Bruxelles Culture septembre 2020

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BRUXELLES CULTURE 15 septembre 2020 Brussels Diffusion asbl Contact et abonnement gratuit : pressculture4@gmail.com

RENCONTRE : THIERRY-MARIE DELAUNOIS


RENCONTRE : THIERRY-MARIE DELAUNOIS Auteur, chroniqueur littéraire et membre sociétaire de l’Association des Ecrivains Belges de langue française (AEB), né en 1959 à Soignies, Thierry-Marie Delaunois a déjà publié plusieurs romans (dont “Auprès de ma blonde”, “L’île joyeuse” et “Raconte-moi Mozart…”). Diplômé supérieur en programmation et en chimie clinique, il aime travailler les dialogues de ses ouvrages, leur accordant une extrême importance, l'humain toujours dominant. Partage, solidarité, compréhension et passion demeurent chez lui des phares incandescents. Rencontre. Enfant, quels livres dévoriez-vous ? Soyons honnêtes : bien que mon père soit un philologue classique et professeur de Lettres, je n’ai commencé à lire qu’assez tardivement tant j’étais concentré sur mes études. Il fallait que j’obtienne en permanence de bons résultats, la “médiocrité” n’étant pas tolérée dans la famille. Ce fut d’abord la bibliothèque rose et la bibliothèque verte avec, entre autres Enid Blyton, le Club des cinq, le Clan des sept, etc… Ensuite ce fut une longue série de lectures en format de poche avec notamment les Anne et Serge Golon, Barbara Cartland, Guy des Cars, et durant les Humanités, ce qui était imposé par le programme : Le Grand Meaulnes, Vol de nuit, et bien d’autres. C’était très diversifié, la TV avait aussi une place de choix dans ma vie. Un plaisir d’ado qui sortait peu il y a plus de quarante ans de cela. Vous souvenez-vous de vos premiers écrits ? Ils remontent fort loin et je ne sais plus très bien quand ni pourquoi j’ai commencé. Par contre, je me souviens fort bien que cela a débuté durant une période de chômage temporaire. Trois manuscrits du genre polar, tous finalisés, avec une singulière paire d’enquêteurs, un homme et une femme, en tant que personnages principaux. Je n’ai jamais envisagé de les faire publier. Je me suis ensuite attaqué à une saga familiale pour la jeunesse prévue en six tomes mais certaines circonstances m’ont conduit à lâcher mon projet en fin de deuxième tome. J’ai conservé le tout dans une caisse, preuve à présent lointaine de ma capacité à écrire tout un roman. Puis il y eut un passage à vide avant que j’en vienne à la rédaction d’articles pour le courrier des lecteurs de journaux nationaux et régionaux, et j’ai eu souvent la bonne surprise de les voir publiés mais sans en être informé ! Mon cœur battait alors très fort et je ne pouvais m’empêcher de songer : “Thierry, t’es pas trop mauvais ! Manifestement !” En quelle année avez-vous publié votre premier ouvrage ? Dans le courant de l’année 2005, j’ai entamé l’écriture d’un roman policier dont l’action se déroule au coeur de Bruxelles, plus précisément dans un établissement hospitalier réputé que je connaissais fort bien. Une fois parvenu au bout de mes peines, j’ai estimé qu’il était plus que temps que je tente l’aventure de la publication. Un long parcours, dit du combattant, a alors débuté, un parcours que bon nombre d’auteurs expérimentent. En décembre 2007, il a été publié, pour les fêtes. Cela a ensuite été fort vite car mon deuxième roman a déjà été publié neuf mois plus tard. Re-plaisir ! Qu’avez-vous ressenti lors de la publication de votre premier manuscrit ? Il me faut avant tout vous avouer que j’étais parvenu à effectuer ma phase de recherche d’un éditeur à l’insu de tous. Incognito ! Je savais que je ne rencontrerais que des obstacles ainsi que des avis négatifs, d’où mon choix. Personne dans mon entourage ne croyait en moi à ce point de vue-là et quand j’ai été accepté, ce fut une réelle stupéfaction. Ma mère avait déjà quitté ce monde à cette époque-là! Ce que j’ai ressenti ? C’est de l’ordre de l’indescriptible, du surnaturel. On se sent à la fois léger, droit, fier et “digne”. On en a beaucoup parlé dans mon entourage. “Vous savez, le fils Delaunois, eh ben il a…”


Une jolie revanche en ce qui me concerne et l’on a cessé avec le temps de m’appeler “le fils de…”. J’ai ensuite évolué dans la vie avec davantage d’assurance. Si vous saviez comme les regards peuvent changer une fois que l’on est parvenu à se faire publier ! Comment pourrait-on définir votre style ? C’est là une très bonne question car il est plutôt difficile à définir. Je dois vous avouer, une fois de plus, que je ne cherche pas longtemps mes mots. Ils surgissent, tout simplement, dictés par mon cœur, mes propres sentiments et ceux de mes personnages, mes propres sensations et celle que me procurent mes héros. Car tous mes personnages sont pour moi des héros. Ils vivent, respirent, se battent, survivent, pensent, agissent, se révoltent... L’on dit de mon écriture qu’elle se révèle simple, fluide et sans fioritures ni recherches d’effets particuliers, que je ne cherche apparemment pas à former de belles phrases, de celles qui captent l’attention de l’érudit, du cultivé, du connaisseur. Non, rien de tout cela ! Je raconte simplement les choses à la manière d’un conteur s’adressant à un public très diversifié là pour écouter une bonne histoire. Rien de plus! Ni formules alambiquées, ni expressions recherchées qui témoigneraient autant de la qualité que de la complexité de notre belle langue française. Pour vous, que représente l’acte de créer ? Créer. Donner vie à quelque chose. L’alchimie est présente. On extrait du néant ou de son propre terroir intérieur une idée qui fait doucement son chemin. Le pouvoir de la pensée claire et cohérente, l’inspiration ainsi que l’imagination en action. La création a de mystérieuses origines, prenant des formes bien diverses. Notre propre vécu avec ses blessures nous mène souvent à la création, méandres assurés ! Créer, c’est aussi devenir papa… ou maman, c’est selon ! Un rituel est-il nécessaire au moment d’écrire ? Pour moi pas particulièrement mais j’ai malgré tout besoin d’un minimum de calme autour de moi, un discret fond musical m’accompagnant souvent durant l’écriture. Mozart, Beethoven, Schubert, du classique avant tout ! Il me faut également de la clarté, pouvoir poser mes bras sur des accoudoirs ou sur une table, ne pas être vêtu comme pour sortir. Une tenue d’intérieur rassurante et appropriée en fonction de la saison. Une chose que je dois par contre éviter, c’est d’avoir le soleil dans les yeux. Que l’on m’éblouisse, d’accord, mais pas le soleil ! Un rituel malgré tout ? Couper le téléphone et éteindre mon smartphone, également éloigner tout ce qui pourrait me distraire. Quand vous débutez l’écriture d’un ouvrage, savez-vous déjà à ce moment-là comment vous le terminerez ? Pour plusieurs de mes romans, j’avais dès le départ un plan qui permettait d’éventuels changements d’itinéraire pendant l’écriture. La plupart du temps, je savais dès le début comment je terminerais mon ouvrage. Avec un roman policier c’est de loin préférable, le scénario devant rester cohérent et crédible du début à la fin. C’est toute une construction qu’on élabore, où rien ne peut être laissé au hasard. Ce fut le cas pour mon premier roman “Reflets”. En ce qui concerne “L’île joyeuse”, “Raconte-moi Mozart…” et “Connectée”, j’ai effectué quelques changements en cours de route. J’en ressentais la nécessité si je voulais bâtir un ensemble structuré totalement exempt de toutes invraisemblances. Par contre, j’ai démarré l’écriture de “Auprès de ma blonde” au petit bonheur, sans la moindre idée de la manière dont je poursuivrais mon histoire, mais à mesure que j’avançais, je me suis mis à voir progressivement plus clair quant au fil à suivre et finalement, en bout de course, je me suis retrouvé


satisfait de l’ensemble. Après publication, j’ai récolté, ô surprise, pas mal d’avis positifs. Le scénario de mon roman était assez bien ficelé. Percevez-vous une évolution dans votre manière de rédiger ? Et comment ! Il y a un monde entre “Reflets”, le polar dont je parlais précédemment, et “Connectée”, mon septième roman, un drame psychologique contemporain dont j’ai remanié deux fois l’écriture principalement d’un point de vue stylistique. Mes deux premiers romans, je les ai écrits au présent, ce qui n’est pas si simple. Ils sont parsemés de quelques lourdeurs, j’en suis conscient. Ultérieurement, après de nombreuses lectures d’ouvrages écrits au passé, j’ai tenté de le faire à mon tour pour finalement découvrir que j’étais plus à l’aise ainsi. Étonnamment. J’ai aussi gagné en fluidité, m’a-t-on appris, éliminant beaucoup d’adjectifs et d’adverbes en fait superflus. Je ne suis personnellement jamais satisfait du premier jet, un second tour minimum est toujours prévu afin d’améliorer mon texte. Je me sens toujours bien la chose accomplie. Si quelque chose était à refaire, laquelle serait-ce ? Et une erreur à ne plus commettre ? Il y a eu quelques erreurs d’aiguillage dans ma vie, qui font que le chemin de l’écriture, je ne l’ai pas directement emprunté. En cause l’entourage, l’environnement et diverses circonstances que je ne relaterai pas ici. Cela prendrait plusieurs pages. Je me suis souvent laissé influencer par les autres, un peu trop même ! Quelque chose à refaire en tant qu’auteur ? Éventuellement réécrire mes deux premiers ouvrages dont je n’aime plus trop la narration, la trouvant à présent assez chaotique. Quant à ma pièce “Sur sa faim !”, je l’allégerais volontiers considérablement. C’est du roman-théâtre. Une erreur à ne plus commettre ? Elle découle de ce que je viens de vous raconter : moins écouter les autres, surtout “les touristes” en matière d’écriture. Depuis un bon moment déjà vous êtes le chroniqueur des Rencontres Littéraires de Bruxelles et à présent vous en êtes le nouvel animateur. De quoi s’agit-il en fait ? De présentations publiques d’auteurs et d’écrivains de chez nous, leurs parcours en littérature et leurs dernières publications, une ou deux. Ces Rencontres se déroulent à l’Espace Art Gallery qui est situé à la rue de Laeken dans le centre-ville. Un accueil garanti convivial, tel un bon quart d’heure académique, précède la présentation en elle-même, deux auteurs tous les deux mois, excepté durant les vacances scolaires, suivent la séance de signatures et un drink aux discussions amicales informelles, le tout se déroulant dans une atmosphère chaleureuse axée sur l’interaction. Des après-midis de dimanche à ne manquer sous aucun prétexte si l’on est un inconditionnel de littérature ! L’un ou l’autre écrivain vous impressionne-t-il particulièrement ? Si oui, lequel et pourquoi ? Parmi les auteurs contemporains, pour sa qualité d’écriture, la profondeur de ses ouvrages et ce qui s’en dégage : Eric-Emmanuel Schmitt. J’ai lu une bonne partie de son œuvre et rien ne m’a déçu, venant de lui. Il a un sens inné de la narration et de la formule qui lui sont typiques. J’ai eu l’énorme chance de pouvoir le lui dire, je l’ai rencontré maintes fois, en diverses occasions, notamment en dédicaces. Je le sentais ravi du compliment et à la longue il finissait par me reconnaître lorsque j’arrivais. Cela me faisait plaisir et m’impressionnait. Quelles sont les thématiques du livre que vous êtes en train de rédiger ?


Il s’est produit il y a quelque temps un changement de priorités dans mes projets. J’en avais principalement deux sur la planche : l’écriture d’une fiction-vérité tournant autour de la condition précaire d’écrivain ballotté entre son éditeur et ses lecteurs, et l’élaboration d’un recueil de nouvelles axé sur les croyances et prémonitions, mais l’intrusion brutale dans nos vies de ce barbare, le Coronavirus, m’a mené au confinement. Inspiré, j’ai alors débuté la rédaction d’une chronique sur les comportements de l’Homme en temps de stress. “Confitures et déconfitures du confinement”. Peutêtre tenterai-je un jour de le faire publier... Quelles sont les sources de vos idées ? Elles sont multiples ! Si vous saviez… Des petites choses du quotidien, l’un ou l’autre fait divers, l’époque dans laquelle nous vivons, les comportements excentriques, l’un ou l’autre grand événement, vous ne pouvez pas vous imaginer tout ce qui me passe par la tête parfois même en deux heures de temps si je me trouve au bon endroit au bon moment. Je capte, ou pas, l’instant. C’est tout simple et je ne me casse jamais la tête pour “trouver”. Cela vient.... ou non. J’aime traiter de la complexité des relations et des grandes valeurs de ce monde, particulièrement celles du respect et de la compassion. Selon vous, comment se porte le monde de l’édition en Belgique ? Il se porte bien et les auteurs ont l’embarras du choix, me semble-t-il, mais entre les maisons d’édition traditionnelles et les nombreuses possibilités qu’offre le numérique, s’orienter et choisir n’est pas toujours évident. Cela dépend aussi des objectifs poursuivis par l’auteur. En Belgique, nous avons quelques belles structures telles que les éditions MEO mais il en existe d’un autre type, certaines se rapprochant parfois davantage du statut de pur prestataire de services. On publie bien chez nous, le principal problème résidant en fait dans le manque de visibilité de nos ouvrages par rapport à certains de nos voisins tels que la France et l’Angleterre mais nous n’avons pas trop de raisons de nous plaindre, me semble-t-il à nouveau. Auriez-vous un conseil à donner à un jeune qui veut se lancer dans l’écriture ? J’en aurais plusieurs à lui prodiguer mais retenons-en principalement deux ! Le premier : qu’il définisse bien ses objectifs avant de se lancer ! Le pourquoi et quel est le but. S’agit-il d’un pur appel intérieur, d’une absolue nécessité personnelle d’écrire pour transmettre un message, ou l’objectif est-il d’ordre lucratif ? Vivre de l’écriture n’est pas donné à tous. Si ni le talent ni la chance ne sont au rendez-vous, autant virer de bord si le but est de se constituer purement et simplement un joli pactole. Le second conseil est de savoir où l’on va quand on entame l’écriture d’un ouvrage. Cela permettra au jeune d’abandonner moins facilement en chemin. Patience et persévérance sont les maîtres-mots, également lorsque débutera la phase de recherche d’un éditeur. Dans les maisons traditionnelles à compte d’éditeur, très peu de manuscrits aboutissent à la publication, il faut qu’il en soit conscient. Mais s’il est déjà une personnalité en vue dans son principal domaine d’activité, c’est alors une autre histoire… Un tout grand merci, Daniel, de m’avoir accordé cette puissante interview qui, je l’espère, aidera d’une manière ou d’une autre l’un ou l’autre jeune ou moins jeune qui aimerait s'aventurer dans l’univers de nos Lettres. Retrouvez Thierry-Marie Delaunois sur le site www.thierry-mariedelaunois.com Propos recueillis par Daniel Bastié


EXPOSITION : SERGE TENÈZE : DE RETOUR DANS LA CAPITALE ! Serge Tenèze est de retour à Espace Art Gallery ! Notre homme procède de l’abstraction, après une longue période à se chercher dans la figuration. Puis, fin 2017, une métamorphose s’est opérée, tant psychologique qu’esthétique. Pourquoi reproduire le réel alors que la photographie le permet avec une aisance remarquable ? L’occasion de déposer le pinceau et de se remettre complètement en question, sans renier une quinzaine d’années de pratique qui traduisent des états d’âme aussi bien qu’elles reflètent une époque. Aller de l’avant, abandonner le trait, progresser en songeant à dégraisser l’ensemble et en ne retenant que le mouvement, le rythme et la couleur : voilà le challenge ! Bien sûr, simplification ne signifie jamais facilité. Chaque approche nouvelle implique de ne pas se renier et de ressentir les sensations et les passages, sans omettre le rôle prépondérant de la lumière qui veloute, qui chatoie et qui fluctue. La vingtaine de toiles accrochées aux cimaises du rez-de-chaussée parlent sans nécessiter l’intervention d’un interprète, en aparté avec le visiteur, soufflent une expression, suggèrent une atmosphère, opposent des idées. La mémoire de notre temps se veut également celle d’un monde qui s’active toujours davantage, en proie au vertige de la technologie et à la vitesse que chacun tutoie au quotidien. Peindre ces instants fugaces revient à les associer à certains parfums, à l’une ou à l’autre musique captée à la radio ou capturée sur le Net, à une senteur qui séduit l’odorat. Enfin, aux rencontres futiles ou non qui émaillent les enjambées d’une existence. Malheureusement, la mémoire humaine engourdit le plus souvent ces instants précieux pour n’en retenir que de vagues souvenirs. Dans sa série, Abstract - Lumières noires et Lumières de verre, Serge Tenèze s’immerge complètement dans cette perception et cherche à figer les émotions floues qui meurent si on n’y prend pas garde. Plutôt que d’encourager le défaitisme, il privilégie les moments solaires et transpose (par le truchement des pigments de couleur) tout ce qui agrémente les semaines qui se succèdent sans faiblir. Tout participe à cette perception qui devient matière, brillance ou matité, linéarité ou relief, huile ou cire, toile légère, panneau de bois dur et rigide ou verre, alchimie entre les différents supports, agrégats des noirs d’os ou de fer malaxés aux huiles cuites ou brutes, aux essences entêtantes d’aspic, de térébenthine ou de cire. Un constat s’impose. En tournant le dos à l’académisme et à tout ce qu’il a mis en chantier jusqu’alors, l’artiste s’invite à une sincère redécouverte, à contrebalancer le pour et le contre de chaque action. Surtout à créer de nouveaux outils et à en chercher ailleurs, qu’il s’agit de grattoirs, de lames tranchantes, de brosses, de plexi tordu, de racloirs, etc. Les artistes Marc Vioulès, Pauline Bailly et Monica Senah complètent cette aventure picturale avec leurs derniers travaux. Une manifestation picturale à découvrir à Espace Art Gallery du 4 au 27 septembre 2020 et du mercredi au samedi de 11 heures 30 à 18 heures 30. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.espaceartgallery.eu Rue de Laeken, 83 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié


RENCONTRE AVEC LA NOUVELLE DIRECTRICE DU RIDEAU Elle a le sourire énigmatique de l’Asie. Comme le Bouddha, elle nous fixe de son regard impénétrable. On ne sait pas ce qui se cache sous son visage lisse, impassible, lointain. Et puis soudain, la parole se libère, comme une rivière qui a cherché son chemin et l’a trouvé. Cathy Min Jung sera en septembre la nouvelle directrice du Rideau de Bruxelles. Pour au moins cinq ans, sinon dix. Nous l’avons rencontrée et elle a accepté de se livrer à nos questions. − Je suis une femme de 46 ans. Je suis née à Séoul, en Corée du Sud, mais j’ai grandi en Belgique, dans la région d’Ath où j’ai été adoptée à l’âge de trois ans et demi. J’ai fait toute ma scolarité primaire et secondaire dans la campagne wallonne. Après un bref passage à l’ULB en philologie romane, Cathy suit un régendat en français-histoire, mais ce n’est pas la carrière d’enseignante qui l’intéresse. Dès le départ, elle se destine au théâtre. C’est là qu’elle veut se réaliser. − Après le régendat s’est ouvert le concours au Conservatoire de Bruxelles où j’ai été reçue dans la classe de Bernard Marbaix (qui fut acteur notamment au Rideau). J’ai poursuivi cette formation pendant trois ans. En parallèle, elle commence à jouer pour les scènes belges : le National, le Varia, le Théâtre de Namur ou celui de Liège. On la retrouve sur les grandes scènes de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Elle fréquente aussi Paris où elle obtient des petits rôles au cinéma et à la télévision. Elle suit une formation de six mois à Londres, à la Webber Douglas Academy chargée de dispenser des cours dramatiques. Très vite, elle fonde sa propre compagnie, la Billie On Stage, où elle met en scène des spectacles qu’elle n’écrit pas : Jean et Béatrice de Carole Fréchette (2002) ou Les Dernières Volontés de Dominique Breda et Alexis Goslain (2006) par exemple. C’est ensuite qu’elle se met à écrire ses propres textes : Les bonnes intentions qui interrogent l’identité, la filiation, l’héritage culturel, le rapport mère-fille en 2012 et Sing My Life en 2016, sur le monde des ouvriers confrontés aux excès du capitalisme. Avec La Cour des grands brutalement interrompue au début du confinement, en mars dernier, Cathy comptait interroger nos systèmes éducatifs face aux jeunes. Sa démarche artistique la pousse à convoquer sur les planches ceux que l’on nomme « les invisibles » qui n’ont pas la parole dans les débats publics et médiatisés. La nouvelle directrice − Vous venez, Cathy, de créer la surprise en devenant la nouvelle directrice du Rideau de Bruxelles. Qu’est-ce qui a pu vous pousser à briguer ce poste ? Vous en aviez assez du métier de comédienne, d’actrice, d’autrice ? − Je n’en ai absolument pas « marre » de ce métier. Je ne fais pas une croix dessus. C’est pour moi un prolongement. Dessiner une programmation, c’est comme construire un projet. Il se fait que, comme auteur d’un projet, on est centré sur ce projet. En tant que directrice, le principe reste le même : c’est rencontrer des gens, les mettre ensemble et construire tous ensemble un projet final qui est la


