M A G A Z I N E G R AT U I T R É U N I O N N A I S - # 4 1 - AV R I L / M A I 2 0 1 8
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ÉDITO
Passons à autre chose Dans 7 ans de mariage, Didier Bourdon et Catherine Frot se demandent comment briser leur routine ; ils s’aiment, mais ils s’ennuient un peu ; alors, ils tentent des trucs. Cette année, cela a fait sept ans, justement, que BuzBuz partage un petit bout de vos vies. Et immanquablement, nous nous posons la question, aussi, de l’évolution de notre relation. Nous nous aimons, sans doute, mais avons un peu peur que nous nous lassions. Alors, comme Bourdon et Frot, trouvons une manière de conserver cette passion. C’est une question de désir, en fait. Nous avons envie que vous nous désiriez, que vous ayez envie de nous. Et pour cela, vous allez nous voir moins souvent : la prochaine fois, ce sera en décembre. À ce moment-là, BuzBuz tentera d’être plus beau que jamais, tout en gardant ses fondamentaux, ceux-là mêmes qui ont provoqué, chez vous, un intérêt pour nos pages. BuzBuz sera alors plus volumineux, parce qu’il faudra le rattraper, tout ce temps sans se voir ; pas complètement différent, mais pas totalement le même non plus. Il est cependant hors de questions que vous restiez sans nouvelles de nous pendant six mois de l’année. C’est justement le but d’événements comme Tempête dans un cerveau, que nous avons lancé il y a quelques semaines, et d’autres, dont vous entendrez parler dans les mois à venir. Vous l’avez compris, donc, profitez bien de ce numéro, nous ne nous reverrons pas avant la fin de l’année. D’ici là, nous aurons travaillé dur pour vous plaire. Et il n’y a aucune raison que ce ne soit pas le cas. PASC AL PEL O UX
RÉDACTION EN CHEF
Marie Renneteau, Marianne Renoir, Livy, Loïc Chaux, Laurent Perrin
SARL au capital de 4 350 euros 62 boulevard du Chaudron Bât. A - Bureau 905 97490 Sainte-Clotilde 0692 55 99 98 contact@buzbuz.re
DIRECTION ARTISTIQUE GRAPHISME
www.buzbuz.re
Loïc Chaux
RÉDACTION
Pascal Peloux
PHOTOGRAPHIE COUVERTURE Modèle : Émilie Photo : Romain Philippon
Gwael Desbont, Vincent Dambreville, Romain Philippon
IMPRESSION BUZBUZ MAGAZINE
Graphica
Bimestriel N°41 Avril-mai 2018
PUBLICITÉ
DIRECTION DE LA PUBLICATION Pascal Peloux
BuzBuz Magazine Pierre Dehais Tél. 0692 13 60 08 commercial@buzbuz.re
ISSN 2114-4923 Dépôt Légal : DL 6398 Toute reproduction même partielle est interdite.
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LE NEZ D E H O RS TEXTES MARIANNE RENOIR, LIVY, MARIE RENNETEAU PHOTOS GWAEL DESBONT
ET AU MILIEU POUSSENT DES CACTUS Mag Made, c’est l’histoire d’une reconversion et d’un projet familial. La reconversion de Magali Aroca, qui a profité d’un plan de départ volontaire d’une boîte où elle gagnait bien sa vie, pour se consacrer au rêve qu’elle nourrissait depuis plusieurs années. Elle a donc passé, à la cinquantaine, un CAP pâtissier à l’Institut national de boulangerie pâtisserie (INBP) de Rouen et a pu compter sur ses proches pour monter la petite entreprise, des travaux à la com’ en passant par la déco. Arthur, l’un des fils, travaille avec “la patronne” et le duo alterne entre la cuisine et le service. L’idée du salon de thé : “Se sentir comme à la maison”, grâce à une cuisine ouverte, de bons gâteaux faits maison, des produits frais et locaux, du vrai thé sans sucre ajouté. Les formules et brunchs du samedi sont à déguster au milieu des créations végétales de Magali, des cactées et euphorbes sous lampe ou en terrarium qui ne demandent aucun entretien. Oui, aucun! MAG MADE, 20 RUE RONTAUNAY, SAINT-DENIS. OUVERTURE : DU MARDI AU SAMEDI, 11H-18H. TÉL. : 0262 94 61 37.
TROPICAL CHIC
L’EMPIRE DES SENS Leur commerce ne porte pas de nom mais dans le quartier, tout le monde les connaît. Marc Pavie et sa compagne, dans un premier temps spécialisés dans les fleurs, se sont diversifiés il y a deux ans en ouvrant un espace consacré aux fruits et légumes. Certains produits sont importés, d’autres viennent de notre île. Les primeurs se fournissent auprès de cultivateur·rice·s “passionné·e·s et bon·ne·s dans leur domaine” afin de proposer le meilleur à leurs client·e·s. Des produits bien spécifiques tels que des tomates anciennes venues de Vincendo, des tomates ananas, des cœurs de bœuf sont ainsi le fer de lance de cette adresse familiale et de proximité. Vous y trouverez aussi un coin bio ainsi que toute une gamme de produits artisanaux 100% locaux – confitures, sucre, massalé, etc. Enfin, le dynamique et généreux couple a créé une décoration chaleureuse au milieu de laquelle vos cinq sens s’éveilleront ! 126 BIS CHEMIN NEUF, LA MONTAGNE. OUVERTURE : DU LUNDI AU SAMEDI, 9H-12H30//15H-19H ; LE SAMEDI, 9H-19H ; LE DIMANCHE ET LES JOURS FÉRIÉS, 9H-12H30.
C’est un peu un coup de hasard. Christine avait quitté le monde de la nuit pour retrouver une vie de jour, des horaires de travail plus classiques. Finalement, le monde de la nuit l’a rattrapée, et c’est très bien ainsi. Il y a quelques mois, elle s’est lancée dans l’aventure de ce nouveau bar saint-gillois, le Pinkananas. Ici, on ouvre tôt et on ferme tard. En semaine, la première partie de soirée est généralement consacrée aux concerts live, selon une programmation de Fabio Marouvin. Une ambiance jazzy, de la pop, du disco funk, il y en a pour tous les goûts. Même pour les amateur·rice·s de classique, si si. En seconde partie de soirée, on laisse la place aux DJs pour la partie dance floor. Des tapas à grignoter sont à la carte. Et comme Jessica, en place aux fourneaux, a pas mal voyagé, elle a ramené dans ses valises tout un tas de recettes à faire découvrir. Selon l’inspiration du jour, les produits trouvés sur le marché, elle compose alors ses apéritifs pour contenter tout le monde. Musique ! PINKANANAS, 122 RUE DU GÉNÉRAL-DE-GAULLE, SAINT-GILLES-LES-BAINS. OUVERTURE : DU MARDI AU SAMEDI, 19H-4H. TÉL. : 0692 65 75 95.
La
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LE COIN DES MORDUS DE MANGAS Parce que plus jeune, il aurait aimé trouver ce genre d’endroit pour y rencontrer d’autres passionné·e·s, Michaël Pirbay a ouvert son propre “manga café”. Inspiré d’un concept japonais, L’Otaku974 propose aux client·e·s de dévorer sur place les BD nippones pour trois euros de l’heure ou sept euros l’après-midi. “En une heure, il est possible de lire deux à trois tomes, indique le gérant. Sachant qu’un manga compte en moyenne trente tomes, ça revient moins cher que de les acheter.” Un service de restauration permet de savourer des gyoza, des yakitori ou des boissons japonaises pendant la lecture. Côté jeux vidéo, le système est le même et des tournois sont régulièrement organisés. Tout comme des ateliers cosplay, des blind tests spécial pop japonaise ou coréenne, etc. Une adresse incontournable pour les “otaku” de Saint-Denis qui, vous l’aurez deviné, désigne les fans de mangas et animés. L’OTAKU974 MANGA CAFÉ, 20 BIS RUE RUISSEAU-DES-NOIRS, SAINT-DENIS. OUVERTURE : DU MERCREDI AU DIMANCHE, 11H-22H. TÉL. : 0693 40 83 27.
DESTINATION MALT
FUNKY TERRASSE Commander un “saumon façon bipolaire” au milieu d’arbres sur lesquels poussent des vinyles... pas de doute, nous sommes à La Terrasse. Dans cette “brasserie du midi” implantée au Village Bienvenue depuis cinq ans, on ne se prend pas la tête. “Nous portons la même considération au directeur d’entreprise qu’au stagiaire, indique Gérémy Roux, directeur hyperactif de l’établissement. Nous voulons que chaque client·e ait l’impression d’être le·la plus important·e du resto.” Au menu, de la déconne, mais surtout des plats de qualité qui ont su fidéliser une clientèle en semaine. Entre autres, du poulet rôti façon tartare, des entrecôtes, des lasagnes d’espadon, proposés avec “l’accompagnement universel” frites, salade et mayonnaise maison. Tous les deux mois, le lieu se transforme en théâtre d’improvisation, lors des soirées Mix’n’laugh, puis en piste de danse. Et plus ponctuellement, des soirées rock en partenariat avec Studiotic. LA TERRASSE, VILLAGE BIENVENUE, 14 CHEMIN DE LIGNE, SAINTE-MARIE. OUVERTURE : 8H-18H. TÉL. : 0692 64 22 02.
Il n’y a pas que la Dodo ou les bières belges dans la vie et Jérémy Capela, le gérant de Bière au logis, entend le démontrer. Cet ancien peintre décorateur a quitté la région parisienne et son emploi pour redonner ses lettres de noblesse à l’alcool à bulles le plus consommé. “La bière a été dévalorisée pendant des années mais on assiste à un renouveau de la bière artisanale, explique-t-il. Les vieux styles sont dépoussiérés, de nouvelles saveurs sont imaginées.” Chez lui, peu de bières belges donc, mais des brasseries artisanales du monde entier. Cent vingt-cinq références environ, à emporter ou sur place. Jérémy projette d’organiser des ateliers de dégustation pour prouver que la bière peut elle aussi se marier à merveille à une assiette de charcuterie-fromage et d’autres plats. Également brasseur amateur, il devrait prochainement présenter son breuvage en boutique. BIÈRE AU LOGIS, 87 RUE ALEXIS-DE-VILLENEUVE, SAINT-DENIS. OUVERTURE : DU LUNDI AU SAMEDI, 11H-21H. TÉL. : 0693 45 79 12.
