Ardennes Alpes
#206 / 4ème trimestre 2020
Pour éviter la déshydratation lorsqu’au bivouac vous êtes à court de boisson, respirez à travers un foulard ou votre mouchoir placé comme un masque de chirurgien, TEXTE DE JEAN BOURGEOIS MIS EN IMAGE PAR AUDREY CAUCHIE
afin de ne perdre qu’un minimum de vapeur d’eau lors de l’expiration, vapeur que vous ré inhalez en partie à l’inspiration suivante.
Ingurgiter de la neige conduit à un supplice, et sucer de la glace n’est possible que si ce n’est pas la bouche qui gèle. Question de température, donc.
édito Au moment de clôturer ce numéro, l’actualité de la grimpe belge prend une fois de plus de la hauteur. Au nom du Club Alpin Belge, je tiens à féliciter Sébastien Berthe qui entre dans le cercle fermé des grimpeurs de 9A+ avec « Super Crakinette » ; Chloé Caulier (bloc) et Nicolas Collin (difficulté) qui rentrent tout deux des championnats européens à Moscou avec une médaille d’argent et enfin, « Loïc et les Flolopapys » décroche le prix du Best Climbing Film à Kendal ! Bravo et merci à vous tous ! La fin de l’année 2020 approche. L’heure des bilans ? 2020 aura été une année très particulière, marquée du sceau du confinement / déconfinement / reconfinement. Nous avons dû nous y adapter et faire preuve de créativité parfois. Nous avons néanmoins pu profiter d’une « éclaircie » pendant les mois d’été pour partir un peu en montagne. Des mesures particulières ont été prises dans les refuges pour s’adapter à la situation. D’après certains gardiens, une nouvelle clientèle est apparue : les jeunes de 25 à 35 ans qui découvrent la montagne1. Un des effets de la pandémie a en effet été l’annulation de voyages outre atlantique, dans les deux sens. Ainsi, 1 - Montagnes Magazine 482, octobre 2020.
Julia C assou
© 202 0
Sébastien Berthe dans « Super Crakinette – 9A+ », novembre 2020 / Saint Léger
en France par exemple, la clientèle étrangère a en grande partie été remplacée par des Français curieux de redécouvrir leur pays. Ce numéro vous présente un dossier spécial « Indoor », domaine dans lequel la Belgique fait figure de pionnier. A ce propos, Loïc Timmermans, un de nos champions d’escalade, a décidé de prendre sa retraite pour se consacrer pleinement à son nouveau métier. Je profite de l’occasion pour le féliciter pour sa carrière sportive et pour tout ce qu’il a pu apporter à notre Fédération. Bravo Loïc et bonne route ! Vous pourrez également découvrir quelques articles hivernaux, ainsi que des nouvelles du « Manneken Trip », les aventures de Sébastien Berthe et quelques idées de livres dont « Le Gouffre Berger » rédigé par notre ami Lambert Martin et quelques autres. Bonne lecture ! Un peu à l’avance, je vous souhaite de joyeuses fêtes de fin d’année, même si cette fois elles seront sans doute un peu différentes… Plus que jamais, prenez bien soin de vous et des autres !
DIDIER MARCHAL Président du CAB
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DOSSIER
Indoor L’escalade indoor made in Belgium !
COINS PERDUS PAGE 14
Les premiers alpinistes provenaient des plaines anglaises. C’est ce que nous a appris « l’âge d’or de l’alpinisme ». Les premiers grimpeurs sur les rochers ardennais provenaient principalement de Bruxelles et des villes industrialisées, donc aussi du plat pays.
CHORÉGRAPHIES VERTICALES PAGE 18
Grimper est parfois un combat. Les ouvreurs doivent réunir tous les éléments pour chauffer les grimpeurs à se donner à fond !
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Sommaire 5
Première rencontre et affinités avec la neige
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Streab Alba Geamhradh 2020
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Fiche expérience
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Un Noël sous les tropiques, quel cadeau
DOSSIER : Indoor 14 À la recherche de coins perdus 18 Chorégraphies verticales 22 Ouverture en Structure Artificielle d’Escalade
SÉCURITÉ EN ESCALADE PAGE 24
L’escalade en salle est de plus en plus populaire et semble aseptisée de tout danger. Elle n’est cependant pas sans risques et il importe de rappeler quelques règles de base pour minimiser les dangers.
D’UNE PASSION À L’AUTRE PAGE 27
Après vingt belles années, j’ai décidé de me retirer du circuit international. C’est un choix personnel, que j’ai fait sur base du critère « plaisir ».
23 1987 24 La sécurité en salle d’escalade 27 D’une passion à l’autre 32 Graines de champions 34 Bruxelles se débloc ! 36 S’initier et évoluer en escalade 37
La mia via è senza funivia
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Action collective de transition pour nos sommets (ACTS)
40 Un petit tour à vélo et quelques grandes voies ? 44 The Manneken Trip 47 Les chaussons 48 Lire
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Première rencontre et affinités avec la neige PABLO RECOURT
Pablo Recourt © 2019
Comment ça marche ce truc ? Ah, j’ai trouvé, je pense. Clic. Clic. Me voilà les raquettes aux pieds. Je suis tout excité. C’est la première fois que je fais de la montagne en hivernal. Et la première fois que je vois autant de neige. C’est beau. Cette immensité, cette blancheur. Qui aurait cru qu’elle pouvait être dangereuse ? Qui aurait dit que ce 22 novembre 2019, j’allais frôler la mort ?
Avec Florian et Pierre, je suis descendu dans les Alpes pour quatre jours. Ce matin-là, on a rejoint Antoine et Dorsan pour une journée en montagne. Au programme, environ 7 heures de course afin d’arriver le soir même à l’hospice du GrandSaint-Bernard. Les conditions ne sont pas trop mauvaises et il y a même quelques rayons de soleil. On démarre avec un bon rythme et ça réchauffe. J’adore ça. On se sent bien. Cependant, avec l’altitude, le vent commence à se lever et la température chute rapidement. Le froid est mordant et on s’arrête seulement pour pique-niquer rapidement. Les heures défilent vite et il ne faut pas traîner pour ne pas se faire rattraper par la nuit. page 5
Page précédente : Approche du col du Névée de Larousse
Prochaine étape, premier col : col du Névé de Larousse (2753 m). On l’aperçoit au loin, englouti dans le brouillard. Le vent commence à vraiment forcir, et, avec lui, les flocons glacés qui fouettent le visage. Il y a facilement un mètre de neige et on s’enfonce de 30-40 centimètres à chaque pas. C’est pénible et je m’enferme dans ma bulle en me concentrant sur le col. Pas après pas. Arrivé en haut, je me retourne et remarque que les autres sont encore loin derrière. Le vent et la neige tournoient violemment autour de moi. Dans un moment d’émerveillement, je sors mon appareil pour capturer l’arrivée du reste de l’équipe. Après quelques photos, je me rends compte que l’il est en train de geler. Je le range au fond de mon sac en espérant qu’il survivra. J’attends impatiemment les autres. Le vent est glacial ici. À peine arrivés, on entame la redescente. 200 mètres plus bas, on fait finalement une petite pause pour faire le point.
Il fait noir. Plus aucun point de repère. Désorientation totale. Ne sachant plus où aller, on se met à la recherche des marques du GR. C’est en mangeant une barre de céréale congelée que je réalise à quel point la température a chuté. Topo de la situation : il nous reste environ une heure de clarté et deux cols à franchir. Le suivant est encore conséquent et je sens que Dorsan est inquiet. Si on le passe avant la tombée de la nuit, alors on sera en sécurité. Il insiste pour qu’on ne traîne pas. Malheureusement, la neige a le pouvoir d’altérer complètement le paysage et on s’égare dans cette blanche immensité. L’obscurité guette. Le peu de lumière qu’il reste me paraît étrangement rose. J’ai juste le temps d’imaginer le soleil qui se couche loin au-dessus de la tempête.
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Cette pensée réconfortante se fait immédiatement happée par les ténèbres. Il fait noir. Plus aucun point de repère. Désorientation totale. Ne sachant plus où aller, on se met à la recherche des marques du GR. Alors que nos faisceaux de lampes frontales se perdent dans toutes les directions, l’inquiétude commence à m’atteindre. Autour de moi, Dorsan court impulsivement dans tous les sens. Il semble avoir trouvé une piste. Face à nous se dresse une imposante pente enneigée. Impossible de dire où cela mène. Quoi qu’il arrive, il faut monter. On entame les lacets dans une neige très profonde. On est complètement aveugles dans cette immensité. C’est alors que nous vient l’idée d’utiliser nos téléphones pour nous géolocaliser. Pas de réseau. Heureusement (et vraiment heureusement), MapsMe fonctionne et nous indique notre position. Combinant cette donnée avec l’inclinaison du terrain et notre intuition, on continue à avancer dans l’obscurité. Cette montée me paraît interminable. Après chaque lacet, je relève la tête en espérant apercevoir le col. Obscurité tachetée de flocons. Je repars aussitôt dans les traces de Dorsan. Progressivement, la pente s’adoucit et bientôt un replat apparaît. Une vague d’énergie positive nous submerge : on n’est pas perdus, on va s’en sortir. On est au col de l’Arpalle (2654 m), il est environ 20h, et les conditions météo continuent à se dégrader. Normalement, le gros est passé. Il ne nous reste plus qu’un troisième col à franchir. Mais il fait de plus en plus froid et on a de moins en moins de force. Après être redescendus, on fait mini pause pour manger du sucre. Je sens une nouvelle vague d’énergie, ça me rassure et me rappelle que mon corps est encore en vie. Il faut qu’on reparte rapidement. Heureusement, l’équipe résiste. Malgré le combat interne de chacun, on continue à se soutenir l’un l’autre. C’est comme ça qu’on réussit à avancer. Lorsque certains fléchissent, ceux qui ont des hauts d’énergie assument et prennent les devants pour tirer le groupe. Pour attaquer ce troisième col, je suis exténué. Heureusement, Flo est lucide et décide de mener la trace, avec Pierre qui le téléguide avec MapsMe. Je me laisse guider, leur faisant entièrement confiance. Étant dans un état second, je me concentre pour mettre un pied devant l’autre. Je ne dois pas perdre Flo. La visibilité est maintenant réduite à trois mètres et il y a tellement de vent que les traces s’effacent en deux minutes. Les conditions sont encore pires que tout à l’heure. Le ressenti est de -15 °C et le vent souffle constam-
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ment jusqu’à 80 km/h. Pas le choix, il faut tenir. En progressant péniblement sur le versant du col, j’entends les distances indiquées par Pierre diminuer petit à petit. 300 m. 250 m. 150 m. Le col se rapproche malgré tout. J’entends : « Le panneau du col se trouve à 50 m à droite, traverse à la même hauteur ! » Élan d’espoir, on y est presque. Plus qu’un tout petit effort. Je suis Flo de près, puisant le peu d’énergie qu’il me reste. Mes yeux sont mi-clos pour me protéger de la neige qui me lacère le visage. C’est si dur, mais on y est enfin. Zut, zut, zut ! En une fraction de seconde, je réalise ce qu’il se passe. La plaque de neige sur laquelle on se trouve se décroche. « Merde, qu’est-ce qu’on fait ? Qu’est-ce qu’on fait ? ». Je me souviens avoir crié. Je plante mon bâton de toutes mes forces et me tiens fermement. Un bref instant, j’ai l’impression que tout se stabilise. C’est alors que je me sens aspiré vers le bas, impuissant. La neige me passe par-dessus et m’emporte vers les pénombres. Je panique. Ouvre la bouche pour inspirer une bouffée d’air, ce n’est que de la neige qui y rentre. Je l’avale. Je réinspire. De nouveau de la neige. Je vois des flashs lumineux. Ça y est, je suis en train de mourir, c’est fini. Je sens qu’on continue à glisser. Mon cerveau tourne à mille à l’heure. Dans un moment de désespoir, je tends mon bras le plus loin possible en espérant que quelqu’un m’attrape par la main. Je ne ressens pas la lourdeur de la neige comme sur le reste de mon corps. Je m’efforce alors de le garder à tout prix en dehors. Le mouvement se calme, ça se stabilise. Encore en apnée, j’ai une pensée calme d’acceptation. C’est bon, laisse-toi aller, tant pis. Avec cette pensée si légère, mon esprit se calme et je pense à inspirer par le nez. Il est dégagé. C’est fou comme cette bouffée d’oxygène m’éclaircit l’esprit. O.K., je suis vivant. Mais pour combien de temps ? Et puis, c’est confortable là, à quoi bon lutter ? Des voix lointaines me ramènent à la réalité. Je prends conscience de la situation. Une avalanche. Elle s’est stabilisée assez vite, ça n’a pas duré très longtemps, ouf. Ma main est en dehors, je ne suis pas entièrement enseveli et j’ai le droit à quelques bouffées d’oxygène. Je vais m’en sortir. Et les autres ? Les voix se rapprochent. Je ne les reconnais pas, ça doit être des sauveteurs. Il y a de la lumière, j’ai l’impression qu’il fait jour. La tempête est finie ? Je ne comprendrai que plus tard que cette clarté, tout comme les flashs lumineux lors de la chute, était due à ma frontale. Quelqu’un me dégage la
tête. Grosse inspiration par la bouche. Je réalise que j’étais en apnée. Avec cet air glacial, la violence refait surface. Du calme et de la douceur de la neige qui m’ensevelissait, je suis replongé dans la dure réalité glacée. Le combat n’est pas fini. Il fait toujours nuit, la tempête est encore bien présente et il faut continuer à se battre. Un bras me hisse le buste en dehors de la neige. Mes jambes sont complètement immobilisées par cette lourde blancheur. Dorsan creuse et j’arrive enfin à me dégager. Mon corps est épuisé, l’apnée sans doute. À quatre pattes au milieu de ce champ de bataille, je réalise l’ampleur de la situation. On a eu de la chance. L’avalanche n’a pas dégringolé sur des centaines de mètres et tout le monde est là. Merci pour ça. J’ai perdu un de mes bâtons. « On s’en bat les c… », me dit Dorsan. Il faut se forcer à rapidement reprendre contrôle de son corps et se replonger dans le combat. Le froid ne pardonne pas.
