Centralités #5 - décembre 2014

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VOUS REFEREZ BIEN UN PEU D'URBANOTHÉRAPIE ? Alors que l’hiver arrive et que l’activité métropolitaine se fait de plus en plus rythmée, Centralités du Grand Paris #5 avance à son propre rythme de croisière, impulsé par de fidèles contributeurs.

Yves Schwarzbach, trublion littéraire, présente l’urbanothérapie ( !). Bertrand Lemoine, figure tutélaire de la réflexion grandparisienne, revient sur les quatre séries de mesures prises par le Comité interministériel du 13 octobre 2014 sur le Grand Paris. Virginie Picon-Lefèbvre, frénétique dénicheuse de nouvelles tendances sociétales, interroge la place de la nature en ville. Emmanuelle Graffin s’intéresse au territoire de Cachan et nous livre un entretien avec le maire de la ville, Jean-Yves Le Bouillonnec. Alexandra Fau, fervent promoteur de la culture au sein du Grand Paris, explique la politique à venir d’aménagement des 69 gares des territoires franciliens desservis par le futur métro.

Un focus spécial sur la tour Majunga qui vient d’être livrée à La Défense témoigne du dynamisme architectural et économique de ce territoire-clé du Grand Paris. Un entretien avec Bruno Donjon de Saint-Martin, directeur général des bureaux de France d’Unibail-Rodamco, nous livre les problématiques contemporaines de l’immobilier de bureaux.

La tour Majunga à La Défense © Takuji Shimmura

Un dossier inédit interroge les extrêmes architecturaux : les rez-de-chaussée et les toits. Que faire de ces espaces ? Ouvrir les rez-de-chaussée et surélever la ville : pourquoi, pour qui ? Encore une fois, c’est la dimension humaine de la cité qui est au cœur des enjeux de requalification des pieds ou des hauts d’immeubles.

Enfin, ce sont trois territoires mis à l’honneur dans ce numéro : Bagneux et Villeneuve-la-Garenne pour le Grand Paris, La Confluence pour le Grand Lyon. Des opérations de reconversion et de construction à différentes échelles pour des villes toujours plus humaines et connectées.

Marc Sautereau, directeur de la publication

À DÉCOUVRIR DANS LE PROCHAIN NUMÉRO SORTIE EN MARS 2015 : → DOSSIER SPÉCIAL MIPIM


paris / JaNuary 23-27, 2015 paris NOrd VillepiNte

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paris / 23-27 JaNVier 2015 1995-2015, 20e aNNiVersaire Gâteaux d’aNNiVersaire chercheNt assiettes d’aNNiVersaire

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iNFO@saFisalONs.Fr OrGaNisatiON saFi, uNe Filiale des ateliers d’art de FraNce et de reed expOsitiONs FraNce / salON réserVé aux prOFessiONNels / desiGN © Be-pOles - imaGe © FraNçOis cOQuerel


SOMMAIRE

 

ACTUS  AIGP3 : LE GRAND PARIS EN 12 CLÉS  TRIBUNE

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GRAND PARIS UNE VISION À RÉALISER

8

L'annonce de nouvelles mesures affirme l'avancement du projet métropolitain, mais qu'en est-il vraiment de sa faisabilité, tant technique que financière  ? Bertrand Lemoine ouvre le débat.

 À LA UNE

LA DIVERSITÉ HUMAINE ET URBAINE AU SEIN DU GRAND PARIS

10

À quels impératifs environnementaux, économiques et sociaux du développement durable le projet se confronte-t-il ? Éléments de réponse par Yves Schwarzbach

 URBA

20

LA NATURE ET LE GRAND PARIS Historique, définitions et prospectives architecturales du projet pour un développement durable, par Virginie Picon-Lefèbvre.

 SOCIÉTÉ

OCCUPER LES EXTRÊMES Rez-de-chaussée et toits, comment les (re)construire et les (ré)aménager en réponse aux enjeux sociétaux actuels ?

 PAROLE D'ÉLU

30 48

JEAN-YVES LE BOUILLONNEC, maire de Cachan et député du Val-de-Marne.

 PROMO IMMO

52

BRUNO DONJON DE SAINT-MARTIN,

directeur général des bureaux de France chez Unibail-Rodamco.

 CULTURE

60

LA POLITIQUE CULTURELLE DANS LE MÉTRO DU GRAND PARIS

 LES TERRITOIRES CONSTITUTIFS DU GRAND PARIS

68 88

BAGNEUX ET VILLENEUVE-LA-GARENNE

 LES MÉTROPOLES FRANÇAISES LYON CONFLUENCE

Directeur de publication, éditeur : Marc Sautereau m.sautereau@bookstorming.com

Publicité : Vincent Delegue v.delegue@bookstorming.com

Conception graphique : Chloé Gibert-Sander Mise en page : Adelyne Lefort a.lefort@bookstorming.com Johanna Grateloup Coordinatrice éditoriale et secrétaire de rédaction : Solveig Placier s.placier@bookstorming.com Assistante éditoriale : Charlotte Guy

Rédacteurs : Christine Desmoulins, Delphine Désveaux, Alexandra Fau, Emmanuelle Graffin, Charlotte Guy, Bertrand Lemoine, Ariella Masboungi, Virginie Picon-Lefèbvre, Yves Schwarzbach. Rédaction : Centralités du Grand Paris 49, boulevard de la Villette, 75010 Paris Tél : 00 33 (0)1 42 25 15 58 www.centralites.com Abonnement : Bulletin d’abonnement en page 96

Diffusion : MLP en kiosques Trimestriel. Le numéro : 5, 90 € Dépôt légal : à parution le 4 décembre 2014 CPPAP : 0615 T 92356

Centralités du Grand Paris est édité par Bookstorming

N°5 – décembre 2014 Le magazine décline toute responsabilité pour tous les manuscrits et photos qui lui sont envoyés. Les articles et photos publiés n’engagent que leurs auteurs. Tous droits de reproduction réservés. Prochaine sortie : mars 2015

www.centralites.com En couverture le jardin partagé Vignoles Est, rue des Haies, Paris, 20e © Christophe Jacquet

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 ACTUS Charlotte Guy

RÉHABILITATION DU CHÂTEAU DE RENTILLY « Explore. » est l’exposition d’ouverture du château de Rentilly, réhabilité par Xavier Veilhan, les architectes Bona&Lemercier et le scénographe Alexis Bertrand, pour devenir le second lieu du Frac Île-de-france. Dans ce contexte particulier, au regard d’un nouveau bâtiment à découvrir, l’exposition prend l'idée de découverte et d’exploration comme point de départ pour opérer une sélection d’œuvres au sein de la collection. À ce titre, c’est notamment la notion d’espace que ces œuvres abordent de façon très diversifiée pour des expériences inédites. « Explore. » jusqu'au 23 mars 2015 Domaine de Rentilly, 1 rue de l’étang - 77600 Bussy-Saint-Martin

20e SALON MAISON&OBJET PARIS DU 23 AU 27 JANVIER 2015 Le salon MAISON&OBJET PARIS fête ses 20 ans ! Entre nouvelles tendances déco et design, le salon MAISON&OBJET est un rendezvous incontournable pour les professionnels. À cette occasion Archibooks édite Les 101 mots de MAISON&OBJET PARIS, rédigé par ses Créateurs de l'année depuis 1995. Parc des Expositions de Paris Nord Villepinte Du vendredi au lundi, de 9h30 à 19h et le mardi, de 9h30 à 18h

INAUGURATION DE LA PHILHARMONIE DE PARIS GALA D'OUVERTURE AVEC L'ORCHESTRE DE PARIS SOUS LA DIRECTION DE PAAVO JÄRVI, LE 14 JANVIER 2015 La Philharmonie de Paris réunit le nouveau bâtiment conçu par Jean Nouvel et l’actuelle Cité de la musique. Il renouvelle les approches de la musique. En effet c'est un espace dédié aux concerts qui repense la relation entre publics et professionnels. Mais pas seulement : la Philharmonie est un lieu de vie, voire de villégiature. L'espace d'exposition notamment vous invite à demeure, « David Bowie is »... est votre hôte à partir du 3 mars lors d'une rétrospection consacrée à son parcours. www.philharmoniedeparis.fr/fr Consultez le programme saison-2015.philharmoniedeparis.fr

« JEAN PROUVÉ » À l’occasion du lancement de l’espace Vitra chez Arteum au Cnit à La Défense, une exposition de la collection Jean Prouvé par Vitra est organisée. En matière de design, d’architecture et d’ingénierie, le Français Jean Prouvé compte au nombre des personnalités les plus polyvalentes et les plus innovantes du xxe siècle. Dans son travail de constructeur, Prouvé ne cherchait pas à créer une signature mais à trouver des réponses logiques et utiles aux fonctions demandées. Jusqu'au 6 décembre 2014 Place Malraux et Rez-de-jardin Cnit, 2 place de La Défense 92800 Puteaux ©MNAM-CCI/Bibliotheque Kandinsky / @photographie : Vera Cardot et Pierre Joly.


« MATIÈRE GRISE » MATÉRIAUX / RÉEMPLOI / ARCHITECTURE Consommer « plus de matière grise » pour consommer « moins de matières premières » est l'un des enjeux de cette manifestation qui convoque l'intelligence collective pour reconsidérer la matière de nos constructions. 75 projets démontrent le potentiel du réemploi et la possibilité d'une nouvelle vie pour des matériaux usés dans tous les lots du bâtiment. GRAND PARIS EXPRESS DÉBUT DES TRAVAUX DE LA LIGNE 15 ! D’une longueur d’environ 75 km, la Ligne 15 parcourt l’ensemble de la métropole du Grand Paris. Elle est également raccordée à l’ouest de la Seine-et-Marne en son terminus de Noisy-Champs. © Victor Brito

« PARIS, LA MÉTROPOLE ET SES PROJETS » La nouvelle exposition permanente du Pavillon de l’Arsenal consacre plus de 800 m2 à l’histoire, à l’actualité et au devenir de la métropole parisienne à travers plus de 1000 documents d’archives, photos, cartes, plans, films et d’une maquette numérique de 37 m2. Rez-de-chaussée Pavillon de l'Arsenal 21, boulevard Morland - 75004 Paris infopa@pavillon-arsenal.com Du mardi au samedi, de 10h30 à 18h30 et le dimanche, de 11h à 19h ©Vincent Fillon

LANCEMENT DE L'ESPACE VITRA CHEZ ARTEUM Le choix d’Arteum d’accueillir le nouvel espace Vitra au Cnit à La Défense est lié à sa volonté de présenter des signatures du monde de l’art, de l’architecture et du design. Ceci toujours en accord avec son engagement de démocratiser l’art sous toutes ses formes et dans tous ses états. Vitra produit les meubles de Jean Prouvé depuis 2001. Cnit 2, place de La Défense - 92800 Puteaux Du lundi au samedi, de 10h à 20h et le dimanche et jours fériés, de 11h à 19h ©Alexandra de Cossette

Jusqu'au 4 janvier 2015 Pavillon de l'Arsenal 21, boulevard Morland - 75004 Paris infopa@pavillon-arsenal.com Du mardi au samedi, de 10h30 à 18h30 et le dimanche, de 11h à 19h © Antoine Espinasseau

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 AIGP 3 : LE GRAND PARIS EN 12 CLÉS

© D.R.

Entretien avec Pierre Mansat Président du conseil d’administration de l’Atelier international du Grand Paris Réélu président du conseil d’administration de l’Atelier international du Grand Paris (AIGP) en juillet, Pierre Mansat évoque les grands enjeux de l’année 2005. Quelle est la feuille de route de l’AIGP dans les mois à venir ? Pierre Mansat : Avec ma réélection au poste de président et la nomination le mois dernier de Mireille Ferri comme directrice générale, la gouvernance de l’AIGP est rétablie et marche désormais sur les deux pieds. Après l’AIGP 1 qui a correspondu à la fin de la consultation internationale sur le Grand Pari(s) de l’agglomération parisienne, l’AIGP 2, marqué par les deux études « Habiter le Grand Paris » et « Systèmes métropolitains », nous entrons clairement dans l’AIGP 3. Nous nous sommes fixé deux repères très importants : l’élaboration du projet métropolitain d’ici à la fin du premier semestre 2015 et la grande conférence mondiale sur le climat. L’avenir de l’AIGP se joue dans cet agenda-là. Il dépend de la qualité de nos travaux et de notre capacité à peser dans le débat public.

Comment l’AIGP compte-il peser dans le débat public ? L’AIGP veut porter une vision que l’on peut qualifier d’alternative. Nous voulons nous positionner un peu comme des empêcheurs de tourner en rond et, dans ce but, nous devons construire une vision critique. Par ailleurs, nous devons passer au récit métropolitain, faire émerger quelques grandes idées pour permettre aux habitants de s’approprier le projet de métropole. Certaines équipes proposent de produire des « scénarios actifs », énoncés à partir de situations territoriales réels et permettant des démonstrations à valeur métropolitaine, ou veulent confronter leurs pensées avec les territoires. Vous évoquez le projet métropolitain mais, au préalable, il faut réaliser le diagnostic métropolitain, comme le prévoit la loi MAPTAM1... Le prédiagnostic doit être élaboré pour le 15 décembre. Il est assez simple à réaliser car des travaux déjà considérables ont été menés sur cette question. L’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) et l’Institut d’aménagement et d’urbanisme (IAU) de la région d’Île-de-France viennent de publier le carnet 1 de l’Abécédaire de la future métropole du Grand Paris et de la Direction régionale et interdépartementale de l’équipement et de l’aménagement (Driea) a produit un atlas cartographique. De son côté, l’AIGP a synthétisé une partie des travaux des quatorze équipes d’architectes-urbanistes du conseil scientifique dans « Les 12 clés pour inventer le projet métropolitain du Grand Paris ». 1 Loi de Modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.


7

INVENTER LE PROJET PERMANENT DU GRAND PARIS

1. 2.

DU PROJET EN AMONT AU PROJET PERMANENT

DE LA RECHERCHE DE COHÉRENCE AU SCÉNARIO DU CHANGEMENT

POUR UNE MÉTROPOLISATION RAISONNÉE

3. 4. 5.

UNE MÉTROPOLE EUROPÉENNE MONDIALE VERS L’ÉCO-MÉTROPOLE GRAND PARIS DES HABITANTS

DU PROGRAMME AUX SCÉNARIOS ACTIFS

6.

PENSER CONJOINTEMENT HABITAT, ACTIVITÉS, DÉPLACEMENTS ET CULTURE

7.

INTÉGRER LES MUTATIONS DE LA VILLE EXISTANTE AU SCÉNARIO DU CHANGEMENT

8.

ARTICULER ACTION FONCIÈRE ET AMÉNAGEMENT DE L’ESPACE PUBLIC MÉTROPOLITAIN

9. 10.

COMBINER LES ÉCHELLES DE LA MÉTROPOLE

MAILLER LES RÉSEAUX POUR GARANTIR L’ACCESSIBILITÉ DE TOUS

11.

INVENTER LES NOUVELLES FIGURES DE LA CENTRALITÉ

12.

PENSER LES TERRITOIRES COMME DES SYSTÈMES OUVERTS ET COMPLÉMENTAIRES source : http://www.ateliergrandparis.fr/12cles/12cles.pdf © AIGP


 TRIBUNE

GRAND PARIS UNE VISION A REALISER Le Comité interministériel du 13 octobre 2014 sur le Grand Paris a confirmé pour l’essentiel les dispositions déjà définies en 2010 sur le réseau de transport public du Grand Paris – déjà revalidées en 2013 – et sur les polarités futures du territoire métropolitain. Malgré l’ambition de donner une « nouvelle vision globale au Grand Paris », les quatre volets prioritaires et les annonces qui les accompagnent ne vont guère au-delà du déploiement du réseau du Grand Paris Express et de la mise en œuvre du plan de mobilisation sur les transports existants, ainsi que de la confirmation des pôles de développement économique. Les quatre séries de mesures annoncées sont cependant à observer attentivement. Sur les transports, le déploiement de certaines lignes est légèrement accéléré, notamment pour desservir le plateau de Saclay et les aéroports. Bonne nouvelle, à supposer que cela soit techniquement et financièrement possible. Bertrand Lemoine , ancien directeur général de l'Atelier international du Grand Paris


9 Le déficit des logements en Île-de-France Sur l’épineuse question du doublement du rythme de production de logements neufs par an, pour respecter l’objectif annoncé de 70 000 logements, les propositions ne pourront pas répondre en l’état à l’affaissement très net du marché en Île-de-France. Certes l’identification de territoires à fort potentiel de création de logements susceptibles de bénéficier d’une intervention de l’État et la mise en place de nouvelles opérations d’intérêt national multi-sites confirment l’engagement de l’État dont le bras armé sera l’AFTRP rénovée et renommée « Grand Paris Aménagement ». Mais l’État, qui n’investit déjà plus beaucoup dans la pierre, a-t-il les moyens de soutenir l’investissement locatif, déjà échaudé par les dispositions de la loi ALUR, ou de favoriser l’accès à la propriété ? Ce sont des mesures de massive simplification normative, administrative et technique qu’il conviendrait de prendre, appuyées sur une puissante volonté politique, pour restaurer la confiance nécessaire à la reprise de l’effort de construction de logements. Notons cependant que les cinq premiers territoires identifiés (canal de l'Ourcq, cité Descartes, Villejuif - Campus Grand Parc, Gennevilliers, Louvres-Puiseux) sur la vingtaine repérés font déjà l’objet d’attentions particulières de longue date. Dans ces territoires, en partie concentrés sur le nord et le sud de la petite couronne, on voit aussi réapparaître les cinq villes nouvelles créées dans les années 1960. Cette polarisation de l’offre de logements devrait par ailleurs s’accompagner d’une aide aux maires bâtisseurs, mais qui restera à définir en 2015. Il faut d’ailleurs remarquer que si l’offre de 70 000 nouveaux logements par an se concrétise, elle sera largement excédentaire par rapport aux besoins de l’accueil d’une population nouvelle, estimée à 50 000 habitants par an, et que 23 000 logements suffiraient à abriter (à raison de 2,2 personnes par logement). Le reste, soit 47 000 logements, est destiné au desserrement et au renouvellement du parc et à l’accompagnement de l’évolution des modes de vie (décohabitation, vieillissement de la population…) et ne nécessite donc pas de nouveaux équipements communaux.

L’économie Le développement économique est opportunément remis au centre du jeu, comme il l’était dans les « clusters »

thématisés déjà définis en 2009. Là aussi il se structure autour de pôles prioritaires tels que Saclay, ou autour de projets d’intérêt métropolitain que sont l’aménagement du triangle de Gonesse avec Europa City, la Cité de la Gastronomie à Rungis, le nouveau port de Confluence Seine-Oise, les Ardoines, Pleyel et bien sûr de La Défense. Tous ces territoires se répartissent harmonieusement en pétales de marguerite autour de Paris mais on peut s’interroger sur la dispersion des pôles de développement économique. Il est clair aussi que l’investissement dans le développement économique sera essentiellement le fait du secteur privé, aux capacités financières étroitement liées à la conjoncture.

La gouvernance Enfin la question de la gouvernance. L’attention se concentre autour de la confirmation de la Métropole du Grand Paris, définie par la loi MAPTAM du 27 janvier 2014 pour une mise en œuvre au 1er janvier 2016, et dont le périmètre se trouve de fait élargi aux communes adjacentes aux départements de petite couronne. Mais les vifs débats en cours et la très large fronde des élus réunis au sein de Paris Métropole, qui revendiquent une fiscalité propre pour les territoires reconstituant peu ou prou les communautés d’agglomération supprimées par la loi MAPTAM, laissent augurer de profonds aménagements législatifs qui pourraient aller jusqu’à vider la loi de sa substance en réduisant à peau de chagrin les moyens et les compétences de la Métropole. Le deuxième volet de la gouvernance concerne la carte intercommunale de l’unité urbaine. L’exigence formulée par la loi de constituer des communautés urbaines d’au moins 200 000 habitants entre les limites de la Métropole et celles de l’unité urbaine est loin d’être acquise. La situation actuelle montre en effet un découpage très hétérogène, avec des ensembles pouvant aller jusqu’à 800 000 habitants comme à VersaillesEurop’Essone, entourés de communautés de communes variant de 6 000 à 50 000 habitants. L’architecture de la région métropolitaine d’Île-de-France reste donc à construire, même si des fondations ont été jetées. Au-delà, c’est d’une vision claire et ambitieuse et partagée sur le futur de la région parisienne dont le Grand Paris a besoin.


 À LA UNE LA DIVERSITE HUMAINE ET URBAINE AU SEIN DU GRAND PARIS$ TOUS ADEPTES DE L URBANOTHERAPIE

Un quartier résidentiel de la Seine-Saint-Denis © D.R.


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La diversité devrait être la valeur fondatrice d'un Grand Paris qui concilierait les impératifs environnementaux, économiques et sociaux du Développement Durable. Mais quelle place nos normes, nos labels, nos plans et nos zonages laissent-ils à la mixité dans le monde techno de la transition énergétique, de la Smart City et de la gouvernance métropolitaine ? Quelles innovations sociales imaginerons-nous pour de nouvelles solidarités ? Yves Schwarzbach


Trombone Shorty © D.R.

ALORS QUE LA DIVERSIFICATION DES MODES DE VIE, VÉRITABLE ADN DE LA VILLE, BOULEVERSE NOS CONCEPTIONS, NOTRE URBANISME OUBLIE LA DIVERSITÉ.

Quoi de commun entre Colaba et Belleville ? Pourquoi on aime la fête de la musique et Trombone Shorty au Parc Floral alors que le Triangle d'or nous ennuie ? Que sera le Grand Paris post-carbone ? On dit que les architectes font des bâtiments où ils ne vivent pas. « Pas faux », lancerait le roi Arthur de la série Kamelot, devant l’éternel T3 compact des promoteurs ou la maisonnette en grande couronne. « Avons-nous encore besoin de T5 ou T6 ? », me disait Thierry Bert, alors délégué général de l'USH1. On construit toujours des logements pour familles nombreuses, des appartements pour primo-accédants et des EPAD2. 1 USH : Union Sociale pour l’Habitat, fédération des organismes HLM. 2 EPAD : Établissement pour Personnes Agées Dépendantes.

BargeAjazz au parc floral © Jacques Thevenet

Alors que la diversification des modes de vie, véritable ADN de la ville, bouleverse nos conceptions, notre urbanisme oublie la diversité. Strates administratives, procédures qui se contredisent, genre zonages PLU3 et loi Duflot4. ZAC5 répétitives, cahiers des charges toujours plus prescriptifs. Crainte de la spéculation, peur des effets d’aubaine. Sanctuarisation des centres historiques, requalifications stéréotypées autour des tramways. Réglementation thermique uniforme, récurrence d’un universel catalogue d’architecture. Similitude du traitement au sol, mobilier urbain cloné, enseignes commerciales identiques. Partout la même malbouffe réchauffée au microonde version Autocad6. Prévisible, rationnelle, impersonnelle. Qui lasse comme les meubles Ikea. Plus tard, on classera les bâtiments étanches de la Transition Énergétique aux Monuments historiques. Obsolète, la philosophie post-carbone restera malthusienne. Trop de monde, pas assez de ressources ? L’Université du Michigan assure que les divorcés consomment jusqu’à 61 % de ressources en plus par habitant. Par précaution, limitons le divorce au nom de la planète. Après la Chine et l’enfant unique, la Suisse songe à une « politique du chat unique ». Sérieux : je l’ai lu dans Le Temps de Genève. Et pense à la votation sur l’immigration. Quand le racisme revient, où est l’humanisme ? 3 PLU : Plan Local d’Urbanisme. Document de planification urbaine à l’échelle d’une commune ou d’une intercommunalité, définissant les types de zones à urbaniser et leurs règles de construction. 4 Zonage qui module le régime fiscal de l’investissement locatif en fonction d’une typologie de zones plus ou moins tendues, où l’offre et la demande de logement ne coïncident pas. 5 ZAC : Zone d’Aménagement Concerté. Principale procédure d’aménagement urbain. 6 Logiciel de conception graphique, largement utilisé par les architectes et urbanistes.


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Technoparade à Paris

© D.R.

Immeuble standardisé de logements à Moscou © D.R.


EDF 552 081 317 RCS PARIS, 75008 Paris – Photo : Rob Payne

EDF CONÇOIT LE FUTUR RÉSEAU DE RECHARGE AUTOMOBILE Nous déployons des réseaux de bornes de recharge et nous concevons des batteries plus performantes pour circuler autrement. D’ici 2015, 5 000 bornes de recharge électrique seront installées partout en France. En partenariat avec les constructeurs automobiles, nous faisons entrer le véhicule électrique dans la ville. collectivites.edf.com L’énergie est notre avenir, économisons-la !


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Vue du métro en 1987 © D.R.

Invocations à je ne sais quel dieu aux abonnés absents, les appels à la mixité sonnent creux. Parlant de la gentryfication7 de la Goutte d’Or et des Eaux Vives à Genève, le sociologue Vincent Kaufmann note pourtant que la mixité ne rime à rien quand les habitants d’un quartier ne font qu’y dormir. À propos de désertification des centres, l’universitaire Gérard Monédiaire écrit que « le droit de l’urbanisme éprouve des difficultés à concilier des objectifs d’urbanisme de proximité et de diversité (…) et le respect des libertés ». Vrai sujet que la liberté, socle de la mixité. 7 Processus de requalification urbaine lié à l'installation de populations de niveau culturel et économique plus élevé dans d’anciens quartiers populaires en déshérence. Soho à New York et le Marais, Levallois ou Montrouge en Île-de-France en sont des exemples. On parle aussi de « boboification ».

