BRUXELLES CULTURE 5 juillet 2022 Brussels Diffusion asbl Contact et abonnement gratuit : pressculture4@gmail.com
RENCONTRE : ELISE JANE
RENCONTRE : ELISE JANE Elise Jane est un nom d'emprunt. Cette écrivaine est née à Toulouse en 1969. Son anonymat lui permet de travailler pour la prévention dans les domaines suivants : violences faites aux femmes, prostitution, délinquance et addictions diverses. Rencontrée via les réseaux sociaux et, principalement par le truchement de sa page Facebook, l’idée est venue de l’interviewer. Au-delà de la qualité de son écriture, ses romans parlent de thématiques fortes, de sujets qu’on aurait tort d’occulter, car malheureusement trop présents dans notre société. Rencontre. Qui êtes-vous, Elise Jane ? Jusqu’à l’âge adulte, j’étais une jeune fille peu sociable. J’observais le monde autour de moi sans comprendre le sens de la vie. J’ai suivi des études de gestion administrative puis d’informatique sans grande conviction. Lorsque je me suis ouverte aux autres, je me suis naturellement tournée vers ceux qui étaient dans le besoin. J’ai intégré en qualité de bénévole une association de « paterning » pour enfants handicapés et, plus tard, une association qui aidait les personnes démunies. J’avais trouvé mon but. Je crois profondément qu’il faut sortir de sa zone de confort pour apprendre à connaître l’être humain. Ma profession m’a permis d’être en poste dans plusieurs villes de France : Paris, Toulouse… J’ai côtoyé des gens en souffrance, des femmes violentées, des hommes sous la coupe d’une éducation ancestrale, des enfants perdus. J’ai appris à les écouter sans les juger. Je travaille, actuellement, dans la prévention de la délinquance, des addictions, de la prostitution des mineurs et des violences intrafamiliales. Je suis également bénévole dans plusieurs associations et notamment référente et enquêtrice pour « Assistance, Recherche de Personnes disparues » (ARPD) qui est basée à Paris et qui aide les familles à retrouver une personne proche dont la disparition inquiétante n’a jamais été élucidée par la justice. Les muses se sont penchées sur votre berceau. De quel talent vous ont-elles comblée ? J’ai toujours eu un penchant pour la créativité et l’imaginaire. Le mot talent ne convient pas vraiment à ma personnalité. Lire, écrire, créer des objets voilà pour moi une passion davantage qu’un talent. Aujourd’hui, je suis heureuse de constater que toutes ces passions, je les ai transmises à mes enfants. Ma fille a une formation de photographe et de graphiste et a commencé à écrire son premier roman. C’est elle qui réalise la couverture de mes livres. Quant à mon fils, il crée des objets insolites avec du recyclage et compose des poèmes où il partage ses émotions. À quel âge avez-vous senti la fibre artistique croître en vous ? Dès l’adolescence, j’ai commencé à rédiger des poèmes. Je retranscrivais mes ressentis et mon espoir d’une vie meilleure. Quand je suis entrée dans le monde du travail, j’ai couché ma biographie. Après deux années d’écriture émotionnellement compliquée, j’ai brûlé toutes les pages. Les mots étaient personnels et je ne voulais pas les partager. Avez-vous été encouragée par vos proches ? Ma fille qui m’a encouragée à publier mon premier roman. Les autres membres de la famille ont été surpris et ont été mes premiers lecteurs assidus. Quant à mes amis proches, chacun a reconnu ma personnalité sensible. Ils sont tous fiers de moi et j’en suis étonnée. Chacun me pousse à continuer l’écriture. Que lisiez-vous étant enfant ? Pensez-vous que ces lectures ont orienté votre écriture ? Enfant, je ne lisais pas. Je rêvais, je m’inventais de belles histoires qui m’aidaient à m’endormir. J’ai réellement apprécié la lecture lorsque j’étais étudiante. Les mots apportaient un sens à ma vie et j’avais
besoin de lire pour m’évader. Ce ne sont pas mes lectures qui ont orienté mon écriture. Ce sont les épreuves de la vie. Assez paradoxalement, une partie du public vous connaît comme écrivaine, alors qu’une autre vous connaît sous une autre identité. Pourquoi le choix d’un pseudonyme littéraire ? Elise Jane est mon nom d’auteur. Le prénom Elise est celui de ma nourrice, une personne habitée par l’amour et la bienveillance. Le nom Jane est le diminutif du prénom de ma grand-mère maternelle, c’est avec elle que j’ai pu partager mes lectures et cette passion pour les mots. J’aime la discrétion et je considère que je vis trois existences : ma vie personnelle, ma vie de famille et ma vie professionnelle. Je gère, les trois, différemment. C’est la raison pour laquelle on dit souvent que je possède une personnalité atypique. Finalement, rares sont celles et ceux qui me connaissent profondément. Je crois qu’il s’agit enfin d’une manière de me protéger des autres et de continuer à rester dans ma bulle. Pour vous, écrire c’est d’abord … Écrire est un exutoire, mais c’est surtout avoir la chance de mettre en avant des hommes et des femmes qui m’ont fait confiance. Avec leur accord, j’ai retranscrit l’histoire de leur vie, mais aussi de la mienne. L’amour devrait avoir une part très importante dans le parcours de chacun, car nous vivons dans un monde où l’argent, l’individualisme, l’indifférence et le manque de tolérance sont devenus une priorité, bien plus que la place de l’humain en tant que tel. Mes lecteurs l’ont compris et je leur en suis reconnaissante. À ce jour, vous avez publié trois romans ancrés dans le réel. Il s’agit le plus souvent d’histoires d’amour perturbées par un climat social difficile. D’où vient l’inspiration ? Je retranscris des histoires vécues de personnes que j’ai côtoyées, mais il y a aussi une partie de ma vie réelle, celle qui ne peut être racontée ouvertement. Mélanger mon quotidien avec celui des autres à travers l’écriture est une thérapie pour continuer à avancer dans un monde où le but n’est plus de vivre dans le bonheur, mais plutôt de survivre en tant que personne à part entière pour trouver sa place. Dans mon métier autant que dans ma vie associative, je côtoie le désespoir, la violence, la tristesse, la maltraitance, la douleur physique et psychologique, l’oubli, la délinquance, la folie. Je connais personnellement certaines de ces souffrances et, à cinquante-trois ans, il est peut-être temps de les partager. Je vois des personnes souffrir, dans un monde où elles ne trouvent pas d’apaisement. Certaines survivent comme elles peuvent, d’autres sont déjà mortes intérieurement. C’est tellement triste de ne pas pouvoir aider tout le monde. À travers mes livres, elles existeront encore, même lorsque la vie les aura oubliées. Pouvez-vous nous parler de l’ouvrage « Votre amour est plus fort que ma mort », sous-titré « Survivre à la maladie grâce à l’amour » ? Ce roman est une histoire d’amour passionnée peu commune dans un trio. Il raconte l’histoire de Lise qui va changer de métier, de style de vie et qui va enfin réaliser une partie de ses rêves. Lorsqu’un médecin lui annonce une maladie grave, elle va prendre la décision de vivre pleinement ses envies, sans se soucier des préjugés ni du regard des autres. L’amour simple, bienveillant et honnête de deux hommes va l’aider à surmonter sa nouvelle vie de femme malade. Ce roman représente une bouffée d’oxygène. Malade ou pas, j’ai l’intime conviction que nous serions tous plus heureux si nous pouvions vivre nos rêves en faisant abstraction à nos obligations journalières. Bien sûr, je n’ai pas la prétention de dire que l’amour guérit, mais je reste convaincue qu’il aide à endurer la souffrance en la lénifiant. De quoi traite le roman intitulé « Ma résurrection » Ce roman me touche personnellement et j’ai eu beaucoup de difficulté à y déposer le mot « fin ». La thématique principale en est la violence commise envers les femmes au sein du couple. J’ai côtoyé et je côtoie encore ce type de violences. A travers l’histoire de Samantha, j’ai voulu donner de l’espoir à
celles qui n’arrivent pas à quitter la personne qui les brutalise physiquement ou psychologiquement. Il suffit d’un déclic, d’une rencontre ou d’un espoir pour décider, enfin, de fuir son présent et courir vers son futur. Il s’agit d’une décision difficile à prendre. Parfois, elle prend de nombreuses années, parce que les victimes doivent être prêtes à affronter l’inconnu pour abandonner ce cauchemar qu’elles connaissent si bien. Enfin, à quoi doit-on s’attendre en achetant « Votre haine ne détruira pas notre amour » ? L’histoire d’Amin et de Marie revient sur la rencontre entre une commissaire de police catholique et un trafiquant de stupéfiants musulman. Deux vies opposées qui s’affrontent et se rapprochent pour, finalement, s’apercevoir que peu importe l’origine et la classe sociale, la vie n’épargne personne. Le monde dans lequel nous vivons, manque de bienveillance, de tolérance autant que d’amour et est rempli de préjugés. En résumé, c’est le message que je souhaitais partager avec mes lecteurs Tout un temps, vous refusiez qu’une photographie de vous soit associée à vos fictions. Pour quel motif et comment expliquez-vous ce changement de cap ? Je souhaite continuer à protéger ma vie professionnelle et ma vie privée. Je n’écris pas pour être connue ou reconnue. J’écris pour partager des ressentis, des leçons de vie et démontrer que, parfois, après la souffrance, l’apaisement permet de profiter de tous les moments qui nous sont bénéfiques. Dans ma profession, je me dois d’être discrète. Avant d’accepter cette interview, j’ai demandé l’accord de ma hiérarchie. Cette démarche a été difficile pour moi, parce que mes collègues de travail ne savent pas que j’écris. J’ai aussi dû prouver que je pouvais concilier ma journée de travail avec mes moments d’écriture en soirée et parfois, la nuit. Que vous apporte aujourd’hui l’acte d’écrire ? Ecrire des histoires vécues, sur des thématiques parfois dures, représente une possibilité d’échange avec les victimes et les bourreaux. Pour une femme émotionnellement complexe comme moi, je dirais qu’écrire est une thérapie de groupe puisqu’elle permet avant tout à nous, les victimes, de continuer d’exister en tant que personne. À partir de quel instant, un livre est-il terminé, prêt à être livré au public ? Cette question est extrêmement difficile. Pour moi, un livre n’est jamais terminé. Pour qu’il soit publié, je dois d’abord être prête psychologiquement. J’ai beaucoup de mal à me détacher de mes personnages, puisque je les connais intimement. Dans tous mes romans, les prénoms et les lieux ont été modifiés pour que les lecteurs ne puissent faire aucun rapprochement. Avant chaque publication, je demande l’accord des victimes et le livre version « papier » est soumis à leur approbation. Lorsque je suis prête à envoyer le manuscrit à mon correcteur, je me sens vide. Je suis en manque, un peu comme si je prenais la décision de laisser un passé douloureux me quitter. Pour tutoyer vos œuvres, quel ouvrage conseilleriez-vous à un novice ? J’ai écrit « Ma Résurrection » lorsque j’ai contracté le Covid 19 lors du premier confinement. En quinze jours, ce livre de plus de quatre cents pages a été bouclé. A ce moment-là, les mots fusaient dans mon cerveau et l’écriture était simple aussi bien que fluide. Mes trois romans se relient par un fil conducteur que beaucoup de
lecteurs ont trouvé. Néanmoins, pour découvrir ma plume, je conseille « Ma Résurrection ». Quels sont vos projets ? Actuellement, je travaille sur trois nouveaux romans. Celui que je souhaite finir avant la fin de l’année est le tome 2 de « Ma Résurrection ». Mon site internet est en construction. Vous pouvez me retrouver sur facebook : Elise JANE et Elise JANE auteur, sur instagram : elise.Jane.auteur et sur sur Tik-Tok : elise.Jane.auteur Propos recueillis par Daniel Bastié
EXPOSITION : PORTRAIT DE FEMMES Retour sur une exposition qui se tient à la Villa Empain jusqu’au 4 septembre. Elle est consacrée au Portrait de femmes depuis la Préhistoire jusqu’à nos jours. Un portrait contrasté ! Dans un précédent article, nous avons montré comment ces femmes étaient le produit du regard masculin. Les artistes les ont déclinées dans des poses suggestives, qui plaisaient aux hommes. Ils les ont représentées le plus souvent nues, comme on peut le voir avec les Vénus de l’âge de pierre ou celles du monde antique. Le Moyen Age chrétien les a transformées en madones irréprochables. Léonard de Vinci insistait sur le degré de leur vertu, en leur recommandant de serrer les jambes sous leur robe, d’avoir la tête inclinée et le regard baissé. Ce sont des poses de saintes qu’il nous présente et qu’il a étudiées dans ses tableaux. Les peintres plus tard ont dévêtu les femmes dans des nus intimes qu’ils nous font partager : elles dorment ici, s’éveillent là ou vont au bain dans une tenue négligée qui, au XVIIIe siècle, laisse place à la nudité érotique. Ou à l’exotisme avec la vague orientaliste. La femme est le modèle du peintre, sa chose, parfois sa muse, qu’il s’approprie pour un public essentiellement masculin. C’était le sujet de la première partie de l’exposition que nous avons décrite précédemment. Portraits et autoportraits à partir de 1950 Le regard porté sur la femme change dans la seconde moitié du XXe siècle. Elle a acquis son indépendance, elle ouvre un compte en banque sans l’autorisation de l’homme, elle participe comme lui aux élections depuis 1950, date phare dans l’exposition et dans toute l’Europe. En France, ce fut en 1944, sous le Général de Gaulle. En Belgique, en 1948. En Tunisie, en 1956. Et ailleurs encore dans le monde. L’émancipation féminine était en marche et allait changer le regard sur la femme. Aujourd’hui, il y a beaucoup plus de femmes inscrites dans les écoles d’art que d’hommes. Et les portraitistes sont davantage des femmes. Dans les six dernières chambres de l’exposition, vous verrez ces femmes à travers de nouveaux médias comme la photographie ou la vidéo, qui les prennent sur le vif, dans la rue ou dans leurs activités quotidiennes. A travers ces photos, le paysage où paraît la femme devient l’état d’âme du spectateur qui explore un espace psychique. Cette femme debout, par exemple, devant un mur à la frontière libanoisraélienne, évoque les femmes activistes du Moyen Orient luttant pour leur indépendance ou celle de leur pays. Photographiées par Rania
Matar, elles dialoguent avec, au milieu de la pièce, les chaussures à talon transformées en bronze ou recouvertes de punaises qui vont s’enfoncer dans le pied des activistes. Le combat des femmes pour la liberté n’est pas gagné, comme on peut le voir. D’autres photos montrent l’ambivalence du genre humain, déjà posée dans Le Banquet de Platon qui affirmait que chacun de nous n’est qu’une moitié de l’autre et qu’on est tous à la recherche de notre alter ego. C’est le mythe de l’hermaphrodite mi-homme, mi-femme par ses attributs. Ce sont aussi Les Travestis de Lisetta Carmi, les portraits énigmatiques de Gauthier Hubert ou l’œuvre de Chaza Charafeddine, qui visualisent la question du genre présente dans cette exposition. La vidéo de Rosalind Nashashibi et Lucy Skaer, intitulée Why are You Angry ?, est une réponse à la peinture post-impressionniste de Gauguin sur les femmes de Polynésie. Prenant les poses du peintre, elles s’interrogent sur ce qu’il a voulu faire en les peignant ainsi, avec des couleurs franches et simplifiées qui témoignent de leur nature primitive. Baudelaire parlait, dans Parfum exotique, « des femmes dont l’œil par sa franchise étonne », par rapport à la femme occidentale soumise au regard masculin. C’est un regard critique sur Gauguin que portent nos Tahitiennes à l’écran. Pour se faire une idée de la complexité d’être une femme aujourd’hui, le public est invité, à la fin de l’exposition, à porter des chaussures féminines présentées dans le Grand Salon et à écouter les récits des femmes qui sont interviewées. Qu’est-ce que c’est que d’être une travailleuse du sexe, d’avoir passé des années en prison, d’être une enfant qui grandit à Téhéran, une réfugiée syrienne ou une vétérane de la guerre ? Vous découvrirez les réponses à ces questions au fil de l’exposition foisonnante orchestrée par Louma Salamé, directrice de la Fondation Boghossian qui l’organise. Portrait de femmes est visible jusqu’au 4 septembre à la Villa Empain. Plus de détails sur www.boghossianfoundation.be Av. Franklin Roosevelt, 67 à 1050 Bruxelles Michel Lequeux
