Ardennes & Alpes n°218

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Ardennes Alpes

#218 / 4e trimestre 2023



Didier Marchal © 2023

Ardennes & Alpes — n°218

édito Le 18 novembre dernier, le ministre des Sports de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) a révélé la liste des sportifs qui ont obtenu un nouveau contrat de sportif de haut niveau pour 2024. Pour les sports qui nous concernent, on notera que Chloé Caulier et Nicolas Collin (escalade), ainsi que Maximilien Drion (ski alpinisme) en font partie. Félicitations à eux ! Encore une livraison très riche dans ce numéro ! En voici un aperçu, dans le désordre… Vous allez découvrir les dernières aventures en date de nos amis de la Belgian Rock Climbing Team (BRCT) : récit de leurs ascensions dans les Alpes maritimes. Comme ils le rappellent très bien dans leur article, la BRCT est une équipe du Club Alpin Belge qui a vu le jour pour mettre en avant l’esprit d’équipe en escalade et encourager les performances outdoor de grimpeurs belges. Petit coup d’œil dans le rétroviseur sur le CAB’aret de septembre dernier. Vous verrez également que les chèvres peuvent se montrer particulièrement utiles et efficaces dans l’entretien de nos rochers ! L’ascension de l’Elbrouz pour Climb for Kids vous raconte le contexte et la réalisation de cet ambitieux projet. Les rochers constituent un de nos terrains de jeu. On vous explique un aspect indispensable pour pouvoir y grimper : le travail administratif qui comprend les conventions avec les propriétaires et les différents permis et autorisations. Vous comprendrez ainsi un peu mieux le rôle de notre Fédération dans ce domaine, ainsi que l’utilité des indispensables séances d’entretien collectif. Lucie Alexandre aborde un sujet pratiquement absent de la littérature de montagne, tout en mettant en

La Meije (et sa guirlande) depuis La Grave

pratique ses convictions pour le respect de l’environnement. Et en passant, un bel hommage au guide du groupe ! François Morsomme et Margaux Pirotte vont également dans le sens d’un plus grand respect de l’environnement : trip en vélo pour découvrir les falaises des Balkans. Bilan : 149 jours de voyage, près de 4.000 kilomètres à travers 9 pays, escalade dans 15 spots de grimpe européens et nombreuses rencontres de personnes inspirantes ! Plus près de chez nous, des montagnes particulières nous sont présentées par Micheline Dufert et Francis Pourcel. Ils nous expliquent aussi comment se perdre sur un GR ! Vous aviez pu lire il y a peu le projet un peu fou d’équiper un ancien viaduc pour en faire une salle d’escalade à ciel ouvert. On vous livre les dernières infos à ce sujet, en léger différé de Born, petit village niché entre Amel et Saint-Vith. N’hésitez plus : enfourchez vos vélos et rendez-vous y pour découvrir un superbe site d’escalade. Bravo à tous ceux qui se sont impliqués dans ce beau projet ! Et encore quelques autres articles que je vous laisse découvrir… Bonne lecture ! Je profite de l’occasion pour vous souhaiter, un peu à l’avance, de très belles Fêtes de fin d’année et le meilleur pour 2024 ! DIDIER MARCHAL Président du CAB

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À LA POURSUITE DU TRÉSOR D’ALIBABA PAGE 17

Emile Pino ©

2023

Il existe, aux alentours d’un petit village surnommé Aiglun, dans les Alpes maritimes, un immense mur déversant isolé du monde. Tellement perdu qu’on le surnomme la paroi dérobée. Au centre de cette face, une voie se dessine entre les colonnettes. [...] Elle porte un nom regorgeant de trésors : Alibaba.

Sommaire 3

Édito

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Rencontre avec les crêtes

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CAB’aret 2023 — retour sur la 5e édition

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Born climbing

À notre connaissance, aucune chèvre n’a encore enchaîné « wanted gratons » en sabots. Mais les prouesses qu’elles réalisent pour nous sont tout autant incroyables.

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Le Dock 79 & On my way asbl — Nouvelle salle d’escalade, nouveau cercle

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Bienvenue au Conseil d’administration du Club Alpin Belge !

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Mammut, le nouveau sponsor du Club Alpin Belge — Les cimes se rejoignent

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À la poursuite du trésor d’Alibaba — Une aventure de la BRCT

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Démarches administratives & falaise — La face cachée du travail nécessaire pour pouvoir grimper nos rochers

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Des bêtes à cornes — Pour entretenir Freyr

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Elbrouz 2023 — Le toit de l'Europe

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Règles alpines

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Lire — Un alpinisme d’aventures de Bernard Amy

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Les Chemins des Terrils à Charleroi — À l’origine de la Boucle Noire et de la Grande Dérive

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The balk’n’ climb trip — Une grande odyssée mêlant vélo et escalade à travers les Balkans

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DES BÊTES À CORNES

THE BALK’N’ CLIMB TRIP PAGE 45

Marga

ux Pir o

2023

L’accès avait beau être difficile et critiqué, nous avons décidé, pour Climb for Kids, de faire le choix de croire en l’Homme plutôt que d’accepter l’absurdité de quelques-uns. C’est ainsi qu’en juillet de cette année, nous nous sommes rendus en Russie, dans le grand Caucase, pour atteindre un nouveau sommet parmi les 7 : l’Elbrouz et ses plus de 5 600 m d’altitude.

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Baskav Tatyana

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ELBROUZ 2023 PAGE 31

5 h 00, le réveil sonne [...] Pas une minute à perdre, il faut se mettre rapidement en route. En effet, à cette période de l’année en Albanie, il est impossible pour nous de rouler passé midi, au vu des chaleurs étouffantes.


Rencontre avec les crêtes STEVE CAILLER – Texte & images

Essoufflés et écrasés par la pente, nos dos se courbent, nos mains accrochent le rocher, nos pieds s’ancrent dans le sol. Les appuis sûrs, nous nous extirpons de l’étroit couloir de pierres pour rejoindre une plateforme et nous encorder avec la bienveillance des bénévoles. Rassurés, le cardio redescend, nous nous redressons, observons la pente en contrebas puis levons les yeux vers le majestueux Chourum1 que nous allons traverser. La lumière est diffuse, les bénévoles souriants, les coureurs aux anges !

Plantons le décor ! Nous sommes en septembre, dans le massif du Dévoluy dans les Hautes Alpes au départ de la Grande Trace. Nous sommes quatre potes et notre supportrice préférée (#ontekiffClem’) arrivés la veille dans la station hôte du Super Devoluy. Nous sommes au pied de pâturages jaunis par l’été avec pour horizon des crêtes dessinées au couteau sur 360° (enfin, 180° si on est au pied de la barre hôtelière de la station). La course d’origine hivernale se déroule sur deux jours de +/- 25 km et 2 200 m de dénivelé positif. Le concept du ski alpinisme se retrouve sur la version estivale où les coureurs doivent courir en équipe de deux afin d’affronter les quelques passages

1 - Les chourums sont des cavités naturelles présentes dans le Massif du Dévoluy

Début de journée

techniques aériens qui nécessitent d’être équipé de son baudrier, de sa longe de via-ferrata et de son casque d’alpinisme. Nos objectifs sont simples : full challenge, full montagne et full amusement. C’est le D-day ! Levés à 6 h, top petit déjeuner avec la bonne ambiance qui va avec et on se rend sur la ligne de départ située à Agnière. Mini échauffement, check du matos, réglage du baudrier et de la longe, dernier stop toilettes, accolades et c’est parti ! Les jambes sont étonnamment lourdes sur les 3 premiers kilomètres en faux plat montant jusqu’à ce que l’on rejoigne une descente qui libère l’ensemble. On s’engouffre alors dans un canyon sur un single track en léger faux plat. Le soleil commence à réchauffer l’air et le cardio monte. On s’extrait du lieu en atteignant le premier passage technique où l’on se hisse sur des rochers glissants à l’aide d’une corde. On débouche alors sur les pâturages, à point grillés par le soleil estival, aucun arbre, des vues à couper le souffle, des crêtes, des crêtes et des crêtes qui nous donnent terriblement envie… Ce paysage ne nous quittera plus et on ne s’en lassera jamais. On gravit la pente, sur une ascension de 400 m de D+ et on atteint le premier Chourum de Soleil Boeuf. « – Rho ça déchire ! – Ouais, mais ça pique les jambes ! J’suis bien loin de mon 3’45 sur la promenade verte là ! » Passés le Chourum, on emprunte un single track sur balcon en vue de rejoindre le sommet du point culminant (« tête de vallon Pierra » à 2 500 m d’altitude). « – C’est moi où on ne fait que monter la ? ! – Vas-y ! Bâtonne ! On arrive… Enfin, bientôt ! » Sommet en approche signifie descente à venir… C’est alors full plaisir et plein gaz en descente dans un

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pierrier où l’on se laisse littéralement glisser dans la pente à 40 %… On freine comme on peut, les quadri sont en feu et les mains sont écorchées. Passé le premier ravitaillement dont les victuailles sont amenées à dos d’âne par les bénévoles, on part en direction de Rocher Rond, le sommet emblématique de la région. On traverse de nouveau des crêtes avec quelques passages vertigineux où l’on évite de trop regarder en contrebas. Le paysage est vraiment dingue, tellement minéral et vaste. À l’approche du Rocher, on observe et on suit les recommandations :

« Ici, on range les bâtons, on met le casque, on sort la longe, on s’encorde et on pousse sur les jambes pour grimper. » Le passage technique est bref, un peu trop peutêtre… mais nous permet de nous hisser sur le sommet du Rocher Rond. Il ne reste plus qu’à aborder les 10 derniers kilomètres de descente, agrémentés d’encouragements de bénévoles à se casser la voix, de pierriers avec des pentes toujours aussi dingues, des herbes hautes glissantes, des chamois affolés par l’agitation, des singles roulants où l’on s’amuse à relancer sans trop réfléchir au lendemain. Les jambes restent réactives et on s’amuse ! Ensuite… ? Bah on ne spoile pas ici, si vous en voulez plus, c’est à vous de terminer l’histoire (en prenant part à la prochaine édition par exemple) !

Enfin bref, tout ça pour dire que la Grande Trace c’est juste l’excuse parfaite pour prolonger un peu les vacances avec les copaines ! Et on vous y souhaite que du bonheur.

STEVE CAILLER De haut en bas : • Dans le Chourum • Photo prise sur Rocher Rond Versant Nord Vue de Tête De Plate Longue et de la crête qui nous a permis de rejoindre Rocher Rond • Dans le Canyon page 6



CAB’aret 2023 : retour sur la 5e édition L’ÉQUIPE DU CAB La cinquième édition du CAB’aret a pris ses quartiers à Freyr le weekend du 16 septembre 2023.

Cette année, nous avons mis en place une édition plus minimaliste en matière d’offre d’activités, cependant elles ont ravi les participants présents si on en croit les sourires affichés à la descente d’un death ride ou encore au détour d’un des nombreux lacets des sentiers menant aux pieds des rochers. Organiser un tel événement nécessite pas mal de préparation (autorisation administrative, signalétique, commandes, etc.) et de logistique. Amener tout ce matériel sur la plaine du bivouac pour une seule journée représente quelques milliers de pas les bras chargés. Déjà un grand merci aux bénévoles pour leur coup de main à la préparation, mais aussi à celles et ceux qui nous ont aidé·es lors du rangement. Comme pour d’autres activités de la Fédération, nous tentons d’appliquer les principes du développement durable dans notre démarche d’organisation de cet événement. Bien entendu tout n’est pas encore parfait, mais on peut aussi se féliciter des réussites. Voilà les points d’attention auxquels nous avons été attentifs pour l’organisation de cet événement : •

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Emprunter ou louer du matériel plutôt que de l’acheter (ex. pour le matériel de sono, les lumières, certaines tentes et tonnelles)

Acheter du matériel de récupération/réemploi, c’est notamment le cas pour le superbe chapiteau que nous avons acquis

Réutiliser le matériel de déco créé les années précédentes, lui-même réalisé avec des matériaux de réemploi

Gérer les déchets pour limiter ceux-ci et mettre en place un tri : il n’y a eu que 2,5 sacs de PMC récoltés et 2 sacs de déchets tout venant, les cartons et les bouteilles en verre étaient triés séparément

Alimentation : proposition d’un menu végétarien, achat chez des fournisseurs locaux (25 km max) et en bio pour une grande majorité des fournitures

Boissons : bières locales, softs artisanaux (un peu moins locaux puisqu’ils viennent de Leuven)

Utilisation de gobelets réutilisables

Mais il reste des marges de progression : •

Prévoir un mécanisme de collecte des mégots

Mesurer et limiter nos déplacements en véhicule thermique lors des phases d’organisation et de rangement

Mieux anticiper les quantités de nourriture et atteindre le zéro gaspillage

Travailler sur l’offre d’accès en mobilité active et covoiturage

Nous vous donnons rendez-vous le 14/09/2024 pour la prochaine édition ! D’ici-là, si vous avez des idées, des suggestions, l’envie de proposer une animation/un atelier, etc. n’hésitez pas à nous en faire part à communication@clubalpin.be.