programmation, la ligne artistique générale de la maison. Pour moi, l’un ne supprime pas l’autre. En tant qu’actrice ou comédienne, j’aurai beaucoup moins de temps à consacrer à ma part d’artiste, mais ces dernières années, je me suis davantage investie dans l’écriture, que ce soit en donnant des cours d’atelier d’écriture au Conservatoire ou en écrivant des textes dramatiques. − Comme autrice, vous avez signé Les bonnes intentions en 2012 et, tout récemment, La Cour des grands. Comme actrice, on vous a vue jouer dans Délices du monde à la télé, en 2012, ou dans Préjudice à l’écran en 2016. Quelle différence faites-vous entre les deux prestations, sur planche et sur la toile ? − Ce sont des modes d’expression différents. Au cinéma, il y a quelque chose de plus ludique, de plus immédiat. Dans le rapport à la caméra, c’est l’action, on y va, c’est joué. On n’a pas l’effet des huit semaines de répétition au théâtre. Tout est différé à l’écran. Au théâtre, c’est de l’art vivant et donc le moment où vous livrez votre prestation, le moment où vous actez, où vous œuvrez, c’est le moment de rencontrer le public dans un même espace. C’est un moment de rendez-vous. Tandis qu’au cinéma, on donne rendez-vous à un public inconnu, qui le restera, puisqu’on n’y est plus au moment où le film est projeté dans la salle. Vous ne rencontrez jamais ce public, sinon aux festivals. Au théâtre, vous le rencontrez chaque jour. La représentation elle-même est le moment du partage. Un moment intense pour moi et pour les comédiens. Théâtre et politique − Ce n’est pas simple de diriger un théâtre aujourd’hui avec le virus, l’administration, le public et la politique qui vient de mettre au chômage, ou dans la rue, près de 250 000 personnes. Théâtre et politique : comment voyez-vous le rapport entre les artistes et la sphère politique ? − Bénédicte Linard (ministre de la Culture, de la Petite Enfance, du Droit des Femmes, de la Santé et des Médias à la Fédération) a le souci de la concertation et du dialogue. Je pense qu’elle cherche vraiment à rencontrer les acteurs du terrain et les opérateurs. Après, la réalité politique de la Belgique est ce qu’elle est. Cette ministre doit user de toute sa force de persuasion pour travailler avec ses partenaires et ses opposants. Elle peut user de son influence pour espérer obtenir le plus possible, mais elle n’a aucun pouvoir sur le budget. Je crois qu’elle fait du mieux qu’elle peut. Aujourd’hui, je pense que le dialogue est entamé. Il est bien réel. On a trop souvent vu des politiciens qui n’avaient aucune connaissance de la réalité du terrain et on l’a encore vu dernièrement par rapport à la gestion de la crise. On a pu se rendre compte qu’il y avait dans le passé une réelle méconnaissance de la profession et des métiers artistiques. La ministre et son équipe sont allés à la rencontre du secteur après qu’on les ait fortement interpellés et sollicités. Du coup, notre ministre fait le travail auprès des autres instances politiques pour amener une certaine pédagogie de la profession. Ça commence par là. Une femme d’origine coréenne − Vous êtes une femme, Cathy, et une femme d’origine coréenne. Est-ce que ces deux aspects vont changer quelque chose dans la gestion du Rideau de Bruxelles après Claude Etienne, Jules-Henri Marchant, Martine Renders et Michael Delaunoy ? Focus sur l’altérité, sur l’Afrique qui est aux portes du Rideau, sur l’Asie, sur le genre ? Focus sur la femme et les planches ? − Je suis une femme nouvellement désignée pour la direction du Rideau de Bruxelles. Avec ma personnalité, mon parcours, mes qualités et mes défauts, mes compétences, je vais mener un projet différent de mon prédécesseur Michael Delaunoy, qui partagera mon poste encore deux mois, en septembre et en octobre. C’est un projet qui est dans la lignée de ce que Claude Etienne a fondé par rapport à l’approche textuelle du théâtre. Je veux parler de l’ouverture aux nouveaux récits, l’ouverture à tous les auteurs et autrices francophones de la Fédération Wallonie-Bruxelles. J’insiste sur le mot


francophone et sur les écritures contemporaines. Après, pour parler de l'altérité qui est votre mot, cela fait partie de ma pratique culturelle. C’est une pratique qui doit rester naturelle pour moi et qui sera forcément présente dans ma façon de diriger le Rideau. − Vous êtes d’origine coréenne et vous êtes retournée tard en Corée. Pourquoi y êtesvous retournée ? Vous étiez à la recherche du cœur ? − J’ai fait le chemin pour retrouver la trace de mes géniteurs et rencontrer la terre natale où je suis née. Ce n’était pas dans un souci d’appartenance à ce pays, c’était pour recomposer mon histoire personnelle à laquelle il manquait les trois premières années de ma vie. Je ne connaissais pas l’histoire de mes origines. Toute ma démarche a été de connaître cette histoire. Comme chaque être peut l’éprouver dans son for intérieur, d’où qu’il vienne et quel qu’il soit. J’avais besoin de remplir ce vide, de combler les trous, d’y mettre les faits, la vérité d’avant mon adoption. La Corée fait partie de mon histoire, j’y suis née, j’y ai grandi pendant trois ans et j’en garde le goût viscéral de... la nourriture coréenne (elle part d’un grand éclat de rire). Un nouveau public ? − Vous allez exercer votre direction dans un quartier cosmopolite, altermondialiste, aux portes de Matonge qui se trouve ici tout à côté, porte de Namur. Quel nouveau public drainer et comment l’attirer au théâtre ? Avez-vous une recette en tête ? − Je n’ai malheureusement pas de recette en tête et je n’ai rencontré personne qui en avait pour la « piquer » à mon tour. Peut-être qu’un bon début, c’est d’être curieux. Curieux de tous et de toutes. J’ai envie de mener un projet dans lequel le plus grand nombre possible se reconnaîtrait. J’ai envie qu’au Rideau, tous et toutes se sentent les bienvenus, invités, concernés, attendus même. Je ne ferai pas de focus spécifique, je l’ai dit, pour drainer un public diversifié. Pas de focus qui mettrait les gens dans des catégories. Je souhaite réunir des artistes ayant des sensibilités différentes pour retrouver ces moments de rendez-vous intenses, ces moments de partage que sont les représentations. Je souhaite que les artistes aient envie de travailler ensemble pour créer ensemble ces moments sur la scène.


− « Bienvenue à la maison » affiche le Rideau en haut du billboard. Ça fait quoi d’être dans cette maison qui vient d’être restaurée après deux ans d’intenses travaux, avec un tout nouveau théâtre ? Comment une autrice comme vous se sent-elle dans « la maison des écritures contemporaines » ? − C’est pour moi d’abord un honneur. J’ai toujours été sensible à ce que faisait le Rideau depuis que je le connais. J’ai fait la connaissance de cette maison quand elle était dirigée par Jules-Henri Marchant et Martine Renders (19922008). Je ne l’ai plus quittée ensuite. J’ai toujours été une spectatrice assidue des pièces qui y étaient produites. La phrase d’accueil me parle réellement. On est dans une maison qui a la taille humaine. La structure du Rideau privilégie un rapport de proximité, un rapport intime avec le public. Cela a toutes les caractéristiques d’une maison. J’aime aussi qu’on puisse repenser son économie dans la dimension étymologique du terme. Economie, c’est l’administration d’une maison en grec. On peut vraiment réfléchir à cette économie par rapport à la structure du Rideau. Je me sens aujourd’hui chez moi dans notre maison. Le Coronavirus − Qu’est-ce que le Coronavirus vous a appris pour vous-même et pour le théâtre ? − Il m’a confirmé notre fragilité par rapport au monde. Il m’a confirmé la dimension mortifère du système économique qui est le nôtre : je pense à la mondialisation, au capitalisme et à la protection du travail. Nos choix de société sont mortifères. Par contre, d’un point de vue artistique, le Coronavirus m’a confirmé la nécessité d’être toujours en éveil, d’être toujours ouvert au présent. Ce que nous faisons au théâtre, ce que nous faisons dans l’art, nous le faisons en étant attentifs à ce présent que nous traversons. Plus que jamais, nous devons tenter de le comprendre, de le raconter, de le transcender. L’incertitude est notre lot quotidien, parce que nous ne sommes jamais sûrs de rien. On a eu la prétention de croire qu’on pourrait tout prédire avec des chiffres. Le Coronavirus m’a confirmé qu’il est illusoire de vouloir tout maîtriser, tout dompter. Propos recueillis par Michel Lequeux Photos : Beata Szparagowska et Michel Lequeux


LE RIDEAU DE BRUXELLES ROUVRE SES PORTES Il les a rouvertes en fait depuis septembre dernier mais les a refermées début mars, comme tous les théâtres, suite au confinement. Et pourtant, il attendait cette ouverture avec un tel espoir. Un espoir qui avait fait patienter le Rideau pendant cinq ans jusqu’à ce que des travaux d’envergure y soient entrepris en mars 2018, alors qu’il fêtait son 75e anniversaire. Fondé par Claude Etienne en 1943 dans l’enceinte du Palais des Beaux-Arts, le Rideau de Bruxelles déménage et devient itinérant entre 2011 et 2014, où il trouve enfin sa place rue Goffart, à deux pas de Matonge, au croisement de la chaussée de Wavre. La commune d’Ixelles l’accueille à la place de l’XL-Théâtre que le Grand Midi venait de quitter en décembre 2013. Des travaux s’imposaient pour aménager cet espace d’abord occupé par une charbonnerie, puis par un garage d’automobiles, enfin par un petit théâtre de quartier qui ne payait pas de mine au début des années 80. C’était une occasion rêvée pour le Rideau qui cherchait un havre de paix après ses itinérances. Il l’a trouvé pour une durée de 27 ans avec le bail emphytéotique que lui a délivré la commune d’Ixelles. Et comme dans une maison nouvellement acquise, les travaux ont transformé l’espace intérieur, faisant de cet îlot « la maison des écritures contemporaines ». Un patio de lumière Tout part de la cour intérieure où aboutissait l’ancienne charbonnerie dont le Rideau a gardé la balance. On peut voir celle-ci dans l’accès donnant à la salle contiguë. La cour a été reconvertie en un patio de lumière vitré, planté d’arbustes japonais, autour duquel rayonnent les cinq bâtiments de l’îlot, comme un cœur de vie. Il rythme tout l’espace théâtral. « Il y avait au départ cinq bâtiments différents autour d’une cour, nous dit Stéphane Damsin, architecte d’Ouest, qui a conçu cette rénovation avec son associé Jan Haerens. Cinq architectures différentes, avec des couleurs et des châssis différents. Il fallait rassembler l’îlot très construit, avec des voisins autour, pour unifier l’ensemble d’une manière fluide et logique qui permette aux artistes et au public de se déplacer sans se rencontrer. Le projet devait aussi offrir un confort acoustique non seulement pour le théâtre, mais également pour les voisins qui habitent un étage plus haut. » Ce qui surprend le visiteur, c’est la lumière qui se répand dans l’espace depuis le haut. Comment amener cette lumière dans l’îlot ? « C’était en effet le but dans cet îlot enclavé. Pour éviter la claustrophobie du lieu, le côté cul de sac, il fallait l’ouvrir par le haut. Le patio d’abord, autour duquel s’agencent les pièces et la grande salle. On a créé ensuite des puits de lumière pour ramener


cette clarté à l’intérieur. On avait des velux dans l’architecture existante. On en a rajouté quelques-uns à travers une triple hauteur. La lumière vient d’en haut à travers une structure en poutres de béton à claveau. » En fond de parcelle, au-delà du patio, le foyer théâtral s’ouvre en partie sous une triple hauteur laissant pénétrer la lumière zénithale qui éclaire le bar mis à la disposition du public. A droite, les toilettes avec leurs lavabos où l’on reconnaîtra les abreuvoirs de l’ancienne écurie. Car les architectes ont tout fait pour sauvegarder le patrimoine de ce lieu datant du XIXe siècle. A droite aussi les bureaux et le « Salon » donnant sur la rue : « C’est l’espace Joker qui permet au Rideau d’investir dans le lien avec le quartier, explique Stéphane Damsin. C’est un lieu de rencontre et d’échange qui peut accueillir des expositions, une classe avant le spectacle, ou des ateliers pour les jeunes du quartier. Mais il peut aussi servir de bureau d’appoint pour l’équipe du théâtre, pour les metteurs en scène ou les comédiens invités le temps d’une création. » La grande salle A gauche du patio, on arrive dans la grande salle qui déploie ses 155 sièges issus de la rénovation du KDS flamand. Elle est spacieuse face à une large scène qui s’étend à même le sol, avec des gradins modulables. C’est l’ancienne charbonnerie. « En rehaussant le plafond de la salle de théâtre, nous avons créé de nouvelles possibilités, tant pour le jeu des acteurs que pour le confort des spectateurs ou les enjeux scénographiques, intervient Jan Haerens, l’architecte associé d’Ouest. Le jeu se fait au niveau du sol, sans podium, ce qui permet plusieurs dispositions des gradins mobiles et une relation artistique intime et audacieuse. Au rez-dechaussée, tous les espaces sont de plain-pied, ce qui rend la salle accessible à tous. » La rehausse d’un mètre des fermes a libéré la mezzanine et la régie pour les éclairages scéniques. On y accède depuis la « petite maison » que la commune a achetée à côté, en fait une maison plus loin, pour servir d’issue de secours. « C’est la maison technique pour le régisseur, les décors, le service de ventilation et les chaudières, avec le billboard au-dessus, en toiture, précise Stéphane Damsin. Les étages alentour, au-dessus du patio, sont attribués aux artistes et à l’équipe. On a deux rampes d’escalier, l’une conduisant à la grande salle, l’autre aux bureaux, qui permettent ainsi aux artistes de passer d’un bâtiment à l’autre sans rencontrer le public. » A l’étage, on comprend mieux l’architecture générale qui structure les cinq bâtiments répartis autour de cet îlot, avec le patio central. Budget atteint Un des défis majeurs a été le budget initialement prévu. Le théâtre s’étend sur 950 m² et on en est à 900 € le mètre carré, ce qui fait 850 000 € pour les travaux de base. La somme estimée était de 1,1 million d’euros. « C’est un tout petit budget pour de tels travaux, confirme Stéphane Damsin. La magie de l’exercice a été de ne pas diffuser tout le budget au m² mais d’hiérarchiser les travaux pour réaliser des détails soignés, des interventions claires et précises. Nous sommes fiers d’avoir pu le faire. » Le Rideau vous attend le 22 septembre pour la reprise de ses activités si le Corona le permet. « Bienvenue à la maison » comme nous y invite le billboard placé en toiture.


Prochainement au Rideau de Bruxelles

Des hommes endormis, mis en scène par Michaël Delaunoy, nous interroge avec un humour décapant sur notre rapport au genre, aux générations, à la procréation. Comme une danse au bord du précipice. Après le succès de La ville, retour à l’écriture dangereusement envoûtante d’un des plus grands dramaturges britanniques toujours en vie, Martin Crimp. Du 22 septembre au 10 octobre 2020. Muzungu de Vincent Marganne nous emmène au Burundi où Vincent raconte son enfance et la mémoire familiale pétrie d’images, d’odeurs et d’anecdotes. Pétrie aussi des contradictions propres à un muzungu, l’homme blanc d’Afrique. On réentend Petit Pays de Gaël Faye sur les planches. Du 27 octobre au 14 novembre 2020. Loin de Linden de Veronika Mabardi raconte la Belgique telle qu’elle était voici deux générations. Pourquoi on peut se sentir sans terre, tiraillé entre deux langues, deux classes sociales, deux façons de ressentir le monde. Du 24 novembre au 12 décembre 2020.

Pour réserver : contact@rideaudebruxelles. Infos sur www.rideaudebruxelles.be Rue Goffart, 7a à 1050 Ixelles Michel Lequeux

EXPOSITION : SEYNI AWA CAMARA Seyni Awa Camara est une artiste sénégalaise de Casamance, qui vit dans un petit village perdu au cœur de la forêt. Initiée par sa mère aux techniques traditionnelles de la poterie lorsqu'elle était encore enfant, sa pratique artistique s'est très vite éloignée du caractère utilitaire de l'objet pour s'affirmer comme une recherche esthétique sur la substance et la forme. Selon une légende locale relative à une initiation mystérieuse et divine, Seyni et ses frères ont été enlevés par les génies de la forêt qui leur ont appris à travailler la terre. Pour les ramener, les villageois ont fait des sacrifices d'animaux qui ont apaisé les esprits. Tirées d'histoires imaginées ou inventées, ses créations de monstres, portant souvent d'autres petits monstres, sont imprégnées d'un mysticisme inhérent aux esprits et pratiques animistes qui caractérisent l'Afrique villageoise. Révélées au monde occidental en 1989, ses œuvres ont par la suite fait le tour du monde. La raison de cette fascination transnationale pour son art s'explique par cette petite partie de l'esprit qui est commune à tous les hommes : la sincérité des émotions. Des travaux à découvrir du 3 septembre au 24 octobre 2020 à la galerie Baronian Xippas. Plus d’informations sur le site www.baronianxippas.com Rue Isidore Verheyden 2 à 1050 Bruxelles

EXPOSITION : A B D E L K A D E R B E N C H A M M A Né en 1975 à Mazamet, Abdelkader Benchamma vit et travaille à Paris et Montpellier. Benchamma choisit de travailler dans un seul médium : le dessin. Il adopte différentes approches du processus de dessin, se déplaçant parfois sur une feuille de papier avec les traits méticuleux d'un graveur, parfois s'étalant sur un mur avec des gestes somptueux qui s'approprient l'espace. La matière s'échappe du cadre sous une forme de croissance organique. S'inspirant de la littérature, de la philosophie, de l'astrophysique et des réflexions ésotériques, ses œuvres créent des scénarios visuels qui interrogent notre rapport à la réalité alors qu'ils explorent les frontières de l'invisible. Ses œuvres sont à voir du 3 septembre au 24 octore 2020 à la galerie Templon. Plus d’informations sur le site www.templon.com Rue Veydt, 13A à 1060 Bruxelles


TTO: UNE SAISON CHAMBOULÉE, MAIS DRÔLEMENT BONNE ! S’il y a bien un truc que nous a appris le pangolin, c’est que le TTO délivre un service essentiel à la survie de l’espèce humaine : du rire en barre, depuis 25 ans. On le prenait parfois pour un petit divertissement du samedi soir, il est incontestable à présent qu’il s’agit aussi d’un bien de première nécessité. Un quart de siècle déjà que notre théâtre occupe le terrain de l’humour, sans complexe, et croyez bien que c’est loin d’être fini. Jaune, vulgaire, tonitruant, moqueur, joyeux, fin, gras, à froid, pincé, british, méchant, fou, politique, gratuit… Aucune ségrégation : tous les rires ont ici droit de cité. En témoigne notre nouvelle saison, entre audace et valeurs sûres. Le retour de Sébastien Ministru et son classique « Excit », la commémoration des 40 ans de la mort de John Lennon par Marc Ysaye dans « Lennon : the last day » la découverte de nouveaux « stand-up’s » avec la fabuleuse équipe de « What the Fun » , Le poing levé de « King Kong Theory » » de Virginie Despentes, le souvenir ému et musical de « Frederic » par Dominique Bréda, le retour sur scène de Soda et Nathalie Uffner dans l'hommage à leur ami de toujours : Marc Moulin dans « Marc Moulin se moque du monde » de Olivier Monssens... Vingt-cinq ans, le Covid, t’as vu ça ? Ça te laisse rêveur, avoue … L’équipe du Théâtre de la Toison d’Or


MURDER MYSTERY GAME AU COUDENBERG Depuis le 30 juillet, chaque jeudi en fin d’après-midi, vous êtes invités à découvrir le criminel qui hante la rue Isabelle au château du Coudenberg, dans les souterrains de la place Royale. A l’aide de votre smartphone, suivez la piste de l’assassin dont le visage montre une cicatrice à hauteur de l’oeil. Son crime remonte à 1521, voici cinq siècles. Le chambellan du château a été empoisonné. Qui est le coupable ? Ouverture d’un cold case. Le jeu se déroule dans les vestiges du palais de Charles Quint que nous vous avons fait visiter dans un précédent article. Il tourne autour du passé prestigieux du palais impérial, avant que celui-ci ne fût détruit une nuit de 1731 par un terrible incendie qui fit du Coudenberg un “mont froid”. Voici les faits exposés aux visiteurs. Bruxelles, 1521. Alors qu’une fête bat son plein au palais, résidence de l’empereur, un personnage important décède dans des circonstances étranges. Il est empoisonné. Quelques siècles plus tard, son fantôme et celui de plusieurs convives de la Toison d’Or réapparaissent sur les lieux mêmes du crime. Alertés par la présence de ces âmes en peine, les gardiens du musée demandent aux visiteurs de découvrir la clé du mystère. Peut-être que les fantômes disparaîtront alors. Enquête sous corona Pour résoudre le mystère, il faudra vous munir d’un smartphone et d’une tablette, accessoires indispensables au bon déroulement du jeu. C’est en effet un des prérequis de cette activité qui fonctionne grâce à des QR codes et des vidéos. Le jeu a été adapté aux circonstances actuelles pour devenir “coronacompatible” : parcours à sens unique, masque obligatoire, gel des mains à l’entrée et à la sortie, nombre de visiteurs limité sur le site, etc. Cette adaptation a été un défi, comme l’explique Gaspard Breny, responsable event-expo et initiateur du Murder Mystery Game. “On avait développé cette activité pour la Museum Night Fever de l’an dernier. On voulait proposer un jeu-enquête avec des indices à récolter, des personnages à interroger. A ce moment-là, on avait huit acteurs en costumes, qui jouaient les personnages, et des indices physiquement présents. Ce fut un vrai succès ce soir-là avec un public conquis. On avait dans l’idée de refaire le jeu en juin, lors de l’Ommegang, mais il y a eu le coronavirus qui a tout annulé.” C’est grâce au soutien de l’échevine de la culture de la Ville de Bruxelles, Delphine Houba, que le Coudenberg a pu reprogrammer cette activité sous une forme adaptée aux circonstances actuelles. “On a engagé un réalisateur qui a filmé les personnages pour lesquels on a écrit un texte, on a créé des cartons avec des QR codes, etc.” Vous les voyez en train de jouer sur vos tablettes et vous répondez à leurs questions. Jusqu’en septembre Visiblement, le public a répondu présent. “On a dû libérer plus de places initialement prévues, souligne Gaspard Breny. Comme on garantit aux gens que ça se passera dans le cadre des mesures prévues par les autorités, et que les activités sont rares actuellement, le jeu en vaut la chandelle.” Il se passe dans un lieu peu commun, à une dizaine de mètres sous la place Royale. Il y fait frais aussi, ce qui n’est pas désagréable à la fin de l’été. En attendant, le Murder Mystery Game se joue au palais du Coudenberg jusqu’en septembre, tous les jeudis de 18 à 21 h, à raison d’une demi-heure par séance. Entrée place Royale, 10, à 1000 Bruxelles. Tarif demandé : de 8 à 10 euros. Réservation obligatoire à info@coudenberg.brussels Michel Lequeux


EXPOSITION : YUKO NAKAYA Yuko Nakaya dépeint le monde du subconscient en quête de l’âme pure et immaculée. En tant qu’artiste, elle a pour but de montrer l’intégralité du spirituel dans l’art. Pouvoir atteindre et réveiller la partie subconsciente chez l’être humain est pour elle un fabuleux accomplissement. Ce « subconscient » présent en toile de fond, sous la surface consciente, est partagé par tous les Hommes et les relie dans la mesure où ce « subconscient » est influencé par celui des autres. D’après Yuko Nakaya, cette partie subconsciente est reliée à l’univers et entre en résonance avec lui. De la même manière que l’Homme a depuis toujours cru évident que la lunaison influençait le flux et le reflux de la mer, l’être humain est, lui aussi, influencé par la nature qui l’entoure. Il est constitué de la même proportion d’eau que celle qu’il y a sur Terre. Le corps humain fait partie intégrante de cette Terre car il partage avec elle les mêmes atomes. Dans le corps d’une mère, existe un autre univers qui lui aussi est influencé par les cycles lunaires. Nous tous avons la même expérience subconsciente d’avoir jadis vécu un temps dans cet univers maternel avant notre naissance. Nous l’avons oubliée, ce souvenir du moment passé au sein de l’univers maternel qui pourtant a bercé chacun d’entre nous. Si ce souvenir venait à resurgir et réveiller un sentiment de bien-être, à quel point l’être humain peut-il devenir bienveillant ? L’univers intracorporel lui fait penser, telle la lumière, à une imagerie blanche. Aucune illustration, aucune peinture ne devrait être un mur, un obstacle, mais plutôt servir de fenêtres. Ces fenêtres sont telles des portes d’entrée qui aspirent nos émotions. Elles se prolongent au loin faisant le pont entre le ici et le par-delà. Ce ne sont pas des fenêtres au travers desquels de l’intérieur on observe un paysage, non, elles sont la porte d’entrée de nos sentiments. L’artiste voudrait dépeindre la lumière. Elle ne parle pas d’une lumière extérieure qui nous illuminerait, mais de la lumière qui réside en notre for intérieur, notre âme qui nous fait briller de mille feux. C’est une lumière emplie de chaleur. Des œuvres à découvrir à la galerie Arielle D’Hauterives du 2 au 29 septembre 2020. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.arielledhauterives.be Quai des Péniches, 69 à 1000 Bruxelles

UN REQUIEM INSPIRÉ PAR LE COVID-19 ! Être créatif durant une période où il y a peu de perspectives et encore moins de certitudes, voilà un vrai défi ! Mais celui-ci n’est ni insurmontable ni redoutable si la volonté reste intacte. La création est en effet le cœur même de l’activité de l’Opéra royal de La Monnaie en tant qu’opérateur culturel. Là, chacun considère comme essentiel de poursuivre sa mission en faisant de l’art, même au beau milieu de la plus grave pandémie de ces dernières décennies. Si l’équipe a pu faire plaisir à plus de 150.000 spectateurs grâce à trois festivals en streaming proposant non moins de vingt productions différentes, il sera temps, dès l’automne, de revenir à la création proprement dite. Il ne s’agit pas d’une adaptation ni d’une production de remplacement avec une distribution restreinte, mais bien d’une commande originale qui s’inspirera directement de thèmes actuels comme la solitude, la mort et les adieux. Lorsqu’il faut vivre le deuil sans étreinte et lorsqu’on ne peut se consoler l’un l’autre que de manière virtuelle, la douleur n’en est que plus vive. On le voit : l’isolement laisse des séquelles ! C’est en particulier le cas chez les jeunes, qui sont en quelque sorte les plus durement touchés par cette crise. Ils ont beau ne pas faire partie du groupe à risque, ce sont eux qui voient leur avenir hypothéqué (qui sait dans quelle mesure ?) et qui subiront le plus longtemps l’impact de cette épidémie. Mais toutes les générations mènent actuellement une lutte presqu’irréelle avec la peur de la maladie et avec un besoin de recommencer quelque chose sans savoir précisément quoi. Dans un tel contexte, la Monnaie est fière de mettre au point, en quelques mois à peine, la création de Is this the end ? Scénario, livret et partition sont actuellement en cours d’élaboration. Si personne aujourd’hui ne peut détailler la forme qu’aura cette œuvre ni la manière dont elle sera présentée, car tout est encore en chantier. Il est cependant déjà clair qu’il s’agira de la première partie d’une trilogie qui se déploiera sur plusieurs saisons.


