BRUXELLES CULTURE 5 août 2022 Brussels Diffusion asbl Contact et abonnement gratuit : pressculture4@gmail.com
RENCONTRE : LEÏLA ZERHOUNI
Rencontre : Leïla Zerhouni Née près du Parc de Mariemont et enseignante, Leïla Zerhouni est une nouvelle venue dans l’univers de la littérature. Après quelques nouvelles aux éditions Lamiroy, elle vient de publier son premier roman aux Editions M.E.O. Rencontre. Qui êtes-vous ? Née d’un couple belgo-algérien, j’ai grandi à La Louvière. Ma mère, originaire de Morlanwelz, était professeure d’anglais et de russe à Charleroi. J’ai suivi sa voie et j’enseigne à présent l’anglais et l’allemand dans une école de promotion sociale à Bruxelles. Mon métier m’enrichit énormément, car il me permet de côtoyer des élèves de cultures très différentes, toujours dans le respect et la bonne humeur. J’adore ! Vous avez été publiée aux Editions Lamiroy, racontez-nous la genèse de cette rencontre littéraire. C’est un concours de circonstances qui m’a permis de publier. Je me rendais chaque semaine dans une magnifique librairie, « Mot Passant », à Jette. Chaque dimanche, des auteurs inspirants sont invités autour d’une table pour parler de leur dernier ouvrage. A l’entrée trônaient des livres de petit format : les opuscules. Je me suis dit : eh bien, cinq mille mots, pourquoi pas ? et me suis lancé un défi sans trop y croire. J’ai envoyé ma première nouvelle un lundi soir et le mardi matin, je recevais un mail d’Eric Lamiroy. Un moment très émouvant. Avec « Femmes empêchées », vous êtes passée aux Editions M.E.O. Quelle est cette maison d’édition et pourquoi ce changement d’éditeur ? Les éditions Lamiroy publient essentiellement des nouvelles et donc très peu de romans. Entretemps, j’avais publié une nouvelle poétique (Abysse) aux éditions Bleu d’Encre de Claude Donnay. Or, il se trouve que Claude Donnay, poète aux écrits de grande qualité, est également auteur de romans chez M.E.O. C’est ainsi que j’ai entendu parler pour la première fois de cette maison d’édition bruxelloise. J’ai donc envoyé le manuscrit de mon premier roman chez Gérard Adam … et je ne le regrette pas ! J’ai découvert un éditeur très professionnel qui prodigue d’excellents conseils à ses auteurs et qui travaille énormément pour les faire connaitre. Chose extrêmement difficile face au rouleau-compresseur des grandes maisons d’édition françaises. A l’origine, M.E.O. publiait des traductions d’œuvres d’écrivains bosniens et croates, avant d’élargir son catalogue à la littérature générale, avec quelques noms d’auteurs belges : Daniel Soil, Liliane Schraûwen, Evelyne Wilwerth, Aurélien Dony, Martine Rouhart ou, encore, Isabelle Bilecki. Le titre « Femmes empêchées » peut paraître intrigant. De quoi parle ce roman ? Du désir, du non-désir de maternité. Et pour certaines femmes, à certains moments de leur vie, de l’impossibilité de devenir mère. C’est un sujet qui me touche beaucoup. Les Femmes Empêchées sont ces femmes qui ne peuvent aller au bout de leur maternité. Le roman démarre sur la vie d’Ania, enfant née sous X et taraudée par sa quête d’identité. Au fil du livre, le lecteur découvrira l’histoire de sa mère et d’autres femmes empêchées, chacune à leur manière et pour diverses raisons. L’intrigue se déroule dans une librairie des Ardennes belges où les villageois viennent épancher leur cœur. D’où la couverture. Dans la deuxième partie, le lecteur voyagera en Algérie. Y a-t-il une part d’autobiographie dans cet écrit ou de souvenirs personnels ? Quelles sont vos sources ? Il s’agit d’une fiction mais, bien sûr, elle a sans doute été nourrie par quelques rencontres. La part de l’inconscient …
Comment passe-t-on de la nouvelle au roman ? Quelles sont les exigences de l’une et de l’autre technique ? Je considère le roman comme une forme très exigeante, car il faut tenir en l’haleine sur un nombre plus élevé de pages et imaginer une structure qui tienne la route. La nouvelle est plus ramassée, mais aucun temps mort n’est permis ! En général, ce texte court se termine sur une chute qui crée la surprise. Je ne me serais pas lancée dans l’écriture d’un roman si je n’avais pas publié une nouvelle auparavant, un genre que j’apprécie beaucoup. Existe-il un fil conducteur qui relie tous ces ouvrages ? Il faut que l’histoire me parle et que les personnages me touchent en raison de leur fragilité. Peut-on vous étiqueter écrivaine féministe ou engagée ? J’aime écrire sur des sujets qui m’interpellent. En ce sens, il y a certainement un engagement dans mes écrits. En revanche, je ne m’attribue aucun mérite car il est facile d’écrire dans le confort de son salon, de surcroît dans un pays démocratique. Si l’on parle des femmes, les vraies courageuses sont souvent anonymes et mettent leur vie en danger pour défendre leurs valeurs, leurs droits. Comment ne pas être solidaire ? A quel instant un texte est-il prêt à être livré à l’éditeur ? Il est difficile d’évaluer à quel moment un texte est considéré comme abouti. Souvent, on croit que le texte est terminé, on le laisse reposer, on le relit et … finalement, non, il n’est pas satisfaisant ! Il faut le retravailler jusqu’à ce qu’on ne puisse plus voir les personnages en peinture ! Y a-t-il des auteurs avez lesquels vous entretenez des liens d’amitié ou que vous admirez particulièrement ? Grâce aux opuscules, j’ai rencontré un cercle d’auteurs belges généreux, passionnants et passionnés. Parmi eux, Gaëtan Faucer qui, en plus d’écrire, met en lumière d’autres écrivains, notamment au Carpe Diem, Alain Magerotte qui tient de petites chroniques littéraires sur Secrets de Polichinelle, Eric Allard qui publie le compte-rendu de ses lectures sur Les Belles Phrases ou Patrick Devaux, poète reconnu et membre éminent de l’AREAW. Chacun se soutient, promeut les livres des autres. La plupart des auteurs écrivent pour le plaisir et exercent un autre métier. J’assiste donc, en effet, à la naissance de belles amitiés ! Chez les auteurs de renommée internationale, vivants ou décédés, Eric-Emmanuel Schmitt et Stefan Zweig occupent une place particulière dans mon cœur. J’apprécie aussi beaucoup les écrits de Leïla Slimani et d’Annie Ernaux. Pour vous, qu’est-ce qu’un bon livre ? Un livre qui me touche, qui enrichit ma perception du monde et dont l’auteur a effectué un vrai travail sur la langue. Ce sont mes trois critères. D’où vient l’inspiration ? De la vie, d’un reportage, d’un film, d’un livre, d’une œuvre d’art … Bref, de tous horizons ! Quels sont vos projets ? Je suis en train d’écrire un deuxième roman qui se déroulera en Afrique, un continent souvent oublié et qui me touche beaucoup. Retrouvez Leïla Zerhouni sur le site www.meo-edition.eu Propos recueillis par Daniel Bastié et photo page II de Vincent Vandendriessche
SALON D’ÉTÉ 2022 Comme chaque année, Espace Art Gallery organise un salon d’été. Cette fois, six artistes se sont donné rendez-vous pour dialoguer à travers une série d’œuvres éparses. Leur dénominateur commun : chacun possède un lien étroit avec Bruxelles. Par ordre alphabétique, ils nous parlent de leur technique et de leur rapport avec la capitale. FEDERICO ARIU Quelle technique utilisez-vous ? J’ai toujours été passionné par les images. Adolescent, j’étais déjà cinéphile et je louais régulièrement des VHS pour découvrir autre chose que ce que les programmes télévisés proposaient. Avec la caméra Super 8 que mes parents m’ont offerte, je me suis mis à réaliser des courtsmétrages en autodidacte, entouré d’amis. Des créations dans lesquelles je plaçais le meilleur de moi-même. Pour moi, la caméra est progressivement devenue une extension de mon regard et m’a permis de figer des instants que la mémoire oublie. En ce qui concerne la photographie, j’ai commencé par l’argentique pour continuer en numérique. Je pratique très peu de retouches. Quel rapport entretenez-vous avec Bruxelles ? Je suis né et j’ai grandi à Bruxelles. J’habite depuis une vingtaine d’années dans le quartier des Marolles et je viens de bénéficier de subsides qui me serviront à créer une WebTV qui s’intitulera MarollesTV. Elle verra le jour en septembre 2022. Qu’allez-vous présenter en août 2022 à Espace Art Gallery ? Je présenterai une série de photographies que j’ai saisies lors de différents voyages en Inde, au Burkina Faso, en Thaïlande, au Laos, au Cambodge et au Mexique. Une opportunité de les sortir de mes fardes et d’inviter les Bruxellois qui n’estiveront pas à voyager par leur intermédiaire. Il s’agit essentiellement de paysages et des portraits de personnes croisées le long de la route. Pour vous la photographie, c’est … La photographie représente une manière de révéler les merveilles du monde. J’y mets en avant l’humain et son identité, sa diversité et ses mystères. FRÉDÉRIC BASTIÉ Quelle technique utilisez-vous ? Je peins à l’huile sous verre. Une technique qui vient d’ex-Yougoslavie. Là-bas, les paysans utilisaient leurs soirées d’hiver à reproduire des paysages sur des morceaux de vitre dans un style naïf et coloré. Un procédé qui requiert une double difficulté. Tout est peint de l’autre côté de la plaque de verre et ce qui est vu à droite est représenté à gauche et inversement. Un peu comme un miroir qui renvoie une image. Quel rapport entretenez-vous avec Bruxelles ? J’ai toujours vécu dans la capitale, où j’ai également passé ma vie à travailler. Une ville agréable que j’ai vu évoluer. Bien entendu, comme beaucoup de personnes d’un certain âge, je garde une forme de nostalgie pour les quartiers de mon enfance et de ma jeunesse, empreints d’un folklore qui a complètement disparu. Où parle-t-on encore bruxellois, hormis chez Toone ?
Qu’allez-vous présenter en août 2022 à Espace Art Gallery ? J’ai réalisé une série de peintures qui représentent des fleurs, la plupart d’un rouge lumineux. J’ai volontairement opté pour le dépouillement en renonçant au fond. Il n’y a aucune nécessité à encombrer une composition en y multipliant les détails inutiles et en collant un arrière-plan froid ou chaud. J’espère simplement que ce choix plaira aux visiteurs. Pour vous peindre, c’est … Peindre est avant tout une satisfaction, une deuxième existence après plus de trente ans à exercer une profession dans laquelle je me suis pleinement investi. Peindre est la joie de créer des choses personnelles en toute solitude dans mon atelier et en écoutant de la musique. Un moment de relaxation complète et de bien-être ! CHRISTIANE CUMPS Quelle technique utilisez-vous ? Comme technique, je mélange l'acrylique, l'huile et le pastel. La peinture me sert de base. Le dessin est ensuite réalisé avec le pastel sec. Quel rapport entretenez-vous avec Bruxelles ? Je suis une simple habitante de la capitale, mais avec un arbre généalogique qui remonte en 1515. Qui dit mieux ? Qu’allez-vous présenter en août 2022 à Espace Art Gallery ? Pour l’événement d’août, j’entends exposer des toiles et des sculptures de papier mâché. Pour vous peindre, c’est … Peindre est un agréable passe-temps et une évasion. C’est un espace de rêve qui permet de donner libre-cours à mon imagination. JERRY DELFOSSE Quelle technique utilisez-vous ? Avec ma formation de graveur, je privilégie avant tout le dessin. Un dessin super précis, calibré au millimètre. J’ai longtemps travaillé le crayon, avant de passer à l’encre de Chine. Quel rapport entretenez-vous avec Bruxelles ? J’ai fait mes études non loin d’ici à l’Académie royale des Beaux-Arts, située rue du Midi. Ensuite, j’ai quitté Overijse pour m’installer dans la capitale, me rapprocher des artistes et des lieux d’exposition. J’y ai fort vite trouvé mes aises. Une ville où il se passe sans arrêt quelque chose et où il ne faut pas aller bien loin pour assister à un événement. Qu’allez-vous présenter en août 2022 à Espace Art Gallery ? Je vais montrer aux visiteurs un échantillonnage de mes plus belles créations. Des œuvres dont certaines ont servi à la réalisation de cartes postales ou d’illustrations pour différents livres. Les visiteurs pourront y voir des vues de Bruxelles et une sélection de chiens et de chats que, tout un temps, j’utilisais comme modèles.
Pour vous dessiner, c’est … Un exutoire au ronron et un dialogue avec soi. Un champ de tous les possibles. Il ne faut pas grandchose pour être libre avec une feuille, une plume et de l’encre. On voyage de la sorte sans quitter sa table de travail, en oubliant les soucis liés à l’actualité, en étant vraiment soi-même. Sans l’art, mon existence aurait une autre saveur … JEANNINE VANDENSANDE Quelle technique utilisez-vous ? Je travaille la toile qui me sert de support. La peinture acrylique a toujours eu ma préférence. Quant aux outils, j’emploie des palettes, des couteaux et des pinceaux. J’utilise parfois du papier, du carton, de la poudre de marbre ou du pastel gras et de l'encre. En fait, je ne m’interdis rien du tout ! Quel rapport entretenez-vous avec Bruxelles ? J'ai appris à découvrir Bruxelles au fil du temps et à mesure de son évolution. Il s’agit d’une ville cosmopolite qui permet de rencontrer des gens issus de divers pays. On y parle toutes les langues et les cultures s’y mélangent. Elle a néanmoins gardé sa personnalité grâce à une série de lieux d’exception, dont la Grand Place, le Sablon, les galeries Saint-Hubert, un folklore très présent et, bien sûr, son savoureux parler bruxellois. Bruxelles se singularise enfin par ses architectures, ses sculptures et ses peintures. Via diverses promenades, j'ai découvert les créations nées avec les artistes du Street Art, ainsi que les fresques bédés qui représentent des personnages bien connus des Belges. Bruxelles ma belle comme chantait Dick Annegarn ! Qu’allez-vous présenter en août 2022 à Espace Art Gallery ? Pour l'exposition du mois d'août, je présenterai un aperçu des dix dernières années de travail. Travail à la limite de l'abstrait et qui invite à prendre le temps de s arrêter pour un voyage original et intime. Pour vous peindre, c’est … Dans mon cas, peindre, c'est entrer dans un autre univers. A savoir, celui de l’atmosphère de l'atelier sans les soucis du quotidien. Puis, s'installer devant une toile sans idée très précise. Enfin, progressivement, les couleurs suivent l'humeur du moment. Elles m'invitent à un imaginaire et me font rêver le temps que l'œuvre se construise. YVES ISSELÉ Quelle technique utilisez-vous ? Je suis versé à diverses techniques graphiques depuis très longtemps mais, pour des raisons pratiques, j’ai opté depuis quelques années pour l’infographie. La portabilité de mes créations, la simplification des outils et surtout la liberté de création en est grandement améliorée. Quel rapport entretenez-vous avec Bruxelles ? Je suis né à Ixelles. Bruxelles est donc la ville qui a vu mes plus jeunes années. J’y ai fait une partie de mes études et garde encore un très bon rapport avec cette ville qui me rappelle d’excellents souvenirs.
Qu’allez-vous présenter en août 2022 à Espace Art Gallery ? Diverses illustrations réalisées depuis quelques années et les dessins du recueil de nouvelles rédigé par Jean Lhassa. J’ai fait une sélection des images qui possèdent pour moi une histoire et pour lesquelles j’éprouve une certaine tendresse. Pour vous dessiner, c’est … Une liberté extrême, une manière d’exprimer ce que je ressens. Quand je dessine, je ne vois plus le temps passer, j’arrive à sortir de la réalité et je suis, pendant un court moment, dans un univers qui n’appartient qu’à moi. Je crois qu’il doit s’agir du lot d’énormément d’artistes.
Une exposition à découvrir du 3 au 28 août 2022 à Espace Art Gallery. Découvrez les ours et heures d’ouverture sur le site officiel www.espaceartgallery.eu Rue de Laeken, 83 à 1000 Bruxelles Propos recueillis par Sam Mas
TAPIS DE FLEURS Tous les deux ans, l’asbl Tapis de Fleurs réunit un comité de professionnels (illustrateur, graphiste, paysagiste) pour imaginer un motif géant à réaliser sur les pavés de la Grand Place en se servant de bégonias. Aucune restriction pour illustrer un sujet différent à chaque édition, qu’il s’agisse d’une commémoration d’un grand événement, d’un clin d’œil à un pays, un continent ou autre. Une fois le thème accepté sous forme de maquette et de symboles, le nombre de fleurs est calculé au plus précisément et les combinaisons de couleurs sont établies. Les centaines de milliers de fleurs coupées nécessaires à la composition peuvent alors être réservées, très longtemps à l’avance. Quelques jours avant l’inauguration, un dessin grandeur nature est déposé sur les pavés de la Grand-Place. Il est réalisé sur du plastique micro-perforé. Les travaux peuvent alors commencer grâce au savoir-faire d’une centaine de jardiniers bénévoles réunis pour assembler ce puzzle gigantesque en moins de huit heures. L’idée consiste à proposer une œuvre éphémère conçue pour tenir quatre jours. On le sait, ce tapis floral de 70 mètres de long sur 24 de large est a chaque fois composé d’un peu moins de mille sept cents bégonias, de graminées et d'écorces. Cette année, il est à découvrir du 12 au 15 août 2022. Voyez les détails pratiques sur le site www.flowercarpet.brussels
LE SQUARE DU PETIT-SABLON Enclavé entre la rue de la Régence et le palais d’Egmont, le square du PetitSablon est à mi-chemin de la place Royale jusqu’au Palais de Justice. Il fait face à l’église Notre-Dame du Sablon. C’est un livre d’histoire qui nous replonge au temps des comtes d’Egmont et de Hornes, au XVIe siècle. Du haut de leur socle de pierre, ils contemplent le petit jardin trapézoïdal qui se déroule à leurs pieds, avec le grand bassin circulaire, les bancs publics et les neuf parterres de buis et de fleurs symbolisant les neuf provinces belges d’autrefois. Autour du socle se pressent des soldats espagnols qu’on reconnaît à leurs casques de conquistadores et aux pourpoints bouffant sous les armures. Les hommes d’armes les encadrent et vont les mener à l’échafaud. Ces deux comtes, d’abord fidèles à Charles Quint, prirent très vite la tête de l’opposition à son fils Philippe II, roi d’Espagne. Avec d’autres nobles, catholiques comme eux, ils entendaient soutenir un esprit de tolérance envers les protestants. Mais en 1566, après la crise iconoclaste qui voit les églises pillées, les saints défigurés et les prêtres massacrés, leur position devient intenable devant les Espagnols chargés de ramener l’ordre dans nos provinces. Ils sont convoqués par le duc d’Albe dépêché à Bruxelles, arrêtés devant le Conseil des troubles et exécutés par décapitation sur la Grand-Place de Bruxelles, le 5 juin 1568. A la suite d’une « sentence inique » prononcée par leur juge, âme damnée de Philippe II. C’est l’inscription qu’on peut lire sous leur statue qui fut d’abord érigée sur la Grand-Place en 1864, à l’endroit où avait été dressé leur échafaud. Quinze ans plus tard, le monument fut transféré à son emplacement actuel, devant le palais d’Egmont, alors que les autorités cherchaient à magnifier les grandes figures de notre histoire, dans un élan nationaliste. C’est l’époque en effet de Léopold II qui dote Bruxelles de ses parcs et rêve d’en faire une capitale à l’image de Paris. Un jardin de pierre, de marbre et de bronze Le bourgmestre Charles Buls confie donc en 1873 la conception et l’aménagement d’un square à l’architecte Henri Beyaert, sur l’emplacement d’un ancien cimetière dépendant de l’hôpital Saint-Jean. L’architecte propose d’y établir un jardin mêlant la sculpture de la pierre, du marbre et du bronze, qui rappelle nos gloires passées. Le square du Petit-Sablon est conçu comme une mise en scène du XVIe siècle tel qu’on se le représentait alors, dans un style néo-renaissance flamande. Le choix se porte sur des personnalités politiques, artistiques et intellectuelles représentant des valeurs laïques chères aux libéraux de l’époque et en opposition au conservatisme catholique. C’est ainsi que la sculpture monumentale des comtes d’Egmont et de Hornes, œuvre en bronze de Charles-Auguste Fraikin, est encadrée sur les côtés par les humanistes du XVIe siècle. Ces dix
figures en arc de cercle, dans leur niche de verdure, forment l’arc du savoir et du pouvoir de l’époque. Elles sont nuancées d’une espèce de nonchalance qu’on prêtait aux troubadours et qui les rend fort belles. Le travail du vêtement Renaissance est un pur chef-d’œuvre. Vous y verrez la statue de Guillaume le Taciturne, prince d’Orange (1533-1584) qui fut le principal acteur du soulèvement des Pays-Bas contre l’Espagne et le fondateur de la république des Provinces Unies. Il ne dut la vie sauve qu’au fait d’avoir fui Bruxelles à l’arrivée du duc d’Albe, alors que les deux comtes refusaient de le suivre. Henri de Bréderode (1531-1568), instigateur du Compromis des Nobles et banni ensuite, porte plus loin l’écuelle et la besace, signe des « gueux de la mer » qui affronteront la flotte espagnole. Plus loin encore, le botaniste Rombaud Dodonée (1518-1585), médecin, cosmographe et physiologiste, est l’auteur d’un herbier ou « Cruydeboeck », histoire des plantes. Place aussi à deux géographes : Abraham Ortelius (1527-1598), auteur du premier atlas de géographie du monde connu à l’époque, et tout en haut, près de la sortie du square, Gérard Mercator (1512-1585), géographe, cosmographe et mathématicien, auteur de la projection cartographique qui porte son nom. Dans une main, il tient la boule terrestre, dans l’autre un compas, signe des maçons. La colonnade des métiers Toutes ces personnalités illustrent le siècle des comtes d’Egmont et de Hornes. Elles sont l’œuvre des sculpteurs qui les ont taillées dans le marbre de Carrare en 1890. Parmi eux, Jef Lambeaux, auteur du Mercator. Il fait partie des 24 sculpteurs à qui on avait demandé de ceindre le square d’une colonnade de statues en bronze représentant les corporations de l’époque. Pour assurer la cohérence du projet, Henri Beyaert, architecte du square, avait chargé le peintre Xavier Mellery de dessiner 48 statues, deux par sculpteur. Les statues de 1 m 30 sont anonymes, comme les sculpteurs du Moyen Age et de la Renaissance l’étaient. Certains des sculpteurs se sont plaints pourtant du peu de liberté qui leur était accordé et, surtout, de la maigre rétribution que la ville et l’Etat leur octroyaient pour la réalisation des figures. Elles sont donc là, ces 48 statues de bronze qui somment la colonnade avec les métiers de l’époque, depuis les armuriers jusqu’aux brasseurs et boulangers, en passant par les tisserands et les forgerons si vous en faites le tour. Un dernier coup d’œil, rue de la Régence, aux couvreurs de tuiles avec leur échelle sur l’épaule, une truelle à la ceinture et une corde à la main, avant de quitter le square du PetitSablon. C’est, décidément, une balade riche en histoire dans un magnifique écrin de verdure. Michel Lequeux