Fonctionnelle et sociale, on en parle partout. Voulue par les experts, promue par les plans, soutenue par les élus mais ratée. La mixité ne découle pas de l’organisation du territoire mais des usages de l’espace et de la mobilité. Une société libre est mobile géographiquement et socialement, même s’il faut moins se déplacer pour moins polluer. L’explosion de déplacements de plus en plus aléatoires8 remet en cause le vieux triptyque mixité-proximitédensité. Elle dépasse le concept de ville compacte. La recherche de compacité ne nous évite d’ailleurs pas le dilemme de l’empreinte écologique. Soit une ville anthropise très fortement un espace restreint, soit son impact se répartit sur une grande superficie. Le pire est-il d’altérer gravement l’environnement en un point précis ou de marquer plus légèrement un territoire plus étendu ? Choix plus idéologique qu’écologique. 8 La part des déplacements entre la périphérie et le centre se réduit au profit d’une mobilité à l’intérieur des territoires périphériques. De même, les trajets domicile-travail ou domicile-études diminuent par rapport aux autres déplacements (achats, loisirs, relations personnelles, etc.)

LA MIXITÉ NE DÉCOULE PAS DE L’ORGANISATION DU TERRITOIRE MAIS DES USAGES DE L’ESPACE ET DE LA MOBILITÉ.

Vue du métro en 2014 © D.R.


Vue sur Paris depuis Montmartre © D.R.

Vue sur la basilique du Sacré-Cœur © D.R.

PUISQUE QU’ON NE PEUT EMPILER TOUTES LES ACTIVITÉS SUR LE MÊME SOL, RESTE L’ÉTALEMENT RAISONNÉ. AUCUN PLAN N’A JAMAIS MAÎTRISÉ L’EXPANSION URBAINE.

Sur un marché parisien © D.R.

Puisque qu’on ne peut empiler toutes les activités sur le même sol, reste l’étalement raisonné. Aucun plan n’a jamais maîtrisé l’expansion urbaine. Pas plus que les lois ne dissuadent quelqu’un qui meurt de faim de tenter sa chance. « C’est pure folie de faire sans arrêt la même chose et d’espérer un résultat différent », disait Einstein. Cessons de contrôler l’incontrôlable et regardons les photos de Martin Parr. Comme les nouveaux venus sur les plages, la croissance se reporte sur les fronts pionniers. Carbone ou pas, notre devoir démocratique est de donner sa place à chacun.

Dans la cité relationnelle qui naît, cette place n’est pas figée. La proximité ne s’y exprime ni en mètres ni en heures mais en termes de préférences et d’affinités. La meilleure « Tradi », je la trouve au coin de la rue ou près du bureau ? J’achète mes chaussures sur Internet ou dans le quartier ? Mes voisins sont-ils mes amis ? Où vivent mes proches ? Cette proximité fluctuante bouleverse la notion de densité, liée à la concentration d’activités mais aussi à leur continuité. Je me suis souvent demandé pourquoi on aime Paris parce que les immeubles s’y ressemblent. Rien de commun entre un hôtel particulier du XVIIe, un immeuble hausmannien et un autre des années 1970. Comme la densité ressentie, l’homogénéité découle de notre regard sur notre environnement. Un regard qui oriente nos actes.


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Transformation du quartier du parc aux Lièvres à partir du foncier de l'ancienne nationale 7, projet des Ateliers Lion associés, 2008 - ..., vue générale © Ateliers Lion associés

Perspective aérienne, Aulnay-sous-bois, projet de restructuration urbaine par les Ateliers Lion associés, 2007 - 2013 © V-pictures

« Tourne la tête et tu verras que tes pieds suivent ! », disait mon prof de ski. Si le comportement humain structure la cité, il faut revoir la notion d’espace public, lieu privilégié du nomadisme collectif. Puisque nous communiquons avec nos pieds autant qu’avec notre langue, les frontières entre espaces publics et privés sont poreuses. Plus perméables que les rues, les périmètres des urbanistes et les limites administratives. Moins structurante qu’on ne le dit, la voirie divise les tissus urbains et brise les liens sociaux. Plus nous contraignons les flux, plus nous cloisonnons l’espace et plus nous enfermons l’humanité. Heureusement, « bad girls go everywhere »9. Quel gestionnaire de grand ensemble n’a pas vu les habitants ouvrir des sentiers là où ils ont envie de passer malgré les interdits ? 9 « Good girls go to Heaven (Bad girls go everywhere) », chanson du groupe Pandora Box, 1989.

Transformation du quartier du parc aux Lièvres à partir du foncier de l'ancienne nationale 7, projet des Ateliers Lion associés, 2008 - ... © Ateliers Lion associés


Mumbai © D.R.

PLUS NOUS CONTRAIGNONS LES FLUX, PLUS NOUS CLOISONNONS L’ESPACE ET PLUS NOUS ENFERMONS L’HUMANITÉ.

Au fond, la limite entre lieux collectifs et intimes est culturelle. Dans le Japon ancien, une feuille de papier faisait rempart. Parcourez les villes indiennes, totalement organiques. Aménagements minimaux, leurs rues sont des lieux mixtes, ni tout à fait publics ni vraiment privés. Pénétrez dans le dédale intérieur d’un éco-quartier : vous verrez un bien collectif qui n’intéresse personne. Qui possède le terrain vague, la cour de l’immeuble, la terrasse du café, le centre commercial, la gare et l’atrium d’une tour ? Qu’importe son gérant si on y vit bien ? Le manque de mixité découle d’un rapport au sol formaté par la vieille rivalité entre sédentaires (qui demeurent) et nomades (qui passent). Nous pensons la ville comme nos copropriétés. Tout change dans la cité hybride, écosystème à la fois réel et virtuel, où nos rencontres engendrent la mixité : regard du cœur et mouvement vers l’autre.

Faisons donc aimer la ville. Tournons-nous vers ce que désirent les humains. Notre avenir est d’apprivoiser la libido urbaine. Par la variabilité, la réversibilité et l’alternance d’usage d’un même lieu10. Par le réemploi, le détournement, le jugaad11. Par le vernaculaire, le temporaire, le communautaire. Par la confiance dans la conscience individuelle et l’intelligence collective. On me dira d’en parler aux riverains de l’usine AZF de Toulouse et aux promoteurs qui doivent construire des commerces en pied d’immeuble sans trouver preneur. Aux bailleurs sociaux qui gèrent leur parc par cage d’escalier. On m’objectera les risques, la rentabilité, la gestion efficace, les taxes. On n’aura pas tort, sans avoir raison. L’économie urbaine est l’arbre qui cache la forêt. L’écologie urbaine, c’est la coexistence harmonieuse de tous sur un territoire. 10 En Argentine et au Chili, les écoles accueillent tous les enfants de la maternelle au collège en gérant des rythmes différents. Moins de bâtiments mais utilisés de façon plus intense. En France, combien d’écoles, de gynmases et de salles culturelles vides la plupart du temps ? 11 Mot hindi, signifiant « solution astucieuse à un problème quotidien».


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À Drancy, en Seine-Saint-Denis, des enfants du voyage sont scolarisés à René-Deschamps et soutenus par une équipe pédagogique adaptée © D.R.

échelle 1 cœur © archikubik

Le vivre ensemble. La mixité fleurira quand nous gérerons les conflits d’usage avec intelligence et équité. On a beaucoup critiqué le zonage, qui spécialise les quartiers, et vanté le modèle haussmannien, mixant bourgeois et prolétaires. Entre nous, les pauvres ne vivaient pas comme leurs patrons. Même conflit entre activité économique et logement, alors qu’il faut ramener l’artisanat et l’agriculture dans nos villes. Sincèrement, le restau branché en bas de mon immeuble sent mauvais, bien que Trip Advisor en dise du bien et qu’il emploie du monde. Et quel vieux riverain du Sentier n’a pas grincé des dents entre piles de cartons et prostituées ? Reste que ce quartier réaménagé a perdu sang, nerf et tripes. Comme la rue des Rosiers, dotée par un voyer bien pensant d’un absurde parterre de roses. On aménage mais personne ne nous apprend à cohabiter.

LA MIXITÉ FLEURIRA QUAND NOUS GÉRERONS LES CONFLITS D’USAGE AVEC INTELLIGENCE ET ÉQUITÉ

La solution est donc sociale, mentale, comportementale, comme on voudra. Elle n’est ni technique ni normative. Peut-être faut-il renoncer à l’illusion des règles, à la séduction des procédures. Revenir à l’essentiel : agora signifie marché en grec. Aujourd’hui, on dirait mall. Mieux valent quelques cafés du commerce qu’une place de la République stérilisée par le granit et les couloirs de bus. Idem pour les éco-quartiers, « prolifération de programmes qui (…) ne donnent pas naissance à de véritables quartiers de ville et ne génèrent pas de résultats significatifs en ce qui concerne la lutte contre le réchauffement climatique » selon la revue Urbanisme12. Lâchons prise, sortons du fantasme mixité-proximité-densité, revisité à la sauce Transition. Puisque l’avenir sera citadin, l’urbanisme doit revenir vers les gens. C’est ça, l’urbanothérapie : innover socialement pour une mixité du cœur. 12 Collectif, Denise Bourdier, Jean-Loup Msika et Luc Dupont. Revue Urbanisme n°375, novembre 2010.


La nature s’est depuis longtemps disciplinée et intégrée à nos villes mais aujourd’hui, le besoin de « naturel » au cœur de nos cités semble répondre à des besoins différents de ceux du xviie ou de la première moitié du xxe siècle. Sujet de réflexion pour les architectes, les paysagistes bien sûr, mais aussi les pouvoirs publics, la nature est un thème incontournable pour tous ceux qui pensent la ville. Virginie Picon-Lefèbvre

Jardin partagé Vignoles Est, rue des Haies, Paris, 20e © Christophe Jacquet


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 URBA

LA/ NATURE ET LE GRAND PARIS


Bretez L., Plan de Paris, (dit Plan Turgot), 1734-1739, Planche n° 15 : Le Louvre, les jardins des Tuileries et les jardins du Palais-Royal

DANS LE LANGAGE COURANT D’AUJOURD’HUI EST « NATUREL » TOUT ESPACE PLANTÉ, DE LOISIR OU AGRICOLE, ALORS QUE CES DIFFÉRENTS LIEUX DEMANDENT UN ENTRETIEN ET DES SOINS CONSTANTS DE LA PART DES JARDINIERS. Les Champs-Élysées. Vue à vol d'oiseau, dans ALPHAND Charles-Adolphe, Les promenades de Paris, gravure, 1867-1873

Nous voudrions faire ici un bref historique des relations entre l’architecture, la ville et la nature dans le Grand Paris. Il nous faut tout d’abord préciser ce qu’on entend par « nature ». La définition évolue selon les époques. En effet au xviie siècle, on trouve dans Paris des espaces agricoles, des jardins aristocratiques ou religieux pour la plupart fermés au public et des espaces ouverts plantés, comme la place des Vosges. Aujourd’hui, la question de « la nature » se trouve associée à la notion d’environnement durable qui englobe un grand nombre de sujets parmi lesquels l’agriculture, le végétal, l’eau, l’air, les animaux, le développement économique et social, sont considérés tout à la fois sous un angle quantitatif et qualitatif.

Qu’est-ce que la nature aujourd’hui ? Doit-on la concevoir telle qu’elle a été pensée par le monde occidental, c’està-dire dans l’opposition entre nature et culture, afin de rendre nos villes plus habitables ? Comment s’inventent la place de l’homme et celle de la nature dans le Grand Paris ? Dans le langage courant d’aujourd’hui est « naturel » tout espace planté, de loisir ou agricole, alors que ces différents lieux sont bien évidemment constitués de manière volontaire et demandent un entretien et des soins constants de la part des jardiniers, des agriculteurs ou des forestiers. Versailles, qui mêle infrastructures, architectures et plantations constitue au xviie siècle, l’exemple le plus impressionnant d’un projet de ville où se combinent la maîtrise du végétal et des terrassements et l’aménagement urbain, mais constitue une exception. Au xviiie siècle, la ville héritée du Moyen Âge se caractérise davantage par sa densité et sa saleté, selon les descriptions faites de Paris par Sébastien Mercier, que par


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Jardins Rosa-luxembourg, Paris, 18e © Jacques Leroy

la qualité de ses espaces plantés. Cependant, la place de la Concorde, de Ange-Jacques Gabriel, l’architecte de Louis XV, avait donné forme à une nouvelle relation entre la ville et la nature. En réalisant une place ouverte sur trois côtés « naturels » : le jardin des Tuileries, la Seine et les plantations de ce qui deviendra les jardins des Champs-Élysées, et un côté bâti, il dessine un espace ouvert, délimité par des douves, qui annonce peut-être les grands espacements modernistes.

FAIRE RENTRER LA NATURE DANS LES RUES DE PARIS, MÉTAMORPHOSANT UNE VILLE DE PIERRE EN UN RÉSEAU VÉGÉTAL AVEC DE GRANDES AVENUES PLANTÉES.

Jean-Charles Alphand fut sans doute, en tant que responsable des parcs et jardins des travaux d’Haussmann entre 1852 et 1870, le premier à établir un projet général de parcs et de jardins pour faire rentrer la nature dans les rues de Paris, métamorphosant une ville de pierre en un réseau végétal avec de grandes avenues plantées.


Cité-jardin de Suresnes © D.R.

La nature « moderne » Mais, c’est dans les années 1920 que les urbanistes et les architectes vont instituer un rapport étroit entre le bâti et le végétal sous deux formes différentes et apparemment opposées : celle de la Cité-jardin et celle de la métropole moderne qui initiera le répertoire formel des Grands Ensembles.

AVANT-GUERRE, DES CITÉS-JARDINS, COMME CELLE DE SURESNES, SE RÉALISENT DANS LA BANLIEUE ET LES PROJETS THÉORIQUES DE VILLES MODERNES SONT DÉFENDUS PAR LES ARCHITECTES COMME LE CORBUSIER.

Avant-guerre, des Cités-jardins, comme celle de Suresnes, se réalisent dans la banlieue et les projets théoriques de villes modernes sont défendus par les architectes comme Le Corbusier. La volonté de mettre en relation la ville et la nature qui les caractérise répond à la critique faite à l’organisation désordonnée du territoire parisien. Entre le centre dense et la banlieue, une coupure franche a par ailleurs été instituée avec la construction de la muraille de Thiers en 1848, détruite à partir de 1918, remplacée par la ceinture verte et son réseau ferré éponyme qui sera doublée dans les années 1950 par le périphérique. En banlieue, autour des gares, les petits centres villageois se sont densifiés et ont accueillis les lotissements défectueux, selon la terminologie de l’époque, pour loger les ouvriers et les employés pauvres chassés du centre par l’haussmannisation ainsi que les coquets lotissements de villas, comme au Vésinet par exemple, où les bourgeois parisiens viennent prendre l’air avant de s’y installer de manière permanente.

Plan et photographie de la Cité

© Rémi Jouan


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Jardin de la dalle des Olympiades, Paris, 13e © Jacques Leroy

Après la Seconde Guerre mondiale, les urbanistes jugent sévèrement Paris qui leur apparaît comme un organisme malade souffrant de congestion automobile et qui propose des logements insalubres, inadaptés à la vie « moderne ». Paris et sa banlieue ne répondent pas aux aspirations de changements d’une génération qui a connu la guerre. Le Corbusier s’élève dans La Charte d’Athènes contre l’injustice faite aux plus modestes et réclame des projets pour rétablir le lien, selon lui perdu, entre architecture et nature.

De la fin de la dernière guerre aux années 1970-1975, une des solutions envisagées est la construction d’immeubles sur dalle. Ils paraissent en effet susceptibles de libérer de grands espaces réservés aux piétons. Leur réalisation se heurte à des problèmes liés au caractère artificiel de leur sol. La conception et la mise en œuvre des jardins sur dalle apparaissent comme des problèmes suffisamment courants pour nécessiter la rédaction d’un guide par le service des parcs et jardins de la ville de Paris : « La technique des jardins sur dalle » éditée en 19731. Dans la période suivante, à partir des années 1980, la redécouverte des qualités de la ville ancienne va donner moins d’importance aux espaces naturels. La nature en ville et dans la périphérie prend la forme de nouveaux parcs comme le parc de la Villette ou celui de Bercy et celles des grands parcs péri-urbains, quand ce n’est celle du jardinet pavillonnaire. L’aménagement d’avenues existantes comme l’avenue d’Italie est menée sous une forme inspirée des aménagements urbains haussmanniens.

1 J. Bernard, La technique des jardins sur dalle, Paris, sous-direction des parcs, jardins et espaces verts, sn, 1973, 48 DB 46 Archives de Paris.

Plan et photographie de la Cité

© Rémi Jouan


HENRI BAVA ARCHITECTE PAYSAGISTE, AGENCE TER

Propos recueillis par Virginie Picon-Lefèbvre

Comment posez-vous la question du rapport ville/nature ? Henri Bava  : Nous avons plusieurs projets en cours sur de grands territoires. L’échelle à laquelle on traite cette question a changé et c’est sans doute relativement récent. Aujourd’hui, on a une ville territoire composite : les parties urbaines sont mélangées avec les parties rurales. L’ensemble est traversé par de grandes infrastructures. Nous avons fait de grands parcs autour de Paris dans la période précédente, comme à Ivry en 2002, mais aujourd’hui on nous demande de travailler à l’échelle des intercommunalités comme à Bordeaux ou à Toulouse avec des équipes qui rassemblent de nombreuses compétences et qui posent avant tout la question de la géographie.

Qu’en est-il dans le Grand Paris ? Nous avons fait un projet de territoire le long de la Seine à la demande de l’Epamsa (Établissement Public d'Aménagement du Mantois Seine Aval). Le projet s’appelle Seine Park, il ne s’agit pas d’aménager le bord de l’eau mais de travailler sur des territoires qui sont situés perpendiculairement avec le fleuve. Notre intervention porte sur 80 km de long, 51 communes sont associées au processus. Il s’agit de repenser le territoire comme un tout qui est l’ensemble de la vallée. Nous avons défini la notion d’intervalles situés entre les zones urbanisées. La méthode consiste à faire prendre conscience d’un intérêt commun et à mettre tout le monde autour de la table pour penser les projets d’extension ou d’aménagement portés par chaque commune. Nous avons cartographié la vallée et déterminé des coupes qui suivent les espaces en interfaces entre plusieurs communes : on met ainsi en évidence une sorte de bien commun. Notre rôle alors est de mettre en place les conditions du dialogue et non de faire un projet.

Vue sur la Seine à Évecquemont © D.R.

Le projet Seine Park © SPK

La Seine des profils © SPK


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CAROLINE TISSIER ARCHITECTE, CHEF DU BUREAU DE LA STRATÉGIE URBAINE À LA VILLE DE PARIS

Propos recueillis par Virginie Picon-Lefèbvre manière plus simple, certains se concentrent sur des cultures en sac qui peuvent coloniser le moindre espace disponible pour faire pousser des légumes. Les projets seront évalués dans 3 ans, mais l’objectif de lancer l’expérimentation dans ce domaine va être poursuivi sous d’autres formes. Avez-vous des échanges avec d’autres villes dans le monde sur ce sujet ? Nous suivons ce qui se passe à New York où la pratique des jardins partagés est ancienne. À Berlin, nous nous sommes intéressés à la végétalisation des pieds d’arbres par les habitants, que l’on observe aussi couramment à Tokyo. De nombreux jardins partagés ont été ouverts à Paris et cela fonctionne très bien, il y a des listes d’attentes pour en profiter. Quartier Broussais, rue des Mariniers, Paris, 14e © Bernard Pedretti

Quelles sont les initiatives de Paris en ce qui concerne la mise en œuvre de nouvelles relations entre la ville et la nature ? Caroline Tissier : La ville a lancé un concours en 2013, pour solliciter les Parisiens afin qu’ils proposent des projets innovants en relation avec l’environnement. Une cinquantaine de projets ont été retenus sur des terrains qui sont mis à disposition par la ville mais pour lesquels les intervenants s’organisent pour trouver des financements. On peut citer des projets de culture en aquaponie qui utilisent par exemple les déjections des poissons pour faire pousser des légumes, ou encore des cultures d’algues entre deux baies vitrées. De

Brûlon-Citeaux, square Léo-Ferré, Paris, 12e © Jacques Leroy

Quelles difficultés rencontrez-vous pour mettre en œuvre ces nouvelles pratiques ? Les Parisiens ont trop tendance à se défausser sur les services de la Ville. Par habitude ils ne se sentent pas concernés par l’entretien des espaces naturels et plantés et ont plutôt tendance à les négliger. Pour changer ces comportements, un travail de sensibilisation est mené sous forme d’actions auprès des écoles et par l’organisation d’événements ponctuels dans les parcs et jardins. De nouveaux centre de tri vont être ouvert en milieu urbain. Enfin la ville édite les Cahiers Habitat Durable, afin d’aider les familles à mettre en œuvre des pratiques comme le compostage qui est en place dans certains jardins publics à disposition des riverains, ou encore pour économiser l’eau et l’énergie ainsi que la végétalisation des espaces urbains privés.


BRUNO GOUYETTE CHARGÉ DE MISSION AU SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA VILLE DE PARIS

Propos recueillis par Virginie Picon-Lefèbvre

NOUS VOULONS FAIRE RECONNAÎTRE LES NOUVELLES SURFACES VIVRIÈRES QU’ELLES SOIENT SITUÉES SUR DES TERRASSES OU SUR LE SOL.

Comment transformer la relation entre ville et nature ? Bruno Gouyette : Traditionnellement, la nature dans la ville prenait place dans des lieux aménagés pour ce faire, notamment les squares, les parcs et les jardins, et le bois de Boulogne et de Vincennes pour Paris. Aujourd’hui on pense cette relation en contact avec le bâti. Le végétal peut ainsi prendre place sur les surfaces disponibles qu’elles soient à l’horizontale ou à la verticale. Nous avons donc fait un recensement de toutes les surfaces verticales qui pourraient accueillir du végétal et nous avons compté un linéaire d’environ 140 km, ce qui est considérable. La gestion de la nature a donc considérablement évolué depuis 150 ans. Cette évolution est qualitative car nous n’avons plus de surface disponible pour ouvrir des parcs, en revanche, nous avons de nombreuses terrasses minérales que nous pouvons convertir en espace végétalisé. Si les parcs ouverts dans les années 2000 faisaient encore des surfaces importantes comme le parc de Bercy, les nouveaux jardins sont en comparaison beaucoup plus petits.

Vue des toits de Beaugrenelle © Graphix-images – Laurent Zylberman

Ruches sur les toits de Beaugrenelle © Graphix-images – Laurent Zylberman

Quelle est la position de la Ville sur ces questions ? Nous pensons la question à l’échelle globale et nous sommes convaincus que nous avons changé de paradigme, le statut de la nature a changé ! Il s’agit par exemple d’encourager des cultures vivrières, le projet de la Métropole va favoriser la mise en culture d’espaces laissés en friche, mais aussi ouvrir de nouvelles liaisons par des espaces plantés. À l’échelle du Grand Paris, on va mettre en place des corridors écologiques pour favoriser les déplacements des oiseaux notamment, et planter les espaces qui relient le centre dense avec la périphérie, le long des grands axes. Nous travaillons aussi sur la notion de désirabilité, la nature doit donner davantage de plaisir aux habitants. Quels sont les projets en cours ? Je travaille sur la petite ceinture comme un réservoir d’espace libre végétal que l’on peut ouvrir aux Parisiens. On peut y aménager des jardins partagés, des espaces de loisir et renforcer des liaisons douces, pour compléter les aménagements déjà réalisés, il s’agit aussi d’augmenter la biodiversité de la faune et de la flore. Nous établissons une feuille de route avec RFF, le propriétaire, pour ce faire. Mais le pari le plus innovant est celui qui consiste à vouloir végétaliser les surfaces bâties existantes. Aujourd’hui le ministère de l’Agriculture considère qu’il n’y a aucune surface agricole dans Paris et la première couronne, nous voulons faire reconnaître les nouvelles surfaces vivrières qu’elles soient situées sur des terrasses ou sur le sol car elles constituent une ressource non négligeable et sont sources d’une nouvelle sociabilité urbaine d’une part et d’économie solidaire d’autre part.


29 La nouvelle échelle de la prise en compte de la nature : l’échelle territoriale En 2012, la ville de Bordeaux a lancé un appel d’offre pour révéler les 55 000 hectares de nature qui s’infiltrent entre les morceaux de la ville. À Toulouse, la Ville s’emploie à définir la Garonne, comme un morceau de nature pour toute l’agglomération.

L’histoire récente des espaces verts urbains démontre que la ville abrite une biodiversité croissante et diversifiée. Paradoxalement, les agglomérations urbaines deviennent des havres de diversité naturelle. Ainsi les coteaux, les forêts, les marais, les plaines, les berges de la Seine considérés un temps uniquement comme les poumons du milieu urbain sont maintenant envisagés comme des supports de biodiversité aux limites des zones urbanisées.

Aucun programme d’une telle ampleur n’a été lancé pour le Grand Paris, faute de gouvernance. La SGP semble pour l’heure communiquer principalement sur son projet de transport. Faire de la nature le cœur du projet métropolitain, c’est pourtant projeter l’agglomération dans le futur. C’est inventer, comme le propose Bruno Gouyette, un nouveau paradigme de la relation entre l’homme et la nature tout en prenant en compte les identités remarquables et exceptionnelles de l’agglomération. À l’heure des catastrophes écologiques, du réchauffement climatique, nature et culture sont désormais indissociables et leurs rapports doivent être redéfinis. En effet l’homme doit considérer son cadre de vie en interaction constante avec les milieux quels que soient leur échelle, les éléments naturels et les espèces vivantes. Vue sur le pont neuf à Toulouse © D.R.

La nature : un des grands chantiers de la décennie pour la communauté urbaine de Bordeaux

À LIRE

Collectif sous la direction de Catherine Chomarat-Ruiz Nature urbaine en projets Archibooks + Sautereau éditeur, Paris, 2014, 140 p. ISBN 978-2-35733-262-1 17 €

© CUB

À LIRE

Olivier Lemoine, Joanny Fahrner, Tolga Coskun, Les 101 mots de la biodiversité urbaine à l’usage de tous Archibooks + Sautereau éditeur, Paris, 2013, 56 p. ISBN 978-2-35733-288-1 12,90 €


 SOCIÉTÉ

Les extrémités d’un bâtiment, considérant celui-ci dans sa hauteur sont le rez-de-chaussée et le toit. Pourquoi réunir dans un même dossier deux espaces aux fonctions bien différentes ? Pour le premier, on pensera d’abord à sa fonction commerciale largement répandue. Le toit, quant à lui, fait office de terrasse pour certains ou bien de… rien. Dans ce dernier cas, pourquoi ne pas le surélever ? Comme toujours, des enjeux fondamentaux de société se cristallisent autour du réaménagement de ces deux espaces à reconsidérer dès aujourd’hui dans leur fonction architecturale et urbanistique.

