BRUXELLES CULTURE 15 mai 2019 Brussels Diffusion asbl Contact et abonnement gratuit : pressculture4@gmail.com
RENCONTRE : CLÉMENT MARTINERY
RENCONTRE : CLÉMENT MARTINERY Clément Martinery a suivi un cursus traditionnel, tout en se laissant influencer par le street art. Artiste et enseignant, il propose des œuvres pures, loin de toute étiquette, et des travaux de commande principalement axés sur le domaine de l’enfance et de l’adolescence. Après avoir passé une partie de son existence à Ixelles, il vit aujourd’hui à Berchem-SainteAgathe. Rencontre. Quelle est votre parcours artistique ? Je suis un produit de l'Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles. Je peux dire que j'ai touché à tout : la photographie, la sérigraphie, la gravure, pour ensuite me diriger vers l'illustration et la peinture. Ma pratique a été influencée par chaque discipline rencontrée lors de ma formation. A quel âge avez-vous commencé à peindre ? Petit, je peignais déjà dans un atelier pour enfants à Perpignan, ma ville d'origine. La lumière du lieu et l'odeur des peintures m'ont énormément marqué. Elles ont tracé ma voie. Je viens du Sud de la France et les couleurs de là-bas ont vraiment été décisives dans ma création. Je préfère le terme d’élan à celui de recherche ! Avez-vous été encouragé par vos proches ? Mon éducation a été merveilleuse. J'ai eu la chance de grandir dans un petit village entre terre, ciel et mer. Mes parents, mes grands-parents et ma fratrie ont stimulé mon quotidien en l’illuminant. Mon éducation a été basée sur la nécessité de poser des choix personnels et la nécessité d’en assumer les responsabilités. Mes parents font partie de la génération contestataire hippie. Plutôt que d’intimer, ils m’ont guidé à travers leur expérience et m’ont appris à réfléchir par moi-même. A quel moment avez-vous décidé de vous consacrer professionnellement à l’art ? Dès la fin de mes études à l'Académie royale des Beaux-arts de Bruxelles, j'ai voulu me consacrer à l'enseignement. J'ai donc commencé un régendat en pédagogie générale option Arts et, à partir de cet instant, ma création a effectué un bon en avant. Au contact des jeunes, ma créativité s’est encore développée. A ce moment-là, j'ai également pris conscience que les gens appréciaient mon travail et j'ai décroché quelques contrats dans le domaine de l’illustration. Rien de faramineux, mais j'ai eu un réel plaisir à réaliser des dessins pour les petits. Quant à mon travail personnel en peinture, il a mis davantage de temps pour décoller. Sans doute parce que plus pulsionnel et moins commercial ? Quelles techniques utilisez-vous ? Je n'ai pas de technique particulière. J'emploie beaucoup l'acrylique pour mes peintures mais, comme beaucoup d'artistes de ma génération, le « Street art » a été le berceau de tout. La bombe de peinture et l'influence de la rue restent omniprésentes. Pour mes illustrations, je privilégie des moyens classiques. Là, le crayon graphite et la gomme sont essentiels ! Que représente pour vous l’acte de créer ?
Peindre ou dessiner est une trace et le témoignage d'un état d'esprit. L'envie est tout aussi jouissive que celle de posséder et d’offrir. Je ne suis pas dans une réalisation contextuelle de notre société. Je laisse ça aux autres. Je suis dans l'immédiateté. A travers mes illustrations, j'essaie d'être davantage dans une forme de poésie picturale, où le défi et la technique deviennent chaque fois un challenge. Je suis profondément convaincu que rester dans un seul savoir-faire mène à la dépression. J’ai besoin d’expérimentation et de remise en question. En ce sens, le monde des arts peut être un vaste champ, où tout est permis, sans tabous et sans contraintes. A mesure que je vieillis, je me rends compte que je progresse et que j’apprends chaque jour. Y a-t-il certains artistes que vous appréciez particulièrement ? J’admire de nombreux créateurs. A chaque époque, plusieurs d’entre eux ont contribué à faire bouger le regard sur les arts et ont amené les mentalités à évoluer. Personnellement, j’éprouve une affection particulière pour l’École américaine, même si je n’ai jamais eu l’état d'esprit de réaliser des œuvres monumentales. Il ne faut pas traverser la moitié de la planète pour découvrir des gens talentueux. Chez nous, on peut admirer les créations de Julien Meert, Arnaud Kool et Laurent Veldekens sans avoir honte de demeurer ébahi par leurs travaux qui apparaissent comme de véritables odes à la couleur. A quel moment une œuvre est-elle achevée ? Elle est finie quand l'envie n'y est plus ou lorsque j'ai l'impression d'avoir tout dit. La création d’une peinture peut nécessiter une heure ou une semaine. Il importe que l'harmonie et la logique des couleurs soient justes. Une question d’appréciation ! Comment peut-on se représenter l’une de vos journées ordinaires ? Comme chacun d'entre nous, je prends mon café le matin et je regarde par la fenêtre. J'ai un processus de création relativement lent. Je ne pense pas peinture toute la journée. Je devrais peut-être fonctionner de cette manière, mais je ne suis pas ce genre d’artiste ! Avec une baguette magique, quelles mesures prendriez-vous pour promouvoir les artistes bruxellois ? Je ferais connaître les artistes qui n’ont pas la chance d’être mis en lumière. Le monde de l'art, comme le reste du monde, a été réduit à sa seule valeur marchande. Des lobbyistes spéculent sur le travail des créateurs, établissent des nomenclatures et s’efforcent d’imposer des cotes. Ils dictent ce qui est bon ou mauvais, ce qui est beau ou non, ce qui doit être acheté ou délaissé. Certains artistes sous contrat se retrouvent dès lors totalement dépendants d’un système, qui leur ordonne de fonctionner de cette manière-ci plutôt que d’une autre. Sous risque de voir leur pedigree chuter en flèche ! Percevez-vous une évolution dans votre manière de peindre ? Comme je l'ai dit précédemment, si le processus de création demeure statique, je n’évoluerai pas. Je me considère davantage comme un plasticien que comme un artisan.
Même si la question risque de paraître prétentieuse, quel message ou quelle impression cherchez-vous à transmettre à travers vos créations ? Il n'y a pas de message ni de contextualisation politique. Juste une envie de partage ! Je laisse l'art revendicateur aux autres. À chacun sa lecture, avec son passé et sa culture. Si message il y a, c'est aux spectateurs de trouver le leur. Que pensez-vous de l’aphorisme qui dit : « L’art est toujours au présent » ? Très brouillon lors de la création, il reste la synthèse d'un moment, mais devient désuet à mesure que les années passent. Généralement, il n'existe déjà plus quand l'acte créatif est passé ! Vous arrive-t-il de détruire certains travaux ? Souvent ! La peinture existe car le spectateur la fait vivre. Quand elle traîne trop longtemps sans être vue ou trop vue par moi, elle perd sa vitalité et devient une habitude. Voilà le bon moment pour la jeter et passer à autre chose. Autant vous dire que j'ai balancé pas mal de travaux ! Pour vous l’inspiration naît de … Elle naît d'une envie de faire ou d’une idée à concrétiser. Elle peut être pulsionnelle ou mûrement réfléchie, tout en restant une démarche. Elle est à l'image d'un mot et de sa définition. Quels sont vos projets ? Pour le moment, je travaille sur un projet d'album pour enfants. J’y suis concentré depuis un bon mois. Par la suite, j'espère exposer mon travail un peu plus régulièrement ! Dans quels coins de Bruxelles pourrait-on vous croiser ? Je suis Bruxellois d’adoption et je n'ai pas réellement de lieux de préférence. La capitale est mon terrain de jeu, même si j'aime particulièrement la Marolles et son bouillon de culture. Retrouvez Clément Martinery sur le site www.clementmartinery.com Propos recueillis par Daniel Bastié
LITES, LE STUDIO AQUATIQUE À LA POINTE DE L’EUROPE Il vient d’ouvrir ses portes à Vilvorde, tout près de Bruxelles. Il a coûté 23 millions d’euros, dont 1,1 million financé par la Région flamande. Avec son bassin pouvant atteindre une profondeur de 10 mètres et sa superficie couvrant le quart d’un terrain de football, il va accueillir des scènes de cinéma spectaculaires. C’est Hollywood qui débarque chez nous. Petit tour dans les coulisses du Lites Water Studio. Wim Michiels, propriétaire du Lites Water Studio, ne tarit pas d’éloges à propos de son nouveau-né. Le projet a mis quatre ans avant d’aboutir. Son atout majeur réside dans le fait que tous les effets aquatiques pourront désormais être tournés à l’intérieur, dans les conditions voulues par la production du film. Ils seront réalisés avec une grande fiabilité, l’attention se portant aussi sur la sécurité des scènes, comme l’explique le directeur : « En tant que cameraman sous-marin, j’ai souvent constaté que les studios existants sont inadéquats pour les grands effets aquatiques. Un studio extérieur permet ces effets, mais il présente des inconvénients : l’eau y est trop froide, il y a peu de contrôle sur son état et la météo est imprévisible. Le Lites Water Studio offre une sécurité et une stabilité beaucoup plus grandes, de sorte que les scènes peuvent être tournées dans le cadre du budget initialement prévu. Si une équipe de cent personnes doit travailler moins d‘une semaine chez nous, cela représente une économie considérable pour le producteur. » Un équipement high-tech dans une eau à 32 degrés Grâce à son équipement sophistiqué permettant de réaliser de nombreux effets spéciaux, le studio de 1.250 m² (c’est son extension d’immersion maximale) est unique en Flandre et dans le monde. Ses six millions de m3 d’eau sont chauffés en permanence à 32 degrés, ce qui facilite le tournage des longues scènes sous-marines. Le bassin a une profondeur initiale de neuf mètres : « La plupart ont six mètres de fond, mais ces trois mètres supplémentaires font une grande différence, commente le directeur. Vous pouvez faire des plans plus larges qui sont utilisés immédiatement. Il n’existe aucun magasin de photos pour créer, par exemple, l’effet des profondeurs marines infinies, même sur ordinateur. » Le bassin est pourvu d’un système de filtration qui donne diverses apparences à l’eau : de cristalline, elle peut devenir polluée, ou de rivière se changer en océan. On peut y faire courir des vagues d’un mètre de hauteur ou, en appuyant sur le bouton, les faire grossir encore. Un déferlement de vagues sur un canot en perdition par exemple. On peut aussi simuler différentes conditions météo, de l’orage au temps ensoleillé. « Nous pouvons faire surgir le brouillard ou la pluie si nous le voulons. Avec des panneaux d’éclairage spéciaux, nous créons la lumière du jour ou le coucher du soleil sur l’eau. Nous pouvons générer des vagues jusqu’à un mètre de hauteur. Cela ne semble pas beaucoup, mais si la caméra est dans les vagues, vous avez l’impression d’être submergé et que la tempête fait rage autour de vous. »
Quant à l’aspect de l’eau, c’est avec des choux de Bruxelles que Lites la rend trouble. « Des choux broyés et moulus par une machine, qui sont injectés dans l’eau », précise Wim Michiels. Le long du bassin s’étagent de grandes plateformes mobiles et des grues aériennes qui peuvent supporter jusqu’à 25 tonnes de décors construits à sec, avant d’être immergés à la profondeur souhaitée. « Nous avons installé des abreuvoirs avec lesquels nous pouvons laisser tomber 18 tonnes d’eau sur des toboggans pour créer un effet de tsunami où des acteurs, des voitures, des meubles sont entraînés par le flot, explique-t-il. Tant d’un point de vue technique que créatif, on peut faire ici beaucoup plus de choses qu’ailleurs, dans des conditions économiques et durables. » Jeté à l’eau avec vingt-trois millions d’euros La société Lites a investi 23 millions d’euros dans ce nouveau complexe comprenant trois studios de cinéma « secs » et un studio sous-marin unique en Europe. Les investissements sont financés par des emprunts bancaires, de l’argent d’investisseurs privés et des subventions accordées par la Flandre. « Et enfin, bien sûr, toutes nos économies qui sont en jeu. Nous nous sommes jetés à l’eau avec ce studio, mais le risque en vaut la peine. C’est un risque responsable », déclare Wim Michiels, dont la société emploie trente collaborateurs à temps plein, répartis sur Vilvorde, Bruxelles et Amsterdam. Avant l’ouverture du complexe, Lites avait déjà travaillé pour des séries télévisées comme Loft, Undercover, Team ou Missing, ainsi que pour Kursk, ce sous-marin en perdition dans la mer de Barents qu’on a pu voir l’an passé avec Mathias Schoenaerts dans le rôle principal. « Au fait, le réalisateur m’appelle maintenant Swim au lieu de Wim », sourit le directeur, devenu cameraman sous-marin après avoir longtemps filmé des maillots de bain accrocheurs dans des destinations exotiques pour des magazines de mode. Ce n’est qu’en 2014 qu’il est passé à plein temps pour des missions sous-marines. Jusqu’à ce jour, sa société se concentrait sur la location du matériel de photo et d’éclairage pour les productions télévisées et cinématographiques. Le chiffre d’affaires annuel de Lites oscille autour de 6 millions d’euros, mais cela devrait doubler avec l’expansion du nouveau studio. « Nous devenons incontournables », affirme Wim Michiels. Il est actuellement sur plusieurs projets relatifs à l’eau : des films d’action, des films de guerre ou des films concernant les réfugiés. Des drames psychologiques aussi. Des projets très diversifiés dans le monde entier. « Je peux voir les scénarios et trouver des réponses pour réaliser les scènes. Les producteurs ont des questions, nous avons nos réponses. C’est un sentiment puissant de donner vie aux films qui sont en préparation. » Une douzaine de ces films sont dans les cartons ou en chantier. Le bouche à oreille commence à fonctionner. De l’exotisme à la magie du 7e Art, il n’y a souvent qu’un pas. Vous le franchirez en allant découvrir les studios Lites à Vilvorde, Fabrieksstraat 81 à 1800. Site : www.lites.be. Michel Lequeux
EXPO : ÉMOTION Á ESPACE ART GALLERY Né en 1963 à Woluwé-Saint-Lambert, Johann Damoiseau vit et travaille à Bruxelles. Après avoir suivi les cours du soir de peinture et de dessin à l’Académie des Arts de la commune où il est né et à l’Académie des Arts Constant Meunier (Etterbeek), il s’engage dans un cursus à l’Académie royale des Beaux-Arts (Bruxelles) en section atelier de dessin. Très vite, il devient assistant, puis professeur d’art graphique. Ses recherches l’engagent à se questionner sur le rôle du vide et du plein, la notion d’intérieur et d’extérieur et la fonction des passages, déplacements ou glissements dans l’espace. L’intérêt pour le paysage et ses structures le pousse à préciser son objectif et à se diriger vers l’articulation de sculptures comme modèles pour ses créations. Néanmoins, il opte pour une option symbolique davantage que descriptive. Démarche plus proche de la suggestion que de la description. Au fur et à mesure du temps et des expériences, son travail s’affine et s’organise vers la nature au sens large. Doté d’un vrai talent, il examine, teste, se renforce dans l’idée que la peinture est une maîtresse exigeante alors que, sur le plan personnel, il devient guide nature bénévole au Cercle naturaliste de Belgique. Activité qui lui fait découvrir différents aspects de notre royaume avec ses bois, ses campagnes, ses zones abandonnées à la flore et à la faune. En refusant toute étiquette, il retient essentiellement la notion de rythme et d’équilibre. Ses œuvres sont avant tout une succession de traits posés avec un soin extrême et qui se relient les uns aux autres, tout en demeurant une invitation à la contemplation, miroir subjectif qui explore des terres inconnues, qui fait appel à la sensibilité et qui engage au dialogue. Artiste suisse installé en Belgique depuis de longues années, Pierre Pache est un passionné. De ceux que rien n’arrête, qui osent beaucoup et qui ne s’encombrent jamais du quand dira-ton. Derrière un air facétieux et des toiles qui portent parfois des titres curieux, il laisse les ricaneurs se gausser doucement, car il est conscient de la qualité de son travail, des heures passées à imaginer et à créer. Maître d’une technique sûre, il réclame le droit d’être pris au sérieux. Sans procrastiner, il agit plutôt que de palabrer, rejette les demi-mesures et refuse de se bâtir des châteaux en Espagne. Il a passé l’âge de croire à l’alchimie qui transforme le plomb en or. Depuis longtemps, il a compris que la peinture ne doit plus être descriptive, qu’elle peut (ou doit) se détacher du réel pour faire entrer les visiteurs dans un univers chatoyant où les couleurs se répondent en écho, se tenant parfois sur le fil tendu du funambule et donner à voir une composition sertie de merveilleux, de mystérieux, de coups de brosse et de pinceaux qui conversent en harmonie. Surtout pour éviter de croire que tout est acquis avec les années. Afin de ne jamais sombrer dans la redondance. Pour faire taire les intellectuels de tous bords qui se prétendent des experts et qui ne connaissent rien à l’art moderne. Puis, faut-il tout expliquer ? En regardant de près, on imagine des éléments tangibles. Seraitce un bout de roche, un morceau de plante, une silhouette humaine ou animale ? La règle veut ici que chaque tableau demeure une énigme. Pas de mode d’emploi. Pas de guide. La liberté d’interpréter justifie sa souveraineté. Quant à la technique, elle se nomme glacis à l’acrylique. Un procédé minutieux qui offre les moyens de nous échapper de la morosité d’une société laminée par la pollution, les extrémismes et la bêtise. Les compositions de Pierre Pache possèdent l’atout de nous libérer momentanément des contingences quotidiennes et de ne pas nous encombrer avec le malaise qui règne aux alentours. Une explosion. Une profusion ! Vous pouvez également admirer les sculptures de Patricia Molinaro, artiste marseillaise, dont les créations assument une sensualité baignée dans une atmosphère onirique, soutenue par la liberté du geste artistique. Des œuvres à découvrir à Espace Art Gallery jusqu’au 25 mai 2019. Plus de détails sur le site www.espaceartgallery.eu Rue de Laeken, 83 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié
