Oasis, un nouveau mode de vie

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KAIZEN

construire un autre monde … pas à pas

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Numérol spécia

OASIS UN NOUVEAU MODE DE VIE

OASIS UN NOUVEAU MODE DE VIE AUTONOMIE, PARTAGE et CONVIVIALITÉ

AUTONOMIE, PARTAGE et CONVIVIALITÉ

Aux quatre coins de la France, des femmes et des hommes imaginent et construisent depuis des années des lieux de vie différents : écohameaux, écoquartiers, habitats groupés, etc. KAIZEN • NUMÉRO SPÉCIAL

Appelons-les oasis. Ils sont, à leur échelle, la maquette d’une société plus écologique et plus citoyenne. Nous proposons un ouvrage de référence, inspiré par Pierre Rabhi, qui présente 100 oasis. L’objectif est de donner des clefs aux citoyens et aux élus pour réimaginer nos territoires, bâtir ensemble des oasis à leur image et créer des espaces de vivre-ensemble.

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présente 100 LIEUX PRÉFACE DE PIERRE RABHI

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PRÉFACE DE PIERRE RABHI Propos retranscrits par Claire Eggermont

Tchouang-Tseu (IVe s. av. J.-C.), dissertait déjà sur la question de la densité idéale des êtres humains, sous-entendue une convivialité positive pour éviter les conflits préjudiciables à la cohésion et à la cohérence de la communauté. Nul ne peut aujourd’hui ignorer que la prospérité du monde occidental s’est bâtie sur le pillage de la planète et des peuples du Sud, avec la complicité cupide des États censés les protéger. Une minorité accapare les quatre cinquièmes des ressources du patrimoine du genre humain. Tous ces déséquilibres actuels et les menaces qu’ils représentent pour l’avenir de l’espèce humaine sont révélés et exacerbés. Il ne nous reste plus qu’à espérer que les leçons tirées de la récession actuelle puissent nourrir l’imagination d’une société nouvelle. Il est à noter que cette récession est loin d’affecter l’infime minorité à l’extrême pointe de la pyramide sociale, celle de l’avoir et du pouvoir. Les oasis préparent le futur L’ethnologie nous apprend que l’être humain a, par nature, un caractère clanique. De tout temps, les individus se sont réunis pour vivre en collectivité. Chaque corps social assurait son autonomie et veillait à ne pas outrepasser les limites dictées par la capacité du milieu à subvenir à ses besoins vitaux et par la nature humaine qui savait d’instinct qu’au-delà d’un certain seuil de densité, la cohésion du groupe était menacée. Quand le clan devenait trop important, une partie de ses membres essaimait, comme le font les abeilles. En tant que membre et cellule du groupe social, chaque individu avait une fonction précise et reconnue. Dans La République, Platon réfléchissait déjà à la cité idéale et affirmait qu’elle se devait d’être limitée, afin de maintenir l’harmonie avec le milieu, tout autant que l’harmonie du groupe. Il semble qu’un philosophe chinois,

En 1995, insurgé contre la civilisation hors-sol, sa dissipation des ressources naturelles et son aliénation de l’être humain, j’ai lancé le mouvement des Oasis en tous lieux, afin d’encourager la création de lieux de vie solidaires et écologiques. Depuis, la problématique n’a fait que s’accentuer. Notre société a érigé un système fragmenté, individualiste et générateur de dépendance, dans lequel ceux qui n’ont pas de moyens sont oblitérés socialement. Ils tombent alors dans l’indigence et sont pris en charge par des institutions, qui sont loin de pouvoir pallier le déficit d’une véritable solidarité sensible. Au sein de cette société déshumanisée, on peut se sentir aussi bien étranger dans sa propre famille que seul au milieu de la densité urbaine. Les individus se retrouvent agglomérés sans être en lien.

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l’énergie : le concept des oasis en fait partie. Face à ce monde en délitement qui m’apparaît tel un grand désert social, nous sommes de plus en plus nombreux à nous réjouir de ces initiatives qui révèlent par exemple certains pays de l’Union européenne. Des oasis de vie se multiplient, répondant à des besoins émergeant de combler par nous-mêmes nos nécessités vitales, de nous relier à nos semblables et à la nature, de retrouver le sens de la vie, la joie d’être en vie, pour ne plus se demander s’il existe une vie avant la mort. Ainsi, tandis que la politique continue à faire de l’acharnement thérapeutique sur un système moribond, des milliers de créatifs s’affairent à construire les alternatives sur lesquelles le futur pourra s’appuyer. Que ce soit en matière d’agriculture vivrière, de sobriété énergétique, d’écoconstruction, de mutualisation et d’échange de biens et de services, de convivialité et d’entraide, d’éducation alternative abolissant la compétitivité pour la solidarité, ces lieux de vie ou de transmission expérimentent de nouvelles manières d’être et d’agir afin de retrouver le respect et l’indispensable coopération avec la vie. Comme nous l’avons mis en évidence avec Jean-Marie Pelt dans notre livre Le Monde a-t-il un sens ? 1 , la coopération et l’associativité sont deux lois fondamentales du vivant. Aucun élément ne roule pour lui-même. Tous les éléments constitutifs de la nature entrent dans le cycle du donner et du recevoir pour la pérennité et le renforcement du tout. Avoir cru pouvoir s’extraire de cette logique du vivant fut une dangereuse illusion. Chercher des moyens de construire un vivre-ensemble harmonieux et respectueux de la Terre à laquelle nous devons la vie est la seule voie possible pour demain. En plein désert, l’oasis est cet îlot vivant que l’être humain a su faire fleurir de ses mains en recréant une synergie au sein des différents maillons de l’écosystème – végétal, ani-

Ce n’est pas parce qu’il y a masse qu’il y a cohésion ; c’est le contraire qui se produit. Quand je circule en ville, j’ai la sensation de participer au grouillement et d’être un exclu anonyme parmi mes semblables. Il est paradoxal que, dans ce monde dit moderne, la prolifération des outils de communication les plus sophistiqués censés favoriser la relation ne fait que l’amoindrir. L’accès facilité à l’autre par la technologie dispense de la relation naturelle et sensible que la proximité quasiment charnelle a toujours suscitée, pour le meilleur ou le moins bon ! Avec le chômage augmentant et la dette atteignant des sommets inégalés, force est de constater que la logique d’une croissance indéfinie comme solution à tous les problèmes touche à sa fin : un nombre grandissant d’individus sont rendus chaque jour orphelins par un système qui ne peut plus les materner ni les paterner. La logique du pompier pyromane touche à sa fin. Un champ nouveau des innovations salutaires s’ouvre pour ceux qui en ont la détermination et

