la surface de la Terre. Pourquoi, lorsqu’on se retrouve face à un phénomène qu’on ne comprend pas, c’est le mot “extraterrestre” qui vient en tête en priorité ? “On aurait posé la question il y a trois siècles, on aurait parlé de Dieu, d’anges, de fantômes, d’esprits. Or, depuis, on a appris que l’espace, les exoplanètes, ça existe, et que tout un champ des possibles s’est ouvert”, propose Thomas Durand, auteur et vulgarisateur dans l’excellente chaîne Youtube La Tronche en Biais, consacrée à l’esprit critique et aux discussions scientifiques autour des croyances. Il rappelle aussi l’effet “culture populaire” des soucoupes volantes.

Avant 1947, personne n’en parlait. Cette année-là, un aviateur américain affirma avoir vu des objets volants en forme de croissants, dont il décrit la trajectoire “comme un mouvement de ricochet qu’on ferait sur l’eau avec une soucoupe”. Les médias ne retiennent que le mot “soucoupe” et, en quelques jours naissait l’expression “soucoupe volante”, qui n’avait donc aucun rapport avec ce que l’aviateur avait vu. Mais l’expression était apparue, et était diffusée ; les témoignages se multipliaient : tout à coup, tout le monde croyait voir des “soucoupes volantes” dans des phénomènes qui, auparavant, passaient inaperçus. La littérature, le cinéma s’en emparèrent ; les journaux réunionnais de l’époque, qui reprenaient des dépêches venant du monde entier, participèrent à cette diffusion. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que Luce Fontaine, en 1968, utilise le mot “assiette” lorsqu’il tenta de décrire ce qu’il pensait avoir vu, que les médias transformèrent en “soucoupe”, tous fiers que “cela arrive à La Réunion”. Pas étonnant non plus que nombre d’observations dans les années suivantes – jusqu’à celle de Saint-Benoît, en 2014 – évoquent la même forme. Cela s’appelle la contagion psycho-sociale, et le phénomène est parfaitement étudié, dans de nombreux autres domaines que les PAN. Attention : il ne s’agit pas de dire que les gens dont nous parlons n’ont pas vu d’engin extraterrestre ; juste de tenter une explication moins… étonnante. À toutes fins utiles, rappelons qu’on ne peut pas prouver que quelque chose n’existe pas ; c’est à celui qui affirme un fait extraordinaire d’en apporter la preuve. Et pour l’instant… Thomas complète : “Le Geipan a des centaines de témoignages, classés par lettre selon la possibilité de les expliquer. Ceux qui sont classés avec la lettre “D” résistent à toute explication ; cela ne veut pas dire que ce n’est pas explicable, ou qu’ils ont une cause exotique. La meilleure preuve, c’est qu’aucun cas expliqué n’est exotique ! Quand on a une explication, elle ne fait jamais intervenir des “Ovnis”. Pourquoi donc les faire intervenir quand on ne sait pas ?” Peutêtre parce que cela fait de belles histoires ? “Tu remarqueras que dans toutes ces histoires, les personnages ont un ensemble de données déjà connues, ils n’ont qu’une chose ou deux en particulier : il vole, il marche sur l’eau, il a une grosse tête… Le reste est totalement classique. L’histoire, elle frappe, parce qu’on est dans un contexte où on comprend, et il y a un ou deux éléments qui sortent du commun, qui permettent de la raconter et de s’en souvenir.”

PETITE-ÎLE, 1975

“IL Y A TROIS SIÈCLES, ON AURAIT PARLÉ DE DIEU, D’ANGES, DE FANTÔMES, D’ESPRITS.”


