Josef Hofer

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josef hofer : transmutations

un bac à sable aménagé spécialement pour lui. Sa chambre est pleine de jouets comme des machines agricoles et autres personnages Playmobil. Cet univers enfantin, il l’a préservé jusqu’à aujourd’hui. Ses œuvres précoces ont d’ailleurs conservé ce caractère enjoué, « bonsaïesques » comme les a qualifié l’historien d’art autrichien Wieland Schmied. Au contraire de ses nus - souvent des autoportraits, plus rarement des figures androgynes ou féminines - qui paraissent exprimer une tension opposée et sont de prime abord, pour certains observateurs, irritants et déconcertants. Ses dessins sont comme les témoignages de ses soliloques face au miroir qu’il a installé dans sa chambre.

taux, crus, le sexe rehaussé de rouge, ses corps sont souvent sans pieds ni tête ou alors contraints dans l’espace restant. Cette vision fragmentaire, réduite au torse, est probablement due à l’image tronquée que lui renvoie son miroir et, qui plus est, celui-ci est posé à même le sol de sa chambre, car Josef Hofer ne veut pas qu’il soit accroché au mur.

En fait, avec la radicalité de ses autoportraits, Hofer se confronte à sa sexualité. Il ne représente pas, comme Schiele, des corps décharnés ou suppliciés, voire automutilés comme chez les premiers actionnistes comme Rudolf Schwarzkogler ou Günter Brus. Non, il y a chez lui une dimension purement existentielle, juste une manière d’être, une façon de représenter sa masculinité, sans aucune autre Alors qu’au début les corps et les objets intention. Il n’est question chez lui ni de réflottaient dans l’espace de la page, dès bellion ni de provocation. Avec joie, fierté 2003 il commença subitement à les enca- même, Hofer donne à voir le plaisir qu’il drer de jaune et d’orange. Depuis, l’enva- éprouve avec lui-même. hissement toujours plus manifeste et plus intense de ce cadre traduit nettement Michel Thévoz, ancien directeur de la Coll’horror vacui. Hofer s’emploie durant des lection de l’Art But, à Lausanne, parlait, à heures à tracer obsessivement ces ban- propos d’Hofer « d’état de grâce ». Soulideaux jaune/orange – qui rappellent d’ail- gnant ainsi l’absence d’intention de sa part. leurs des travaux de vannerie. Josef Hofer travaille par séries, répétant Dans des cartouches réservés à cet effet, inlassablement et avec d’infinies variail appose sa signature, PEPI, dans des sé- tions ses sujets. Tandis que le cadre en quences et des ordres différents, parfois définit invariablement la forme, le sujet même de droite à gauche. incarcéré est décliné en de légères variations de perspective jusqu’à l’épuisement Il entoure ses nus avec ces cadres comme des possibilités. Il vise ce qui paraît être pour former un cocon protecteur. Fron- pour lui une forme absolue et ce n’est 16


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