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sa voix magnifique, claire et forte, remplit la salle ; il chante avec tant de conviction que nous chantons avec lui. Puis nous rendons visite à Mme Kagan, celle que j’appelle “la grand-mère”. La plupart du temps, Mme Kagan doit rester dans une chaise roulante. Elle nous montre des photos de ses petitsenfants. On les trouve dans toute la pièce : en cadres, en albums et même scotchés sur le mur. La chambre de Mme Schreiber est remplie de souvenirs, des souvenirs qui deviennent vivants quand elle nous raconte des histoires de ses expériences d’il y a si longtemps. Je l’appelle “la dame aux souvenirs”. Après, c’est M. Krull, “l’homme tranquille”. Il n’a pas grandchose à dire ; il se contente d’écouter ce que Grand-Père et moimême lui racontons. Il hoche la tête, sourit et nous demande de revenir le voir la semaine suivante. De fait, c’est ce que chacun nous demande, même la dame qui accueille les visiteurs à l’entrée, derrière son bureau. Chaque semaine, nous revenons, même s’il pleut. Nous allons ensemble rendre visite à nos amis : la cuisinière, le rigolo, le chanteur, la grand-mère, la dame aux souvenirs et l’homme tranquille. Un jour, mon grand-père est tombé gravement malade et dut être hospitalisé. Les médecins étaient pessimistes, ils disaient qu’ils ne savaient pas s’il ne pourrait jamais aller mieux. Chabbat arriva et, dans l’après-midi, arriva l’heure où nous devions rendre visite aux pensionnaires de la maison de retraite. Comment pouvais-je y aller sans mon grand-père ? Puis, je me souvins qu’il avait l’habitude de dire : “Rien ne doit nous empêcher d’accomplir une bonne action” ! Alors je décidai d’y aller tout seul. Tous furent contents de me voir. Cependant, tous étaient aussi
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surpris de ne pas voir mon grand-père. Quand je leur dis qu’il était malade et hospitalisé, ils comprirent pourquoi j’avais l’air si triste. “Tout est dans les mains de D.ieu, me dirent-ils. Agis au mieux et D.ieu fera le reste !”. Puis “la cuisinière” révéla quelques-uns de ses ingrédients secrets ; “le rigolo” me raconta ses dernières plaisanteries ; “le chanteur” entonna une mélodie particulièrement émouvante, rien que pour moi, me dit-il. “La grand-mère” me montra encore d’autres photos de ses derniers petits-enfants ; “la dame aux souvenirs” égrena encore d’autres souvenirs. Quand je me rendis auprès de “l’homme tranquille”, je lui posais plein de questions ; mais il arriva un moment où je n’avais plus de questions, alors je lui racontai ce que j’avais appris à l’école.
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Après tout ce temps passé en leur compagnie, je dis au revoir à tout le monde, même à la dame assise à l’accueil derrière son bureau. “Merci d’être venu, me dit-elle. Transmettez à votre grandpère mes vœux de prompt rétablissement”. Quelques jours plus tard, Grand-père était toujours à l’hôpital. Il n’arrivait plus à manger, il ne pouvait plus s’asseoir même dans son lit et il avait du mal à s’exprimer. Je me retirai au fond de la pièce afin qu’il ne me voit pas pleurer. Ma mère prit ma place à côté du lit et prit la main de son père dans la sienne. La chambre était peu éclairée et calme. Soudain l’infirmière entra et annonça : “Vous avez de la visite !” “Est-ce ici qu’a lieu la réception ?” s’exclama une voix que je connaissais. Je levai la tête et n’en crus pas mes yeux : il y avait là : “le rigolo”, la “cuisinière”, “le chanteur”, “la grand-mère”, “la dame aux souvenirs”, “l’homme tranquille” et même la dame chargée de l’accueil ! “La cuisinière” expliqua à mon grand-père toutes les soupes qu’elle préparerait pour lui dès qu’il irait mieux. D’ailleurs elle lui avait déjà apporté une thermos pleine de délicieuse soupe de poulet. “Soupe de poulet ? S’exclama “le rigolo”. Vous n’y pensez pas ! Ce dont cet homme a besoin, c’est un gros sandwich au saucisson !” Dit “le rigolo” qui ne put s’empêcher d’éclater de rire de sa plaisanterie qui fit rire tous les présents. Il raconta alors d’autres blagues qu’il enfila avec une telle vitesse qu’à la fin, chacun dut utiliser des mouchoirs pour s’essuyer les yeux tellement il les avait fait rire. Ensuite “la grand-mère” montra à mon grand-père une carte
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postale remplie de souhaits de prompte guérison que deux de ses petites-filles lui avaient envoyée. On y voyait des clowns tenant des ballons sur lesquels étaient inscrits les mots “Remettez-vous vite !” avec toutes sortes de couleurs. Le chanteur se mit à chanter et nous l’avons tous accompagné de bon cœur. La grand-mère raconta comment Grand-Père était un jour venu lui rendre visite, alors qu’une tempête de neige se déchaînait dehors, juste pour lui apporter des roses pour son anniversaire. Avant que je ne puisse m’en rendre compte, le temps imparti pour les visites était passé. Avant de partir, les visiteurs récitèrent ensemble une courte prière pour la guérison de mon grand-père puis prirent congé en lui disant qu’ils espéraient le revoir bientôt en bonne santé. Ce soir-là, mon grand-père appela l’infirmière et lui dit qu’il avait faim. Il s’assit tout seul sur son lit et mangea de bon appétit. Le lendemain, il réussit à faire quelques pas. Chaque jour, il faisait