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LE NEZ DEHO RS
LE MAROC EN BORD DE MER… DE SAINT-PIERRE
Situé au cœur du village des pêcheurs de Terre-Sainte, le restaurant WOW est un restaurant d’inspiration marocaine. Au menu : couscous, tajines, mais aussi salades semoule, briouates et sandwichs aux saveurs d’ailleurs. Laissez-vous tenter également par les desserts… Pâtisseries marocaines, glaces, crêpes et gaufres qui sauront vous séduire. Vous pourrez au choix vous installer en salle ou sur la petite terrasse face à la mer. Sur place ou à emporter, venez tester une cuisine Marocaine riche en goût. WOW, 83 RUE AMIRAL-LACAZE, SAINT-PIERRE. OUVERTURE : LES MARDI ET JEUDI, 12H-14H//18H30-21H ; LE MERCREDI, 12H-14H//15H00-21H ; LES VENDREDI ET SAMEDI, 12H-14H//18H30-22H ; LE DIMANCHE 12H00-15H. TÉL. : 0262 61 37 57.
FUTURE MAMAN, C’EST POUR TOI
Ouverte en décembre 2017, la boutique Mum2Be propose aux futures et no nouvelles mamans du prêt-à-porter de maternité et d’allaitement. On y trouve des jolies tenues pour tous les jours, de la lingerie, des maillots de bain mais aussi des robes de cocktails. Et pour qu’elles soient comblées, cette jolie boutique de Saint-Pierre propose des bijoux de grossesse, des livres de maternité et des cosmétiques bio et naturels. De quoi être belle, à la mode et à l’aise. Même enceinte ! MUM2BE, 68 RUE VICTOR-LE-VIGOUREUX, SAINT-PIERRE. OUVERTURE : DU MARDI AU VENDREDI, 10H-12H//14H-18H ; LE SAMEDI, 10H-18H. TÉL. : 0692 98 85 90.
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LE NEZ D E H O RS
MADAME S’HABILLE Initialement, la boutique P’tit Piment proposait des vêtements pour femmes et enfants. Puis les enfants de Virginie ont grandi, et le magasin s’est orienté exclusivement vers la clientèle féminine. Située dans la galerie marchande du Jumbo Score au Port, la boutique a été refaite il y a un peu plus de deux ans pour laisser place à un vaste espace ambiance “appartement bourgeois”. Différentes marques forment la garde-robe, de Suncoo à La Fée Maraboutée, en passant par See U Soon ; une partie est réservée aussi pour de plus petits créateur·rice·s. Des accessoires sont également proposés, on note les chaussures de la marque Patricia Blanchet, pour les connaisseur·euse·s. Difficile de ressortir du magasin sans y acheter un petit quelque chose. P’TIT PIMENT, GALERIE MARCHANDE JUMBO SCORE, LE PORT. OUVERTURE : LE LUNDI, 12H–20H ; DU MARDI AU SAMEDI, 8H30-20H ; LE DIMANCHE, 8H30-12H. TÉL. : 0262 71 02 92.
DU BON SON DANS LE PORT
JE PIQUE ET ELLE COUD Depuis quelques années, on observe un véritable engouement pour la couture. Le Do it yourself a le vent en poupe. Plusieurs ateliers de couture sont d’ailleurs proposés sur l’Île, pour ceux·elles qui souhaiteraient s’y essayer. C’est à La Possession qu’Agnès a décidé de pousser le concept un peu plus loin, en s’inspirant de ce qui est fait déjà en Allemagne, en Angleterre, ainsi qu’en Métropole. Et ce en remplaçant les ordinateurs par des machines à coudre. Ainsi, plutôt que de rester seul·e chez soi, devant sa machine, à tenter de déchiffrer son patron, vous pouvez venir dans cet espace convivial, pour réaliser votre création. Des ouvrages ainsi que des patrons sont à votre disposition. Comptez en moyenne sept euros de l’heure. Selon ses besoins et ses envies, on peut aussi s’inscrire aux ateliers qui sont également proposés. C’est à la carte. Une façon de créer selon ses besoins, ses envies et ses possibilités. Vous savez à présent où venir coudre. COSY CAFÉ COUTURE, 2 RUE ANTANYFOSTY, LA POSSESSION. SUR RÉSERVATION. TÉL. : 0692 26 33 37.
Trois potes sont à l’origine du tout récent bar Scandale, au port de Saint-Gilles. Petite vue très sympa depuis la terrasse pour apprécier, tout simplement. Le dimanche, des concerts live sont proposés, une façon de terminer le week-end en beauté. Le vendredi et le samedi, la playlist du bar fait dans le rock et l’électro. Concernant le mercredi et le jeudi, c’est selon l’humeur de ces messieurs et quelque chose nous dit qu’on peut aisément leur faire confiance. La très bonne nouvelle, c’est que des concerts live sont aussi programmés les veilles de jours fériés. Ce serait bien dommage de manquer une occasion de faire la fête. Et ils ont même pensé aux petits (et grands) estomacs avec une restauration le soir, et bientôt le midi. Bar à tapas mais pas que. Bon, ben maintenant, on sait où se retrouver dimanche prochain, non ? SCANDALE, LOCAL 27B PORT DE PLAISANCE, SAINT-GILLES-LES-BAINS. OUVERTURE : DU MERCREDI AU DIMANCHE, 18H-0H30. TÉL. : 0692 60 45 41.
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2 MOIS DE FAI T S DI V ’ TEXTES LOÏC CHAUX
HALTÈRE, BOURSOUFLURES ET LIQUIDE VAISSELLE Parce que lire les pages “Faits Divers” du Jir et du Quotidien, c’est aussi prendre des nouvelles de La Réunion, voici un rappel de ce que vous auriez raté ces deux derniers mois. Du 5 au 11 février
Du 26 février au 4 mars
On ne sait pas trop comment, mais un monsieur qui, apparemment, s’est retrouvé enfermé sur un balcon, s’est aussi retrouvé sur le toit, à insulter les policiers avec un couteau à la main, avant de tenter de leur lancer un haltère à la figure et de tomber dudit toit. Clope au bec, un Dionysien rentre dans son appartement, dont les voisins se plaignaient depuis plusieurs jours de l’odeur de gaz. Boum ! Le monsieur parti à Maurice alors qu’il continuait à toucher de confortables indemnités-chômage en France devra tout rembourser. On parle de 134 000 euros, quand même.
Attrapés par les propriétaires alors qu’ils étaient en train de cambrioler une boutique, des jeunes gens commencent par leur envoyer des chaises à la figure, avant de s’enfuir en laissant derrière eux leur voiture, avec les clés dessus. Tuto cambriolage : à Saint-Louis, deux hommes décident de faire glisser le lourd coffre-fort qu’ils viennent de voler avec du liquide vaisselle. Plus malin, en tous cas, que ce Saint-Joséphois qui a tenté d’ouvrir un gabier avec un couteau. À Sainte-Marie, la police municipale s’étonne de ce camion garé depuis deux jours et qui sent pas très bon. Dedans, 500 kilos de poisson.
Du 12 au 18 février Tu picoles, tu cambrioles une épicerie, tu fonces sur un gendarme en voiture et tu te caches dans un buisson ? Mauvaise idée. Tu te bagarres, tu te fais ramener par les gendarmes, tu ressors dans la rue, tu te bagarres encore avec des gendarmes, tu leur voles un taser et tu t’en sers contre un passant ? Mauvaise idée. À Saint-Denis, un commerçant un peu connu est mis en garde à vue pour être propriétaire d’une maison où des femmes se prostituaient ; faut dire que les voisins commençaient à en avoir marre ; quelques jours plus tard, un policier est suspecté d’avoir protégé le manège. Dans le Sud, des dames venues dans un institut de beauté se faire enlever les rides se plaignent à la police de plaies et de boursouflures. A priori, Mickey Rourke ne fait pas partie des plaignantes. Dans une bagarre, un jeune homme arrache avec les dents un bout d’oreille de son tonton.
Du 19 au 25 février Menotté, un monsieur emmené à son procès à Champ-Fleuri arrive à s’échapper en courant : il est retrouvé à la maternité de Terre-Sainte, au chevet de sa compagne enceinte. À Saint-Leu, un député est condamné notamment pour des faits de harcèlement sexuel auprès d’une ancienne collaboratrice. Selon les témoignages, un bon gros lourd.
Du 5 au 11 mars Passage du cyclone Dumazile : pour la première fois depuis des années, l’Ouest est coupé du Nord par la Montagne et la Route du littoral. “Oui, euh, moi je bosse à Saint-Denis et je vis dans l’Ouest parce que y a la plage…” Ben voilà. Grosse surprise : dans les casernes règne une ambiance de caserne. Du coup, cette dame pompier, lassée d’être ennuyée par les gros relous, a réussi à faire condamner l’un d’eux pour harcèlement. Le sens de la mesure : au tribunal, un monsieur explique qu’il boit du rhum “modérément”, “un litre par jour”.
Du 12 au 18 mars Le coup est parti tout seul : à Saint-Denis, un monsieur tire accidentellement dans sa voiture. À Saint-Pierre, c’est Fast and Furious : un agriculteur perd le contrôle de son tracteur et pour éviter l’accident, saute de son siège et fait un roulé-boulé.
Du 19 au 25 mars À La Ravine-des-Cabris, le baptême du p’tit dernier finit en bagarre générale. Au large de Saint-Gilles, des Sri-Lankais sont trouvés sur un radeau (voir aussi page 12). Un peu gros doigts, ce hacker : il se fait passer pour le maire du Port sur Facebook pour proposer des emprunts pas chers. Au tribunal, un monsieur accusé de violences sur sa compagne et ses ex assure que ce sont “toutes
des menteuses”. Pas sûr qu’en ce moment, ce soit la bonne stratégie à adopter. À Saint-Benoît, on aperçoit un couple tenant leur bébé à bout de bras au-dessus du vide de leur balcon. Apparemment, ils tentaient de le “désensorceler” en le balançant par-dessus la rambarde, et ils avaient prévu de suivre le mouvement. C’est sûr qu’un bébé qui pleure, c’est énervant ; ceux qui n’ont pas d’enfant peuvent pas comprendre.