PORTRAIT : MARTINE HUYGENS (Manneken-Prix 2021 de la meilleure libraire) Alors que la plupart se contentent d'une petite vie linéaire bien tranquille, Martine Huygens, notre lauréate du Manneken-Prix 2021 de la meilleure libraire, a su mettre du piment dans la sienne au point qu'on pourrait sans exagération parler de plusieurs vies dans une ! Voilà un parcours tout à fait incroyable comme dirait Michel Drucker. Jugez plutôt : Des études de journalisme en cours du soir à la maison de la presse (parmi ses professeurs, un certain Jean-Jacques Jespers, présentateur du JT à la RTB) située Petite rue au beurre (près de la Grand Place). Cours tous les soirs de 18H à 22H ! Une carrière commencée comme journaliste (Faits divers, Sports,...) au journal "Le Peuple" où elle reste deux ans durant lesquels elle est introduite dans différentes associations de journalisme. Cela lui permet de faire de nombreuses rencontres comme ce soir-là où elle se retrouve au fameux Martini Center (Place Rogier) en compagnie du non moins fameux Omar Sharif ! Ensuite, nous retrouvons Martine Huygens à l'hebdo "Spécial" (le patron, Pierre Davister était le journaliste vedette du "Pourquoi Pas ?"). Elle y reste deux ans également. Journaliste free lance et cours de sténo en accéléré à l'Institut Meysmans, la voilà à présent engagée à Bernheim Outre-mer, une Société immobilière de la compagnie Bruxelles Lambert. Elle y reste dix ans en qualité de secrétaire du directeur commercial. Après cela, nous la retrouvons dans les assurances, toujours comme secrétaire du directeur commercial mais à la Winterthur où elle reste huit ans. L'aventure Winterthur terminée, Martine Huygens entre au service du personnel à l'EPFC (Enseignement de Promotion et de Formation Continue). L'EPFC est composé de huit écoles (dépendant de l'ULB et de la Chambre du Commerce). Martine devient secrétaire du directeur d'une des écoles et cela jusqu'à sa pension. Femme comblée mais aussi femme d'action peu encline à rester tranquillement chez elle. Le besoin de contacts sociaux est trop grand pour passer ses journées dans ses pantoufles devant la télé. Martine Huygens aime aller à la rencontre des gens. Martine Huygens aime les livres, dès lors elle traine ses guêtres à la librairie Mot Passant où elle peut assouvir sa passion pour la lecture ! Cette cliente des plus fidèles finit par attirer l'attention au point de voir débarquer chez elle le journaliste/présentateur Thierry Bellefroid en compagnie de l'écrivain Pierre Raufast ("La fractale des raviolis", "La variante chilienne") pour l'émission "Livré à domicile" (RTBF, 30 janvier 2017). Et quand Thierry Bellefroid lui demande quel est son endroit de prédilection, c'est tout naturellement chez Mot Passant que Martine Huygens emmène l'équipe de la RTBF, ce qui va lui mettre le pied à l'étrier dans la célèbre librairie "Jettoise". Le patron de Mot Passant lui propose de collaborer au développement de la librairie. Ce qu'elle accepte volontiers. Elle pourra ainsi conjuguer sa passion pour la lecture et rencontrer des gens, que du bonheur ! - Martine, peux-tu nous dire ce que tu apprécies surtout dans un livre ? - D'abord l'écriture, une écriture simple, efficace. Surtout pas le côté verbeux ! Ensuite, il y a la concordance des temps, la ponctuation et le vocabulaire. Tous ces ingrédients, bien sûr, doivent être mis au service d'une bonne histoire ! - Peux-tu me citer quelques auteur(e)s que tu aimes particulièrement ? - Des auteur(e)s qui parlent de la vraie vie. Karin Tuil (« Les choses humaines », Prix Goncourt des lycéens 2019), j’apprécie particulièrement les Prix Goncourt des lycéens. Metin Arditi (« Le turqueto »), Stefan Hertmans, un auteur néerlandophone (« Le coeur converti », « Antigone à Molenbeek »), Antoine Wauters (« Nos mères », Prix Goncourt de la Nouvelle 2022),
Sorj Chalandon (« Une promesse », Prix Médicis 2006, « Retour à Killybegs », « Le quatrième mur », etc.) - Des auteur(e)s qui t’ont marquée lors des rendez-vous du dimanche matin ? - Armel Job. Un homme d’une grande simplicité et d’une extrême gentillesse. Les différent(e)s auteur(e)s belges de Polar qui se reconnaitront et qui sont devenus des amis. Marcel Javaux, un homme très plaisant, Geoffrey Van Hecke qui pratique avec maestria l’art de la vulgarisation des techniques les plus compliquées, un vrai tour de force. Il y a aussi Marc Voltenauer (« Qui a tué Heidi ? ») un auteur suisse. - Un auteur que tu voudrais faire venir à Mot Passant ? - Sylvain Tesson (« La panthère des neiges ») ! Un vrai baroudeur. Il a notamment obtenu le Prix Médicis 2011 pour « Dans les forêts de Sibérie » ! - Venons-en à ce fameux prix… Le Manneken-Prix 2021 de la meilleure libraire… - Cela m’a fait énormément plaisir, tu penses ! Surtout que je ne suis présente que le vendredi, le samedi et le dimanche matin lors des rencontres avec un(e) auteur(e). Faut croire que je marque les esprits comme on dit… - En qualité de client régulier, je t’ai vue à l’œuvre et je dois dire que c’est impressionnant, tu ne te contentes pas juste d’alimenter le tiroir-caisse… - Oh, certes non ! Ce qui m’intéresse surtout, c’est la discussion avec les gens. Tu sais, ceux-ci aiment qu’on les reconnaisse, qu’on leur parle. Ils achètent un livre et le plaisir est pour moi. J’aime beaucoup aussi avoir des avis en retour. - Une des caractéristiques de Mot Passant est de faire la part belle aux auteur(e)s belges et pas forcément les plus connus… - Absolument et nous y tenons beaucoup. Il faut les découvrir et arrêter de croire que ce qui n’est pas français est mauvais ! D’ailleurs, je n’hésite pas à mettre les auteurs belges en évidence, j’ai un petit côté influenceuse. C’est presque toute une « éducation » à refaire car la plupart des gens viennent pour acheter un auteur français avant tout (Lévy, Musso, Thilliez, Dicker...). Je tiens à préciser cependant que ce sont surtout les adultes qui achètent les auteur(e)s français connus. Les jeunes sont plus ouverts ce qui est, à mon avis, assez réconfortant. - As-tu une référence en matière de critique littéraire ? - Michel Dufranne. - Pourrais-tu nous rappeler l’adresse de Mot Passant ? - Certainement : Avenue de Jette, 300 à 1090 Jette. C'est à deux pas de la Place du Miroir et on y est vite si on prend les trams 9 ou 19. Je m'en voudrais de passer sous silence les nombreux appels en provenance de Mot Passant durant notre entretien. C'est dire l'importance de Martine Huygens au sein de cette librairie qui, après seulement quelques années d'existence, est devenue une des plus importantes de la capitale. Alain Magerotte
LA MAISON D’ERASME À ANDERLECHT Après la visite du Palais de Charles Quint place Royale, intéressons-nous à présent à son maître et conseiller Erasme, et entrons dans la maison qui accueillit l’auteur de « L’Eloge de la Folie » en 1521. Cette maison d’aspect Renaissance est située à Anderlecht. Elle fêtait ses 500 ans d’existence en 2015. Après être passés devant la collégiale des SS. Pierreet-Guidon et le béguinage de la place de la Vaillance, vous la découvrirez en suivant la rue du Chapitre sur laquelle s’ouvre son vaste portail caché sous le lierre. On est frappé par la majesté de cette demeure patricienne où s’est abrité Erasme durant l’été et l’automne 1521 pour fuir les persécutions religieuses. Pendant six mois donc, il a échappé aux foudres de l’inquisition qui sévissait au lendemain de la « protestation » de Martin Luther à Worms. Il s’y était réfugié chez une de ses connaissances, l’écolâtre Pierre Wichman chargé de l’enseignement à la collégiale toute proche et détenteur d’une Bible du Moyen Age, qu’Erasme voulait consulter pour finir la 3e édition du Nouveau Testament. Au centre de la belle cour pavée, nous pouvons admirer cette demeure qui est à la charnière de deux époques : au donjon bourguignon, carré et tout en hauteur, percé de petites fenêtres, le chanoine Pierre Wichman avait fait ajouter en 1515 une spacieuse maison bâtie dans le style Renaissance flamande – toute en longueur et éclairée par de grandes fenêtres. De l’intérieur, vous remarquerez d’ailleurs un saisissant effet de perspective : l’espace entre les fenêtres allant en s’amenuisant vers la somptueuse cheminée et nous donnant ainsi l’illusion d’une fuite en avant comme dans les tableaux de la Renaissance (par exemple chez Andrea Mantegna, qui a travaillé les effets de profondeur). En faisant le tour de la demeure, vous découvrirez, donnant à l’arrière, un beau jardin de plantes médicinales – qu’on appelait à l’époque les simples. Il fut dessiné par le paysagiste René Pechère, auteur des jardins du mont des Arts, et il est orné d’une centaine de plantes qui traitaient (et traitent encore) les affections comme les maux de tête, les maux de ventre, la tension, la diarrhée ou la goutte dont mourut Erasme en 1536. Ce jardin se prolonge par un vaste parc d’un hectare, où vous serez amené à la méditation en lisant ou en relisant les Adages d’Erasme qui parsèment les petites vasques d’eau. Peut-être aurez-vous même envie de vous asseoir et de converser sur les bancs qui occupent le centre du parc, comme le faisait Erasme lui-même dont les amis étaient la seule richesse. A l’intérieur de la maison, tout est d’époque et respire la Renaissance à plein nez. Laissez-vous guider au fil des pièces, de bahut en bahut et de tableaux en tableaux qui appartiennent au XVIe siècle. Dans la salle Renaissance, là où l’effet de perspective nous surprend, nous serons surpris en effet par un tableau de Peter Huys, La Tentation de saint Antoine : on y voit le saint homme soumis aux tentations de la chair qu’incarne, sous ses yeux, une femme nue escortée de ses suivantes qui l’aident à se baigner dans une mare répugnante. Tout autour s’agitent les monstres de l’enfer. Si on les écoute, on
se fera percer l’oreille par la flèche de Dieu. Observez, au-dessus de cette flèche, le mât d’un bateau en forme d’animal marin, qu’un cochon escalade vers une ruche de miel qui représente la parole de Satan – ou de Luther, excommunié en 1520 pour avoir pris position contre les richesses de l’Eglise et le commerce des « indulgences ». Le commerce des âmes en ce bas monde. Vision effrayante qui terrorisait les bonnes âmes de l’époque et qui a trouvé maintes adaptations chez les peintres, notamment chez Jérôme Bosch dont on verra, dans la même salle, l’Adoration des Mages. Ces tableaux nous ont été commentés avec finesse et un rare don de l’observation par Jean-Pierre Vanden Branden, conservateur honoraire de la Maison d’Erasme, qui continue de répandre son savoir à l’âge de 93 ans (voir son livre récemment paru, Erasme, au cœur d’un nouvel humanisme). On finira la visite par le cabinet de travail d’Erasme, qui a composé une de ses œuvres majeures, Le Nouveau Testament, et une vingtaine de lettres sur l’écritoire près de la fenêtre. Il était acharné au travail et s’y tenait debout, dès six heures du matin, car debout il pouvait mieux se concentrer sur sa matière, réservant l’après-midi à ses promenades et aux entretiens avec les amis qui venaient le voir. Vous verrez à l’étage ses ouvrages censurés par l’époque de mille et une manières. Erasme, le prince des humanistes Qui était donc ce vieillard affable, ou feignant de l’être, qu’on voit sur la toile de Félix Cogen dans la première pièce de la demeure, dite Chambre des rhétoriqueurs ? Erasme est assis dans un fauteuil, avec sa barrette noire de prêtre et sa longue robe de laine, et il converse avec les notables de la ville de Bâle où il est venu finir ses jours. Des jeunes gens, ses famuli, notent scrupuleusement ses propos. Derrière lui et au fond du tableau, on aperçoit les deux frères imprimeurs, les Froben qui l’ont accueilli. L’un d’eux, assis derrière le fauteuil, relit les notes de Désiré Erasme de Rotterdam. Malgré son prénom, Erasme n’était pas du tout désiré quand il naquit en 1467 ou 1469. Et il n’était pas « aimable » non plus (du grec erasmios), comme on peut le découvrir dans Le Manuscrit de la Giudecca, le roman d’Yvon Toussaint qui nous raconte sa vie d’errance à travers l’Europe. Fils illégitime d’un prêtre médecin, il s’appelait en réalité Geert Geerts, Gérard, fils de Gérard. Il entre au couvent de Steyn près de Gouda, où il est ordonné prêtre à 20 ans. Connaissant très bien le latin (il a écrit la première méthode Assimil avec ses Colloques), Erasme devient le secrétaire particulier de l’évêque de Cambrai, Henri de Berghes grâce à qui il pourra voyager aux Pays-Bas, faire des études à Paris (il étudie le grec au Collège de Montaigu) et se fixer un temps à Bologne, en Italie, où il assiste au triomphe du pape Jules II. C’est en revenant de Bologne à cheval, sur la route qui le conduisait en Angleterre, qu’il rédigera les premières pages d’un ouvrage qui fera sa renommée, l’Eloge de la Folie. Vaste satire de la société où il s’en prend aux superstitions de l’époque, aux grands du monde qui usent et abusent de leur autorité, et à tous ceux qui profitent lâchement de la faiblesse d’autrui. Satire toujours d’actualité. En Angleterre, où il enseigne le grec, il se lie d’amitié avec Thomas More, l’auteur de l’Utopie. A Louvain, chez nous, il fonde le Collège des Trois Langues dans lesquelles la Bible est écrite, d’abord en hébreu, puis en grec et enfin en latin. Il y poursuivra la traduction, du grec en latin, du Nouveau Testament avec son commentaire. Ceci lui vaudra la rancœur de ses collègues, car il touchait au texte de la Vulgate de saint Jérôme, dont on voit le portrait au-dessus de la cheminée de la salle Renaissance : le saint se gratte la tête et il indique un crâne, semblant dire « Qui sommes-nous pour faire la leçon aux autres ? » dans un contexte funèbre. Le contexte de l’époque.
C’est la raison pour laquelle, en 1521, Erasme doit fuir l’université de Louvain. Il se réfugie un moment dans la maison de Pierre Wichman qui détenait, disions-nous, un exemplaire précieux de la Bible. Il y mettra la dernière main à la troisième édition du Nouveau Testament, avant de quitter définitivement les Pays-Bas pour s’installer à Bâle, chez l’imprimeur Jean Froben qui avait déjà édité plusieurs de ses livres. Il ne reviendra plus chez nous malgré l’invitation pressante de Charles Quint. Par son abondante correspondance avec les humanistes de la Renaissance (son ami Guillaume Budé, par exemple), par sa tolérance d’esprit envers chacun, par son érudition remarquable, Erasme fut certainement le prince des humanistes, comme on le surnomma plus tard. Il a réussi à faire la synthèse entre la foi chrétienne et le retour aux sources antiques qu’il a célébrées dans ses Adages. Par-dessus tout, il détestait la guerre et la rupture religieuse qui se préparait entre catholiques et protestants, entre le pape et Luther au XVIe siècle. Il disait notamment : Bellum dulcissimum est inexpertis, la guerre n’est très douce que pour ceux qui ne la font pas ! Cela fait mouche aujourd’hui encore. Plus d’informations sur le site www.erasmushouse.museum ou en téléphonant au 02/521 13 83. Rue du Formanoir, 31 à 1070 Bruxelles Michel Lequeux
FESTIVAL INTERNATIONAL DES BRIGITTINES Chaque année, le Festival International des Brigittines opère une traversée orientée des formes scéniques contemporaines : langages novateurs, univers insolites, formes singulières et originales s’ouvrant à l’imaginaire. Le Festival rassemble des spectacles qui s’articulent autour d’une idée ou qui se présentent comme des objets de pensée, d’invention ou de partage fantasmatique. Il se donne annuellement un thème qui permet de poser une nouvelle question et d’orienter autrement le regard du spectateur. Des rapprochements lui sont proposés, des voies de sensibilité et des pistes de lecture. Il peut créer selon sa perception des liens entre des spectacles très différents dans les styles, mais qui abordent des sujets assez proches. Après deux années de pandémie, le Festival est de retour du 18 août au 3 septembre 2022 pour une poignée de démonstrations de virtuosité. De nombreuses affiches ont été sélectionnées pour assurer pleinement la réputation de l’événement et ne jamais flancher sur le plan de la qualité, alliant moderne et ancien, mais offrant surtout une part au rêve. Découvrez l’agende complet sur le site officiel www.brigittines.be
FERMETURE DU POINT CULTURE BRUXELLES Une page se tourne ! Ce que certains ont connu sous le nom Médiathèque voit la fin d’une aventure. Nombreux étaient celles et ceux qui allaient jadis emprunter un disque au Passage 44, afin de le découvrir ou l’enregistrer. Avec l’arrivée en fanfare d’Internet, l’accès à un catalogue quasiment illimité en ligne et deux années de pandémie, les emprunts à l’ancienne ont subi une douche glacée, observant un radical changement des comportements. Depuis plusieurs années déjà, les chiffres ne tournaient plus, le public se raréfiait et les initiatives de proposer des expositions autant que des concerts peinaient à décoller malgré tous les efforts soutenus. Baptisé depuis une décennie ‘Point Culture’, il a fallu déménager à l’angle de la rue Royale et du boulevard Bischoffsheim, se réinventer, trouver d’autres orientations et faire l’impossible pour garder le cap. La décision est finalement tombée : le Point Culture de Bruxelles, ex-Médiathèque, a fermé ses portes définitivement en juin dernier, laissant derrière elle une légion de souvenirs auprès des plus de quarante ans qui avaient connu sa belle époque et sa lente évolution pour passer des 33 tours aux nouveaux supports et se familiariser avec les CD, les VHS et enfin les DVD et autre BluRay. Si la section bruxelloise n’existe désormais plus, celle d’Ixelles sur le campus de l’ULB continue de tourner, ainsi que celle de Woluwé-Saint-Lambert logée dans une aile de la maison communale. Mais pour combien de temps ? On a également vu disparaître de notre paysage les boutiques de location de vidéos ainsi que tous les disquaires qui, l’un après l’autre, ont tiré leur volet pour ne plus jamais le relever ! Paul Huet
DES CLICHÉS DE PHILIPPE MASSART EXPOSÉS AU PARC JOSAPHAT Passionné par la faune et les paysages de nos régions, Phillipe Massart est photographe. Depuis de nombreuses années, il accumule les clichés pour immortaliser certaines espèces de chez nous et les faire connaître au plus grand nombre, notamment via son site et sa page Facebook. Son objectif consiste à voir ce que nos semblables ne remarquent pas, faute d’avoir l’œil ou, plus simplement, de s’arrêter pour regarder. Bien entendu, la place du rêve joue un rôle important dans sa démarche. On ne se lance pas dans cette activité sans avoir le feu sacré. Récemment, la commune de Schaerbeek lui a permis de concrétiser un projet qui lui tenait à cœur. A savoir afficher sur la façade de La Laiterie (bien connue de tous ceux qui se promènent dans le parc Josaphat) des bâches de taille géante qui présentent Spip l'écureuil et quelques oiseaux, hôtes des branches et taillis. Une manière d’accompagner les promeneurs lors de leur visite avant de se rendre à la plaine de jeux, monter sur le kiosque, se balader dans la plaine du tir à l’arc, aller faire un golf ou profiter d’une boisson fraîche à une terrasse. Ses travaux vous attendent 24 heures sur 24. Avis aux amateurs autant qu’aux curieux. Sam Mas
EXPOSITION : DÉVOILEMENT DES PAYSAGES EN UKRAINE Quarante-deux artistes dévoilent en effet les paysages de l’Ukraine avant que leur pays ne soit envahi par les Russes. Peintres, dessinateurs, sculpteurs, photographes, beaucoup d’entre eux ont vécu la transition de l’Ukraine soviétique à l’Ukraine indépendante. Leurs œuvres sont métaphoriques. Elles nous parlent de cette indépendance aujourd’hui compromise. Au Musée du Cinquantenaire jusqu’au 18 septembre. La guerre donne à Unfolding Landscapes, « dévoilement des paysages », une dimension supplémentaire : ces paysages que vous allez découvrir sont aujourd’hui menacés par les bombes et les missiles russes. Tout comme les 44 millions d’habitants qui fuient l’enfer depuis quelques mois. En mai 2022, l’exposition refermait ses portes au Silkeborg Bad Art Centre du Danemark qui l’avait accueillie. La guerre totale déclenchée par la Russie a empêché le retour des 83 œuvres en Ukraine, liant le destin des artistes à la tragédie de tout un peuple en souffrance. Au cœur de la capitale européenne, ici à Bruxelles, l’European External Action Service, le Musée d’Art et d’Histoire et l’ASBL Horizon 50/200 se sont associés pour présenter cette exposition itinérante aux MRAH. Elle lie les paysages et la poésie contemporaine de l’art en Ukraine. « Un morceau du cœur » Unfolding Landscapes explore le paysage, la topographie, le ressenti de l’espace et la culture de ce pays qui est voisin de l’Europe et qui rêve d’en faire partie un jour. Englobant trois générations d’artistes et réalisées avant que la guerre n’éclate en février 2022, les œuvres témoignent de l’histoire de l’Ukraine contemporaine. La conservatrice et historienne de l’art Natalia Matsenko nous explique pourquoi il est si important que cette exposition soit présentée aux MRAH : « Avec cette exposition, nous voulons montrer la diversité du paysage ukrainien, tant au sens littéral que socioculturel. Aujourd’hui, dans les conditions d’une guerre brutale de grande ampleur, pour chaque Ukrainien, le paysage n’est pas seulement une vue par la fenêtre, c’est un morceau de son cœur. Et pour chacun de ces morceaux, nous nous battons désespérément. Dans le contexte de la candidature tant attendue de l’Ukraine à l’Union européenne, c’est une occasion de fixer une fois de plus le vecteur européen de notre pays, pour lequel le premier sang a été versé il y a huit ans. Nous nous battons maintenant pour notre culture. Le langage de la culture est un langage universel. » Des œuvres métaphoriques Métaphoriques, ces 83 œuvres d’Ukraine ? Oui, à coup sûr, elles le sont pour celles et ceux qui déchiffrent leur histoire. A commencer par ces Grand-mères au bord du ciel qu’ont photographiées Elena Subach et Viatcheslav Poliakov pour refléter le fossé entre les générations et deux systèmes politiques. Subach a photographié les grands-mères de l’Adieu, une cérémonie religieuse qui invite les chrétiens à expier leurs fautes. Les femmes portent leurs plus belles parures, robes fleuries et mouchoirs en dentelle blanche qui rappellent les compositions de l’école hollandaise de peinture. Celle qui nous occupe tient l’affiche de l’exposition publiée à côté du chapeau de notre article. Vue de dos dans sa robe bleue, la grandmère franchit une grille étroite et s’avance vers un paysage
