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PROFESSION : CONTEUSE !
PAR RENÉE ROBITAILLE Conteuse, autrice, metteure en scène
L’autrice et conteuse Renée Robitaille parcourt les pays francophones pour raconter ses histoires. C’est d’ailleurs pendant sa dernière tournée en France qu’elle a rédigé ce texte, dans lequel elle raconte où elle puise son inspiration pour écrire.
Il y a quelques années, mon amoureux et moi étions au programme lors d’un festival de contes à Trois-Pistoles, là où le fleuve glisse dans les bras de la mer. Nous sommes tombé·e·s en amour avec le Bas-Saint-Laurent. Nous y avons trouvé notre nid ; une petite maison en bois perdue dans un rang de campagne.
Ce lieu est devenu le poumon de ma vie. C’est là que je me ressource, que je m’inspire et que j’invente des histoires. C’est là que j’écris, que je jongle avec les mots, que j’explore des personnages. C’est là que j’éveille le vocabulaire corporel qui m’habitera pendant un spectacle. Entourée de mes poules, de mes canards et de mes plantes médicinales, j’ère tous les matins, café à la main, pour me nourrir du moment présent, de lenteur et de douceur. Faire pousser la vie, c’est l’essence même de ma création. Tout ce que j’observe et enregistre, tout ce que je ressens et goûte pleinement servira de matière brute pour l’écriture.
Si mon quotidien créatif se trouve à la campagne, mon métier de conteuse, lui, me mène dans les grandes villes pour partager mes histoires dans des salles de spectacle, des bibliothèques, des maisons de la culture et des salons du livre. Alors je voyage beaucoup. Dans tous les coins du Québec et de la francophonie.
L’ORALITÉ ET L’ÉCRITURE
Quand j’ai commencé à raconter des histoires, il y a plus de 20 ans, je n’imaginais pas être capable d’écrire un livre. L’écriture était quelque chose d’inaccessible pour moi, et je manquais cruellement de confiance et de bienveillance envers ce que j’écrivais. Je chiffonnais toujours mes premières phrases ou déchirais mes papiers… Je visais la perfection du premier coup ! Aujourd’hui, j’ai compris que l’écriture, ça se peaufine, ça se raffine, ça s’enrichit au fil du temps. Alors je ne déchire plus jamais mes premières phrases.
Ce sont les maisons d’éditions qui m’ont fait comprendre que mon style d’écriture était singulier. Elle est très influencée par mon métier de conteuse. Mes phrases sont courtes, truffées d’images et de sensations. En fait, quand j’écris, je deviens une caméra de cinéma et je raconte ce qui se passe. Je crée souvent des livres audio ou des balados pour accompagner la lecture de mes œuvres. Avec les éditions Planète rebelle, j’ai ainsi publié une dizaine de livres audio. Cela me permet de partager mes histoires dans deux langages différents. Et j’aime bien m’imaginer que j’accompagne les enfants, au creux de l’oreille, sur la route en voiture ou tranquilles dans leur lit avant de s’endormir.
Lorsque j’écris un livre sans version audio, c’est plus fort que moi, j’ai besoin d’ajouter une touche d’oralité à mon écriture. Par exemple, dans l’album Douze Oiseaux, paru aux Éditions de La Bagnole, j’ai imaginé une histoire où Dame Mésange joue au jeu du téléphone avec ses amis ailés, tous perchés sur un fil. La lecture à voix haute devient dès lors une découverte des rimes et des mots tordus qui surgissent lorsqu’on a mal entendu. Au moment d’écrire ces lignes, je termine également pour les Éditions Scholastic l’écriture d’une nouvelle histoire intitulée Onze mares (parution en mars 2023), qui mêlera une fois encore jeux de mots, poésie et oralité.
Cette approche particulière de l’écriture plaît aux enfants, mais aussi aux professeur·e·s. De les voir utiliser mes livres en faisant toutes sortes d’activités en classe, par exemple, en jouant au jeu du téléphone par écrit, cela me touche beaucoup. J’ai bien hâte de voir ce qu’iels imagineront autour de l’album Onze mares. Et je crois qu’il y aura beaucoup de fous rires en classe !
À PROPOS DE RENÉE ROBITAILLE
Renée Robitaille est une conteuse originaire d’Abitibi. Depuis 1999, elle présente ses créations au sein de festivals internationaux. Douée pour la création de personnages, Renée marie harmonieusement la marionnette et le masque aux arts de la parole. Passionnée d’herboristerie, Renée se ressource chaque été auprès de ses poules et de ses plantes médicinales.