RENCONTRE : JORDI CLIMENT Né à Barcelone, (ville métropolitaine avec un courant artistique « à cent à l’heure) et issu d’une famille d’artistes, impossible de ne pas avoir une envie créatrice. Il étudie le dessin avec le peintre T. Bermejo à Barcelone. Dès son arrivée en Belgique et pour rester en contact avec le monde de l’art, il s’inscrit à l’École des Beaux-Arts de Wavre, où il suit les cours de.Serge Goyens de Heusch, Claude Stas et Caroline Bricmont (histoire de l’Art), Dominique Fournal (peinture) et Monique Dohy (gravure). Gaudi. Jordi nous dit : Pour comprendre ma peinture et ma passion pour l’architecture de Gaudi, il faut que je parle de mes arrière-grands-parents. En 1905 mon arrière-grand-père, qui possédait un atelier de forge artistique à deux rues de la Sagrada Familia, réalisa des barrières et diverses forges avec des formes mystérieuses : têtes de dragons, feuillages etc. pour le célèbre architecte. Son épouse, Rosa Mas Ferrer, mon arrière-grand-mère qui était d’une beauté surprenante, avait servi comme modèle à monsieur Gaudi, qui l’avait dessinée pour faire les anges de la Façade de la Nativité. Ensuite, en 1939, mon grand-père continua avec l’atelier et j’allais avec lui sur les chantiers de la Sagrada Familia, Cette petite anecdote qui m’accompagne depuis l’enfance est de manifester que quelques-unes de mes peintures s’inspirent de formes géométriques et végétales du grand Gaudi. Expos J’ai participé à différentes manifestations culturelles, dont celles-ci : 1999/2003 Belgique - Louvain la Neuve : Expositions années « Correspondances 98/99/2000 » - Wavre : Biennal Peintres Région Brabant Wallon. - Exposition au Château de l’Ermitage. - Bruxelles : Exposition personnelle à La Tentation /99 - Expositions de peintures et sculptures à l’Hôtel Radisson SAS - Hôtel Hilton Brussels - Galerie Lorelei/Sablon - Galerie Granero/Sablon de 2003 à 2005. Rixensart : Exposition 19ème Cabaret Culturel de Rixensart. Antwerpen : Exposition salons Van Marcke - Galerie Verrebeck - Hôtel Crow Plaza. 1999, Canada – Ottawa - Centre Culturel Espagnol. - peintures sur l’ouvre d’Antonio Gaudí. 2001, Canada – Toronto - Samuel J. Zacks Art Gallery York University Exposition collective avec le photographe Eliseu Oriol sur l’ouvre d’Antonio Gaudí. 2002, États-Unis Washington - peintures de Jordi Climent et conférence par Eliseu Oriol sur l’oeuvre d’Antonio Gaudí Ambassade d’Espagne et Université d’Architecture. Cuba - La Habana - peintures de Jordi Climent et conférence par Eliseu Oriol sur l’œuvre d’Antonio Gaudí, Casal Catalá de La Habana. 2008 France Pavillon de l'Architecture de Pau et à la Mairie de Tarbes-France. Cycle d’Antoni Gaudí et l’Art Nouveau à la Modernité. 2009 Spain Barcelona - Ateneu Barcelones, diner-débat sur l'œuvre de Gaudí par Eliseu Oriol et l’artiste plasticien Jordi Climent. Après 2010, j’ai participé à plusieurs expositions collectives. Pour en savoir plus sur ce créateur aux multiples casquettes et à l’imaginaire sans limites, visiter le site de l’artiste www.jordicliment.com et/ou prenez rendezvous pour le rencontrer dans son atelier bruxellois. Silvana Minchella


EXPOSITION : MAPPA MUNDI La représentation du monde est aujourd’hui comme hier une nécessité pratique et scientifique afin d’appréhender notre géographie, proche ou lointaine, et une source de rêverie invitant aux voyages et au merveilleux. Les premiers explorateurs découvraient des mondes inconnus et en permettaient ainsi la traduction imagée. La cartographie reste toujours à compléter, à préciser selon les informations rassemblées mais aussi en fonction du sens que l’on veut lui donner. La carte en effet représente le réel mais l’interprète en créant une image à partir de données multiples plus ou moins fiables. La représentation du monde évolue sans cesse. Les technologies actuelles la rendent extrêmement précise, nous faisant voir le monde autrement. Il n’en reste pas moins que cette mise à plat est un artifice et que dès leur naissance les cartes témoignent pour ce faire d’un souci artistique qui s’ajoute à leur fonction de repérage. Les artistes contemporains se montrent eux-aussi captivés par la carte du monde qu’ils sont nombreux à réinventer et à transformer. Ils en éprouvent tous les potentiels, non seulement géographiques mais aussi politiques, poétiques ou utopiques. La carte est à la fois une forme plus ou moins obligée à partir de laquelle toutes sortes de dérives graphiques sont possibles, mais aussi le prétexte à une réflexion sur l’état du monde, ou encore le lieu de projections imaginaires. Elle est illusion et réalité tout à fois. Elle réinterprète une vérité et la transforme. C’est sans doute ce qui explique que tant d’artistes l’aient privilégiée en mettant ainsi, chacun à leur manière, le monde à plat. Complétée par une sélection de cartes anciennes ou de références littéraires, l’exposition rassemble une trentaine d’artistes contemporains issus du monde entier. Elle témoigne de l’intérêt récent des artistes pour un Mapping revu selon leurs propres recherches esthétiques. Certains ont développé de nombreuses œuvres sur cette thématique, comme Marcel Broodthaers ou Mona Hatoum, là où d’autres ont rencontré ponctuellement la carte du monde au fil de leurs recherches quitte à en réaliser des ensembles conséquents. Tel sera le cas d’Alighiero Boetti, avec ses Mappa ou de Wim Delvoye qui réalise pour l’exposition une installation inédite. Ce ne sont là que quelques-unes des figures célèbres ou moins connues que l’exposition rassemble autour d’une thématique riche de significations, la carte étant pour les artistes prétexte à toutes sortes de commentaires sur la société contemporaine, les rapports de pouvoir, l’écologie, les conflits, etc. Un événement à voir jusqu’au 4 octobre 2020 à la Villa Empain. Plus de détails sur le site www.villaempain.com Avenue Franklin Roosevelt, 67 à 1050 Bruxelles

EXPOSITION : JUANJO GUARNIDO Connu pour sa remarquable série Blacksad, Juanjo Guarnido est un auteur dont le talent a vite traversé les frontières. Né en Espagne en 1967, il est depuis toujours féru de dessin. Après des études aux BeauxArts de Grenade et de nombreuses collaborations dans les fanzines, il travaille pour des séries télé à Madrid puis rejoint l’équipe des studios Walt Disney de Montreuil. Avec Juan Diaz Canales comme scénariste, il crée son premier album « Quelque part entre les ombres » (Dargaud, 2000) et entraîne le lecteur au cœur de l’Amérique des années 50 et des enquêtes du détective privé John Blacksad. Cette série animalière compte à ce jour cinq volumes traduits en plusieurs langues et de nombreux aficionados. Guarnido excelle dans ses dessins à l’aquarelle et la création d’ambiances. Que ce soit dans la noirceur de ruelles sombres ou sous la lumière éclatante de la Nouvelle-Orléans, le pinceau du maestro fait merveille. Il dessine également Sorcelleries (Dargaud), les aventures d’une fée au pays de sorcières écrites par Teresa Valero. Avec Alain Ayroles au scénario, il se consacre à un nouvel album, Les Indes Fourbes (Delcourt), qui fait revivre le Siècle d’Or espagnol et le Nouveau monde. Des premiers crayonnés aux planches finales, l’exposition permettra de découvrir l’univers fascinant d’un auteur contemporain majeur ! Une exposition à voir jusqu’au 8 novembre 2020 au Centre belge de la bande dessinée. Plus de détails sur le site www.cbbd.be Rue des sables, 20 à 1000 Bruxelles


EXPOSITION : BRUEGEL, A POETIC EXPERIENCE À l’occasion de l’année célébrant le 450e anniversaire de la mort de Pieter Bruegel l’Ancien, l’Atomium propose à partir du 18 septembre 2019 une exposition immersive et interactive sur le célèbre peintre de la renaissance. L’exposition Bruegel, A Poetic Expérience présente des facettes connues mais aussi insoupçonnées de son œuvre et de sa personnalité. Cette exposition, réalisée par Tempora, s’inscrit dans la série consacrée à la belgitude organisée par l’Atomium depuis sa réouverture en 2006. Symbole de Bruxelles et de la Belgique, l’Atomium, qui attire deux millions de curieux et 600 000 visiteurs par an, a déjà organisé avec succès des expositions sur la Sabena et sur le peintre surréaliste belge René Magritte. L’exposition présente sur deux étages des installations immersives et interactives qui plongent les visiteurs au cœur du monde de Bruegel grâce à de grandes reproductions de ses œuvres. Au niveau inférieur, une installation pop-up met en scène cinq tableaux de la célèbre série Les six saisons dans une scénographie tridimensionnelle qui donne aux visiteurs l’impression de se promener dans les célèbres paysages. Des panneaux explicatifs invitent le public à découvrir quatre facettes innovantes de l’œuvre de Bruegel. L’on apprend ainsi que le peintre a bousculé les habitudes au niveau de la composition et du rythme, notamment à l’aide d’une vue plongeante et de la division de ses tableaux en plans successifs, ce qui crée une fascinante profondeur de champs. L’installation montre aussi que Bruegel se distinguait par une prodigieuse attention aux détails et par un jeu d’images humoriste.

À l’étage supérieur, l’exposition s’attarde à éclairer la personnalité de Bruegel. Si peu de détails de sa biographie nous sont connus, ses œuvres recèlent des indices précieux sur l’homme et le peintre. À commencer par sa renommée comme peintre de la vie paysanne, le plus souvent associée à son fameux tableau Le repas de noces. Chez ses contemporains, Bruegel était en outre réputé comme le second Jérôme Bosch. Mais cette exposition prend soin de montrer comment il a su se démarquer de son modèle, par exemple en intégrant dans sa Chute des anges rebelles des animaux du Nouveau Monde récemment découvert et inconnus de Bosch, qui était mort un demi-siècle auparavant. Une troisième caractéristique de Bruegel, souvent oubliée, est son humanisme reconnaissable dans les sujets de ses tableaux. L’exposition dévoile enfin un aspect plutôt surprenant de la personnalité de Bruegel : avant d’être un peintre célèbre, il était principalement connu comme dessinateur de gravures. L’invention récente de l’imprimerie avait en effet facilité la diffusion de ses créations dans toute l’Europe. L’exposition Bruegel, A Poetic Experience. An innovative world and mind est présentée jusqu’en septembre 2020 et est comprise dans la visite de l’Atomium, tout comme le parcours retraçant l’histoire du monument. Suite à la crise du Covid-19, cette exposition est prolongée jusqu’au 15 novembre 2020. Voyez les renseignements pratiques sur le site www.atomium.be Place de l’Atomium, 1 à 1020 Bruxelles


COURRIER ENVOYÉ AUX RESPONSABLES POLITIQUES PAR LA DIRECTION DU THÉÂTRE DE PUBLIC Madame la Première Ministre, Mesdames et Messieurs Ministres Présidents et Ministres ayant dans vos compétences le secteur culturel, Mesdames et Messieurs les Présidentes et Présidents des Partis francophones, Mesdames et Messieurs Membres de la Commission Culture, Mesdames et Messieurs les Députés de la Fédération Wallonie Bruxelles, Si elles sont maintenues, les dernières mesures sanitaires (le CNS du 27 juillet) nous obligeront, pour ne pas déposer notre bilan, de mettre en place un plan catastrophe : la mise au chômage économique de centaines de personnes. Les artistes, les techniciens et l'équipe encadrante de notre théâtre vont payer le prix fort. C’est à eux que nous pensons et pour eux que nous nous battons. Au Théâtre Le Public, les mesures sanitaires actuelles nous feront perdre, sur la saison à venir, une recette billetterie de 1.000.000 d’euros sur les 1.400.000 euros prévus. Soit 100.000 euros par mois de septembre 2020 à juin 2021. Pour supporter cette perte, nous allons devoir mettre au chômage économique et/ou temporaire 80% de notre équipe fixe et 80% des artistes et techniciens prévus. Près de 300 personnes sont concernées. Cependant, nous avons fait un calcul et nous le partageons avec vous. Nous avons estimé assez précisément ce que ces mesures allaient coûter à l’état : Coût du chômage 671.250 euros ; charges patronales non perçues 510.665 euros ; cotisations sociales non perçues 307.445 euros. Soit un coût total sur la saison à venir de 1.489.360 d’euros (148.000 euros par mois) pour l’État, et donc pour les citoyens qui le financent (voir schémas ci-dessous) En ce qui nous concerne, compenser cette perte pour maintenir tous les emplois et maintenir toutes nos missions, malgré les contraintes sanitaires, ferait donc faire à l’État une économie de 479.000 euros. (47.000 euros par mois ) Et ceci sans compter tous les effets indirects positifs Nous souhaitons vous rencontrer pour vous détailler les paramètres de la mise en place de cette solution et de cette réalité économique. Sans aucunement hypothéquer l’avenir, soutenir cette démarche et maintenir la totalité des emplois et la totalité de nos missions sera bien moins couteux pour l’état, et donc pour les citoyens, que de devoir prendre les mesures qui s’imposent sans cette aide. L'ensemble des théâtres subventionnés de la FWB réalisent en moyenne 7.000.000 d’euros de billetterie par saison. Compte tenu des contraintes sanitaires actuelles, 4.500.000 d’euros d’aides permettraient à tous les théâtres de réaliser leurs saisons prévues, sans devoir mettre au chômage qui que ce soit. Cette démarche, ce choix intelligent, générerait une économie pour l'État et donc pour les citoyens de plus ou moins 3.400.000 euros. (450.000 euros par mois tant que les mesures sanitaires restent identiques) Nous sommes parfaitement conscients que, d’un côté, il s’agit de demander une aide à la FWB dont nous dépendons, et de l’autre c’est générer une économie au Fédéral. Mais parfois ne faut-il pas, pour sauver les personnes les plus fragiles et faire des économies, faire preuve de bon sens et aller au-delà de ces logiques ? Par ailleurs, la FWB a annoncé avoir encore 2.700.000 euros de fonds non distribués. Nous souhaitons savoir si vous pourriez soutenir cette démarche. Pour la mener à bien, en ce qui nous concerne, nous avons besoin de votre réponse pour le 21 aout au plus tard.


À titre d’exemple, depuis l’annonce de CNS du 27 juillet et uniquement sur deux spectacles prévus en septembre et déjà annulés (« Festen » et « Les chevaliers de la Table ronde ») plus de 60 personnes ont perdu leur emploi. Seuls l’aide financière mensuelle qui vous est demandée ici (soit en ce qui nous concerne 100.000 euros par mois), ou un retour aux mesures sanitaires d’avant le 27 juillet 2020 nous permettraient de ne pas devoir mettre au chômage 80 % de tous ceux qui comptent économiquement sur nous. Nous sommes conscients que sauver quelques villages ne sauvera pas le monde, que nous aider ne sauvera pas tout le secteur culturel ni l’événementiel non subventionné. Mais nous pensons qu’il vaut mieux sauver ce qui est possible quand c’est possible. Aidez-nous à limiter ce carnage humain, social et économique ! Merci pour votre attention, En restant à votre entière disposition Bien cordialement, Patricia Ide et Michel Kacenelenbogen

Chères spectatrices et chers spectateurs du Théâtre Le Public, Ces quelques lignes pour reprendre contact en cette fin d’été et faire le point sur la situation du Théâtre Le Public. Grâce au soutien d’un très grand nombre d’entre vous, vos nombreux messages d’encouragement, vous nous avez permis de maintenir le lien et de garder confiance. Merci ! Vous nous avez communiqué que les arts vivants avaient une place de choix dans votre vie sociale. Que le théâtre est un rendez-vous qui vous tient à cœur. Vous dire aussi que nous ne savons pas encore avec quelle programmation nous allons pouvoir démarrer la saison. Nous savons par contre que, si elles sont maintenues, les dernières mesures sanitaires du 27 juillet 2020 ne nous permettront pas de vous présenter la saison prévue. Mais nous pensons que des solutions existent pour maintenir tous les spectacles prévus. Vous avez trouvé ci-dessus le courrier que nous avons fait parvenir aux responsables politiques. Nous espérons être entendus. Nous vous informerons très rapidement de la suite des évènements. Au plaisir de se revoir au théâtre, Bien amicalement, Patricia Ide et Michel Kacenelenbogen


EXPOSITION : BACK TO BRUEGHEL La mythique Porte de Hal, vestige de l'enceinte médiévale de Bruxelles, s'ouvre sur l'univers du peintre Bruegel. Effectuez un plongeon surprenant dans une version en réalité virtuelle de ses peintures mondialement connues. Quatre œuvres du maître prennent vie et vous entraînent, pour un instant, dans la vie quotidienne d’il y a 450 ans. Voyagez au cœur du XVIe siècle, face à d’authentiques trésors du Nouveau Monde, des armes et armures, des instruments de musique et d’autres œuvres des Musées royaux d’Art et d’Histoire. Complétez votre découverte par le toucher, l’odorat ou la manipulation. Au sommet du bâtiment, profitez aussi du magnifique panorama sur Bruxelles et laissez-vous transporter dans le temps de Bruegel grâce aux longues-vues virtuelles. Un audioguide gratuit est disponible en six langues : français, néerlandais, anglais, allemand, espagnol, russe (possibilité de télécharger le texte des audioguides via Google Play - tapez Orpheo Porte de Hal ou Orpheo Hallepoort & App Store - tapez Porte de Hal ou Hallepoort). Une exposition à découvrir jusqu’au 18 octobre 2020 à la Porte de Hal. Plus de détails sur www.kmkg-mrah.be Boulevard du Midi, 150 à 1050 Bruxelles

EXPOSITION : EXPERIENCE BRUSSELS Explorez les quatre coins de de la Région bruxelloise et imprégnez-vous de son charme unique. « Experience.Brussels » est une exposition interactive à travers laquelle locaux comme visiteurs auront l’opportunité d’en découvrir davantage à propos de leur capitale. C’est au cœur de Bruxelles, sur la Place Royale, que se trouve l’exposition « Experience.Brussels », le point de départ pour découvrir ou redécouvrir ce que la capitale peut nous offrir. Cette exposition changera votre vision de Bruxelles et mettra en valeur différents endroits, institutions, ainsi que la population travaillant au cœur de l’Europe. Quel est le symbole phare de Bruxelles ? Un atome géant ? Un petit garçon faisant pipi ? Une grande place dorée ? Un temps pluvieux ? Un cornet de frites ? « Experience Brussels » vous permet d’élargir votre vision. L’exposition vous aide à comprendre et interpréter Bruxelles de la meilleure des manières. Interagissez avec les transports publics bruxellois et élargissez vos connaissances sur cette capitale et ses habitants. Parcourez les quatre coins de Bruxelles, ses dix-neuf communes et découvrez un nombre incalculable de personnalités au sein de cette métropole. Tournez les pages d’un livre géant pour découvrir les moments-clés de l’histoire bruxelloise ; testez vos connaissances sur l’Union Européenne ; rencontrez de vrais Bruxellois ; apprenez de nouveaux mots de la langue locale ; interagissez avec notre maquette. Que vous soyez Bruxellois ou étranger, vous apprendrez à coup sûr de nouvelles choses sur cette capitale. Et avant de partir, n’oubliez pas votre carte postale personnalisée ! Que vous soyez en ville pour quelques jours ou Bruxellois de naissance, vous découvrirez le charme de quartiers insolites et/ou touristiques et vivrez réellement l’ambiance bruxelloise. Un événement à découvrir jusque fin décembre 2020 et qui met en avant différents quartiers de la capitale, pouvant être appréciés entre amis, en famille, en groupe ou en solo ! Davantage de détails sur le site ww.experience.brussel.com Rue Royale, 2-4 à 1000 Bruxelles