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SOMMAIRE Édito • p. 3 Présentation des auteurs • p. 4 Préface de Pierre Rabhi • p. 6 Qu’est-ce qu’une oasis ? • p. 12 Lexique • p. 13 Quelques-uns des avantages de l’habitat groupé et participatif • p. 14 Les formes juridiques • p. 16 Comment les maires peuvent-ils soutenir la création d’oasis ? • p. 18

25 oasis du nord-est • p. 22 Gouvernance : des outils pour garder l’équilibre • p. 48 25 oasis du sud-est • p. 50 Le financement, la clef de tout projet • p. 76 25 oasis du sud-ouest • p. 78 Relations avec l’extérieur : loin du camp retranché, un groupe ouvert, actif et accueillant • p. 104 25 oasis du nord-ouest • p. 106 Succession : réfléchir aux départs et aux arrivées • p. 132 Ressources • p. 134

25 oasis du sud-est • p. 50

25 oasis du nord-est • p. 22 1 Écolline • p. 24

26 Le Village vertical • p. 52

2 Mosaïk / 3 Vergers vivants • p. 30

27 Habiterre / 28 Changement de Cap • p. 58

4 La Maison des Babayagas / 5 Greenobyl • p. 31

29 Habitat participatif de Croix Haute / 30 Institut Karma Ling • p. 59

6 Couleur d’orange / 7 La Croix vosgienne • p. 32

31 Le Vieil Audon / 32 Oasis de Serendip • p. 60

8 Saint-Gall / 9 Le Jardin d’Elsee • p. 33

33 Buenas ondas / 34 Fontaine de l’Aube • p. 61

10 Le Lavoir du Buisson Saint-Louis • p. 34

35 L’Arche de Saint-Antoine • p. 62

11 Taizé • p. 36

36 Le Hameau des Buis • p. 64

12 Écossigny / 13 Corps de ferme et bon voisinage • p. 38

37 Bellecombe / 38 Écohameau du Claux • p. 66

14 La Veuglotte / 15 Terre du Ciel • p. 39

39 Foyer Marie-Jean / 40 Les Amanins • p. 67

16 Bouche à oreille / 17 Anagram • p. 40

41 Monastère de Solan / 42 Tilia & Compagnie • p. 68

18 Moulin du Petit pont / 19 Lentillères • p. 41

43 La Bariole / 44 École de la Nature et des Savoirs • p. 69

20 Éco-logis Strasbourg Neudorf • p. 42

45 Le Château partagé • p. 70

21 Arbracoop • p. 44

46 Éourres • p. 72

22 L’Îlot des Combes / 23 Boult-aux-Bois • p. 46

47 Terre vivante / 48 Ferme du lien • p. 74

24 Pré aux fleurs / 25 Le 56 • p. 47

49 Écoravie / 50 Écodomaine de Vailhauquès • p. 75

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25 oasis du sud-ouest • p. 78

25 oasis du nord-ouest • p. 106

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51 Écohameau d’Andral • p. 80

76 Les z’écobâtisseurs • p. 108

52 Village des Pruniers / 53 Interval • p. 86

77 La Maison autonome / 78 Les Voisins Terre Pelle • p. 114

54 Oasis La Source / 55 Moulin de Busseix • p. 87

79 Le Grand chemin / 80 Le Centre Amma -

56 Ferme de La Tournerie / 57 Abbaye Saint-Benoît d’En Calcat • p. 88

81 Le Carnet de bord / 82 Le Clos d’Émile • p. 116

58 Cantercel / 59 Prieuré de Marcevol • p. 89

83 Éco-logis du Berry / 84 La Pâture es Chênes • p. 117

60 Tera • p. 90

85 Les Petits moulins • p.118

61 La Servantie • p. 92

86 Troglobal • p. 120

62 Mange-pommes / 63 L’Ouvert du Canal • p. 94

87 Babel Ouest / 88 La Grée • p. 122

64 Écoquartier du Four à pain / 65 Sainte-Camelle • p. 95

89 Ecocum / 90 Pen an Hoat • p. 123

66 La Maison des aînés / 67 Terre de Choix Terracor • p. 96

91 La Coudraie / 92 Monastère Sainte-Présence • p. 124

68 Abricoop / 69 Sol 6 • p. 97

93 La Gibbeuse / 94 Ékoumène • p. 125

70 Écohameau de Verfeil-sur-Seye • p. 98

95 Oasis des 7 cercles • p. 126

71 Village Emmaüs Lescar-Pau • p. 100

96 Le Pré aux graines • p. 128

72 La Semblada / 73 H’Nord • p. 102

97 La Pelousière / 98 Les Prés • p. 130

74 Hameau de Vispens / 75 Alter-Habitat Lislois • p. 103

99 La Petite maison /

Ferme du Plessis • p. 115

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Habitat différent • p. 131


LES QUATRE TYPES D’OASIS Qu’est-ce qu’une oasis ?

On distingue quatre types d’oasis :

Dans un système qui prive les communautés humaines du pouvoir de subvenir à leurs besoins par leurs propres moyens, se trouvent des lieux qui vont dans le sens d’une autonomie retrouvée et qui portent des valeurs communes en matière d’agriculture, d’énergie, de gouvernance, de coopération et d’ouverture sur le monde. Ce sont des oasis, des endroits où chacun peut trouver la réponse à ses propres besoins et, plus largement, contribuer à répondre à ceux de son territoire. Une oasis peut se situer en milieu rural ou urbain : écohabitat partagé, écohameau, écoquartier, écovillage, commune engagée dans une transition, monastère ayant une démarche écologique…

• Dans les oasis de vie habitent plusieurs familles. Ce sont des lieux de vie où un collectif expérimente le vivre-ensemble. • Les oasis ressources sont des lieux tournés vers l’accueil qui incarnent les différentes dimensions d’une oasis, mais où n’habite qu’une famille au plus. • Les graines d’oasis aspirent à devenir des oasis ressources ou des oasis de vie. Ce sont des projets déjà lancés, mais qui, soit ne sont pas encore construits, soit n’incarnent pas encore assez les valeurs d’une oasis. • Les écosites sacrés sont des lieux ancrés dans une tradition spirituelle qui trouve dans les fondements de sa démarche les motivations pour incarner avec responsabilité les valeurs de l’écologie et d’un vivre-ensemble fraternel.

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LEXIQUE

La permaculture est une « science du design » qui s’appuie sur des principes qui gouvernent la nature. Elle est particulièrement utile pour concevoir en conscience l’aménagement écologique d’un lieu et maximiser la production de nourriture avec peu d’énergie.