Un ensemble d’Habitations à bon marché, vers la porte d’Asnières, Paris, 17e © Agnès Candas, Diego Fredes, Corentin Gallard et Sébastien Wampach


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OCCUPER LES EXTREMES


REZ--DE--CHAUSSONS LA VILLE PAR ARIELLA MASBOUNGI INSPECTRICE GÉNÉRALE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, CONCEPTRICE DES ATELIERS « PROJET URBAIN ».

« Ses trois mille boutiques scintillent, et le grand poème de l’étalage chante ses strophes de couleurs depuis la Madeleine jusqu’à la porte Saint-Denis. Artistes sans le savoir, les passants vous jouent le chœur de la tragédie antique ». Histoire et physiologie des boulevards de Paris, Honoré de Balzac, 1845. Les rez-de-chaussée fondent la qualité, l’identité toujours unique et la valeur d’usage de chaque ville. Point de rencontre entre espace public et bâti, c’est sur ce point d’imbrication, ce niveau zéro, ces « plinthes » que se joue la capacité à « faire ville », en favorisant urbanité et multiplicité d’usages. État des lieux : les usages pauvres des rez-de-chaussée Pourtant, dans les projets architecturaux et urbains comme dans la ville ordinaire, le rez-de-chaussée est le plus souvent délaissé. Comment ne pas constater les usages pauvres des rez-de-chaussée des immeubles de logements, de bureaux ou encore de grands équipements publics ? C’est ainsi que les immeubles de bureaux ou les bâtiments universitaires renvoient leurs espaces vivants – cafétéria, espace de détente, bibliothèque, etc. – vers des atriums, empêchant par là même tout rapport à la rue. Réduits à des fonctions d’accueil ou de stockage des locaux techniques, tournant le dos à l’espace public et matérialisant la frontière entre le caractère privé du bâtiment et le caractère public de la rue, les rez-de-chaussée sont au mieux l’objet d’un déni, au pire le produit d’une réflexion intentionnelle. Or, les rez-de-chaussée sont (devraient être) support de vie, d’animation, de vivre-ensemble, de frottement, de plaisir de ville. Pour qu’il en soit ainsi, l’urgence est de replacer les rez-de-chaussée au cœur des débats quand la ville contemporaine en fait souvent fi et que le vocabulaire durable n’intègre que rarement cette notion. Comment, pourtant, considérer une ville durable sans dessiner des rez-de-chaussée vivants ? Actifs, animés, conviviaux, ils donnent sa valeur à la ville et fondent l’attractivité et l’identité des quartiers. Par ailleurs, les rez-de-chaussée sont le miroir du contexte économique. Ils sont soumis aux fortes pressions des acteurs privés ainsi qu’aux tensions commerciales croissantes entre centre et périphérie et aux nombreuses mutations qui en découlent. Prospérité ou pauvreté, la situation économique et sociale des villes peut se lire dans les succès et les échecs des modes d’occupation des rezde-chaussée. Il suffit d’aller voir les pieds d’immeuble des quartiers difficiles pour s’en convaincre.

Faire la ville par et pour le piéton Mieux appréhender la ville des rez-de-chaussée conduit à inverser le regard pour aborder toute opération ou politique urbaine. Comment réactiver le niveau zéro pour rendre la ville, dans toutes ses acceptions, agréable au passant ? Faire la ville par et pour le piéton incite à un changement radical de focale pour tourner la page de l’ère de la voiture-reine qui a dessiné la ville européenne éclatée. L’urbanisme fonctionnel a non seulement fait du socle de la ville un objet résiduel et technique, mais l’a figé, alors que la flexibilité et l’informel sont les ferments de l’animation. Ainsi, selon l’architecte urbaniste François Leclercq, le xxe siècle apparaît comme un moment de reniement du rez-de-chaussée qui se cristallise dans le rêve inachevé des constructions sur pilotis du Mouvement moderne.

Birmingham Brindleyplace © Oosoom

À LIRE

Ariella Masboungi, (Ré)aménager les rez-de-chaussée de la ville Éditions du Moniteur, Paris, 2013, 144 p. ISBN 2-281-19554-6 24 €


33 Rendre la ville agréable au piéton dans les centres-villes comme dans les périphéries : cet objectif ferait du rezde-chaussée un espace de projets et mettrait la mobilité douce et le piéton « à la une » pour appréhender l’urbain. La notion anglo-saxonne de « ville marchable » (walkable city) part de l’idée que les rues commerciales doivent privilégier le piéton (« cars don’t shop, people do ! ») ; elle devrait s’appliquer à tout espace urbain commercial ou non. Rendre aux citadins le plaisir de la déambulation, en lien ou pas avec le commerce, c’est rendre désirable la ville des courtes distances, enjeu majeur de la réduction des circulations automobiles qui s’imposera sans doute progressivement. L’amabilité des rez-de-chaussée est plus aisée quand les espaces bâtis et non bâtis sont pensés à partir du piéton et non de la voiture. Ce qui n’est pas synonyme de rue piétonne, loin de là ! Dessiner l’espace pour le piéton change la donne dans tous les cas de figure et implique une mutation conceptuelle significative chez les donneurs d’ordre et les concepteurs. Nouveaux paradigmes Mieux réparer la ville et mieux concevoir son devenir impliquent trois changements susceptibles de faire sortir les rez-de-chaussée du silence où ils sont habituellement tenus. - Le rez-de-chaussée est un espace de projet urbain à part entière Rarement évoqués dans les consultations urbaines, voire architecturales, les pieds d’immeuble sont des espaces fragiles, soumis au feu croisé des exigences techniques, des mutations rapides d’occupation, des équations budgétaires. Pour tirer parti de leur potentiel, il faut appréhender les rez-de-chaussée de façon horizontale, en intégrant le faisceau des différentes contraintes. Le rez-de-chaussée peut alors être le point de départ ou de convergence d’une politique globale de la ville, car il devient le complice de l’espace public et des déplacements, des équipements, du logement et du commerce. La question est à poser dans toute consultation urbaine et architecturale, y compris pour les éco-quartiers et les éco-cités. Que les élus, aménageurs, programmistes, urbanistes, la mettent au cœur de leurs préoccupations ! Que l’on ne renonce pas, au motif que le marché et les logiques sectorielles ne s’y prêtent pas. Les opérateurs ont à développer des montages inventifs pour sortir des sentiers battus. - Tous les rez-de-chaussée ne peuvent être commerciaux En ville consolidée, le commerce occupe rarement plus de 10 % du linéaire urbain. Que dire des périphéries ! Le commerce reste soumis aux flux, aux zones de chalandise et à la concurrence. Au-delà du linéaire strict pouvant recevoir du commerce, toute l’inventivité des concepteurs et des maîtres d’ouvrage est requise pour trouver les ferments de l’animation des quartiers : par des programmes alternatifs, services, équipements, microcentralités ; par le traitement du socle des bâtiments ; par la transparence des entrées ; par des programmes ouverts sur la ville

Birmingham Brindleyplace © Oosoom

Birmingham Birmingham1 montre dans quelle mesure un projet urbain portant un intérêt particulier sur les rez-de-chaussée peut conduire à une transformation radicale de l’image d’une ville. Qualifiée de « ville la plus laide d’Europe » durant les années 1970 et 1980, structurée pour l’automobile et finalement contre les piétons, la ville fut lourdement affectée par la crise économique et le chômage. Au milieu des années 1980, apparaît la nécessité pour Birmingham de se réinventer un avenir. Cet avenir passe par un projet urbain de grande ampleur dont le moteur sera un partenariat entre les pouvoirs publics et les acteurs privés. Le projet contient entre autres le réaménagement du centreville et la production d’un pôle commercial et d’un centre d’affaires. Le quartier de Brindleyplace est la première opération privée. Menée par l’aménageur Argent, l’opération se caractérise par le soin particulier accordé au rez-de-chaussée et à l’espace public. Durant l’opération, l’aménageur est ainsi resté propriétaire des rez-de-chaussée afin de pouvoir intervenir sur l’occupation de ces espaces. Pour encourager l’installation de commerces de qualité, l’aménageur a mis en place un système de péréquation des loyers, les bureaux et logements payant le surcoût nécessaire à la baisse des loyers commerciaux et pas-deporte pour favoriser les commerces et restaurants de bon niveau. En effet, seuls les fast-food et les franchises peuvent payer des baux et loyers élevés. Pour Argent, l’opération est bénéfique au quartier dont ils tiennent à garder la gérance des rez-de-chaussée, afin d’assurer la pérennité de sa bonne tenue qui fait son image de marque. En un mot, c’est ici la qualité des rez-de-chaussée qui qualifie le quartier. 1 Voir le livre d’Ariella Masboungi (dir.), Birmingham. Faire la ville en partenariat (City Renewal through Partnership), Marseille, Parenthèses, 2006.


LE TEMPS DES REZ-DE-CHAUSSÉE N’EST PAS CELUI DE L’AMÉNAGEMENT IL FAUT ATTENDRE QUE LA VIE S’EMPARE D’UN QUARTIER, QUE LES CHANTIERS SOIENT ACHEVÉS POUR QUE LES COMMERCES TROUVENT UNE CLIENTÈLE.

(cafétérias, bibliothèques, etc.). Créer des architectures aimables à l’espace public, avec des socles de grande hauteur sous plafond pour faciliter l’adaptabilité des usages, y imaginer des activités et des services générateurs d’animation qui ne soient pas uniquement fondés sur le commerce, rendre les halls d’immeuble ouverts, lumineux et accueillants, habiter les rez-de-chaussée, retourner l’activité de tous les programmes vers la rue alors qu’elle se centre sur les atriums… Le champ des possibles est vaste et l’amicalité à la rue et à l’espace public permet de lutter contre l’enfermement du bâti sur soi. La vitalité des rez-de-chaussée est décuplée quand les programmes sont issus d’initiatives indépendantes souvent plus inventives que la programmation traditionnelle. - Le socle des bâtiments est un espace de liberté La conception du socle des bâtiments pourrait favoriser l’évolutivité, notamment en exploitant le potentiel des étages (entresol, duplex, etc.). En effet, le commerce ou les grands programmes ne s’installent pas au moment de la livraison des immeubles. Le temps des rez-de-chaussée n’est pas celui de l’aménagement : il faut attendre que la vie s’empare d’un quartier, que les chantiers soient achevés pour que les commerces trouvent une clientèle. De plus, les programmes évoluent avec le temps, comme l’économie et les modes de vie. Aussi est-il opportun de garder des marges d’adaptation indispensables à la fabrication permanente de l’urbain. On ne peut imaginer figer dans une enveloppe réglementaire trop stricte un lieu d’accueil, d’appropriation et d’interactions sociales. Pour valoriser les rez-de-chaussée, de nouvelles règles du jeu sont à imaginer pour permettre l’invention architecturale, la négociation, l’écart par rapport aux habitudes et l’initiative individuelle. Permettre l’innovation, la marge, plus de permissivité dans les usages et dans les formes, échapper à l’excès du « bon goût » qui stérilise et uniformise l’espace urbain, serait bienvenu par ailleurs. La règle et la négociation peuvent jouer dans le sens de la richesse, de la diversité et de l’évolutivité des rezde-chaussée, à l’image des nouvelles pratiques newyorkaises qui inscrivent dans les enjeux d’aménagement la revitalisation urbaine du niveau rue.

La ville, c’est le commerce en pied d’immeuble ! Les villes se sont fondées sur le négoce, et l’espace public a toujours été le lieu d’échange et de circulation des richesses. Certes, rêver de rez-de-chaussée commerciaux généralisés est chose commune, mais l’évolution perpétuelle des modes commerciaux, le règne toujours dominant des grandes surfaces et de la périphérie, de même que les nouvelles pratiques de vente virtuelles n’aident pas à fabriquer ces pieds d’immeuble commerciaux dont tous les opérateurs rêvent. La technicité est grande en la matière, et fabriquer les centralités ou polarités favorisant la ville des courtes distances ne va guère de soi. Dans la ville consolidée ou en opérations urbaines, l’effort et l’inventivité sont de mise et les aménageurs ont un rôle majeur à jouer, tant en termes de commande architecturale que de politiques incitatives pouvant aller jusqu’à la maîtrise des murs, pour garantir une bonne fin aux projets commerciaux de pied d’immeuble. C’est ce qui est réalisé à Paris-Rive gauche ou dans le quartier Andromède de l’agglomération toulousaine. Hors de l’Hexagone, le cas de Birmingham franchit une étape supplémentaire, l’opérateur gardant la gestion des rez-de-chaussée et définissant une politique claire de péréquation générant une vie au sol liée à la qualité des lieux et des programmes. La qualité du niveau zéro garantit celle de l’ensemble de l’opération. Toutefois le risque de banalisation est fort et l’architecte urbaniste Bernard Reichen tente notamment à Romainville, en Seine-Saint-Denis, de lutter contre la généralisation des malls commerciaux en créant des « folies » susceptibles d’accueillir des programmes plus innovants et diversifiés. Plus largement, il défend la ville des « petits investissements » aux côtés de la ville des « grands investissements. » Et la cohabitation de commerces de destination avec des fonctions de proximité reste un enjeu malaisé à atteindre. Chose à laquelle se sont attelées la Ville de Paris et la Semaest avec le programme Vital’Quartier, qui tente de répondre à la déshérence ou à la spécialisation des rues, programme peu copié par d’autres villes mais dont le bilan est prometteur.

Juilliard School New York © Paul Masck


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Harlem Madison Avenue © D. R.

Petits et grands dispositifs urbains à New York Ville monde, ville des affaires, ville gratte-ciel, New York est surtout la ville du piéton, la ville qui a inventé les tours amicales à la rue, les larges trottoirs et l’animation permanente propice à la flânerie. Ville du commerce par excellence, elle offre aussi dans les lieux d’habitat de petits dispositifs urbains organisant en demi-niveaux des cours anglaises et entresols pour le logement. Ces dispositifs s’étendent aux commerces, avec de petites plates-formes sur lesquelles peuvent s’ouvrir des restaurants ou des cafés et qui donnent accès aux magasins en créant des sas entre eux et la rue. La politique urbaine proactive en matière d’urbanisme des deux mandats du maire Bloomberg favorise aujourd’hui la création de cafés-trottoirs – chose en fait peu courante dans cette ville – par des incitations et des règles urbaines. Lesquelles favorisent aussi, dans le droit fil des politiques précédentes, les piazzas intérieures qui assurent des continuités urbaines entre deux espaces publics, lieux où l’on peut s’asseoir librement sans consommer. Les espaces extérieurs ne sont pas en reste. Déjeuner avec table et chaises libres s’offre de plus en plus au passant, tant dans les espaces publics qui bordent la rue que dans des salons urbains installés dans tout espace disponible. Il est à noter, dans les politiques publiques récentes de cette municipalité très ambitieuse en matière urbaine, des règles spécifiques destinées à mettre en valeur des rues mythiques comme la 125e Rue à Harlem. Ces règles permettent de lutter contre un fléau général, la stérilisation urbaine par la généralisation des banques et des compagnies d’assurances en pied d’immeuble, en défavorisant l’installation d’activités peu créatrices d’animations. Sans exclure ces dernières, elles les autorisent à bénéficier d’un accès sur rue à l’entresol où elles se situent mais leur interdisent d’occuper le linéaire urbain.

Preuve s’il en est du rôle assigné à l’interaction entre espace public, traitement des rez-de-chaussée multiples et animation : la savante organisation du passage entre la rue, la High Line (promenade plantée née de la reconquête d’une ancienne voie ferrée dans le sud de Manhattan) et les bâtiments nouveaux qui intègrent les passages entre rue et promenade haute. Extension du Lincoln Center, la Juilliard School, œuvre de l’agence américaine Diller Scofidio + Renfro, illustre le soin accordé au rapport à la rue, au séjour des p romeneurs, dans une organisation savante entre trottoir, place basse le long d’un double niveau de rezde-chaussée transparent, accueillant une cafétéria, un jeu d’escaliers tournant le dos à la voie orienté vers le volume transparent qui crée calme, vue pour les personnes assises et spectacle vivant pour le rezde-chaussée bâti. Un rez-de-chaussée pluriel, à étages, intérieur et extérieur… Cette mise en scène urbaine est jouée sur un mode plus mineur par nombre de nouveaux immeubles, tel celui du tandem Herzog et de Meuron, à Soho, au décor urbain de grilles sculptées. Malgré le coût foncier prohibitif de Manhattan, le rez-de-chaussée peut aussi être constitué de jardins collectifs associatifs, offrant potagers, lieux de fêtes, lieux de calme, accueillant un théâtre de plein air et géré par les usagers. L’art du bien manger s’illustre aussi dans la vitalité des rez-dechaussée. Une règle étonnante, définie par l’agence d’urbanisme de la Ville, incite les commerces à vendre des produits frais dans les quartiers difficiles, le Bronx, le Queens, etc., par une augmentation des droits à construire ; cela afin de lutter contre l’obésité. De manière plus « bobo », des marchés bios s’implantent en plein cœur de ville sur l’espace public, accompagnés de chaises et de tables mises à disposition de l’usager pour consommer sur place. S’illustrent ainsi de microdispositifs urbains qui permettent une ville de la spontanéité, du frottement, de l’interaction – l’essence même de la vie urbaine !


High Line New York © David Berkowitz

Régénérer les entrées de ville est-il un rêve impossible ? Transformer les entrées de ville cernées de parkings en quartiers mixtes ouverts sur l’espace public est un thème récurrent depuis fort longtemps, mais dont l’aboutissement peine à voir le jour. Cette préoccupation touche aussi la poursuite du développement des zones périphériques malgré la mort annoncée des mégacentres commerciaux qui est loin d’être suivie d’effets en France, si l’on en croit le nombre et la taille des projets en cours ou annoncés. Ces espaces seront-ils de futures friches, comme le prédisent, avec espoir sans doute, nombre d’acteurs de la ville ? Rien n’est moins sûr quand on comprend le mécanisme de production et la difficulté juridique, financière et opérationnelle de transformer ces lieux en quartiers et de délocaliser les « boîtes » tant honnies. Cela sans oublier la multiplication des drives, lieux de récupération des commandes Internet qui se réalisent sans le moindre contrôle urbanistico-qualitatif. Deux opérations retiennent l’attention dans une démarche d’optimisme méthodologique et d’expérimentation : la Route de la mer, à Montpellier, et Pont-de-l’Âne Monthieu, à Saint-Étienne. Elles jouissent de conditions idéales : maîtrise d’ouvrage puissante en appui sur un portage politique assuré, partenariat avec les groupes commerciaux, projets urbains de qualité dessinés par deux Grands Prix de l’urbanisme (Bernard Reichen et David Mangin), transports en commun performants, expertise de haut niveau… Mais les obstacles sont nombreux et les spécialistes commerciaux – le bureau d’études Bérénice et la consultante Sophie Simonet – expliquent les étapes à franchir. Si ces opérations expérimentales réussissent,

le mode d’emploi sera enfin trouvé, ouvrant la voie aux nombreux projets français du même type en recherche de solutions. Soyons optimistes et espérons ainsi démontrer qu’il est possible que le commerce en périphérie serve la ville au lieu de la détruire. Mode d’emploi Réaliser les enjeux précités passe par quelques évolutions qui se font jour. – Les synergies entre le public et le privé sont indispensables. Cependant le rez-de-chaussée ne peut pas seulement être un pur produit financier. Il faut aussi accepter d’investir à plus long terme et développer une inventivité dans les mécanismes de financement pour avoir la diversité qui convient, car c’est souvent ce qui rapporte le moins qui crée le plus de valeur… – Il n’y a pas d’obstacles techniques ou juridiques majeurs pour mieux concevoir les rez-de-chaussée. Mais les savoirs techniques restent à acquérir ou à diffuser, du côté des pouvoirs publics comme du côté des opérateurs privés, ce qui nécessite de sortir des pratiques professionnelles traditionnelles de chacun. – Il faut également accepter l’esthétique des rez-dechaussée, celle de l’animation, du temporaire, de l’appropriation : un désordre – ou un ordre différent – auquel nous tous, concepteurs, bailleurs, collectivités, État, ne sommes pas nécessairement habitués.


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En conclusion Le projet des rez-de-chaussée est source d’économie globale, notamment dans les quartiers les plus sensibles. Des rez-de-chaussée actifs offrent une surveillance naturelle des lieux, donc une sécurité sans barrière ni coercition. Enfin les rez-de-chaussée sont par nature durables s’ils permettent flexibilité, accueil d’initiatives et réversibilité. Et il faut échapper au règne du bon goût qui est sans doute destructeur lorsqu’il est poussé dans les limites de l’ennui, et accepter une forme d’esthétique du désordre. Le commerce se plaît aussi à une forme d’intimité que les urbanisations contemporaines, aux espaces surdimensionnés, ne savent pas favoriser. Revoir les dimensions et les distances entre les objets, comme le préconisait l’architecte urbaniste barcelonais Manuel de Solà-Morales, s’impose en relecture de nombre d’échecs de places ou rues destinées à l’animation et qui peinent à y parvenir. Autant de questionnements qui interpellent les acteurs de la ville, pour de meilleures synergies qui seraient au service de rez-de-chaussée d’intérêt public, pour réussir la ville aimable, celle du piéton et du plaisir de la déambulation, sûre et intense. High Line New York © Beyond my ken

High Line New York © Jessica Sheridan


TOIT SUR TOIT PROPOS RECUEILLIS LORS DU COLLOQUE SUR LA SURÉLÉVATION DE PARIS ORGANISÉ PAR LE LABORATOIRE ACS xixe-xxie SIÈCLES – UMR/AUSSER C.N.R.S./MCC N° 3329 ET QUI S’EST TENU LE 16 JANVIER 2014 À L’ÉCOLE SUPÉRIEURE NATIONALE D’ARCHITECTURE PARIS-MALAQUAIS.

Le colloque « Toit sur Toit » avait pour ambition de convoquer les domaines de l’architecture et de la politique autour de la question de la surélévation à Paris. Ce sujet était présent dans les discours électoraux des principaux partis se présentant à la Mairie de Paris. Il est rare qu’un sujet architectural, urbain et paysager occupe une telle importance dans le monde politique. L’objectif était donc de s’ancrer dans la dynamique des élections municipales pour intensifier et ouvrir le débat. Une exposition accompagnait le colloque. L’École est le lieu d’une recherche et d’une expérimentation dynamique et perpétuelle. Le débat politique et architectural sur les diverses questions que pose la surélévation à Paris prend sens dans ses murs au contact des étudiants, des enseignants et des chercheurs de l’ENSA Paris-Malaquais, dans une école au centre de la Ville et ouverte sur celle-ci. Mais les enjeux concernent un public plus large que celui de l’école. Ce débat est une occasion pour porter l’architecture et les architectes sur la place publique. La surélévation de Paris est une histoire ancienne. Contenue dans des enceintes successives, la ville ne pouvait pas s’étendre horizontalement, elle s’est énormément développée par le rehaussement des immeubles existants, cela de manière courante jusqu’au xxe siècle. Ce processus s’est trouvé modifié avec l’avènement des logiques de contrôle règlementaire,

Ce colloque est issu des réflexions portées par les recherches « Plus de toit » effectuées dans le cadre de Paris 2030 et « L’épiderme aérien des villes au regard de la question de l’énergie et des modes de vie : prospective des formes et des stratégies architecturales et urbaines. "Learning from" Chicago, Montréal, Paris », faite dans le cadre de l’appel d’offres « Ignis Mutat Res - Penser l’architecture, la ville et les paysages au prisme de l’énergie » par le Bureau de la recherche architecturale, urbaine et paysagère du ministère de la Culture et de la Communication. En partenariat avec l’Observatoire SITQ du développement urbain et immobilier à l’Institut d’urbanisme, Faculté de l’aménagement de l’Université de Montréal, Canada ; Groupe d’intérêt scientifique Climat-environnement-société, Paris ; Institut des sciences de l’environnement (ISE) rattaché à la Faculté des sciences de l’Université du Québec à Montréal, Canada.

LA SURÉLÉVATION DE PARIS EST UNE HISTOIRE ANCIENNE. CONTENUE DANS DES ENCEINTES SUCCESSIVES, LA VILLE NE POUVAIT PAS S’ÉTENDRE HORIZONTALEMENT, ELLE S’EST ÉNORMÉMENT DÉVELOPPÉE PAR LE REHAUSSEMENT DES IMMEUBLES EXISTANTS, CELA DE MANIÈRE COURANTE JUSQU’AU xxe SIÈCLE.

qui ont cadré cette pratique, pour des raisons esthétiques et hygiénistes, et l’ont ainsi rendu plus ponctuelle. Aujourd’hui, la surélévation et la modification des toitures sont redevenues des sujets d’actualité. L’enjeu du colloque et de l’exposition « Toit sur Toit » est d’interroger les potentialités qu’offre l’objet toit à Paris au travers de plusieurs questions : comment le toit peut-il accompagner une politique environnementale et énergétique de la ville ? Quelle politique de densification peut accompagner la surélévation ? S’agit-il de surélever les dents creuses ou de créer des points d’intensité dans la ville ? Comment la surélévation peut-elle participer à l’évolution heureuse d’un bâtiment, aussi bien en termes esthétiques et formels qu’en termes énergétiques et règlementaires ? Dans quelle mesure et à partir de quel seuil, l’occupation des toits peut-elle devenir un enjeu foncier et économique pour la ville ? Comment repenser les règlements urbains pour générer une politique de surélévation cohérente et fructueuse ? Le colloque « Toit sur Toit » se fonde sur des propositions entre fiction et réalisme conçues par trois jeunes équipes d’architectes qui présenteront leurs travaux sur la surélévation. Des chercheurs et des politiciens de différents bords réagiront et débattront. Entre les déclarations d’intentions des partis candidats et les suggestions hors normes des architectes, comment permettre et inventer ce que seront les toits parisiens de demain ?