Du 26 mars au 1er avril À La Poste de Saint-Pierre, une dame gifle la guichetière ; et on n’est même pas en début de mois. Au Port, la police met la main sur des voleurs plutôt organisés, qui envoient par conteneurs leurs larcins à Mada. Quand ils ne le vendent pas sur Leboncoin. En une semaine, des Réunionnais ont trouvé dans leurs jardins de Saint-Pierre et Saint-Denis un python et un boa. Ce dernier n’ayant pas mangé d’éléphant, selon nos informations. À Saint-Denis, une dame se réveille avec son ex-compagnon en train de dormir sur son canapé. Sympa : après être rentré par la fenêtre, il n’a sans doute pas voulu la réveiller.
Du 2 au 8 avril Quand les banques veulent pas prêter… Deux Saint-Leusiens ont trouvé la solution : aller cambrioler un hôtel pour meubler leur propre pizzeria. À Saint-Joseph, un monsieur de soixante-dixhuit ans fait une chute de trois mètres : il avait grimpé dans un arbre pour cueillir des avocats. À Gillot, une dame qui avait embarqué enceinte en Inde, est arrivée avec un bébé dans les bras à Sainte-Marie.
Du 9 au 15 avril Tri sélectif : au Chaudron, la BAC attrape deux cambrioleurs sur le fait, et trouve le troisième caché dans une poubelle. À l’Hermitage, des gens qui ne veulent plus des restaurants installés juste au bord de la plage vont manifester. L’un d’eux arrive avec une masse à la main, et s’attaque aux pots de fleurs. Allez, ça ira mieux demain.
ÇA SE PASSE AILLEURS ÇA SE PASSE AILLEURS ÇA SE PASSE AILLEURS ÇA SE PASSE AILLEURS ÇA SE PASSE AILLEURS ÇA SE PASSE AILLEURS
Parmi les vingt-cinq communes françaises les plus peuplées, seules quatre ne possèdent pas de tramway : Toulon, Nîmes, Aix-en-Provence et Saint-Denis. // L’Île de Boracay, au Philippines, sera interdite aux touristes pendant six mois afin qu’elle puisse être nettoyée. // Lego a annoncé vouloir produire des jouets uniquement en bioplastique à partir de fibres végétales et d’éthanol extrait de cannes à sucre. // À Hampstead (Canada), le conseil municipal vient de décider de l’interdiction de fumer dans la rue. // À Lyon, une amende pour mauvais stationnement coûte 60 euros.
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L’ÉVÉNEM E N T TEXTES LOÏC CHAUX
SIX PERSONNES D’ORIGINE SRI-LANKAISE SONT RETROUVÉES AU LARGE DE SAINT-GILLES
Le 21 mars, un groupe d’hommes sur un radeau est repéré en mer par des plaisanciers.
Le matin du 21 mars, des plaisanciers sont attirés par des reflets sur la mer, au large des Aigrettes. Partis vérifier, ils tombent sur un groupe de six hommes entassés sur un radeau fait de ficelles et de bouées, à 15 kilomètres des côtes.
Le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage, alerté, rejoint les lieux et récupère les naufragés, qui ont l’air en bonne santé.
Âgés de vingt à cinquante ans environ, de nationalité sri-lankaise et ne parlant pas Français et un peu anglais, ils expliquent deux raisons à leur situation.
Ils sont confiés à la police aux frontières, à laquelle ils font part de leur envie de demander asile.
À la police, ils racontent avoir fait naufrage deux jours plus tôt avec leur navire de pêche parti du Sri-Lanka depuis plusieurs semaines.
Risquant d’être renvoyés dans leur pays, ils ont finalement eu le droit de déposer une demande d’asile. Ils sont depuis libres, en attendant de connaître le résultat de leurs démarches.
À l’aumônier du port, ils racontent avoir payé pour qu’un bâteau de commerce les dépose au large de La Réunion, et ainsi y obtenir le statut de réfugié.
En fait, et alors qu’ils attendaient un passeur qui n’est jamais venu alors qu’ils l’avaient payé, ils sont partis eux-mêmes vers La Réunion avec un bâteau de pêche qui a fait naufrage, et duquel ils se sont échapés en construisant un radeau de fortune.
Ils expliquent avoir fui des persécutions religieuses et politiques.
Des ashrams les ont accueillis.
Depuis février, le Sri Lanka est le siège de violences meurtrières entre Bouddhistes et Musulmans.
L’épave du bateau a été repérée plus tard par un plongeur. Le Sri Lanka et La Réunion sont distants d’environ quatre mille kilomètres.
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ART, CU LT URE URBA I N E E T M ULT I M ED I A TEXTES MARIANNE RENOIR, LAURENT PERRIN PHOTOS GWAEL DESBONT
LES POSSIBILITÉS D’UNE ÎLE Sur bois, sur tôle ou sur tablette, Damien Clavé met à l’honneur le patrimoine de La Réunion à travers des illustrations pleines de vie et de poésie.
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amien Clavé a très vite conquis les Réunionnais·e·s et des touristes en imaginant des cartes postales XXL de notre île. Des affiches 50 X 70 cm au style “vintage et un peu naïf” qui dépeignent des lieux tels que la pointe de Trois-Bassins, le lagon de Saint-Pierre, Cilaos. “La première que j’ai réalisée représentait GrandeAnse, raconte le professeur d’arts plastiques. J’ai moins l’occasion de peindre depuis mon déménagement, où je n’ai plus d’atelier, j’ai donc voulu tester l’illustration sur tablette pour voir si ça pouvait plaire.” Tirées en trente exemplaires, les premières affiches se sont écoulées immédiatement. Ces spots, il les connaît par cœur pour les avoir déjà peints sur du bois, de la tôle, des paraboles satellites. “Le thème est le même, mais le medium est différent”, commente-t-il. Les coups de pinceaux ont donc laissé place, pour le moment, aux traits vectoriels. Mais Clavé n’est est pas à son coup d’essai. En 2015, il remportait le concours d’affiches de Burgos, en Espagne, devenant le premier Français à y décrocher un premier prix. Quatre ou cinq autres lui seront décernés la même année.
– TIRAGES LIMITÉS – Alors, quand il a quitté son lieu de naissance dans les Pyrénées-Atlantiques, il y a dix ans, motivé par une envie de soleil, l’artiste a continué à faire ce qu’il sait faire de mieux : célébrer la beauté des lieux qu’il visite. Son coin préféré ? La mer. Ce qui surprend peu quand on sait que Damien Clavé est un ancien surfeur. S’il navigue entre commandes commerciales et créations artistiques,
sa signature varie peu : des illustrations colorées qui immortalisent des instants de vie, empreintes de poésie et même de nostalgie avec le bus courant d’air. Un transport en commun lontan que le public des Francofolies a pu voir également sur le visuel de la dernière édition. Quand aux affiches qui dressent la carte de La Réunion, le tirage peut aller jusqu’à quatre cents exemplaires ; mais l’enseignant tient à l’idée d’un produit rare. Toutes sont d’ailleurs imprimées localement et numérotées à la main. Pour les dénicher, trois adresses à retenir : Casa Saba à Saint-Pierre, le Repaire de la Murène à Saint-Denis et La Tête dans les Étoiles à Saint-Gilles-Les-Bains.
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UNE SAISON EN ENFER Ceux·elles qui ont déjà vu The Holy Mountain d’Alejandro Jodorowsky comprendront que ce film des années soixante-dix est l’une des principales influences d’Abeastlyrage, dit ABR. Le graffeur et illustrateur de vingt-six ans a exposé jusqu’en avril au Va Piano de Saint-Denis douze œuvres où cohabitent magiciens, extra-terrestres, félins, serpents, etc. Voilà sa vision de l’enfer. “J’ai créé une accumulation de personnages issus d’univers différents, une conversation entre eux, explique celui qui a étudié les arts plastiques au lycée et les Beaux Arts pendant un an. Chaque personnage a son propre univers, sa propre histoire.” ABR crée depuis l’enfance. Ses premiers murs, il les réalise à l’âge de neuf ans, initié par ses frères. L’univers de l’artiste n’a jamais vraiment changé au fil des ans. Aux BD américaines et comics qui l’ont toujours inspiré, se sont ajoutés plus tard la musique psychédélique et le heavy metal, ou des animés déjantés comme Happy Tree Friends. Abeastlyrage s’exprime aussi bien en peinture sur les toiles que sur les vêtements et accessoires. Il a prévu de s’installer à Bordeaux en juillet, l’expo au Va Piano était donc peut-être l’une des dernières occasions de découvrir en vrai ses toiles mystiques et surréalistes. Heureusement qu’on a pris des photos. UN Œ IL DANS LA RUE
BALEINE-MYSTÈRE
C’est un mystère qu’on n’aura su résoudre : ni la Cité des Arts, ni la mairie, ni même les différents sculpteurs sur bois de palettes qu’on a contactés n’ont pu nous dire qui est le responsable de cette installation qui trône au bord du boulevard Lancastel, devant la Cité des Arts, et représentant une baleine semblant nager dans le gazon. À moins que l’un d’eux nous ait menti : elle est apparue comme ça, un beau matin, anonymement, sans signature, fabriquée donc par quelqu’un qui ne voulait pas qu’on sache qui il·elle était. Quitte à raconter des bobards à BuzBuz ? Quand même…
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CULTU RE PO P’ RECUEILLI PAR LOÏC CHAUX
(
I O U ÀQ ? E U O J ON
)
Hand spinner, yoyo, billes… à quoi jouent nos marmailles à la récré ? On a posé la question à Jacques, un instit’ réunionnais de quarante ans. Pour lui, ce n’est pas si différent qu’à notre époque.