L’ÉQUIPE DU CAB


TINA HENDRICKS Depuis peu, la liste des rochers du CAB compte un nouveau spécimen un peu étrange : dans le village Born, un pont ferroviaire désaffecté en béton a été équipé en mur d’escalade.

Vous l’avez peut-être vu passer dans l’Ardennes & Alpes de l’été ou sur les réseaux sociaux, en communauté germanophone, une nouvelle section locale du CAB, le KCO (Kletterclub Ostbelgien), a récemment équipé les 7 premières voies sur un viaduc de 19 m de haut, construit pendant la Première Guerre mondiale. Cet imposant pont marqué par des centaines d’impacts de balles et d’obus se situe entre Malmedy et Saint Vith, le long du Ravel, juste à côté de la bifurcation vers Vielsalm. Ce tout récent projet est jusqu’ici un réel succès et de nombreuses idées ont émergé afin de rendre cet endroit encore plus magique. Mais d’abord, tirons le bilan de l’aventure des derniers mois et essayons de le faire d’une manière qui puisse peut-être aider et inspirer des gens qui auraient envie de s’impliquer dans des processus similaires : Que faut-il donc pour réaliser un tel projet un peu fou ? Comme dit un dicton amical : « Il faut le vouloir, il faut y croire et il faut le faire ! » On vit dans un temps qui hérite de beaucoup trop de béton et d’histoires de guerre. Quel plaisir de transformer cet héritage en un lieu qui permet d’exercer des passions basées sur l’entraide, la connaissance de soi, le dépassement des peurs, etc. Évidemment !

Mais pour réaliser ce genre de rêves, il faut s’accrocher et croire que c’est possible et que ça vaut la peine, sinon on ne tient pas. Puis, surtout… Il faut le faire. Chose qui n’est possible qu’avec une équipe pleine de volonté et d’engagement, prête à prioriser le projet par rapport à de nombreux plaisirs possibles, à se taper des réunions le soir, à appeler, écrire, lire, organiser, et puis évidemment forer, coller, visser, pendant beaucoup, beaucoup, beaucoup d’heures, et ceci bénévolement. Ah oui, le fric. Ça aussi, il en faut pour qu’un tel projet puisse aboutir. Parlons-en, comme ça, c’est fait. C’est en effet un peu vertigineux de commencer à faire le calcul du prix du matériel nécessaire pour mener à bien un tel chantier. Ça chiffre très vite. C’est clair, il faut être inventif et identifier différentes sources de financement. Un facteur clé du succès était certainement le crowdfunding organisé pendant l’été, soutenu par le CAB. Nous tenons à remercier tous ceux qui ont répondu à l’appel au soutien. Sans votre aide, sans votre participation, le mur n’aurait pas pu être équipé et ça fait chaud au cœur de savoir que plus de 160 personnes ont pris le temps et fait le geste de nous soutenir.

Kletterclub Osbelgien © 2023

Kletterclub Osbelgien © 2023

Born climbing

Combinant particuliers, entreprises, associations (dédicace spéciale au CAB Bruxelles-Brabant qui nous a soutenu très tôt dans l’aventure) et fonds publiques, le bilan total de la récolte des fonds se chiffre à 30 000 €. On s’en sort avec une réserve d’argent et de matériel de notre première phase de chantier qui assure la suite. page 9


Prends contact avec nous, surtout si tu as de l’expérience dans l’ouverture de voies d’escalade (artificielles ou naturelles). Pour la suite, d’autres idées sont également dans le pipeline pour porter le projet plus loin : •

Équiper le site de manière à ce qu’il puisse servir à s’entraîner à différentes disciplines telles que la spéléologie, le dry tooling, la slackline, le canyoning, etc.

Aménager le lieu avec des bancs, etc. afin de le rendre encore plus convivial

Créer une section indoor du KCO

Créer une zone de bloc à côté du pont

Organiser un workshop de partage de connaissances interrégional pour rassembler de la main d’œuvre et surtout semer plus de projets de réappropriation de structures de béton dans plein d’endroits différents

Collaborer avec le monde du cirque pour organiser des spectacles aériens dans ce cadre extraordinaire

Si l'un de ces points te fait vibrer, n’hésite surtout pas à prendre contact avec nous via hello@kletterclub.be. Nous restons évidemment aussi toujours ouverts et reconnaissants pour des dons sur le compte en banque du KCO : BE64 7370 6807 5552. page 10

Kletterclub Osbelgien © 2023

Envie de te joindre à l’aventure ?

À part l’argent, pour qu’un tel projet soit un succès, il faut une bonne dose de chance. Mais vu que certain·es ne croient pas à l’existence de la bonne fortune, on peut dire que ça revient finalement à rencontrer au bon moment le plus de personnes volontaires et engagées possible. Par exemple, les extraordinaires Jacques Lenoir et Jeroen Kirchner. Rencontré complètement par hasard via un trajet blablacar, Jeroen, qui sillonne habituellement avec son van des contrées beaucoup plus ensoleillées pour équiper surtout du canyoning, a accepté de venir nous filer un coup de main pendant 2 bonnes semaines dans sa Belgique natale grisailleuse. Et Jacques, espérons qu’il ne s’en veut pas d’avoir proposé son aide après peut-être un petit verre en trop lors de l’anniversaire des 5 ans de la salle The Wall à Malmedy. En tout cas, grâce à ses compétences d’armurier, nos points d’ancrage peuvent participer à un concours des trous de forage les mieux nettoyés du monde de l’escalade et sa belle énergie a enchanté humains et animaux présents.


Tu en sors nourri de souvenirs inoubliables et impayables. Imagine, par exemple, qu’en pleine phase finale du chantier, différents médias te contactent, généralement vers 8 h 30 du matin pour débarquer une heure après. On s’est bien marrés à regarder le reportage sur le projet au JT de la RTBF pendant que l’équipe de montage de la vidéo était encore garée à 50 m.

Kletterclub Osbelgien © 2023

Quel bonheur aussi d’avoir pu compter sur Anja, Antoine, Arthur, Eric, Gérard, Gina, Jan, Julien, Joe, Madeleine, Max, Sebi, Stéphane, Thibault, Vaillant, & co… et n’oublions pas les différent·es voisin·es qui nous ont spontanément préparé à manger. En réalité, il y a tellement de personnes qui ont apporté leur pierre à l’édifice qu’on pourrait remplir toutes les pages restantes de ce magazine avec des anecdotes et remerciements. Mais résumons, la magie de ce type de projets, c’est de tresser tant d’histoires personnelles en un beau résultat commun.

Kletterclub Osbelgien © 2023

Citons aussi les super ouvreur·ses Aurélie Brouwers et Vincent Houbiers de The Wall, Karim Abene d’Evolution-Verticale, Marc de Decker qui est venu nous trouver avec sa moto, son t-shirt « Live more, worry less » et l’aisance de nombreuses années d’expérience et Mehdi Enjoui qui a fait un travail d’artiste malgré la pluie et l’apesanteur dans le grand dévers.

Ou bien le vieux fermier voisin, dont les mains surdimensionnées témoignent d’une vie pleine de travail très dur, qui interrompt son labour pour venir te féliciter, partager des souvenirs familiaux atroces de la construction du pont pendant la guerre et exprimer sa gratitude sur le fait que ce projet ait permis à l’histoire de cet endroit de marquer une tournure tellement plus joyeuse. Puis tu te balades lors de la fête d’inauguration du site et tu te dis que ça fait vraiment longtemps que tu n’as pas vu autant de personnes souriantes, aux yeux qui brillent de regards émerveillés, réunies ensemble. Et le lendemain, un père vient de Bruxelles avec son fils pour lui enseigner les manipulations de corde exactement à l’endroit que vous avez imaginé pour, et, dès lors, installé, et tu te dis que peut-être que la bonne fortune existe après tout.

Sur ces bonnes bases, une prochaine semaine de chantier collectif est déjà prévue du 29 mars au 5 avril 2024. Nous allons équiper plus de voies, dont des voies plus difficiles dans le toit qui se baladeront de manière organique sur la bâtisse et utiliseront les impacts de balles et d’obus, ainsi qu’intégrer des modules dans le mur (merci Itinéraire AMO !).

TINA HENDRICKS

Erratum copyrights article « Born to Climb » AA216 : • Panorama du village Born, © Michael Leufgen | Amel Tourist Info • Escalade au pont de Pérolles à Fribourg (Suisse), © Aurèle Nicolet

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Le Dock 79 & On my way asbl Nouvelle salle d’escalade - nouveau cercle LYDIE DESCAMPS & STÉPHANE DALLA-VERA Le Dock 79 est une récente salle de bloc en Province de Hainaut où a été créé On my way asbl, l'un des nouveaux cercles de la Fédération1

1 - Les autres nouveaux cercles vous seront présentés dans les prochains numéros.

Informations pratiques

Une salle de bloc mais pas que … Le Dock 79 est un parc de loisirs multi-activités situé dans un cadre naturel et protégé. Véritable lieu d’évasion et de dépaysement, le Dock 79 propose 5 activités sportives et ludiques pour une expérience inoubliable : une salle de bloc, deux terrains de padel tennis, deux téléskis nautiques, 11 parcours d’accrobranche, un aquapark et une brasserie.

De la salle de bloc … La salle a ouvert ses portes en octobre 2022. Elle occupe une superficie de 800 m², possède une zone de grimpe pour enfants, une zone d’entraînement avec Pan Güllich, des structures pour tous types de bloc (vertical, dalle, dévers, dièdre, arête, grotte) et deux vestiaires avec douches. Des cours et des stages y sont également organisés. Une équipe de plusieurs ouvreurs veille à l’équilibre et à la diversité des blocs proposés dans la salle, ainsi qu’à une rotation régulière des secteurs pour offrir challenge et plaisir à tous les grimpeurs.

… à la création d’un cercle Le Dock 79 aspire à développer une vraie communauté et à impliquer les grimpeurs motivés dans l’animation de sa salle. C’est dans cette optique qu’ils ont organisé leur première compétition le 15 octobre 2023, pour fêter la première année d’existence de la salle. L’événement était organisé sous forme d’un open ouvert à tous (3 h 30 pour un max de blocs) suivi de finales hommes et femmes. La compétition a rencontré un franc succès avec plus d’une centaine de grimpeurs dont plusieurs équipes provenant de salles belges et françaises. Des stands partenaires étaient également présents pour présenter leurs produits aux participants (magnésie, baumes réparateurs, etc.) et leur proposer des activités ludiques.

Adresse : Dock 79, Parc de loisirs Rue de la Hamaide 79, 7333 Tertre (Saint-Ghislain) La salle est accessible 7 jours sur 7 : •

La semaine : de 12 h à 22 h

Le week-end : de 10 h à 20 h

Site Web : https ://dock79.be/activite/bloc/ Contact : info@dock79.be

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La salle de bloc du Dock 79 souhaite promouvoir la discipline sportive. En devenant membre du Club Alpin belge, elle aspire à renforcer les liens de la communauté d’escalade et à contribuer aux initiatives de développement de l’escalade.

LYDIE DESCAMPS & STÉPHANE DALLA-VERA

Dock 79 © 2023

compétition de bloc pour jeunes à Dock79


Didier Marchal ©

Bienvenue au Conseil d’administration du Club Alpin Belge ! DIDIER MARCHAL & YANN LEFRANÇOIS Administrateurs du CAB Didier Marchal : Yann, pourquoi as-tu décidé un jour de devenir administrateur au Conseil d’administration du CAB ? Yann Lefrançois : Je suis membre du CAB depuis 2012. Pendant de nombreuses années, je payais chaque année ma cotisation pour profiter des nombreuses activités proposées par le CAB Bruxelles-Brabant et un jour j’ai décidé de passer de « simple » bénéficiaire des services de mon cercle à « acteur ». J’ai commencé par être administrateur dans mon cercle puis j’ai décidé de me lancer au niveau de la Fédération pour y apporter mon énergie afin d’aller ensemble plus loin (et notamment au sein des formations). Et toi, Didier ? DM : Je me suis dit qu’après avoir été un « simple » affilié du CAB, après avoir participé aux activités proposées par mon cercle, le CAB Namur-Luxembourg, je m’investirais bien pour donner un coup de main et aussi participer au développement de notre Fédération. YL : Ah ouais, comme moi ! Et donc, le moment est venu de solliciter de nouvelles candidatures pour renouveler une partie du Conseil d’administration.

Balade hivernale

DM : Exactement ! Nous cherchons des personnes motivées qui souhaitent réellement s’investir dans ce challenge. YL : Oui, des personnes qui représentent les différentes activités du CAB, que ce soit la randonnée, l’escalade ou l’alpinisme, le sport pour tous et la compétition, mais aussi la diversité de nos cercles. Le Conseil d’administration se veut être un reflet de notre société, en représentant la diversité des genres, des origines, des âges, en intégrant le handisport. La durée d’un mandat est de trois ans et les administrateurs·trices sortant·es sont rééligibles. DM : Alors, pour être candidat·e administrateur·trice, il faut respecter quelques points : •

être affilié·e à la Fédération depuis deux ans au moins ;

avoir 18 ans au moins ;

être présenté·e par un cercle qui est membre effectif de catégorie A de la Fédération ou par au moins trente membres (pas nécessairement du même cercle) ;

ne pas faire partie du personnel rémunéré par la Fédération ;

ne pas exercer d’activités de nature à porter atteinte aux intérêts de la Fédération ;

transmettre sa candidature par lettre recommandée à la poste ou contre accusé de réception, ou par courriel avec accusé de réception au plus tard le 31 janvier 2024 (la lettre ou le courriel de candidature est à adresser au président du Conseil d’administration).