COMÉDIE MUSICALE : ELISABETH Cette comédie musicale raconte l'histoire d'Elisabeth (mieux connue sous le surnom Sissi et immortalisée à l’écran par Romy Schneider), l'impératrice d'Autriche, et revient sur ses fiançailles et son mariage avec le jeune empereur François-Joseph en 1854 jusqu’à son assassinat en 1898 par l'anarchiste italien Luigi Lucheni. Même s'il s'agit d'un coup de foudre, leur amour a toutefois été mis à l'épreuve. Non seulement à cause de l'ingérence de la stricte archiduchesse Sophie, la mère de François-Joseph, mais surtout à cause de la vie elle-même. Après une existence remplie de passion, de tragédies et d'incompréhensions qui culmine avec le suicide de son fils émotionnellement négligé, elle finit dans un isolement complet et fuit tout et tout le monde. L’histoire qui avait débuté comme un conte de fées s’achève de façon dramatique, puisque la violence et la mort la rattrapent lors de son dernier voyage. Pour raconter son destin, le compositeur Sylvester Levay a déployé une partition généreuse qui unit romantisme et instants tragiques. Le librettiste Michael Kunze a fourni un livret idoine pour la version originale en allemand. Fort vite, l’œuvre est devenue un succès sur les planches et a fait l’objet de plusieurs pressages discographiques, avant de voyager à travers le monde. Au-delà du destin d’une reine passée à la postérité ultérieurement grâce au cinéma, il s’agit avant tout ici d’une récréation agréable qui prend l’Histoire pour prétexte à de belles envolées lyriques et chantées. Jack Cooper et Simon Paco ont veillé au soin de la mise en scène et ont fait appel à Stéphane Laporte pour l’adaptation française. Marie-Pierre de Brienne, Antonio Macipe, Arnaud Masclet et beaucoup d’autres donnent de la voix sur scène et dansent face à l’orchestre dirigé en direct par Laure Campion. Les représentations ont lieu au Château du Karreveld du 11 juillet au 25 août 2022. Voyez tous les détails sur le site www.brusselons.be Av. Jean de la Hoese, 32 à 1080 Bruxelles Daniel Bastié
THÉÂTRE : ROMEO ET JULIETTE Ce classique de William Shakespeare a régulièrement eu droit aux honneurs de la scène et les adaptations cinématographiques n’ont pas manqué. Qui a oublié la version de Franco Zeffirelli avec Olivia Hussey et celle de Bahz Lurzmann avec Leonardo di Caprio, même si rien ne vaut de découvrir cette pièce en live avec la performance de comédiens sur les planches ? L’action se déroule à Vérone et nous raconte la querelle séculaire qui oppose deux familles voisines. Les Capulet mènent la vie dure aux Montaigu et inversement. Néanmoins, contre toute attente, une histoire d’amour se tisse malgré la haine viscérale que les aînés se vouent. Juliette est folle de passion pour le beau Roméo et, à deux, ils bravent les interdits pour se retrouver en cachette et se prêter à des caresses et à des baisers. Avec un talent que nul peut lui nier, l’auteur parvient à faire pleurer et transforme leurs épanchements en tragédie. Depuis plus de quatre cents ans, le couple est devenu l’archétype des amants maudits, frappés par la bêtise des adultes. Il ne s’agit pas d’un drame ancien, mais d’un récit qui se singularise par son intemporalité, avec des accents qui interpellent toujours actuellement. Combien de jeunes ne sont-ils pas confrontés à la violence des leurs, se voient imposer un mariage forcé ou se trouvent en proie au rejet parce qu’ils s’éprennent d’une personne qui ne convient au cercle étroit des proches ? Les dialogues font mouche, quelques scènes sont devenues cultes (dont celle du balcon) et le final a énormément contribué à booster la vente des mouchoirs Kleenex. Tout s’achève par le suicide des tourtereaux et l’écrire ne revient pas à déflorer un secret. L’Abbaye de Villers-la-Ville inscrit « Roméo et Juliette » au menu de son agenda estival. Ce drame est à applaudir en plein air à partir du 12 juillet jusqu’au 6 août 2022. Voyez toutes les informations pratiques sur le site www.deldiffusion.be. Rue de l’Abbaye, 55 à 1495 Villers-la-Ville Daniel Bastié
SAISON 22-23 AU THÉÂTRE DES MARTYRS Heureux d’en avoir fini pour le moment avec le Covid-19 et les masques, Philippe Sireuil, directeur artistique depuis 2015, a démasqué fin mai la prochaine saison du Théâtre des Martyrs. Devant une salle comble qui ne demandait qu’à être comblée par l’annonce des dix-huit prochains spectacles se pressant au portillon. « Dire notre foi : qu’il y a plusieurs spectateurs, spectatrices, spectateur-ices en nous, qu’il ne faut pas réfréner, qu’on peut à la fois goûter aux écritures d’hier et d’aujourd’hui, à toutes les formes qui en découlent, à tous les croisements qui en naissent, aux thématiques et sujets discordants qui les innervent. C’est ce qui fonde le projet du Théâtre des Martyrs, sans intégrisme programmatique ni cécité, avec la curiosité pour boussole et l’incertain pour horizon. » Philippe Sireuil veut atteindre, avec les portraits inclusifs qui présentent la saison, cette part cachée de nous-mêmes où les genres se confondent. Où le féminin et le masculin se rejoignent, se télescopent pour faire notre humanité. Les prochains spectacles y touchent en mêlant les écritures. Un portrait rencontre l’autre en acceptant le temps qui passe, les rides qui apparaissent, les pulsions qui disparaissent, les sillons qui se creusent sous les passions. La passion du théâtre. Le but du Théâtre des Martyrs, c’est de faire refleurir ces rencontres entre le passé et le présent, entre les fictions d’hier et d’aujourd’hui, en préservant leur singularité et leur complexité. Au programme jusqu’en décembre •
Loin de Linden de Veronika Mabardi et Giuseppe Lonobile. Deux aïeules se parlent, du moins essaient de le faire entre le patois flamand et la langue huppée de la bourgeoisie francophone. Un dialogue de sourds. Silence familial, silence de l’histoire dans la Belgique divisée entre les deux communautés. C’est un bond dans le temps qui met à jour les souvenirs de guerre, les conflits linguistiques du plat pays, mais aussi la chaleur des anecdotes de l’époque. Des récits croisés qui inscrivent l’intime dans l’Histoire. Cette rencontre improbable retisse les morceaux éparpillés d’un puzzle qui est l’histoire de notre pays (20/9 au 7/10).
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Le Procès. S’emparant des dix cahiers écrits par Franz Kafka, Hélène Theunissen pose un regard neuf sur ce casse-tête tentaculaire de la machine administrative et judiciaire. Une lecture du Procès oscillant entre la narration et l’incarnation, dans laquelle nos sensations deviennent confuses, la réalité nous échappe comme à Josef K., l’humour et le monstrueux fusionnent pour créer une atmosphère cauchemardesque. Il en est resté le mot kafkaïen pour le dire (du 20/9 au 7/10).
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Ce jour te fera naître et périr. S’inspirant d’une prison humaniste basée en Norvège, Julien Lemonnier et Camille Sansterre ont imaginé cette histoire où quatre détenus, deux hommes et deux femmes, vont vivre la dernière année de leur détention en participant à un atelier sur Sophocle. En les confrontant aux récits tragiques d’hommes et de femmes qui, comme eux, ont trempé dans le crime et le sang, ce spectacle questionne la tragédie et la poésie comme moyens de résilience (du 18 au 22/10).
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Des caravelles et des batailles nous fait rejoindre une petite communauté vivant loin de l’agitation du monde. Peu à peu, cependant, une série d’événements vont bouleverser les attentes et les désirs de ces pacifistes venus chercher l’oubli. Inspirée par La montagne magique de Thomas Mann, cette aventure mise en scène par Eléna Doratiotto et Benoît Piret nous amène à jeter un regard neuf sur la réalité. Un merveilleux antidote à l’agitation du monde (du 8 au 13/11).
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Europe Connexion dépeint l’activité d’un lobbyiste qui met tout en œuvre pour contourner les textes de lois votés à la Commission Européenne, afin de servir les intérêts du marché de l’agriculture. Pas ceux de la société. Pas de différence pour la santé, en effet, entre un fruit bio et un fruit traité aux pesticides : c’est dit ainsi et ça passe ! Derrière chacun des succès se cache un désastre pour le monde. Nous avons remplacé « terreur et pitié » des temps anciens par « fiabilité et profit » en nous servant du pouvoir de la rhétorique pour transformer le monde. Alexandra Badea nous aide à disséquer les mécanismes impitoyables de l’économie de marché (du 9 au 26/11).
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Si j’étais moi plonge dans la peau de Sven Punti, homme d’affaires rusé, puissant et dominant, héritier d’une longue lignée des barons de la finance. S’inspirant de Maître Puntila et son valet Matti de Bertolt Brecht, Mathias Simons entraîne le personnage dans un road trip improbable et surréaliste, une nuit où l’alcool et le carnaval mènent la danse. Mais sous quels masques, quelles comédies notre « héros » est-il prêt à jouer ? Une fable hallucinée qui nous force à résister à l’idéologie dominante et à nous moquer des travers de notre époque (du 29/11 au 10/12).
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Contes nus est un conte sans fard, pour du beurre, entrecoupé de questions, de tentatives de réponses, de petits films qui témoignent du temps qui passe. C’est une histoire débridée du monde où nous barbotons. On y parle des étoiles, des orangs-outangs, des trous noirs dans l’univers et des vaches, d’un opticien, de l’illusion de la transparence et des autoroutes pour galaxies. Des contenants et des contenus, de la vitesse du monde et de nos cheveux qui poussent, sous une ombrelle plantée dans un citron. En plein surréalisme, quoi ! (du 13 au 23/12)
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Histoire de l’imposture de Nicole Mossoux et Patrick Bonté. Attention, mesdames, à vos faux cils, vos faux ongles, vos faux seins, à tout ce que vous cachez sous une belle apparence qui ne peut être que trompeuse. Attention, messieurs, à vos replis de graisse soigneusement dissimulés sous une chemise flottante, à votre perruque ou à votre dentier éclatant qui risque de sauter à la moindre anicroche, sur un sandwich récalcitrant. Tôt ou tard, vous devrez vous montrer comme vous êtes. C’est-à-dire tout nus, comme les danseurs au début du spectacle qui montre, avec drôlerie, comment l’inconscient finit toujours par déjouer les prescrits de l’ordre social (du 15 au 17/12).
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Des mêmes auteurs, A Taste of Poison montre des tableaux où le grotesque et l’étrange offrent un regard grinçant sur les jeux de rôles sociaux. Une lecture fantasmatique de notre société au rythme de plus en plus débridé, comme pour échapper à nos impasses et illusions (du 20 au 22/12). A voir et à savourer au Théâtre des Martyrs, place des Martyrs, 22 à 1000 Bruxelles. A vos agendas pour réserver sur www.theatre-martyrs.be. Michel Lequeux
BIENTÔT LE SALON D’ÉTÉ ! Après deux années de Covid (un hôte indésiré et indésirable !), Espace Art Gallery a subi de plein fouet une des pires crises de sa déjà longue existence, laissant bien derrière elle la mise sous scellés des commerces durant les attentats de Bruxelles et de Zaventem. Une fermeture dont l’ampleur n’a rien eu de pareil avec ce que nous avons vécu durant deux longues années, sans mode d’emploi quant à une éventuelle reprise des activités de plusieurs secteurs paralysés et un espoir laissé en berne. Si Jerry Delfosse a pu relancer doucement ses activités dès juin 2020, il a vu plusieurs contrats réduits à néant, suite au blocage des frontières et à la peur qui a eu pour corollaire de pousser la population à freiner ses déplacements. Résultat : l’exposition prévue en mars s’est prolongée durablement et les œuvres sont demeurées accrochées aux cimaises jusque fin juin ! Bien entendu, il ne faut pas être un grand financier pour clamer que les affaires ont été inexorablement gelées. Retrouver le tempo, voilà le challenge ! Puis, certaines priorités se sont évidemment imposées aux yeux des citoyens dès la reprise d’une partie de l’économie : reprendre une vie la plus habituelle possible, revoir les proches, se déplacer. Avec le soleil qui n’a pas quitté la Belgique (et qui a parfois fait oublier la pandémie autant que la distanciation sociale à maintenir !), beaucoup songeaient à préparer leurs vacances ou à rejoindre leur résidence secondaire. Chose qui n’a pas retenu certains amateurs d’art à venir sonner dès l’annonce du déconfinement à la porte de la galerie pour une visite en toute sécurité, avec port du masque dès l’entrée et invitation à se désinfecter les mains avec du gel hydroalcoolique. Le respect des autres passe avant tout par le respect de soi ! En ce qui concerne ce mois de juillet, Espace Art Gallery sera fermé, mais ne cessera pas ses approches en coulisses, puisque le patron profitera de ce beau mois estival pour reprendre ses contacts avec les artistes qui se sont manifestés par mail ou par courrier papier durant la période de confinement. Une peinture ou une sculpture se découvre de visu, dans un atelier, un grenier ou un salon. Pour se rendre compte à la fois de sa taille, du rendu sous les spots et non pas en impression sur la toile d’un ordinateur, qui tronque forcément les couleurs. L’opportunité de recevoir également quelques plasticiens qui feront le déplacement pour visiter les lieux et réserver un ou plusieurs espaces, parler des modalités d’exposition, de l’organisation du vernissage et de la sélection d’une photographie pour illustrer le carton d’invitation et de l’affiche. Parfois, de rassembler des données biographiques afin de préparer un dossier de presse. Surtout de mettre en route le salon d’août, qui regroupera une sélection de créations issues de séries diverses (plasticiens proches ou admirés), panneaux laissés en dépôt ou collection particulière de l’enseigne. Un événement à découvrir très prochainement. Jours et heures d’ouverture sur le site www.espaceartgallery.eu Rue de Laeken, 83 - 1000 Bruxelles Sam Mas
EXPOSITION : VOYAGES ET PAYSAGES DANS L’ŒUVRE DE DOTREMONT Christian Dotremont aurait eu cent ans cette année. Il est décédé en 1979, à l’âge de 56 ans, dans le sanatorium de Buizingen. Avec lui mourait le dernier surréaliste belge, fondateur du groupe Cobra et inventeur des « logogrammes », mêlant mots et peinture pour en faire de véritables poèmes visuels. Une exposition nous présente son œuvre, assortie de 40 photos argentiques en noir et blanc de Georges A. Bertrand, spécialiste de l’auteur, qui nous invite à suivre les traces du poète à travers l’Europe. De Bruxelles à Copenhague et jusqu’en Laponie, au fin fond de la Finlande, là où le poète a découvert les fameux logogrammes. Durant l’hiver 1956-57, Christian Dotremont reçoit en effet une bourse du gouvernement belge pour entreprendre un premier voyage dans le grand Nord. Il y retournera douze fois avant de succomber à la tuberculose, sa « catastrophe » naturelle qu’il avait contractée au début des années 50, tout comme son ami le peintre danois Asger Jorn, cofondateur de Cobra. La découverte du paysage arctique va donc l’éblouir. La blancheur de l’horizon, comme une feuille blanche, va devenir sa « papeterie de neige » : un mot fondu dans le paysage qui décantera un poème magique. Un an plus tard, en 1958, paraîtra le film d’un autre de ses amis, Pierre Alechinsky (âgé aujourd’hui de 94 ans), sur la Calligraphie japonaise, avec un commentaire écrit du poète qui marque ainsi l’influence orientale du logogramme. Cette étrange écriture poétique, créée en 1962, mêle le mot au dessin. Les logogrammes sont des poèmes peints spontanément, qui déforment les lettres de l’alphabet latin pour en faire des graphismes. Par la spontanéité du geste qui applique le trait d’encre au pinceau, Dotremont parvenait à animer l’écriture. Il la faisait voyager sur la feuille, accentuant la plasticité des signes picturaux qui s’inscrivaient dans une sorte de paysage. Poèmes tant à lire qu’à voir. Le plus souvent, le texte des logogrammes se retrouve en dessous, transcrit au crayon. Il s’agit d’une des plus grandes inventions poétiques de la seconde moitié du XXe siècle. Toujours poussé plus loin par l’appel du grand Nord, Dotremont tracera bientôt les signes dans la neige ou la glace à l’aide d’un bâton, pour en faire des « logoneiges » ou des « logoglaces » appelés à s’effacer. Il en gardera la trace avec des photos. Comme dans les calligraphies éphémères réalisées en Chine, avec un pinceau plongé dans un seau d’eau. Dans les pas du poète C’est un photographe qui s’est lancé sur les traces invisibles du poète pour accompagner son œuvre ou la faire revivre sous nos yeux. Georges A. Bertrand a refait le voyage poétique. Il nous le décrit avec une quarantaine de photos, en noir et blanc, riches de contrastes et de nuances dues à l’argentique. Tervuren où le poète est né, Bruxelles où il a écrit entre ses voyages, mais aussi Paris où il se rendait pour rencontrer les surréalistes, Dublin et Copenhague, la ville de ses amours déçus, ou encore les sanatoriums d’Eupen ou Silkeborg : autant d’endroit où notre photographe a promené ses pas et son appareil pour remonter le temps. Pour rattraper le poète nomade. Ce sont les restes d’un pavement sur lequel Dotremont a posé le pied mille fois. Ce sont des fenêtres aux lignes carcérales closes sur la maladie, des volutes et des arabesques ouvertes en contrepoint, vers le nord lointain.