d’automne aux tons mordorés. Elle a laissé au premier plan sa chaussure, dorée comme la grille. Elle franchit un seuil entre deux époques. Elle nous montre des vieux déchirés entre deux sociétés, celles d’hier et d’aujourd’hui. L’Ukraine contemporaine ne peut pas oublier son attachement aux valeurs du passé, malgré son combat pour faire partie de l’économie occidentale. Les racines de l’arbre fixe ces valeurs au sol. Mykola Matsenko s’intéresse, lui, aux stéréotypes et aux mythes de l’histoire. Son travail sur peinture acrylique propose une vision grotesque du paysage socioculturel de l’Ukraine. Maidan est une peinture du square de l’Indépendance où s’est jouée la révolution de février 2014 menant à la destitution du président Ianoukovitch et à l’annexion de la Crimée par les Russes en représailles. Peinte en 2002-03, dix ans donc avant la révolution, la composition reflète l’image paradoxale de Kiev au tournant du troisième millénaire, où l’héritage totalitaire rencontre le kitsch de la période de transition. Le rose bonbon des bâtiments et de la colonne corinthienne est un clin d’œil à l’histoire. Sébastopol en Crimée Autre clin d’œil à l’histoire, la bataille de Sébastopol qui se déroule sur une longue fresque murale. Il fallait à la fresque originale un bâtiment spécial pour qu’on l’y exposât. Le siège opposa durant neuf mois, en 1854-55, les assaillants anglais, français, sardes et turcs aux assiégés russes qui s’y étaient retranchés et qui, durant la guerre de Crimée, firent tout pour forcer le passage de la mer Noire vers la Méditerranée. Chacun défendait son accès à la mer : les Anglais vers le golfe de Suez, les Français pour éviter que ne se reforme contre eux la coalition fatale à Napoléon Ier et les Turcs pour garder le contrôle maritime de leur Empire. Rien n’a fondamentalement changé du côté russe. Cette bataille mémorable a été peinte en 1904 par Franz Roubaud alors au service de Nicolas II, tsar de toutes les Russies. Mais ce qui était minutieusement décrit dans la fresque par le peintre est ici noyé dans le brouillard par le tandem Hnylytskyi-Holosiy. C’est une réinterprétation ironique et postmoderne de la vision de la guerre héroïque cultivée à titre de propagande par l’Union soviétique. L’huile sur canevas en cinq tableaux date de 1991-1992, au moment du démembrement de l’Union et de ses républiques libérées du régime. Le brouillard sur toile marque cette nouvelle liberté accordée à ses membres par l’Union soviétique à bout de force face au monde. Côté sculpture, Portrait avec un plan différent renvoie aux matériaux comme le bois, l’argile, la pierre, le plastique et les métaux avec lesquels travaille Nazar Bilyk. Ce portrait taillé dans la résine et la fibre de verre ressemble à une stèle où deux images s’imbriquent, l’image négative se mirant dans l’eau au pied de la sculpture. Bilyk décrit son travail comme étant la projection de son espace intérieur d’artiste. Autre portrait, celui d’un glacier qui risque de s’effondrer dans la mer et qui, vu sa taille, fera gonfler démesurément les eaux. C’est la patte écologique de Ksenia Hnylytska qui milite pour la destruction et la renaissance de notre monde face à la nature. Ces œuvres vous attendent au Musée du Cinquantenaire jusqu’au 18 septembre. En allant les voir, vous soutenez ces artistes et leur pays au bord de l’annexion. Après Bruxelles, l’exposition continuera son parcours à travers l’Europe pour répandre l’image de l’Ukraine. Entrée gratuite. Davantage d’informations sur www.artandhistory.museum. Michel Lequeux
EXPOSITION : LE PETIT PRINCE PROLONGÉE ! Bonne nouvelle, l’exposition « Le Petit Prince » est prolongée pour répondre à la demande croissante des visiteurs. Alors qu’elle devait fermer ses portes fin juin, elle se voit jouer les prolongations pour quelques nouveaux mois. Un monde qui joue à faire se croiser deux univers. Celui d’Antoine de SaintExupéry, le romancier, et celui de son personnage le plus célèbre. C’est toutefois Marie de Saint Exupéry, la maman de l’écrivain qui sert de guide. Comme elle l’a fait de son vivant lors de conférences ou d’entretiens, elle raconte la vie et l’œuvre de son fils par le truchement d’enregistrements. Une mise en contexte émouvante que justifient les liens particuliers, denses qui unissaient la mère à son fils. Ce fil rouge se dévide dans l’audioguide qui accompagne le visiteur tout au long du parcours. Si Le Petit Prince est connu à travers le monde, la vie de son auteur l’est sans doute moins. Pourtant, celui-ci a toujours nourri son œuvre de sa propre vie. Et quelle vie ! Aviateur passionné, pionnier de l’aviation, notamment de l’Aéropostale à l’égal d’un Mermoz ou un Guillaumet, écrivain combattant lors de la Seconde Guerre mondiale, Antoine de Saint Exupéry est un personnage de roman aux multiples facettes. Et un homme amoureux de la vie et de l’humanité. C’est la première fois qu’autant d’objets personnels, photos, manuscrits et dessins sont ainsi rassemblés pour raconter la vie de l’auteur. Le visiteur feuillette ce roman vrai dont chaque chapitre est mis en scène pour le plonger au cœur d’une vie et d’une époque, celle des fous volants. Des répliques d’avions voisinent avec des projections de films, des montages audiovisuels, des témoignages de l’écrivain, de sa famille, de ses amis. Jusqu’à sa disparition mystérieuse au-dessus de la Méditerranée, un jour de juillet 1944. Sa dernière mission. Le monde du Petit Prince et celui de son créateur vont se rejoindre dans un espace immersif grandiose où le visiteur assiste à un jeu de cache-cache entre l’auteur et son célèbre personnage. Au milieu d’un décor fabuleux, ils se trouvent, se perdent, se poursuivent dans un show qui sollicite toutes les ressources audiovisuelles actuelles. Au point que la vie réelle de l’un finit par se confondre avec celle, rêvée, de l’autre. Un chassé-croisé haletant qui se termine par un happy end en apothéose. Le visiteur est appelé à s’exprimer, à réagir, à faire des choix dans un atelier interactif. Mis face à des situations issues de la vie et l’œuvre de l’écrivain, il devra choisir parmi des réflexions, des attitudes et des réactions celle dont il se sent le plus proche. Il pourra aussi y laisser des messages à destination des autres visiteurs mais aussi de tous ceux qui, à travers le monde, soutiennent la Fondation Saint Exupéry. Une exposition dans laquelle on s’immerge et à voir et à apprivoiser à Brussels Expo jusqu’au 6 novembre 2022. Plus de détails sur le site www.expo-petitprince.com Place de Belgique, 1 à 1000 Bruxelles
SPECTACLE-IMPRO : À TABLE ! C’est à un repas bien réel auquel va assister le public. Au début du spectacle, le menu est annoncé aux spectateurs et aux comédiens qui n’en ont pas connaissance. Qui seront les personnages réunis autour de la table ? À quelle occasion seront-ils réunis ? Un repas d’affaire, un dîner de Saint Valentin, un festin de retrouvailles d’amis d’enfance, un pique-nique en famille... C’est aux spectateurs de proposer. Démarrant de cette impulsion du public et sans concertation ni canevas, les comédiens vont improviser une scène de repas pendant 1h15. À partir d’une situation toute simple que tout le monde a déjà vécu, les comédiens vont créer une véritable histoire pouvant, selon les soirées, aller d’une comédie haute en couleur, à un drame poignant en passant par un thriller haletant. Chaque saison, grâce à la générosité des comédiens jouant bénévolement ce spectacle, la moitié des recettes de ce spectacle permet de soutenir une association. Cette année, il s’agit de l’asbl forestoise "A.P.R.E.S. ASBL" qui se consacre à la réinsertion socio-professionnelle des ex-détenus. En venant assister à ce spectacle, vous faites donc également une bonne action ! A vivre chaque dimanche d’août à 20 heures 30 au Théâtre de L’improviste. Plus de détails sur le site www.improviste.be Rue de Fierlant, 120 à 1190 Bruxelles
MEYBOOM 2022 Le Meyboom fait partie des points forts du folklore bruxellois, dont l’origine remonte au début du XIIIe siècle et marque la victoire des Bruxellois sur les Louvanistes. A cette époque, de nombreux habitants se rendaient dans le haut de la ville, au-delà des remparts, pour écluser des bières. Selon la tradition, il s’agirait de l’emplacement de l’actuelle rue du marais. A cet endroit, la ville n’avait pas le droit de taxer les produits alcoolisés, puisqu’on se situait en dehors de sa juridiction. Il a été rapporté que les boissons s’y débitaient à prix doux. Fâché sur le tarif des consommations, un groupe de Louvanistes se serait pressé dans le quartier pour en découdre avec les habitants. Bagarre générale et, finalement, victoire des autochtones grâce à l’appui bienvenu des Compagnons de Saint-Laurent. Par la suite, il a été décidé de planter un arbre chaque 9 août, veille justement de la fête de Saint Laurent. Il a ensuite été précisé que la plantation devait être accomplie avant dix-sept heures, faute de quoi ce privilège passerait aux mains des citoyens de Louvain. Question d’honneur, donc ! Cette fois encore, le Meyboom devra être mis en terre dans les temps. L’occasion de fédérer les citadins et de suivre le cortège dans la bonne humeur et en musique. Comme de coutume, le défilé sera composé de maints participants, constitués de curieux, d’habitués mais aussi de représentants de nombreuses corporations locales, désireuses d’afficher leur amour inconditionnel pour tout ce qui touche de près ou de loin à la capitale. Selon les organisateurs, près de quatre cents personnes sont attendues. Si le soleil s’invite, cette édition 2022 devrait être réussie ! Sam Mas
COMÉDIE MUSICALE : ELISABETH Cette comédie musicale raconte l'histoire d'Elisabeth (mieux connue sous le surnom Sissi et immortalisée à l’écran par Romy Schneider), l'impératrice d'Autriche, et revient sur ses fiançailles et son mariage avec le jeune empereur François-Joseph en 1854 jusqu’à son assassinat en 1898 par l'anarchiste italien Luigi Lucheni. Même s'il s'agit d'un coup de foudre, leur amour a toutefois été mis à l'épreuve. Non seulement à cause de l'ingérence de la stricte archiduchesse Sophie, la mère de François-Joseph, mais surtout à cause de la vie elle-même. Après une existence remplie de passion, de tragédies et d'incompréhensions qui culmine avec le suicide de son fils émotionnellement négligé, elle finit dans un isolement complet et fuit tout et tout le monde. L’histoire qui avait débuté comme un conte de fées s’achève de façon dramatique, puisque la violence et la mort la rattrapent lors de son dernier voyage. Pour raconter son destin, le compositeur Sylvester Levay a déployé une partition généreuse qui unit romantisme et instants tragiques. Le librettiste Michael Kunze a fourni un livret idoine pour la version originale en allemand. Fort vite, l’œuvre est devenue un succès sur les planches et a fait l’objet de plusieurs pressages discographiques, avant de voyager à travers le monde. Au-delà du destin d’une reine passée à la postérité ultérieurement grâce au cinéma, il s’agit avant tout ici d’une récréation agréable qui prend l’Histoire pour prétexte à de belles envolées lyriques et chantées. Jack Cooper et Simon Paco ont veillé au soin de la mise en scène et ont fait appel à Stéphane Laporte pour l’adaptation française. Marie-Pierre de Brienne, Antonio Macipe, Arnaud Masclet et beaucoup d’autres donnent de la voix sur scène et dansent face à l’orchestre dirigé en direct par Laure Campion. Les représentations ont lieu au Château du Karreveld du 11 juillet au 25 août 2022. Voyez tous les détails sur le site www.brusselons.be Av. Jean de la Hoese, 32 à 1080 Bruxelles Daniel Bastié
THÉÂTRE : ROMEO ET JULIETTE Ce classique de William Shakespeare a régulièrement eu droit aux honneurs de la scène et les adaptations cinématographiques n’ont pas manqué. Qui a oublié la version de Franco Zeffirelli avec Olivia Hussey et celle de Bahz Lurzmann avec Leonardo di Caprio, même si rien ne vaut de découvrir cette pièce en live avec la performance de comédiens sur les planches ? L’action se déroule à Vérone et nous raconte la querelle séculaire qui oppose deux familles voisines. Les Capulet mènent la vie dure aux Montaigu et inversement. Néanmoins, contre toute attente, une histoire d’amour se tisse malgré la haine viscérale que les aînés se vouent. Juliette est folle de passion pour le beau Roméo et, à deux, ils bravent les interdits pour se retrouver en cachette et se prêter à des caresses et à des baisers. Avec un talent que nul peut lui nier, l’auteur parvient à faire pleurer et transforme leurs épanchements en tragédie. Depuis plus de quatre cents ans, le couple est devenu l’archétype des amants maudits, frappés par la bêtise des adultes. Il ne s’agit pas d’un drame ancien, mais d’un récit qui se singularise par son intemporalité, avec des accents qui interpellent toujours actuellement. Combien de jeunes ne sont-ils pas confrontés à la violence des leurs, se voient imposer un mariage forcé ou se trouvent en proie au rejet parce qu’ils s’éprennent d’une personne qui ne convient au cercle étroit des proches ? Les dialogues font mouche, quelques scènes sont devenues cultes (dont celle du balcon) et le final a énormément contribué à booster la vente des mouchoirs Kleenex. Tout s’achève par le suicide des tourtereaux et l’écrire ne revient pas à déflorer un secret. L’Abbaye de Villers-la-Ville inscrit « Roméo et Juliette » au menu de son agenda estival. Ce drame est à applaudir en plein air à partir du 12 juillet jusqu’au 6 août 2022. Voyez toutes les informations pratiques sur le site www.deldiffusion.be. Rue de l’Abbaye, 55 à 1495 Villers-la-Ville Daniel Bastié
LOISIRS : HELLO SUMMER Après dix-sept ans de bons et loyaux services, Bruxelles-lesBains ne pourra pas prendre place sur les berges du canal (station Yser), car ces dernières seront en chantier durant tout l’été. Pour remplacer cet événement incontournable de la capitale, l’échevine de la Culture et du Tourisme Delphine Houba a concocté quatre longs week-ends festifs qui, chaque semaine, seront décentralisés. Au menu : projection de films, danse, activités familiales et sport … mais accompagnés de sable fin, de transats et de paillotes. Depuis quelques jours l’agenda a été fixé dans différents lieux. Baptisé « Hello summer », il a pour objectif d’apporter un air de vacances dans la métropole et d’oser du neuf. A tester pour se faire une idée et à découvrir jusqu’au 29 août 2022. Voyez le programme détaillé sur le site www.hellosummer.be Sam Mas
BRONZER À BRUXELLES-LES-BAINS ! La Ville de Bruxelles tire un bilan très positif des éditions avant Covid de Bruxelles les Bains, lieu ensoleillé de référence pour celles et ceux qui n’estivent pas et qui gardent les pieds serrés dans la capitale ! Au fil du temps, les organisateurs ont réussi leur pari et ont transformé cet événement phare des vacances scolaires en un lieu de rencontre et d’échange incontournable. Ambiance estivale, événements culturels, sports, loisirs en tous genres, spécialités culinaires… Les enfants et leurs familles peuvent profiter d’animations créatives et qualitatives, d’une zone abritée et encadrée, de concerts et d’initiations sportives. Les collègues de bureau, viennent prendre l’apéritif les semelles dans le sable, profitent de jolies terrasses bien décorées et de mets variés, dans une ambiance décontractée. Les transats déployés pour le cinéma ou l’opéra en plein air sont pris d’assaut. Les très nombreux amateurs peuvent visionner, sur le plus grand écran extérieur de la capitale et les orteils en éventail, une sélection exceptionnelle de films mettant à l’honneur la ville de Montréal et les meilleurs opéras. Quant aux noctambules, ils contribuent également à l’énorme succès du BoatClub et de la Croisetteke, en se déhanchant sur les rythmes endiablés des meilleurs DJ’s de la capitale, sur terre ferme ou en croisière sur le Canal de Bruxelles. La seizième édition de Bruxelles-les-Bains se poursuit du 25 juillet au 25 août 2022 et ce du mardi au dimanche. Accès gratuit. Attention, certaines activités sont payantes. Quai des Péniches - Place Sainctelette à 1000 Bruxelles André Metzinger
LA FOIRE DU MIDI EST DE RETOUR ! Tradition oblige, la Foire du Midi revient après deux ans de pandémie dans le centre de Bruxelles pour offrir aux citadins des attractions chaque fois plus impressionnantes. Une fois encore, elle prend ses quartiers le long du boulevard du Midi, entre la porte de Hal et la porte d'Anderlecht. Au programme : cent trente attractions pour les petits et les grands, à la fois traditionnelles et de la dernière génération. Il y a en aura pour tous les goûts avec la traditionnelle baraque de tir, la grande roue, la pêche aux canards, les stands de dégustation, les autos tamponneuses, le labyrinthe, le jeu des miroirs, le toboggan de la mort et, bien entendu, des nouveautés que les visiteurs découvriront avec plaisir. Parmi celles-ci, le Outbreak, manège à sensation extrême, unique en France et en Belgique. Assis dans une nacelle, les passagers tournoient dans les airs à grande vitesse. De quoi faire le plein d’adrénaline en quelques minutes. L’édition 2020 de la Grande foire du Midi se déroulera du 16 juillet au 21 août 2022. Un rendez-vous annuel qui ravive le cœur de la capitale ! Plus de détails sur le site www.foiredumidi.be Willy Smedt
LIRE DANS LES PARCS L’opération « Lire dans les parcs » est née en 2000 et a été réalisée d’abord sur la Région de Bruxelles-Capitale pour ensuite être étendue à toute la Wallonie. Il s’agit de proposer, durant l'été, le déplacement des livres d’une bibliothèque vers divers l ieux publics et d’offrir, le temps des vacances, des moments de plaisir aux enfants, par la découverte de livres variés. A des dates et des lieux précis, des animateurs se rendront vers un endroit déterminé d’un parc et/ou lieu public où habituellement des enfants jouent (par exemple le bac à sable) et, munis d’une caisse ou d’un sac de livres divers, les animateurs proposeront aux enfants de lire ou d'écouter le ou les livres de leur choix. Chaque lieu est parrainé par une bibliothèque publique afin d’inviter les enfants à la fréquenter en dehors des séances d’animations dans les parcs et, par temps de pluie, les animateurs les attendront dans la bibliothèque partenaire. Naturellement, quelque chose se passera dans votre quartier. Il ne faut dans pas hésiter à emmener vos enfants à la découverte des livres, avec en prime souvent une animation réalisée par la personne déléguée par l’institution présente de votre commune. L’occasion de permettre aux plus jeunes d’écouter des histoires, de feuilleter des ouvrag es et de les inviter à aller faire un tour plus tard dans les rayonnages du bâtiment le plus proche de leur domicile. Cela se passe du 1 er juillet au 31 août 2022. Voyez les lieux et les horaires sur le site www.biblio.brussels
MUSÉE : LES ÉGOÛTS DE BRUXELLES Le saviez-vous ? Le réseau d'égouts de Bruxelles-Ville compte près de trois cent cinquante kilomètres. Une cité sous la ville et un embranchement de ramifications souterraines qui engloutissent chaque jour des milliers de m3 d'eaux usées. Le Musée des Égouts vous convie à un voyage insolite dans ce que Bruxelles a de plus caché et de plus nécessaire à son fonctionnement. Un musée pas comme les autres, vivant, avec la Senne en vedette. Un musée qui raconte quand, pourquoi et comment les égouts furent construits, qui parle du travail des hommes dans ce monde souterrain, qui explique le cycle de l'eau en ville. Un musée à vivre de 7 à 77 ans. Il est évidemment préférable de se chausser convenablement (par exemple : une paire de bottes) et de s’assurer de ne pas souffrir de claustrophobie. La visite des sous-sols de Bruxelles est une expérience qui marque les esprits et qui mérite qu’on s’y intéresse. 0uverture du mercredi au samedi de 10 à 17 heures et durant les congés scolaires du vendredi au samedi de 10 à 17 heures. Attention ! En cas de fortes pluies et pour des raisons de sécurité, le personnel du Musée se réserve le droit de refuser l’accès au pertuis et au collecteur. Musée des Egouts - Pavillon d’Octroi - Porte d’Anderlecht Sam Mas
HIDE & SEEKS FESTIVAL Encore une fois, Bruxelles nous surprend par les trésors et pépites de lieux insolites qu’elle recèle. Ces endroits cachés ont été dénichés par l’équipe de Muziekpublique, et ouvrent leur porte pour une représentation unique au son des musiques traditionnelles des cultures du monde. Laissez-vous transporter lors d’un concert inattendu dans un temple maçonnique, dans la savonnerie bruxelloise, dans une salle d’escalade et bien d’autres lieux encore ! La promesse de moments magiques inoubliables. Comme chaque année, la formule est unique et inédite en son genre, et les places limitées. Un festival auquel il convient ed participer sans modération du lundi 22 au samedi 27 août 2022. Voyez les détails complets sur le www.muziekpublique.be
FESTIVAL THÉÂTRES NOMADES Théâtres Nomades, festival des arts de la rue et de théâtre, s’implante chaque été pendant quatre jours dans un espace vert bruxellois. Depuis sa création, il n’a eu de cesse de se réinventer mais conserve une identité qui lui est propre. Le caractère nomade, la programmation engagée, la démarche durable et l’accessibilité sont au cœur de son ADN et de son succès. Le festival se veut éclectique et ouvert sur le monde, de manière à générer surprise et curiosité. Il réunit chaque année plus de 35 compagnies de domaines artistiques divers : théâtre, cirque, conte, danse, marionnettes, etc. La programmation fait la part belle à la création belge, et notamment aux jeunes artistes, tout en ayant à cœur d’inviter quelques compagnies internationales également. Cet événement ouvrira ses portes au Bois de la Cambre (accès via le croisement entre l’Avenue de l’Orée et l’Avenue de Flore) du jeudi 18 au dimanche 21 août 2022 et reste bien entendu 100% gratuit. Voyez toutes les informations pratiques sur le site officiel www.festivaltheatresnomades.be