EXPOSITION : DIALOGUE D’ARTISTES MIREILLE ROOBAERT & DENIS MEYERS Née en 1968, Mireille Roobaert vit et travaille à Bruxelles. Elle a commencé sa carrière en tant que reporter de presse avec de nombreux voyages à Buenos Aires et à Auckland, en passant par New York, Paris et Naples. Fin des années 90, lors de la transition de l’argentique au numérique, elle a intégré les nouveaux outils de la photographie numérique. Ceux-ci lui ont rapidement ouvert de nouvelles perspectives. Depuis, elle collabore avec de nombreux magazines et des entreprises dans divers domaines. Ses banques d’images sont aussi appréciées. Né en 1979 à Tournai, Denis Meyer réside et créé à Bruxelles. Artiste urbain, il est connu pour ses fresques ou pour ses stickers en forme de visage (il les appelle ses "perso"), imprimés et découpés à la main puis disséminés dans toute la ville ou ailleurs. Il se revendique typographe, une formation qu'il a suivie à l'École Nationale Supérieure des Arts Visuels de la Cambre mais qu'il tient aussi de son grand-père, Lucien De Roeck (1915-2002) qui a entre autres créé l'emblème et l'affiche de l'Expo Universelle de 1958. C'est avec lui qu'il a commencé à écrire et dessiner. On lui doit une série de sweats et T-shirs pour la collection printemps-été 2016 de la marque belge Bellerose. Auparavant, il a aussi collaboré à des projets caritatifs (Plate-Forme Prévention Sida, Make-A-Wish, …) et peint sur de nombreux supports : planches de skate, cadres de vélo, verres à bière pour Duvel ou encore live painting lors d'événements phares. Tous deux se retrouvent aujourd’hui pour un projet d’envergure avec une exposition de photostémoignages à la fois fruit d’une collaboration et d’une co-création entre une photographe et un typographe. Travail de mémoire vive, l’événement fait le lien entre les mots graffés sur la pierre comme un cri éphémère et des clichés d’’architecture. Des 25.000 m² d’espoir et de spleen tagués par Denis en dix-huit mois sur les murs de l’ancien bâtiment Solvay destiné à être détruit, Mireille a conçu des anamorphoses, photos panoramiques prises à 360° et restituées à plat. Ces images sont ensuite devenues des œuvres monumentales, ou des light box rétro-éclairées, au cadre dessiné puis graffé par Denis, chacune en exemplaire unique. L’exposition issue du projet global Remember/Souvenir sera produite dans la galerie d’Arielle d’Hauterives, dans la Tour Upsite, au même moment et à deux pas de la Foire internationale Art Brussels. Le dialogue entre les univers graphiques de Mireille et Denis s’est d’abord produit sans leurs protagonistes. Un jour, la photographe a vu passer une annonce d’Arkadia offrant une visite officielle du bâtiment recouvert de phrases courtes sorties des tripes de l’artiste. Elle s’y est rendue par curiosité, sans s’attendre à se trouver à ce point bouleversée par les mots mis en formes et par l’ampleur du projet répandu sous ses yeux. De cette révélation, elle a imaginé un travail de mémoire, puisque l’immeuble était destiné à être démoli. Talentueuse et obstinée, elle a obtenu un accès libre à l’espace, y est revenue à vingt-cinq reprises, y compris avec un drone. En quelques mois, elle a effectué plus de trois mille prises, pour en garder finalement quatre cents en couleur et noir et blanc. Si vous souhaitez découvrir ce travail à quatre mains, vous avez jusqu’au 29 mai 2019. Davantage de détails sur le site www.arielledhauterives.be Galerie Arielle d'Hauterives Quai de Péniches, 69 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : LIVRE D’ARCHITECTE L’exposition intitulée « Livre d’architecte » est constituée d'une sélection de travaux réalisés par de jeunes étudiants de la Faculté d'Architecture La Cambre Horta de l'ULB (1ère, 2ème et 3ème bachelier). Sont présentés : des livres d'architecte (à la manière du livre d'artiste), des carnets de voyages, des estampes et des dessins d'architecture. Objet de fascination, outil de travail ou de communication, le livre a toujours attiré de nombreux architectes. Entre autres, Le Corbusier en a tiré parti dans ses abondantes productions : éditions, carnet de croquis et carnets de voyage. Les livres d'architecte ont été conçus et réalisés par les étudiants comme un objet construit, fruit de multiples savoir-faire au sein d'une pédagogie. A l'image de l'architecture, chacun de ceux-ci trouve sa source dans une idée globale, se confronte à la technique et aux matériaux. Une attention particulière a également été portée sur les assemblages / la reliure, la typographie, le choix de la matière et du papier, etc. Ces livres révèlent à la fois le soin apporté à chaque détail et la cohérence d'un objet fini. Les qualités visuelles, la manipulation aisée et l'efficacité dans la communication en sont les points forts. C'est dans cette démarche que les étudiants ont également travaillé leur projet d'architecture : un logement pour des artistes en résidence. Ils regroupent une série de documents qui sont des études préliminaires : principalement l'estampe et la planche botanique. Celle-ci a permis aux étudiants de comprendre la relation d'un détail dans son ensemble. Quant à l'estampe, elle avait pour objectif d'aborder les plans d'architecture, en particulier la coupe, grâce à la découpe et l'impression d'un objet en grandeur réelle. Les esquisses et plans du logement pour artiste en résidence font également partie intégrante du livre d'architecte afin de communiquer le projet final. Sont présentés également lors de l'exposition : quelques carnets de voyages urbains tantôt proches (un quartier de Bruxelles), tantôt lointains (la Chine). Ils contiennent des dessins d’observation "In Situ" qui témoignent d’une grande diversité, d’un réel enthousiasme, d’une découverte de soi et du monde en toute authenticité. Un événement à découvrir à la Bibliotheca Wittockiana du mardi au dimanche et de 10 à 17 heures jusqu’au 18 mai 2019. Plus de détails sur le site www.wittockiana.org Rue du Bemel, 23 à 1150 Bruxelles
THÉÂTRE : FRITLAND Fritland, le nom claque ! Fritland, c’est tout simplement la friterie la plus connue de Bruxelles, n’en déplaise à Antoine et Eugène ! Dans les années 70, une famille d’immigrés albanais, nourrie au rêve américain, atterrit en Belgique en attendant mieux. Les Laci achètent un local derrière la Bourse et y ouvrent leur commerce. Sous la férule du père, chaque membre de la tribu est mis au travail. Parmi eux, Zenel bosse quatorze heures par jour : frites, cornets, fricandelles, sauce andalouse, pickles, boulettes … il est devenu un maestro en la matière ! Son corps garde encore la trace de ce sacerdoce : cheveux brûlés par la graisse, varices dues à la station debout, tendinite à l’épaule à force de soulever les bacs. Fritland se veut surtout une réussite familiale. Pourtant, l’argent n’a jamais été la raison première de Zenel. Il rêve de littérature, d’écrire et de raconter des histoires. A force de regarder passer les clients, de se débattre pour sortir de ce foutu destin de fritier albanais et pour trouver sa liberté, il est capable de noircir des milliers de pages. Sa vie est intime et précieuse. Zenel Laci n’est pas un acteur et, pourtant, le voilà sur les planches pour raconter sa fragilité et interroger notre regard de spectateur. Sommes-nous au théâtre pour juger ou pour faire, nous aussi, un pas vers l’autre ? Et puis comme ce poète n’est jamais aussi à l’aise que derrière son comptoir, il nous fait revivre Fritland comme une belle utopie, un pays où nous pourrions déguster des frites cuisinées par cet enfant d’immigré qui raconte sa vie comme personne. Ce spectacle est à découvrir jusqu’au 18 mai 2019 au Théâtre de Poche. Plus de détails sur www.poche.be Chemin du Gymnase 1A à 1050 Bruxelles Paul Huet
THÉÂTRE : VALHALLA « Valhalla » est une oeuvre pluridisciplinaire mêlant le théâtre, le cirque, le mat chinois, la danse et le chant lyrique. Elle est présentée par la compagnie bruxelloise Petri Dish, qui tourne abondamment à l’étranger comme chez nous. Avec « Valhalla », la troupe nous propose un voyage à travers les mythes fondateurs, le pouvoir et ses dérives, ainsi que sur la capacité de l’humanité à œuvrer pour le bien de tous. Serti dans les glaces d’une mer d’hiver et paralysé, gît un bateau. Sans doute le dernier d’un monde en pleine destruction ? Mille fissures courent sur les blocs figés et dessinent sur sa carcasse des motifs anguleux. Un immense échiquier pour les dieux ? À l’horizon, des icebergs fatigués s’élèvent vers le ciel sombre, avec des nuages qui glissent indifféremment sur le firmament gris. Cinq hivers sans soleil viennent de s’écouler. La terre a été pillée et les océans ont été gelés. Une silhouette se détache. Il est là, le Capitaine ! Accroché à la barre d’un navire qui ne saurait plus aller nulle part. A bord, il organise une société de manière autoritaire. Comme dans le répertoire de Wells, Orwell et Bradbury, auquel « Valhalla » rend hommage, c’est probablement une femme qui sera l’élément déclencheur de la révolution. Cette pièce est à applaudir jusqu’au 29 mai 2019 au Théatre de Poche. Plus de détails sur le site www.poche.be Chemin du Gymnase 1A à 1050 Bruxelles Paul Huet
THÉÂTRE : COUP DE SOLEIL Le démon de midi n’est pas un mythe ! Plusieurs couples subissent de plein fouet ce réveil de libido tardif, qui fait que certains hommes aux tempes grisonnantes se sentent attirés par des femmes plus jeunes qu’eux. Il ne s’agit pas de vice ni de la volonté de défaillir aux promesses matrimoniales. A un âge où on bascule de la jeunesse à un âge plus mûr, on souhaite conserver intactes ses facultés de séduction. Bien sûr, au sein du ménage, ce coup de chaud apparaît comme une infidélité, voire une perte totale de confiance pour le conjoint. Les hommes sont-ils les seules victimes de cette tentation qui les engage à aller voir ailleurs ? Selon diverses études extrêmement sérieuses, cette espèce de coup de folie tarauderait aussi bien les femmes que les hommes. Marcel Mithois s’est intéressé à ce phénomène et a imaginé une pièce humoristique qui raconte les émois de Valentine, lasse du quotidien et qui rêve d’une existence pimentée. Il suffit d’un petit rien pour chahuter la morosité des semaines qui se suivent en se ressemblant misérablement. Engoncée dans le ronron, elle aspire à autre chose et s’apprête à quitter son amant. Un livreur, venu lui apporter un bouquet de fleurs, ravive bien vite des émotions qu’elle croyait éteintes depuis longtemps. Plus que le parfum des roses, il lui transmet l’arrogance de la jeunesse, la beauté d’un physique enjôleur et la force de l’insouciance qui ne se préoccupe que du présent. En moins de temps qu’il ne faut pour l’exprimer, la bourgeoise se sent revigorée, prête à se remettre complètement en question, à se lancer dans une aventure folle et à tirer un trait charbonneux sur le passé. Sans calcul, elle choisit l’exaltation à la somnolence, la passion à la tiédeur, le risque à la sécurité. L’auteur brosse le portrait d’une quarantenaire qui, brusquement, prend conscience de la stérilité de son existence et se met à aspirer au mouvement et aux embrasements. Malgré quelques appréhensions, elle envoie balader le qu’en dira-t-on et, sans complexes, se jette dans ce qui pourrait peut-être ?- s’apparenter à une cure de jouvence. Démon de midi ou coup de soleil, peu importe le terme idoine ! Cette pièce, infiniment drôle, se joue d’une situation finalement ordinaire, mais refoulée chez beaucoup. Doit-on se laisser envahir par ses envies ou faut-il impérativement lutter ? Jalousie, quiproquos, approche ambiguë, mots teintés de sous-entendus, rien n’est épargné aux protagonistes. Plutôt que de tremper sa plume dans l’encre de la tragédie, Marcel Mithois joue avec les poncifs de la vie de couple pour mieux les dégonder et engendrer des scènes burlesques, où le rire entraîne les spectateurs à se regarder dans le miroir de leurs pensées intimes. Et moi, n'ai-je jamais songé à un ailleurs probable, à une vie loin des miens, à un futur que je bâtirais brique par brique sur les cendres des années écoulées ? Marie-Paule Kumps, Bernard Cogniaux, Camille Pistone, Damien De Dobbeleer, Julie Deroisin , Jean-Daniel Nicodème et Gudule sont parfaits dans leur rôle et incarnent à la perfection des femmes et des hommes qui s’activent sur le théâtre de l’existence, prêts à s’étriper, à s’opposer et à exposer de maigres arguments pour se justifier aux yeux des autres. Avec « Coup de soleil », on oublie ses rides, ses courbatures, ses complexes et ses pilules lénifiantes pour se laisser emporter dans un tourbillon de répliques savoureuses, où les a priori n’existent pas, et qui se définit comme un appel à laisser tomber nos œillères. Nathalie Uffner, qui maîtrise son métier à la perfection, propose une mise en scène dynamique où rien n’est laissé au hasard. Cette pièce est à découvrir jusqu’au 19 mai 2019 au Théâtre royal des Galeries. Plus de détails sur www.trg.be Galerie des Princes 6 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié
THÉÂTRE : LE CHEVALIER D’EON Chacun connaît ou a entendu parler du célèbre chevalier d’Eon (1728-1810), officier, diplomate, homme de lettres et espion, demeuré célèbre pour son goût du travestissement. Le cinéma s’était déjà emparé de ses aventures en 1959 avec Andrée Debar devant les caméras de Jacqueline Audry. Le personnage apparaît encore dans le long métrage « Beaumarchais, l’insolent » (1996) sous les traits de Claire Nebout et dans un épisode de la série Nicholas Le Floch (2009). De son vrai nom Charles-Geneviève de Beaumont, on lui attribue plusieurs victoires diplomatiques, parallèles aux efforts officiels des hommes mandatés par Louis XV, parvenant à faire basculer la Russie dans le camp français lors de la guerre de Sept ans. Bien entendu, les romanciers ont principalement retenu ses relations galantes ambiguës, véritables feuilletons destinés à passionner ou à choquer les gens de son époque. Très vite, les paris ont été ouverts : est-il mâle ou femelle ? Il a été rapporté que, en 1774 et pour faire taire les rumeurs, le monarque lui a ordonné de révéler officiellement son identité sexuelle. Le chevalier a solennellement affirmé être une femme, propos corroborés par les médecins. Pourtant, après son décès, une autopsie aurait clamé le contraire, relançant les supputations et donnant corps à la légende. Pour achever la saison, le Théâtre royal du Parc s’attaque à l’une des énigmes de l’Histoire et revient sur un protagoniste qui a fait couler énormément d’encre. L’imagination fertile des écrivains s’est rapidement mariée à la réalité, arguant que pour s’approcher du roi, il se serait déguisé en femme, afin de titiller son attention. Réputé pour sa maîtrise de l’escrime, sa réputation de fine lame le précédait partout. Créé en 2006, ce spectacle en costumes est aujourd’hui mis en scène par Daphné d’Heur qui, avec le dynamisme qu’on lui attribue, revisite le passé pour entraîner le public dans un tourbillon d’émotions et d’action. Pas de mauvaises surprises au menu de ce programme : les dialogues ciselés, la beauté des décors, la magnificence des costumes, le tempo soutenu, la puissance du récit et le jeu sans fautes des comédiens Maroine Amimi, Julien Besure, Didier Colfs, Laurence D’Amelio, Perrine Delers, Baptiste Denuit, Jonas Jans, Nicolas Janssens, Marc Lauren, Tanthony Molina-Diaz et Valentin Vanstechelman contribuent vivement à la réussite d’un spectacle total, haut en couleur et bourré d’inventivité. Au demeurant, une escapade divertissante et panachée au cœur du XVIIIe siècle, pétri de complexité et de violence. « Le chevalier d’Eon » est à applaudir jusqu’au samedi 25 mai 2019 au Théâtre royal du parc. Plus de détails sur le site www.theatreduparc.be Rue de la Loi 3 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié
THÉÂTRE : UN GRAND AMOUR Déni d’amour et génocide nazi sont repris dans cette pièce du Rideau de Bruxelles mise en scène pour la seconde fois au Théâtre des Martyrs. Elle est jouée avec force et talent par Janine Godinas, qui nous entraîne comme une vipère dans sa confession ambiguë. Frau Stangl vient donc s’asseoir dans le fauteuil cossu de son salon à São Paulo, au Brésil, et suite à sa rencontre avec une journaliste anglaise venue l’interroger sur son mari mort en prison, elle se lance dans une longue confession qui tient la salle en haleine. Son monologue la force peu à peu à répondre à ses propres questions. Savait-elle ce que faisait son mari Franz durant les années de guerre ? Savait-elle qu’il était le commandant en chef des camps de Sobibor et de Treblinka en Pologne, où furent gazés près de neuf cent mille Juifs ? Et si elle le savait, pourquoi n’a-t-elle pas rompu avec lui ? Pourquoi ne lui a-t-elle pas demandé de choisir entre Treblinka et leur couple, entre Treblinka et leurs enfants ? La force de ce monologue (et de son actrice Janine Godinas, qui joue comme une vipère dans l’ambiguïté de la confession), c’est de nous laisser dans l’incertitude. Quand on aime, c’est toujours de façon excessive, en laissant le bénéfice du doute à l’autre. En l’acquittant à l’avance du mal qu’il a fait. Pas sûr que le texte de Nicole Malinconi, l’auteur du roman mis en scène, ait été respecté dans son intégralité avec une question cruciale qui apparaît en préambule, ou avec des syncopes dues peut-être à l’actrice qui se lance à corps perdu dans la confession, mais la pièce vaut mille fois la peine qu’on s’en approprie le contenu. Qu’on la digère et qu’on y réfléchisse. Cette vieille femme a été la complice passive d’un génocide abominable. Elle s’est rendue coupable des crimes de son mari, qu’elle n’a pas voulu voir. Qu’elle a feint d’ignorer. Qui la mettaient mal à l’aise. Ses silences la trahissent peu à peu. Ils laissent deviner sa culpabilité qu’elle a avouée à un curé complaisant au début de la guerre. On perçoit ses regrets – mais jusqu’où vont-ils ? – dans la confession qu’elle nous livre. Oui, le temps passant, elle aurait dû s’opposer plus fermement à son mari et lui dire qu’il commettait l’irréparable. Qu’il se transformait en une bête inhumaine, bouffi par l’alcool qu’il devait prendre pour se voiler la face sur les crimes qu’il perpétrait en tortionnaire. Mais elle ne l’a pas fait. Elle s’est cantonnée dans les apparences. Dans sa vie de femme bourgeoise attendant chaque soir le retour de Franz pour l’aimer. Et pour protéger son foyer et ses enfants. Elle s’est construit une bonne conscience. C’est ce déni d’amour qui est au cœur de la pièce de Nicole Malinconi, et qui nous saisit aux tripes. Les criminels sont-ils capables d’exprimer un regret profond et sincère sur leurs actes ? Ont-ils le sens de la responsabilité ? A voir de toute urgence et pour quelques jours encore au Théâtre des Martyrs jusqu’au 12 mai 2019. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.theatre-martyrs.be Place des martyrs, 22 à 1000 Bruxelles Michel Lequeux
THÉÂTRE : LES BELLES PERSONNES Sébastien Ministru fait partie des noms récurrents du Théâtre de la Toison d’Or. L’une des plumes sur laquelle l’équipe peut miser sans avoir peur de se fourvoyer. Né à Mons en 1961, il a réussi à imposer une encre mêlée de vinaigre et de miel, cherchant constamment la réplique qui fait mouche ou la formule qui déclenche d’immenses éclats de rire. En s’affranchissant des tabous, il ose tout et clame ce que beaucoup murmurent. Depuis le milieu des années 80, il est également réputé pour ses rubriques dans l’hebdomadaire « Moustique », dont il est devenu le rédacteur en chef. Chez lui, le décalage n’a pas de limites et son imagination foisonnante fait mouche. Pourquoi changer une formule qui plaît ? Après, entre autres, « Cendrillon, ce macho » et « Ciao Ciao Bambino », il revient en grande forme avec « Les belles personnes », une création mise en scène par Nathalie Uffner et défendue sur les planches par Laurence Bibot, Emmanuel Dell’Erba, Antoine Guillaume, Aurelio Mergola, Pierre Poucet et Soda, des comédiens qu’il connaît et apprécie. L’occasion de découvrir des individus singuliers et de gratter le vernis pour laisser émerger la vraie personnalité de chacun. La caricature est ici acerbe et rondement menée. Les trois couples, amis de longue date, aiment se réunir autour d’une table bien garnie et digresser à propos de tout et de rien, remodeler le monde, juger et critiquer autrui. Ils tiennent la chronique de leur amitié, de leurs espoirs, de leurs rêves, de leurs désenchantements et abusent un peu trop de l’alcool. Or, on le sait : in vino veritas ! Alors qu’ils comptaient passer une énième soirée conviviale, les propos dérapent et les libations avinées délient les langues. La situation vire très vite au burlesque le plus total et nous vaut des séquences d’une drôlerie irrésistible. « Les belles personnes » fait partie de ces spectacles conçus pour nous arracher de la morosité du quotidien, bousculer le ronron et décrisper les zygomatiques. Cette création est à applaudir jusqu’au au 31 mai 2019 au Théâtre de la Toison d’Or. Plus de détails sur le site www.ttotheatre.com Galeries de la Toison d'Or, 396-398 à 1050 Bruxelles Daniel Bastié