Un écoquartier est un projet d’aménagement urbain écologique porté et géré par une commune qui le finance – tout ou partie. Il suit les principes du développement durable tout en s’adaptant aux caractéristiques de son territoire. Les écovillages, ou écohameaux, sont des lieux de vie en zone rurale qui favorisent l’agriculture biologique, la construction écologique, la production d’énergies renouvelables et une mutualisation des biens et des systèmes de production nécessaires à la vie du lieu.

L’agroécologie est une technique inspirée des lois de la nature. Elle considère que la pratique agricole doit envisager l’ensemble du milieu dans lequel elle s’inscrit avec une véritable écologie, et non pas se cantonner à une technique. La SCI ou société civile immobilière est un contrat par lequel plusieurs personnes mettent en commun un bien immobilier. Les biens dont la SCI est propriétaire ne sont pas la propriété des associés. Ceux-ci sont propriétaires de parts sociales.

Habitat groupé, habitat partagé, cohabitat, habitat participatif : voilà différentes terminologies qui regroupent peu ou prou un même concept. Deux critères le définissent : • un ensemble de bâtiments souvent hybrides – mi-maison mi-appartement – constitué de logements privatifs et de parties communes ; • une volonté collective de construire et de gérer le lieu.

La SCIA ou société civile immobilière d’attribution a pour vocation « l’acquisition ou la construction d’un ensemble immobilier, en vue de sa division par fractions, destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance ». L’objet d’une telle société comprend également la gestion et l’entretien des immeubles jusqu’à la mise en place d’une organisation différente résultant de la dissolution de la SCIA. Cette dissolution intervient par un acte de partage, généralement lorsque la construction est achevée. Dès lors la SCI laisse place au statut de la copropriété.

Une ZAC ou zone d’aménagement concerté est une zone à l’intérieur de laquelle une entité publique réalise l’aménagement et l’équipement de terrains. Un primo-accédant est une personne qui réalise un premier achat immobilier ou qui n’a pas été propriétaire de sa résidence principale durant les deux dernières années.

La SAS, ou société par actions simplifiée, est une société commerciale offrant aux actionnaires une grande liberté d’organisation, définie par des statuts.

Le plan de masse est obligatoire afin d’obtenir un permis de construire. Il présente l’emplacement du projet de construction par rapport à son voisinage immédiat et indique les limites et l’orientation du terrain, l’implantation et la hauteur de la construction, le tracé des voies de desserte et des raccordements.

La S3C ou SCCC – société civile coopérative de construction – a pour objet la construction d’un ou plusieurs immeubles ou maisons en vue de leur division par lots et destinés à être vendus aux associés. Les logements sont vendus à moindre coût à leurs membres du fait de l’absence de marge bénéficiaire dans le montage financier.

L’architecture bioclimatique utilise les éléments favorables du climat du lieu d’implantation afin d’en tirer un habitat au confort optimal et au coût énergétique le plus réduit possible, dans le respect de l’environnement. L’objectif principal est de réguler la température ambiante de manière la plus naturelle possible. Le maître d’œuvre conçoit les plans, organise, supervise, coordonne les différentes personnes qui travaillent sur un projet. Il est choisi par le maître d’ouvrage, qui est une personne physique ou morale commanditaire du projet.

Une SCIC ou société coopérative d’intérêt collectif est une coopérative de participation qui prend la forme d’une société anonyme ou d’une SARL à but non lucratif. Elle associe obligatoirement autour d’un projet des salariés, des bénéficiaires – clients, usagers, riverains, fournisseurs, etc. – et des contributeurs – associations, collectivités, sociétés, bénévoles, etc. – pour produire des biens ou des services d’intérêt collectif au profit d’un territoire ou d’une filière d’activités.

Une HLM ou habitation à loyer modéré est destinée aux personnes physiques ayant des ressources modestes et est construite grâce à une aide financière de l’État.

Une Scop ou société coopérative et participative est une société de type SARL, SAS ou SA, dont les associés majoritaires sont les salariés.

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OASIS DE VIE >> SAINT-DIÉ-DES-VOSGES (88) >> CRÉATION 2012 >> HABITANTS 18 >> CONTACT ecolline.over-blog.com

JOURS DE RESSOURCEMENT À ÉCOLLINE Après des années d’autoconstruction et de chantiers participatifs, les occupants de cet écohabitat goûtent au plaisir de leur nouvelle vie en communauté. À l’entrée d’Écolline, les places de stationnement du parking collectif sont figurées par de petits cailloux blancs. En progressant sur le chemin d’accès piéton de cet étonnant écohabitat groupé perché sur les hauteurs de Saint-Dié-des-Vosges, on voit émerger les panneaux solaires et les bardages non traités. Les dix maisons basse consommation de ce projet lancé en 2008 sont sorties de terre en 2012. Toutes sont occupées, à l’exception de deux dans l’attente de finitions : végétalisation des toitures, enduits, etc. Elles sont aménagées en deux « groupes » avec chacune leur jardin privatif : à une première bande de six maisons mitoyennes et un local technique s’ajoute une seconde bande de quatre maisons un peu plus en hauteur. Un enrochement d’imposants blocs de grès rose, une roche emblématique des Vosges, a été édifié en bordure du chemin. Il retient le talus d’une placette qui assure une continuité entre les deux groupes de logements. Nous rencontrons Christophe, dit Tof, Stéphanie, Florence et Bernadette dans la maison ronde autoconstruite par Anne Burgeot, cheville ouvrière de ce projet et l’une des premières occupantes des lieux. Cette femme passionnée et énergique a également bâti la maison de sa sœur handicapée, Catherine, mitoyenne à la sienne. Autour de la table, les Écolliniens évoquent leur besoin de « se poser » après des années intenses de chantier. Copropriété de 1,5 hectare Mais ils parlent aussi de leur désir d’avancer sur l’aménagement des espaces extérieurs qui portent encore les traces des années de travaux : mini-pelleteuse, véhicule utilitaire et blocs de pierre à l’entrée du site, serres de stockage de matériaux derrière les maisons, etc. Pas évident lorsqu’on sait que les parties communes représentent les deux tiers de la surface de cette copropriété de 1,5 hectare. Enherbé et bordé d’arbres, ce vaste espace

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OASIS DE VIE >> ÉCOLLINE

Les dix maisons basse consommation de ce projet lancé en 2008 sont sorties de terre en 2012.

