soit 10 ans états intérieurs christian berst art brut k lein & berst
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soit dix ans états intérieurs
commissaire invité : stéphane corréard
Stéphane Corréard : avant-propos interview de Stéphane Corréard Stéphane Corréard : préface texts in english œuvres d'art brut interview d'Annette Messager installation d'œuvres d'Annette Messager œuvres d'art contemporain biographies
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christian berst art brut kl ei n & berst
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stéphane corréard
avant-propos
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Ambroise Vollard ou Leo Castelli ou Denise René ; certaines figures de galeristes sont devenues si légendaires qu'elles demeurent figées pour l'éternité, comme des silhouettes ou des archétypes. Dans le cas de Christian Berst, premier marchand d'art brut contemporain à Paris, cette inclination prend une ampleur particulière car elle agit dans un champ où le biographique occupe une place particulièrement problématique. Par nature, le créateur brut se définit tellement par les accidents de son existence que des profanes l'y résumeraient volontiers. Pour tel, la catastrophe est survenue dès les ténèbres de sa conception. Pour tel autre, c'est l'enfance qui aura été le théâtre d'une effroyable erreur d'aiguillage. Pour d'autres encore, l'entrée dans l'âge adulte, voire l'âge mûr, aura été marquée par un décrochage équivoque. Certains enfin, apparemment bien intégrés le jour, laissent la nuit les monstres de l'irraison les envahir. Dans le meilleur des cas, on ignore tout de la vie de l'auteur, et on se contente de fouiller dans son œuvre pour en extraire d'hypothétiques indices. Quant à Christian Berst, dont je n'ai jamais recueilli le récit biographique, c'est donc d'indices que j'ai cherché à extraire les motifs d'une passion, sa singularité, sa nécessité dans le paysage contemporain.
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Reconstitution 1 : le bureau Cette pièce essentielle du puzzle que constitue tout galeriste est réservée aux intimes, aux initiés. Entre les fondamentaux (une poignée d’œuvres dont la présence demeure immuable), les trouvailles, les raretés, le bazar sur la table de travail et les livres qu'on choisit de garder à portée de main, le bureau est une projection mentale du galeriste. La visite d'une galerie devrait débuter par là ; c'est ce que je propose, en l'hypertrophiant et l'inversant avec la salle d'exposition principale.
sera dévolu à la présentation de trois artistes contemporains, dont les oeuvres plaident, chacune à sa manière, pour un réexamen des frontières. Reconstitution 3 : la table-ronde
Autre « spécialité » de la galerie, l'organisation de tables-rondes sert autant à définir les champs sémantiques à partir desquels la place de l'art brut peut s'entendre dans l'ensemble plus vaste de la création contemporaine, qu'à envoyer les signaux d'une « ouverture ». Reconstitution 2 : la librairie L'organisation d'une conférence avec Christian Boltanski en 2011 aura marqué Articulation entre le travail visible et l'invisible, elle en signale l'abondante un tournant dans la perception de la production éditoriale. Au-delà, elle est galerie. Pour cet anniversaire, le bureau le théâtre de présentations d’œuvres en de Christian Berst se transforme en tablecontrepoint, offrant une discrète mais ronde métaphorique, laissant la place à tranchante conclusion à l'expo en cours. une installation contemporaine d’œuvres Elle témoigne surtout du cœur de la d'Annette Messager faisant écho à ses relation que Christian Berst entretient à préoccupations. l'art, de son goût pour le dialogue entre les champs de la création. Cet espace
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stéphane corréard. photo : Valeria Motta
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stéphanie estournet
interview de stéphane corréard
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Comment avez-vous abordé la mise en espace des 10 ans de la galerie christian berst art brut ? Je suis parti d'un constat simple. L'ensemble des galeristes que je connais sont perçus comme des marchands. Quand ils s'enthousiasment pour une pièce, on leur renvoie que leurs choix sont orientés, qu'ils sont forcément intéressés financièrement. Jamais vous n'entendez ce genre de reproche concernant un éditeur ou un producteur de cinéma. Pourtant, les fonctions sont similaires. Un artiste et un galeriste doivent fonctionner en couple, tout comme un producteur et un réalisateur, un éditeur et un écrivain. Il y a une nécessité de ce rapport à l'intime si l'on veut sortir d'un marché « industrie » de l'art.
portant de montrer cette particularité car c'est ce qui caractérise la galerie.
Quelle a été votre démarche ? L'idée est donc de montrer les caractéristiques du lieu qui viennent pour une large part du galeriste lui-même. Concrètement, j'ai retenu les différents endroits dans leur singularité : le bureau, donc, et l'espace d'exposition, mais aussi l'espace tableronde et livres. Ces deux derniers espaces sont des lieux d'ouverture, notamment vers l'art contemporain. Le jour où j'ai vu Christian Boltanski à une table ronde chez Christian Berst, j'ai compris qu'il y avait là une volonté de transgression. C'est une particularité de l'endroit – et du galeriste. J'ai donc tenu à souligner l'existence de ces espaces en les Quel impact sur les galeries ? chamboulant, et en les montrant différemElles se ressemblent toutes, dans une sorte ment. Le bureau prend la place principale, de fantasme mimétique. Il faut se souvenir il faut le traverser pour accéder à l'espace d'Ambroise Vollard, de ce côté haut en cou- d'exposition – en un sens, je force Christian leurs que pouvaient avoir les marchands Berst, dans un choc de l'inversion, à acd'art. D'ailleurs, c'est une autre réalité : cueillir chacun comme son meilleur client. tous ceux qui ont la chance d'accéder au bureau du galeriste vous diront que c'est, Vous inversez les pièces, vous les montrez en opposition à l'espace d'exposition, au aussi... white cube, un espace chaleureux, où on Le soir venu, et la galerie fermée, les esaime prendre son temps, parler d'art. Il y paces sont laissés en lumière. Cela donne a cependant quelque chose de particulier un effet Fenêtre sur cour. Nous en sommes à la galerie christian berst... Grâce à l'art les voyeurs – comme dans l'installation de brut, on est immédiatement dans quelque Marcel Duchamp Etant donné qui m'a inchose d'essentiel. Il n'y a pas de filtre avec spiré le titre « Soit 10 ans ». C'est une mise les auteurs. Quelque chose de l'ordre de en fiction en trois tableaux correspondant l'émotionnel en émane. Ça m'a paru im- aux trois ouvertures de la galerie.
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stéphane corréard
préface
critique, journaliste, commissaire d’expositions et collectionneur, Stéphane Corréard s’attache particulièrement depuis vingt ans à faire découvrir de nouveaux artistes en France. 14
La deuxième moitié du vingtième siècle, on le sait, aura été duchampienne jusqu'à la caricature. C'est simple, on ne s'en sortait pas ; de l'objet manufacturé, de l'art-action, du corps-sculpture, de la spéculation vertigineuse, de l'invisible, du hasard, etc. C'est-à-dire : du ready-made, des échecs, du silence, de la tonsure, de la boîte verte, des bruits secrets, du mètre-étalon et de toutes ces choses que Tonton Marcel nous avait léguées, qui s'avérèrent en fin de compte bien plus encombrantes que prévu. Un comble, venant d'un tenant de l'inframince... On ne s'en sortait pas, et puis une lumière s'est allumée, un contrefeu presque. Car l'art brut est venu, afin de remettre un peu de nécessité dans tout cela, en ce début de vingt et unième siècle. On s'en sort encore, mais tout n'est déjà plus que griffures, envahissement, foultitudes, déformations, tensions, diagrammes, fagots, prosopopées... En fait, les deux feux auront historiquement brillé plutôt en parallèle, certains acteurs alimentant même l'un et l'autre successivement ou simultanément, comme André Breton, qui écrivait ainsi à propos du Tonton en 1939 : « Notre ami Marcel Duchamp est assurément l’homme le plus intelligent et (pour beaucoup) le plus gênant de cette première partie du vingtième siècle ». Bien entendu, Dubuffet éructait sa haine à l'encontre de Duchamp. Il a même assez pesté devant Hubert Damisch la fois où le Tonton a réussi à lui extorquer 15
mille dollars contre une de ses gravures. Tout est là, la dépense chez l'un, même mal, même trop, et l'extrême dénuement, jusqu'à la grivèlerie, voire l'anorgasmie, peut-être, chez l'autre. Gênant : il est intéressant ce qualificatif que Breton accole au Tonton. Il évoque assez le caillou dans la chaussure. Celui qui provoque une légère arythmie dans la marche un peu trop martiale, parfois, de l'histoire de l'art, et oblige à se demander sur quoi (et avec quoi) on chemine. Après ça, peu importe au fond de quoi est fait le caillou. Ce qui compte, c'est qu'il soit bien solide, et placé au bon endroit. La plupart des marcheurs, cependant, préfèrent s'en passer. D'autres, au contraire, les grands athlètes légendaires de l'histoire de l'art, préfèrent en utiliser plusieurs, successivement ou simultanément, car ça amplifie la dérive. Et là mon regard intérieur se tourne vers André Breton, bien sûr, mais aussi Arturo Schwarz, Jan Hoet ou Harald Szeemann.
l'artiste finalement on s'en moque. Et le Tonton, ne se demandait-il pas d'ailleurs avec envie : « Peut-on faire des œuvres qui ne soient pas d'art ? » Existe-t-il plus juste, plus pure, plus belle définition pour l'art brut ? Des œuvres oui, et qui en plus ne sont pas d'art... Il l'avait d'ailleurs prédit, Tonton Marcel : « Le grand artiste de demain sera souterrain ». C'est envoyé, non ? C'est à tout ça que je pense, quand je me demande avec un sourire gourmand quel gros, quel immense, quel hénaurme cadeau d'anniversaire réserver à Christian Berst pour les dix ans de sa galerie qui a tant œuvré pour placer le petit caillou de l'art brut dans les godillots des historiens et amateurs d'art... Parce que le cadeau, en fait, il doit plutôt revenir à ses visiteurs, à ses amis, ses soutiens, qui lui ont permis de tenir tout au long de cette décennie. Mais le meilleur galeriste ne peut donner que ce qu'il a : sa galerie. Le cadeau, c'est donc la galerie en entier, avec ses trois belles salles vitrées sur le passage, de sacrés espaces intérieurs... Alors on les a ré-arrangés, on les a même tourneboulés, on les a retournés comme un gant. Pour montrer comme elle est belle, aussi, cette galerie, vue de l'intérieur.
D'ailleurs, plusieurs pensées parmi les plus fortes de Marcel Duchamp pourraient fort utilement être méditées par les partisans d'un art contemporain de l'intention, qui s'agacent et refusent encore, un peu partout, de mêler l'art brut à l'art cultivé. Car si le Tonton a bien dit que « Ce sont les « Soit dix ans... » fait ainsi absolument regardeurs qui font les tableaux », alors écho à « Étant donnés... », l'installation micela signifie peut-être que l'intention de raculeusement secrète et obsessionnelle 16
de Duchamp, indéplaçable, totalement impénétrable dans tous les sens du terme. J'ai souhaité d'ailleurs que les trois salles restent allumées un peu tard, le soir, pour que l'ensemble puisse se voir un peu à la lueur du tungstène, à travers les trous du voyeur, comme dirait Tonton Marcel, pour ne rien dissimuler en effet de ces voyeurs que nous sommes, quand nous nous emparons esthétiquement de ces œuvres qui ne sont pas d'art. Voyeurs, sans doute, mais pour l'être il nous faut des voyants : « Maintenant, je m'encrapule le plus possible. Pourquoi ? Je veux être poète, et je travaille à me rendre Voyant : vous ne comprendrez pas du tout, et je ne saurais presque vous expliquer. Il s'agit d'arriver à l'inconnu par le dérèglement de tous les sens. Les souffrances sont énormes, mais il faut être fort, être né poète, et je me suis reconnu poète. Ce n'est pas du tout ma faute. C'est faux de dire : Je pense : on devrait dire : On me pense. - Pardon du jeu de mots. Je est un autre »*.
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stéphane corréard
foreword
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Ambroise Vollard, Leo Castelli and Denise René exemplify the way gallery owners can become such legendary figures that they remain forever fixed, like silhouettes or archetypes. With Christian Berst, the first contemporary Art Brut dealer in Paris, this tendency is particularly acute, as he works in an area where biography plays such a problematic role. In his very nature, the outsider artist is so strongly defined by the circumstances of his life that the layman is quick to reduce his work to it. For some artists, catastrophe struck on the dark night they were conceived; for others, childhood dramas were the site of misdirections; for others still, the stirrings of adulthood and maturity were marked by an equivocal disengagement. Finally, some artists seem perfectly well-adjusted during the day, but invite the monsters of irrationality in at night. In the best-case scenario, we know nothing about the life of the artist, and can happily explore his works, looking for suggestive clues. In Christian Berst’s case, I have never heard his life story, and I have simply looked for clues as to what drives his passion, his individuality, his centrality to the landscape of contemporary art.
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Reconstruction #1: the office Every gallery owner is a puzzle, and this essential piece is a place only close friends and insiders can enter. Between the fundamentals (a handful of works whose presence is considered vital), new finds, rare objects, the mess on the worktable and the books kept within arm’s reach, the office is an outward projection of the mental world of the gallery owner. Any visit to a gallery should start there ; this is what I offer you, as a way of developing and contrasting what you see in the main exhibition space. Reconstruction #2: the bookshop Linking the work we see with what we can’t see, it reveals an abundance of editorial output. Beyond that, it is also the site for displaying contrasting works of art, giving a subtle yet critical conclusion to the current exhibition. It shows, above all, what is at the heart of Christian Berst’s relationship to art: his love of dialogue between different fields of creativity.
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This space will be used to exhibit the works of three contempoarry artists, whose creations ask us, in different ways, to reconsider our boundaries. Reconstruction #3: the round table The organization of round tables, another “area of expertise” of the gallery, is just as useful for shaping the semantic fields that allow us to understand the place of outsider art within the wider field of contemporary art, as it is for announcing “openings.” The conference with Christian Boltanski, organized in 2011, was a turning point for the perception of the gallery. For its anniversary, Christian Berst’s office has been transformed into a metaphorical round table, with its space devoted to a contemporary installation of Annette Messager’s works, which echo his own preoccupations.
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stéphane corréard
preface
as a critic, journalist, curator and collector, Stéphane Corréard has worksd for twenty years to discover new artists in France. 22
The second half of the 20th century, it is known, will have been dominated by a Duchampian influence, to the point of resembling a caricature. It’s simple, we couldn’t get away from it: from the manufactured objet, from art-as-action, from the body-as-sculpture, from dizzying speculation, from the invisible, from haphazard, etc. That is to say: from the ready-made, from chess-pieces, from the silence, from tonsure, from la Boîte Verte, from secret noises, from the standard measure for a meter and from all these things that Uncle Marcel had left us, which in the end turned out to be much more cumbersome than expected. A last-straw, coming from a follower of the infra-thin… We couldn’t get away from it, and then a light went on, almost a counterfire. For Art Brut came in order to reintroduce the concept of necessity at the start of this twenty-first century. We’re still getting away from it, but everything is no longer only scratches, overgrowth, heaps, deformations, tensions, diagrams, bundles, prosopopoeia… In fact, the two flames will have burned brightly in parallel, rather, with certain actors even feeding the one and the other successively or simultaneously, like André Breton, who wrote the following of our Uncle in 1939: “Our friend Marcel Duchamp is surely the most intelligent man and (for many) the most unsettling of this first part of the twentieth century.” Naturally, Dubuffet was vocal about the 23
hatred he had for Duchamp. He even fulminated against him quite a bit with Hubert Damisch the time that Uncle Marcel managed to extort him for one thousand dollars in exchange for one of his engravings. It’s all there, the spending by the one, even badly, even too much, and the extreme poverty, to the point of stealing, even anorgasmia, maybe, in the other. Unsettling: this qualifier that Breton attaches to Uncle Marcel is interesting. It seems to evoke a pebble in the shoe. The one provoking a light arrhythmia in the progress, at times a little too militant, of art history, and making us ask what (and with what) we are advancing. Beyond that, little does it matter what the pebble is made of. What counts, is that it is very solid, and placed in the right spot. Most walkers, however, prefer to live without it. Others, however, the great, legendary athletes of art history, prefer to make use of many, successively or simultaneously, for it amplifies the shift. And thus my intuition looks towards André Breton, of course, but also Arturo Schwarz, Jan Hoet or Harald Szeemann.
meditating several of Marcel Duchamp’s most powerful ideas. For if Uncle Marcel indeed said that “The viewers are the ones who make the paintings,” then it perhaps means that in the end, we don’t care about the intention of the artist. And anyhow, didn’t Uncle Marcel eagerly wonder: “Can one make works that are not art?” Could there be a more exact, more pure, more beautiful definition of Art Brut? Works, yes, and moreover, ones that are not art… And Uncle Marcel had predicted it: “The great artist of tomorrow will be underground.” It’s done, isn’t it?