En une fraction de seconde, je réalise ce qu’il se passe. La plaque de neige sur laquelle on se trouve se décroche. L’adrénaline nous booste et tout le monde est à peine relevé qu’on est reparti. Il est 23h30 et la nuit n’a jamais été si noire. Il ne faut plus que traverser une pente enneigée pour atteindre le col. Je n’ose pas me lancer. Dorsan fonce et je le suis prudemment. On arrive enfin au col de Fenêtre. Je n’ai jamais vu un vent si violent. 120 km/h et je peine à tenir debout. J’ai l’impression que les flocons gelés qui frappent mon visage le découpent petit à petit. Titubant, je me tire jusqu’au panneau. Je devine que les autres ne sont pas très loin de moi. Mais ce n’est peutêtre qu’une impression. Le vent qui rugit nous empêche d’ouvrir les yeux correctement. « Si on reste ici, on est morts », me crie Flo. Je fais quelques pas, effort surhumain. Je me retourne. À seulement quelques mètres du panneau, on ne l’aperçoit déjà plus. Tout le monde est complètement désorienté. Quelle direction ? On s’en fou, il faut descendre. Juste descendre, sinon on meurt. Ayant la seule frontale assez puissante, c’est moi page 7
qui mène le groupe. Pourtant, je ne vois rien. Ce p… de vent m’aveugle complètement. Entre rester là et mourir congelés dans les quelques minutes ou foncer à l’aveugle vers le bas en risquant de tomber d’une falaise, je choisis la solution qui nous offre le plus de chance nous en sortir. Après un dernier regard inquiet vers Flo, je fonce droit devant moi. Je mets alors un bras devant mon visage pour me protéger, et je m’efforce juste de mettre un pied devant l’autre. Petit à petit on perd de l’altitude. Et comme espéré, le vent faiblit. Il y a une route en bas. Si on la rejoint, on est en sécurité. Je m’arrête plusieurs fois pour attendre les autres. Antoine est loin derrière et Dorsan à côté de moi est au bord de l’hypothermie. Il ne veut pas s’arrêter. Mais il faut attendre les autres, sinon c’est le début de la fin. Il délire et claque des dents. J’ai peur qu’il craque et mette le groupe en danger. J’essaye de le raisonner et le prends dans mes bras pour le réchauffer. Étonnamment cette toute petite vague de chaleur suffit à rallumer son visage. Aussitôt que les autres nous ont rejoints, je me relance en courant dans la pente. Déterminé, j’avance droit devant moi jusqu’à atteindre enfin cette route. Le vent est de nouveau supportable, et on a gagné au moins 10 degrés. C’est la première fois qu’on peut se poser un instant depuis l’avalanche. C’est la première fois qu’on est sûrs de sortir vivants de cette aventure. C’est la première fois que j’en suis persuadé. Une nouvelle vague d’énergie me gagne, et je ressens la même chose chez tout le monde. Malgré la fatigue, je me remets aussitôt en route et rythme la trace dans cette blancheur qui recouvre le macadam de plus d’un mètre. L’hospice du Grand-Saint-Bernard n’est plus très loin. Comme dans un rêve flou, je dépasse alors des ombres de bâtiments hibernants qui créent une haie d’honneur vers des portes éclairées. En passant finalement le porche, une douce chaleur nous accueille. Contraste immense entre le bruit assourdissant de la tempête et ce calme apaisant. Entre le noir total et cette lumière douce. Il est 2h du matin. Dans le hall d’entrée, on peine à retirer la glace qui emprisonne nos cils, nos sourcils, et nos cheveux. Je lis dans le regard des autres qu’ils ont traversé la mort. Une immense vague de fatigue me prend, et j’ai du mal à tenir sur mes jambes. Un dernier effort pour me déshabiller. En enlevant mes couches une à une, je repousse loin de moi le froid, la peur, la fatigue et la tempête. Au-dessus de la porte des vestiaires, j’aperçois un écriteau : « Heureux ceux qui ont persévéré ». Je souris. page 8
J’écris ces lignes une vingtaine de jours après l’accident. Oui, on parle aujourd’hui d’accident. Un accident de vie. Comme un boulet de canon qui bouleverse notre rythme quotidien. Plus rien n’est pareil. J’ai un regard nouveau sur tout ce que je vis. Ça peut être vraiment positif certains jours. Tout me paraît si beau, et je suis simplement émerveillé par ce qu’il y a autour de moi. Un rayon de soleil sur mon visage, une caresse, la douceur du chocolat. D’autres jours cependant, c’est un nuage sombre qui m’embrume l’esprit. Une remise en question constante et une perte de motivation. À quoi bon se forcer ? À quoi bon continuer de courir tout le temps ? J’aimerai pouvoir dire : pause. Digérer. Accepter. Me souvenir de ce qui me fait plaisir et me stimule au quotidien. Mais la vie n’attend pas. Les gens autour de moi continuent à avancer, et il faut suivre. Ça a été drôle de parler de tout ça avec des gens autour de moi. Au début, ils ne réalisent pas. Je sens bien qu’ils sont distants. Ils se disent sans doute que ça ne leur serait pas arrivé à eux, qu’ils n’auraient pas commis les mêmes erreurs. J’aimerais leur faire comprendre qu’ils se trompent. Il est évident que certaines actions peuvent être jugées a posteriori comme des erreurs. Mais sur le moment, dans de telles conditions, il s’agissait des meilleures décisions à prendre. N’importe qui aurait probablement fait la même chose. Une « erreur » en montagne arrive beaucoup plus vite que ce que l’on pense. La seule vraie erreur est justement de penser qu’on est à l’abri d’en commettre une. Ce n’est pas la mésaventure en elle-même qui est difficile à surmonter. C’est ce qui suit. Il y a cette peur. Ma peur et celle de mes proches. Une peur qui freine ma motivation à grimper, à repartir en montagne. J’ai compris qu’il ne faut pas l’étouffer. Il faut la comprendre et la confronter pour pouvoir l’accepter. Prendre du temps pour soi. Le temps a la faculté de guérir n’importe quelle blessure. Petit à petit, je me sens mieux. Et j’ai grandi. Je retrouve la motivation qui me caractérise si bien. J’ai des rêves d’escalade par milliers et je n’ai qu’une envie : repartir. Je ressens au fond de moi cette petite flamme qui me rappelle ce que je suis plus que jamais. Je suis vivant.
PABLO RECOURT
Streab Alba Geamhradh 2020 Escalade hivernale en Écosse THOMAS WUYTS
Un tel événement n’avait pas été organisé depuis 2016 et il y avait des participants du Canada, de la Corée du Sud, de l’Afrique du Sud, de la Suisse, des États-Unis, de l’Italie... et de la Belgique ! Moi, véritable « cascatiste de beau temps », j’ai pu représenter notre pays à ce rendez-vous international du 22 au 29 février 2020. Le but: connaître « leur » forme d’escalade hivernale, souvent illusoire pour nous, « les continentaux » !
Kyle Wood © 2020
L’association écossaise d’alpinisme Mountaineering Scotland fête ses 50 ans en 2020. Pour cette occasion, elle a invité 23 nations différentes au Scottish Winter Climbing Meet, ou traduit en gaélique Streab Alba Geamhradh.
L’escalade était si bonne, tellement intéressante, que je me suis retrouvé en Écosse pendant deux semaines et pas seulement une ! Voici le compte rendu de cet événement.
Entre les deux doigts sur le Finger’s ridge aux Cairngorms / Cairngorms / 2020
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FICHE EXPÉDITION Accès J’ai pris l’avion pour Édimbourg directement depuis l’aéroport d’Amsterdam. De là, nous avons roulé pendant deux heures et demie vers Aviemore dans le Cairngorms National Park. C’est également possible en transports en commun ! Aviemore est un excellent point de départ pour toute aventure écossaise, car son emplacement est très central. L’auberge de jeunesse est excellente et il y a beaucoup de magasins d’alpinisme autour. L’accès aux Cairngorms ne prend qu’une demi-heure en bus. C’est probablement la zone d’escalade la plus accessible d’Écosse ! Depuis Aviemore, vous pouvez vous diriger vers Fort William et Ben Nevis, Glen Coe, Torridon, Creag Meagaidh… Certaines de ces zones seront malheureusement moins accessibles en transports en commun.
Les zones d’escalade
Kyle Wood © 2020
Les Cairngorms sont grands ! Il y aura des zones avec plus de cinq heures d’approche, mais en général, l’accès est facile en se rendant au centre de ski de Cairngorm. Une seule heure de marche vous amènera à Coire An t-Sneachda, avec des secteurs comme « Mess of Pottage », « Aladdin’s Buttress » et « Fluted Buttress ». Il s’agit principalement d’escalade mixte sur des blocs de granit très marquants. Ces itinéraires dépendent généralement moins sur la présence de glace. Des gullies enneigées peuvent également être trouvées là. Par temps froid, « Lurcher’s Crag » est un site d’escalade de glace facile.
J’AI GRIMPÉ : « Finger’s Ridge » (IV / 5) sur « Fluted Buttress » et « The Melting Pot » (V / 7) sur « Mess Of Pottage »
Ben Nevis est situé près de Fort William. En fait, la face nord est visible depuis le centre-ville. L’accès à toutes les routes sur Ben Nevis est décrit depuis la cabane CIC. On y accède par le sentier partant du North Face Car Park. Ce n’est pas accessible avec les transports en commun, donc il faut prévoir pas mal de marche supplémentaire ! L’accès au CIC dure environ une heure et demie. Attention : la cabane est de type bivouac, très bien équipée, mais nécessite une réservation et c’est très strict. Il y a un gardien qui vérifie les réservations. Pas de réservation = pas de séjour. Pour la saison d’hiver, il est préférable de réserver la cabane plus d’un an à l’avance !
J’AI GRIMPÉ : « Minus Two Gully » (V / 5), « Gutless » (IV / 5), « Minus One Gully » (VI / 6) et « Gemini » (VI / 6) Glen Coe est une zone d’escalade excellente à environ 45 minutes de Fort William. Là, on trouve la montagne la plus emblématique d’Écosse, le Buachaille Etive Mor et, à mon avis, le meilleur secteur d’escalade de tout mon voyage : Stob Coire Nan Lochan. Pour le Buachaille, vous pouvez rester dans la cabane Lagangarbh au pied de la montagne. Il s’agit également d’une cabane de style bivouac, propriété de SMC, très bien équipée et moins fréquentée que la cabane CIC. Plus proche de Stob Coire Nan Lochan se trouve « The Clachaig Inn », le meilleur pub écossais, et aussi un hôtel. L’accès à Stob Coire Nan Lochan prend une heure et demie de marche depuis le parking désigné, pas loin du pub.
J’AI GRIMPÉ : « North Buttress » sur Buachaille Etive Mor (IV / 4), « Chimney Route » (VI / 6) et « Central Grooves » (VII / 7) à Stob Coire Nan Lochan Torridon est très haut dans le nord-ouest de l’Écosse. Il est extrêmement éloigné, prenant jusqu’à trois à quatre heures d’Avie-
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Thomas Wuyts et Kyle Wood / Cairngorms
J’AI GRIMPÉ : « The Salmon Leap » (VI / 6) et « Deer Hunter » (V / 6) Creag Meagaidh mesure 3 km de long et 500 m de haut. Il est considéré comme l’un des meilleurs rochers en termes de qualité pour l’escalade hivernal. Cependant, les bonnes conditions sont très difficiles à trouver et la région est extrêmement dangereuse concernant les avalanches ! Certaines équipes ont visité cette zone pendant la rencontre internationale et toutes se sont retirées en raison de ces conditions avalancheuses.
Matos Pour l’hiver écossais, vous aurez besoin de : • • •
2 piolets techniques ; crampons d’escalade de glace (de préférence monopoints pour le mixte) ; équipement d’escalade normal comme un harnais et dégaines, corde double, casque, sangles… ;
Selon l’itinéraire que vous monterez, un mélange de : • • • • • • • •
vis à glace (les courtes de 10 et 13 cm sont très utiles !) cams (plutôt pour les voies snowed-up rock, moins utiles pour le mixte !) coinceurs hexagonales tricams bulldogs et terriers (pour les fissures très fines et pour le turf) beaucoup de vêtements : chauds, imperméables et extras…, de tout ; gants : au moins 3 paires. Votre Glove Game doit être solide en Écosse !
Kyle Wood © 2020
more en voiture. De Torridon, vous pouvez accéder à plusieurs zones d’escalade comme Liathach et Beinn Bhan. Les approches sont longues et le sentiment est plus impressionnant par rapport à des zones comme les Cairngorms. Liathach est un secteur avec une grande sélection de cascades de glace s’il fait assez froid ! C’est une face de style canadienne, avec des taches de glace partout. Les trois cascades plus connues sont « Umbrella Fall » (V / 5), « The Salmon Leap » (VI / 6) et « Poacher’s Fall » (V / 5).
Cotations La cotation dans l’escalade hivernale écossaise est indiquée par deux nombres, plutôt qu’un, comme dans l’escalade normale. Le chiffre romain est la citation générale. Cela prend en compte l’engagement, la qualité d’assurage, la longueur totale du parcours… Le chiffre arabe représente la difficulté purement technique. Pensez, « la taille des poignées ». La route est-elle pleine de « bacs » ou sont-ils tous des « pinces » ? En tant que « continentaux », nous avons tendance à regarder principalement ce deuxième chiffre, mais en fait, la citation globale est la plus importante ! Sans bonnes pointes d’assurage, vous n’irez nulle part !
Topo Le topoguide que nous avons utilisé s’appelle Scottish Winter Climbs par le SMC. Il contient une très grande sélection de montées dans tous les secteurs avec les cotations et une courte description de l’itinéraire. Ce n’est qu’une sélection d’itinéraires. Chaque zone d’escalade a également son propre topo dédié, avec tous les itinéraires.
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Anne
Thebe
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Un Noël
sous les tropiques, quel cadeau Une ascension de la Montagne de Dieu, mon premier volcan, à 14 ans MARTIN BAGUET Pendant les vacances de Noël, mes parents ont prévu de faire un séjour exceptionnel en Tanzanie, le pays de la girafe. Pour finaliser notre super safari, nous avons décidé de faire l’ascension de l’Ol Doinyo Lengaï, la « Montagne de Dieu » en langage massaï. Ce volcan, le dernier actif de Tanzanie, se situe dans le nord du pays, à 200 km du célèbre Kilimandjaro.
Le 25 décembre 2019, nous nous levons à 22 h. Nous avons dormi à peine une heure 40. Ma sœur, mon papa, ma maman, nos guides, l’organisateur Ladzaro, et moi prenons la route vers le Lengaï. Après une demi-heure de route cahoteuse, dans la nuit noire, en ayant l’impression de ne rouler nulle part, car les traces de la piste ont été effacées lors des derniers orages, et alors que nous sommes presque arrivés, la jeep tombe dans une
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ornière. On sort pelle et cric pour la dégager. Après une heure de vains efforts, l’essieu bute toujours dans la terre. Nous avions prévu de commencer la marche à minuit, pour être au sommet au lever du soleil. Nous sommes à 1 km du point normal de départ. Nous décidons que Justin, notre guide-chauffeur, qui de toute façon ne prévoyait pas de faire l’ascension, reste seul près de la voiture pour la dégager. Il est près d’une heure du matin quand enfin nous commençons à marcher. Les guides massaï marchent vite. Rapidement, le sentier commence à monter entre les hautes herbes, et les plaques de lave s’effondrent régulièrement sous nos pas. La marche est fatigante, car le sentier est souvent coupé par des ravines et il commence à pleuvoir de plus en plus fort (eh oui, nous sommes à la fin de la petite saison des pluies). Nous ne voyons rien autour de nous, seul le petit halo de lumière de nos frontales nous permet de ne pas trébucher à chaque pas. Ce n’est vraiment pas évident de trouver son chemin. Maman est déjà trempée, car elle a laissé sa bonne veste à ma sœur Aude, qui se plaignait d’avoir froid. Il faut sans cesse faire très attention où nous posons les pieds, à tout bout de champ le sol s’effondre sous nos pas. Après trois heures de marche, ma sœur n’est visiblement pas bien, elle se plaint maintenant de méchantes coliques et de mal de tête. Elle s’arrête de plus en plus souvent et commence à retarder la marche. Le deuxième guide massaï n’en mène pas plus large. Mon papa décide de faire demi-tour avec Aude et le guide malade pour nous laisser continuer à une cadence raisonnable. À 6h du matin, après cinq heures de marche, le jour se lève. Nous sommes maintenant au-dessus de la première couche de nuages, il s’arrête enfin de pleuvoir. Tout se teinte de rose, c’est magnifique. Nous commençons à voir la grandeur du paysage. Les sommets qui entouraient hier le Lengaï, ne sont plus maintenant que des petites collines verdoyantes. Nous remontons un profond ravin taillé en pente raide dans le flanc de la montagne. La végétation est maintenant plus rare.
Nous la franchissons à un endroit où les deux lèvres sont séparées par un gros bloc assez instable qui nous sert de marche intermédiaire. Nous marchons maintenant sur des cendres parsemées de cailloux. Il faut faire attention à l’endroit où l’on met les pieds dans les marches sommaires et distantes. Elles attaquent directement la pente sans le moindre lacet qui pourrait diminuer l’effort à fournir pour monter. En dehors de cette trace, le sol est glissant, car les petits cailloux font roulement à billes sous nos semelles. Quand la pente s’adoucit, nous débouchons enfin au bord du cratère. Nous sommes à 2 962 m d’altitude, soit près de deux mille mètres plus haut que notre point de départ. Nos efforts sont récompensés par la vue magnifique qui s’offre à nos yeux. De l’autre côté de la crête sur laquelle nous venons d’arriver, une espèce de large entonnoir de cendre redescend vers une énorme cheminée d’environ 300 m de diamètre et de 50 m de profondeur. Les parois verticales du cratère sont formées de strates horizontales où beige, gris, blanc et noir se superposent. Au milieu du lac de lave solidifiée trône une cheminée appelée hornito, d’où s’échappent des vapeurs chaudes. Contre la paroi du cratère s’appuie un demicône, au sommet duquel une bouche béante laisse entendre les gargouillements du volcan. Le fond est marbré de blanc, phénomène assez rare, dû au carbonate de sodium que l’Ol Doinyo Lengaï est un des uniques volcans à éjecter. Cette natro-carbonatite, comme l’appellent les scientifiques, a la particularité d’être liquide et plutôt noire à 500 °C, et de blanchir en se refroidissant. J’aurais voulu faire le tour complet du cratère, mais on ne pouvait en faire que la moitié, car une partie de la crête s’est effondrée et est trop instable pour y passer en sécurité. Il est 9 h 20 quand nous décidons d’entamer la descente. Tout est beaucoup plus impressionnant, car maintenant on voit le décor. La pente semble plus raide, et le sol plus chaotique. La descente est encore plus éprouvante que la montée. Je commence à ressentir la fatigue. La température grimpe.