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SOCIÉT É

SAINT-GILLES, 1980

Sans connaître Free Dom, Thomas vient de nous expliquer pourquoi pareilles histoires ont un tel retentissement chez nous – et ailleurs. Plus encore : l’actualité locale vient sans cesse nous rappeler que le “surnaturel” fait partie du quotidien réunionnais. Les croyances dans les “envoûtements”, comme récemment dans un lycée de Saint-Louis ; les dénonciations d’“actes de sorcellerie” pendant les élections ; les offrandes à Saint-Expedit ; l’évocation de “miracles” liés à la religion ou les soi-disantes apparitions du visage de Jésus dans un fauteuil d’église… Thomas, encore : “Ce n’est que mon avis, mais il semble y avoir un climat où le surnaturel est très présent. Et du coup, cela paraît normal d’expliquer quelque chose par une intervention qui n’est pas explicable. Il n’est pas impossible que cela renforce des schémas cognitifs qui ont tendance à expliquer des choses classiques par Dieu, les anges, les sorcières ou les extraterrestres…” Dans une île où les cimetières sont anormalement fréquentés la nuit, où un boug’ qui voit le vierge descendre d’un cocotier parvient à réunir des dizaines de fidèles, où l’on “teste” sa foi en se mutilant, oui, la croyance en des forces pas naturelles du tout est omniprésente. D’ailleurs… Lors de l’observation de janvier 2014, à Saint-Benoît, le témoin principal n’avait pas hésité à jurer “sur la Bible” de ce qu’il avait vu. Une croyance s’additionnant à une autre. Que faire, donc, de ces témoignages ? La gendarmerie doit y faire face, parfois. “Quand on arrive sur place, il n’y a rien à voir”, se désole le commandant Grocholski. “Il n’y a pas de procédure particulière en cas d’observation, de toute façon. Attention, on prend au sérieux ce qu’on nous dit, ne croyez pas qu’on en rit. Mais on ne peut pas enquêter sur du “rien” ! On va sur place si on nous appelle, et puis… Voilà.” C’est donc à nous, lecteurs, de savoir réagir face à ces témoignages. Questionner le contexte, demander des détails, imaginer des théories alternatives et plus plausibles, ne jamais dire à quelqu’un qui dit avoir vu un “Ovni” qu’il a tort ; si ça se trouve, il a raison. Aujourd’hui, avec la découverte quasi quotidienne d’exoplanètes,

la communauté scientifique semble de plus en plus envisager l’existence de vie ailleurs que sur notre planète. De là à imaginer une civilisation assez avancée pour traverser des galaxies afin de venir goûter au rougail saucisse, il y a un pas qu’aucune preuve ne nous permet de franchir. Et nous en sommes les premiers déçus.

Ô, SAIN ESPRIT CRITIQUE ! Il existe depuis quelques années un mouvement de sceptiques, au sein de la communauté scientifique, appelé “zététique”. Il s’agit pour les personnes qui s’en réclament d’appliquer la méthode scientifique à des phénomènes dits “paranormaux”, ainsi qu’à toutes les croyances en général. Outre la diffusion de l’esprit critique, quelques uns de ses sympathisants proposent même des protocoles scientifiques pour valider ou non des croyances. Ils ont notamment démontré que les “sourciers” ne parvenaient jamais à des résultats supérieurs à ceux que

donneraient le hasard. Le but des zététiciens n’est pas de dire “cela n’existe pas”, simplement de proposer des explications alternatives à celles faisant intervenir le surnaturel ou les pseudosciences (acupuncture, homéopathie, astrologie…). Sur Youtube, nous vous conseillons la chaîne de La Tronche en biais, ainsi que celle d’Hygiène Mentale, qui nous ont beaucoup aidés dans la réalisation de cet article. Cette dernière s’est d’ailleurs particulièrement intéressée au phénomène des “Ovnis”, et notamment de sa propagation dans la culture populaire.


SAINT-DENIS, 1992

S O CIÉ TÉ 31


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SOCIÉT É

S O U R C E : G E I PA N

LE GEIPAN, UNE MINE D’OR Le Groupe d’études et d’informations sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés (Geipan), dépend du Centre national d’études spatiales (Cnes). Cet organisme public a un but : appliquer la méthode scientifique aux “phénomènes” spatiaux observés par une population qui n’a souvent aucune compétence dans le domaine et demandeuse d’explications. 2007 restera une année symbolique pour tous les amateurs de PAN : cette année-là, le Geipan décide de rendre public un grand nombre des observations qu’il a collectées depuis sa création, en 1977. Des centaines de documents, de procès-verbaux, de dessins, de photos sont ainsi mis à la disposition du public, et c’est franchement décevant pour celui qui espérait y trouver une preuve de visite extraterrestre. Il faut savoir que le Geipan s’appuie sur un réseau d’enquêteurs bénévoles sur le terrain, ainsi que sur tous les organismes publics pouvant l’aider (gendarmerie, armée, Météo France…). Seuls sont diffusés les témoignages dont il a eu connaissance, ce qui laisse de côté nombre d’observations parues dans les journaux, qui ne reposent bien souvent que sur les dires de leurs auteurs. Ainsi, nombre de cas réunionnais