I think about all this, when I wonder with an eager smile what big, what immense, ginormous birthday gift to get Christian Berst for the ten-year anniversary of his gallery, which has worked so hard to place the little pebble of Art Brut in the clodhopper of historians and art lovers… For the gift must, in fact, go to his visitors, to his friends, his sponsors, those who have allowed him to keep going throughout the decade. But the best gallery owner can only give what he has: his gallery. The gift is thus the whole gallery, with its stunning interior spaces, three beautifully luminous rooms overlooking the passage… Incidentally, it might be rather useful for So we have rearranged them, we have the partisans of a contemporary art of even flipped them around, we’ve turned intention - those who get annoyed and still them inside-out like a glove. To show how refuse, in many places, to assimilate Art beautiful this gallery is, too, seen from the Brut to highbrow art - to spend some time inside.
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“Soit dix ans…” thus absolutely echoes “Étant donnés…,”the miraculously secret and obsessive installation of Duchamp, immoveable, totally impenetrable in every sense of the term. I wanted, incidentally, for the three rooms to remain lit late into the night, so that the ensemble may also be seen by incandescent light, through the voyeur holes, as Uncle Marcel would say, to not effectively dissimulate anything from us, the voyeurs, when, aesthetically, we seize these works that are not art. Voyeurs, to be sure, but to be that we need clairvoyants: “Now, I act like a scoundrel as much as possible. Why? I want to be a poet, and I work to become a Seer: you will not understand everything, and I almost wouldn’t know how to explain it to you. It’s about reaching the unknown through the debauchery of all the senses. The suffering is enormous, but one must be strong, be born a poet, and I have recognized myself as a poet. It is not at all my fault. It’s wrong to say: I think; one should say: People think me. - Sorry for the pun. - I is another.”
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œuvres d'art brut / art brut works
œuvres d'art brut
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
verso
Carlo Zinelli sans titre | untitled, recto verso, 1968. 28
gouache sur papier, 70 x 50 cm gouache on paper, 27.5 x 19.7 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Josef Hofer sans titre | untitled, 2012. 30
crayon de couleur et graphite sur papier, 42 x 29.5 cm coloured pencil and graphite on paper, 16.54 x 11.6 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Friedrich Schröder-Sonnenstern sans titre | untitled, 1961. 32
crayon de couleur sur papier, 73 x 51 cm coloured pencil on paper, 28.74 x 20 in
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34 œuvres / works
soit dix ans : états intérieurs
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works 36
Misleidys Castillo Pedroso
Misleidys Castillo Pedroso
sans titre | untitled, circa 2010.
sans titre | untitled, circa 2010.
gouache sur papier, 24 x 40.5 cm gouache on paper, 9.45 x 15.9 in
gouache sur papier, 36 x 37 cm gouache on paper, 14.17 x 14.57 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Joaquim Vicens Gironella double masque II, 1980. 38
liège sculpté, 62 x 51 cm bas relief in cork, 24.4 x 20 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Miguel Hernandez Le couple, 1953. 40
huile sur toile, 38 x 55 cm oil on canvas, 15 x 21.6 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works 42
Marilena Pelosi
Marilena Pelosi
sans titre | untitled, 2005.
sans titre | untitled, 2005.
stylo bille sur papier, 16 x 24 cm pen ball on paper, 6.3 x 9.5 in
stylo bille sur papier, 14.8 x 20.8 cm pen ball on paper, 5.8 x 8.2 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
verso
Anonyme (collection Lafora) sans titre | untitled, recto verso, circa 1930. 44
encre sur papier, 17 x 13 cm ink on paper, 6.7 x 5 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
verso
Anonyme (collection Lafora) estilizaciones expresionistas de la alienación mental, recto verso, circa 1921. 46
crayon sur papier, 16 x 19 cm pencil on paper, 6.3 x 7.5 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
verso James Edward Deeds Mr. Machantire Age. 25" / Quill pens (165/166), recto verso, circa 1950. 48
graphite et crayon de couleur sur papier administratif, 23.5 x 21.4 cm Indian ink and acrylic on paper, 33 x 23.25 in
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50 œuvres / works
soit dix ans : états intérieurs
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Luboš Plný sans titre | untitled, 2015. 52
encre de Chine, collage et acrylique sur papier, 100 x 140 cm Indian ink, collage and acrylic on paper, 39.37 x 55 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Janko Domsic sans titre | untitled, sans date. 54
stylo à bille de couleur sur carton, 47 x 57 cm ballpoint on cardboard, 18.5 x 22.44 in
55
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
verso
Alexandre Lobanov sans titre | untitled, recto verso, circa 1980. 56
crayon de couleur et encre de stylo à bille sur papier, 40.7 x 29 cm coloured pencil and ballpoint pen ink on paper, 16 x 11.3 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
André Robillard Fusil U.S.A.-rapide 2305-VRASTONE 56-A.W.S.N.REVL U.S.AIR FORCE, circa 2000. 58
matériaux de récupération, bois, métal, cartouches de fusil..., 20 x 69 x 12 cm recycled materials, wood, metal, shotgun shells..., 7.87 x 27.17 x 4.72 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Mary T. Smith sans titre | untitled, circa 1980. 60
acrylique sur tôle, 140 x 38 cm house paint on tin, 55 x 14.9 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works 62
David Marshall
Joseph Barbiero
sans titre | untitled, circa 1985.
sans titre | untitled, sans date.
papier mâché, pigments, plâtre, paille, 20 x 20 x 14 cm papier mâché, pigments, plaster, straw, 7.87 x 7.87 x 5.5 in
pierre de lave de Volvic, 40 x 17 x 23 cm volvic lava stone, 15.75 x 6.7 x 9 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Josette Rispal sans titre | untitled, 1987. 64
chiffon et matériaux divers, 44 x 15 x 7 cm chiffon and mixed media, 17.3 x 5.9 x 2.7 in
65
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Michel Nedjar sans titre | untitled, circa 1985. 66
papier mâché, pigments, plâtre, paille, 20 x 20 x 14 cm papier mâché, pigments, plaster, straw, 7.87 x 7.87 x 5.5 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Michel Nedjar sans titre | untitled, 1987. 68
technique mixte sur papier, 60 x 60 cm mixed media on paper, 23.6 x 23.6 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Guo Fengyi Désintéressement | Desinterestedness, circa 1990 70
encre de couleur sur toile, 142 x 42 cm Ink on canvas, 56 x 16.5 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Rosa Cazhur sans titre | untitled, 2009 72
aquarelle sur papier , 29.5 x 20.8 cm watercolour on paper, 11.6 x 8.2 in
73
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Philipp Schöpke Fraü Mitzi, 59 j, sans date 74
graphite sur papier, 39.5 x 30 cm graphite on paper, 15.55 x 11.8 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Dwight Mackintosh sans titre | untitled, circa 1993 76
encre sur papier, 56 x 71 cm ink on paper, 22 x 28 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Raphaël Léonardini l'artiste chasseur du monstres, circa 2014. 78
encre sur papier, 65 x 50 cm ink on paper, 25.6 x 19.7 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Giovanni Bosco sans titre | untitled, circa 2008 80
marqueur sur papier, 47.8 x 33 cm felt-tip marker on paper, 18.8 x 13 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works 82
Jill Gallieni
Jill Gallieni
sans titre | untitled (prière à Marie), 2012
sans titre | untitled (prière à Marie), 2012
encre de couleur sur papier, 24 x 16 cm coloured ink on paper, 9.45 x 6.3 in
encre de couleur sur papier, 24 x 16 cm coloured ink on paper, 9.45 x 6.3 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
verso
Raimundo Camilo sans titre | untitled, recto verso, 1991 84
stylo à bille sur papier, 8.7 x 14.8 cm ballpoint pen on paper, 3.43 x 5.8 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Zdenek Košek sans titre | untitled, 1991 86
stylo à bille, encre et feutre sur papier, 14 x 19 cm ballpoint pen, ink and felt tip on paper, 5.5 x 7.5 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works 88
Zdenek Košek
Zdenek Košek
sans titre | untitled, 1991
sans titre | untitled, 1991
stylo à bille, encre et feutre sur papier, 14 x 19 cm ballpoint pen, ink and felt tip on paper, 5.5 x 7.5 in
stylo à bille, encre et feutre sur papier, 19 x 14 cm ballpoint pen, ink and felt tip on paper, 7.5 x 5.5 in
89
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Melvin Way Heat, 2010 90
encre sur papier, 7.50 x 10 cm ink on paper, 3 x 4 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Pepe Gaitán sans titre | untitled, circa 2000 92
stylo à bille, encre, collage, photocopie sur papier, 28 x 21.5 cm ballpoint pen, ink, collage, photocopy on paper, 11. x 8.45 in
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94 œuvres / works
soit dix ans : états intérieurs
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Anibal Brizuela sans titre | untitled, sans date 96
stylo à bille sur papier, 32 x 23.7 cm ballpoint pen on paper, 12.6 x 9.33 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works 98
Harald Stoffers
Harald Stoffers
sans titre | untitled (lettre n°233), 2012.
sans titre | untitled (lettre n°223), 2012.
encre sur papier, 8 x 21 cm ink on paper, 3.15 x 8.27 in
marqueur acrylique sur papier, 11 x 30 cm acrylic marker on paper, 4.33 x 11.81 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Harald Stoffers sans titre | untitled (lettre n°158), 2009. 100
encre de Chine et acrylique sur papier, 100 x 70 cm Indian ink and acrylic on paper, 39.37 x 27.5 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Kunizo Matsumoto sans titre | untitled (13 juillet), 2004. 102
encre sur papier, 38.5 x 26 cm ink on paper, 15 x 10.25 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Yuichi Saito Mo letter (Doraemon), circa 2005. 104
encre sur papier, 38.2 x 54.2 cm ink on paper, 15 x 21.35 in
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soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Dan Miller sans titre | untitled (123 123 Lumber), 2006. 106
encre sur papier, 55.9 x 76.2 cm ink on paper, 22 x 3 in
107
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Dan Miller soldering gun plug cord, 2013. 108
encre de machine à écrire sur papier, 76 x 28 cm typewriter ink on paper, 30 x 11 in
August Walla sans titre | untitled (Ewigkeltendepolizistn...), sans date. stylo à bille et encre de machine à écrire sur papier, 28.5 x 20.9 cm ballpoint pen and typed ink on paper, 11.2 x 8.25 in
109
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works 110
August Walla
August Walla
sans titre | untitled (Bernaltes Blech RUDJAK), sans date.
sans titre | untitled (Russiochlochtelch), circa 1960.
vernis sur feuille d'acier, 21 x 30 cm varnish on steel sheet, 8.27 x 11.8 in
tirage argentique (tirage unique original), 10 x 7.1 cm gelatin silver print (original print), 4 x 3 in
111
112 œuvres / works
soit dix ans : états intérieurs
113
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Peter Kapeller sans titre | untitled, 2014 114
bouteille avec objets divers et tempera sur carton, 25 x 12 x 12 cm bottle with various itmes and tempera on cardboard, 10 x 4.7 x 4.7 in
Peter Kapeller sans titre | untitled, 2010 encre de Chine, encre, collage, vernis sur papier, 50 x 75.5 cm Indian ink, plug and varnish on paper, 19.7 x 29.72 in
115
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Beverly Baker sans titre | untitled, 2014 116
stylo à bille sur papier, 38.4 x 56 cm ballpoint pen on paper, 15 x 22 in
117
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Didier Amblard sans titre | untitled, 2013 118
stylo à bille sur papier, 50 x 65 cm ballpoint pen on paper, 19.7 x 25.6 in
119
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
José Johann Seinen sans titre | untitled, (dossier d'archive), sans date. 120
stylo à bille, crayon de couleur et découpage sur papier, 81 x 87 cm ballpoint pen, coloured pencil and découpage on paper, 32 x 34.25 in
121
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
John Devlin sans titre | untitled, n° 319 (recto-verso), 2000. 122
technique mixte sur papier, 22.5 x 28 cm mixed media on paper, 8.86 x 11 in
John Devlin sans titre | untitled, n° 94 (recto-verso), 1988. technique mixte sur papier, 28 x 22.5 cm mixed media on paper, 11 x 8.86 in
123
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Óscar Morales sans titre | untitled, circa 2013. 124
stylo bille, encre, crayon et crayon de couleur sur papier, 33 x 22 cm ballpoint pen, ink, pencil and coloured pencil on paper, 13 x 8.66 in.
125
126 œuvres / works
soit dix ans : états intérieurs
127
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Alexandro Garcia La Lemuria, 2011. 128
rotring, feutre et crayon de couleur sur papier, 34.8 x 49.7 cm rotring, felt-tip pen and coloured pencil on paper, 13.7 x 19.5 in
Alexandro Garcia Ciudad Atlante, 2011. rotring, feutre et crayon de couleur sur papier, 34.8 x 49.6 cm rotring, felt-tip pen and coloured pencil on paper, 13.7 x 19.5 in
129
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Ionel Talpazan sans titre | untitled, (Artistul...), circa 2008. 130
feutre de couleur et argent sur papier contrecollé, 50.6 x 76 cm felt tip on paper, 20 x 30 in
131
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Albert Moser sans titre | untitled, (A panoramic view of Hunt’s Pier & the Boardwalk; Wildwood, New Jersey), 1984. 132
photographies et bande adhésive ou ruban de masquage, légende et signature au dos, 14 x 71.5 cm photographs and masking or scotch-tape - description and signature on the back, 5.5 x 28.15 in
133
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Albert Moser sans titre | untitled, (A panoramic view of the 36th Ave Bridge, NY), 1995. 134
photographies et bande adhésive ou ruban de masquage, légende et signature au dos, 16.8 x 52 cm photographs and masking or scotch-tape - description and signature on the back, 6.6 x 20.47 in
135
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Hassan sans titre | untitled, sans date. 136
crayon, crayon de couleur et peinture sur bois, 17.5 x 32.6 cm pencil, coloured pencil and painting on wood, 7 x 12.83 in
137
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Hassan 138
sans titre | untitled, sans date. crayon, crayon de couleur et peinture sur bois, 17 x 17 cm pencil, coloured pencil and painting on wood, 6.7 x 6.7 in
Hassan sans titre | untitled, sans date. crayon, crayon de couleur et peinture sur bois, 16.6 x 30.2 cm pencil, coloured pencil and painting on wood, 6.54 x 11.9 in
139
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Miroslav Tichý 140
sans titre | untitled, circa 1970. tirage argentique (tirage unique original), 10.4 x 5.4 cm gelatin silver print (original print), 4 x 2.13 in
Miroslav Tichý
Miroslav Tichý
sans titre | untitled, circa 1970.
sans titre | untitled, circa 1970.
tirage argentique (tirage unique original), 13.3 x 9.2 cm. gelatin silver print (original print), 5.24 x 3.62 in.
tirage argentique (tirage unique original), 18 x 8 cm gelatin silver print (original print), 7 x 3.23 in
141
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Éric Benetto Mon frère et mon père, circa 2010. 142
encre de chine sur radio médicale, 42.8 x 10.5 cm indian ink on medical radio, 14.53 x 4.13 in
143
144 œuvres / works
soit dix ans : états intérieurs
145
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Madge Gill sans titre | untitled, 1944. 146
encre de chine sur carte, 14 x 9 cm indian ink on card, 5.51 x 3.54 in
147
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works 148
Henriette Zéphir
Henriette Zéphir
sans titre | untitled, 1964.