collectif devrait faire l’objet dans les années à venir d’un aménagement en permaculture. « Lors de nos réunions mensuelles, le temps d’évoquer les travaux en cours, nous avons à peine l’occasion de parler de permaculture », regrette Florence. « Il y a eu quelques réunions de travail autour de la maison commune… », remarque Tof, qui profite des week-ends pour achever « à [s]on rythme » sa maison. Pour le moment, l’espace partagé est constitué d’une buanderie, d’une chaufferie, d’une cave, de quelques îlots cultivés en permaculture et de deux grandes serres situées à l’entrée. L’une sert à faire lever les semis et pousser les tomates, l’autre à accueillir les visiteurs lors de journées portes ouvertes ou autres événements. Pour concrétiser la construction d’une maison commune – de 50 à 100 m² –, outre le temps, les ressources financières font également défaut. Mais les Écolliniens sont en recherche de solutions. « À Écolline, tout est possible », c’est leur devise…

UN DOSSIER VITE ET BIEN FICELÉ Le montage du dossier juridique et financier d’Écolline n’a pris qu’une petite année. Les résidents admettent qu’ils ont eu de la chance, beaucoup de chance. Pour commencer, l’opportunité d’acquérir un terrain – 1,5 hectare pour 180 000 euros – a précédé la formation du groupe d’autopromotion. En trois semaines, par l’entremise du bureau d’études thermiques Terranergie, le noyau dur du projet a été réuni : Anne Burgeot et son fils Rafael, 18 ans, Patricia Baret et ses deux filles, ainsi que Florence Salvaire et son conjoint. Ces trois locomotives ont travaillé d’arrache-pied pour monter le dossier. Et elles n’ont eu aucune difficulté à agréger autour d’elles un groupe d’habitants. Tout d’abord, il y a eu la rencontre providentielle de Bernadette : cette Strasbourgeoise avait déjà fédéré trois autres familles. D’autres ont rejoint le groupe grâce à une annonce parue dans la revue alternative Passerelle Éco. Coopératif, le propriétaire a accepté de diviser son terrain en plusieurs lots pour permettre un achat en copropriété. Ainsi, chaque candidat a pu acquérir sa surface privative et des millièmes de surface collective. « Cela nous a évité de monter une SCIA pour acheter le terrain. En effet, cela aurait impliqué de retourner chez le notaire pour la dissoudre une fois les constructions achevées afin de passer au statut de copropriété », souligne Anne. Gain de temps supplémentaire, les Écolliniens ont rapidement déniché un cabinet d’architecture – Ascendense architecture – qui partageait leurs valeurs. Enfin, et c’est loin d’être un détail, le notaire, tout comme les services urbanistiques de la ville, ont prêté main-forte à ces pionniers.

Monsieur Machines Que tout est possible, ils l’ont prouvé en laissant une large place à l’autoconstruction, assumant les retards de chantier et les dépassements budgétaires. « Le cabinet d’architectes et le bureau d’études thermiques nous avaient incités à conserver des structures semblables et à personnaliser plutôt l’aménagement intérieur. Mais chacun a souhaité une maison qui lui corresponde. Du coup, nous avons beaucoup travaillé au début », reconnaît Florence. Par ailleurs, la mise en œuvre de l’étanchéité à l’air, essentielle dans une maison basse consommation, a pris du temps. Enfin, les maisons ont été construites à des altimétries différentes. Le résultat est plus doux visuel-

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OASIS DE VIE >> STRASBOURG (67) >> CRÉATION 2010 >> HABITANTS 30 >> CONTACT www.ecoquartier-strasbourg.net

« À L’ÉCO-LOGIS STRASBOURG NEUDORF, NOUS SOMMES VRAIMENT PRÉSENTS LES UNS POUR LES AUTRES. » Claire Lauffenburger et Sophie Desrues racontent cinq ans de bonheur - et six de labeur - dans l’Éco-logis, le premier habitat participatif à avoir associé ossature bois, autopromotion et basse consommation. Comment cet immeuble de onze appartements, proche du centre-ville et entouré de verdure, est-il sorti de terre ? Sophie Desrues À l’origine, on trouve Zélia Simon et Serge Asencio, tous deux membres d’un système d’échange local [SEL]. Ils rêvaient d’aménager un écoquartier sur l’îlot Lombardie, à l’entrée du quartier de Neudorf. Cet îlot faisait l’objet d’un projet de renouvellement urbain, et ils avaient en tête l’exemple du quartier Vauban de Fribourg-en-Brisgau, à 80 kilomètres d’ici. Ils ont créé l’association Éco-quartier Strasbourg. Mais, nous étions en 2000, le concept d’écoquartier n’existait pas encore… Alors, ils ont lancé un éco-immeuble, qui deviendra l’Écologis ! Aujourd’hui, le projet initial de Zélia et Serge n’est pas loin de devenir réalité. Un habitat participatif, Melting Potes, est en phase d’achèvement juste en face. De l’autre côté, une maison citoyenne va bientôt voir le jour et, derrière elle, un terrain en autopromotion devrait être aménagé par le Baugroupe [nom franco-allemand à l’image de la composition du collectif]. Ces trois projets sont ou ont été accompagnés par l’association Éco-quartier Strasbourg.

Rejoindre un projet d’habitat participatif, était-ce une évidence pour vous ? Claire Lauffenburger J’ai rejoint l’association en 2004. La naissance de ma fille m’avait sensibilisée aux enjeux d’un développement plus durable. J’avais participé à la création d’une crèche parentale et porté avec des amis un projet d’habitat groupé qui n’a pas abouti. Sur le plan de l’organisation, l’arrivée d’un ingénieur, Bruno Parasote, au sein de l’association Éco-quartier Strasbourg, a été très béné-