YL : Oh là, ça me semble compliqué ! DM : Mais non, il suffit de lire attentivement ce qui précède et de me poser des questions si nécessaire (president@clubalpin.be).

On vous attend ! Bienvenue au Conseil d’administration du CAB !

DIDIER & YANN page 13


For the moments that make us


Ardennes & Alpes — n°218

MAMMUT : Un Géant de la Montagne ®

Pour les alpinistes, les grimpeur·euse·s et les aventurier·ère·s du monde entier, MAMMUT est bien plus qu’une simple marque d’équipement de montagne. C’est une entreprise dont le nom est synonyme de qualité, de durabilité et d’innovation. Fondée en 1862 en Suisse, MAMMUT a su s’imposer comme un leader dans le domaine de l’alpinisme, avec une gamme d’équipements qui allie performance et sécurité. ®

®

Le choix du Club Alpin Belge de s’associer à MAMMUT en tant que sponsor officiel est un hommage à l’engagement de la marque envers la montagne et les valeurs que nous partageons. Les alpinistes savent que chaque détail compte en haute montagne et MAMMUT incarne cette recherche constante de la perfection. Ils offrent une gamme complète d’équipements, des vestes et pantalons, aux cordes et aux sacs à dos, qui répondent aux besoins spécifiques des pratiquants de tous niveaux et de tous les sports de notre fédération. ®

Les cimes se rejoignent :

Mammut , le nouveau sponsor du Club Alpin Belge ®

®

Un Partenariat Prometteur Ce partenariat est une opportunité extraordinaire pour l’équipe professionnelle du Club Alpin Belge qui pourra bénéficier de l’expertise de MAMMUT , ainsi que de ses produits de haute qualité, lors des différentes missions que nous serons amenés à remplir. ®

Ensemble, nous gravirons de nouveaux sommets.

Lorsque l’on parle d’exploration en haute montagne, d’escalade, de passion pour l’aventure et d’un engagement envers la sécurité et l’environnement, le Club Alpin Belge est une référence de ces valeurs et tend à les mettre en oeuvre depuis sa création, en 1883.

MAMMUT ©

LE CLUB ALPIN BELGE

C’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que nous annonçons un partenariat qui renforce ces liens, unissant notre ® organisation à MAMMUT , une marque synonyme de qualité et d’innovation dans le monde de l’alpinisme et de l’escalade depuis des décennies.

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À la poursui

d’Alibaba

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te du trésor Une aventure de la BRCT Images d'Emile Pino

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Il existe, aux alentours d’un petit village surnommé Aiglun, dans les Alpes maritimes, un immense mur déversant isolé du monde. Tellement perdu qu’on le surnomme la paroi dérobée. Au centre de cette face, une voie se dessine entre les colonnettes. On raconte qu’elle est d’une rare intensité pour l’escalade et d’une unique beauté pour les grimpeurs. Véritable joyau des grandes voies, elle porte un nom regorgeant de trésors : Alibaba. En septembre, la Belgian Rock Climbing Team (BRCT) est partie à la poursuite de ce trésor.

La BRCT est une équipe du Club Alpin Belge qui a vu le jour pour mettre en avant l’esprit d’équipe en escalade et encourager les performances outdoor de grimpeurs belges. Au-delà de faire la promotion des performances individuelles, la BRCT a pour ambition de mettre en avant l’émulation, l’entraide et la bienveillance. Il s’agit d’apprendre à fonctionner ensemble pour que chacun puisse se dépasser et arriver à un tout qui soit plus que la somme des parties. Vous pourriez dire, rien de tel qu’une équipe homogène pour se simplifier la tâche, n’est-ce pas ? Et bien non, c’est un groupe des plus hétérogènes qui soit qui s’est formé. Que ce soit en matière de discipline de prédilection, de niveau, de style de grimpe, de style de vie et de centres d’intérêt, on y trouve tous les profils de grimpeur·euse·s. Il en résulte des envies variées que les membres de la BRCT doivent apprendre à articuler autour d’un projet commun : devenir une équipe qui perfe ensemble.


Après un premier trip de bloc dans le Tessin (Suisse) au printemps dernier1, la team était prête à s’engager dans une aventure quelque peu plus aérienne. C’est David Leduc qui, le premier, a évoqué l’idée d’aller voir Alibaba, la célèbre grande voie déversante. Après nous avoir partagé ses souvenirs et la perspective d’une performance de groupe, l’aventure nous a immédiatement tentés : « J’ai déjà fait quelques grandes voies à Aiglun, en 2016, dans la paroi au-dessus du petit village. Un jour, je suis allé me balader jusqu’à la “paroi dérobée” car je voulais voir la gueule du mur d’Alibaba. Un grand dévers “dérobé” du monde, dans un coin sauvage au-dessus d’une rivière verdonesque, sans aucune vue sur la civilisation, et en bonus 250 m de colonnettes. Parfait pour une petite aventure verticale ! J’ai toujours eu envie d’y retourner. La voie a été équipée et libérée par Philippe Mussatto. Un sympathique et légendaire bonhomme qui figurait parmi les protagonistes du haut niveau des années 90 et qui, plus tard, ouvrira toute une série de grandes voies exceptionnelles dans certains des plus beaux murs d’Europe et d’ailleurs. En 2002, il s’attaque à Alibaba avec un ami. Ils équipent la voie par le haut en descendant en rappel – pratique parfois controversée – mais qui leur a permis de connecter les plus belles portions de rocher pour en faire une œuvre unique de 250 m de grimpe exceptionnelle. Depuis, c’est devenu une classique dans ce niveau. Mais il n’y a pas tant de grimpeur·euse·s qui la réussissent à la première tentative, encore moins à la journée ! » C’est ainsi que quelques mois après la première évocation d’Alibaba, l’aventure démarre au départ de Bruxelles, où David, Sven Lempereur et Thomas Salakenos se retrouvent pour prendre le bus jusqu’à Paris, puis le train jusqu’à Nice. Après une journée de transport à regarder les champs de patate se transformer petit à petit en oliviers, ils rejoignent Eline Le Menestrel et son van, qui les aide alors à transporter les vivres et le matos de grande voie sur les derniers 100 km. L’équipe se complète finalement à Aiglun, où Florian Gourgue et Pablo Recourt dorment déjà à poings fermés après avoir trimballé deux haul bags et un portaledge lors d’une longue journée de stop, au départ de Gap. Bivouac sous le préau du village comme accueil, histoire de grapiller la moindre heure de sommeil pour entamer cette semaine de folie.

Jour 1 Le réveil pique tôt en ce dimanche matin et cette première journée s’annonce longue. Au programme : beaucoup de dénivelé, des mètres de corde statique, des litres de sueur, mais pas d’escalade. Le départ de la voie se trouve en haut d’un grand pierrier, accessible par une multitude de cordes statiques – à monter et à descendre – à environ deux petites heures d’approche du village d’Aiglun. Et malheureusement pour nous, personne n’a pensé à installer une fontaine dans ce coin si reculé. C’est donc char1 - ndlr : voir A&A 217

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gés de sacs pleins à craquer d’eau, de nourriture, de matos de bivouac et d’escalade que nous entamons la journée. Après un premier aller-retour qui nous fume les cuisses et un dernier gros plat de pâtes au parking, l’équipe se sépare en deux. Se séparer en deux ? Est-ce une bonne idée pour grimper une grande voie en équipe ? Hé bien la BRCT a concocté un plan d’attaque pour venir à bout de ces 8 longueurs déversantes et soutenues (8a, 8a, 7b+, 8a, 8a+, 8a+, 8a, 7c). Alors que Pablo et Flo partiront dès le lundi matin pour un push de trois jours équipés de beaucoup d’eau, de beaucoup de nourriture et d’un portaledge pour un bivouac tout confort au 3e relais, Eline et David feront le tour par le haut afin de repérer, équiper et mettre les cordes statiques dans les longueurs sommitales. Ils partiront aussi avec un portaledge qu’ils comptent déposer au 5e relais, en dessous du dernier 8a+. Il reste Sven et Thomas : Sven a pour objectif d’enchaîner en une journée et pense partir mardi matin. Quant à Thom, il attend David pour un push plus court, deux jours environ, en fin de semaine.

Bien installés au pied et au sommet de la voie, c’est sous un magnifique ciel étoilé que la team s’endort. Mais retournons à notre journée de portage : alors que l’équipe du bas profite une nouvelle fois de ce pierrier interminable et s’installe au pied de la voie dans un confort relatif, Eline et David, bien trop chargés, se perdent en tentant de trouver le sommet. Après pas mal d’errance, ils finiront par improviser un bivouac, bloqués dans le noir, obligés d’attendre le lendemain pour continuer. Bien installés au pied et au sommet de la voie, c’est sous un magnifique ciel étoilé que la team s’endort. Un calme plat après une journée pas plate du tout. Seuls un lointain bruissement d’eau dans le canyon en contrebas et les oiseaux nocturnes perchés sur le mur nous surplombant nous rappellent ce que nous faisons ici et les merveilles que nous nous apprêtons à découvrir demain.

Jour 2 Le sommeil fut assommant et le réveil est lent en ce lundi matin. Et pourtant, c’est une grosse semaine de travail qui débute. Il est temps pour l’équipe d’enfin décortiquer le mythe. Neuf heures sonnent quand Flo pose son chausson sur le premier pied de la voie. Encordé à Pablo et relié


C’est la beauté de la grande voie, la sensation unique de partager la réussite du binôme, dans un sport où la réussite est souvent intimement personnelle.

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à un sac de 60 kg, c’est un marathon qu’il démarre. L’objectif de notre première cordée est de découvrir, travailler et enchaîner les longueurs une à une et dans l’ordre, jusqu’au sommet. Elle effectue ainsi un repérage depuis le bas pour le reste de l’équipe. À peine le premier relais atteint qu’on entend une corde de rappel claquer à l’autre bout de la voie, tout là-haut : la deuxième cordée d’éclaireurs, David et Eline, a fini par trouver le sommet de la voie et entame le repérage des longueurs du haut. C’est un plaisir immense que de découvrir les longueurs progressivement, toutes les unes plus belles que les autres, et de décortiquer les méthodes : comprendre les sections difficiles, trouver les repos, les prises et les genoux cachés, et retenir le tout pour en faire bénéficier le reste de l’équipe. C’est ainsi que perchés au premier relais, Flo flashe Thomas dans la première longueur tout en assurant Pablo dans la deuxième, encouragé par Sven depuis le sol. Imaginez l’émulation ! La journée est longue et éprouvante, mais plutôt productive. Lorsque le soleil se couche derrière la montagne en face, seule la L4 (8a) n’a pas encore été explorée et les deux camps portaledges sont installés au R3 et R5. Pablo, exténué après avoir enchaîné les trois premières longueurs, s’en remet aux talents de bouilleur d’eau de Flo pour préparer les lyophi-

lisés. Tout prend une éternité sur un portaledges. Il faut calculer chaque mouvement au préalable pour s’assurer qu’un geste inattendu ne déséquilibre pas le tout et fasse valser les sacs de couchage (ou son partenaire de cordée) par-dessus bord. Arrivés tôt au camp, ce n’est que bien plus tard dans la nuit que nous pouvons enfin éteindre les frontales et profiter des quelques heures de sommeil que la voie veut bien nous offrir. Alors que la cordée Flo et Pablo ferme tout juste l’œil, on entend Eline et David préparer leurs couchages sur le portaledges du haut. Tout résonne ici et quand les « bonne nuit » retentissent, on ne sait plus s’ils viennent du camp de base au pied de la voie, des voix de la cordée du haut ou de l’écho de la caverne. La deuxième journée dans Alibaba a des airs de bataille et de serrage de coudes, des odeurs de sueur et de larmes, et des échos d’encouragements. C'est un grand jour pour l’un d’entre nous : Sven tente l’enchaînement à la journée. Il nous raconte : « J’ai directement eu l’idée de faire la grande voie à la journée, même si je savais que c’était très ambitieux car


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Eline a pour cœur de faire un repérage complet de la voie dans l’optique de revenir une prochaine fois et tenter l’enchaînement.



méthode de ma part me refait chuter ! Le témoin de la jauge d’énergie est allumé et le doute s’installe. Heureusement, j’ai mon joker Eline qui me remobilise et me pousse à prendre un long repos, un bon repas (enfin, des lentilles précuites dans un sachet en plastique) et à attendre que le soleil descende pour avoir de bonnes conditions.

