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Sen Ramsamy, Managing Director Tourism Business Intelligence
« Notre offre
touristique doit se réinventer »
En ce début d’année, les arrivées touristiques stagnent et les recettes sont en baisse. Devons-nous être inquiets ? Sen Ramsamy, directeur de Tourism Business Intelligence et ancien directeur de l’Office du Tourisme nous donne son point de vue.
juin/juillet 2019 - no141
L
es dernières statistiques de la Banque de Maurice indiquent que les recettes touristiques ont baissé par plus de Rs 430 millions en janvier 2019 en comparaison avec la période correspondante l’année dernière. Cette situation n’est guère une surprise pour moi. Il y a un problème de fond dans le secteur du tourisme à Maurice. Je suis peut-être le seul qui tire la sonnette d’alarme régulièrement depuis des années déjà que nous naviguons à vue dans cette industrie majeure. Nous nous réjouissont trop des effets mirage du tourisme. Il n’y a pas d’analyses techniques en profondeur comme cela se fait ailleurs. Il est urgent de repenser notre offre touristique car les voyageurs sont devenus plus exigeants, les marchés sont devenus plus complexes et la concurrence plus sophistiquée. Mais au lieu de cela, les responsables se plaisent dans d’innombrables réunions et discussions légères sur le tourisme pour mieux recycler entre eux-mêmes des idées archaïques et dépassées, ils se bousculent pour aller dans toutes les foires touristiques et ainsi profiter du ‘wining, dining et photo-shooting’. Et tout le monde semble sortir de ces réunions inutiles, excité par le côté glamour du tourisme sans se poser les bonnes questions sur l’avenir de ce pilier important de notre économie.
gamme, une stratégie de diversification des marchés plutôt boiteuse car elle ignore les cultures et les nouvelles attentes, un marché à fort potentiel comme la Chine qui tourne le dos au tourisme mauricien, une dépense moyenne par touriste qui frise le ridicule pour une destination qui se croit haut de gamme, le manque de ‘market intelligence’, le manque d’innovation des opérateurs privés dans leurs offres et dans leur commercialisation, la présentation à haut risque de Maurice comme destination ‘All-Inclusive’, l’amateurisme foudroyant des responsables du tourisme mauricien, y compris à la MTPA, le manque de leadership éclairé pour ce secteur au profit d’une politique ouverte de copinage, le silence complice et retentissant des grands acteurs du tourisme mauricien par rapport à une situation actuelle où le secteur est lourdement endetté. Alors qu’on se plaît à annoncer tambour battant la hausse dans les arrivées touristiques, on fait l’impasse sur les dépenses moyennes par visiteur par jour, chiffre qui se situe autour de 120 euros, toutes dépenses comprises. Mêmes les Mauriciens qui vont à l’hôtel y dépensent bien plus par jour. Sans compter que l’emploi direct dans le secteur stagne depuis des années et les Mauriciens sont obligés de chercher de l’emploi ailleurs avec pour résultat direct, une dégradation plus qu’inquiétante de la qualité de service, qui était jadis notre plus grande force. Aujourd’hui la qualité de service fait partie de notre faiblesse. La situation dans le tourisme ne donne aucun signe d’amélioration dans un avenir proche, si ce n’est plutôt le contraire, à un moment où notre ligne aérienne nationale vient y ajouter son grain de sel en piquant du nez avec arrogance.
«...tout le monde ici semble sortir de ces réunions inutiles, excité par le côté glamour du tourisme sans se poser les bonnes questions...»
Manque de leadership éclairé D’autre part, de nombreuses raisons expliquent, à mon avis, cette perte de vitesse du tourisme mauricien. Notamment, la situation économique et sociale en Europe, le changement même qui s’opère dans le profil des visiteurs, surtout européens, à la recherche des facilités et services plutôt moyens et bas de
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