Alors, à quoi jouent les enfants dans les cours d’école ? “Dans l’ensemble, l’essentiel des jeux qui sont pratiqués dans les cours d’écoles ressemblent furieusement à ce qu’on pouvait avoir, nous. Si ce n’est que maintenant, les jeux sont beaucoup plus encadrés, parce qu’il y a des questions législatives derrière. Quand tu as des enfants qui viennent jouer avec des cartes Pokemon par exemple, et que tu apprends qu’une carte vaut 120 euros, ça peut créer des histoires. Même chose pour les hand spinners, entre le modèle de base qui vaut 4 ou 5 euros, et le modèle professionnel qui en vaut dans les 30 ou 40, ça peut susciter des jalousies.
Du coup, vous êtes obligés de mettre des restrictions sur ces jeux ? Comme on veut minimiser ce genre de problèmes, ou du moins ne pas avoir à gérer ça en plus de tout le reste, très souvent la norme c’est l’interdiction. Ce ne sont pas les enseignants qui les émettent, ce sont les conseils d’école où les parents siègent, à part égale avec les enseignants. Donc c’est une décision conjointe. Les parents ne souhaitent pas avoir des retours pour des histoires de jeux qui valent de 20 à 100 euros. Il y a quelques années, tu as eu des essais d’intrusion des jeux électroniques genre Gameboy DS et compagnie, mais ç’a été “niet”. Même chose pour les portables, en primaire, c’est clairement et strictement interdit. Ça t’étonne de les voir jouer aux mêmes jeux que toi à leur âge ? Non, pas du tout. Dans les grands classiques, on va retrouver les billes, c’est un truc qui marche encore du tonnerre. C’est toléré tant que ça ne pose pas problème. À partir du moment où ça devient un projectile… c’est différent. Suivant les écoles, tu vas avoir des choses qui sont organisées, avec des secteurs, des moments, tel type de classe a le droit de faire tel type de jeu dans tel coin de la cour. Les petits, par exemple, qui sont éloignés des grands pour ne pas qu’il y ait d’histoire. Jouer au maire, au chat, se courir après, ce genre de choses, on le retrouve partout, tout le temps. Et les jeux de ballons aussi, bien sûr, en fonction de la culture de chaque école.”
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JEAN-CLA UDE C O I N DI N
LUI,
P ORT R A IT
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TEXTE LUCILE REBOUL PHOTO ROMAIN PHILIPPON
JEAN-CLAUDE …
Jean-Claude Coindin, c’était pour nous le monsieur avec les cols ouverts et la grosse montre, qui essaie de nous vendre une maison en créole avant les bandes annonces au cinéma. Un homme d’affaires ? Certes : il nous a reçus dans son village témoin. Mais Jean-Claude Coindin, ce n’est pas que cela.
S
es débuts humbles, Jean-Claude Coindin ne les cache pas, il en est même fier : fils d’un marin-pêcheur et d’une femme de ménage, ce marmaille de Sainte-Suzanne quitte le collège à onze ans pour seconder son père à la pêche… jusqu’à ce que les gendarmes lui rappellent l’obligation de scolarisation jusqu’à seize ans. Il s’inscrit au lycée professionnel du Moufia, section menuiserie : CAP, BEP, bac Génie Civil puis école d’ingénieur en Métropole, les études, il y a finalement pris goût. Il finit par rentrer à La Réunion, est embauché comme conducteur de travaux dans une boîte de BTP. Selon lui, le patron lui demande alors de reprendre l’affaire : il accepte, apprend à diriger, puis laisse tomber les marchés publics, lassé “des collectivités qui paient avec des années de retard.” Nous sommes en 2003, le spectacle Coindin peut commencer : il s’oriente vers la construction de “petites maisons tranquilles”, les moins chères possibles.
93 FAUBOURG SAINT-HONORÉ, SANS ARDISSON MAIS AVEC COINDIN. “Moins, cher”, cela veut dire des achats en masse (donc des économies d’échelle), lambrequins fabriqués en Chine, des WC arrivant par conteneurs entiers. Puis il engage la com’ qui le fera connaître de tous les Réunionnais·e·s, avec des publicités en créole à la télévision et lui sur le devant de la scène. Cases Créole, c’est JeanClaude Coindin. Pour lui, ça marche : Jean-Claude Coindin gagne de l’argent. Alors, il se fait plaisir : il s’achète un bateau - il a continué longtemps à aller pêcher avec son père, récemment décédé - se déniche un domaine (Bassin la Boue, à Deux-Rives), où il reçoit ses ami·e·s autour d’un cari et de sa guitare. Il aime la musique, il a notamment joué pendant des dizaines d’années dans les églises. Le rachat de Kanal Austral, pour promouvoir la culture populaire
créole, lui permet de vivre justement à fond cette passion, au grand dam de son comptable : il reconnaît lui-même que dans ce domaine, il perd de l’argent, même s’il gère lui-même tournages, présentation, montages, programmation et reportages. La pub ? C’est pour les copains et les dîners dansants, il ne ferait même pas payer. Serge Lacour, fondateur de la chaîne, confirme : “Jean-Claude a créé certes un produit narcissique, mais populaire dans le sens noble du terme, pas populiste, car apolitique.” Car cette chaîne, c’est un peu JCC TV avec, en point d’orgue chaque semaine, ces dîners télévisés ouverts à une vingtaine de convives dans son repaire de Bassin la Boue, sorte de 93, Faubourg Saint-Honoré, mais avec Coindin pour remplacer Ardisson, et des caris en lieu et place des espumas et des veloutés. Que cette joyeuse bande à l’écran ne vous trompe pas, cependant : lorsqu’il n’a pas ses enfants, Jean-Claude Coindin est seul chez lui, se relaxant avec le “doux bruit de sa tondeuse à gazon”…
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EX TRAMURO S TEXTE MARIANNE RENOIR PHOTOS GWAEL DESBONT
SILENCE, ÇA POUSSE !
Avec sa façade en bois et sa silhouette de botte de vétiver, la nouvelle médiathèque du Sud Sauvage se fond presque dans le paysage. Concilier le caractère rural du lieu et les traditions réunionnaises avec le projet architectural était justement le principal objectif.
i la bibliothèque existe toujours dans les combles de la mairie, la Ville de Saint-Joseph a souhaité offrir à ses habitant·e·s et ceux·elles des communes limitrophes “une structure culturelle digne de ce nom”. C’est de cette volonté qu’une médiathèque de 2 600 m² est sortie de terre en décembre. “Nous souhaitions assumer le côté “équipement public” et le fait de montrer que l’architecture réunionnaise ne se limite pas à un toit de quatre pans, qu’elle est plus riche que ça”, commente Nicolas Peyrebonne, du cabinet Co-Architectes, heureux lauréat du concours lancé par la commune. Le travail s’inspire de la langue créole et des images qu’elle renvoie, mais aussi de sa toponymie. Sur un socle en basalte s’érige ainsi une botte de vétiver, dont la façade a été réalisée en bois de moabi. “Certain·e·s y voient une charrette bœuf”, indique Fred Figuin, directeur de la médiathèque. “La manière d’entrer a été pensée comme dans les traditionnelles cases créoles”, avec un parvis symétrique et une arrière-cour tandis que “la force de travail”, l’administration, est installée dans le kalbanon. Pour réussir à faire disparaître la frontière entre l’extérieur et l’intérieur : des fenêtres ouvertes, une varangue
S
et, surtout, l’absence de climatisation. Un système de protection solaire, une ventilation naturelle sur les trois niveaux rendue notamment possible par la cheminée dépressionnaire et des murs en ossature en bois font en effet chuter le mercure.
Barocco créole Quant à l’isolation acoustique – revêtements en placo, chicanes et laine absorbante, entres autres – elle permet par exemple de déclamer son texte dans la salle de contes sans être entendu·e depuis les autres espaces où des jeunes papotent entre eux·elles, profitent de la vue sur la mer et sur le Piton Babet. “L’architecture de la médiathèque repose finalement sur un mode fonctionnel très rationnel, formant une boucle mais avec des ambiances très différentes pour chaque espace, précise Nicolas Peyrebonne. Ces cloisons invisibles en font une sorte de barocco créole.” Un barocco dans lequel nous avons même le droit de jouer du piano, au rez-dechaussée, et de bercer les bois de Judas, mahot tantan, bois de rongue et autres espèces endémiques qui poussent en silence dans l’arrière-cour.
EXT R A M U R O S
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MICRO-T RO T T ’ RECUEILLI PAR MARIANNE RENOIR PHOTOS ROMAIN PHILIPPON
QU’AVEZ-VOUS COLLECTIONNÉ ? L’association de lindy hop La Panthère Rose fêtait ses quatre ans d’existence fin mars. Nous nous sommes invités à la soirée pour savoir si ces danseurs étaient également de bons collectionneurs.
Emmanuelle “Petite, je collectionnais des coquillages. J’habite en bord de mer, à Saint-Pierre, voilà pourquoi ! Ça a fini par me lasser, ça n’a pas duré longtemps.”
Patricia “Je collectionnais des timbres parce que j’adorais les voyages. Certains provenaient des courriers et cartes postales qu’on m’envoyait. Je suis hôtesse de l’air aujourd’hui, il doit y avoir un lien.”
Irène “Je conservais les tickets de cinéma quand j’étais plus jeune. J’avais une boîte à bonbons ronde qui était remplie. J’ai tout jeté récemment.”
M I C R O- T R OT T’
Loudgi “Les figurines des Chevaliers du Zodiaque. Il existe un personnage pour chaque constellation donc il y en a pas mal, oui. J’avais cinquante-deux figurines, quasiment toutes.”
Thomas “Vers mes cinq ou six ans, je collectionnais les autocollants des Crados, et les vignettes de la Coupe du Monde de football de 1986 au Mexique. Tout est encore chez mes parents. Ah, et les nœuds papillon aussi !”
Florence “Je ne sais pas si on peut appeler ça une collection mais, petite, je gardais les bouteilles de parfums qu’on m’offrait. Aujourd’hui, je ne le fais plus.”
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SOCIÉTÉ TEXTE LOÏC CHAUX PHOTOS ROMAIN PHILIPPON, VINCENT DAMBREVILLE
ET AU MILIEU COULE UN FRIGIDAIRE
Un vacoa, un petit tangue, un pied de letchi et, tiens, juste devant, un canapé avec un royal bourbon qui fait pipi dessus. Il n’y aurait pas un problème ?