Corse, 1965.
crayon de couleur, encre de Chine sur papier, 23 x 32 cm coloured pencil, Indian ink on paper stuck on rhodoïde, 9 x 12.6 in
encre de Chine sur papier Canson, 50 x 21.3 cm Indian ink on Canson paper, 19.7 x 8.4 in
149
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Raphaël Lonné sans titre | untitled, 1967. 150
crayons de couleur sur papier, 9.2 x 12.8 cm coloured pencil on paper, 3.62 x 5 in
Anna Zémankova sans titre | untitled, circa 1960. stylo à bille, pastel et gaufrage sur papier, 15 x 21 cm ballpoint pen, pastel and embossing on paper, 5.9 x 8.27 in
151
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Pedro Alonso Ruiz sans titre | untitled, circa 1930. 152
encre, aquarelle et crayon sur papier, 17 x 11 cm ink, watercolor and pencil on paper, 6.7 x 4.33 in
153
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works 154
Edmund Monsiel
Vasilij Romanenkov
sans titre | untitled, circa 1950.
sans titre | untitled, sans date.
crayon sur papier, 14.5 x 11 cm pencil on paper, 5.7 x 4.33 in
graphite, encre et stylo bille sur papier, 34.5 x 29.7 cm graphite, ink and felt pen on paper, 13.58 x 11.7 in
155
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
verso
Fernand Desmoulin sans titre | untitled, circa 1900. 156
encre sur papier, 36 x 23 cm ink on paper, 14.17 x 9 in
157
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Anonyme (collection Lafora) sans titre | untitled, circa 1930. 158
encre sur papier, 19 x 13 cm ink on paper, 7.5 x 5 in
159
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Thérèse Bonnelalbay sans titre | untitled, 1978. 160
encre de Chine sur papier, 32.5 x 50 cm indian ink on paper, 12.8 x 19.7 in
161
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Patricia Salen le réseau informatif 3/10, 2009. 162
graphite sur papier dessin, 30 x 40 cm graphite on drawing paper, 11.8 x 15.75 in
163
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
John Urho Kemp sans titre | untitled, (his and hers miracal number cube), 1995 164
crayon sur papier, 14 x 10.8 cm pencil on paper, 5.5 x 4.25 in
John Urho Kemp sans titre | untitled, (69998), sans date. crayon, collage et photocopie sur carton, 8.8 x 19 x 8.8 cm pencil, collage and photocopy on cardboard, 3.5 x 7.5 x 3.5 in
165
soit dix ans : états intérieurs œuvres / works
Gunther SchÜtzenhöfer sans titre | untitled, 2014. 166
crayon sur papier, 14 x 42 cm pencil on paper, 5.5 x 16.5 in
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annette messager
installation d'œuvres d'annette messager
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stéphanie estournet
interview d'annette messager
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Comment est venue cette idée de vous exposer à la galerie christian berst art brut?
D’abord, je n’étais pas fière qu’on parle ainsi de mon travail. Et puis j’ai trouvé ça bête.
Annette Messager - Je suis née avec l’art brut. Dans le Pas-de-Calais, où j’ai grandi, il y avait cette idée de faire des choses avec trois fois rien, des matériaux du quotidien. Les gens récupéraient ce qu’ils pouvaient, quoi que ce soit. Il y avait des constructions réalisées avec des éclats d’obus, un jardin avec des oiseaux en ciment. C’était un territoire très marqué par la mine. Il n’y a qu’à voir Augustin Lesage (peintre né en 1876 dans le Pas-de-Calais, rattaché à la Collection de l’art brut, mineur, fils et petit-fils de mineur, ndlr), les séances de spirite - il y a un lien avec ce moment où les hommes sortaient de l’obscurité, des entrailles de la terre et se retrouvaient dans la lumière une grande violence.
Vous exposez six œuvres à l’occasion de “Soit 10 ans”... C’est la première fois que je montre La Lune-crayons. il y a dans le tissu, les crayons de couleurs, qui renvoient à l’idée que les adultes fantasment de l’enfance: quelque chose de joli, de charmant. Mais les crayons sont des pics, et ils sont dangereux. Les oiseaux… Annette Messager - On est tous proches des moineaux. ils sont là, en ville, à la campagne. A Paris, à Venise. ils sont comme des étrangers, un monde proche, contigu au nôtre. J’aime bien l’idée de regrouper les trois œuvres et d’avoir l’oiseau au-dessus de la porte, en ex-voto. L’ensemble est sombre, et même morbide, mais le cadre casse l’effet sinistre.
Quel impact sur votre œuvre? Quand j’ai commencé à travailler, c’était évidemment avec des matériaux simples, Maintenant que l’accrochage est terminé, des bouts de tissus, des choses récu- comment vous sentez-vous dans un enpérées. Ça n’aurait pas pu être autrement. droit dédié à l’art brut? Les œuvres de Dubuffet, Wölfli, ChaisComment cela a-t-il alors été perçu? sac, Lesage tiennent une place particuAu début, c’était compliqué pour moi, sur- lière dans ma vie. Et Aloïse corbaz. C’est tout parce que j’étais une femme. On me étrange d’être là, mais logique en même disait que mes productions était viriles. temps. Viriles? Ça signifiait qu’elles avaient de la force.
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174 christian boltanski et annette messager. photo : Valeria Motta
gants, crayons de couleur, tissu, corde, 170 x 120 cm. gloves, coloured pencils, tissue, rope, 66.93 x 47.24 in.
la lune crayons, 2015.
Annette Messager
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Annette Messager
Annette Messager
le bras-chaussure, 2015.
en équilibre, 2015.
sculpture recouverte de feuille d'aluminium noire, peinture, 16 x 35 x 13 cm sculpture covered with black aluminum leaf, pain, 6.3 x 13.8 x 5.1 in
sculptures, chaussures peintes, 47 x 30 x 18 cm sculptures, painted shoes, 18.5 x 11.81 x 7 in
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Annette Messager jambes-oiseau, circa 2015. Annette Messager 178
sculpture recouverte de feuille aluminium noire, peinture, crochet, corde, 105 x 17 x 15 cm sculpture covered with black aluminum leaf, paint, crochet, rope, 41.35 x 6.7 x 5.9 in
l'oiseau, 2015. sculpture recouverte de feuille d'aluminium noire, peinture, 2 crochets peints, 20 x 20 x 12 cm sculpture covered with black aluminum leaf, paint, 2 painted crochets , 7.87 x 7.87 x 4.72 in
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Annette Messager S comme Salaud, 1988. 180
encre de Chine sur papier, 20 x 20 cm Indian ink on paper, 7.87 x 7.87.1 in
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œuvres d'art contemporain / contemporary art works
œuvres d'art contemporain
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Cathryn Boch sans titre | untitled, 2015. 184
cartes topographiques, plan de ville, couture machine et couture main, collage, papiers assemblés, 138 x 82 cm topographic maps, city map, sewing machine and hand sewing,collage, paper assembled, 54.33 x 32.28 in
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Cathryn Boch sans titre | untitled, 2015. photographies, couture machine et couture main, collage, 50 x 45 cm. photos, sewing machine and hand sewing,collage, 19.7 x 17.72 in.
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Arnulf Rainer Hut, 1967. 188
pastel gras sur papier millimetré, 33 x 32.5 cm. oil pastel on squared paper , 13 x 12.8 in.
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Arnulf Rainer Desmoulin, 1967. pastel gras sur papier toilé, 42 x 29.7 cm. oil pastel on linen paper , 16.54 x 11.7 in.
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Simone Pellegrini Alcoba, 2015. 192
technique mixte sur papier, 79 x 133 cm mixed media on paper , 31 x 52.3 in
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© Dario Lasagni
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biographies
biographies artistes d'art brut
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biographies 196
Didier AMBLARD
Beverly BAKER
1965 - | France
1961 - | États-Unis
Didier Amblard, né à Nancy, grandit en Auvergne. Apprenti, il entre à l’usine puis devient ouvrier dans le bâtiment. « Un soir, ça m’a pris de faire un trait lancé : un fauteuil de train, un repose tête, une paire de lunette à la Dutronc, un habit de moine et une gousse d’ail... » Ainsi découvre-t-il à 16 ans sa passion pour le dessin. Il sera colporteur de sérigraphies sur la Côte d’azur, avant de tomber malade et d’être hospitalisé en psychiatrie. S’essaie à vivre « héréditairement » à Bar-le-Duc, où naît son fils. Et puis il rêve de menuiserie et d’ébénisterie. On le met au travail en ESAT. Il continue de dessiner sur son cahier de croquis et de peindre, il offre et distribue ses travaux dans les structures qui l’accueillent, nul ne s’y intéresse. En 2012, Didier Amblard entre à l’atelier de l’hôpital. Le nouvel hôpital remplace l’ancien, Didier, ulcéré par la destruction de la vieille chapelle (inaugurée en 1857) décide de dessiner son « vieil hôpital », les silhouettes, celles de ses « camarades morts » : ceux « qui ne peuvent pas s’occuper de leurs enfants », ceux qui sont allés droit dans le mur et n’en sont jamais ressortis, coincés dans des angles pointés en direction du ciel, des « coinpatissants ». Avec frénésie, d’un Bic l’autre, il quête afin de sortir du déséquilibre « la structure pour ovaliser la capture ». « Mon vieil hôpital » raconte une histoire, celle des au-delà du village de Kafka, celle de la foule des mal aimés, des ombres informes, des emmurés effacés de la mémoire collective, des disparus du peuple des morts. Des non advenus.
Beverly Baker crée ses dessins en superposant de manière obsessionnelle des textes trouvés dans une petite sélection de livres et de magazines qu'elle utilise comme matériel de référence. Il est difficile de retrouver trace du langage à la genèse de ses compositions, au final abstraites, car Beverly dessine continuellement sur la même feuille. Elle efface ainsi les mots ou les lettres avec des mots supplémentaires, des lignes et des couleurs. La plupart de ses dessins sont créés au stylo à bille, au crayon de couleur et au marqueur indélébile. Beverly Baker, atteinte du syndrome de Down, est membre depuis 2001 de la Communauté “Latitude Artist” à Lexington, dans le Kentucky, un programme dont la mission est de venir en aide à toutes les personnes, particulièrement celles présentant un handicap. Latitude crée de solides interactions entre ses membres et permet à ses participants de contribuer à la vie culturelle et politique de leur communauté. Elle a été montrée en 2014 à deux reprises à la Maison rouge dans les expositions : Le Mur, oeuvres de la collection Antoine de Galbert et art brut, collection abcd/Bruno Decharme.
Josef BARBIERO
ÉRIC BÉNETTO
1901 - 1992 | Italie
1972- | France
Joseph Barbiero naît à Trebaseleghe en Vénétie. Deuxième enfant dans une fratrie de huit, Il n’est pas scolarisé car il doit aider son père à nourrir la famille en cultivant son jardin. En 1923, suite à la prise du pouvoir par Mussolini, il quitte l’Italie à l’âge de 22 ans. Après un bref séjour dans le midi de la France, il s’installe à Beaumont dans le Puy de Dôme, près de Clermont-Ferrand. En 1927, il se marie et prend la nationalité française en 1931. Durant toute sa vie professionnelle, il exerce le métier de maçon et a la chance de participer à Clermont aux travaux de restauration des pierres de la basilique Notre Dame du Port et de la cathédrale, bâtie entièrement en pierre volcanique : la lave noire de Volvic. Retraité en 1965, il déploie dans son garage une activité créatrice personnelle qui aboutira à la production de centaines de sculptures et de nombreux dessins et esquisses. Pour les sculptures, essaie terre, ciment, calcaire, grès, plâtre et bois. Mais c’est la pierre de Volvic qu’il choisit comme matériau de prédilection, car il souhaite, selon Jean Lelong, « se mesurer aux sculptures de la cathédrale ». Sa première exposition aura lieu en 1985, 20 ans de sculpture derrière lui.
Lorsqu’il découvre, en 1989, l’affiche de l’exposition des œuvres du mineur médium Augustin Lesage, Eric Benetto - qui pratique déjà la méditation comprend qu’il est possible de donner forme à ses visions, de les transmettre. Sa rencontre avec l’Abbé Coutant, devenu peintre grâce à son ami Chaissac, lui confirmera qu’il appartient à cette famille de créateurs. Il exerce, entre deux voyages en Inde, et tout en continuant à dessiner, les métiers les plus divers : cantonnier, sondeur téléphonique, gardien d’usine chimique … Ses œuvres, empruntes d’un mysticisme sourd, fascinent par l’oscillation permanente entre les formes surgies d’une tache et celles, comme récitées, qui chantent en canon l’air entêtant de ses Cosmic Songs et ses Love Songs. Depuis plusieurs années, Eric vit reclus dans une communauté religieuse près de Lyon et s’est approprié la matière à la fois sombre et translucide de la radiographie - clichés d’IRM assemblés, notamment - sur laquelle il dessine à l’encre de Chine ses motifs empreints de mysticisme, organes réinventés, poétisés, sublimés, maladies conjurées ? Il borde parfois ses compositions pouvant atteindre 1,5 mètre de négatifs photographiques. Eric Benetto convoque littéralement la lumière pour révéler l’épais mystère de ses compositions.
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biographies 198
Thérèse BONNELALBAY
Giovanni BOSCO
1931 - 1980 | France
1948 - 2009 | Italie
Née dans l’Hérault d’un père charbonnier, Thérèse part à l’âge de 29 ans vivre à Marseille pour y travailler comme infirmière. Quelques années plus tard, en 1959, elle se marie à l’instituteur Joseph Guglielmi dont elle a deux enfants. Le couple est mu par des convictions politiques, si bien qu’il se rend régulièrement aux réunions du parti communiste. C’est à l’occasion d’un de ses rassemblements, en 1963, que Thérèse esquisse mécaniquement quelques griffures à l’encre sur un brouillon dévoyé. Son mari, saisi par ces formes inhabituelles, l’encourage à poursuivre, si bien que Thérèse, de longues années durant, laisse sa main vaguer sur la surface blanche du papier. D’abord volontiers figuratives, ses productions s’épanouissent progressivement dans une abstraction éthérée où dessin et écriture s’épousent et non plus s’opposent. Croquis, idéogrammes, simulacres, alphabet imaginaire ? L’indécision face à cette création en fait sa force même. Alors que la famille est venue vivre à Ivry-sur-Seine, Thérèse disparaît le 16 février 1980 : elle est retrouvée un mois plus tard, noyée dans la Seine, laissant derrière elle un œuvre extraordinaire. Ses créations, très appréciées par Jean Dubuffet, figurent dans d’importantes collections dont celles de Lausanne et du LaM à Lille.
Né en 1948, le sicilien Giovanni Bosco, d’abord berger puis ouvrier dans une carrière de marbre, sombra dans la psychose à la suite de l’assassinat de deux de ses frères. Ses séjours en institution psychiatrique, puis la prison à laquelle il fut condamné un an à la suite, semble-t-il, d’un vol de bétail, ne lui ôtèrent ni son sourire désarmant, ni la propension à transformer son existence démunie en un acte de poésie pure. A Castellamare del Golfo, ses journées furent alors rythmées par les chansons populaires napolitaines et les peintures d’une nventivité rare qu’il exécutait sur les murs de sa ville ou sur des matériaux de fortune. Corps démembrés ou « surmembrés », serpenteaux et homoncules, coeurs céphaliques, mots et signes scandés dans l’intervalle du dessin, tel est l’alphabet pictural de Giovanni Bosco. Lorsque son génie est enfin reconnu, il est emporté par un cancer en 2009. Depuis, des historiens de l’art et autres spécialistes de l’art brut lui ont consacré des journées d’études et des analyses. Un film retraçant les derniers mois de sa vie a été produit par des étudiants qui furent parmi ses derniers véritables amis, tandis qu’un projet de conservation de ses fresques est à l’étude.