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Image extraite de la consultation sur l'habitabilité du toit © Naudin Séevagen

Intervention de Rosa Naudin et de Vivien Séevagen / NS architectes Paris n’était-elle pas déjà assez dense ? Faut-il la densifier en construisant sur les toits ? Il faut d’une part équiper les toits de manière simple pour récupérer l’énergie par des dispositifs, et d’autre part, offrir une balade touristique au-dessus des toits : profiter du panorama, du skyline de Paris. On y accéderait par un dispositif très simple d’échafaudage, qui se fondrait dans le paysage, on peut apporter des réponses discrètes, une architecture à laquelle tous les habitants de cette ville sont habitués inconsciemment. Il faut densifier à l’extérieur de Paris. Ainsi ramener un peu d’unité et de cohérence architecturales à toute cette première couronne, et même à toutes ces couronnes autour de Paris. La surélévation serait un principe, poser un élément au-dessus des maisons pour retrouver une régularité. Cela constituerait le modèle, un protocole, que chacun ensuite individuellement ou en s’associant avec les voisins viendrait s’approprier, adapterait, plus ou moins en retrait de la rue selon la construction existante. Le protocole s’accorde aussi selon la place de la surélévation. Si elle est à l’intérieur du périphérique, dans certains quartiers historiques, son objet est de rester discrète, voire invisible. Il ne s’agit pas de surélever seulement pour rendre les toits efficaces, ou pour habiter davantage l’espace. La densité en intramuros est déjà important. En densifiant autour on injecte de la valeur.

Intervention de Benoit Chanteloup, Thomas Landemaine et Nino da Silva / CLS + architectes Le toit et la potentielle surélévation apparaissent comme un « levier » qui permet de mettre en œuvre des solutions, notamment quant à la question du foncier, au problème énergétique des toitures parisiennes, qui aujourd’hui sont très difficilement isolables et isolées, et aussi une solution pour permettre de réfléchir à de nouvelles énergies.

Image extraite de la consultation sur l'habitabilité du toit © CLS + architectes

Le toit est envisagé selon trois axes de réflexion : la visibilité, le rapport entre les masses, et enfin une stratégie globale de territoire. Les deux enjeux principaux sont : la visibilité lointaine. On peut avoir une image forte d’un projet de surélévation depuis un point de vue éloigné ; et une visibilité plus proche, qui serait celle dans les rues adjacentes du site, où on ressent un rapport plus fort à l’avoisinant, au patrimoine, un rapport plus fort d’implantation dans le contexte. Le deuxième point de réflexion est le rapport entre les masses, les pleins et les vides. De l’image des masses bâties, on dégage l’image d’un nouveau territoire, celui du sol des toits. On a une image onirique de ce que pourraient être les toits, un territoire qui a ses propriétés propres, sa topographie, des dévers ou des zones inconstructibles. Il faut venir s’inscrire sur cette cinquième façade, les considérer comme un sol. Est-ce un sol dur, qui peut être un toit terrasse, ou est-ce un sol plus mou, plus difficile à travailler, comme des toitures zinc ? Il faut prendre en compte la masse et la hauteur, pour ne pas bloquer la lumière. Reste la question de la visibilité, qui se lie à l’image protégée de Paris. Il s’agit de mettre en place une stratégie de conquête. Apporter cette densité, c’est aussi lutter contre l’augmentation aberrante du foncier dans Paris. Cette réponse ne se veut pas univoque, il s’agit d’entreprendre une variété d’opérations à différentes échelles, avec une diversité en fonction de la nature des toits, et selon le lieu où il semble plus ou moins judicieux de s’implanter. L’idée d’espace public pousse la réflexion à sortir de la question de la surélévation d’immeuble à immeuble et nous amène à la question d’une autre échelle. Il s’agit de créer une nouvelle promenade dans une logique d’ensemble pour créer un nouveau lieu de sociabilité à partager. Une des premières choses que l'on enseigne aux étudiants en architecture, c’est se dire que le toit est là pour protéger des éléments météorologiques, soit de la pluie, du vent, du soleil. Or il s’agit davantage de considérer le toit comme une interface et comme un espace de captation de ces énergies naturelles.


LES RAISONS SONT PROGRAMMATIQUES, C’EST-À-DIRE QU’ON CHERCHE À OPTIMISER SES BUREAUX OU SON LOGEMENT PAR EXEMPLE ; MAIS AUSSI ÉCONOMIQUES, IL S’AGIT D’ARRIVER À RENTABILISER DAVANTAGE UN BIEN GRÂCE À LA SURÉLÉVATION.

Intervention de Maria-Bruno Fabrizi et Fosco Lucarelli / Microcities architectes Aujourd’hui la distinction entre le temps de travail et le temps de vie s’affaiblit progressivement. D’après ce constat, le toit pourrait être utilisé pour imaginer la possibilité d’augmenter les réseaux et les programmes de la maison et du domestique. Le toit serait un élément ouvert qui dans le temps pourrait prendre différentes formes, tout en respectant certains éléments. La surélévation est envisagée comme un petit élément qui peut s’adapter, qui est dédié à un programme (de buanderie, d’équipement ou de crèche par exemple), et qui reste en devenir par rapport aux bâtiments sur lesquels il va se poser. On pourrait ainsi agencer plusieurs éléments pour créer des espaces de vie complémentaires à l’habitat existant. L’élément devrait être autonome en énergie et structurellement indépendant. La ville est faite de strates, de choses qui se construisent les unes sur les autres, ce n’est pas quelque chose qu’il faut cacher, oublier ou négliger. Paris peut grandir, elle ne perdra pas son importance, son charme, et elle doit intégrer les questions de l’efficacité énergétique, de la densité, de l’importance d’offrir plus de services. Il ne faut pas avoir peur de changer l’image d’une ville, c’est sa nature.

Intervention de Philippe Simon / architecte, chercheur au laboratoire ACS xix-xxiesiècles Paris est surélevé, et il était important de comprendre comment, pourquoi, à quelle époque et pour quelles raisons. Dépouiller les permis de construire archivés permet d’analyser les documents des architectes et des pétitionnaires de l’époque, d’analyser la manière dont la ville de Paris a accepté ou refusé les permis de construire. C’est assez fascinant d’observer que les villes aujourd’hui, les villes denses, les villes centres, évoluent à partir d’un « déjà là ». Il n’y a pas une démolition pour une reconstruction, mais des tonnes de petites modifications. On les trouve partout sans y prêter attention. C’est totalement invisible, je pense que la plupart des Parisiens et des touristes ne voient pas que la ville a été surélevée, notamment via les constructions du boulevard Sébastopol ou de la place de Clichy. Les raisons sont programmatiques, c’est-à-dire qu’on cherche à optimiser ses bureaux par exemple ; mais aussi économiques, il s’agit d’arriver à rentabiliser davantage un bien grâce à la surélévation. À cela s’ajoutent des raisons esthétiques, la surélévation permet de « cacher » de nouveaux dispositifs environnementaux, elle permet de les intégrer à une architecture, à un paysage. On peut au contraire vouloir « rendre visible ». Mais on peut surélever de manière modeste. Quand on observe les boulevards parisiens, on constate qu'un immeuble sur deux a été surélevé avec un ajout de un à deux niveaux.

Intervention de Cedissia de Chastenet / architecte, urbaniste, adjointe au chef du Service technique de l’habitat de la Mairie de Paris. Quel impact sur le paysage urbain a la surélévation des toits de Paris ? Rappelons que plus de 80 % du territoire est protégé à Paris, c’est donc toujours très compliqué d’y construire. Pourtant on voit qu’il y a de plus en plus de demandes de permis pour des surélévations depuis 2006, ce qui peut s’expliquer par l’augmentation du prix du foncier. La surélévation a toujours existé à Paris, tous les bâtiments sont surélevés, cela fait partie de l’histoire de la ville. Mais auparavant il était indiqué qu’il s’agissait d’une construction sur les permis de construire, et non d’une surélévation.

Image extraite de la consultation sur l'habitabilité du toit © microcities architectes


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Le potager de l'hôtel Pullman par Topager © David Haddad

Cependant on pourrait se heurter à la copropriété dans un projet de surélévation. La copropriété a très peu intérêt à voir se construire sur son toit « un chemin », qui va aller sur un autre toit. Dans le cas où il y aurait un problème de fuite d’eau par exemple, cela génère des problèmes immenses, et infinis, insolubles, juridiques et techniques. Personne n’a donc vraiment envie d’entreprendre un tel projet, avec les risques à la fois très coûteux, et les ennuis de gestions que cela pourrait générer. De plus on peut constater que Paris n’a pas capacité d’accueillir beaucoup plus d’habitants, et donc de se densifier. Cela pose à nouveau des problème de gestion. En revanche, en première ou seconde couronne, on peut commencer à réfléchir sérieusement à une stratégie de densification. Il faut faire des cartes à une autre échelle, franchir la frontière du périphérique. C’est l’enjeu de la construction de la Métropole annoncée pour dans deux ans, et la question des toits le cristallise.

Intervention de Vincent Renard / économiste, directeur de recherche au CNRS et chercheur associé à l’IddriSciences Po La politique publique doit harmoniser son discours dans les faits. D’une part on va vers la « libération » en encourageant des projets de surélévation, de densification de la ville de Paris, mais face aux propositions de projets les architectes et autres concepteurs se retrouvent face à une porte verrouillée.

Intervention de Sabri Bendimérad / architecte, chercheur au laboratoire ACS xix-xxie siècles Paris connaît actuellement des projets encourageant l’agriculture sur les et la végétalisation des toits. Dès lors, le toit est-il facteur de densité ou compense-t-il la densité ? Prenons l'exemple d'AgroParisTech et le projet de Nicols Bel (Topager), qui se situe en plein centre de Paris, sur le toit de l’hôtel Pullman. Personne ne soupçonne qu’il y a un jardin sur ce toit. Les expérimentations produites sont très intéressantes, puisqu’il s’agit d’alléger les sols, de recréer les sols artificiels, de travailler aussi sur le goût… C'est presque une forme de terroir qui est cherchée ici, un terroir aérien, une nouvelle forme de rapport au territoire.

Intervention de Nicolas Bel / ingénieur, co-créateur de Topager Après des tests sur la pollution : on a constaté que les seules pollutions qu’il y avait dans les légumes analysés venaient du sol et pas de l’air. Ainsi les métaux lourds, selon plusieurs études compilées, restent plutôt au niveau du sol, donc on est assez préservés de la pollution urbaine sur les toits. Végétaliser les toits serait privilégier au maximum ce qui peut avoir une valeur ajoutée en « première fraîcheur ». Ce sont des Chefs, notamment de grands restaurants, comme la Tour d’Argent qui ont d’abord vu tout l’intérêt de ce projet, notamment par rapport à l’intérêt gustatif, au goût des produits qui est lié à la fraîcheur. L’idée est de réduire le temps entre la récolte et la consommation. Sur le toit on peut avoir un microclimat différent, plus chaud, plus sec ; on pourrait donc créer une prairie méditerranéenne, qui s’auto-entretient grâce à l’écologie fonctionnelle. Il s’agirait d’avoir des toitures sans entretien, et qui participent à l’effort nourricier de la ville, par exemple en permettant la cueillette sauvage. On peut aussi y trouver une dimension thérapeutique et faire un jardin sur le toit d’une maison d’accueil pour adultes handicapés, enfants autistes et personnes âgées, récréer des zones de biodiversité, des potagers avec des objectifs curatifs.

Intervention de Chantal Pacteau / directrice de recherche au CNRS, directrice adjointe du Groupe d’intérêt scientifique « Climat, environnement, société » Le défi est de rendre les villes productrices plutôt que consommatrices et d'envisager le toit comme un composant d’un système complexe, générant des externalités positives, partagées au sein d’un territoire. Pour nous, les toits sont un espace multifonctionnel, dont les services sont rendus à l’ensemble des acteurs, et pas seulement à ceux du bâtiment sur lequel est ce toit, et des êtres vivants d’ailleurs, et à toutes les échelles : bâtiment, quartier, ville, territoire. Les études menées sur le toit posent la question du « comment ». Comment les toits peuvent-ils contribuer à la complémentarité, à l’autonomie énergétique, alimentaire, etc. ? Comment repenser les toits pour favoriser une nouvelle culture de l’habiter où les rapports à l’énergie et au système


Les travaux des étudiants présentés ont été produits dans le cadre du module de projet « Actualités des processus historiques de densification de Paris », Ensa Paris-Malaquais, coordonné par Philippe Simon, avec Christelle Lecœur, Carla Deshayes et Nils Le Bot.

Les Échelles du Baroque, place de Catalogne, Paris 14e © Nikki Beuneiche et Chloé Otton, École nationale d’architecture Paris-Malaquais

LA SURÉLÉVATION RELÈVE D’ENJEUX À « PLUSIEURS NIVEAUX », ET REPOSE SUR DE NOMBREUX ACTEURS, DONT L’HABITANT, L’USAGER SEUL.

naturels servent les principes générateurs ? Comment réaménager les toits pour que nos villes soient plus résilientes, résistantes, qu’elles encaissent les chocs, mais aussi qu’elles s’adaptent aux chocs, qu’elles évoluent avec les perturbations auxquelles elles sont soumises ? Compte tenu des modalités d’aménagement des toits, des structures, des équipements, des revêtements, etc., quels sont les principaux défis pour assurer une transition viable ? Et quels sont les principaux acteurs qui doivent participer à ces affaires ? Et enfin, quelles sont les politiques publiques, les cadres réglementaires, les contraintes, les risques en matière de sécurité, santé, incendie, assurances, etc. ? La surélévation relève d’enjeux à « plusieurs niveaux », et repose sur de nombreux acteurs, dont l’habitant, l’usager seul. On est vraiment dans une approche du toit qui va bien au-delà de la question architecturale ; ça concerne l’habitat, le loger, comment faire pour loger « en haut » avec les problèmes de santé que cela incombe1 ? On parle aussi de la question du foncier : quand il y a du vert, quand il n’y en a pas. Il faut considérer le toit dans une approche systémique, au contraire de parcellaire, et aborder les questions de santé en lien avec le logement. 1 Le fait de dormir dans une chambre sous les toits multiplie le risque décès par quatre.

Intervention de Luc Abbadie / professeur à l’UPMC, directeur Institut de l’écologie et des sciences de l’environnement de Paris La ville aujourd’hui, c’est un milieu qu’on ne perçoit pas comme milieu de vie du vivant, et pire, c’est un milieu aujourd’hui qui peut constituer un obstacle à la survie des espèces. L’enjeu de savoir si la zone urbaine est perméable aux espèces, si elle tolère les espèces, cela devient vital bien au-delà du milieu urbain. Il faut travailler sur le retour de la nature en ville. C’est un enjeu fonctionnel à l’échelle de la biosphère. Et aujourd’hui le plus gros potentiel est sans doute du côté des toits. Rétablir une nature en ville, c’est un objectif écologique majeur. Sur le plan climatique, la nature est diffuse, celle qui est dans les rues, l’arbre d’alignement, la pelouse en bas. Finalement celle qu’on peut mettre sur les toits c’est celle qui va concerner la plus grande partie des habitants. Donc l’enjeu de la végétalisation des toits, dans une vision très utilitariste en quelque sorte, est extrêmement important. La plus grande partie des personnes seront concernées par ce qui se passe sous leurs fenêtres et moins dans le parc qui est à 2 ou 300 mètres. L’enjeu à Paris, c’est la végétalisation de proximité. Un toit végétalisé doit rentrer dans une géométrie du vivant. Un toit peut rendre des services climatiques, sur la biodiversité, sur l’agriculture, il peut fixer des polluants, il peut aussi au passage en produire. Il faut équilibrer les choses, avoir une vision intégrative, ce que fait finalement un système naturel. On peut combiner des panneaux solaires et de la végétation. Le succès d’un écosystème de toit peut dépendre d’un peu d’ombre produite par un panneau solaire, et un panneau solaire fonctionnera d’autant mieux qu’il y aura l’effet refroidissant par l’évaporation de la végétation autour. Donc cette vision systémique correspond à une réalité du monde vivant.


43 MATERIALISATION D’UN TOIT

SURELEVATION DE L’EXISTANT

SUR LE TOIT BASSIN D’AGREMENT

3 BASSINS DE RECUPERATION DES EAUX

3200 m3

36 EOLIENNES A AXE VERTICAL GIROMILL

72 000 kWh /an

8 CUVES D’EAU CHAUFFEE THERMIQUEMENT

NOUVEAUX VOLUMES

2800 m3

EDICULES TECHNIQUES

USAGES CREATION D’ESPACES EN TOITURE ET ACCES

1. 2. 3. 4. 5. 6. 7.

LABORATOIRES

4080 m2

LABORATOIRES, SALLE INFORMATIQUE, LOCAUX ADMINISTRATIFS CHAMBRES

1800 m2 675 m2

LOCAUX ADMINISTRATIFS, CHAMBRES

1800 m2

RESTAURANT, BAR ET LOCAUX ASSOCIES SUITES CHAMBRES

8.

AUDITORIUM

9.

STATION METEO

900 m2 860 m2 630 m2 1800 m2 50 m2

MACHINERIE: RENDRE AU TOIT SES FONCTIONS TECHNIQUES

BASSINS D’EAU DE PLUIE ALIMENTER LE BATIMENT

UTILISER L’ENERGIE EOLIENNE COMME ELEMENT ARCHITECTURAL

Les barres Cassan, université de Jussieu, quai Saint-Bernard et rue Cuvier, Paris 5e ÉOLIENNES

PROMENADE PLANTÉE

PANNEAUX PHOTOVOLTAÏQUES

LOGEMENTS

ÉQUIPEMENTS

LOGEMENTS

© Teresa Chamorro, Pauline Goffin, Elias Nourry et Natalia Yunis, École nationale d’architecture Paris-Malaquais

SYSTEME ENERGETIQUE

VENTILATION

STRUCTURE

ACCÈS / ESCALIER COURS

Les boulevards de Bastille à République © Lisa Poletti-Clavet, Lucille Roland et Julie Solfeldt, École nationale d’architecture Paris-Malaquais PROGRAMME IMPLANTE

CIRCULATIONS Prolongation des circulations et création d’un nouvel accès au restaurant

ILOT EXISTANT ET VOLUME CAPABLE

La rue d’Aubervilliers, Paris, entre le 18e et le 19e © Laila Martinez Diaz, Aude Ndzana Ekani, Eleana Polychronaki et Maud Schmiel, École nationale d’architecture Paris-Malaquais

Le front de parc de Bercy, Paris 12e © Madeleine Devineau, Annalucia Senatore et Marguerite Wable, École nationale d’architecture Paris-Malaquais


Lors de ce colloque, un des enjeux qui pointe sans être nommé est la question du confort. L'élu doit par définition rechercher l’intérêt général, arriver à trouver une forme de synthèse, avoir une approche d’ensemble, écosystémique. Les toits constituent un enjeu considérable, de par l’étendue des champs qu’ils touchent a fortiori. Il faut remonter effectivement très en amont de la conception, et pas simplement de Paris intramuros, mais de l’articulation de Paris dans son périphérique avec ses alentours, pour avoir un système ajusté. Il faut remettre un peu d’ordre, de priorité, d’équité et de sens dans ce qui est fait, et fédérer l’ensemble des idées pour que toutes « ces idées de toits » prennent du sens, de la cohérence, et c’est peut-être là le rôle du politique. Le toit considéré seul n’a pas d’intérêt. Il ne doit pas être le lieu qui condense « ce que l’on n'a pas réussi à faire dans la rue » ou que l’on a perdu ailleurs, comme les lieux de socialisation. Le toit doit s’articuler avec la rue, avec le paysage urbain, à l’échelle de l’îlot, à l’échelle de la ville. Cela veut dire aussi qu’il faut revoir toute la méthodologie de gestion des permis de construire. Entre le fait d’une part qu’ils soient entre les mains d’une seule personne, et d’autre part qu’il n’y ait aucun droit de regard des citoyens sur les permis délivrés, on va à l’encontre de l’appropriation collective de l’aménagement de la ville.

Photographies d'études : Anvers, rue de Flandres, rue de Rivoli, rue de Rome

© Toit sur toit

LES TOITS CONSTITUENT UN ENJEU CONSIDÉRABLE, DE PAR L’ÉTENDUE DES CHAMPS QU’ILS TOUCHENT A FORTIORI.

Or un écosystème, cela ne se construit pas avec un décideur pour les autres, il y a risques de confrontations, et de perdre de vue l’intérêt général, l’objectif du vivre ensemble. Si l'on n’implique pas les citoyens dans la construction de leur ville, en même temps que l’on construit la ville, on ne construit pas la ville durable.


45 UN EXEMPLE CONTEMPORAIN DE SURÉLÉVATION

Une toiture vétuste en tuile, un besoin urgent de la remplacer, mais avec une volonté de transformer ce qui pourrait être une simple rénovation en architecture. Le projet renouvelle la vision de la mansarde parisienne, entre contemporanéité et sobriété. Le zinc anthracite tranche avec la façade enduite blanche du bâtiment existant. Les combles semblent s'être posés ici, perchoir de lumière. Une terrasse intime et à la fois belvédère sur la ville vient se nicher en creux dans la toiture, protégée des vues.

aūtenta | atelier d’architecture Programme : Surélévation et création de terrasse Situation : 19 rue Joseph-Dijon, 75018 Paris Maîtrise d'ouvrage : GTF syndic de copropriété Maîtrise d'œuvre : aūtenta Mission : complète (consultation en cours) Budget : NC Surface : 98 m2 Superficie du terrain : 161 m2

Avant

Après

« Toit sur toit » est le nom d’un collectif regroupé autour de Sabri Bendimérad, Carla Deshayes, Léa Mosconi et Philippe Simon. Outre ce colloque ont été organisées une exposition éponyme à la Maison de l’architecture en Île-de-France et une série de trois autres colloques. Une publication de toutes ces productions est prévue en 2015.

Colloque ToiT sur ToiT 3/3 JeuDi 04 DéceMbre 2014 ∆ 18h - 21h eNSA PAriS-MALAquAiS, AMPhi 2 DeS LogeS, 14 rue boNAPArte, PAriS 6e Pour LA MoDiFicAtioN DeS toitS : queLLe StrAtégie ArchitecturALe et urbAiNe Pour L’AggLoMérAtioN PAriSieNNe ?

L'acte 3 du colloque se tiendra le jeudi 4 décembre 2014 de 18h à 21h à l'ENSA Paris-Malaquais, dans l'amphithéâtre 2 des loges, 14 rue Bonaparte, Paris 6e. INTERVENTION DE Philippe Simon, architecte DPLG, enseignant à l’ENSA Paris-Malaquais, chercheur au laboratoire ACS xix-xxie siècles Marie Dehaene, ingénieure en paysage, spécialiste en agriculture urbaine Andrei Feraru, architecte-urbaniste, docteur en urbanisme (Ph.D) Nasrine Seraji, architecte AA dipl RIBA, directrice de l’ENSA Paris-Malaquais Yves Lion, architecte DPLG., urbaniste, enseignant en architecture Philippe Panerai, architecte DPLG., urbaniste DIUUP, enseignant en architecture L’enjeu de cette troisième conférence est de questionner le toit comme élément de stratégie de développement du grand Paris, à l’aune des enjeux métropolitains. comment construire plus, en limitant ou en réduisant l’empreinte énergétique ? comment amplifier le dynamisme urbain et comment créer du lien entre habitants ? comment modifier ce paysage des toits tout en lui gardant ses qualités ? Plusieurs

AVEC LA PARTICIPATION AU DÉBAT DE Mireille Ferri, directrice générale de l’Atelier international du Grand Paris, professeure associée en aménagement et urbanisme à l’Université de Paris La Sorbonne Jean-Louis Missika, adjoint à la Maire de Paris, chargé de l’urbanisme, de l’architecture, des projets du Grand Paris, du développement économique et de l’attractivité.

équipes de la consultation du grand Paris ont questionné la surélévation comme stratégie d’un nouveau développement urbain. en construisant sur le déjà-là, en densifiant le dense, ne sera-t-il pas possible de résoudre (ou du moins de commencer de répondre à) certaines questions environnementales et sociales, pour rendre la métropole plus écoresponsable et plus solidaire ?

Philippe Simon, architecte DPLG, enseignant à l’ENSA Paris-Malaquais, chercheur au laboratoire ACS XIX-XXIe siècles Marie Dehaene, ingénieure en paysage, spécialiste en agriculture urbaine Andrei Feraru, architecte-urbaniste, docteur en urbanisme (Ph.D) Nasrine Seraji, architecte AA dipl RIBA, directrice de l’ENSA Paris-Malaquais Yves Lion, architecte DPLG., urbaniste, enseignant en architecture Philippe Panerai, architecte DPLG., urbaniste DIUUP, enseignant en architecture Avec LA PArticiPAtioN Au DébAt De Mireille Ferri, directrice générale de l’Atelier international du Grand Paris, professeure associée en aménagement et urbanisme à l’Université de Paris La Sorbonne Jean-Louis Missika, conseiller de Paris, adjoint au maire de Paris chargé de l’innovation, de la recherche et des universités MoDérAteur Jean-Louis violeau, sociologue, professeur à l’ENSA Paris-Malaquais, directeur du laboratoire Architecture Culture Société XIX-XXIe siècles

© design graphique. Caroline Arquevaux.

coorDiNAtioN Sabri bendimérad, carla Deshayes, Léa Mosconi, Philippe Simon

MODÉRATEUR Jean-Louis Violeau, sociologue, professeur à l’ENSA Paris-Malaquais, directeur du laboratoire Architecture Culture Société xix-xxie siècles COORDINATION Sabri Bendimérad, Carla Deshayes, Léa Mosconi, Philippe Simon


ENTRETIEN AVEC JEAN-YVES DURANCE PRÉSIDENT DU CONSEIL D’ADMINISTRATION DE L’AUDE, PRÉSIDENT DU COMITÉ CONSULTATIF DE DEFACTO ET PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE DE COMMERCE ET D’INDUSTRIE DES HAUTS-DE-SEINE

Propos recueillis par Emmanuelle Graffin

© D.R.