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seul une poignée de grimpeurs avaient réussi ce challenge avant moi. Mais ce qui m’excitait le plus c’était cette inconnue de la réussite et surtout l’idée qu’un sacré combat m’attendait… et je ne fus pas déçu ! Après un réveil matinal (6 h), un petit déjeuner et un échauffement à la lueur de la frontale, les premiers rayons du soleil sonnent le début de la bataille. Le stress m’envahit car je sais que tous les runs comptent, que mon énergie est limitée et qu’il n’est donc pas question de perdre des essais inutilement. La journée précédente dédiée à l’assurage m’a beaucoup fait douter car j’ai pu voir les difficultés rencontrées par le reste du groupe. Pour être honnête, cela a bien hanté ma nuit. Malgré cela, je flashe les trois premières longueurs (8a/8a/7b+) et j’arrive vers 10 h 30 au troisième relais où Flo et Pablo ont passé la nuit. La L4 fut magique car personne ne l’avait essayée, il manquait des dégaines, le photographe était en place, David et Eline étaient au relais suivant pour prendre en main l’assurage, Thomas regardait le spectacle depuis le R2. Après avoir englouti une barre de céréales, je me lance : le début me semble très compliqué sur des prises difficiles à déchiffrer. Je comprendrai plus tard que mes méthodes étaient pourries. Après cette entrée en matière difficile, j’arrive dans un enchaînement de colonnettes, bien physique avec des genoux : je gère et j’enchaîne cette longueur, rejoignant le groupe du haut. Je sais que c’est maintenant que le succès se joue car plusieurs forts grimpeurs ont échoué leur push à la journée en tombant en haut de cette L5. Je m’élance donc dans ces 40 m et 80 mouvements. Malheureusement, je zippe à la fin du crux… La première cartouche s’envole et, avec elle de nombreux kilojoules d’énergie. Ça passe au deuxième run et me voilà sous la L6 vers 14 h. Ensuite, une incompréhension des méthodes me fait chuter en toute fin de L6 à mon run flash. Puis, un oubli de page 22

Ce 3e run est magique : la pression est énorme mais je rentre dans un état de flow et je marche sur la longueur. Le souci est qu’il fait sombre à présent. Mais c’est décidé : je ne descendrai plus. Quoiqu’il arrive, je sors la voie. La nuit tombe, cela fait déjà 12 h que je suis sur le mur. En allumant ma frontale, je déconnecte mon cerveau et m’enfonce dans ma bulle créée par ce faisceau de lumière. Tout devient naturel, cet environnement hostile me pousse dans une partie de moi que je connais, je sais que je vais répondre présent car cette situation m’excite et c’est avec une réelle facilité que j’enchaine ce dernier 8a (L7). Le dernier 7c, complètement à vue avec peu de dégaines, ne me pose pas trop de soucis et c’est avec une joie immense, décuplée par les cris des autres, que j’arrive en haut de ce monstre vers 21 h 30, soit 14 h 30 après le début de mon push. Au-delà de la performance sportive, du dépassement personnel, j’ai vraiment aimé grimper autant de mètres en autonomie avec mon sac, en passant de cordée en cordée et en prenant ce que chacun avait à m’apporter. La mise en confiance dans le début de Thomas, l’assurage nocturne de Pablo dans la dernière longueur, les méthodes de David, la psychologie et les encouragements d’Eline,… Après cette journée marathon, me voilà heureux et prêt à me mettre au service de l’équipe pour la fin du séjour. » C’est donc dans une ambiance de joie que cette deuxième journée s’achève. De leurs côtés, Pablo et Flo ont rejoint le deuxième portaledge au relais 5 après avoir tous les deux enchaîné la L4 (8a) et le la L5 (8a+) lors de combats mémorables. La fatigue commence à se faire sentir dans tous les muscles de tous les corps. Étonnamment, la nuit en portaledge devient alors un luxe après avoir passé la journée suspendus dans un baudrier. Au sol, c’est le méga luxe : le reste de l’équipe se retrouve autour d’un joli plat de semoule (comme tous les repas de cette semaine) !

Jour 3 Jour 3 sur le mur pour la cordée Pablo et Flo. Les muscles sont raides, la peau des mains brûlante, la fatigue mentale présente et l’escalade qu’il reste éprouvante. Mais la ligne d’arrivée est a priori au bout de la journée. Et ça, c’est une sacrée motivation ! Le mental est d’acier pour entamer la L6, le dernier 8A+. Un immense dévers avec une section soutenue sur colos, où l’erreur n’est pas permise. En combinant leurs efforts, nos deux grimpeurs finissent par trouver les méthodes les plus adaptées à leurs petites tailles. Et oui, la méthode David, c'est de tricher ! « D’ailleurs,


C’est décidé : je ne descendrai plus. Quoiqu’il arrive, je sors la voie. La nuit tombe, cela fait déjà 12 h que je suis sur le mur. c’est triché d’être grand » diront-ils écartelés entre 2 colos. Après un beau combat, Pablo enchaîne et c’est une nouvelle perspective qui se profile pour lui : le sommet d’Alibaba est à deux (plus faciles) longueurs (plus faciles). L’enchaînement devient tout à coup non plus une option, mais une obligation ! Flo quant à lui passe à deux doigts (littéralement) de l’enchaînement de cette longueur crux. L’émotion et la fatigue se faisant de plus en plus présentes, c’est dans ces moments-là que de bêtes erreurs surviennent. Il y a eu un nœud mal serré, une chute. Rien de grave heureusement, mais une belle frayeur pour les copains du dessous… Plus en contrebas, c’est la cordée Thomas et David qui entame leur push : deux jours sur le mur dans une optique d’enchaînement rapide. David ayant déjà repéré presque toute la voie en la descendant en rappel les jours précédents, il accompagne et prend sous son aile Thomas, qui est le poussin du trip. Aucune expérience en grande voie, tout à apprendre. Quelle ne fut pas sa frayeur lorsque, suspendu au deuxième relais, il fut assailli de bruits sifflants tels des rochers pleuvant du ciel. Des rochers ? Heureusement non, mais des cacas volants joliment empaquetés dans des sachets de lyophilisé passèrent non loin d’eux avant

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de s’écraser au sol. Baptême de grande voie assuré pour notre bloqueur préféré ! Hormis ce petit incident, cette troisième journée se déroule sans embûche pour nos grimpeurs. Alors que David et Thomas atteignent le portaledge du R3, c’est ce sont des cris de joie qui résonnent au sommet ! Flo et Pablo sont heureux de pouvoir étaler leurs affaires sans risquer de les faire tomber, et de dormir en étoile de mer chacun de leur côté, loin des pieds puants du compagnon de cordée. Et en prime, un enchaînement de l’entièreté de la voie pour Pablo, que demander de plus ? La vie et la vue sont belles tout là-haut !

Jour 4 Après sa première nuit en portaledge, Thomas marquera les esprits en cette quatrième journée de trip de par son évolution fulgurante sur le rocher. Accompagné par David, il ira jusqu'au sommet. Parti de rien, il a tout appris en quelques jours : « Je n’ai aucune expérience en grande voie, rien, le néant ! Je m’entraîne à la belge, à coup de circuits de résistance dans les pans, avec des sorties falaises pour transférer. J’évolue bien… jusqu’à cette sortie désastreuse à Kraftio, et cette violente commotion dont je me serais bien passé à une semaine du départ pour Aiglun. J’aborde donc le trip et ce push en pleine crise de confiance ! J’ai la marge physique dans les mouvements mais je grimpe trop mal, tellement crispé, et je regarde sans arrêt la corde entre mes jambes. Bref, l’enfer ! Décevant, je n’ai aucune chance d’enchainer. Mais en acceptant, j’ai su vivre l’expérience sans pression et en tirer un maximum. Je me repose sur l’expérience de David, il dégage une telle sérénité dans les longueurs et ça me calme. On évolue donc ensemble,

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je progresse dans ma grimpe et paradoxalement, au plus on monte, au mieux je me sens. Lui, avale les longueurs les unes après les autres avec une facilité déconcertante, presque insolente ! C’est la beauté de la grande voie, la sensation unique de partager la réussite du binôme, dans un sport où la réussite est souvent intimement personnelle. » Tandis qu’il aide Thomas à prendre progressivement son pied en grande voie, David perpétue au passage la légende du gardien de Freyr : discret mais invincible. C’est en toute dignité qu’il réalise le troisième enchaînement de l’équipe en seulement deux jours de grimpe ! Toujours aussi bluffant fieu ! Alors que la cordée bloqueur-mentor sort au sommet, Sven rend la monnaie à Eline et l’accompagne sur le mur pour l’assurer et l’encourager dans les plus belles longueurs. Eline a pour cœur de faire un repérage complet de la voie dans l’optique de revenir une prochaine fois et tenter l’enchaînement. Après de bons essais dans la L2 sous l’œil aiguisé de notre photographe Emile, la cordée rejoint le portaledge du R3. Dernière nuit sur le mur avant les derniers essais du lendemain.

Jour 5 Le jour cinq résume assez bien l’énergie qui aura régné sur la voie durant cette semaine. Sven pousse Eline à muerte dans la L4. Rehaussé par les cris d’encouragements venus du sol et du sommet, Eline passe à deux doigts de l’enchaînement de cette magnifique longueur à colos, sous les regards bienveillants de l’ensemble de la team. La fatigue d’une semaine sur le mur est bien présente, et c’est difficile d’être performant dans ces conditions. Mais la volonté est là et la motivation est d’autant plus grande pour la prochaine fois ! De leur côté, Flo et Pablo sont descendus du sommet et Flo prend sa revanche, en toute aisance, dans la L2 et la L3. Il ne lui manquera au final que la L6 pour atteindre la complétude. Préférant placer la team avant sa performance personnelle, il sera passé à un cheveux de l’enchaînement total. Mais c’est sans aucun doute grâce à son dévouement que Pablo aura pu atteindre le sommet. Alors, n’est-ce pas là qu’est la performance ?

1. Flo repère et calle les méthodes dans la L5. 2. Remontée sur corde qui pique le biceps, nécessaire pour voyager entre les relais. 3. Eline Le Menestrel 4. Confort le plus total au R3, perché à 120 m du sol. 5. David décontracte avant les hostilités de la L2, une longue envolée ultra rési. 6. Pablo dans la L4, après avoir passé la nuit en portaledge au R3 7. Le retour au parking, épuisé·e·s mais profondément heureux·se ! page 24

Chacun est d’accord pour dire que cette semaine avait un goût spécial. [...] Quelque chose d’unique est né, de solidaire, de belge. Après ces derniers runs pour profiter de la beauté d’Alibaba, il est temps pour l’équipe de laisser la voie tranquille et de la remercier pour les trois enchaînements qu’elle a bien voulu offrir, les incroyables mètres de grimpe partagés, et les milliers de souvenirs construits en équipe. Déséquipement de la voie et des cordes statiques, repliage des portaledges et portage du retour. Non sans peine, les sacs sont toujours beaucoup trop lourds. Le corps fatigué mais le cœur vibrant, c’est au début de la nuit que nous retrouveons notre préau préféré à l’entrée du village d’Aiglun.

Le retour Le lendemain, veille du retour à Bruxelles, le réveil est paresseux. Avant un bain à la rivière (heureusement que les odeurs ne voyagent pas sur papier), l’équipe débriefe sur cette semaine intense. On peut dire que le projet est une réussite. Autant en termes de performance individuelle (trois enchaînements sur six, plutôt saluable) que de réussite d’équipe.

Alors que ce nouveau projet du CAB a eu un peu de mal à trouver sa place à ses débuts, on sent qu’on tient quelque chose. Chacun est d’accord pour dire que cette semaine avait un goût spécial. Un goût d’entraide, de stimulation et de partage qu’aucun de nous n’avait pu rencontrer à ce niveau-là dans un trip d’équipe auparavant. Quelque chose d’unique est né, de solidaire, de belge. Nous nous sentons tous super reconnaissants envers le CAB d’avoir ouvert cette nouvelle porte vers un univers alors peu connu en escalade. Un univers qui permet d’exercer un sport à allure plutôt individuelle, à une échelle d’équipe. Il nous tarde de rêver ensemble, de grandir dans nos escalades et de rencontrer les futurs membres. Sur ce, on vous donne rendez-vous ici pour vous conter la prochaine aventure qui se profile en février. À bientôt ! PS : Tous les paquets de lyos aux senteurs acres sauvagement balancés depuis la paroi furent ramassés et rapatriés au village, laissant les narines des porteurs marquées jusqu’à la fin de leur vie.

BRCT


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Démarches administratives & falaise La face cachée du travail nécessaire pour pouvoir grimper nos rochers JOE DEWEZ - Responsable Rochers - CAB En cette période d’entretien collectif de nos rochers, la Fédération souhaite vous informer sur l'une des facettes du travail de l’équipe rochers. Cette fois-ci, il n’est pas question de technique d’équipement ou de purges de blocs instables, mais plutôt de vous présenter un aspect indispensable pour pouvoir grimper sur nos rochers, à savoir le travail administratif qui comprend les conventions avec les propriétaires et les différents permis et autorisations. Contrairement à ce que certaines personnes pensent, les rochers n’appartiennent pas à tout le monde … et ce n’est pas parce que je suis wallon et que les rochers sont en Wallonie que je peux y aller librement… En Belgique, le moindre mètre carré de terrain appartient à quelqu’un … et vous-mêmes êtes peut-être propriétaire de quelques mètres carrés. Le propriétaire peut être un privé, une société, la commune ou la Région, mais même si le propriétaire est une commune ou la Région, cela ne signifie pas que l’accès y est libre. L’espace public qui est accessible à tout le monde est en effet limité aux espaces de passage et de

Le saviez-vous ? L’entretien et la gestion des rochers en chiffres (2022) : • Une équipe permanente de 4 personnes (un peu plus de 2 ETP) • Un jeune du service citoyen pendant 6 mois • 18 massifs en gestion pour environ 1 700 voies • 19 journées d’entretien collectifs encadrées par l’équipe rochers pour 170 participants • 534 jour homme1 de bénévolat 1 - Unité de mesure correspondant au travail d'une personne pendant une journée.