Aníbal BRIZUELA
Raimundo CAMILO
1937 - | Argentine
1939 - | Brésil
L’histoire d’Aníbal est une véritable énigme ; aucun membre de sa famille n’a jamais cherché à le contacter. Personnage aussi attachant que mystérieux, il semble arpenter depuis toujours sans jamais l’avoir quittée la vaste propriété de l’hôpital psychiatrique Colonia d’Oliveros, à quelques kilomètres de Rosario en Argentine. On suppose qu’il a 74 ans. Si ce petit homme maigre communique peu, il dessine de façon compulsive. Ses œuvres sont des messages qu’il laisse à différents endroits de l’hôpital. « Ce sont ses oracles » affirme sa curatrice. Pourtant, Anibal n’a jamais répondu à l’invitation de se joindre aux autres patients pour dessiner. Seulement a-t-il accepté de participer à l’exposition de fin d’année de l’atelier, au salon d’Artebacdès en 2005, puis au musée Macro (2007) où des centaines de ses dessins ont été montrés sur un mur de 7 mètres de long. C’est à l’occasion de cette dernière présentation de son œuvre que Brizuela a écrit : « Un jour, je pêchais au bord de la rivière et j’ai vu une soucoupe volante. (…) J’ai regardé ma canne à pêche et lorsque j’ai relevé les yeux, elle n’était plus là. Je n’y ai pas attaché d’importance. » Les dessins d’Anibal Brizuela, tracés au stylo bille de couleur, évoquent le dazibao. Et ceci n’est pas uniquement dû au fait qu’il les affiche volontiers un peu partout dans l’hôpital où il vit. Chargés de références et symboles mystiques ou politiques, ponctués d’allusions à l’actualité, ses dessins très structurés frappent à la fois par leur caractère sibyllin et leur liberté formelle.
Né dans le Nordeste du Brésil, en 1939 ou 1943, selon les sources, Raimundo Camilo quitte sa région très jeune pour aller travailler à Rio. Des « travaux d’esclave » comme l’on dit là-bas, dans le bâtiment, dans les cuisines, etc. C’est au cours d’une de ces expériences que se produit la rupture : n’ayant pas été payé par l’un de ses employeurs, il connaît une période d’errance, sans ressource, dans les rues de Rio, qui le mène en 1964 à l’hôpital psychiatrique Colonia Juliano Moreira, qu’il ne quitte alors plus. Il y côtoie un patient qui deviendra la figure de proue de l’art brut brésilien, Arturo Bispo do Rosario ; réminiscence de ses difficultés passées, Raimundo se met à dessiner ses propres billets de banque, à genoux devant son lit, avec des matériaux de fortune, papiers d’emballage, imprimés de l’administration, et en fabriquant d’abord lui-même ses couleurs, avec du café par exemple. La tête qui figure sur le recto représente, selon lui, tantôt un roi, tantôt un bandit en chef, un cangaceiro. Raimundo offre volontiers des billets aux membres du personnel de l’hôpital qu’il apprécie, notamment aux femmes. Il affirme ne pas faire de l’art, mais simplement « son travail ». Depuis quelques années, les autorités culturelles brésiliennes ont pris conscience de l’importance de ses créations ; plusieurs expositions et un catalogue lui ont été consacrés. Entré récemment dans la collection de Lille Métropole, Musée d'art moderne, d'art contemporain et d'art brut, il a été présenté pour la première fois en Europe par la galerie Christian Berst en 2008, et en 2009 au Salon du dessin contemporain (Paris). 199
biographies 200
Misleidys CASTILLO PEDROSO
Rosa CAZHUR
1985 - | Cuba
1947 - | Uruguay
Misleidys Castillo Pedroso est née en 1985 à Güines, non loin de de la Havane, avec un déficit auditif sévère. Son père quitte le foyer alors qu'elle est encore une toute jeune enfant. La petite fille présentant un retard dans son développement, sa mère la place à cinq ans dans une institution spécialisée. Mais à mesure que les symptômes de l'autisme se précisent, elle doit la quitter. Elle vit alors chez elle, dans un isolement social total hormis les liens qu'elle entretient avec sa mère et son jeune frère. Misleidys montre un attrait particulier pour les crayons de couleur et la peinture à l'eau qu'elle utilise pour se divertir. Un jour, elle a commencé à peindre des silhouettes masculines aux traits de visage marqués et aux muscles saillants. Elle les a dessiné en augmentant progressivement leur taille jusqu'à ce qu'ils dépassent l'échelle humaine et s'est mise à en découper le contour pour le coller sur les murs de sa chambre puis sur ceux des autres pièces de la maison en les appliquant avec des languettes de scotch brun. Au fil du temps, la jeune femme a également peint des faunes, des démons, des animaux et insiste de plus en plus sur les détails anatomiques en représentant les organes en coupe partielle. Ne s'exprimant pour ainsi dire pas sur le sens de sa production, son œuvre, d'une forte présence plastique, reste absolument énigmatique. Son entourage prétend que Misleidys présente également d'exceptionnelles capacités de voyance et de clairvoyance, héritage de sa mère.
Rosa Cazhur est née en 1947 à Durazno dans une ville du centre de l’Uruguay. Enfant déjà, elle dessinait, encouragée par son père puis par son fiancé. Son premier mari, artiste plasticien, lui ayant asséné qu’elle avait perdu toute créativité, Rosa en fut blessée. Ses deux mariages suivants ne furent pas heureux et lorsqu’elle séjourna pour la première fois en 2004, à l’hôpital psychiatrique “Dr. Bernardo Etchepare » dans la région de Montevideo, elle se contentait de répéter les motifs décoratifs appris au Brésil alors qu’elle travaillait comme céramiste. La responsable de l’atelier lui suggéra alors de s’essayer aux techniques libres, elle choisit de travailler les yeux fermés, jusqu’au jour où elle se présenta en s’exclamant « C’est aujourd’hui qu’est née Rosa Cazhur ! ». Depuis 2007, cette femme diagnostiquée bipolaire vit dans une famille d’accueil. Dans sa chambre trop petite pour y installer un bureau, elle place une planche sur son lit pour peindre, avec une finesse dans le trait et une transparence des couleurs aux antipodes des motifs reproduits sur les carreaux de céramique. Elle trace à l’aquarelle des couples, des danseurs, des mères et leur fille, des portraits de femmes, enceintes parfois, des scènes d’accouchement et des proches disparus. Lorsqu’elle en a les moyens, elle peint à l’acrylique.
James Edward DEEDS
Fernand DESMOULIN
1908 - 1987 | États-Unis
1854 - 1914 | France
Derrière l’œuvre de James Edward Deeds, se cache l’histoire tragique d’un jeune Américain interné de force à l’âge de 17 ans à la suite d’une altercation violente avec son frère, sur décision d’un père excessivement autoritaire. Deeds a passé toute sa vie dans un asile psychiatrique, subissant des traitements aux électrochocs, sans anesthésie, jusqu’à 2 fois par semaine. Ses dessins au crayon et crayon de couleur, aux traits méticuleux, réalisés dans un style désuet sur des feuilles de petit format portant l’en-tête de l’hôpital, illustrent des personnages, des références à la guerre civile, des automobiles et des paysages urbains en milieu rural, un monde imaginaire – celui dans lequel il échappait à la réalité de sa vie brisée. Ses portraits, pourtant, affichent les stigmates de ses traitements aux psychotropes ; en témoignent leurs yeux écarquillés aux pupilles dilatées. Les 140 planches recto verso connues d’Edward Deeds n’ont été attribuées à leur auteur que très récemment. Elles ont été trouvées dans une poubelle dans les années 70 par un garçon de 14 ans qui les a conservées pendant près de 40 ans avant de les céder.
Les dessins médiumniques de Fernand Desmoulin furent réalisés durant une parenthèse fiévreuse qui ne dura que de 1900 à 1902. La vague du spiritisme qui submergeait l’époque offrit à cet artiste complexe, asphyxié par son activité de peintre et de graveur académique, un souffle libérateur, porteur d’une œuvre médiumnique exceptionnelle, magnétique, parfois violente, à laquelle André Breton lui-même aurait voulu rendre hommage par une publication que seule sa mort empêcha. Freud venait de faire paraître L’Interprétation des rêves tandis que le siècle naissant passait de la conversation avec l’au-delà à l’exploration de l’inconscient. Visage brumeux aux volutes de cheveux, psychisme fiévreux rejetés sur la feuille en fulgurante écriture, lignes sinueuses, trame arachnéenne, oscilloscope mental, l’œuvre de Fernand Desmoulin frappe par son incroyable richesse, par l’intrusion géniale de ce dernier dans ce que Henri Michaux nomme « l’espace du dedans », celui des voix intérieures, témoin virtuel d’une psyché lourde de conflit qui fit de lui le plus novateur des artistes spirites. Une production qui, libérée du carcan normatif de son auteur, rejoint ici l’archipel de l’art brut.
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John DEVLIN
Janko DOMSIC
1954 - | Canada
1915 - 1983 | Croatie
John Devlin est né à Halifax, capitale de la province canadienne de la Nouvelle-Ecosse. À 25 ans, il part étudier la théologie au Collège St-Edmond, de l’Université de Cambridge. C’est là qu’il est atteint d’une grave dépression, première d’une série d’épisodes psychotiques qui l’oblige à retourner dans sa ville natale pour y être hospitalisé. Pendant sa longue convalescence, il est obsédé par l’idée de retrouver l’essence même de Cambridge qu’il considère comme la ville idéale. Il consacre alors les 10 années suivantes à produire des centaines de dessins, études et autres plans d’une ville imaginaire et utopique, baptisée Nova Cantabrigiensis, qu’il situe sur une île au cœur du bassin des Mines en Nouvelle Ecosse. Ses esquisses réinventent les bâtiments et les jardins ornementaux de la ville médiévale qui devait le mener à la prêtrise. Toutes sont codées par des symboles, des formules. « Ma théorie c’est que pour un design idéal, il y a un ratio idéal. J’ai recherché une telle constante. J’étais dans une quête faustienne pour découvrir les arcanes de l’ambiance magique de Cambridge. Je pensais que je trouverais le moyen de sortir de la maladie mentale en revivant les moments heureux vécus à Cambridge… Avant que les choses s’effondrent en moi. » John Devlin est notamment obsédé par le ratio 3 : 8, rapport entre le nombre de voyelles et de consonnes dans « Jésus Christ ». Il ira jusqu’à se l’inscrire sur ses ongles des pieds. Après être resté chez ses parents, reclus, John a rejoint une maison communautaire en 1989 à Dartmouth où il vit toujours.
On ne sait presque rien de la vie de Janko Domsic avant son arrivée en France, dans les années 1930, ni des circonstances qui l’y ont amené. Il aurait reçu une éducation élémentaire, connu la prison, vécu à Toul et travaillé à la construction de chemins de fer. À Paris, il vit dans la pauvreté, occupant un bout de couloir d’un modeste immeuble près de la place de Clichy. En conflit avec la Sécurité sociale à propos de sa pension, il reproche aussi à certaines personnes de lui avoir volé ses écrits. Ses dessins, réalisés au crayon de couleur, au stylobille et au feutre associent des figures géométrisées et des textes mêlant français, croate et allemand qui listent des bribes de sa vie, reprennent des extraits de chansons nazies, ont Dieu pour sujet central ; son lexique fait référence à des idées mystiques, au code moral de la franc-maçonnerie, mais aussi à l'économie. Des symboles graphiques forts - le pentagramme, le svatika, le symbole du dollar, la faucille et le marteau communistes le marteau communistes, la croix orthodoxe – et les rayons venus du ciel structurent une œuvre volontairement codée par son auteur et de laquelle se dégage un sentiment de puissance fascinante autant qu’énigmatique.
Pepe GAITÁN
Jill GALLIENI
1959 - | Colombie
1939 - | France
Pepe Gaitán est issu d’une famille bourgeoise. Son père décède quand il est très jeune. Sa mère qui vit toujours, le reçoit chaque samedi au petit déjeuner pour qu'il lui lise les journaux. Il suit des études de communication sociale et s’intéresse particulièrement à la radio. Il est un temps professeur. En 1975, la curieuse expression « ne mange pas tant de sucreries, si tu ne veux pas attraper des amibes » semble être déclencheur d’un tournant dans sa vie. C'est en effet à partir de ce moment qu'il commence son œuvre. Il passe ses journées dans des bibliothèques, sélectionne avec minutie des textes, les photocopie puis intervient dessus d’abord en rayant la plupart des lettres, puis transforme la page en lui ajoutant des collages et des signes toujours en utilisant une gamme chromatique très choisie. Les échos de formes qui font penser à une codification confèrent à ces œuvres une force géométrique saisissante. Chaque page cache des amibes qu'il nomme pseudopodes. Il vit aujourd’hui seul à Bogotá et dessine sans cesse. Pepe Gaitán a été notamment montré en 2014 dans l’exposition art brut collection abcd / Bruno Decharme à la Maison rouge.
Née en 1948 d’une mère américaine et d’un père comédien, Jill Galliéni est élevée loin de ses parents avant que son père ne la prenne en charge à sept ans. Depuis toujours, elle crée, à Paris, d'étranges poupées de tissus et, vers l'âge de 30 ans, les prières l'aident à se reconstruire, à chercher comment se sortir d'inextricables situations mentales qui l'empêchaient de vivre. Elle aurait d'abord voulu « dire » par des mots, mais voir une phrase écrite par elle lui était absolument insupportable. Alors, elle a inventé les phrases de prières, toujours les mêmes, des centaines de fois répétées, guirlandes de prières très serrées afin que le sens échappe à tous. Adressées à Sainte-Rita, patronne des causes désespérées, Jill « traite » par ces prières des situations, des personnes, elle-même, etc. Simili d’écriture ou écritures superposées les unes aux autres, c’est selon, l’encre noire ou de couleur emplit feuilles volantes et cahiers ; libérée de toute convention, l’écriture évolue dans différents sens, obéissant à une rythmique propre, suivant des courbes, des diagonales, dessinant, tels des calligrammes, fleurs, maisons, cœurs, ou d’autres formes parfois abstraites. Ces textes saisissants ont récemment été accueillis dans les collections du Musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut de Lille.
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Alexandro GARCIA
Madge GILL
1970 - | Uruguay
1882 - 1961 | Grande-Bretagne
Alexandro Garcia nous révèle ses visions éthérées dans des dessins d'un graphisme méticuleux qui mêlent cités fantastiques - comme en apesanteur ou sur le point de s'élancer dans l'infini sidéral- aux ballets des constellations venues à leur rencontre. Il y est question d'un ailleurs offert à nos projections et à la colonisation d'une humanité nouvelle : « nous ne sommes pas seuls ». L'expérience de voir un OVNI appelé avistamiento en Amérique latine- provoque cette créativité chez ce jardinier né à Montevideo (Uruguay) en 1970. C'est sans formation plastique ni connaissance du dessin qu'Alexandro produit ses premières créations à l'aide d'une règle, de marqueurs, de stylos à bille, de crayons à papier sur les supports qui lui tombent sous la main (comme le verso d'un almanach). Son œuvre est à rapprocher de l'art médiumnique dans le sens où s'y exercent, selon lui, des forces dont il ne serait que l'instrument : « je suis un canal qui absorbe les messages du cosmos ». Depuis Magali Herrera et, avant elle, les créateurs issus de la collection du psychiatre brésilien Osorio Cesar, l'Amérique latine ne nous avait pas permis pareille plongée dans les méandres de la création. Exposée pour la première fois en Europe à la galerie Christian Berst en 2010 et présenté à Art Paris et au Salon du dessin contemporain de la même année, cette œuvre figure déjà dans de grandes collections d'art brut.
Enfant illégitime, Madge Gill, née en 1882 à Londres, est d’abord cachée par sa mère et sa tante, puis placée dans un orphelinat à l’âge de neuf ans. Envoyée au Canada pour travailler dans une ferme, elle rentre en Grande Bretagne à dix-neuf ans, devient infirmière, épouse son cousin dont elle a trois fils. Le second décède et l'année suivante, en 1919, elle accouche d'une petite fille morte-née. Ces épreuves plongent Gill dans une longue maladie qui lui fait perdre l’usage de son œil gauche. Alors que sa tante l'initie au spiritisme, elle s'adonne à la peinture. Travaillant très rapidement, des nuits entières, à la bougie, dans un état voisin de la transe, cette femme hypersensible et réservée refuse de vendre ses œuvres qui appartiennent selon elle à son esprit guide Myrninerest (my innerest, "mon plus intime"). Ses dessins vont du calicot pouvant atteindre plusieurs dizaines de mètres à la carte postale en passant par des formats intermédiaires, le tout travaillé à la plume et à l’encre noire avec quelques rares écarts de couleur. Ce n’est qu’après sa mort, en 1961, qu'on trouve chez elle des centaines de dessins empilés dans des placards ou sous les lits. Figure incontournable de l'art brut qui fascina Jean Dubuffet, Roger Cardinal, Michel Thévoz et tant d'autres, l'œuvre magistrale de Madge Gill est représentée dans les plus importantes collections d'art brut au monde.