Vers les logogrammes de Laponie. La poésie-voyage se concentre dans ces images en noir et blanc qui nous font sentir les hauts et les bas d’une vie poétique, l’amour impossible pour une femme qui a échappé au poète et qu’il poursuivra sans cesse sous le nom de Gloria. C’est là que Cobra est mort entre 1948 et 1951, après une courte vie fiévreuse. Là, dans la nuit arctique profonde, que les plus belles photographies ont été prises et que se peignent les plus beaux poèmes du monde. Georges A. Bertrand est écrivain et photographe, détenteur d’un doctorat en Lettres et Civilisations. Spécialiste de l’œuvre de Dotremont, il lui a consacré un ouvrage, Un Lapon en Orient, ainsi que de nombreux articles, avant de réaliser cette exposition soutenue par la Fondation Roi Baudouin, avec le concours du commissaire Stéphane Massonet. A voir jusqu’au 2 octobre à la Wittockiana, Musée des Arts du livre et de la reliure, rue du Bemel, 23 à 1150 Woluwe-St-Pierre. Entrée : 5 € ou 3 € pour seniors, étudiants et groupes. Magnifique catalogue à découvrir, et pas seulement pour y piquer les informations que je vous ai livrées après les avoir savourées. Plus d’info sur www.wittockiana.org. Rue du Bemel, 23 à 1150 Bruxelles Michel Lequeux
FESTIVAL BRUXELLONS ! Chaque été et depuis vingt-quatre ans, le « Festival Bruxellons ! » propose au Château du Karreveld une centaine de représentations d'une quinzaine de spectacles issus des dernières saisons. L’opportunité de voir ou de revoir des pièces qui ont enchanté les spectateurs wallons et/ou bruxellois. Mieux qu’une simple séance de rattrapage, il s’agit de la mise à l’honneur de toutes celles et de tous ceux qui œuvrent pour que l’art puisse exister sur les planches et, après deux années de pandémie, chacun a pu se rendre compte de la nécessité de permettre aux créateurs de s’exprimer pour panser nos plaies, nous pousser à réfléchir ou plus simplement nous aider à vivre. Bien entendu, diverses formules sont proposées pour assister aux représentations ou se focaliser sur un seul coup de cœur. Selon la formule consacrée, chaque troupe dispose de son calendrier propre. Assurément, aucun genre n’a été exclu, pourvu que la qualité soit au rendez-vous. De la sorte, se succèderont, parmi beaucoup d’autres, « Venise sous la neige » de Gilles Dyrek, « Hommage à Brel » avec la brillante interprétation des standards du grand Jacques par un Filip Jordens survolté, « La plus précieuse des marchandises » de Jean-Claude Grumberg, « Requiem pour un gigolo » de Patrick Chaboud du Magic Land Théâtre, « Le rêve d’un fou » de Nadine Monfils, « Musée haut, musée bas » de Jean-Michel Ribes, « Ça va saigner » seul en scène avec Eric Boschman, etc. De quoi prouver que la période estivale ne marque pas un frein à la culture et que les artistes restent dans la capitale pour bruxeller et ensoleiller juillet et août en les parant de leurs plus beaux atours. Le Festival Bruxellons ! se nappera de ses couleurs éclatantes du 11 juillet au 27 septembre 2022. Voyez le programme détaillé sur le site www.bruxellons.be Paul Huet
LOISIRS : HELLO SUMMER Après dix-sept ans de bons et loyaux services, Bruxelles-lesBains ne pourra pas prendre place sur les berges du canal (station Yser), car ces dernières seront en chantier durant tout l’été. Pour remplacer cet événement incontournable de la capitale, l’échevine de la Culture et du Tourisme Delphine Houba a concocté quatre longs week-ends festifs qui, chaque semaine, seront décentralisés. Au menu : projection de films, danse, activités familiales et sport … mais accompagnés de sable fin, de transats et de paillotes. Depuis quelques jours l’agenda a été fixé dans différents lieux. Baptisé « Hello summer », il a pour objectif d’apporter un air de vacances dans la métropole et d’oser du neuf. A tester pour se faire une idée et à découvrir jusqu’au 29 août 2022. Voyez le programme détaillé sur le site www.hellosummer.be Sam Mas
FÊTE NATIONALE Le 21 juillet 2022 dès 10 heures, la Fête nationale belge se célèbrera dans la capitale à travers une multitude d’activités gratuites organisées tant dans le parc royal que devant le palais de justice (place Poelaert), sans oublier l’annuel défilé militaire et le feu d’artifices qui viendra clore la journée. Si le soleil est au rendez-vous, on sait qu’il s’agit d’une des journées qui attire le plus de visiteurs chez nous et active les leviers du tourisme. Bon enfant et récréatif, le programme n’a pas d’autre objectif que de rappeler à quel point il fait bon vivre dans notre petite Belgique et à quel point la convivialité reste primordiale. Devenu une tradition depuis une décennie, le Bal populaire se déroulera la veille (le 20 juillet) dans une ambiance de zwanze et de rigolade dans les Marolles, avec la place du Jeu de Balle (ou vieux marché) transformée en piste de danse pour accueillir des artistes nationaux et un public nombreux qui feront monter des paillettes jusqu’aux étoiles et ce pour une partie de la nuit. Si on a de la chance, ce sera enfin l’occasion de voir en chair et en os les membres de la famille royale et quelques ministres venus saluer le public. Notez bien que, en dehors des lieux de loisirs et de gastronomie, toutes les enseignes (banques, grandes surfaces, administrations) seront fermées. Jour férié oblige ! André Metzinger
LA FOIRE DU MIDI EST DE RETOUR ! Tradition oblige, la Foire du Midi revient après deux ans de pandémie dans le centre de Bruxelles pour offrir aux citadins des attractions chaque fois plus impressionnantes. Une fois encore, elle prend ses quartiers le long du boulevard du Midi, entre la porte de Hal et la porte d'Anderlecht. Au programme : cent trente attractions pour les petits et les grands, à la fois traditionnelles et de la dernière génération. Il y a en aura pour tous les goûts avec la traditionnelle baraque de tir, la grande roue, la pêche aux canards, les stands de dégustation, les autos tamponneuses, le labyrinthe, le jeu des miroirs, le toboggan de la mort et, bien entendu, des nouveautés que les visiteurs découvriront avec plaisir. Parmi celles-ci, le Outbreak, manège à sensation extrême, unique en France et en Belgique. Assis dans une nacelle, les passagers tournoient dans les airs à grande vitesse. De quoi faire le plein d’adrénaline en quelques minutes. L’édition 2020 de la Grande foire du Midi se déroulera du 16 juillet au 21 août 2022. Un rendez-vous annuel qui ravive le cœur de la capitale ! Plus de détails sur le site www.foiredumidi.be Willy Smedt
BRONZER A BRUXELLES-LES-BAINS ! La Ville de Bruxelles tire un bilan très positif des éditions avant Covid de Bruxelles les Bains, lieu ensoleillé de référence pour celles et ceux qui n’estivent pas et qui gardent les pieds serrés dans la capitale ! Au fil du temps, les organisateurs ont réussi leur pari et ont transformé cet événement phare des vacances scolaires en un lieu de rencontre et d’échange incontournable. Ambiance estivale, événements culturels, sports, loisirs en tous genres, spécialités culinaires… Les enfants et leurs familles peuvent profiter d’animations créatives et qualitatives, d’une zone abritée et encadrée, de concerts et d’initiations sportives. Les collègues de bureau, viennent prendre l’apéritif les semelles dans le sable, profitent de jolies terrasses bien décorées et de mets variés, dans une ambiance décontractée. Les transats déployés pour le cinéma ou l’opéra en plein air sont pris d’assaut. Les très nombreux amateurs peuvent visionner, sur le plus grand écran extérieur de la capitale et les orteils en éventail, une sélection exceptionnelle de films mettant à l’honneur la ville de Montréal et les meilleurs opéras. Quant aux noctambules, ils contribuent également à l’énorme succès du BoatClub et de la Croisetteke, en se déhanchant sur les rythmes endiablés des meilleurs DJ’s de la capitale, sur terre ferme ou en croisière sur le Canal de Bruxelles. La seizième édition de Bruxelles-les-Bains se poursuit du 25 juillet au 25 août 2022 et ce du mardi au dimanche. Accès gratuit. Attention, certaines activités sont payantes. Quai des Péniches - Place Sainctelette à 1000 Bruxelles André Metzinger
FESTIVAL : BRUXELLES FAIT SON CINÉMA Ce sont chaque été, depuis vingt-deux ans, des projections en plein air dans des lieux parfois méconnus de différentes communes. Une occasion de redécouvrir Bruxelles dans toute sa diversité et de rappeler, à la sauce méditerranéenne, une tradition de convivialité : celle les cinémas de quartiers presque tous disparus aujourd'hui. Aussi l’idée d’associer les citadins à une belle fête du septième art fédératrice ! Également une merveilleuse occasion de redécouvrir des films projetés durant la dernière saison culturelle et de se balader dans certains coins parfois loin de chez soi. De la sorte, vous aurez l’opportunité de voir sur large écran « Adieu les cons », « En attendant Bojangles », « ADN », La fracture », « Haut et fort », « Rouge », « La mesure des choses » et, parmi plusieurs autres, « Nos plus belles années ». Evidemment, les projections sont entièrement gratuites. Faites-vous plaisir jusqu’au 15 juillet 2022 ! Le programme est disponible en ligne sur le site officiel www.bruxellesfaitsoncinema.be Paul Huet
JOËLLE PICQUET ÉTAIT À PARIS ! Sa passion pour les tissus, les broderies, les fils et la teinture l’a emmenée à Paris pour exposer en juin dernier à la Halle des Blancs Manteaux dans le cadre d’une manifestation collective, rassemblant 70 artistes et créateurs. Joëlle Picquet est une Anderlechtoise que nous avons découverte il y a peu lors du parcours Itinéart. Pour l’occasion, elle ouvrait les portes de sa maison aux visiteurs pour les inviter à découvrir son atelier et ses travaux. Des œuvres qui allient étroitement artisanat d’art et compositions colorées. Au fil de la rencontre, elle nous a expliqués de quelle manière son attirance pour l’indigo l’a progressivement conduite à créer ses propres bains et à développer une technique rare, s’emparant de différentes influences pour les mixer de manière toute personnelle et proposer un style qui intrigue, fascine et fait mouche. Daniel Bastié
MARIONETTES : GUIGNOLET AU BOIS DE LA CAMBRE Lorsque les beaux jours reviennent, Guignolet sort de sa retraite hivernale et, pour la première fois, installe son castelet dans le Bois de la Cambre, non loin du Théâtre de Poche, pour y couler une saison ensoleillée et ravir les enfants qui ne sont pas trop pressés de retourner à l’école. L’occasion de découvrir avec la Cie du Théâtre royal des Cœurs de Bois des mondes enchanteurs, où les histoires aident chacun à grandir. Tendres, poétiques et toujours positifs, les spectacles se déroulent en plein air dans un cadre verdoyant, menés depuis plusieurs décennies par des manipulateurs qui savent de quelle manière susciter l’attention des petits. Rien à voir avec le théâtre folklorique de Toone, qui se caractérise par des marionnettes à tringle et qui adopte volontiers le second degré et use d’expressions locales ! Guignolet et ses amis s’inscrivent dans l’univers de l’enfance, plus feutré et empreint de douceur, sans aucune ambiguïté, et sont animées par une main qui se glisse dans une gaine souple. Une cinquantaine de représentations se déroulent du mercredi au dimanche à 15 heures et ce jusqu’au 21 août 2022. Voilà les titres des spectacles proposés : « Guignolet et le mouton d’Anatole », « Guignolet et les fantômes », « Guignolet et les extraterrestres », « Guignolet et le diable », Guignolet et le petit Chaperon Rouge ». Jolie mise en bouche ! Pour découvrir cet événement, je vous invite à consulter toutes les informations pratiques sur le site www.guignolet.brussels Paul Huet
FESTIVAL ARENA5 Comme beaucoup de festivals, Arena5 revient cet été avec une programmation à faire pâlir les plus exigeants. Il s’agit d’une des plus brillantes scènes d'été en plein air qui sera une nouvelle fois au rendezvous estival des amateurs de musique et de culture. Avec une vue impressionnante sur l'Atomium, elle déroule son tapis rouge entre les majestueux palais des expositions pour emmener tout un chacun dans un voyage musical inoubliable afin d’aller à la rencontre de grandes pointures de la musique, avec un programme chamarré conçu pour satisfaire tout le monde, faisant se succéder du jazz, du funk, de la pop française et du rap, en passant par la musique du monde et une touche d'électro. L'Arena5 vibrera jusqu'au bout de la nuit sur les airs funky de Nile Rodgers, CHIC et Dimitri from Paris, saluera la performance de IAM, MC Solaar, Vianney, Alan Parsons Live Project et, entre autres, Gilberto Gil qui clôturera l’événement avec des sonorités brésiliennes faites pour réchauffer les oreilles. Bien que déjà entamé, ce festival se prolonge jusqu’au 24 juillet. Ne tardez pas à réserver dès maintenant. Voyez la programmation complète sur le site www.Arena5.be Place de Belgique à 1000 Bruxelles
WALDEN FESTIVAL Voilà un moment musical créé pour profiter de l’été dans une ambiance décontractée et chaleureuse, génératrice de passions et d’envies. La version 2022 fera des jardins du Musée des Sciences naturelles le point de départ de cette balade à nulle autre parei lle. Le nom Walden Festival renvoie naturellement à l’ouvrage éponyme de l’écrivain américain Henry David Thoreau. L’auteur tire parti de ses observations de la nature et de ses réflexions philosophiques pour concevoir un plaidoyer en faveur d’une société meilleure. Son ouvrage, vieux de cent cinquante ans, reste plus que jamais d’actualité et il invite tout un chacun à vivre de manière responsable. L’idée des organisateurs consiste donc à rapprocher les citoyens en leur faisant prendre conscience de l’importance de veiller à leur empreinte écologique, en la réduisant autan que possible, et en les invitant à se promener dans divers cadres verts de la capitale pour écouter de la musique. Pour des raisons facilement compréhensibles, certains concerts se dérouleront en plein air, alors que d’autres bénéficieront d’intérieurs peu ou mal connus par les habitants. Bref, un voyage exploratoire à travers toutes sortes de partitions qui mènent à la musique classique, au jazz, à la musique contemporaine et aux musiques non occidentales. Le projet opte résolument pour des formats de concerts alternatifs et l’abolition des frontières entre les différents genres. L’occasion d’aller écouter un quatuor à cordes, un solo de jazz, de la musique orientale et des paysages sonores mystérieux … Cela est proposé le samedi 16 et le dimanche 17 juillet 2022 ! Voyez tous les détails de la programmation sur le site www.waldenfestival.be