Anne Theben ©
Nous voyons enfin ce que nous avons déjà gravi. Il était 1 h quand on a commencé à marcher, il est 8 h quand je sens les premières émanations du volcan : ça pue le soufre. Une première cheminée apparaît, d’où sortent quelques fumerolles. Une crevasse assez profonde nous barre la route et semble faire tout le tour de la montagne. Un peu comme une rimaye dans la partie supérieure d’un glacier.
Paul Baguet ©
La roche reste friable, elle se teinte de noir, de gris et d’ocre.
Haut : Dans les hautes herbes des pentes inférieures. Bas : L’Ol Doinyo Lengaï vu de la pleine du lac Natron. Page précédente : Grimpée dans le grand ravin.
Il y a plein de ravines creusées par l’eau et quelques profonds ravins qui doivent être d’anciens couloirs par où la lave s’est écoulée lors des dernières éruptions. Le soleil perce enfin les nuages et commence à taper de plus en plus. Il était prévu d’être de retour au pied du volcan à la mi-journée, afin d’éviter la chaleur oppressante de l’après-midi. Les retards pris au départ et pendant la montée ont décalé notre timing de plus de deux heures. Bien que nous ayons emporté plusieurs litres d’eau, il nous faudra rationner le dernier ; la température dépasse maintenant les 35 °C et les hautes herbes que nous traversons réfléchissent les rayons du soleil. À 14 h 30, nous arrivons enfin à la voiture, que Justin notre guide, a réussi à dégager et amener au point de départ normal. On vient de faire plus de 1 800 m de dénivelé en un peu plus de douze heures : c’est avec plaisir que nous faisons une petite pause. Il nous faut encore rejoindre le camp, démonter les tentes et reprendre la route chaotique qui nous ramènera à Arusha.
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DOSSIER INDOOR
À la recherche de coins perdus Partie 1 MARK SEBILLE Les premiers alpinistes provenaient des plaines anglaises. C’est ce que nous a appris « l’âge d’or de l’alpinisme ». Les premiers grimpeurs sur les rochers ardennais provenaient principalement de Bruxelles et des villes industrialisées, donc aussi du plat pays. Plus tard, les premiers murs d’escalade artificiels ont été construits dans la partie plate de l’Europe. Il est frappant de voir comment l’histoire se répète.
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Aujourd’hui, cependant, les plus grandes salles d’escalade se situent dans les grands centres alpestres. Ces structures artificielles d’escalade ont été développées vers la fin des années quatre-vingt et la Belgique a d’ailleurs joué un rôle clé dans cette évolution. Mais on faisait déjà de l’escalade en Belgique, loin des rochers, bien avant l’existence des premiers murs d’escalade. La recherche de cette préhistoire est pleine de surprises. Voyageons dans le temps, vers 1960. La Belgique compte déjà bon nombre d’alpinistes qui visitent régulièrement les rochers. Seuls les citoyens aisés
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Ci-contre et bas : les frères Bovée, debut annees 60
ont leur propre voiture. Ceux qui vivent près de Namur, Dinant ou Liège peuvent atteindre les rochers à vélo, mais pour le reste du pays, c’est toute une aventure : il faut prendre le train pour Dinant et rejoindre ensuite Freyr à pied.
Jusque-là, toutes ces initiatives murales visaient uniquement à mieux performer en haute montagne, il n’y avait pas d’escalade sportive telle que nous la connaissons aujourd’hui.
À Bruxelles, au milieu des années 1970, une activité d’escalade se développe sur les murs du musée de l’armée. C’était en fait « du bloc » bien avant que le terme ne soit inventé. On l’appelait à l’époque « traverser », ce qui donnait une sensation plus alpine. Mais bien avant cela, des constructions abandonnées avaient été reprises par des grimpeurs et transformées en murs d’escalade. Il s’agissait de bunkers de la Seconde Guerre mondiale, de piliers de ponts, d’usines abandonnées, etc. Le groupe d’escalade des Amis de la Nature organisait régulièrement une école d’escalade au Fort Napoléon, à Ostende. À Gand, vers 1960, il y avait un groupe qui avait ouvert différentes voies sur les murs du cinéma Rio dans la Meibloemstraat. Le cinéma n’existe plus aujourd’hui. Il s’agissait d’un mur en
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En 1958, le CAB a fondé la section Anvers qui, au fil du temps, est devenue le BAC. Elle rassemblait en fait la plupart des membres flamands de l’époque. Certains venaient de la classe supérieure, mais clairement pas tous. À Gand par exemple, il y avait un groupe d’alpinistes issus de la classe ouvrière. Les Amis de la Nature, ainsi qu’une mutuelle d’inspiration socialiste, ont mon-
tré un grand intérêt pour l’escalade, mais Freyr était trop loin pour y aller chaque semaine. Ils organisaient un week-end en Ardennes toutes les deux ou trois semaines et, entre-temps, les jeunes cherchaient des lieux de pratique plus près de chez eux. Non seulement en Flandre, mais aussi à Bruxelles et dans le Brabant, on cherchait partout des murs qui se prêtaient à la pratique, sur lesquels on pouvait s’imaginer sur les rochers pendant quelques heures. En Wallonie, nous n’avons pas vu ce phénomène : les rochers sont à proximité. Dans le Hainaut, qui est cependant aussi loin des rochers, les grimpeurs se sont plutôt rendus vers des carrières.
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briques rouges, dans lequel plusieurs pitons étaient cimentés. Il y avait même un relais, qui était suspendu, et un morceau de tronc d’arbre formait un obstacle supplémentaire. N’oubliez pas que les gars montaient encore avec des chaussures de montagne et une corde de chanvre autour de la taille. Dans les années quatre-vingt, de plus en plus de jeunes ont une voiture pour se rendre dans les Ardennes et les rochers aux itinéraires faciles deviennent surpeuplés. Les meilleurs grimpeurs continuent donc de monter la barre, et il ne faudra pas longtemps avant qu’Arnoud ’t Kint soit le premier à grimper un 8a. La recherche d’alternatives proches de chez soi ne s’est pas arrêtée pour autant. Arnoud’t Kint a découvert le Pont du Diable près de son domicile parental : un pont décoratif de la Belle Époque qu’un architecte paysagiste avait fait construire en pierre naturelle, dans le parc de Woluwe. Ce pont est devenu une nouvelle Mecque pour les grimpeurs sportifs. Jusqu’à aujourd’hui, ce pont et les murs du Cinquantenaire sont toujours utilisés. Alors que la première génération en 1975 se faisait encore régulièrement expulser des murs par la gendarmerie, ce n’est plus le cas aujourd’hui : la police voit désormais la différence entre un cambrioleur et un grimpeur sportif. Dans la première moitié des années 80, toujours à Gand, un pont de la N466 a constitué une nouvelle cible. À quelques centaines de mètres de l’endroit où se trouve maintenant la salle Biover, on peut encore lire les noms des itinéraires sur les murs : Scarabee 6b, Peanuts 6a, Turkish Delight 5c+, etc.
Debut 70, Jaques Van Gampelaere dans La Tabletta, Brasserie Ultra à Gand © archives Roger Antoine Page suivante : Haut : les frères Bovée, debut annees 60 © archives Herman Bovée Bas : Gand, cinema Rio, vers 1960 © archives Roger Antoine page 16
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Aujourd’hui, il n’y a plus d’escalade ici, les pigeons sauvages ont repris la gestion sous le pont et leurs fientes sur le sol ont déjà l’épaisseur d’un crash pad. La forteresse d’Ostende (autrefois construite par Napoléon) a entretemps été restaurée et est maintenant un musée avec brasserie. Les nombreuses voies d’escalade ont disparu. En 1986, Pierre D’haenens a eu l’idée d’utiliser du contreplaqué perforé pour réaliser des murs d’escalade constamment changeants. Isabelle Dorsimond et Marc Bott y ont vu un avenir et se sont lancés dans une aventure sur une « Terre neuve ». En dehors du Cinquantenaire, les activités sur les sites d’escalade urbains se sont peu à peu interrompues.
Un nouveau sport en salle est né.
MARK SEBILLE
La préhistoire de l’escalade sportive est largement décrite dans le livre BEL’WALL 2021 qui sortira début 2021.
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DOSSIER INDOOR
Chorégraphies verticales L’ouverture de voies – Quelques témoignages DAVID LEDUC Chaque ouvreur se rappelle de ses premières créations. De la fatigue après coup, du mal au dos à force de pendouiller dans le baudrier, des doigts défoncés, du manque d’imagination qui le coince pendant des minutes entières, des t-nuts pétés… et ensuite les commentaires sympas des premiers ascensionnistes de cette voie de plastique qui leur a coûté tant de sueur. « C’est beaucoup trop dur ce crux sur réglettes ». « C’est morpho, pour toi c’est facile, tu fais 1 m 80 ». Ou encore « Ce n’est jamais 7a, ça ». La séquence incroyable qu’on a mis 30 minutes à inventer, que le premier touriste venu arrive à boycotter facilement en remontant en paume. Ça fait plaisir ! page 18
Autrefois ils semblaient des sorciers en marge de la société, mais aujourd’hui avec le boom de l’escalade, des dizaines de grimpeurs en Belgique travaillent comme ouvreur, toujours en uniforme. Quelques-uns à temps plein ou presque dans une ou plusieurs salles d’escalade, beaucoup à temps partiel, d’autres comme bénévoles occasionnels… En tout cas, ces gens-là sont les créateurs de ces centaines de blocs et de voies auxquelles des milliers de grimpeurs viennent s’agripper toutes les semaines ! En quoi consiste ce boulot ? Qu’est-ce qui les attire dans ce jeu de l’ouverture ? Quels sont les plaisirs, les challenges, les difficultés ? J’ai regroupé quelques témoignages de véritables passionnés qui mettent un peu de lumière sur le sujet. Terres Neuves, 1987, la première salle d’escalade commerciale au monde : les débuts de l’ouverture de voies avec des prises facilement amovibles grâce à l’utilisation de boulons et t-nuts, une petite révolution à l’époque. Aujourd’hui, la salle est un de ces rares musées de l’escalade, un endroit qu’on visite autant pour son charme et pour son histoire que pour le plaisir d’y grimper.
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Isabelle Dorsimond et Marc Bott ouvraient déjà à l’époque, et encore aujourd’hui. Pour Marc, les salles d’escalade sans les ouvreurs, n’existent pas. « Ce sont eux les créateurs, les inventeurs qui font qu’une salle est appréciée pour ses voies et fréquentée pour ça. Pas simplement parce que c’est plus près de chez soi ou plus haut ou plus beau. Les ouvreurs partent de rien, un mur, des trous et des prises à visser. La subtilité d’une belle ouverture de voie est de créer un enchaînement de mouvements qui forme une réalisation cohérente, homogène dans la difficulté. Agréable à grimper et qu’on a envie de refaire. On pourrait faire une comparaison entre le pinceau et le racagnac. L’artiste peintre démarre lui aussi de rien. Une toile vierge, qu’il remplit petit à petit pour arriver à une œuvre aboutie. Après avoir ouvert des milliers de voies en salle, je pense pouvoir affirmer qu’un grimpeur qui ne s’inspire pas de la falaise est rarement longtemps un génie de l’ouverture. L’artiste peintre qui reste enfermé entre les quatre murs de son atelier ou devant son ordi peint rarement de magnifiques toiles de forêt ou de paysage de montagne ». À plus de 60 ans, Marc ouvre encore du 8a dans ce dévers qu’il connaît par cœur. C’est un de ces spécialistes qui arrive à s’imaginer chaque préhension et chaque positionnement, à sentir l’intensité du mouvement, sans devoir grimper la voie qu’il a conçue. La plupart des ouvreurs sont des grimpeurs expérimentés, qui dédient une belle partie de leur vie à tout ce qui touche à l’escalade. Grimper beaucoup soi-même, en salle ou en falaise, ouvrir, entraîner, coacher, équiper, échanger, rêver…, et l’ouverture de voies est une manière de partager ses connaissances, son savoir-faire, sa passion. Il y a l’exemple de Rob Denayer, champion de bloc, qui applique tout son bagage exceptionnel acquis sur le grès de la forêt de Fontainebleau, dans la création de blocs dans tous les styles qui deviennent des challenges, même pour les meilleurs grimpeurs du pays. « Ce que j’aime, c’est inventer des passages qui transmettent l’effort et les sensations que je ressens en grimpant dehors. C’est la seule activité créatrice où je ne suis pas nul et en ouvrant je peux partager mon flow et la beauté du mouvement avec les autres. Ouvrir est beaucoup plus excitant encore en compétition, parce qu’on est plus à la recherche des limites, tandis qu’en ouverture commerciale, on a tendance à arrondir tous les angles pour le grand public ». C’est aussi grâce à des gens comme Rob, qui ont un niveau et une expérience hors
du commun, qu’on arrive à organiser des compétitions de haut niveau comme des championnats de Belgique. Mais il ne faut pas toujours avoir un gros niveau, comme on a déjà remarqué : l’expérience et la maîtrise peuvent prendre le relais. Christian Rolfs, équipeur de Mozet, ex-entraîneur, ouvrait déjà lors des premiers championnats de Belgique au début des années 90, et en 2020 il bosse encore de temps en temps sur des compétitions de ce niveau. Pour Christian, « L’ouverture en compétition est un grand jeu complexe, très excitant et tout aussi aléatoire. L’extase ultime est de parvenir à créer une communication entre l’athlète qui exalte à travers l’expression de son savoir-faire dans des passages savants, et un public, surpris par le spectacle de la gestuelle et touché par le suspense de la compétition ».
La semaine prochaine, les grimpeurs reviennent, et ils ont très faim ! Heureusement, il y a aussi des femmes dans ce petit monde. Car l’ouvreur stéréotype, mâle et 1 m 80 pour 75 kg de muscles, a parfois un peu de mal à s’imaginer être dans le corps des autres. Nathaleigh Bell est cogérante d’une salle Black Box à Courtrai. « Pour moi, le bloc parfait est complètement unisexe, n’est pas morphologique (ni pour les petits, ni pour les grands), est légèrement complexe, mais permet quand même une bonne fluidité, fait travailler un maximum de muscles… Ça se passe en équilibre, mais aussi en puissance ! Le plus dur à l’ouverture est le travail sur commande. Chez moi, c’est une activité émotionnelle et il y a des jours où ça ne marche pas. Ouvrir des blocs spécifiques sur commande ou pour des compétitions est difficile, car on est limité par différents paramètres et par des objectifs à réaliser, on est moins libre, même si j’apprécie le challenge et l’excitation qui en dérivent. Je veux être capable d’ouvrir dans tous les styles, pour cela je pousse ma créativité aussi en travaillant mes points faibles (en ouvrant dans mon anti-style par exemple) ». Jan De Smit, son compagnon, bleausard tout comme elle, nous raconte ses 30 années d’expérience en quelques lignes : « Avant, l’escalade page 19
Ci-contre : Même pendant la chute, l’ombre du grimpeur ne lache pas les prises.
indoor était fort différente d’aujourd’hui. Les salles étaient des espaces d’entraînement pour s’exercer pour la falaise. Entre-temps, ce lien entre l’in- et l’outdoor s’est beaucoup restreint. L’escalade en salle, avec l’utilisation d’une énorme quantité de volumes et de grandes prises type macro, ressemble de plus en plus au skate free-style et au parkour. L’esthétique visuelle – la forme – des voies devient de plus en plus importante, plus que la gestuelle – le fond. Il faut avoir de l’empathie athlétique, car on ouvre les voies pour les autres. C’est génial de créer des œuvres temporaires, une matérialisation de mouvements potentiels qui amusent les grimpeurs et qui leur permet de se reconnecter à leur corps. Moi, je dirais qu’ouvrir c’est comme cuisiner. Je cuisine des voies et des blocs pour différents clients, qui ont tous un goût différent. En tant qu’ouvreur, on est toujours un peu anxieux de savoir si notre plat sera assez épicé pour monsieur ou madame. Certaines voies sont plutôt des desserts, d’autres des spécialités locales et d’autres des plats de résistance. On peut être un bon pâtissier, mais un ouvreur professionnel doit absolument maîtriser toute sa cuisine, certains grimpeurs ne veulent pas que des sucreries ! La semaine prochaine, les grimpeurs reviennent, et ils ont très faim ! ».