Joaquim Vicens GIRONELLA
Guo FENGYI
1911 - 1997 | Espagne
1942 - 2010 | Chine
Joaquim Vicens Gironella, l'amoureux du liège, le sculpte, l'épouse, le caresse pour nous livrer des figures étonnantes et détonnantes, puisées dans les méandres de son imaginaire et empruntes des réminescences de son pays natal : la catalogne. Né en 1911 à Agullana près de la frontière française, ses parents artisans bouchonniers lui enseignent le métier; passionné, Joaquim fait l’éloge du liège dans la presse locale. Malgré son éducation rudimentaire, il s’enthousiasme pour l’écriture et rédige pièces de théâtre, poèmes et romans sans trouver d’éditeur. Anti-fasciste et républicain, il s’engage dans la guerre d’Espagne, si bien qu’à la victoire des franquistes il est contraint de s’exiler en France : au cours de sa fuite, il est arrêté et interné un an dans le camp de Baum. A sa libération, il s’installe à Toulouse où il se marie et travaille dans une fabrique de bouchons. En 1941, Joaquim se met à sculpter l’argile mais cette matière ne lui convient pas, il sculpte alors le véritable objet de sa passion : le liège. Sculpture dans la masse, perspective fantasque, membres des personnages disproportionnés, ces originalités qui démultiplient la force expressive de ces oeuvres ne cessent d'interloquer le regardeur, de le subjuguer. L’administrateur de son entreprise, Réné Lajus, remarque ses créations singulières et lui en emprunte quelques unes pour son bureau parisien. Jean Dubuffet, alors marchant de vin, y découvre Gironella à l’occasion d’une commande de bouchons: immédiatement séduit, il organise une exposition qui en préfigure bien d’autres.
Guo Fengyi, artiste découverte récemment, intéresse de façon fulgurante les spécialistes de l'art. Née en 1942 à Xi’an, elle obtient son baccalauréat puis devient technicienne dans une usine de caoutchouc. Néanmoins, souffrant de terribles crises d’arthrite, elle est contrainte de cesser toute activité professionnelle à trente-neuf ans. Pour soulager ses crises, Guo s’initie au Qi-Gong, médecine qui lui ouvre de nouvelles portes, notamment spirituelles. À partir de 1989, en prise à des visions, elle produit de nombreux dessins, d’abord sur les versos de pages de calendriers, ensuite sur du papier de riz. Ces productions, à l’encre de chine et au pinceau, parfois longues de plus de 5 mètres, sont élaborées sans idée préalable, Guo découvre sa création au fur et à mesure qu'elle la dessine. À travers une multitude de traits délicats, se dessinent des formes spectrales, dragons, phenix, visages parfois entremêlés, souriants et sereins, ou au contraire, terriblement inquiétants et monstrueux. Fascinante et originale, l'œuvre de Guo a cette force : elle nous emmène sur des territoires où la sérénité, trop calme, en devient inquiétante et où le monstreux, étrangement, nous est familier.
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HASSAN
Miguel HERNANDEZ
? - | Sénégal
1893 - 1957 | Espagne
D’origine sénégalaise, Hassan a élu domicile dans le quartier des entrepôts de vin du port de Barcelone. Secret, parlant peu voire pas du tout, il vit dans la rue à l’écart des autres et semble avoir une trentaine d’années. Au dire d’un « ami », il viendrait d’un petit village et aurait une fille. Dès qu’il a un peu d’argent, il s’achète des piles pour son poste de radio et écoute de la musique. Il dessine sur des planches de caisses de vin, qu’il retaille à la scie et au cutter, des maisons à toit plat, du mobilier fonctionnel d’inspiration géométrique. Il travaille avec minutie, réfléchit longuement, positionne précisément ses instruments avant d’effectuer un tracé. En guise de signature, il se sert de pièces de cuivre qu’il inclut dans le bois, poinçonne et polit. Il conserve dans une valise attachée près de lui ses outils, ses crayons et ses plaques de bois. Il a vendu quatre-vingts pièces à un collectionneur rencontré en 2010. Lorsque celui-ci lui a dit qu’il allait montrer son travail en France, Hassan a répondu d’un geste de la main semblant signifier : « chacun sa route, laissemoi ».
Corps emmêlés, « gros cernés d’épais noir pâteux » (Dubuffet), têtes égarées, courbes sinueuses peuplent l’œuvre d’Hernandez qui, à l’écoute de son monde intérieur, accède à des modes de représentations d’une sincérité inouïe. Cette liberté éclatante ne manque pas de séduire Jean Dubuffet et André Breton qui dès 1947 l’exposent au tout jeune Foyer de l’Art Brut. Né près d’Avila (Castille) de parents paysans, Miguel aide aux champs dès l’âge de 10 ans. Rêvant de travailler dans des plantations de café, il s’exile au Brésil à 19 ans. Finalement de retour en Europe, il collabore à une revue anarchiste à Lisbonne, est arrêté, puis rentre en Espagne où son service militaire l’attend ; il est envoyé au Maroc pour combattre. A son retour, il s’installe à Madrid et publie des brochures de propagande contre le franquisme et le stalinisme. Engagé dans la guerre d’Espagne, il est forcé de fuir à la victoire des Franquistes : il part pour la France en compagnie de son épouse mais la renvoie en Espagne lorsqu’il est fait prisonnier en camp de concentration.Il ne la reverra jamais. En 1945, il s’établit à Paris et s’adonne à la peinture. Le visage de sa femme aimée hante inlassablement sa création. Le cri de son déchirement semble parfois percer et distordre l’œuvre : les visages se brouillent, les droites se courbent, les corps se désarticulent tandis que d’autres tableaux, plus sereins, puisent leur terreau dans les réminiscences du monde agricole et le transcendent en un onirisme fabuleux.
Josef HOFER
Peter KAPELLER
1939 - | Autriche
1969 - | Autriche
Josef Hofer ne parle pas. En revanche, il s’exprime inlassablement par le dessin. Né en 1945, il est élevé reclus dans une ferme en Haute-Autriche car souffrant tout comme son frère d'un retard mental, de difficultés d'audition et d'élocution auxquels s'ajoute, pour Josef, une mobilité réduite, le père a souhaité soustraire ses fils aux moqueries de l'entourage et surtout aux traitements qu'auraient pu leur infliger les occupants nazis puis soviétiques. A la mort du père, en 1982, la mère part vivre avec ses fils à Kirschlag, donnant à Josef l'occasion de contacts sociaux, ainsi que la possibilité de fréquenter un hôpital de jour. Ces changements s'avèrent bénéfiques: Josef prononce même quelques mots. Par la suite, il est pensionnaire d'une institution à Ried, où Elisabeth Telsnig repère son goût pour le dessin et encourage sa créativité. Pepi - c’est ainsi qu’il signe - se regarde, Pepi se raconte. Dans le miroir qu’il se tend et qu’il nous tend, nous assistons, médusés, à l’enfance de l’art. Comme le souligne Michel Thévoz, « Josef Hofer est en état de grâce ». Une grâce érotisée, indomptée, où le corps tente de prendre son essor dans le carcan du cadre. Nudité sensuelle et brute qui perce au travers de son trait sûr et frustre aux couleurs chaudes. Josef Hofer a été montré à deux reprises à la Maison rouge en 2014 dans les expositions : Le Mur, oeuvres de la collection Antoine de Galbert et art brut, collection abcd/Bruno Decharme.
À la suite d’une violente crise mentale, Kapeller est contraint de renoncer à ses études de chauffagiste. Pris en charge par les services sociaux, il est accueilli dans un appartement communautaire de la ville de Vienne, exigu, au mobilier minimaliste : un lit, un meuble, une étagère et une table. « Je dessine dans mon ghetto », explique-t-il. Le calme de la nuit libère Kapeller, l’invite à une méditation où ses réminiscences (lectures, informations…) affluent et dialoguent pour constituer le véritable terreau de son oeuvre. Alors seulement, lentement, il élabore ses dessins dont la force graphique se double d’une richesse, relevant à la fois du carnet de notes et du journal intime. Certaines oeuvres prennent la forme de lettres de protestation aux administrations. Une exposition lui a notamment été consacrée dans le prestigieux Haus der Kunst à Munich en 2010.
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John Urho KEMP
Zdenek KOŠEK
1942 - 2010 | États-Unis
1949 - | République tchèque
John Urho Kemp obtint une licence en génie chimique et biochimique à l'université de Berkley - Californie - en 1965. Il travailla comme ingénieur chimiste pendant presque deux ans, puis démissionna pour étudier la Scientologie. Pendant les dix années suivantes, il fit tourner un magasin d'antiquités à Los Angeles. Entre autres activités parallèles, il parcourut le monde pour assister à des éclipses solaires et devint un habitué des sources thermales du nord de la Californie. Tout au long de sa vie, John a cherché la révélation à travers la méditation, la métaphysique, les formules mathématiques et les nombres tirés de sa propre histoire qu'il consignait dans un premier temps, au crayon et au stylo, sur des papiers brouillons. La plupart de ses travaux étaient affinés, compilés et mis en forme avant d'être photocopiés pour être distribués et partagés avec le plus grand nombre. Des archives en ligne de ses travaux - poèmes, équations, dessins et collages de 1979 à 2000 - sont en cours d'élaboration. L'on doit le sauvetage et l'archivage de son grand œuvre à son ami le photographe Aram Muksian, soit des milliers de pages, diagrammes, schémas et séquences de chiffres, allant jusqu'à coloniser des liasses interminables de papier d'imprimante à aiguille. Daniel Baumann - commissaire, critique d'art et actuel directeur de la Kunsthalle de Zürich ainsi que de la Fondation Wölfli à Berne - lui a consacré une exposition au 548 Center à NY en 2014.
Zdenek Košek est d’abord typographe et caricaturiste pour des journaux régionaux. Artiste autodidacte, il commence à produire une peinture de facture plutôt conventionnelle. Dans les années 80 il subit un grave traumatisme dont les conséquences psychiques sont irrévocables. Diagnostiqué psychotique il est mis à la retraite en 1989. Dès lors il va produire une œuvre radicalement différente de ses peintures antérieures. Košek est persuadé qu’il joue un rôle déterminant au sein de la grande ordonnance du monde dont le temps météorologique est le vecteur. « J’étais le maître du monde et j’avais l’énorme responsabilité de résoudre tous les problèmes de l’humanité. Si je ne les résolvais pas, qui d’autre le ferait ? » Il se voit comme une sorte de centrale recevant et émettant sans cesse des multitudes d’informations et pense devoir maîtriser les problèmes météorologiques. « Je ne maîtrisais pas seulement le temps mais aussi la politique, j’ai nommé Vaclav Havel président de la République. [...] Je me croyais immortel ». Il passe ses journées devant sa fenêtre afin de contrôler le temps qu’il fait, notant tout : direction des vents, vol d’oiseaux, changements de température, pensées, etc. Il dessine sur des cahiers d’écolier, sur des cartes d’atlas ou dans de vieux magazines. Ses diagrammes sont un rituel dicté, indispensable, auquel il doit se soumettre au risque d’être responsable d’un chaos irréversible.
Raphaël LÉONARDINI
Alexandre LOBANOV
1970 - | France
1924 - 2003 | Russie
Issu d'une famille d'artistes, Raphaël Léonardini s'adonne au dessin dès son plus jeune âge. Il passe sa scolarité à l'École expérimentale de Bonneuilsur-Marne (Centre d'études et de recherches psychanalytiques). Au sortir de l'école, il suit des enseignements en sculpture et dessin avant d'intégrer un CAT de poterie et de fresque. Mais c'est lorsqu'il abandonne ces cadres normatifs que sa création prend son véritable envol : de grandes surfaces saturées de traits noirs ou de couleurs engagent l'œil à caresser doucement l'œuvre avant d'identifier les figures représentées. On assiste alors à la fusion détonante de thèmes qui lui sont chers comme la bande-dessinée – celle des comics américains notamment – mais aussi la mythologie grecque ou égyptienne, l’imagerie gothique, voire médiévale. Le policier new-yorkais y côtoie des armées de momies et des déesses guerrières se transforment parfois en fille de saloon en bas résille jouant du saxophone. Ces univers cohabitent de façon inattendue dans des compositions savantes faites d’architectures labyrinthiques, de colonnes doriques, de cascades de roses, de tours médiévales, le tout ponctué d’inscriptions grecques, égyptiennes, hébraïques ou comme sorties d’un roman de science-fiction. Raphaël réussit admirablement, en mêlant mythes anciens et contemporains, à produire des contes d’un temps nouveau, d’un monde nouveau où l’on distingue parfois l’empreinte tutélaire de son auteur fétiche, Edgar Alan Poe.
A sept ans, Alexandre Lobanov devient, à la suite d'une méningite, sourd et muet. Révolté, souvent agressif, sa famille le fait interner en hôpital psychiatrique à l'âge de vingt-trois ans. Il manifeste les dix premières années une haine et souvent une agitation extrêmes. A partir de 33-35 ans, il se met progressivement à dessiner. Alors, son comportement se transforme. Jadis turbulent et irascible, il se calme et devient plus sociable. Le dessin le distrait et le tranquillise, stabilise son état psychologique. Toute son activité est désormais axée sur les moments où il est seul à seul avec une feuille blanche et vierge. Souriant, il dessine tout d’abord un cadre, soigneusement, puis « plonge » littéralement dans son monde à part. Une feuille de papier, pour lui, c’est une sorte de « seuil », de « fenêtre », vers quelque chose d’autre. Le comportement de Lobanov s’est tellement stabilisé avec les années qu’il a commencé à bénéficier d’un régime libre. Jusqu'à sa mort, il consacre tout son temps de loisir au dessin. Depuis la rétrospective que lui a consacrée la Collection de l'Art Brut à Lausanne en 2007 et la monographie publiée la même année, Lobanov est considéré comme l'une des figures majeures de l'art brut.
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Raphaël LONNÉ
Dwight MAKINTOSCH
1910-1989 | France
1906-1999 - | États-Unis
Né dans les Landes en 1910 d'une famille de métayers, il arrête l’école à 12 ans pour travailler la terre. Par la suite, il est tour à tour receveur de tramway, concierge-chauffeur, homme de peine à l’hôpital des enfants, puis, après la guerre, facteur. S’il a toujours manifesté un intérêt pour la musique, il n’a jamais songé à être dessinateur. Ce n’est qu’en 1950, lors d’une séance de spiritisme improvisée qu’il effectue sa première production.Aucune autre séance n’a lieu, mais Lonné, seul, continue de dessiner le soir se concentrant pour entrer en contact avec les esprits qui guident « le mouvement de sa main ». Ces impressionnantes créations spontanées, traversées de courbes et d’arabesques aux traits fins, d’une légèreté confinant à l’allégresse, laissent se profiler quelques formes, femmes, animaux, têtes de chiens, oiseaux… Bien que Lonné lui-même ne sache mettre réellement de nom sur les caprices de son crayon. Découvert par Jean Dubuffet en 1963, Lonné, qui fait partie de la famille des artistes spirites, a toujours refusé de vendre ses œuvres faisant vœux de n’en pas tirer profit. Aujourd’hui, ces productions, devenues des classiques de l’art brut, sont amplement exposées et font l’objet de nombreuses publications.
Dwight Mackintosh commence à créer à la fin de sa vie, après avoir passé 56 années dans des institutions psychiatriques. Ayant manifesté une aptitude pour le dessin, il intègre à 72 ans le Creative Growth Art Center à Oakland. Malgré ce démarrage tardif, il produit une multitude de dessins, peintures, estampes et céramiques. Le travail de Dwight Mackintosh se caractérise par l’omniprésence d’écritures inintelligibles qui semblent couler sur la page, une multiplication des points de vues et une vision « au rayon X ». Ses sujets de prédilection oscillent entre personnages masculins – notamment les « boysses » – des groupes de garçons nus aux joues rouges et aux longs cheveux avec des pénis en érection – bus, trains, anges et animaux fantastiques et des illustrations particulières de vues « avant et après » ablation d’amygdales. Les lignes des contours sont souvent redoublées – peut-être juste pour le plaisir du geste , ou manière de s’affirmer, en tant qu’artiste. L’oeuvre de Mackintosh a été exposée à l’étranger, notamment à la collection abcd à Montreuil, à la Pinacothèque Agnelli de Turin et à la Gavin Brown’s Entreprise à New York.