LIRE DANS LES PARCS L’opération « Lire dans les parcs » est née en 2000 et a été réalisée d’abord sur la Région de Bruxelles Capitale pour ensuite être étendue à toute la Wallonie. Il s’agit de proposer, durant l'été, le déplacement des livres d’une bibliothèque vers divers lieux publics et d’offrir, le temps des vacances, des moments de plaisir aux enfants, par la découverte de livres variés. A des dates et des lieux précis, des animateurs se rendront vers un endroit déterminé d’un parc et/ou lieu public où habituellement des enfants jouent (par exemple le bac à sable) et, munis d’une caisse ou d’un sac de livres divers, les animateurs proposeront aux en fants de lire ou d'écouter le ou les livres de leur choix. Chaque lieu est parrainé par une bibliothèque publique afin d’inviter les enfants à la fréquenter en dehors des séances d’animations dans les parcs et, par temps de pluie, les animateurs les attendront dans la bibliothèque partenaire. Naturellement, quelque chose se passera dans votre quartier. Il ne faut dans pas hésiter à emmener vos enfants à la découverte des livres, avec en prime souvent une animation réalisée par la personne déléguée par l’ins titution présente de votre commune. L’occasion de permettre aux plus jeunes d’écouter des histoires, de feuilleter des ouvrages et de les inviter à aller faire un tour plus tard dans les rayonnages du bâtiment le plus proche de leur domicile. Cela se passe du 1 er juillet au 31 août 2022. Voyez les lieux et les horaires sur le site www.biblio.brussels
TOONE : FAUST De quelle manière Toone en est-il arrivé à adapter l’opéra de Charles Gounod ? Au temps où La Monnaie, maintenant Opéra National, disposait de privilèges écrasants par rapport aux autres théâtres de Bruxelles, Tôône-Dufeys (une autre dynastie de marionnettistes) se rendait régulièrement dans ce lieu de culture lyrique pour y copier le plus fidèlement possible ces grands spectacles inaccessibles pour le peuple des Marolles et les présenter ensuite dans son théâtre. Les marionnettes traditionnelles étaient alors le seul moyen d’éducation populaire d’un public toujours prêt à s’enthousiasmer pour les plus grandes œuvres. Toone VII à son tour se pencha sur l’opéra de Gounod pour en faire une adaptation parodique. « ... Tandis que le docteur Faust boit une dernière kriek dans l’espoir d’une mort subite, un inquiétant personnage, le Deuvel, vient lui proposer des paquets de billets de mille et une belle mokske au doux nom de Marguerite en échange de son âme. On fait un tour à la foire du Midi, on passe en coulisses une nuit enchanteresse et... c’est le coup de foudre ! Avec une conséquence pour Marguerite : “Des robes qui vont devenir trop courtes par devant”. Quiconque s’aventure dans le vaste univers que représente ce sujet comprendra, à travers l’humour zwanzé, le sentiment de paix intérieure qui l’anime. On devine aisément ce que peuvent donner des mélodies telles que Salut, demeure chaste et pure ou Anges purs, anges radieux accommodées à la sauce bruxelloise... Fidèle à la tradition, Nicolas Géal pousse toutes les voix et n’hésite pas à entonner le grand air des bijoux à l’égal de notre célèbre Castafiore nationale. Un classique revisité à découvrir jusque fin août 2022 au Théâtre de Toone pour passer un joyeux moment de détente. Voyez tous les détails complémentaires sur le site www.toone.be Rue du marché-aux-Herbes, 66 (Impasse Sainte Pétronille) à 1000 Bruxelles
5E ÉDITION DU BRIFF 2022 Le Festival international du film à Bruxelles se poursuit et refermera ses portes le 2 juillet à l’UGC De Brouckère. Avec trois compétitions au palmarès et dix films qui honorent la Belgique. Un tremplin pour nos réalisations. Le 2 juillet, au Grand Eldorado place De Brouckère, sera donc décerné le palmarès des trois compétitions qui auront récompensé la scène internationale, les œuvres « made in Europe » et nos meilleures réalisations belges, dont Entre la vie et la mort de Giordano Gederlini (lire notre critique). Ce soir-là, les « bests des bests » seront dévoilés à l’issue de la projection du film de clôture, Trois mille ans à t’attendre, romance épique du réalisateur australien George Miller, auquel on doit Les Sorcières d’Eastwick et les quatre Mad Max avant le cinquième qui est annoncé. Les films des trois compétitions seront départagés par trois jurys mais aussi par le public qui fera entendre sa voix. De plus, les deux télévisions partenaires du Festival, la RTBF et Betv, achèteront les droits de diffusion d’un film de leur choix. Le prix du Jeune Jury Européen sera attribué, de son côté, à l’un des films concourant dans la compétition Directors’ Week, toujours à traduire pour les œuvres européennes. Nouveauté, cette année : le prestigieux prix Fipresci sera décerné par un panel de journalistes qui iront faire leur choix dans le cadre des trois compétitions en jeux (compétitions internationale, nationale et européenne). Il faut souligner que le Briff est le seul festival à accueillir ce prix de la presse. Marina Vlady Dernière information pour ceux qui l’auraient loupée : si vous avez raté le passage de Fanny Ardant en tant qu’invitée d’honneur du Briff à l’occasion de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne, ne manquez surtout pas la présence de Marina Vlady. L’ancienne « bombe érotique » illustrée par le cinéma italien accompagnera Chroniques d’Amore, une rétrospective sur cinq pépites entièrement restaurées du 7e Art transalpin des années 50 et 60. Signées par les plus grands réalisateurs italiens à l’instar d’Antonioni, de Ferreri ou encore de Pasolini, puis roulées dans l’amour à l’italienne, ces cinq pépites enrichissent le patrimoine le plus glamour de la péninsule. Au programme : Chronique d’un amour d’Antonioni (1950), Jours d’amour de De Santis et Savona (1954), La fille de la vitrine d’Emmer (1961), Le lit conjugal de Ferreri (1963) et Enquête sur la sexualité de Pasolini (1964). Cinq films qui nous feront revoir l’actrice française au visage botticellien, née de parents russes immigrés en France après la révolution de 1917. Marina Vlady nous rejoindra le 30 juin (en même temps d’ailleurs que Fanny Ardant) et le 1er juillet, durant cette cinquième édition du Briff. Lieux du Festival : Cinéma Galeries, Palace, UGC De Brouckère, Bozar et Mont des Arts pour les séances gratuites en plein air. Du 23 juin au 2 juillet. Réservations sur www.briff.be pour le grand Pass donnant l’accès au Festival entier (60 €), pour le petit Pass sans l’ouverture ni la clôture (45 €) ou pour les tickets de séance (9 €). Bons baisers sur grand écran ! Michel Lequeux
DÉCÈS DE JEAN-LOUIS TRINTIGNANT Il s’est éteint à l’âge de 91 ans à Collias, dans le Gard, entouré de ses proches. Sa voix un peu traînante, désenchantée et sarcastique, s’est tue sur une carrière de 160 rôles partagés entre le théâtre et le cinéma. Jean-Louis Trintignant était un acteur discret, qui jouait dans la réserve. Il disait que le public ne l’aimait pas. On se souvient de Dieu créa la femme qui l’avait fait découvrir en 1956 au côté de Brigitte Bardot. Il jouait le rôle du jeune époux fou amoureux de Juliette, une fille à la beauté sauvage et diabolique. Une marie-couche-toi-là d’un soir, qui mettait les cœurs en feu. La liaison de Trintignant avec l’actrice avait fait couler beaucoup d’encre dans la presse populaire, avant de faire exploser les deux couples, celui de Bardot et le sien avec l’actrice Stéphane Audran, sa première épouse. Il en aura trois. Dix ans plus tard, Claude Lelouch en fait une star internationale avec Un homme et une femme qui remporte la Palme d’or au Festival de Cannes en 1966 et l’Oscar du meilleur film étranger et du meilleur scénario original aux Etats-Unis en 1967. Au point que le correspondant du Times, Charles Brenner, ébloui, quitta son emploi pour venir s’installer en France, le pays de l’acteur. Trintignant, sympathisant de gauche, joue aussi dans des films politiquement engagés contre le fascisme et la dictature : Le Combat dans l’île d’Alain Cavalier en 1962 ou Z de CostaGavras avec Yves Montand, rôle pour lequel il recevra le prix du Jury et celui de l’interprétation masculine à Cannes en 1969. On le revoit en juge inquiétant, derrière ses lunettes noires, en train d’enquêter sur un assassinat politique mené par les membres d’une organisation d’extrême droite en Grèce. Juge intègre qui ira au bout de ses convictions, même s’il doit se mettre tout le gouvernement à dos. Il est ensuite la vedette d’un western-spaghetti : Le Grand Silence où une extinction de voix passagère en fait un justicier muet qui, sous les neiges de l’Utah, poursuit une bande de tueurs au service de Klaus Kinski. Trintignant avait imposé à Corbucci sa fin à lui, qui lui vaudra un hommage rendu à la Cinémathèque française en 2012. Ce n’était pas le film dont il voulait se souvenir. Pourtant, ce rôle muet lui convenait bien, lui qui préférait le silence à la voix. Un silence qui lui permettait de peser ses mots, avec une pointe sarcastique. Ou avec un détachement qu’il devait à l’éducation protestante qu’il avait reçue dans le Sud, près d’Orange où il était né en 1930. « Je n’ai jamais été optimiste » L’enfance lui a laissé d’amers souvenirs, entre un père résistant, parti dans le maquis sous l’Occupation, et une mère comédienne qui fut tondue après la guerre pour avoir eu une liaison avec un soldat allemand. Ces événements marqueront durablement l’acteur qui avouera être né malheureux, avec des pensées suicidaires qui le rongeaient. Ce qui le marquera aussi, c’est la mort des deux filles qu’il eut avec Nadine Marquand, devenue la réalisatrice Nadine Trintignant : Pauline, décédée à 9 mois des suites d’un étouffement dans le berceau, alors que Trintignant tournait Le Conformiste (1970), et Marie, devenue actrice et morte sous les coups de son compagnon Bertrand Cantat, chanteur du groupe Noir Désir. La mort de ses deux filles affectera
profondément l’acteur, surtout celle de Marie Trintignant, sa partenaire privilégiée dans les pièces de théâtre où elle lui donnait la réplique. Elle a été assassinée en 2003, alors qu’elle tournait le téléfilm de sa mère, Colette, une femme libre. Trop libre au goût de Cantat, dévoré par une jalousie maladive. Jean-Louis Trintignant ne s’en est jamais remis, sinon en s’adonnant à la poésie, sa passion de jeunesse qu’il cultivait en récitant les poèmes de Desnos, Prévert, Vian et Apollinaire. Il cultivait aussi les oliviers et le vin Rouge Garance dans une propriété des côtes du Rhône qu’il partageait avec un couple d’amis. Garance en hommage à Arletty qu’il avait adorée dans Les enfants du paradis (1945). Amour Un dernier film l’a fait revenir sur le grand écran : Amour de Michael Haneke, drame intimiste et universel sur la maladie, la vieillesse et la mort, récompensé par la Palme d’or du 65 e Festival de Cannes en 2012. César aussi du meilleur film et Oscar du meilleur film étranger en 2013. Il y incarne un octogénaire qui assiste, impuissant, à l’agonie de sa femme, victime de deux AVC. Il fera encore par la suite de timides apparitions à l’écran, notamment dans Les plus belles années d’une vie de Claude Lelouch, suite d’Un homme et une femme, où le personnage perd progressivement la mémoire (2019). Jean-Louis Trintignant est parti « paisiblement, de vieillesse », a déclaré Marianne Hoepfner qu’il avait rencontrée sur les circuits de course automobile − son autre passion −, et qu’il avait épousée en 2000. En voyant ses petits-enfants, l’acteur disait récemment encore, atteint d’un cancer : « On n’a pas tout raté. Oui, ça vaut la peine de vivre ! » Michel Lequeux
EXPOSITION : BALADE REPTILIENNE A l'occasion de ses vingt ans, le Musée d'Art Fantastique propose l'exposition collective Balade Reptilienne. De nombreux artistes ont réinterprété des crocodiles en résine mis à leur disposition. Du Crokot'Frit au Croco-timbré, venez découvrir ces drôles de créatures et visiter cette série atypique et unique à Bruxelles. Un voyage au sein d'un univers atypique et féériques au pays des reptiles. Un évènement bien sûr pour tous ceux qui ne partent pas en vacances, qui sont dans l’attente de leur avion ou qui sont déjà revenus. Rien d’un tel qu’un crocodile pour se mettre en appétit. Attention particulière pour les Odile, car on le sait ces bestioles croquent Odile (pour le jeu de mots potache) ! Une exposition à découvrir jusqu’au 28 août 2022. Plus de détails sur le site www.fantastic-museum.be Rue Américaine, 7 à 1070 Bruxelles
BELK'DO Le Belk'do, voilà un endroit où j'aime me rendre de temps en temps. "Bel" pour Belgique, "K" pour Kriss (prénom de la patronne) et "do" pour cadeau. Au Belk'do, on ne vend que des spécialités belges ! Du belge artisanal émanant de petits producteurs issus de toute la Belgique ! Par exemple, si vous voulez y boire une bière, vous ne trouverez pas de Maes, de Jupiler ou de Leffe, mais uniquement des bières artisanales ! Je vous conseille, par exemple, la bière de Gembloux, un vrai délice ! C'est le 2 juin 2017 que Kriss Rassart, la patronne, poussée par une irrésistible envie de faire du commerce et avide de contacts sociaux, sans oublier, il faut bien le dire, la gourmandise (elle apprécie les bonnes choses), s'est lancée dans cette belle et passionnante aventure. Il serait fastidieux de reprendre ici tous les produits que l'on trouve au Belk'do. Aussi, me contenteraije (un peu à regret) de ne vous en présenter que quelques-uns comme les gayettes du Pays Noir (un petit nuage au café enrobé d'une croûte au chocolat), les biscuits feuilletés au Herve piquant en petits sachets (idéals pour accompagner l'apéro), les produits d'épicerie (confis fruits, de chicons, de figues), les cuberdons, des confitures originales (de bières, rhubarbe/spéculoos...), la bière de Gembloux (déjà évoquée), la vodka de Sorinnes et celle de Deinze, le whisky de Liège, les jus de fruits aux combinaisons diverses (pomme/orange, pomme/ananas, pomme/gingembre, pomme/rhubarbe...) L'article le plus vendu ? Le produit phare ?... Les limonades Ritchie fabriquées à Leuven ! De nombreux arômes : orange, citron/framboise, citron/gingembre, cola zéro... Jadis, Ritchie était une brasserie (bière, limonades). Une fois les propriétaires décédés, les enfants n'ont pas désiré prendre la succession. Mais plus tard, le petit-fils a repris l'affaire de ses grands-parents d'où le côté vintage. Toutes les limonades sont réalisées avec des produits purs (peu sucrées et au sucre de canne). Très intéressants aussi, ce sont les pochettes mignonnes et les paniers cadeaux réalisés à la demande par Kriss Rassart. Des paniers cadeaux pour célébrer des événements divers comme un anniversaire, un mariage, une fin d'année scolaire, une promotion ou une pension dans une entreprise, etc. Les prix varient suivant le volume ou "l'importance" du panier cadeau. Et puis, il y a ces phrases que l'on découvre sur les vitrines et les murs de l'établissement. Elles apportent un indéniable supplément de convivialité à l'endroit : "Sois belge et régaletoi" (un clin d'oeil à l'ancien bourgmestre, Joël Riguelle, qui fit partie de la troupe des humoristes de "Sois belge et tais-toi !", célèbre spectacle d'humour satirique belge s'amusant à rire de l'actualité), "Du bon, beau, belge !", "Je préfère le vin d'ici à l'au-delà !", "Chez nous, on traite les amis comme la famille et la famille comme des amis !" (Tout est dit). Renseignements : email : kris@belkdo.be - Tél. : 02/427 82 92 - Site : www.Belk'do.be Rue de l'Eglise, 17 à 1082 Berchem Sainte-Agathe Alain Magerotte