C
omme quoi, il ne suffit pas de grand-chose. Oh, non, pas grand chose, juste une épidémie de dengue pour que, tout à coup, dans le débat public, s’immisce un sujet que tout le monde connaît, que tout le monde voit, mais jamais pris à bras-le-corps, les dépôts sauvages. Il y a clairement un souci, et nous n’avons pas attendu que les moustiques porteurs de maladies dangereuses s’installent dans les eaux stagnantes pour y réfléchir. Comme beaucoup, la première réaction est basique : “Mais c’est dégueulasse !” C’est surtout le symptôme d’un problème plus profond ; l’humain souille son propre habitat naturel. Ce qui n’est pas très malin. Que ce soit “dégueulasse”, on n’en doute pas.
Qu’il y en ait trop, non plus. Mais d’abord, de quoi parle-t-on ? Selon l’Agence pour l’observation de La Réunion, l’aménagement et l’habitat (Agorah), “Un dépôt sauvage est un site ponctuel, pouvant être récurrent, qui résulte, le plus souvent, d’apports illégaux, irréguliers et clandestins de déchets réalisés par des particuliers, des artisans, des entreprises, pour se débarrasser de leurs déchets à moindre coût. Ce type de site est caractérisé par l’absence d’un gestionnaire, faisant ainsi référence à la notion d’abandon ou d’élimination incontrôlée de déchets.” Si les collectivités territoriales ou les initiatives privées – comme le site Bandcochon – tentent régulièrement de les compter, il est quasiment impossible d’en établir une liste exhaustive : elles fleurissent ici et là, disparaissent, réapparaissent. Cependant, on
S OC I É TÉ
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L’HUMAIN SOUILLE SON PROPRE HABITAT NATUREL. CE QUI N’EST PAS TRÈS MALIN.
peut observer, à la vue des photos publiées sur Bandcochon et dans différents rapports d’associations, qu’elles apparaissent dans l’immense majorité des cas au bord des routes, pour des raisons “pratiques”, sans doute. Et c’est intéressant : si La Réunion fait partie des douze départements les plus densément peuplés de France, elle est aussi parmi les dix contenant le plus faible réseau routier en nombre de kilomètres. Pour faire simple : beaucoup de monde, sur peu de routes ; une des raisons pour lesquelles on voit des décharges partout. “Je pense que cette “impression” vient du fait qu’on n’a pas beaucoup de routes, à La Réunion, et du coup, on ne voit que ça”, propose d’ailleurs Rachid Razzak, le directeur du service “environnement” à la Communauté intercommunale du Nord de La
Réunion (Cinor). Pas faux : voir “beaucoup” de dépôts sauvages, c’est aussi une question mathématique et géographique, une particularité de notre territoire. N’empêche : elle sont là, et ça craint. Plus encore qu’en Métropole, la prise de conscience écologique puis l’organisation relative aux collectes d’ordures ménagères à La Réunion est récente. Depuis toujours, et partout, l’être humain a balancé ses déchets dans la nature. Dans les années soixante-dix, l’écologie politique a fait prendre conscience que ça ne se faisait pas : les habitudes de consommation augmentant de plus en plus nos productions de détritus et, surtout, la science commençant à évoquer des désastres écologiques futurs, il a fallu trouver des solutions. La plus marquante dans le domaine,
l’apparition des premières déchèteries, dans les années quatre-vingts en Métropole. À La Réunion ? La première date de 1997. Rachid Razzak commente : “1997, c’est le début de la notion d’“apport volontaire”. C’est récent ! Et on a constaté que dans cette période, les apports aux déchèteries, en poids, a été multiplié par deux, c’est donc que, petit à petit, les gens prennent l’habitude.” Las : dans une étude de 2016, l’Agorah remarquait que “73% du total des dépôts (hors pneus et VHU), se situent à moins de 5 minutes de l’une des 35 déchèteries de l’Île.” “On a même des dépôts juste devant les déchèteries, c’est dire”, soupire Émilie Catherine, à la cellule propreté de Saint-Denis. Horaires d’ouverture des déchèteries peu adaptés ? Certes. Mauvaise organisation du vidage des conteneurs, refusant ainsi de nouveaux apports
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SOCIÉTÉ
VOIR “BEAUCOUP” DE DÉPÔTS SAUVAGES, C’EST AUSSI UNE QUESTION MATHÉMATIQUE ET GÉOGRAPHIQUE, UNE PARTICULARITÉ DE NOTRE TERRITOIRE. des particuliers ? Oui, aussi. Mais pas que : si les pouvoirs publics que nous avons contactés confirment bien qu’il faut, encore, faire un effort sur le maillage territorial en termes de déchèteries – environ une pour 25 000 habitants, alors que l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) en recommande une pour 15 000 habitants – le problème est ailleurs : il vient de nous. Mais nom de nom, comment éradiquer le problème ? Dans son rapport, l’Agorah propose plusieurs solutions : réorganisation, modernisation, communication… et sanction. Tu m’étonnes. Il peut être intéressant de voir comment cela se passe ailleurs : les dépôts sauvages sont un problème universel. Dans le Cher, ainsi, l’organisme chargé de collecter les déchets constatait : “Depuis la mise en place d’actions communes (arrêtés municipaux instaurant une amende pour abandons de déchets identique pour les 99 communes, assermentation des employés de la DDT pour contrôler les dépôts sauvages sur le bord des routes, opération coup de poing entre le CG18, le SMIRTOM, les médias presse, TV, radio, la gendarmerie et la police municipale, dépôt de plainte systématique dès que le contrevenant est identifié), il semble que les incivilités diminuent.” À Auxerre, dans l’Yonne, la communication assortie d’amendes salées a permis l’éradication de 90% des décharges sauvages de la ville. Et on ne compte plus, d’ailleurs, les autres villes métropolitaines annonçant des verbalisations, et les appliquant, en zones rurales ou urbaines. Plus généralement, beaucoup de collectivités en Métropole ont abandonné les collectes d’encombrants : c’est au particulier de se débrouiller.
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APPARITION DES PREMIÈRES DÉCHÈTERIES : DANS LES ANNÉES QUATRE-VINGTS EN MÉTROPOLE. À LA RÉUNION ? LA PREMIÈRE DATE DE 1997.
Au pire, la règle du dépôt d’encombrant qui ne peut être effectué plus de vingt-quatre heures en amont du jour de collecte est appliquée, sous peine de sanction. Une règle, d’ailleurs, qui existe à La Réunion, que nous avons retrouvée dans les mémentos des communautés de communes locales… Que personne n’applique : dans nos têtes, les encombrants, c’est tout le temps. Y aura bien quelqu’un pour venir ramasser… Or, La Réunion ne sanctionne pas. Ou peu. “C’est compliqué, d’abord, de retrouver les propriétaires des ordures retrouvées dans ces décharges”, nous dit-on à la Cinor. Or, nous nous sommes amusés à fouiller, un peu, quelques décharges que nous avons croisées lors de nos pérégrinations : quasiment une fois sur deux, nous avons pu identifier un des auteurs. C’est donc faisable. Et puis, de toutes façons, les communes les annoncent, ces hypothétiques amendes, non ? Pas plus tard que début avril, SaintDenis annonçait, dans un communiqué justement consacré à la propreté, que “Les Agents de Surveillance de la Voie Publique seront ainsi amenés à verbaliser les individus portant atteinte à la salubrité de la Ville. Des amendes qui peuvent aller de 35€ à 1500€.” Sauf que dans la réalité… “On n’est pas dans la verbalisation du riverain lambda, nous répond-on à la mairie. On ne souhaite pas taper sur les usagers.” Oui, mais si, chez les autres, ça marche ? “Nous, on a choisi de dialoguer.” C’est tombé sur SaintDenis, mais on a vérifié ailleurs : c’est pareil. La recette des collectivités pour lutter contre ce genre d’incivilités, c’est de la com’. Du dialogue avec les riverains ; du dialogue avec les bailleurs sociaux – chez qui s’accumulent aussi les déchets – du dialogue avec les professionnels. Du dialogue, donc, et un cierge à Saint-Expedit pour que ça marche. Sauf que cela ne marche pas et, d’ailleurs, ces mêmes collectivités nous le concèdent : mettez des petites fleurs dans une aire ravagée pour qu’on n’y dépose pas de nouveau des déchets, et ils sont déposés ailleurs. Nettoyez un endroit, il est réinvesti dans la semaine. On finirait par envier cette commune de l’Oise, où le maire enquête sur chaque dépôt et, avec les services municipaux, ramène les ordures
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SOCIÉTÉ
LA RECETTE DES COLLECTIVITÉS POUR LUTTER CONTRE CE GENRE D’INCIVILITÉS, C’EST DE LA COM’, DU DIALOGUE.