EXPOSITION : TOUTÂNKHAMON - SA TOMBE ET SES TRÉSORS L’exposition « Toutânkhamon : Sa Tombe et Ses Trésors » propose une plongée inédite dans l'Égypte Antique. Avec ses centaines d'objets parfaitement reconstitués, ses décors époustouflants et ses explications passionnantes, il s’agit de l'expo la plus complète au monde pour découvrir la vie du jeune roi. Alors, prêt(e) à voyager dans la légende des pharaons ? La découverte de son tombeau Le 4 novembre 1922 à Louxor, après cinq années de fouilles infructueuses dans la Vallée des Rois, l'archéologue britannique Howard Carter a fait une découverte incroyable qui reste à ce jour sans précédent. Éclairé par la lueur d’une bougie, il s’est retrouvé face l’impressionnante tombe dorée du pharaon Toutânkhamon, mort il y a plus de trois mille ans, entouré de tous ses trésors. Un monarque dont on ne connaissait pas grand-chose et qui Le tombeau Son tombeau recélait un fastueux sarcophage de cent dix kilos doté d’un masque d'or et de plus de deux mille objets en parfait état. Il est à noter qu’il s’agissait d’une des rares tombes à avoir été trouvée dans un état impeccable avec du mobilier dont un splendide trône, plusieurs lits, des bijoux, des statuettes, des cannes, des vases, des éventails, des diadèmes et bien d’autres choses. Le fabuleux trésor retrouvé dans ce tombeau qui n’a pas été visité par les pillards laisse augurer de la magnificence des demeures ultimes offertes aux monarques. Il y a plus de trois millénaires Toutânkhamon est monté sur le trône en 1332 av. J.-C. à l'âge de neuf ans en tant que l'un des derniers rois de la XVIIIe dynastie. Son père était le roi hérétique Akhénaton. La réalisation la plus importante de son règne a été le rejet des réformes religieuses radicales de son père qui avaient déstabilisé tout le pays. Selon les dernières études, le jeune roi souffrait de graves maladies qui ont précipité son décès à même pas vingt ans. Les raisons de sa disparition n’ont pas été totalement élucidées, même si les experts s’accordent à affirmer qu’il souffrait de diverses pathologies. Certains parlent même d’un accident de char lancé à toute allure et qui lui aurait été fatal. Que voit-on dans l’exposition ? Il y a cent ans, le Metropolitan Museum avait envoyé Harry Burton comme photographe des fouilles. Ce dernier était « l'œil et la mémoire de Carter ». Avec son énorme appareil photo et ses plaques négatives encombrantes, il arpentait inlassablement le lieu de la découverte et avait installé son laboratoire et sa chambre noire dans la tombe voisine. Chaque étape des travaux d'excavation a ainsi été documentée en photographies jusque dans les moindres détails. En tout, deux mille huit cents négatifs sur verre grand format ont été tirés et répertorient toutes les découvertes et leur emplacement dans la tombe. Cette exposition reproduit le plus fidèlement possible ces clichés et les redistribue tels qu’ils sont apparus aux explorateurs. Grâce à la 3D, les visiteurs ressentent ce qu’a vu l’archéologue britannique lors de la découverte de cet inestimable trésor funéraire égyptien. Trois mille mètres carrés accueillent aujourd’hui et durant tout l’été plus de mille objets pour une immersion aussi réaliste que possible pour côtoyer l’une des momies les plus célèbres. Cela se passe à Tour et Taxis. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.tutankhamunexpo.com Av. du Port, 86C à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : JUSTINE ROBA Escale du Nord accueille durant tout l’été, les travaux de Justine Roba, jeune artiste belge. Depuis 2020, elle crée des œuvres chargées d'émotions. Elle nous propose, en toute simplicité, un voyage intuitif mêlant évasion, illusion et réflexion intérieure. Dans ses créations, elle incorpore le tracé spontané, sa sensibilité pour la couleur ainsi que des formes géométriques abstraites, imaginaires ou illuminées par la nature, notre lieu de vie. Depuis toute petite, elle partage ses projets artistiques avec son entourage. Elle met également sa créativité au service des particuliers désireux de décorer leur intérieur, leur espace de vie ou la vitrine de leur commerce en construisant avec eux des projets artistiques collaboratifs. Cette exposition est accessible du mercredi au samedi et ce jusqu’au 3 septembre 2022. Voyez tous les détails précis sur le site www.escaledunord.brussels
CINEMATEK : CYCLE FANNY ARDANT On l’a oublié, mais Fanny Ardant a fait sa première apparition dans le film de Joël Séria « Marie Poupée » en 1976, suivi par « Les chiens » d’Alain Jessua (1979). Elle a toutefois dû attendre que la réalisatrice Nina Companeez fasse appel à ses talents pour le feuilleton « Les dames de la côte » (1980) et qu’elle soit remarquée par François Truffaut, éternel jeune homme amoureuse de ses comédiennes, alors à la recherche du premier rôle féminin pour « La femme d’à côté » (1981), une sordide histoire d’amour et de jalousie défendue entre autres par Gérard Depardieu. Le résultat a naturellement été concluant et lui a valu les éloges de la presse unanime, saluant en elle la révélation de l’année. Ce succès a été immédiatement suivi par « Vivement dimanche » (1982) du même Truffaut. Au passage, elle a emménagé chez son metteur en scène et pygmalion et est entrée dans les encyclopédies pour avoir été sa dernière compagne. Par la suite, le septième art n’a eu de cesse de la solliciter pour tourner en compagnie des meilleurs : André Delvaux, Volker Schlonderff, Alain Resnais, Costa-Gavras, Ettore Scola, etc. En 2009, elle a décidé de se lancer à son tour dans la réalisation afin de donner naissance à quatre longs métrages qui se sont succédést jusqu’en 2017. Dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, Cinematek et Bozar ont décidé de rendre hommage à Fanny Ardant, celle dont la voix grave reste reconnaissable entre toutes, mais qui demeure bien sûr davantage qu’une voix. Depuis le début des années 1980, la comédienne a fait partie intégrante du cinéma français comme professionnelle unique pour accumuler une filmographie remarquable. Cet été, une quinzaine de films qui évoquent différents aspects de son parcours ont été sélectionnés. Retrouvez la programmation sur le site www.cinematek.be. Avis aux curieux et aux cinéphiles ! Rue Baron Horta, 9 à 1000 Bruxelles
ATELIER : L'HOMME ET SON IMAGE. LA REPRÉSENTATION HUMAINE DEPUIS L'ANTIQUITÉ Vous êtes attirés par la beauté classique, le rendu de la musculature et le sens des proportions des sculptures grecques ? Vous aimez observer l’expression des portraits romains ? Vous êtes passionnés par la ligne épurée des corps égyptiens ? Alors ce stage est fait pour vous ! Plongez durant deux jours dans le monde de l’art de l’Antiquité. En compagnie d’une guide du musée prenez le temps d’observer, d’analyser et de dessiner les représentations de l’homme en Egypte ancienne, en Grèce ou à Rome. Laissez-vous aussi guider dans l’atelier des moulages qui recèle tant de trésors… Dans l’atelier, inspirés par les objets du musée, vous pourrez expérimenter la peinture égyptienne avec des pigments naturels ou encore réaliser des ébauches de corps en terre inspirées de différentes sculptures. Pas besoin de savoir dessiner ou d’être un artiste pour suivre ce stage ! C’est au fil de la découverte des collections que se profile la créativité… Masterclass trilingue pour adultes du mardi 16 au mercredi 17 août de 9 heures 30 à 16 heures 30. Voyez les conditions pratiques sur le site www.artandhistory.museum Parc du Cinquantenaire, 10 à 1000 Bruxelles
STAGE : ET SI TU DEVENAIS EGYPTOLOGUE ? Le soleil brûle le sable du désert. Tu te reposes à l’ombre de ta tente en buvant un thé à la menthe avant de repartir fouiller… Et c’est alors que l’inespéré se produit ! Tu découvres enfin ces objets de l’Egypte antique que tu cherchais depuis si longtemps ! De retour au musée, commence le vrai travail : dessiner, mesurer, photographier, faire des recherches et exposer dans les vitrines. Deviens égyptologue pour une semaine et pars à la découverte des collections du Musée, en faisant connaissance avec de vrais chercheurs pour développer ta créativité dans l’atelier. Ce stage pour enfants de six à douze ans se déroule lundi 22 au vendredi 26 août 2022 au Musée Arts et Histoire. Le prix demandé est de 125 € (100 € par enfant pour les frères et sœurs). Voyez les modalités concrètes sur le site www.artandhistory.museum Parc du Cinquantenaire, 10 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : NIKOLAY KARABINOVYCH Why do you stand at the door ? est le résultat d’une recherche menée en 2021 et 2022 par l’artiste ukrainien Nikolay Karabinovych (1988, Odesa) au sein du Musée Juif de Belgique. Dans le « Project Space », vidéo, son, textes et installation de cet artiste multidisciplinaire sont mis en dialogue avec des publications des années 1920-1930 préservées dans la bibliothèque yiddish du musée, ainsi qu’avec des objets issus du patrimoine juif. Le titre de l’exposition Why do you stand at the door? (Pourquoi te tiens-tu devant la porte?) est extrait de la chanson du folklore yiddish ‘Lomir Zikh Iberbetn’ (Réconcilions -nous). Les paroles sont un appel à l’entente amoureuse, autant qu’une référence à la crainte du départ de l’autre. Le vers est utilisé ici comme une métaphore pour aborder les migrations des communautés juives d’Europe de l’Est, un nomadisme forcé qui se lit également dans les livres en yiddish conservés au Musée Juif de Belgique. Ces ouvrages constituent un point de départ pour l’exploration poétique d’une mémoire collective oubliée. L’attention se porte en particulier sur les témoignages des femmes, des autrices yiddish de l’entre -deux-guerres dont les livres mettent en lumière cette histoire de migrations mise de côté par les récits et mythes nationaux. À travers cette proposition menée en partenariat avec la commissaire d’exposition Patricia Couvet (1994, Paris), Nikolay Karabinovych cherche à faire dialoguer objets et documents d’archives avec des sources non référencées par les institutions, en vue de valoriser ce qui n’est pas perceptible et d’en exhumer des narrations invisibilisées. Sa démarche permet la réécriture d’une histoire collective, au moment où l’un des fondements de cette histoire, le yiddish, langue diasporique par excellence, semble en voie de disparaître. Elle offre aussi un cadre pour comprendre les expériences personnelles des migrations forcées d’hier et d’aujourd’hui. Elle nous rappelle que l’artiste se veut, à chaque époque, témoin de son temps : source critique de l’historiographie, il rend visible les fêlures d’une histoire dont on ne peut ignorer qu’elle se déroule tous les jours à Kyiv, Odesa, Bucha, Kharkiv ou encore Mariupol. Une exposition à découvrir au Musée juif de Belgique jusqu’au 23 octobre 2022. Voyez plus de détails sur le site www.mjb-jmb.org Rue des Minimes, 21 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : VIVIAN MAIER À partir du début des années cinquante et pendant plusieurs dizaines d’années, Vivian Maier (1926-2009) a été gouvernante d’enfants à New York et à Chicago. Une période qu’elle a mise aussi à profit pour observer et documenter méticuleusement le monde autour d’elle. Comme elle n’a pratiquement jamais développé ses négatifs, presque personne n’a vu son travail photographique de son vivant. Pendant toute sa vie, elle est restée dans l’anonymat et son œuvre n’a été découverte qu’en 2007 : plus de 120.000 négatifs, films super 8 et super 16, etc. Une collection d’archives inédites présentée pour la première fois au public. La (re)découverte de cette artiste qui s’est consacrée corps et âme à son travail photographique a révélé un des plus grands talents de la photographie de rue. L’analyse de son œuvre met en avant des thèmes récurrents : scènes de rue, portrait, monde des enfants et autoportraits, un des moyens d’expression qu’elle privilégie. Ces autoportraits sont à ce point nombreux, et leurs formes et variations diversifiées qu’ils en deviennent une langue dans la langue. L’expression d’une dualité, par des reflets de son visage ou de son ombre : chaque autoportrait de Vivian Maier produit une preuve irréfutable de sa présence. Un voyage à travers les rues de ces grandes villes au fil de plus de 80 autoportraits. Un événement à découvrir à Bozar jusqu’au 28 août 2022. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.bozar.be Rue Ravenstein, 23 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : LUCY RAVEN Dans cette exposition, Lucy Raven (née en 1977 à Tucson, États-Unis) présente deux installations d’envergure. La première est dévoilée pour la première fois, tandis que la seconde est le fruit d’une commande récente de la Dia Art Foundation de New York. Cet ensemble explore les propriétés de la pression extrême et le changement d’état de la matière (solide, liquide, gazeux) observés respectivement sur un stand de tirs au Nouveau-Mexique et dans une centrale à béton en Idaho. Avec ces travaux, l’artiste explore les techniques de l’image avec caméras haute vitesse, drones, graphie de l’ombre, faisant de la physicalité de l’image un enjeu. Ainsi, des ondes nébuleuses viennent secouer la caméra, des éclats d’obus transpercent le papier photosensible. Elle explique son travail avec ces mots : Pour moi, le progrès technique qui permettent de filmer des images en mouvement et la popularité du western comme genre cinématographique ont façonné notre image, et notre imaginaire, des paysages de l’ouest. Ces films étaient basés sur le fantasme d’un Ouest désert, offert à la conquête, issu d’une manière de voir très sélective, ou plutôt d’une manière de ne pas voir ceux et ce qui y vivaient déjà. Des œuvres à voir au Wiels jusqu’au 14 août 2022. Voyez toutes les modalités pratiques sur le site www.wiels.org Avenue Van Volxem, 354 à 1190 Bruxelles
MARIONETTES : GUIGNOLET AU BOIS DE LA CAMBRE Lorsque les beaux jours reviennent, Guignolet sort de sa retraite hivernale et, pour la première fois, installe son castelet dans le Bois de la Cambre, non loin du Théâtre de Poche, pour y couler une saison ensoleillée et ravir les enfants qui ne sont pas trop pressés de retourner à l’école. L’occasion de découvrir avec la Cie du Théâtre royal des Cœurs de Bois des mondes enchanteurs, où les histoires aident chacun à grandir. Tendres, poétiques et toujours positifs, les spectacles se déroulent en plein air dans un cadre verdoyant, menés depuis plusieurs décennies par des manipulateurs qui savent de quelle manière susciter l’attention des petits. Rien à voir avec le théâtre folklorique de Toone, qui se caractérise par des marionnettes à tringle et qui adopte volontiers le second degré et use d’expressions locales ! Guignolet et ses amis s’inscrivent dans l’univers de l’enfance, plus feutré et empreint de douceur, sans aucune ambiguïté, et sont animées par une main qui se glisse dans une gaine souple. Une cinquantaine de représentations se déroulent du mercredi au dimanche à 15 heures et ce jusqu’au 21 août 2022. Voilà les titres des spectacles proposés : « Guignolet et le mouton d’Anatole », « Guignolet et les fantômes », « Guignolet et les extraterrestres », « Guignolet et le diable », Guignolet et le petit Chaperon Rouge ». Jolie mise en bouche ! Pour découvrir cet événement, je vous invite à consulter toutes les informations pratiques sur le site www.guignolet.brussels Paul Huet
TOONE : FAUST De quelle manière Toone en est-il arrivé à adapter l’opéra de Charles Gounod ? Au temps où La Monnaie, maintenant Opéra National, disposait de privilèges écrasants par rapport aux autres théâtres de Bruxelles, Tôône-Dufeys (une autre dynastie de marionnettistes) se rendait régulièrement dans ce lieu de culture lyrique pour y copier le plus fidèlement possible ces grands spectacles inaccessibles pour le peuple des Marolles et les présenter ensuite dans son théâtre. Les marionnettes traditionnelles étaient alors le seul moyen d’éducation populaire d’un public toujours prêt à s’enthousiasmer pour les plus grandes œuvres. Toone VII à son tour se pencha sur l’opéra de Gounod pour en faire une adaptation parodique. « ... Tandis que le docteur Faust boit une dernière kriek dans l’espoir d’une mort subite, un inquiétant personnage, le Deuvel, vient lui proposer des paquets de billets de mille et une belle mokske au doux nom de Marguerite en échange de son âme. On fait un tour à la foire du Midi, on passe en coulisses une nuit enchanteresse et... c’est le coup de foudre ! Avec une conséquence pour Marguerite : “Des robes qui vont devenir trop courtes par devant”. Quiconque s’aventure dans le vaste univers que représente ce sujet comprendra, à travers l’humour zwanzé, le sentiment de paix intérieure qui l’anime. On devine aisément ce que peuvent donner des mélodies telles que Salut, demeure chaste et pure ou Anges purs, anges radieux accommodées à la sauce bruxelloise... Fidèle à la tradition, Nicolas Géal pousse toutes les voix et n’hésite pas à entonner le grand air des bijoux à l’égal de notre célèbre Castafiore nationale. Un classique revisité à découvrir jusque fin août 2022 au Théâtre de Toone pour passer un joyeux moment de détente. Voyez tous les détails complémentaires sur le site www.toone.be Rue du marché-aux-Herbes, 66 (Impasse Sainte Pétronille) à 1000 Bruxelles
LES TRIBULATIONS DE LA FAMILLE ZOEGEMEEL À BRUSSELLES 1.15 — Et ton copain, qu'est-ce qu'il devient celui-là ? Je sais plus comment il s'appelle encore, mais c'est un Romain, c'est ça ? — Mais non P'pa, c'est Marius et il est roumain. Et aussi Rom. — C'est ce qui me semblait bien. Tu vois que j'avais raison ? Tu disais qu'il joue de la guitare et du violon dans un orchestre. — Ben oué, et il chante aussi. Ça fait mennant huit mois qu'on est ensemble. Il m'a présentée à sa famille. Tu aurais dû voir ça : tous les garçons me regardaient comme si j'étais un morceau de chocolat fondant. — Ça je veux bien croire, tiens ! Une belle fille comme toi, ils doivent pas voir ça souvent ! Pour une fois qu'ils auraient quelque chose de bien à regarder... Mais puûte van de koech, hein, Jacqueline ! Ces petits crapuleux doivent pas croire que ça tombe tout cuit dans leur assiette. — Och oué, P'pa. Il y a juchte Marius qui peut me donner des baises. Il dit qu'il aime bien mes yeux. — Oué, oué, je connais ça. On dit comme ça les yeux mais on pense à autre chose, ça tu peux me croire. Faut rien leur donner, hein, Line ! Rien de knots, tu entends ? Sinon ils vont faire la file, zenne ! Ces castars ça sait pas garder ses mains chez eux. Et avec ce Marius,tu es sûre que c'est pas une striep ? — Ses parents sont très contents. — Eh ben ça, ça m'étonne pas, tiens ! Potverdekke une belle fille avec un métier, qui rapporte son argent à la maison, avec des parents qui ont une maison à Brusselles, on laisse pas passer une okkoge pareille, qu'est-ce que tu crois donc ? Eux ils ont juchte une roulotte pour huit ou neuf personnes ! — C'est pas vrai ça, P'pa ! Ils ont une villa à Zebil, près du lac Babadag. Je pourrai y aller avec eux cet été. — À ton nez brodé ! Gien kweste van ! Tu vas là-bas et tu reviens pas, Jacqueline ! Ils traitent encore les Blanches, t'sais ? — Oué, comme toi tu traites les Noirs ! Mo enfin, P'pa, c'est fini ce temps-là ! — Déjà s'appeler Zebil, c'est louche. Ils auraient dû dire Ietembil ! Et le lac, comment tu dis ça ? Dag Baba ? T'es vi te lache ! Il y a janvermille des tas de braves kets à Brusselles et toi tu vas fréquenter sur un peï qui a un nom pas catholique, avec des parents qui ont une maison à Ietembil mais qui viennent en roulotte en Belgique ! Tu deviens quand même un peu djoumdjoum, t'sais ! — C'est l'amour, ça. Tu vois un garçon et tout d'un coup tu sens quelque chose dans ton ventre et dans ta tête qui te dit que c'est lui. — Tu sais mieux avoir ça avec un ket de chez nous, hein ! Tiens moi quand je vois le portrait chez Liliane dans son salon. Tu sais, juchte au-dessus de son poêle à pellets ? — La belle gitane ? — Oué. Enfin, belle, ça c'est pour les ceux qui aiment ce genre-là. Awel quand je vois ses yeux noirs comme de l'anthracite de la Bacnure et sa peau comme une ziemvel, je dois vite penser à ma Treene avec ses beaux yeux bleus et sa peau bien blanche, pour pas dégobiller, ara ! — Oué mais toi c'est pas moi. Moi je fonds pour des yeux comme ça et lui, mon Marius, il est comme toi, il aime mes yeux bleus et ma peau claire. Qu'est-ce que tu dis en bas de ça ? — Je dis que je dois reconnaître que ce peï a du goût. Mais enfin, ça, tous les hommes aiment mieux les blondes avec des yeux bleus et une peau claire, que ces espèces de noires qui ont l'air qu'elles sont pas lavées depuis des années. On n'en peut rien, c'est comme ça. Et ton Marius, il chante des chansons d'amour, sans doute, comme le Rossen Tino dans son temps ? — Ouille je comprends pas les paroles, t'sais ! Mais c'est joli et puis, on a envie de danser là-dessus. Direct quand tu l'entends. Si je suis là, il vient près de moi avec son micro et il chante juchte pour moi toute seule. — Oué, dis ! Et quand tu n'es pas là alors il chante dans l'oreille d'une autre fille. Je connais ça ! — Non, non, P'pa. Il m'aime. — Et il chante « Zie de ga ma geire ? » en romain, net pour toi ? Il sait bien tirer son plan ce peï ! Moi je dis : En ga geluuft da. Reviens pas avec un poechenel dans ton tiroir, hein, Line, car alors je te regarde plus. Un bastoed romain comme klaanzaun ça m'intéresse pas. — Roumain, P'pa !
— Oué allez ! Moi j'aime mieux que tu fréquentes sur un ket de Brusselles qui cause comme nous et qui sait chanter Vie van Boma sans un accent pointu, ara. Que c'est un goulaffe de stoemp ou un buveur invertébré de lambic ça je m'en fous, mais un peï de chez nous c'est quand même mieux moi je trouve. — Si tu crois que ça court les rues, tu te trompes drôlement. Il y a plus que des Espingos, des Turcs, des Marocains et presque plus de Brusselleirs de souche. Moi j'aime ça bien, ces mélanges. — Allez bon, un mélangé comme tu dis c'est toujours mieux qu'un Romain, hein, Jacqueline ? Un qui habite chez nous, et pas à Ietembil, potverdekke ! Un qui sait boire ses bières à la tutte et surtout, ma Line ! Surtout ! Un qui sait zwanzer. C'est le prinsipoltsjte ça : un qui sait zwanzer. — Mais l'amour ça choisit pas, P'pa ! L'amour, c'est quand une fille rencontre celui qui doit devenir ton mari. — Och erme, Line ! Si tu crois encore ça tu peux aussi encore croire à Saint-Nicolas et tout ce bazaar. Ton Romain il fréquente déjà sur trois ou quatre autres filles de chez lui, et c'est pas ta main qu'il veut, ça tu peux me croire. — Et un Brusseleir il fait pas ça, tu crois ? Mon œil en parachute ! C'est tous des coureurs, mais une fille doit quand même choisir, alors moi j'ai choisi Marius et c'est comme ça. — Et si je dis non ? — Eh ben tu pourras mettre ta tête tout près. J'ai eu tous mes vaccins, ara ! Georges Roland LEXIQUE puûte van de koech : bas les pattes juchte : juste Rien de knots : rien du tout zenne : tu sais castars : zigotos striep : passade Potverdekke : juron bruxellois okkoge : occasion Gien kweste van : pas question Ietembil : cuisse légère T'es vi te lache : c'est pour rire janvermille : juron bruxellois djoum-djoum : fêlée Awel : eh bien ziemvel : peau de chamois en bas de ça : de ça Rossen Tino : Tino Rossi Zie de ga ma geire ?; tu m'aimes ? En ga geluuft da : et tu gobes ça poechenel dans ton tiroir : enceinte bastoed : bâtard klaanzaun : petit-fils goulaffe : gourmand stoemp : spécialité bruxelloise à la tutte : au goulot prinsipoltsjte : principal och erme : mon Dieu Petit rappel : Les expressions bruxelloises utilisées dans les textes se basent sur les travaux de Louis Quiévreux, de Jean-Pierre Vanden Branden et de Jean-Jacques De Gheyndt, d'autres me viennent de mon père. Je les remercie tous vivement.