David MARSHALL
KUNIZO MATSUMOTO
1936 | États-Unis
1962 - | Japon
On sait peu de choses sur David Marshall, excepté qu’il est né à Nassau County (NY) et qu’il a arrêté l’école à 16 ans pour devenir ouvrier agricole, tapissier puis peintre en bâtiment. Choisissant des pierres polies par l’eau des rivières, il les sculptait pour en exprimer toute une population comme autant de témoins, voire de génies aquatiques. Des figures minérales comme la matérialisation de la « mémoire de l’eau » ? Le mystère reste entier, comme l’aura été sa vie.
Vivant à Osaka, Kunizo Matsumoto est en charge de la vaisselle dans le restaurant familial. Il collectionne d’une manière compulsive toutes sortes d’imprimés (brochures du théâtre kabuki, catalogues d’expositions, guides, etc.), dont sa chambre est pleine et auxquels personne n’a le droit de toucher. Analphabète, il a créé sa propre langue. Parfois, il recopie des passages de pièces de kabuki. Une fois la page noircie, il lui arrive de continuer à écrire dans l’air, la danse prenant ainsi le relais en une chorégraphie imaginaire. Le soir, quand tous les membres de sa famille sont couchés, il écrit sur le calendrier du restaurant ou remplitdes cahiers dans sa chambre.
Son œuvre a été distinguée dès 1983 dans l’ouvrage de référence de Jay Johnson American Folk art of the 20th Century (Ed. Rizzoli)
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biographies 212
Dan MILLER
Edmund MONSIEL
1961 - | États-Unis
1897 - 1962 | Pologne
La création acharnée de Dan Miller, qui superpose des couches considérables d’écriture jusqu’à l’illisible, a tant fasciné le public qu’outrepassant la sphère de l'outsider art, elle est entrée dans les collections permanentes du MOMA, à NewYork. Bien que cette œuvre soit formellement très contemporaine, entrant notamment en résonance avec le travail de Pollock et de Cy Twombly, c’est néanmoins hors du débat artistique que Miller invente ses modes d’expression. Né à Castro Valley en 1961, Dan Miller est autiste. Depuis plus de 15 ans il fréquente le Creative Growth Art Center d'Oakland (Californie) et laisse libre cours sans frein aucun à son inventivité. Obsédé par des objets comme des ampoules ou des douilles électriques, par des noms de villes, de gens, par des chiffres, par la nourriture, il décline son monde intérieur en répétant exalté sur le papier les signifiants qui s’y rapportent. Peinture, stylo, crayon, feutre, à l’instar des mots, différents matériaux se chevauchent, créant de subtiles strates chargées d’une force graphique incontestable. Noires et blanches ou de couleurs, ces créations portent en elles un dynamisme rare qui semble raviver - au-delà du cryptage lexical que provoque l’accumulation - le corps de la lettre, la force expressive des mots. Dan Miller a été montré à deux reprises à la Maison rouge en 2014 dans les expositions : Le Mur, oeuvres de la collection Antoine de Galbert et art brut, collection abcd/Bruno Decharme.
Né en Pologne en 1897, Edmund Monsiel quitte l'école sans diplôme et ouvre un petit magasin dans un village que les Allemands lui confisquent en 1942. Il se réfugie chez son frère à Wozuczyn, petite ville de la province de Lublin persuadé que les nazis le recherchent et reste caché dans le grenier pendant 20 ans, jusqu'à sa mort. En 1943, alors que la guerre bat son plein, il commence à dessiner. Ce n'est qu'après sa mort que l'on trouve ses quelques 500 créations «inspirées» de l’iconographie traditionnelle, populaire et religieuse. Des myriades de visages couvrent la totalité de la page, répétition obsédante. Les plus petits sont difficiles à distinguer, quelques fois, jusqu'à 3 000 figures sont représentées sur le même dessin.
Óscar MORALES
Albert MOSER
1951 - | Chili
1928 - | États-Unis
Óscar Morales Martínez est né en 1951 à Copiapo, au nord du Chili, au sein d’une famille humble. Son père, était chauffeur dans la Société nationale des mines tandis que sa mère élevait leurs 6 enfants. Óscar, comme ses frères, a grandi dans les rues poussiéreuses de sa ville. Il a pourtant suivi des études primaires et secondaires et depuis l’enfance a manifesté un vif intérêt pour la littérature et les arts. À 17 ans, Óscar est parti faire un service militaire de 3 ans à l’issu duquel il a manifesté de premiers symptômes apparents de schizophrénie paranoïde. Entre 1975 et 1995, il a été interné à plusieurs reprises en hôpital psychiatrique avant de retourner dans sa ville natale. Là, compte tenu de la complexité de sa maladie, Óscar est à nouveau hospitalisé, durablement : « C’était le dernier espoir de salut », dit-il. Alors qu’il était alité, il se souvient avoir commencé à dessiner « dans le ciel » de sa chambre. En 1999, Óscar met au point sa célèbre « Formule de Valence alphabétique et numérique » à partir de laquelle il crée des machines et dessine de manière compulsive des cellules, des noyaux, des atomes et des radios, sur des ordinateurs portables, des couvertures de livre et des feuilles de dessin de différentes tailles. « Je pensais créer quelque chose de noble qui servirait à tout le monde. Cette formule mathématique est d’un haut niveau. Je l’ai inventée pour améliorer et accroître la capacité de l’ordinateur », explique-t-il. Depuis 10 ans, Óscar vit dans le foyer d’un l’hôpital psychiatrique avec six autres patients chroniques.Il participe à divers ateliers : peinture, littérature, radio
Albert Moser, né à Trenton (NJ), est considéré comme autiste. Il a vécu jusqu’à l’âge de 60 ans avec ses parents. Dans sa jeunesse - après avoir été envoyé avec l’armée américaine au Japon - Albert a exercé quantité de petits métiers : laveur d’avions sur une base militaire, vendeur de bonbons... Mais il s’est toujours imaginé photographe. Notamment après avoir suivi quelques cours de photographie à l’Ecole des Arts industriels dans le cadre des formations allouées aux anciens GI. Expérience à la suite de laquelle il se fera fabriquer un tampon avec la mention “photographer” qu’il apposera au dos de ses clichés, à côté de la description méthodique de ses prises de vue. À partir des années 1970 et durant plus de 25 ans, il réalise quelques centaines de panoramiques (allant parfois jusqu’à 360°) à partir de ses clichés développés par un photographe de quartier. Puis, il recompose minutieusement ses paysages urbains dans un format linéaire qu’il colle, photo après photo. Il retrouve les jonctions à l’aide de ciseaux, et les relie avec du scotch transparent, ce qui confère à ses assemblages une qualité plastique, une matérialité rares. Ce qui frappe, outre l’audace poétique, c’est la volonté délibérée de réinventer la réalité saisie dans son objectif. Le paysage se referme sur lui-même comme sur celui qui regarde, en une sorte de vertige optique qui contraste avec l’amplitude du déploiement propre au panoramique. Albert Moser n’a pourtant jamais cherché à exposer. Il gardait enroulées ses compositions les unes dans les autres, au fond d’un sac, sans jamais les montrer. Il aura fallu, pour les découvrir enfin, un extraordinaire concours de circonstances...
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biographies 214
Michel NEDJAR
Marilena PELOSI
1947 - | France
1957 - | Brésil
Michel Nedjar naît troisième d’une famille de 7 enfants. Il se passionne très tôt pour le tissu, confectionne des robes pour les poupées de ses sœurs et accompagne sa grand-mère vendre des fripes (Schmatess) au marché aux Puces. Adolescent, il prend douloureusement conscience de l’horreur de la Shoah, de l’histoire de sa famille, en grande partie victime du nazisme : les poupées tragiques qu’il se met alors à créer en sont la réminiscence. Par la suite, il entreprend plusieurs voyages en Asie et au Mexique où il découvre les poupées magiques kachinas et les momies : « Ce n’était pas mort. Elles avaient leurs costumes, leurs robes collées sur la peau. » C’est à son retour qu’il fabrique ses premières poupées (ses « chairs d’âme ») de cordes, de haillons et de plumes qu’il trempe dans un bain de terre, de teinture et de sang. Autant de cadavres brulés et de corps mutilés. A partir de 1980, sa créativité s’étend au dessin, à la cire et à la peinture. Alors que Dubuffet le découvre et collectionne ses poupées, Nedjar rencontre l’art brut : enthousiaste, il co-fonde - avec Madeleine Lommel et Claire Teller - L’Aracine. Ainsi, Nedjar entre doublement dans l’histoire de l’art, en tant que découvreur d’art brut et, surtout, en tant qu’artiste. Roger Cardinal lui consacre un article de fond dans les Fascicules de l’Art Brut et plus d’une vingtaine de ses travaux rejoignent le Musée national d’art moderne grâce à la donation Cordier. Il est l’artiste brut - même s’il n’appartient plus vraiment à cette catégorie - qui fut le plus exposé à travers le monde ces 30 dernières années.
D'un trait sombre, sans artifice, Marilena Pelosi fait jaillir dans ses créations complexes et parfois très colorées, une cruelle féerie emplie de symboles dans laquelle le sens se dérobe, défie la raison, la sienne en premier, même si, admet-elle « ce sont les gens normaux qui deviennent fous. Mais comme je ne l'ai jamais été, je ne risque rien. » Née à Rio de Janeiro, Marilena aurait aimé faire les Beaux-Arts : « Heureusement, je n'y suis pas allée, peut-être qu'on m'aurait appris à dessiner correctement ». C'est à l'âge de 16 ans qu'elle commence son activité artistique : à la suite d'une maladie grave, en convalescence, créer lui permet de tuer les journées trop longues. Puis, elle est contrainte de quitter le Brésil pour fuir un mariage forcé avec un prêtre vaudou brésilien. S'ensuit une période d'errance, ponctuée de deux mariages dont elle se relève par la création. Ses dessins, au stylo bille ou au feutre sur du papier ou du calque, représentent bien souvent des femmes, parfois torturées, d'où jaillissent des larmes : les fluides, eaux ou sang, sont omniprésents. La culture de Marinela, transgressée, y est aussi palpable, le catholicisme exubérant et la macumba fiévreuse de son Brésil natal y tournoient jusqu'au délire. Cette œuvre libre et dérangeante d'où sourd une souffrance aigüe nous projette dans un univers illicite, intime et sublime.
Luboš PLNỲ
Josette RISPAL
1961 - | République tchèque
1946 - | France
« On repère dans ses dessins organiques, à la fois précis et fantaisistes sur le plan anatomique, un goût presqueinquiétant de la décomposition et de la dissection », écrivait Roxana Azimi en 2012. Luboš Plný est le premier artiste brut à avoir fait l’objet d’une acquisition par le Musée National d’art moderne en 2013. Dans ses travaux à l’encre de Chine retravaillés à l’acrylique et souvent agrémentés de matières organiques, Plný - qui est persuadé que dessiner l’un de ses organes l’amènerait à une forme de méditation sur les limites de son existence physique - livre dans un protocole conjuratoire ses études anatomiques codifi ées à l’extrême. Fils unique d’une mère possessive, Luboš Plný se consacre dès l’enfance à ses deux passions : le dessin et l’anatomie. Il adore disséquer les animaux. Celui qui, lors de son service militaire, fut transféré en hôpital psychiatrique, se mit alors à étudier la littérature médicale et psychiatrique. Fasciné par les corps en décomposition, il passe un diplôme de fossoyeur mais est surtout employé comme modèle à l’Académie des Beaux-Arts de Prague. D’où le tampon avec lequel il « signe » toutes ses oeuvres « Luboš Plný, modèle académique ». Il note également sur ses dessins les jours et le nombre d’heures passés à y travailler. Découverte majeure de l’art brut, Luboš Plný a notamment fait l’objet d’une exposition au Japon en 2012 au Hiroshima City Museum of Contemporary Art et au Hyogo Prefectural Museum of Art de Kobe. Il a été montré à deux reprises à la Maison rouge dans les expositions : Le Mur, oeuvres de la collection Antoine de Galbert et art brut, collection abcd/Bruno Decharme.
« Éloigné des sentiers battus, son art aime les rencontres impossibles et les accouplements les plus risqués de matière » (Laurent Danchin). Le bronze, le verre, le plastique, la terre, Josette Rispal utilise bien à « profusion », comme le souligne Françoise Sagan, les matériaux pour créer cet univers unique et riche de diversité où coquillages, bonbons, flore magnifique, masques translucides et poupées de chiffons se côtoient. Josette, née à Aurillac (Cantal) en 1946, commence à partir de 1974 à travailler l’argile et découvre, en modelant L’Homme qui se roule de douleur, que la sculpture lui ouvre le monde de l’expression. L’année suivante ses recherches explosent en tous sens : elle sculpte sur laves et utilise le verre. S'ensuivent une créativité prolifique, une multiplication des matériaux, une inventivité débordante de nouvelles techniques. Dès 1977, elle expose à Paris et en Allemagne et sa première rétrospective, en septembre 1983, est suivie de nombreuses expositions internationales.
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biographies 216
André ROBILLARD
Vasilij ROMANENKOV
1931 - | France
1953 - | Russie
Né en 1931, fils d’un garde forestier de la forêt d'Orléans, André est hospitalisé pour troubles mentaux à la fin de son adolescence. Après plusieurs tentatives de remise en liberté, toutes suivies d'échecs, il est recruté comme auxiliaire pour s'occuper de la station d'épuration de l'hôpital, ce qui lui donne un véritable statut social et une certaine autonomie. La même année, il fabrique, à trente-trois ans, son premier fusil qu'un amateur éclairé envoie à Jean Dubuffet : ce dernier le conserve soigneusement dans la collection de la Compagnie de l'Art Brut. Dix ans plus tard, Michel Thévoz, alors conservateur du tout jeune musée de l'Art Brut de Lausanne, fasciné par ce fusil, invite Robillard à poursuivre sa production, ce qu'il fait avec entrain. André puise principalement son inspiration de la télévision. Néanmoins, après une visite à Lausanne au cours de laquelle il est vivement impressionné par l'œuvre d'Auguste Forestier, il élargit ses sujets de prédilection (fusils, mitrailleuses, engins spatiaux...) et réalise une série d’animaux fantastiques et de personnages. Pour ses constructions, il utilise tout ce qui lui tombe sous la main : vieux tuyaux, ficelles, cartouches, boîtes, ampoules, tubes électriques, tissus, plastiques, qu'il assemble avec des clous, du scotch et du fil de fer. Jusqu'à une époque toute récente, il disposait d’un grand hangar atelier, où s’accumulaient les matériaux de récupération. Il y vivait entouré de bêtes (cochon d’Inde, oiseaux, chats, pigeons) et s'y montrait très fier de ses productions, mais sans se considérer pour autant comme un artiste.
Actuellement jardinier dans le parc d’un hôtel de la banlieue de Moscou, Vasilij Romanenkov est avant tout un créateur prolifique. Sur ses dessins à l'élaboration méticuleuse, il a coutume de dire : « C’est comme si quelqu’un me murmurait quelque chose à l’oreille, comme si quelqu’un dans l’univers me guidait ». Vasilij naît en 1953 à Bogdanovka, un endroit reculé de Russie où beaucoup d’anciennes traditions sont encore très vivaces. Adolescent, il s’installe chez des proches dans les environs de Moscou pour y suivre une formation d’ébéniste, puis, à 22 ans, il se met à dessiner. L’artiste Rotanov, qui découvre son travail, l’encourage à conserver son propre style. Les thèmes qu'explore Vasilij se rapportent aux grandes étapes de la vie, sa création en est la fresque, de la maternité aux funérailles. La minutie de son travail, le choix des tons, souvent sombres, les traits appuyés et sûrs de ces motifs, le soin porté à la composition, d'un équilibre serein, confèrent à ces productions une sagesse ancestrale. Cette œuvre majeure, qui a été sélectionnée pour le Grand Prix Insita 2004 et à laquelle Raw Vision a consacré un article de fond en 2007, figure actuellement dans plusieurs collections d'art brut.