MARC YSAYE : ROCK’N ROLL Après le succès de la saison dernière et nous avoir conté la folle aventure du Rock, sa naissance, ses pionniers, ses stars, ses managers et ses scandales, Marc Ysaye, voix mythique (et ex-Monsieur le Directeur) de Classic 21 revient avec un nouveau programme : les 50 ans du festival de Woodstock. La drogue y coulait à flots et l’amour libre y était de rigueur. L’organisation incroyablement montée, la construction de l’affiche, les rebondissements, la solidarité, la fraternité seront évoqués sur fond de contreculture, de développement du mouvement Hippie parti du campus de l’université de San Fransisco, du Peace and Love et, enfin, du Flower Power. Ce fut aussi la plus grande manifestation pacifiste contre la guerre du Vietnam. Bref, une conférence inédite et interactive où l’on retrouve LE Marc Ysaye de la radio, l’image en plus. Ce spectacle a été prolongé jusqu’au 17 mai 2019 au Théâtre de la Toison d’Or. Plus de détails sur le site www.ttotheatre.com Galeries de la Toison d'Or, 396-398 à 1050 Bruxelles
TOONE : LE LION DE FLANDRE Dès sa parution en 1838, Le Lion de Flandre (De Leeuw van Vlaanderen) de Hendrik Conscience, suscite l’enthousiasme de la classe populaire. Véritable renaissance de la culture flamande, sur le plan historique comme sur celui de la langue, ce roman évoque un temps fort : la lutte des Flamands contre les troupes françaises au XIVe siècle. Par sa force narrative conjuguée à la simplicité de son écriture, l’auteur belge d’expression flamande s’impose comme visionnaire et pédagogue, « Celui qui apprit à lire à son peuple ». Conscience qui possède la langue française comme celle de Vondel connaît une aura européenne. Ses livres sont traduits en plusieurs langues. Le Roi Léopold Ier, Victor Hugo, Alexandre Dumas père, l’honorent de leur estime. Cette fresque est présentée sur la scène des Toone du passé sous forme de feuilletons (deux semaines et cent seize tableaux). José Géal et Andrée Longcheval adaptent l’œuvre du chantre romantique en une soirée (deux actes et douze tableaux). Ils ont fait appel au talentueux peintre Raymond Goffin pour réaliser les décors et à Lidia Gosamo pour confectionner les costumes. Avec l’artisan Robert Derijck, Toone VII complète les collections des personnages « en armure ». Maintenant, c’est Nicolas Géal alias Toone VIII qui interprète l’épopée médiévale. L’intrigue se déroule en 1302 au temps où les « fransquillons » de Philippe Le Bel occupent notre sol. A leur tête, le seigneur de Châtillon se rend au château de Wijnendael pour y rencontrer Robert de Béthune (le futur Lion de Flandre) et y conclure une alliance entre la France et le Pays Flamand. Loin d’avoir les « poeppers » (avoir les chocottes), Jan Breydel (dont un descendant porte toujours le prénom), doyen de la Corporation des Bouchers, affronte le solide Le Roux, stukske fransquillon qui veut faire son « dikke nek » (vantard), et lui donne une « rammelink » (une tripotée) qui le mettra au moins pour six mois à la mutuelle. L’épopée se poursuit avec le fameux mot de passe « Schild en vriend », des Mâtines brugeoises, les amours contrariées de la belle Mathilde de Béthune, la célèbre Bataille des Eperons d’Or et enfin, le retour triomphal du Lion de Flandre. Une fresque médiévale à découvrir chez Toone jusqu’au 8 juin 2019. Plus de détails sur le site www.toone.be Impasse Sainte Pétronille, 66 (Rue du Marché-aux-Herbes) à 1000 Bruxelles
THÉÂTRE : FUGUEUSES Pierre Palmade a le rythme, le sens du verbe et de la formule. Il a aussi une fêlure, quelque chose qui donne au rire un chouia de mélancolie et nous rappelle que le rire est la politesse des reines ! Deux rôles splendides pour deux actrices en vadrouille, deux désobéissantes qui vont nous emmener sur les routes, à travers les bois et les champs. Deux évadées qui vont respirer à pleins poumons, rire, dire des bêtises et nous donner des envies de liberté et de chemins buissonniers. Margot sent comme une fatigue. Sa fille a 18 ans aujourd’hui. Alors, brusquement, elle décide de se faire la malle ! Sur la route, avec ses valises, elle rencontre Claude, qui elle aussi a fugué... Mais de sa maison de retraite, où son fils l’a placée. Margot est sage, fidèle, un peu naïve, en pleine crise existentielle. Claude est charmeuse, délurée, espiègle, aguerrie et amoureuse de la vie. À deux, elles font la paire ! Elles s’improvisent autostoppeuses, aventurières… Elles s’envolent et se sauvent. Il n’y a pas d’âge pour les bonnes résolutions. Quand les circonstances t’étouffent faut pas hésiter, hein ! Faut prendre la tangente et la clé des champs. Les comédiennes Nicole Oliver et Martine Willequet sont à applaudir au Théâtre Le Public jusqu’au 22 juin 2019. Plus de détails sur le site www.theatrelepublic.be Rue Braemt 64-70 à 1210 Bruxelles
THÉÂTRE : ELEPHANT MAN Londres, 1884. Les parades « monstrueuses » de nains, femmes à barbes, hommes-troncs, sont monnaies courantes et divertissent le public de l’époque. Pour un homme de foire, Joseph Merrick n’est qu’une attraction, un monstre dont l’atroce laideur et les difformités amusent et effraient les curieux en recherche de sensations fortes. Il faut dire que Joseph Merrick est particulièrement repoussant. Une bonne pioche lucrative. Un jour, l’homme-éléphant croise la route du chirurgien Frederick Treves qui voit immédiatement en lui un cas médical exceptionnel : impitoyable mécanique d’une société qui fait profit de tout et broie pêle-mêle les déshérités, les pas conformes, les inutiles. Car dans l’Angleterre victorienne, la prospérité matérielle est la récompense naturelle de la conformité. Joseph Merrick n’y a pas sa place. Or, sous cette carapace de peau épaisse et difforme, il y a un Homme. Un homme qui sait lire et écrire. Dont l’absence totale d’amertume et de colère est une énigme. Un homme reconnaissant malgré les cruautés de la nature et la dureté des humains à son égard… Un homme si étrangement plein de bonté, de générosité, de sagesse. Alors qu’est-ce qu’un monstre ? Qui voyons-nous ? Qu’a-t-il en lui qui nous fascine ? Quelle place accordons-nous à la différence ? Mis en scène par Michel Kacenelenbogen avec Bénédicte Chabot, Yves Claessens, Jo Deseure, Itsik Elbaz, Othmane Moumen, Ariane Rousseau et Anne Sylvain, ce spectacle est à découvrir jusqu’au 22 juin 2019 au Théâtre Le Public. Plus de détails sur le site www.theatrelepublic.be Rue Braemt 64-70 à 1210 Bruxelles
THÉÂTRE : TERREUR Dans cette pièce-procès, Ferdinand von Schirach, criminaliste à succès et maître de l’ambivalence morale, pose la question de la dignité, apanage de l’être humain. L’état d’urgence et la menace terroriste justifient-ils dans certains cas la mise en balance de vies humaines ? Peut-on tuer 164 personnes pour en sauver 70.000 ? Il n’y a aucun doute quant à la culpabilité de l’accusé, qui d’ailleurs ne cherche pas à contester ce fait. La question est de savoir s’il avait le droit d’enfreindre la loi. La constitution prévoit-elle un devoir de désobéissance ? Ou la loi prime-t-elle toujours sur les hommes ? Ce sera à vous, spectateurs, de vous faire une opinion et, ensuite, de rendre justice. Car vous allez devoir délibérer à la fin du « procès » et rendre le verdict. Avant tout, pensez que face à vous sera assis un homme. Un homme qui a les mêmes rêves, les mêmes désirs et les mêmes besoins que vous, et qui, comme vous, aspire à la justice. Un spectacle mis en scène par Pauline d’Ollone, défendu sur les planches par Pierange Buondelmonte, Serge Demoulin, Patricia Ide, Sarah Messens, Alexandre Trocki et Jérémie Siska et à découvrir jusqu’au 22 juin 2019 au Théâtre Le Public. Plus de détails sur le site www.theatrelepublic.be Rue Braemt 64-70 à 1210 Bruxelles
OPÉRA : LE CONTE DU TSAR SALTAN Le tsar Saltan épouse la cadette de trois sœurs, après avoir appris que le vœu le plus cher de celle-ci était de lui donner un fils héritier héroïque. Mais à la suite d’une ruse ourdie par ses frangines jalouses et par leur vieille tante Babaricha, la tsarine est jetée à la mer avec son nourrisson, Gvidone. Le tonneau dans lequel ils sont enfermés est rejeté sur le rivage d’une île déserte. Dans ce lieu ensorcelé, le fils du tsar grandit et libère un cygne des mains d’un magicien. Pour lui témoigner sa gratitude, le cygne aide Gvidone à visiter son pays natal sous la forme d’un bourdon. Trois souhaits, trois prodiges et trois piqûres de bourdon plus tard, père et fils peuvent enfin se rencontrer. « J’apporte la lumière et la joie à bien des gens sur terre, le chagrin s’apaise dans une chanson, dans un conte, la crainte devient touchante. » Bien des années après que le tsar Saltan a répudié sa femme et rejeté son fils sur de fausses accusations, la princesse Cygne rétablit l’harmonie en épousant le tsarévitch. Ce conte de Pouchkine, d’après une vieille légende populaire russe, fournit le texte idéal au grand conte-opéra que Rimski-Korsakov compose en 1899 en l’honneur du centième anniversaire du poète. Le compositeur déploie à son tour un style narratif rhapsodique et virtuose. L’orchestration y est bien entendu capitale, elle est intrinsèque à l’âme de l’oeuvre. Avec cette partition à la fin heureuse, le chef d’orchestre Alain Altinoglu s’impose tel un vrai magicien, comme récemment dans Le Coq d’or. Le metteur en scène russe Dmitri Tcherniakov revient ici à la Monnaie, après son retentissant Il trovatore, pour une fin de saison lyrique tout en féerie. Un opéra comme on les aime à découvrir du 11 au 29 juin 2019 à La Monnaie. Plus de détails sur www.lamonnaie.be Place de La Monnaie à 1000 Bruxelles
DANSE : OSHIIRE Uiko Watanabe est une adepte du “théâtre abstrait et de la danse concrète” et Oshiire – sa cinquième création en est le plus bel exemple. Un oshiire est un meuble très populaire au Japon. Dans cette armoire aux portes de papier coulissantes, encastrée dans le mur, les enfants souvent se cachent ou s’y retrouvent, lorsqu’ils sont tristes, fâch és, punis ou qu’ils veulent s’isoler et rêver. C’est aussi là où les familles rangent les objets usuels et les souvenirs. Entre théâtre et danse, le spectacle raconte l’histoire d’une enfant pas comme les autres écartelée entre une mère seule, les secrets enfouis et les désirs de départ. C’est une histoire déchirante et délicate dans laquelle la chorégraphe danse l’enfant chargée de rêves qu’elle était, et l’acteur Vincent Minne, joue la mère dont elle se souvient. Une prouesse scénique à découvrir du 14 au 17 mai 2019 au théâtre Varia. Plus de détails sur le site www.varia.be Rue du sceptre, 78 à 1050 Bruxelles
THÉÂTRE : LA PETITE FILLE DE MONSIEUR LINH Monsieur Linh a fui une région hostile d’Asie, à la recherche d’un avenir paisible pour sa petite-fille. Néanmoins, il souffre du déracinement et peine à trouver ses marques. Dans un pays qui n’est pas le sien, il rencontre monsieur Bark, qui lui parle de sa femme défunte. Monsieur Linh ne le comprend pas, mais l’écoute en tenant sa petite-fille sur ses genoux. Saisis par l’habitude, ils se retrouvent chaque jour et communiquent sur le même banc. Doucement, son existence trouve un nouveau sens. Néanmoins, un jour, tout est bouleversé. « La petite fille de monsieur Linh » est inspiré d’une nouvelle de Philippe Claudel et nous parle de l’exil et des exilés avec un beau sens de la formule et une narration presque onirique. La mise en scène s’attache à plusieurs aspects du récit et développe de nombreux thèmes, dont celui de la lutte archétypale du héros isolé dans un environnement qu'il convient d’apprivoiser, la difficulté de la communication verbale avec un ami d’une autre culture, les éléments du passé auxquels on se raccroche, etc. Seul en scène, Jérôme Kircher incarne tous les personnages et fait preuve d’un mimétisme incroyable, capable d’une intériorisation exceptionnelle. Il ne s’agit pas d’un one-man show, mais d’un spectacle complet rempli d’émotion, d’intelligence et qui nous lance de grandes questions d’actualité sur le déracinement, le sort des migrants et la difficulté à s’intégrer dans une communauté nouvelle. Il y a également le douloureux sujet de la mort des proches qui, en filigrane, projette une ombre grisâtre. Une performance à découvrir au Théâtre national du 25 au 31mai 2019. Plus de détails sur le site www.theatrenational.be Boulevard Emile Jacqmain, 111-115 à 1000 Bruxelles André Metzinger
CONCERT : FRÉDÉRIC DEVREESE Père de la musique de film belge, le compositeur Frédéric Devreese fête ses 90 ans. Le Brussels Philharmonic et Flagey ont dès lors voulu lui rendre hommage à travers un portrait musical. L’importance de son œuvre ne peut être sous-estimée. L’homme s’est principalement fait remarquer par une collaboration sur la durée avec le cinéaste André Delvaux (« Un soir, un train », « Belle », « L’œuvre au noir », « Benvenuta », etc.), tout en étant régulièrement sollicité par d’autres metteurs scène (Yves Hanchar, Hugo Claus, Marion Hänsel, Lieven Debrauwer). On sait beaucoup moins qu’il s’est investi dans la musique classique avec des concertos, des suites pour ballet, des lieder, deux opéras et des pièces pour piano soliste. En 1983, il a eu l’honneur d’écrire l’œuvre imposée du Concours Reine Elisabeth. Son père Godfried Devreese était lui-même compositeur et chef d’orchestre. Malheureusement, peu de disques témoignent de son activité, hormis quelques rares albums principalement édités par le label « Marco Polo ». Le chef Christian Schumann dirigera le Brussels Philharmonic Orchestra, avec au piano le virtuose Liebrecht Vanbeckevoort. Un programme à découvrir le mercredi 5 juin 2019 à 20 heures 15 au studio 4. Plus de détails sur www.flagey.be Place Sainte-Croix à 1050 Bruxelles
FESTIVAL : STEAMPUNK Qu'est-ce que le steampunk ? A l’origine, le steampunk est un genre littéraire qui mêle l’esthétique et la technologie de la période victorienne (fin du XIXème siècle) à des éléments de science-fiction. Ses histoires se déroulent dans une réalité alternative (une uchronie) où le progrès technologique est basé non pas sur l’électricité, mais sur la machine à vapeur. Si l’on en retrouve des prémices dans les écrits de Jules Vernes, le terme « steampunk » apparait en 1987 dans une lettre que l’écrivain américain Kevin Jeter a adressé au magasine Locus. L’auteur utilise la dénomination de « steampunk » pour définir les fictions victoriennes qu’il écrit avec ses acolytes Tim Powers et James Blaylock. Le terme « punk » étant ici une référence amusée au Cyberpunk, mouvement beaucoup plus dystopique et basé, quant à lui, sur les technologies cybernétiques plus contemporaines. Véritable mouvement artistique à part entière, le « steampunk » apparait aujourd’hui comme une mouvance résurgente à de nombreux Arts. De la littérature au cinéma, en passant par la bande dessinée ou le jeu vidéo, l’esthétique particulière de ce mouvement est immédiatement reconnaissable et a su fédérer une véritable communauté souvent désignée sous le terme de « vaporistes » ou « steamers ». Saint-Gilles accueillera ce festival avec moult animations qui se déplieront un peu partout, en association avec une série de partenaires fiables, dont le Centre culturel Jacques Franck. Il investira également l’espace public en proposant un grand marché d’artistes sur la place Morichar (ou le Carré de Moscou selon autorisations communales), ainsi que de nombreux spectacles (équestres et théâtraux), jonglerie, impromptus contés, etc. A l’occasion de l’événement, le Musée d’Art Fantastique sera également accessible et le Centre d’Art Fantastique accueillera, entre autres, un labyrinthe basé sur les romans de Jules Verne, un carrousel rétro futuriste dénommé le « manège des vaporistes » ainsi qu’un marché d’artisans d’art. Les visiteurs pourront également profiter d’animations telles la soucoupe des steamers ou le train futuriste. Un atelier badge et un passe-tête seront également proposés et la cafétéria, avec des collations et de la petite restauration spéciale inspirée par la thématique en cours. Le Centre Culturel Jacques Franck participera à l’événement à travers la programmation de films liés à la thématique de l’événement et un petit train touristique assurera la liaison entre les divers lieux. Ce festival se déroulera les samedi 8, dimanche 9 et lundi 10 juin 2019. Voyez tous les détails sur le site www.fantastic-museum.be Sam Mas
HUMOUR : VÉRONIQUE GALLO Née le 27 octobre 1976 à Liège, Véronique Gallo est humoriste, comédienne et écrivaine. Après trois one-woman-shows, un roman et une pièce de théâtre, elle apparaît chaque jour sur RTL-TVI dans des capsules intitulées « Vie de mère ». L’occasion de découvrir son existence de fiction entre son mari Bertrand et leurs quatre enfants. Pas une sinécure lorsqu’on cherche à devenir une maman parfaite et qu’on se trouve confrontée aux aléas du quotidien. Assurément, on se doute qu’elle puise une partie de son inspiration dans son vécu, qu’elle tourne en dérision pour rire des avanies et faire rire. Des chaussettes qui traînent, des leçons à faire réciter, une activité de maman-taxi, des week-ends sans temps mort, des nuits blanches et des matins tête de travers, voilà le quotidien d’une maman qui ressemble à toutes les autres et qui vit à cent à l’heure pour ne pas se laisser phagocyter par le temps qui la harcèle. Au demeurant, Véronique Gallo profite de son « One Mother Show » pour dire tout haut ce que toutes les mères pensent tout bas. Un régal sans complexes et plein de drôlerie à applaudir sans calcul le 17 mai 2019 au Cirque royal. Plus de détails sur le site www.cirque-royalbruxelles.be Rue de l’enseignement, 81 à 1000 Bruxelles André Metzinger
EXPOSITION : FANTASTIQUE JEAN RAY Aujourd’hui, Jean Ray est glorifié, admiré. Et ceux, innombrables, qui se passionnent pour ses œuvres lui vouent un véritable culte (un culte presque maniaque). Quand par exemple ils en arrivent à posséder un de ses livres en version originale, c’est comme s’ils tenaient entre les mains un précieux incunable. Pour eux, l’homme est à prendre sans aucune réserve. Avec d’emblée tous les partis pris favorables. Par extraordinaire, sa vie les intéresse peu ou prou et, fatalement, ils l’acceptent avec ses parts d’ombre et ses légendes. Il a été raconté que Jean Ray aurait bourlingué aux quatre coins du globe, qu’il aurait été trafiquant d’armes, d’alcool, d’ivoire, de diamants dans les années 20 ou 30, qu’il aurait dompté des fauves dans un cirque, qu’il aurait activement participé à la prohibition aux Etats-Unis, qu’il aurait été bourreau à Venise, pirate dans les mers lointaines, gangster à Chicago. Bref, qu’il aurait vécu mille existences remplies de rebondissements et chargées d’adrénaline. Jamais, l’auteur ne s’est échiné à séparer le vrai du faux, s’amusant à ne pas démêle le clair de l’obscur. A-t-il participé à tout cela ? Les sceptiques doutent forcément, tout en se heurtant à des obstacles biographiques. Au demeurant, Jean Ray demeure insaisissable, coincé entre rumeur et vérité. Il a même eu le privilège d’entrer de son vivant dans le mythe, devenant pour beaucoup un des pères du récit fantastique moderne. Il a puisé son style dans la littérature américaine plutôt que dans le courant européen, même si le lecteur décèle ci et là des traits bien de chez nous, avec des descriptions flamboyantes, un goût prononcé pour les vieilles pierres, les reliques et les ruelles aux façades austères. Son fantastique accuse un étonnant syncrétisme entre le connu et l’inconnu, entre les signes extérieurs de la mythologie chrétienne et ses mystères essentiels. Avec lui, les certitudes humaines ne sont pas la rédemption ni la sérénité, mais l’effroi et l’épouvante. L’agression provient toujours de l’extérieur, de l’autre, du monde invisible que nous ne soupçonnons pas. Auteur de multiples nouvelles, du roman « Malpertuis » et de la saga des enquêtes de Harry Dickson, le Sherlock Holmes américain, il a vu ses textes couronnés par une réédition souhaitée par Marabout quelques années avant sa mort, devenant pour beaucoup un exemple à suivre, un écrivain prolixe et flanqué d’une imaginaire intarissable. Il écrivait vite, se relisait peu et ratait rarement la cible à atteindre. Jusqu’au 26 mai 2019, la Maison Autrique propose une exposition intitulée « Fantastique Jean Ray », dont l’objectif est de nous coller dans les pas d’un artiste hors normes et finalement pas suffisamment étudié dans les écoles. Plus de détails sur le site www.autrique.be Chaussée de Haecht, 266 à 1030 Bruxelles Daniel Bastié