EXPOSITION : OMAR BA L’œuvre d’Omar Ba (1977, Sénégal) est caractérisée par sa nature énigmatique et sa grande intensité poétique. A rebours d’une narration didactique, il cherche à l’inverse à exprimer son subconscient et son interprétation symbolique du réel. L’artiste traite de thèmes comme le chaos, la destruction et la dictature, drapant son discours politique d’un voile de poésie grâce à un langage pictural qui lui est entièrement propre, à la fois féroce et délicat. Omar Ba vit et travaille entre Dakar, Genève, Bruxelles, Paris et New-York. Partagé entre plusieurs continents, il développe une réflexion issue d’une hybridation permanente, loin des stéréotypes liés à ses racines africaines. Cette hybridation se retrouve également dans ses toiles où se côtoient touches organiques et couleurs flamboyantes, mixant les formes, les techniques et les textures (acrylique, gouache, crayon et même typex). Ba peint sur fond noir (sur carton ondulé ou sur toile), demandant ainsi au spectateur de s’adapter littéralement et métaphoriquement à l’obscurité. C’est une quinzaine de toiles de grand format, réalisées spécialement pour l’exposition, qui seront présentées au public aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Son iconographie, à la fois engagée politiquement et socialement, mais aussi empreinte de mythologie personnelle, soulève des questions historiques et intemporelles, tout en rayonnant un message artistique résolument contemporain, que l’on peut retrouver tant chez des artistes proches du surréalisme que du symbolisme. Omar Ba dénonce de son pinceau le chaos du monde. Un travail à découvrir jusqu’au 7 août 2022. Plus de détails sur le site www.fine-arts-museum.be Rue de la Régence, 3 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : CHARLOTTE PERRIAND Cette artiste a consacré son existence à améliorer les conditions de vie du plus grand nombre, créant un « art d’habiter » en lien avec la nature. Elle a utilisé la photographie comme outil d’observation du réel, mais aussi pour défendre sa conception d’un monde nouveau. En résonance avec nos préoccupations actuelles, elle utilise au cours des années 1930, le photomontage géant pour dénoncer l’urbanisme insalubre et donner sa vision de conditions de vie meilleures. Ses fresques photographiques témoignent de la modernité de son approche, que ce soit La Grande Misère de Paris (1936), la salle d’attente du ministre de l’Agriculture (1937), ou le pavillon du ministère de l’Agriculture à l’Exposition internationale des arts et techniques de la vie moderne qui a lieu à Paris en 1937, composé avec Fernand Léger. L’exposition propose une plongée dans sa conception du monde à travers sa méthode de travail et son incroyable collection de photographies – tirages d’époque, négatifs, magazines découpés, photographies personnelles –, archives mises en regard de la reconstitution de ses photomontages monumentaux. Une exposition à découvrir jusqu’au 28 août 2022 au Design Museum. Voyez les détails complets sur le site www.designmuseum.brussels Place de Belgique à 1020 Bruxelles
EXPOSITION : TOOTS 100 – THE SOUND OF A BELGIAN LEGEND Bruxellois marollien né d’une mère anversoise et d’un père bruxellois, à trois ans déjà, Toots Thielemans frôla les touches du piano à bretelles dans le caberdouche que tenaient ses parents rue Haute. Atteint d’un début de pneumonie, le médecin dira à ses géniteurs : « Plutôt que de jouer de l’accordéon, qu’il s’adonne à l’harmonica ». Au départ, il fut guitariste et siffleur. Il apprit la guitare chez un professeur espagnol. Il était un élève studieux. Ayant terminé avec fruit ses humanités, il accomplit une année de mathématiques à l’ULB ; mais la guerre interrompit sa formation. Longtemps après, il sera reçu docteur honoris causa de l’Université Libre de Bruxelles. Très sympathique, plein d’humour et de gouaille, il n’eut jamais la grosse tête. Littéralement fou de jazz, il décida au début des années 50 de quitter la Belgique (auquel il restera toujours attaché) pour les Etats-Unis où, longtemps, il vécut à « Big Apple ». A qui veut l’entendre, il répéta : « Je suis Belgo-Américain. » Toots Thielemans parlait français, flamand, anglais et se débrouillait en suédois. Il eut un énorme succès en ce pays qu’il aimait. A New York, il fut admis au prestigieux Carnegie Hall. Une consécration ! Découvert par Benny Goodman, il démarra une carrière internationale et fut le seul Blanc accepté dans les tournées alors dites noires, années terribles où les gens de couleur connaissaient la chape de la ségrégation raciale. Le petit Toots allait faire les courses, quand les orchestres voyageaient dans les états racistes. Ray Charles, avec qui il collaborera, fut victime comme tant d’autres de ce rejet violent autant qu’injustifiable. En chemin vers le succès, il composera « Bluesette », succès international, qui assoira sa renommée. Il se consacrera alors, quasi entièrement, à l’harmonica lui donnant ses lettres de noblesse ; abandonnant la guitare qui était son médium jusqu’alors. Instrument qui obtiendra enfin son et que nombre d’artistes de variétés utilisèrent également (Bob Dylan, Bryan Ferry, les Stones, Hugues Aufray). Toots Thielemans accompagnera les stars : Dizzy Gillespie, Louis Armstrong, l’immense Charlie Parker, Ella Fitzgerald, Ray Charles, le divin Miles Davis, Frank Sinatra, Paul Simon et Philippe Catherine. Une chanson fut enregistrée avec son ami Adamo. Rappelons qu’il participa à l’enregistrement de musiques de film : « Macadam Cow-Boy », « Le guignolo », « The Surgarland Express » « Turk Fruits », « L’état de grâce », « Jean de Florette » comme soliste et à un merveilleux dessin animé suédois « Dunder Klumpen », en tant que compositeur. Toots stoppa sa carrière à 92 ans et il fut nommé baron par le Roi Albert II. Précis et doté d’une oreille très fine, son réel charisme fit merveille. Un « espace » lui fut dédié à Saint-Josse, un autre à La Hulpe. Ses notes bleues s’envolent aux cieux étoilés : « Star Dust Memories » dirait Woody Allen clarinettiste de jazz. On the road again, Toots ! Aujourd’hui une exposition lui rend un vibrant hommage du 22 avril au 30 août 2022 au Palais de Charles de Lorraine. Voyez toutes les informations concrètes sur le site www.kbr.be Monts des Arts, 28 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : MAGICAL THEATRES La Porte de Hal vous ouvre les portes d’un univers rempli d’histoires, des pièces de Shakespeare aux contes des frères Grimm. Vous pourrez découvrir le charme de ces petites œuvres d’art apparues il y a deux siècles, reflétant la grandeur des scènes théâtrales de Londres, Paris ou Vienne. Au cœur de l’exposition, le chat botté en version animée guidera petits et grands. Il vous emmènera dans les salons bourgeois de l’époque pour vous conter l’histoire et le contexte de ce patrimoine exceptionnel. Venez découvrir la diversité et la sophistication des décors d’autrefois mais aussi les versions d’artistes actuels. L'exposition se déroulera au troisième étage du bâtiment féérique du Musée de la Porte de Hal. Ce vestige de la seconde enceinte de Bruxelles dévoile dans une présentation permanente l’époque où la ville était fortifiée et propose un panorama impressionnant depuis son chemin de ronde. Les expositions temporaires qui y sont présentées annuellement mettent l'accent sur divers aspects de la vie quotidienne d’hier et d’aujourd’hui, en puisant régulièrement dans les collections d'Ethnologie européenne des Musées royaux d'Art et d'Histoire. Le théâtre en papier, théâtre miniature ou théâtre de table, était, autrefois, une source de plaisir pour petits et grands. Il est, aujourd’hui, un peu tombé dans l’oubli. L’exposition « Magical Theatres » va vous faire revivre ce monde magique du théâtre jouet, ses merveilleux décors colorés et ses petits acteurs de papier. Un événement qui écarte le châssis du rêve pour le concrétiser jusqu’au 4 décembre 2022 et qui est à découvrir à la Porte de Hal. Plus de détails sur le site www.brusselsmuseums.be Boulevard du Midi, 150 à 1060 Bruxelles
CAMPAGNE DE SENSIBILISATION ET DE VISIBILITÉ DES PERSONNES LGBTQ+ ISSUES DE CULTURES ÉTRANGÈRES "Expressions Mixtes" est un film documentaire qui permet aux personnes LGBTQ+ (principalement d'origines étrangères et habitant la Belgique) de témoigner de leur vécu et de leur parcours de vie face caméra, qu’elles soient hommes, femmes, transgenres, intersexes, non-binaires, etc. Ce long métrage aborde la richesse de la diversité de leur quotidien, avec les ségrégations qui y sont liées, et traite des discriminations qui concernent leur ethnie, leur orientation sexuelle et affective, leur milieu social, leur vie professionnelle, leur identité de genre et, entre autres, leur confession religieuse. Ce projet permet aux personnes issues de plusieurs cadres socioculturels de pouvoir s'exprimer en toute liberté, d’exposer leurs questionnements et leurs doutes, ainsi que leurs difficultés et leurs aspirations. Libérer leur parole permet avant tout de les libérer eux-mêmes mais, surtout, d’inspirer d'autres personnes dans la même situation. Ce faisant, ils contribuent enfin à sensibiliser autrui sur leur situation personnelle pour combattre l'homophobie qui existe autant à l'extérieur qu'à l'intérieur de leurs propres communautés. "Expressions Mixtes" se veut un espace de parole pour celles et ceux qui se sont accomplis suite à différentes formes de rejet et qui travaillent, encore aujourd’hui, à la défense de causes humanistes et ce de manière militante, artistique ou professionnelle. Le site www.expressionsmixtes.com permet d’accéder à différentes associations pour du soutien moral, psychologique et/ou tout autre domaine. Le site permet également de visionner gratuitement le documentaire « Expressions mixtes » produit par Artfusion, réalisé et monté par Raphaël Kalengayi et Federico Ariu. Sam Mas
EXPOSITION : PORTRAIT DE FEMMES Retour sur une exposition qui se tient à la Villa Empain jusqu’au 4 septembre. Elle est consacrée au Portrait de femmes depuis la Préhistoire jusqu’à nos jours. Un portrait contrasté ! Dans un précédent article, nous avons montré comment ces femmes étaient le produit du regard masculin. Les artistes les ont déclinées dans des poses suggestives, qui plaisaient aux hommes. Ils les ont représentées le plus souvent nues, comme on peut le voir avec les Vénus de l’âge de pierre ou celles du monde antique. Le Moyen Age chrétien les a transformées en madones irréprochables. Léonard de Vinci insistait sur le degré de leur vertu, en leur recommandant de serrer les jambes sous leur robe, d’avoir la tête inclinée et le regard baissé. Ce sont des poses de saintes qu’il nous présente et qu’il a étudiées dans ses tableaux. Les peintres plus tard ont dévêtu les femmes dans des nus intimes qu’ils nous font partager : elles dorment ici, s’éveillent là ou vont au bain dans une tenue négligée qui, au XVIIIe siècle, laisse place à la nudité érotique. Ou à l’exotisme avec la vague orientaliste. La femme est le modèle du peintre, sa chose, parfois sa muse, qu’il s’approprie pour un public essentiellement masculin. C’était le sujet de la première partie de l’exposition que nous avons décrite précédemment. Portraits et autoportraits à partir de 1950 Le regard porté sur la femme change dans la seconde moitié du XXe siècle. Elle a acquis son indépendance, elle ouvre un compte en banque sans l’autorisation de l’homme, elle participe comme lui aux élections depuis 1950, date phare dans l’exposition et dans toute l’Europe. En France, ce fut en 1944, sous le Général de Gaulle. En Belgique, en 1948. En Tunisie, en 1956. Et ailleurs encore dans le monde. L’émancipation féminine était en marche et allait changer le regard sur la femme. Aujourd’hui, il y a beaucoup plus de femmes inscrites dans les écoles d’art que d’hommes. Et les portraitistes sont davantage des femmes. Dans les six dernières chambres de l’exposition, vous verrez ces femmes à travers de nouveaux médias comme la photographie ou la vidéo, qui les prennent sur le vif, dans la rue ou dans leurs activités quotidiennes. A travers ces photos, le paysage où paraît la femme devient l’état d’âme du spectateur qui explore un espace psychique. Cette femme debout, par exemple, devant un mur à la frontière libanoisraélienne, évoque les femmes activistes du Moyen Orient luttant pour leur indépendance ou celle de leur pays. Photographiées par Rania
Matar, elles dialoguent avec, au milieu de la pièce, les chaussures à talon transformées en bronze ou recouvertes de punaises qui vont s’enfoncer dans le pied des activistes. Le combat des femmes pour la liberté n’est pas gagné, comme on peut le voir. D’autres photos montrent l’ambivalence du genre humain, déjà posée dans Le Banquet de Platon qui affirmait que chacun de nous n’est qu’une moitié de l’autre et qu’on est tous à la recherche de notre alter ego. C’est le mythe de l’hermaphrodite mi-homme, mi-femme par ses attributs. Ce sont aussi Les Travestis de Lisetta Carmi, les portraits énigmatiques de Gauthier Hubert ou l’œuvre de Chaza Charafeddine, qui visualisent la question du genre présente dans cette exposition. La vidéo de Rosalind Nashashibi et Lucy Skaer, intitulée Why are You Angry ?, est une réponse à la peinture post-impressionniste de Gauguin sur les femmes de Polynésie. Prenant les poses du peintre, elles s’interrogent sur ce qu’il a voulu faire en les peignant ainsi, avec des couleurs franches et simplifiées qui témoignent de leur nature primitive. Baudelaire parlait, dans Parfum exotique, « des femmes dont l’œil par sa franchise étonne », par rapport à la femme occidentale soumise au regard masculin. C’est un regard critique sur Gauguin que portent nos Tahitiennes à l’écran. Pour se faire une idée de la complexité d’être une femme aujourd’hui, le public est invité, à la fin de l’exposition, à porter des chaussures féminines présentées dans le Grand Salon et à écouter les récits des femmes qui sont interviewées. Qu’est-ce que c’est que d’être une travailleuse du sexe, d’avoir passé des années en prison, d’être une enfant qui grandit à Téhéran, une réfugiée syrienne ou une vétérane de la guerre ? Vous découvrirez les réponses à ces questions au fil de l’exposition foisonnante orchestrée par Louma Salamé, directrice de la Fondation Boghossian qui l’organise. Portrait de femmes est visible jusqu’au 4 septembre à la Villa Empain. Plus de détails sur www.boghossianfoundation.be Av. Franklin Roosevelt, 67 à 1050 Bruxelles Michel Lequeux
EXPOSITION : BALADE REPTILIENNE A l'occasion de ses vingt ans, le Musée d'Art Fantastique propose l'exposition collective Balade Reptilienne. De nombreux artistes ont réinterprété des crocodiles en résine mis à leur disposition. Du Crokot'Frit au Croco-timbré, venez découvrir ces drôles de créatures et visiter cette série atypique et unique à Bruxelles. Un voyage au sein d'un univers atypique et féériques au pays des reptiles. Un évènement bien sûr pour tous ceux qui ne partent pas en vacances, qui sont dans l’attente de leur avion ou qui sont déjà revenus. Rien d’un tel qu’un crocodile pour se mettre en appétit. Attention particulière pour les Odile, car on le sait ces bestioles croquent Odile (pour le jeu de mots potache) ! Une exposition à découvrir jusqu’au 28 août 2022. Plus de détails sur le site www.fantastic-museum.be Rue Américaine, 7 à 1070 Bruxelles
EXPOSITION : THIS IS WHAT YOU CAME FOR Cette exposition a été conçue sous la forme d’un tutoiement et est née d’actions et de créations quasiment rituelles avec un mélange de sculpture, d’installation et de vidéo. Els Dietvorst est une plasticienne de chez nous, lauréate du BelgianArtPrize 2021, née à Kapellen en 1964. Depuis douze ans, elle vit et travaille dans le sud-est de l’Irlande. Son travail s’axe entièrement sur une série de questionnements tels le racisme, la migration des individus et le changement climatique. Des sujets forts et récurrents dans son élaboration. L’idée de la présente manifestation est née durant la crise du Covid pour rapprocher les citoyens et interpeller les spectateurs. « This is what you came for » (qui se traduit plus ou moins par C’est ce pour quoi vous êtes venus) a été l’occasion de rassembler des travaux qui proposent une plongée en apnée dans l’univers de cette créatrice qui n’a pas froid aux yeux. Un événement à découvrir à la Centrale du 28 avril au 18 septembre 2022. Voyez toutes les informations pratiques sur le site officiel www.centrale.brussels Place Sainte Catherine, 44 à 1000 Bruxelles André Metzinger
EXPOSITION : T-REX Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Tyrannosaurus rex.Au-delà des images, des films et des mythes, cette expo vous invite à une vraie rencontre avec cet animal fascinant, probablement le plus célèbre des dinosaures. Dès l’entrée, vivez un face à face spectaculaire avec une femelle T. rex de 67 millions d’années. Elle s’appelle Trix et vous accueille en position d’attaque. Son squelette, un moulage 3D de haute qualité scientifique, est juste époustouflant. Ensuite, apprenez à la connaître. Le parcours de l’expo vous propose six premiers interactifs pour comprendre le travail des paléontologues et découvrir l’époque à laquelle Trix a vécu, son âge lors de sa mort, son alimentation, l’origine de ses blessures et bien plus encore. Autant de questions auxquelles les scientifiques ont répondu en examinant ses os fossilisés et les roches dans lesquelles ils l’ont trouvée. Six autres interactifs vous permettent d’en apprendre plus sur la paléobiologie du T. rex en général : naissance, alimentation, déplacements… Relèverez-vous les défis que vous proposent ces interactifs ? Il faudra notamment sauter en selle pour défier le T. rex à la course, faire appel à son imagination pour colorer sa peau, tenter de séduire Trix par une danse, participer à un quizz hilarant… Une expo à vivre avec 12 interactifs-jeux qui jalonnent votre parcours : jeu électro, microscope, vidéos, quizz, touche-à-tout et défis. Particulièrement destinée aux enfants dès 5 ans, elle fera le bonheur de tous les mordus de dinos ! A voir en famille jusqu’au 7 août 2022 au Musée des Sciences naturelles. Voyez toutes les informations précises sur www.naturalsciences.be Rue Vautier, 29 à 1050 Bruxelles
EXPOSITION : CHRISTIAN DOTREMONT À l’occasion du centenaire de la naissance du poète et peintre belge Christian Dotremont, les Musées royaux des Beaux-Arts et les Archives & Musée de la Littérature lui consacrent une exposition exceptionnelle. Plus de 120 œuvres sur papier mettent en lumière sa saisissante création graphique, oscillant entre écriture et peinture. Artiste majeur de la seconde moitié du XXe siècle, cofondateur du mouvement CoBrA, le belge Christian Dotremont (1922-1979) fut l’un des premiers à élever l’écriture au rang d’art plastique. Novateur, il invente les « logogrammes », véritables poèmes graphiques, tracés au pinceau avec une fabuleuse spontanéité. Les mots qu’il couche impulsivement sur papier s’allongent, se distordent jusqu’à créer une composition d’une grande expressivité. Écriture et peinture fusionnent et se voient ainsi sans cesse réinventées. L’exposition met en lumière cette grande variété de logogrammes réalisés par Dotremont à travers plus de 120 œuvres sur papier, photographies, films et certaines pièces d'archives présentées pour la toute première fois au public. Glissez-vous dans la valise de l’artiste pour découvrir son cheminement créatif vagabond. Outre les logogrammes, le parcours présente une sélection de « dessins-mots » et d’autres œuvres à quatre mains réalisées avec Pierre Alechinsky, Asger Jorn, Serge Vandercam, Hugo Claus, etc. D’autres plasticiens de l’écriture comme Henri Michaux, René Guiette, Jean Raine, Jules Lismonde, Jacques Calonne dialoguent avec le travail de Dotremont. Un événement à découvrir jusqu’au 7 août 2022 aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Plus de détails sur le site www.fine-arts-museum.be Rue de la régence, 3 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : VOYAGES ET PAYSAGES DANS L’ŒUVRE DE DOTREMONT Christian Dotremont aurait eu cent ans cette année. Il est décédé en 1979, à l’âge de 56 ans, dans le sanatorium de Buizingen. Avec lui mourait le dernier surréaliste belge, fondateur du groupe Cobra et inventeur des « logogrammes », mêlant mots et peinture pour en faire de véritables poèmes visuels. Une exposition nous présente son œuvre, assortie de 40 photos argentiques en noir et blanc de Georges A. Bertrand, spécialiste de l’auteur, qui nous invite à suivre les traces du poète à travers l’Europe. De Bruxelles à Copenhague et jusqu’en Laponie, au fin fond de la Finlande, là où le poète a découvert les fameux logogrammes. Durant l’hiver 1956-57, Christian Dotremont reçoit en effet une bourse du gouvernement belge pour entreprendre un premier voyage dans le grand Nord. Il y retournera douze fois avant de succomber à la tuberculose, sa « catastrophe » naturelle qu’il avait contractée au début des années 50, tout comme son ami le peintre danois Asger Jorn, cofondateur de Cobra. La découverte du paysage arctique va donc l’éblouir. La blancheur de l’horizon, comme une feuille blanche, va devenir sa « papeterie de neige » : un mot fondu dans le paysage qui décantera un poème magique. Un an plus tard, en 1958, paraîtra le film d’un autre de ses amis, Pierre Alechinsky (âgé aujourd’hui de 94 ans), sur la Calligraphie japonaise, avec un commentaire écrit du poète qui marque ainsi l’influence orientale du logogramme. Cette étrange écriture poétique, créée en 1962, mêle le mot au dessin. Les logogrammes sont des poèmes peints spontanément, qui déforment les lettres de l’alphabet latin pour en faire des graphismes. Par la spontanéité du geste qui applique le trait d’encre au pinceau, Dotremont parvenait à animer l’écriture. Il la faisait voyager sur la feuille, accentuant la plasticité des signes picturaux qui s’inscrivaient dans une sorte de paysage. Poèmes tant à lire qu’à voir. Le plus souvent, le texte des logogrammes se retrouve en dessous, transcrit au crayon. Il s’agit d’une des plus grandes inventions poétiques de la seconde moitié du XXe siècle. Toujours poussé plus loin par l’appel du grand Nord, Dotremont tracera bientôt les signes dans la neige ou la glace à l’aide d’un bâton, pour en faire des « logoneiges » ou des « logoglaces » appelés à s’effacer. Il en gardera la trace avec des photos. Comme dans les calligraphies éphémères réalisées en Chine, avec un pinceau plongé dans un seau d’eau. Dans les pas du poète C’est un photographe qui s’est lancé sur les traces invisibles du poète pour accompagner son œuvre ou la faire revivre sous nos yeux. Georges A. Bertrand a refait le voyage poétique. Il nous le décrit avec une quarantaine de photos, en noir et blanc, riches de contrastes et de nuances dues à l’argentique. Tervuren où le poète est né, Bruxelles où il a écrit entre ses voyages, mais aussi Paris où il se rendait pour rencontrer les surréalistes, Dublin et Copenhague, la ville de ses amours déçus, ou encore les sanatoriums d’Eupen ou Silkeborg : autant d’endroit où notre photographe a promené ses pas et son appareil pour remonter le temps. Pour rattraper le poète nomade. Ce sont les restes d’un pavement sur lequel Dotremont a posé le pied mille fois. Ce sont des fenêtres aux lignes carcérales closes sur la maladie, des volutes et des arabesques ouvertes en contrepoint, vers le nord lointain.
Vers les logogrammes de Laponie. La poésie-voyage se concentre dans ces images en noir et blanc qui nous font sentir les hauts et les bas d’une vie poétique, l’amour impossible pour une femme qui a échappé au poète et qu’il poursuivra sans cesse sous le nom de Gloria. C’est là que Cobra est mort entre 1948 et 1951, après une courte vie fiévreuse. Là, dans la nuit arctique profonde, que les plus belles photographies ont été prises et que se peignent les plus beaux poèmes du monde. Georges A. Bertrand est écrivain et photographe, détenteur d’un doctorat en Lettres et Civilisations. Spécialiste de l’œuvre de Dotremont, il lui a consacré un ouvrage, Un Lapon en Orient, ainsi que de nombreux articles, avant de réaliser cette exposition soutenue par la Fondation Roi Baudouin, avec le concours du commissaire Stéphane Massonet. A voir jusqu’au 2 octobre à la Wittockiana, Musée des Arts du livre et de la reliure, rue du Bemel, 23 à 1150 Woluwe-St-Pierre. Entrée : 5 € ou 3 € pour seniors, étudiants et groupes. Magnifique catalogue à découvrir, et pas seulement pour y piquer les informations que je vous ai livrées après les avoir savourées. Plus d’info sur www.wittockiana.org. Rue du Bemel, 23 à 1150 Bruxelles Michel Lequeux
FESTIVAL BRUXELLONS ! Chaque été et depuis vingt-quatre ans, le « Festival Bruxellons ! » propose au Château du Karreveld une centaine de représentations d'une quinzaine de spectacles issus des dernières saisons. L’opportunité de voir ou de revoir des pièces qui ont enchanté les spectateurs wallons et/ou bruxellois. Mieux qu’une simple séance de rattrapage, il s’agit de la mise à l’honneur de toutes celles et de tous ceux qui œuvrent pour que l’art puisse exister sur les planches et, après deux années de pandémie, chacun a pu se rendre compte de la nécessité de permettre aux créateurs de s’exprimer pour panser nos plaies, nous pousser à réfléchir ou plus simplement nous aider à vivre. Bien entendu, diverses formules sont proposées pour assister aux représentations ou se focaliser sur un seul coup de cœur. Selon la formule consacrée, chaque troupe dispose de son calendrier propre. Assurément, aucun genre n’a été exclu, pourvu que la qualité soit au rendez-vous. De la sorte, se succèderont, parmi beaucoup d’autres, « Venise sous la neige » de Gilles Dyrek, « Hommage à Brel » avec la brillante interprétation des standards du grand Jacques par un Filip Jordens survolté, « La plus précieuse des marchandises » de Jean-Claude Grumberg, « Requiem pour un gigolo » de Patrick Chaboud du Magic Land Théâtre, « Le rêve d’un fou » de Nadine Monfils, « Musée haut, musée bas » de Jean-Michel Ribes, « Ça va saigner » seul en scène avec Eric Boschman, etc. De quoi prouver que la période estivale ne marque pas un frein à la culture et que les artistes restent dans la capitale pour bruxeller et ensoleiller juillet et août en les parant de leurs plus beaux atours. Le Festival Bruxellons ! se nappera de ses couleurs éclatantes du 11 juillet au 27 septembre 2022. Voyez le programme détaillé sur le site www.bruxellons.be Paul Huet
EXPOSITION : MARAT ASSASSINÉ Les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique possèdent depuis 1893 le chefd’œuvre de Jacques Louis David « Marat assassiné » (1793). Afin de témoigner de la position centrale qu’occupe cette toile dans l’avènement de l’art moderne, nous proposons une exposition dédiée à cette pièce maîtresse de nos collections. Pour la première fois, les Musées royaux offrent une approche sans précédent de l’œuvre de David en combinant à la fois les regards historiques et contemporains, mais également une démarche scientifique par la présentation au public des résultats d’une campagne de recherche qui a mobilisé des examens de laboratoire. L’exposition est ainsi structurée en trois volets qui permettent au public d’appréhender l’œuvre de David de façon inédite. Le premier volet, scientifique, présente au public les résultats de l’étude matérielle et technique intitulée « Face to Face » et conduite sur le « Marat Assassiné », qui ont révélé pour la première fois, notamment, le dessin sousjacent du chef d’œuvre. Ces recherches, menées par le Centre européen d’Archéométrie de l’Université de Liège, sont basées sur l’utilisation de techniques d’imageries scientifiques et d’analyses physico-chimiques non-invasives réalisées in situ. Dans un second volet, historique quant à lui, seront présentées les répliques d’atelier conservées à Reims, Dijon et Versailles, ainsi qu’une œuvre issue d'une collection privée (Paris). Ce volet sera complété, dans une troisième approche, par les interprétations contemporaines d’artistes comme Picasso, Ai Weiwei, Gavin Turk, Jean-Luc Moerman, Jan Van Imschoot ou encore une œuvre de Rachel Labastie qui pose quant à elle un regard féminin déplaçant l’attention de Marat vers Charlotte Corday, protagoniste absente de la représentation de David. Voyez toutes les informations concrètes sur le site www.fine-arts-museum.be Rue de la régence, 3 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : FOOD AND THE CITY Cette exposition esquisse une image de l'évolution historique de l'approvisionnement alimentaire et jette un regard sur les défis actuels auxquels les villes font face pour se nourrir. Chaque jour, plus de 7,5 milliards de personnes sur la planète ont besoin de se nourrir. Cette population vit depuis 2006 majoritairement en zone urbaine. Parallèlement, le nombre de producteurs ne cesse de diminuer. Evere est un exemple d'une localité qui vivait autrefois d’une forte activité agricole et qui s'est récemment urbanisée. Mais comment allonsnous nourrir les villes grandissantes si de moins en moins de personnes produisent de la nourriture ? ‘Food and the City’ esquisse une image de l'évolution historique de l'approvisionnement alimentaire et jette un regard sur les défis actuels auxquels les villes font face pour se nourrir. Un événement à découvrir au Musée bruxellois du Moulin et de l’alimentation jusqu’au 31 août 2022. Plus de détails sur le site www.moulindevere.be Rue du Tilleul, 189 à 1140 Bruxelles
EXPOSITION : FRITES BY IDAHO Cet été, le Micro Musée de la Frite de Bruxelles de Home Frit’ Home vous le promet 100% frituresque ! Il proposera à ses visiteurs des pièces uniques, sorties des collections permanentes et jamais dévoilées à ce jour. Mais également, des nouveautés... Comme la fragrance « Frites by Idaho » ! Un parfum collector Jamey Higham, Président et CEO de l’Idaho Potato Commission (États-Unis), l’assure : « L’odeur est si bonne qu’il est impossible de résister !», en évoquant la dernière création de ses collaborateurs, la fragrance « Frites by Idaho ». Jusqu’à aujourd’hui, pour la promotion de la pomme de terre d’Idaho, ces derniers s’étaient investis dans des gadgets promotionnels gags, certes, mais de facture plus traditionnelle... «Puis, l’idée d’un parfum à la frite est venue en avril 2021», nous raconte Jeweldean Hull, responsable administrative et réseaux sociaux, lorsque nous l’avons contactée pour exposer cette création inédite au Micro Musée de la Frite de Bruxelles. « Nous avons convenu de le proposer à la Saint-Valentin 2022, en quantité limitée, en vendant le flacon au prix d’une portion de frites à 1,89$. Il a été sold-out en très peu de temps !» Odeur des frites : 90% des sondés l'aiment C’est donc un flacon de « Frites by Idaho » rescapé de cette razzia qui vous est dévoilé cet été au Micro Musée de la Frite. Jeweldean Hull nous confiait aussi : « Nous ne sommes pas des parfumeurs et nous nous questionnions beaucoup. Nous avons réalisé une enquête et 90% des répondants nous ont confirmé qu’ils aiment l’odeur des frites ! Alors, nous avons cherché, testé... même avec de la véritable huile de friture, ce qui n’était pas la meilleure idée (rires) . Nous avons utilisé des huiles essentielles et des pommes de terre Russet distillées de l’Idaho, les meilleures pour faire les frites chez nous.» Parfum frite: un bouquet très complexe En août 2013, Home Frit’ Home avait déjà questionné le parfumeur belge Olivier Kummer en vue de recueillir son expertise dans l’hypothèse où nous nous lancerions dans la création d’un parfum frites... « Lors de sa cuisson dans la matière grasse, la pomme de terre va subir différentes réactions chimiques dont celle de Maillard, ce qui va l’amener à changer de couleur (brunissement de la surface) et à développer son goût (arômes principalement empyreumatiques)», nous expliquait alors le spécialiste. « Donc en apparence le parfum ou le goût de la frite peut paraître simple et évident, mais dans la pratique il s’agit d’un bouquet très complexe (plus d’une centaine de composants chimiques différents) qui est caractéristique de ce genre de réaction chimique. Cet arôme serait un véritable parfum en soi qui nécessiterait des recherches et des mises au point longues et coûteuses sans garantie de résultat !» L’Idaho Potato Commission aurait contourné l’obstacle, en précisant : «Toute nouvelle idée est folle, jusqu’à ce qu’elle fonctionne!» Rendez-vous aux portes ouvertes gratuites « Frites by Idaho » et quantité d’autres surprises sont à découvrir cet été aux portes ouvertes gratuites du Micro Musée de la Frite de Bruxelles de Home Frit’ Home, chaque premier week-end du mois. Plus de détails sur le site www.homefrithome.com Rue des Alliés 242, 1190 Bruxelles
CINÉ-VACANCES La formule revient ou comment assister en famille à des projection au ticket unique de 1,50 euros et découvrir ou revoir des longs métrages diffusés dans les salles au cours de la dernière saison.