Pedro Alonso RUIZ
Yuichi SAITO
? - ? | Espagne
1983 - | Japon
On ne connait que peu de la vie de Pedro Alonso Ruiz, sinon qu'il a exercé le métier de forgeron et qu'il a été interné à l'asile de Tolède pour trouble de la personnalité paranoïaque dans les années 1930. Patient du professeur Lafora, celui ci a conservé plusieurs de ses dessins.
Yuichi Saito fréquente l’atelier de création pour adultes déficients mentaux de Kobo Shu, dans la préfecture de Saitama. Depuis 2002, date à laquelle il a commencé ses travaux, Saito a montré un intérêt unique pour la calligraphie et la production d’oeuvres écrites, à la différence des nombreux artistes de l’atelier qui préfèrent la peinture. Saito écrit les titres de ses émissions de télévision préférées : Pocket Monster, Doraemon, Stray Cops (une version japonaise de Miami Vice), TV Champion, etc., créant méthodiquement chaque oeuvre le jour même où l’émission télévisée est diffusée. Bien que les dessins soient fidèles aux centres d’intérêts de l’artiste, ils ont depuis peu atteint un point d’abstraction visuelle d’une grande intensité. Plus récemment, il trace avec obsession un alphabet unique de « mo », dont les répétitions révèlent ses états émotionnels.
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biographies 218
Patricia SALEN
Phillip SCHÖPKE
1957 - | France
1921 - 1998 | Autriche
Née au Québec et après un passage aux Arts décoratifs de Nice, Patricia Salen devient Pandora en 2005. « Les ouvertures temporelles » lui donnent accès à la fois au passé et au futur, mais également à un autre niveau de conscience qui permet l’écriture automatique, et pourtant codifiée, que l’on retrouve dans ses travaux. Ce ne sont plus des corps, mais des champs vibratoires, ce ne sont plus des cerveaux, mais des cartographies cryptées qui recèlent un véritable langage. Elle y exerce, à la manière d’un Zdenek Kozek, une perception cataclysmique. Ce travail hypnotique - pour sybillin qu’il soit au néophyte - n’en est pas moins plastiquement jubilatoire.
Les dessins de Schöpke marquent par la brutalité de leur trait. Personnages aux membres disproportionnés, au visage excessivement expressif, sans fard ni manière, on est face à l'être, dénudé. Rencontre troublante. Né en 1921 en Basse-Autriche, la scolarité de Philipp est brève puisque, après avoir redoublé plusieurs fois, il quitte l’école au bout de quatre ans. Il travaille alors en tant que manœuvre et, à vingt ans, intègre l’armée allemande. Là aussi, son séjour est court : au bout de quelques semaines, il est licencié car, selon le médecin militaire, il n’est « même pas capable de lacer ses souliers ». Inapte au service, il est placé en clinique psychiatrique ; il en sort en 1944 et travaille quelques temps dans une fonderie et sur des chantiers avant d’être définitivement interné en 1956. C'est durant des phases d’excitation que Philipp dessine ses personnages -souvent humains, parfois des animaux- auxquels il confère une singulière transparence, laissant parfaitement visible leurs organes intérieurs. Léo Navratil précise que Schöpke « ne veut nullement choquer avec ses dessins, […] il entend au contraire créer quelque chose de très beau » et, effectivement, la beauté, crue, épurée, est au rendez-vous. Plusieurs articles sont consacrés à cette œuvre majeure qui figure désormais dans d'importantes collections d'art brut.
Friedrich SCHRÖDER-SONNENSTERN
Günther SCHÜTZENHÖFER
1892 - 1982 | Lituanie
1965 - | Autriche
Friedrich Schröder-Sonnenstern est né à la frontière germano-russe et a reçu peu d'éducation. Des accusations de vol et un comportement parfois agressif lui valent d'être envoyé dans des maisons de correction et même en hôpital psychiatrique. Il gardera de ces expériences une haine pour l’autorité. Après un certain nombre de petits boulots dans un cirque et comme diseur de bonne aventure, notamment - Schröder-Sonnenstern tombe malade ; les médecins lui diagnostiquent une démence précoce. Il se tourne alors vers la peinture et le dessin, ayant été introduit à l'art pendant une courte période en prison à une époque antérieure de sa vie.
Né en 1965 à Mölding, près de Vienne, Schützenhöfer a rejoint la Maison des artistes de Guggingen en 1999. Dessinant d’abord sur de très petits formats, il en augmente désormais volontiers le format. Schützenhöfer réfléchit d’abord longuement à ce qu’il va faire avant de se lancer. Lorsqu’il s’exécute, il n’a plus de repentir, son trait, retenu mais sûr, commence par la silhouette du sujet puis se poursuit avec des stries serrées pour le remplissage. Ses créations sont extrêmement déconcertantes, énigmatiques même, et leurs titres, à la fois nous éclairent et repoussent nos cadres traditionnels de la représentation.
Au crayon de couleur sur de minces lavis de peinture -pour atteindre la profondeur-, SchröderSonnenstern dessine des caricatures colorées grotesques, des monstres et des animaux. Un immense sentiment de menace et de subversion sadique caractérise tous ses travaux : le grotesque s’épanouit dans un monde mythique sinistre et sexuellement chargé. Son œuvre a attiré l’attention des surréalistes et a connu une certaine notoriété dès les années 60.
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biographies 220
José Johann SEINEN
Mary T. SMITH
1934 - 2012 | Pays-Bas
1904 - 1995 | États-Unis
José Johann Seinen a produit avec un soin maniaque un œuvre incomparable qui s’apparente à l’inventaire d’une mythologie personnelle où archéologie et science-fiction se mêlent. Un projet vertigineux qui pose également la question du jeu dans l’art. Lorsque ses parents - soupçonnés de collaboration avec les allemands - furent emprisonnés à la fin de la guerre, José et ses cinq frères furent confiés à la garde de leurs grands-parents qui vivaient à Amsterdam. C’est là qu’il commença à dessiner inlassablement : des cahiers conçus comme des livres animés remplis de robots et, déjà, des découpages minutieux et minuscules, petits personnages d’un théâtre intime qu’il faisait évoluer dans des décors dessinés à leur mesure. Jeune adulte, il entra comme employé dans la banque se maria et devint père d’une fille ; femme et enfant le quittèrent à la fin des années 60. José ouvrit ensuite une agence de voyage où il rencontra sa deuxième épouse, Colombienne, avec laquelle il convint de vivre à Amsterdam puis à Bogota, en alternance. Mais il passa le reste de sa vie en Colombie à s’enfermer dans une petite pièce sans confort pour s’évader dans son univers. Très érudit, José connaissait tout de l’Antiquité et possédait une bibliothèque de milliers de livres rares. À sa mort, sa veuve découvrit 22 boites remplies de milliers de dessins d’une grande précision, des accumulations sérielles de personnages ou d’objets, très souvent soigneusement découpés et classés dans des enveloppes : dieux mésopotamiens, édifices grecs et romains, armées entières, poteries surgies d’une fouille archéologique, extraterrestres...
Mary Tillman Smith est née en 1904 dans le sud du Mississippi, troisième de 13 enfants d’une famille de métayers. Elle a travaillé la majeure partie de sa vie dans des fermes et comme cuisinière. Souffrant d’une déficience auditive importante, cette afroaméricaine communiquait peu avec son entourage. Enfant, elle ne se mêlait pas aux autres mais traçait des dessins dans la poussière. Mariée et divorcée à deux reprises, elle a un fils qu’elle élève seule. Vers 1978, après une vie de misère et de souffrance que rien ne prédisposait à la création, Mary Smith prend sa retraite et commence à aménager la cour de sa maison en de nombreux espaces tous décorés de motifs, transcendant ainsi sa condition en établissant un rapport particulier au monde où l’art devient l’intercesseur par excellence de forces qui la dépassent et lui fait retrouver sa dignité. Utilisant des planches de bois ou des tôles comme support, elle peint son quotidien : portraits d’amis, de voisins, figures allégoriques ou animaux de la ferme, la plupart en une ou deux couleurs. Elle ajoute parfois des signes ou des slogans qui marquent sa croyance et son amour de Dieu. Audessus de sa maison, elle place des panneaux diffusant des messages aux automobilistes. Lorsqu’elle décède en 1995, à l’âge de 91 ans, elle laisse un oeuvre d’une force élémentaire unique constitué de quelques centaines de peintures. Des peintures de Mary T. Smith ont été montrées, dès 1988, dans l’exposition Outside the Mainstream: Folk Art in Our Time organisée par le High Museum of Art d’Atlanta.
Harald STOFFERS
Ionel TALPAZAN
1961 - | Allemagne
1955 - | Roumanie
Entre écriture, partition musicale et composition graphique, les lettres d’Harald Stoffers, par leur rare intensité, invitent tant à la lecture qu’à la contemplation fascinée. Né à Hambourg en 1961, Harald entre à l’institut psychiatrique pour adultes à l’âge de 22 ans où il commence à écrire un seul, parfois plusieurs mots sur de petits morceaux de papier qu’il distribue autour de lui. Par la suite, ces courts messages évoluent en de plus longues lettres adressées à sa « chère maman ». L’écriture se pose alors sur des lignes tracées comme des portées de musique, induisant rythme et musicalité. Parfois Harald déchire savamment ses messages en fines bandes formant à leur tour une lettre qu’il nous appartient de recomposer. L’intérêt pour ses lettres a désormais largement dépassé le seul milieu de l’art brut. Cet oeuvre dense et dansant, auquel Youssef Tabti a consacré un film a été exposé par le Museum of Everyting à la Pinacoteca Agnelli (Turin) cette même année puis en 2012, à la Chalet Society, Exhibition #1 à Paris. En 2014, Harald Stoffers a été monré par la galerie christian berst art brut dans la cadre de l’exposition art brut, masterpieces et découvertes, carte blanche à Bruno Decharme, mais aussi lors de l’exposition inaugurale de sa galerie new yorkaise, Do the Write thing, Reed Between the Lines, et enfin successivement à la Maison Rouge dans la présentation de la collection d’Antoine De Galbert puis celle de Bruno Decharme.
Selon Ionel Talpazan, ses dessins et sculptures de soucoupes volantes contiennent des informations secrètes sur les systèmes de propulsion des OVNI susceptibles d'intéresser la NASA. Ce qui est sûr, c'est que ses admirables créations multicolores, dont l'ensemble constitue une véritable station inter-galactique, nous projette dans un univers unique, celui de cet homme, qui, enfant, a vu une lumière bleue « extra-terrestre », source de son œuvre. Ionel connaît un parcours mouvementé : né en 1955 près de Bucarest (Roumanie), il perd son frère jumeau peu après leur naissance. Ses parents, en conflit, le confient à son grand-père avant qu'à ses six ans il intègre une famille d'accueil dont la mère se révèle violente et alcoolique. A huit ans, alors qu'il se cache dans des buissons après s'être échappé de la maison, il aperçoit cette étrange lumière bleue qui se meut sans bruit : quatre ans plus tard, il dessine ses premiers OVNI. Adulte, il fuit son pays, traversant le Danube à la nage; reconnu réfugié politique, il s'installe à New-York. Dès lors, Ionel se livre pleinement à sa création, son appartement suffisant à peine à stocker son impressionnante production. Son travail, montré dans de nombreuses galeries aux états-unis, est présent dans plusieurs collections majeures d'art brut.
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biographies 222
Miroslav TICHÝ
August WALLA
1926 - 2011 | République Tchèque
1936 - 2001 | Autriche
Miroslav Tichý a entamé une carrière de peintre, marqué par les influences de Picasso, Matisse et des expressionnistes allemands. La prise du pouvoir par les communistes en 1948 le conduit à revenir dans sa ville natale de Kyjov. Il délaisse la peinture et s'initie, au milieu des années cinquante, à la photographie, qu'il réinvente en construisant ses propres appareils à partir de matériaux qu’il récupère : tubes en carton, boîtes de conserve, verres optiques poncés avec du dentifrice et des cendres de cigarettes… Pendant trente ans, dans l'isolement, il réalise quotidiennement des dizaines de clichés sous ou sur-exposées, ayant pour sujet principal et obsessionnel les femmes de Kyjov. Il développe ses photos comme il peut et les retouche au crayon. Son comportement volontairement marginal lui vaut des difficultés avec les autorités. Il est interné en établissements psychiatriques à plusieurs reprises et finit par être expulsé de son atelier en 1972. Son travail, découvert à la fin des années 90 est rapidement reconnu. Il sera notamment exposé au Kunsthaus de Zurich (2005) et le centre Pompidou à Paris lui a consacré une retrospective en 2008.
Né en Basse-Autriche, August Walla reste fils unique et vit une relation fusionnelle avec sa mère qui l'élève comme s'il était une fille, espérant ainsi lui épargner d'être enrôlé dans l'armée. Incapable de s'accoutumer à l'école, il est placé dans une institution spécialisée. À l’âge de neuf ans, après avoir vécu pedu le sommeil pendant trois mois, il écrit dans ses cahiers d’école : « Tout ce qui est rouge est diabolique ». Souffre-douleur de ses camarades, il reste sans défenses. À seize ans, après avoir menacé de se suicider et de mettre le feu à sa maison il est interné pendant quatre ans dans un hôpital psychiatrique où on le diagnostique schizophrène. À sa sortie, sa mère se dévoue entièrement à son service. Mais en 1970, August est de nouveau admis en psychiatrie, à l’hôpital de Gugging près de Vienne. Seize ans plus tard, il devient l'un des pensionnaires de la Maison des artistes (Haus der Künstler) créée quelques années plus tôt par le docteur Navratil où il restera jusqu'à la fin de ses jours. Comme Wölfli, Walla a rempli des pages d'écriture et lorsque la feuille de papier s'est révélée trop étroite, il a recouvert les murs de sa chambre de dessins et d'inscriptions. Parfois il peignait sur les arbres ou sur les routes, pour ensuite photographier ses messages avec une caméra repeinte en vert parce qu’il détestait le noir. Walla inventait sans cesse des langages imaginaires inspiré par la lecture de dictionnaires de langues étrangères. Ecriture et dessin sont indissociables dans son œuvre, pétrie de symboles obsessionnels et qui se déroule comme un continuum, dont chaque partie serait inséparable de l’ensemble.
Melvin WAY
Anna ZEMANKOVA
1954 - | États-Unis
1908 - 1986 | République Tchèque
Lambeaux de papiers récupérés, manipulés, recouverts d’écritures, de chiffres, de formules mathématiques et chimiques, de figures géométriques, de partitions de musique, de rubans adhésifs… La densité graphique des billets graciles de Melvin Way leur confère un magnétisme rare. Ils témoignent de son obsession pour l’espace et le temps, et ses équations semblent vouloir calculer les passerelles qui mènent de l’un à l’autre. Comme une manière de s’en affranchir, d’abolir la place qui nous est assignée par ces concepts et, ainsi, offrir des voies nouvelles à celui qui signe parfois luimême Melvin «Milky» Way. Né en Caroline du sud, Melvin est élevé à Brooklyn par un parent de la famille. Au lycée, passionné par les sciences, il joue de la basse et chante dans un groupe. Alors qu’il engage des études au Technical Career Institut, il est progressivement atteint par d’importants problèmes psychiques. En couple un temps avec une toxicomane, il se consacre par la suite à la musique, puis se retrouve SDF sur l’île de Ward. C’est dans un centre pour sans-abris que, dans les années 80’, l’artiste Andrew Castrucci découvre les dessins de Melvin Way et expose son oeuvre. Melvin griffonne au stylo bille sur de petits bouts de papiers d’innombrables signes, formes, formules sibyllines qu’il chine parfois dans des livres et dont il détient seul la clé. Il travaille plusieurs semaines, parfois plusieurs mois à un dessin puis il le garde dans sa poche ou entre les pages d’un livre et intervient à nouveau dessus des années plus tard. Aujourd’hui, Melvin Way est un créateur salué par des critiques éminents comme Jerry Saltz qui dit de lui qu’il est «un génie mystique visionnaire».