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À AUXERRE, LA COMMUNICATION ASSORTIE D’AMENDES SALÉES A PERMIS L’ÉRADICATION DE 90% DES DÉCHARGES SAUVAGES DE LA VILLE.
devant le domicile de leurs propriétaires, comme il l’expliquait au Monde récemment : “Je ne fais que rapporter à leurs légitimes propriétaires ce qui leur appartient”… Résultat, de ses actions coup-de-poing, selon lui ? “On est passé de quatre ou cinq incidents par semaine sur Laigneville à un ou deux par an.” Soyons clairs, le problème des dépôts sauvages est aussi un problème politique : les cochons sont des électeur·rice·s. Alors, la Cinor – et les autres – continuent à mettre des pansements sur des jambes de bois, à envoyer des agents ramasser les déchets jetés n’importe où. Un million d’euros par an, que ça coûte, paraît-il. “Vous savez, on fait le même constat que vous, souffle Rachid Razzak, c’est insupportable, en terme d’image. On est tous gagnants, en améliorant la salubrité de nos territoires.” Aujourd’hui, et au-delà des annonces, qu’espérer ? Du mieux, sans aucun doute. D’abord, en terme de répression, la Communauté intercommunale des villes solidaires (Civis) a créé, il y a quelques semaines, une “brigade nature”, des agents assermentés avec un pouvoir de police, donc, de verbalisation. La Cinor a prévu, de son côté, de se doter du même outil, une équipe de huit personnes. Ça, quand même, on demande à voir. Et puis, le problème est traité à la racine, sous la forme d’une prise de conscience plus collective. Depuis une dizaine d’années, les enfants sont sensiblisés à la protection de la nature, dans les écoles notamment. Les notions de recyclage, de tri, font désormais partie des programmes scolaires : peut-on espérer que ces enfants-là, citoyen·ne·s de demain, seront un peu moins cochons ? “On voit des enfants qui disputent leurs parents lorsqu’ils jettent des choses dans la nature. Il faut rendre inacceptable cette réalité”, pense monsieur Razzak. L’autre jour, en voiture, nous sommes allés nous promener dans les Hauts de Trois-Bassins. Les routes sont superbes, là-haut, il y a des vaches, des pâturages, on n’a pas la place pour se croiser, on roule doucement, il fait frais. Au détour d’un virage, et à l’orée de la forêt, une machine à laver, rouillée, des déchets de taille de haies et une sorte de bidon de peinture, qui a dû dégouliner il y a longtemps, mais désormais sèche. Aucune maison aux alentours, celui·elle qui a fait cela s’est quand même sacrément pris la tête pour charger le tout dans sa voiture, rouler plusieurs kilomètres, déposer le tout, repartir. La déchèterie était-elle fermée ? Les encombrants ont-ils oublié de passer ? Dans tous les cas, comment arrive-t-on à se dire : “Tiens, je vais aller mettre mon bazar dégueulasse dans un virage, y aura bien quelqu’un pour le ramasser” ? Les vaches, les petits tangues et les géraniums attendent nos réponses.
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STATISTIQ UE M E N T RECHERCHES LOÏC CHAUX ILLUSTRATIONS FREDDY LECLERC
LA CONSOMMATION D’ÉNERGIE À LA RÉUNION Chaque année, Énergies Réunion se penche sur le bilan énergétique de La Réunion. Les chiffres de 2017 n’étant pas encore sortis, penchons-nous sur ceux de 2016.
4,82 En 2016, chaque Réunionnais·e a produit 4,82 tonnes de CO2.
86,6% Notre taux de dépendance énergétique est de 86,6% ; nous ne produisons donc que 13,4% de l’énergie que nous consommons.
1/3 Plus d’un tiers de la production électrique de La Réunion provient du charbon. Plus d’un quart des hydrocarbures.
< La Réunion est le département d’Outremer ayant la plus faible consommation d’électricité par habitant.
34% Le transport routier (particuliers, professionnels et transports collectifs) représente un tiers de la production totale de gaz à effets de serre à La Réunion.
1 La bagasse est la plus importante source d’énergie primaire produite localement ; elle devance largement les énergies hydraulique, solaire thermique et photovoltaïque.
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LE SHOPPI N G STYLISME PIERRE DEHAIS PHOTOS GWAEL DESBONT
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1. Boîte à bento Monbento, Casa Saba À Table! 60 bis rue François-de-Mahy, Saint-Pierre 2. Culottes voile de coton Germaine des Prés, Les Jolies Choses, 62 rue François-de-Mahy, Saint-Pierre 3. Malette platine tourne disque et hauts parleurs GPO, So Hype, 131 rue Jean-Chatel, Saint-Denis 4. Sac cuir, Little Factory, 85 rue du Général-de-Gaulle (Le Forum), Saint-Gilles-les-Bains 5. Bouteille isotherme infuseur à thé intégré Monbento, Casa Saba À Table! 6. Service céramique, Origine, 59 rue Jean-Chatel, Saint-Denis 7. Salopette ripstock white camo Dickies, So Hype 8. Parfum Sultane Saba Paris, Little Factory 9. Tunique à motifs, So Boutique
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LE SHOPPI N G
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1. Pochette cuir tressé, Little Factory 2. Théière fonte verte, Casa Saba À Table ! 3. Abat jour motif plage ensoleillée, Casa Saba, 91 rue François-de-Mahy, Saint-Pierre 4. Mugs, Little Factory 5. Body rayé Ichi, Sud Express, 72 rue Jean-Chatel, Saint-Denis 6. Plateau rond à motifs Mr et Mrs Clink, Casa Saba À Table ! 7. Sautoir perles Shyloh, Messieurs Dames, 93 rue François de Mahy, Saint-Pierre 8. Sandales à lanières osier, Hazarterhappy, 35 A Galerie Amandine, Saint-Gilles-les-Bains 9. Nœud papillon motif tropical Colonel Moutarde, Messieurs Dames 10. Bijoux porcelaine Julie Gentils, Les Jolies Choses
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MA BU LL E RECUEILLI PAR MARIE RENNETEAU PHOTOS GWAEL DESBONT
FANTASTIC Un après-midi de mars, nous sommes allés rencontrer Tic dans son studio éponyme, le Studiotic. Visite guidée.
M A B U LL E
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ENTREVUE EXPRESS C’est la première fois que je viens ici, tu peux nous expliquer ce qu’est le Studiotic ? Eh bien il s’agit d’un studio de répétition, avec cinq salles pour accueillir les groupes. Qui plus est une association qui gère le local, avec dix bénévoles. C’est joli en tout cas. En tant que motards et fans de Harley, on a opté pour les couleurs orange, noire et blanche. Regarde, les salles portent des noms de moteurs Harley-Davidson. Et après, c’est pas mal de récup’, un canapé en palettes, celui-ci, en cuir, c’est quelqu’un qui nous l’a donné. Avant, on avait des tables et des chaises faites avec des pneus. Là, il en reste une, regarde. Et concernant les groupes qui viennent répéter ici, c’est quoi comme style ? Ça va du rock au black métal, en passant par du séga maloya. Tous les styles, en fait. Environ quarante groupes viennent ici pour répéter et quand ils sont prêts, ils peuvent jouer dans la salle principale. On organise aussi des concerts, c’est convivial, il y a la buvette et parfois je me mets au barbecue, on envoie les grillades. Et vous avez même un baby-foot dans le fond du studio. Oui on a récupéré ça, ça permet de faire des pauses et les soirs de matchs, de Coupe du Monde notamment, on regarde la rencontre ici. Et les écrans de TV au fait ? C’est pour les matchs de foot justement, l’occasion de regarder ça ensemble. On a aussi la console, parfois on y joue. Et là, ces CD que tu as mis derrière le comptoir, c’est quoi ? Ceux-là, ils ont principalement été enregistrés ici, donc j’essaie de les mettre en avant. Et dans cette vitrine, qu’est-ce qu’on trouve? Il s’agit de matériel de musique provenant du magasin Zeshop (souvenez-vous, on en a parlé dans un précédent Nez Dehors, Ndlr). Imagine, tu es en train de répéter et là tu casses ta baguette, ou t’as besoin d’une corde pour ta guitare, c’est pratique.
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CULTU RE G RECHERCHES LOÏC CHAUX ILLUSTRATIONS MATTHIEU DENNEQUIN
L’immeuble Auteuil, dans le quartier Vauban à Saint-Denis, est le bâtiment réunionnais le plus grand, avec quarante-huit mètres de hauteur.
Le clip de Despacito est la vidéo la plus vue de l’histoire de Youtube, avec presque cinq milliards de visionnages.
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Arlette Laguiller détient le plus grand nombre de candidatures à l’élection présidentielle : six, de 1974 à 2007.
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Une langue humaine mesure en moyenne neuf centimètres (exactement la largeur d’une photo dans la rubrique “Le Nez Dehors”).
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Le Gangkar Puensum, dans l’Himalaya, est la plus haute montagne (7570 m) qui n’a jamais été gravie par un humain.
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Pour faire les malins devant les amis, voici quelques infos qui vous donneront la classe dans les discussions.
On n’a pas encore retrouvé le tombeau de Cléopâtre VII et de Marc-Antoine.
Un humain a sur la tête entre cent mille et cent cinquante mille cheveux.
David Hallyday a composé l’ancien générique de Jour de Foot.
Michael Jordan est le sportif ayant amassé la plus grande fortune dans l’histoire en combinant salaires, primes et revenus publicitaires (hors investissements extra-sportifs).
Le record du monde du changement des quatre roues d’une voiture, sans l’assistance d’appareils électriques, est de 59 secondes et 62 centièmes. Il est détenu par quatre Allemands.
Scotch & Soda, IKKS, MCS, Harriswilson, A.T.P.CO, American Vintage, Sundek, Vicomte A, Levis, Bobbies, Faguo
Concept store mode dédié à l’homme
Gallerie Commerciale Sacré Cœur, Jumbo Le Port - Tel. 0262 71 00 18
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LES PAGES SPORT
LA RE N C O N T R E D ON T ON N ’ A PA S PA R L É
BOIBOINNGG!!