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rassemblement comme les routes, rues, parcs publics, certains chemins forestiers, rivières, etc. Aucun rocher belge ne se trouve dans un espace public. Avant de pouvoir grimper sur un rocher, il faut donc avoir l’accord du propriétaire. Pour les sites gérés par le CAB (mais il en va de même pour les sites gérés par d’autres fédérations), celui-ci a conclu une convention avec le propriétaire. Ces conventions sont parfois à titre gratuit, mais le plus souvent un loyer y est associé. Pour le CAB, le montant annuel des loyers se monte à près de 39 000 € et il n'existe pas de subside ou autre ressource que les cotisations. Il faut ensuite obtenir un permis unique qui comprend le permis d’urbanisme et le permis d’environnement. À première vue, le lien ne semble pas évident entre escalade et permis d’urbanisme. On vous explique. Les broches installées pour sécuriser une voie d’escalade sont considérées comme « installation fixe » et donc soumises à l’obtention d’un permis d’urbanisme. Il faut alors respecter le plan de secteur qui limite les activités autorisées en fonction de la destination de la zone. Malheureusement, tous les rochers ont eu la malencontreuse idée de s’installer en zone forestière ou naturelle ou en zone d’extraction pour les anciennes carrières et pas en zone de loisirs, ce qui est la qualification de l’escalade. Il faut donc déjà obtenir une dérogation au plan de secteur en argumentant sur le caractère d’intérêt communautaire (pour la collectivité) de l’escalade. Il faut aussi tenir compte des contraintes en matière d’accès et de parking. Pour le lien avec le permis d’environnement, ça semble plus évident. La pratique de l’escalade, elle, est soumise à l’obtention d’un permis d’environnement. Pour obtenir le permis, d’autant plus que la plupart des rochers se trouvent dans des sites Natura 2000, il faut démontrer dans une notice d’évaluation des incidences que l’impact de l’escalade sur le milieu et en particulier la flore n’est pas significativement négatif. Confectionner le dossier pour une demande de permis n’est pas anodin, cela nécessite un relevé floristique et la proposition de mesures d’accompagnement pour limiter les effets négatifs et même favoriser la biodiversité qui est le premier objectif des zones Natura 2000. La confection de pareil dossier peut prendre quelques mois, puis ensuite plusieurs mois d’attente sont nécessaires pour évaluer le dossier et enfin recevoir la décision (qui n’est pas toujours favorable et nécessite parfois un complément d’étude ou un recours). Le permis d’environnement a une durée de validité de 20 ans alors que le permis d’urbanisme reste valide aussi longtemps qu’on ne modifie pas « l’installation fixe ». Les premiers permis d’environnement obtenus par le CAB datent de 2004 et concernent les Aiguilles de Chaleux, Freyr, Plain des Fosses, Corphalie et Beez. Ils arrivent donc très bientôt à échéance et il faut dès lors, dans les prochains mois, introduire les demandes de renouvellement. Sans ces actions « administratives » des fédérations, la pratique de l’escalade en Belgique serait interdite. JOE DEWEZ



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Des bêtes à cornes Pour entretenir Freyr STÉPHANE WINANDY - CAB À notre connaissance, aucune chèvre n’a encore enchaîné « wanted gratons » en sabots. Mais les prouesses qu’elles réalisent pour nous sont tout autant incroyables. On vous en parle ci-dessous.

formations botaniques particulières tout en minimisant leur impact sur le milieu. Ces milieux ne sont pas nécessairement faciles d’accès et l’entretien à la débroussailleuse n’est pas toujours le plus adéquat. Il existe d’autres solutions comme l’intervention de petits ruminants cornus !

Un partenariat avec Ardenne & Gaume

Des débroussailleuses qui tournent à la cellulose Les zones sommitales de nos rochers sont des milieux naturels particuliers et d’une grande richesse, qui font souvent l’objet d’une attention et d’une gestion spécifiques, dont les principes sont repris dans les conditions des permis d’environnement nécessaires pour pouvoir y grimper (cf article pécédent). Il existe plusieurs manières d’entretenir et d’intervenir dans ces milieux fragiles. Parfois, la méthode consiste à interdire la fréquentation de la zone et à réaliser un entretien ponctuel pour enlever les ligneux envahissants et les plantes couvrantes. Dans d’autres cas, ces milieux restent accessibles mais s’arpentent via un sentier bien défini. Là encore, un entretien ponctuel pour limiter la croissance des ligneux (arbres, arbustes, arbrisseaux) et des plantes couvrantes comme le lierre, les ronces ou la clématite est nécessaire et un un balisage précis permet aux promeneurs d’admirer ces page 28

Ardenne & Gaume est une association active en Wallonie dont l’action porte sur la préservation d’espaces naturels. L’association protège et gère plus de 800 hectares répartis sur 100 sites naturels remarquables en Wallonie et ce au moyen de méthodes de gestion adaptées comme le pâturage par des petits ruminants. Cette année encore, les chèvres d’Ardenne & Gaume étaient de retour à Freyr sur la pelouse des 5 ânes aux alentours du 15 septembre. Nous nous sommes entretenus avec Marc-Antoine Haeghens qui est chargé de projets Réserves naturelles dans le cadre de cette arrivée sur le site de Freyr. A&A : Peux-tu nous en dire un peu plus sur ce partenariat entre le CAB et Ardenne & Gaume ? M-A Haeghens : Depuis plusieurs années, nous mettons à disposition du CAB quelques chèvres afin de venir entretenir la pelouse sommitale du rocher des 5 ânes. En échange de quoi, l’équipe du CAB nous aide dans la gestion des zones d’accès difficiles dans la réserve naturelle de Furfooz située à quelques kilomètres de Freyr.


Les chèvres parcourent les pelouses sommitales de manière assez habile, les escarpements ne leur font pas peur. Quelle est l’action des chèvres sur les pelouses calcaires sommitales ? Les chèvres parcourent les pelouses sommitales de manière assez habile, les escarpements ne leur font pas peur. Elles broutent une partie de la végétation couvrante qui a tendance à fermer le milieu naturel et empêche le développement d’une végétation typique de pelouses calcaires1. Pourquoi faire appel à des chèvres et pas un autre animal? Le recours aux chèvres est intéressant car elles ont un pied un peu plus montagnard que les moutons et elles s’alimentent plus facilement de plantes plus ligneuses, voire épineuses, qui sont justement celles que nous cherchons à limiter à Freyr.

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La durée du passage des chèvres dépend de plusieurs facteurs. Notamment, si les conditions climatiques de l’année ont favorisé une croissance importante de la végétation, les chèvres devront rester plus longtemps. On parle d’une durée de 5 à 15 jours. À contrario, lors des années les plus sèches, il est arrivé de ne pas faire pâturer la pelouse. Amener les chèvres à Freyr demande une certaine organisation : il faut avoir assez d’animaux expérimentés et dociles (un groupe de trop jeunes animaux aura tendance à ne pas rester dans les limites fixées), il est nécessaire de clôturer la zone et de prévoir un abreuvement ainsi qu’une surveillance quotidienne. On remet le couvert l’an prochain ? Avec plaisir et si les chèvres le veulent bien !

Le CAB remercie Ardenne & Gaume pour cette collaboration, Marc-Antoine et son équipe pour l’organisation et les chèvres pour leur boulot. Ce projet n’est peut-être que la première pierre vers d’autres collaborations … Plus d’infos sur Ardenne & Gaume : https ://ardenne-et-gaume.be/

Quelle est la durée du passage des chèvres ? Et comment cela se met en place / s’organise ?

STÉPHANE WINANDY

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1 - Maintenir les zones sommitales ouvertes fait partie des mesures de gestion reprises dans les conditions d’octroi du permis d’environnement, si ce travail n'était pas fait par des chèvres, il devrait être effectué par l'équipe rochers.

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Elbrouz 2023 Le toit de l’Europe FERNAND SOUPLY

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Nous étions conscients de nous exposer à la critique et à l’incompréhension. Sans nous étendre sur le sujet, il est apparu assez clairement dans nos esprits que le boycott de cette région montagneuse n’avait que peu d’intérêt et que, pire, il aurait contribué à exacerber un peu plus les mauvais sentiments des personnes qui y vivent envers l’étranger, d’une part, et envers leur propre pays, d’autre part. Ces gens exception-

nellement accueillants ne demandent pourtant qu’une chose : partager leur amour pour leur montagne, leur région et leur culture. Les Hommes ne méritent pas de souffrir des décisions politiques prises loin de chez eux et sans qu’ils ne puissent exprimer leur profond désaccord. Ici comme là-bas, c’est l’incompréhension qui règne. C’est animés par une ambition de paix entre les peuples que nous y sommes allés. Un autre choix important a été posé : celui du sommet, parmi les deux. Car si les deux sont reconnus comme sommet de l’Europe (l’Elbrouz étant un volcan avec deux cratères), le sommet Est et ses 5 621 m d’altitude est celui qui se trouve être le plus intéressant dans le cadre de la pratique de l’alpinisme. Le sommet Ouest, quant à lui et malgré ses 21 m d’altitude supplémentaires, est devenu, au fil du temps, un lieu dédié au tourisme d’altitude et plus à la pratique sportive que nous affectionnons. On monte sur le second grâce à des télécabines, puis sur des motoneiges jusqu’à une zone très proche du sommet. Notre choix s’est donc porté, à reconnaissance équivalente, sur le sommet Est, gravi depuis la North Route. Plus sauvage et plus intéressant pour l’alpinisme. De plus, nous nous rendrons compte sur place que les conditions pour réaliser la traversée en sécurité du col d’Est en Ouest ne sont désormais plus réunies. page 31

Tatyana Baskava © 2023

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Ces derniers mois, le sommet de l’Europe nous a paru inaccessible, rendu tellement lointain par cette guerre absurde entre la Russie, pays hôte de cette ascension, et l’Ukraine. Mais entre être et paraître, il existe un monde de différence. L’accès avait beau être difficile et critiqué, nous avons décidé, pour Climb for Kids, de faire le choix de croire en l’Homme plutôt que d’accepter l’absurdité de quelques-uns. C’est ainsi qu’en juillet de cette année, nous nous sommes rendus en Russie, dans le grand Caucase, pour atteindre un nouveau sommet parmi les 7 : l’Elbrouz et ses plus de 5 600 m d’altitude.


Une fois les embûches logistiques et administratives franchies (trouver un moyen de transport, payer l’agence, obtenir le visa et les assurances), Fernand a rejoint la petite ville de Kislovodsk, le 10 juillet dernier, après presque 24 heures de voyages répartis sur 3 vols différents et un accueil musclé de la part des officiers en charge du contrôle des frontières (leur inspection – 6 agents avec Fernand dans une petite pièce en zone internationale – aura duré presque 2 heures). Il s’agit d’une charmante station thermale, paisible et agréable à parcourir, même quand on est perdu loin de chez soi et qu’on ne parle pas un mot de Russe. Mais grâce à notre guide, Tatyana, la découverte de la ville aura été simple et agréable, tout comme la rencontre avec le troisième compagnon de cordée : Alexandre – qu’on appellera plus tard, affectueusement, Sasha.

Et de 3/7 pour Climb for Kids ! Comme vous le savez, nous profitons de la visibilité que nous donnent nos expéditions pour sensibiliser les gens à une cause qui nous est chère : la lutte contre la précarité infantile ! Vous voulez, vous aussi, participer au combat contre cette injustice qui touche encore plus d’un enfant sur quatre en Belgique ? FAITES UN DON sur le compte de la Fondation Roi Baudouin BE10 0000 0000 0404 – BPOTBEB1, avec la communication structurée 623/3706/90057, déductible fiscalement.

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Le Caucase est une région incroyablement verdoyante et pleine de vie sauvage. Dès le lendemain, direction le camp de base lové à 2 500 m au fond d’une vallée verdoyante. C’est d’ailleurs un élément très marquant du séjour : le Caucase est une région incroyablement verdoyante et pleine de vie sauvage. Là-bas, c’est le grand luxe : cabanes en dur avec des lits superposés, toilettes, douches, électricité et même une connexion Internet. Autant dire que c’est presque plus un camp de vacances qu’un camp de base. Une fois installés, c’est parti pour une petite balade pour découvrir la région « basse » et ses magnifiques cascades qui nous en mettrons plein la vue pour notre premier jour en montagne. Nous décidons de partir parcourir une partie de la voie des premières ascensions pour atteindre un peu moins de 3 500 m de haut. Pour Sasha, qui n’avait jamais mis les pieds en montagne (eh oui, c’est un choix audacieux pour un premier sommet), l’altitude se fait déjà sentir avec un bon mal de tête. Mais Fernand et Tatyana mènent le petit groupe, chacun à leur tour, et, après une baignade dans un lac glacé surplombant la vallée, nous redescendons nous réchauffer au camp de


base et manger. C’est aussi un élément très marquant du séjour, on mange très très bien là-bas.