DES NOUVELLES DU THÉÂTRE ROYAL DU PARC Certains d'entre vous l'ont déjà certainement vu sur les réseaux… Nous ne pourrons malheureusement pas jouer « Les chevaliers de la table ronde » en septembre-octobre 2020. Les nouvelles ne sont pas bonnes et les récentes mesures imposées ne nous permettent plus de jouer cette pièce. Nous sommes donc obligés de la reporter à la rentrée 2021. Nous sommes toutes et tous conscients du côté insupportable de ces différents changements. Désormais nous devrons nous habituer à nous adapter sans cesse… Nous avions donc deux options : garder le théâtre fermé en attendant des jours meilleurs ou proposer un spectacle plus « léger » qui puisse se jouer devant cent spectateurs, dans le respect de toutes les consignes de sécurité. Il était important pour nous de permettre au public de retrouver le chemin du théâtre. Le confinement nous a permis au moins de nous rendre compte à quel point nous avons besoin de relations et humaines et d’arts vivants. Nous vous proposerons donc la pièce : « To play or not to play » une comédie de Thierry Debroux qui raconte le confinement d’un directeur dans son théâtre à l’italienne. Mais la question essentielle demeure : pourront-ils jouer ou non ? C’est une question que nous nous posons toujours bien évidemment. Il est prévu pour l’instant de pouvoir accueillir maximum cent spectateurs par représentation. Dans notre vaste et beau théâtre, les spectateurs seront très à l’aise et les distances bien respectées. Le spectacle ne dépassera pas une heure. Le port du masque sera donc très supportable. Il y aura deux comédiens sur scène pour relever ce défi, deux professionnels au sommet de leur art. Othmane Moumen a immédiatement accepté de se lancer dans l’aventure. Le second nom vous sera dévoilé sous peu. Pour l’organisation nous vous demandons de nous faire confiance et de nous laisser un peu de temps. Nous faisons notre maximum pour vous satisfaire au mieux… mais nous sommes nous-même devant des interrogations, que nous essayons de gérer le mieux possible ! Prenez soin de vous et à tout bientôt ! Merci pour votre patience et soyez assuré que nous mettons tout en œuvre pour vous proposer qualité et sécurité ! L’équipe du Théâtre Royal du Parc

RENTRÉE ÉGALEMENT BOULEVERSÉE AU THÉÂTRE ROYAL DES GALERIES ! Chers Spectateurs, Au vu de la situation actuelle et des mesures prises par le conseil national de sécurité, nous n’avons pas d’autres choix, pour la sécurité de tous, que de reporter le premier spectacle, prévu en septembre, au mois de mai 2021. Ce spectacle (‘Un petit jeu sans conséquence’) deviendra le dernier de la saison et sera donc toujours compris dans l’abonnement 2020/2021. De cette façon, nous espérons assurer l’entièreté des spectacles de la saison. Nous le voulons pour vous, notre fidèle public (comme ils font chaud au cœur tous vos messages de sympathie) mais aussi afin d’assurer tous nos engagements artistiques. Nous avons vraiment hâte de vous retrouver mais il faut faire preuve de bon sens. Si ces retrouvailles sont postposées, nous sommes persuadés qu’elles n’en seront que meilleures. Rendez-vous le 21 octobre, pour ouvrir notre saison avec « Misery » de Stephen King. Portez-vous bien. À très vite. David Michels et toute l’équipe du Théâtre royal des Galeries


EXPOSITION : PHILIPPE VANDENBERG – MOLENBEEK L’exposition Molenbeek revient sur les années que l’artiste Philippe Vandenberg a passées à Bruxelles. Jusqu’à son décès en 2009, Vandenberg a travaillé à Molenbeek, où il a été ému par la réalité sociale de la commune. Dans cette exposition, le commissaire Barry Rosen explore la production artistique engagée de Vandenberg de cette période, avec plus de 300 œuvres sur papier. À travers notamment des dessins, des gravures et des sculptures en papier, il vous fait découvrir le Molenbeek de l’artiste : un site imaginaire où sa vie privée se confond avec les problématiques des grandes villes, les conflits mondiaux et l’histoire. Molenbeek est la première grande exposition belge autour de l’œuvre radicale de Philippe Vandenberg depuis son décès. Un événement à découvrir à Bozar du 17 septembre 2020 au 3 janvier 2021. Plus de détails sur le site www.bozar.be Rue Ravenstein 23, à 1000 Bruxelles

EXPOSITION : DANSER BRUT Danser Brut éclaire le lien entre danse et mouvements involontaires ou répétitifs. L’expo étudie les formes d’expression du corps, du visage ou des mains, comprises comme une forme d’accès à notre être-au-monde. Mélange d’art brut, d’art moderne et contemporain, de documents d’archives médicales ou d’extraits de films, l’exposition défie toute catégorisation. Se refusant à raconter une histoire de la danse, elle vise à élargir notre vision et à mettre la modernité sous un jour différent. Avec des œuvres d'Ulrich Bleiker, Michael Borremans, Charlie Chaplin, Aloïse Corbaz, Henri de Toulouse-Lautrec, Michel François, Valeska Gert, Rebecca Horn, Henri Michaux, Vaslav Nijinsky, Arnulf Rainer, Philippe Vandenberg, Mary Wigman, Adolf Wölfli, ainsi qu'une sélection de documents d'archives, manuscrits, magazines et fragments de films. Une exposition à voir à Bozar du 24 septembre 2020 au 10 janvier 2021. Plus de détails sur le site www.bozar.be Rue Ravenstein 23, à 1000 Bruxelles


CRÉATION DU NOUVEAU CONCERTO POUR ORGUE DU COMPOSITEUR PHILIPP MAINTZ PAR L’OPRL Le compositeur allemand Philipp Maintz a présenté ses œuvres dans les plus grands festivals européens. À l’occasion du festival d’orgue de BOZAR, il lui fait l’honneur d’un nouveau Concerto pour orgue spécialement dédié au grand orgue du Palais des Beaux-Arts. Organiste hongrois de renommée mondiale, László Fassang se chargera de révéler les nombreuses couleurs et nuances de cet instrument monumental dans un mariage subtil avec la sonorité généreuse de l’Orchestre Philharmonique Royal de Liège. Son compatriote Gergely Madaras mettra ensuite en valeur tous les solistes de la formation belge dans le feu d’artifice de virtuosité et d’énergie qu’est le Concerto pour orchestre de Béla Bartók. Un événement qui aura lieu à la Salle Henry Le Bœuf (Bozar) le jeudi 17 septembre 2020 à 20 heures. Plus de détails sur le site www.bozar.be Rue Ravenstein 23, à 1000 Bruxelles

CONCERT : TRULS MØRK & SCHUMANN On appelle parfois le compositeur suisse Richard Dubugnon – une étoile montante au firmament de la musique classique contemporaine – le « fils de Ravel et Prokofiev ». Les influences françaises et russes se mêlent dans son style lyrique et ses orchestrations hautes en couleurs. La Deuxième Symphonie de chambre de Dubugnon sera présentée pour la première fois en Belgique. L'effectif symphonique revêt également une dimension intime dans le Concerto pour violoncelle de Schumann, une œuvre d’une virtuosité magistrale aux sonorités lyriques chaleureuses. Schumann avait développé une affinité particulière pour le violoncelle et se mit à jouer lui-même de cet instrument après avoir dû renoncer au piano, à la suite d’une blessure à la main droite. La Symphonie « Roulement de timbale » de Haydn, la toute dernière de ses douze Symphonies londoniennes, se devait de figurer au programme de cette saison placée sous le signe du « Rythme ! ». Une performance à applaudir à Bozar le 25 septembre 2020 à 2à heures. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.bozar.be Rue Ravenstein 23, à 1000 Bruxelles


SPECTACLE : LENNON-THE LAST DAY Malgré les temps qui courent, le TTO veut continuer à exister et à vous apporter du divertissement. Pour ça, il arrive avec non pas une, mais bien deux bonnes nouvelles : La première : si vous avez des pass 20-21, vous pouvez enfin choisir en ligne les spectacles que vous souhaitez voir cette saison. La seconde : le TTO ouvre à nouveau ses portes et la saison démarre sur les chapeaux de roues avec Marc Ysaye. Une conférence-spectacle qui tombe à pic pour les quarante ans du décès de John Lennon. Marc Ysaye nous raconte le dernier jour de ce monstre du Rock'n'Roll. Petit rappel : Le 8 décembre 1980 à 22h50, cinq coups de feu résonnent dans l’entrée du Dakota Building à New York. Une figure mythique du rock s’écroule : John Lennon vient d’être assassiné ! L’annonce fait l’effet d’une bombe. Mais qui était cette légende ? Comment comprendre son ascension fulgurante au rang d’icône mondiale, en pleine période « peace and love », de son enfance difficile jusqu’à cette soirée tragique qui scella son destin ? Marc Ysaye, le créateur de Classic 21, est de retour. Il nous plonge dans l’une des plus incroyables odyssées de l’histoire contemporaine. Des Quarrymen aux Beatles en passant par sa rencontre avec Yoko Ono, découvrez le parcours hors-normes de John Lennon dans une conférence interactive et passionnante qui vous racontera heure par heure sa toute dernière journée. Un spectacle à (re)voir du 12 septembre au 3 octobre 2020. Plus de détails sur le site www.ttotheatre.com Galeries de la Toison d'Or, 396-398 à 1050 Bruxelles

RÉOUVERTURE DE LA PORTE DE HAL Après plusieurs mois de fermeture due à la crise du Covid-19, la Porte de Hal rouvrira enfin ses portes au public le 1er septembre. Dès cette date, les visiteurs pourront à nouveau venir découvrir le magnifique bâtiment de la Porte de Hal. En toute sécurité bien sûr, avec un parcours spécial qui les emmènera dans les collections permanentes et l’exposition temporaire ‘Back to Bruegel’, en parcourant toute la Porte jusqu’à l’incroyable panorama sur Bruxelles depuis le chemin de ronde, en passant par des escaliers médiévaux habituellement inaccessibles pour le public. Passage secret Pour réaliser un parcours respectant la distanciation sociale et permettant de visiter l’intégralité de la Porte de Hal et de l’exposition, les visiteurs devront emprunter un passage inédit par les escaliers médiévaux d’origine. Ces escaliers ont été cachés au public depuis les grandes transformations de la Porte de Hal réalisées au XIXe siècle par l’architecte Henry Beyaert et la création du magnifique escalier de style néo-gothique qui relie tous les étages du bâtiment.La réouverture du Musée de la Porte de Hal et son nouveau parcours offre aux visiteurs la chance de (re)découvrir de manière passionnante l’histoire médiévale de la ville de Bruxelles et le XVIe siècle du peintre Peter Bruegel en tout sécurité. Le port du masque est obligatoire. Vous trouverez toutes les informations pratiques sur le site internet http://www.kmkgmrah.be/fr Boulevard du Midi, 150 à 1060 Bruxelles


EXPOSITION : XAVIER THOMÉ & HENK VISCH

NOIRET-

Xavier Noiret-Thomé, artiste français basé à Bruxelles, offre des peintures et assemblages d’une rare diversité qui se nourrissent de savoir, d’expérience et d’influences assumées. Il a choisi d’inviter le sculpteur, dessinateur et peintre hollandais Henk Visch, dont les sculptures tantôt monumentales, tantôt miniatures, s’apparentent selon lui à la pensée humaine. Leurs œuvres, intenses et directes, parfois teintées d’humour, dépeignent le réel et tentent de cerner le processus de création et son impact sur la vie. Pour cette exposition, les deux artistes ont conçu un parcours qui se décline en cinq chapitres, de la pensée à la métaphysique. Ce cheminement permet la découverte de leurs œuvres respectives, prenant le contre-pied de la présentation classique de la peinture et de la sculpture, tout en permettant une lecture du processus de création artistique et de la réflexion qu’il suscite. Un événement à voir à la Centrale Electrique du 3 septembre 2020 au 17 janvier 2021. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.centrale.brussels Place Sainte-Catherine 44 à1000 Bruxelles

EXPOSITION : MAX KESTELOOT Depuis plus de dix ans, Max Kesteloot, qui vit et travaille à Ostende, capture ses observations sur photo. Au cours de promenades ou de voyages, il se concentre principalement sur son contexte urbain environnant, constitué d’éléments architecturaux souvent banals. Ses images sont dépourvues de personnes et ne se réfèrent qu’indirectement à une présence ou une action potentielle. Le travail de Kesteloot semble porter sur la façon dont nous absorbons notre environnement, et comment cela se traduit par des impressions fragmentées et des souvenirs associés. Avec la présente exposition, les visiteurs peuvent entendre une voix constante qui se réfère à des lieux qui ont été photographiés par l’artiste, puis utilisés comme source pour réaliser des œuvres visuelles. Pour les spectateurs, il est impossible de savoir quel texte appartient à quelle image, mais c’est exactement ce qui rend intéressant l’exploration de l’œuvre. Un événement à voir à la Centrale Electrique du 3 septembre au 8 novembre 2020.Voyez tous les détails pratiques sur le site www.centrale.brussels Place Sainte-Catherine 44 à 1000 Bruxelles


EXPOSITION : GAUTHIER HUBERT Il s’agit d’une exposition non pas rétrospective mais plutôt « introspective », selon les termes de l’artiste. Par un voyage à travers le temps, rassemblant une sélection de peintures à la fois récentes et remontant jusqu’à une quinzaine d’années, Gauthier Hubert présente les rapports qu’entretiennent certaines œuvres entre elles. Telle une généalogie, au sein même de sa démarche, il regroupe certains travaux qui, a priori, n’ont rien à voir entre eux mais qui, cependant, n’existeraient pas sans la réalisation qu’ils entretiennent les uns avec les autres. Gauthier Hubert est un artiste belge qui vit et travaille à Bruxelles. Lauréat, en 1999, du Prix de la Jeune Peinture Belge, il expose depuis lors, de façon collective ou en solo, principalement au RoyaumeUni, en Islande et en Belgique. A la rentrée 2020, il présente, au Botanique, deux projets d’expositions distincts : « réunions familiales » (un goût de liberté), une analyse à rebours de ses vingt dernières années de peinture mettant l’accent sur sa méthode de travail et « ...fils de... » (Les retrouvailles), un tout autre accrochage, un tout autre propos pour une galerie de portraits. On connait l’importance du choix des titres chez cet artiste qui commence ses peintures en les nommant, en les écrivant, en les pensant et qui les retient sur une liste d’attente bien avant de les réaliser. Cette attente construit une relation entre beauté, laideur, politique, mensonge et humour qui deviennent les alibis des images et des mots manipulés par Gauthier Hubert. Des peintures qui, à l’origine, n’entretenaient aucun lien entre elles, retrouveront leurs sources premières par leur mise en relation. Une exposition à voir au Botanique du 3 au 27 septembre 2020. Plus de détails sur le site www.botanique.be Rue Royale, 236 à 1120 Bruxelles

MUSÉE BRUXELLOIS DE LA GUEUZE Comment le lambic et ses dérivés sont-ils fabriqués ? N’ayez pas peur, poussez donc la porte du Musée de la Gueuze. Il est question d’une machine à remonter le temps. Vous quittez la civilisation moderne, adieu le bruit, adieu le monde. "Mais où sommes-nous", vous direz-vous ? Tout simplement dans une brasserie familiale où l’on brasse le Lambic et où rien n’a changé depuis 1900, année de création de la Brasserie Cantillon ! La famille Van Roy-Cantillon vous accueille et vous invite à découvrir un patrimoine fabuleux. Bières, outils, machines et procédé de fabrication sont d’époque. A coup sûr, vous profiterez de la dégustation d’une authentique Gueuze-Lambic de tradition, et si vous voulez en savoir un peu plus sur les autres Kriek et Framboise, interpellez donc le MaîtreBrasseur car c’est un sujet qu’il adore. Le musée est accessible uniquement sur rendez-vous les vendredis pour une visite libre + dégustation (7 euros/pers.) et les samedis pour une visite guidée + dégustation (9.50 euros/pers.) Il est donc obligatoire de réserver son ticket on line. Davantage de détails sur le site www.cantillon.be/ Rue Gheude, 56 à 1070 Bruxelles


CRÉATION MONDIALE DE : IS THIS THE END ? La Monnaie ouvre sa nouvelle saison lyrique avec un pop requiem du compositeur belge Jean-Luc Fafchamps. Cette œuvre de commande, un triptyque composé sur un livret d’Éric Brucher, est intitulée Is This The End. Le premier volet, Dead little girl, est présenté en septembre sous la forme d’un opéra virtuel retransmis en direct. Cette œuvre moderne se penche sur les états transitoires entre la vie qui s’achève et la mort imminente : la conscience qui s’éteint, le monde des demimorts, les limbes de la pensée. Un homme, une femme et une adolescente se retrouvent projetés dans cet entre-deux où ils évoluent sans nécessairement comprendre ce qui leur arrive. Cela faisait un moment déjà que ce projet était en gestation ; la crise du coronavirus a précipité sa réalisation dans des conditions totalement covid-compatibles, c’est-à-dire avec la distanciation requise entre les artistes, qui n’entrent de toute manière pas en contact les uns avec les autres dans l’univers intermédiaire où ils séjournent. Il n’y a pas non plus de public, ni de scène. Le parallélisme avec les images, gravées en lettres de feu dans nos mémoires, de personnes qui ne peuvent pas se dire adieu et de patients mourant sans leur famille est évident. Dans le contexte de la crise du coronavirus, la thématique de Is This The End ? revêt une actualité poignante. Chaque volet de la trilogie est autonome, mais les trois parties sont néanmoins liées, comme un prisme qui reconstitue la réalité à partir du point de vue de chacun des protagonistes. La première partie, Dead Little Girl, parle d’une adolescente bloquée dans les limbes entre la vie et la mort. Là, elle rencontre toutes sortes de personnages, des « âmes en partance » qui, tout comme elle, se trouvent dans un état transitoire.

La metteuse en scène Ingrid von Wantoch Rekowski a imaginé une formule inédite pour cette « messe des demi-morts ». Les bâtiments de la Monnaie constituent le décor de ce premier volet, qui se jouera sans public. Des épisodes filmés au préalable dans les locaux du Théâtre dialogueront avec un spectacle live porté par trois solistes, dix-sept musiciens de l’Orchestre symphonique de la Monnaie et dix-huit chanteurs des Chœurs de la Monnaie. Vous pourrez suivre la représentation en direct sur le site Internet de la Monnaie. La Monnaie est par ailleurs en négociations avec des télévisions et cinémas au niveau (inter)national pour pouvoir proposer cette production au grand public. La première mondiale aura lieu le 12 septembre 2020 à 20 heures et le 13 septembre 2020 à 15 heures. Davantage de détails sur le site www.lamonnaie.be


LA CULTURE À L’ÉCOLE … DE BONNES NOUVELLES POUR LA RENTRÉE ? La Ministre de l’Éducation Caroline Désir et des conseillers de la Ministre de la Culture Bénédicte Linard ont rencontré, le mardi 25 août, divers représentants des secteurs culturels concernant les collaborations culture-école dans le contexte de la gestion de la pandémie Covid-19. Les deux ministres tiennent avant tout à réaffirmer l’importance du lien entre l’école et la culture. La fréquentation des lieux culturels et l’expérimentation des pratiques artistiques favorisent la créativité et le développement de la personnalité. Elles offrent une meilleure appréhension de l’ensemble des matières scolaires et ouvrent la porte à l’interdisciplinarité. L’accès à la culture est par ailleurs fondamental pour permettre aux enfants et aux jeunes de décoder la société et notamment la crise que nous traversons ces derniers mois. Il est donc plus que jamais essentiel de renforcer cette synergie entre écoles et culture. Le gouvernement s’est déjà engagé à renforcer structurellement ces collaborations et à assurer que chaque élève bénéficie d’un véritable parcours d’éducation culturelle et artistique (PECA) dans le cadre de sa scolarité. Cet engagement s’est traduit par l’adoption d’une note d’orientation, le 17 juillet dernier, fixant une trajectoire budgétaire et définissant les modalités de mise en œuvre du projet, en articulation avec la réforme du tronc commun Les acteurs culturels ont rappelé les difficultés engendrées par les normes prévues dans les écoles lors de la rentrée scolaire 2020 sur base des recommandations des experts sanitaires. Dans ce contexte, les ministres se sont engagées à réévaluer ces normes en fonction de l’évolution de la situation sanitaire mais également en tenant compte du respect des droits de l’enfant dont celui d’accéder à la culture. Dans l’enseignement secondaire, la suspension des activités extra-muros est en effet d’ordre provisoire. Les deux Ministres formuleront aux experts et autres Communautés, dès le début du mois de septembre, une proposition de modalités pratiques permettant d’envisager rapidement une reprise des sorties culturelles à la fois en codes jaune et orange. Il s’agit notamment de tenir compte des mesures adoptées par les lieux culturels visant à respecter des règles sanitaires strictes et accueillir les enfants en toute sécurité. Les ministres rappellent par ailleurs que les activités extra-muros sont toujours possibles sans restriction pour les maternelles et primaires. Concernant les interventions de tiers dans les écoles, elles sont limitées au nécessaire mais restent possibles en code jaune et orange. La FAQ de la Ministre de l’éducation a été revue pour inclure explicitement les collaborations culture-école dans la définition des intervenants externes pouvant être autorisés à tous les niveaux d’enseignement, en ce compris le secondaire.