HÔTEL TRANSYLVANIA 3 Ce film d’animation se veut une joie pour les parents qui se sentent quelque part moralement obligés d'accompagner leur marmaille dans une salle de cinéma. C'est fou le nombre de choses que l'on y apprend en une heure et demie. Ce troisième volet est plus une suite de sketchs qu'une vraie aventure mais ça fonctionne toujours grâce à la loufoquerie géniale de tous les instants. Les gags et les idées farfelues font tout le sel et le panache de la saga avec une prédilection pour les séquences musicales d'anthologie. Bref, les monstres préférés des enfants signent un come-back réussi et s’apprêtent à s’offrir des vacances méritées à bord d’une croisière. Malheureusement, l’un des monstres s’éprend de la capitaine, une humaine qui risque de trahir leur secret. On est vampire pour la vie et on ne peut pas échapper à cette malédiction ! Un dessin animé à applaudir les 16 et 17 août à 14 heures à l’Antenne Scheut. Réservations en ligne. Plus de détails sur le site www.escaledunord.brussels. Avenue de Scheut, 147 à 1070 Bruxelles LES CROODS 2 Les Croods ont survécu à leur part de dangers et de catastrophes mais ils vont maintenant devoir relever leur plus grand défi : rencontrer une autre famille. Ils ont besoin d'un nouvel endroit où habiter. La famille préhistorique part alors en quête d'un endroit plus sûr. Quand ils découvrent un paradis idyllique entouré de murs, ils pensent que tous leurs problèmes sont résolus... Mais une famille y vit déjà : les Bettermans. Avec leur cabane dans les arbres, leurs inventions étonnantes et leurs hectares irrigués de produits frais, Les Bettermans sont bien au-dessus des Croods sur l'échelle de l'évolution. Ils accueillent les Croods avec joie, mais les tensions ne tardent pas à s'intensifier entre la famille des grottes et la famille moderne. Mais une nouvelle menace va propulser les deux familles dans une aventure épique hors des murs, ce qui les obligera à accepter leurs différences et à se servir des forces des uns et des autres. Un dessin animé familial à voir les 23 et 24 août 2022 à 14 heures à l’Antenne Scheut. Réservations en ligne. Plus de détails sur le site www.escaledunord.brussels. Avenue de Scheut, 147 à 1070 Bruxelles
PALMARÈS DU BRIFF 2022 Le Festival international du film de Bruxelles a refermé ses portes le samedi 2 juillet sur un bilan très positif. On parle de 45 000 entrées, invités compris (et il y en avait beaucoup), que se sont disputées le Palace, l’UGC place de Brouckère, le cinéma Galeries, Bozar et l’espace libre du mont des Arts. C’est un beau score pour un festival qui en est à sa cinquième édition depuis 2018. Les trois compétitions en jeu l’internationale et la semaine des européens – ont décerné, durant ces au 7e Art, 16 prix répartis entre le fiction.
– la nationale, jeunes réalisateurs dix jours consacrés documentaire et la
Et d’abord le documentaire Le Grand Prix du Jury national est revenu à Austral du réalisateur belge Benjamin Colaux qui a filmé les îles tristement célèbres de l’extrême sud du Chili. Trois hommes affrontent la mer australe et ses dangers pour aller à la rescousse des pêcheurs isolés au bout du monde. Un travail d’orfèvres initié en 2017. Le film a reçu aussi le prix du montage pour Yannick Leroy. Un autre documentaire belge a également été récompensé : Une bosse dans le cœur de Noé Reutenauer à propos d’un trisomique qui cherche à se faire aimer. Quête ayant peu de chance d’aboutir auprès des élues de son cœur. Enfin, Camille de Leu et Martin Swabey ont reçu chacun un prix pour leur interprétation de la liberté sous bracelet électronique dans Sous contrôle de Manuel Poutte. Les deux personnages sont pris dans le paradoxe d’une liberté apparente de deux km² pour en faire le tour et s’aimer sous haute surveillance. Un film très charnel qui renoue avec 1984 de George Orwell. Les deux autres compétitions Côté international, c’est Sundown qui a remporté le Grand Prix. Cette coproduction entre la Suède, le Mexique et la France, signée Michel Franco, met en scène une dispute familiale au sein d’une très riche famille anglaise. On aurait tort d’y voir un rapport avec la famille royale d’Angleterre. Encore que... Nana, le film indonésien de Kamila Andini, a reçu, lui, le prix du Jury. C’est l’histoire de deux femmes qui auraient dû se détester cordialement, l’une étant la maîtresse du mari de l’autre, mais que la situation sociale à Java rapproche pour en faire deux confidentes. Ensemble, elles rêvent d’une nouvelle liberté face aux hommes qui les dominent et abusent d’elles. Sur les huit jeunes talents européens, la Directors’Week a fait son choix. Le Grand Prix a été attribué à Fogo-Fátuo du
réalisateur portugais João Pedro Rodrigues, qui nous raconte la vie de deux jeunes pompiers bien décidés à changer le statu quo social pour vivre leur relation à deux. Il Buco du réalisateur italien Michelangelo Frammartino a reçu le prix du Jury. Chronique des profondeurs, à 700 mètres sous terre, au sein d’un monde inconnu où se mêlent nature et mystère dans un noir profond. Quant au film hongrois Gentle, de la réalisatrice Anna Eszter Nemes et du réalisateur László Csuja, il a été primé deux fois. D’abord par le prix du Public puis par celui de la Fipresci qui décerne le prix de la critique internationale des films, présente cette année au Briff pour la première fois. Ces deux prix sont venus récompenser le rêve d’une culturiste de devenir Miss Olympia. Entre le rêve et la réalité se glisse parfois l’amour qui va changer le projet en cours. Et faire voir aux biceps leur vraie nature. Le prix du jeune Jury du Briff est allé au documentaire hollandais (encore un !) Three Minutes - a lengthening de Bianca Stigter sur une ville juive de Pologne en 1938, avant que celle-ci ne soit détruite sous la Shoah. Egalement récompensé par une mention spéciale de la Director’Week. Prix des deux télévisions Les deux derniers prix sont ceux des télévisions. La RTBF a récompensé Petite Fleur du réalisateur argentin Santiago Mitre sur une thérapie conjugale qui tourne mal, tandis que BeTV récompensait Las Bestias du réalisateur espagnol Rodrigo Sorogoyen : sur un conflit de voisins à propos d’une installation d’éolienne menant à l’irréparable. Au total donc, ces prix atteignent une valeur de près de 70 000 €, allant de 1 000 € à 11 000 € pour consacrer les lauréats 2022 du 7e Art dans un festival qui commence à être reconnu parmi ses pairs. Le Festival bruxellois a clos ses portes sur un dernier verre de l’amitié au Village du Briff, sous le chapiteau de la place de Brouckère, dans l’attente d’un Briff 2023 aussi zébré. Michel Lequeux
CINÉMA : THE LAST BUS Drame de Gillies MacKinnon, avec Timothy Spall et Phyllis Logan. GB 2020, 86 min. Sortie le 6 juillet 2022. Résumé du film – De la pointe extrême de l’Ecosse jusqu’au fond des Cornouailles, à Land’s End, les bus vont conduire Tom, un vieil entêté, à la destination finale qu’il s’est fixée. Il veut retrouver l’endroit où lui et sa femme se sont promis, voici longtemps, de s’épouser. Et rien ne pourra le faire revenir sur sa promesse, même le refus du chauffeur de le laisser monter à bord sur un simple billet local. Commentaire – Un road trip de 1 200 km qui nous fait découvrir les Highlands d’Ecosse, leurs landes sauvages, les moutons qu’on charge dans le bus et, beaucoup plus loin, les paysages verdoyants de l’Angleterre. C’est vu par les yeux de ce vieil homme qui se déplace difficilement et qui traîne sa valise d’une chambre à l’autre, de B&B en B&B, en tentant de refaire en sens inverse l’itinéraire de leur jeune couple amoureux. Telle chambre soigneusement notée dans son calepin lui rappellera celle où ils avaient dormi cinquante ans plus tôt, quand ils partaient s’établir en Ecosse. C’est aussi pour Tom l’occasion de comparer les époques, les gens, les mœurs, et de prendre, dans le bus, la défense courageuse d’une femme voilée agressée par un hooligan. Tout le bus se portera au secours du vieux. Sa mine renfrognée mais pathétique s’éclaircira ainsi au fil de la route et des échanges qui vont se créer pour donner à son personnage de plus en plus d’épaisseur. On apprendra qu’il a été brancardier durant la Seconde Guerre mondiale, qu’il fut mécanicien de métier, au point de pouvoir réparer le bus en panne au bord de la route, et qu’il a gardé toute sa voix pour chanter et charmer son auditoire à l’arrêt, un soir. Ne dévoilons pas la fin de la course : c’est elle qui donne tout son sens à ce road trip qui sera partagé sur les réseaux sociaux, chacun voulant suivre le vieux à la trace. Ce voyageur est interprété par Timothy Spall qui a pris un « coup de vieux » pour le rôle en question et qu’on a vu dans de nombreux films, notamment Le Dernier Samouraï avec Tom Cruise, où il immortalisait en photographe le Japon ancien, mais aussi Mr. Turner de Mike Leigh, son réalisateur fétiche. Il mérite le prix de l’interprétation qu’on lui a offert à Cannes en 2014 pour camper le peintre anglais. Sa prestation dans le rôle d’un vieux voyageur pétri de souvenirs amoureux est ici éblouissante. Il vient du théâtre, comme beaucoup d’acteurs anglais. Avec une bonne dose de courage, d’optimisme et de spontanéité, notre vieux affronte sa propre vulnérabilité. Il rencontre aussi une Angleterre aux mille visages qui lui était inconnue, au fin fond de l’Ecosse où le jeune couple était allé s’installer. La réalisation a été confiée à Gillies MacKinnon, également peintre et écrivain écossais, à qui l’on doit par exemple Tara Road, un autre drame sur la résilience de deux femmes amenées à s’échanger leur résidence d’été. Ses talents de peintre sont au service de ce film qui mélange les époques : attention à ne pas s’y perdre. Avis – Un road movie qui fait chaud au cœur et nous rappelle que nous sommes tous en route vers la même destination. Michel Lequeux
CINÉMA : EVERYTHING EVERYWHERE ALL AT ONCE Film de SF de Dan Kwan et Daniel Scheinert, avec Michelle Yeoh, Ke Huy Quan, Stephanie Hsu, James Hong et Jamie Lee Curtis. USA 2021, 139 min. Sortie le 20 juillet 2022. Résumé du film – Evelyn Wang tient une laverie avec son mari qui veut divorcer, au moment où tous deux sont convoqués pour le contrôle fiscal. Poussée à la faillite, Evelyn rencontre dans l’ascenseur du ministère monsieur Wang-bis, version alternative de son mari, qui lui explique que de nombreux univers parallèles existent. Elle va être entraînée ainsi dans le multivers pour y vivre d’incroyables existences simultanées. Commentaire – Tout, partout, tout à la fois, comme l’ont rebaptisé les Québécois, est le deuxième film du duo Daniels : Dan Kwan et Daniel Scheinert, auxquels on devait déjà Swiss Army Man nous contant la balade d’un homme avec un cadavre (2016). Dans ce film de science-fiction, les réalisateurs américains explorent le « multivers », l’élargissement de l’univers à une infinité de dimensions qui s’entrechoquent. Des bulles d’existence qui se télescopent. Quand les personnages passent de l’une à l’autre, ils changent de vie et multiplient à l’infini leurs actions. Ainsi, notre héroïne va devenir simultanément star de cinéma, maître du kung-fu, cheffe cuistot ou, peut-être, l’héroïne que tout le monde attendait pour tourner cette histoire pour le moins rocambolesque. Tout cela dans des plans qui fusionnent avec fracas. Question de kung-fu, Michelle Yeoh s’y connaît puisqu’elle a pratiqué les arts martiaux dans de nombreux films chinois, avant de devenir une James Bond Girl dans Demain ne meurt jamais au côté de Pierce Brosnan (1997). On l’a vue aussi dans La Momie 3 de Rob Cohen, sortie en 2008, et, surtout, dans The Lady de Luc Besson, où elle interprétait avec brio et délicatesse Aung San Su Ki, l’opposante birmane couronnée du prix Nobel de la Paix. Elle interprète ici une immigrée chinoise vieillissante (elle a 59 ans en fait), entraînée dans une folle aventure spatio-temporelle. A ses côtés, on retrouve Ke Huy Quan, revenu également à l’écran dans la chorégraphie des combats, et James Hong, un vétéran, l’un des comédiens les plus prolixes de tous les temps (600 films et séries). Avec aussi Jamie Lee Curtis, la « Scream Queen », la reine du hurlement qu’on a revue dans Halloween et sa suite en 2018. Il faut en tout cas reconnaître à ce film de SF la qualité des combats martiaux, leur parfaite chorégraphie et, surtout, l’enchaînement des plans pour les montrer et passer d’un univers à l’autre. Les plans ultrarapides s’imbriquent au millimètre près, le temps d’une seconde, pour précipiter les personnages ailleurs. Le problème, c’est que les réalisateurs y mettent deux heures vingt, passées à faire redondance de leurs exploits. Trop, c’est trop, et la fin de l’intrigue, qui tourne au mélodrame, voire au pathos, n’arrête pas de se faire attendre. Quand la fin de ce télescopage arrivera-t-elle ? Avec une demi-heure de moins, au moins, resserré sur l’essentiel, le film aurait pu tenir son pari : faire le tour des possibles dans ce monde où tout s’enchaîne sur un rythme effréné. Il aurait pu. C’est pourtant bien filmé, en Californie, par Larkin Seiple qui dirige la caméra. Avis – Une autre version du « multivers », plus longue que The One, avec des combats qui se répètent à l’envi. C’est long, trop long, même si c’est bien filmé. Michel Lequeux
CINÉMA : VAILLANTE Animation de Laurent Zeitoun et Théodore Ty, avec les voix d’Alice Pol, Vincent Cassel, Valérie Lemercier, Claudia Tagbo, Elie Semoun et Emmanuel Curtil. Musique de Chris Egan. France-Canada 2021, 93 min. Sortie le 20 juillet 2022. Résumé du film – Petite déjà, Georgia n’a qu’une ambition : devenir pompier comme son papa. Hélas, à New York en 1932, les femmes ne pouvaient pas exercer ce métier trop dangereux. Quand les pompiers disparaissent les uns après les autres dans de mystérieux incendies qui frappent les théâtres, Georgia y voit une occasion en or pour elle : elle se déguise en homme et rejoint l’équipe des pompiers novices chargés d’arrêter le pyromane, sous les ordres de son père qui ne la reconnaît pas. Commentaire – Vaillante est le premier film d’animation réalisé par Laurent Zeitoun qui est aussi coscénariste et coproducteur du film. On lui doit la production et la coécriture de Bellerina, un dessin animé sorti en 2016 sur une jeune ballerine montée à Paris, lors de la construction de la tour Eiffel. La ballerine est devenue ici une « pompière » aux grands yeux d’Avatar qui affronte les flammes de l’enfer. Et l’enfer, on y plonge avec les fumées violettes que dégage le pyromane, au son des tambours et des trompettes qui ponctuent ses coups d’éclat. La détermination de l’incendiaire fera sans doute peur aux tout petits, en suggérant le monstre qui se cache derrière les fumées, mais le rythme, les gags et les couleurs plairont aux plus grands. A noter aussi les vues en plongée qui nous font découvrir les avenues de Brooklyn sillonnées par les autopompes. Celle de Georgia a le feu en poupe, et on vous promet quelques cascades spectaculaires avec un Fangio fou au volant. La fin de l’animation vire au jeu de trapèze au-dessus des buildings en feu. Emotion garantie pour les petits, et même pour les plus grands. L’intention qui a présidé à ce dessin animé apparaît dans la dédicace finale : les femmes ont rejoint le corps des pompiers en 1982 à New York, où elles seront bientôt une quarantaine à combattre le feu. On parle désormais des hommes et des femmes du feu. Cette animation leur rend hommage. Les voix d’Alice Pol, Vincent Cassel et Valérie Lemercier se prêtent bien à l’envolée du spectacle et collent avec les personnages. Avis – Un dessin animé réussi sur les femmes du feu à travers une jeune « pompière » coriace, qui veut en démontrer à ses pairs. De 7 à 77 ans, pour voir en famille. Michel Lequeux
CINÉMA : PICCOLO CORPO Drame de Laura Samani, avec Celeste Cescutti et Ondina Quadri. Italie-France-Slovénie 2020, 89 min. En dialecte italien sous-titré Fr/Nl. Sortie le 27 juillet 2022. Résumé du film – Italie, 1901. Agata, femme de pêcheur, vient d’accoucher d’un enfant mort-né. Comme le village ne veut pas accorder de sépulture à son bébé, elle se charge du petit corps dissimulé dans une caisse pour aller le faire baptiser loin dans les montagnes, là où un sanctuaire, selon la tradition, anime d’un dernier souffle les enfants mort-nés pour leur permettre d’échapper aux limbes et de gagner le paradis. Le chemin de sa quête sera long et semé d’embûches. Commentaire – C’est à partir d’une question posée sur les sanctuaires à répit que Laura Samani a réalisé Piccolo Corpo. Ce premier film, où se mêlent religion et superstition, suit son court-métrage La santa che dorme, centré lui aussi sur un miracle, qui a été sélectionné au Festival de Cannes en 2016. Elle nous assure que ce sera le dernier de ce genre. Et pourtant... Piccolo Corpo a la saveur d’un conte de fée « pour adulte », oscillant entre la berceuse qui rythme les images et la sorcellerie. Entre les vieilles coutumes italiennes qui mêlaient sang, salive et lait maternel, et la foi qui a inspiré ces lieux de miracle : des centaines de sanctuaires éparpillés dans les Alpes, où les enfants mort-nés pouvaient revenir à la vie, le temps d’un souffle, pour qu’on leur accorde le baptême et les cieux. Laura Samani en a tiré ce périple d’une femme courant après la rédemption de sa fille. On ne peut s’empêcher d’y voir un lien avec le combat actuel des femmes pour se libérer des préjugés, des servilités, du regard des hommes. En 1901 avec l’éveil de la psychanalyse, comme aujourd’hui avec #Metoo. Ce petit corps qu’Agata tire sur son dos après l’avoir porté dans son ventre, c’est son destin de femme qu’elle emmène au sanctuaire où, dit-on, seuls les hommes allaient à l’époque, laissant l’accouchée au lit. C’est sa douleur à qui elle fait franchir la montagne et qu’elle plonge dans le lac. C’est son corps qui est dénudé dans ses parties les plus intimes, les plus crues : la scène met les spectateurs mal à l’aise dans un contexte clinique qui n’a rien de sexuel, malgré les poils du pubis et les seins gorgés de lait. La caméra à l’épaule, portée par Mitja Licen, le chef opérateur, suit notre héroïne pas à pas, dans la lente traversée du paysage montagneux, très beau. Elle s’attarde sur ses longs cheveux qui feront office de salaire, sur le coffret attaché dans le dos, sur la robe sombre et souillée, sur les pieds qui dérapent dans la pente à gravir. Elle nous fait participer à l’épreuve d'Agata. La caméra s’attarde aussi sur le compagnon de voyage qui a rejoint la jeune femme et qui porte, lui aussi, toute une histoire qu’on finira par découvrir, allant dans le sens de cette émancipation féminine. Il devient « elle » à partir du moment où le duo se sépare. C’est joué par des comédiens qui font leurs premiers pas à l’écran, brûlants de vérité, candides et touchants, où seule Ondina Quadri, qui joue le personnage de Lynx, a déjà pour elle une carrière au cinéma et au théâtre. Le tournage s’est déroulé en Vénétie et dans le Frioul. Il a duré cinq semaines et s’est passé en 2020. La réalisatrice a choisi les dialectes de la région, plus proches de la vérité du moment que l’italien, imposé par l’état à partir de 1861, lorsque l’Italie d’aujourd’hui est née. Avis – Avec les couleurs symbolistes de la fin du XIXe siècle, un conte qui nous plonge dans les superstitions d’alors et dans la foi d’une femme pour réveiller son bébé mort. Fort et poignant tout à la fois. Michel Lequeux
CINÉMA : LA NUIT DU 12 Thriller de Dominik Moll, avec Bastien Bouillon, Bouli Lanners, Anouk Grinberg, Pauline Serieys, Théo Cholbi, Johann Dionnet et Pierre Lottin. France-Belgique 2022, 114 min. Sortie le 31 août 2022. Résumé du film – Yohan, inspecteur à la PJ de Grenoble, est obsédé par l’assassinat de Clara, brûlée vive une nuit, alors qu’elle revenait d’une soirée entre amies. Il passe au peigne fin la liste des suspects : chacun a son alibi. Commentaire – A partir du livre de Pauline Guéna, Une année à la PJ, Dominik Moll a bâti un thriller haletant. Il nous glace le sang avec cette jeune femme cadrée la nuit du 12 octobre, au retour d’une soirée entre copines. Il nous la montre en train d’envoyer un dernier message à sa meilleure amie. Et puis soudain, un inconnu la rattrape, l’asperge d’essence et allume le feu avec son briquet. Sans un seul mot. La torche vivante s’enfuit sur le chemin et va s’effondrer quelques mètres plus loin. Qu’avait fait Clara pour mériter ce bûcher ignoble, sinon d’être trop belle, trop libre, trop facile avec les hommes ? Au fil de l’enquête qui s’amorce, tous les suspects vont être interrogés, et tous ils auraient pu commettre cet acte abominable. Tous, ils avaient des raisons d’en vouloir à Clara qui se partageait entre eux avec une franche liberté, faisant de son corps ce qu’elle voulait. Ce que le thriller montre, c’est que la société n’aime pas les filles faciles : Clara l’avait bien cherché, elle a récolté ce qu’elle avait semé. Même parmi la police, certains le pensent et mettent en boule les deux inspecteurs chargés d’enquêter. Ce qui est au cœur de l’affaire, c’est le rapport biaisé entre les femmes et les hommes : les femmes soumises depuis toujours aux mâles, et les mâles dominateurs, qui n’apprécient pas qu’elles leur fassent faux bond. Et qui s’en vengent par le feu. Comme des bêtes, même si celles-ci ont peur des flammes. Dominik Moll, réalisateur français né d’un père allemand, est l’auteur de ce thriller fait dans la même couleur que son film précédent, Seules les bêtes (2019) qui nous plongeait sur la piste d’un autre crime commis lui aussi sur une femme, lors d’une tempête de neige en Lozère. Le point commun des deux films, c’est qu’il s’agit chaque fois d’un thriller joué par Bastien Bouillon dans le rôle du flic qui enquête. Mais au-delà de l’enquête, le film fore la personnalité des deux inspecteurs : Johan parce qu’il a un idéal de justice en lui contre ces 20% de dossiers remis au placard, et qu’il s’éprend de la juge ; son collègue, interprété par Bouli Lanners, parce que sa femme l’a quitté pour un autre et qu’il aurait voulu être prof de français pour révéler la puissance des mots aux élèves. Clin d’œil du réalisateur : l’inspecteur s’appelle Vivès, et il enquête sur une jeune fille brûlée vive, qui hante ses nuits blanches. Mine de rien, le film quitte le thriller et s’enfonce dans l’analyse des caractères, faute d’un véritable dénouement. C’était prévu au programme : 20% des affaires restent non élucidées, et celle-ci, tirée d’un chapitre du livre, en est une qui vous restera en tête. Le tournage a eu lieu à l’automne 2021 dans les environs de Grenoble, et notamment à St-Jean-deMaurienne et Villargondran. Avis – A la différence des autres, un thriller qui le restera jusqu’à la fin sans qu’on connaisse l’assassin. C’est compensé par l’analyse approfondie des caractères et de la société. Michel Lequeux
À LIVRE OUVERT - UNE LIBRAIRIE PRÈS DE CHEZ VOUS ! La librairie « À Livre Ouvert » a vu le jour en 1974 à La Hulpe, avant de déménager en 1986 à Woluwé-Saint-Lambert. En 2002, elle a fusionné avec « Le Rat Conteur », l'une des premières boutiques spécialisées en lecture Jeunesse de la capitale. Par sa diversité et son sens de l’accueil et de l’écoute, elle est rapidement devenue une référence pour les amateurs de beaux et bons livres. Proposer le prix le plus juste, offrir un service de qualité et prétendre à des conseils avisés, voilà son credo ! Le lieu s'agence sur de nombreux espaces aux couleurs chaleureuses et où chacun peut s’arrêter pour découvrir les nouveautés distribuées sur les étagères. Bien que généraliste, la librairie a vite compris la nécessité de se spécialiser dans certains domaines, tant par choix personnel que pour répondre à une demande pressante. Quelques spécificités de « À Livre Ouvert » : - Le rayon Littérature générale : tous les genres s’y côtoient sans craindre le grand écart. A côté d’écrivains venus des deux hémisphères, une place est réservée aux auteurs de chez nous, qu'ils soient publiés chez des éditeurs connus ou plus confidentiels. Réserver une vitrine aux écrivains belges paraissait une évidence. - Le rayon Sciences humaines : dans un environnement plus feutré, où il est bon prendre son temps, les amateurs de références pointues de l'univers "psy" peuvent consulter les essais avant de les acheter ou feuilleter les titres qu’ils ne connaissent pas. Maintenant si le livre recherché manque ou semble introuvable, l’équipe se chargera de guider patiemment le demandeur jusqu'à lui. -Le rayon Jeunesse : Evidemment, cette dernière occupe une place de choix avec des albums colorés, des dessins rigolos, des pop-ups, des documentaires, des jeux, des bricolages, des doudous et, parmi beaucoup d’autres, des CD de musique et de chansons. Rien ne manque ou presque, en passant du livre de bain pour bébé au documentaire pour l'élocution de l'aîné ou le petit cadeau d'anniversaire marquant et pas cher. Le conseil des libraires est précieux parce qu'il est tout simplement parfois difficile de trouver l’ouvrage idoine, qui correspond à l'âge et à la curiosité de celui qu’on veut gâter. Chaque samedi de 10 heures 30 à 11 heures, une séance de lecture est destinée aux petits âgés de 3 à 8 ans, tandis qu’un groupe d’adolescents se réunit toutes les deux semaines pour partager la joie de découvrir ensemble un nouvel ouvrage. Beaux-arts, histoire, voyage, actualité, économie, cuisine, sport, livres pratiques, bande dessinée, biographie, cinéma, musique, santé, religion, spiritualité, english books, manuel scolaire ... on trouve de tout dans cette caverne d’Ali Baba, dont la vocation consiste à célébrer le goût de lire. Enfin, de nombreuses animations sont régulièrement prévues pour les adultes (conférences, séances de dédicaces, etc.). Le site www.alivreouvert.be permet de suivre l’agenda des activités qui, pour la plupart, sont entièrement gratuites. Rue Saint-Lambert, 116 à 1200 Bruxelles André Metzinger
PORTRAIT : ALAIN MAGEROTTE Bruxellois, Nouvelliste et passionné de littérature Fantastique, Alain Magerotte a été publié dans plusieurs maisons d'édition (Chloé des Lys, L'Harmattan, Publibook, Edilivre, Bernardiennes, Les Impliqués Editions, Lamiroy...). Il est aussi membre de l'Association des Ecrivains Belges (A.E.B.) depuis 2014. Enfin, régulièrement, vous lisez ses chroniques dans Bruxelles Culture. Si l’imaginaire fantastique a longtemps produit des vampires, des monstres, des maisons hantées aux bruits inquiétants… chez Alain Magerotte, pas d’êtres effrayants ni de bruits alarmants, sauf dans les Nouvelles parodiques. Le fantastique prend sa source dans le psychisme même des protagonistes, leurs phantasmes, leurs désirs refoulés. Son inspiration ? Il la trouve dans la vie de tous les jours au hasard des rencontres ou des événements. Une écriture vive, ludique, le choix du mot juste, la syntaxe parfaite, la peinture précise des personnages; voilà comment on peut définir le style d’Alain Magerotte qui aime cultiver les paradoxes puisque cet éternel optimiste, cet incurable bon vivant, aime aussi les ambiances sombres et arpenter les chemins sinueux par temps de brume épaisse... Quelques notes de lecture : Des nouvelles de l’absurde (Editions L'Harmattan) « … L’observation sans complaisance de notre société et de ses dérives donne ici une suite de « caractères » proches de l’univers de Jean Ray… Des nouvelles piquetées d’une dérision très « belgicaine » rendant l’humour de l’auteur d’autant plus caustique… » Georges Roland (écrivain) Rencontres avec l’étrange (Editions Mon Petit Editeur) "Comme en poésie, j’attends de la prose qu’elle me donne du plaisir. D’où ma réputation de critique impitoyable quand je rencontre, en poésie ou en prose, du mal écrit ! Ce qui n’est pas le cas chez un auteur que nous suivons depuis ses tout débuts, Alain Magerotte. Ce m’est toujours un plaisir de le lire. Au moins celuilà, on ne s’y endort pas et ses Rencontres avec l'étrange parviennent à rappeler deux de ses maîtres admirés, Edgar Poe et Jean Ray, auxquels j’ajouterai cette fois ceux qui ne se prennent pas au sérieux et dont les livres, après un passage dans le désert, font aujourd’hui l’objet de versions filmées ou télévisées appréciées. Je ne veux pas citer Hitchcock, et cependant sa manière de faire peur m’y fait penser… » Paul Van Melle (poète, journaliste, éditeur, bibliothécaire) La fin du voyage (Editions Lamiroy) "La fin du voyage", publiée aux Editions Lamiroy dans la jolie collection Opuscule,est une nouvelle d'Alain Magerotte.