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OASIS DE VIE >> ÉCO-LOGIS STRASBOURG NEUDORF

fique. Il a professionnalisé notre démarche et permis le lancement concret du projet Éco-logis. Aujourd’hui, j’estime que nos objectifs initiaux ont été atteints. Sur le plan écologique, la chaudière à gaz alimente un immeuble de trois étages pour une puissance équivalente à celle d’une maison individuelle mal isolée ! Et les espaces partagés sont nombreux : buanderie, salle commune, chambre d’ami, jardins, etc. La mixité générationnelle a également été atteinte. Pas la mixité sociale, car nous ne sommes pas parvenus à travailler avec un bailleur social. Sophie Avec mon mari, nous sommes parmi les derniers à avoir rejoint le projet. Au départ, nous étions davantage intéressés par la dimension « éco-immeuble ». Nous avions moins compris sa dimension participative. Au final, c’est ce dernier aspect que nous apprécions le plus. Comme nous sommes loin de nos régions d’origine, les liens d’amitié noués avec les voisins nous donnent le sentiment d’être un peu en famille. L’obstacle financier vous a contraints à revoir certaines ambitions à la baisse… Claire L’ancienne municipalité a tout d’abord refusé notre statut, une indivision où chaque occupant était co-acheteur du terrain. Dans l’urgence, nous avons dû nous constituer en SCIA, ce qui a fait décoller la TVA de 5,5 à 19,6 %. Le projet prenant du temps, le prix du terrain a augmenté… Pour absorber le surcoût, nous avons dû abaisser la hauteur sous plafond, renoncer à une VMC double flux, abandonner le triple vitrage et supprimer le F1 que nous réservions à une personne en difficulté sociale. Enfin, une personne a dû quitter le projet. En quoi l’Éco-logis génère-t-il du vivre-ensemble ? Claire Le lieu favorise une vie plus riche en matière de relationnel. Au démarrage, nous étions plusieurs célibataires engagés dans le projet. Quand on vit seul, la convivialité, c’est vital ! Aujourd’hui, nous sommes vraiment présents les uns pour les autres pour les tracas du quotidien, comme pour des moments plus essentiels. Ainsi, nous avons accompagné une voisine, gravement malade, jusque dans ses derniers instants. Pour moi, l’être humain est un être social qui a besoin d’être en relation, y compris avec des personnes qui n’ont pas les mêmes opinions. Après six ans de travaux et cinq ans d’occupation, je reste emballée. Je regrette simplement que le vivre-ensemble ne soit pas plus harmonieux. Malgré l’intervention d’un médiateur, deux occupants ne se parlent plus. Et cela est difficile pour plusieurs d’entre nous.

En congé parental, Sophie estime faire partie des privilégiés de l’Éco-logis, car elle y passe beaucoup de temps.

Sophie Pour Théophane, mon garçon d’un an, c’est essentiel de voir d’autres petits enfants. Entre parents, on se donne de temps en temps des vêtements, des jeux, etc. J’estime faire partie des personnes privilégiées dans cet immeuble, car j’y passe beaucoup de temps depuis que je suis en congé parental. Au 2e étage, on se voit beaucoup. Cet étage est un peu comme la tranche de jambon au milieu du sandwich : c’est le meilleur !

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OASIS DE VIE >> VILLEURBANNE (69) >> CRÉATION 2013 >> HABITANTS 23 >> CONTACT WWW.VILLAGE-VERTICAL.ORG

LE VILLAGE VERTICAL, LES AVENTURIERS DE LA COOPÉRATIVE RETROUVÉE Depuis 2013, la France compte un nouveau village. Un Village vertical à l’organisation horizontale. Mais ce qui passera peut-être pour l’acte fondateur du renouveau des coopératives d’habitants n’a rien d’une querelle de clocher. Pour comprendre ce « programme immobilier » atypique, levons le voile, avec l’aide de ses « Villageois », sur un projet qui a débuté en 2005. changé, à part les voitures, de plus en plus envahissantes. » Situé au 4e étage, leur appartement offre une vue d’ensemble sur la ZAC des Maisons Neuves, dont le Village vertical fait partie. D’un côté, les membres du Village recherchaient un terrain pour leur projet ; de l’autre, la Métropole de Lyon souhaitait promouvoir une opération d’habitat participatif. Il faudra presque quatre années « d’efforts » et de négociations aux deux parties pour s’accorder. Un consensus a été trouvé en 2008 autour d’une parcelle orientée au sud, condition nécessaire à la performance énergétique du bâtiment. Inconvénient à être au cœur d’une opération d’aménagement d’environ quatre cents logements, le Village vertical aura passé ses premières années entouré d’un chantier, toujours en cours. Mais cette position convient bien aux Villageois, qui tenaient à inscrire leur projet dans un quartier populaire. Les expressions « quartier populaire » et « logement social ou très social » reviennent régulièrement dans la bouche d’Antoine, pour qui le Village vertical montre qu’un autre modèle économique est possible en matière de logement. Avec sa compagne Cécile, ils sont à l’initiative du projet et le seul foyer d’origine encore présent dans le groupe. « L’idée d’initier, de financer et de concevoir un immeuble écologique pour le gérer de manière démocratique dans le cadre de la propriété publique est née il y a une dizaine d’années, quand nous attendions notre premier enfant. Plutôt

Olivier vit au Village vertical avec Ximena et leurs deux enfants depuis avril 2015. Il a grandi dans les immeubles voisins, de petites « barres » des années 1960. Il apprécie toujours ce quartier de La Ferrandière, à une dizaine de minutes du centre de Villeurbanne, tout proche des 3e et 8e arrondissements de Lyon. « Ça a assez peu

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OASIS DE VIE >> LE VILLAGE VERTICAL

que de se retrouver en concurrence sur le marché de l’immobilier, nous avons regroupé différents ménages dans nos réseaux. L’habitat écologique ne peut pas être réservé aux riches. » Pour Antoine et Cécile, le projet sera collectif, écologique, urbain – pour limiter l’usage de la voiture –, mais il sera surtout coopératif. Dès les débuts, ils ont la conviction que la coopérative d’habitants est la seule forme juridique qui puisse garantir la non-spéculation et permette d’enrayer la flambée des prix de l’immobilier. À condition que le modèle se généralise. Court-circuiter la spéculation immobilière Malheureusement, ce statut juridique, qui avait court jusque dans les années 1970 en France, n’est plus reconnu par la loi (lire l’entretien avec Valérie Morel page 56). La vague d’individualisme des années 1980 et 1990 a fait table rase des utopies collectives quand, dans la même période, d’autres pays comme le Canada ou la Suisse encourageaient l’habitat coopératif. Ailleurs, cette troisième voie, entre habitat privé et logement social, peut représenter une part importante des logements sur un périmètre donné : 20 % à Zurich – 8 % sur l’ensemble de la Suisse – ou 40 % à Oslo – 8 % au total en Norvège. Habiter en coopérative, c’est choisir de ne pas être propriétaire de son logement. C’est poser un cadre juridique qui privilégie l’usage sur l’avoir. Pour intégrer la coopérative qui est propriétaire du bien, il faut d’abord acquérir des parts sociales, ce qui nécessite d’avoir un apport ou une capacité à emprunter. L’usage se paie ensuite sous la forme de charges mensuelles. Elles se composent d’un loyer, encadré au titre du logement social, qui permet à la coopérative de rembourser son emprunt, et de provisions pour anticiper les grosses dépenses et les inévitables travaux à venir. Ces charges comprennent également une épargne sous la forme de parts acquisitives – environ 20 % du montant des charges. Dans le cas du Village vertical, cette épargne donnera droit à une rente à la fin du crédit d’une durée de quarante ans. Ce qui est aujourd’hui une situation bien réelle n’aurait certainement pas vu le jour sans la rencontre des membres du groupe de l’époque avec Habicoop. Cette association a été créée en 2005 avec l’objectif de relancer en France l’habitat coopératif tel que ses membres fondateurs ont pu le voir à l’occasion de voyages d’études à l’étranger. Avec le Village vertical, Habicoop trouve son projet pilote et le groupe un accompagnement personnalisé. Un partenariat

Le Village vertical est la preuve que l’on peut aller loin grâce à l’intelligence collective.