DU CÔTÉ DU THÉÂTRE DES MARTYRS Vu les circonstances que nous traversons, le Théâtre des Martyrs reporte jusqu’au 30 septembre prochain la possibilité d’acheter, à des conditions très favorables, des abonnements pour trois, six ou neuf spectacles. Si vous êtes ou étiez abonnés, le programme de la saison en version papier devrait vous être parvenu aux entours du 20 août. Si ce n’est pas le cas, vous pouvez vous manifester par téléphone du mardi au vendredi de 14 à 18 heures (jusqu’au mercredi 15 septembre), puis du mardi au samedi de 15 à 18 heures dès le mardi 18 ou par courriel à l’adresse :billetterie@theatre-martyrs.be

DÉCÈS D’HERMINE DE CLERMONT-TONNERRE Femme de tête, Hermine de Clermont-Tonnerre était principalement connue pour ses ouvrages de savoir-vivre et ses participations dans diverses émissions télévisées. Ancienne styliste chez Dior, elle a rapidement fondé sa société de communication et de création d’événements. Personnalité contrastée, elle était adorée par certains, jalousée par d’autres et franchement détestée par une part infinie du public. Loin d’accepter de s’en laisser compter, elle menait de front chacun de ses projets, en clamant bien fort sa devise : « Rien ne se perd, tout se gagne pour une seconde vie ! ». Victime d’un grave accident de moto le 1er juin dernier, les médecins l’ont plongée dans le coma artificiel, avant de mourir des conséquences de ses blessures début juillet. Amélie Collard


LES CHRONIQUES DU KET DE BRUSSELLES : EXTRAIT DE « RENDEZ-VOUS À LA FLEUR » Le nouveau bourgmestre (l'ancien, Ferdi le Gentil, adroitement évincé, passait maintenant son temps à chercher le maâbuûm (meiboom) de l'année prochaine dans le bois de la Cambre) avait réuni son collège en session plénière dans la salle gothique de l'hôtel de ville, pour une communication qu'il jugeait de première importance : — Bruxelles n'est plus ce qu'elle était, mesdames et messieurs. Quand je pense à Jules Anspach, qui a su la transfigurer, en faire une capitale européenne chouchoutée par nos voisins, j'en ai des vapeurs. Depuis un siècle, Bruxelles périclite dans le béton. On voit des voitures partout, des stationnées normalement, des stationnées anormalement, des pas bien stationnées du tout qui gênent celles qui circulent ! Bref, j'en ai assez. Cette bruxellisation a assez duré. Plus de voitures en ville, mais la nature, dans toute sa splendeur. Depuis 1960, on prône les villes à la campagne, eh bien moi, je lance le concept de la campagne à la ville ! Mesdames, messieurs, j'ai décidé de rouvrir le cours de la Senne. Partout, depuis la porte de Ninove jusqu'à Vilvorde. On va refaire la Petite Île, la Grande Île, la Grote Spuy, les moulins, tout ! C'est pas une idée géniale, ça ? Passer dans l'Histoire avec un grand H, ça vous dirait ? La Senne sera notre Hudson River. Je crois pas qu'un Bodding 747 saura se poser d'urgence dessus, mais ce sera bien pour le kayak, on devra plus le faire sur gazon. Qu'en pensez-vous ? — Pas que du bien, répliqua une petite voix masculine de l'autre côté de la grande table. Yves Van Maeyer n'aimait pas les dissidents. Il chercha l'origine de l'opposition et la trouva en la personne de l'échevin des finances, un petit rabougri fielleux : — Pour une fois qu'on avait bien négocié un grand terrain libre de voitures où les cyclistes pouvaient s'ébattre et les athlètes préparer le prochain Van Damme, et les ados faire du roller sans crainte, vous voulez tout bousiller. — Je ne bousille rien, contra le bourgmestre. Vos cyclistes pourront faire du pédalo et les athlètes se recycleront au kayak et au raft, c'est plus tendance que le 100m haies. Je vois bien les frères Morlay en skiff double, faire la jonction Nord-Midi en vingt-quatre minutes. Les ados pourront faire trempette au pied du moulin de la Barbe. Moi je dis que c'est génial. Il toisa deux échevines comploteuses penchées dans un aparté plein de sous-entendus : — Une remarque, madame Van Tichelen ? L'interpellée se leva avec une moue franchement dégoûtée : — Ça va sentir la merde partout, c'est atroce ! Vous parliez de Jules Anspach : il a justement fait couvrir la Senne parce qu'elle puait ! Yves Van Maeyer en tomba assis sur sa chaise mayorale en levant les yeux vers le plafond richement décoré : — Nous sommes au XXIe siècle, madame Van Tichelen ! On assainit les eaux, on a des stations d'épuration, tout le bataclan ! La Senne, c'est aujourd'hui un torrent de montagne, avec une eau fraîche et pure, où les enfants aimeront se baigner l'été venu. — À ton nez brodé, grinça l'interpellée. Va déjà voir à Ruysbroek l'état des eaux... Et à Vilvorde, je te dis pas. Ta station d'épuration elle marche juste pour saint-Nicolas ! Et tu veux que nos enfants aillent y boire la tasse ? Zo-ot ! Va te baigner toi-même dedans, tatchelul (naïf) ! On va voir comme tu vas revenir plein de boutons et de pustules, et puer le caca à cinq kilomètres contre le vent ! Et je sais de quoi je cause : je n'ai pas été nommée échevine de la propreté et de la culture pour rien ! C'est encore une fois ce foutbaliste qui t'a soufflé ça dans le pavillon, dis ? Écoute, Scourmoy, tu dois le laisser tranquille avec tes idées de peï qui fume son tapis-plain, hein ? Il sait pas de chemin (il ne s'en sort pas) avec des omnuzels (crétins) comme toi, qui ont que des stoummiteiten (bêtises) dans leur crâne. Tu dois avoir trop donné des têtes quand tu étais jeune, fieu, ça a dû faire du michmach (gadoue) avec ton cerveau.


Après cette diatribe, madame Van Tichelen, quelque peu essoufflée, céda la parole à sa coéquipière, madame Stekebeis, non moins virulente, bien qu'appartenant à la même famille politique que le bourgmestre : — Françoise a raison, Yves, c'est une idée idiote, ça ! Demande un peu à ton copain si Anderlecht va utiliser le stade de Sclessin au lieu du Parc Astrid pour ses matches à domicile, tu vas entendre quelque chose ! C'est Roger Dubaston qui va en faire un caca mou, si tu lui racontes des flooskes (idioties) pareilles ! Refaire de Bruxelles un égout à ciel ouvert, nè ! on a déjà assez avec le canal qui pollue tout ! Un long murmure secoua le collège, où l'on pesait le pour et le contre. Les uns entrevoyaient Bruxelles Plage bordée de cocotiers, au sable blanc, aux eaux vertes, le bruit des vagues mêlé aux cris des mouettes (tu crois qu'il y a des mouettes aux Maldives ?), les autres redoutaient la vision atroce de Bruxellois engoncés dans une combinaison étanche, avec masque respirateur, se hâtant vers leur domicile pour y respirer un air consciencieusement aseptisé et filtré au charbon actif. — Bon, écoutez, l'idée est lancée, se risqua enfin Joseph Scourmoy, soucieux de ménager la chèvre et le chou (on était loin des élections, mais tout de même). Je signale toutefois que ça ne reviendrait pas cher à la ville. J'ai un copain au fédéral, dont l'oncle émarge à la commission européenne. Il doit y avoir moyen de tirer quelques milliards de ce côté-là. Je vais voir si ça peut se faire. Avec un bon dossier, tout est possible. — Une étude de faisabilité, voilà ! C'est très tendance, ça plaît toujours au contribuable, intervint Yves Van Maeyer. On pourrait même créer un groupe d'experts, des calés de la VUB par exemple. — La VUB ? interrogea un échevin jusque là discret. Pourquoi pas l'ULB ? Ils sont trop cons à votre avis ? C'est une avanie communautaire, monsieur le bourgmestre ! Je ne manquerai pas de la signaler sur mes réseaux sociaux. L'interpellé releva la tête, inspira bruyamment, et répliqua d'un ton sans ambages : — On peut aussi la demander à Harvard, si vous voulez ! La Senne, ça doit vraiment les concerner ! Georges Roland

PRÉSENTATION SUCCINCTE DE GEORGES ROLAND PAR LUI-MÊME Je suis un enfant de Bruxelles. Né à Bruxelles, mais pas à la clinique saint-Pierre des Marolles. J’ai passé mon enfance et mon adolescence à Bruxelles, j'y ai habité pendant plus de vingt-cinq ans, mais pas à Molenbeek. Je suis un ket de Weule (Woluwé), qui vaut bien les strotches autour de la Vosseplaan et les dikkenekke de Meulebeek, nè tiens! Ces années ont été bercées par un dialecte tellement fleuri qu’il m’est resté gravé dans la mémoire. Je ne suis ni romaniste, ni linguiste, ni arriviste, ni foutbaliste (j'insiste). Je ne suis ni universitaire, ni mercenaire, ni fonctionnaire, ni patibulaire (j'espère). Je ne suis ni historien, ni académicien, ni politicien, ni vaurien (je pense bien). Je suis un artisan, un manuel de l'écriture ; un voyageur sans bagage, dans l'univers du rêve. Simplement, quelque chose se met à bouillir en moi, et explose. Les figures que j'ai connues naguère deviennent soudain des acteurs, les faits réels, des aventures, et le tout fait un roman, une fiction. Un auteur n'existe que grâce aux personnages qu'il crée, son nom importe peu. J'aime la langue française, apprise à l'école, sur le tard, et j'aime le dialecte bruxellois, issu du Brabançon, ma langue maternelle. Ils sont les instruments desquels je joue, et cette dualité me fascine jusque dans les êtres et les événements qui font le quotidien. J'écris des divertissements, je façonne des outils pour l'évasion (voyez ma devise dans l'entête). Voir sur le visage d'un lecteur, un sourire ou une larme qui reflète son bonheur, est la finalité de mon travail.


EXPOSITION : MASCULINITIES De la « grande renonciation masculine » de la fin du XVIIIe siècle à la mode androgyne d’aujourd’hui, pour la première fois en Belgique, un musée de mode consacre une exposition à la garde-robe de l’homme ! À travers des pièces de Raf Simons, Walter Van Beirendonck, Namacheko, Mosaert, Xavier Delcour ou Vêtements pour les Belges, Off-White, Jean Paul Gaultier, John Stephen, Giorgio Armani, Comme des Garçons ou Westwood & Mc Laren pour les internationaux, cette exposition célèbre la créativité, l’inventivité et le talent des designers contemporains. Elle explore également la façon dont l’évolution de la mode masculine reflète et encourage l’évolution de la notion de masculinité ou plutôt de masculinités ! Un événement à découvrir au Musée de la Mode et de la Dentelle jusqu’au 13 juin 2021. Veuillez trouvez les informations utiles sur le site officiel www.fashionandlacemuseum.brussels Rue de la Violette, 12 à 1000 Bruxelles

EXPOSITION : KURT LEWY Peintre, émailleur et illustrateur, Kurt Lewy (1898 – 1963) est né à Essen (Allemagne), où il enseigne les techniques graphiques à la Folkwang Schule de 1929 à 1933. Dès l’avènement du nazisme, cet artiste juif est destitué de ses fonctions. Deux ans plus tard, il fuit l’Allemagne hitlérienne pour s’installer à Bruxelles. Incarcéré comme sujet ennemi par les autorités belges en mai 1940, Kurt Lewy est interné dans les camps de Saint-Cyprien et de Gurs. En 1942, il parvient à s’évader et revient à Bruxelles, où il se cache durant une vingtaine de mois. En juin 1944, il est arrêté par les nazis, qui l’internent à Malines jusqu’à la Libération. Après la Seconde Guerre mondiale, Kurt Lewy renonce aux thèmes figuratifs qui guidaient jusqu’alors sa production, marquée à ses débuts par l’expressionnisme allemand. Il se tourne vers l’abstraction, qu’il explorera jusqu’à son décès. Soucieuse d’« éliminer le superflu, l’éphémère, le chaotique », sa recherche géométrique le dégage des angoisses que lui avaient causés le cauchemar de la guerre comme son isolement d’émigré. S’appuyant sur les collections du Musée Juif de Belgique, mais aussi sur des œuvres de la galerie anversoise Callewaert-Vanlangendonck, cette exposition sort de l’ombre une figure incontournable, mais aujourd’hui tombée dans l’oubli, de la peinture belge d’après-guerre. S’y révèle une œuvre qui, saisissant précipité de l’évolution dès l’histoire de l’art au 20e siècle, montre un chemin qui part de la figuration pour aboutir à l’abstraction. Une exposition à découvrir au Musée Juif de Belgique du 11 septembre 2020 au 7 février 2021. Davantage d’informations sur le site www.mjb-jmb.org Rue des Minimes, 21 à 1000 Bruxelles


EXPOSITION : LE CŒUR AU VENTRE Art et marges musée présente les œuvres de créateurs qui sortent un peu de l’ordinaire. L’art en marge ou art outsider (on peut aussi parler d’art brut), c’est l’art qui est réalisé dans des contextes où on ne l’attend pas. Résidents dans une institution pour personnes handicapées mentales, patients en psychiatrie ou bien autodidactes, ces inventeurs et créateurs n’ont pas tous conscience d’être des artistes et ils restent souvent à la marge du circuit traditionnel de l’art. Sans formation artistique, pour la plupart, ils créent alors des formes d’art qui ne correspondent pas aux normes académiques. Ces artistes hors du commun expriment chacun un univers propre à travers des techniques et des supports très variés : stylobille, plastique, dessin, assemblages, broderie, sculpture, peinture, etc. Tous les trois mois, le musée présente une nouvelle exposition. La découverte de formes artistiques d’une grande spontanéité fait prendre conscience de son propre potentiel artistique. Ces œuvres hors du commun encouragent les enfants et adolescents à inventer, à créer et non pas restituer et copier. Ils sont invités à exprimer leur personnalité. La visite sensibilise l’enfant et l’adolescent à la différence et à la non-conformité par la spécificité des artistes présentés. Les rencontres et les dialogues qui s’établissent entre eux et l’art en marge permettent une véritable ouverture d’esprit et une prise de conscience de soi et des autres avec toutes les particularités qui peuvent exister. Par le biais du questionnement et de l’expérimentation créative, ils apprennent à regarder simplement et à avoir confiance dans leurs observations. Enfin, la visite fait du musée un espace de découvertes ludiques, curieuses et passionnantes. L’exposition en cours et intitulée « Cœur au ventre » donne le ton. On y découvre une série d’objets collectionnés avec amour par des passionnés, tout en pénétrant sur la pointe des pieds dans leur intimité. Une exposition à voir jusqu’au 11 octobre 2020. Plus de détails sur le site www.artetmarges.be Rue Haute, 314 à 1000 Bruxelles

EXPOSITION : LES SUPER-HÉROS DÉBARQUENT À BRUXELLES Né en 1963 au Brésil, Mike Deodato Jr. débute sa carrière en travaillant pour divers petits éditeurs brésiliens puis américains. En 1994, avec son adaptation de Wonder Women, il fait une entrée remarquée chez Marvel Comics et restera longtemps attaché à la prestigieuse maison d’édition où il s’impose comme un des auteurs essentiels. Il est associé à la série Avengers qu’il illustre abondamment, avec notamment la complicité du scénariste Brian Michael Bendis. Il intègre rapidement les codes graphiques de la narration et n’hésite pas à les expérimenter dans des mises en page audacieuse et spectaculaires soutenues par un trait ultraréaliste et précis. Actuellement, Deodato a délaissé l’encre et la plume au profit de la palette graphique et il est l’un des fleurons de la nouvelle maison d’édition AWA Comics. Une exposition de ses travaux est à découvrir du 10 au 26 septembre 2020 à la galerie Champaka. Plus de détails sur le site www.galeriechampaka.com Rue Ernest Allard, 27 à 1000 Bruxelles


REPORT DE LA CINQUIÈME ÉDITION DE UNITED MUSIC OF BRUSSELS La cinquième édition de United Music of Brussels, prévue le 5 septembre aux Marolles, est reportée. Les strictes mesures de sécurité vont en effet à l’encontre de tout ce qui fait l’identité de cet événement. Il est pour le moment impossible pour les trois institutions d’organiser des concerts pour un public diversifié sur plusieurs sites originaux de la capitale. Hans Waege (intendant Belgian National Orchestra) « L’organisation d’une édition réduite aurait nécessité des ressources humaines et des moyens non justifiables Et la version minimaliste qui en aurait résulté aurait tout simplement été contraire à l’âme du projet. » Les trois institutions culturelles fédérales se concertent actuellement afin de pouvoir proposer chacune une offre de musique classique de haute qualité et travaillent de concert à l’organisation de la nouvelle saison. Les directeurs de BOZAR, de la Monnaie et du Belgian National Orchestra souhaitent ouvrir leurs portes au public afin de pouvoir remplir leur mission essentielle en ces temps difficiles. Paul Dujardin (CEO et directeur artistique BOZAR) : « La motivation est bien présente et tout est réglé sur le plan de l’organisation. […] Tout est prêt pour proposer une nouvelle saison humaine, même si cela doit se faire à plus petite échelle. » Et pour les musiciens, les collaborateurs et les partenaires, il est tout aussi crucial qu’un nouveau programme musical voie le jour. Le secteur culturel souhaite pouvoir reprendre ses activités normalement. Les musiciens aussi ont le droit d’exercer leur profession. Les conditions sont déjà remplies : toutes les mesures de sécurité nécessaires ont été prises. Peter de Caluwe (intendant la Monnaie) : « Aucun autre secteur n’est mieux préparé à gérer le flux de visiteurs que le secteur culturel et événementiel. Nous sommes prêts. » Les trois directeurs estiment que le secteur culturel est durement touché par les exigences en matière de sécurité. Les salles de la Monnaie et du Palais des Beaux-Arts peuvent clairement accueillir plus de 200 personnes dans le respect de toutes les mesures de prévention. Hans Waege, Paul Dujardin et Peter de Caluwe demandent donc avec insistance la confiance des autorités et invitent chaleureusement le public à venir assister aux prochains concerts.

© Illias Teirlinck


CD : JOHN WILLIAMS IN VIENNA Depuis presque cinq décennies, John Williams est le complice attitré du cinéaste Steven Spielberg, pour lequel il a composé la majorité des scores. Il est aussi celui qui se trouve à la base du renouveau hollywoodien, avec des partitions flamboyantes comme à l’époque de Miklos Rozsa et autre Dimitri Tiomkin, disposant d’un orchestre symphonique et de chœurs lorsque le besoin se précise. Né en 1932 à New York, il se fait d’abord connaître comme pianiste de jazz, arrangeur et chef d’orchestre avant de se lancer dans l’écriture pour la télévision sous le nom de Johnny Williams. Fort vite, le cinéma fait appel à son mimétisme et l’engage au cours des années 60 sur des réalisations commerciales. Il doit toutefois attendre les seventies pour éclore aux yeux de tous. Coup sur coup, il paraphe des blockbusters tels que « L’aventure du Poséidon », « Tremblement de terre », « La tour infernale » et « Les dents de la mer ». Alfred Hitchcock n’hésite pas à l’engager pour son dernier opus : « Complot de famille ». Ensuite, les succès se multiplient : la saga « Indiana Jones », celle de « La guerre des étoiles », les premiers épisodes de « Harry Potter », la trilogie « Jurassic Park », « Superman », etc. Néanmoins il accepte de prendre la tête du Boston Pops Orchestra avec lequel il livre une quinzaine de disques, glissant çà et là l’un ou l’autre titre de sa verve. On l’ignore souvent, mais il est également l’auteur de pièces classiques, dont deux concertos pour violon, un pour trompette, un autre pour harpe, etc. Une musique beaucoup plus sèche et intellectuelle que celle qu’il propose pour le grand écran. Les 18 et 19 janvier 2020, il a été invité à diriger l’Orchestre Philarmonique de Vienne pour deux soirées mémorables, accompagné par la violoniste Anne-Sophie Mutter. L’opportunité d’adapter certains morceaux à la virtuosité de cette dernière. Le label Deutsche Grammophon a enregistré cet événement dans l’intention de commercialiser un CD désormais disponible dans les bacs des disquaires. Au menu, treize plages réparties de la sorte : The Flight to Neverland (From “Hook”) , Excerpts (From “Close Encounters of the Third Kind”), Devil’s Dance (From “The Witches of Eastwick”), Adventures on Earth (From “E.T. the Extra-Terrestrial”), Theme (from « Jurassic Park »), Dartmoor, 1912 (From “War Horse”), Suite (from “Jaws”), Marion’s Theme (From “Indiana Jones and the Raiders of the Lost Ark”), Main Title (From “Star Wars: A New Hope”), The Rebellion is Reborn (From “Star Wars: The Last Jedi”), Luke & Leia (From “Star Wars: Return of the Jedi”), Imperial March (From “Star Wars: The Empire Strikes Back”) et Raider’s March (From “Indiana Jones and the Raiders of the Lost Ark”). Bien sûr, les amateurs signaleront que d’autres motifs auraient pu être inclus au programme et que la sélection demeure subjective. Où sont passés Hedwig’s theme (from “Harry Potter“) et Midway march (from “Battle of Midway“) ? Il ne s’agit évidemment pas ici de reprendre le travail de John Williams dans son exhaustivité, mais d’offrir un réel moment de plaisir en conviant les passionnés à redécouvrir certains thèmes qu’ils adorent rejoués et magnifiés sous l’archet d’Anne-Sophie Mutter, tout imprégnée de son jeu et de sa maestria. Un disque dispensable pour ceux qui suivent le maestro depuis des années, mais pas totalement inutile puisqu’il recense le meilleur du meilleur. Daniel Bastié


DÉCÈS D’OLIVIA DE HAVILLAND Une des dernières gloires du vieil Hollywood s’est éteinte durant les vacances d’été à l’âge de cent quatre ans. Olivia de Havilland, le nom ne dira rien aux moins d’un demi-siècle et pourtant … Elle a été la petite fiancée de la Côte Ouest, née au Japon en 1919, d’origine britannique, naturalisée américaine, puis française. Loin des projecteurs de cinéma, elle est morte à Paris en toute discrétion. Discrétion, voilà un mot qui lui convenait à merveille. Elle a été la gentille Mélanie de « Autant en emporte le vent », mais le public l’a adoubée en tant que compagne du bondissant Errol Flynn dans nombre de ses films : « Captain Blood », « Les aventures de Robin des Bois », « La charge de la brigade légère », « Les conquérants », « La piste de Santa Fe », etc. Elle était également la sœur de l’actrice Joan Fontaine, autre vedette de l’époque. Il a été raconté que leur relation s’était lentement détériorée au point de devenir détestable. Les biographes rappellent la soirée des Oscars 1942, où chacune est nommée dans la catégorie « meilleure actrice ». Joan l’emporte grâce à sa prestation dans « Soupçons » d’Alfred Hitchcock. De plus en plus frustrée par les rôles qui lui sont attribués, Olivia estime être capable de jouer autre chose que les sages demoiselles en détresse stéréotypées et commence à refuser les scénarios proposés. Elle lutte contre la Warner pour décider elle-même des longs métrages sur lesquels elle souhaite travailler et se retrouve devant les tribunaux pour rupture unilatérale de contrat. Le juge lui donne raison et permet de la sorte aux comédiens de ne plus être assujettis à 100% aux studios. A partir des fifties, elle se fait de plus en plus sélective et ses apparitions se raréfient sur la toile blanche de nos nuits blanches. On raconte qu’elle a refusé le rôle de Blanche Dubois dans « Un tramway nommé désir » et on se souvient de sa prestation de vieille dame digne dans « Airport 77 ». Adieu l’artiste ! Daniel Bastié

DÉCÈS : ALAN PARKER J’ai vu il y a bien longtemps « Midnight Expresse », ce film terrible sur les prisons turques et qui a suscité quelques tensions diplomatiques. Un coup de poing lancé au visage des spectateurs et soutenu par la rythmique du sieur Giorgio Moroder, pape de la musique électronique et vainqueur de l’Oscar 1978 pour sa partition au synthé. Bien sûr, ce long métrage a été interdit pour insulte à la nation dans le pays du futur Recep Tayyip Erdoğan, pas un rigolo. Tardivement, le scénariste Oliver Stone (devenu depuis réalisateur) a reconnu avoir appuyé un tantinet trop fort sur le champignon en décrivant la condition des prisonniers, même si personne ne souhaite prolonger sa villégiature dans une geôle d’Istanbul. Tout cela pour annoncer qu’Alan Parker, qui a mis en scène ce brûlot, nous a définitivement quitté durant les vacances d’été pour acheter un ticket sans retour en direction du grand paradis où se réunissent pour l’éternité tous les artistes. Venu du monde de la pub, le bonhomme a fait ses preuves en réalisant deux courts-métrages et en faisant interpréter « Bugsy Malone » (son premier grand format) par des enfants, dont la toute jeune Jodie Foster en pin-up des années 30, une comédie musicale présentée comme un film familial de gangsters dans lequel les mitraillettes crachent des fromages (genre Petits Suisses) et où les bagnoles fonctionnent avec des pédales. Après le clash « Midnight Express », il entame les eighties en signant « Fame », « Birdie », « Pink Floyd : the wall » et quelques titres engagés contre le racisme et la peine de mort. En 1996, il revient au genre musical avec « Evita », soutenu par la prestation de Madonna et du bel Antonio Banderas. Alan Parker s'essaie également à l'écriture avec la parution en 2008 de « Sid Vicious, l'icône du punk », livre sur le bassiste du groupe Sex Pistols. Il était également connu pour être un fervent défenseur des droits civiques et des libertés. Daniel Bastié