EXPOSITION : LE GRAND FOUTOIR Née à Bruxelles, Lisette Delooz a réalisé ses études à L’Abbaye de La Cambre, avant de travailler comme graphiste et de créer des logos, des dessins animaliers, ainsi qu’une soixantaine de timbres pour la Poste marocaine ayant pour sujets la faune et la flore. Puis, elle en est progressivement arrivée au portrait humain tout en se lançant dans le monde de l’exposition avec des dessins personnels. Un pas dans le fantastique et l’érotisme ne l’a jamais rebuté, puisque dans son esprit les étiquettes ne comptent pas. Pour les présentes vacances d’été, elle propose au Centre d’Art Fantastique un melting-pot de ses œuvres, alliant des travaux anciens à une série de peintures récentes. L’occasion de brasser plusieurs décennies et de revivre en raccourci le meilleur du best-of. Une expose à découvrir du 9 juillet au 28 août 2022. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.fantastic-museum.be Rue de la glacière, 18 à 1070 Bruxelles
EXPOSITION : KATHLEEN, UNE HÉROÏNE BRUXELLOIS Kathleen, la jeune femme moderne et indépendante, créée par le duo Baudouin Deville (dessin) et Patrick Weber (scénario), ancre résolument ses aventures dans l’Histoire de la Belgique, à des périodes aussi différentes que celles de l’exposition universelle (Sourire 58), la décolonisation du Congo (Léopoldville 60), l’occupation allemande (Bruxelles 43) et l’incendie du grand magasin A l’Innovation (Innovation 67). Enquête policière, rigueur historique, reconstitution des décors, et graphisme dans le sillage du trio Hergé-Jacobs-Martin font de ces quatre albums un ravissement pour l’œil et pour l’esprit. La Galerie Champaka en présentera les meilleures planches, ainsi que des illustrations et des crayonnés. Un grand rendez-vous estival avec l’Histoire belge et bruxelloise, façon ligne claire de qualité, à voir jusqu’au 16 juillet 2022. Plus de détails sur le site www.galeriechampaka.com Rue Ernest Allard, 27 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : OMAR BA L’œuvre d’Omar Ba (1977, Sénégal) est caractérisée par sa nature énigmatique et sa grande intensité poétique. A rebours d’une narration didactique, il cherche à l’inverse à exprimer son subconscient et son interprétation symbolique du réel. L’artiste traite de thèmes comme le chaos, la destruction et la dictature, drapant son discours politique d’un voile de poésie grâce à un langage pictural qui lui est entièrement propre, à la fois féroce et délicat. Omar Ba vit et travaille entre Dakar, Genève, Bruxelles, Paris et New-York. Partagé entre plusieurs continents, il développe une réflexion issue d’une hybridation permanente, loin des stéréotypes liés à ses racines africaines. Cette hybridation se retrouve également dans ses toiles où se côtoient touches organiques et couleurs flamboyantes, mixant les formes, les techniques et les textures (acrylique, gouache, crayon et même typex). Ba peint sur fond noir (sur carton ondulé ou sur toile), demandant ainsi au spectateur de s’adapter littéralement et métaphoriquement à l’obscurité. C’est une quinzaine de toiles de grand format, réalisées spécialement pour l’exposition, qui seront présentées au public aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Son iconographie, à la fois engagée politiquement et socialement, mais aussi empreinte de mythologie personnelle, soulève des questions historiques et intemporelles, tout en rayonnant un message artistique résolument contemporain, que l’on peut retrouver tant chez des artistes proches du surréalisme que du symbolisme. Omar Ba dénonce de son pinceau le chaos du monde. Un travail à découvrir jusqu’au 7 août 2022. Plus de détails sur le site www.fine-arts-museum.be Rue de la Régence, 3 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : CHARLOTTE PERRIAND Cette artiste a consacré son existence à améliorer les conditions de vie du plus grand nombre, créant un « art d’habiter » en lien avec la nature. Elle a utilisé la photographie comme outil d’observation du réel, mais aussi pour défendre sa conception d’un monde nouveau. En résonance avec nos préoccupations actuelles, elle utilise au cours des années 1930, le photomontage géant pour dénoncer l’urbanisme insalubre et donner sa vision de conditions de vie meilleures. Ses fresques photographiques témoignent de la modernité de son approche, que ce soit La Grande Misère de Paris (1936), la salle d’attente du ministre de l’Agriculture (1937), ou le pavillon du ministère de l’Agriculture à l’Exposition internationale des arts et techniques de la vie moderne qui a lieu à Paris en 1937, composé avec Fernand Léger. L’exposition propose une plongée dans sa conception du monde à travers sa méthode de travail et son incroyable collection de photographies – tirages d’époque, négatifs, magazines découpés, photographies personnelles –, archives mises en regard de la reconstitution de ses photomontages monumentaux. Une exposition à découvrir jusqu’au 28 août 2022 au Design Museum. Voyez les détails complets sur le site www.designmuseum.brussels Place de Belgique à 1020 Bruxelles
EXPOSITION : TOOTS 100 – THE SOUND OF A BELGIAN LEGEND Bruxellois marollien né d’une mère anversoise et d’un père bruxellois, à trois ans déjà, Toots Thielemans frôla les touches du piano à bretelles dans le caberdouche que tenaient ses parents rue Haute. Atteint d’un début de pneumonie, le médecin dira à ses géniteurs : « Plutôt que de jouer de l’accordéon, qu’il s’adonne à l’harmonica ». Au départ, il fut guitariste et siffleur. Il apprit la guitare chez un professeur espagnol. Il était un élève studieux. Ayant terminé avec fruit ses humanités, il accomplit une année de mathématiques à l’ULB ; mais la guerre interrompit sa formation. Longtemps après, il sera reçu docteur honoris causa de l’Université Libre de Bruxelles. Très sympathique, plein d’humour et de gouaille, il n’eut jamais la grosse tête. Littéralement fou de jazz, il décida au début des années 50 de quitter la Belgique (auquel il restera toujours attaché) pour les Etats-Unis où, longtemps, il vécut à « Big Apple ». A qui veut l’entendre, il répéta : « Je suis Belgo-Américain. » Toots Thielemans parlait français, flamand, anglais et se débrouillait en suédois. Il eut un énorme succès en ce pays qu’il aimait. A New York, il fut admis au prestigieux Carnegie Hall. Une consécration ! Découvert par Benny Goodman, il démarra une carrière internationale et fut le seul Blanc accepté dans les tournées alors dites noires, années terribles où les gens de couleur connaissaient la chape de la ségrégation raciale. Le petit Toots allait faire les courses, quand les orchestres voyageaient dans les états racistes. Ray Charles, avec qui il collaborera, fut victime comme tant d’autres de ce rejet violent autant qu’injustifiable. En chemin vers le succès, il composera « Bluesette », succès international, qui assoira sa renommée. Il se consacrera alors, quasi entièrement, à l’harmonica lui donnant ses lettres de noblesse ; abandonnant la guitare qui était son médium jusqu’alors. Instrument qui obtiendra enfin son et que nombre d’artistes de variétés utilisèrent également (Bob Dylan, Bryan Ferry, les Stones, Hugues Aufray). Toots Thielemans accompagnera les stars : Dizzy Gillespie, Louis Armstrong, l’immense Charlie Parker, Ella Fitzgerald, Ray Charles, le divin Miles Davis, Frank Sinatra, Paul Simon et Philippe Catherine. Une chanson fut enregistrée avec son ami Adamo. Rappelons qu’il participa à l’enregistrement de musiques de film : « Macadam Cow-Boy », « Le guignolo », « The Surgarland Express » « Turk Fruits », « L’état de grâce », « Jean de Florette » comme soliste et à un merveilleux dessin animé suédois « Dunder Klumpen », en tant que compositeur. Toots stoppa sa carrière à 92 ans et il fut nommé baron par le Roi Albert II. Précis et doté d’une oreille très fine, son réel charisme fit merveille. Un « espace » lui fut dédié à Saint-Josse, un autre à La Hulpe. Ses notes bleues s’envolent aux cieux étoilés : « Star Dust Memories » dirait Woody Allen clarinettiste de jazz. On the road again, Toots ! Aujourd’hui une exposition lui rend un vibrant hommage du 22 avril au 30 août 2022 au Palais de Charles de Lorraine. Voyez toutes les informations concrètes sur le site www.kbr.be Monts des Arts, 28 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : MAGICAL THEATRES La Porte de Hal vous ouvre les portes d’un univers rempli d’histoires, des pièces de Shakespeare aux contes des frères Grimm. Vous pourrez découvrir le charme de ces petites œuvres d’art apparues il y a deux siècles, reflétant la grandeur des scènes théâtrales de Londres, Paris ou Vienne. Au cœur de l’exposition, le chat botté en version animée guidera petits et grands. Il vous emmènera dans les salons bourgeois de l’époque pour vous conter l’histoire et le contexte de ce patrimoine exceptionnel. Venez découvrir la diversité et la sophistication des décors d’autrefois mais aussi les versions d’artistes actuels. L'exposition se déroulera au troisième étage du bâtiment féérique du Musée de la Porte de Hal. Ce vestige de la seconde enceinte de Bruxelles dévoile dans une présentation permanente l’époque où la ville était fortifiée et propose un panorama impressionnant depuis son chemin de ronde. Les expositions temporaires qui y sont présentées annuellement mettent l'accent sur divers aspects de la vie quotidienne d’hier et d’aujourd’hui, en puisant régulièrement dans les collections d'Ethnologie européenne des Musées royaux d'Art et d'Histoire. Le théâtre en papier, théâtre miniature ou théâtre de table, était, autrefois, une source de plaisir pour petits et grands. Il est, aujourd’hui, un peu tombé dans l’oubli. L’exposition « Magical Theatres » va vous faire revivre ce monde magique du théâtre jouet, ses merveilleux décors colorés et ses petits acteurs de papier. Un événement qui écarte le châssis du rêve pour le concrétiser jusqu’au 4 décembre 2022 et qui est à découvrir à la Porte de Hal. Plus de détails sur le site www.brusselsmuseums.be Boulevard du Midi, 150 à 1060 Bruxelles
CAMPAGNE DE SENSIBILISATION ET DE VISIBILITÉ DES PERSONNES LGBTQ+ ISSUES DE CULTURES ÉTRANGÈRES "Expressions Mixtes" est un film documentaire qui permet aux personnes LGBTQ+ (principalement d'origines étrangères et habitant la Belgique) de témoigner de leur vécu et de leur parcours de vie face caméra, qu’elles soient hommes, femmes, transgenres, intersexes, non-binaires, etc. Ce long métrage aborde la richesse de la diversité de leur quotidien, avec les ségrégations qui y sont liées, et traite des discriminations qui concernent leur ethnie, leur orientation sexuelle et affective, leur milieu social, leur vie professionnelle, leur identité de genre et, entre autres, leur confession religieuse. Ce projet permet aux personnes issues de plusieurs cadres socioculturels de pouvoir s'exprimer en toute liberté, d’exposer leurs questionnements et leurs doutes, ainsi que leurs difficultés et leurs aspirations. Libérer leur parole permet avant tout de les libérer eux-mêmes mais, surtout, d’inspirer d'autres personnes dans la même situation. Ce faisant, ils contribuent enfin à sensibiliser autrui sur leur situation personnelle pour combattre l'homophobie qui existe autant à l'extérieur qu'à l'intérieur de leurs propres communautés. "Expressions Mixtes" se veut un espace de parole pour celles et ceux qui se sont accomplis suite à différentes formes de rejet et qui travaillent, encore aujourd’hui, à la défense de causes humanistes et ce de manière militante, artistique ou professionnelle. Le site www.expres-sionsmixtes.com permet d’accéder à différentes associations pour du soutien moral, psychologique et/ou tout autre domaine. Le site permet également de visionner gratuitement le documentaire « Expressions mixtes » produit par Artfusion, réalisé et monté par Raphaël Kalengayi et Federico Ariu. Sam Mas
EXPOSITION : DE DIEPPE À JUNO Cette exposition présente l’empreinte profonde du Raid de Dieppe dans la mémoire collective canadienne de la Seconde Guerre mondiale. Il s’agit d’une exposition sur le traumatisme, mais aussi la guérison et les nombreuses conséquences de cette opération militaire en août 1942. L’histoire de ce raid considéré comme un échec tragique est aussi complexe que nuancée. L’événement a fait l’objet d’études approfondies au cours des décennies par des historiens et continue d’être débattu parmi les chercheurs et les amateurs d’histoire. Pour les visiteurs qui découvrent le sujet pour la première fois, « De Dieppe à Juno » se veut une présentation accessible et factuelle de la planification du raid luimême et de ses conséquences. Pour ceux qui connaissent mieux l’histoire de Dieppe, l’exposition aborde également des facettes peu explorées. Ce n’est qu’au cours des dernières années que les événements de « Juno Beach » en Normandie 44 dans le cadre du Débarquement a rattrapé Dieppe dans la mémoire canadienne. Cette exposition tente donc d’expliquer comment et pourquoi des conclusions ont souvent été tirées à la hâte au fil des ans, notamment l’idée que la catastrophe a permis de sauver des vies le Jour J, et explore de quelle manière le mythe liant l’horreur de Dieppe au succès des Canadiens le Jour J a évolué au fil du temps. L’héritage laissé par le Raid de Dieppe s’étend au-delà des frontières nationales et temporelles. En revenant sur ce fait d’armes, le Centre Juno Beach et le War Heritage Institute explorent les impacts à travers le vécu de témoins de tous horizons. L’exposition est composée de cinq zones dans lesquelles se déploient cinq thématiques construites en suivant deux axes : l’un ascendant, l’autre descendant. Lorsqu’il pénètre dans la salle d’exposition temporaire, le visiteur est naturellement guidé par un jeu de panneaux vers la zone 1 (le contexte en 1942). De là, il aperçoit la zone 2 (le raid) et le mur du fond de la salle où se trouvent une carte à grande échelle ainsi qu’une chronologie qui résument et expliquent les événements de cette tragique journée du 19 août 1942. Le visiteur chemine ainsi jusqu’à ce point à travers les différentes étapes qui ont conduit à l’opération (contexte, les raids, préparation, etc.) Arrivé en zone 2, où le raid est expliqué en détail, la visite se continue en sens inverse. Commence alors symboliquement le lent