La première phrase de celle-ci - "Le doigt sur la gâchette, je suis prêt à tirer..." - peut suggérer le genre policier dont l'auteur raffole. On est vite détrompé par la fin toute "maldororienne" (Lautréamont) du premier paragraphe - "Puisse cette incroyable histoire servir d'avertissement à ceux qui pensent que l'on peut ouvrir impunément tous les livres." Oui, la lecture peut être dangereuse, et nous sommes ici dans le genre de la littérature Fantastique proche d'Edgar Poe mais aussi du Fantastique français tel qu'il a existé dans "La peau de chagrin" de Balzac ou les nouvelles de Théophile Gautier par exemple. Le narrateur de cette nouvelle est un célibataire, fonctionnaire de son état. La passion de ce gratte-papier solitaire sont les livres. Sa vie bascule quand il pousse la porte d'une bien étrange librairie et fait l'acquisition d'un diabolique ouvrage. Comme pour "Le nez" de Gogol ou "La métamorphose" de Kafka, la situation du personnage-narrateur est angoissante pour lui et le communique au lecteur. Ce court texte nous fait aussi découvrir Bruxelles, ses bancs, ses rues. L'auteur est un conteur et ses descriptions font mouche. Ses évocations de la vie bureaucratique sont vécues ! Jusqu'à l'ambiguïté de la fin de la nouvelle, le suicide de l'individu qui évite peut-être un meurtre de masse... Glaçant !!" Philippe Lesplingart (bibliophile) Contes noirs pour nuits blanches (Editions Bernardiennes) "Douze Nouvelles nouvelles d'Alain Magerotte plus incroyables que jamais. On les apprécie certes pour la qualité, mais également, et surtout!, car elles résonnent en nous . Fantastiques, dans tous les sens du terme, ces récits nous font basculer dans un univers non loin de notre quotidien...sans doute la raison pour laquelle, chaque histoire ressemble à quelque chose ou à quelqu'un que nous connaissons. « Contes noirs pour nuits blanches » est un recueil à lire d'une traite ou en douze jours, c'est selon. Une nouvelle par jour ou douze nouvelles en un jour, le plaisir reste identique. Bref, vous l'aurez compris, à lire le plus vite possible !" Gaëtan Faucer (dramaturge, aphoriste, nouvelliste) Claude Moine est un (rock) auteur (éditions Lamiroy) Le texte d'Alain Magerotte est remarquable de connaissance sur la longue carrière de ce parolier-rocker. Ne l'oublions pas, Alain Magerotte fût pendant de nombreuses années le président du fan-club de l'artiste de Belleville et il connaît bien son affaire. Ce petit opuscule est indispensable pour pénétrer dans le monde d'Eddy Mitchell. Au delà de l'importance d'Eddy dans le milieu de la variété française de ces soixante dernières années, c'est sur la qualité des textes du rocker qu'Alain Magerotte veut mettre l'accent. La musique peut parfois "couvrir" le texte, c'est pourquoi il faut prendre avec profit les textes des albums d'Eddy Mitchell pour découvrir leur originalité. Si Eddy n'est pas un artiste engagé, il promène le miroir de son regard sur notre société. Avec par exemple "La dernière séance", Mitchell a écrit non seulement "un tube" mais il interprète avec nostalgie toutes nos angoisses face au monde qui change. Le titre de cette chanson est également une émission de Télé qui restera parmi les meilleures jamais données au public avec l'humour distancié et élégant de son présentateur. Merci Mr. Eddy pour votre regard en ce monde de déraison. Sam Mas
BULLET TRAIN Kotaro Isaka fait monter la pression en embarquant à bord d’un train à grande vitesse une poignée de flingueurs bien décidés à en découdre. Chacun possède une arme automatique et sait qu’il n’hésitera pas à s’en servir. Kimura est venu pour éliminer un collégien qui a poussé son fils de six ans du sommet d’un toit, l’abandonnant entre la vie et la mort. Citron et Mandarine, hommes de main d’un mafieux, sont chargés de lui ramener son enfant victime d’un kidnapping et de verser une importante rançon aux malfaisants. Face à eux, Nanao, mandaté pour ramasser le fric qui sera versé contre la libération du gosse. Bien vite, la tension se corse et les index se crispent sur la détente des révolvers. Lorsque tout ce joli petit monde se toise dans le wagon, la situation est prête à imploser. Star de la littérature dans son pays, l’auteur n’a pas son pareil pour booster ses romans de violence et de suspense. Plusieurs de ses ouvrages ont déjà été adaptés pour le grand écran et « Bullet train » vient d’être transposé au cinéma, mis en scène par David Leitch et défendu devant les caméras par Brad Pitt, Joey King et Karen Fukuhara. Un blockbuster attendu chez nous pour ce mois d’août. Ed. Presses de la Cité – 560 pages Andrea Cerasi
L’INVITÉ(E) DE TROP Tout devait être parfait ! Le mariage de Julia et Will avait été annoncé comme l’événement du moment. Une union splendide entre une éditrice déterminée et influente, à la tête d’un magazine people, et une étoile montante de la télé-réalité. Pas question de laisser certains détails au hasard. Il importait de déposer les petits plats dans les grands pour rappeler l’importance de l’événement. Invités triés sur le volet, buffet chic et tenues issues de la collection de créateurs réputés, on ne pourrait pas mieux faire ! Puis, l’endroit choisi pour la cérémonie se devait d’être à l’image de l’insolente réussite sociale des époux. A savoir, une île sauvage et belle au large de l’Irlande, balayée par une mer agitée et où le réseau internet ne fonctionne qu’imparfaitement. Fort vite, pourtant, les préparatifs ne tiennent pas leurs promesses, les plans dérapent, les convives se révèlent tels qu’ils sont, les ressentis se dévoilent, la jalousie se manifeste et les remarques désobligeantes se multiplient. Après un black-out, un cadavre est découvert. Lucy Foley signe un thriller angoissant qui renvoie aux codes mis en place par Agatha Christie, avec un groupe isolé dans un lieu difficilement accessible et en présence d’un criminel qui pourrait s’en prendre à n’importe qui. Bien entendu, chacun cherche à se protéger, se défie de son entourage et tente de comprendre le mobile qui pousse à occire un ou plusieurs membres de l’assemblée. L’occasion de rappeler que les rancunes passées ont souvent la dent dure, que les apparences restent trompeuses et que les secrets s’exhument quoi qu’il en coûte. Un thriller habile mené tambour battant et captivant par une spécialiste du genre, sans temps morts et qui fonctionne sur les turbines. Lecture idéale pour un mois d’août passé sous le parasol ou dans un transat. Ed. Presses de la Cité – 336 pages Willy Smedt
LES ENFANTS DE CINECITTÀ Il fallait la capacité d’une plume talentueuse pour nous conduire devant les écrans blancs, de ceux qui font frémir notre âme lorsque les films se mettent en mouvement. Il fallait que le langage soit juste, dépourvu du superflu alors que la lumière se pose sur les visages de ces destins particuliers. Évidement que les mots me sont faciles, portés par cette auteure, cette écrivaine sachant peindre la vie comme le ferait le plus talentueux metteur en scène. Ce livre, « Les enfants de Cinecittà » dépasse de loin le chant de mes battements de cœur, il est une aventure vous invitant à oublier le temps puisque, comme on le fait au cinéma lorsque le film est réussi, le public offre quelques instants de silence avant de se lever pour ovationner le travail du réalisateur. Et c’est ainsi, qu’ici, plongé dans la solitude de mon lieu de travail j’ose m’extirper de mon fauteuil, qu’importe ce qu’en diront les voisins, je lance en voix puissante, le bravo qui se mérite pour acclamer l’auteure. « Les enfants de Cinecittà » est une histoire relativement simple, celui de quelques destins portés vers la gloire pouvant pour certains s’entrechoquer à l’ivresse des grandeurs, mais pas que… Il y a l’odeur de l’Italie, la sueur des paysans, le combat d’un enfant aspirant à des lendemains heureux alors qu’ici, sous les orages du père, la vie se fait bien monotone et toujours au service de la terre. Mais si le sol exige les courbements de dos elle épuise toute perspective à ceux qui sont avides de lendemains plus beaux. Il y a ces sols encombrés de vestiges romains, des antiquités recherchées pour les uns permettant d’offrir à son propriétaire quelques sous de plus pour abriter les siens. Plus loin, sur une plage déserte des enfants jouent sous la direction d’un gosse qui prend les choses très au sérieux. Ce livre est un ouvrage qui vous aspire, une œuvre offrant à ses lecteurs des sensations étranges comme si les couleurs se matérialisaient sur chaque page, le bruit que font les rues de l’Italie encombrées par ces drôles de voiturettes que l’on associerait à des chapeaux melon alors que pour leurs propriétaires, après les privations de l’après-guerre c’est le symbole d’une certaine réussite sociale. La liberté ne s’apprend pas, elle se construit à force de volonté, d’espérance et de motivation. Et puis ? Les caméras pivotent sur un décor insolite en ces lieux, un saloon, une table de poker et les revolvers qui parlent. Voici que nous vivons les prémices des Westerns spaghettis, les chevauchées sauvages, l’absurdité de dialogues burlesques relevés encore et encore par les jeux de lumière, les gueules qui se retrouvent belles, la mort jouée pour se l’apprivoiser. Je vous entends d’ici me dire que rien ne semble original et pourtant ! Raconter une histoire peut-être donné à chacun d’entre nous, mais le faire avec autant de talent requière le sens inné pour déjouer les pièges de notre langue ainsi que la volonté d’élaguer tout superflu. Envouter le lecteur est non seulement un don, c’est également le résultat d’un travail délicat, une sorte de quête à la recherche de la perfection, celle qui ne s’atteint jamais quoique ? Ici je ne vais plus m’étendre, ce serait inutile comme le serait ces mots de séduction que l’on ânonne indéfiniment. Je vous laisse à votre jugement, vous offrant ce petit cadeau, celui de pousser les portes de votre librairie pour vous offrir un voyage littéraire. Après tout pour une telle évasion on peut s’offrir « Les enfants de Cinecittà », c’est moins cher que de prendre le train, de faire la file pour un avion et ici, en plus, vous remontez le temps. Que votre lecture soit belle. Ed. Academia - 226 pages Philippe De Riemaecker
LE CRAQUAGE DE LA FOUNE Le deuxième tome d'Ana P. Lorens « Le craquage de la Foune » est tout aussi hilarant que « Le mariage de la Touffe ». Si vous manquez de motivation et que votre moral est en berne, je vous conseille vivement de lire les aventures de ces dézinguées. Ce volume est la suite des aventures d'un groupe d'amies dont les péripéties vont vous dérider. La Foune devient écolo suite à un trip dans une pseudo secte et rentre chez elle complètement déconnectée de la réalité. Ces deux amies se sont données pour mission de la sortir de sa léthargie avec des théories sorties tout droit de leur esprit farfelu. Les choses ne sont pas aussi simples que prévues et vont amener le petit groupe d'amies dans des aventures rocambolesques. Si vous aimez l'aventure, les mots tordues et cash, les expressions qui n'existent pas et qui sont propres à l'auteur, mais surtout, si vous aimez l'humour à tous les degrés, lancez vous dans cette lecture. Si vous êtes coincés dans la vie et que vos oreilles ne supportent pas les mots tordus, ne touchez pas ce livre, vous risqueriez de devenir addict. Bonne lecture et n'ayez pas honte de rire avec nos dézinguées plus que déjantées. Autoédition – 505 pages Elise Jane
LES RESCAPÉS DE L’ELDORADO C’est en décembre 1953 que la première aventure de Bob Morane, « La vallée infernale » (numéro 16 de la Collection Marabout Junior), paraissait dans les kiosques des librairies. Créé sous la plume du journaliste Charles-Henri Dewisme, devenu bientôt Henri Vernes, Bob Morane (qui a failli s’appeler Robert Ujac) se met à courir le vaste monde aux côtés de son inséparable Bill Ballantine. Histoire d’affronter des fripouilles comme Orgonetz, l’Homme aux dents d’or, Monsieur Ming alias l’Ombre Jaune, et tant d’autres ennemis de la planète. Néanmoins, l’homme n’a jamais été l’écrivain d’une seule œuvre. Véritable couteau suisse, il a imaginé d’autres personnages auxquels il s’est empressé de donner vie. Parmi ceux-ci, Luc Dassaut, créé quatre ans après le commandant Morane et qui ne vivra que deux épisodes menés tambour battant. Un héros qui se voulait journaliste à Paris-Journal et qui sentait bon l’odeur de l’aventure. Bien sûr, ces deux récits demeurent aujourd’hui introuvables et voilà la raison pour laquelle « Les rescapés de l’Eldorado » vient d’être réédité, agrémenté d’illustrations dues au talent de Vincent Grimm dans un esprit bédé de bon aloi. Pourquoi relire ce roman ? Simplement parce que Henri Vernes est devenu au fil des décennies une valeur sûre de la littérature, mais également pour savourer un livre exhumé d’un fonds qui méritait d’être soumis au plus grand nombre. Lire implique de se faire plaisir pour assumer sa curiosité et pour l’amour des récits qui entraînent les lecteurs loin du ronron et de la morosité. Ed. du Tiroir – 156 pages Daniel Bastié
RENDEZ-VOUS AU PÉLICAN VERT A ce jour, Henri Vernes aurait vendu quarante millions d’exemplaires de Bob Morane. Le double, affirmait l’auteur. Aucun écrivain belge n’a réalisé un tel score ! Que ceux qui ne disposeraient pas de l’œuvre complète d’Henri Vernes se rassurent : des passionnés veillent à de très nombreuses éditions et rééditions. Pour preuve, la mise en vente aujourd’hui de ce roman qui nous entraîne sur les pas de Robert Barney Singleton, agent secret britannique, et ses amis Hart Fleming et Levinson Levinson aux prises avec des espions nazis dirigés par le redoutable von Low, l’homme aux yeux morts. Même si le combat s’avère inégal, on se doute que, au fil de moult péripéties, le bien l’emportera. Encore une sale mission en perspective ! Une question demeure. Pourquoi cette admiration, qui perdure malgré les âges avancés de ses lecteurs ? Un an après le décès de l’écrivain, ses premiers admirateurs sont toujours à son écoute, voire à son affût ! La réponse est à la fois simple et complexe. Simple, parce qu’il suffisait (et il suffit toujours) de lire la première page d’un de ses romans, quel qu’il soit, pour dévorer tout le reste du livre sans répit. Complexe, car cette œuvre que l’auteur destinait à un tout jeune public a fait surtout école parmi les adultes. Henri Vernes lui-même en riait. Il traitait les quinquagénaires, les septuagénaires et même les octogénaires qui l’adulaient de grands enfants et se plaisait à dire de ses deux cent cinquante histoires qu’elles n’allaient pas plus loin. Autrement formulé : qu’il ne fallait pas chercher le mérite là où il n’était pas et des réponses sérieuses là où elles n’étaient pas attendues. Ed. du Tiroir – 222 pages Daniel Bastié
PALOMITA PALOMA Parmi les atouts d’Henri Vernes, il y avait l’ambiance. L’ambiance des rues, des villes, des forêts, l’ambiance des vieux temples en ruines, l’ambiance des Indes d’hier et d’aujourd’hui, l’ambiance des Caraïbes, l’ambiance de l’Afrique centrale, tout élément géographique, terrestre, montagneux ou maritime, était un bon prétexte pour l’auteur de nous aider à quitter le plancher bruxellois. Pourtant, il n’était pas un auteur contemplatif et savait ajuster un côté ludique qui menait à l’action ou au suspense. Inutile de le répéter, le succès de Bob Morane l’a phagocyté au point, parfois, de rêver de tout envoyer valdinguer pour passer à autre chose, de prouver qu’il était capable d’écrire des romans adultes, de se divertir en empruntant une tangente. Pour faire une pause, il a créé en 1983 le personnage de Don, petit-fils du chef des chefs de la Mafia. Pourtant, son personnage est traqué par les tueurs de l’organisation et, afin de leur échapper, il doit user de mille stratégies. Si l’aventure se trouve naturellement boostée à 100%, ce qui caractérise cet ouvrage reste son ton adulte, avec des scènes érotiques qu’on n’aurait jamais imaginées sous la plume de cet écrivain estampillé familial. Le ton est parfois crû et les descriptions ne laissent que peu de place au second degré. Ce roman fait bien sûr figure d’exception dans la bibliographie de l’auteur et s’avère du coup une curiosité à ne pas mettre, bien sûr, entre les mains de jeunes lecteurs. De son propre aveu, il avait envie de changer d’air, de se défouler et de s’éclater en allant là où personne ne l’attendait. Pour adultes avertis ! Ed. du Tiroir – 222 pages Daniel Bastié
THE HEARTBREAKERS Ecrit par Ali Novak, une autrice révélée à l’âge de quinze ans pour son premier roman, « The Heartbreakers » est par excellence un livre à emporter avec soi en vacances, léger et bien de notre temps. Tout commence pourtant fort mal avec la maladie de Cara, une jeune fille atteinte d’un cancer et que ses deux sœurs souhaitent soutenir en allant se procurer une dédicace de son groupe préféré « The Heartbreakers » actuellement en tournée. Stella, passionnée de photographie, ne se doute évidemment pas qu’elle va flasher sur le leader de la formation et que ses membres vont l’inviter à les suivre de concert en concert pour les faire bénéficier de son talent. Ce qui débute sous les auspices d’un conte de fées va-t-il durer ? Bien que l’intrigue ne soit pas d’une énorme surprise, les personnages sont attachants, les uns autant que les autres. Chapitre après chapitre, on suit le cheminement de Stella qui s’intègre dans le monde de la pop pour y découvrir les coulisses, voir évoluer ses sentiments et se confronter à la réalité, parfois assez lointaine de ses rêves. Des thèmes très actuels émaillent le récit : la prise de responsabilité et la mesure du risque. Naturellement, elle ne se doute pas que certains complotent contre elle. Il s’agit en somme d’une lecture estivale parfaite pour oublier le ronron et laisser derrière soi les ennuis de boulot. La fluidité de l’écriture encourage à poursuivre la découverte du récit avec des pans énigmatiques, faits pour titiller la curiosité et des émotions posées pour justement … émouvoir ! Stella, la narratrice, se révèle à la fois attachante, pleine de vitalité tout en cachant son manque de confiance en elle. Quoi qu’il lui en coûte, on se doute que sa rencontre avec « The Heartbreakers » va la transformer durablement ! Ed. Le Livre de Poche – 412 pages Julie Plisnier
LES MUSES Mariana mène l’enquête. Enfin, elle répond à la demande d’aide de Zoé, sa nièce étudiante à Cambridge, et qui accuse Edward Fosca, son professeur de grec ancien, d’avoir assassiné une condisciple sur le campus. Pourquoi ne pas se référer à la police et laisser sa tante, psychothérapeute traumatisée par la mort de son époux voilà un an, se charger de résoudre cette affaire ? Assez vite, Marianna découvre que le susdit enseignant entretient de singulières accointances avec un groupuscule baptisé « les Muses ». Le meurtre d’une deuxième étudiante donne un tour de vis supplémentaire à l’intrigue. Si dès le départ les soupçons convergent dans une même direction, Alex Michaelides a l’heur de faire douter le lecteur en jouant la carte des fausses pistes, en brouillant les cartes et en soulevant de nouveaux indices. A contrario, a-t-on ici affaire à un criminel extrêmement ingénieux capable de passer à travers les mailles du filet et à mener sa besogne sans craindre qui que ce soit ou faiton fausse route ? A mesure que s’égrènent les chapitres, on devine la détermination de l’héroïne, bien décidée à faire éclater la vérité. L'intrigue est menée au cordeau, sans temps morts, et en dévoilant les codes estudiantins sur le fameux campus britannique. De surprise en surprise, Marianne va être amenée à remettre totalement en cause tout ce qu'elle croyait. Suspense garanti ! Ed. Le Livre de Poche – 412 pages Willy Smedt
LE CARROUSEL INFERNAL Ce recueil de nouvelles a été rédigé en 2019 par Joe Hill, un des nouveaux maîtres de l’horreur. Treize récits faits pour surprendre et donner la chair de poule. Treize histoires plus machiavéliques les unes que les autres et qui s’inscrivent dans la veine ouverte par son père Stephen King, qui cosigne deux des textes. Il n’y a pas à dire, l’auteur a été biberonné à bonne école pour son éducation, mâtiné depuis le plus jeune âge par les récits de son paternel à l’aura prégnante. Doté d’une réelle facilité, l’auteur génère les idées et use d’une plume aisée pour les mettre à plat, avec cette caractéristique qu’elles donnent l’impression de ne pas avoir été travaillées pour leur conserver un naturel qui ajoute de la crédibilité à ce qui est narré. Les récits naissent de situations banales qui, bien vite, dérapent pour s’engager dans les méandres de l’étrange et du fantastique. En quelques pages, « Le carrousel infernal » parvient à conduire le lecteur dans différentes sphères bien éloignées les unes des autres, alternant les lieux féériques pour se retrouver ensuite dans un monde futuriste. Ce qui constitue la force de ces récits plus ou moins longs demeure leur chute, qui rappelle en compagnie du fils de qui on voyage. Des aventures singulières chargées de thèmes et d’horizons hétéroclites, mais avec leur particularité qui fait qu’on ne lâche pas la lecture avant la dernière ligne. Ed. Le Livre de Poche – 662 pages Daniel Bastié