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OASIS DE VIE >> DIE (26) >> CRÉATION 2011 >> HABITANTS 31 >> CONTACT www.habiterre.org

HABITERRE, POUR UN VIVRE-ENSEMBLE HARMONIEUX AVEC SES VOISINS ET LA NATURE « Nous ne faisons que recréer ce qui existait dans le village, où l’on pouvait traverser la rue et aller demander des œufs à son voisin… » la maison commune offre un espace de vie central permettant aux habitants de se retrouver le temps d’un repas, d’une fête, d’un atelier créatif, mais aussi aux voisins proches et aux habitants du Diois d’expérimenter une dynamique territoriale collective – soirées-débats, théâtre, fêtes… L’ensemble abrite onze familles de tous horizons. Les principes de convivialité et de solidarité sont inscrits dans les fondements du projet au même titre que l’écologie. « Des personnes qui, selon les critères des banques, n’auraient pu acheter, ont pu s’installer, car c’est une “propriété collective », souligne Marc Bodinier, un des piliers du projet. Les habitants sont les usagers de ce bien à la fois pour les parties privatives, les parties collectives – buanderie, jardins, atelier, garage… – et la maison commune qui a été financée par de l’épargne solidaire, mais personne n’est propriétaire, les murs appartiennent à la SCI. L’originalité d’Habiterre réside assurément dans ses valeurs d’humanité et de solidarité, mais également dans sa dimension d’échange avec les habitants de la vallée.

Face aux contreforts majestueux du Vercors, cinq maisons construites dans une grande exigence environnementale se sont élevées progressivement depuis 2011. Parmi elles,

OASIS RESSOURCE >> ROSIÈRES (07) >> CRÉATION 2013 >> SALARIÉS 8 >> CONTACT www.changedecap.fr

CHANGEMENT DE CAP, POUR HISSER LA GRAND-VOILE ET (RE)VIVRE Une association indépendante qui aide à se reconstruire. Trois questions à Sylvain Auger, cofondateur.

rupture de se reconstruire et de reconquérir leur souveraineté financière. Changement de Cap a été créé sans subventions publiques, sans contrat aidé et sans crédits ! Nos parcours atypiques sont notre richesse. Nous n’avons pas peur de prendre des risques et d’avancer, nous ne voulons pas réparer le bateau avec des pansements, nous voulons hisser les voiles pour changer radicalement de direction.

Comment a débuté le projet Changement de Cap ? Avec ma compagne Sophie, nous avons croisé de nombreux projets alternatifs lors de nos voyages en Europe et en Amérique du Sud. En France, parmi les nouvelles utopies, la branche populaire ne nous semblait pas représentée. Avec Florian Peter, alors compagnon d’Emmaüs, nous avons monté cette recyclerie dans l’idée de créer une activité économique tout en faisant de l’écologie et du social. Ici, nous donnons une seconde vie aux objets… et aux humains.

Et côté jardin ? Avec l’argent gagné, nous espérons acheter une ferme d’accueil qui puisse devenir lieu de vie et d’activités, des graines et des terrains pour nous permettre de retrouver également notre souveraineté alimentaire.

En quoi consiste votre projet, côté cour ? La valorisation des déchets permet à des personnes en

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GRAINE D’OASIS >> SAINT-HIPPOLYTE-DU-FORT (30) >> EN COURS >> CONTACT www.croixhaute.org

HABITAT PARTICIPATIF DE CROIX HAUTE, UN PROJET DE VIVRE-ENSEMBLE La force des utopies et du collectif au pied des Cévennes. Cette grande bâtisse en pierre située au cœur du quartier de Croix Haute s’ouvre d’un côté sur la rue et de l’autre sur un jardin ; une position qui résume ce projet d’habitat à mi-chemin entre l’urbain et le rural. « Que faire de ce domaine reçu en héritage ? », se demandent Lise et Yves Bordarier. L’idée retenue est celle d’un habitat participatif. Le collectif informel qui se monte est accompagné dès ses débuts par Stefan Singer, un professionnel qui apporte la structuration nécessaire à l’avancement du projet : création d’une association, d’un comité de pilotage et des groupes de travail, puis levée de fonds au « chapeau », dans lequel

chacun participe selon ses moyens pour financer la conception du permis d’aménager. Le projet est de construire une trentaine de logements écologiques et d’agencer le bâti en maison commune pour favoriser les échanges avec d’autres habitants du quartier. Le collectif, qui a appris à s’organiser et à traverser les épreuves dans le respect des différences de chacun, travaille désormais à établir de bonnes relations avec les élus locaux, de façon à inscrire ce projet dans une dimension territoriale.

ÉCOSITE SACRÉ >> ARVILLARD (73) >> CRÉATION 1979 >> HABITANTS 30 >> CONTACT www.pleinepresence.net

L’INSTITUT KARMA LING CONJUGUE ÉCOLOGIE INTÉRIEURE ET EXTÉRIEURE Une vision à la fois ancrée dans la tradition et ouverte sur la modernité qui propose un mode de vie précurseur. La communauté Rimay, composée de pratiquants de la tradition du Bouddha et de la méditation laïque, installée depuis une trentaine d’années sur les contreforts du massif de Belledonne et guidée par Denys Rinpoché, illustre la conjugaison réussie entre engagement spirituel et écologique. « L’enseignement du Bouddha contient dans son principe une dimension écologique, car il met l’accent sur la compréhension de l’interdépendance de tous les phénomènes, sur la compassion et la non-violence, dans une approche de l’être humain considéré comme un fil dans l’économie de la nature et non comme le centre de l’univers », explique Denys Rinpoché, directeur de l’Institut. Les programmes proposent des pratiques contemplatives facilitant la découverte d’une relation profonde avec soi-même, les autres et la nature. D’un point de vue pratique, la communauté a opté pour une alimentation végétarienne, biologique et de proximité, produite en partie dans son jardin potager de 3 000 m2. « Partant du principe que la crise actuelle ne pourra se résoudre uniquement par des actions, politiques ou économiques, nous avons à cœur d’expérimenter et de diffuser une approche conjuguant écologie intérieure – par la pratique de la pleine conscience par exemple – et écologie extérieure. »