CINÉMA : PETIT PAYS Drame d’Éric Barbier, avec Jean-Paul Rouve, Djibril Vancoppenolle, Isabelle Kabano et Delya De Médina. France 2019, 111 min. Sortie le 28 août. Résumé du film – Dans les années 1990, le jeune Gaby vit au Burundi avec son père Michel, entrepreneur français, sa mère Yvonne, une Rwandaise tutsie, et sa petit sœur Anna. Il passe son temps à faire les quatre cents coups avec ses copains de classe, jusqu’à ce que la guerre civile entre Hutus et Tutsis se déclare, mettant fin à l’innocence de son enfance. Il va comprendre pourquoi une affaire de nez a mis le feu aux poudres dans une région de l’Afrique où grondait la révolte depuis longtemps. Commentaire – Depuis des siècles en fait. Depuis que l’élite tutsie s’est imposée aux Hutus, majoritaires mais plus frustes, dans les deux pays voisins du Rwanda et du Burundi, et que la colonisation a consacré cet état de fait. Les Tutsis, grands et au nez fin, ont dominé la société malgré les révoltes populaires. Même pays, même langue (le kinyarwanda au Rwanda, le kirundi au Burundi), même territoire mais pas le même nez, sur lequel se disputent les enfants en voyant celui de Cyrano de Bergerac à l’école. Le génocide dans les deux pays limitrophes nous est conté à partir du Petit pays de Gaël Faye, tourné au Rwanda avec 90% d’acteurs rwandais. Le réalisateur français est Éric Barbier (La promesse de l’aube, 2017), qui en fait une adaptation très fidèle. Sauf la fin du livre qu’il adapte dans un souci de vraisemblance, en recentrant les éléments un peu émiettés de l’histoire. Tout est donc conforme au récit de Gaby, et l’on suit les aventures d’une bande de cinq gamins qui vont découvrir l’horreur du génocide, mal profond et contagieux. Ce mal se communique d’un pays à l’autre comme un virus, ou comme une gangrène, dévastant tout sur son passage. Jean-Paul Rouve incarne bien l’ingénieur français passionné par la coopération au Burundi, tandis que sa femme, réfugiée tutsie ayant fui le Rwanda, ne rêve qu’à Paris pour arpenter les Champs-Elysées. Yvonne a gardé une certaine arrogance héritée de l’aristocratie tutsie qu’elle représente, et elle le fait sentir à son mari qu’elle domine de la tête et du nez. C’est une femme au port altier, et leur couple s’en va à vau l’eau, au bord de la déroute, miné par le colonialisme ambiant. On suit leur brouille, tandis que la situation dégénère sur le plan social et qu’une grande noce se prépare à Kigali, où doit se rendre Yvonne pour assister au mariage de son frère Pacifique. C’est alors que l’avion des deux présidents sera abattu au-dessus de Kigali, le 6 avril 1994, entraînant l’assassinat d’un million de Tutsis et d’Hutus modérés, avec un effet boomerang au Burundi. Tout nous est minutieusement raconté comme dans le livre, qui le faisait à travers les paroles d’un enfant. C’est raconté ici à travers la bouche des adultes que couvrent le crépitement des rafales et le lynchage des corps martyrisés, avec des moments forts. Moins poétique il est vrai, mais plus circonstancié, le réalisateur ayant soin de situer les faits terribles qu’il met en scène. Le film a été tourné au Rwanda, où l’unité nationale a pu être reconstituée après la tragédie, Tutsis et Hutus se fondant dans une nation recomposée. Ce n’était sans doute pas le cas au Burundi, le petit pays décrit par Gaby, où les tensions restent fortes, vingt-cinq ans plus tard, entre les deux communautés. Petit pays a été présenté à Kigali en avant-première, avant que n’éclate la crise du coronavirus. Avis – A voir si vous n’avez pas lu le best-seller de Gaël Faye, Prix Goncourt des Lycéens et Prix du premier roman en 2016. Le film n’y apporte rien de plus, sinon la beauté des images et la présence des deux jeunes acteurs, magnifiques dans leur rôle. Michel Lequeux


CINÉMA : POISSONSEXE Comédie romantique d’Olivier Babinet, avec Gustave Kervern, India Hair, Ellen Dorrit Petersen et Alexis Manenti. France-Belgique 2019, 89 min. Sortie le 9 septembre. Résumé du film – Alors que Miranda, la dernière baleine du monde, fait la une des journaux, Daniel, biologiste obstiné, tente de redonner vie aux poissons en train de disparaître des mers. Célibataire désabusé, il est lui-même hanté par le désir de devenir père et compte bien traiter ce problème scientifiquement. Le hic, c’est qu’à Bellerose, petit village sur l’Atlantique où il poursuit ses recherches, il y a seulement quatre femmes en âge de procréer, c’est-à-dire bien peu de chances pour lui de rencontrer la mère de ses futurs enfants. Pourtant, en sauvant de la noyade un étrange poisson amphibien, Daniel va réapprendre à tomber amoureux. Commentaire – Connu pour son long métrage Swagger, grand succès critique et public sur les jeunes banlieusards en 2016, Olivier Babinet se lance dans une comédie romantique avec Poissonsexe qui aurait dû sortir le 1er avril. Il en a été empêché par le virus. Ce poisson d’avril est un amphibien, un amblystome originaire du Mexique qui est venu s’échouer sur les côtes françaises. Il représente le dernier espoir pour sauvegarder les poissons de l’extinction, annonciatrice de la disparition de l’espèce humaine. Notre biologiste en mal de paternité en est bien convaincu : il doit tout faire pour repeupler la petite station balnéaire où il poursuit ses recherches dans un laboratoire. Alors que sa cheffe de service l’invite à lui fournir son sperme pour une fécondation in vitro à la vue de ses seins, Daniel bat la plage à la recherche de celle qui pourrait devenir la mère de ses enfants. Où pourrait-il la rencontrer ? Il l’a peutêtre croisée à la pompe d’essence de la station. Olivier Babinet développe cette comédie amoureuse comme une métaphore filée, où un petit amphibien représente l’espoir de l’humanité sortie de la mer. Car nos ancêtres étaient bien sûr des poissons. Le biologiste trouvera-t-il son âme sœur, comme le poisson à patte chargé de se reproduire si on le relâchait dans la mer ? Avec son air rose et canaille, il a tout pour faire fondre le cœur de notre scientifique, qui va rapidement trouver chaussure à son pied. Les sentiments ne se cultivent pas en effet dans un bocal, en laboratoire. Ils se cultivent au corps à corps. Gustave Kervern, qui a campé autrefois la figure d’un journaliste débraillé et alcoolique, incarne avec tendresse ce biologiste lunatique qui ressemble comme deux gouttes d’eau au capitaine Haddock dans les aventures de Tintin. C’est un ancien comparse du Groland, le pays fictif inventé en 1992 par l’équipe de Jules-Edouard Moustic pour les émissions de divertissement de Canal+. Quant à celle dont il va tomber amoureux − c’est le meilleur moyen de faire des enfants −, elle est interprétée par India Hair, meilleur espoir féminin de Camille redouble, la comédie de et avec Noémie Lvovsky (2012). Depuis, elle a fait son chemin : elle est apparue dans une vingtaine de films et dans plusieurs téléfilms, dont Capitaine Marlow. Une belle rencontre en perspective. Avis – Prix du Jury au Festival de Bordeaux, cette comédie sentimentale fait de l’amour un poisson d’avril à pêcher dans la vraie vie plutôt qu’en laboratoire. On s’y laisse prendre. Michel Lequeux


LES CHEMINS INTERDITS Orphelin à neuf ans au début de la guerre, Guillaume Doutremont est recueilli par une tante avare, bigote et possessive. Une époque, pas tellement éloignée de la nôtre, où il était de mauvais ton d'ouvrir sur le monde l'esprit des enfants. Le petit garçon, élevé dans la crainte de Dieu et l'horreur du péché, est tenu à l'écart des mystères de la chair, qu'il pressent comme vils et honteux. Dès son adolescence, il est d'ailleurs rigoureusement mis en garde contre les tentations malsaines par un oncle aussi pudibond que son épouse. De la sorte, il est préparé à mener son existence loin des chemins interdits, dans la stricte observance des préceptes qu'on lui a inculqués. Jusqu'au jour où, devenu professeur de mathématiques dans un établissement de la capitale, il rencontre LA femme, une et multiple, qui comme chacun sait, est un des innombrables pièges du démon. De découverte en découverte, d'enchantement en désillusion, Guillaume devient le jouet d'un destin absurde, qui laisse sa vie suspendue à un fil. Réédité aux éditions Ménadès, ce roman de Gus Rongy avait déjà fait l’objet d’une parution en 1997, totalement épuisée à ce jour. Ed. Ménadès – 352 pages Sam Mas

LA PRIÈRE QUI TUE Jean Lhassa est connu pour ses nouvelles insolites. A la limite toujours de l’étrange qui nimbe le récit et qui se cristallise dans chacune des chutes. On le redécouvre dans le dernier recueil qui vient de paraître, La prière qui tue. Cette prière issue des westerns spaghetti que l’auteur a disséqués ailleurs, dans une étude consacrée au genre. Elle sort ici de la tombe, cette prière, pour se venger d’une bande de salopards venus tout droit d’un film de Sam Peckinpah. Avec le sang sur les mains et le viol sur la conscience qu’ils n’ont pas. Les autres nouvelles sortent, elles, des souvenirs d’enfance de l’auteur. On y reconnaît, un soir de Noël, une grand-mère jaillie d’un fagot de bois déposé près d’un vieil arbre, faisant la leçon à son petit-fils qui s’endormira du dernier sommeil sous la neige, dans le parc, à côté d’elle. On retrouve la grand-mère à la fin, dans Le retour, avec ce médecin qui l’a soignée, qui est mort lui-même ensuite, et qui arpente les rues depuis, à la recherche de son cabinet médical pour se venger des héritiers cupides qui ont saccagé sa mémoire et sa demeure. Où en est-on dans ces récits venus d’outre-tombe, où les morts apparaissent au coin des rues pour demander des comptes aux vivants ? Pour leur demander ce qu’ils ont fait après leur disparition. Ailleurs encore, c’est une mère qui pousse son jeune fils dans un car pour une colonie de vacances pas comme les autres, où les mauvais garçons qui mènent la danse apprendront à leurs dépens ce qu’il en coûte de toucher au corps d’un ange nommé Angel. Toutes ces nouvelles respirent l’odeur de la mort qui imprègne chaque page et qui éclate comme un coup de feu dans le titre du recueil. La mort qui rôde au bout des mots et qui nous apprend à partager l’instant présent comme si c’était le dernier instant, l’instant du grand départ. C’est écrit avec des mots simples, les mots de tous les jours, qui vont droit au cœur et qui nous laissent leur goût d’encore qu’on tourne au fil des pages, en en redemandant. Dommage que les dernières nouvelles ne soient pas de la même eau. De la même force. Elles sont inspirées, semble-t-il, par d’autres auteurs qui sont les amis de Jean Lhassa, et qui n’ont rien à voir dans le recueil, ni par leur style, ni par leur thématique centrée sur la SF. A part ces dernières nouvelles, le recueil mérite largement la lecture : on s’y perd entre les vivants et les morts, au fil d’étranges rencontres qui vous laisseront le dos accroché à la paroi, au bord de l’abîme. Ed. Ménadès - 270 pages Michel Lequeux


LA MARCHE DU LEVANT Les repères n’ont plus rien à voir avec les nôtres. Trois cents ans : voilà le temps que met la terre pour pivoter sur son axe ! La population ne sait plus à quel saint se vouer. Dans ce futur proche, les lois ont changé et les hommes se dressent les uns contre les autres, amenés à survivre pour occuper des zones latérales plus amènes. Si certains s’accrochent à leur territoire, d’autres n’ont pas d’alternative et doivent migrer, provoquant des conflits. La jeune Célérya vient d’être promue à la tête des siens et accepte un enrôlement douteux au risque de sa vie. Bien vite, elle découvre qu’elle est l’élue d’une prophétie à laquelle elle n’a jamais prêté la moindre attention. La grande originalité de ce second roman du français Leafar Izen repose sur son postulat : notre monde à l’ère apocalyptique, avec un ralentissement de la rotation du globe terrestre, avec pour conséquence fâcheuse que la moitié des humains cuit sous une canicule permanente, tandis que la seconde gèle durant un hiver interminable. Bien que l'esthétique de ce monde au ralenti ait quelque chose d'hypnotique et de franchement envoûtant, il faut aimer la sciencefiction pour lire cet ouvrage d’une traite. L’auteur cristallise son écriture sur l’action et développe assez peu le passé de son personnage principal. Assurément, il pourrait s’agir d’une métaphore de notre civilisation qui va à vau-l’eau mais, à l’analyse sociologique et politique (car une révolution se fomente !), il préfère soigner un aspect cinématographique avec écran large et un ton qui devrait plaire aux adolescents. Ed. Albin Michel – 646 pagesµ André Metzinger

QUITTER LES MONTS D’AUTOMNE Dans un avenir proche, l’écriture est bannie. Seule la tradition de « Dit » entretient la mémoire de l’humanité. La dictature est présente dans chaque sphère du quotidien. Devenue danseuse, la jeune Kaori hérite des biens de sa grand-mère au décès de celle-ci. Parmi les objets qui lui reviennent, elle découvre un rouleau de calligraphie, qu’elle s’empresse de dissimuler. Posséder pareil objet pourrait lui coûter la vie. Afin de déchiffrer les mystères qui entourent ce document et connaître la véritable raison de la mort de ses parents, elle décide de rejoindre la capitale. Un périple qui occasionnera maintes surprises et la révèlera à elle-même. Emilie Querbalec signe un roman initiatique d’une excellente tenue, qui se veut à la fois un récit de science-fiction et une belle aventure, au cours de laquelle l’héroïne découvre un sens à son existence. L’histoire emporte dès les premiers chapitres et permet d’évaluer à quel point la liberté est un bien précieux. Voilà un livre au style agréable, qui se lit sans bâiller. La tension va crescendo pour ne jamais se relâcher. Un ouvrage addictif ! Ed. Albin Michel – 442 pages André Metzinger


LES SOUCIEUX Rien ne prédestinait Florian à assister un réalisateur connu sur le tournage d’une série à succès. Tout s’est enchaîné à vive allure. Pas encore totalement conscient de sa chance, il accompagne l’équipe dans une usine désaffectée où doivent être installés les décors de l’épisode à filmer. Débarque avec brusquerie une bande de sanspapiers. Que faire ? A l’affrontement, le dialogue est préféré et une cohabitation s’organise vaille que vaille, avec des élans de fraternité et de générosité. Lorsque les politiques locaux s’emmêlent, les artistes préfèrent se ranger du côté des démunis et s’organiser en groupe militant qu’ils baptisent « Les Soucieux ». Difficile de continuer à travailler dans pareille condition. La réalité baigne la fiction et chacun dépose un pied dans un engrenage qu’il ne soupçonnait pas. Face aux contingences, les masques tombent et chacun se révèle aux autres tel qu’il est vraiment. François Hien signe un premier roman plein de vérité qui traite de la nature humaine dans ce qu’elle possède de plus profond et souligne les carences d’une société rythmée par l’individualisme et, parfois, soulevée par un idéalisme salvateur. L’auteur est dramaturge et cinéaste professionnel. Ses films ont été diffusés dans divers festivals internationaux et ses pièces montées sur scène. Avec « Les soucieux », il signe son premier roman. Ed. du Rocher – 369 pages Paul Huet

L’ENFANT ET LA NATURE La chose n’est pas nouvelle et Jean-Jacques Rousseau prônait un rapport étroit de l’homme avec la nature. Freinet, le grand pédagogue, était partisan d’un apprentissage avec l’environnement direct de l’enfant. Pour Frédéric Plénard, le lien avec la nature est le secret d’une éducation qui mène au bonheur. Aujourd’hui, la situation mondiale est telle qu’il y a urgence de se resituer. Notre écosystème s’affaiblit, le réchauffement climatique menace la stabilité de la planète et la pollution croît à une vitesse exponentielle. L’urgence mobilise une grosse partie des citoyens sur divers continents. Malgré ses bonnes volontés, l’Education nationale s’accroche à de vieux préceptes liés à une logique économique et sociale à l’ancienne, sans vraiment prendre en compte les enjeux ou combats à mener. Il existe toutefois de plus en plus de pédagogies qui visent à inverser le système et qui proposent des alternatives, notamment en permettant aux élèves de se mettre en situation au cœur des espaces verts, de nouer des liens ténus avec la nature. Ces écoles d’un nouveau genre s’efforcent d’amener les jeunes à comprendre et à saisir l’importance de l’écosystème pour notre avenir commun et à adopter en toute conscience et en toute responsabilité des comportements en phase avec le développement durable. Ce livre s’adresse aux adultes (enseignants, parents, militants, curieux, politiciens, etc.) qui s’interrogent, cherchent des pistes, veulent savoir ou sont en recherche. Au fil des chapitres, ils découvriront des pistes concrètes et des techniques éducatives comme autant de stratégies à mettre en chantier. Ed. du Rocher – 264 pages André Metzinger


DARRIGADE André Darrigade, surnommé le « Lévrier des Landes », vient d’une famille issue de Narrosse, un minuscule village planté dans les Landes. Pour échapper au métier de métayer, il prend le vélo par les cornes et se lance dans la compétition. Très vite, il gagne ses premiers galons au Vélodrome d’Hiver à Paris, participe à quatorze Tours de France, avec vingt-deux étapes gagnées et en portant très souvent le maillot jaune. En 1955, il est sacré champion de France sur route et en 1956 champion du Tour de Lombardie. Les succès se multiplient et focalisent l’attention des médias. Jacques Anquetil en fait son lieutenant préféré. Un drame le marque toutefois en 1958. Au Parc des Princes, il percute un jardinier qui meurt quelques jours plus tard de ses blessures. Pour beaucoup, il reste un sportif exceptionnel et complet, à la fois équipier modèle et caractère affirmé lorsqu’il la joue solo. Aujourd’hui encore, beaucoup le considèrent comme ayant été l'un des plus grands routiers-sprinteurs de tous les temps. Christian Laborde raconte avec lyrisme et précision l’épopée de cet homme hors du commun, s’emparant tantôt du maillot jaune et tantôt du maillot vert. Au fil des pages, on croise toute une série de visages mythiques de la Petite Reine, dont Fausto Coppi, Jean Robic, Rik Van Looy, Louison Bobet et une poignée d’autres. Des illustrations en noir et blancs émaillent les chapitres et permettent de découvrir les traits des personnes citées. Bien entendu, pour apprécier pleinement cet ouvrage, il incombe de faire tourner un disque d’Yvette Horner à l’accordéon. Toute une page qui se déplie au son des tubes d’avant-hier ! Ed. du Rocher – 289 pages André Metzinger

COURAGE AU CŒUR ET SAC AU DOS Il aura fallu la crise du Covid-19 pour qu’on prenne enfin conscience de la difficulté dans laquelle vit une partie de nos aînés. Il ne s’agit pas de précarité financière (pas toujours !), mais de dépendance aux autres, car incapables de subvenir seuls aux gestes quotidiens. Dès lors, une partie des citoyens deviennent des aidants. Une alternative bénéfique à celle de placer les seniors dans une maison de repos. Nathalie Levy fait partie de ces millions de Belges et de Français qui, chaque jour, donnent un coup de pouce à une mammy ou à un papy. Présente sur les ondes d’Europe 1, elle vient de rédiger un ouvrage poignant qui raconte de quelle manière elle se charge de sa grand-mère Rosine, quasiment centenaire et qu’elle soutient contre vents et marées. Bien sûr, elle se livre sans détour et offre un récit à hauteur de vie, affranchi de pudeur et sans censure. Elle y conte la complicité qui l’unit à celle qui a bercé son enfance et qui a toujours répondu présent. Au fil des pages, elle nous rappelle la complexité d’une société qui porte un regard vague et distant sur celles et ceux que l’âge accable, sur le manque d’infrastructures adaptées, sur le coût de celles-ci et sur les sacrifices personnels qu’entraînent pareille prise en charge. Comment préserver son foyer et, surtout, comment aider efficacement nos seniors sans les débarquer dans une institution qui a encore récemment montré ses limites, en devenant de gigantesques mouroirs, loin de toute humanité digne de ce nom. Les résidents des séniories ont été livrés à eux-mêmes, frappés par le corona, dans une indifférence presque totale ! Ed. du Rocher – 187 pages Daniel Bastié


LE COMBAT SPIRITUEL Le paradis n’est pas acquis sans efforts ! Joël Guibert nous rappelle que le Mal entrave le Bien et que les tentations terrestres représentent une spirale infernale qui se dénomme péché. Chaque être humain a donc comme première nécessité de se redresser et de tendre vers ce qui est juste, de vivre en bombant le torse et sans se satisfaire de demi-mesures. Pour atteindre cet objectif, il faut lutter contre soi-même et la paresse qui nous materne. L’illusion est de croire que nous arriverons au terme d’une vie épanouie sans combat, sans obstacles et sans nous engager. Si Saint Paul nous rappelle que nous sommes sauvés, il importe de ne jamais s’appesantir en croisant les bras. Construire des murs de verre n’est d’aucune protection. Le moindre choc les ébranlera ! La spiritualité demeure un phare pour qui s’y accroche ! Elle guide et embrase. L’homme moderne est confronté à mille dangers, dont l’hyperconsommation s’est transformée en veau d’or. Tous les biens sont à disposition d’un clic de souris d’ordinateur. A cela, la société sans entraves et du tout est permis se révèle d’un individualisme malsain, violent et dépressif. Alors, plusieurs personnes ont choisi d’ancrer leur existence dans la spiritualité, en revenant à des valeurs de partage, d’entraide et d’humilité. A quoi cela sert-il de tout posséder sans connaître le bonheur ? Bien entendu, l’auteur défend ici des valeurs catholiques, mais celles-ci peuvent être conjuguées à tous les temps et à tous les modes. La paix intérieure peut être acquise par maintes disciplines et par différents courants. L’idée consiste à ne pas se laisser phagocyter par un monde qui nous enclave, à ne jamais éroder la raison et à maintenir les pieds bien sur terre, en veillant à se respecter et en n’oubliant pas que les autres sont nos semblables. Ed. Artège – 288 pages Sam Mas