Avec l’expérience, j’arrive à ouvrir trois ou quatre voies et dix à douze blocs de qualité sur une journée. Un journaliste affirmait à l’époque des premières compétitions que « regarder un grimpeur progresser dans une voie est aussi passionnant que voir de la peinture sécher ». C’est exactement l’effet qu’un ouvreur recherche ! Un de ces pros de l’ouverture, un personnage peu connu dans la moitié sud du pays, est Michel De Vogel, un pompier anversois. Klimax, la plus grande salle de Belgique, tourne principalement grâce à lui. Sur les 20 années en tant que chef page 20
ouvreur à Klimax, il pense avoir ouvert entre 2 à 3 000 voies et un petit millier de blocs. Il a une centaine de compétitions à son actif. Ce qui est certain, c’est qu’il a passé dans sa vie beaucoup plus de temps à ouvrir qu’à grimper. « J’ai fait mes premiers pas en tant qu’ouvreur dans l’ex-salle indoor à Anvers, sous la tutelle de Christian Rolfs. Ensuite, avec l’ouverture de Klimax en 1999, tout est allé très vite, et en 2000 on organisait déjà les premiers Goldfinger – des masters internationaux sur invitation – qui ensuite se sont transformés en coupes du monde officielles. Je n’avais pas l’objectif d’en faire mon boulot. L’ouverture a un côté artistique, on crée une voie, qui ensuite sera appréciée et évaluée selon sa gestuelle et sa difficulté. On crée une émulation aussi, car, après coup, les gens discutent des voies, des passages, des projets, des difficultés… autour d’une bière ».
Il ne faut pas avoir peur d’innover, d’expérimenter, d’essayer, voire tout démonter si ça ne va pas, recommencer… Prendre des risques, oser ! « Concrètement, d’abord, on choisit un mur, ensuite on choisit ses prises et on définit éventuellement une ligne – on définit par quelles structures ou modules la voie idéale doit passer. Mais la plupart du temps, c’est seulement une fois pendu au mur que l’on réfléchit à la gestuelle et qu’on choisit parmi les différentes prises sélectionnées. Avec l’expérience, j’arrive à ouvrir trois ou quatre voies et dix à douze blocs de qualité sur une journée. Le soir, avant de m’endormir, je pense souvent aux voies et je visualise les séquences en cherchant des améliorations. En ouverture – que ce soit un 6a pour la salle ou une coupe du monde – tout doit être logique et cohérent : je travaille pour le plaisir du grimpeur. On ouvre différemment en fonction du public, mais on cherche à éviter à trop avantager les grimpeurs plus grands ou plus petits. Ne pas ouvrir toujours trop en force, ni trop retord ou hyper technique, il faut de tout et pour tout le monde. Il faut aussi rester créatif et lucide – arriver à estimer la dif-
Michaël Timmermans © 2018
Page précédente : La fabrication des voies.
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ficulté réelle des mouvements – jusqu’au bout, malgré la fatigue. Les compétitions restent les plus gros challenges, la cerise sur le gâteau, car c’est un travail de spécialiste et tout doit être parfait. Le but est de faire un classement parmi les compétiteurs et donc personne ne peut tomber au même mouvement. Et vu qu’on veut que les grimpeurs montent suffisamment haut pour se faire quand même un peu plaisir, le haut de la voie est très important. Les championnats de Belgique sont chaque fois un chouette défi, et, en équipe avec David, je sais que tout se passera bien et qu’on peut donc se concentrer sur l’esthétique et l’originalité des voies, en essayant d’innover le style et de surprendre les grimpeurs dès le premier regard jeté vers les voies. Car la voie parfaite est une voie sexy, qui propose du spectacle, mais sans être du cirque ». Dans l’autre extrémité du pays, on fait Escale à Arlon, une autre salle avec une équipe dynamique tout-terrain, qui propose aussi des voies exigeantes et de qualité. Cyril Lapka travaille là depuis un bon nombre d’années et nous partage ses réflexions sur son métier d’ouvreur. Il fait la comparaison avec la cuisine : comme un chef, l’ouvreur doit prendre le temps de sélectionner
ses ingrédients (= les prises) pour concocter le meilleur repas possible. Selon Cyril, « Comme pour tout processus créatif, l’ouvreur a différentes sources d’inspiration (blocs et voies, grimpés auparavant, compétitions, le caillou/ la falaise, des vidéos…), mais il doit y ajouter sa touche personnelle pour ne pas faire du plagiat ! Par conséquent, il ne faut pas avoir peur d’innover, d’expérimenter, d’essayer, voire tout démonter si ça ne va pas, recommencer… Prendre des risques, oser ! La philosophie de l’ouvreur doit être de ’’vouloir transmettre quelque chose’’. Par exemple, en ouvrant un passage en dièdre, il est important de le rendre accessible pour permettre l’apprentissage de la grimpe dans ce type de profil. Pour qui ouvrons-nous ? Ouvrir un ’’4’’ à sa propre taille a peu de sens, car c’est justement ce type de voies qui doit être adapté aux enfants. Un bon ouvreur devrait tenir compte du public pour lequel il ouvre, et pas juste partir dans son propre délire. Mais je pense qu’il existe clairement des ’’fautes de goût’’ selon l’inexistante ’’charte de l’ouvreur’’, des trucs à éviter : mélanger les nuances de couleur (ex. : du vert fluo et du vert foncé) dans une même voie/bloc, les remontées d’inversées pénibles (la salle n’est pas la falaise),
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DOSSIER INDOOR les prises traumatisantes (monos, bacs à bords tranchants…, même si ce type de prises existe de moins en moins), des successions de prises sans logique (ex. : une réglette, suivie d’un bac, puis d’un plat, et d’une pince…), le gauche-droite sur mauvaises prises plutôt que des mouvements complexes, les prises de pieds mal placées, etc. Liste à compléter ! Ensuite, il y a bien sûr l’aspect sécurité ; la sécurité et l’ergonomie de l’ouvreur qui travaille en hauteur, et la sécurité des autres personnes présentes dans la salle… Ceci est une tout autre histoire ! ». Pour les ouvreurs affamés : le livre de Jacky Godoffe, My keys to routesetting.
DAVID LEDUC
Ouverture en Structure Artificielle d’Escalade (SAE) YSALINE SACREZ Comment devient-on un ouvreur ou une ouvreuse ? Devenir un•e ouvreur•euse est avant tout une question d’expérience. La première étape est donc d’apprendre les bases et de pratiquer un maximum ! Vous pouvez apprendre cela dans la plupart des salles d’escalade. Cependant, dans un souci de sécurité et de reconnaissance, le CAB propose depuis 2019 une formation pour acquérir des connaissances et des aptitudes suffisantes, tant techniques que sécuritaires, pour ouvrir des voies et des blocs en salle. Car, comme le dit très justement le créateur de la formation Stéphane Van Lierde, « travailler en hauteur sur un mur d’escalade ne s’improvise pas ».
La formation « Ouverture sur SAE » en pratique Conditions d’accès :
• Être âgé•e d’au moins 16 ans • Être un•e grimpeur•euse actif•ive et confirmé•e depuis plus de deux ans • Avoir un niveau de minimum 6B en lead & 6A en bloc • Être affilié•e au Club Alpin Belge Prix : 200 € Durée : 18 heures + 10 heures de stage Pour les informations complètes, rendez-vous sur clubalpin.be/ouverture
Une bonne partie de la formation est donc consacrée à la sécurité et à la manutention qu’exige ce travail. L’ouverture de blocs et voies en tant que telle est bien sûr abordée, ainsi que la gestuelle qui s’y rapporte. Vous aurez aussi l’occasion de partager trucs et astuces avec votre formateur•trice, pour être plus efficace et pouvoir laisser place à votre créativité. Il est important de préciser que cette formation vous donne les bases pour ouvrir des voies et des blocs dans le cadre du renouvellement et de la gestion quotidienne d’une salle, mais vous ne serez pas compétent•e pour ouvrir dans le cadre d’une compétition régionale ou nationale. Pour ce faire, vous devrez acquérir plus d’expérience grâce à des stages et des séminaires. Vous trouverez toutes les informations sur ce cursus sur le site CMBel.be YSALINE SACREZ
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1987 Pour Terres Neuves, MARC BOTT Ce n’est finalement il n’y a pas si longtemps, 33 années, qu’Andy Warhol, Dalida ou Fred Astaire sont partis vers d’autres vies. C’est aussi en 1987, que naquit l’escalade à l’intérieur, de nos jours indoor, pour parler branché de ouf grave, ou grave branché de ouf, à vous de choisir. Mais pour l’heure, chut ! Laissons Jean de Macar, notre grand guide belgo-italien, vous raconter une très belle histoire. « Au début des années 90, je travaillais à la salle d’escalade Terres Neuves. Un jour, la porte s’ouvrit, et un jeune homme à l’accent parfumé de pastis et de lavande me demanda s’il pouvait visiter… Après un moment, il me confia être un représentant en matériel et prises d’escalade en visite à Bruxelles. Il ne pouvait résister à l’envie de découvrir “ le temple où tout avait commencé ”… Chaque fois que j’ai promené mes chaussons dans une salle d’escalade en France et en Italie, je me suis demandé ce qu’aurait été le monde des grimpeurs si Isa et Marc n’avaient pas inventé ce formidable outil sportif, social, culturel, professionnel, etc. Dans cet ancien dépôt de gants au cœur du quartier le plus populaire de la capitale virent le jour la première compétition d’escalade en salle, le premier cours d’escalade pour école, le premier bar de grimpeurs, les premiers ouvreurs, le premier cours de yoga esca-
Ci-dessus : Terres neuves rocher.
lade et bien d’autres choses qui aujourd’hui semblent presque avoir toujours existé. 33 ans après sa naissance, le 28 rue Terre-Neuve n’a jamais cessé de vibrer aux éclats de rires, aux débats passionnés et à la danse sur des voies dont la richesse est devenue référence. Terres Neuves, c’est le berceau de l’escalade en salle, mais c’est surtout Bruxelles avec sa simplicité, son charme, sa gentillesse et son authenticité. Lolottes et houblon s’y sont mariés dans une harmonie qui n’a d’égal que la mixité de ses adeptes ». Jean de Macar
Merci Jean, ta belle plume a résumé en quelques phrases cette aventure fantastique. Et pour répondre à la question de Marie Pierret (CAB) qui me demandait pourquoi Terres Neuves devenait un nouveau cercle de la Fédération – sous le nom d’Évasions Verticales – c’est pour tout ce que Jean développe dans son texte. L’envie de perpétuer cette passion qui nous anime depuis tant d’années et de continuer à transmettre au plus grand nombre le bien-être que l’escalade apporte à tous, que ce soit indoor ou outdoor. Ceux qui ont compris ça ne me contrediront pas… pour une fois.
MARC BOTT
Plus d’infos : clubalpin.be/club/evasions-verticales-1346 et terresneuves.be
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DOSSIER INDOOR
La sécurité en salle d’escalade ERIC BERTHE L’escalade en salle est de plus en plus populaire et semble aseptisée de tout danger. Elle n’est cependant pas sans risques et il importe de rappeler quelques règles de base pour minimiser les dangers.
Escalade de voies en moulinette1 • Ton baudrier, de moins de 5-10 ans d’âge, correctement tu placeras : bannis les vieux baudriers fluo des années 80-90 et les baudriers présentant des traces d’usure prononcées, place tes bonnes jambes dans les bons trous pour ne pas avoir une sangle ou le pontet torché, serre bien la ceinture au-dessus des hanches. Vérifie que les boucles d’attache sont correctement placées et en position bloquantes.
Les propos repris ci-dessous ne constituent qu’une introduction au problème, chaque paragraphe ou sujet traité pourrait faire l’objet d’au moins un article complet. Les encadrants des salles belges sont généralement bien formés, conscients des risques, et mettent tout en place pour informer les utilisateurs et prévenir les accidents. Il importe d’écouter les consignes propres à chaque salle et de les respecter. La lecture des bases ci-dessous ne dispense pas de suivre une formation plus complète dans les cercles ou les salles d’escalade. L’énoncé de ces quelques règles s’adresse à tous les utilisateurs, néophytes ou confirmés, parce que rien ne vaut une bonne piqûre de rappel, à intervalles réguliers, pour rester bien vacciné. Même si cela semble basique, les responsables des salles constatent quasiment chaque jour des erreurs plus ou moins graves.
• Encorde-toi avec un bon nœud de huit : même si tu es le champion du nœud de chaise, de bouline ou polonais inverse, privilégie le nœud de huit. Cela rassurera les encadrants de la salle qui pourront le vérifier facilement, même à distance, et empêchera les autres usagers de t’imiter sans avoir tes compétences. Le nœud doit être au plus proche du baudrier, bien serré,
1 - L’escalade en tête devrait faire l’objet d’un article complet séparé.
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idéalement avec les brins ne se croisant pas et avec un bout de corde qui dépasse d’au moins 15 cm ; attention : passe la corde d’encordement dans les bonnes boucles de ton baudrier !
• Vérifie que les deux brins de la corde ne sont pas enroulés en « sommet » de voie.
d’assurage, c’est bien3. Pendant la descente, les deux mains travaillent : une main manipule délicatement le système d’assurage pendant que l’autre tient bien la corde qui glisse dans la main. Évite de jouer à faire peur à ton partenaire avec une descente trop rapide, n’oublie pas qu’après, ce sera ton tour. De plus, cela préservera le matériel : les descentes rapides brûlent les cordes. • Ne grimpe pas avec un objet qui ne demande qu’à tester le principe de la pesanteur, comme un GSM dans ta poche ou même des dégaines ou un grigri pendus au baudrier : en cas de chute au sol, tu éviteras une blessure due à un contact violent avec l’objet et par la même occasion, tu auras l’air un peu moins ridicule sans des breloques inutiles.
• Avant de grimper, procède avec ton partenaire à un Partner check : tu vérifies qu’il a bien placé le système d’assurage et il vérifie que tu es correctement encordé. • Assure comme il faut avec un système à freinage assisté : privilégie un système type Grigri, Smart, Jul, Click Up… hautement recommandé en salle d’escalade2. Place la corde dans le bon sens et verrouille le mousqueton (vis) dans la bonne boucle du baudrier (pontet). Pendant la grimpe, reste attentif en suivant l’évolution du grimpeur, ni trop mou, ni trop sec, en tenant bien la corde qui sort du système d’assurage vers le sol, avec la main en pronation (paume vers le sol). Si tu n’es pas familier de la technique en trois, quatre ou cinq temps, ce n’est pas grave : si ta main glisse bien le long de la corde, entourant bien celle-ci (en « tunnel », avec le pouce entourant la corde), sans être levée plus haut que le système
3 - C’est encore nos voisins germaniques qui, avec les moyens et la rigueur qu’on leur connaît, ont montré, études à l’appui, que, si l’assurage à quatre temps enseigné depuis des années reste valable, il faut lui préférer la technique de la main en « tunnel ». Les vidéos référencées ci-dessus en font une belle démonstration. La principale raison de cette préférence étant notamment liée au risque de chute au moment où la main tire la corde en haut (entre le temps 0 et 1), mais aussi liée à la complexité d’apprentissage (tous les moniteurs ont pu observer le jeune grimpeur concentré sur son décompte de temps, au lieu de regarder le grimpeur, et dans ses grands mouvements de bras laisse des mètres de mou au sol, voire se trompe carrément de corde ou de main). C’est valable avec tous les systèmes d’assurage.
2 - Des études produites par les importantes fédérations allemandes, autrichiennes et suisses arrivent à la conclusion relativement logique qu’il est hautement recommandé d’utiliser des systèmes à freinage assistés comme le grigri et équivalent plutôt que des systèmes freinant comme le reverso ou l’ATC (on oublie le huit, qui est de toute façon à remiser dans les placards à souvenirs) ; ceci est valable pour l’escalade sportive : salles d’escalade et voies rocheuses équipées d’une longueur. Certaines salles européennes refusent d’ailleurs l’usage des systèmes freinant et ça pourrait (devrait ?) devenir la norme.