Fernand Souply-Pierard © 2023

Les troisième et quatrième jours sont un peu difficiles pour Sasha, car il est déjà temps de monter au High Camp, à 3 800 m. Une fois pour faire un portage et s’acclimater (la cuisinière du High Camp nous avait gentiment préparé une délicieuse soupe de poulet), et l’autre pour nous y installer. Le temps est avec nous, il fait bon et pas trop venteux pour le moment. Après deux jours à évoluer vers les 3 800 m, il est déjà temps de refaire une course d’acclimatation et de monter au pied de Lenz Rock à 4 800 m d’altitude. Nous croiserons, en chemin, une roue d’hélicoptère, affublée de nombreux stickers comme autant de marques de passages des alpinistes de la planète au fil des ans, waypoint et souvenir d’un crash d’appareil – preuve s’il en fallait que les conditions climatiques peuvent être dantesques sur cette montagne. Là-haut, Sasha a la nausée et un violent mal de tête qui ne nous laissera que quelques minutes pour admirer une vue déjà extraordinaire même sans aller plus haut. Son état aura été une source de stress pour Fernand qui, après l’ascension du Denali en mai, ne voulait sous aucun prétexte voir le sommet lui échapper mais qui savait que, dans un si petit groupe, c’était tous ensemble au sommet, ou personne là-haut.

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Tatyana Baskava © 2023

Le lendemain était un jour de repos qui aura fait grand bien à notre infortuné compagnon de cordée. C’était également l’occasion rêvée de réviser,

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Fernand Souply-Pierard © 2023

Fernand Souply-Pierard © 2023

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Fernand Souply-Pierard © 2023 Alexandre Zakharov © 2023

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ou découvrir pour lui, les bases : la progression sur glacier, les techniques d’arrêt, de secours, et pour Fernand de pratiquer un peu l’escalade sur glace, au bord d’impressionnantes crevasses insondables. Chacun prend du plaisir dans toutes ces activités réalisées sous le soleil et sur une couche de neige fraichement tombée. Demain, nous partirons à l’assaut du sommet, pensions-nous. Mais c’était sans compter sur un vent particulièrement fort qui nous contraindra à utiliser le jour de réserve et à nous calfeutrer dans les baraquements du High Camp en espérant pouvoir essayer le jour suivant. C’est donc durant la nuit du 7e au 8e jour que nous nous mettons en route pour la longue ascension du sommet Est de l’Elbrouz, malgré un vent assez soutenu mais avec une promesse de beau temps au lever du jour. La progression est lente, Sasha peine à garder le rythme qu’imposent la guide et Fernand pour garantir la réussite du sommet. En effet, même si l’altitude n’est pas si importante, les risques augmentent à chaque mètre de plus parcouru vers le haut. Le temps joue presque toujours contre nous dans ces conditions particulières. Nous atteignons la roue d’hélicoptère, puis la partie basse de Lenz Rock que nous contournons par la droite, en passant par des sections de glace bleue sur pente assez raide, aucun faux-pas n’est permis ici. Enfin, nous atteignons la moitié de cette section de roches et de

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glace, vers 5 200 m. Le soleil se lève enfin, mais avec lui le vent devient aussi de plus en plus fort. Sasha puise au fond de lui-même pour continuer à grimper, là ou Tatyana et Fernand font preuve de patience et d’une concentration importante afin de continuer la progression le plus en sécurité possible. Ils sont tous les deux impressionnés par les ressources que notre camarade parvient à trouver pour progresser malgré sa forme physique. Je précise d’ailleurs ici que nous serions redescendus à la moindre manifestation plus sévère de son mal des montagnes. Les montagnes restent, comme on dit, mais pas les hommes, ai-je pour habitude d’ajouter. Mais quel vent ! Soutenu à plus de 40 km/h, avec des rafales atteignant, selon les informations de notre guide, plus de 65 km/h ! Autant vous dire qu’il faisait un peu frais là-haut, malgré un soleil éclatant. Nous progressons néanmoins et atteignons finalement le sommet de l’Europe. Quelle immense joie, quel sentiment de plénitude et surtout quelle vue incroyable sur la chaine de montagne qui nous entoure. Quelques minutes seulement là-haut et direction le High Camp sans plus attendre. Il fait froid, venteux, et nous en avons encore pour 4 h à redescendre, du moins c’est ce que nous pensions. Sasha, en plus de ses difficultés dues à l’altitude, se blesse au genou, ce qui ralentira drastiquement notre progression, rendant les passages sur glace encore un peu plus dangereux et nous obligeant même à le faire descendre sur la corde par endroits… On aura un peu gouté aux efforts à déployer pour réaliser un sauvetage en haute montagne.

En tout, c’est presque 14 h d’efforts qui auront été nécessaires pour atteindre le sommet et revenir boire une bière fraîche au High Camp. Il ne restait plus alors qu’à redescendre et entreprendre le (très) long voyage vers la Belgique. Merci et à bientôt pour la suite du 7S challenge, de la part de toute l’équipe de Climb for Kids !

FERNAND SOUPLY

1.

German Aerodrome et vue sur l'Elbrouz - Alexandre & Tatyana

2. Photo au sommet de l'Elbrouz - Fernand & Alexandre 3.

Vue sur la vallée et le Base Camp - Alexandre & Tatyana

4. Le Base Camp & Alexandre 5. Alexandre près de la roue d'hélicoptère 6. Moon Field et vue sur l'Elbrouz - Alexandre & Tatyana 7.

High Camp - 3 800 mètres

8. La cordée victorieuse - Fernand, Tatyana & Alexandre


LUCIE ALEXANDRE Cet été, je suis partie durant 8 jours avec un groupe de randonneur·euses dans le massif de Belledonne. Une expérience inoubliable jalonnée de rencontres aux couleurs de l’arc-en-ciel. Si nos pas ont arpenté tantôt le vert des forêts, des mousses et des alchémilles duveteuses, tantôt les passages cendrés de granite et de schiste, ou encore le bleu de l’horizon une fois la journée terminée, les miens ont aussi exploré du rouge sang au creux de leurs mouvements.

Je ne suis certainement pas la première ni la dernière à avoir bravé les « monstruations » alpines. C’est donc pour moi un privilège et un engagement de saisir la plume qui m’est tendue pour vous partager mon expérience et quelques trucs et astuces sur les protections réutilisables en montagne. Alors, c’était comment les règles douloureuses faces aux contraintes parfois rudes de l’effort physique et de la nature ?

Serge Raucq © 2023

Règles alpines

Salut ! Je m’appelle Lucie Alexandre. Cet été, je suis partie avec Escal’pades pour une traversée du massif de Belledonne. Dans cet article, je vous partage mon expérience des règles alpines.

Dès les préparatifs, je savais que mes règles viendraient là-haut. Mon cycle en continuelle évolution me réserve depuis peu une poignée de symptômes vertigineux. Cependant, l’enthousiasme à l’idée de me retrouver à quelque 2000 mètres de hauteur écarta toute tergiversation et question. À vrai dire, dans une sorte de déni, je n’y ai pas vraiment pensé hormis au moment de glisser mes serviettes lavables et ma cup menstruelle dans mon sac à dos. Au départ de la course, de petites ondes commencent à se faire sentir, comme un léger rappel face au déni.

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Entre dépassement de moi et respect des limites qu’imposent mon corps ? Où réside le plaisir et le bonheur que je suis venue cueillir en montagne ? Aussitôt, naît en moi la crainte de l’impact sur le rythme collectif. J’en parle à une membre expérimentée du groupe (Sandrine) : « C’est comme cela, il n’y a rien à faire. Quand ça m’arrive, je suis très fatiguée, j’avance à mon rythme et je fais avec ». Des mots qui tombent sous le sens et qui me remplissent d’une obligation de bienveillance naturelle (voire naturaliste) envers moi-même. Je n’y pense plus et dévale les 3 premiers jours dans une forme olympique. Arrive alors la fin de cette 3e journée. Après une pause, le moment de hisser mon sac à dos fut poignant de vérité : simultanément, un voile de fatigue tombe sur mes épaules jusque dans mes bottines, ma tête se met à chauffer et mon estomac mendie son lot d’énergie pour braver l’effort restant. Mais sous la fatigue et la tension naissante, j’étais ravie d’être avertie de l’arrivée de mes vieilles copines plutôt que d’être inondée par surprise en plein effort. Premières gouttelettes quelques heures plus tard : je vais me lover dans mon sac de couchage et accueillir ce passage bien au chaud, fatiguée et heureuse. C’est le lendemain qu’eut lieu le moment critique. Une trentaine de minutes après le réveil, tout s’est mis à bouillonner et tourbillonner. Diarrhée, nausées vertigineuses presque à chaque pas et crampes insoutenables. Un rappel en force de mon oubli passager. Mon corps, blême, vide des calories englouties lors des derniers repas, devait se préparer à une belle section de dénivelé et 5 jours restants de marche. Je sentais, à juste titre, que mon départ était incertain, peut-être insensé. Ma préoccupation pour le groupe revenait. Je n’en étais plus à l’évaluation des probabilités : j’allais nous ralentir et nous imposer des temps d’arrêts. Une deuxième réflexion fit ensuite irruption : « Y a-t-il vraiment un sens à ma poursuite ? Quelle est la limite entre persévérance et acharnement ? Entre dépassement de moi et respect des limites qu’imposent mon corps ? Où réside le plaisir et le bonheur que je suis venue cueillir en montagne ? ». Enfin, la suite de mes tergiversations fut très pragmatique : « Que faire si je ne poursuis pas ? Trouver refuge plus en aval et rejoindre le groupe plus tard ? Est-ce possible et réellement moins d’efforts ? » page 36

Cette tentative de discernement fut petit à petit envahie par la tristesse à l’idée d’interrompre, même momentanément, ce périple tant attendu. Malgré le bilan de mon incapacité temporaire à affronter flancs et cols, crêtes et torrents, je ne connaissais que trop bien ce que j’étais venue chercher : mouvement et connexion à la nature, alors que la mienne s’imprégnait de moi. Ainsi, la spirale des pensées se mit en marche, se clôturant toujours par le souci pour le groupe et le besoin de prendre et d’assumer une décision. Pendant ce temps, les nausées s’accentuaient. Notre guide, attentif, s’est approché pour examiner la situation. Face à la certitude de la durée des symptômes, il me proposa de poursuivre ce que j’avais commencé, un pas après l’autre dans le respect de mon rythme, quitte à m’arrêter. Dans le ton de sa voix ne résidait aucun doute quant à l’accomplissement de l’objectif de la journée. J’avais enfin trouvé la pièce manquante me permettant de me positionner : la bienveillance, l’avis et la confiance du guide. Or, comme dès les premières minutes de notre aventure ces dispositions sont par extension collectives, j’avais devant moi la confiance et le souhait de tout le groupe. Mes impressions se vérifièrent dès la reprise de l’ascension ! Environ une heure après, la question de faire demi-tour s’était complètement évaporée. Ce fut difficile, piquant, mais un moment de bienveillance et de dépassement… et surtout une sensation marquante d’appartenance à l’unité collective ! Pauses, échanges, écoute, poursuite, attention, furent les maîtres mots. Tout bien considéré, face aux aléas de toustes durant ces 8 jours, nous n’avons fait qu’un bloc, reliés par une corde invisible mais presque palpable. Heureusement, les nausées qui avaient été la goutte de trop se sont cantonnées à la première journée. Le reste des symptômes s’est maintenu de manière éparse et décroissante, durant les 3 premiers jours de règles, plus fréquemment en matinée. Ils furent pour la plupart sans corrélation certaine ni avec le dénivelé, ni avec la météo. Je l’aurais pourtant parié. Il y eut, comme annoncé par Sandrine, une fatigue incontournable et visible. Quelques maux de tête et vertiges me valurent d’ailleurs les fesses dans l’eau ! Il me fallut également réduire les doses de nourriture, malgré l’appétit, pour cesser de batailler avec des crampes intestinales et diarrhées, desserrer les lanières du sac autour des hanches et donc endosser le poids sur les épaules, et, pour finir, gérer les implications de mon « engagement sans déchet » peu importe la météo.