THÉRÈSE DE LISIEUX Les éditions Artège ont récemment publié une bande dessinée consacrée aux époux Louis et Zélie Martin, heureux parents de la future Thérèse de Lisieux. Voici donc en cases et en phylactères le destin de cette dernière. À huit ans et demi, la gamine entre au pensionnat des bénédictines de Lisieux et rentre chaque soir à la maison, puisque le pensionnat se trouve non loin du cocon familial. Bousculée par des camarades plus âgées qui la jalousent, elle pleure et n'ose pas se plaindre. Elle déteste l'agitation bruyante des récréations. Son institutrice la décrit comme étant une élève assidue, calme et gentille, parfois songeuse ou même triste. Selon l'intéressée, ces cinq années sont les plus moroses de sa courte vie. Passionnée par les récits chevaleresques, elle éprouve une grande admiration pour Jeanne d’Arc. Elle pense être, elle aussi, née pour la gloire, mais une gloire cachée. Elle affirme que « Dieu m’a fait comprendre que ma gloire à moi ne paraîtrait pas aux yeux des mortels et qu'elle consisterait à devenir une grande sainte ». En 1887, elle entre au Carmel pour y mener un parcours exemplaire, prier et écrire. Elle meurt à l’âge de vingt-quatre ans. Après son décès, la ferveur populaire s’emballe et on lui prête plusieurs miracles. Dupuy, Perconti et Rizzato reviennent sur cette existence (extra)ordinaire et la racontent sans emphases. En choisissant le mode de la bédé, ils souhaitent atteindre le jeune public. Livre parfait pour compléter les cours de religion, le catéchisme ou découvrir une trajectoire à la fois humble et magnifique. Ed. Artège – 48 pages Sam Mas


L’UTOPIE SAUVAGE Les chiffres sont alarmants. La planète épuise ses ressources à un rythme exponentiel et le réchauffement climatique menace tout être vivant. Pourtant, les marches des jeunes en vue de sauver le climat paraissent vaines face à l’immobilisme des puissants et aux discours à la fois clairs et simplistes de Greta Thunberg. La peur d’une fin ou d’un effondrement de nos sociétés se veut désormais un scénario plausible. L’angoisse et la crise environnementale sont désormais connectées à la santé de tout un chacun, nous amenant à nous sentir plus vulnérables que jamais. Alors, pourquoi ne pas revenir aux valeurs naturelles et retourner dans notre milieu primaire ? Rarement, les balades en forêt ont eu autant la cote. Bien entendu, certains postuleront que cette recherche de la simplicité n’est pas neuve et qu’elle était déjà clamée par les hippies au cours des sixties. A contrario, ce qui paraît inédit tient dans l’intensité du phénomène et sa démocratisation par l’intermédiaire des médias et une prise de conscience relative. Hautement souhaitée, l’écologie est désormais au programme de tous les partis, refuge et solution à partir de l’instant où elle est prise à brasle-corps et pas simplement utilisée à titre de slogan racoleur. Aujourd’hui, quelques familles s’interrogent sur la question de savoir si l’existence de nos ancêtres n’était pas meilleure que la nôtre. Alors, retour à la cueillette et à la chasse primitive ? Sébastien Dalgalarrondo et Tristan Fournier sont sociologues au CNRS et ont analysé ce sujet. Pour eux, il apparaît que l’appétit de la nature épouse des réponses variées, tantôt anarchistes et tantôt réactionnaires. En fait, la population (enfin une tranche !) souhaite un changement des habitudes et une nouvelle manière de faire de la politique. Pour autant qu’elle n’impacte pas leur pouvoir d’achat. Ed. Les Arènes – 180 pages Amélie Collard

L’INCROYABLE HISTOIRE DE LA MÉDECINE Philippe Bercovici est un dessinateur bien connu par les amateurs de bédés. A son actif, la série « Les femmes en blanc » et de nombreuses participations à l’hebdomadaire « Spirou ». Afin de raconter l’évolution de la médecine, il s’est adjoint les services du professeur Jean-Noël Fabiani, auteur de nombreux ouvrages sur la médecine et ancien chirurgien. A quatre mains, ils ont conçu un voyage à travers les siècles pour suivre les grandes révolutions qui ont amené le monde des hôpitaux à devenir ce qu’il est aujourd’hui, en mettant en lumière le rôle de la recherche et de plusieurs personnalités insignes, tutoyant sans inconvénients la grande comme la petite Histoire. Bien entendu, tout est rigoureusement exact, appuyé par des thèses érudites ou des études sérieuses. Au fil des pages, on découvre que l’art de traiter les malades est d’abord né de la magie ancestrale et de rites plus ou moins primitifs, avant de devenir le fruit de l’observation et de la raison. Durant l’Antiquité, certains praticiens maîtrisaient plusieurs pans de cette discipline (Ah, Hippocrate et son fameux serment !). Au cours des siècles suivants, l’alchimie et le christianisme se sont impliqués avec plus ou moins de ferveur dans la manière de traiter les maladies. Puis, après maints balbutiements, la médecine est devenue une science à part entière qui, de plus en plus régulièrement, fait appel à des connaissances pointues. Heureusement, ce grand chaînon historique est balisé de multiples anecdotes, émouvantes, cocasses ou enjouées. Il s’agit surtout de récits qu’il convenait d’illustrer pour les pérenniser, parce intimement liés à notre passé et dont les avancées sauvent des vies au quotidien. Ed. Les Arènes – 288 pages Sylvie Van Laere


CORONAVIRUS : ÉLECTROCHOC POUR LA BELGIQUE ? On connaît Rudy Aernoudt pour son langage vrai et ses positions belgicaines, loin de tous ceux qui prônent le morcèlement du royaume. Chaque fois qu’il en a l’occasion, il pointe les slogans mensongers de plusieurs partis, ramène son discours aux chiffres, prouvant que la NVA triche lorsqu’elle parle de transferts budgétaires nord-sud, et dénonce l’invraisemblable structure de notre pays avec sept gouvernements et cinquante-cinq ministres pour onze millions d’habitants. Il souligne également la dette publique qui représente une épée de Damoclès équivalente à quarante-cinq mille euros sur la tête de chaque citoyen. Alors, selon lui, l’épreuve endurée au cours de la crise du Covid-19 pourrait être salutaire pour revoir nos priorités, refaire les comptes et investir dans un avenir aux contours socio-économiques en accord avec les valeurs humaines et les attentes d’une grosse partie de la population. Sa plume vive et acérée nous fait entrevoir demain avec un autre regard et, bien entendu, secoue les habitudes politiques. Ses multiples propositions étayées par des exemples concerts sont limpides. Quant à les appliquer au plus tôt, il est fort de constater que le manque de cohésion de nos gouvernants et que les réformes à mettre en œuvre pour y aboutir représentent le plus gros frein. Or, la crise du Coronavirus nous enseigne que, plus que jamais, nous avons besoin d’unité et de la solidarité de l’Europe, avec le soutien de la Banque Centrale européenne pour pallier la récension annoncée et les faillites qui commencent à se multiplier. Ed. Mardaga - 190 pages Daniel Bastié

L’ACTIVATION COMPORTEMENTALE On a beaucoup parlé de problèmes post-Covid19. Notamment, en évoquant la dépression, un fléau qui frappe les sociétés modernes avec une puissance mal évaluée par beaucoup. La dépression taraude et nuit au comportement. Il s’agit de cette impression de nuire à soi-même, d’avoir perdu le goût de vivre, de se trouver enlisé sous une pyramide de problèmes insurmontables et d’être écrasé par le poids de la solitude, de l’abandon ou du harcèlement. Pour soigner ces troubles, les traitements se cristallisent sur l’approche psychique ou médicamenteuse. Après un cadastre des connaissances actuelles en la matière, Sylvie Blairy, Céline Baeyens et Aurélie Wagener privilégient des actions qui portent sur l’activation comportementale et les évitements. Leur livre présente des stratégies d’intervention pour pallier aux difficultés vécues par leurs patients. En résumé, l’activation mentale consiste à augmenter l’engagement dans des activités associées à un sentiment de plaisir et/ou de maîtrise de la tâche à accomplir et à diminuer l’engagement dans des comport-ements qui maintiennent les affects négatifs ou qui en augmentent les risques. Constat qui importe de planifier des activités, de veiller à la reconstruction cognitive et de revoir certains pans du comportement. Bannir la rumination mentale : voilà l’objectif ! Ed. Mardaga – 286 pages Paul Huet


LA DEMOISELLE À L’ÉVENTAIL Entière, Raphaëlle entend bien se vouer à sa passion. Pour elle, la photographie est un viatique depuis la mort de sa mère et le temps passé à veiller sur ses sœurs et frères. Cette fois, à vingt-trois ans, elle a décidé de déployer ses ailes et de vivre pleinement. Une rencontre fortuite bouscule son quotidien. Sacha Aubanel, son écrivain préféré, est de passage à Menton et, séduit par sa fraîcheur autant que par sa fragilité, lui suggère de le guider à travers les quartiers de la ville. Conquise, elle accepte sans conditions. De ces heures éphémères naît un sentiment tout particulier, presque magique, avec un basculement vers quelque chose de beaucoup plus profond et de densément intime. Mais voilà, le cœur de l’homme est déjà pris ailleurs, lié à une belle journaliste à l’avenir prometteur et au présent nuancé ! Peut-on vivre une passion a priori contrariée ou se voir en cachette ? Lyliane Mosca échappe aux stéréotypes et évite de narrer un ménage à trois. Elle raconte le vécu de l’un et l’autre, géographiquement distanciés, avec les naturelles évolutions de situation, les épreuves qui se dressent et les révélations qui éclatent. Dans de telles conditions, les rêves sont-ils à même de prendre chair ? Même si le chemin du bonheur se barde d’embûches, le destin unit celle et celui qui doivent convoler. La demoiselle du Sud et l’homme du Nord sauront-ils taire leurs craintes et afficher leurs désirs ? Ed. Presses de la Cité – 313 pages Daniel Bastié

LES ENFANTS DE VAL FLEURI Damien et Marion ont grandi dans le merveilleux domaine de Val Fleuri, à Anduze, entre vignes et garrigue. Si leurs parents ne trouvaient pas leurs jeux d’enfants contraires, ceux du garçon n’apprécient pas maintenant de le voir flirter avec la fille de leur métayer. Qu’importe, car tous deux refusent de céder à la pression et, loin des regards, se retrouvent en cachette. L’année 1936 change radicalement leur destin. En effet, le papa de Damien a l’idée d’utiliser la terre argileuse d’une partie de la propriété pour produire des vases horticoles. Le succès se trouve au rendez-vous. Durant trente ans, les deux familles se croisent et se séparent, liées par un grand secret. Christian Laborie évoque la vie passée et nous parle d’une époque que la majorité d’entre-nous n’a pas connue. A travers un récit passionnant, il évoque l’évolution de la société et la quête d’une vérité troublante. A son accoutumée, il aime mêler l’histoire de familles que tout oppose et que, malgré tout, la vie rapproche. Faite de bonheurs et de hasards malheureux, cette dernière tisse ses liens ténus et nous emporte là où elle l’entend. Il s’agit d’une chronique, avec ses hauts et ses bas, ses moments forts et ceux qui le sont moins, et un amour plus fort que tout. Une brique qui fait presque six cents pages et qui se lit d’une traite ! Ed. Presses de la Cité – 599 pages Daniel Bastié


MONSTRES DE MAISON Voilà une drôle de maison ! Lorsque la nuit l’encapuchonne de son drap opaque, tout se met à bouger. Les murs s’animent et des créatures peuplent l’espace des couloirs, du salon, de la cuisine, de la salle de bains. Il s’agit de monstres terrifiants. Parmi eux se tient Crissgrif. Il aime se carrer près de la porte d’entrée. Sur son crâne poussent des serpents. Quant à ses jambes, elles ressemblent à des tentacules crochus. Ses amis n’ont rien à lui envier. Il y a Cuisinosaure, Sluuurp, Médusa, Bog, Coucoupé et Spiro. Chacun occupe une pièce de l’habitation et disparaît dès que se pointe l’aube. Lola tremble dans son lit avant de s’endormir et se pelotonne contre son chat Haricot. Même en y mettant de la bonne volonté, elle sait que tout possède une explication. Heureusement, il n’y a aucun monstre dans sa chambre. Ni le jour ni la nuit. Ouf ! Eleonora Marton est une auteure-illustratrice italienne reconnue pour son talent et son imagination. Avec « Monstres de maison », elle se joue des peurs enfantines et invite chacun à réfléchir sur le pourquoi de ses frayeurs. Finalement, ne s’agit-il pas tout simplement d’objets domestiques qui prennent une apparence fantasmagorique lorsqu’ils sont baignés dans l’obscurité ? En somme, rien de bien inquiétant, si ce n’est le produit de l’imagination qui carbure. Voilà une promenade fantasmagorique au sein de lieux connus pour apprivoiser les angoisses, appréhender les différentes perceptions, rire et s’amuser tout en apprenant à grandir. Le livre se termine par la phrase : ça y est, j’ai enfin compris ! Moi aussi ! Ed. Grasset-Jeunesse – 48 pages Amélie Collard

APOLLINE ET LA VALLÉE DE L’ESPOIR La vallée de l’espoir existe vraiment. Il s’agit d’un camp de quarantaine destiné aux malades de la lèpre. A côté de personnes obligées de s’isoler, on découvre d’anciens patients aujourd’hui guéris et qui ont décidé de rester sur place pour y couler des jours heureux. Contrairement à ce que certains peuvent croire, il n’est pas question d’un endroit sordide, mais d’un lieu où règne l’entraide et la fraternité. Disons : où il fait bon vivre malgré la contamination ! Heng Swee Lim a rencontré ces gens et l’idée lui est venue de raconter une fiction autour d’une petite fille prénommée Apolline. Celle-ci voit son univers s’assombrir avec la venue d’un gros nuage. Loin d’être affecté par l’ombre qu’il projette sur la région, ce dernier paraît déterminé à ne pas bouger. La gamine tente tous les moyens pour le déloger : jet de cailloux, supplications, pleurs, menaces, imprécations… Le géant dodu refuse de bouger. En fin de compte, elle essaie l’amitié et … ça marche ! Réalisé avec une économie de traits et dans un presque noir et blanc parfait (sauf quelques taches de couleur !), cet ouvrage s’adresse aux enfants et leur fait saisir à quel point il importe d’agiter la clochette de la générosité pour progresser. Un livre plein d’espoir et qui donne confiance en nos capacités à réagir ! Ed. Grasset Jeunesse – 48 pages Daniel Bastié


INGÉRABLE OU ATYPIQUE ? Les enfants se ressemblent, mais ne sont jamais pareils ! Il y a aussi ceux qui demeurent inclassables, qu’on appelle autistes, atypiques, zèbres, … Des mots qui indiquent le fossé qui les séparent de leurs condisciples d’école. La question qui se pose est celle-ci : Comment faire grandir celle ou celui qui n’entre dans aucune case, qui se distingue par son comportement et que la société entend étiqueter à n’importe quel prix ? Claire Stride signe un ouvrage qui ambitionne d’ouvrir certaines portes et d’apprendre aux adultes à gérer cette différence. En se basant sur son vécu d’enfant atypique, l’auteure propose une méthode qui prône une acceptation et un accompagnement idoines. Elle entend mettre un terme à la culpabilité, à la solitude, au mythe du parent parfait et à la crainte d’être jugé par autrui. Elle a créé un coaching à son image, en apprenant à se connaître et à se regarder telle qu’elle est, sans a priori. Dans ce livre, elle a rassemblé des anecdotes, des instants vécus, des informations médicales et une kyrielle de souvenirs qui font que les chapitres se déplient comme une malle au trésor. Il existe tant de façons d’améliorer le quotidien que cela en devient une nécessité pour tous : la famille, les amis, les compagnons de classe, les voisins, ... Travailler avec des profils de gosses atypiques ou autistes revient à pratiquer de la dentelle rare, avec énormément de minutie. Il s’agit de tout un art ! Bien entendu, il n’existe aucune panacée, mais chaque leçon à retirer mérite d’être tentée. Ed. Desclée de Brouwer – 212 pages Daniel Bastié

SONGES DU TEMPS « Penser, vivre, être présent au monde, c'est essayer d'écouter-voir ce qui monte du fond des temps, se laisser troubler par des songes venus d'ailleurs, d'infiniment plus loin que soi, et cependant nous concernant au plus intime. » En méditant sur les fêtes, en parcourant les saisons d'un hiver à un autre, de l'Avent à la Toussaint, en s'arrêtant aux bords des jours les plus ordinaires comme des plus irradiés de mystère, en traversant aussi quelques nuits, étoilées ou obscures - Sylvie Germain donne au poids du temps un relief inédit. Docteur en philosophie, Prix Femina en 1989, Prix des Libraires religieux 1997, Sylvie Germain est l'auteure de plus d'une trentaine d'ouvrages, parmi lesquels : « Le Livre des nuits », « Les Échos du silence » et « À la table des hommes ». Son dernier roman, « Le vent reprend ses tours » est paru chez Albin Michel en 2019. Ed. Desclée de Brouwer – 120 pages Sam Mas


PRÉNOM MARLÈNE La quête d’identité est la base de ce roman signé Jean Ghyssens, un homme curieux de tout et inlassable randonneur. Avec un habile art de la description, il aime décrire les paysages qu’il découvre et s’arrête, le temps d’une histoire, afin de peaufiner la trame d’un récit qu’il développera plus tard devant le clavier de son ordinateur. Avec ce livre aux accents nostalgiques, il revient sur le parcours d’une héroïne née de parents yougoslaves, les Doubinsky, dans le Pas-de-Calais. Des gens qui ne parlent pas la langue nationale. Une voisine se charge de déclarer l’enfant à la mairie sous le nom Kaufman, celui du mari décédé de sa propre mère. Sans le savoir, elle enclenche une mécanique qui ne s’arrêtera que de nombreuses années plus tard. Inspiré librement de faits authentiques, ce roman baigne dans une atmosphère de fiction et entraîne le lecteur au cœur de la seconde guerre mondiale. Passé recherché, méprises, hontes, joies, histoire occultée, l’auteur développe successivement différents thèmes tout en ne perdant jamais de vue les difficultés rencontrées au quotidien par les migrants pour s’intégrer dans une société alors repliée sur elle-même, malgré le fait qu’elle réclame de plus en plus de bras étrangers pour accomplir une série de tâches rebutantes pour les nationaux. Ed. Marcel Dricot-164 pages Sam Mas

MA VOISINE CONNAÎTRAIT-ELLE FLAUBERT ? Voilà quelques jours que je me suis mis à relire « L’éducation sentimentale de Flaubert, vingt-cinq ans -à quelques mois près- de sa première lecture. Expérience roborative, comme certains se plaisent à utiliser le mot, certes, jouissive -j’ai toujours aimé Flaubert, été rétif à Balzac- avant tout empreinte de nostalgie car, même si je suis conscient du cliché, ce livre m’a sauvé à l’époque. Voilà de quelle manière Denis Riguelle, professeur de français, débute son roman ! Un livre empreint de références littéraires et qui déploie sa passion immodérée pour le grand Gustave, prosateur de premier plan de la seconde moitié du XIXe siècle et qui a marqué la littérature universelle par la profondeur de ses analyses psychologiques, son souci du réalisme, la force de son style et l’acuité de son regard sur la société de son époque. Mais l’idée n’est pas ici de dresser une biographie du fameux écrivain. Plutôt de travailler la relation qui unit un libraire de quartier à sa nouvelle vosine : jeune femme curieuse et mystérieuse. Hanté par la mort de sa sœur, le protagoniste se réfugie dans la lecture et redécouvre une série de chefs-d’œuvre passés. Assez vite, la nouvelle venue qui se prénomme Marie, lui déclare adorer, elle aussi, les ouvrages de Flaubert. Mais peut-il se fier à ce qu’elle raconte ? « Ma voisine connaîtrait-elle Flaubert » se veut un roman désabusé, qui se sert de Namur pour planter le décor. Ed. Marcel Dricot – 244 pages Sam Mas


SOUVENIRS DE VACANCES Malgré un titre qui laisse croire qu’il s’agit d’un carnet de voyages, JeanFrançois Mortehan propose un thriller sur fond de nature sereine, sertie dans des paysages grandioses. L’action se déroule en 1992, alors que les routiers français sont en train de malmener le trafic, en révolte contre l’Etat. JeanRené, professeur liégeois, parvient tant bien que mal à rejoindre sa famille dans un camping méditerranéen. Sur place, les siens font la connaissance des voisins, loin de l’agitation qui secoue l’Hexagone. Alors que l’atmosphère se veut au farniente, il revit malgré lui des souvenirs qu’il espérait avoir bannis à tout jamais. Il s’agit d’un accident survenu une décennie plus tôt dans la pinède. Bientôt, le comportement étrange de ses hôtes l’entraîne à suspecter quelque chose. Même si les mots se bousculent dans son crâne, il tâtonne en vue d’y voir clair. Il se décide alors à investiguer sans donner l’air de quoi que ce soit, avec des manières de parfait amateur. Suspense et frissons pointent au rendez-vous de cette aventure inclassable, qui fait la nique aux traditionnels codes du genre. En forgeant son avis sur la raison, cet anti-héros progresse de découverte en découverte, avant d’être confronté à ce qu’il n’imaginait pas dans ses rêves le plus complexes. Ed. Marcel Dricot – 257 pages Sam Mas

LES GARÇONS DE L’AMOUR L’homosexualité demeure encore trop souvent un sujet tabou, qu’on évite d’évoquer ou qui embarrasse. Même si les gays ont le droit de se marier en Belgique, la France s’y oppose toujours, malgré certaines avancées des mentalités. Traditions et religion pèsent lourd dans le giron des familles. Alors que dire de la situation dans les pays musulmans, où les fautifs sont condamnés à la prison, voire exécutés ? Ghazi Rabihavi est né en Iran et y consacre l’essentiel de son temps à l’écriture. En 1994, sa nouvelle « La fosse » suscite la polémique et il se voit ostracisé. Interdit de publication, il préfère immigrer en GrandeBretagne, afin de vivre librement et de pouvoir s’exprimer sans craindre les couteaux de la censure. Avec « Les garçons de l’amour », il raconte l’histoire de Djamil, fils unique d’un riche propriétaire de la région d’Abadan, qui a joui d’une formation scolaire brillante dans un milieu privilégié et qui rêve de devenir danseur. Au cours d’un mariage auquel il est convié, il croise la route de Nadji. Coup de foudre réciproque entre les deux jeunes hommes et désapprobation violente des parents. Avec une plume incisive, l’auteur revient également sur la dureté de la révolution islamique, avec la confiscation d’une grande partie des libertés, et achève son récit dans le cadre de la guerre fratricide qui a opposé son pays à l’Irak voisin. Bien entendu, il cristallise son écriture sur les tourtereaux, conscients des conséquences de leur passion. Sans pudeur particulière, il traite cette union avec un réalisme un peu cru et des descriptions audacieuses. Ecrit en persan, ce livre est ici traduit pour la première fois en français et reste, bien sûr, voué aux gémonies dans le golfe persique. Ed. Serge Safran - 425 pages Daniel Bastié