bien connus ici n’apparaissent pas sur le site du Geipan. Classés par date et par lieu, les témoignages sont, de plus, divisés en quatre catégories, selon qu’ils sont explicables ou non. En 2016, 50 % des phénomènes français avaient été identifiés, de manière certaine ou probable. 37 % n’étaient pas identifiables par manque de données, et 13% n’étaient toujours pas identifiables après enquête. Ce sont ces derniers qui font rêver les “ufologues”. Des “ufologues” qui restent très circonspects face à ce travail ; Christian Comtesse regrette le manque de prise au sérieux des témoignages : “Il faut d’abord passer par la gendarmerie, et les témoins hésitent à aller la voir, de peur d’être pris pour des fous.” Le fait que le Geipan soit financé par l’État fait aussi penser à certaines personnes du milieu qu’il est chargé de cacher de potentiels contacts. “La population n’est pas encore prête”, pense Laurent Houry. Pour ce qui concerne La Réunion, six cas (sur trente-quatre notés pas le Geipan) résistent à l’enquête. Pour le Geipan, ce sont “au vrai sens du terme, des phénomènes aérospatiaux non identifiés”. Mais toujours pas des engins extraterrestres, une seule hypothèse parmi des centaines d’autres.


saint-denis - cité des arts

du 16 au 21 mai 2016 DJ HE LL K OSME IR AT ION STEPPAS DJ DEEP MOLLY HOLD YOUT H DU B MATIX J ERE MY U N DE RGR OUND JESS & CR ABBE HA E ZE R LES BOUCLES É TR ANGES ACTUS, INFOS, BILLETTERIE SUR NOTRE SITE


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STATIS T I Q UE M E N T RECHERCHES LOÏC CHAUX ILLUSTRATIONS FREDDY LECLERC

LE PITON DE LA FOURNAISE

70 km/h C’est la vitesse atteinte par l’écoulement de lave et observée lors de l’éruption de 1976.

196 -

En jours, le temps record qu’a duré l’éruption de 1998.

136 -

C’est le nombre d’éruptions répertoriées entre 1900 et 2010.

233020 Dans la base de données américaine du Global volcanism program, c’est le numéro auquel est répertorié le Piton de la Fournaise.

186 C’est le nombre d’éruptions du Piton de la Fournaise que les scientifiques ont pu dater avec quasi-certitude. La plus ancienne date d’environ vingt-huit siècles avant notre ère. Il y en eut évidemment d’autres avant et depuis.

10 -

C’est le nombre de fois où une coulée a atteint la mer depuis le début du XXe siècle.



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MA BULLE RECUEILLI PAR ANNE CHANS PHOTOS GWAEL DESBONT

L’UNIVERS SELON JALMA POUR CERTAINS, CHRISTIAN “FLOYD DOG” JALMA EST UN FOU. POUR D’AUTRES, UN GÉNIE. DISONS QUE C’EST UN HOMME ENTIER, AVEC DES CONVICTIONS ET DONT L’UNIVERS ARTISTIQUE NE S’ARRÊTE PAS AUX PORTES DE SA MAISON. ATTENTION, ENTRETIEN DÉCOUSU.