et long retour vers la liberté, la guérison et pour finir avec la mémoire et la commémoration. Ainsi, le visiteur prend un parcours parallèle au premier en passant par la propagande (zone 3), la captivité (zone 4) pour terminer par la zone 5, qui évoque le Jour J sur Juno, la libération de Dieppe en septembre 1944 et la mise en place du travail sur la mémoire du Raid. Au sein de ce parcours chaque différent type d’information se voit attribuer un support particulier. Les textes historiques sont placés sur des modules qui définissent le cheminement général et les zones. A l’intérieur même de chaque zone, les biographies viennent en appui sur des mobiliers situés sur un plan différent, afin de mettre en avant l’aspect humain. De même, des citations fortes, les voix de ceux qui ont participé de manière directe ou indirecte ainsi que celles des historiens viennent se placer sur de grands kakémonos qui rythment chaque étape et créent un appel d’un espace à l’autre. Enfin, les cartes et autres données statistiques font l’objet d’un mobilier propre. Ainsi, trois cheminements complémentaires permettent de tisser des contenus informatifs et descriptifs, des synthèses visuelles et des temps d’appel à l’émotion. Cette exposition est à découvrir au War Heritage Institute. Plus d’informations sur le site www.warheritage.be Parc du Cinquantenaire 3 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : SOL LEWITT Né à Hartford (Connecticut) dans une famille d’immigrants juifs venus de Russie, Solomon (Sol) LeWitt est l’un des pionniers de l’art conceptuel et minimal, réputé notamment pour ses Wall Drawings (dessins muraux). Bien qu’il ne soit pas religieux, menant une vie sécularisée, il entretient tout au long de sa vie des liens discrets mais tenaces avec son héritage juif. Dans les années 1990, il s’engage plus activement au sein de sa communauté à Chester (Connecticut) jusqu’à en concevoir la nouvelle synagogue de la Congrégation réformée Beth Shalom Rodfe Zedek qui sera inaugurée en 2001. Pour Sol LeWitt, la conception d’une synagogue relevait d’un problème de formes géométriques dans un espace qui se conforme aux usages du rituel. À l’appui d’archives, de dessins, de photographies et de témoignages, l’exposition explore la genèse de ce projet majeur, resté jusqu’à aujourd’hui peu connu du grand public. L’exposition aborde également un autre aspect oublié de la carrière de Sol LeWitt : les relations étroites que l’artiste a développées tout au long de sa carrière avec des collectionneurs, des galeristes et des artistes basés en Belgique. Seront présentés, entre autres, le Wall Drawing #138, réalisé pour la première fois à Bruxelles dans la galerie MTL – qui joua un rôle pionnier dans l’introduction de l’art conceptuel en Belgique -, mais également la collaboration de Sol LeWitt avec l’architecte Charles Vandenhove pour l’aménagement du Centre Hospitalier Universitaire de Liège. Toutes les œuvres montrées dans l’exposition sont issues de collections publiques et privées belges, ainsi que de la Collection LeWitt. Quant à la réalisation des Wall Drawings, directement sur les murs du Musée Juif de Belgique, elle est l’occasion d’une expérience participative exceptionnelle, rassemblant aux côtés de dessinateurs professionnels de l’atelier LeWitt de jeunes artistes et étudiants en art plastique basés à Bruxelles. Pour chaque dessin mural, des équipes sont constituées autour d’un assistant professionnel qui accompagne et guide les apprentis. Cette initiative pédagogique est une opportunité unique pour ces derniers d’être associés au processus de création d’un des plus grands artistes américains. Un événement à découvrir au Musée juif de Belgique jusqu’au 31 juillet 2022. Plus de détails sur le site www.mjb-jmb.org Rue des Minimes, 21 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : T-REX Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Tyrannosaurus rex.Au-delà des images, des films et des mythes, cette expo vous invite à une vraie rencontre avec cet animal fascinant, probablement le plus célèbre des dinosaures. Dès l’entrée, vivez un face à face spectaculaire avec une femelle T. rex de 67 millions d’années. Elle s’appelle Trix et vous accueille en position d’attaque. Son squelette, un moulage 3D de haute qualité scientifique, est juste époustouflant. Ensuite, apprenez à la connaître. Le parcours de l’expo vous propose six premiers interactifs pour comprendre le travail des paléontologues et découvrir l’époque à laquelle Trix a vécu, son âge lors de sa mort, son alimentation, l’origine de ses blessures et bien plus encore. Autant de questions auxquelles les scientifiques ont répondu en examinant ses os fossilisés et les roches dans lesquelles ils l’ont trouvée. Six autres interactifs vous permettent d’en apprendre plus sur la paléobiologie du T. rex en général : naissance, alimentation, déplacements… Relèverez-vous les défis que vous proposent ces interactifs ? Il faudra notamment sauter en selle pour défier le T. rex à la course, faire appel à son imagination pour colorer sa peau, tenter de séduire Trix par une danse, participer à un quizz hilarant… Une expo à vivre avec 12 interactifs-jeux qui jalonnent votre parcours : jeu électro, microscope, vidéos, quizz, touche-à-tout et défis. Particulièrement destinée aux enfants dès 5 ans, elle fera le bonheur de tous les mordus de dinos ! A voir en famille jusqu’au 7 août 2022 au Musée des Sciences naturelles. Voyez toutes les informations précises sur www.naturalsciences.be Rue Vautier, 29 à 1050 Bruxelles
EXPOSITION : CHRISTIAN DOTREMONT À l’occasion du centenaire de la naissance du poète et peintre belge Christian Dotremont, les Musées royaux des Beaux-Arts et les Archives & Musée de la Littérature lui consacrent une exposition exceptionnelle. Plus de 120 œuvres sur papier mettent en lumière sa saisissante création graphique, oscillant entre écriture et peinture. Artiste majeur de la seconde moitié du XXe siècle, cofondateur du mouvement CoBrA, le belge Christian Dotremont (1922-1979) fut l’un des premiers à élever l’écriture au rang d’art plastique. Novateur, il invente les « logogrammes », véritables poèmes graphiques, tracés au pinceau avec une fabuleuse spontanéité. Les mots qu’il couche impulsivement sur papier s’allongent, se distordent jusqu’à créer une composition d’une grande expressivité. Écriture et peinture fusionnent et se voient ainsi sans cesse réinventées. L’exposition met en lumière cette grande variété de logogrammes réalisés par Dotremont à travers plus de 120 œuvres sur papier, photographies, films et certaines pièces d'archives présentées pour la toute première fois au public. Glissez-vous dans la valise de l’artiste pour découvrir son cheminement créatif vagabond. Outre les logogrammes, le parcours présente une sélection de « dessins-mots » et d’autres œuvres à quatre mains réalisées avec Pierre Alechinsky, Asger Jorn, Serge Vandercam, Hugo Claus, etc. D’autres plasticiens de l’écriture comme Henri Michaux, René Guiette, Jean Raine, Jules Lismonde, Jacques Calonne dialoguent avec le travail de Dotremont. Un événement à découvrir jusqu’au 7 août 2022 aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Plus de détails sur le site www.fine-arts-museum.be Rue de la régence, 3 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : MARAT ASSASSINÉ Les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique possèdent depuis 1893 le chefd’œuvre de Jacques Louis David « Marat assassiné » (1793). Afin de témoigner de la position centrale qu’occupe cette toile dans l’avènement de l’art moderne, nous proposons une exposition dédiée à cette pièce maîtresse de nos collections. Pour la première fois, les Musées royaux offrent une approche sans précédent de l’œuvre de David en combinant à la fois les regards historiques et contemporains, mais également une démarche scientifique par la présentation au public des résultats d’une campagne de recherche qui a mobilisé des examens de laboratoire. L’exposition est ainsi structurée en trois volets qui permettent au public d’appréhender l’œuvre de David de façon inédite. Le premier volet, scientifique, présente au public les résultats de l’étude matérielle et technique intitulée « Face to Face » et conduite sur le « Marat Assassiné », qui ont révélé pour la première fois, notamment, le dessin sousjacent du chef d’œuvre. Ces recherches, menées par le Centre européen d’Archéométrie de l’Université de Liège, sont basées sur l’utilisation de techniques d’imageries scientifiques et d’analyses physico-chimiques non-invasives réalisées in situ. Dans un second volet, historique quant à lui, seront présentées les répliques d’atelier conservées à Reims, Dijon et Versailles, ainsi qu’une oeuvre issue d'une collection privée (Paris). Ce volet sera complété, dans une troisième approche, par les interprétations contemporaines d’artistes comme Picasso, Ai Weiwei, Gavin Turk, Jean-Luc Moerman, Jan Van Imschoot ou encore une œuvre de Rachel Labastie qui pose quant à elle un regard féminin déplaçant l’attention de Marat vers Charlotte Corday, protagoniste absente de la représentation de David. Voyez toutes les informations concrètes sur le site www.fine-arts-museum.be Rue de la régence, 3 à 1000 Bruxelles
EXPOSITION : FOOD AND THE CITY Cette exposition esquisse une image de l'évolution historique de l'approvisionnement alimentaire et jette un regard sur les défis actuels auxquels les villes font face pour se nourrir. Chaque jour, plus de 7,5 milliards de personnes sur la planète ont besoin de se nourrir. Cette population vit depuis 2006 majoritairement en zone urbaine. Parallèlement, le nombre de producteurs ne cesse de diminuer. Evere est un exemple d'une localité qui vivait autrefois d’une forte activité agricole et qui s'est récemment urbanisée. Mais comment allonsnous nourrir les villes grandissantes si de moins en moins de personnes produisent de la nourriture ? ‘Food and the City’ esquisse une image de l'évolution historique de l'approvisionnement alimentaire et jette un regard sur les défis actuels auxquels les villes font face pour se nourrir. Un événement à découvrir au Musée bruxellois du Moulin et de l’alimentation jusqu’au 31 août 2022. Plus de détails sur le site www.moulindevere.be Rue du Tilleul, 189 à 1140 Bruxelles
EXPOSITION : KASPER BOSMANS Kasper Bosmans est un conteur. Fasciné par les histoires, il en dénoue les fils et les tisse différemment, de manière ludique, afin de créer de nouvelles histoires. Agissant toujours à partir d'exemples concrets, qu'il s'agisse d'une anecdote, d'une recette artisanale ou d'un fait divers, Bosmans utilise les traditions locales et vernaculaires pour développer un discours globalisant. Ses œuvres vernaculaires prennent des formes éparses pour développer un discours globalisant. Ainsi, chez lui, on se trouve confronté à des peintures murales géantes ou à des panneaux de petite structure qui ressemblent à des boucliers ou à des illustrations pour livres. Evitant le didactique, il s’emploie à se contenter de traces ou indices qui permettent d’entrer dans son travail, en suggérant et sans jamais contraindre. A une époque croissante de polarisation croissante, il mélange des références appartenant à différentes époques et cultures et pour en dégager les similitudes. Pour aller encore plus loin dans sa démarche, il ose des titres suggestifs, sa faisant parfois allusions. Son travail est à découvrir au Wiels jusqu’au 31 juillet 2022. Plus de détails sur www.wiels.org Avenue Van Volxem, 354 à 1190 Bruxelles
EXPOSITION : THIS IS WHAT YOU CAME FOR Cette exposition a été conçue sous la forme d’un tutoiement et est née d’actions et de créations quasiment rituelles avec un mélange de sculpture, d’installation et de vidéo. Els Dietvorst est une plasticienne de chez nous, lauréate du BelgianArtPrize 2021, née à Kapellen en 1964. Depuis douze ans, elle vit et travaille dans le sud-est de l’Irlande. Son travail s’axe entièrement sur une série de questionnements tels le racisme, la migration des individus et le changement climatique. Des sujets forts et récurrents dans son élaboration. L’idée de la présente manifestation est née durant la crise du Covid pour rapprocher les citoyens et interpeller les spectateurs. « This is what you came for » (qui se traduit plus ou moins par C’est ce pour quoi vous êtes venus) a été l’occasion de rassembler des travaux qui proposent une plongée en apnée dans l’univers de cette créatrice qui n’a pas froid aux yeux. Un événement à découvrir à la Centrale du 28 avril au 18 septembre 2022. Voyez toutes les informations pratiques sur le site officiel www.centrale.brussels Place Sainte Catherine, 44 à 1000 Bruxelles André Metzinger
EXPOSITION : FRITES BY IDAHO Cet été, le Micro Musée de la Frite de Bruxelles de Home Frit’ Home vous le promet 100% frituresque ! Il proposera à ses visiteurs des pièces uniques, sorties des collections permanentes et jamais dévoilées à ce jour. Mais également, des nouveautés... Comme la fragrance « Frites by Idaho » ! Un parfum collector Jamey Higham, Président et CEO de l’Idaho Potato Commission (États-Unis), l’assure : « L’odeur est si bonne qu’il est impossible de résister !», en évoquant la dernière création de ses collaborateurs, la fragrance « Frites by Idaho ». Jusqu’à aujourd’hui, pour la promotion de la pomme de terre d’Idaho, ces derniers s’étaient investis dans des gadgets promotionnels gags, certes, mais de facture plus traditionnelle... «Puis, l’idée d’un parfum à la frite est venue en avril 2021», nous raconte Jeweldean Hull, responsable administrative et réseaux sociaux, lorsque nous l’avons contactée pour exposer cette création inédite au Micro Musée de la Frite de Bruxelles. « Nous avons convenu de le proposer à la Saint-Valentin 2022, en quantité limitée, en vendant le flacon au prix d’une portion de frites à 1,89$. Il a été sold-out en très peu de temps !» Odeur des frites : 90% des sondés l'aiment C’est donc un flacon de « Frites by Idaho » rescapé de cette razzia qui vous est dévoilé cet été au Micro Musée de la Frite. Jeweldean Hull nous confiait aussi : « Nous ne sommes pas des parfumeurs et nous nous questionnions beaucoup. Nous avons réalisé une enquête et 90% des répondants nous ont confirmé qu’ils aiment l’odeur des frites ! Alors, nous avons cherché, testé... même avec de la véritable huile de friture, ce qui n’était pas la meilleure idée (rires) . Nous avons utilisé des huiles essentielles et des pommes de terre Russet distillées de l’Idaho, les meilleures pour faire les frites chez nous.» Parfum frite: un bouquet très complexe En août 2013, Home Frit’ Home avait déjà questionné le parfumeur belge Olivier Kummer en vue de recueillir son expertise dans l’hypothèse où nous nous lancerions dans la création d’un parfum frites... « Lors de sa cuisson dans la matière grasse, la pomme de terre va subir différentes réactions chimiques dont celle de Maillard, ce qui va l’amener à changer de couleur (brunissement de la surface) et à développer son goût (arômes principalement empyreumatiques)», nous expliquait alors le spécialiste. « Donc en apparence le parfum ou le goût de la frite peut paraître simple et évident, mais dans la pratique il s’agit d’un bouquet très complexe (plus d’une centaine de composants chimiques différents) qui est caractéristique de ce genre de réaction chimique. Cet arôme serait un véritable parfum en soi qui nécessiterait des recherches et des mises au point longues et coûteuses sans garantie de résultat !» L’Idaho Potato Commission aurait contourné l’obstacle, en précisant : «Toute nouvelle idée est folle, jusqu’à ce qu’elle fonctionne!» Rendez-vous aux portes ouvertes gratuites « Frites by Idaho » et quantité d’autres surprises sont à découvrir cet été aux portes ouvertes gratuites du Micro Musée de la Frite de Bruxelles de Home Frit’ Home, chaque premier week-end du mois. Plus de détails sur le site www.homefrithome.com Rue des Alliés 242, 1190 Bruxelles