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• Laisse à la maison les artifices comme les bijoux (bagues, longs colliers, grandes boucles d’oreille) et les écharpes ou foulards qui ne demandent qu’à s’accrocher dans le système d’assurage ou aux dégaines et prises. Il en va de même pour les cheveux longs : si tu tiens à ton scalp, attache-les avant d’assurer, voire même de grimper ! • Ne te déplace jamais sous un grimpeur : il pourrait avoir oublié de respecter une des règles ci-dessus. • Évite de crier inutilement pour préserver les vieilles oreilles fatiguées de l’auteur de cet article qui grimpe parfois dans la même salle que toi.
Escalade en blocs • Ne te déplace jamais sous un grimpeur ! • Quand tu sautes pour descendre, vérifie quand même si quelqu’un n’aurait pas lu la première règle ; il en va de même lorsque tu vas tenter un bloc de coordi ou un jump oblique qui pourrait t’envoyer valser à plusieurs mètres : organise la zone d’atterrissage, au besoin fais-toi assister d’un commissaire de vol. • En tombant, au moment de l’impact, évite de laisser traîner un bras ou une jambe selon un mauvais angle : si tu n’as pas l’habitude, entraîne-toi à bien tomber de nombreuses fois avant de tenter des blocs durs ou engagés. • Pour descendre, préserve ton dos en désescaladant un peu avant de sauter : parole de vieux qui grimpe toujours en blocs. • Ne lâche pas tes enfants, ce n’est pas une salle de jeu, et n’hésite pas à remballer les enfants des autres, accessoirement tu leur sauveras peut-être la vie, mais page 26
surtout tu préserveras encore les vieilles oreilles de l’auteur. • Ne grimpe pas avec un baudrier, surtout si tu y as accroché un système d’assurage. Et préserve nos poumons : ne grimpe pas non plus avec ton sac à magnésie accroché à toi. Dans tous les cas, reste informé, lis attentivement les notices du matériel que tu achètes, fais preuve de bon sens et surtout, garde un œil averti et critique sur tes manipulations et celles de ton partenaire ; la distraction et la routine ont déjà tué des grimpeurs. Si tu ne sais pas ou si tu as un doute, évite d’utiliser un autre client comme moniteur : demande au responsable de la salle ! Stay safe et n’oublie pas que pour progresser, rien ne vaut la Force et le Style !
ERIC BERTHE
À visionner absolument : les excellents tutoriels vidéo de la DAV (Fédération allemande) sur l’escalade en salle ; disponibles en anglais, elles sont faciles à trouver sur le site de la DAV (www.alpenverein.de/sicherungsvideos) ou avec les mots clés « DAV Climb Safe videos ». Merci à PETZL pour les images sécu.
Loïc Timmermans / IFSC Climbing and Paraclimbing World Championships / Paris 2016 Je me rappellerai longtemps de ce mouvement ! En demi-finale des Championnats du monde, un mouvement de 360° qui demandait de l’engagement et du relâchement. Merci à mon frère d’avoir immortalisé ce moment…
aël
Mich
2016 ans ©
erm Timm
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D’une passion à l’autre LOÏC TIMMERMANS Après vingt belles années, j’ai décidé de me retirer du circuit international. C’est un choix personnel, que j’ai fait sur base du critère « plaisir ». Je me suis effectivement rendu compte que, si j’adore l’escalade et m’entraîner, les compétitions ne me procuraient plus autant de plaisir qu’avant. Et même si je me sens encore capable de progresser, il ne m’a pas semblé juste de poursuivre un projet qui ne me motive plus à 100 %. À l’inverse, je suis aujourd’hui très excité à l’idée d’ouvrir un nouveau chapitre de ma vie, cette fois en tant qu’avocat.
Remerciements J’aimerais commencer par remercier toutes les personnes qui, de près ou de loin, m’ont soutenu durant toutes ces années. Je pense tout d’abord à mes parents. Clairement, ce sont eux qui ont constitué mon pilier. Que ce soit au tout début pour me conduire aux entraînements et organiser des voyages afin de participer à des compétitions à l’étranger ; ou que ce soit, plus tard, dans leur présence discrète en compétition ou derrière leur écran, ils m’ont invariablement encouragé. Au début, je me souviens que leur présence en compétition m’était même indispensable. Et pour cause, à ma première compétition en leur absence, je me suis senti tellement perdu que j’ai raté toutes mes voies. Au fur et à mesure, nous avons trouvé un équilibre composé de mon autonomie d’une part, et de leur présence rassurante d’autre part. Ni trop présents, ni absents. Ni invasifs, ni indifférents. Pour tout cela, merci !
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1. 2005 : Arco podium Open jeunes : Me voilà à 10 ans sur la deuxième marche du podium de l’Open international à Arco (Italie). Je ne savais pas, à ce moment-là, que je terminerais ma carrière 15 ans plus tard à Briançon grimpant aux côtés de Domen Skofic 2. 2010 : Vienne Coupe d’Europe :
Les déplacements avec l’équipe belge, probablement ce qui me manquera le plus !
3. 2017 : Demi-finale Chamonix : Mon meilleur
souvenir de compétition avec un décor exceptionnel qu’est le mont Blanc et le public énorme de Chamonix n’ont fait qu’accroître le côté magique de ce moment.
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4. 2018 : Speed au Championnat du Monde
à Innsbruck : Si on m’avait dit il y a 10 ans que je me mettrais un jour à la vitesse… j’aurais bien rigolé ! Mais avec le combiné repris comme discipline aux Jeux Olymiques, je trouve un nouveau défi dans ma carrière. Finalement, la vitesse m’aura sorti de ma zone de confort et apporté que du plus ! Comme quoi, toute expérience est bonne à prendre ;-)
5. 2018 : Lolotte au Championnat du Monde
d’Innsbruck : Premier bloc de qualification du championnat du monde à Innsbruck. Je tente le tout pour le tout avec ce mouvement de « lolotte de l’espace ». Malheureusement ça ne passe pas. Mais je me suis donné à 100 %, c’est toujours le principal… Et puis la photo est comique !
Michaël Timmermans © 2018
Eddie Fowke © 2017
Je pense évidemment à mon entraîneur Christophe Depotter, qui m’a suivi dès l’âge de huit ans environ jusqu’à aujourd’hui. Des bases de l’escalade jusqu’aux petits détails du haut niveau, nous avons tout travaillé ensemble. Par son approche rigoureuse de l’entraînement, il a su me pousser à travailler dur pour atteindre mes objectifs. Dans son garage aménagé en salle d’entraînement, j’aurai passé, avec les autres grimpeurs du club, un nombre incalculable d’heures à tourner sur le mur comme des petits « rats de laboratoire ». Et le pire, c’est que j’adorais ça ! J’ai encore en tête son fameux « qui touche tiens », à savoir si tu arrives à toucher la prise, c’est que tu sais la tenir (et qu’il n’y a donc aucune raison d’abandonner). Par ailleurs, puisque chaque saison charrie son lot d’incertitudes, de questionnements, de blessures, de réussites et d’émotions en tout genre, c’est peu dire que nous avons traversé ensemble quelques épreuves. Et je suis très heureux et fier d’avoir parcouru tout ce chemin avec lui. Pour tout cela, merci ! Je pense à tous les grimpeurs que j’ai rencontrés et qui sont devenus de vrais potes. C’est grâce à eux qu’une absence de motivation pour un entraînement se transforme en une séance « fun », ou qu’un mauvais résultat en compétition est vite oublié par une soirée endiablée. Sans eux, ces vingt années n’auraient pas été aussi chouettes. Pour tout cela, merci ! Je pense aussi à toutes les personnes ayant fait partie de mon « staff ». Chacune d’entre elles m’a apporté quelque chose, a partagé sa vision du sport avec moi et a contribué à la poursuite de mes objectifs. Je pense notamment à Philippe Duboisdenghien, Olivier Verraver (et à l’équipe Moovia), Élodie Fally, Thibaut Vincent, Serge Pieters, Patrick Marsin et bien d’autres. Pour tout ce que vous m’avez apporté, merci ! J’aimerais remercier le Club Alpin Belge et l’ADEPS pour avoir cru en moi et m’avoir apporté leur
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soutien. D’une fédération peu impliquée dans le haut niveau lors de mes débuts, à une fédération volontariste et engagée aujourd’hui, son évolution a été considérable. Je sais que tous les pays n’ont pas la chance d’avoir une fédération si active, et je suis donc d’autant plus reconnaissant envers toutes les personnes qui la font vivre. J’aimerais également remercier les divers commanditaires qui m’ont apporté leur soutien et qui m’ont permis de vivre de ma passion pendant ces vingt belles années. Enfin, je remercie toutes les personnes qui m’ont suivi et apporté leurs encouragements. Cela m’a vraiment boosté, merci !
Mon plus beau moment Mon meilleur souvenir de compétition restera résolument ma première finale de coupe du monde à Chamonix en 2017. Outre le résultat, ce sont surtout mes sensations sur le mur qui m’ont fait vibrer. Je me sentais invincible, comme si rien ne pouvait m’arriver. Fort de cette confiance et avec mon objectif en tête, j’ai su simplement me laisser grimper et donner le meilleur de moimême. Le décor exceptionnel qu’est le mont Blanc et le public énorme de Chamonix n’ont fait qu’accroître le côté magique de ce moment.
Les moments difficiles S’il est agréable d’aborder ses meilleurs souvenirs, il est souvent plus difficile d’évoquer les moments plus difficiles. Pourtant, je suis convaincu que ce sont aussi ces moments-là qui m’ont permis de vivre mes plus beaux souvenirs. Les pertes de motivation, les blessures, les doutes ou encore les échecs sont autant d’épreuves à surmonter. Finalement, les réussites en sont d’autant plus savoureuses !
Les moments les plus insolites Tous ces voyages, compétitions et entraînements ont évidemment mené à quelques scènes insolites : grimper sur un mur installé pour les championnats du monde sur une plage paradisiaque à Singapour ; enchaîner une voie de qualification lors d’une compétition en Belgique en 25 minutes (avant qu’on n’impose une limite de temps) ; marcher sur un oursin à Nouméa (ouf, le jour après la compétition) ; tourner une vidéo
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d’escalade avec la chanteuse Noa Moon pour une émission de la RTBF ; faire la fête avec les autres compétiteurs dans une boîte de nuit en Chine ; manger des tentacules de poulpe qui s’agrippaient à la langue dans un petit restaurant en Corée du Sud ; se faire conduire au mur de compétition en voiturette de golf ; et j’en passe !
Un nouveau chapitre Un mois. Cela fait un mois, à l’heure où j’écris ces lignes, que j’ai prêté le serment pour accéder à la profession d’avocat. Ce nouveau chapitre, je l’ai préparé depuis un certain temps déjà. Et je l’attendais quelque part avec impatience aussi. Mon projet n’a jamais été de devenir grimpeur professionnel et de vivre de ma passion de l’escalade. Tout simplement parce que j’ai d’autres passions. J’ai en effet pris énormément de plaisir à suivre mes études de droit et j’ai toujours su que, tôt ou tard, je voudrais entrer dans la pratique. Après un mois, je pense déjà pouvoir affirmer être passé d’une activité remplie de challenges à une autre. Je découvre ce métier comme j’ai découvert le monde de la compétition étant petit, à savoir avec énormément d’envie et de motivation, mais aussi des doutes et des appréhensions. Je suis donc impatient de vivre ce nouveau chapitre, d’apprendre encore davantage sur moi-même et de continuer à me faire plaisir.
Prenez soin de vous, amusez-vous et à bientôt j’espère dans une salle d’escalade ou ailleurs ;-)
LOÏC TIMMERMANS
Tijl Smitz :
Palmarès de onze années de compétition : • 2019 : World Cup Inzai, 7e • 2018 : World Championships Innsbruck, 13e • 2017 : World Cup Chamonix, 5e • 2016 : World Championships Paris, 13e • 2015 : World Cup Briançon, 10e • 2014 : World Youth Championships Nouméa, 2e • 2013 : World Youth Championships Central Saanich, 9e • 2012 : European Youth Cup Kranj, Linz & Moscow en Or • 2011 : European Youth Cup & Kranj en or, première en senior à Puurs, 23e • 2010 : World Youth Championships Edinburgh, 2e; EYC Veliko Tarnovo en Or • 2009 : Première European Youth Series, 5e (du premier coup)
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« Loïc Timmermans, athlète de haut niveau en escalade sportive, a officialisé son départ de la compétition. À 25 ans, le Bruxellois a décidé de troquer le t-shirt contre la toge après une carrière bien remplie au sein de la Belgian Climbing Team. Le mardi 1er septembre, il prêtait serment au Palais de Justice de Bruxelles en tant que candidat au stage d’avocat après de brillantes études de droit menées en parallèle. Pour la Belgian Climbing Team, son équipe, c’est une page qui se tourne sur onze années de partage, bien que Loïc souhaite conserver des relations étroites en tant que « parrain » pour assurer une certaine transmission vers les jeunes. Le Club Alpin Belge et sa Fédération sont fiers de compter parmi leurs membres un jeune qui s’est épanoui dès cinq ans dans un sport de compétition avec fairplay, calme et sérénité. Il a toujours été un exemple dans la gestion de sa carrière sportive et académique. Loïc nous a offert de magnifiques moments de grimpe. » Rétrospective de sa carrière à voir sur https://cutt.ly/Xgz44aE
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Graines de champions En bonne voie vers les compétitions STÉPHANIE GREVESSE Malgré ces temps chahutés, qui ont vu l’annulation de nombre d’événements sportifs, la Belgian Climbing Team continue sa préparation pour les futures compétitions internationales en 2021. Cet été, elle a notamment participé à des camps d’été et des jeunes ont rejoint ses rangs. Focus sur deux de ces graines de champions ! Ils ont 13 ans et des rêves plein la tête : Julie Verbeelen et Alexandre Noël sont deux jeunes recrues de la Belgian Climbing Team. Tout petits, ils grimpaient sur « à peu près tout » et leurs parents, médusés, leur ont fait découvrir l’escalade en salle pour grimper en toute sécurité. Cinq ans plus tard, les voilà sur les circuits nationaux et internationaux. Comment en sont-ils arrivés là ? Alexandre : « Les gens de l’équipe belge venaient à l’Escale une fois par an, je les admirais, j’ai toujours voulu rentrer dans l’équipe et j’ai tout fait pour être pris, je me suis donné plus en compétition, j’ai travaillé pour gérer mon stress et j’ai pu rejoindre l’équipe. C’était un de mes rêves ». L’envie d’arriver loin et les bons résultats de Julie lui ont également permis de rejoindre l’équipe. Tous deux s’entraînent environ cinq fois par semaine, entre une heure et demie et trois heures par séance, dans plusieurs salles, pour varier les plaisirs et la technicité. Selon les objectifs de la saison et les points d’amélioration à travailler, les échauffements divers sont suivis par des exercices sur le pan, des blocs et/ou voies – dont le coach se page 32
garde bien souvent de leur donner la cotation – et des circuits. Comme dit Julie : « Il faut de tout, pas juste être forts et avoir des muscles ». Le renforcement musculaire est donc aussi au programme pour travailler l’équilibre, la souplesse et l’agilité.
Bloc, lead, speed Alexandre a une petite préférence pour les voies, mais il regrette de ne pouvoir s’entraîner comme il le voudrait en vitesse. La Belgique ne compte en effet actuellement que peu de murs pour cette discipline. Le cœur de Julie balance plutôt vers le bloc : « C’est plus social que le lead : quand tu tombes en bloc, on t’explique comment faire et c’est beaucoup plus sympa ». Ce qui ne l’empêche pas d’être impressionnée par la performance de Laura Rogora en lead lors de la coupe du monde 2020 à Briançon.
L’escalade, mais pas seulement Si Alexandre a pu profiter du confinement pour s’essayer davantage à la falaise, qu’il apprécie de plus en plus (notamment à Berdorf où il a enchaîné un 8a+), Julie a tiré parti des beaux jours pour faire de la planche à voile et apprendre le kite surf. Elle nage également deux fois par semaine. Cet été, tous deux ont aussi participé au camp d’été de la Belgian Climbing Team qui s’est déroulé début août à Cologne, Braine, Puurs, Courtrai et Fontainebleau. Julie : « J’ai vu beaucoup de grimpeurs très, très forts et fait d’autres sports, j’ai appris beaucoup de nouvelles choses durant cette semaine ». Alexandre partage cet enthousiasme et a également été impressionné par les différents styles de voies, ouvertes par des ouvreurs internationaux.