CINEMA : MALPERTUIS Grande fresque baroque tirée du roman homonyme de Jean Ray, voilà un film belge mis en scène par Harry Kümel en 1972, servi par un casting international : Mathieu Carrière, Orson Welles, Michel Bouquet, Jean-Pierre Cassel, Susan Hampshire, Sylvie Vartan, Johnny Hallyday, …. Aussi une curiosité au tempo envoûtant qui prouve que le cinéma fantastique n’est pas que l’apanage d’Hollywood. Les habitants de cette maison maudite sont contraints de vivre dans un lieu retiré de tout, où rôdent des ombres étranges, où chacun dissimule un secret redoutable, où les meurtres sanglants se succèdent. A la tête de cette demeure trône le vieux Cassave, patriarche étrange qui au cours de ses voyages passés a recueilli les dieux de l’Olympe agonisants et les retient à l’abri de tous à l’intérieur des murs de la bâtisse. A sa mort, l‘ordre des choses se bouscule. Dans le cadre de la coproduction avec l’étranger, le compositeur Georges Delerue a été choisi pour signer une musique envoûtante, où la nostalgie se combine aux effets harmoniques étranges. Il ne s’agit néanmoins pas d’un traditionnel film d’épouvante. Le réalisateur s’est ici attaché à restituer une ambiance baroque visuellement très belle. Le montage a connu deux versions pour l’exploitation internationale. L’une en anglais et l’autre en français. Trop peu connu et rarement diffusé à la télévision, ce long métrage demeure une curiosité. La Cinematek a décidé de le projeter sur grand écran le dimanche 28 mai 2019 à 18 heures. Une occasion de voir ou de revoir un chef-d’œuvre méconnu ! Plus de détails sur www.cinematek.be Rue Baron Horta, 9 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié
HUMOUR : LES CHEVALIERS DU FIEL Les Chevaliers du Fiel sont de retour avec "Camping-Car For Ever". Tout comme dans les trois spectacles précédents, on retrouve des quidams qui traversent l’existence en souhaitant profiter de chaque instant avec désinvolture, ahurissement ou spontanéité. Cette fois, le duo décide de se procurer un camping-car et de se lancer, pour la toute première fois, dans l'aventure des vacances en roulotte. Une réelle épopée au cours de laquelle, chaque soir, les protagonistes doivent chercher où passer la nuit et évaluer combien ce mode de vacances itinérantes va leur coûter. Bien sûr, il ne s’agit pas d’une critique sociale, mais d’un show plein d’humour, qui croque les petits traits, les habitudes, les frustrations, les élans d’humeur. Le camping-car en question ne consomme pas que du carburant. Les arrêts sont célébrés à coups de rosé et de grosses blagues. Venez découvrir l’escale de Les Chevaliers du Fiel au Cirque royal le 22 mai 2019 à 20 heures. Plus de détails sur le site www.cirque-royal-bruxelles.be Rue de l'Enseignement, 81 à 1000 Bruxelles Sam Mas
CONCERT : BRYAN ADAMS Après une année 2018 marquée par un album Best Of et un show détonnant au Palais 12, l’icône canadienne nous réserve cette année d’autres belles surprises. A commencer par la sortie de « Shine A Light », son quatorzième album studio, suivi d’une toute nouvelle tournée qui passera bien entendu par la Belgique ! Bryan Adams sera à Forest National le vendredi 14 juin 2019 pour un concert qui s’annonce explosif ! Avec quarante ans de carrière au compteur, une kyrielle de tubes incontournables, une voix reconnaissable entre toutes et des récompenses à la pelle, Bryan Adams est l’un des musiciens les plus respectés de la scène internationale. Bête de scène au charisme dévastateur, c’est avec beaucoup de bonheur qu’il reprendra la route en 2019. Entertainer hors pair et artiste talentueux, Bryan Adams procure un plaisir indescriptible à chacune de ses apparitions, entre découverte de nouveaux morceaux ou tubes indémodables. Plus de détails sur www.forest-national.be Avenue Victor Rousseau, 208 à 1190 Bruxelles
EXPOSITION : AU-DELÀ DE LA GRANDE GUERRE : 1918 – 1928 Après la Première Guerre mondiale, la Belgique (à l’image du reste du monde) subit de profondes mutations. La société est fortement ébranlée mais, en même temps, elle revit. Dans l’exposition « Audelà de la Grande Guerre : 1918-1928 », le War Heritage Institute explore plusieurs thèmes majeurs tels que l’offensive finale, la libération, la période d’après-guerre, les révolutions géopolitiques, mais aussi la reconstruction économique, le processus de deuil et la mémoire, les changements sociopolitiques et socioculturels. Cette manifestation présente des pièces exceptionnelles provenant des riches collections du WHI, de musées nationaux et internationaux. Les décors et les témoignages des « Années folles », ainsi que des outils interactifs, réservent au visiteur leurs lots de surprises et d’émotions. Un catalogue volumineux accompagne l’exposition afin d’illustrer en profondeur le contexte de cette période mouvementée. Un événement à voir jusqu’au 22 septembre 2019 au Musée Royal de l'Armée et d'Histoire Militaire. Plus de détails sur le site www.khm-mra.be Parc du Cinquantenaire, 3 à 1000 Bruxelles Sam Mas
CINÉMA : AFTER Comédie romantique de Jenny Gage, avec Josephine Langford, Hero Fiennes Tiffin, Selma Blair et Dylan Arnold. USA 2019, 103 min. Sortie le 17 avril. Résumé du film – Tessa a la vie devant elle quand elle rentre à l’université : de bonnes notes, la volonté d’y parvenir et un mariage tout tracé avec son fiancé Noah, qui a les faveurs de sa mère. Jusqu’à ce qu’elle croise Hardin, un condisciple d’auditoire grossier, provocateur et cruel. C’est le garçon le plus détestable qu’elle ait jamais rencontré. Et pourtant, ce bad boy tatoué, au sourire ravageur, va lui faire perdre tout contrôle sur sa vie bien rangée, vouée aux études. Initiation, jalousie, mensonges, est-ce une histoire destructrice qui commence pour elle ou un amour absolu qui va les lier ? Commentaire – Avant lui, elle contrôlait sa vie. Après, elle ne sait plus, tout se brouille dans son cœur. Cette romance pour teen-agers est adaptée d’un récit d’Anna Todd publié en 2014 sur Wattpad, un site américain de fictions à partager. After fera fureur auprès des jeunes qui se délecteront de cette histoire d’amour finissant mal, sur la découverte des pulsions sexuelles d’une adolescente. Succès oblige, c’est devenu, après parution, un best-seller recensé dans les pages du New York Times. Jenny Gage a été choisie pour réaliser ce film qui est son premier long métrage, tourné en Géorgie l’été passé. Elle en fait une romance qui plaira aux filles friandes de se découvrir à travers les émois de Tessa pour ce beau ténébreux. On retiendra deux scènes de leurs ébats : d’abord celle où les deux amoureux se baignent dans un lac, le garçon nageant autour de la fille pour l’appâter et la séduire. C’est un morceau de bravoure où les yeux, filmés en gros plan, se disent tout. Et puis, il y a la scène où Hardin déflore Tessa avec tact et tendresse : cela fera rêver bien des cœurs féminins. Ces deux scènes nous rappellent Les 50 nuances de Grey, sans le côté sadomasochiste du film qui est ici gommé pour un public plus jeune. Il en reste ce jeu cruel poursuivi par notre mauvais garçon, qui a parié avec ses copains de séduire la jeune étudiante. Il en sera bien marri, s’apercevant trop tard que le jeu a mis en péril les sentiments qu’il avait pour elle. Le jeune couple est interprété avec brio par l’actrice australienne Joséphine Langford (la sœur de Katherine) et par Hero Fiennes Tiffin, l’acteur anglais qu’on a pu voir, enfant, dans Harry Potter et le Prince de sang-mêlé (2009). Ils forment un beau duo : l’ingénue face au garçon rebelle, dont elle veut changer le cœur et la personnalité. Avis – Une romance à l’eau de rose sur l’éveil sexuel des jeunes, sur leurs émois et leurs ébats. N’eston pas tous passé par là ? Michel Lequeux
CINÉMA : NOUS FINIRONS ENSEMBLE Comédie dramatique de Guillaume Canet, avec François Cluzet, Marion Cotillard, Gilles Lellouche, Pascale Arbillot, Clémentine Baert, Valérie Bonneton. France 2019, 135 min. Sortie le 1er mai. Résumé du film – Acculé par les dettes, Max est venu se ressourcer dans sa propriété au bord de l’océan avant de la mettre en vente. Sa bande de copains, qu’il n’a plus vus depuis trois ans, débarque tout à coup à l’improviste pour fêter son anniversaire. Dérangé dans sa retraite, Max les accueille d’abord froidement, même si sa nouvelle copine Sabine plaide en leur faveur. Les enfants ont grandi, les couples se sont séparés, les accidents de la vie ont changé les rapports entre eux. Que reste-t-il de leur amitié passée, quand chacun a repris ses billes ? Commentaire – Nous finirons ensemble est le sixième long métrage de Guillaume Canet, César du meilleur réalisateur pour Ne le dis à personne (2007) mais connu également pour sa passion des chevaux avec lesquels il aime sauter les obstacles. Ici, il risque bien de se retrouver par terre comme il l’a déjà été dans le passé, ce qui l’avait fait renoncer à l’équitation. Cette comédie dramatique est en effet trop longue (elle dure plus de deux heures) et beaucoup trop touffue. Si l’on n'a pas vu Les Petits Mouchoirs (2010) dont elle est la suite avec les mêmes acteurs, on s’y perd dès les premières minutes. Et quand bien même on l’aurait déjà vue, d’ailleurs. Ainsi avec Marie, l’alcoolo hystérique campée par Marion Cotillard, qui arrive à la villa en taxi avec un fils dont elle ne peut s’occuper : à un certain moment, elle s’épanche entre les cris, les larmes et la déprime, en disant qu’elle ne peut plus vivre « sans lui ». Mais qui est-ce parmi cette bande de joyeux lurons qui se prennent pour des ados attardés, où les couples se font et se défont au fil des vacances ? Qui est-ce donc ? On ne le saura pas, quitte à tisser des liens entre eux tous dans cette toile d’araignée. Comme c’est le cas d’ailleurs dans l’existence, où tous ces acteurs et actrices sont les amis du réalisateur qui les a réunis pour refaire un film ensemble. On a vraiment l’impression que Guillaume Canet et ses potes signent ici une comédie à bureau fermé dont ils tiennent les clés. De même encore pour Max, le propriétaire incarné par François Cluzet, dont l’ex-femme Valérie Bonneton joue aussi son ex dans la comédie : acculé par les banques mais faisant tout pour paraître à l’aise, il finit par craquer devant ses amis et il songe au suicide. La scène atteint son paroxysme quand il fait mine de se pendre au-dessus du ponton de sa propriété. Manque de pot, la corde est trop longue comme pour le film, et il tombera à l’eau comme le film aussi. Tous ses copains s’y jettent ensemble pour le ramener, pantelant, sur le rivage. On est en plein pathos, le pathétique se prolongeant quelques scènes plus loin avec toute la bande qui se porte au secours des enfants partis seuls en mer sur un catamaran. Que va-t-il arriver ? Devinez... N’est pas Claude Sautet qui veut après Vincent, François, Paul... et les autres. Guillaume Canet risque bien de chuter dans cette suite rocambolesque, mal fagotée, malgré les acteurs de bonne volonté, chacun étant bon pris séparément, François Cluzet, Marion Cotillard, Gilles Lellouche et... tous les autres. Mais vont-ils « finir ensemble » leur carrière ? Le tournage a débuté en mars 2018 sur le bassin d’Arcachon, notamment au Cap Ferret en Gironde, dont on reconnaîtra la longue presqu’île. Avis – A voir si on fait l’impasse sur l’intrigue et si on y va pour pêcher à la ligne dans cette bande de copains réunis. Michel Lequeux
CINÉMA : TEL AVIV ON FIRE Comédie dramatique de Sameh Zoabi, avec Kais Nashef, Lubna Azabal, Yaniv Biton et Maisa Abd Elhadi. Coproduction internationale (Luxembourg, France, Israël et Belgique) 2018, 1 h 37. Sortie le 1er mai. Résumé du film – Salam, trente ans, est Palestinien et vit à Jérusalem. Il est stagiaire sur le tournage d’une série à succès, Tel Aviv on Fire, dont il assure la traduction de l’arabe en hébreu. Chaque jour, il traverse le même check point pour se rendre dans les studios de Ramallah situés à dix km de la frontière. Un jour, il se fait arrêter par un officier israélien et, pour s’en tirer, il prétend être le scénariste de la série. L’officier va lui demander de rectifier cette série dont sa femme est une adepte convaincue. Pris à son propre piège, Salam met les doigts dans l’engrenage d’un mélodrame sulfureux, où plus rien ne se passera comme prévu. Commentaire – A partir d’un soap opera qui tient les femmes rivées à l’écran, les Palestiniennes comme les Israéliennes, cette comédie dramatique de Sameh Zoabi multiplie les points de vue sur la situation en Israël. Elle donne du fil à retordre à la fin qui n’arrête pas de changer, au fil des rencontres entre Salam et l’officier en poste qui veut mettre son grain de sel dans le scénario. L’espionne Rachel arrivera-t-elle à faire sauter Tel Aviv ou tombera-t-elle dans les bras du général qui la drague ? C’est la question que se renvoient les Israéliens et les producteurs arabes à travers le scénario que le malheureux Salam doit réécrire chaque jour pour passer le check point et se rendre aux studios de Ramallah. C’est ici qu’on goûte à l’humour du film, cet houmous dont raffole l’officier que Salam approvisionne chaque matin avec ses intrigues (un peu comme Shéhérazade le faisait dans les Mille et une Nuits). L’occasion aussi de voir dressé tout près, en béton, le fameux mur séparant l’Etat d’Israël de la Cisjordanie, avec les soldates de Tsahal qui ne sont pas, elles, des « bombes » mot malheureux employé par le général israélien pour qualifier la séduisante Rachel. L’espionne est incarnée par Lubna Azabal, actrice belge née à Bruxelles d’un père marocain et d’une mère espagnole, qui a reçu le prix Magritte de la meilleure actrice pour son rôle de mère martyre dans Incendies de Denis Villeneuve (2010). Elle joue ici le rôle de la « bombe » vivante qui explosera peutêtre à la synagogue, où elle doit rejoindre son futur époux si le scénario n’est pas changé entre-temps. Il le sera pour le plus grand bonheur des fans de la série et pour celui du scénariste amateur campé par Kais Nashef, astucieux et drôle tout à la fois. Acteur israélien, Kais parle couramment l’arabe, l’hébreu, l’anglais, l’allemand (sa mère est allemande) et même le français. Un comédien polyglotte, bien fait pour interpréter le traducteur de la série. Il a reçu, lui aussi, le prix du meilleur acteur lors de la Mostra de Venise en 2018. Avec un producteur (Nadim Sawalha) qui accepte que les scènes soient revues et corrigées pour le succès du film et pour de nouveaux accords d’Oslo. Etonnant de la part d’un producteur arabe travaillant à la cause palestinienne, mais apparemment pas impossible. Avis – Enfin une comédie agréable, bien faite et bien jouée, avec beaucoup d’humour et de clins d’œil sur la situation politique, qui nous fait voir que tout reste jouable en Israël pour arranger les tensions entre Palestiniens et Israéliens. En tout cas pour la moitié du pays. Michel Lequeux
CINÉMA : SÉDUIS-MOI SI TU PEUX Comédie romantique de Jonathan Levine, avec Charlize Theron, Seth Rogen, June Diane Raphael et O’Shea Jackson Jr. USA 2019, 120 min. Sortie le 15 mai. Résumé du film – Charlotte Fields, brillante diplomate, est l’une des femmes les plus en vue de la Maison Blanche. A l’inverse, Fred Flarsky est un journaliste mis au chômage pour ses opinions politiques trop tranchées et parce qu’il s’attire tous les ennuis du monde. Tout les sépare donc, sauf qu’elle fut sa baby-sitter et qu’ils ont en commun des souvenirs d’enfance. En course pour devenir la première présidente des Etats-Unis, Charlotte décide de l’engager pour écrire ses discours. Très vite, leur collaboration va se doubler d’un amour improbable. Très vite aussi, l’allure débraillée, l’humour caustique et le franc-parler de Fred vont porter ombrage à la campagne de Charlotte. Commentaire – On aimerait tous croire à cette romance entre une politicienne qui a du charme, de l’entregent et l’intelligence, et un journaliste bourru, mal à l’aise dans ses vêtements de vieux garçon. C’est sur cette rencontre difficilement compatible que joue la comédie romantique Long Shot, « coup foireux », pourrait-on traduire. Elle est signée Jonathan Levine, réalisateur et scénariste américain, auteur de plusieurs comédies aventureuses, voire parodiques (Larguées, 2017). L’humour juif new-yorkais y triomphe avec Seth Rogen, humoriste pince-sans-rire volontiers balourd, qu’on a vu dans 40 ans, toujours puceau, énorme succès aux EtatsUnis, et dans En cloque, mode d’emploi, où il incarne un glandeur devant assumer la grossesse non désirée d’une aventure d’un soir. Il est à l’aise pour jouer ce journaliste mal fagoté dans ses vêtements, à la plume acerbe, qui tombe sous le charme de celle qui l’a engagé pour écrire ses discours. Il n’a pas son pareil pour s’étaler en public, faire rire l’assistance et pouffer la femme à qui il veut plaire. Cette femme, belle et piquante, est interprétée par Charlize Theron, top model et actrice sud-africaine naturalisée américaine, qui ne paraît pas son âge derrière sa silhouette élancée. On l’a vue à diverses reprises, notamment dans Atomic Blonde où elle incarnait la nouvelle James Bond girl de l’action. Elle fut la compagne de Sean Penn. Elle a été récompensée par l’Oscar de la meilleure actrice pour l’Affaire Josey Aimes. Elle est active dans la lutte contre le sida en Afrique du Sud et milite ici, avec son « nègre », contre la déforestation dans le monde. Ils forment à eux deux le couple improbable de la belle et la bête, aussi dérangeant que les dégringolades spectaculaires auxquelles se livre Fred, sans coup férir. Le contrepied en somme des comédies classiques, genre Pretty Woman. Petit clin d’œil aussi au fait que les hommes n’aiment pas les femmes trop intelligentes et trop puissantes, qui ne leur consacrent que cinq minutes d’intimité par jour, le temps d’un fol égarement vite fait, bien fait. Fred, lui, s’en accommode sur un canapé, entre deux speechs à écrire. Avis – Malgré une certaine longueur et des scènes qui se répètent, cette comédie donne envie d’y croire. Humour caustique et débridant pour parler du sexe et de l’intelligence sur le canapé de la Maison Blanche. Il en a vu d’autres. Michel Lequeux