Née en 1908 à Olomouc en Moravie, Anna montre dès l’enfance un goût prononcé pour le dessin qui, toutefois, se heurte à l’incompréhension de son père : elle devient assistante dentaire. En 1933, elle se marie à un officier, arrête de travailler et se consacre pleinement à son foyer. Le couple a trois fils (dont le premier décède à l’âge de 4 ans), puis, plus tardivement, une fille. Son rôle de mère aimante l’occupe à plein temps. Après la seconde guerre mondiale, la famille déménage à Prague, puis, en 1950, Anna entre en dépression puis, en raison de son diabète, subit l’amputation de ses deux jambes. À plus de 50 ans, – renouant peut-être avec son rêve d’enfant – Anna se met à produire quotidiennement des dessins spontanés d’inspiration végétale, entre 4 h et 7 h du matin, moment où elle a le sentiment de capter des forces magnétiques. Elle ignore, au commencement de l’oeuvre, sa forme fi nale : « Tout marche tout seul », « […] pas besoin de réfléchir ». Ces productions, aux détails saisissants, mues d’un rythme singulier entre spirales, arabesques et formes géométriques, font d’Anna une fi gure majeure de l’art brut. Elle est représentée dans les plus prestigieuses collections, jusqu’à connaître la consécration du pavillon international de la biennale de Venise 2013.
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biographies 224
Henriette ZÉPHIR
Carlo ZINELLI
1920 - 2012 | France
1916 - 1974 | Italie
Henriette Zéphir est née en 1920 près de Toulouse. Ses parents travaillant loin de son village d’origine, elle est élevée par ses grands-parents. Bien qu’ayant reçu une éducation religieuse, elle n’est ni pieuse ni pratiquante. Mariée à un Noir Martiniquais en 1941, le couple part pour les Antilles, cependant, au cours du voyage, les jeunes époux sont bloqués à Casablanca, où nait leur première fille. Son mari mobilisé, Henriette reste 2 ans et demi seule au Maroc. Après la guerre, ils rejoignent finalement la Martinique, néanmoins, Henriette ne s’adapte pas, se sent constamment en exil : elle se sépare de son mari vers 1956 et s’installe à Nice. Le 1er mai 1961 se manifeste pour la première fois son «guide», dès lors, Henriette s’adonne à ce qu’elle appelle «l’occulte». L’exigence extrême du guide s’exprime de diverses manières : lors de séances de dessin, le stylo se pose quelque part sur la feuille et ne s’en détache qu’une fois tout l’espace rempli. D’autres fois, il lui impose des séances de prostration, couchée par terre ou à genoux durant des heures, il lui dicte des messages qu’elle doit scrupuleusement noter. Henriette se considère comme l’instrument de ces forces de l’au-delà et paraît circonspecte qu’on puisse qualifier ses productions d’art. Repérées par Jean Dubuffet lui-même, ces créations médiumniques au détail surprenant, aux couleurs osées, à la composition singulière, parfois figurative, mais bien souvent abstraite, où se mêlent courbes, pointes, formes géométriques, furent exposées dès 1967, au Musée des Arts Décoratifs, première exposition d'art brut ouverte au grand public.
Carlo, interné en hôpital psychiatrique 24 ans durant, a élaboré une œuvre éblouissante où la répétition des figures construit un théâtre d'ombres au sein duquel se meuvent, en rythme, les protagonistes d'une histoire intérieure Fils de menuisier, né aux environs de Vérone, il perd sa mère à l'âge de deux ans. Après avoir passé son adolescence à travailler à la ferme, il devient apprenti boucher aux abattoirs municipaux de Vérone : là nait son goût exalté pour la musique et la peinture. Enrôle et envoyé en Espagne durant la seconde guerre mondiale, il est rapatrié en 1941 pour raisons médicales. S'ensuit quelques années agitées avant un internement définitif en 1947 à l'hôpital San Giacomo de Vérone pour schizophrénie paranoïde. Animé d'un fort besoin créateur, il recouvre les murs de l'hôpital de graffiti et en 1957 intègre un atelier de peinture et de sculpture nouvellement ouvert. Commence alors une création effrénée. Carlo produit pas moins de 3 000 peintures à la gouache et plusieurs sculptures. Comme pris d'une urgence de poursuivre l'élan créateur, il peint dans la foulée le recto puis le verso des feuilles de papiers. Très rapidement, son œuvre intéresse la critique et fait l'objet d'expositions; Dubuffet lui-même acquiert plusieurs dessins. Décédé en 1974 d'une pneumonie, Carlo a connu de son vivant plusieurs publications et aujourd'hui, alors qu'une fondation lui est dédiée, il est un des artistes d'Art Brut les plus reconnus à travers le monde. Il a été montré dans les giardini de la biennale de Venise 2013 et dans l’exposition art brut collection abcd / Bruno Decharme à la Maison rouge en 2014.
biographies artistes contemporains
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biographies
Cathryn BOCH
Annette MESSAGER
1968 - | France
1943 - | France
À l’origine, des cartes routières, des vues aériennes, des relevés topographiques, des plans d’occupation au sol... bref toute une iconographie de repérage, de mesure et d’inscription du territoire. Toute une matérialité codifiée du paysage. C’est là le médium de prédilection de Cathryn Boch. Comme un peintre presse les tubes de couleurs sur sa palette pour obtenir le ton recherché, comme un sculpteur prélève des morceaux du matériau qu’il travaille pour donner corps à une forme, l’artiste use de protocoles spécifiques qui en appellent tour à tour au déchirement et à l’assemblage via une pratique singulière, la couture. Le fil, en ligne ou en épaisseur, lui permet alors d’élaborer la cartographie de toutes sortes de mondes à part, inédits et improbables. Des aplats, des creux, des bosses, des béances, des effractions configurent plaines, vallées et collines imaginaires dans lesquels l’artiste entraîne le regard à la perte de tout repère, de toute identification, de toute réalité. Il faut se laisser aller au pur plaisir de l’inconnu, de la surprise, de la découverte, voire au risque de ne plus jamais retourner au monde ici-bas. L’art de Cathryn Boch est requis par la tentation d’une échappée, d’une forme de fugue hors de soi et du contingent, en quête d’un ailleurs dans les entrailles mêmes du paysage. Plilippe Piguet
Après avoir interrompu ses études à la veille de mai 68 Annette Messager réunit ses premières Collections, albums de photos et de sentences extraites de la presse qu'elle annote et modifie. La galerie Germain lui commande en 1971 une œuvre avec de la laine et du tissu, Les Pensionnaires, alignement de moineaux empaillés et emmaillotés dans des tricots recouvert de tissu. Se développant dans le contexte parisien des années 1970, son œuvre, proche de celles d’artistes comme Boltanski, Le Gac, Sarkis, ou Paul-Armand Gette, relève de ces démarches singulières qualifiées de « mythologies individuelles ». Hostiles à tout académisme, comme aussi à une politisation extrême qui avait suivi mai 68, ces artistes prônent la prise en compte de l’élément affectif, imaginaire, voire nostalgique dans l’œuvre. Annette Messager, qui revendique la dimension féminine de son art, intègre l’univers domestique dans lequel le regard masculin a cantonné la femme: travaux à l’aiguille, carnets précieusement intimes, revues de beauté, pour en faire son langage plastique en même temps qu’une critique de la condition féminine. Des Pensionnaires, 1972, à Mes petites effigies, 1988, aux Piques, 1992, son travail affectionne l’esthétique du fragment et révèle un univers de l’intime à l’écoute des mouvements contradictoires de l’inconscient. Elle entame une création continue, qu'elle expose à Munich en 1973 dans une exposition personnelle puis au Musée d'art moderne de la ville de Paris en 1974. Ses travaux sont exposés à l'échelle internationale, avec notamment une exposition à Buenos Aires en 1999 et au Musée d'art moderne de la ville de Paris en 2004. Elle reçut en 2005 le Lion d'or de la 51e Biennale de Venise pour son œuvre Casino.
Née à Strasbourg, elle travaille et vit à Marseille. Elle est représentée par la galerie Claudine Papillon, à Paris, et a notamment reçu le Prix Drawing Now 2014. 226
Simone PELLEGRINI
Arnulf RAINER
1972 - | Italie
1928 - | Autriche
Simone Pellegrini est en 1972 à Ancona (Italie). En 1999 il obtient son diplôme des Beaux Arts de Urbino, spécialité peinture. En 2003, avec l’exposition personnelle « Rovi da far calce », il commence sa collaboration avec la galerie italienne Cardelli e Fontana à Sarzana dans la province de La Spezia. En 2006 il inaugure sa première exposition personnelle à la galerie Hachmeister de Münster, qui deviendra sa galerie de référence en Allemagne. Il vit et travaille à Bologne.
Arnulf Rainer est à Baden, près de Vienne. Il fera des études d'architecture à l'Ecole de Villach (19471949), puis suit un enseignement à l'Akademie der bildenden Künste de Vienne (1950). Arnulf Rainer sera cofondateur du Hundsgruppe (« Groupe du chien »), d'inspiration révolutionnaire et surréaliste qui développe un travail existentiel proche de l'Art corporel. Avant 1951, ses oeuvres présentent un univers fantastique, parfois morbide, influencées par les théories surréalistes. Il dessine des oeuvres non figuratives en 1951 (Les yeux fermés). Sa première exposition personnelle est organisée en 1951 (Galerie Kleinmayr, Klagenfurt, Autriche). Il entreprend, l'année suivante, le cycle des Übermalungen, peintures de recouvrement monochromes ; si dans cette dernière série, l'artiste repeint pour partie ses propres toiles, il efface aussi celle des autres avec acharnement (des oeuvres de Van Gogh, Goya, Rembrandt, Vasarely...) Au début des années 60, Arnulf Rainer commence une suite de photographies, autoportraits redessinés qui constitue un répertoire des expressions humaines. Arnulf Rainer s'initie à la gravure en 1965. A la fin de cette même décennie, l'artiste flagelle, écorche, défigure et torture sa propre image (FacesFarces). Ce travail devient l'armature de son oeuvre. L'artiste commence alors la série des masques mortuaires et des cadavres peints. À partir de 1982, Arnulf Rainer commence le cycle des séries des « Hiroshima » et des « Christs stigmatisés ». Dans les années 90 et 2000, il réalise des peintures du Cosmos et recouvre des portraits de stars du cinéma ou de la musique.
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AMBLARD ANONYME (ESPAGNE) BAKER BARBIERO BENETTO BONNELALBAY BOSCO BRIZUELA CAMILO CASTILLO PEDROSO CAZHUR DEEDS DESMOULIN DEVLIN DOMSIC GAITAN GALLIENI GARCIA GILL GIRONELLA GUO HASSAN HERNANDEZ HOFER KAPELLER KEMP KOŠEK LÉONARDINI LOBANOV LONNÉ
MACKINTOSH MARSHALL MATSUMOTO MILLER MONSIEL MORALES MOSER NEDJAR PELOSI PLNÝ RISPAL ROBILLARD ROMANENKOV RUIZ SAITO SALEN SCHÖPKE SCHRÖDER-SONNENSTERN SCHUTZENHOFER SEINEN SMITH STOFFERS TALPAZAN TICHÝ WALLA WAY ZEMANKOVA ZÉPHIR ZINELLI 229
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prophet royal robertson : space gospel texte de pierree muylle, édition bilingue (FR/EN), 2016 josé manuel egea : lycanthropos textes de graciela garcia et bruno dubreuil, édition bilingue (FR/EN), 2016 melvin way : a vortex symphony textes de laurent derobert, jay gorney et andrew castrucci, édition bilingue (FR/EN), 2016 sur le fil par jean-hubert martin texte de jean-hubert martin, édition bilingue (FR/EN), 2016 misleidys castillo pedroso & daldo marte : fuerza cubana textes de karen wong, édition bilingue (FR/EN), 2016 josef hofer : transmutations textes de elisabeth telsnig et philippe dagen, édition bilingue (FR/EN), 2016 franco bellucci : beau comme... texte de gustavo giacosa, édition bilingue (FR/EN), 2016 soit 10 ans : états intérieurs textes de stéphane corréard, édition bilingue (FR/EN), 2015 john urho kemp : un triangle des bermudes textes de gaël charbau et daniel baumann, édition bilingue (FR/EN), 2015 august walla : ecce walla textes de johann feilacher, édition bilingue (FR/EN), 2015 sauvées du désastre : œuvres de deux collections de psychiatres espagnols (1916-1965) textes de graciela garcia et béatrice chemama-steiner, édition bilingue (FR/EN), 2015 beverly baker : palimpseste texte de philippe godin, édition bilingue (FR/EN), 2015 peter kapeller : l'œuvre au noir texte de claire margat, édition bilingue (FR/EN), 2015 art brut masterpieces et découvertes : carte blanche à bruno decharme entretien entre bruno decharme et christian berst, édition bilingue (FR/EN), 2014 pepe gaitan : epiphany texte de johanna calle gregg & julio perez navarrete, édition bilingue (FR/EN), 2014 231
do the write thing : read between the lines textes de phillip march jones et lilly lampe, édition bilingue (FR/EN), 2014 dan miller : graphein I & II textes de tom di maria et richard leeman, édition bilingue (FR/EN), 2014 paños : prison break texte de pascal saumade, édition bilingue (FR/EN), 2014 le lointain : on the horizon édition bilingue (FR/EN), 2014 james deeds : the electric pencil texte de philippe piguet, édition bilingue (FR/EN), 2013 von bruenchenhein : american beauty texte de adrian dannatt, édition bilingue (FR/EN), 2013 anna zemankova : hortus deliciarum texte de terezie zemankova, édition bilingue (FR/EN), 2013 john devlin : nova cantabrigiensis texte de sandra adam-couralet, édition bilingue (FR/EN), 2013 davood koochaki : un conte persan texte de jacques bral, édition bilingue (FR/EN), 2013 mary t. smith : mississippi shouting textes de daniel soutif et william arnett, édition bilingue (FR/EN), 2013 albert moser : life as a panoramic textes de phillip march jones, andré rouille et christian caujolle, édition bilingue (FR/EN), 2012 jean perdrizet : deus ex machina textes de manuel anceau, josé argémi, jean-gaël barbara & marc décimo, édition bilingue (FR/EN), 2012 josef hofer : alter ego textes de elisabeth telsnig et philippe dagen, tédition bilingue (FR/EN), 2012 pietro ghizzardi : charbons ardents texte de dino menozzi, trilingue (FR/EN/IT), 2011
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guo fengyi : une rhapsodie chinoise texte de rong zheng, trilingue (FR/EN/CH), 2011 rentrée hors les normes 2012 : découvertes et nouvelles acquisitions édition bilingue (FR/EN), 2012 carlo zinelli : une beauté convulsive texte par daniela rosi, édition trilingue (FR/EN/IT), 2011 joseph barbiero : au-dessus du volcan texte de jean-louis lanoux, édition bilingue (FR/EN), 2011 giovanni bosco : dottore di tutto textes de eva di sefano et jean-louis lanoux, édition trilingue (FR/EN/IT), 2011 henriette zéphir : une femme sous influence texte de alain bouillet, édition bilingue (FR/EN), 2011 alexandro garcia : no estamos solos texte de thiago rocca, édition trilingue (FR/EN/ES), 2010 back in the U.S.S.R : figures de l’art brut russe 2 texte de vladimir gavrilov, édition bilingue (FR/EN), 2010 harald stoffers : liebe mutti texte de michel thévoz, édition bilingue (FR/EN), 2009 made in holland : l’art brut néerlandais texte de nico van der endt, édition bilingue (FR/EN), 2009 american outsiders : the black south texte de phillip march jones, édition bilingue (FR/EN), 2009
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remerciements / acknowledgments
hélène barré, elisa berst, carole billy et la galerie marian goodman, cathryn boch, stéphane corréard, aurélien farina, jonathan frydman, galerie christophe gaillard, benedetta grazioli, phillip m. jones, carmen et daniel klein, chase martin, annette messager, claudine et marion papillon, galerie claudine papillon, simone pellegrini, arnulf rainer. sans vous - artistes, amis et amateurs, collectionneurs et compagnons de route - la célébration des 10 ans de la galerie n'aurait aucune saveur. 234