Et puis, les cloches de la rentrée ont sonné… Gérer l’école et le sport de haut niveau n’est pas une mince affaire. « C’est assez compliqué », dit Alexandre, qui est en compétition environ un
Page précédente : Alex au Summercamp 2020 à Fontainbleau Ci-contre : Julie au Summercamp 2020 à Fontainbleau
La cour des grands Tous deux sont unanimes : rejoindre la BCT est une expérience enrichissante par la diversité des approches et des rencontres. Cela les stimule et leur donne davantage encore l’envie de se dépasser. Après la seule et unique coupe d’Europe jeunes de difficulté de la saison 2020, en septembre à Augsburg (Allemagne), Julie souhaiterait faire un meilleur résultat en compétition internationale, « peut-être une demi-finale, ce serait cool ! », avant de pouvoir un jour participer aux J.O. De son côté, Alexandre a lui aussi plusieurs objectifs, à commencer par « faire une finale en championnat d’Europe, puis être premier ». Puis pareil au niveau mondial, rien que ça ! Mais s’il aime par-dessus tout aller toujours plus haut, il sait aussi qu’il doit travailler dur : « Je dois améliorer ma gestion du stress, même dans la vie normale, sinon ça va me jouer quelques tours, et la rési en bloc ». Julie partage son avis : « En compétition, j’ai beaucoup de stress dans la première voie, je commence à trembler, surtout les nouvelles compétitions ». Dans ces moments-là, Alexandre s’isole, souffle dans sa bulle et pense probablement à ses modèles, Tomoa Narazaki, Adam Ondra et Sean McColl.
Une passion, ça se partage Pour le futur, Alexandre a un autre rêve : ouvrir sa salle d’escalade. « J’aimerais qu’elle soit vraiment très bloc pour les gens qui aiment et très voie pour ceux qui aiment ça, avec des modules et des voies dehors, pensée pour tout le monde ». L’escalade est une belle école de vie et de partage où les athlètes, formidablement soutenus par leurs familles, leurs coaches et toutes les personnes qui gravitent autour, font rayonner leur passion et inspirent des vocations. Le conseil de Julie : « Il faut toujours prendre du plaisir, sinon tu ne vas pas aller loin si tu n’aimes pas ce que tu fais. Donne tout ! ».
STÉPHANIE GREVESSE – CAB
Dominique Van Eyken © 2020
week-end sur deux. « Je gère ça avec beaucoup d’organisation : dès que j’ai du temps de repos, je fais mes devoirs, si je loupe l’école pour une compétition, je prends contact avec les profs pour qu’ils envoient les matières vues en mon absence et que je puisse me remettre à jour ».
Dernières compétitions en date : Au niveau national, le CAB a organisé des coupes de bloc belges sur son mur d’entraînement à Braine-l’Alleud pour chaque catégorie d’âge officielle IFSC (senior et junior les 12 et 13 septembre, A et B les 26 et 27 septembre). Elles se sont tenues à huis clos, avec masque obligatoire, respect des distanciations physiques et protections maximales des athlètes, juges, ouvreurs et coaches présents. Résultats complets sur www.cmbel.be/sport-climbing/national -competitions/ Au niveau international, la BCT a participé à la coupe du monde d’escalade à Briançon les 21 et 22 août 2020, et à la coupe d’Europe jeunes à Augsburg (Allemagne) du 15 au 18 septembre 2020, où Lucie Watillon s’est hissée à la 3e place du podium en A. Résultats complets sur www.ifsc-climbing.org Ce sont les seules compétitions officielles depuis le mois de mars. Mais la BCT a également participé aux championnats d’Allemagne et des Pays-Bas, et participera à d’autres stages durant les vacances d’autonome et d’hiver. À l’heure d’écrire ces lignes, les championnats d’Europe IFSC à Moscou sont maintenus et 3 athlètes de la BCT y participent : Chloé Caulier, Nicolas Collin et Simon Lorenzi. Espérons que les compétitions reprennent de manière normale dès début 2021. Les jeunes sont en tout cas en bonne voie… page 33
« Alors qu’elle est le lieu de naissance des premières salles d’escalade, la capitale de l’Europe est maintenant un retardataire en la matière, surtout en ce qui concerne le bloc. C’est dans ce contexte qu’un trio de grimpeurs, Stéphane Hanssens, Florian Delcoigne et Merlin Didier, a décidé de s’atteler à un projet de salle de bloc au centre de Bruxelles ».
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Bruxelles se débloc ! STEPH, MERLIN ET FLO « Super initiative les gars, hâte que vous démarriez un tel projet ! L’escalade de bloc est encore malheureusement sous-représentée dans la capitale, surtout en ce qui concerne le haut niveau. Merci d’avance à tous, et j’attends déjà l’inscription pour la fiesta d’inauguration ! »
C’est la 645e réponse à notre sondage que nous lisons et déjà notre cœur palpite… Comment est-ce qu’on va se débrouiller pour faire une fête à la hauteur des attentes de tout le monde ? Visser trois prises dans des planches trouées, ce n’est pas bien compliqué, mais faire la fiesta du siècle, ça, par contre… Bon, on va peut-être commencer par écrire un petit article pour l’A&A afin de présenter le projet, ce sera un bon début et ça nous laissera le temps de faire les flyers. Avant toute chose, permettez-nous de nous présenter : nous ne sommes ni des investisseurs, ni des promoteurs immobiliers et encore moins des hommes d’affaires… Nous sommes simplement trois grimpeurs passionnés, dévoués et ambitieux. On s’est rencontré il y a quinze ans, alors que Stéphane venait de créer son équipe d’entraînement « ClimbCool », Florian en faisait partie dès ses débuts et, comme c’était cool, Merlin les a rejoints un peu plus tard. Depuis cette lointaine époque qui était à l’aube de l’entraînement moderne en page 34
Belgique, notre passion et notre implication n’a fait que s’accroître. Mais bien que nous ayons fait maints voyages, aventures et expéditions aux quatre coins de la terre, nous finissions toujours par nous retrouver dans nos salles natales. Orelsan avait peut-être raison finalement… Passant le plus clair de notre temps à nous entraîner à l’intérieur, comme beaucoup de grimpeurs, nous avons souvent imaginé notre salle idéale ou même envisagé d’en créer une, mais sans jamais sortir du domaine du rêve. À Bruxelles, cela fait des années que l’on entend parler de projets secrets et que l’on espère que quelque chose voie le jour, mais hélas, rien à l’horizon. Sont-ce des rumeurs émanant de doux rêveurs (comme nous) ? On ne sait pas… Mais il semble que la capitale de l’Europe soit un milieu trop hostile pour la création d’un nouveau lieu de la culture verticale. Plutôt étonnant pour une ville dont toutes les salles sont pleines à craquer et qui fut jadis l’un des leaders mondiaux ! Doit-on vraiment attendre que Chris Sharma découvre l’existence de la Belgique pour qu’il vienne ouvrir un centre chez nous et qu’on ait quelque chose de frais à se mettre sous les doigts ? Finalement, un messie fait son apparition : Petite Île. Seize ans après la dernière ouverture de salle, voilà la première salle de bloc à Bruxelles ! Sans que l’on s’en rende compte, c’est probablement le premier déclic dans nos têtes : « Ouvrir une nouvelle salle avec une pure ambiance, une chouette équipe et dans un nouveau quartier, c’est finalement faisable ». Merci à eux pour l’inspiration !
Le deuxième déclic commence par « c » et finit par ovid19, orona ou bien encore onfinement ou onnard de virus. Bien que cette période ait mis les salles de grimpe à rude épreuve (et continue de le faire), nous avons pu la mettre à profit pour prendre le temps de penser à nos rêves, les mettre à plat et décider si nous voulions les vivre ou non. Mais avions-nous la même vision ? C’est beau de rêver chacun dans son coin, mais quand il s’agit de se marier autour d’un si gros projet, c’est pareil que sur un « big wall » : mieux vaut ne pas être dérangé par l’odeur des pieds de l’autre. Heureusement, nos trois profils et envies personnelles se sont avérés être plus que complémentaires :
Philippe Dufraisse © 2017
Ardennes & Alpes — n°206
Florian Ayant déjà travaillé sur plusieurs projets de salles d’escalade, il souhaite maintenant créer son projet idéal en essayant de pousser l’aspect durable du bâtiment autant que possible. Il sera l’expert pour les travaux et la structure de la salle. Il projette d’architecturer tout le palais en trois mois. Trois mois ???
Merlin Quant à lui, après avoir fondé et géré une agence de communication à Bruxelles pendant trois ans, sera en charge de l’identité et de la stratégie de communication. En gros, c’est lui qui dessinera les motifs pour les collants du staff.
Philippe Laurent © 2020
Ayant fraîchement tourné sa page de compétiteur international et à la recherche de nouveaux challenges tout aussi ambitieux, il a très envie, en toute modestie, de développer la meilleure école d’escalade du royaume. Il apportera son expertise pour l’entraînement des athlètes et la gestion des ouvertures.
Christophe Henry © 2020
Stéphane
STEPH, MERLIN ET FLO
Nous sommes encore à la genèse du projet, mais pour ceux qui souhaiteraient être tenus informés de son avancée, nous vous invitons à déjà nous rejoindre en suivant le lien ci-dessous et découvrir par la même occasion le nom choisi pour ce nouveau haut lieu bruxellois !
https://www.linktr.ee/c_b
Maintenant que vous en savez un peu plus sur notre Biographie, voici quelques infos clés sur le projet. • Quoi ? Une salle de blocs. • Où ? Là où il n’y en a plus... • Quand ? Début 2022 • Pourquoi ? Pour l’amour de cette passion qui est pour nous une source d’inspiration intarissable. page 35
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pécifique de à double écifique au relais
généraux + pécifique n du descendeur obloquant us ment des rappels
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S’initier et évoluer en escalade
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Avec les passeports du Club Alpin Belge
oir-Être Faire / SE : Sav ir / SF : Savoirice sportif·ve un·e moniteur·r on des acquis parminimum SAE ur iate init au moniteur·rice niveau par un·e ion globale du cateur SAE minimum ·ve de niveau édu
YSALINE SACREZ En salle (indoor) ou en falaise (outdoor), les passeports ESCA vous accompagnent tout au long de votre apprentissage vers une pratique autonome et responsable de l’escalade. Ils permettent d’attester les différentes compétences acquises à chaque étape de votre parcours.
Pour chaque acquis, il est spécifié s’il s’agit d’un Savoir, d’un Savoir-Faire et/ou d’un Savoir-Être. Dans un souci de clarté, viendra un léger mode d’emploi qui détaillera, de manière brève et précise, les différents acquis.
À qui sont-ils destinés ? Ils s’adressent à tout membre du CAB qui désire évoluer dans sa pratique personnelle de l’escalade.
Comment se les procurer ?
Indoor Le passeport Indoor est divisé en deux niveaux : Tope rope & Bouldering et Lead.
Outdoor Deux passeports distincts existent : le second de cordée et le premier de cordée. L’acquisition du passeport premier de cordée ne peut se faire que si le•la grimpeur•euse a validé le passeport second de cordée.
À NOTER • Ce ne sont donc pas des brevets, mais des attestations de progression de vos connaissances et capacités. • L’acquisition d’un niveau de passeport peut se faire sur plusieurs stages. • Les acquis d’un niveau doivent être maîtrisés pour valider le niveau suivant (les spécificités sont décrites sur les passeports). page 36
Vous recevrez et pourrez faire compléter votre passeport lors d’une participation à un stage ou une activité d’escalade organisée par un cercle de la fédération. Lorsque vous le recevez, n’oubliez pas de compléter l’encadré « Grimpeur•euse » et de signer en dessous.
Qui est habilité à les signer ? Seul•e•s les encadrant•e•s des stages concernés, valablement délégué•e•s par les cercles organisateurs et en conformité avec les directives de la fédération, peuvent approuver les acquis des passeports. Les acquis doivent être validés par un•e moniteur•trice sportif•ive de niveau initiateur SAE/SNE minimum.
Que faire lorsque mon passeport est complet ? Comme différent•e•s formateur•e•s peuvent intervenir dans votre parcours, le CAB demande que chaque niveau de passeport entièrement complété soit validé par un•e moniteur•trice sportif•ive de niveau éducateur SAE/SNE minimum. Dès lors, nous lui demandons de transmettre vos coordonnées à la fédération pour archivage et
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100 € de rabais PA
sur présentation de ce coupon* SS EP
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pour vous avertir de la mise en place de nouvelles formations.
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Et après ? Lorsque vous avez acquis et validé le passeport Indoor ou les passeports Outdoor, n’hésitez pas à vous renseigner sur les formations de moniteur sportif et, plus précisément, le premier niveau « Animateur SAE/ SNE ». Vous pouvez nous contacter pour plus d’informations.
YSALINE SACREZ
VINCENT HANRION
GRAPHISTE Fier partenaire du Club Alpin Belge depuis 2016
Infos : clubalpin.be/passeports-escalade
vincenthanrion@gmail.com * valable uniquement pour une première collaboration (nouveau client, première facture), non cumulable et valable jusqu’au 31 mai 2021, sur simple présentation de ce coupon par mail
La mia via è senza funivia En collaboration avec Mountain Wilderness Belgique et le Club Alpin Belge DAVID LEDUC Une petite pause « activiste » pendant l’enchaînement des cinq faces nord des Tre Cime. Un chouette projet commun. Sébastien aime la course acrobatique et l’escalade contre la montre, et moi j’adore galoper sur le rocher pourri. Du coup, on avait de quoi s’amuser : 1 750 mètres d’escalade dans la journée en passant par cinq voies classiques ; Cassin, Comici, Dulfer, Preuss et Innerkofler. Et puis, on avait tous les deux un message à partager.
C’est par hasard qu’on avait discuté ensemble du projet de la construction de nouveaux téléphériques dans les Dolomites : le fameux projet controversé « Super ski », qui projette de relier toutes les pistes et domaines skiables existants par de nouvelles méga-infrastructures, pour l’extase de l’industrie des sports outdoor et des inconditionnels du ski. Stimulé par les Jeux olympiques d’hiver à venir (à Cortina d’Ampezzo, en 2026), il y a beaucoup d’argent qui danse dans le ciel et qui veut se matérialiser en montagnes urbanisées. Les Dolomites, un Disneyland en altitude ? Mais qu’allons-nous chercher dans la montagne ? Du plaisir sur commande, garanti ou remboursé ? De l’entertainment, de l’estime de soi et de l’adrénaline dans des activités normées et sur des parcours artificiels sur-balisés ? O.K., stop, j’abandonne le ton activiste. Ça ne touche personne, à part les gens qui ont le même avis. C’est juste qu’à un moment, il faut pouvoir montrer qu’on est en colère. Silencieusement, intérieurement en désaccord avec un système, une toile invisible qui capitalise tout notre univers, jusqu’au tas de débris de pierre et de neige qu’on appelle « montagnes », jusqu’à la spiritualité devenue valeur marchande, jusqu’à l’escalade devenue un sport. page 37
Cima Ovest
Cima Grande
Punta-Frida
Cima Piccola
Cima Piccolissima
VIA CASSIN
VIA COMICI
VIA DÜLFER
VIA INNERKOFLER
VIA PREUSS
Aujourd’hui, nous défendons la nature « sauvage ». Celle qui ne vaut rien et qui ne sert à rien. Pour qu’il reste possible aux amoureux du vide de se fondre dans le cœur d’une paroi insignifiante, d’une pente Invisible ou d’un mont Pourri. Mais surtout, parce qu’il n’y a pas que nous, « les humains », à avoir une voix cosmique. La nature ne répondra jamais à notre anthropocentrisme que par le vacarme de tempêtes et la noyade de nos civilisations. Sans vouloir être biblique, je veux juste dire qu’il faut pouvoir assumer pleinement les distorsions causées par notre mode de vie, nos idéaux et nos saintes religions modernes. En étant honnête, on voit très bien les dégâts causés par chacun de nos mouvements et de nos actes, même ceux de bonne volonté et de pleine conscience. Pourquoi ne pas ralentir, découvrir le revers de la médaille, ajuster son quotidien et
Sébastien Berthe © 2020
Sébastien Berthe et David Leduc Lavaredo, Dolomites
ses perceptions à des découvertes personnelles, intimes, et ainsi s’éloigner du rythme et du débit de la société de consommation ? L’univers sauvage est aussi notre univers. Il n’y a pas que les montagnes à protéger. Il y a tout l’univers wild.