« Certains usagers caractérisent cette dalle non comme un rez-de-chaussée mais comme un toit. » Jean-Yves Durance nous explique la particularité d’un quartier aménagé en grande partie sur une dalle et l’avenir d’un traitement au sommet des tours plus qu’en pied pour faire vivre la dalle.

L’Association des Utilisateurs de La Défense Sauvegarder, développer, innover ce formidable patrimoine économique, architectural et culturel de manière ambitieuse et promouvoir son image internationale. L’Association des Utilisateurs de La Défense, créée en 2002 par les principales entreprises présentes dans le quartier d’affaires, participe à son développement en faisant entendre la voix du monde économique dans les débats et dans les réflexions portant sur son avenir. Cette initiative dépasse aujourd’hui Courbevoie, Nanterre et Puteaux, et concerne toutes les villes associées à l’expansion économique de l'Ouest parisien. L’AUDE rassemble en 2014 plus de soixante-cinq entreprises représentatives des sociétés installées à La Défense au sens large. Connu pour la compétitivité de son secteur financier, ce centre économique réunit des leaders internationaux de l’énergie, de l’immobilier, du conseil, des NTIC et de l’industrie ainsi que des universités et des grandes écoles de premier plan. Il trouve sa force et son potentiel dans la pluridisciplinarité et dans la cohérence des filières qui y sont représentées. L’AUDE apporte une contribution constructive aux réflexions sur les principales problématiques du quartier d’affaires élargi, dont elle entend valoriser l’image au plan international et renforcer l’attractivité au bénéfice de l’ensemble de la région Île-de-France. La Défense doit être un vecteur puissant de « marketing urbain » innovant anticipant les attentes et les contraintes à venir. Dans son rôle, AUDE attire l’attention des pouvoirs publics sur les préoccupations des entreprises pour qu’avec leurs partenaires et leurs salariés, elles trouvent sur le site les infrastructures et les services dont elles ont besoin pour se développer. Pour soutenir l’action de ses dirigeants, les commissions de l’AUDE, composées des représentants des entreprises et des écoles supérieures échangent régulièrement avec les partenaires du site sur des thématiques précises et sont force de proposition pour favoriser les échanges au sein du quartier d’affaires, améliorer les transports, accroître l’animation culturelle, renforcer l’offre commerciale et les services aux entreprises, ou répondre aux attentes des salariés en matière de logements… En défendant l’intérêt de ses membres, l’AUDE apporte un soutien décisif aux établissements publics du quartier d’affaires (Epadesa et Defacto) pour qu’un projet ambitieux structuré autour du concept de centralité et au service des utilisateurs du site fasse de La Défense un atout majeur de l’Îlede-France dans la compétition entre les grandes métropoles européennes.

La dalle qui forme le sol du quartier d’affaires de La Défense fait la part belle aux piétons. Comment aujourd’hui sont traités les rez-de-chaussée à l’échelle du piéton qui appréhende cet espace urbain à très forte identité ? Quels services et animations y sont proposés ? Jean-Yves Durance : Cela dépend beaucoup des endroits. La circulation à La Défense se compose de deux parties. Premièrement la dalle qui comprend elle-même deux parties : le parvis qui constitue une sorte de grande agora et des couloirs à circulation piétonne qui descendent sur les deux côtés jusqu’à l’esplanade. Le piéton arrive alors sur une sorte de « falaise » et peut soit accéder au métro soit emprunter des passerelles. Deuxièmement, l’esplanade. Le parvis accueille régulièrement des animations souvent éphémères, lesquelles sont soit intégrées à la circulation soit au contraire la bloquent. Le marché de Noël, par exemple, occupe tout l’espace et oblige les gens à le traverser ou à le contourner. Outre un ou deux restaurants à la frontière du parvis, très peu de commerces sont implantés dans ce lieu. On trouve quelques commerces et restaurants en pied d’immeubles mais qui sont implantés de manière discontinue. En fait, nous ne sommes pas sur un rez-de-chaussée mais bien sur une dalle. Le parvis permet l’accès au CNIT et aux Quatre Temps, mais sinon il s’agit de couloirs de circulation qui desservent les bureaux. Cependant, ces derniers posent des questions relatives à la signalétique, à l’entretien, notamment des sculptures. Il ne faut pas oublier que La Défense, où sont présentées une soixantaine de sculptures, est probablement un des plus grands parcs d’art contemporain au monde ! Mais dans l’ensemble, la problématique de dalle de l’urbanisme de La Défense est très difficile à gérer. L’Epadesa (Établissement public d'aménagement de La Défense Seine Arche) se pose la question d’ouvrir les tours futures sur l’extérieur avec des aménagements commerciaux, comme par exemple des show rooms, de manière à animer la dalle et éviter ainsi de voir des tours fermées sur elles-mêmes avec de simples banques d’accueil en rez-de-chaussée. Mais les tours existantes restent difficiles à transformer.


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De quelle manière les usagers utilisent-ils la dalle ? Par exemple, ils jouent aux boules sur l’esplanade qui est en terre et non sur dalle. Plantée d’arbres, elle est très fréquentée quand il fait beau. Mais à part cela, les cheminements sur la dalle sont classiques et utilitaires. Les usagers empruntent les cheminements le matin quand ils se rendent à leur bureau et le soir lorsqu’ils en partent. Defacto propose des manifestations qui regroupent beaucoup de monde, comme le feu d’artifice, mais les questions de sécurité restent très contraignantes. Certains usagers d’ailleurs caractérisent cette dalle non comme un rez-de-chaussée mais comme un toit. Au-dessous se trouvent des sous-sols, mal exploités, ce qui pose problème. À La Défense on est effectivement sur un toit et non sur une chaussée. Par exemple, le quartier d’affaires de Canary Wharf à Londres se développe au niveau de la chaussée, avec des voitures, des trottoirs et des commerces en pied de tour. Cette configuration n’est pas celle de La Défense. Il existe un effet d’agora très important sur le parvis, mais il ne fait pas l’objet de manifestations spontanées, et les passants ne sont pas amenés à flâner ni à rester car il n’existe pas d’interaction entre l’horizontalité et la verticalité.

LES ENTREPRISES ADHÉRENTES À L’AUDE EN 2014 1. Aew Europe 2. Air liquide 3. Allianz 4. Areva 5. Atemia 6. Aviva 7. Axa France 8. Beacon Capital 9. Bnp Paribas- Cardif Assurance Vie 10. Bnp Paribas -Immobilier 11. Bouygues Construction 12. Bouygues Immobilier 13. Bureau Veritas 14. Cap Gemini 15. Carlyle Group 16. Crédit Agricole – Calyon 17. Cofia – Europrestim 18. Cegereal - Gci 19. Comexposium 20. Dauphine - Université 21. Dexia 22. Edc - Paris 23. Edf 24. Eirea Green Building 25. Erdf 26. Ernst & Young 27. Fidal 28. Foncière des Régions 29. Gdf – Suez 30. Generali Immobilier 31. Gras Savoye

32. Groupama Immobilier 33. Hines 34. Hro 35. Icade 36. Ieseg School Of Management 37. Ivanhoe Cambridge Europe 38. JLL - Tetris 39. La poste 40. Macsf 41. Marsh 42. Nexity Management 43. Racing - Arena 44. Regus 45. Schneider – Electric France 46. Sepadef-Vinci Park 47. Stet 48. Silic 49. Société Générale 50. Sodexo 51. Sogeprom 52. Suez - Environnement 53. Technip 54. Telmma 55. Tishman Speyer 56. Total 57. Unibail - Rodamco 58. Université Paris – Ouest Nanterre La Défense 59. Vinci Facilities

Esplanade de La Défense © David Monniaux

Quelles pistes de réflexion ou d’actions envisagez-vous pour rendre cette dalle plus vivante, pour mieux la vivre ? Il faut à mon sens admettre tout d’abord que le quartier d’affaires de La Défense n’est pas devenu une ville ordinaire. Ce n’est pas les Champs-Élysées ! La notion d’éclairage est le premier point que je voudrais évoquer. Un point très important qui à l’heure actuelle n’est pas résolu de manière entièrement satisfaisante. L’éclairage donne le sentiment de ville. Le deuxième point serait de développer sur les nouvelles constructions une vision complètement différente des pieds de tour. Mais ce n’est qu’une réponse partielle, car les commerces au niveau de la dalle seront éparpillés et nous n’aurons jamais une vision continue comme sur les Champs-Élysées. Une autre question peut aussi se poser : comment attirer d’autres utilisateurs de ces rez-de-chaussée ? C’est là toute la promotion d’une Défense touristique. Et paradoxalement, il s’agirait plutôt d’ouvrir les sommets des tours de manière à faire venir les gens. Mais pour le moment ce n’est pas le cas, il n’y a pas de restaurant comme au sommet de la tour Montparnasse. Le sommet de la Grande Arche est le seul endroit qui est public, mais fermé pour des raisons de sécurité. Il accueillait autrefois plus de 400 000 touristes par an ! Les gens venaient pour admirer la vue. Depuis toujours la hauteur évoque le désir de voir la ville différemment. Voir Paris depuis une tour de La Défense serait un spectacle totalement différent. Paradoxalement donc, l’aménagement du sommet des tours serait un moyen d’améliorer le cheminement des passants au niveau de la dalle. Mais les règles pour l’accès du public dans les immeubles de grande hauteur, la sécurité dans les ascenseurs, etc. rendent très difficiles l’aménagement des sommets de tours. Il est probable que les deux tours Hermitage, projet de Norman Foster, qui abriteront des appartements de luxe et un hôtel cinq étoiles, proposeront un restaurant panoramique au sommet. Il reste que traiter la dalle suppose à la fois de traiter l’horizontalité au-dessous (accès pour les livraisons et VIP) et la verticalité au-dessus. Pour penser le rez-de-chaussée, il faut donc avoir la vision de la liaison entre les sous-sols et les espaces verticaux qui représentent La Défense. Cela me paraît fondamental.


 PAROLE D’ÉLU Parce que le Grand Paris est gouverné par plusieurs entités, l’un de ses élus nous donne sa vision des relations entre chaque territoire ainsi que ses perspectives d’avenir.

© D.R.


JEAN-YVES LE BOUILLONNEC -

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MAIRE DE CACHAN, DEPUTE DU VAL-DE-MARNE

Vue de Cachan © D. R.

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Pour Jean-Yves Le Bouillonnec, maire de Cachan, député du Val-deMarne, le projet Grand Paris Express doit permettre de créer une métropole capitale, à la fois solidaire pour ses habitants, mais aussi rayonnante, attractive et innovante dans sa dimension nationale, européenne et mondiale. Propos recueillis par Emmanuelle Graffin

En tant que président du comité stratégique de la Société du Grand Paris, quelles sont vos prospectives, vos terrains de réflexion et les réponses que vous envisagez ? Jean-Yves Le Bouillonnec : Le projet Grand Paris Express et les 72 nouvelles gares qu’il comporte constituent une feuille de route ambitieuse pour les 25 prochaines années. Il s’agit au fond, comme le gouvernement le souhaite, de poser les bases d’une métropole capitale, ordonnée et solidaire pour ses habitants, rayonnante, attractive et innovante dans sa dimension nationale, européenne et mondiale. Il faut bien comprendre que l’organisation de l’espace urbain n’est pas seulement une question technique. Elle est d’abord et éminemment politique. Tous les élus doivent faire face à des enjeux considérables, essentiels pour la qualité de vie de millions de personnes, pour leur mobilité et l’accessibilité, essentiels pour la cohésion sociale, le développement économique et urbain de nos territoires. La métropole que nous bâtissons doit servir le bien-être de ses habitants, de tous ses habitants. Nous ne pouvons plus accepter les phénomènes de ségrégation sociale et spatiale qui mettent à mal l’idéal républicain d’égalité et de fraternité. La reconnaissance des territoires et de leurs besoins doit être au cœur de l’engagement métropolitain. Il est intolérable que dans le Grand Paris, l’une des métropoles les plus riches et développées du monde, des quartiers s’enfoncent dans les difficultés économiques et sociales tandis que d’autres accumulent les richesses. De même, réfléchir et construire le Grand Paris impose de questionner le processus de métropolisation et ses implications politiques, notamment la croissance démographique et dans un contexte d’étalement urbain, l’augmentation des besoins en termes de logements, d’emplois, de santé et de loisirs sportifs, socio-éducatifs et culturels. Au cœur des réponses à beaucoup de ces enjeux se trouve la mobilité. C’est en cela que le Grand Paris Express est un formidable levier pour réinventer la Grande Métropole. Dans cet esprit, il est donc bien évident que les gares sont conçues en adéquation avec les quartiers qui les accueillent. Les diverses concertations avec la Société

du Grand Paris, les élus, les habitants nourrissent les différents projets et les architectes, les ingénieurs ont pour mission de concevoir des ouvrages parfaitement intégrés à la ville. Pour certaines des gares, c’est un grand projet de réaménagement de quartier, de renouvellement urbain parfois, qui s’engage. Il peut comprendre, avec l’habitat, les locaux d’activités économiques, l’intégration d’équipements publics, de services, des commerces. Pour exemple, dans ma commune à Cachan, la nouvelle halle du marché, inaugurée il y a quelques semaines, est un projet directement lié au projet de construction de la future gare d’Arcueil-Cachan du réseau Grand Paris Express, située sur la ligne 15 (Pont-de-Sèvres - NoisyChamps). Cette nouvelle gare d’Arcueil-Cachan est un projet de renouveau pour la Ville de Cachan et les quartiers riverains d’Arcueil, une occasion unique de favoriser le dynamisme économique, de faire progresser l’offre de logement en améliorant les conditions de vie des habitants.

LA MÉTROPOLE QUE NOUS BÂTISSONS DOIT SERVIR LE BIEN-ÊTRE DE SES HABITANTS, DE TOUS SES HABITANTS.

La nouvelle halle du marché au cœur de Cachan realisée par Croixmariebourdon Architecture © Luc Boegly


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De quelle manière inscrivez-vous votre politique dans celle de la Métropole du Grand Paris ? Sur l’important sujet de la Métropole, le débat n’est pas achevé, le dispositif législatif est en cours de révision et les arbitrages du gouvernement ne sont pas encore rendus. Cependant, la loi MAPTAM (loi du 27 janvier 2014 de Modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles), qui inscrit la création de la Métropole du Grand Paris au 1er janvier 2016, place les élus dans l’exigence de faire aboutir les travaux de la mission de préfiguration qu’elle a instituée. C’est ce que nous faisons actuellement. Le Conseil des élus de cette mission de préfiguration a adopté, à une très large majorité, un texte proposant des points de révision de l’article 12 de la loi. Il est ainsi suggéré de mettre en place une organisation métropolitaine à trois niveaux : commune, territoire et métropole. Cette architecture qui allie constitution de conseils de territoire au statut juridique et politique réel avec un partage des ressources s’inscrit dans une métropole forte et stratégique. Cette formule semble satisfaire l’ensemble des élus et la métropole devrait bien voir le jour au 1er janvier 2016. On prendra le temps de régler toutes les difficultés, la métropole montera en charge et en compétence, petit à petit, dans une construction progressive et planifiée dans le temps. La construction métropolitaine est d’abord un chemin. Quelles sont les grandes lignes de votre politique de la ville ? La Ville de Cachan et les six autres villes de la Communauté d’agglomération du Val de Bièvre ont l’antériorité du partage des diagnostics sur la situation de nos territoires et de nos habitants et des visions stratégiques qui en découlent. Ce partenariat a commencé il y a plus de 15 ans. C’est ainsi que nous avons signé avec la Ville, la Communauté d’agglomération de Val de Bièvre (CAVB) et l’État un contrat de ville (20002006) puis un contrat urbain de cohésion sociale (CUCS) définissant les actions concrètes en faveur de nos quartiers. Ces politiques ont permis une véritable opportunité d’échanges et de collaboration pour conduire des politiques publiques communautaires entre les villes de Cachan, d’Arcueil, de Fresnes, de L’Haÿ-les-Roses, de Gentilly, du Kremlin-Bicêtre et de Villejuif que traduit le Contrat de développement territorial que nous avons signé avec l’État.

Dans notre commune, nous intensifions nos actions en direction de la jeunesse, de l’accès à l’emploi et au logement. Mais nous conduisons également des actions de développement économique, de valorisation avec le soutien de la Vallée scientifique de la Bièvre et en bénéficiant de l’atout considérable du Grand Paris Express. Nous voulons maintenir une démarche d’équipement en restant toujours engagés par un travail de réaménagement et d’embellissement des espaces extérieurs offrant à chacun un cadre de vie plus agréable. Territoire dynamique mais également harmonieux et apaisé, dans lequel chacun trouve sa place et est reconnu, c’est un grand et beau défi.

CACHAN (92)  Situation Superficie : 2,74 km2

Nombre de communes limitrophes : Arcueil, Bagneux, L’Haÿ-les-Roses, Le Kremlin-Bicêtre, Villejuif

 Démographie (2011) Nombre d’habitants : 28 404 Densité : 9 065 habitants / km2 Nombre de naissances : 427 Nombre de décès : 240 Répartition par sexe : 47,5 % d’hommes et 52,5 % de femmes Répartition par âge : 0-14 ans : 19,2 % ; 15-29 ans : 21,8 % ; 30-44 ans : 20,1 % ; 45-59 ans : 19,2 % ; 60-74 ans : 10,7 % ; 75 ans ou plus : 9 %  Urbanisme et espaces verts Hectares de végétation : 45 ha Superficie de massifs d’arbustes : 10 ha Superficie de pelouses : 15 ha Superficie fleurie : 4 000 m2  Économie et emploi Actifs : 75,5 % Dont personnes ayant un emploi : 67,1 % Dont demandeurs d’emploi : 8,3 % Salariés : 11 725 Non salariés : 879 Nombre d’entreprises : 1 573  Enseignement et scolarité Nombre d’écoles maternelles : 6 Nombre d’écoles primaires : 5 Nombre d’établissements d’enseignement supérieur : 5  Vie associative Environ 100 associations  Vie culturelle 1 théâtre 1 centre culturel 1 conservatoire de musique 3 bibliothèques 1 cinéma


La tour Majunga vue depuis la ville de Puteaux Š UFLY


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 PROMO IMMO Actrice essentielle de la requalification du Grand Paris, la promotion immobilière passe ici à la question sur des thématiques variées : tissu urbain, acte architectural, développement des entreprises et de la vie économique de la métropole, mais aussi de sa vie sociale.

© D.R.

BRUNO DONJON DE SAINT-MARTIN

DIRECTEUR GENERAL DES BUREAUX DE FRANCE CHEZ UNIBAIL-RODAMCO


À La Défense, Unibail-Rodamco et l’architecte Jean-Paul Viguier n’en sont pas à leur coup d’essai. Après Cœur Défense en 2001, la tour Majunga, qui, du haut de ses 195 mètres, domine désormais l’esplanade entre le centre commercial des Quatre Temps et la tour Ariane, marque une nouvelle étape décisive dans l’évolution des tours. Par son architecture, sa position stratégique et son accessibilité optimale, elle relève le challenge de l’efficience économique et offre aux futurs occupants un environnement de travail sans équivalent au cœur du premier quartier d’affaires européen. Bruno Donjon de Saint-Martin, directeur général des bureaux de France, nous présente cette tour révolutionnaire. Propos recueillis par Christine Desmoulins Comment le Groupe Unibail-Rodamco offre-t-il aux utilisateurs de cette tour des conditions d’accueil et de travail exceptionnelles ? Bruno Donjon de Saint-Martin : Majunga est le premier opus du « Nouvel Art de travailler », concept inédit qui révolutionne le rapport entre le collaborateur et son environnement de travail. Dès l’origine du projet architectural, le bien-être des utilisateurs a été placé au centre de la démarche. Chaque étape du parcours quotidien de l’utilisateur a été étudiée et repensée avec le souci constant de créer un environnement de travail limpide, calme et aéré, aussi convivial que fonctionnel et doté de services qui facilitent la vie au quotidien. Dès le palier d’ascenseur, l’espace de travail met en scène la relation entre l’intérieur et l’extérieur et la lumière du jour est perceptible partout grâce à des couloirs vitrés. On est loin de l’effet de claustrophobie parfois ressenti dans les tours de première et seconde génération ! À chaque étage, ce principe est relayé par divers dispositifs : des vitrages extérieurs de 2,45 mètres de hauteur, mais aussi le fait de pouvoir ouvrir sa fenêtre pour rafraîchir la tour naturellement. Majunga est la première tour en France à disposer à chaque étage d’une loggia de 50 m2 ou d’un balcon et, dans chaque bureau, des ouvrants dotés de moucharabiehs permettent d’accéder à l’air libre tout en étant à l’abri du vent. Nous ne sommes plus dans un univers aseptisé coupé du monde extérieur. L’utilisateur peut à son gré adapter le confort de son espace de travail (éclairage, stores et température) et l’acoustique des faux plafonds limite la diffusion du bruit.

La mise en place d’outils facilitant la vie quotidienne au travail repose sur une analyse du parcours des utilisateurs… Nous adressant autant à l’utilisateur quotidien qu’à l’utilisateur occasionnel, nous tenions en premier lieu à leur assurer une arrivée sereine grâce à une parfaite information sur les conditions d’accès. L’accueil, c’est d’abord un hall zen en rupture avec le stress des transports. Vient ensuite la découverte d’une architecture et d’un design valorisant la transparence et les aspects polysensoriels. La tour offre aussi toute une gamme de services qui facilitent le quotidien des collaborateurs et leur bienêtre. À cela s’ajoute l’agrément des loggias, des terrasses et des jardins ouverts sur l’extérieur et, enfin, toute une série d’innovations qui améliorent la communication, l’ergonomie et le confort au travail.

À LIRE

Christine Desmoulins, La tour Majunga à La Défense Archibooks + Sautereau éditeur, Paris, 2014, 80 p.

Depuis son introduction en bourse en 1972, Unibail-Rodamco a montré que la performance financière pouvait servir l’architecture européenne en collaborant avec les meilleurs architectes internationaux, qu’il s’agisse de projets propres ou d’acquisitions. Son exigence est mise à l’honneur dans ce livre anniversaire qui donne la parole à de nombreux partenaires du groupe : de grands maires tels que Gérard Collomb et Xavier Trias et des architectes prestigieux à l’instar de Jean Nouvel, Jacques Herzog, Jean-Paul Viguier, Ricardo Bofill et Paul Andreu. Les recherches d’Unibail-Rodamco sur la ville de demain sont également présentées via les projets de Renzo Piano, de Manuelle Gautrand, de Philippe Chiambaretta et de l’agence MVRDV. Ainsi, vingt-sept actifs sont magnifiés grâce à de nombreux documents graphiques inédits – croquis, vues de synthèse, photographies.

Catherine Sabbah et Marie-Douce Albert, Unibail-Rodamco, 40 ans d'activité architecturale

Since it was floated on the Stock Exchange in 1972, Unibail-Rodamco has shown that financial performance can serve European architecture; it has done this by working with top world architects, both on new projects or on existing properties acquired by the Group. This book, published to celebrate the Group’s anniversary, pays tribute to its highly exacting approach and features testimonials from many of its partners: mayors of major cities such as Gérard Collomb and Xavier Trias, and great architects such as Jean Nouvel, Jacques Herzog, Jean-Paul Viguier, Ricardo Bofill and Paul Andreu. Unibail-Rodamco’s research into the future development of our cities is also presented via the work of Renzo Piano, Manuelle Gautrand, Philippe Chiambaretta, and the MVRDV architecture firm. The book showcases a total of twenty-seven developments and features a host of previously unpublished documents including sketches, computer-generated images, and photographs.

CNiT TÄBY CeNTRUM PARLY 2 ARiANe DONAUZeNTRUM LYON PART-DieU fORUM DeS HALLeS LeS QUATRe TeMPS CARROUSeL DU LOUVRe eURALiLLe CiTY eUROPe LA MAQUiNiSTA CŒUR DÉfeNSe CiTÉ DU ReTiRO CARRÉ SÉNART CiTY MALL ALMeRe ZLOTe TARASY CAPiTAL 8 DOCKS 76 OXYGÈNe LYON CONfLUeNCe SO OUeST AÉROViLLe MAJUNGA TRiANGLe PHARe PORTe De VeRSAiLLeS PALAiS DeS CONGRÈS PARiS-NORD ViLLePiNTe

_MARIE-DOUCE ALBERT

Née à Nantes en 1973, Marie-Douce Albert est journaliste indépendante. Diplômée du Celsa, elle a intégré en 1997 la rédaction du Figaro où elle a commencé à s’intéresser à l’architecture et au patrimoine. Désormais, elle collabore avec différentes publications dont Le Moniteur et L’Architecture d’Aujourd’hui. Born in Nantes in 1973, Marie-Douce Albert is a freelance journalist. She graduated from Celsa and in 1997 joined the editorial team at Le figaro where she began taking a particular interest in architecture and heritage. She now writes for various publications including Le Moniteur and L’Architecture d’Aujourd’hui.

_CATHERINE SABBAH

Archibooks + Sautereau éditeur, Paris, 2012, 176 p. ISBN 978-2-35733-222-5 22,90 € Simulation du site de La Défense incluant les tours du renouveau © D.R.