TINA NOIRET, LES MOTS AU NET ! “L’u-topie du cyberspace, ce lieu “sans lieu”, est aussi le seul endroit au monde, à cause de son impossibilité, de son inexistence même, à permettre quelque chose comme une forme d’écriture. Impossible. Blanc sur noir, ainsi ce qui s’écrit s’efface au fur et à mesure. Art alternatif ? Nouvel “art pauvre” ? Art des pauvres ?” Une question fondamentale que pose et se pose Tina Noiret dont les passions sont la littérature - particulièrement la poésie -, les nouvelles technologies de l’information et de la communication (TIC) avec leurs implications sur le plan sociétal, humain et historique. Justice sociale et égalité en droits animant aussi profondément cette femme “aux mille récits, aux mille éclats, aux étincelles héritées d’ailleurs et d’autrefois” (cfr.BELA) qui a rédigé en 2013 un remarquable article “Espace numérique; mutation de l’auteur et fragmentation de l’œuvre ?” pour Action et Recherches Culturelles (ARC). Tina est également l’auteure de l’audacieux projet “L’Art à l’œuvre” qui a pour but d’établir un pont entre art et emploi par la mise en place de projets créatifs, individuels ou collectifs. Une autre de ses motivations profondes : “Un statut pour l’artiste, et le statut d’artiste pour tous. Appliquer l’art au politique, c’est revenir aux racines de la création et du possible humain.” Un programme ambitieux mais crédible et réaliste, qui devrait nous rendre le monde plus accessible, respirable, par bien des aspects. Licenciée en philologie romane, titulaire d’une agrégation, formée en informatique, certifiée en gestion des connaissances (ULB) et même experte en NTIC, Tina Noiret est l’auteure de nombreuses études (scientifique, technique et pédagogique), traductions, manuels de cours, nouvelles et romans; elle a également dans sa vie multiplié les fonctions. Formatrice, consultante pluridisciplinaire, project manager, responsable de la gestion de l’information et des connaissances, de la communication interne et externe dans le programme SFP financé par l’Union européenne, etc. Dans le domaine littéraire, mentionnons parmi ses œuvres “Chants Perdus”, l’œuvre d’une longue tranche de vie se voulant méditation philosophique s’en référant aux philosophes Kierkegaard et Maurice Blanchot ; “La Femme invisible”, roman touchant, puissant, au style narratif entraînant, d’une grande finesse, un drame de la solitude et de l’exclusion ; “Le Caprice des Dieux”, histoire d’une passion déchirante, destructrice, également voyage entre présent et passé, rêves et réalité. Une tragédie moderne, étrange et envoûtante. De nombreux lecteurs trouvent la plume de Tina Noiret subtile, profonde, géniale et la rencontrer mène à s’enrichir personnellement car l’on s’imprègne sans conteste de la profonde humanité de notre poétesse aussi bien présente sur les réseaux sociaux, Booktube et Youtube. Et si nous lui laissions le mot de la fin ? “ Je vous invite à un voyage poétique au cœur du cyberspace et aussi dans l’intimité qui est le lieu de la littérature parce que l’on peut réenchanter nos vies.” Thierry-Marie Delaunois
RENCONTRE : KATE MILIE Vous êtes amoureux de Bruxelles ? Vous êtes à la recherche de lieux insolites ? Vous aimez les balades décalées ? Vous aimez l’art déco, l’art nouveau mais aussi les recoins oubliés de la ville ? Alors, précipitez-vous dans votre librairie préférée et commandez sans attendre un livre de Kate Milie. Ses trois polars mettent Bruxelles en scène. « L’assassin aime l’Art déco » vous emmènera enquêter dans des lieux emblématiques de l’entre-deux-guerres (Palais des Beaux-Arts, hôtels chics, « maisons de rendez-vous »). Avec « Noire jonction », les gares bruxelloises n’auront plus aucun secret pour vous ! « Peur sur les boulevards », 1er polar consacré au piétonnier, mélange meurtres, secrets ésotériques, voûtement de la Senne et errance contemporaine. Et... à découvrir d’urgence : « Bruxelles Love » tout frais sorti des imprimantes. Edité par 180° éditions. Ce livre nous présente soixante lieux vibrants « où se donner rendez-vous » Alliant statues, réverbères, bancs publics, hôtels glamour, cimetières légendaires, coins charmants, détours charmeurs et promenades parfois insolites…une invitation à (re)découvrir une ville mystérieuse, à travers son patrimoine amoureux. Extrait : Rendez-vous devant le cœur de lumière de la tombe Evrard (cimetière de Laeken), etc. A chaque solstice d’été, lorsque le soleil pénètre par l’ouverture de la toiture, un merveilleux cœur lumineux se forme lentement et illumine le petit temple … 180°éditions est une maison d’édition indépendante. Elle publie romans, essais et beaux livres consacrés au patrimoine bruxellois. Elle a lancé en 2008 « Bruxelles ma belle », une collection mêlant textes d’auteurs accompagnés de photographies. Elle vient de lancer « bxl », une collection de petits livres faciles à glisser dans sa poche et à emmener en promenade. « Bruxelles Love » est le tout premier opus vendu au prix de 12€. Plus de détails sur le site https://katemilie.wordpress.com Silvana Minchella (Retrouvez les ouvrages de Silvana Minchella sur le site www.ecrivainsbelges.be) CONCERT : VANESSA PARADIS Révélée à quinze ans avec la chanson « Joe le taxi » d’Etienne Roda-Gil et Franck Langolff, Vanessa Paradis connaît en quelques semaines une notoriété à laquelle elle ne s’attendait pas. Le hit devient un tube international et connaît une prolongation aux Etats-Unis, au Canada et en Israël, avant de bénéficier d’une adaptation espagnole. Forcément, les compositeurs se l’arrachent, dont Serge Gainsbourg, qui en fait l’une de ses égéries. Le réalisateur Jean-Claude Brisseau lui donne l’opportunité de faire ses premiers pas à l’écran. Il s’agit du controversé « Noces blanches » (1989), histoire d’amour obsessionnelle entre un enseignant et une de ses élèves. La justesse de son jeu surprend tout le monde. Pour elle, les tournages s’enchaînent : « Elisa » face à l’ogre Depardieu, « Une chance sur deux » entre les stars Delon et Belmondo, « Atomik Circus », ovni kitsch totalement indéfinissable, et une série d’autres longs métrages plus confidentiels. Sur le plan discographique, elle enchaîne les hauts et les bas, entre parfois plusieurs années de silence. Tout un temps, sa vie privée fait la une des journaux, notamment lorsqu’elle épouse le comédien Johnny Deep, puis au moment de leur divorce médiatisé ». Le Cirque royal accueille sa tournée qui passe par Bruxelles les 31 mai et le 1er juin 2019. Plus de détails sur le site www.cirque-royal-bruxelles.be Rue de l’enseignement, 81 à 10 André Metzinger
BALADE DU CÔTÉ DE FLAGEY Bétonnée, la place Flagey (de son vrai nom : place Sainte-Croix !), désertique la nuit, mal éclairée et conviviale comme le disent les écolos, se caractérise par une absence totale d’arbres, sauf un de couleur jaune : une sorte de cheminée d’aération au-dessus d’un parking qui fut longtemps aquatique. Jadis un étang se nichait en lieu et place de la place Sainte Croix ! Non loin de là, la rue de la Brasserie est située la typique rue du Serpentin qui a toutes mes faveurs : souvenirs tenaces. Ce fut bien dirait d’Ormesson. J’aime le serpentin : c’est un merveilleux ruban de papier enroulé sur lui-même que l’on déroule dans les fêtes où on le fait onduler ! Le serpentin fait penser au serpent et se dit d’une rue qui ondule ! Remarquons au passage de la Bourse ceci : le serpentin est aussi d’alambic et non celui de monsieur Lambique ! C’est en cette rue charmante que je fus un client choyé huit agréables années dans un petit restaurant nommé « La Rondina » : cela signifie joliment « l’Hirondelle ». J’y passai des moments heureux et délicieux non point pour autant les délices et les moments de Capoue, mais ceux des Pouilles. La maman était aux fourneaux, accompagnée de son accorte et vivifiante très jeune fille. Gino, le fils des patrons officiait aussi à « L’Hirondelle ». Il possédait déjà le sens de l’humour ! Trente-cinq ans plus tard Gino officie comme patron au sympathique restaurant « Vesuvio », à Etterbeek, où l’on me connaît sous le nom de Fachetti, un ancien international de foot italien ! Son épouse est aux fourneaux et son fils est en salle. C’est un spécialiste des sabaglione. A la défunte « Rondina », je rencontrai nombre de journalistes de la RTB et une chanteuse classique poussant, au pousse-café, les airs de la Norma ou de la Cantatrice Chauve (ce qu’elle n’était nullement !) et sa noble et superbe voix fendillait les verres en cristal de St Lambert ou de Bohème Moravie ! Elle officiait à l’Orchestre de la RTB, station qui n’était pas assortie d’un F vengeur. Grande, bien mise, j’étais épastrouillé par son talent et sa prestance, sans en devenir djoum djoum comme dit aux Marolles. Ah, cette voix à nulle autre pareille ! A deux pas de la rue du Serpentin, se nichait l’excellent « Yougo Grill ». J’aimais manger aussi chez le Portugais Joao rue Gray, me perdre dans le coin de la rue du Cygne ou de Venise où je connus la délicate et féminine journaliste et scénariste italo-belge de B.D. Gabrielle Borile, belle scénariste de la série de l’Inspecteur Sackeville. Nous sortîmes aussi dans un lieu « encore plus historique », place de Londres, nommé « La Houblonnière » ; là, le soir se couchait tôt. Je connus, chez elle, à Ixelles, l’un des anniversaires les plus superbes de ma chienne d’existence ! C’était le sien ! Nostalgie aussi des étangs de Woluwé, où tant de fois je fus, dévalant en luge une solide pente qui finissait sur la glace de la pièce d’eau. En été, les canards parlent anglais comme au « jardin extraordinaire de Charles Trenet. Nous n’étions pas des « flàs » en ces temps-là ! Mêmement je me souviens de nos « expéditions » dans les fourrés et les dunes du quartier de l’Europe où nous cuisions des « canadas », fumions en cachette des Sprint ou des Zémir ou des Johnson ! Nous gaulions un noyer et un pommier ou un arbousier aux subtils fruits âpres rouges comestibles, semblables à de grosses fraises ! A ne pas confondre, de grâce, l’arbouse, fruit de l’arbousier et l’argousin qui est le gardien des forçats ou le flic ! Que de souvenirs ! Non loin de l’actuelle nonciature du Vatican, se nichait une belle propriété disparue sous les balles du béton. C’est là que nous gaulions gaîment, ayant franchissant les hauts murs d’enceinte ; nous mangions là des fruits cachés dans les halliers et communs. Le majordome ou le concierge des lieux nous poursuivait dans les chemins, mais la vitesse de notre course aurait fait pâlir d’envie nos coureurs Pennewaert, Roger Moens ou les frères Borlée ! Pour nous venger de nos frayeurs, nous placions dans la boite aux lettres, ou un tuyau d’évacuation, de solides pétards qui secouaient le repos des guerriers et des châtelains. « Boum » ! Un petit bunker, datant de la Deuxième Guerre, nous servait d’abri. Une après-midi, Serge Flabat, notre « troubadour », manqua se noyer dans un puits. L’un de nous l’agrippa (sans d’Aubigné) par les ripatons et le sauva courageusement d’un sort cruel et indigne de nos équipées. Jean-Louis Cornellie
CELEBRATING JOHN WILLIAMS Né en 1932 à New York, John Williams a étudié la musique à l’Académie de Los Angeles, avant de se mettre au service des studios d’enregistrement et de travailler comme pianiste et orchestrateur. Assez vite, son talent de compositeur a été remarqué et le cinéma comme la télévision ont fait appel à ses services. Au cours des années 60, il s’est penché sur des productions mineures et a dû attendre la venue de Steven Spielberg qui, dès son deuxième film, l’a engagé à créer une partition originale pour le requin « Jaws ». Dès lors, sa réputation a traversé l’Atlantique et en a fait l’un des artisans les plus acclamés dans le monde. Les triomphes se sont enchaînés : « Star wars », « Superman », « Tremblement de terre », « La tour infernale », « La bataille de Midway », « Indiana Jones », « E.T. », « Jurassic Park », « Harry Potter », etc. Il est devenu l’homme le plus applaudi aux Oscars avec cinq statues et cinquante nominations, soixante-six nominations aux Grammy Awards (dont vingt-deux victoires), vingt-cinq nominations aux Golden Globe (avec cinq prix) et six nominations aux Emmy Awards (dont il s’est emparé de trois récompenses). Même s’il est beaucoup moins actif qu’hier, on garde le souvenir d’un professionnel accompli, qui a offert au septième art des œuvres majeures, connues et archi-connues, gages d’un cinéma populaire de qualité, fait pour divertir et éblouir. On sait un peu moins que durant plusieurs années, il a dirigé le Boston Pops Orchestra et a noirci les portées de pièces classiques, destinées à l’univers du concert. Aujourd’hui, le chef vénézuelien Gustavo Dudamel lui rend hommage à la tête du Los Angeles Philharmonic et propose un double album qui couvre l’essentiel de la carrière d’un musicien inspiré et qui a relancé la mode des scores flamboyants dignes du vieil Hollywood, évitant les clichés, soignant la mélodie et cherchant à éviter la redondance. Le programme s’ouvre avec « Olympic fanfare » et balise des territoires aussi connus que « Close encounters of the third kind », « Jaws », « Harry Potter », « Schindler’s list », « The extra-terrestrial », « Hook », « Jurassic park », « Indiana Jones », « Memoirs of a geisha », « Star wars » et « Superman ». Pas des incunables, mais des standards qu’on prend toujours plaisir à retrouver et qu’on découvre dans une version légèrement différente de celles qu’on possède. Avis aux amateurs ! CD Deutsche Grammophon - 13 titres Daniel Bastié
DANSE MODERN JAZZ : ODE À LA VIE Créée au cours des années 20 aux États-Unis, la danse Modern Jazz se veut un métissage et brasse le classique, le jazz, les influences hispaniques et africaines. Sans jamais omettre la technique, elle possède ses propres codes et se veut très physique ou sportive. Corps et rythmes fusionnés, elle donne à voir des prestations éblouissantes au potentiel scénique incomparable. Patricia Pascali, formée à la danse classique, s’est initiée au Modern Jazz durant les années 70 et en a fort vite relevé les potentialités. Maurice Béjart l’a engagée dans son école « La leçon » pour enseigner et créer divers ballets. Par la suite, elle a animé des cours et a fait partie de différents jurys, devenue une spécialiste dans le domaine. Aujourd’hui, elle revient sur l’historique du Modern Jazz, part de ses origines et raconte sa longue traversée pour aboutir chez nous. Avec des mots qui se transforment en ode, elle flatte notre sensibilité, titille notre curiosité et nous gratifie de très nombreuses photographies qui donnent vie à ses propos. Au passage, on devine les rythmes de swing, de gospel, de blues et, parmi beaucoup d’autres, des claquettes importées de Broadway. Le résultat a donné naissance à un luxueux volume couché sur papier glacé qui s’inscrit parmi les livres d’art précieux à conserver avec soin, à prêter aux connaisseurs ou à offrir dans le cadre d’un événement particulier (anniversaire, Noël, etc.) Un cadeau comme on les aime ! Ed. Avant-Propos – 318 pages Daniel Bastié
AGATHA CHRISTIE : LES MYSTÈRES D’UNE VIE Qui n’a jamais été saisi d’une soudaine crise de tachycardie en lisant les dernières pages d’un roman d’Agatha Christie ? Observatrice des mœurs, l’écrivaine possédait un talent unique pour mettre en scène des personnages ordinaires et les plonger dans les méandres du thriller. Faits divers lus dans les journaux, ragots de villages, conversations glanées en rue. Rien ne lui échappait et elle consignait ce qui pourrait, peut-être, servir de base à une enquête de Miss Marple ou d’Hercule Poirot, ses héros de plume. Alors que le meurtre est un exercice qu’elle a toujours désapprouvé, elle n’a jamais hésité à le mettre en scène pour bluffer ses nombreux lecteurs, faisant d’elle LA reine du mystère. Comme cela est devenu le cas pour de nombreux auteurs, l’œuvre a éclipsé son existence. Cette dernière a cependant été excitante. Marie-Hélène Baylac s’est donc particulièrement intéressée à la femme plutôt qu’à sa longue bibliographie, révélant que son premier roman est né à la suite d’un pari avec sa sœur, que l’échec de son premier mariage avec un aviateur l’a affectée au point qu’elle a disparu durant une huitaine de jours (tenant en haleine la presse et ses admirateurs inquiets de ne pas la voir apparaître) et que son second mariage avec un archéologue l’a amenée à voyager un peu partout, galvanisant son imagination et lui permettant des descriptions de lieux rares pour l’époque. Eternelle optimiste, elle mordait dans l’existence deux fois plutôt qu’une et se reposait sur ses droits d’auteur, même si une partie de sa fortune lui a échappé, happée par le fisc ou des montages financiers qui ont davantage profité aux siens. Enfin, on apprend qu’elle était passionnée de théâtre et qu’elle a émis le regret de ne pas avoir suffisamment écrit pour l’univers des planches. Ed. Perrin – 414 pages Daniel Bastié
POUR DIEU ET POUR LE ROI Sous l’Ancien Régime, religion et politique étaient étroitement unis, marquant d’un sceau indélébile la vie en société, se trouvant à la base de déchirures et de conflits armés. Hommes d’État, serviteurs de l’Église, philosophes et écrivains, tous se sont enroulés dans des débats qui pourraient paraître incompréhensibles aujourd’hui, alternant des guerres fratricides au nom de Dieu, dénonçant le jansénisme, le quiétisme, etc. François de la Rochefoucauld, Bossuet, Richelieu, Fénelon, LouisAntoine de Noailles, Christophe de Beaumont, André-Hercule de Fleury, François-Joachim de Bernis ont, tour à tour, eu besoin d’exprimer leur avis sur la situation, prêts à défendre leur opinion à travers une prose virulence ou par le sang versé. Du règne d’Henri IV à celui de Louis XVI, on vivait dans une Europe en ébullition constante. Le clergé obéissait au Pape et ce lien d’autorité ne pouvait pas demeurer indifférent aux lois. D’ailleurs comment pourrait-il en être autrement, puisque les hauts dignitaires religieux étaient issus de la noblesse ? Plutôt que de brasser l’Histoire, Marie-Joëlle Guillaume a décidé de s’attacher à certaines personnalités et de les présenter dans leur contexte politico-spirituel. Alliant la rigueur de l’historienne patentée à un style d’une belle limpidité, elle éclaire un pan encore largement méconnu de notre passé et expose en quoi l’alliance inconditionnelle entre le Trône et l’Autel régulait chaque événement et chaque prise de décision. Ed. Perrin – 447 pages Daniel Bastié
ON NE SORT PAS AVEC UN PROF ! Sortir avec un prof n'est pas chose aisée. Surtout lorsqu'on a dixsept ans, qu'on possède quelques kilos en trop et que l'enseignant n'a aucune envie de transgresser un tabou. Puis, les neurones s'activent. Dans son lit, avant de s'endormir, Jocelyne déroule un film de ouf, ne sait plus à quel saint se vouer et se conditionne à croire que tout est possible. Pourtant, il suffirait d'un rien. En amour, il importe de se manifester au bon moment. Ni avant ni trop tard ! Un homme ne peut décidément pas rester indifférent à une jeune femme qui s'offre sans calcul. C'est un peu mal connaître le monde des adultes. Alors, un refus peut déclencher une tornade et faire vaciller la morale. On se situe ici à mille lieues du livre romantique, même si la première partie pourrait laisser croire à cette étiquette. Vengeance et manipulation sont les clés de ce livre d'un peu moins de cent quatre-vingts pages. Quête initiatique, besoin d'expression et recherche de sentiments forts sont les boussoles de ce récit ancré dans le présent et qui nous décrit l'adolescence sous des traits parfois crus. Daniel Bastié est enseignant et connaît l’univers de l’école, une jungle de tous les possibles où certains se servent de leur jeunesse et se croient à l’abri des lois. Néanmoins, à tout âge, on peut déchanter ! Ed. Ménadès – 176 pages Sylvie Van Laere
LA ROUTE DE NUIT Les années 30. Ottie Lee est une rousse plantureuse, coincée entre un patron lubrique et un époux qui la délaisse. Elle se trouve embarquée dans une odyssée macabre qui consiste à assister au lynchage de trois hommes de couleur. A contrario, Calla Destry, jeune métisse adolescente, entend libérer les condamnés en se servant d’un vieux pistolet, capable d’ouvrir le feu. Laird Hunt dresse le portrait de deux femmes meurtries dans un monde d’hommes, où le quotidien ressemble à une servitude. Naturellement, elle se sert du contexte social pour prouver les limites d’un système et dénoncer les inégalités, le racisme, la pauvreté, les violences subies par les plus faibles. Il y a aussi la description de deux êtres blessés et malheureux en quête de bonheur, prêts à tout pour changer le cours des choses, prompts à poser un ultime sursaut salvateur. Qui n’ont pas beaucoup à perdre et beaucoup à espérer. « La route de nuit » est aussi le portrait d’une Amérique déchirée, pleine de contrastes, où la haine fait écho à la peur. Voyage initiatique, huis-clos à ciel ouvert, ce roman multiplie espoirs et déceptions, impatience et résilience, secrets abandonnés et lumière qu’on espère voir pointer sur la ligne d’horizon. Sans le savoir, deux destins se mettent en marche, amenés à se croiser. Un livre dur mais qui ne manque jamais d’atouts. Laird Hunt est principalement connu pour « Neverhome » qui lui a valu le Grand prix de la littérature américaine en 2015. Ed. Actes Sud – 288 pages Sylvie Van Laere