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OASIS DE VIE >> BERRIAS-ET-CASTELJAU (07) >> CRÉATION 2002 >> HABITANTS 50 >> CONTACT www.la-ferme-des-enfants.com

LE HAMEAU DES BUIS Ce lieu de vie et d’accueil est animé par une cinquantaine d’habitants âgés de 3 à 82 ans. Une vingtaine de logements écologiques et bioclimatiques sont construits autour d’une école, qui est le cœur du projet. Créée par Sophie Rabhi, elle favorise une éducation respectueuse de l’enfant. Elle reçoit soixante-cinq élèves de la maternelle au collège et se compose d’une ferme comprenant un petit élevage – chèvres, poules, cochons, poneys, ânes –, un verger, ainsi que des serres et des potagers maraîchers cultivés en agroécologie.

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OASIS DE VIE >> LE HAMEAU DES BUIS

« Le principal écueil, c’est nous-même ! L’une des raisons d’être de ce projet est un travail important sur la question relationnelle, la gestion émotionnelle. L’idée est que les enfants soient les témoins d’adultes qui trouvent des solutions dans le vivre-ensemble. »

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ÉCOSITE SACRÉ >> THÉNAC (24), LOUBÈS-BERNAC (47), DIEULIVOL (33) ET PUYGUILHEM (24) >> CRÉATION 1982 >> HABITANTS 300 >> CONTACT : www.villagedespruniers.net

LE VILLAGE DES PRUNIERS, UNE COMMUNAUTÉ POUR LA PAIX Dans les quatre hameaux principaux des Pruniers, répartis sur trois départements – Dordogne, Gironde et Lot-et-Garonne –, moines et laïcs cultivent l’harmonie en eux et autour d’eux. « Les moines et les moniales partagent tout et ne possèdent rien, ni voiture, ni portable, ni compte bancaire », explique sœur Consécration d’une voix douce et gaie à la fois. Quelques moines et laïcs cultivent un potager bio appelé Happy Farm, qui fournit les légumes du Hameau du Haut (Thénac). L’eau pluviale des toitures permet d’arroser, mais aussi d’alimenter les douches et les toilettes. Il y a même des toilettes sèches autoconstruites sur le site. Côté écoconstruction, le bâti ancien a été rénové dans un souci écologique et la belle salle de méditation allie le bois et le bambou. « La communauté tient à préserver l’harmonie avec l’ensemble de l’écosystème qui nous entoure », assure Serge, un résident laïque très impliqué dans le jardin et la rénovation. Comment ces projets sont-ils décidés ? « Par les moines et les moniales uniquement, indique Sœur Consécration. Le Conseil prend les décisions au consensus, mais, suivant notre culture orientale, la parole des aînés est très écoutée. » L’ouverture au monde extérieur est un des buts de la communauté. Le Village accueille chaque année 5 000 à

10 000 visiteurs lors de retraites de méditation de pleine conscience autour du maître bouddhiste vietnamien Thich Nhat Hanh.

OASIS DE VIE >> SAINT-PIERRE-DE-FRUGIE (24) >> CRÉATION 2008 >> HABITANTS 18 >> CONTACT www.ecohameau.interval.overblog.com

ÉCOHAMEAU INTERVAL, FRÈRE DE L’ÉCOCENTRE DU PÉRIGORD Cet écohameau a été conçu en lien avec un centre de formation en construction écologique et en permaculture. L’écocentre du Périgord – un lieu d’expérimentation et de formation autour du bâtiment, mais aussi du jardin, de l’eau et du paysage – apporte une aide précieuse aux habitants d’Interval. Sa proximité géographique et relationnelle – plusieurs de ses salariés habitent le hameau – a été un atout pour la construction des maisons et l’aménagement des espaces verts. En plus d’apporter son appui technique, l’écocentre a acheté les matériaux aux prix « artisans » et les a revendus aux autoconstructeurs avec une marge réduite. Bien sûr, les maisons sont écologiques et bioclimatiques ! Toutes intègrent du solaire thermique, la récu-

pération des eaux pluviales, des toilettes sèches, un système de phytoépuration et le chauffage au bois. Les liens restent forts entre les deux lieux. Les chambres des espaces communs du hameau permettent d’accueillir trois jeunes en service civique à l’écocentre. Des maisons construites dans le cadre de formations pratiques ont été vendues à deux familles à des prix abordables. Afin de privilégier la mixité sociale, les habitants de cet écohameau ont permis à trois familles d’être locataires sans devenir sociétaires de la SCI.

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GRAINE D’OASIS >> ARGELOUSE (40) >> EN COURS >> CONTACT www.eco-hameau-argelouse.org

OASIS LA SOURCE, UNE TERRE À PARTAGER Valérie et Florent sont prêts à accueillir des porteurs de projets agricoles pour travailler ensemble. Florent Pomier a débroussaillé les questions administratives et juridiques, et il espère maintenant fonder un écohameau d’agriculteurs. Cet ancien maraîcher et pisciculteur a créé une association et une société civile d’exploitation agricole (SCEA). Ce statut permet de sortir de la spéculation foncière : l’association est actionnaire à 99 % de la SCEA. La maison de 500 m² que Florent avait construite pourrait accueillir d’autres familles ainsi que les bureaux. « Rares sont les possibilités de s’installer sur une terre avec zéro investissement agricole ! On demande juste un apport de

10 000 à 15 000 euros par foyer », précise Valérie Garcia, qui a rejoint le projet en 2013. « Le travail en collectif permet de partager les tâches et de se relayer, insiste Florent. On pourrait travailler trois jours par semaine chacun, pour un salaire suffisant au regard des vrais besoins. Ici, nous mangeons bio et sain pour 70 euros par mois. À plusieurs, on pourrait produire légumes, fruits, fromage, poulets, miel… en mutualisant les outils. Mon credo : travailler moins pour vivre plus. »

OASIS DE VIE >> BUSSEIX (87) >> CRÉATION 2004 >> HABITANTS 18 >> CONTACT www.moulindebusseix.org