Catherine Sabbah est journaliste, spécialiste de l’économie urbaine et de l’immobilier pour le quotidien Les Échos et collabore à de nombreux autres supports. Après des études à l‘institut d’études politiques de Paris puis au Centre de formation des journalistes, elle s’est tournée vers ce vaste champ d’investigation dont elle explore toutes les évolutions. Catherine Sabbah is a journalist specialising in urban economics and real estate issues for the daily newspaper Les Échos; she also writes for a number of other publications. After studying at the Institut d’études politiques in Paris and the Centre de formation des journalistes, she focused on exploring the many changes taking place in the urban arena.

iSBN : 978-2-35733-222-5 Prix de vente : 22,90 euros

40 JAAR VAN GeDURfDe ARCHiTeCTUUR 40 ANS D’AUDACe ARCHiTeCTURALe _ 40 YeARS Of ARCHiTeCTURAL AUDACiTY

À LIRE

ARCHIBOOKS

ISBN 978-2-35733-324-6 12,90 €


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Projet d'aménagement du hall de la tour © Saguez Workstyle

Projet d'aménagement d'un restaurant © Saguez Workstyle

 Unibail-Rodamco est le premier groupe européen côté du secteur de l'immobilier commercial, propriétaire d'un portefeuille de 33,6 milliards d'euros au 30 juin 2014. Unibail-Rodamco est présent sur 3 segments majeurs de l'immobilier commercial : Le développement L'investissement La gestion opérationnelle Le Groupe applique sa stratégie à trois classes d'actifs : Les centres commerciaux Les bureaux Les centres de Congrès-Expositions Une loggia de la façade sud : un espace extérieur à chaque étage

© Saguez Workstyle


Vue des bureaux © D.R.

L'APPLICATION « MAJUNG'APP » PERMET À CHAQUE UTILISATEUR DE GÉRER LE CONFORT DE SON ESPACE DE TRAVAIL. Majunga est une « e-tour » connectée. Quelles applications numériques inédites propose-t-elle ? L’accueil commence en réalité bien avant l’arrivée dans l’immeuble car des applications dédiées permettent une arrivée sereine dans des parkings sûrs et connectés, répondant aux mêmes standards que la tour. Les espaces communs sont tout aussi innovants. Dans la zone d’accueil, être « accueilli » ne suffit plus, on doit aussi pouvoir « attendre » et « travailler » confortablement. On y trouve donc différentes fonctions et de nombreux services : l’espace lounge pour se détendre, la Beauty Room pour se rafraîchir, l’espace « Press and Drink » où boissons et tablettes digitales sont à disposition. L’espace « Plug and Work » voué aux rendez-vous plus informels ou à la préparation d’une réunion offre des prises de courant intégrées au mobilier, un accès et une imprimante WiFi, des tablettes digitales et des chargeurs en libre-service. À l’accueil, sont aussi disponibles des beauty kits (brosse à dents, cirage, couture) et des kits d’accès destinés aux visiteurs, avec des informations sur les restaurants et les services de proximité. L’univers du bureau ne s’inspire-t-il pas ici de l’univers hôtelier ? Les entreprises et les utilisateurs peuvent ici disposer d’un auditorium, d’un complexe de salles de réunion modulables, d’espaces de réception, d’une conciergerie haut de gamme qui offre toute une série de services, du pressing à l’organisation de voyages en passant par les démarches administratives, la réservation de spectacles, de fleurs, etc. Il y a également un centre de bien-être.

Qu’en est-il en matière de restauration ? Est-elle tout aussi inédite ? Multiple et diversifiée, l’offre propose huit concepts de restauration dont un Sushi Shop, un Daily Monop’ et un Illy Espressamente en phase avec les attentes des utilisateurs en termes de design et de qualité. Les autres restaurants disposent d’une terrasse avec une offre allant du déjeuner d’affaires à la restauration rapide. À cela s’ajoute un room service disponible à tous les étages. Comme nous tenons à déjouer les frontières entre les activités, les espaces de restauration sont équipés du WiFi et d’un mobilier spécifique pour travailler ou faire une pause, selon les heures de la journée. Pour faciliter ces échanges, nous avons mis au point « Majung’app », une application smartphone qui permet d’évaluer le trafic des restaurants en temps réel, d’accéder aux menus ou de réserver une table à la brasserie. Elle permet aussi à chaque utilisateur de gérer lui-même à partir de son smartphone le confort de son espace de travail (éclairage, stores, température), d’accéder en temps réel à l’état des réseaux routiers et de transports en commun et d’accéder 24 h/24 aux services de la conciergerie. Pendant la phase de commercialisation, vous aviez meublé un plateau avec du mobilier Vitra. Quels sont les atouts de cette gamme de mobilier ? À cette nouvelle génération d’immeubles de bureaux correspond un design mobilier prenant en compte la santé et le confort des utilisateurs, en accord avec l’évolution de la vie au travail. Des tables à hauteur variable permettent de passer selon les cas de la position debout à la position assise.


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FICHE TECHNIQUE DE LA TOUR MAJUNGA Maître d’ouvrage Unibail-Rodamco Architecte mandataire Jean-Paul Viguier et Associés Associé directeur de projet Andres Larrain Équipe Chef de projet : Edwige Caumont Julie Lavergne, Axel Kronborg, Alessia Zambon, AnneElisabeth Foirien, Thomas Ouanhnon, Frédérique Désarnaud, Ronan Malle, Aida Bensouda, Clément Devergie, Arthur Brigaud, Benoist Quiviger, Stéphanie Boufflet, Pierre Saunal, David Colinet, Anne Pestel, Fanny Laureau, JF Dupuis, Stephen Lee, Gustavo Boscan, Landon Moore, Romain Viaut Paysage Benjamin Doré Massimiliano Stagno Lionel Sikora Direction administrative Anne-Christine Chevalier Lucrezia Rampinelli - Rota BET SETEC TPI : structures INEX : fluides Emmer Pfenninger Partner AG : façades Économiste Sterling Quest Associates

Acousticien Rémi Raskin HQE ELIOTH Design d'intérieur Saguez Workstyle Maître d’œuvre d’exécution ARCOBA Co-traitant BET Structures : SETEC TPI et Egis Coût 200 M d'euros H.T. Surface 67 200 m SUBL (inclus restaurant inter-entreprises) Certifications Première tour de bureaux IGH en Europe certifiée HQE BBC1 et BREEAM « Excellent » en phase de conception (février 2011) Majunga a obtenu le trophée BREEAM 2011 lors du salon Ecobuild (meilleur score d’Europe en 2011) ENTREPRISES Groupement : Eiffage Construction Grands Projets / Groupe Goyer CALENDRIER Études : 2006-2011 Chantier : 2011-2014 Livraison : juillet 2014

Paysagiste Jean-Paul Viguier et Associés

Détail de la façade et de ses décrochés © UFLY

Vue générale de la tour © Takuji Shimmura


PARIS / 4-8 SEPTEMBRE 2015 PARIS NORD VILLEPINTE

MAISON&OBJET PARIS,

ET VOS PROJETS DEVIENNENT RÉALITÉ

L'ÉDITION D'AUTOMNE DE MAISON&OBJET PARIS S'EST TERMINÉE LE MARDI 9 SEPTEMBRE, APRÈS 5 JOURS D'EXPOSITION AUTOUR DU THÈME DU PARTAGE.

Le salon MAISON&OBJET est reconnu pour son offre de produits à 360 degrés : décoration, ameublement, accessoires, textile, parfums, produits d'enfant, vaisselle, etc. Cet événement, consacré à l'art de vivre, produit à chaque session l'enthousiasme des acheteurs et des initiateurs de tendances du monde entier. Comme un point de rencontre pour tous les professionnels, un établissement de stratégies pionnier, ce carrefour professionnel incontournable s’implante à Paris pour développer sa puissance d'inspiration. Organisé au sein de MAISON&OBJET et créé pour répondre aux besoins des architectes, des architectes d'intérieur et des entrepreneurs dans la recherche de nouvelles issues, originales et pointues, MAISON&OBJET |projets| a pris, lors de sa dernière édition en septembre 2014, une nouvelle ampleur et présente 200 exposants offrant des solutions techniques, décoratives et créatives haut de gamme. L'édition 2015 se tiendra du 4 au 8 septembre. Pour soutenir le segment novateur du marché de la décoration d'intérieure, MAISON&OBJET présente le prix MAISON&OBJET |projets| Awards. Cette compétition ouverte aux exposants de MAISON&OBJET |projets| récompense les projets les plus novateurs en solutions d'amménagement intérieur dans les catégories de l'éclairage, du bien-être en station thermale et des couvertures de plancher/mur. Pendant le salon professionnel, les cinq finalistes POLICE DE CARACTÈRES BARCELONE (Espagne), Lux LCD Druez (Belgique), MEYSTYLE (Royaume-Uni), DÉSIGNE LITE/M. O914 (France) et WHITEPOOL (Allemagne), étaient en concurrence pour deux récompenses :

HALL 7 PARIS / SEPTEMBER, 4-8 2015 BRING YOUR PROJECTS TO LIFE

WWW.MAISON-OBJET.COM

INFO@SAFISALONS.FR SAFI, A SUBSIDIARY OF ATELIERS D’ART DE FRANCE AND REED EXPOSITIONS FRANCE / TRADE ONLY / IMAGE © JACqUES GAVARD / DESIGN © BE-POLES

- Le Prix Coup de Cœur du Jury

Des matériaux novateurs, des compétences techniques bon marché et des technologies d'avant-garde étaient les trois critères qui ont aidé le jury à déterminer le gagnant de PARIS MAISON&OBJET « Prix Coup de Cœur du Jury ». Ce jury de professionnels international était composé de Philippe Brocart (le PDG de MAISON&OBJET), Reda Amalou (architecte et concepteur), Massimo Mussapi (architecte italien et concepteur), Hicham Lahlou (concepteur marocain), Francis Surjaseputra (Président de l'Alliance des Concepteurs Spatiale du Pacifique d'Asie), Iris Maluski (rédacteur en chef de Home Magazine) et Antoine Vernholes (rédacteur en chef d'Architecture d'Aujourd'hui). C'est POLICE DE CARACTÈRES BARCELONE, pour la collection 5.1 RED HOT par Élodie Posso, qui a été récompensé.

- Le Prix Coup de Cœur du Public

Du 18 juillet au 7 septembre 2014, le public a voté pour le meilleur projet en terme d'innovation. Il y avait deux façons de voter : - sur les réseaux sociaux, par le biais de la page Facebook de MAISON&OBJET ; - en remplissant le questionnaire en ligne disponible sur les sites internet de L'Architecture d'Aujourd'hui Magazine (A'A') et de Home Magazine, partenaires de Prix MAISON&OBJET |projets|. Avec plus de 700 votes en ligne, le public a récompensé MEYSTYLE, pour le projet la Dolomite le Papier peint, mené par Yaschuk Ekaterina et Maria.


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MAISON&OBJET PARIS EN CHIFFRES (JANVIER 2014) 83 282 visiteurs professionnels dont 40 690 venus du monde entier et 42 592 de France soit 36 % de prescripteurs divisés selon les fonctions suivantes : Architectes d'intérieur / décorateurs 37 % Designers 18 % Directeur d'agence et d'hôtel 10 %

MAISON&OBJET PARIS EN CHIFFRES ( SEPTEMBRE 2014

Architectes certifiés 9 % Chefs de restaurant 6 % Stylistes 5 %

66 962 visiteurs uniques - 50 % d'internationaux - 35 % de prescripteurs (63 % d'agence d'architecte et d'architecture d'intérieur) - 19 % gestion de projets - 65 % d'acheteurs (68 % de détaillants et 7 % de grands magasins)

48 % détaillants

15 % manufacters / designers 10 % ventes en gros / importateurs 9 % départements d'enseigne / groupe

Directeurs artistiques 4 %

8 % points de vente spécialisés

Consultant / merchandiser 3 %

6 % commerce en ligne 4 % autres visiteurs

Promoteur immobilier 4 %

Archiviste 1 % Paysager 1 %

2 2 5 5 3 4 4 1 7 6 6 9 1 3

9 7

64 % d'acheteurs

8 10 10 8

LE TOP 10 DU NOMBRE DE VISITEURS PAR PAYS

LE TOP 10 DU NOMBRE DE VISITEURS PAR PAYS

1 France 33 557 personnes

6 Suisse 1 985 personnes

1 Italie 22 % (5 798 personnes)

6 Espagne 8 % (2 010 personnes)

2 Belgique 4 045 personnes

7 États-Unis 1 910 personnes

2 Grande-Bretagne 15 % (3 911 personnes)

7 Suisse 8 % (2 005 personnes)

3 Italie 3 171 personnes

8 Japon 1 405 personnes

3 Belgique 15 % (3 808 personnes)

8 Russie 8 % (1 950 personnes)

4 Allemagne 2 968 personnes

9 Espagne 1 282 personnes

4 Allemagne 12 % (2 980 personnes)

9 États-Unis 7 % (1 800 personnes )

5 Grande-Bretagne 2 755 personnes

10 Russie 1 095 personnes

5 Pays-Bas 8 % (2 080 personnes)

10 Japon 6 % (1 620 personnes)


Le Grand Paris, territoire polymorphe, profite d’une vaste politique culturelle. Centralités analyse les aspects marquants et les temps forts de l’animation de la métropole.

 CULTURE

Octobre 2014. La société du Grand Paris a souhaité donner un avant-goût de son ambition culturelle pour les 69 gares des territoires franciliens desservis par le futur métro. C’est timidement, par excès de prudence ou de concertation, que le comité d’experts présidé par François Barré esquisse les grands axes du projet (raconter, préparer, révéler et animer) qu’une autre équipe artistique, en passe d’être formée d’ici la fin de l’année, devra mettre en place. Ces premières intentions laissent entendre davantage d’actions plurielles et multiformes dans les gares de proximité, que d’installations pérennes et patrimoniales. Alexandra Fau

Mrzyk et Moriceau, 2012 © Mrzyk et Moriceau, Société du Grand Paris


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LA POLITIQUE CULTURELLE DANS LE METRO DU GRAND PARIS


LES ŒUVRES SONT AINSI APPELÉES À CRÉER DAVANTAGE DE LIEN SOCIAL, À RENDRE CES LIEUX DE PASSAGE EMPRUNTÉS CHAQUE JOUR UN PEU PLUS FAMILIERS.

Exposition pour les 150 ans du Tube, Station Gloucester Road, Métro de Londres © Société du Grand Paris

The Sea, station Toledo, métro de Naples, 2013 © Robert Wilson

Parmi les nombreuses missions (développement urbanistique dans un périmètre de 800 mètres autour du métro, accès au haut-débit et à l’open data…) de la société du Grand Paris, la programmation culturelle reste l’une des plus attendues. Fidèles à sa politique d’intégration de l’art dans l’espace public, les transports parisiens entendent rivaliser avec les projets du monde entier (station Gloucester Road à Londres métamorphosée en galerie d’art). Pour fêter le centenaire des célèbres édicules d’Hector Guimard (1900), la RATP confiait en 2000 à l’artiste français Jean-Michel Othoniel la réalisation de la station Palais Royal – Musée du Louvre sur la place Colette. Ces deux couronnes de verre et d’aluminium à l’accent baroque et décoratif ne font pas que des heureux mais sont pourvoyeuses d’une identité visuelle puissante. Début 2014, la RATP renouvelle l’expérience avec la station de métro Pont Cardinet (quartier des Batignolles de Paris) signée Tobias Rehberger. L’artiste allemand, lauréat du Lion d’or de la Biennale de Venise en 2009, a été choisi par

Projet proposé pour la station Pont Cardinet, Paris, 2014 © Tobias Rehberger

le promoteur Emerige pour signaler le rez-de-chaussée de l’immeuble imaginé par l’agence chinoise MAD et le cabinet Christian Biecher. Plus qu’une sculpture, l’œuvre marque le temps avec ses fragments triangulaires rétroéclairés, qui s’illuminent pour indiquer l’heure, selon le concept de l’horloge binaire : 12 triangles indiquent les heures, 5 autres les fractions de 10 minutes et les 9 derniers donnent les minutes. La société du Grand Paris souhaite de la même manière apporter des services et une plus grande proximité avec les usagers. Les œuvres sont ainsi appelées à créer davantage de lien social, à rendre ces lieux de passage empruntés chaque jour un peu plus familiers. C’est le cas de l’installation de Pascale Marthine Tayou au cœur de la gare Saint-Lazare, une impressionnante œuvre éphémère en sacs plastiques colorés collectés auprès des nombreux usagers et agents SNCF.


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ParisSaint-Denis-Aubervilliers 569 700 m2

Paris-Roissy 155 200 m2 Paris-Orly 494 700 m2

ParisLa Défense-Nanterre 470 250 m2

ICADE

La première foncière du Grand Paris.

Avec près de 10 milliards d’euros d’actifs, Icade est aussi la seule foncière à détenir du foncier disponible en Ile-de-France : 2 millions de m2 de reserves constructibles, pour accompagner le développement du Grand Paris.

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@Icade_officiel


La première commande faite à la photographe Françoise Huguier sur les habitants du Grand Paris donne le ton. Les clichés relatent le quotidien de toute une population, de jeunes étudiants pour l’essentiel, pressés d’en finir et de voir leurs déplacements facilités. Les images prennent le pouls de cette périphérie qui rêve d’être au centre. Mais comment donner à tous ces habitants l’impression de vivre dans des villes bien ancrées dans un territoire élargi ? Cela doit-il passer par les mots comme le fit Emmanuel Bove sur Bécon-Les-Bruyères en 1927 ? Le comité d’experts de la société du Grand Paris laisse filtrer une possible commande faite à des écrivains désireux de tramer des récits entre les gares, sur une ville, une partie du réseau ou sa totalité. Les projets culturels de la société du Grand Paris ont avant tout pour ambition de désigner ces territoires, de visualiser ces gares comme les nouvelles portes de Paris. Au début des années 70, le polonais Eustache Kossakowski dans son projet conceptuel « 6 mètres avant Paris » se postait juste devant le panneau indiquant l’entrée de la capitale dans cet environnement de désolation, entre périphérique, zones de friches et puces de Saint-Ouen.

LES PROJETS CULTURELS DE LA SOCIÉTÉ DU GRAND PARIS ONT AVANT TOUT POUR AMBITION DE DÉSIGNER CES TERRITOIRES, DE VISUALISER CES GARES COMME LES NOUVELLES PORTES DE PARIS.

Le projet du Grand Paris Express pourra aussi se raconter à travers les fouilles mises au jour par l’INRAP (Institut national de recherches archéologiques préventives), ou par l’entremise d’objets collectés auprès de la population. Patrick Raynaud édifia sur ce principe un « Grenier du siècle » sur une façade du Lieu unique à Nantes (2000).

Françoise Huguier, commande photographique pour la Société du Grand Paris, Colocation à Saint-Denis, 2014 © Société du Grand Paris


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SI LA GARE SE DOIT DE REFLÉTER L’ÂME DE LA VILLE, SON MOUVEMENT, SA RAPIDITÉ, ELLE VÉHICULE DÉSORMAIS UN IMAGINAIRE À TRANSPORTER AVEC SOI LE TEMPS DU VOYAGE.

Pascale Marthine Tayou, Plastic bags, installation gare Saint-Lazarz, 2012 © Galleria Continua

Pascale Marthine Tayou, Plastic bags, installation gare Saint-Lazarz, 2012 © Galleria Continua


La tour d'observation à Cergy-Pontoise, 2011, Tadashi Kawamata © ARTER


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L’ENSEMBLE DES COMMANDES RÉALISÉES AUPRÈS DES CRÉATEURS DEVRA ASSURER LA VISIBILITÉ ET L’IDENTITÉ GLOBALE TOUT AU LONG DES 195 KM DE LIGNE DU GRAND PARIS EXPRESS.

Les différentes phases du chantier sont également propices à créations (le collectif ETC a élaboré le projet « Si on essayait pour voir »). L’artiste Tadashi Kawamata a ainsi construit avec l’aide de communautés locales (jeunes du quartier réunis au sein d’un workshop) la « Tour d’observation » à Cergy-Pontoise, une vigie sur la plaine des Linandes, l’un des derniers sites urbanisables de l’agglomération. L’ensemble des commandes réalisées auprès des créateurs devra assurer la visibilité et l’identité globale tout au long des 195 km de ligne du Grand Paris Express. Pour cela, il importe de faire appel à des artistes qui travaillent sur le signe visuel (Felice Varini, Daniel Buren…), ou la trace indicielle (Jan Dibbets, Hommage à Arago (1984) le long du méridien de Paris). Autre fil conducteur du projet, la charte architecturale définie par Jacques Ferrier, centrée sur la qualité émotionnelle des lieux. À grands renforts d’effets lumineux, les plasticiens sont capables de donner une autre tonalité à l’espace public. Citons la station Westfriedhof de Ingo Maurer à Munich réalisée en 1996. Des cloches sphériques peintes créent une variation sans modifier l’éclairage des personnes. Des projections vidéo peuvent également transporter les usagers dans d’autres contrées ; la mer semble s’ouvrir sous nos pas à Naples dans la station imaginée par Robert Wilson (The Sea, 2013). Le métro s’ouvre à Stockholm sur une grotte (station T Centralen) restituée grâce à d’importants dispositifs scénographiques. Si la gare se doit de refléter l’âme de la ville, son mouvement, sa rapidité, elle véhicule désormais un imaginaire à transporter avec soi le temps du voyage. Le parcours se vit ainsi différemment d’une gare à l’autre animée par des actions ponctuelles, modulables et ré-activables comme autant de rendez-vous qui instaureront une familiarité avec le lieu et l’effet de surprise.


 LES TERRITOIRES CONSTITUTIFS DU GRAND PARIS Dans le contexte de reconfiguration de Paris et de sa banlieue, chaque territoire composant cette zone constitue une force vive. Chaque numéro de Centralités en analysera un ou plusieurs.

BAGNEUX UN PROJET DE RENOVATION URBAINE Le centre social et culturel de La Fontaine-Gueffier © D.R.


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VILLENEUVELA-GARENNE UNE DIMENSION HUMAINE

QWARTZ vu de nuit © Kamel Khalfi.


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BAGNEU

DE LA MODERNITÉ D'UN GRAND ENSEMBLE À LA STIGMATISATION D'UN QUARTIER POPULAIRE « LES TERTRES ET LES CUVERONS » Un nouveau quartier sort de terre et transforme le paysage C’est dans le cadre de la politique nationale de reconstruction que le sud de la ville de Bagneux s’est urbanisé à partir de la fin des années 1950 : les destructions de guerre combinées à l’exode rural et à une forte croissance démographique ont accentué à ce moment-là une importante crise du logement en France. De nombreux grands ensembles ont alors vu le jour, portés par différents promoteurs engagés dans la construction de ces programmes, comme la SCIC1, qui a mis en place les premiers engins de terrassement entre 1957 et 1959 sur les carrières de Bagneux. Le grand ensemble des Tertres et des Cuverons (ou Quartiers sud) respecte les grands principes de La Charte d’Athènes2. Le nouveau quartier est implanté sur un terrain issu du remembrement d’anciennes parcelles agricoles qui a permis de mettre à la disposition des architectes de très grands îlots pour entreprendre de nouveaux modes d’urbanisation. Le changement de paysage qui s’est produit à ce momentlà dans la vie du quartier est radical : « Sept tours de 13 étages couronnent le coteau tandis que deux grands immeubles en barre de 7 niveaux et de 300 mètres de long sont bâtis à mi-hauteur. Un certain nombre de bâtiments nord-sud ou est-ouest, de 3 à 10 niveaux, assurent la “liaison” entre ces éléments principaux. La superficie totale est de 212 000 m², dont 25 128 m² ont été réservés aux groupes scolaires et 102 816 m² aux allées, aires de jeux, espaces verts et espaces plantés. » 1 Société civile et immobilière de la Caisse des dépots et consignations. 2 Théorie de planification et de construction publiée sous l’égide de Le Corbusier.

Les Cuverons après réhabilitation © SEM 92

Les Tertres © SEM 92

LE GRAND ENSEMBLE DES TERTRES ET DES CUVERONS RESPECTE LES GRANDS PRINCIPES DE LA CHARTE D'ATHÈNES.

Organisation d'une vie de quartier avec l'implantation de l'usine Thomson Emménager dans ce quartier moderne était perçu comme une ascension importante pour les habitants qui vivaient auparavant dans des logements vétustes et insalubres. La plupart d’entre eux n’avait pas choisi leur lieu de résidence car les attributions obéissaient à la répartition des contingents et à l’offre de logements affectée aux employeurs. Ainsi, les premiers habitants sont arrivés aux Tertres alors que certains bâtiments étaient encore en cours de construction. En effet, une grande partie des nouveaux arrivants travaillaient pour les usines de Thomson implantées en 1957 dans les Quartiers sud, employant environ 460 ingénieurs et cadres, 445 ouvriers et 1 510 employés : ces usines sont devenues un lieu indissociable de la vie du nouveau quartier. L’amicale des locataires et des structures mises en place


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par le bailleur social et la municipalité se sont développés pour rompre l’isolement et favoriser les liens de sociabilité. Progressivement, les commerces se sont ouverts. Cependant, les transports publics étaient déjà jugés à l’époque peu satisfaisants. Pour assurer les liaisons avec Paris, seules deux lignes étaient en service à partir des Blagis et de la mairie de Sceaux. Aucune ligne n’était mise en place à l’intérieur même du quartier.

Réhabilitation de la barre des Cuverons © SEM 92

La construction des Cuverons © SEM 92

LE MODÈLE ARCHITECTURAL DES GRANDS ENSEMBLES SUSCITE DES DIFFICULTÉS ET EST DE PLUS EN PLUS DÉCRIÉ À L'ÉCHELLE NATIONALE.

Une situation économique et sociale qui se détériore, avec des problèmes qui en résultent Bagneux n’est cependant pas épargné par l’ensemble des problèmes rencontrés de manière générale dans les quartiers d’habitat social à partir des années 1970. Le modèle architectural des grands ensembles suscite des difficultés et est de plus en plus décrié à l’échelle nationale. Dans un contexte de crise socio-économique très importante, l’image des quartiers est stigmatisée dans les médias. La municipalité s’est efforcée de mettre en place différents outils et actions pour pallier les problèmes : de nombreuses structures locales et associations de quartier se sont créées, comme le Club Relais visant à développer des actions de prévention spécialisées en direction des jeunes ou l’Association intercommunale des Blagis (AIB) ayant pour objectif d’apporter une formation et le retour à l’emploi.