LA GARÇONNE On l’appelait La garçonne, une jeune femme solitaire, qui braconnait dans les bois de Sologne durant l’entre-deux-guerres. Puis, un jour, elle a mystérieusement fui la région pour disparaître, errer ou se terrer. Personne n’a jamais vraiment su. Contre toutes spéculations, au lendemain de l’armistice, elle est revenue dans le village où elle a grandi. Mûre, certaine des gestes à poser, capable de prendre des décisions qui bouleverseront la vie apparemment tranquille de ses anciens voisins. Incapable d’oublier le traumatisme subi et prête à se venger d’un viol ignoble perpétré par deux individus auxquels elle fera payer leur forfait. Il y a un peu de Monte-Cristo dans le nouveau roman de Gilbert Bordes, avec une résiliente sortie des ténèbres et prête à férir sans aucune pitié. A la campagne, il est des secrets qu’on préfère inhumer, des affaires sordides qu’on choisit de taire. Elle se procure un bien immobilier et, loin de dévoiler sa véritable identité, se frotte à ceux qui l’ont blessée dans la chair. Puissamment sensoriel, le texte baigne dans une atmosphère glauque loin de toute échappée lumineuse. L’auteur brosse un portrait de femme qui fait face à l’innommable et qui refuse de baisser les bras. Son douloureux passé devient une arme qui la pousse à progresser. Elle sait également que les années noires de l’occupation ont révélé les vrais caractères. Les habitants de Saint-Roch ne sont pas reluisants et certains ont même trempé dans la collaboration. Celle qu’on nommait La garçonne n’est plus. Pourtant, les souvenirs (principalement les plus douloureux) ne meurent jamais ! Ed. Presses de la Cité – 305 pages Daniel Bastié
TANT QU’IL Y A DE LA VIE ! Après la retraite, l’existence ne doit pas devenir l’antichambre de la mort et les maisons de repos (ou séniories) ne peuvent en aucun cas ressembler à des lieux où l’ennui fait cortège à la souffrance. Malgré l’austérité de la directrice, Hendrick Groen et ses compagnons ont choisi de profiter à 100% de la santé qui leur reste. Pas question d’attendre sur un siège-percé qu’on vienne les changer ou qu’on leur apporte le goûter. Avec un esprit potache, ils entament des parties de cartes frénétiques, organisent des virées et rigolent comme des gamins, chamboulant l’organisation tranquille du home qui les accueille. Loin de s’en laisser compter et refusant d’obéir, ils font de chaque jour une fête. Best-seller aux Pays-Bas, « Tant qu’il y a de la vie » ose un regard désopilant sur le troisième âge, tout en offrant un crochet acéré sur le vieillissement, la maladie et l’esseulement. Un grand mystère règne actuellement sur l’auteur de ce journal. S’agit-il d’un écrivain ou d’un journaliste qui préfère se dissimuler derrière son personnage principal ou d’un pensionnaire d’une maison de retraite qui, par prudence, a choisi l’anonymat ? A ce jour, personne n’a cherché à torturer l’éditeur pour lui faire cracher la vérité. Puis, on s’en moque, parce que le seul plaisir de lire importe. Alors, laissez-vous emporter par ce récit drôle qui aborde le troisième âge sous des traits bien différents que ceux auxquels la littérature nous a habitués. Des pépés indignes. Et pourquoi pas ? Ed. Presses de la Cité – 414 pages Paul Huet
FAITES VOS JEUX Martha Grimes est l’une des championnes du crime résolu à travers ses nombreux polars qui mettent en scène le commissaire Richard Jury de Scotland Yard. Avec un suspense qui va crescendo, elle connaît la mécanique bien huilée qui fait que le lecteur refuse de lâcher prise et en redemande. Difficile de refermer le roman avant d’avoir découvert le ou les coupables et que justice soit enfin rendue. Cette fois, le protagoniste est amené à plonger dans l’univers des casinos, suite à une sordide affaire de meurtre. Un couple est abattu devant l’Artemis Club, l’une des plus prestigieuses salles de jeux de Londres. Fort vite, il est révélé que l’homme était un astrophysicien réputé, qui affirmait avoir mis au point une martingale lui permettant de gagner à tous les coups au black-jack. Bluff ou réel danger pour l’univers des tapis verts ? Aidé par ses habituels complices en culotte courte, le flic le plus perspicace du royaume doit naviguer en eaux troubles, sachant que le danger menace à chaque coin de rue. Bien décidé à résoudre cette sordide enquête, il devine que la vengeance sert de mobile au crime. Pour cette vingt-quatrième mission, l’auteure ne change pas d’un iota son fusil d’épaule, consciente de tenir une formule qui fonctionne avec un univers qui voltige des lieux bling-bling aux trottoirs crasseux de la capitale, faisant intervenir des adjuvants qui paraissent sortis d’un livre de Charles Dickens et un épilogue inattendu, servi par des dialogues parfois crus, extrêmement cinématographiques et menés au cordeau. Ed. Presses de la Cité – 426 pages André Metzinger
LA DAME DE LA TÉNARÈZE Le temps fait des ravages et ce qui était hier la fierté de la région ressemble à un clos désolé. Avec ses grillages livrés aux saisons, le parc de la Ténarèze n’a plus le lustre d’autrefois. Le lierre envahit tout, le chèvrefeuille tapisse les murs qui s’effritent et les pelouses pleurent leur beauté fanée. Pourtant, il suffirait d’un rien, d’un souhait énergique et de bonne volonté pour remettre le jardin en état. Claudia avait oublié ce pan de son histoire, engoncée dans le déni d’une existence gâchée depuis la disparition de son époux plusieurs décennies plus tôt. Peut-être parti vivre avec une autre ? Lorsque la mairie l’entretient de son souhait de récupérer l’endroit, elle devine qu’il s’agit d’une expropriation et la nouvelle lui fait l’effet d’une gifle qui la ramène à la nécessité de sortir de son état de semi-léthargie. Prête à mener un ultime combat, la vénérable dame s’empresse de mettre ses ressources en œuvre et s’oppose au projet. Préserver ses murs, ne pas maculer son passé et ne jamais livrer ses secrets : voilà l’objectif auquel elle s’enferre ! Madeleine Mansiet-Berthaud signe un roman qui fleure la nostalgie et se veut une réflexion sur les années qui défilent inexorablement, ainsi que sur la nécessité (ou non) de leur demeurer fidèle. L’histoire d’une famille s’écrit le plus souvent sur du sable et le vent balaie l’ensemble lorsqu’on ne prend plus soin de protéger les traces. « La dame de la Ténarèze » est un livre qui fait chaud au cœur parce qu’il parle de constance, qui interpelle sur le sens de l’existence et qui oppose les générations face à ce qu’on nomme modernité ou évolution. Il est enfin question d’un parcours abimé, aux relents dommageables. Le tout s’offre dans une langue bouleversante de sincérité entièrement au service du lecteur. Ed. Presses de la Cité – 351 pages Amélie Collard
LA PROMESSE DE BOIS-JOLI Lara est une jeune femme en fuite permanente, qui s’évade du quotidien en musardant et en rêvant. Célibataire, elle vit chez sa grand-mère avec son frère Julien, qui ne parvient toujours pas à se remettre de la perte de leurs parents. Depuis quelques années, elle exerce le métier de professeure au Collège de Troyes, tout en jouant du violoncelle au sein d’un orchestre. Elle aime particulièrement les promenades pédestres. Façon de décompresser et de nouer des liens précieux avec la nature. Elle adore se recueillir devant le monument aux cinquante-trois martyrs dans le petit village de Creney. Elle y est particulièrement fascinée par le visage d’un résistant décédé. Etrangement, ses traits ressemblent à ceux de l’homme qui hante ses rêves, alors qu’elle aspire à un sommeil paisible. Lors d’une visite, elle rencontre Audran Mondeville, la trentaine séduisante, et ébauche une liaison amoureuse. Toutefois, celle-ci s’ébruite et ne plaît pas à tout le monde. Sans message particulier, Lyliane Mosca livre un récit plein d’espoir, qui prouve que la résilience n’est pas la solution, qu’il faut bousculer ses peurs et avancer. L’amour est également un terreau fertile. L’auteure use d’une écriture à la fois simple et belle, sans fioritures et qui va droit au cœur. L’histoire de Lara pourrait être celle de plusieurs autres femmes, qui refusent de baisser les bras, qui témoigne de la difficulté à arpenter la vie au milieu des éléments et qui prouve qu’elle mérite mille fois d’être vécue. La magie va-t-elle revenir dans son existence ? Il y a bien sûr de fortes chances qu’elle se répande en elle comme les volutes que dégage son instrument … Ed. Presses de la Cité – 346 pages Amélie Collard
JE SUIS NÉ LAID La laideur est souvent innée. Elle ne croît pas au fil du temps, mais se conforte dans le regard des autres. Arthur fait partie des enfants nés avec cette plaie sur le visage. Des traits de lépreux. Une gueule pas possible. Un physique à fuir ! Dès lors, que faire ? Rien ou sublimer ce qui entrave son quotidien ? Isabelle Minière raconte de quelle manière ses parents tentent de s’attacher à lui, de l’aider à grandir, de se parer face aux remarques qui fusent de toutes parts. Peine perdue, Arthur ne sera jamais comme les gosses des voisins ni ceux de l’école. Avec énormément d’autodérision, le protagoniste se raconte et passe en revue les différentes étapes de son existence, avec des petits bonheurs et des malheurs appuyés, son désir profond d’être comme tout le monde, d’aimer et d’être aimé. En se mettant à le dessiner, son père ne sait pas encore qu’il est en train de transformer un objet de répulsion en œuvre d’art. Bizarrement, la laideur peut devenir fascination. Née au Mali, l’auteure a passé son enfance non loin d’Orléans, a effectué ses études à Tours et à Paris, avant de se lancer dans l’écriture de romans et de nouvelles. « Je suis né laid » est le quatrième livre qu’elle publie chez Serge Safran. Notons la sélection d’un autoportrait d’Egon Schiele pour illustrer la couverture. Ed. Serge Safran – 248 pages Daniel Bastié
UNE SAISON À HYDRA Alors que d’autres songent à préparer leur retraite, Emmanuel Joyce, dramaturge à succès, se rend au casting destiné à trouver une jeune comédienne capable d’endosser le rôle principal de sa derrière pièce qui sera prochainement montée à Broadway. Malgré sa fébrilité et son désir de trouver l’oiseau rare, aucune ne convient. Il songe alors à Alberta, sa secrétaire à peine âgée de dix-neuf ans, sans aucune expérience sur les planches et fraîchement sortie des études. Sa candeur le séduit d’emblée. Reste à surmonter deux obstacles de taille : obtenir son consentement et la former rapidement au métier de comédienne. Six semaines sur l’île grecque d’Hydra devraient suffire à lui enseigner les rudiments de la profession, lui permettre d’endosser le personnage de fiction et apprendre les répliques. Un pari loin d’être gagné, mais auquel l’écrivain croit dur comme fer. S’ensuit une sorte de huis-clos pesant. Lilian, l’épouse de l’artiste, peine à exorciser de vieux démons, tandis que son époux se sent de plus en plus attiré par la jeune femme. Durant une saison sous un soleil qui poudroie, le destin est mis en déséquilibre et rejoue les classiques de la séduction. A force de se rapprocher, les tempéraments se dévoilent, les quiproquos s’installent et les apparences se déchirent. Elizabeth Jane Howard parle bien entendu du monde de la scène, mais surtout de ses coulisses, des interminables répétitions loin du regard des spectateurs, des efforts, des découragements, de la reprise en main par le maître des opérations, mais surtout des fêlures humaines. En sculptant les mots, l’auteure se trouve ici au meilleur de sa forme littéraire et envoûte avec un ton fait de vérité, de clairvoyance et de précision. Ed. La Table ronde – 442 pages André Metzinger
EROS L’érotisme a été l’apanage de tous les auteurs, quels qu’ils soient, moteur de l’inspiration et vecteur de textes sublimés, poétiques ou dérangeants. Les éditions La Table Ronde proposent un recueil du bestof sélectionné parmi les meilleurs gens de plume (femmes et hommes) qui ont marqué les siècles précédents, prouvant que les choses du sexe et la sensualité font partie de l’existence au même titre que la nourriture et l’argent. Un florilège qui brosse cinq siècles de littérature et qui démarre avec Rabelais pour croiser Jean-Jacques Rousseau, George Sand, Stendhal, Victor Hugo, Lautréamont, Guy de Maupassant, Guillaume Apollinaire, Jean Cocteau, Pierre-Jean Rouve, Catherine Robbe-Grillet et, parmi beaucoup d’autres, Françoise Rey. Pour constituer ce recueil, Claudine Brécourt-Villars est évidemment aller puiser dans les œuvres injustement passées à la trappe ou a butiné dans la correspondance privée. Les textes retenus sont présentés par période historique, sans discrimination hiérarchique ni jugement de valeur. L’occasion surtout de voir évoluer les mœurs, de lire les mots d’intellectuels face aux choses de la chair et de laisser transpirer la sensualité dans ce qu’elle possède de plus vrai. Bien entendu, il reste à définir ce qu’est l’érotisme. Une notion bien subjective qui se transforme au fil du temps, en fonction des règles établies, des interdits et de la censure. On le sait, il se distingue parfois mal de la pornographie. Un constat qui soulève des débats et qui est loin d’être clos. Voilà une anthologie qui se veut un voyage dans le passé et qui avive toujours moult passions. La fièvre des corps et des sens demeure un remède à la morosité et est la vie. Une stimulation, souvent. Un moteur. Autant le savoir ! Ed. La Table Ronde – 458 pages André Metzinger
L’HÉRITIER Peregrine Chase n’a qu’une envie : liquider au plus vite la succession dont il vient d’hériter. En fait, une propriété dans la campagne anglaise, loin de ses habitudes de citadin. Avec l’argent, il épongera ses crédits. Pour ce faire, il compte sur l’aide des notaires, professionnels doctes et fiables. Néanmoins, contre toute attente, il tombe amoureux de l’endroit et ressent des impressions jusqu’ici totalement inédites. La magie naît des descriptions poétiques, des petits gestes posés dans une nature libre et de la richesse du vocabulaire. Le charme agit dès les premières pages et nimbe ce récit optimiste et sensoriel qui devient un appel à la simplicité des choses et au bonheur. Vita Sackville-West (18921962) est une auteure assez mal connue chez nous, alors que ses ouvrages ont été acclamés en Angleterre. Femme libre issue d’une famille nantie, elle n’a jamais eu à se soucier de son avenir et a pu consacrer sans calcul une grande partie de son existence à sa passion pour l’écriture. Malgré un mariage et deux enfants, elle a entretenu une liaison passionnée avec Violet Tréfusis, dont la maman était la maîtresse officielle du roi Édouard VII. On lui a également prêté une relation durable avec l’écrivaine Virginia Wolff, de dix ans son aînée. Ed. Autrement – 185 pages Paul Huet
OUTBACK L’outback est l’arrière-pays semi-aride de l’Australie. Une zone située au-delà du bush et grande comme les deux-tiers de l’Europe. Kenneth Cook se sert de ce décor hostile pour livrer une coursepoursuite entre un fugitif, accusé d’avoir tué un policier, et un journaliste qui compte ramener un reportage unique. Servi par un rythme haletant, ce roman joue avec les nerfs et tient du thriller. Dans un monde sans pitié et qui haït les rêveurs, Kenneth Cook met face à face deux hommes que tout oppose, mais qui sont unis par une vitalité qui les tient en vie. Ce roman a été publié dans la Série Noire en 1964 et est demeuré longtemps introuvable. Les éditions Autrement ont fait le pari de le ressortir aujourd’hui avec une nouvelle traduction française pour répondre à la demande d’amateurs, mais principalement pour le faire découvrir par la nouvelle génération. Dans un charme vintage qui évoque les débuts des grands médias, l’auteur juxtapose le destin d’un inadapté et celui d’un idéaliste. Il n’y a ici aucun bon ni mauvais. Le premier est totalement dépassé par l’acte qu’il a commis, tandis que le second cherche de l’humanité dans une société qui met à mal ses convictions profondes. Un roman noir écrit pieds au plancher ! Ed. Autrement – 260 pages Daniel Bastié
LITTLE HEAVEN Le passé ressemble à un rouleau-compresseur. Chaque action y est collationnée avec soin et peut, à un instant précis, ressurgir du néant pour frapper. Minerva, Micah et Ebenezer sont chasseurs de prime et ont mené de concert plusieurs missions parfois peu reluisantes. Ils ne parviennent pas à oublier un événement qui s’est déroulé en 1966, lorsqu’un enfant a été enlevé par une secte. Quinze ans plus tard, la fille de Micah disparaît mystérieusement. Le trio se reforme et découvre, atterré, que cette vieille histoire possède un prolongement actuel. L’enfer débarquerait-il dans la bourgade paisible de Little heaven (ou Petit paradis) ? Avec un plaisir manifeste, Nick Cutter joue avec les poncifs du roman d’épouvante et propose un récit sanglant, pas fait pour les esprits romantiques. Avec un style mené au cordeau, il enchaîne les séquences spectaculaires et ne ménage pas la sensibilité du lecteur. Ce qui débute comme une banale mission de sauvetage vire au tragique, avec un suspense sans temps mort, des personnages courageux et des méchants très retors. On voyage dans une sorte de quatrième dimension qui se veut un hommage à Stephen King et à John Carpenter, avec un récit bien crade, dans les ténèbres permanentes et les échos d’un chant funèbre qui sourd aux oreilles. Jamais on n’évolue vers la lumière et on perd ses dernières illusions en la bonté de l’être humain. A ne pas mettre entre les mains d’adolescents sensibles et de femmes enceintes ! Ed. Denoël – 589 pages Daniel Bastié
COMME IL PLEUT SUR LA VILLE Bergen est la deuxième ville de Norvège, avec un peu moins de deux cent quatre-vingts mille habitants. Il s’agit également d’un lieu universitaire, réputé pour son enseignement. Tout juste âgé de vingt ans, Karl Ove s’y installe avec l’espoir secret de devenir écrivain. Pour cela, il suit les cours de la prestigieuse Académie de lettres, prêt à fournir maints efforts. Pourtant, très vite, il bute contre ses lacunes. Son style se révèle maladroit, nourri de poncifs et peu attractif. Les échecs le fustigent les uns à la suite des autres. Quant à sa vie privée, elle se caractérise par un vide social, tant auprès d’amitiés passagères que de relations sentimentales avec les femmes. Il noie son humiliation dans l’alcool et s’adonne au rock. Puis, petit à petit, les ténèbres s’estompent. Il renonce à la rédaction de romans et se consacre à la critique littéraire, beaucoup plus directe et gratifiante. Il tombe enfin réellement amoureux. Avantdernier volet de son autobiographie à rallonges, « Comme il pleut sur la ville » narre les débuts hésitants de Karl Ove Knausgaard, que certains ont nommé plus tard le « Proust norvégien », en 1988. La structure du récit se veut à nouveau simple et linéaire, parant les détails les plus banals d’un éclat transcendant. Il est surtout question de la manière de grandir dans une société âpre, de trouver sa place et de partager ce qu’on possède d’unique. Enfin, on peut voir ce cinquième recueil comme une parabole qui passe de l’échec à la réussite. Un livre qui ne cherche jamais à enjoliver les choses, mais à les présenter sans fard. L’auteur norvégien n’en finit pas de conquérir le monde ! Ed. Denoël – 837 pages Daniel Bastié