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Sans hésiter, je recommencerai ! Vivre ce rapprochement de la nature, tout en étant rattrapée par ma propre nature, fut un excellent moyen d’être rappelée à ma place, à mon humanité, en petitesse et en grandeur. Petitesse face à l’inévitable, à l’incontrôlable et à la beauté de la terre. Grandeur devant l’impossible ayant été surmonté. Devant la hauteur déroutante de mes capacités. C’était également un excellent moyen de vivre la force et la nécessité du collectif et son indénouable lien avec le « prendre sa place ». Rien, si j’ose dire, n’aurait été possible sans l’accueil et le respect de toustes, à commencer par le lien avec moi-même. Cela s’est traduit, en outre, par un langage délivré des tabous sur la féminité et les menstruations, peu importe le genre et l’âge de l’interlocuteur. J’ajoute à cela l’écoute de mes limites dans une bienveillance qui en ressort évoluée. Cerise sur le gâteau ! Pour les femmes ayant des règles douloureuses et/ ou accompagnées d’autres symptômes forts, pour les femmes dont le cycle est dans une phase changeante ou chargée d’inconnues, comme ce l’était pour moi, je ne recommande ni de provoquer, ni d’éviter un départ pendant les règles. J’éviterais certainement la démonstration de force. En revanche, j’invite simplement à la confiance, à la bienveillance et au respect de soi, le tout placé sous le signe de la lenteur. Il n’y a d’ailleurs pas meilleur endroit pour se remettre dans le pas de la lenteur et de l’écoute que celui de l’altitude et de la montagne. Chaque chose prend son temps. Nos cycles aussi. C’est une ouverture du corps et de l’esprit à garder en mémoire en tant qu’accompagnateur·ice ou membre de cordée, peu importe le lieu, l’autre, le soi. Personnellement, j’ai aimé constater tout ce dont j’étais capable malgré les tourbillons physiologiques, j’ai adoré perdre mon sang à flanc de montagne, col à col. Les termes de plus en plus répandus de nature sauvage, de femme dans mon cas, ont raisonné avec force et joie. Bienveillance, lenteur… et zéro déchet ? « Pas question de rompre avec les bonnes habitudes : montagne ou pas, j’emporte dans mes bagages mes convictions et engagements éthicologiques (et ma cup) » ! Quelles sont mes recommandations sur la gestion des protections menstruelles réutilisables en randonnée ? De manière concise, le seul vrai conseil que je transmets avec certitude est de bien connaître son rapport à ces aspects techniques. Autrement dit, ne faites page 37


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Pexels © Greta Hoffman Unsplash © Ali Kazal

Je suis partie avec : une cup, deux serviettes lavables et un peu plus de volume pour le transport de l’eau.

pas d’une sortie montagnarde le théâtre de vos premiers essais. Chaque corps est différent et aucune solution ne vaut mieux qu’une autre. De manière un peu plus détaillée, je suis partie avec : une cup, deux serviettes lavables et un peu plus de volume pour le transport de l’eau. La cup était idéale dans mon cas. Avec l’impossibilité partielle voire totale de se laver, son utilisation a permis d’éviter l’agglomérat de sang séché au niveau de la vulve. Attention à deux points cependant : 1.

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Il existe des modèles de cup adaptés aux usages sédentaires versus sportifs (plasticité et adhésion différentes). Je préconise d’avoir au moins porté une fois sa cup dans un effort considérable et de moyenne durée.

2. Il est nécessaire de prévoir un volume d’eau suffisant, nécessaire au nettoyage de la cup, ET d’éviter au maximum, voire entièrement, d’utiliser de l’eau traitée au micropur. Cela entraînerait un risque de déséquilibre de la flore vaginale, terrain favori des mycoses. Pour la petite anecdote tout en audace, je me suis retrouvée, sous une averse vorace, à changer ma cup à proximité non négligeable du reste du groupe. Choisissant d’éviter un détrempage, mes doigts couverts de sang escaladaient les parois du vagin, à un (gros) caillou de distance de mes congénères. À nouveau, ce fut une belle preuve de confiance interpersonnelle et intergenre. J’utilise habituellement des culottes menstruelles, en coton pour des raisons éthiques, mais celles-ci sont relativement lourdes après le rinçage. J’ai donc privilégié des serviettes à clips (en coton également) que j’utilisais comme back-up sous la cup et pour la nuit. Une fois arrivée sur le lieu de bivouac, je lavais la serviette portée la journée pour la réutiliser une fois sèche, le soir suivant. Lors de mon prochain voyage, je tâcherai cependant de privilégier les culottes menstruelles aux serviettes à clips car ces dernières se baladaient sous mes enjambées ! Dans ce


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cas, je trouverai des culottes en polyester bien plus légères et rapides à faire sécher. Enfin, je prendrai 3 protections plutôt que 2, trop juste en cas de pluie.

thèse que le partage d’expérience puisse susciter un changement m’enchante. Là-haut une merveilleuse impression se transportait avec moi : celle de littéralement rendre ce sang bourré d’énergie à la terre, plutôt que de lui puiser deux fois des ressources lors de la confection et de la destruction de nos déchets menstruels. Imaginons quelle empreinte nous pourrions laisser toutes ensemble !

Bien qu’il soit possible de rester discrètes grâce à quelques subterfuges, l’utilisation des protections lavables peut impliquer une levée des tabous lorsqu’elles sèchent aux yeux de toustes. De mon point de vue, chercher à dérober ce rappel de ma nature n’était ni nécessaire ni enviable ! Cela a suscité des moments de partage entre femmes ainsi que des conversations avides d’intérêt avec les hommes, pour une participation à la bonne humeur collective ! Le jeu en vaut largement la chandelle !

Je suis Femme et Fière

LUCIE ALEXANDRE

Le choix d’appliquer ses convictions pour le respect de l’environnement, peu importe le degré d’accès à notre confort quotidien, DOIT rester personnel. Même s’il est inconcevable à mes yeux de faire autrement, c’est un regard enthousiaste et non jugeant que je pose sur la question dans les échanges. Néanmoins, l’hypo-

Lire

PS : Faisant écho à une réflexion collective, j’ai une pensée particulière pour toutes les femmes contraintes à l’itinérance, dans l’urgence et sans protection menstruelle.

UN ALPINISME D’AVENTURES de BERNARD AMY

Dans son livre précédent, publié en 2020, l’au-

dans le choix de pouvoir à tout moment modifier

teur avait analysé les motivations profondes nous

son itinéraire ou son éthique ? Dans la manière de

amenant à pratiquer la montagne et à en accepter

s’équiper, de refuser catégoriquement l’usage des

les risques. Une recension en avait été publiée ici-

points d’ancrage autrement que pour la sécurité ?

même (Ceux qui vont en montagne, Psychologie

Mais où commence l’insécurité, la sienne ou celle

de l’alpinisme et Approche du risque, Ardennes et

des autres ? La liberté n’est-elle pas plutôt le privi-

Alpes, n°205 p. 24).

lège de ceux qui n’en ont rien à cirer ? Mais alors, à

Cette fois Bernard Amy confronte ses propres expé-

quel prix, pour eux et pour les autres ?

riences – elles sont nombreuses – à ses réflexions

Ses réflexions et ses expériences nous mettent

multiples : la peur du vide, l’attrait de l’inconnu,

face à nous. La lecture de ce livre nous rend plus

la valeur d’une cordée, sa faculté de mémoriser

conscients de nous-mêmes et de nos actions. J’avais

les situations passées mais pas leur chronologie,

terminé la précédente recension par ces mots « La

la mort en montagne, la rencontre avec l’ange,

lecture de ce livre m’a mis à nu ». Je réitère…

comme il la nomme, mais aussi un questionnement JEAN BOURGEOIS

sur l’idée, fallacieuse selon lui, de l’escalade dite « libre ». Que signifie-t-elle vraiment ? La réponse de Georges Livanos est simple et sans détours : « Pour moi, c’est celle où je fais ce que je veux ! ». Mais

Un alpinisme d’aventures

actuellement le sujet est plus complexe : qui et quoi

Bernard Amy

est vraiment libre, le grimpeur ou la paroi qu’on a

Éditions les Passionnés de bouquins, 2023, 285 p.

solidement équipée ? Où se situe la liberté, est-ce

ISBN : 978-2-36351-134-8 page 39


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Francis Pourcel © 2016

Les Chemins des Terrils à Charleroi À l’origine de la Boucle Noire et de la Grande Dérive MICHELINE DUFERT & FRANCIS POURCEL – administrateurs de cheminsdesterrils Actif depuis 2011, cheminsdesterrils. be est au départ un blog dédié à nos pérégrinations de Carolos autour de la chaîne des terrils, ces vestiges significatifs de l’industrie minière à Charleroi qui marquent le paysage. L’aventure est riche, les rencontres nombreuses. Musiciens dans les années septante et quatre-vingt, nous sommes en recherche d’expériences et d’expérimentations ; cela se fera moins en improvisant dans notre grenier qu’en nous confrontant à des paysages dont nous espérons découvrir, et plus tard écrire, des bribes de récit.

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Les premières sorties débutent dans nos quartiers respectifs, puis dans la grande ville, s’appuyant sur d’anciennes publications telles les « Balades à Charleroi » reliant des terrils, des parcs, d’anciennes carrières ; « le Guide des Chemins du Rail » à la découverte d’anciennes lignes ferroviaires industrielles devenues des « RAVeL » ou en attente de l’être ; le guide du « Touring Club de Charleroi » de 1917 pour ses descriptions d’un autre temps. Le livre « Terrils » (éd. Vie ouvrière) reste une référence pour son abord photographique, poétique et militant. L’aventure prend un sens nouveau lors de la découverte de balises GR à proximité du Bois du Cazier. Le GR412 « Sentier des Terrils », dont nous découvrons le balisage, traverse Charleroi sur une vingtaine de kilomètres. Semaine après semaine, nous suivrons ce fil blanc et rouge dont nous nous écarterons souvent pour y revenir obstinément. Pas question ici de relater des exploits sportifs. Nous ne sommes pas du tout dans un rythme de marche mais plutôt de prospection. À l’aide d’une vieille carte De Rouck,


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d’une boussole, de jumelles et d’un appareil photo, nous découvrons l’art de se perdre sur un GR. Nos dérives tiennent de l’exploration urbaine, relatées ensuite sur notre blog. En 2011, il est devenu relativement aisé de créer et d’alimenter un blog, sorte de site Internet personnel au début des réseaux sociaux. Les blogs sont légion, ils favorisent les échanges et apportent de la notoriété. Sur le net, les sites « Terrils.be » qui a engendré quelques années auparavant le projet de « transterrillienne », première mouture du GR412, et « Sentiers.be » sont de nouveaux sites militants en faveur de la marche, de la promotion des paysages et de la petite voirie. À la suite d’une action citoyenne autour d’un sentier dans notre quartier, nous devenons baliseurs aux Sentiers de Grande Randonnée. Notre exploration de la chaine des terrils carolo se poursuit. Avec notre blog en guise de carte de visite, nous consultons, questionnons, publions. En 2014, nous publions un article dans la revue du Cercle d’Histoire et d’Archéologie de Charleroi « Créer des cheminements originaux en mode cyclo-piéton en reliant la Sambre au canal Charleroi-Bruxelles. Valoriser un cheminement sur la chaîne des terrils », véritable manifeste sur la sauvegarde du paysage minier et sidérurgique carolo comprenant la création de sentiers (que nous allons concrétiser nous-mêmes) et la demande d’une passerelle reliant les rives de la Sambre aux rives du Canal (aujourd’hui dans les plans du projet Porte Ouest). Nous travaillons au culot, sans connaître l’aspect législatif des terrils et les procédures administratives

Page précédente : Cheminsdesterrils – Chaine des terrils de Charleroi, 2016

Francis Pourcel © 2016

Ci-dessous : Chantier balisage et débroussaillage pour le projet Boucle noire – Chaine des terrils, 2016

qui vont plus tard nous sembler interminables. Mais, portés par les rencontres, nous sommes conscients de la richesse et de l’urgence du projet. À la même époque, Charleroi, ville industrielle qui doit se relever de crises successives, est à nouveau frappée par les délocalisations (le haut fourneau 4 de Carsid et Caterpillar). La ville est pourtant à un tournant culturel et urbanistique majeur où le paysage est pris en compte. À l’administration, Martine Piret, en charge des terrils, des GR et des RAVeL travaille avec nous sur le projet. Les Sentiers de Grande Randonnée suivent nos actions. Nous défrichons et envisageons le balisage à deux, un travail énorme ! Nous récupérons un stock d’anciennes dalles de béton qui, une fois plantées dans le sol, serviront de support de balises. Une entreprise de formation par le travail nous vient en aide avec du matériel et des moyens humains. En deux journées, des sentiers sont ouverts et les premières balises sont placées. Le centre culturel Eden, qui développe une nouvelle approche partagée du territoire, invite le public sur le chantier sous le titre « Su les teris, sîntez com èm cœur bat ! ». Ce sera la première pierre d’une collaboration qui se poursuit aujourd’hui. D’autre part, la rencontre avec les artistes du collectif d’art contemporain Hôtel Charleroi dont les résidences de 2010 à 2014 mélangent artistes et citoyens, nous amènent à proposer une marche autour des œuvres et installations dans les rues, ce qui va définitivement sceller notre approche artistique du territoire. Le passage de la Boucle noire à travers un trou dans un mur au Viaduc est l’une des œuvres du collectif, que nous avons rebaptisée « La Porte d’Adrien » en référence à son auteur Adrien Tirtiaux et à Marguerite Yourcenar, autrice des « mémoires d’Hadrien » dont les aïeux possédaient le