Le nécessaire diagnostic d'un quartier à réhabiliter Les diagnostics établis au cours des années 1990 aboutissent à un constat paradoxal : alors que le site présente un potentiel spatial, paysager et bâti intéressant, le quartier souffre d’une image négative et de réels dysfonctionnements. Comme dans la plupart des grands ensembles, l’amalgame est rapidement fait entre architecture de barres et de tours, troubles sociaux et mal-être des banlieues. Ainsi, il était nécessaire de prendre en compte l’évolution négative de l’image du quartier, tout en faisant la part des choses entre la détérioration des espaces, leur qualité réelle et la perception qu’en avaient les habitants. Il fallait donner aux riverains la possibilité de réapprendre à apprécier leur quartier. C’est pour cette raison que la stratégie retenue en termes d’urbanisme et d’action sociale n’a pas été celle de la « table rase » et de la reconstruction totale, mais celle d’un renouvellement urbain équilibré afin d’amorcer une nouvelle dynamique.

Démolition de la barre des Tertres, 2010 © SEM 92

COMME DANS LA PLUPART DES GRANDS ENSEMBLES, L'AMALGAME EST RAPIDEMENT FAIT ENTRE ARCHITECTURE DE BARRES ET DE TOURS, TROUBLES SOCIAUX ET MALÊTRE DES BANLIEUES.


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RENOVATION DES QUARTIERS SUD ENTRETIEN AVEC MARIE - HELENE AMIABLE MAIRE DE BAGNEUX

Propos recueillis par SEM 92

Quelle a été l'impulsion politique pour rénover les Quartiers sud ? Marie-Hélène Amiable : Chaque action a été initiée sous le signe d’une volonté absolue : rénover complètement le quartier, pour le rendre à ses habitants, pour qu’ils y vivent mieux. Pour cela, la municipalité a créé un dialogue avec les riverains et a mis en place de nombreuses réunions publiques. Des actions concrètes ont été mises en place et, notamment, le renforcement de la qualité des services publics avec reconstruction d’une école, d’un centre social et culturel ainsi que d’un gymnase. Ces actions ont apaisé la sensation d’abandon, montré l’attention que portaient les élus à une situation critique et marqué les premières étapes de la réappropriation du quartier par ses habitants. Parallèlement, un véritable projet social a été mis en œuvre. Un observatoire a été installé pour centraliser toutes les informations issues des services municipaux (jeunesse, logement, éducation), des associations et amicales de locataires et des services de quartier. La Gestion urbaine de proximité (GUP) est créée pour gérer au mieux les dysfonctionnements de la vie collective et assurer un plan d’action pour le suivi des chantiers, par exemple. Enfin, la régie de quartier en facilite la dynamisation en permettant l’accès à l’emploi, l’implantation d’activités économiques et en créant du lien social pour construire une citoyenneté urbaine et participative. Mettre les habitants du quartier au cœur du projet en fait sa force et sa réussite. Changer la vie, construire le « Bagneux pour tous », transformer durablement le quartier, reconstruire un logement neuf pour chaque logement démoli, assurer la diversité sociale : tous ces objectifs ont été le fondement de cette renaissance. La volonté de la municipalité, confortée par tous les acteurs du projet, l’équipe de l’ORU, la SEM 92, a été de pouvoir répondre constamment aux attentes des habitants. Tout a été pensé pour décloisonner ce quartier, pour qu’il s’intègre naturellement dans la commune.

L'espace libéré parla démolition de l'immeuble des Tertres © SEM 92

© D.R.

CRÉATION D'UN JURY CITOYEN DANS LE CADRE DU PROCESSUS DE SÉLECTION DES PROJETS ARCHITECTURAUX.

Concertation du jury citoyen © SEM 92

Pouvez-vous nous citer un moment fort du processus mené ? La création d’un jury citoyen dans le cadre du processus de sélection des projets architecturaux a vu le jour. À l’automne 2011, les projets ont été présentés et un appel au volontariat a été lancé pour la constitution du jury citoyen : 6 Balnéolais ont été en charge du choix des projets lauréats, au même titre que 6 élus et 6 experts. Il y a eu en amont un travail de pédagogie et de sensibilisation des habitants pour les aider à lire un plan, à analyser un projet dans son intégralité. Leurs remarques ont toujours été pertinentes et pleines de bon sens. Au départ il faut avouer que les réactions ont été assez mitigées. Très rapidement, les plus réticents sont devenus les plus convaincus et notre démarche a connu un succès dont nous sommes aujourd’hui très fiers.


Comment s’intègre le PRU dans la politique de la ville de Bagneux ? Le PRU des Quartiers sud de Bagneux n’est pas une action isolée. Inscrit dans la stratégie globale d’urbanisation de la ville, il comporte différents leviers de développement : le maintien des services publics existants et l’arrivée d’une offre de logements enrichie contribuent à l’attrait du quartier pour ses habitants actuels et futurs ainsi que pour tous ceux de Bagneux. L’extension du parc François-Mitterrand et la création d’un nouveau réseau de voirie plus qualitatif favorisent la réintégration des Quartiers sud au sein de la commune. Le renouvellement urbain des Quartiers sud est une très belle expérience qui demande à être suivie et compte tenu de ce succès collectif, les grands axes de développement de notre ville sont déjà définis :

LA CRÉATION D'UN NOUVEAU RÉSEAU DE VOIRIE PLUS QUALITATIF FAVORISE LA RÉINTÉGRATION DES QUARTIERS SUD AU SEIN DE LA COMMUNE.

– l’arrivée du métro à Bagneux dès 2019 par la prolongation de la ligne 4, et de la ligne 15 en 2020 ;

Vue d'ensemble des travaux de construction des nouveaux logements, 2014 © SEM 92

– le développement important de l’activité économique sur la commune. Aujourd’hui, Bagneux souffre du manque d’entreprises. Notre objectif est de redevenir dynamique et attractif. Nous fonctionnons comme un « puzzle » : la construction se fait méthodiquement, pièce après pièce, pour obtenir un résultat cohérent ! – les futures rénovations urbaines à engager : par exemple, le quartier de la Pierre-Plate qui présente des problématiques similaires aux Quartiers sud ; – la transformation, dès 2016, des 16 hectares du site de la DGA : un programme mixte pour intégrer un nouveau « morceau de ville » au centre de Bagneux ; – la requalification de la zone industrielle en entrée de ville : un programme mixte et complexe réalisable à long terme ; – le positionnement privilégié de la ville dans le Grand Paris afin de séduire de nouveaux habitants et les inciter à rester à travers une impulsion publique forte.

Centre social et culturel de La Fontaine-Gueffier © SEM 92


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QUATRE GRANDS AXES D'INTERVENTION POUR UN PROJET DE RÉNOVATION URBAINE « OPÉRATION DE RENOUVELLEMENT URBAIN » Une intervention conséquente L’opération de renouvellement urbain de Bagneux propose une intervention conséquente sur la structure urbaine déclinée en différentes intentions programmatiques : – Le choix de déconstructions importantes et la prise en compte de lieux de patrimoine sur le site : le projet urbain s’appuie notamment sur la démolition de la barre des Tertres, mais aussi sur les démolitions qui se justifient par l’état vétuste et/ou inadapté de certains bâtiments. Par ailleurs, il est recherché la valorisation de certains lieux, comme la Fontaine-Gueffier, les mails des Tertres et des Cuverons, et différents emplacements où certaines œuvres d’art sont positionnées dans le paysage.

Patio du centre de La Fontaine-Gueffier © SEM 92

– La reconfiguration de la rue des Tertres, véritable « colonne vertébrale » du site, délimitée par ses deux carrefours redessinés, et agrémentée par un parc urbain et des équipements publics reconstruits qui s’y rattachent (groupe scolaire Paul-Éluard, halle des sports JanineJambu, centre social et culturel de la Fontaine-Gueffier).

Le centre de La Fontaine-Gueffier, vue de nuit © SEM 92

UNE NOUVELLE IDENTITÉ PAYSAGÈRE ET UN NOUVEAU MAILLAGE DES ESPACES PUBLICS, À PARTIR DE LA TOPOGRAPHIE DU SITE.

– La réalisation d’un trait d’union bâti entre les quartiers des Tertres et des Cuverons et le développement de la mixité des fonctions au cœur des Quartiers sud. Il est souhaité ainsi la mise en cohérence du paysage bâti en cherchant à éviter les ruptures d’échelle et en équilibrant les opérations neuves et l’existant. Le site de la FontaineGueffier, au cœur du projet de renouvellement du quartier, et à l’articulation entre les Tertres et les Cuverons, est pensé comme un pôle d’animation et de services autour de plusieurs fonctions et usages : logements, commerces, espaces verts et équipements. – La requalification des espaces de proximité des bâtiments. De manière générale, une nouvelle identité paysagère et un nouveau maillage des espaces publics sont créés à partir de la topographie du site (par exemple, des interventions lourdes sur le nivellement de la rue de la Fontaine et le dévoiement de la rue des Pichets).


Apprivoiser les contraintes du site : la pente et la mise en état des sols En balcon sur le pavillonnaire de la vallée et des communes limitrophes, le quartier est un repère visible de très loin. Sur la pente, il agit comme la véritable façade de la commune : l’organisation du site traduit l’occupation progressive de la pente avec sur le plateau l’ancien site Thomson aujourd’hui occupé par la Direction générale de l’armement (départ prévu en 2016), sur le coteau le grand ensemble avec ses barres et ses tours, et sur le bas de la pente des zones pavillonnaires. Le dénivelé marqué (près de 40 mètres entre le carrefour des Blagis et la rue des Pichets) explique le caractère exceptionnel des perspectives visuelles sur le val des Blagis. Cependant, la topographie générait une coupure entre le quartier et le centre-ville. Le projet de renouvellement urbain vise à atténuer le cloisonnement du site par un traitement des dénivelés et des constructions sur la pente. Cela s’est traduit concrètement dans le projet de rénovation par la reconquête de la pente, marquée par une valorisation du panorama, par la recherche d’un dialogue entre l’aménagement paysager de proximité avec le paysage lointain, ainsi que par l’ouverture de l’ensemble des logements sur le paysage. Cela a donné lieu par exemple à d’importantes interventions de terrassement afin de remodeler ou de dévoyer certaines rues, d’aménager une voie nouvelle, de créer une terrassebelvédère et de supprimer de multiples talus morcelant l’espace.

Le carrefour de La Fontaine-Gueffier et le centre © SEM 92

Remobiliser du foncier et reconfigurer ensuite les espaces publics L’organisation foncière du quartier héritée de l’urbanisation initiale était complexe : des parcelles privées (résidences de copropriétés et pavillonnaires) et un vaste territoire appartenant à ICADE1 traversé par des rues, de statut privé mais d’usage public. La discordance du statut et de l’usage posait d’importants problèmes de responsabilité, de sécurité, mais également des difficultés de gestion et d’entretien des espaces extérieurs abandonnés qui pénalisaient au final la vie sociale du quartier. À partir de 2003, la vente de l’immeuble des Tertres au Syndicat mixte de Bagneux, celui des Cuverons à la SEMABA2, et du centre commercial Sarrail à la SEM 92, a permis d’engager tout un travail de recomposition du foncier disponible afin de reconfigurer les espaces publics, et de proposer des équipements publics plus compacts et mieux intégrés. Le dévoiement de la rue des Pichets en est une illustration puisqu’elle permet à la fois de simplifier le carrefour et de dégager du foncier disponible pour la construction de la nouvelle halle des sports. Les objectifs souhaités étaient de désenclaver le quartier, de résidentialiser les parcelles et de clarifier les usages tout en redéfinissant des limites claires entre espace public et espace privé. Parmi les espaces publics qui ont été mis en œuvre, il convient d’évoquer la rue des Tertres, la reprise des espaces publics aux abords de l’immeuble des Cuverons et l’extension du parc François-Mitterrand. En complément de ces aménagements paysagers, un travail de modernisation, d’enfouissement et de reprise de l’ensemble des réseaux a été réalisé par tous les concessionnaires et les entreprises travaillant sur le site pour reconfigurer et adapter les réseaux du quartier (eau potable, électricité, assainissement, télécom et chauffage urbain), en privilégiant des techniques respectueuses de l’environnement. assainissement, télécom et chauffage urbain), en privilégiant des techniques respectueuses de l’environnement. 1 Immobilière caisse des dépôts, ex-SCIC. 2 Sociétè d'économie mixte agir à Bagneux.

Centre social et culturel de La Fontaine-Gueffier © SEM 92


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Halle des sports Janine-Jambu © SEM 92

Halle des sports Janine-Jambu © SEM 92

Articuler la démolition et la reconstruction d'immeubles d'habitation et d'équipements Le projet de remodelage du quartier s’appuie sur la démolition de la barre des Tertres, de pavillons et du centre commercial Sarrail, la réhabilitation de la barre des Cuverons, et la démolition-reconstruction de trois équipements publics (groupe scolaire Paul-Éluard, centre social et culturel de la Fontaine-Gueffier, halle des sports Janine-Jambu) permettant ainsi une réorganisation spatiale du quartier. La barre des Tertres cristallisait une grande part des problèmes diagnostiqués sur le quartier. Elle souffrait d’une mauvaise image et ses espaces extérieurs posaient d’importantes questions d’usage : son mail était souvent désert et la rue des Tertres surchargée de stationnements. Dans le cadre du projet de renouvellement urbain, sa démolition a donc été décidée ; s’en est suivi un long travail de relogement et d’accompagnement social mené par le Syndicat mixte de Bagneux. À partir de 2003, l’équipe de la Direction de projet de la Ville et celle de maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (MOUS) pour le relogement, portée par la SEMABA, ont été les interlocuteurs directs des locataires sur toutes les questions liées au relogement. La barre des Cuverons, malgré son relatif isolement, bénéficiait d’une image plus positive et a donc été réhabilitée. Ses façades ont été entièrement repensées en jouant sur l’accessibilité et le gabarit.

À LIRE

Les quartiers sud de Bagneux Mouvements de rénovation urbaine Archibooks + Sautereau éditeur, Paris, 2014, 88 p. ISBN 978-2-35733-263-8 13,90 €

LA BARRE DES CUVERONS, MALGRÉ SON RELATIF ISOLEMENT, BÉNÉFICIAIT D'UNE IMAGE PLUS POSITIVE ET A DONC ÉTÉ RÉHABILITÉE.

Dynamiser l'image du territoire en favorisant l'implantation de logements en accession Avec pour objectif le développement de la mixité sociale et suite à la vente des logements d’ICADE sur le quartier à la SEMABA et à DOMAXIS, la ville de Bagneux a souhaité modifier la programmation des nouveaux logements à réaliser sur le quartier : transformer la construction des logements sociaux prévus en construction de logements en accession à la propriété, et reporter la réalisation des 113 logements sociaux prévus dans le cadre de la reconstruction du « 1 pour 1 » sur d’autres quartiers de la ville. Il fallait susciter l’intérêt de promoteurs privés à investir dans un quartier qui avait souffert jusque-là d’un déficit d’image en valorisant le projet de rénovation urbaine qui se mettait en œuvre.


FICHE TECHNIQUE Aménagement des espaces publics

Paysagiste : SLG Paysages Bureau d’études techniques : Séphia Ingénierie 1e tranche : entreprises Razel, Screg, Inéo Infra, Lachaux Paysage Livraison : décembre 2011 2e tranche : entreprises Colas IDF Normandie, Citéos, Pam Paysage Budget : 20,5 M d’euros HT Livraison : juin 2014 Extension du parc François-Mitterrand Paysagiste : Atelier de l’Île Bureau d’études techniques : Igrec Ingénierie Entreprises : Colas IDF Normandie, Roussel Paysage, Bouvelot TP, Ferraz Budget : 5 M d’euros HT Livraison : mai 2014 Réhabilitation de l’immeuble des Cuverons Architecte : Atelier VIARD Bureau d’études techniques : Berim, Secotherm, Synerg CTS Entreprise : GTM Budget : 24 M d’euros HT Livraison par la SEMABA : février 2010 Réaménagement des espaces extérieurs de l’immeuble des Cuverons Paysagiste : Atelier Phusis Bureau d’études techniques : Synerg CTS Entreprises : Razel, Inéo Infra, Lachaux Paysage Budget : 2,4 M d’euros HT Livraison : janvier 2011 Démolition de la barre des Tertres Maîtrise d’œuvre : AD Ingé Entreprises : Genier-Deforge, SNPR, Copes France Budget : 1,5 M d’euros HT Livraison : juillet 2010 Démolition du centre commercial Sarrail Maîtrise d’œuvre : Antéa Group Entreprises : Picheta, Genier-Deforge Budget : 0,35 M d’euros HT Livraison : novembre 2012 Démolition de l’ancien groupe scolaire Paul-Éluard Maîtrise d’œuvre : Antéa Group 1e tranche : entreprises LDT, Isotherma Livraison : septembre 2009 2e tranche : entreprises Bouvelot TP, Sogedec Budget : 0,30 M d’euros HT Livraison : décembre 2011 Injections et comblement de sols Maîtrise d’œuvre : Sépia GC Entreprise : GTS Budget : 5,2 M d’euros HT Livraison : septembre 2011

Construction du CSC de la Fontaine -Gueffier Architecte : Epicuria Architectes Bureau d’études techniques : CET Ingénierie Entreprise : Pitel (gros œuvre) Budget : 4,6 M d’euros HT Livraison : mars 2012 Construction de la halle des sports Janine-Jambu Architecte : Nomade Architectes Bureau d’études techniques : CETBA Ingénierie Entreprise : Sylvamétal (gros oeuvre) Budget : 7,5 M d’euros HT Livraison : mars 2013 Construction du groupe scolaire Paul-Éluard Architecte : Hesters et Barlatier Bureau d’études techniques : Sas Mizrahi Entreprise : Pitel Budget : 8,4 M d’euros HT Livraison par la SEMABA : août 2011 Construction des logements Tertres : « PERSPECTIVES Grand angle » et « Côté belv édère » Promoteurs : Kaufman & Broad, Cogedim et Logipostel Architecte : Daquin Ferrière Bureau d’études techniques : Berim Entreprise : CBC Nombre de logements : 111 logements dont 24 en accession sociale Livraison : 1er trimestre 2015 pour « Perspectives Grand angle » et 3e trimestre 2015 pour « Côté belvédère » Construction des logements Paul-Éluard : « PERSPECTIVES Promenade » et « Les jardins PaulÉluard » Promoteurs : Kaufman & Broad, Cogedim et Logipostel Architecte : Brelan d’Arch Bureau d’études techniques : Berim Entreprise : CBC Nombre de logements : 140 logements dont 33 en accession sociale Livraison : 1er semestre 2015 pour « Perspectives Promenade » et 3e trimestre 2015 pour « Les jardins Paul-Éluard » Construction des logements Fontaine -Gueffier : « PERSPECTIVES L’Avant -scène » et « Les Balcons de la Fontaine » Promoteurs : Kaufman & Broad, Cogedim et Logipostel Architecte : Guy Vaughan Bureau d’études techniques : Berim Entreprise : CBC Nombre de logements : 148 logements dont 56 en accession sociale Livraison : 4e trimestre 2015 pour « L’Avant-scène » et 1er trimestre 2016 pour « Les Balcons de la Fontaine »


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Vue de Paris depuis la Tour First

L’IMMOBILIER

MULTICANAL

Altarea Cogedim est un acteur de référence de l’immobilier. A la fois foncière de commerce et promoteur, il est présent sur les trois principaux marchés de l’immobilier : commerce, logement, bureau. Il dispose pour chacun de l’ensemble des savoir-faire pour concevoir, développer, commercialiser et gérer des produits immobiliers surmesure. En rachetant RueduCommerce, un des leaders du e-commerce en France, Altarea Cogedim devient la 1ère foncière commerce multicanal. Présent en France, en Espagne et en Italie, Altarea Cogedim gère un patrimoine de centres commerciaux de 4 milliards d’euros au 31 décembre 2012. Coté sur le compartiment A de NYSE Euronext Paris, Altarea affiche une capitalisation boursière de 1,5 milliard d’euros au 31 décembre 2013.

www.altareacogedim.com

Nework - Nanterre (92)

Nouvelle Vague - Paris 4

*Opération développée en partenariat avec CFC

Qwartz-Villeneuve-la-Garenne (92)

Mercedes-Benz France (78)*

RueduCommerce


NEU

VILLE

ENNE

-GAR VE-LA

UN CENTRE COMMERCIAL QUI REQUALIFIE UN TERRITOIRE « L'IMMOBILIER COMMERCIAL EST UN SECTEUR EN ÉVOLUTION PERMANENTE » Vecteur de dynamique économique Élément urbain structurant et vecteur de dynamique économique, l’immobilier commercial est un secteur en évolution permanente : il répond à des stratégies territoriales, au plus près des mutations sociétales et des nouvelles attentes des consommateurs… Loin des standards des années 1970-1980, le centre commercial contemporain est lumineux, convivial, multifonctionnel et ouvert sur la ville. Ainsi de QWARTZ, le nouveau centre commercial régional de Villeneuve-la-Garenne, dans les Hauts-deSeine (92).

À LA CLÉ, LA VOLONTÉ DE REVISITER LA NOTION MÊME DE CENTRE COMMERCIAL POUR TENDRE VERS UN ESPACE DE SERVICES, D'INTERACTIONS ET DE LOISIRS.

Quartier sud, 1954 © Ville de Villeneuve-la-Garenne

La Caravelle avant remodélisation du quartier © Ville de Villeneuve-la-Garenne

Vue du chantier du nouveau centre commercial QWARTZ © D. R.

Inauguré en avril 2014 après treize ans de conception, QWARTZ incarne, par son positionnement singulier, le renouveau de tout un territoire. Riche de concepts innovants développés pour l’occasion, ce centre commercial régional de 86 000 m² situé au croisement de trois départements propose une expérience unique de shopping réinventé avec tous les atouts que le consommateur est en droit d’attendre d’un tel édifice : luminosité, qualité spatiale, repérages simples, élégance d’un traitement unifié, offre d’achats variés, convivialité, œuvres d’art interactives, activités ludiques… C’est un véritable lieu de vie. Réaliser un projet d’une telle ampleur ne peut découler que de la résolution d’équations complexes portées par les différents acteurs : programmation adaptée, recherche d’innovations, portages politique et foncier, choix des partenaires, conception urbaine et architecturale, réalisation technique, commercialisation de qualité… avec, à la clé, la volonté de revisiter la notion même de centre commercial pour tendre vers un espace de services, d’interactions et de loisirs.


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Début du chantier pour la construction de QWARTZ © Altarea Cogedim

Façade de QWARTZ du côté du fleuve © Kamel Khalfi

QWARTZ vu depuis la route © Altarea Cogedim

QWARTZ ou le commerce intelligent En bordure de la Seine et de l’A86, l’équipement jouit d’une belle visibilité dans un quartier en plein développement… Quoi de plus fondamental pour un programme commercial ? Se déployant sur deux étages situés sur les trois niveaux de parking, il regroupe un hypermarché Carrefour, une trentaine de restaurants dont certains disposent de terrasses extérieures, plusieurs moyennes surfaces, des boutiques et des services : au total, 165 enseignes ont suivi Altarea Cogedim pour venir s’implanter là, conscientes des atouts du site et de sa zone de chalandise d’un million d’habitants.

L'ÉQUIPEMENT JOUIT D'UNE BELLE VISIBILITÉ DANS UN QUARTIER EN PLEIN DÉVELOPPEMENT... QUOI DE PLUS FONDAMENTAL POUR UN PROGRAMME COMMERCIAL ?

Cette offre multiple, ajoutée à l’envergure du centre et à l’originalité des façades, en fait un véritable morceau de ville, dans la dynamique créée par le maire Alain-Bernard Boulanger. Oui, ce centre commercial est un « morceau de ville », habilement et élégamment conçu par l’agence d’architecture DGLa. Si les panneaux de méthacrylate (Danpalon®) s’irisent délicatement aux moindres humeurs du ciel, évoquant possiblement les cristaux du quartz, la façade urbaine, elle, longue de 400 mètres, explose franchement par sa volumétrie fractale et ses couleurs saturées. Mais ce morcellement par séquence pallie l’effet de masse et correspond au caractère que la Ville souhaite donner au nouveau quartier. À l’intérieur, le centre est desservi par des mails spacieux. Perpendiculaires à la Seine, deux allées traversantes sont traitées comme de véritables rues : ils sont naturellement éclairés par des verrières zénithales – plus de 7 000 m² – et se terminent de part et d’autre par des fenêtres urbaines monumentales ouvertes sur la ville et sur la Seine. Pour les deux autres mails, les cheminements diffèrent : l’un avec un plan courbe éclairé par des cônes de lumière, le second plus traditionnel. C’est là, l’un des savoir-faire des architectes que d’avoir appréhendé l’incidence des tracés sur les qualités spatiales d’un tel parcours. Les architectes ont soigné les détails. Le bandeau filant au-dessus des vitrines est unifié, au plafond les sous-faces des caissons techniques renfermant tous les réseaux sont habilement travaillées, notamment en traitant les joints de dilatation à la manière de joints creux très graphiques, transformant une nécessité en qualité esthétique. Dans le même esprit, les sols sont rythmés par des ruptures de couleurs. Le tout dégage une impression de souplesse dans le structuré, de liberté dans le cadre.


Facade de QWARTZ du côté de la ville © Altarea Cogedim

Une dimension humaine La lumière naturelle, omniprésente, répond aux critères de la certification Breeam® et HQE®.  Les galeries commerciales sont situées en hauteur et dégagent des vues inédites sur la Seine et la Cité du cinéma de Luc Besson. Cette notion de transparence architecturale associée à l’idée de couture urbaine, pour contextuelle qu’elle soit, vient appuyer le concept d’un centre commercial connecté. Le mail parallèle au fleuve est éclairé par des cônes équipés d’une lentille de verre tandis que la verrière du mail en parallèle du boulevard Gallieni est plus simple dans sa réalisation. Positionnés côté Seine, les restaurants se prolongent par des decks avec vue sur l’extérieur. Ces perspectives, ce sentiment d’ouverture, la lumière naturelle, la spatialité généreuse participent d’une ambiance à échelle humaine, amène et conviviale.

LA RÉVOLUTION NUMÉRIQUE EST DEVENUE UN PHÉNOMÈNE SOCIAL, CULTUREL, ÉDUCATIF, QUI MODIFIE LES RAPPORTS HUMAINS ET LE VIVRE ENSEMBLE.