M A BU L L E

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ENTREVUE EXPRESS Beaucoup de vos objets font partie du même univers, n’est-ce-pas ? J’écris une histoire de la nénène. Personne ne raconte ce qu’elles ont réalisé, on dit qu’elles étaient des nounous, des bonnes, et rien d’autre. Pourquoi ça ? Elles sont pourtant l’origine de la culture créole et celles qui furent les dépositaires de l’histoire de l’univers. Je peux les relier aux pyramides, même. Vous avez lu Amistad ? C’est la couverture qui m’intéresse ici, elle représente l’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises par François-Auguste Biard. Vincent Collin, alors directeur du CDOI, m’avait commandé une analyse du tableau. Une nénène, par exemple, sort de l’esclavage en remettant ses seins dehors. Un couple d’affranchis se sautent dans les bras. Ce sont des symboles pour moi, le Kaf Amnési et la Kafrine Symbolie. Ils représentent le métissage mais aussi la perte de repères par rapport à leurs origines. Waou ! Un mur de livres ? J’aime beaucoup avoir des livres sous les yeux, leur présence m’apaise. Avant, c’étaient des arbres avec plein de couleurs et de fruits. Les pages jaunissent, je vois les arbres en train de mourir. Puis j’habite un logement social, les murs n’en sont pas. Avec un peu de force, quelqu’un pourrait traverser de part en part. Il y a beaucoup de tortues chez vous... C’est la tortue qui porte le monde. L’espace accueille des géants dont on peut voir la trace du pied dans la forme de Madagascar. Ils sont suivis par des tortues, dont les nénènes portent l’histoire. C’est coloré, ici. Oui, c’est jaune et bleu, comme chez les malbars. Je suis malbar, chinois, gaulois et je n’ai aucun problème à le dire. Si tu es métis, tu as l’univers en toi.


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EXTRA M URO S

MAISON SUBTILE LA MAISON DE PASCAL ET LEÏLA À SAINT-GILLES A DEMANDÉ UN GROS TRAVAIL DE CONCEPTION ET DES TRAVAUX UN PEU PÉRILLEUX, VU LE TERRAIN SUR LEQUEL ELLE EST NICHÉE. MAIS L’ARCHITECTE A RÉUSSI À CONSTRUIRE UN NID HARMONIEUX.

TEXTE ANNE CHANS PHOTOS GWAEL DESBONT

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our comprendre la maison de Pascal et Leila, il faut s’imaginer le terrain sur lequel ils l’ont construite : une bande très pentue de 80 mètres de long orientée plein sud. Pour corser le tout, des fosses, des creux et, heureusement, deux plateaux. Sur l’un d’eux, le couple a installé la cuisine à partir de laquelle la maison se déploie. La découvrir nécessite de s’être farci un escalier raide. “On angoisse de devoir changer la machine à laver”, plaisante à moitié Pascal. Une difficulté d’accès oubliée dès le premier regard sur la vue. Le café tendu par l’hôtesse nous ramène vers la maison. À la fin des escaliers, par lesquels on traverse le jardin, elle vous accueille donc par une véranda. La cuisine en fait partie, simplement délimitée par le sol en béton lisse et des baies vitrées coulissantes. “Nous voulions une maison aérée par les vents”, explique Pascal, l’architecte, qui n’utilise donc pas de climatisation. Les chambres ont tout de même des brasseurs d’air. Et puisqu’elle est traversante, il arrive que l’hiver, il y fasse froid… Le bâtiment forme un angle droit, deux grands volumes rectangulaires la composent. Elle a été montée en

deux jours, le plus difficile étant de faire monter des engins de chantier sur le terrain et de construire “l’énorme base en maçonnerie”. Sur une ossature en bois, les ouvriers ont accolé des panneaux. On peut compter les espaces au fur et à mesure que l’on découvre la maison : le patio, avec la piscine construite presque hors sol à cause des caprices du terrain, la véranda, la cuisine, un cellier, une première mezzanine, une seconde ; la maison est à étage. On débouche sur une chambre, puis une seconde, puis c’est la salle-de-bains et la chambre des parents. Pascal a tenu en effet à cette notion de “continuité“ ; d’un bout à l’autre se déroule un ruban de fibre ciment, dont la matière, poreuse, laisse échapper l’humidité. Les bibliothèques sont intégrées au mur ainsi que les rangements dont la maison doit un peu manquer quand même. Et pour le fils aîné de dix-sept ans, son architecte de père a même pensé à la porte donnant sur l’extérieur lui permettant d’être un peu plus libre de ses allées et venues. Si leur nid d’aigle est à l’abri des regards, les chats du quartier ne s’y sont pas trompé ; c’est là qu’ils viennent eux aussi se nicher.