PARADIS BUCOLIQUE AU MOULIN DE BUSSEIX Dans leur écohameau créé autour d’un ancien corps de ferme, le petit groupe partage le travail manuel avec des woofers et porteurs de projets. « Nous voulons montrer qu’il est possible de vivre en réduisant son empreinte écologique, en pratiquant la solidarité et l’ouverture vers l’extérieur », résume Alain Dorange, un des fondateurs de l’écohameau du Moulin de Busseix. Question foncier, le Limousin est une région accessible. D’où le choix de cet ancien corps de ferme que les habitants ont rénové. « Pour attirer des jeunes et des familles, on a créé un studio et mis plusieurs logements en location », ajoute-t-il. Côté alimentation, un éleveur de moutons loue 10 hectares à la SCI et deux habitants cultivent un potager pour le hameau. Le groupe achète des produits bio en gros, et chacun vient se servir dans la réserve puis met l’argent dans une boîte, un système qui fonctionne sur la base de la confiance. La nourriture achetée et produite sur place permet de cuisiner des repas partagés tous les midis par les habitants. Souvent, ils sont rejoints par des woofers – vingt-cinq l’an dernier – qui aident au jardinage et autres travaux manuels. Pour prendre les décisions, la communauté a adopté le consensus. « On cultive la confiance, plutôt que de fixer des règles, pour anticiper d’éventuels problèmes », sourit Alain.

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NORDOUEST

OASIS DE VIE >> LOUVIGNY (14) >> CRÉATION 2010 >> HABITANTS 26 >> CONTACT ecozac.louvigny.free.fr

LES Z’ÉCOBÂTISSEURS, L’ART DE LA CONCILIATION Dans la banlieue sud-ouest de Caen, les Z’écobâtisseurs ont réussi, après six ans de conception et de chantier, à créer un habitat agréable pour leurs treize familles. Fin d’après-midi à Louvigny. Côté route, la rangée de maisons mitoyennes de l’habitat groupé Les Z’écobâtisseurs semble silencieuse. Côté jardin, c’est une autre histoire. Sur la pelouse commune, Antonin a installé son P’tit marché bio. Les habitants du quartier sont venus y choisir navets, betteraves, oignons et autres haricots. Panier au bras, quelques-uns discutent devant Le Fournil de Philippe, la boulangerie bio installée sur le site. Depuis deux ans, Philippe Denis, l’un des Z’écobâtisseurs, cuit pains et brioches au levain naturel dans un four à bois qu’il peut voir depuis sa fenêtre. « Le quartier est plutôt résidentiel, explique Christian Delabie, un autre habitant. On a tous vite accepté d’accueillir chaque semaine un maraîcher ainsi que la boulangerie. Cela nous ouvre aux voisins et dynamise la vie sociale. » Depuis 2012, la famille Delabie occupe l’un des treize logements en ossature bois de l’habitat participatif, répartis en deux blocs parallèles de maisons mitoyennes. Chaque maison, de 70 à 120 m², dispose de 60 m² de jardin privatif, d’un espace vert collectif et de potagers partagés. De la baie vitrée du salon lumineux de Christian, on aperçoit des fleurs et des arbustes ondoyants. Là où, dix ans plus tôt, il n’y avait qu’un terrain vague.

En plus de jardins privatifs, les Z’écobâtisseurs disposent de potagers partagés.

trop cher. En 2006, à trois semaines du dépôt du permis de construire, la plupart des familles quittent le bateau. Celles qui restent sont bien décidées à ne pas enterrer leur rêve. Un nouveau groupe se constitue, qui développe davantage une réflexion sur la densité urbaine et se satisfait donc de maisons mitoyennes. L’heureux coup du sort vient alors de Louvigny, une commune de l’agglomération caennaise que l’ancien collectif n’avait pas contactée. La municipalité veut y mettre en place une ÉcoZAC. « Ils nous ont proposé un terrain de 5 000 m2. Nous voulions nous y installer à dix maisons. Ils en ont exigé treize. » En 2007, l’association Les Z’écobâtisseurs naît.

Des débuts difficiles L’idée de l’habitat coopératif naît en 2005. Christian Delabie travaille alors dans l’environnement et souhaite monter un projet avec des collègues : « Nous avons demandé à recevoir un terrain auprès de dix-neuf communes autour de Caen. La seule réponse que nous avons reçue a été négative. » Ils se tournent donc vers un terrain privé. Un couple d’architectes travaille des plans mais, le groupe étant parti sur une idée de maisons individuelles, le devis est beaucoup

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OASIS DE VIE >> LES Z’ÉCOBÂTISSEURS

Ils tiennent à un projet où prime le vivre-ensemble et à une construction écologique (voir encadré) et économique. Aujourd’hui, Damien, 32 ans, est le plus jeune propriétaire de l’équipe. Jacqueline, 82 ans, la doyenne, explique : « Pour garantir une mixité sociale, nous avons fait le projet le plus économe possible. 1 550 euros le mètre carré pour la construction, 1 950 euros le mètre carré avec le terrain et la maison commune. Sinon, les jeunes primo-accédants n’auraient pas pu rester. » Les Z’écobâtisseurs ont des professions et des revenus variés. « Les gens sont très différents, observe Pascal Gourdeau, l’un des habitants. Mais quelque chose nous relie : nous avons quasiment tous un engagement citoyen dans la cité ou un métier d’utilité sociale. »

vie, sinon, on est malheureux, sourit Pascal Gourdeau. Nous sommes des amateurs en autoapprentissage, alors il nous faut du temps. » Le statut juridique, le financement et l’assurabilité de l’opération, le plan de masse, l’architecture à la fois collectiviste et individualiste, la sélection des matériaux… Autant de choix à opérer après de longs débats. A posteriori, Christian Delabie se demande si le collectif n’a pas souffert de réunionite aiguë : « Tous les quinze jours de 18 h 30 à 22 h 30 ; c’était éprouvant, on aurait pu faire moins. » Pascal Gourdeau ne partage pas cet avis : « Il me semble nécessaire de décider tous ensemble. La construction écologique est complexe. Par exemple, j’ai découvert sur la ventilation cinq points de vue aussi valables les uns que les autres. Alors que je pensais qu’à une question donnée, il n’y avait qu’une seule réponse possible... » Pascal convient tout de même qu’après l’installation s’est instaurée une lassitude collective des réunions. Les futurs voisins n’ont pas choisi de démarcher des promoteurs. En 2008, ils se tournent vers la Shéma (Société hérouvillaise d’économie mixte pour l’aménagement), une

Une question, des réponses Trois années pour esquisser le programme, trois autres pour la construction, voilà le temps qu’il a fallu pour que le projet voie le jour. « Quand on se lance dans une aventure comme celle-ci, il faut accepter d’y consacrer un bout de sa

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