A L’INSTANT MÊME OÙ L’ON BOUGE La danse est un art. La danse est un viatique. La danse est un sport. Ever vit de cette pratique et multiplie les satisfactions, jusqu’au jour où elle se noie dans le marasme. Suite à une rupture, elle perd totalement pied. Comment garder la tête hors de l’eau lorsque l’abime entraîne le corps vers le fond, comment respirer lorsque les idées suffoquent ? Souvent, les ennuis s’enchaînent et un malheur en appelle un autre. Néanmoins, elle sait que le bonheur est là où s’arrêtent les peurs et le chagrin. Il se dresse à quelques mètres, de l’autre côté des vitres, loin de la grisaille intérieure qui annihile tout. Le destin offre le choix de marcher à nouveau vers lui, de baisser totalement la garde ou de vivre dans un état de prostration. Son regard ne voit plus très clair et son optimiste se tait. A cela, consulter une psychologue aide-t-il réellement ? S’aménager une vie somptueuse ne sert pas à grand-chose puisque tout valse dans la tourmente. Accepter la situation, faire fi du passé et redémarrer ce qui peut l’être sur de meilleures bases. Existe-t-il meilleure alternative ? Vera Street signe un joli portrait de femme, qui n’est ni une superwoman ni réellement une perdante. Simplement un être fragilisé qui, au-delà de ses pas, cherche à s’épanouir en passant des meurtrissures à la joie de vivre, de la défiance à l’envie, du mur de la désolation à l’estime de soi. Ed. Carnetsnord – 258 pages Daniel Bastié
L’ANCIEN DE PATMOS SAINT AMPHILOQUE MAKRIS Le père Amphiloque Makris (1889-1970) vient d’être canonisé. Pour beaucoup, il demeure l’une des figures marquantes de la spiritualité orthodoxe. Il a été raconté que, à l’âge où les garçons songeaient à courir derrière les filles, il vouait son temps libre à servir Dieu pour ensuite entrer au monastère de Saint-Jean Amphilogue à Patmos. Ordonné diacre, puis prêtre, il consacre énormément de temps aux étudiants de l’Académie ecclésiastique. On lui doit également la fondation du monastère de Patmos et le renouveau du monachisme cénobitique. Durant les années de guerre, il pousse la population à ne jamais perdre la foi et à croire que le Seigneur veille toujours sur ses brebis. Fort vite, sa renommée croît et son enseignement renforce chacun dans la conviction que le paradis débute sur terre. De nombreuses personnes viennent écouter ses conseils et on commence à lui prêter des vertus de sainteté. Non seulement, il ne baisse jamais les bras, mais pousse ses contemporains à devenir meilleurs et à agir en faveur des autres, sans calcul et à l’image du Christ qui a donné sa vie pour sauver les hommes du péché et de la mort. Ce livre écrit par un de ses disciples est l’un des premiers qui lui a été consacré. Lors de sa parution en 1994, il a obtenu un énorme succès auprès des fidèles. Il ressort aujourd’hui dans une cinquième édition couronnée par le prix de l’Académie d’Athènes. Avis aux amateurs ! Ed. des Syrtes – 304 pages Sam Mas
LE CONTINENT PERDU L’Europe va mal. On parle de Brexit, d’états qui ne parviennent pas à se mettre d’accord, de divisions internes. Dans un moment délicat de son parcours, il convient de revoir le modus operandi, de traiter sans tabous les questions épineuses qui divisent et de s’écouter avec respect. Les dilemmes se multiplient à mesure que les années passent : sécessionnisme catalan, guerre larvée en Ukraine, invasion massive de réfugiés économiques sur les côtes méditerranéennes, concurrence déloyale entre pays, régressions sociales, divorce entre population et ses élus, hégémonie allemande. Guy Mettan affirme que la Suisse a œuvré à la destruction du vieux continent en refusant de s’intégrer dans le système, en jouant le tireur solitaire pour garder son autonomie et ne rien devoir à ses voisins. Prouvant, sans doute, que ne pas partager ses richesses aide à grandir ou à maintenir sa stabilité. L’auteur clame également que les vingt-sept auraient peut-être intérêt à s’inspirer de son modèle pour renaître. La Suisse applique une politique stable depuis cent cinquante ans et garde uni des peuples de culture francophone, allemande et italienne sans que cela ne pose de réels problèmes. Chaque canton est géré de manière autonome, grâce à un fédéralisme assumé et responsable. Un système qui réclame davantage de volonté que d’audace. Aussi, pourquoi ne pourrait-on pas faire de même ? Pour cela, une totale remise en question des mentalités serait exigée : faire confiance au peuple, s’autoriser une véritable révolution mentale et cesser de tirer aveuglément l’épingle à soi sans tenir compte des problèmes que cela peut générer ailleurs. Plaider pour une Europe démocratique et souveraine peut donc revenir à s’inspirer du modèle suisse. Une piste à étudier … Ed. des Syrtes – 280 pages Sam Mas
PÉRÉGRINATIONS (1723-1747) Vassili Grigorovich-Barski est né à Kiev en 1701 et, à vingt-deux ans, prend son bâton de pèlerin pour voyager un peu partout dans le monde, s’émerveillant aussi bien en Europe qu’en Orient. Durant un quart de siècle, il arbore les sites classiques comme les lieux qui sont étrangers aux voyageurs. L’Italie, la Grèce, le Liban, la Syrie, la Palestine, etc. lui ouvrent leurs portes entre ravissement et étonnement. Lors de chaque rencontre, il s’initie à la langue véhiculaire, goûte à la nourriture, se familiarise avec les coutumes. Croyant, il remercie Dieu pour ses bienfaits, le sollicite également lorsque les avanies se succèdent ou lorsqu’il tombe malade. S’ouvrir à d’autres civilisations implique un effort constant, de la détermination et un certain sens du sacrifice. Bien sûr, cette aventure n’a rien d’une sinécure. Il lui arrive de se trouver entre les mains de brigands et de se faire battre ou dépouiller de ses biens. Qu’importe ! Il faut poursuivre ce qui a été entamé, sans geindre ni fléchir. Conscient de vivre des instants uniques, il consigne ceux-ci dans des carnets pour ne pas oublier, partager et transmettre ses impressions aux générations futures. En ce sens, ses pérégrinations demeurent un témoignage unique du XVIIIe siècle, avec des descriptions de paysages d’une rare précision, de personnalités de l’époque et des dessins de villes ou de monuments. Naturellement, par instants, il n’hésite pas à se mettre en scène au détour d’un chemin ou au bord d’un puits. Plus de trois cents ans après, ses écrits restent une documentation précieuse sur un monde divisé, où les chrétiens latins s’opposaient aux chrétiens grecs, sans oublier l’ombre des musulmans, qui ne planait jamais loin. Il parle d’une société en train de lentement basculer dans la modernité. Enfin, il mêle les anecdotes à la grande histoire, rappelant certaines traversées dramatiques, les querelles entre gens du voyage, l’insécurité, les amitiés naissances, les trahisons inévitables et la quête d’un gîte ou de moyens pour se nourrir. Ed. des Syrtes – 560 pages Daniel Bastié
LA MEILLEURE FAÇON DE MARCHER ? La passion des habitants de Languependue est de jaser sur tout et rien, sur tous et personne. Lorsqu’ils aperçoivent un homme juché sur le dos d’un âne et un garçon qui les suit en trottant, ils savent qu’ils ont la matière pour palabrer toute la journée. Le lieu suivant se nomme Grande-Grinche et les gens passent leur temps à grommeler. Là aussi, ils s’enflamment avec des commentaires peu gracieux. A Guerrelasse, les villageois soupirent du soir au matin. La venue des deux étrangers devient rapidement sujet à se lamenter. A Durcœur, les citoyens s’activent sans jamais bénéficier du moindre loisir, toujours accaparés par une tâche. Lorsqu’ils voient passer le trio, ils éclatent de rire. Enfin à Haute-Flemme, lieu où se rassemblent les gens les plus paresseux, les voyageurs ne subissent aucune remarque parce que les résidents n’ont pas la force d’émettre le moindre écho, sempiternellement fatigués. A dos d’âne ou à pied, quelle est la meilleure façon de marcher ? Chemin faisant, par monts et par vaux, un pied devant l’autre, ils arrivèrent chez eux. Voilà un beau livre bien illustré qui fonctionne comme une comptine et qui ravive des souvenirs de contes et de légendes que les grands-mères racontaient aux enfants sages. Si ce n’est que, ici, il s’agit d’un texte original dû au talent conjugué d’Anna Castagnoli et Gaia Stella. Un récit graphique foisonnant et créé pour réfléchir au regard des autres, aux différences culturelles et à la tolérance. Ed. Grasset Jeunesse – 34 pages Amélie Collard
COMMENT J’AI RATÉ MA VIE Quand j’étais petit, j’étais riche d’un tas de trésors. Mais un jour, j’ai grandi … Voilà de quelle manière débute ce mini recueil à la fois caustique et d’une belle vérité. Quel est le secret du bonheur et de quelle façon ne pas gâcher son existence ? A force de convoiter les biens du monde et d’accumuler les richesses atteint-on la plénitude et s’épanouit-on ? Bertrand Santini et Bertrand Gatignol cosignent un plaidoyer en faveur de la simplicité et opposent le texte aux dessins pour bien faire sentir ce qui ne va pas. En grandissant, le protagoniste est devenu stupide en décrochant un diplôme dans une grande université, menteur en se mariant, vaniteux en ayant des enfants, vulgaire en acquérant un appartement prestigieux, sans amis en traînant dans les soirées VIP, moche en passant entre les mains d’un chirurgien esthétique, etc. Les auteurs nous lancent le miroir de ce que nous appelons trop souvent la réussite sociale. Vrai, à quarante ou à cinquante ans, il faut avoir un matelas d’argent, une belle résidence, une épouse parfaite. Des critères dictés par notre entourage. Mais s’agit-il d’une existence heureuse ? En affirmant que le personnage a raté sa vie, ce petit livre invite le lecteur à réfléchir avant d’entreprendre et à ne pas se laisser happer par le mimétisme. Même s’il s’agit d’un ouvrage jeunesse, il s’adresse également aux aînés ! Ed. Grasset Jeunesse – 40 pages Daniel Bastié
ÉMERVEILLEMENTS Sandrine Kao est française d’origine taïwanaise et a grandi en Seine-Saint-Denis. Après des études en métier du livre, elle poursuit sa formation en illustration à l’École supérieure d'Art d’Épinal. Elle est aujourd'hui auteure et illustratrice pour la jeunesse et habite dans les Vosges. Avec « Émerveillements », elle signe une pépite de douceur qui fait plaisir à lire. Un ouvrage à la fois intime, intelligent et bercé de surprises. Souvent, on s’interroge, sans obtenir de réponses. Alors, il convient de chercher pour trouver. Au sein des pensées éclosent souvent des idées, des embranchements amenés à se tourner vers autre chose et vers les autres. En délaissant les personnages pour une créature qui évoque lointainement Picatchu, on suit une série de saynètes avec texte et illustrations qui permettent de progresser pour aller toujours de l’avant. Assurément, on trouve des influences asiatiques dans le graphisme, avec des arbres ou une colline qui paraissent sortis d’une estampe ou d’un manga, avec un noir et blanc impeccable auquel s’ajoutent quelques traits de couleur comme le pastel du rose, un rouge éclatant ou un brun terreux. S’interroger, être curieux de tout et ne jamais se satisfaire de propos creux, voilà ce qui fait grandir pour devenir un adulte responsable et capable de penser par lui-même. En ce sens, « Émerveillements » est la bonne surprise jeunesse du mois, chargé de poésie et de tendresse. Ed. Grasset Jeunesse – 34 pages Daniel Bastié
LA BALADE DU KOÏSHI Agnès Domergue est musicienne professionnelle. Altiste, elle est membre du quatuor Antarès et professeur. Depuis 2011, elle écrit en littérature jeunesse. Elle est notamment l’auteure de la série « Il était une fois : contes en haïku ». Cécile Hudrisier est illustratrice et, depuis de nombreuses années, fait profiter les enfants de ses dessins mis au service de beaux récits écrits pour les enchanter. A deux, elles viennent de donner naissance à « La balade de Koïshi », qui évolue au fil des saisons et arpente le chemin de l’existence. La grande originalité de ce recueil tient dans son format accordéon, sans brochage ni colle, fil ou agrafes. Un objet narratif qu’on ouvre, déplie et referme à sa guise, qui se lit ou se raconte en suivant du doigt les images qui se succèdent. C’est drôle, sympathique et surtout rempli de poésie. Koïshi admire la nature, lui parle et se laisse bercer par ce qui l’entoure. Bien sûr, les éléments peuvent se réveiller pour gronder, mais jamais bien longtemps. Koïshi sait que des petites choses peuvent naître de grands événements. Il est bien né d’un grain de riz et une larme peut enfanter d’une rivière. Alors ? Ici, pas de vrai récit, mais une multitude d’étapes qui rappellent que l’existence est en élaboration constante et que, à tout âge, on apprend ce qui est beau et vrai. Ed. Grasset Jeunesse – 34 pages Amélie Collard
FILMS À LIRE : DES SCÉNARIOS ET DES LIVRES Un film est un produit fini, réalisé par une équipe et destiné à être remis au producteur (ou financier), avec en amont un scénario ciselé ou non, écrit (parfois réécrit), né de l’imagination ou adapté d’un ouvrage antérieur. La question qui taraude Mireille Brangé, Jean-Louis Jeannelle et leur équipe de rédacteurs est de savoir à quel point ce dernier demeure une œuvre réelle. Publie-t-on un script pour faire plaisir aux cinéphiles, aux curieux ou aux lecteurs impénitents ? Est-il un livre en soi ou une copie de travail destinée à être archivée ? Différents objectifs peuvent entrer en compte : retrouver la saveur d’un long métrage chez soi dans le confort d’un fauteuil sans le support des images, se faire une idée des films non vus, découvrir des projets avortés ou plus simplement se faire plaisir. Lire un scénario reste loin de s’avérer une évidence avec un découpage rempli de didascalies, des précisions concernant les mouvements de caméra, le jeu des comédiens ou les décors. Des propos certes théoriques mais qui peuvent passionner. En évitant le ton pédagogique, « Films à lire : des scénarios et des livres » défend le point de vue que rien n’interdit à un script d’être publié pour un large public ou une découverte individuelle, même si rares sont les travaux à avoir fait l’objet d’une édition papier. De fait, une telle bibliothèque peut demeurer possible, voire être envisagée comme un genre littéraire à part. Une telle extension est-elle viable sur le long terme ? A priori, rien ne semble l’interdire, pourvu que la demande soit là. Pour preuves, Jean Giono et Marcel Pagnol se sont tous deux frottés au grand écran avec succès, sans jamais renoncer à leur métier de plume, faisant entrer leur nom dans les manuels de littérature comme dans les annales du septième art. Ed. Les Impressions Nouvelles – 384 pages Daniel Bastié
LA PATINOIRE Voilà un des quatre films mis en scène par notre compatriote Jean-Philippe Toussaint, écrivain reconnu et passé presque accidentellement à la mise en scène. On se souvient de « La patinoire » long métrage réalisé en 1998 avec, notamment, Tom Novembre, Dolorès Chaplin et Mireille Perrier qui, malgré un scénario minimaliste a été considéré comme subtil et nourri d’humour. Aujourd’hui, l’auteur revient sur ce succès public et critique inattendu et raconte la genèse du projet. A l’époque, il résidait à Berlin, invité par la municipalité. L’idée n’est pas de publier le script original, mais de se replonger dans l’ambiance de l’époque, en racontant moult anecdotes, en passant dans les coulisses pour réveiller les souvenirs et en faire une madeleine de Proust. Bien entendu, on retrouve le document dactylographié qui a servi lors de la mise en scène, mais le propos s’attache à l’analyse du résultat. Comment un auteur réputé intello a-t-il réussi à engendrer une pépite de subtilité tellement attachante ? Bref, un film populaire au bon sens du terme. Comédie contemporaine réorientant le thème classique de l’intrus social, il ressemble par différents aspects à une bande dessinée qui déconstruit la syntaxe orthodoxe et invente un nouveau langage. L’auteur-cinéaste étant surtout réputé pour l’usage de la litote et des ambiances empreintes de mélancolie, Tom Novembre y devient lunaire, avec un faux air à la Buster Keaton, tandis que le récit penche (en rendant hommage) vers Jacques Tati, Pierre Étaix et Federico Fellini. Si toutes les parties de cet ouvrage ne s’accordent pas comme un puzzle traditionnel, elles reviennent sur une aventure peu ordinaire et qui ressemble à un trop rare feu d’artifices. Du bonheur pur jus ! Ed. Les Impressions Nouvelles – 138 pages Daniel Bastié
PEREC EN AMÉRIQUE Né en 1936 et décédé en 1982, Georges Perec a effectué des études d’histoire, qu’il a rapidement abandonnées. Âgé de vingt-trois ans, il s’est essayé à un premier roman, totalement inédit et dont le manuscrit a été officiellement déclaré perdu. Après avoir empoché un diplôme à la Faculté de Lettres de Tunis, il s’est lancé dans l’écriture, sans jamais perdre un œil sur la société qui l’entourait. Plutôt que de dresser une énième biographie de l’homme, Jean-Jacques Thomas s’est intéressé au rapport que l’artiste a entretenu avec les États-Unis. Une relation méconnue, voire sous-estimée. D’après l’essayiste, Georges Perec a effectué cinq allers-retours au pays de l’Oncle Sam pour des raisons aussi diverses que des colloques universitaires, des supervisions de traductions de ses ouvrages, de relations publiques ou de liens amicaux. La question qui pèse demeure celle-ci : quelle a été l’influence des States sur l’œuvre de l’auteur français ? Foin de digressions au profit d’exemples concrets. Les pages ici développées reviennent sur les liens humains entre écrivains et autres intellectuels des deux continents et sur la réception des travaux francophones dans le Nouveau Monde, mais également du retour de la société USA sur les créateurs de chez nous. En cela et au fil des pages, on découvre que Perec se montrait fort proche de l’esthétique avantgardiste new yorkaise, plus libre que l’exiguïté des contraintes parisiennes. La difficulté à s’exprimer en anglais l’a surtout amené à s’exprimer via d’autres canaux tels que les arts plastiques et le cinéma. A défaut de vouloir imposer quoi que ce soit, « Perec en Amérique » a le mérite d’ajouter de nouveaux éléments à la lecture et à la compréhension de son travail. Au demeurant, d’entraîner ses textes dans une nouvelle direction et de cesser les clivages qui veulent trop souvent qu’un créateur de culture européenne soit uniquement circonscrit dans la sphère qui l’a vu naître. Ed. Les Impressions Nouvelles – 174 pages Daniel Bastié
THOMAS D’AQUIN, COMMENTAIRES POLITIQUES Le travail de Thomas d’Aquin fait toujours référence et nombreux sont les théologiens à s’inspirer de ses écrits. Néanmoins, en bon homme de Dieu, il s’est intéressé au monde temporel, sans jamais minimiser le rôle de celui-ci dans la vie de ses contemporains. Une partie de son œuvre a circonscrit la réflexion d’auteurs parfois fort impliqués dans la politique, suscitant des questions auxquelles il cherchait à opposer des réponses. On sait qu’il s’est échiné à éplucher « Politique » d’Aristote, faisant une nouvelle foi preuve de son extraordinaire érudition. Pourtant, il abordait de tels sujets en laissant de côté sa formation religieuse au profit de l’analyse traditionnelle, dont les philosophes grecs se sont avéré les premiers promoteurs. Avec lui, on découvre que la foi n’élude jamais la raison, pas davantage que la Grâce n’abolit la nature. Le présent ouvrage peut être lu comme la suite à « Thomas d’Aquin : Pensez le politique » paru en 2015 aux éditions Dalioz. Cet essai avait laissé de côté les écrits de saint Thomas commentateur et s’était tenu aux textes dans lesquels il exprimait sa pensée intime. Restait donc à explorer le champ via lequel surgissent les propos dont il n’était pas l’auteur. Voilà chose faite par le truchement de « Thomas d’Aquin , commentaires politiques » signé Michel Nodé-Langlois, philosophe et enseignant ! De la belle ouvrage … Ed. Artège – 804 pages Sam Mas