Quand tout à coup, on se souvient des cours d’EPS et de notre maladresse mâtinée de vertige sur les trampolines des salles de gym.
ous avions beau avoir passé un coup de fil à la Ligue dans les jours précédents annonçant notre arrivée, nous nous sommes quand même trompés de salle. Nous voulions assister à une manche de championnats régionaux de trampoline : lorsque nous nous retrouvâmes face à des petites filles maquillées à haute dose par leurs mamans – les garçons n’y ayant apparemment pas droit, et, surtout, puisqu’il n’y avait pas de trampoline, nous comprîmes bien vite qu’on n’était pas au bon endroit. Heureusement, un petit gars qui passait par là nous indiqua le chemin, loué soit-il. Ce n’est pas que nous n’aimons pas la gym acrobatique ; c’est que, après avoir vu récemment Moi, Tonya, nous nous posions alors de sérieuses questions à propos de ces sports où les coiffures, paillettes et autres fards à paupières semblent aussi primordiaux que les performances athlétiques. Alors, nous voilà donc dans cette salle de Champ-Fleuri, à Saint-Denis, pour la dernière manche des championnats régionaux encore qualificative pour les championnats de France. On n’a pas forcément tout compris aux catégories, “nationales”, “régionales”, “élites”, le tout par tranches d’âge, alors nous ne nous attarderons pas sur les résultats secs. Ce qu’on peut vous dire c’est que, apparemment – et nous l’avons vérifié, c’est vrai – La Réunion a un vrai
N
talent pour le trampoline, avec des qualifiés aux championnats nationaux réalisant assez souvent des podiums, se retrouvant même dans les équipes nationales. Même si la France, en trampoline, est loin d’être une nation majeure, les pays sautillant le mieux étant souvent les mêmes que ceux glanant les médailles en gym. En parlant de podiums, d’ailleurs, le nombre de catégories étant ce qu’il est, le trampoline local, c’est un peu l’École des fans : tout le monde repart avec sa médaille. Ce qui est gratifiant. Pour parler un peu de sport, disons qu’après nous être fait une réflexion de béotien – “Il est pas un peu bas, le plafond, non ?” – c’est bien à un superbe sport auquel nous avons assisté. Un sport codifié, où les juges notent tant les figures imposées que la maîtrise des sauts euxmêmes, quand il ne s’agit pas aussi de veiller à l’effet “miroir” en cas d’épreuves en double. Deux duos nous ont paru particulièrement réjouissants : les jeunes Saint-Paulois Dayan Hibon et Kewan Le Bourlout d’abord et leurs collègues plus âgés de Saint-Pierre, Nicolas Sigismaux et Loïc Suroux qui, d’ailleurs, terminent avec la meilleure note de la journée. À la fin de leur programme, l’assistance a poussé un “Aaaah” d’admiration, une dame murmurant même : “C’est beau, quand c’est bien fait”, citation à laquelle nous ne pouvions qu’acquiescer.
S P ORT
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TEXTES LOÏC CHAUX PHOTOS ROMAIN PHILIPPON
> FICHE TECHNIQUE Championnat régional de trampoline Au gymnase de Champ-Fleuri (Saint-Denis). Temps : chaud. Éclairage : superbe (selon le photographe). Spectateurs : 150 environ. Buvette : bon marché, avec des gâteaux, mais sans alcool. ÉLITE 11-12 ANS HOMMES : 1. Kewan Le Bourlout (ATSP) 87,7 pts ; 2. Dayan Hibon (ATSP) ; 3. Mathis Legros (ATSP) 76,1 pts. NATIONAL 11-12 ANS HOMMES : 1. Romann Populaire (SDGR) 56,6 pts ; 2. Karl Assier de Pompignant (ATSP) 52,9 pts ; 3. Ilan Gharbi et Thomas Homps (CGSP) 51,1 pts. NATIONALE 13-14 ANS HOMMES : 1. Raphaël Brigy (ATSP) 50,2 pts. NATIONALE 15-17 ANS HOMMES : 1. Loïc Suroux (CGSP) 62,9 pts ; 2. Nicolas Sigismeau (CGSP) 58,3 pts. NATIONALE 15-17 ANS FEMMES : 1. Celyan Hibon (ATSP) 57,3 pts ; 2. Ariane Boucher (ATSP) 57,1 pts ; 3. Mathilde Brigy (ATSP) 33,6 pts. ÉLITE SYNCHRONISÉE 11-13 ANS HOMMES : 1. ATSP (Hibon et Le Bourlout) 38,75 pts ; 2. ATSP (Le Gouguec et Legros) 35,975 pts. NATIONALE SYNCHRONISÉE 12-14 ANS HOMMES : 1. ATSP (Assier de Pompignant et Brigy) 39,1 pts. NATIONALE SYNCHRONISÉE 15 ANS ET + HOMMES : 1. CGSP (Sigismeau et Suroux) 43,725 pts ; 2. ATSP (Brigy et Hibon) 3,625 pts.
ON A VU ... - Une maman, portable à la main, demander aux athlètes - et aux juges – d’attendre qu’elle soit bien positionnée pour filmer pour commencer. - Notre jeune guide nous regarder avec tristesse quand il a compris qu’on venait faire des photos, et qu’il ne serait pas dessus, puisqu’il avait fini sa journée. - Des jeunes athlètes avec des raies sur le côté bien propres. - Un public avec des mouvements de tête perpendiculaires aux mouvements qu’on constate au tennis. - Un petit garçon, manifestement peu intéressé par la compétition, nous demander si on n’avait pas une batterie pour terminer sa partie de Angry Birds.
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LES PAGES SPORT
E N T RE T I E N RECUEILLI PAR LOÏC CHAUX
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D N RG ASAUT
Le sport réunionnais en a perdu, en chemin, des athlètes avec un grand potentiel et qui se sont plantés en arrivant en Métropole. On en a discuté avec Sébastien Hoareau qui, lui, y est toujours.
SÉBASTIEN HOAREAU est actuellement directeur sportif du Vélo club Villefranche Beaujolais (ancien VC Caladois), club de deuxième division avec lequel il avait terminé sa carrière de coureur en 2015, après une dizaine d’années à courir chez les amateurs en Métropole.
En 2004, tu es champion de La Réunion, et tu décides de partir en Métropole. Comment ton point de chute, là-bas, est décidé ? “Anthony Chéfiare, mon entraîneur au VCSD (Vélo club sportif dionysien, Ndlr), m’a poussé vers la Métropole en me disant que j’avais des possibilités pour passer dans le monde professionnel. J’avais des capacités, il fallait tenter l’aventure. Il connaissait du monde au comité RhôneAlpes. On avait eu des contacts avec le Vélo club Lyon Vaulx-en-Velin (à l’époque en première division amateure, Ndlr). Mais la première année, malheureusement, je n’ai pas pu accéder à l’équipe : étant arrivé un peu tardivement dans un club qui avait déjà effectué son recrutement, je me suis vu proposer d’aller courir pour un plus petit club formateur, Cours-la-Ville. Anthony a pris des contacts là-bas, notamment avec le directeur sportif, qui va m’accueillir ensuite, et avec qui je garderai des liens très forts. J’ai donc passé un an à faire mes preuves, avant de rejoindre Vaulx.
aux championnats de France. C’était mon seul repère : le plus gros niveau français, avec des coureurs préparés pour cet événement. C’est déjà un très bon exemple. J’avais aussi participé à la Classique des Alpes, une autre ambiance encore, avec des Hollandais, des Belges… Et puis le comité de La Réunion nous a permis de faire les challenges nationaux. Mais ce sont de tous petits repères : ce sont deux choses différentes, faire une saison entière et rouler deux, trois courses en Métropole dans l’année, et le reste au chaud à La Réunion.
“QUAND LA RÉUNION DEVIENT UNE DESTINATION POUR LES VACANCES, C’EST QU’ON A PASSÉ LE CAP : NOTRE VIE, ELLE EST EN MÉTROPOLE.”
Comment se passe cette période où tu sais que tu vas partir en Métropole, mais où tu es encore à La Réunion ? Au début, on n’a pas beaucoup d’infos. Moi, j’ai eu la chance de pouvoir participer tous les ans
À quel âge es-tu parti ? Déjà, je suis parti alors que j’étais déjà “junior“, et quand j’y repense, je pense que la meilleure année, pour partir, c’est en “cadets”. Je fais un podium aux championnats de France “cadets”, en 2001, j’aurais dû partir à ce moment-là. Il y a trop d’écart de niveau entre les “juniors” et les “espoirs”… En “cadets“, on est encore plus jeunes, on réfléchit moins qu’avec deux ou trois ans de plus, qu’on commence à entrer dans la vie active, qu’on
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a le permis… Cela fait beaucoup de choses en même temps. Mais moi, j’avais pas envie de quitter ma famille tout de suite. Je le regrette un tout petit peu.
coup, on a essayé d’adapter les courses, les entraînements. Les premiers temps, quand on est Réunionnais, ce climat, il faut vraiment s’y faire.
Et il se passe quoi, dans ta tête, avant le départ ? Il y a eu un peu d’excitation car je savais que j’allais vivre une nouvelle aventure ; c’est une sorte de renouveau. Après, il y a plein de questions qui se posent… Est-ce qu’on va pouvoir s’en sortir tout seul ? Comment va être la vie ? Est-ce qu’on pourra se faire à manger tout seul ? Le gros point négatif, c’est le climat. On se demande vraiment si on va s’y faire, à ce climat. Ça fait poser plein de questions. J’ai vu pas mal de jeunes arriver, et ce que je peux t’assurer, c’est qu’il faut être préparé. Le rôle des parents est primordial : c’est eux qui vont faire que le gamin va pouvoir rester et résister.
Beaucoup de sportif·ve·s qui partent en Métropole parlent de “mal du pays”. Ç’a aussi été le cas pour toi ? Les premières années, c’était compliqué. Surtout quand je rentrais pour le Tour de La Réunion, qu’il fallait repartir après. Tu revois tes amis, cette ambiance que t’as toujours connue jusqu’à tes dix-huit ans … Moi, ce qui m’a toujours sauvé, c’est que j’ai presque fondé ma famille ici. Il y a un lien, mes enfants, ma femme, ça m’a aidé pour pouvoir enlever ce “mal du pays”. Après, rien n’empêche d’y rentrer. Et quand cela devient une destination pour les vacances, c’est qu’on a passé le cap : notre vie, elle est en Métropole. Et puis l’avenir, à La Réunion, avec le taux de chômage qu’il y a…
C’est quoi, justement, le rôle des parents ? Bon, on sait très bien qu’à la Réunion, on est vachement couvés par nos parents. On aime bien se faire chouchouter… Les jeunes, quand ils se retrouvent ici, ils n’y arrivent pas ! Ils se disent : “Comment je vais pouvoir faire pour me faire à manger, m’acheter ce qu’il faut ?” C’est là où on voit les guerriers. Soit tu réussis bien, soit t’arrêtes tout et tu rentres, il n’y a pas de milieu. On voit ceux qui ont un sacré mental : si le mec arrive à passer outre toutes ces claques qu’il prend dans la gueule, ça fait un sportif de haut niveau. Et puis tu as ceux qui ne peuvent pas, qui n’ont pas le mental, et qui veulent retrouver le cocon familial qui leur manque trop.