EXT R A MU RO S

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ÇA SE PAS S E LÀ- BA S TEXTES LIVY

R U E B B O J G N I B B O J . N ANSO NÉRATION H C U NE EC U TRE RÉM V A R ON OI N À V AIDE… C E I R ’A TR ELA N AUX D’EN C , T TOU ÉSE S DU EC DES R A P V ES ’Y ÊT PLUTÔT A N S S, VOU NON PSY KING GI DES

QU’EST-CE QUE C’EST?

COMMENT ÇA MARCHE?

Le “jobbing” (de “job”, donc “petit boulot”) est la mise en relation de particuliers ayant besoin d’un service ou d’une aide (précise et ponctuelle) avec d’autres particuliers qui ont du temps et les compétences ou le savoir-faire requis pour les aider. Pour faire court : on parle de “services d’entraide entre particuliers contre rémunération”.

C’est simple et c’est sur Internet. Il faut s’inscrire et créer un compte personnel sur des sites tels que monabeille.fr, youpijob.fr , annonces-jobber.fr… Les personnes qui proposent leurs services sont appelées les “jobbeurs”. La mise en relation se fait grâce à un moteur de recherche et des critères spécifiques (tarifs, lieux, disponibilités, services…). Le “jobbing” est donc sans limite : monter un meuble ? Changer une roue ? Repasser des chemises ? Faire des courses ?

D’OÙ ÇA VIENT ? Le “jobbing” vient, comme souvent, des États-Unis.

ET À LA RÉUNION ? EN FRANCE ? Le concept marche très bien et ne cesse de prendre de l’ampleur… et oui c’est un système D qui fonctionne bien en temps de crise, puisqu’il permet, outre d’obtenir un coup de main, d’arrondir ses fins de mois. Il paraît même que certains “jobbeurs” ont réussi à monter leur entreprise grâce à ça.

Si les Réunionnais peuvent toujours s’inscrire sur ce genre de site, il n’y a pas à proprement parler d’appli réunionnaise. Mais il semble que cela soit inutile, tant les annonceurs réunionnais ont l’air de prendre l’outil en mains petit à petit…



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LE JOU R O Ù…

9 MARS 1930

S’ORGANISE EN FÉDÉRATION POUR METTRE FIN AU JOYEUX BAZAR QUI RÈGNE DANS LA PRATIQUE DU SPORT DE COMPÉTITION À LA RÉUNION, LA FÉDÉRATION SPORTIVE RÉUNIONNAISE EST CRÉÉE. TEXTE LOÏC CHAUX

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our la Surprise de Saint-Denis, la Républicaine de Saint-Joseph ou la Madelon de Saint-Benoît, avoir un nom rigolo d’association, c’est bien. Mais cela ne suffit pas : leur manque encore une structure les chapeautant, organisant championnats, rencontres, matchs et autres tournois. À la fin des années vingt, si le turf est encore le sportroi à La Réunion, instituteurs et militaires tentent de convaincre les foules de l’intérêt des autres sports, gymnastique, athlétisme puis football en tête. Pour la pratique, chacun se débrouille de son côté. Pour les compétitions, il faut attendre une kermesse pour profiter du public, ou aller demander au voisin s’il ne veut pas jouer avec nous. Le sport est soit une animation parmi d’autres, soit une activité d’initiés. Il fallait organiser tout cela. Une tentative a été initiée en pleine Grande Guerre ; les Réunionnais avaient alors d’autres choses à penser. En 1922, nouvel essai : il s’agissait d’organiser une rencontre sportive entre associations pratiquant foot, rugby, tir et gymnastique, à l’occasion de l’inauguration du Monument aux morts. Mais les organisateurs comptaient sur les équipages des navires de guerre pour y participer, et ils ne restèrent pas assez longtemps. Pour l’anecdote, et puisqu’il ne restait que des équipes locales, ce “challenge” devient le premier championnat officiel de “ballon-association” de La Réunion. Cette impulsion de 1922 donna assez d’élan au monde sportif réunionnais, qui intensifia les rencontres amicales et les “challenges” de ce genre. La création, au sein du Conseil général, d’un Service de l’éducation physique, finira par lier le tout. Après moults réunions et autres consultations, naît la Fédération sportive réunionnais (FSR), le 9 mars 1930. Le Lieutenant Le François, chef du Service de l’éducation physique est le secrétaire général, et il se fixe pour but de rassembler toutes les sociétés sportives, toutes disciplines confondues, ainsi que d’organiser les compétitions en football, athlétisme, tir…