Ouverture panoramique d'un des deux mails du centre commercial © Kamel Khalfi

Centre commercial régional connecté Les mutations de notre société se traduisent jusque dans la typologie du centre commercial : la révolution numérique est devenue un phénomène social, culturel, éducatif, qui modifie les rapports humains et le vivre ensemble.  À l’heure du commerce connecté 2.0., le fonds d’investissement immobilier Orion Capital Managers et l’opérateur Altarea Cogedim ont souhaité développer ces nouveaux usages en proposant des expériences de shopping inédites. C’est pourquoi les mails sont ponctués d’innovations telles que la Cité du e-commerce. Alternatives aux baux de neuf ans, une douzaine de bornes interactives donnent le libre accès à des sites marchands ou à des marques dont l’offre n’est pas présente dans le centre.  De la même manière, un « Experience store », situé dans l’un des meilleurs emplacements du centre, donne à de jeunes créateurs ou à des marques la possibilité de bénéficier d’un espace à investir pour y installer temporairement une boutique « clés en main ». Altarea Cogedim se charge de l’aménagement intérieur et fournit les vendeurs. Le parcours clients est complété par des activités numériques, ludiques et artistiques. Des installations et des œuvres d’art interactives réalisées par des artistes internationaux, en partenariat avec Le Cube, centre de création numérique basé à Issy-les-Moulineaux, sont installées au hasard de la promenade. À la fois sensorielles, participatives, événementielles, relationnelles, ces animations dans un centre commercial constituent une première mondiale !


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LE CHANGEMENT ENTRETIEN AVEC ALAIN BERNARD BOULANGER MAIRE DE VILLENEUVE-LA-GARENNE, PREMIER VICE-PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL DES HAUTS-DE-SEINE, PRÉSIDENT DE SEM 92

Propos recueillis par Delphine Désveaux Monsieur le maire, vous êtes natif de Villeneuve-laGarenne, vous avez travaillé vingt-huit ans auprès de votre prédécesseur, et vous venez d’être réélu. Comment présenteriez-vous votre ville ? Alain-Bernard Boulanger : Villeneuve-la-Garenne est très mal connue pour des raisons historiques. On trouve pour la première fois son nom, qui est celui d’une ferme au bord de la Seine, sur une carte du xiie siècle, à une époque où le fleuve occupait approximativement l’emplacement de QWARTZ. L’endroit fut longtemps isolé : le premier pont vers Saint-Denis remonte à 1841, au moment où l’on édifiait les fortifications de Paris. Le deuxième ouvrage sera construit en 1905 pour consolider ces fortifications et faciliter les manœuvres des troupes autour de Paris en cas d’attaque. Villeneuve-la-Garenne est donc une grande plaine qui va conserver longtemps sa vocation agricole, l’intérieur des terres étant voué au maraîchage en tant que ferme de l’abbaye royale de Saint-Denis, et à l’extraction de sable. Pour la protéger des inondations, une digue de terre est construite au xviiie qui résistera à l’inondation de 1910, le long de laquelle va peu à peu se constituer un hameau.

Détail de la façade en ondulation © D.R.

On note cependant la présence d’activité industrielle.

L’industrie va commencer à s’implanter en 1921 avec la société Davum, qui commercialise des aciers plats ou longs, et qui profite de la présence du fleuve, du rail et de la route pour acheminer ses produits. Se sont ensuite installés trois chantiers navals, un chantier de scaphandriers lourds, une usine de fabrication du gaz de ville (qui deviendra Gaz de France après la guerre), un constructeur automobile, un fabricant de matelas en kapok... Ma famille, arrivée en 1850, avait une affaire de transport hippomobile liée aux constructions des grands monuments parisiens comme le Sacré-Cœur. Comment définiriez-vous le caractère de Villeneuve-laGarenne ?

Mélange d’un monde encore agricole et d’une société préindustrielle jusque dans les années 1960, le village, encore très isolé, où tout le monde se connaissait, ne ressemble en rien à une banlieue. Plus tard, une grande part de sa population fut constituée d’ouvriers spécialisés, l’aristocratie de la classe ouvrière, qui travaillaient à Saint-Denis, aux chantiers navals de la Loire, juste de l’autre côté de la Seine, ou chez Hotchkiss. La ville n’était donc pas pauvre, et conservait un caractère assez traditionnel.

Mail transversal © Kamel Khalfi


Quand avez-vous commencé votre engagement politique et qu’espériez-vous pour votre ville ?

Détail de la façade © D.R.

Comment et quand s’est opéré le changement ?

Mon prédécesseur, M. Prévot, fut le premier maire de France à répondre à l’appel de l’abbé Pierre pendant l’effroyable hiver 1954-1955. Il accepta qu’une cité d’urgence fût construite dans le sud de la ville pour accueillir 600 familles. Depuis lors, Villeneuve-la-Garenne va conserver cette faculté d’accueil, d’abord avec les pieds-noirs qui quittent l’Algérie, puis les anciennes colonies et l’exode rural. Une cité Emmaüs sera construite en face de la mairie, puis viendra l’opération du 14 rue Chaillon, qui eut la particularité d’être un programme mêlant maisons individuelles et logements collectifs. De 1955 à 1963, plus de 8 000 logements sociaux ont été érigés dans les quartiers sud et nord. De très grands architectes, tous très imprégnés des idées modernistes de l’époque, sont intervenus : Dubuisson pour « La Caravelle », Herbé et Le Couteur pour « La Banane ».

Vue de QWARTZ la nuit © D.R.

J’ai eu des responsabilités d’élu pour la première fois en 1971, j’ai été vingt-huit ans premier adjoint et j’ai été élu maire en 1999 après le décès de mon prédécesseur. J’ai donc eu le temps de réfléchir aux inflexions que je souhaitais donner à la politique que je poursuis à l’heure actuelle. Cette politique s’oriente sur trois axes : le premier concernait la diversification de l’habitat pour inverser la tendance des 72 % de logements sociaux. Mon objectif était de parvenir à un équilibre 50/50 en favorisant les programmes en accession libre et en veillant à conserver le caractère pavillonnaire de la ville. Le deuxième axe, dont QWARTZ est l’un des vecteurs, consistait à redensifier les zones d’activités de manière à augmenter les emplois et à échapper au syndrome de la ville-dortoir. Nous avons aujourd’hui, grosso modo, 1,5 emploi par personne active. Enfin, je me suis attaché à moderniser tous les équipements publics – sportifs, maisons de retraite, groupes scolaires, MJC, hôpital, arrivée du tramway – pour répondre à cette logique de densification. Sur ces quinze dernières années, nous sommes intervenus sur 75 % de la surface de la ville.

VILLENEUVE-LA-GARENNE INCARNE LE MÉLANGE D'UN MONDE ENCORE AGRICOLE ET D'UNE SOCIÉTÉ PRÉ-INDUSTRIELLE JUSQUE DANS LES ANNÉES 1960.


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Que représente l’arrivée d’un centre commercial d’une telle ampleur à Villeneuve-la-Garenne ?

De nombreuses études faites sur le nord de la boucle fluviale soulignaient l’insuffisance de l’offre commerciale, ceci pour les raisons historiques que j’ai évoquées. J’ai donc souhaité dès mon élection nous positionner dans ce domaine, d’autant que le centre commercial existant ne satisfait pas la Ville. Après un certain nombre de négociations infructueuses, Orion Capital Managers est intervenu en 2001 et la municipalité a décidé de créer une ZAC de part et d’autre du boulevard Gallieni. L’aménagement en a été confié à la SEM 92, que je préside, ce qui m’a permis d’entretenir des relations directes avec Aref Lahham, président d’Orion Capital Managers, et de garder la main sur cette opération. Cette confiance mutuelle entre Aref Lahham, Altarea Cogedim et moi-même a permis la réalisation de ce projet.

Équipement intérieur © Bruno Levy

LES DÉCISIONS PRISES SUR LA MÉTROPOLE, VALIDÉES PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, ME LAISSENT PENSER QUE LA DENSIFICATION VA ÊTRE TRÈS IMPORTANTE.

Œuvre numérique intéractive © D.R.

Quel regard portez-vous sur le Grand Paris ?

L'accueil de QWARTZ © Kamel Khalfi

Je suis favorable à l’existence d’une telle instance depuis trente ans. Vouloir figer Paris intra-muros me paraît grotesque cependant. Les décisions prises sur la métropole, validées par le Conseil constitutionnel, me laissent penser que la densification va être très importante, de l’ordre de 11 millions d’habitants. À terme, je suis favorable à ce qu’elle tienne lieu de Région au sein de laquelle les 130 communes joueraient un rôle d’arrondissement. Mais c’est faire l’impasse sur la très grande différence de nature entre les Parisiens et les habitants de la banlieue.  Les premiers n’attendent rien de leurs élus, à l’inverse des seconds. Cette configuration risquerait de laisser les gens dans le besoin et il faut considérer en profondeur cette question.


Maîtrise d'ouvrage déléguée Altarea Commerce Maîtrise d’œuvre Architecte : DGLa, Thierry de DINECHIN, Philippe GORCE et Yves SIMON Architecte, directeur de projet : Marie-Laure LANGLOIS BET fluides : Barbanel – Pascal BURIDANT & Luis RIBEIRO BET structure : Mizrahi – Éric BOURNIQUE & Christian KPESSOKRO BET VRD : CL Infra – Albert LICHAN BET Verrières : Roux & associés – Pascale ROUX Économiste : Économie 95 – Claude NARDI & Nicolas PICHOU BET OPC : Amoclé – Benoit GUILLOT & Laurent MOREAU BET acoustique : Peutz & associés – Sulian OLIVO BET éclairagiste : Franck FRANJOU BET HQE : Alto Ingénierie – Oriane DUGROSPREZ & Pierre RAYNAUD Coût d'investissement 300 M€ HT Coût des travaux 155 M€ HT Surface 85 000 m2 de SHON 250 000 m2 de SHOB Calendrier Démarrage des études : janvier 2003 Obtention du permis de construire : 18 mai 2009 Début des travaux : octobre 2011 Date d’inauguration : 8 avril 2014 ÉQUIPE DGLA Jessica AUBIN Gaëlle BAZILE Mylène BEAUMONT Aurore CASVIGNY Louis DE BRIVE Tiphaine DE CAZENOVE Marine DECENEUX François-Xavier GILLES David JOSEPH Fanny LANDEAU Valentino LUCCHIARI Corina MANSUY Céline MASSON Benoît MASSON-REGNAULT

Entreprises GO/Structure/Maçonnerie : Spie SCGPM VRD : COLAS Verrières : SMB/HEFI Ouvrages métalliques : LOISON Charpente bois : MATHIS Couverture étanchéité : SMAC Habillage des façades : SMAC Ravalement : MAES Menuiseries métalliques : VERRE & MÉTAL Serrurerie : VULCAIN Portes CF : GESOP CVCD : AXIMA Protection incendie/RIA : AXIMA Plomberie : AXIMA Courants forts : CLEMESSY GTB : CLEMESSY Groupes électrogènes : VIC Courants faibles : IVT S.S.I. : IVT Guidage à la place : IVT Appareils élévateurs : KONE Portes automatiques : Record Métallerie décorative : LOISON Cloisonnement/Doublage : PARTESIA Menuiseries bois : PARTESIA Faux plafonds : CHARBONNEL Revêtements sols : MINERAL PRODUCT Peinture Parkings : SRPI Peinture décorative : MAES Enseignes : INSIGNIS

À PARAÎTRE

Le lieu Inauguré en avril 2014 après treize ans de conception, Qwartz, le nouveau centre commercial régional connecté de Villeneuve-la-Garenne, dans les Hauts-de-Seine (92), incarne, par son positionnement singulier, le renouveau de tout un territoire. riche de concepts innovants développés pour l’occasion, ce centre commercial régional de 86 000 m² situé au croisement de trois départements propose une expérience unique de shopping réinventé avec tous les atouts que le consommateur est en droit d’attendre d’un tel édifice : luminosité, qualité spatiale, repérages simples, élégance d’un traitement unifié, offre d’achats variés, convivialité, œuvres d’art interactives, activités ludiques… Par sa taille, il est l’un des plus grands centres commerciaux de France et c’est probablement l’un des derniers à être construits dans la région parisienne. Son originalité réside dans le fait qu’il est situé en milieu urbain, et qu’il participe fondamentalement au renouveau immobilier de ce quartier.

Delphine Désveaux, QWARTZ, le nouveau centre commercial connecté de Villeneuve-la-Garenne Archibooks + Sautereau éditeur, Paris, 2015, 96 p.

L’Esprit du Lieu - Urbanisme La ville s’étend et se reconstitue chaque jour par de petites interventions et de grands projets. Pour comprendre et mieux connaître ses développements, cette collection propose de synthétiser des projets en cours de réalisation, des réflexions menées ou des opérations tout juste inaugurées. Élus, architectes, urbanistes et paysagistes sont les principaux acteurs ici interrogés sur leur manière de penser la ville de demain. Les territoires sont en mouvement et chacun d’entre nous est susceptible de juger de ces changements.

Collection L’ESPRIT DU LIEU Urbanisme

ISBN 978-2-35733-320-8 13,90 €

Archibooks

Collection L’ESPRIT DU LIEU Urbanisme

Maîtrise d'ouvrage Architecte : Ori Alta (Altarea Cogedim et Orion Capital Managers)

Eric MECHAIN Kamil NAJMOWICZ Orchidée NGUYEN-HA Benjamin PEIRO Gérald PHILIBERT Axel PIERENS Sandra PINTO Cristian PORTILLO Tsaratsiry RAKOTOMIHANTA Leticia ROTH Antoine TOURNE Agathe VERDIER

QWARTZ, UN MORCEAU DE VILLE

QWARTZ, LE NOUVEAU CENTRE COMMERCIAL RéGIONAL CONNECTé DE VILLENEUVE-LA-GARENNE UN MORCEAU DE VILLE

13,90 E

ISBN 978-2-35733-320-8

Archibooks

FICHE TECHNIQUE

Collection L’ESPRIT DU LIEU Urbanisme


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Figure de proue d’une métropole européenne tournée vers l’avenir, la Confluence est aujourd’hui une vitrine de la capitale des Gaules. En tant que telle, ce nouveau quartier mérite plus d’une visite. Représentatif de la ville du siècle, il fascine par sa capacité à marier patrimoine industriel et architectures contemporaines, innovantes dans leur conception environnementale, leurs formes, leur adaptation aux nouveaux modes de vie. Haut lieu de l’art contemporain, immergée dans la nature, la Confluence propose également une promenade inédite le long des rives de Saône, du centre ville historique à la pointe, là où la rivière rejoint le Rhône. À pied, à vélo, en tram, en navette fluviale ou en voiture électrique, tous les modes de transports contemporains sont à votre disposition pour vous balader tranquillement et découvrir un territoire urbain comme il en existe peu en France. Delphine Désveaux Passerelle fixe, RFR et Jean-François Blassel © Laurence Darnière


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 LES MÉTROPOLES FRANÇAISES Centralités du Grand Paris élargit son horizon et invite à la comparaison avec les autres métropoles françaises.

LYON CONFLUENCE


La Confluence dans les années 1960 © D.R.

Avant le xviiie siècle Un fleuve à dompter Le carrefour géographique représenté par la rencontre du Rhône et de la Saône se révèle très tôt stratégique. Dès le Ier siècle avant J.-C., les Romains établissent des fortifications sur les collines qui le surplombent. La ville se développe ensuite entre les deux cours d’eau, puis s’étend progressivement à l’est. La pointe de la presqu’île, marécageuse, exposée aux caprices du fleuve, reste, elle, longtemps inhabitée.

Projet Perrache (1769)

© Archives municipales de Lyon


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LE CARREFOUR GÉOGRAPHIQUE REPRÉSENTÉ PAR LA RENCONTRE DU RHÔNE ET DE LA SAÔNE SE RÉVÈLE TRÈS TÔT STRATÉGIQUE.

Le temps du remblaiement Au xviiie siècle, la presqu’île de Lyon se terminait par les remparts de l’abbaye d’Ainay et un bras du Rhône. À l’aval, un archipel de petites îles émerge des méandres du Rhône et de la Saône. En 1766, l’architecte MichelAntoine Perrache propose d’agréger les îles afin de doubler l’aire constructible de la presqu’île. Il dessine une chaussée-promenade le long du Rhône, un canal pour des moulins et une gare d’eau, entre Rhône et Saône. Pour leur réalisation, il crée une compagnie à son nom et obtient l’autorisation royale d’ouvrir le chantier en 1775. La plupart des travaux projetés sont réalisés, mais Perrache meurt en 1779 et le projet s’enlise. Au début du xixe siècle, le territoire n’est qu’un vaste marais insalubre et inhabité.

xixe siècle L’aventure industrielle, logistique et portuaire Dans les années 1820, la ville s’intéresse à nouveau à ce qu’elle appelle l’île Perrache. Le canal entre Rhône et Saône est comblé, devenu l’actuel cours Verdun entre le quartier d’Ainay et celui de Perrache. En janvier 1826, juste avant sa démission, le maire Pierre-Thomas Rambaud, puis son successeur Jean de Lacroix Laval font tracer un projet de lotissement du quartier avec un plan en damier autour d’un axe méridien, le cours Charlemagne. La même année, les frères Seguin achètent une vaste emprise à l’ouest. Ils installent la première entreprise de chemin de fer, la compagnie Seguin, qui dessert le bassin houiller de Saint-Étienne à Lyon, un débarcadère à Perrache et une gare d’eau annulaire ouverte sur la Saône pour assurer une liaison fluviale. Des entrepôts de charbon, des gazomètres, des usines s’installent peu à peu, tandis que la municipalité implante des établissements qu’elle juge gênants en centre-ville : prisons et abattoirs côté Rhône, arsenal et entrepôt de vins côté Saône.


LA CONFLUENCE SE TROUVE DÉSORMAIS « DERRIÈRE LES VOÛTES ».

La confluence

© Aurélie Pétrel

La gare PLM En 1851, le quartier Perrache est choisi pour édifier la gare de la ligne Paris-Lyon-Marseille (PLM). Conçue par François-Alexis Cendrier, architecte de la gare de Lyon à Paris, la gare centrale est construite entre Saône et Rhône, au sud d’Ainay, sur un terre-plein à 6 mètres de hauteur pour pallier les différences de niveaux et se protéger des crues. Bien que percé de trois passages, ce terre-plein isole le sud de la presqu’île. La Confluence se trouve désormais « derrière les voûtes ». Gare de Perrache

Un exutoire Dévalorisé et concurrencé par la rive gauche du Rhône, La Confluence attire peu les bâtisseurs et continue de servir d’exutoire au centre-ville. En 1860, une seconde prison, Saint-Paul, vient rejoindre la première, Saint-Joseph, construite dans les années 1930. Puis vient le tour d’une gendarmerie, de deux centres de tri postal, d’un dépôt d’autobus… Les prisons Saint-Joseph et Saint-Paul, Atelier Thierry Roche & Associés coodinateur © Atelier Thierry Roche & Associés

© Aurélie Pétrel


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Prison Saint-Joseph © Aurélie Pétrel

Prison Saint-Paul © Aurélie Pétrel

Cité Perrache © Aurélie Pétrel

xxe siècle Un faubourg en activité La gare et le rail contribuent au développement de la vocation logistique du quartier. Les activités industrielles fleurissent – 37 usines sont recensées avec des ateliers métallurgiques, les abattoirs, l’arsenal, une usine à gaz, une brasserie… – et la population ouvrière s’installe à proximité. Durant les premières décennies du xxe siècle, les premières HBM (habitations bon marché) de Lyon sont construites, majoritairement au nord-est, dans le quartier Sainte-Blandine.

Cité d’habitations à bon marché dite « groupe Quivogne » © Aurélie Pétrel


Le port Rambaud Entre 1906 et les années 1930, le maire Édouard Herriot étend la ville moderne dans le quartier de Gerland avec la construction des abattoirs et du stade qu’il confie à Tony Garnier. Conséquence immédiate : la gare d’eau de Perrache, dysfonctionnelle, est remplacée par un port fluvial aménagé en bord de Saône. Des dépôts à ciel ouvert, des docks, des entrepôts – sucrière, salins, douanes et capitainerie – sont bâtis. Inauguré en 1926, il prend le nom du quai, Rambaud, en hommage au deuxième maire de Lyon.

Le port Rambaud

IMPULSER DES OPÉRATIONS DE GRANDE ENVERGURE POUR RENFORCER ET AFFIRMER LA PLACE DE LYON EN FRANCE ET À L’INTERNATIONAL.

La « machine à circuler » Après-guerre, la ville se heurte à un problème de circulation important. Le tunnel de la Croix-Rousse ne suffit plus ; un second tunnel est percé sous Fourvière pour faciliter le transit est-ouest. Louis Pradel, maire de 1957 à 1976, très influencé par l’architecture des grandes cités nord-américaines, autorise l’emprunt de ce tunnel par l’autoroute A6 entre Paris et Lyon ainsi que la jonction de l’A6 et l’A7 sur le cours de Verdun. La vocation logistique du confluent est à son apogée avec l’ouverture en 1961 du marché de gros (deuxième marché d’intérêt national) qui occupe le quart sud-est du territoire. Le quai du Rhône, élargi aux dépens des bas ports pour réaliser la portion de l’autoroute A7 Lyon-Marseille, facilite grandement son approvisionnement. Entre 1969 et 1976, la construction du centre d’échanges par l’architecte René Gagès vient aggraver la coupure de la presqu’île initiée par la gare de Perrache et finit de verrouiller le quartier. Bien qu’indéniablement fonctionnel – il organise la circulation de tous les modes de déplacement, contient une galerie marchande, un parking automobile, une garderie et un jardin suspendu –, ce mille-feuille de béton ne relie La Confluence à la ville-centre que par trois voûtes. Peu à peu, les activités se réduisent, puis périclitent. Le port Rambaud ferme en 1994. Le secteur semble définitivement condamné…

© Laurence Danière

À l'aube du xxie siècle

Le port Rambaud

© Aurélie Pétrel

À LIRE

Delphine Désveaux, Lyon Confluence Archibooks + Sautereau éditeur, Paris, 2014, 168 p. ISBN 978-2-35733-327-7 9€

Si les efforts en matière d’aménagement ont longtemps primé sur la rive gauche du Rhône, notamment avec la Part-Dieu, les maires Michel Noir (de 1989 à 1995) et surtout Raymond Barre (de 1995 à 2001) vont impulser des opérations de grande envergure pour renforcer et affirmer la place de Lyon en France et à l’international : à la construction de la Cité Internationale confiée à Renzo Piano à l’entrée nord de Lyon, à l’aménagement d’un technopôle et d’un parc à Gerland, s’ajoute la volonté municipale d’embellir la ville. La tenue du G7 en 1996 et l’obtention du label Unesco en 1998 seront deux temps forts. Le centre historique ne pouvant faire l’objet de grandes transformations, l’attention va se porter sur le territoire situé « derrière les voûtes » au sud de Perrache. Et pour couper court avec l’appréciation négative dont ce quartier souffre depuis deux siècles, il est baptisé Lyon Confluence.


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L’ESCALE MOA : Rhône Saône Habitat Programme : 77 logements (43 en accession libre, 11 en accession intermédiaire, 23 en locatif social) et commerces en rez-de-chaussée – 6 817 m2 Shon Architekten Hermann Kaufmann, Atelierd'architecture Hervé Vincent (2014) Rue Casimir-Périer / Rue Denuzière Cet immeuble de logements passifs présente des besoins en chauffage inférieurs à 15 kWh/m2/an. Deux volumes en bois sont habillés d’une seconde peau en verre pour créer des balcons ponctuels et la desserte des logements. Les coursives extérieures empruntent leur vocabulaire à l’imaginaire des traboules. L'escale © Jérôme Boucherat

EMPREINTE MOA : DCB International – Ab Conseil Programme : bureaux – 5 082 m2 Shon Soho-Aurea (2012) 28-31, quai Perrache La façade cinétique de ce bâtiment de bureaux dialogue avec le Rhône tandis que les facettes inox le reflètent. C’est propre, net : efficace.

Empreinte © Aurélie Pétrel

PARC DE SAÔNE MOA : SPL Lyon Confluence Programme : 14 hectares composés d’une promenade, du jardin Ouagadougou, du jardin Erevan, des jardins aquatiques Jean-Couty Georges Descombes, ADR Architectes, Cap Vert (2008/2012) : Profitez de la générosité (14 hectares, tout de même !) et de la diversité de ses composantes : tout au long du parcours, vous pourrez découvrir des atmosphères différentes avec le théâtre de verdure, trois jardins aquatiques (jardins Ouagadougou et Jean-Couty), un îlot central paysagé (jardin Erevan), les « doigts verts » des rues Casimir-Périer, Bayard, Montrochet, la darse qui fait entrer la Saône jusqu’au coeur de La Confluence… Cette sensation d’harmonie irrigue les différents îlots tandis que la générosité de la trame autorise une grande liberté d’usages. Bergeronnettes, cormorans, milans noirs, martins-pêcheurs… Plus d’une trentaine d’espèces d’oiseaux peuplent les collines de Sainte-Foylès-Lyon et La Confluence, à deux pas de l’hypercentre. À La Confluence, la biodiversité gagne du terrain.

Le parc de Saône © Aurélie Pétrel et Jérôme Boucherat


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Figure de proue d’une métropole européenne tournée vers l’avenir, la Confluence est aujourd’hui une vitrine de la capitale des Gaules. En tant que telle, ce nouveau quartier mérite plus d’une visite. Représentatif de la ville du siècle, il fascine industriel et architectures contemporaines,par sa capacité à marier patrimoine innovantes dans leur conception environnementale, leurs formes, leur adaptation aux nouveaux modes Haut lieu de l’art contemporain, immergée dans la nature, la Confluence de vie. également une promenade inédite propose le long des rives de Saône, du centre ville historique à la pointe, là où la rivière rejoint le Rhône. À pied, à vélo, en tram, en navette fluviale ou en voiture électrique, tous les modes de transports contemporains sont à votre disposition pour vous balader tranquillement et découvrir un territoire urbain comme il en existe peu en France. Delphine Désveaux

Passerelle fixe, RFR et Jean-François

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