LE COUDENBERG, PALAIS DE CHARLES QUINT Après deux ans d’absence due à la pandémie, l’Ommegang a défilé de nouveau depuis l’église du Sablon jusqu’à la Grand-Place, avec son cortège de 1 400 figurants retraçant le parcours de l’hommage rendu à Charles Quint le 2 juin 1549. Ce jour-là, « notre empereur » présentait au magistrat de la ville et aux corporations son fils et successeur, le futur roi Philippe II, ainsi que ses deux sœurs, Marie de Hongrie et Eléonore de France, la veuve de François Ier. Bruxelles se montrait alors sous son meilleur jour en organisant un Ommegang, un tour de la ville plus resplendissant que jamais, avec un cortège parti de Notre-Dame du Sablon et mené, tambour battant, par le Grand Serment des Arbalétriers réunis devant l’église. Vous y étiez peut-être fin juin pour assister à l’Ommegang, avec la foule des Bruxellois amassés dans une ambiance Renaissance du XVIe siècle. Mais savez-vous d’où venait Charles Quint ce jour-là, tandis qu’il se rendait à l’hôtel de Ville où il allait recevoir l’hommage citadin ? L’empereur arrivait de sa résidence située place Royale, qu’on appelait alors le Coudenberg, le « mont froid ». Il venait souvent s’y reposer pour se livrer à son sport favori : la chasse qu’il pratiquait en forêt de Soignes. Sinon, il vivait à Valladolid en Espagne, avec sa cour. Pénétrons donc dans les souterrains de la place Royale, à plus ou moins dix mètres de profondeur, pour découvrir les vestiges d’un palais séculaire fondé au 12e siècle. On y pénètre depuis le musée de Bellevue situé à côté du Palais Royal, en face du parc de Bruxelles. Mais avant d’y descendre, posons-nous la question : qui était le dernier des Bourguignons ? L’empereur Charles Quint Habsbourg par son père Philippe le Beau, espagnol par sa mère Jeanne la Folle, bourguignon par sa grand-mère Marie de Bourgogne, Charles V, dit Charles Quint, devint à son avènement en 1515 le maître d’un gigantesque empire réparti entre l’Europe et le Nouveau Monde. Il était le souverain le plus puissant de la terre, devant ses concurrents François Ier et Henri VIII. Il était maître de la péninsule Ibérique et des possessions espagnoles d’outre-mer, maître de la Sardaigne, de la Sicile, de Naples, des Pays-Bas, de la Flandre, de la Franche-Comté, de l’Autriche et des possessions allemandes des Habsbourg. Il était ainsi devenu le souverain incontesté d’un empire colossal « où le soleil ne se couchait jamais ». Né à Gand en 1500, Charles Quint fut intronisé à Bruxelles en 1515, dans l’Aula Magna de la cour de Philippe le Bon. On y recevait les ambassadeurs et les chevaliers de la Toison d’Or. Et c’est là encore qu’il abdiqua en 1555 en faveur de son fils Philippe II, roi d’Espagne au service de la foi catholique la plus radicale. Il fut, dit Erasme, son plus mauvais élève dans l’éducation des princes, à cause de l’intransigeance d’esprit dont il pouvait faire preuve contre vents et marées. Ses bons côtés pourtant : il défendit l’Europe contre les Ottomans et sut préserver l’héritage des Bourguignons, qui lui avaient cédé la Bourgogne, la Flandre et les Pays-Bas. Mais il ne put contenir la Réforme religieuse qui se préparait en Europe. On était à la veille d’un bouleversement sur l’échiquier politique et religieux de notre région. C’est sous le règne de son fils Philippe II que les Dix-Sept Provinces Unies se séparèrent en deux parties en 1579: l’une réunie par le Prince d’Orange, protestant, qui allait fonder les Sept Provinces du nord des PaysBas ; l’autre, restée catholique sous la coupe espagnole, c’est-à-dire la Belgique d’aujourd’hui où, selon Charles De Coster, le célèbre Tyl Ulenspiegel mena la révolte contre les abus de Philippe II.
Visite de son palais résidentiel Depuis la colline du Coudenberg, le palais réaménagé de Charles Quint et de son fils se trouvait donc sur l’éperon qui dominait le vallon du Coperbeek, où se profile aujourd’hui la descente du mont des Arts. On en voit la déclivité depuis le sommet occupé par l’église St-Jacques-sur-Coudenberg, rebâtie après l’incendie de 1731 qui fit du « mont froid » un enfer de flammes. Quarante ans plus tard, les ruines et leurs alentours furent en effet rasés pour faire place au quartier de la place Royale que domine l’église, reconstruite à contrechamp. Les vestiges de ce palais forment le site archéologique souterrain du Coudenberg, qui vous attend pour une visite mémorable d’une heure. Avant d’entamer cette visite, soyez attentifs à l’introduction donnée en vidéo à l’entrée : on vous racontera dans le détail l’histoire de ce château que vous allez découvrir. Puis, vous descendrez l’escalier qui vous conduira au cœur des fouilles. Le plan peut être suivi avec l’audioguide gratuit que vous capterez sur votre téléphone portable. Des panneaux explicatifs vous renseigneront. Passé les caves du corps de logis où se trouvaient les appartements princiers et les salles d’audience, vous déboucherez dans la chapelle que Charles Quint fit adjoindre au palais qu’il avait réaménagé. Ses voûtes sont gothiques. Vous êtes sous un des bâtiments actuels de la place Royale, à l’étage inférieur de la chapelle. Ne manquez pas de faire pivoter le périscope qui vous permettra de regarder par le petit bout de la lorgnette toute la place Royale sous laquelle vous vous trouvez. Pour compenser la forte dénivellation du vallon du Coperbeek et mettre l’espace du culte au même niveau que l’Aula Magna, la grande salle d’apparat du palais, la chapelle avait été dotée de deux niveaux de soubassement. On y conservait le fameux trésor de la Toison d’Or, aujourd’hui à Vienne. Vous verrez aussi ce qui reste de l’Aula Magna, la grande salle où fut intronisé l’empereur et où il abdiqua. Attention, le sol est incliné et tourné vers le mur de droite : la pente est glissante. Entre les deux niveaux descend la rue Isabelle, qui était jadis à ciel ouvert. Elle longeait le palais depuis la place des Bailles (aujourd’hui partiellement la place Royale) pour épouser la forte pente du vallon du Coperbeek et mener l’archiduchesse à la collégiale SS-Michel-et-Gudule, tout en contrebas. En dédommagement pour l’expropriation subie, Isabelle (1566-1633) fit construire la Domus Isabellae, un imposant bâtiment au milieu de la rue portant son nom, pour servir au Grand Serment des Arbalétriers de la ville et à la Cour aussi. Ce tronçon de la rue et tout le quartier qui l’entourait furent détruits au début du XXe siècle pour faire place au Palais des Beaux-Arts, inauguré en 1928 sur les plans de l’architecte Victor Horta. Enfin parvenus dans la cour de l’hôtel d’Hoogstraeten, toujours debout malgré les transformations qui vous seront décrites, vous pourrez admirer, dans ce qui est devenu le musée du Coudenberg, les différentes campagnes de fouilles menées sur le site durant le dernier quart du XXe siècle. Vous y verrez faïences, porcelaines, céramiques, ustensiles divers, lampes à huile, ainsi que les géants qui animent le cortège de l’Ommegang : Goliath, Cheval Bayard et les quatre fils Aymon, les géants Georges et Henri, ou Saint-Georges affrontant le Dragon. Une très belle visite à faire au cours de ces deux mois d'été. Surtout si vous avez vu l’Ommegang. Plus d’informations sur le site du Coudenberg : www.coudenberg.brussels ou en vous branchant sur l’audioguide gratuit https://audioguide.coudenberg.brussels. Entrée place des Palais, 7 à 1000 Bruxelles Michel Lequeux
LES TRIBULATIONS DE LA FAMILLE ZOEGEMEEL À BRUSSELLES 1.14 Nadine Parijs, une vraie blonde décolorée par L'Oréal et cependant la meilleure copine de Treene, se pointe chez ladite avec des larmes tout plein de ses yeux bleu lavande. — Och God, ma Treene ! J'en ai gros sur ma patate, dis ! Tu sais pas savoir comme je souffre. Tu n'as rien à boire ici ? — Oué, oué, tu veux une Mort Subite ? — J'aime mieux quelque chose de plus fort, t'sais. Tu n'as pas du petit blanc, des fois ? — J'ai encore le fond de la bouteille de rhum que Jeuf avait gagnée à la Fancy Fair de notre Line, il y a six ou sept ans. Il doit encore être bon, car l'alcool ça conserve, newo. C'est pas blanc mais ça fait du bien quamême ; tiens, avale et raconte-moi qu'est-ce qui se passe. — Potverdekke c'est fort, dis ! Ça gratte au fond de ma gorge et puis je sens descendre ça le long de mon tuyau à l'intérieur. Ça donne drôldement chaud. — Oué, et nous autres on a déjà versé de l'eau dedans la bouteille car moi et Jeuf on avait aussi les larmes dans nos yeux quand on en buvait. Tu penses comme c'était fort au début. — Dis Treene, je sais pas rester chez toi un ou deux jours ? Je suis en bas de mon Gilbert depuis tantôt et je sais pas où je vais aller pour dormir. — Qu'est-ce qu'il a encore fait, ce saligot ? Il t'a encore une fois tapée ? — Il aime pas quand je lui dis que je veux pas qu'il fréquente sur cette voddewaaif de Rosette ! Elle est tout le temps sur son dos à le caresser comme ça et à raconter des zieverdera que juchte moi je peux lui dire. C'est moi sa femme et personne d'autre. Mais lui il se laisse faire et j'ai vu qu'il lui donne des baises. Et pas sur sa joue, hein ! — Comme ça ? Devant tout le monde ? — Non, non, c'était sur son bureau, car elle travaille avec lui. Un midi je vais lui porter son cervelas car il l'avait oublié le matin sur la table de la cuisine. Qu'est-ce que je vois ? Les deux occupés à froucheler derrière la porte. Et que je te serre bien contre moi ! Moi je suis restée là comme une zottin que je savais pas si je devais entrer ou retourner manger le cervelas moi-même à la maison. Et c'est ce que j'ai fait, ma Treene. Je l'ai avalé avec une demigueuze et ça m'est resté sur l'estomac. — Ma pôvre ! Il t'a même pas vue alors ? — Mais c'est pas fini. Hier, il me dit comme ça qu'il doit aller sur son bureau le soir. Moi, tu me connais, hein ? Je lui réponds « C'est sans doute du travail avec ta Rosette ? » et il me répond que oué, et que j'ai rien à dire. — Et alors ? Il a quand même été ? — Ben oué ! Il est resté toute la nuit dehors. Enfin, dehors, tu vois ce que je veux dire, hein ? Pas si dehors que ça. En compagnie, quoi, quand moi je pleurais dans mon lit toute seule. — Et ce matin tu lui as dit ses quatre vérités ? Et il t'a donné des baffes ? Et tu t'es pas laissé faire ? — Comme ça un tout petit peu ! J'ai tapé une steelpanne sur son oreille, ma fille ! Lap ! Il a vu son père, sa mère, et toute sa famille, ça tu peux me croire. Il avait ses yeux qui tournaient comme des toupies, et puis il est tombé par terre dans la cuisine. — Il est mort ? — J'en sais rien, et ça je m'en fous, t'sais ! J'ai pas envie d'aller le revoir. D'ailleurs je retourne plus làbas, c'est pour ça que je te demande si je peux dormir ici quelques jours. — Oué mais, oué mais... si il est mort c'est que tu l'as tué, Nadine ! Tu dois aller à la police. Moi je sais de rien. Juchte que si tu veux je vais avec toi voir. Et puis on demande à Diseré ce qu'il faut faire. — Och erme Diseré ! Un linkador comme ça il va bien m'aider ! Avec lui, je serai déjà à la prison de
Forest avant d'avoir dit Youie ! — Tu aurais tapé si fort avec ta panne qu'il serait resté dedans ? Il est peut-être juchte en bas de son sus ? On doit aller voir. — Alors tu y vas toute seule car moi je reste ici. Tiens, je bois encore un sloek de ton rhum, ça me fait du bien. — C'est pas ton GSM qui sonne ça ? — Oué, mais si c'est le fantôme de Gilbert moi je réponds pas. — Regarde, c'est lui. Tu vois qu'il est pas mort ? Il t'appelle pour s'excuser. — S'excuser ?? Tu rigoles ou quoi ? Il s'excuse pas, Gilbert, il tape ! Même tu vois, il tape même un coup de fil ! La semaine passée il m'a démis mon épaule, et quand j'ai été chez le docteur il a raconté que j'étais tombée dans l'escalier. Non, non, réponds, toi, si tu veux, moi je retourne pas là-bas. — Allo ? Gilbert ? Non, c'est Catherine. Catherine de Jeuf, la copine de... (...) Oué, elle est ici. Elle dit qu'elle l'a pas fait en exprès, de te flanquer une castrole sur ton oreille. (...) Oué oué, elle m'a raconté. (...) Non, elle veut pas revenir, elle a peur. Elle va rester chez nous cette nuit et puis demain tu verras bien. — Tu peux lui dire que pour que je reviens, c'est bernique ! Tout de suite il me casse un os, ce Jan men tayers ! Et si je dois attendre que le Diseré vient me défendre, je serai deux fois morte. — Allo, Gilbert. Elle dit qu'elle va revenir quand elle sera calmée. Elle demande si tu as mal à ton oreille. (...) Oué mais ça tu dois comprendre hein, Gilbert. Une femme ça a parfois sa crise, tu sais, et après ça passe. Nadine va une fois bien dormir chez nous là-dessus, et tu vas voir que tout va s'arranger. C'est pour ça qu'on a des amis, hein ? Et à ton travail ? Ça va bien ? (...) Ouille, ouille, Gilbert, monte pas sur tes chevaux, dis, moi je te demande juchte si ça va, c'est pas pour ça que tu dois gueuler dans mon oreille ! (...) Nè ! Il a raccroché, ce zievereir ! — Awel je vais te dire, hein, Treene, si j'aurais su je lui aurais donné un deuxième coup de steelpanne pour l'achever ! Georges Roland LEXIQUE Och God : newo : Potverdekke : voddewaaif : zieverdera : juchte : baises : froucheler : zottin : steelpanne : Lap : och erme : linkador : en bas de son sus : sloek : castrole : Jan men tayers : zievereir :
mon Dieu n'est-ce pas juron bruxellois marchande de chiffons conneries juste baisers flirter folle poêle à frire vlan mon Dieu arrangeur assommé gorgée casserole sale type imbécile
Petit rappel : Les expressions bruxelloises utilisées dans les textes se basent sur les travaux de Louis Quiévreux, de Jean-Pierre Vanden Branden et de Jean-Jacques De Gheyndt, d'autres me viennent de mon père. Je les remercie tous vivement.