DAVID LEDUC Moutain Wilderness belgium.mountainwilderness.org www.mountainwilderness.org
Action collective de transition pour nos sommets (ACTS) « L’approche devient une aventure en soi » PAULINE FRANCOIS « Professionnels ou passionnés de la montagne, nous faisons le choix de nous engager de façon concrète pour préserver notre environnement. Développer notre sobriété, bousculer l’industrie, nous impliquer politiquement sont nos objectifs ».
Ardennes & Alpes — n°206
Ces quelques mots reflètent l’essence du collectif Action collective de transition pour nos sommets – ACTS, lancé en août 2020. Des hommes et femmes alpinistes, grimpeurs, trailers, écrivains, photographes et réalisateurs (parmi lesquels des têtes bien connues comme Kilian Jornet, Tommy Caldwell ou Stéphanie Bodet), s’accordent sur la nécessité de ralentir, de consommer moins, de repenser local. L’urgence climatique, matérialisée par la disparition des glaciers, l’effondrement de la biodiversité ou la consommation frénétique et prédatrice des ressources incite ces personnalités sportives à s’engager de façon concrète pour préserver l’environnement de la montagne. Un objectif majeur : réduire leur propre empreinte carbone de 10 % par an. En évitant soigneusement la posture de moralisateur ou de donneur de leçon (ce qui rend l’initiative beaucoup plus attrayante), ces passionnés de la montagne proposent une charte de dix engagements, qui guideront leurs projets et leurs actions, et nous invitent à les suivre dans cette aventure. Comme le souligne Nico Favresse, signataire de la Charte, « Le meilleur moyen de faire changer les choses est de les changer nousmêmes. En montrant l’exemple par des actions concrètes, nous nous engageons et nous inspirons d’autres personnes qui ont les mêmes aspirations et interrogations que nous »1. Ces dix engagements concernent le transport, la consommation, et la communication. Il s’agit, par exemple, de privilégier les aventures de proximité et les déplacements à faible impact carbone, de préférer le vélo et les transports collectifs aux transports individuels, de réduire la place de l’avion. Ainsi, l’approche devient une aventure en soi, une expérience aussi passionnante que le sommet. Un exemple ? Une équipe de huit Grenoblois a décidé de partir pour une expé au Kirghizstan… en train ! En remplacement de l’avion, tous les moyens étaient bons : bus, train, ferry et même skateboard leur ont permis d’appréhender des cultures différentes, de découvrir et croiser des univers. Ils précisent : « Nous avons réussi notre pari un peu fou de venir faire du Big Wall depuis la maison sans prendre l’avion. En plus d’avoir été une aventure supplémentaire dans l’aventure, nous avons gardé notre niveau carbone à un niveau décent, […] tout cela pour un budget
1 - www.acts-association.org
comparable »2. D’autres propositions portent sur les habitudes de consommation en recommandant, par exemple, l’achat de matériel d’occasion. La charte soutient également la promotion de récits mettant en avant les valeurs de partage, de curiosité et de connaissance des écosystèmes plutôt que la performance brute ou l’exotisme de la destination. Enfin, l’objectif est aussi de s’impliquer auprès d’associations, de conseils municipaux ou encore d’acteurs de terrain qui œuvrent à la préservation de l’environnement afin d’imposer la priorité environnementale aux dirigeants. Si la sobriété est prônée, il est néanmoins inconcevable de renoncer à l’ivresse des cimes, d’abandonner les voyages, d’éliminer a priori toute option « avion », et de rester chez soi… Il s’agit plutôt d’envisager l’aventure, cette formidable école de la vie qui nous construit davantage pas après pas, d’une autre manière. La montagne nous apprend à nous adapter, à trouver des solutions. À nous, maintenant, de créer une dynamique capable de changer durablement la situation.
Pour la petite histoire, nos régionaux de l’étape, Nico Favresse et Seb Berthe, ont décidé d’inaugurer leur engagement cet été. Ils ont quitté Briançon avec leur vélo, leur chien et quelques billets de train, et sont paris à l’assaut de la « Trilogie alpine » (Silbergeier au Rätikon, de Der Kaiser’s neue Kleider dans les Wilder Kaiser et End of Silence à Berchtesgaden), ce qui leur a permis de voyager au plus proche de la nature, à suivre dans les pages qui suivent !
PAULINE FRANCOIS
Toutes les informations concernant l’initiative ainsi que la Charte des dix engagements sont disponibles sur le site d’ACTS : www.acts-association.org ainsi que sur leur page Facebook www.facebook.com/ACTforoursummits
2 - L’odyssée des Changos Locos au Kirghizistan, du Big Wall sans prendre l’avion : alpinemag.fr/ odyssee-changos-locos-kirghizistan
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Un petit tour à et quelques gr Des zipettes, nos bicyclettes, des pédales, nos boules de poils…
Damien Largeron © 2020
SEBASTIEN BERTHE
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Je le regarde et tente de lui exprimer au mieux ma lassitude : il se trouve à quelques mètres de moi et insiste. Il commence à s’énerver. Je bâille et me gratte l’oreille avec la patte arrière pour exprimer mon mécontentement... Non merci, y en a marre ! C’est pas une vie de chien, ça ! Mon maître, j’ai beau l’aimer, m’être promis de le suivre jusqu’au bout du monde, mais cette fois c’est trop !
vélo andes voies ?
Non, je ne monterai pas dans cette charrette, un point c’est tout. Ouille…, il a l’air de vraiment se mettre en colère à présent… Encore rancunier sans doute de mon réveil à grands coups de langue : fort matinal certes, mais bien agréable de mon point de vue. Et puis merde, il fait vraiment dégueulasse dans cette région, c’est quoi tous ces orages ?! Vous ne vouliez pas aller en Méditerranée dans une voiture imperméable, comme tout le monde ? Un temps de chien, vous dites ? Quelle hypocrisie ! Je n’en connais pas un, de chien, qui voudrait sortir sous ces trombes d’eau !
Mince, on dirait bien que j’ai confondu l’introduction pour l’article que je devais faire pour Chiens et chats magazine et celle pour l’Ardennes & Alpes... Boh, ça fera bien l’affaire après tout !
Nico dans un beau rappel plein gaz après notre ascension victorieuse de Silbergeier, avec en arrière plan le massif du Ratikon
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Damien Largeron © 2020
Page précédente : Toute la bande recharge les batterie chez le grimpeur local du Wilder Kaiser : Guido Unterwurzacher Ci-contre : Les parois abruptes du Ratikon
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Vous l’aurez sans doute déjà compris : cette histoire est celle de deux chiens amateurs de leurs maîtres, de deux maîtres amateurs de leurs chiens et de varappe, le tout immortalisé par un photographe talentueux. L’objectif de l’aventure, inédit et ambitieux, est le suivant : gravir trois des grandes voies les plus exigeantes et les plus dures des Alpes au cours d’un seul voyage, chacune située dans un massif différent. Il s’agit de trois grandes voies d’anthologie ouvertes entre 1993 et 1994 par trois grimpeurs de légende, de difficulté et de longueur similaires (250 à 300 m pour des longueurs particulièrement soutenues et parfois engagées allant jusque 8b+). Chacune d’elles a son caractère et son style propre. J’ai nommé : « Silbergeier », concoctée par Beat Kammerlander, « Kaizers neue kleider », ouverte par Stefan Glowacs, et « End of silence », créée par Thomas Huber. En enchaîner une reflète déjà une belle prestation dans le monde de la grande voie, mais enchaîner les trois, au cours d’une seule saison qui plus est, est un tout autre challenge dont personne encore n’était venu à bout. Ah oui, il y a un petit détail supplémentaire qui pique les jambes : la mobilité douce... Pour effectuer les 647,8 km qui séparent ces trois parois, nous décidons d’utiliser ce qui reste certainement la plus belle invention du XIXe siècle. J’ai nommé : la bicyclette ! Soyons
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Damien Largeron © 2020
fous, changeons d’approche et tentons de montrer à la communauté des grimpeurs qu’il est possible de grimper dur et beaucoup tout en limitant nos émissions de gaz à effet de serre.
Pour effectuer les 647,8 km qui séparent ces trois parois, nous décidons d’utiliser ce qui reste certainement la plus belle invention du XIXe siècle. J’ai nommé : la bicyclette.
Qu’avons-nous emporté dans nos carrioles ? Il est clair que, pour ce genre d’aventure, vous devrez faire face au combat du moindre gramme… Un objet de plus, ou plus lourd, se traduit bien sûr par plus de watts sur les pédales. Il est donc primordial d’y faire attention, sans exagération tout de même ! À vous de choisir quel objet vaut bien quelques gouttes de sueur supplémentaires. Il s’agit de définir bien à l’avance quels grammes de confort sont à ajouter sur votre vélo pour arriver au sommet du col, plus épuisé certes, mais bien récompensé. En guise d’inspiration pour les curieux qui aimeraient se lancer dans une aventure similaire, voici la liste la plus exhaustive possible du matériel emporté sur nos trois vélos et deux charrettes.
• Un flamant rose en plastique. C’est ainsi que, un mois durant, nous avons grimpé et pédalé sous les encouragements et aboiements parfois excessifs de Bintje et Kroux, nos chiens préférés. Je voulais une vraie aventure ? Eh bien, les ingrédients y étaient : crevaisons, cols sous le soleil et dans la neige, multiples orages, trempés, séchés, retrempés, des bivouacs paradisiaques, humides, urbains, chutes de pierres, et chutes tout court, trempettes dans des lacs et rivières tous plus bucoliques les uns des autres (nous ne rigolons pas avec l’hygiène, cela reste notre priorité). Les douleurs aux mollets remplacent celles sur le bout des doigts et vice-versa. Une voie après l’autre, dans des combats épiques dignes des plus grandes batailles, au prix de couches et de couches de peau sacrifiées, nous sommes venus à bout de la trilogie alpine en trois semaines de temps !
SEBASTIEN BERTHE
Pour plus d’informations sur notre aventure, vous pouvez consulter nos pages Instagram ou encore le récit complet de notre aventure écrit par mes soins dans le dernier Grimper. Un film documentaire sortira également au printemps prochain.
• Une guitare (un single est d’ailleurs en cours de parution, soyez sur vos gardes). • Une tenue complète de vêtement technique : une fourrure, une doudoune, une veste imperméable, un t-shirt, un pull, un cuissard de vélo, un collant vintage, un short de plage, un slip et deux paires de chaussettes. • Une corde de 60 m, une tagline pour hisser le matériel, une corde statique pour les photos, dix dégaines légères + quatre rallongeables, un grigri, une micro-traction, un reverso, cinq mousquetons à vis, cinq paires de chaussons chacun (nous ne lésinons pas sur la gomme, premier facteur matériel de performance en escalade). • Une bouteille de schnaps en guise de courage et d’espoir à partager avec nos compagnons de route. • Quinze kilos de croquette pour chien, quelques aliments lyophilisés, un bon gros morceau de fromage, quelques plaquettes de chocolat, du gras, du gras, du gras… • Un kit de réparation, un appareil photo chacun, un drone. • Un petit matelas et un sac de couchage chacun, et un petit tarp pour nous abriter de la pluie. page 43
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The Manneken Trip
Putu Zed
ARNAUD MALDAGUE Gaia, mon monocoque de 36 pieds (11 m), file à du 7 nœuds, tandis que je m’engage dans le chenal de la Dominique. Ce sont quelque 40 km qui séparent l’île de la Dominique à celle de la Martinique, au sud. La journée fut belle, la navigation au départ de la Guadeloupe une partie de plaisir, mais le ciel s’assombrit…
Il n’est que 17h30, mais la nuit tombe vite dans les Caraïbes, il ne reste plus que 40 minutes de clarté. J’ai passé les deux dernières heures à regarder les orages au loin, tandis que Gaia, au soleil, évitait les grains. Le vent semble constant et je décide de ne pas réduire la grand-voile : « plus qu’une heure et demie à du 7 nœuds et je serai à l’abri, derrière le cap Nord de la Martinique ». Mauvaise stratégie ! Un grain mal identifié me rattrape, le bateau gîte, il devient difficile de contrôler la barre, même de tout mon poids. Impossible de prendre un ris dans ces conditions (baisser une partie de la voile), de plus mon vieux pilote automatique a rendu l’âme quelques heures plus
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tôt. Le vent, la pluie et les embruns giclent à travers le cockpit ! Une seule solution, faire une mise à la cape et laisser la tempête passer. Au bout de quatre heures de bataille, de prises de ris, de manœuvres, ainsi qu’une balancine cassée, j’atteins enfin la côte ouest de la Martinique. Je retiendrai la leçon : ne jamais sous-estimer l’effet Venturi dans un chenal ! Nous sommes le 29 septembre 2020, cela fait désormais 989 jours et 18 385 km que j’ai commencé « The Manneken Trip ». Une expédition non motorisée des Amériques du Nord au Sud, tout en changeant de moyen de transport. Un rêve un peu fou : parcourir l’Arctique canadien en ski de randonnée et ski-kite, traverser le Manitoba à vélo, descendre le Mississippi en kayak, pédaler à travers l’Amérique centrale, naviguer entre les îles Caraïbes à la voile, traverser l’Amazonie en pirogue et à pied, pédaler à travers le Pérou et la Bolivie, longer les Andes à cheval, avant de finir à pied en Patagonie pour atteindre le cap Horn. L’objectif étant de réussir un challenge sportif inédit, tout en changeant constamment d’élément et de pratique. Un retour à l’essentiel, à la nature sous toutes ses formes, un apprentissage constant, sans cesse sortir de sa zone de confort, découvrir, partager…
Ardennes & Alpes — n°206
Previously on the Manneken Trip L’expédition a débuté le 15 janvier 2018 depuis Kugaaruk, petite bourgade de 1 500 Inuits, nichée sur l’océan Arctique. Comme il n’existe pas de réseau routier au Nunavut, on y accède par avion ou par bateau, mais comme la banquise gèle huit mois par ans, l’on favorisera l’avion ! C’est plus rapide… Les plus braves rejoignent le village le plus proche à 350 km en motoneige, bien que personne ne s’y risque au plus froid de l’hiver. Mon harnais autour des hanches, je jette un dernier regard vers l’océan Arctique, et au loin ce que j’imagine être le pôle Nord. À partir d’aujourd’hui et pour les trois prochaines années, je progresserai vers le sud. J’imaginerai donc le pôle Sud ? Je tourne le dos à la banquise et trace mes premiers pas, c’est parti ! Nous sommes le 29 septembre 2020, cela fait désormais 989 jours et 18 385 km que j’ai commencé « The Manneken Trip ».
Il y eut des moments très forts, comme l’attaque de ma tente par un ours polaire en pleine nuit, ou le jour où j’ai enfin atteint le delta du Mississippi après 3 780 km de kayak. J’avais rarement été aussi heureux de voir la mer ! Et il y eut aussi des moments plus durs, comme le décès de mon grand-père, ou la perte du mât d’« Ægir », mon premier bateau, entre les îles Caïmans et la Jamaïque. Il y a aussi cette Covid, sur toutes les lèvres, que personne n’avait prédite, ralentissant encore plus cette partie bateau qui fut plutôt un challenge financier que sportif… Mais une chose est sûre, la réussite de chaque étape m’apporte une satisfaction indéfinissable. J’aime croire que j’en ressors toujours un peu plus accompli, apprenant de mes réussites comme de mes échecs. Derrière chaque expédition n’y a-t-il pas avant tout une recherche de soi-même ?
Arnaud Maldague © 2018
« J’ai dû me gourer dans l’heure, j’ai dû me planter dans la saison ! », car j’ai l’impression que ces images datent d’hier, bien qu’elles soient vieilles de deux ans et demi. Le Manneken Trip a pris un retard certain, mais l’expédition est bien vivante et tient ses promesses d’aventures, de découvertes et de nature. Chaque étape m’offre une approche totalement différente de l’expédition outdoor, un apprentissage continu dont je ne me lasse pas.