Î L E D E L A R É U N I O N . S A I N T - P A U L . K E R M E S S E A U B O U T D E L’ É T A N G ( A S S A U T D E B Â T O N S ) / C R É AT E U R P R I N C I PA L N O N I D E N T I F I É / 1 9 0 3 – 1 9 1 0 / C A RT E P O S TA L E / A R C H I V E S D É PA RT E M E N TA L E S D E L A R É U N I O N

EN 1930, S’OCCUPE DISPUTES DE CLUBS

LE FSR SURTOUT DES ENTRE DIRIGEANTS D E F O O T.

En fait, à partir de 1930, dès qu’on parle de sport à La Réunion, c’est la FSR qui s’en charge. Formation des arbitres, réglage des différends entre les clubs de foot (déjà !), distribution de subventions… Le champ de compétences est large. Et cela fonctionnera jusqu’en 1941 : cette année-là, la Charte des Sports édictée par le Régime de Vichy est appliquée à La Réunion. La FSR n’est plus, elle est remplacée par le Comité des Sports de l’Île de La Réunion, qui répond mieux aux orientations du gouvernement collaborationniste en matière de sport.


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SPORT

VERSION PAILLETTES

IL Y A PRESQUE TRENTE ANS, LE TRIATHLON DES CIMES ÉTAIT, DE LOIN, L’ORGANISATION SPORTIVE PHARE DE LA RÉUNION, AVEC UNE AURA COMPARABLE AU GRAND RAID D’AUJOURD’HUI. CELA N’A PAS DURÉ LONGTEMPS. TEXTE LOÏC CHAUX PHOTOS THIERRY DEKETELAERE / TRIATHLÈTE MAGAZINE

C

e sont des vidéos que les triathlètes réunionnais s’échangent sur les réseaux sociaux, avec force soupirs et commentaires nostalgiques. Même des Métropolitains semblent s’étonner qu’à La Réunion s’est déroulée pareille organisation : le Triathlon des Cimes, à la fin des années quatre-vingt, est un barnum qui a fait long feu. Petite remise dans le contexte. Le triathlon tel qu’on le connaît naît dans les années soixante-dix aux Etats-Unis. Il arrive en France, à Nice, en 1982, puis à La Réunion. Le sport entre de plain-pied dans l’agenda “hors stade” local, à une période où les compétitions de trail sont encore balbutiantes. Richard Marguier faisait partie des pionniers ; il explique comment une discipline naissante a créé le plus gros événement local : “Dans tous les sports, si tu veux faire un grand événement, il te faut un organisateur mégalo. Notre Thierry Sabine à nous, c’était Albert Cachera, un prof de lettres saint-gillois.” Monsieur Cachera, premier président de la Ligue, se souvient : “La Réunion avait tous les atouts d’Hawaii et de Nice. Mais vous n’imaginez pas le travail que ç’a été de

convaincre sponsors et partenaires publics. Et la machine que c’était : des conférences de presse, des voyages dans le monde pour promouvoir…” D’abord Triathlon de Saint-Gilles en 1986, la compétition devient le Triathlon des Cimes l’année suivante, et ce pour trois ans. Les pouvoirs publics sentent le bon coup de com’, et subventionnent l’événement. Coca-Cola est le sponsor principal, le triathlon est inscrit au calendrier international. Patrick Montel et Gustave Parking viennent y donner du micro. Son principal atout ? Sa difficulté, pour des triathlètes encore considérés à l’époque comme des gens un peu fous. Il faut se rappeler qu’aux débuts de la discipline, la médecine se demandait encore si la succession de trois sports ne risquait pas de provoquer au corps des dégâts irréversibles… Le morceau de choix de ce triathlon étant, tout de même, les 120 kilomètres à vélo avec passage par la Route des Plaines… Après les 2,8 kilomètres en mer, et avant les 30 kilomètres sur route, le col de Bellevue, les changements brutaux de température et d’humidité en ont fait vaciller plus d’un. Même chez les plus grands.

“LE PARCOURS EN VÉLO, SURTOUT, ÉTAIT COMPLÈTEMENT FOU.”