PLEURE, TU PISSERAS MOINS Voilà une autobiographie sans ronds de jambe ! Dawa Ma, ancien mannequin pour de grandes maisons et de nombreuses revues (L’Oreal, Dior, Chevignon, Cartier, Sonia Rickyel, Jean Paul Gautier,Kenzo, Stella Mc Cartney, Zucca, Tsumori Chisato, Le coq Sportif, Adidas, Everlast, Morgan,Virgin, Makin jan Ma, Elle, Marie-Claire. Harper's bazaar, etc.), revient sur son passé. De nationalité française, elle vit actuellement à Londres et s’épanche sans pudeur. Elle évoque une dépression abyssale qui l’a assaillie voilà quelques années, avec son cortège de souffrances et de déchirements, de révoltes, d’analyses, d’imprécations, et de quêtes philosophiques. Sans craindre les mots, elle parle également de ses addictions et de ses automutilations. Avec une force interne et l’aide de tiers, elle a réussi à surmonter ce cap difficile et à ressusciter. Durant la période de confinement liée à la crise du covid-19, elle a pris le temps de réfléchir à son vécu et à revenir sur les grandes étapes de celui-ci. Cet arrêt forcé lui a surtout permis de se replonger dans une enfance difficile et à refouler une kyrielle de souvenirs douloureux. Coucher tout cela par écrit a été salutaire. Ce premier livre n’a aucune vocation de susciter la compassion à son égard ou d’inviter le public à la plaindre. Elle sait que la réussite professionnelle lui a permis de renaître à ses propres yeux comme à ceux des autres. Avant tout, elle a souhaité se libérer d’un poids et témoigner, le tout avec un besoin de résilience bien compréhensif. Ed. MEO – 312 pages Sam Mas

PAS FAITE POUR Voilà l’histoire de Cécile, professeur de violon, qui se fait larguer par son mec. Pour elle, tout bascule. Alors qu’elle manquait déjà de confiance en elle, la situation ne fait qu’aggraver son état. Seule, elle perd le goût des plaisirs simples et se renfrogne dans une frustration sans fin. Pour son anniversaire, ses copines lui achètent un abonnement qui donne accès à un club de sport. D’abord réticente, elle finit par s’y rendre. S’ouvre alors un univers qu’elle ne connaissait pas. Là, l’amitié d’une monitrice la pousse à mettre ses préjugés en veilleuse et la rencontre avec un régulier de la salle lui permet de se remettre entièrement en question, en revoyant l’image qu’elle se faisait d’elle-même et en se lançant avec simplicité dans une activité qui, jusque là, lui était complètement hermétique. Véronique Adam signe un premier roman bourré d’humour et d’autodérision, qui dresse le portrait d’une trentenaire moderne en proie aux clichés de notre société et en quête de sa propre identité. Ainsi, voir cette jeune femme s'élever de l’insatisfaction et trouver son chemin grâce au sport est absolument réjouissant et captivant. Ed. MEO – 218 pages Sylvie Van Laere


UNE HISTOIRE BELGE Robert Massart a longtemps été professeur de français et cela se sent dans sa manière de rédiger avec une plume qui maîtrise à la perfection la langue de Voltaire. Constat qui ne fige pas son écriture, mais qui lui permet d’évoluer en s’imprégnant des écrivains de son époque, sans pour autant oublier les références au passé. Empreint de belgitude, ce roman donne vie à un trio de personnages caricaturaux et savoureux. En l’occurrence, un enseignant militant des belles lettres et persuadé que sa langue natale est la plus belle au monde, au point de s’engager ouvertement dans un combat permanent pour la défense du français. Le deuxième est flamand, un rien flamingant, et féru de graffitis qu’on peut observer dans les toilettes publiques. Entre eux se glisse une belle Roumaine, serveuse de son état dans un salon huppé pour homosexuels. L’auteur profite de l’écriture pour faire connaître la capitale de la Belgique et … de l’Europe sous un jour loin des stéréotypes pour touristes. Avec lui, on oublie les établissements bondés de clients avides de bière et les cornets de frites, les moules et les Manneken-Pis en pain d’épices. Il préfère présenter une ville en proie à la cacophonie communautaire, où Belges du Nord et du Sud s’empoignent via leurs élus et nient l’unité nationale. Bien entendu, la causticité est ici privilégiée à la diatribe virulente. Ed. MEO – 196 pages Daniel Bastié

À PROPOS DE PRE Steve Prefontaine est toujours considéré comme l’un des plus grands coureurs de fond américains. Il possédait un style unique qui consistait à prendre la tête de la course pour ne jamais la lâcher. De la sorte, il a pu gagner cent vingt-huit des cent cinquante-trois courses auxquelles il a participé. Un accident de voiture, à l’âge de vingtquatre ans, a mis un terme à son existence. Daniel Charneux revient sur ce sportif hors-normes par le biais de Pete Miller, un jogger vieillissant. Arrivé à l’heure de la retraite, ce dernier décide de consigner ses souvenir par écrit et de raconter l’histoire des EtatsUnis, des eighties aux seventies, par le trou de la serrure et en suivant le parcours de celui que ses fans surnommaient Pre. Au fil des pages, on rencontre un homme simple, qui professait une haute opinion de sa discipline sportive. Selon Steve, gagner importait certes, mais tout dépendait de la manière. Un livre à la première personne, mené comme un journal intime et qui mélange la grande et la petite Histoire. Un récit qui plaira aux amateurs de sports autant qu’aux nostalgiques d’une époque que les moins de cinquante ans n’ont pas connue ! Ed. MEO – 148 pages Daniel Bastié


LA LIGNE BLANCHE Vingt-trois artistes belges, français, turcs, italiens et congolais ont répondu à l’invitation d’Antoine Wauters, qui leur a demandés de rédiger un texte en s’interrogeant sur la signification de « la ligne blanche ». Qu’évoque-t-elle à leurs yeux, au fond d’eux-mêmes, dans leur intimité, dans le reflet des souvenirs ou au présent ? Retrait, brèche, soustraction, trait d’union, elle s’assimile parfois à la perfection ou à un lieu magique abstrait de toute contingence. Egalement, imperfection, elle devient un faix à traîner. Mais, le plus souvent, elle se métamorphose en portée, sorte de cordon et support pour accueillir l’écriture. Au fil des textes (plus ou moins courts), le lecteur se familiarise avec des états d’esprit et des idées qui ricochent pour voltiger avec passion et ardeur, afin de se transformer en prose cohérente ou en poésie pure. Des instants suspendus à la croisée des genres et des styles. Un livre façonné à quarante-six mains et dû au talent de Philippe Marzewski, Serge Delaive, Aline Dethise, Annick Walachniewicz, Carl Norac, Laurent Demoulin, Vincent Tholomé, Pascal Leclercq, Nathalie Skowronck, Aurélie William Levaux, Aliette Gritz, Carole Zalberg, Fixton Mwanza Mujila, Myriam Leroy, Inatello Passi, Karel Logist, Alexis Alvarez Barbosa, Lisette Lombé, Julie Remacle, Anne Versaille, Yadel, Ysaline Parisis et David Giannoni. Ed. L’Arbre à paroles – 134pages André Metzinger

PAROLES DONNÉES, PAROLES PERDUES ? La crise du coronavirus a mis en exergue les profondes inégalités sociales et sanitaires qui frappent nos concitoyens. Réalisé avant le confinement, « Paroles données, paroles perdues » se veut le reflet de la réalité telle qu’elle est ressentie par les acteurs qui officient dans les CPAS, les personnes précarisées qui vivent à la rue et plusieurs quidams présents à Bruxelles. Un appel à l’action face à l’urgence. Un travail de sélection et de mise en forme qui résulte de conversations réalisées durant plusieurs mois et enrichi par le regard neutre des concepteurs du projet. Dictionnaire certes incomplet et glossaire fragmenté, ce recueil né de rencontres éparses convie à la réflexion et au dialogue. Il fait le pari d’une hybridité productive et relance le débat sur le sens d’accepter ou non un monde où règnent les ségrégations et la précarité. A celui ou à celle qui s’interroge sur la réalité de l’expérience des personnes en difficultés matérielles, voilà quarante manières d’entrer en mal-logement. Solutions, pistes, recettes, ébauches, règles, … tout est déposé sur la table pour établir une conversation à hauteur d’épaules en vue d’un résultat probant ou, du moins, d’un potentiel changement des mentalités. Ed. Maelstöm -268 pages Paul Huet


JOHNNY HALLYDAY, FEMMES ET INFLUENCE On a énormément écrit concernant Johnny Hallyday et fort est de constater que la littérature abonde. Frédéric Quinonero a décidé d’aborder son idole par le truchement des femmes qu’il a aimées, voire épousées. Abandonné fort jeune par ses parents et confié à une tante autoritaire, il a longtemps cherché à fonder une famille : vraie, stable et protectrice. Si personne ne peut nier la véritable force dont il a fait preuve sur le plan professionnel, ses proches soulignent une extrême fragilité dans ses rapports avec le sexe féminin. Chose qui ne l’a jamais empêché de vivre ses amours à cent à l’heure, d’être capable d’infidélités ou de se dévouer complètement pour l’élue de son cœur. Toutes celles qu’il a adorées ont souhaité le modeler à leur image. Sylvie Vartan pose cet étonnant témoignage : A chaque mariage, Johnny s’adaptait et se fondait dans le moule attendu. Elle a été sa passion de jeunesse, celle avec laquelle il a eu un fils : l’artiste David Hallyday. D’autres unions ont fait les beaux titres de la presse people : Babeth Étienne, la comédienne Nathalie Baye (hyménée dont est issue l’actrice Laura Smet), Adeline Blondiau et Laeticia Boudou. D’un certain point de vue, l’artiste reste l’un des plus grands de la scène française, encensé par une communauté de fans et titulaire de nombreux disques d’or. Néanmoins, l’homme demeure un mystère. C’est précisément ce mystère que l’auteur a tenté de résoudre en donnant la parole à des témoins qui l’ont côtoyé et qui ont bien connu ses épouses successives : Jean Renard, Jean-Marie Périer, Line Renaud, Pierre Billon, etc. Evidemment, la recherche de l’amour absolu a toujours eu un coût. Au fil des pages, on évoque également des amourettes ou des passions plus ou moins physiques avec Karen Allen, Corynne Charby, Gisèle Galante, Léah jeune mannequin canadien, Nanette Workman, … Dommage que sa dernière histoire d’amour se soit métamorphosée en histoire d’héritage, divisant les Français à son propos ! Ed. Mareuil – 206 pages Paul Huet

UNE MORT PAS TRÈS CATHOLIQUE Louvain-la-Ville est une ville artificielle, créée pour accueillir des étudiants venus de tous les coins du royaume. Une cité de briques rouges qui ne dort jamais, secouée de septembre à juin par les fêtes et désertée en juillet comme en août. Pourtant, un cadavre est découvert derrière une porte verrouillée de l’intérieur. Y a-t-il eu suicide ? Toutefois, certains indices laissent à croire qu’il s’agit d’un meurtre. Un flic à la retraite et un inspecteur novice arpentent les trottoirs pour tenter de résoudre ce qui, à leurs yeux, n’a rien de banal. Agnès Dumont et Patrick Dupuis signent un polar atypique aux accents bien de chez nous. Le rythme est soutenu, l’intrigue prenante et la description des protagonistes assez réussie. Fort rapidement, les hypothèses se multiplient. Se trouve-t-on confronté à un voleur dérangé dans sa besogne ou à un tueur missionné ? Rien n’est prévisible et il faut attendre la fin de chaque chapitre pour voir évoluer les choses. « Une mort pas très catholique » se veut, au final, un livre qu’on lit avec plaisir, tout en découvrant, pour ceux qui ne la connaissent pas, la singulière Louvain-laNeuve, sise non loin de Wavre et d’Ottignies. Ed. Weyrich – 188 pages Paul Huet


BRISBANE Evgueni Vodolazkine est né à Kiev en 1964 et fait partie de la nouvelle génération d’écrivains nourris aux souvenirs de l’ère soviétique. Spécialiste de la littérature médiévale, il est chercheur à Saint-Pétersbourg. Plusieurs de ses romans ont été traduits en français, dont « L’aviateur » et « Les quatre vies d’Arseni » Cette fois, il nous raconte l’histoire de Gleb Ianovski, guitariste virtuose qui découvre être atteint de la maladie de Parkinson. Un handicap sérieux s’il souhaite poursuivre son art. Nestor, un ami rencontré par hasard, suggère de rédiger sa biographie, afin de renouer avec un passé pas toujours heureux. L’opportunité surtout de rassembler des bribes de souvenirs et de les remettre en ordre. Une adolescente, également malade et hyper douée, intervient en cours d’exécution. L’auteur propose ici un roman choral, dans lequel les voix se mêlent, les mains se croisent et les émotions se chevauchent. Au fil des chapitres, le lecteur est baigné par une musique qui semble émerger du fond des arts, par un trouble palpable et un mal déterminé qui lamine les habitudes. Au-delà du verbe, Evgueni Vodolazkine fait œuvre de précision, à l’écriture en retenue et poétique, qui souligne ce que chacun possède d’humanité pour vivre, créer, souffler et repousser l’inévitable. Ed. des Syrtes – 324 pages André Metzinger

LES PETROV, LA GRIPPE, ETC. Qui sont les Petrov ? Alexeï Salkinov nous raconte quelques jours de leur existence fort peu ordinaire. Une tribu lambda avec une succession de hauts et de bas, de coups de mou et des rêves nimbés de vodka. Petrov, mécanicien et auteur raté de bédé, noie sa fièvre dans la boisson, en compagnie d’un ami retrouvé depuis fraîche date. De son côté, Petrova, son ancienne épouse, souffre d’une grippe peu commune et est alitée. La force de Salkinov est de nous balader à travers des lieux communs et de souligner la pérennité de petits éléments sur la ligne du temps de toute une vie. Entre réalité et espoirs arrosés, il dresse le portrait d’une Russie moderne en proie à la sclérose des ambitions, assujettie à la tradition et à l’alcool facile, le tout avec une verve digne de Gogol et de Boulgakov, ravivant un folklore un peu oublié et mal connu en France comme en Belgique. Né en 1978, il est la révélation russe de ces dernières années et lauréat de plusieurs prix dans son pays comme ailleurs. Avec un humour décapant, il raconte une suite d’anecdotes dignes d’un long métrage. Un roman à découvrir sans hésitation pour se distraire autant que pour se dépayser ! Ed. des Syrtes – 309 pages André Metzinger


L’ÉCUYER DU ROI En attentant d’être adoubé par ses pairs, le destin du jeune Tiuri bascule le jour où il descelle une mystérieuse lettre munie de trois sceaux. A quinze ans, rien n’est encore joué et, dans un monde bourrelé de violence, il sait qu’il doit vaincre ses peurs et faire ses preuves. Il ne se doute pas encore qu’il va devoir affronter une menace bien plus périlleuse que tout ce qu’il n’osait pas imaginer dans ses cauchemars les plus lugubres. Entre prophéties ancestrales, pouvoirs magiques et adjuvants capricieux, le protagoniste aura maille à partir avec ceux qui croiseront son chemin, obligé de tout abandonner derrière lui et de ne penser à rien d’autre qu’à la mission à laquelle il s’est investi. L’avenir du royaume dépendra de la réussite ou non de sa quête. Netflix a adapté le roman de Tonke Dragt pour en faire une série à succès, diffusée dès le 20 mars 2020 et suivie par des millions de spectateurs durant la période de confinement. Au vu de l’accueil chaleureux de cette première saison, une seconde est d’ores et déjà annoncée. Il s’agit bien entendu d’héroic fantasy, un peu comme si la célèbre plateforme avait voulu concurrencer Game of the throne sur son propre terrain. Rivières infranchissables, brigands, embuscades, alliés inespérés et ennemis cruels : voilà le fond de commerce de cet opus qui s’adresse aux jeunes lecteurs férus d’anticipation, de carambolages et de castagne. Les aînés songent vaguement à Willow, le long métrage mis en chantier voilà une trentaine d’années par Ron Howard alors au pinacle de sa forme. Ed. Gallimard Jeunesse – 522 pages Daniel Bastié

HÔTEL CASTELLANA Nous sommes en 1957. Daniel a l’âge de tous les possibles, des énormes projets à mettre en exécution et est animé de rêves à revendre. Il se passionne pour la photographie et découvre l’Espagne à travers l’objectif de son appareil photographique. Un pays baigné de lumière incandescente et sculpté par de magnifiques paysages. Il loge dans le quartier réservé aux citoyens américains, loin de la réalité de la population, écrasée par les fantômes de la guerre civile et broyée par des années de Franquisme. Anna travaille dans l’hôtel où résident les étrangers et, bien vite, son regard est attiré par le jeune homme qui, de son côté, éprouve une sympathie réciproque. Bien entendu, la vie met tout en œuvre pour les rapprocher et les faire s’aimer tendrement. A son contact, il découvre les coulisses d’une nation meurtrie, ainsi que le poids de la dictature. Alors que les lecteurs aimeraient croire à leur amour, il se surprennent à songer que beaucoup de choses opposent les protagonistes et que la peur et le mensonge demeurent des fléaux qui corrompent tout …ou presque ! Avec un ton juste, Ruta Sepetys revient sur un pan de l’Histoire mal connu en France autant qu’en Belgique. Assurément, le talent de l’auteure fait qu’on s’attache aisément aux personnages et qu’on les suit sans déplaisir. L’émotion clôt ce livre à lire sans restriction ! Ed. Gallimard Jeunesse – 587 pages Daniel Bastié


NOUVELLE : GLOUPS Elle est entrée d’un pas décidé, a regardé rapidement autour d’elle, m’a vu, m’a reconnu, a souri et s’est dirigée vers moi. Elle m’a tendu la main. - Vincent ? Je suis sous le choc. Quoi, c’est Lorraine, cette chose ? Bien sûr qu’elle m’a reconnu ! MA photo était récente et pas trafiquée ! J’ai failli répondre : - Non, vous faites erreur. Mais ma politesse naturelle, qui m’a déjà desservi bien des fois, a mis dans ma bouche : - Bonjour Lorraine. Je me suis levé, lui ai serré la main, et nous nous sommes assis face à face après qu’elle ait ôté son manteau qu’elle a plié soigneusement avant de le déposer sur le dossier de sa chaise. Ses bras et sa généreuse poitrine prennent place sur la table. Elle me détaille sans en avoir l’air et semble satisfaite. Elle peut ! Il n’y a pas beaucoup d’hommes de soixante ans qui soient aussi avenants que moi. Il est vrai que je prends grand soin de ma personne. Le garçon s’approche pour prendre notre commande. Elle sourit de toutes ses dents et minaude. - Et si nous prenions une coupe de champagne pour fêter notre rencontre en live? J’avale de travers, mon regard croise celui du garçon où je lis une solidarité masculine. Une fois encore, le gentleman s’empresse : - C’est une excellente idée Lorraine ! Le garçon sourit poliment. - Je vous apporte cela tout de suite. Et il s’en va, goguenard, raconter en cuisine qu’il y a un mec qui pourrait se payer une belle nana, qui offre du champagne à un boudin. Pendant ce temps, le boudin, pardon, Lorraine, continue ses approches. - Ca fait tout drôle de se voir… C’est pas pareil que de s’écrire… « Tu l’as dit » Pensé-je in petto. - En effet, réponds-je d’un ton neutre. - Donc, tu es architecte. Quel beau métier ! - Oui… Et toi, prof. d’Anglais ? C’est une noble tâche d’enseigner aux futurs dirigeants de notre pays. - Heu, on voit que tu ne connais pas les jeunes d’aujourd’hui ! Ils ne s’intéressent à rien. Sans parler de leur manque de respect ! Je t’assure que parfois j’ai envie de tout quitter et de m’inscrire au chômage. Je soupire, de plus en plus accablé par cette entrevue. Heureusement, je ne l’ai pas invitée au restaurant! Cette pensée me réconforte. Une petite demi-heure de patience et je me barre. Le garçon apporte pompeusement nos deux coupes, les dépose devant nous et traîne un peu dans l’espoir de saisir quelques bribes de conversation, puis s’en va servir une autre table. Lorraine lève sa coupe en me regardant dans les yeux. - Salute, fortuna, amore ! Comme disent les Italiens. Je bois une gorgée, en essayant de ne pas avaler de travers, et lui réponds évasivement : - Ah, ils disent cela les Italiens… C’est joli. Notre conversation atteint des sommets !Très à l’aise, Lorraine survole la politique, la météo, pose quelques questions sur ma famille et mes goûts culinaires et puis, estimant que nous sommes maintenant intimes, me demande d’un ton qui se veut détaché : - Tu as rencontré beaucoup de femmes sur « Cœurs à prendre » ? Pris au dépourvu, je réponds n’importe quoi : - Bah, non, pas vraiment… Et toi ? - Oh moi, je vois deux hommes par semaine depuis des mois, mais je n’ai pas de chance (soupir), ils ne correspondent jamais aux profils qu’ils mettent sur le site. - Que veux-tu dire ? Dis-je, intéressé. - Et bien, ils sont plus vieux que l’âge qu’ils indiquent, et en général ils mettent uniquement une photo du visage… J’te dis pas à quoi ils ressemblent plus bas ! Bedonnants, mous, mal habillés. C’est toujours moi qui refuse une deuxième rencontre. Je rigole in petto. Ce sera une première pour elle ! N’y tenant plus, je regarde l’heure nerveusement, et m’exclame : - Oh comme le temps passe vite ! Je dois te quitter, j’ai un rendez-vous professionnel auquel je ne puis arriver en retard. Et je lève la main vers le garçon pour demander l’addition. Lorraine sourit gentiment et acquiesce.


- Bien sûr, je comprends. Allons-y. Elle se lève, enfile son manteau, saisit son sac à main, et me précède vers la sortie. Arrivés sur le trottoir, elle me regarde d’un air contrit et me dit : - Merci Vincent, j’ai beaucoup apprécié notre rencontre, mais il vaut mieux ne pas se revoir, tu n’es pas mon type… Je reste statufié, sans voix, elle prend cela pour une immense déception et, généreuse, me donne un bisou sur la joue.

Extrait de « Jeux de dupes » Silvana Minchella

DÉCÈS DE GISÈLE HALIMI Une grande dame vient de s’éteindre. Gisèle Halimi était une figure prégnante du féminisme. Née 1927 en Tunisie, elle a grandi à la Goulette. Très vite, elle se révolte contre la situation des filles, moins considérées que les garçons. Ses études de droit et de lettres à Paris lui permettent d’entrer au Barreau de Tunis en 1949, date à laquelle elle épouse Paul Halimi, dont elle prend le nom. Par ses attitudes, elle défend des causes alors jugées difficiles. En 1972, elle passe à la télévision dans le cadre du procès de Bobigny pour faire relaxer une jeune fille de seize ans qui a avorté après un viol. A nouveau, elle retrouve la une des actualités en 1978 en représentant deux touristes belges violées lors de vacances passées en France. En 1980, sa plaidoirie annonce la reconnaissance du viol comme crime. Proche de Jean-Paul Sartre et de Simone de Beauvoir, elle contribue a fonder le mouvement pour la dépénalisation de l’avortement. Amélie Collard


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