Quand la question de l’éloignement est évoquée avec des sportif·ve·s aux mêmes problématiques, comme les Antillais·e·s, par exemple, ils expliquent que ce qui leur fait
“EST-CE QU’ON VA POUVOIR S’EN SORTIR TOUT SEUL ? COMMENT VA ÊTRE LA VIE ? EST-CE QU’ON POURRA SE FAIRE À MANGER TOUT SEUL ?”
Tu es arrivé dans quelles conditions, justement ? Moi, j’ai pris un appartement avec Ludovic Babef (un autre coureur du VCSD, Ndlr), qui est parti en même temps que moi. On a fait les premiers six mois ensemble. On est ensuite revenus pour le Tour de La Réunion, lui n’est pas reparti pour la Métropole, moi, j’ai continué, j’ai pris mon appart’ tout seul. Ma copine est ensuite venue me rejoindre. Mes parents étaient venus juste au début, pour m’installer, ils ne sont pas restés. Et puis, je me suis fait des amis. C’est important, d’aller vers les autres ? Si t’es une personne qui n’est pas sociable, qui n’a pas la communication facile, ça ne va pas t’aider. Il faut discuter, pour être mentalement à l’aise. Comment se passent les premiers temps ? On ne s’y fait pas rapidement : je pense qu’il faut au minimum un à deux ans d’adaptation. Moi, je suis arrivé au mois de février, tout de suite dans le froid ! C’était vraiment compliqué au début, je n’arrivais pas à faire de performances, à produire mes efforts… Les entraîneurs le voyaient, que j’avais du mal l’hiver. Mais dès que le printemps arrivait, ça allait beaucoup mieux. Du
tenir le coup, c’est de se retrouver dans une communauté antillaise, dans laquelle ils retrouvent des repères culturels. Penses-tu que le fait qu’il n’y ait pas - ou peu - de communautés réunionnaises structurées en Métropole est un frein pour les Réunionnais·e·s nouveaux·elles venu·e·s ? Déjà, dans le vélo, je ne vois pas bien plus d’Antillais qui réussissent que de Réunionnais… Mais plus généralement, c’est sûr que ça aide, de retrouver des gens qui viennent du même endroit que toi. Parce qu’il ne faut pas non plus tout couper d’un coup. On a besoin de manger un cari, de parler créole… Quand on croise quelqu’un de La Réunion, c’est toujours très intéressant de pouvoir discuter de l’Île, ça fait chaud au cœur, ça ramène un peu du pays ici. Et tu es toujours venu au Tour de l’Île… Mais mon île me tient à cœur ! Depuis toujours, je voyais le Tour de l’Île comme mon Tour de France à moi. Ç’a toujours été dans un coin de ma tête, j’ai toujours voulu le gagner, pour ma famille, pour mon club de toujours, le VCSD. Je me suis toujours dit “Il faut que j’arrive à le gagner” (Il aura terminé trois fois sur le podium et gagné notamment la dernière étape en 2015, sur le Barachois, Ndlr). Et comme je te le disais : il ne faut jamais tout couper.”
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PO RT RAI T TEXTE LOÏC CHAUX PHOTO ROMAIN PHILIPPON
LE CALME DU CHASSEUR Dans le Sud Sauvage, Florent et ses acolytes passent leur temps sous l’eau, pour ramener certes quelques poissons, mais surtout parce qu’ils aiment cela.
n n’a pas un peu une vie de merde ?” Dans le texte, les premiers mots échangés avec le photographe au sortir de cette rencontre avec Florent et Eddy, avant de regrimper dans la voiture et de quitter la Marine, à Langevin. Quelques minutes plus tôt, nous rencontrions donc ces deux jeunes gens, dans un de leurs terrains de jeux favoris. Normalement, ils sont trois, les “Frères des Abysses”, comme ils se font appeler sur Youtube, dans deux vidéos dans lesquelles ils tentent de montrer leur complicité et leur amour de la pêche. Mais Miguel a dû partir en Métropole. Et puis, comme il s’agissait de faire un portrait de chasseur sous marin, nous en avons choisi un, Florent : “Parce que lui, c’est un autre niveau, quand même, sourit Eddy, pendant que son acolyte se fait tirer le portrait. Il descend à trente mètres, il pratique beaucoup plus que moi. Des fois, il s’amuse à passer sous les plongeurs en bouteille, comme ça, pour rigoler.” Florent, donc, trente-trois ans, ancien marin, qui a bossé sur les chantiers, effrayé par l’eau quand il était petit dans le Sud Sauvage, déjà. Un père qui pêchait, un fils qui a sorti son premier poisson il y a peu, une fille qui ne va pas tarder. Lui, il a son permis de chasse, il pêche avec les copains, voilà tout : “Ma compagne m’a dit que, puisque j’aimais ça, j’avais qu’à arrêter de travailler et aller pêcher. Dès que la mer est belle, j’y vais. Ça me fait du bien, ça me rend zen.” C’est dit ainsi, simplement, avec les accents de l’évidence. En faire son métier ? Question idiote : “Je sais pas. Quand quelqu’un nous demande des conseils, ou nous demande si on veut les emmener chasser, on y va, c’est tout.” Le fruit de leurs chasses ? Des repas entre copains, en famille, aux proches. Des perroquets, bourses cabri, zarengs rouges, capucins malbars, zourites…
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On ne saurait vraiment définir un bon d’un mauvais chasseur ; mais Florent esquisse quand même le portrait du bon : “On ne touche pas aux juvéniles, on veut pouvoir pêcher longtemps, il ne faut pas faire n’importe quoi. Des poissons, on en voit un petit peu moins, on doit respecter la mer, ce qu’elle nous donne. Quand on part au large, on ramasse toujours tous les plastiques qui traînent sur l’eau.” Peu de temps avant, un pêcheur professionnel nous expliquait que “la mer, c’est notre gagne-pain, on ne va pas y faire n’importe quoi.” Florent et Eddy avaient acquiescé.
IL A SON PERMIS DE CHASSE, IL PÊCHE AVEC LES COPAINS, VOILÀ TOUT.
Et puis, c’est sans doute le drame de l’actualité, c’est Florent qui nous a parlé des requins, lui-même. Calme : “On en voit, des requins, ils sont curieux, ils nous tournent autour, et ils s’en vont. Il est là, il est dans la mer, c’est comme ça.” Il a fallu partir, remonter au bureau. Derrière nous, Florent, qui avait dû passer sa combinaison pour les besoins de la photo, a dit à son pote Eddy : “Bon, ben puisque je suis en tenue, je vais y aller, non ? La mer est bien.” Et il est parti à l’eau.
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LES PAGES SPORT
LE J O UR O Ù… TEXTE LOÏC CHAUX ILLUSTRATION ANNONCE QUOTIDIEN
5 JANVIER 1997
JOUE UN MATCH AMICAL À SAINT-DENIS Conférence de presse au Parc, arrivée ici en Concorde, le tout financé par le groupe Cadjee : le PSG a joué contre une sélection de joueurs réunionnais à au Stade de l’Est.
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décembre 1996, dans la salle de presse du Parc des Princes. Le PSG s’apprête à perdre contre Nancy, et la tête du classement de Première division, mais avant, un petit monsieur avec de grosses lunettes organise un apéritif pour les journalistes, avec samoussas, punch et hôtesses. Abdul Cadjee, puisque c’est de lui dont il s’agit, annonce que Paris, vainqueur la même année de la Coupe des Coupes, ira jouer dans quelques semaines à La Réunion deux matchs amicaux. Le président du PSG, Michel Denisot, précise au passage qu’il ne sera pas question de vacances. Puis les deux rejoignent Enrico Macias et Nagui dans les loges du Parc. Plus tard, Leonardo explique au journaliste qui lui demande s’il connaît La Réunion : “Je suis allé à Johannesburg. J’imagine que ça y ressemble.” 4 janvier 1997, aéroport de Gillot. Finalement, le PSG ne jouera qu’un match ici : Abdul Cadjee, à l’époque vendeur de voitures, tente alors de s’implanter à Maurice ; il y organisera une rencontre quelques jours plus tard. Surtout, c’est le Concorde qui amène tout ce beau monde : après Giscard, Mitterrand et le Pape, c’est donc Ricardo et ses joueurs qui sont venus à Mach 2. L’équipe est quasiment au complet : Raï, Lama, Ngotty, Cauet, Loko… Leonardo, blessé, est aussi du voyage. Pour le groupe Cadjee, le coup de pub est monstrueux : un tour de Concorde est offert à l’achat d’une voiture dans les concessions ; l’adversaire, une sélection de joueurs réunionnais, évolue dans des maillots floqués des logos des marques des autos vendues dans le groupe. Pour l’Île, la promo est pas mal non plus : les journalistes métros ont fait le déplacement, les photos des étirements de Leonardo sur la plage ont fait le tour du monde. “Combien ça coûte ?” demandait Le Quotidien quelques jours plus tard. “3,5 millions” de francs (environ 700 000 euros de 2017, Ndlr), répondait Abdul Cadjee, amortis par du sponsoring et les recettes.
A P R È S G I S C A R D, M I T T E R R A N D E T LE PAPE, C ’EST DONC RICARDO ET SES JOUEURS QUI SONT VENUS À MACH 2.
Et le sport ? Paris a gagné devant les huit mille personnes du Stade de l’Est, 4-3, avec des buts de Pouget, Ngotty, Loko et un tout jeune joueur du nom de Nicolas Anelka. Les dirigeants parisiens n’ont cessé d’insister sur le fait qu’ils étaient en stage, et non en vacances. Ils avaient en effet un match à préparer : la Supercoupe d’Europe, opposant les vainqueurs de la Coupe des Coupes et de la Ligue des Champions de la saison précédente. Pas top, la préparation : dix jours plus tard, la Juve de Deschamps, Zidane et Del Piero leur passait six buts au Parc. Et Monaco finissait champion de France en mai. Le début d’une période de vaches maigres pour le PSG, qui ne sera interrompue qu’en 2011, avec l’arrivée de Qatar sports investments aux manettes du club ; désormais, les stages hors de Métropole visent à vendre des maillots et des droits télé, en Chine ou aux USA.
ancrĂŠ dans la tradition depuis 1845