S P O RT

Car en 1988, le nom “Iron Man” n’est pas encore une marque déposée, et il n’en existe qu’un, celui de Hawaii. Avec le Triathlon international de Nice, c’est la plus grande épreuve mondiale, et un homme commence à faire parler de lui, en finissant à chaque fois sur les podiums. Ces épreuves sont alors connues pour leur difficulté ahurissante, et elles trouvent en Mark Allen un athlète capable de les dompter ; une légende, déjà. Eh bien, en 1988, Mark Allen se pointe à La Réunion. En terminant vainqueur, en moins de sept heures, il lâche : “C’est vraiment, je crois, la course la plus difficile du monde. Le parcours en vélo, surtout, était complètement fou.” Erin Baker, son équivalent chez les femmes, était aussi de la partie : le triathlon local réunissait les plus grands spécialistes mondiaux. Leur participation sera une apogée. Car le Triathlon des Cimes se déroulera encore en 1989, mais ce sera le dernier : l’organisation devenait compliquée. Albert Cachera explique sobrement : “Quelques invités extérieurs devenaient gourmands, des rivalités naissaient au sein de la Ligue.” Richard Marguier, lui aussi dans la Ligue à l’époque, se souvient : “Il y a eu des discussions au sein de la Ligue. Il faut dire que le Triathlon des Cîmes coûtait très cher, il pompait toutes les subventions. C’était un excellent outil de communication pour La Réunion mais pour certains, il laissait trop de côté les athlètes locaux.” Ç’en était donc fini de ce triathlon clinquant ; les différences de points de vue entre dirigeants et les doutes sur la pérennité du modèle économique ayant eu raison de lui. C’est à ce moment que le triathlon local commence à prendre le visage qu’on lui connaît. Les clubs se développent, forment des jeunes. Au début des années quatre-vingt dix, le TCSSD essaiera encore d’organiser un triathlon d’envergure, avec la partie de natation dans le Barachois. Ce sera un succès, des milliers de personnes venant voir l’arrivée, sans, cependant, le retentissement des années quatre-vingt. Et les attaques de requins sur des windsurfeur à ce même endroit, en 1994 puis en 1995 auront raison, encore une fois, d’une épreuve qui nécessitait un sécurisation coûteuse, que les pouvoirs publics rechignaient à engager. Déjà. Et puis, à cette période, la course de montagne commençait à s’installer. Le triathlon, considéré comme un sport jeune et cool dans les années quatre-vingt, n’était plus le seul avec cette image. Les sponsors et pouvoirs publics se sont donc dirigés vers les sentiers, quand les associations et bénévoles étaient plus nombreux dans le trail. Killian Jornet a remplacé Mark Allen. Ne subsistent plus que quelques reportages sur Internet, et les souvenirs des anciens.

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CULTU RE G RECHERCHES LOÏC CHAUX ILLUSTRATIONS MATTHIEU DENNEQUIN

Les sachets de café Le Lion contiennent des cafés venant du monde entier, mais pas de La Réunion.

Le taux de guérisons inexpliquées à Lourdes est le même que celui constaté dans les hôpitaux français.

Les premiers bâtonnets des sucettes Pierrot Gourmand étaient confectionnés en rotin de Madagascar.

Le cryptoméria est originaire du Japon.

CU

L

La méthode scientifique n’a jamais validé une efficacité de l’homéopathie supérieure à l’effet placebo.

T

UR

E

G De 1994 à 1999, neuf personnes sont décédées suite à des attaques de requins à La Réunion. Deux de plus que sur la période 2011 – 2015, dite “crise requins”.

POUR FAIRE LES MALINS DEVANT LES AMIS, VOICI QUELQUES INFOS QUI VOUS DONNERONT LA CLASSE DANS LES DISCUSSIONS.

La girafe est le seul animal vertebré terrestre qui ne bâille pas.

Montréal a terminé de payer ce que lui avaient coûté les Jeux olympiques de 1976 en 2006. Les Jeux d’Athènes de 2004 ont, eux, été une des causes de la crise économique Grecque.

Le vin de messe est, dans l’immense majorité des églises, blanc.

Jacques, Paul et Pierre Vergès ont tous les trois, à un moment de leur vie, disparu pour réapparaître quelques années plus tard.




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