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Francis Pourcel © 2018

Ci-dessus : Porte d’Adrien – Boucle noire – Charleroi, 2018 Ci-contre : Cover GRP 1666 Grande Dérive – 2023

château de Marchienne-au-Pont. Nous partageons l’idée que la ville est inspirante, Charleroi est devenue la Mecque des artistes-marcheurs. À son inauguration en 2016, la Boucle noire est déjà très parcourue, les randonneurs peuvent disposer d’une carte artistique du tracé produite par l’Eden. La suite est connue, GR urbain unique, virée poético-punk décoiffante de 23 km autour de la vallée industrielle depuis la gare de Charleroi, la Boucle noire est parcourue par des milliers de marcheurs annuellement. Quatre années durant, l’Eden organise un évènement sur le parcours, ponctué d’interventions artistiques. Les GR intègrent le tracé de la Boucle noire au nouveau topo guide du GR412 qui sort en 2021. Le confinement de 2020-2021 a fait exploser la fréquentation des sentiers et la redécouverte de la marche « près de chez soi ». Pour l’Eden, parce que la culture doit sortir des murs, cheminsdesterrils crée et guide une série de marches exploratoires à travers le grand Charleroi selon une approche de dérive urbaine liant l’architecture : des maisons remarquables, des usines, des cités sociales et l’urbanisme : des sentiers et venelles, des parcs, des espaces verts et des transports en commun. Selon l’association européenne des Sentiers métropolitains dont cheminsdesterrils est membre, la marche urbaine est en plein essor. Ces randonnées d’une journée à travers la banlieue, déclinées à raison d’un weekend par mois, sont complètes en quelques heures. Ces tracés devraient faire l’objet d’une carte prochainement. La Grande Dérive, GRP 1666 de 54 km, née en 2022 et inaugurée avec l’Eden en 2023, fut conçue dans le prolongement de ces traversées collectives entre bourgs de périphérie et périurbains. L’idée était de développer une randonnée de plusieurs jours en faisant le tour de Charleroi. Les Sentiers de Grande page 44

Randonnée intègrent le projet dans son concept, inédit en Wallonie : le GR périurbain, à l’instar du GR2013 de Marseille. La Grande Dérive fait l’objet d’un topo-guide numérique à télécharger sur grsentiers.be.

À Charleroi, Cheminsdesterrils poursuit ses arpentages dont le compte-rendu photographique figure sur les pages Instagram et Facebook de l’association.

DUFERT MICHELINE & FRANCIS POURCEL


The balk’n’ climb trip

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Une grande odyssée mêlant vélo et escalade à travers les Balkans FRANÇOIS MORSOMME & MARGAUX PIROTTE – Texte & images « – Dis Margaux, si on veut aménager nousmême entièrement un van pour notre voyage, on ne partira pas avant 2 ans… – Mmmh… Le vélo, c’est bien aussi ! ».

est toute naturelle pour nous, car en plus d’être plus éco-responsable, nous avions quelques super exemples de grimpeur-cyclistes grâce à qui nous nous rendons compte que le combo vélo-grimpe est tout à fait possible. Sans transition, nous décidons de nous lancer dans une grande odyssée reliant la Grèce à la Belgique, à la découverte des pays des Balkans et de leurs falaises.

26 juin 2023 C’est à partir d’une discussion à peine plus longue que celle-ci qu’est née l’idée de notre projet : un long trip d’escalade à la découverte des falaises européennes. Initialement prévu en van, le projet va rapidement prendre une autre tournure lorsque nous nous rendons compte que l’achat et l’aménagement d’un van ne sont pas compatibles avec nos comptes en banque d’ancien·ne·s étudiant·e·s. La transition vers le vélo

5 h 00, le réveil sonne mais le Muezzin nous a déjà réveillés depuis une heure. Nous sommes à Tirana, capitale de l’Albanie. Pas une minute à perdre, il faut se mettre rapidement en route. En effet, à cette période de l’année en Albanie, il est impossible pour nous de rouler passé midi, au vu des chaleurs étouffantes. Depuis maintenant 9 jours, nous avons adopté cette routine. Nous traversons l’Albanie sans page 45


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Ces sites sont souvent décrits comme des paradis de l’escalade et nous ne pouvons que confirmer cela. trop nous arrêter. Le pays est beau et nous traversons des régions encore sauvages et peu habitées. Le vrai challenge pour nous est de trouver un itinéraire convenable pour les vélos. Dans les Balkans, le réseau routier n’est vraiment pas pensé pour les cyclistes, particulièrement en Albanie où on a souvent le choix entre les gros axes et les chemins de terre. On finit donc toujours par se coltiner la nationale en fin d’itinéraire. Pas évident, mais on fait avec. Depuis quelques jours donc, nous roulons beaucoup et nous grimpons peu. Ce n’est pas vraiment un problème car, niveau escalade, nous avons été royalement servis en Grèce dans le Péloponnèse. Nous avons passé un mois dans la péninsule grecque, entre mer et montagnes, où nous avons profité des incroyables falaises de Leonidio et Kyparissi. Ces sites sont souvent décrits comme des paradis de l’escalade et nous ne pouvons que confirmer cela. Le décor et la roche sont exceptionnels. Les voies sont souvent athlétiques, faciles à lire et très bien équipées, ce qui fait qu’on se sent rapidement très à l’aise. Dans un rayon de 50 km, il y a assez de falaises pour grimper page 46

toute une vie. Les rides d’approche font bien chauffer nos jambes mais qu’est-ce que ça vaut la peine ! Les images de cette première partie du voyage défilent dans nos têtes pendant que nous pédalons. 11 h 50, nous arrivons à Shkoder, notre destination du jour. Demain, direction le Monténégro !

4 juillet 2023 Notre séjour dans le parc national de Paklenica en Croatie s’achève par une belle aventure. Nous sommes partis découvrir quelques longueurs de l’Anika Kuk, la face phare du parc. La concentration est nécessaire car les longueurs sont assez engagées. Nous gérons bien notre timing et arrivons au dernier relai juste avant que le soleil nous rattrape. D’en haut, nous profitons d’une vue panoramique sur une bonne partie du parc. Splendide ! Arriver jusqu’à Paklenica aura aussi été une sacrée aventure. Presqu’un mois s’est écoulé depuis notre dernier jour en Albanie. Pour traverser le Monténégro, nous avions envisagé 2 options : un itinéraire direct qui longeait la côte et une option plus longue où nous nous enfoncions dans les terres. Nous optons pour

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Petra Mem © 2023

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Des grimpeurs du monde entier viennent ici pour découvrir les secteurs mythiques de Massone, Nago ou Belvedere.


Ardennes & Alpes — n°218

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l’option longue, ce qui se révélera être un excellent choix. Contrairement à l’Albanie, le Monténégro offre assez de routes secondaires pour qu’on puisse rouler en toute tranquillité et profiter à 100 % des paysages. Le Monténégro nous éblouit, les paysages sont variés et tous splendides. Près de la capitale Podgorica, nous passons quelques jours à grimper à Smokovac, une falaise très esthétique aux voies vraiment particulières. Mais le clou du spectacle est le parc du Durmitor qui ne nous a pas laissés indifférents. S’ensuit un bref passage de 4 jours en Bosnie, pays témoin de la complexité ethnique des Balkans. Mais nous ne traînons pas trop, l’escalade nous manque et nous avançons à toute vitesse vers la Croatie où on nous avait parlé de falaises exceptionnelles ! Si le Monténégro a été pour nous un des meilleurs souvenirs en ce qui concerne le vélo, nous ne pouvons malheureusement pas en dire autant de la Croatie. Sans surprise, la côte croate est très fréquentée en juillet. Le trafic y est intense et les gens sont assez peu patients vis-à-vis des cyclistes. Alors que quelques jours plus tôt nous étions encore seuls au monde, nous nous retrouvons maintenant dans une ambiance hyper-touristique dans laquelle nous n’avons pas fort envie de nous inscrire. Après coup, emprunter la route de la côte en Croatie au lieu de rouler dans les terres est une des rares décisions que nous regrettons vraiment.

22 août 2023 N’importe quel passionné d’escalade ne peut qu’être charmé par l’ambiance de la ville d’Arco. Ici, tout est centré autour de la grimpe. Des grimpeurs du monde entier viennent ici pour découvrir les sec-

teurs mythiques de Massone, Nago ou Belvedere. Pour notre part, c’est au village de Comano que nous trouvons notre bonheur, au pied d’une face Nord relativement à l’abri de la canicule. Dernier lieu de vie avant la montagne, Comano est un village perché et isolé à quelques kilomètres d’Arco. Nos jambes se souviendront longtemps de la montée jusqu’au village, tout comme nos doigts qui ont souffert sur les voies techniques et teigneuses de la falaise proche du village. Dans un lieu isolé comme celui-ci, nous ne pensions pas avoir de souci pour nos bivouacs mais c’était sans compter sur ces charmantes petites bêtes plutôt nombreuses dans le Trentin : les ours. Les villageois nous déconseillent de poser notre tente à l’entrée du village et nous proposent plutôt de nous installer dans leur jardin. Nous acceptons volontiers, nous passerons plusieurs nuits avec eux. Les enfants nous observent attentivement monter notre tente et utiliser le matos de cuisine. Nous sommes l’attraction de la soirée selon Chiara, notre hôte. L’Italie aura réchauffé nos cœurs et nos estomacs. Nous y avons rencontré les locaux mieux que nulle part et la gentillesse de certains nous aura profondément touché.e. L’escalade italienne est assez exigeante mais heureusement nous avions un fameux entraînement à notre actif. Avant Arco, nous avons eu le plaisir de passer une quinzaine de jours à Osp où nous avons découvert la falaise de Mišja Peč. Le moins qu’on puisse dire, c’est que ça chauffe ; les cotations sont si sévères que nous en venons presque à regretter ces bonnes vieilles cotations freyriennes. Rési, force, technique, tout est absolument nécessaire pour enchaîner la difficulté ici. Cela dit, Mišja Peč arrive sans hésitation en haut de notre classement des falaises visitées de par la beauté de ses voies ! page 49


Durant ces 149 jours de voyage, nous avons pédalé près de 4 000 kilomètres à travers 9 pays

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27 septembre 2023 Après nos trois derniers jours passés hauts perchés à grimper au secteur « Wadi Rum », dans le village perdu de Bouchier (comptant 20 habitants à l’année), l’aventure touche à sa fin. Nous ne remercierons jamais assez Gary, notre hôte British qui nous a accueillis avec plaisir pendant plusieurs jours (un des nombreux exemples de rencontres improbables et des belles doses d’hospitalité que nous aurons reçues durant ce périple). Nos amis grimpeurs nous avaient rejoints pour les deux dernières semaines. C’est un vrai plaisir de pouvoir passer autant de temps à découvrir des lieux pas si éloignés de la maison. De manière générale, ce voyage nous fait prendre conscience que, niveau escalade, nous sommes vraiment bien servi près de chez nous. Nous embarquons avec nos vélos dans le train de nuit Briançon-Paris. Nous avons passé un mois dans les Écrins, à explorer les sites entre Guillestre et Ailefroide.

29 septembre 2023 Ça y est, nous sommes aux ultimes coups de pédale du voyage. Après deux journées de vélo monumentales depuis Paris, nous arrivons à Thorembais où nos familles nous ont réservé un super accueil. C’est en se rapprochant de la maison que nous nous remémorons un tas de souvenirs qui resteront gravés à jamais dans nos mémoires. Durant ces 149 jours de voyage, nous avons pédalé près de 4 000 kilomètres à travers 9 pays, grimpé dans 15 spots de grimpe européens et rencontré tellement de personnes inspirantes. page 50

À travers cette aventure, nous avons découvert un nouveau mode de voyage, le cyclotourisme, qui permet de voyager doucement, au gré d’où nous entraînent nos coups de pédale. Nous nous sommes lancés littéralement sans rien connaître au voyage à vélo et avons beaucoup appris. Le vélo ne restreint pas le champ des possibles ; au contraire, il offre énormément de libertés. Ensuite, toutes ces falaises européennes nous auront permis de voir des endroits que nous n’aurions sans doute jamais visité, de nous essayer à de nombreux styles de grimpe et de découvrir des types de roches originales. Enfin, nous avons compris que l’aventure peut se trouver à deux pas de chez soi. Tu peux trouver le projet de tes rêves à proximité de ta maison, il suffit d’un vélo, d’un sac à dos d’une bonne paire de jambes et d’une grande soif de découverte. De plus, notre vieux continent est incroyable, il est facile de voyager et d’aller à la rencontre de l’autre. Alors, c’est quand qu’on repart ?

FRANÇOIS MORSOMME & MARGAUX PIROTTE

1.

Vue panoramique sur le parc du Durmitor du haut du col – Parc du Durmitor, Monténégro

2. Le Péloponnèse, entre mer et montagnes – Kyparissi, Grèce 3.

Vue du haut d’une côte raide dans le Trentin – Lupio, Italie

4. Bivouac dans les criques croates – Trogir, Croatie 5. Grosse journée de vélo jusque Mostar – Bosnie et Herzégovine 6. Passage de la frontière slovène – Osp, Slovénie 7. François en pleine concentration dans sa voie à « Face Bouc » – Ailefroide, France 8. Gary, notre dernier hôte de ce voyage – Bouchier, France 9. Grimpe sur la plage de Vlychada – Grèce Page 48 : Grimpe « old school » à Comano – Italie


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