BELGIQUES : LES POLITICHATS Pour parler de sujets graves, il suffit souvent d’éviter la diatribe et d’user de toute son intelligence. Un peu comme Jean de La Fontaine l’a fait voici quatre cents ans, Frank Andriat transforme ses contemporains en animaux. Et pas n’importe lesquels, puisqu’il a choisi les chats, avec des têtes charmantes ou pas, agiles ou câlins, solitaires ou grégaires. Mieux, il brosse neuf portraits de nos stars de la politique derrière un pelage félin et les vautre dans une Belgique telle qu’on la connaît : décalée dans ses contradictions, surréaliste dans ses prises de décisions, grinçante dans le jusqu’au-boutisme de certains décideurs, égoïste lorsqu’il s’agit de scinder le pays pour davantage d’autonomie et moins de solidarité. Pourtant, on le sait, la prose de Frank Andriat n’est jamais méchante. Elle brocarde certes, mais avec gentillesse et en se servant de l’humour pour ne jamais blesser ni fermer des portes. Ses politichats sont avant tout une invitation à s’interroger sur la société que nous plébiscitons, sur le choix de nos élus et sur la nécessité (peut-être ?) de bien réfléchir au moment de donner sa voix pour un parti ou un cador de celui-ci lors du scrutin du 26 mai prochain. Si ses chats ronronnent, se prêtent aux caresses et raffolent de leur gamelle, ils restent capables de décocher un coup de pattes, griffes acérées. Mieux vaut en rire ! Ed. Ker – 115 pages Daniel Bastié
LES MISOPHONES Être misophone revient à souffrir de misophonie ou littéralement de haine du son. Il s’agit d’un trouble rarement diagnostiqué, mais plus commun qu’on le pense. Il se caractérise par des troubles neuropsychiques qui génèrent un état proche de la colère ou du désespoir. Les individus affectés par ce mal se trouvent le plus souvent agacés, voire enragés par des bruits, que les autres trouvent normaux. Difficile dès lors de vivre en société, lorsqu’on se sait prêt à sortir de ses gonds de façon instinctive. Damien est affecté par cette pathologie et est conscient qu’elle le handicape au quotidien. Tout l’insupporte : le bruit des doigts dans le pop-corn au cinéma, les chips qui croquent sous les incisives, la respiration d’un voisin, le chewing-gum qui est mastiqué, la déglutition d’un soda, … A sa solitude s’ajoute le poids qu’il pense être unique à porter ce fardeau. Pourtant, il croise la route d’Alexis, un serveur, qui lui aussi peine à travailler, harcelé en permanence par ce problème. Entre les deux hommes se noue rapidement une amitié faite de compréhension réciproque et de respect. De cette tare, ils décident d’en faire un atout, chercher l’amour et s’épanouir. Ce sujet réclame la légèreté de plume de Bruno Salomone pour éviter le pathos et saupoudrer l’ensemble d’humour salvateur. Avec un ton vif et alerte, des situations cocasses et un entrain contagieux, il emporte le lecteur dans un tourbillon virevoltant et aborde sans détour une affection dont environ quinze pour cent de la population est atteinte. Un mal de notre siècle où tout va trop vite, où tout va trop fort ? Ed. Cherche-Midi – 262 pages André Metzinger
FEMMES ET POUVOIR EN ISLAM Les médias ont comme pouvoir de fournir des explications pas toujours conformes à la réalité, parce que galvaudées, instrumentalisées ou soucieuses d’aller dans le sens des lecteurs, des auditeurs ou des téléspectateurs. En ce qui concerne le rôle des femmes dans l’Islam, on se trouve le plus souvent confronté aux stéréotypes (certes entretenus par une partie de la population immigrée installée en Europe !) et par des discours ultra féministes ayant aujourd’hui cours chez nous autant que par certains politiciens misant leur programme sur la défiance vis-à-vis de l’étranger. Les récents attentats et Daesch ont tout fait pour renforcer cet esprit de division et de diabolisation. Azadeh Kian revient sur cette religion et la présente à travers son histoire en insistant sur quatre périodes : celle de son avènement, l’époque médiévale, l’époque moderne et l’époque contemporaine. Il insiste sur le fait que le Coran n’entrave pas la liberté des femmes. Il dénonce la récupération de celui-ci par certains croyants. Bien entendu, il importe de remettre le livre saint dans son contexte du VIIe siècle, alors que les avancées féminines n’étaient pas brillantes chez nous. N’oublions pas que les filles, épouses et mères ne disposaient pas du droit de vote au début du XXe siècle, tant en Belgique qu’en France, n’avaient pas la possibilité d’avorter et passaient de la férule du père à celle de l’époux. Jusqu’au début des années 60, elles ne pouvaient pas ouvrir un compte bancaire sans l’autorisation de l’un ou l’autre. Alors, fustiger unilatéralement les adeptes d’une foi procède d’un jeu malhonnête. L’auteur insiste également sur les avancées qui voient le jour un peu partout au Maghreb et en Asie, même si la population demeure attachée à la tradition et a du mal à se libérer du joug des mâles qui, trop souvent, décident et soumettent toujours. Cet essai, fondé sur des recherches extrêmement sérieuses, remet en perspective le rôle et l’importance de la femme au sein de la société musulmane. L’occasion de faire taire les incultes et les imbéciles ! Ed. Michalon – 252 pages Amélie Collard
LA FACE CACHÉE DE LA ROBE Le métier d’avocat n’est-il plus LE rêve ? Dans de nombreuses familles, on entend la mère ou le père clamer que, plus tard, son rejeton deviendra un ténor du barreau. Il y a bien sûr les films de prétoire renvoyés par le cinéma qui stimulent l’envie et alimentent le miroir aux alouettes. Pourtant, sur le terrain, la réalité est glauque. Affaires sinistres, manque de dossiers brillants, concurrence exacerbée, pression du chiffre, journées de travail harassantes, salaires pas souvent à la hauteur des études réussies, harcèlement moral, harcèlement physique, pression professionnelle. Si en travaillant à son compte, on devient le décideur, il y a intérêt à se pourvoir d’une clientèle suffisante pour vivre dignement. Quant aux bureaux juridiques, ils peuvent faire subir des conditions de collaboration exécrables, transformant le stagiaire ou le jeune employé en esclave destiné à éplucher les dossiers sans compter ses heures. Burnout et dépression ne sont pas loin ! Anaïs de la Pallière connaît la profession et déplore le manque d’humanité qu’elle a pu découvrir autour d’elle. Heureusement, aujourd’hui, la parole commence à se libérer. Pour elle, il importe de mettre en place des balises et de sanctionner les dérives. Avec cet essai, elle signe un document engagé (certes à charge !) mais dont l’objectif consiste à faire évoluer les mentalités, à faire bouger le système et à donner de l’espoir à ceux qui envisagent de porter la robe. Ed. Michalon – 219 pages Paul Huet
LÉONARD DE VINCI : TOUT L’ŒUVRE PEINT, UN NOUVEAU REGARD Léonard de Vinci est un artiste complet qui suscite toujours l’admiration. Sans doute le plus savant de tous les créateurs, humaniste parfait et témoin d’un siècle où les connaissances primaient. Si ses inventions continuent de troubler les gens du XXIe siècle, il a laissé des œuvres picturales de toute beauté, dont la célèbre et mystérieuse Joconde, attirant au Louvres les touristes du monde entier. Au fil des siècles, ses travaux n’ont jamais cessé de faire l’objet de conjectures et d’analyses approfondies. Tout le monde en parle sans finalement les connaître parfaitement, ni savoir les remettre dans leur contexte. Alessandro Vezzosi est critique d’art et l’un des spécialistes du XVe siècle italien. Il a rassemblé dans un gros volume tous les travaux peints de Léonard, s’est appliqué à en fournir les caractéristiques techniques, a relevé leurs significations cachées, leurs aspects les plus singuliers et a fait le point sur certaines toiles ou panneaux dont l’attribution est contestée. Pour rendre cette étude passionnante, il s’est également engagé à ce que chaque création soit représentée en couleur sur papier glacé, de manière à ce que le lecteur puisse les découvrir dans leurs infinis détails et y receler ce qui en fait l’originalité et la valeur. Des compositions d’une rare précision, où entrent en compte les connaissances pratiques dans des domaines aussi sérieux que l’anatomie, l’optique et la géométrie, continuelles observations de tout ce que la nature présente aux yeux. Comme il devait avoir un esprit universel pour devenir le meilleur de son époque, il s’est évertué à apprendre les sciences de la Renaissance et à les appliquer dans le domaine des Beaux-Arts. D’emblée, un challenge réussi ! Ed. de La Martinière – 320 pages Daniel Bastié
LES 7 CLÉS POUR VIVRE HEUREUX ET EN BONNE SANTÉ Booster sa santé ne réclame pas d’efforts surhumains. Simplement une hygiène de vie et le désir d’harmonie entre l’esprit et le corps. A cet effet, il devient impératif d’abandonner plusieurs mauvaises habitudes et d’apprendre à manger avec plaisir, à gérer le stress, à dormir suffisamment, à s’oxygéner, à expérimenter le plaisir, à pratiquer le jeu et, surtout, à s’apprécier tel qu’on est sans souffrir de l’image qu’on renvoie ni du regard des autres. Sept clés qui aident à regagner l’estime de soi et à rayonner. Le bonheur n’est certes pas acquis à la naissance. Il se bâtit lentement, brique par brique. Au fil des années, la recherche a révélé que l’état psychologique entre en étroite corrélation avec le physique. Les solutions miracles n’existent pas. La méthode Body&Mind utilise les mécanismes du cerveau pour cheminer vers la stabilité émotionnelle. Voilà, modestement, l’objectif de cet ouvrage, préfacé par Anthony Fardet er rédigé par Catherine Malpas et Cécile Guerrier. Une méthode qu’on appelle également holistique. A savoir qui, en épistémologie comme en sciences humaines, ramène la connaissance du particulier, de l’individuel à celle de l’ensemble, du tout dans lequel il s’inscrit. Bref, une manière d’entretenir un cercle vertueux au quotidien ! Ed. de La Martinière – 284 pages Sylvie Van Laere
RÉPARER LES FEMMES Le docteur Denis Mukwege a reçu le prix Nobel de la paix 2018 pour son action auprès des femmes victimes de viols en Afrique. En quinze ans, plus de quarante mille d’entre elles ont subi des violences extrêmes, avant d’être prises en charge par l’hôpital de Panzi, qu’il a fondé en 1999 en République démocratique du Congo. Éducation, insertion sociale, accompagnement judiciaire, campagnes de sensibilisation … l'action de cette figure emblématique de la défense des droits des femmes ne se borne plus aux seuls soins médicaux. Il livre à présent une autre bataille : mettre fin à l’impunité des responsables d’agressions sexuelles. Six tentatives d'assassinat n'ont ébranlé ni ses convictions, ni sa détermination. Avec l’ouvrage « Réparer les femmes », coécrit avec le docteur Guy-Bernard Cadière, il raconte sa lutte contre la barbarie et dénonce l’inacceptable. Otages des conflits armés, les filles sont devenues de la chair à humilier, à avilir et à broyer. Arme de guerre, le viol semble se généraliser pour faire courber l’échine, répandre la terreur et marquer durablement les esprits, à l’origine de déplacements des populations, provoquant un déclin démographique, détruisant l’économie et désintégrant le tissu social et familial. Une abomination qu’il convient de dénoncer et de punir comme crimes contre l’humanité. Il sait que les mots et la prise de conscience ont le pouvoir de changer le cours de l’Histoire. Pour se battre contre le mal, il importe de se parer de convictions. L’opinion publique est sa meilleure alliée. Ne jamais taire les exactions et les châtier, voilà son credo ! Ed. Mardaga – 144 pages Sylvie Van Laere
PIAGET OU L’INTELLIGENCE EN MARCHE Jean Piaget est aujourd’hui considéré comme l’une des figures majeures de la psychologie et des connaissances du XXe siècle. Selon lui, l'origine de la pensée humaine ne naît pas de la simple sensation, pas plus qu’elle ne soit un élément inné. Elle se bâtit progressivement lorsque l'individu, et en particulier l'enfant, entre en contact avec la société. Grâce à cette interaction répétée, il développe une activité intellectuelle pour devenir un adulte responsable. Jacques Montangero et Danielle Maurice-Naville présentent l’œuvre du célèbre pédagogue dans un style didactique, sans la trahir et en développant ses thèmes centraux, son vocabulaire, ses influences et le fonctionnement de sa connaissance. Jean Piaget divisait le développement psychologique de l'enfant en plusieurs périodes, chacune elle-même séquencée en stades conditionnant le suivant. Les âges qui voient le passage d'une strate à l'autre sont indicatifs et basés sur une moyenne. Cet ouvrage peut évidemment être consulté de diverses manières selon qu’on souhaite une introduction à ses recherches, des précisions par rapport à tel ou tel point de sa doctrine ou qu’on souhaite s’initier à l’ensemble de son œuvre. Dans un souci de clarté, de nombreuses subdivisions ont été consenties dans le but avoué de ne pas tout mélanger. Présenter des références, des citations et des synthèses suppose un choix en amont. D’autres auteurs auraient sans doute travaillé en suivant un autre axe. A chacun son approche ! Il reste que la pensée de Piaget est toujours actuelle, qu’elle inspire les pédagogues de tous bords et que sa théorie de l'apprentissage exerce une influence notable sur les méthodes éducatives d’aujourd’hui. Ed. Mardaga - 268 pages Sam Mas
CANCER DU SEIN ET DE L’OVAIRE : UNE HISTOIRE DE FAMILLE ? Malgré les avancées de la médecine, le cancer demeure un mal de notre siècle, souvent caché, parfois tabou. Dans un monde qui entend faire de chacun un winner, la maladie frappe le plus souvent à l’instant où on l’attend le moins, lorsqu’on profite du bonheur, quand on a encore énormément de projets à concrétiser. Et si on parvenait à détecter le cancer en amont, dès le plus jeune âge ? Par exemple dans les gènes ? On a souvent répété qu’il existe des familles à risques, qu’il est héréditaire et qu’anticiper aiderait à le vaincre. Les patients, porteurs ou non de la mutation, sont soumis à rude épreuve et personne n’ignore la souffrance qu’ils endurent. Hélène Chaumet aborde sans langue de bois un sujet délicat, parle du dépistage, des consultations oncogénétiques, du stress lié à l’attente, des multiples dimensions psychologiques et éthiques qui entrent en jeu dans l’analyse d’un diagnostic. Son livre a été écrit comme une réponse à la maladie, pour aider à la comprendre, offrir des astuces pour lutter sans baisser les bras et analyser l’impact que cela peut avoir sur la vie du malade comme sur celle de son entourage. Elle insiste surtout sur le rôle de la génétique. Plus la recherche progresse et davantage elle apporte des réponses tout en faisant surgir de nouvelles questions. Puis, on le sait, un test demeure un test, jamais fiable à 100%. Il confronte l’homme au mystère de l’existence, de son origine et de sa finitude. L’essor de la technologie demeure un bien au service de la médecine, mais ce qui importe reste l’usage humain de ce savoir. Ed. Mardaga – 148 pages Amélie Collard
HISTOIRE DU 36 QUAI DES ORFÈVRES Voilà une adresse mythique, bien connue des amateurs de polars ! Une enseigne qui sert de cadre à maintes enquêtes livresques, télévisées ou cinématographiques, où ont évolué des flics célèbres en chair et en os ou de fiction. Georges Simenon y a tout naturellement aménagé le bureau de Jules Maigret. Ce lieu névralgique de la police parisienne ou P.P. a vu défiler plusieurs affaires du siècle : la bande à Bonnot, le kidnapping du baron Empain, la traque de Guy Georges, les attentats de 1995, le sinistre docteur Petiot, le cas Stavisky, etc. Des noms toujours dans les mémoires et inoxydables. Claude Cancès, désormais retraité, ne peut décemment pas laisser sommeiller ses souvenirs d’ancien directeur de la PJ et, plutôt que de tirer un trait sur le passé, a choisi d’exhumer plusieurs dossiers afin de les exposer aux lecteurs et prouver que la réalité dépasse largement la fiction. Dans ce livre, il ne se contente pas de raconter les faits qu’il a été amené à traiter, mais aussi ceux qui ont alimenté les médias bien avant son entrée en fonction. On le sait, le XXe siècle a marqué un tournant dans la manière de mener les investigations, poussant les enquêteurs à se servir de la technologie face à des bandits toujours mieux armés et plus déterminés. A tort ou à raison, on pourrait penser que tout avait été dit. Au fil des chapitres, on découvre qu’il n’en est rien. L’auteur pose un regard personnel et apporte des détails jusqu’ici peu ou mal connus du grand public. Mieux, il évite le ton dogmatique et use d’une plume de romancier pour inviter chacun à revivre les grandes heures du numéro 36. Vingt-deux, voilà les flics ! Ed. Mareuil – 521 pages Daniel Bastié
ALENTOUR DU VERSET Voilà un livre qui sert d’introduction à la phénoménologie, courant philosophique né au début du XXe siècle et dont Edmund Husserl est le fondateur. Comme son nom l’indique, elle s’intéresse aux structures et à l’analyse des faits de conscience et se concentre sur les phénomènes nés de l’expérience vécue et spirituelle. Plusieurs penseurs se sont attachés à ce mouvement intellectuel dont Heidegger, Merleau-Ponty, Marion, Levinas, Romano, Falque, Stein, Buber et, parmi beaucoup d’autres, Rosenzweig. Assurément, la religion ne pouvait pas être éludée de leur approche et certains se sont spécialisés dans le rôle de la foi face à l’être humain. Marie-Aimée Manchon a rédigé un ouvrage né du fruit de maintes lectures, de médiation christique, de retraites spirituelles et d’un long cursus universitaire. Pour elle, il était grand temps de s’intéresser aux mystères chrétiens et de les observer sous un prisme neuf. Aussi, elle relève les vingt mystères du Rosaire pour leur apporter un éclairage philosophique. Il s’agit du coup d’un livre qui parle de christianisme, de Jésus, de Marie mais aussi de l’action de l’Esprit Saint dans notre vie. On le sait, un mystère n’est pas une porte close, mais un point à appréhender doucement, sans rien forcer, que l’on entrebâille pour en saisir la vérité. Un peu comme on apprivoise certaines émotions ou qu’on lie des amitiés. L’idée consiste ici à se baigner dans la grâce de Dieu tout en ne perdant jamais sa raison ni son intellect. La théologie et la philosophie peuvent avancer de concert, sans s’opposer. Il ressort de cet ouvrage riche, dense et bien illustré d’exemples que le spirituel et le liturgique sont la manne qui nourrit le croyant. Marie-Aimée Manchon est religieuse et chargée de cours au Collège des Bernardins à la faculté de philosophie de l’Institut catholique de Paris. Ed. Ad Solem – 536 pages Sam Mas
LE PACTE DES IDOLES Raphaël Baeriswyl définit le pacte des idoles comme étant le moyen de focaliser les reproches et la violence de la société sur les élus d’hier et d’en faire des boucs émissaires. A l’heure où l’Europe se divise chaque jour davantage, le risque est énorme d’incriminer le système et de dénoncer ses travers. Bien entendu, tout est loin d’être rose au sein de nations unies pour le meilleur, même si le pire n’est jamais fort loin. Fustiger, diaboliser et réveiller les élans identitaires ou xénophobes, le risque demeure face à un monde malade de trop de laxisme, d’une concurrence économique effrénée, de l’afflux de migrants, de citoyens de cultures différentes et de cette propension à toujours tenter de tirer l’épingle à soi. L’auteur analyse avec une froideur quasi chirurgicale les conflits qui endiguent les hommes dans leurs actions. Il pose un regard de philosophe (influencé par René Girard) et ose trois thèmes traitant de ce qui nous entoure : les conflits asymétriques, le développement de la violence et le politiquement correct. Sujets épineux, sans manifeste parenté même s’ils partagent une origine commune pour une quête d’intelligibilité. Assurément, il place la logique au-dessus du reste et se confronte autant à l’histoire qu’à ses mythes. D’essence solitaire, son travail n’échappe pas à notre époque et, en dépit de ses limites, offre au lecteur des pistes visant à édifier un avis propre. Sa cathédrale intérieure, selon le texte ! Ed. Ad Solem – 236 pages Sam Mas