LES DERNIÈRES HEURES Les secrets de famille ébranlent les gens. Joséphine en fait la malencontreuse expérience en découvrant une vieille lettre dans une valise. Un courrier qui remonte aux années de guerre. Des mots qu’elle n’aurait sans doute jamais dû lire. Les phrases ponctuent une histoire d’amour vécue autrefois par sa mère. Le récit d’une passion qui remonte à la veille de la libération de Paris. A cette époque, Lise n’hésitait pas à se mettre en danger pour répondre à son besoin de justice. Ses actions portaient essentiellement sur l’exfiltration d’enfants juifs. Un acte de résistance puni de mort. Puis, contre toute attente, elle a été séduite par un soldat allemand. Un jeune homme amené à traduire les lettres de dénonciation pour les remettre à sa hiérarchie. Cupidon joue des tours dont il convient souvent de se défier. Contre toute attente, ils vont s’aimer en défiant toute raison, en se cachant et en vivant une expérience unique : celle de la sincérité et de la prise de conscience. Secoué par la sincérité de Lise, Sebastian va lentement se confronter à l’horreur et à l’absurdité du nazisme pour se trouver face à un terrible dilemme. Que faire ? Renoncer à la belle Française ou trahir son pays ? Ruth Druart signe un mélo qui tient ses promesses. Ici ce sont les minutes de l’intime qui prévalent et qui, dans ses moments de suspension, emportent l’adhésion. Par l’auteure du best-sellers « L’enfant du train » ! Ed. City – 458 pages Sylvie Van Laere
GOERING : L’HOMME DE FER As de l’aviation pendant la première guerre mondiale, Herman Goering se rallie très jeune aux idées d’Adolf Hitler et fait partie de ses premiers fidèles en participant au putsch de 1923. Lorsque le futur führer accède à la chancellerie, il est nommé ministre sans portefeuille en 1933 et reçoit comme mission de fonder la Gestapo avant de devenir ministre de l’Intérieur, président du Reichstag, maître du plan quadriennal et grand veneur. Accro à la morphine, il entre avec conviction dans la Seconde guerre mondiale, jouant de Dunkerque à Stalingrad un rôle essentiel dans le déroulement des opérations militaires. On le sait ambitieux, orgueilleux et instable. Son appât du gain l’a amené à aller toujours plus loin dans les excès pour acquérir de l’or, des diamants et faire édifier un château durant le conflit armé, l’affligeant d’une réputation de pillard. Il fait partie des pontes de l’Allemagne nazie a être traduit devant le tribunal qui s’est tenu à Nuremberg en 1945, poursuivi pour crimes de guerre. Un homme aussi soucieux de sa légende et qui considérait que le fait d’être condamné à la pendaison relevait de l’infamie préféré se suicider en absorbant une capsule de cyanure. Si énormément de choses ont déjà été écrites à propos de ce personnage charismatique et ambigu, François Kersaudy s’est appuyé sur des archives éparses et des sources allemandes, françaises, canadiennes, américaines et suédoises pour narrer la montée en puissance dans le nouveau régime d’une militaire sûr de lui et de sa responsabilité partagée dans le crash de Berlin au printemps 44. Un livre qui évite les redites et fouille les recoins mal ou peu explorés. Ed. Perrin – 420 pages Andrea Cerasi
LES SEPT VIES D’ADRIEN CONUS Oublié aujourd’hui, Adrien Conus a été un compagnon de Libération, fidèle parmi les fidèles du général De Gaulle. Né le 23 avril 1900 à Moscou et décédé le 1er septembre 1947 à Banqui, il a mené une vie aventureuse qui a suscité l’admiration de Joseph Kessel. Malgré une existence relative courte, il a vécu plusieurs destins que peu d’hommes ont connus. Il a été raconté qu’il fut chasseur d’éléphant, chercheur d’or, espion, etc. Formé à la dure en Angleterre, il a regagné la France pour orchestrer la résistance. Arrêté par les Allemands, il a échappé au peloton d’exécution d’une manière miraculeuse, puis a planifié des opérations commando. Après la Victoire, il a poursuivi ses activités en Indochine, bardé de décorations, pour y mener des actions à la capitaine Conan. Malade, il a fini son existence en Afrique, laissant le souvenir d’un être haut en couleur, curieux de tout et sans peur. Pierre Servent s’est attablé pour retracer son parcours chargé de péripéties, en recueillant des témoignages familiaux et en exhumant du passé un patriote dont le récit mériterait mille fois d’être adapté pour le grand écran, puisque cette vie de roman valait tout ce qu’on inventait dans les livres. L’idée de lui consacrer une vraie biographie est née de l’envie de mieux le connaître, en se basant sur les faits et en s’appuyant sur les archives. A lui seul, Adrien Conus incarne nombre de visages de combattants irréguliers engendrés par une époque violente et tellurique, héroïque et barbare. Il était un héros, sans pour autant être un ange ! Ed. Perrin – 362 pages Sammy Loy
LA FILLE DU TRAIN "Je sais ce que j'ai à faire. J'y ai réfléchi toute la journée d'hier, et toute la nuit aussi. Je n'ai presque pas dormi. Il est rentré épuisé et d'une humeur de chien. Tout ce qu'il voulait, c'était manger, baiser et dormir. Pas le temps pour autre chose. Ce n'était certainement pas le bon moment pour parler de ça. (...) Je reste allongée là et je pense à ce que ce professeur m'avait dit, à tout ce que j'ai été: enfant, adolescente rebelle, fugueuse, pute, amante, mauvais mère, mauvaise épouse. Je ne sais pas si je pense me transformer..." Si Megan avait su ce qui l'attendait quelques heures plus tard...mais quoi donc ? Une mauvaise rencontre, voire le pire ? Premier roman de Paula Hawkins, qui fut journaliste durant quinze ans, best-seller ayant fait l'objet d'une adaptation cinématographique, ouvrage dont le plus grand mérite réside en fait dans la qualité de l'intrigue, "La Fille du Train" a été qualifié de bijou du polar psychologique par le Figaro Magazine, de thriller sophistiqué par le Monde des Livres, d'addictif à vous rendre aussi paranoïaque que sa principale protagoniste par Télérama. Des éloges justifiés ? Nous sommes bien ici en présence d'une trame joliment ficelée réunissant trois personnalités de femme hors norme qui doivent affronter leurs démons : Rachel, qui est divorcée et plutôt portée sur la boisson, Megan, qui est mariée à Scott qu'elle semble aimer de tout son cœur, et Anna qui a eu un enfant de Tom avec qui elle s'est mariée après qu'il ait divorcé de Rachel, complexité et relations agitées au menu de ce "suspense tordu à souhait" (Avantages). Le défaut qu'il nous faut malgré tout mentionner ? Une traduction très littérale de la version originale, au style peu fluide, parfois heurté et même poussif pour le lecteur qui serait habitué au style mozartien des auteurs francophones tels Eric-Emmanuel Schmitt ou Bernard Werber. Et si nous reprenions par le début ? Chaque matin depuis son train de 8h04, Rachel passe son temps à observer les maisons en contrebas de la voie ferrée, son convoi ralentissant de manière systématique et quasi récurrente en raison d'un feu passant souvent au rouge. Dans le jardin de l'une de ses maisons, elle voit régulièrement un couple qu'elle imagine parfait et heureux comme elle le fut par le passé avant que Tom, son mari, ne la trompe. Mais un jour c'est un autre homme plus basané qu'elle aperçoit et cela la bouleverse considérablement quand soudain, quelque temps plus tard, elle apprend la disparition de la jeune femme. Il n'en faut pas davantage pour Rachel pour se mettre aussitôt à enquêter, très intriguée, notre héroïne allant bientôt de surprise en surprise ceci dans un contexte de vie personnel difficile : Rachel ne parvient pas à se remettre de son divorce, aimant manifestement toujours son ex-mari. La disparue ? Elle découvre qu'elle se prénomme Megan; celle-ci semblait tout avoir pour être heureuse mais... "Ca va être dur. Ca risque même d'être la chose la plus difficile que j'ai jamais eu à faire, mais je vais dire la vérité. Finis les mensonges, les secrets, finie la fuite, finies les conneries. Je vais tout faire éclater au grand jour et, ensuite, on verra. S'il ne peut plus m'aimer après ça..." Qu'est-il finalement arrivé à Megan quelques heures plus tard ? A-t-elle été kidnappée lors de la traversée de ce sombre passage qui se situe sous la voie ferrée ? Inspirée, Paula Hawkins nous mène parfois en bateau, nous maintenant également en haleine tout au long de ce récit où nous voyageons la plupart du temps au cœur des pensées de nos protagonistes toutes les trois fragilisées par la vie, l'insoutenable légèreté de l'être en action, le manque d'honnêteté et de sincérité se retrouvant aussi en cause. Réellement addictif, ce thriller ? L'auteure s'est appliquée, c'est certain; n'hésitons donc point à découvrir ce roman à haute teneur hypnotique qui nous maintiendra pourtant éveillés jusqu'à l'épilogue de cette jolie leçon de suspense. "La Fille du Train" ? Embarquons avec elle et suivons-la dans son périple digne de la traversée du Pacifique ! Bon voyage à chacun ! Ed. Pocket – 456 pages Thierry-Marie Delaunois
MAGALI Magali est une femme fière qui refuse de s’en laisser conter par les hommes. Elle tient tête à son père, le comte d’Embrussum, descendant d’une illustre dynastie camarguaise. Pour arracher son indépendance, elle passe de prétendant en prétendant et se prélasse dans les bras de gardians pauvres comme Job mais beaux comme le ciel. N’en déplaise à son paternel, elle fera comme elle l’entend, quitte à se battre jusqu’au dernier souffle. Jacky Simeon propose un roman qui sent l’odeur de la nature sauvage et de la sueur. Avec une plume exaltée, il décrit la magnificence des paysages, déploie un talent rare pour provoquer la rencontre entre individus qui n’auraient jamais dû se croiser. Les saynètes sont relativement courtes, servies par de rares dialogues, compensant ce que certains pourraient appeler un manque mais comblé par la finesse et le détail des descriptions qui plongent le lecteur dans un monde avec ses codes, son honneur, ses pulsions et ses exigences. Finement observé, ce roman nous fait visiter une région que peu connaissent, si ce ne sont ceux qui ont pris la peine d’y séjourner le temps de vacances ou qui ont visionné jadis le film « Crin-Blanc » du vétéran Albert Lamorisse. Dépaysement garanti ! Ed. Au Diable Vauvert – 235 pages Paul Huet
POURQUOI ÇA FAIT SI MAL Né à Cholet, Sébastien Ayreault vit et travaille aux Etats-Unis. Auteur de nouvelles et de chansons, il s’inscrit comme l’un des meilleurs poètes de sa génération. A travers une succession de textes courts, il propose des atmosphères qui résument parfaitement ses univers. Avec une économie de moyens, il évite la surenchère pour s’ancrer dans la quotidienneté et parler à chacun. « Pourquoi ça fait si mal » se veut un texte fédérateur qui évite le côté lugubre des choses de la vie. Pas de désespoir, mais un regard qui part souvent de biais pour assurer que l’existence mérite d’être vécue malgré les avanies qui la frappent, les hauts et bas qui se succèdent. Ici, le poète joue simplement le jeu de la vie, en abattant ses cartes sans bluffer. Pour ne jamais laisser le lecteur en rade, il inonde ses vers de références, cite certains films, extirpe plusieurs livres des rayonnages des bibliothèques, évoque Céline et Bukowski (son maître). Enfin, il ose l’humour pour vaincre les réticences. Voilà un exemple : Tu avais ton permis et ça changeait pas mal de choses. On pouvait faire l’amour en voiture. Avis aux amateurs ! Ed. Au Diable vauvert – 105 pages André Metzinger
SI TU SAVAIS LE DON DE DIEU L’Eglise, c’est bien sûr des dogmes, du vivre-ensemble, des règles à suivre, une communauté, de l’adoration ! Aujourd’hui, le monde est soumis à des défis qu’on esquivait autrefois. La société a évolué, les mœurs se sont adaptées au quotidien et le regard des autres a été amené à se soumettre à ces modifications impossibles à juguler. Des situations qui n’existaient pas hier sont apparues : divorce, concubinage, amour libre, naissances hors mariage, etc. Ce livre n’a pas pour objectif de tout résoudre, mais d’apporter des pistes de réflexion pour qui vit ou connaît un proche dans pareille circonstance. Le but ne consiste évidemment pas à juger ou à émettre un avis qui vise à départager. Il rappelle seulement l’importance de ne pas faire du surplace et martèle que chacun a un chemin à parcourir sans pour autant rentrer dans le rang. Plus que durant les siècles précédents, l’Eglise est consciente que les défis existent et qu’aider les croyants à les dépasser reste un objectif majeur. Pour ce faire, un conseil prévaut : ne pas s’isoler, parler et se reprocher de la communauté. L’idée est ici de proposer un parcours en douze étapes à l’attention des personnes qui ont connu une rupture dans leur couple, un divorce, un abandon ou qui ont entamé une nouvelle union matrimoniale. Il s’agit de cheminer pour faire le point en acceptant le pardon, en veillant à ne pas se retourner pour gémir ou maudire et de se rappeler à quel point l’amour du Christ aide à surmonter les épreuves lorsqu’elles se présentent avec force et virulence. « Si tu savais le don de Dieu » conjugue harmonieusement miséricorde et conseils pratiques en s’appuyant d’extraits des Evangiles, d’enseignements autour du thème de la rencontre et d’invitation à la prière et à la litturgie. Ed. Artège – 160 pages Sam Mas
LES GRANDES HÉRÉSIES A l’instar de tous les grands courants philosophiques ou religieux, le christianisme a connu des périodes de tourmente avec une totale remise en question des fondements de la foi, des mouvements partis sans crier gare et qui ont mis à mal les socles de l’institution religieuse, amenant des réactions souvent violentes. Hilaire Belloc revient sur les courants qui ont fait bouger le catholicisme et les remet en place dans notre histoire. Avant de débuter son analyse, il précise quelques points dont la définition classique d’une hérésie, la portée de celle-ci et la manière de la réprimer. Encouragé par une encre limpide et une érudition sans défauts, il retrace à travers une vingtaine de siècles le vent de nouveautés qui se sont voulues subversives et révolutionnaires à divers niveaux. L’opportunité de revenir sur l’hérésie arienne au cœur de l’empire romain, l’hérésie albigeoise, la réforme et, parmi plusieurs autres, l’entreprise de déconstruction contemporaine des bases de la Foi par un athéisme majoritaire en Europe centrale. L’auteur, décédé en 1953, est un géant oublié des lettres anglaises et son acuité a longtemps servi de métronome lorsqu’il s’agissait de circonscrire la pensée catholique. Cette première traduction fait figure d’événement dans la mesure où elle comble un vide littéraire. Ed. Artège – 270 pages Sam Mas
LA FEMME AU MIROIR « Quatre cents pages ! Quinze ans de réflexion. Je n’avais pas rencontré de sujet qui me demande autant de pages d’écriture depuis "La part de l"autre"(...) Mais je ne sais pas encore en parler. J’ai encore la truffe collée aux phrases... » Paroles d’Eric-Emmanuel Schmitt, compréhensibles : le récit, d’une profondeur schmittique, touche à l’indicible, fait jaillir l’inexprimable, substance palpable qui flotte en nous perpétuellement. Une découverte de soi en même temps qu’une certaine peur de soi-même, de l’avenir, que tout individu normal ressent en chemin, déclenchant inéluctablement le besoin de préparer le quotidien, de planifier, de contrer l’impondérable, on se sent alors mieux, on se rassure, tel est le sentiment final du lecteur, qui ne peut sortir indemne de ce voyage proposé par Schmitt. Véritable plongée en apnée au coeur d’un étourdissant triptyque, "La femme au miroir" révèle au monde trois femmes : Anne, Flamande de Bruges sous la Renaissance, Hanna, de la Vienne impériale, Anny, de Hollywood, vivant de nos jours. Toutes se sentent différentes, du commun des mortels. Au départ, ce n’est qu’un subtil murmure : "le bonheur se cache dehors, derrière un arbre...", plus tard vient la révélation ou l’émerveillement pour chacune d’elles, mais de manière contrastée, différente. A nouveau, la qualité d’écriture est là: le style, délié, fluide, de l’auteur, est reconnaissable, il nous emporte dans une véritable odyssée à la structure contrastée. Cathédrale dans l’âme - souci du détail, charpente solide et étudiée, finition fignolée -, "La femme au miroir" est une oeuvre parfaitement maîtrisée : Schmitt savait où il allait dès l’instant où il a pris la route. Renaissance : Anne de Bruges, fiancée sans amour, fuit soudain son mariage tout proche, se réfugie en pleine nature, s’émerveille, mystique qui s’ignore. "Le bonheur se cachait...tel un lapin; elle voyait le bout de son nez; elle percevait sa présence, son invite, son impatience...". Son parcours, semé d’embûches, la mènera sur bien des sentiers jusqu’à ce qu’elle se découvre réellement. Totalement. Mais, l’époque ... 1904 : Hanna von Waldbergh, mariée à Franz, évolue dans le beau monde, collectionne sulfures et mille-fleurs, sans doute pour leur immuabilité, songe à avoir un enfant. La maternité est-elle le destin de la femme ? "Tu es beaucoup plus que ce que tu crois être" lui révèlera son mari. Quel est son chemin en ce monde ? S. Freud s’est installé à Vienne. La psychanalyse, qu’est-ce donc ? Elle s’interroge, hésite, cherche. 2010 : Anny, star de cinéma à vingt ans, papillonne, s’étourdit, alcool, sexe et drogues au menu. Elle danse, semble s’éclater; soudain c’est l’accident qui la conduit à une prise de conscience: elle doit changer quelque chose à sa vie. Une collègue, ou consoeur, lui révèle : "Anny, tu n’es pas heureuse", la réflexion suit. "Qu’est-ce qui est le plus difficile ? Souffrir de faire ce qu’on n’aime pas ou souffrir pour faire ce qu’on aime ?" Remuée, Anny se met à évoluer mais, pernicieux, bien ancrés en elle, ses vices sont toujours là. "La femme au miroir" nous dévoile trois sentiers de vie tortueux, émaillés de pièges, le lecteur les suivra, en parallèle. "Jusqu’à aimer la douleur autant que le plaisir. Ne pas craindre la crainte ? Embrasser la mort comme on embrasse la vie ?" Au lecteur, celui qui a embrassé "Schmitt", d’en juger. Anne, Hanna, Anny, et si c’était la même ? Le titre nous apporte peut-être la réponse...ou son miroir. Qui sait ? Ed. Livre de Poche – 408 pages Thierry-Marie Delaunois
CE QUE LE PASSÉ ME RÉSERVE Extrait : « Lorsqu’elle est tombée enceinte à 18 ans, Agnès a fait ce qu’on attendait d’elle. Elle a rangé ses rêves de gloire et ses pinceaux pour devenir une épouse et une mère. Treize ans plus tard, le passé revient frapper à sa porte et lui fait comprendre que le prix à payer est trop élevé... ». Brigitte Moreau est fan de yoga, de tisanes et de belles histoires. Assise en lotus sur son canapé, elle quitte dès qu’elle le peut le monde réel pour celui de la fiction. Lecture ou écriture ? Romans ou nouvelles ? Elle préfère ne pas choisir, ils ont tous leur place dans sa vie. Formidable pépite, ce roman était jusqu’ici réservé aux lecteurs numériques. Il complète enfin La Complainte d’Isabeau et ses nombreuses nouvelles. Un livre qui est sorti cet été et qui fait partie des indispensables à emporter avec soi pour villégiaturer. Une plume alerte et un thème fédérateur. Ed. Lamiroy – 114 pages
PROUST RECHERCHE Pour célébrer l’année du centenaire de la disparition de Marcel Proust, Maxime Lamiroy, libraire chez Tropismes à Bruxelles, vous propose sept chroniques sur Marcel Proust. Au travers de sept thèmes, inspirés des sept tomes de La Recherche, elles investiguent les différentes facettes de son œuvre et effectuent un voyage sinuant parmi un millier de titres consacrés au romancier de Combray, Balbec et Paris. L’année 2022 célèbre les cent ans de la disparition de Marcel Proust. Depuis un siècle, l’écrivain de Combray et son œuvre phare « À la recherche du temps perdu » sont le sujet de nombreux ouvrages. L’idée est venue à Maxime Lamiroy de recenser ces parutions. Il a entré le mot « Proust » dans la base de recherche et a parcouru les mille références que proposait Électre (le programme-compagne de tous les libraires). Il a regroupé les titres par thèmes et a décidé de les faire correspondre chacun au titre détourné d’un tome de la Recherche. On le sait, Marcel Proust fait partie de ces indispensables qui ont marqué l’histoire de la littérature et sans qui le plaisir de lire ne serait pas le même. Ed. Lamiroy - 62 pages