Nous sommes le 29 septembre 2020, cela fait désormais 989 jours et 18 385 km que j’ai commencé « The Manneken Trip ».
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Page précédente : Arrivée dans le village Inuit de Rankin Inlet. Des habitants m’apportent un chien pour m’aider à avancer. Page précédente : Paul Parthun lors de la traversée d’un lac de 25 km de large sur le Mississippi. La fumée des incendies des forets canadiennes nous a rattrapé. Ci-contre : Au sommet du Mont Pelé, volcan le plus haut de Martinique.
Jorane Berger © 2020
Suite
Appel aux dons : Le manque de financement est un réel frein à l’expédition, qui est encore et toujours autofinancée à ce jour. Si vous désirez soutenir l’expédition, vous pouvez le faire en faisant un don sur le compte PayPal du Manneken Trip :
Aujourd’hui, la voile touche (enfin) à sa fin, bien qu’il me reste la lourde tâche de revendre mon bateau dans un contexte économique difficile ! J’ai le regard tourné vers le futur et j’imagine déjà l’Amazonie, que je redoute et respecte tant. La partie dans la jungle est la seule pour laquelle je n’ai pu m’entraîner au préalable, faute de terrain de jeu européen. Ce sera donc un challenge de taille. L’objectif est de pagayer le Rio Branco au départ de Boa Vista, un affluant du Rio Negro, pour rejoindre Manaus au centre de l’Amazonie, avant de remonter le Rio Purus, vers la frontière péruvienne. Une diagonale à travers la jungle dans un contexte politique tendu, que j’espère achever en quatre mois. Encore faut-il que les frontières soient ouvertes, les certitudes se font rares de nos jours. L’Amazonie dans la poche, et quelques milliers de kilomètres supplémentaires à vélo, je me préparerai mentalement pour le dernier gros challenge de cette expédition : l’équitation. Tenter de créer une harmonie avec deux équidés, afin de tracer un bout de chemin ensemble, le long des Andes. La réussite dépendra autant du choix des chevaux que de l’attention que j’arriverai à leur porter au quotidien ! J’espère que ces quelques lignes, trop courtes que pour parler réellement du projet, offriront un peu d’évasion au lecteur ! Bien que l’aventure se cache à chaque détour de notre vie, il suffit de tendre la main.
paypal.me/TheMannekenTrip ou en me contactant sur : arnaudmaldague@gmail.com pour toute collaboration. Si vous préférez mettre de l’argent de côté pour réaliser vos propres rêves, je serais également très heureux ! page 46
ARNAUD MALDAGUE
Liens de l’expédition : Facebook : themannekentrip.be L’évolution : livexplorer.com/themannekentrip
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LE COIN TECHNIQUE
Les chaussons Comment peuvent-ils devenir vos meilleures armes pour performer au plus haut niveau ? SÉBASTIEN BERTHE Ambassadeur Lecomte Alpirando Le chausson est sans nul doute le facteur matériel le plus déterminant en termes de performance. Plus le niveau de grimpe augmente et plus le choix du chausson va être important. Avec les années d’expérience, le choix de la marque n’est souvent plus une question. Le grimpeur de bon à très bon niveau sait très bien, et depuis longtemps, quelle marque lui convient le mieux. Il reste néanmoins un grand nombre de détails stratégiques, liés aux chaussons, à élucider. En voici une liste non exhaustive.
La taille des chaussons… est une question qui fâche, surtout à la vue de l’état des pieds des grimpeurs : tordus et des boules partout, odeur fétide mise à part. Lorsqu’on parle de performance, la réalité des choses est pourtant la suivante : un pied le plus serré possible pour une précision accrue et pour éviter des mouvements inopportuns du Ci-dessus : Sébastien Berthe / Céüse / 9a Lülü
chausson lors de contre-pointes ou de talons délicats. On parle donc communément de « tant que ça rentre, on essaye plus petit ». Certains utilisent même le papier plastique qui accompagne la boîte à chaussons en guise de lubrifiant afin de pouvoir entrer dedans lors des premières séances. On se retrouve alors avec des grimpeurs qui, chaque année, perdent une pointure jusqu’à avoir des différences de 4 à 5 pointures entre leurs chaussons et leurs chaussures de ville. Non, un pied ne peut pas rétrécir avec le temps, il devient simplement de plus en plus tolérant à la douleur. Sachez qu’il est tout de même important de garder des chaussons avec des pointures plus amples. Ceux-ci seront utiles lors de grosses chaleurs, pour s’entraîner, à l’échauffement ou encore en grande voie. Des pointures, des modèles ou encore une usure de chausson qui varient selon l’objectif. En fonction de l’inclinaison du mur, du type de rocher, du style des prises ou encore de la température, on se munira de tel ou tel chausson : un chausson rigide pour la dalle ou le vertical, un chausson plus souple ou plus asymétrique pour le dévers ou le bloc. On optera pour un chausson plus usé, ou plus confort lors de l’échauffement, en grande voie ou à l’entraînement, un tel modèle pour le pied droit, un autre pour le pied gauche. Les options sont nombreuses ! Plusieurs fois, il m’est arrivé de tester de multiples modèles différents pour une même voie avant de faire le choix optimal. Le grimpeur de haut niveau, tout aussi obsédé soit-il, pourrait sans doute même envisager de changer de paire au cours d’une voie si des prises de pied l’exigent et qu’un repos total le permet. Cela demande dès lors d’emporter suffisamment de modèles et de paires différentes pour pouvoir répondre à toutes les possibilités de mouvement qui peuvent s’offrir à vous au cours d’une journée de grimpe. Pour ma part, j’emporte régulièrement cinq paires de chaussons différentes lors d’une
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sortie en falaise. L’une pour l’échauffement, deux pour un premier projet, une dernière pour la fin de séance. Il est aussi important de noter qu’à l’instar de vos avant-bras, vos chaussons se fatiguent. Après 50 m de grimpe à pousser sur des micropieds, la semelle se ramollit, se déforme et aura besoin de plusieurs heures avant de reprendre sa forme initiale. D’où vient l’intérêt d’alterner de paire d’un essai à l’autre. À titre d’exemple, on se souviendra d’Adam Ondra qui, lors de son ascension du Dawn Wall sur El capitan en 8 jours, avait utilisé sept paires de chaussons neuves. Le souci du détail ! Entre routine et obsession, le grimpeur de haut niveau soigne son chausson comme la prunelle de ses yeux. Entre chaque essai, la semelle est poncée et limée avec du papier de verre, ou encore retaillée avec une lame de rasoir. Les chaussons sont gardés à l’ombre lors des journées chaudes ou dans la doudoune lors les journées plus froides. La gomme est frottée (addition de salive si nécessaire) jusqu’à tout propre, chauffée comme un pneu de F1. Dans un autre registre,
Lire Le petit arbre apeuré JEAN BOURGEOIS Voici un petit livre pour enfants étonnant à plus d’un titre. Déjà le titre, qui est double, car il est bilingue français/ néerlandais. Le petit arbre apeuré est né d’une graine projetée par le vent sur un replat vertigineux, en pleine montagne. Ses peurs, ses combats pour sa survie, ses joies de surmonter les épreuves, en font un arbre qui découvre peu à peu la confiance en soi. Il sauvera même la vie d’un alpiniste emporté par une avalanche. Ce n’est donc pas un conte anodin, le sous-titre le précise bien : « Édifier les bases pour une attitude non violente » Son auteure, Pat Patfoort, est anthropologue. Dès l’âge de six ans, elle grimpe les rochers de Freyr
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Adam Ondra, encore lui, a pour habitude de noter sur ses chaussons différents mantras, encouragements ou astuces techniques qui lui permettent pendant la grimpe de se motiver ou d’exécuter correctement un mouvement clé.
Bref, les astuces sont nombreuses, et ne demandent qu’un peu de jugeote et de créativité. Bien sûr, pour les mettre en pratique, il en faut des chaussons, et c’est donc loin d’être idéal tant pour le respect de l’environnement que pour celui du portefeuille. La encore, des options existent : utilisation jusqu’à la fin de vos paires pour l’échauffement ou entraînement, ressemelage des gommes usées, achat de deux paires simultanément afin de les alterner pendant les séances… À vos chaussons !
SÉBASTIEN BERTHE Ambassadeur Lecomte Alpirando
avec ses parents et fréquente avec eux la montagne. C’est la découverte d’un monde de toute beauté, mais rude pour qui veut s’y aventurer. Pat a consacré sa vie à diffuser sa vision non violente de l’éducation, de la gestion et de la prévention des conflits dans tous les domaines et dans le monde entier. Après l’écriture de plusieurs ouvrages, voici qu’elle offre ce conte délicieux. Dans son introduction elle invite les parents à le lire en compagnie des enfants afin de les préparer à affronter leurs peurs de manière constructive et, par là, de les rendre aptes à jouir pleinement de leurs potentialités. Magnifiquement illustré à chaque page d’aquarelles évocatrices, ce petit livre nous plonge dans un monde tellement plus fort que soi, mais qui peut apporter la sérénité et l’empathie. Pat Patfoort, Het kleine bange boompje – Le petit arbre apeuré, illustrations de Jannick Roosens, Soest, éd. Boekscout, 56 pp, format 16x24 cm, ISBN 978-94-640-3107-2. Adresse de commande : info@boekscout.nl Prix : 17,50 € (frais d’envoi inclus).
Ardennes & Alpes — n°206
Lire Envers et contre tout– Gouffre Berger 68 LAMBERT MARTIN, CLAUDE DE BROYER, PHILIPPE DELESCAILLE, ALAIN MARBACH, JO MARBACH « Comment se fait-il qu’une aventure pareille ait pu se réaliser, avec des gars aussi jeunes, des moyens très modestes et en plus dans des conditions exécrables ? »
Le gouffre Berger est l’Annapurna des profondeurs : après le premier 8000, il fut, en 1956, le premier – 1 000, fruit de trois années d’explorations obstinées conduites par le Spéléo-Groupe du Club Alpin Français de Grenoble.
la vie à Yves Peeters, 21 ans. Son sauvetage ardu, menacé par les crues subites et tumultueuses dues aux pluies diluviennes en surface, a tenu en haleine télés, radios et journaux qui suivaient sur place les efforts des sauveteurs, au rythme des rotations d’hélicoptères de la Protection civile française. L’angoisse de l’attente en surface, jusqu’à la délivrance, les photos et les titres chocs des quotidiens, on les revit bien sûr dans un des treize chapitres du beau livre tiré de l’aventure, “ Envers et contre tout ”. Mais il y a bien plus dans cet ouvrage choral, nourri des souvenirs, notes et photos d’époque des participants français et belges de 1968. Au fil des témoignages qui s’enchaînent jour après jour et parfois heure par heure, se tisse le récit très vivant et attachant de moments uniques qui ont à jamais changé l’existence de tous ceux qui les ont traversés. Une leçon de vie et de courage. La qualité graphique de l’ouvrage est à la hauteur de son contenu, tant mieux… » Steve Polus, « Le Wolvendael»
S’ouvrant au nord du plateau du Vercors, il attire depuis lors des spéléologues du monde entier, fascinés par sa légende, ses puits majestueux, ses vastes galeries, ses mystérieux siphons et sa « Rivière sans étoiles », tantôt calme et tantôt furieuse. Ce livre est basé de récits écrits sur le vif et sur les souvenirs des membres des expéditions belge et française de 1968, qui restent exceptionnelles à bien des égards. Les textes ont gardé leur forme originale, 22 protagonistes prenant tour à tour la parole pour raconter, comme ils l’ont vécue, leur histoire et celles des autres.
Outre son retentissement médiatique, cette aventure hors du commun aura un impact essentiel sur l’introduction et l’évolution des techniques modernes de la spéléologie en Belgique et ailleurs.
« […] en 2018, les survivants de l’aventure unis par une amitié à toute épreuve retournent sur place pour en fêter les 50 ans et font le serment de raconter enfin dans un livre les moments vécus au fond. Épuisants, passionnants, bouleversants, dramatiques parfois, car leur séjour sur et sous le plateau de la Molière avait été marqué par plusieurs accidents. Le dernier – une chute de quinze mètres à – 620 m – aurait pu coûter
Un superbe livre au format 24 x 24, 216 pages, comportant de nombreuses topographies et photos d’archives complétées de magnifiques photos récentes. Prix de vente : 30 € Où se le procurer ?
• Commande en ligne chez Librairie Spéléo www.librairiespeleo.com • Commande en ligne chez Éditions Nevicata, dans la collection Montagne, editionsnevicata.be • À Bruxelles, en prenant rendez-vous chez Lambert Martin, lambert@ateliermartin.be page 49
André Giraud
En 1966, J. Brunel, ayant décidé de donner une autre orientation à sa vie, m’avait recommandé, pour le remplacer, un jeune guide de Vallouise, un des fils de Jean Giraud, guide à forte personnalité, plein de sages fantaisies, d’humour et de capacités variées, véritable figure emblématique de sa vallée.
JOE DEWEZ André Giraud est décédé le 7 juillet 2020 à Vallouise, terrassé par une crise cardiaque.
Nous allions vite prendre conscience que ce « jeune » guide n’était pas sans références et qu’il représentait brillamment la nouvelle génération de guides.
Ironie : le 7 juillet est le triste anniversaire de la tragédie de l’aiguille Verte en 1964, lorsqu’une avalanche emporta quatorze guides et aspirants de l’ENSA. Ce jour-là, l’aspirant Giraud faisait partie des stagiaires, mais le destin l’envoya vers l’arête des « Ecclésiastiques »…
Né en 1941, il était, l’inventeur du ski extrême avant Sylvain Soudan et bien avant Patrick Vallençant, mais beaucoup moins médiatisé. Avec son comparse Clément, ils avaient leur technique : monter le couloir sans crampons, virer avec dégagement des deux skis (virage sauté). Après le couloir Davin, ce fut le col des prés des fonts en Guisane, la Barre Noire et la Calotte des Agneaux.
Georges Janty © 1968
En 1964, le « Rassemblement » d’alpinistes belges en Oisans a vu le jour. Il bénéficiait de l’encadrement de deux guides (A. Gauci et J. Brunel).
Puis, André s’est rangé des pentes raides pour mener sa vie de guide en authentique montagnard. En guide « amateur » : deuxième du couloir Chaud au Pelvoux, face nord du pic Sans Nom, première hivernale de la Fourastier à la face nord de l’Ailefroide, première de la face est des Bans, toujours considérée comme un « gros morceau » par les alpinistes modernes. Et avec André Gauci, dans le cadre du « Rassemblement », la première de la face sud-ouest de la Meije. Ils étaient accompagnés d’Émile Naomé et de Christian Martel. J’étais loin de me douter, en 1966, que notre collaboration allait se poursuivre pendant près de 40 ans avec une grande complicité. Très attaché au « Rassemblement » (devenu stage de Namur-Luxembourg) et à ses « Belges », il fut un guide et un conseiller très dévoué et très compétent.
Photo souvenir d’époque de la cordée qui a réalisé la première de la voie Gauci au pic du Glacier Carré de la Meije en 1968, dans le cadre du stage annuel du CAB Namur-Luxembourg en Oisans. Au centre, en bas : André Gauci, et en haut André Giraud, les 2 guides encadrant le stage. À gauche : Christian Martel, du CAF, qui devait réaliser une liste de courses pour accéder au probatoire d’aspirant-guide. À droite : Émile Naomé, très bon grimpeur du CAB Namur-Luxembourg de l’époque (pour la petite histoire, comme il habitait Ciney, il se présentait de façon « ironique » comme Émile Naomé de Ciney, ce qui a été repris textuellement dans certains topos). page 50
André Giraud est l’archétype du guide de l’Oisans, infatigable, silencieux. Sa montagne, il la connaissait par cœur, la fréquentait toute l’année, « que ce soit skis aux pieds, piolet à la main ou fusil à l’épaule », écrit Dominique Potard dans Skieurs du ciel, son ode aux as de la pente raide. Plus tard, il se tourna vers des enchaînements que sa rapidité lui permettrait de réussir. Ainsi, en 1972, il effectue la traversée RateauMeije en quinze heures avec… une cliente. Le milieu français de la montagne cite qu’il fit cette traversée avec une cliente belge. En réalité, cette traversée se fit dans le cadre du « Rassemblement en Oisans » avec Danièle Garnaud, seule participante française du rassemblement.
JOE DEWEZ
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