VISITE AU WIELS La brasserie Wielemans-Ceupens a été construite en 1930 par la famille qui lui a donné son nom. Il s’agissait du plus grand producteur de bière de la capitale et qui souhaitait que ses travailleurs soient heureux pour effectuer leur tâche avec passion. L’architecte Adrien Blomme a donc été chargé d’édifier un bâtiment à la fois pratique et agréable, avec de vastes zones lumineuses et aérées. L’atelier où était fabriqué le précieux liquide doré était le plus grand d’Europe et les gigantesques fenêtres qui s’ouvraient sur la voirie permettaient de faire pénétrer la lumière, tout en donnant aux passants la possibilité de se rendre compte des conditions de travail du personnel. La nuit, le bâtiment était illuminé de l’intérieur et irradiait dans tout le quartier. Quant à la décoration, les patrons l’ont souhaitée à la fois belle et sobre. Inutile de préciser que la réputation du nectar s’est fort vite répandue dans tout le royaume. Que s’est-il ensuite passé ? La fin de la guerre et le début des années 50 ont vu les affaires décliner, même si la qualité était toujours au rendez-vous ? On le sait, le goût de la clientèle modifie parfois ses envies et se focalise sur d’autres marques plus efficaces sur le plan de la communication ou moins chères. Quoi qu’il en fût, le bâtiment a été délaissé et abandonné dans son état d’origine, en attendant une hypothétique reprise. En 2007, l’infrastructure a été transformée en musée mais, pour garder un témoignage de son glorieux passé, quatre des huit cuves en cuivre à brasser ont été maintenues. Depuis, des expositions sont organisées autour de thématiques permanentes ou temporaires, toutes focalisées sur l’art moderne, aussi bien pour mettre en évidence des valeurs établies que des créateurs émergents, sans aucune distinction. Bien que le Wiels n’ait pas encore acquis le statut de musée, il est communément désigné comme tel. Au cours de la dernière décennie, il s’est construit une réputation sur son programme engagé et critique, multipliant les démarches et osant se placer de biais par rapport aux formules exploitées ailleurs. Plus qu’un simple lieu de passage, il entend se singulariser comme étant un vrai lieu de dialogue, où les styles ne connaissent pas de frontière et où les restrictions n’existent pas. A ce jour, il se targue d’avoir convié les visiteurs à découvrir une grosse soixantaine de manifestations, d’avoir accueilli un peu moins de cent cinquante artistes venus de tous les horizons et d’avoir mis sur pied de fort nombreuses activités éducatives et socio-culturelles. Que découvre-t-on au Wiels ? Il y en a évidemment pour tous les goûts et, comme les goûts ne se critiquent pas, le public se trouve confronté à des œuvres picturales, à des sculptures et, parfois, à des installations qui témoignent de la vitalité des créateurs d’aujourd’hui avec, toujours, en filigrane, la grande question qui porte sur le rôle de l’art dans la société contemporaine. Il n’est pas rare non plus de voir des productions à résidence tutoyer des pièces spécialement créées pour un événement. Au demeurant, le lieu est devenu en l’espace de quelques années une plateforme des idées, mariant le plus accessible à ce qui l’est forcément moins. Un défi de taille qui semble avoir été remporté haut la main par une équipe volontaire et finalement sûre de la démarche à poursuivre. Le Wiels est accessible gratuitement au public chaque premier dimanche du mois. Plus de détails sur le programme des expositions via le site www.wiels.org Avenue Van Volxem 354 à 1190 Bruxelles
L’ANNIVERSAIRE DE VOTRE ENFANT AU MUSÉE D’ART FANTASTIQUE L’anniversaire de votre enfant approche et vous n’avez aucune idée pour lui offrir une surprise dont il se souviendra longtemps. A cela, dix-sept ou vingt-cinq copains d’école doivent débarquer à la maison pour célébrer cette journée importante. Pourquoi ne pas envisager de faire appel aux services de l’équipe du Musée d’Art Fantastique et de faire entrer tous les invités dans un monde où l’étrangeté rime avec fascination, où le rêve se combine à la réalité, où les trolls et bestioles font la cour aux sorcières sorties des contes de fées ? Evidemment, il importe de rassurer les parents. Ici, rien d’effrayant et l’univers du Musée, comme celui du Centre d’Art Fantastique, se veut avant tout récréatif et bon enfant. Pas question d’être à la base de cauchemars. On rit et on s’amuse dans le monde des Sorcières ! Dès leur arrivée à 14 heures, les enfants visitent la collection permanente et essaient de répondre aux questions de la chasse au trésor pour remporter un badge personnalisable. De nombreux jeux géants (puissance 4 / Puzzle et Tic Tac Toe) permettent ensuite aux membres du groupe de s’affronter lors de duels rigolos. Dans le local de la cafétéria, barbe à papa et autres sucreries diaboliques raviront petits et grands gloutons. Pour les monstres qui désirent danser la salsa du démon, un système de sonorisation est disponible (musique à amener sous forme de cd ou clef usb). Clou de l’après-midi (moyennant supplément et réservation) : les enfants peuvent assister au spectacle « Même pas peur ! » d’une durée de 45 minutes dans la salle de spectacle du CAF, un show humoristique en compagnie d’un pro de la scène. Plus d’informations via infomafcaf@gmail.com Rue de la glacière 18 à 1060 Bruxelles Daniel Bastié
PORTRAIT : FRANCOISE MARQUET Présente lors des vernissages qui se déroulent régulièrement à Espace Art Gallery, Françoise Marquet fait partie des visages connus que les habitués prennent plaisir à retrouver. Toujours installée au même endroit, dans un angle discret de la galerie, sa présence enchante, tandis qu’elle ponctue la soirée avec grâce et délicatesse, en pinçant les cordes d’une harpe celtique (beaucoup plus petite que le modèle classique) et dont elle tire des sonorités cristallines. Avec des mélodies issues de la nuit des âges, la plupart transmises par la tradition et qui n’existent pas sur partition, elle séduit. Partager des émotions par le truchement de cet instrument mal connu dans nos contrées relève d’un long apprentissage, qui tient autant de l’étude que de la pratique, mais qui doit également beaucoup à la sensibilité de l’interprète, obligée de faire corps avec son outil de travail. Tout musicien le dira, il ne suffit pas d’effectuer des arpèges ou de savoir lire une portée pour exceller. L’émotion n’a jamais tenu de la technique pure, mais de l’état d’esprit dans lequel le soliste aborde sa prestation. En écoutant Françoise Marquet égrener son répertoire, on se surprend à vouloir réécrire son parcours et à lui inventer des influences multiples. Sans placer un mot plus haut que l’autre, elle confie avoir été formée au Conservatoire de Mons, avoir suivi le cursus de l’école Parallax et s’être formée à Paris. Elle s’est également fort vite passionnée pour les légendes bretonnes et les mythes anglo-saxons, peuplés de créatures étranges, à la fois merveilleuses, dangereuses et attirantes. La quête du Graal par les chevaliers du roi Arthur ne pouvait que retenir son attention, s’inventant un dialogue avec la fée Morgane ou avec les entités qui hantent la forêt de Brocéliande. Certains affirmeront que sa harpe est céleste, qu’elle tutoie les esprits venus de l’au-delà et possède des vertus presque magiques. Il n’en est rien ! Passionnée, sa musique est simplement humaine et propice à l’évasion. L’écouter reste un plaisir dont on aurait tort de se priver. Plus de détails sur le site www.francoise-marquet.com Daniel Bastié
LA SENNE BIENTÔT LIBRE ? Il n’est peut-être pas illusoire de pouvoir à nouveau découvrir la Senne cent cinquante années après les travaux entrepris pour la voûter. Plusieurs projets de remise à ciel ouvert et d’aménagement de ses berges sont à nouveau lancés. Dissimulée depuis plus d’un siècle et demi sous des dalles de béton et une terrasse de brique, elle semble appelée à devenir le symbole d’une ville nouvelle et le signe de sa revitalisation. S’il ne s’agit pas de l’exhumer sur tout son parcours, il est néanmoins sérieusement question de la libérer de ses entraves par tronçons. Par exemple, le long du boulevard Paepsem ou le long de l’avenue de l’Héliport et de l’allée verte, même si un bout de son bras est toujours visible au niveau du boulevard Industriel ; à quelques mètres de l’écluse d’Anderlecht. Les défenseurs de la nature soulignent une nette amélioration de ses eaux et encouragent toute initiative servant de vecteur à la biodiversité dans la capitale, arguant que la rivière pourrait générer le retour de la flore et de plusieurs espèces animales. Si la crise financière n’endigue pas cet objectif et si les hommes politiques ne retournent pas une énième fois leur veste, les travaux financés par la Région devraient débuter d’ici 2020 et s’étaler sur la décennie. Il est loin le temps où chacun allait de ses arguments pour faire disparaître dans les sous-sols le principal cours d’eau bruxellois. Sous la férule du bourgmestre Jules Anspach, le chantier a été entamé en 1867. Progressivement, la Senne a glissé sous des tonnes de matériaux solides, afin de laisser le champ libre à l’édification des grands boulevards du centre, entre la gare du Midi et celle du Nord. Durant des siècles, elle avait joué un rôle économique important dans le secteur du transport des marchandises. Toutefois, véritable poubelle, elle propageait maints miasmes. Au souhait de doter Bruxelles d’artères imposantes, il importe d’ajouter le souci récurrent de lutter contre les inondations et l’insalubrité de ses eaux. Authentique égout, on y déversait les ordures ménagères, mais aussi les rebus issus des teintureries, distilleries et autres brasseries locales qui longeaient ses berges. Surtout, il serait hypocrite de ne pas mentionner l’ambition de la bourgeoisie libérale, pressée de bâtir un quartier de haut standing autour de la Bourse et de repousser la populace dans les Marolles. Affaire à suivre … Paul Huet
PORTRAIT SUCCINCT : PHILIPPE MEIER Philippe Meier est un artiste qui pratique la technique du point par point, aussi appelée pointillisme. Il prolonge ses rêves à travers ses travaux qui combinent l’expression figurative et des thèmes surréalistes. Son procédé permet l’utilisation de contrastes détaillés en variation d’ombres et de lumières, l’étude des matières et le rendu des vibrations et des reflets. Il adapte, transforme et mélange la fiction et la réalité. Imbriquer une image dans une autre renvoie à une valeur symbolique. Un infime détail peut opter pour une nouvelle orientation, un voyage intérieur ou un monde parallèle. Il n’hésite jamais à superposer les fonctions dans le but de modifier une apparence ou d’apporter de la matière à un sujet. Provoquer un changement d’échelle, afin de découvrir un nouvel horizon ou une appréciation différente sur les choses qui façonnent le quotidien, voilà surtout la perspective dans laquelle il s’engage, partant du principe que le pari ne sera pas toujours compris par les visiteurs. Découvrez son travail sur le site www.meier-philippe.artistes-cotes.com Willy Smedt
DVD : EN ATTENDANT BOJANGLES Sous le regard émerveillé de leur fils, Camille et Georges dansent sur « Mr. Bojangles », un standard de Nina Simone. Leur amour est magique, vertigineux et un air de fête perpétuelle règne chez eux. Entraînée par un besoin de bonne humeur contagieuse, la mère sert de moteur à chaque journée, le nez perdu dans les étoiles, soulevée par le désir de se renouveler, par un besoin de fantaisie et appelant les siens autant que ses amis à se joindre à son doux délire. Avant d'être porté sur grand écran, le livre En attendant Bojangles a été un succès en librairie, paru en janvier 2016 aux éditions Finitude, et a reçu de nombreux prix littéraires, dont celui de France Télévisions, de RTL-Lire et celui le prix du roman de CultureTélérama. Dire que les adaptateurs se sont rués sur le livre reste un euphémisme. En quelques années, le texte s’est vu transposé en pièce de théâtre, puis en bédé grâce au dessin de Carole Maurel avec, toujours, le public au rendez-vous. Ce qui pourrait apparaître comme étant une vie rêvée et de rêve dans le domicile des protagonistes se métamorphose toutefois en crainte lorsque le père et l’enfant constatent que Camille ne possède aucune limite. Que faire ? En se concertant, ils décident de s’unir pour réfréner les délires festifs de cette dernière et revenir à davantage de normalité. Virginie Efira, belle comme un astre, et Romain Duris portent le casting sur leurs épaules et forment un duo convaincant. Quant au réalisateur Régis Roinsart, déjà artisan de « Populaire » avec le même Duris, il signe une mise en scène classique un peu dans l’esprit des vieux films de Frank Capra, gentille, drôle et rehaussée de bons sentiments, fort musicale également grâce au morceau qui donne le titre au long métrage, mais aussi par le truchement de la partition originale jazzy signée Clare et Olivier Manchon. Après un début endiablé, le ton se stabilise et on assiste aux échanges du couple, avec des envolées et des coups de mou. Va-t-on virer vers le drame ? A un instant, on se pose légitimement la question de savoir de quelle manière la situation va évoluer ? Puis, on le sait, il existe cette magie du cinéma pour permettre à tous les carcans d’éclater, de libérer la fantaisie et d’offrir aux acteurs des prestations dignes d’intérêt. Succès en salles, « En attendant Bojangles » ne peut être que bien reçu par les amateurs en DVD, Bluray et sur les plateformes de location. Une façon de s’offrir une seconde chance de voir cet opus dans le confort de son appartement bien installé dans un fauteuil, avec ou sans pop-corn. Daniel Bastié
CINÉMA : COUPEZ ! Parodie de Michel Hazanavicius, avec Romain Duris, Bérénice Bejo, Finnegan Oldfield, Matilda Lutz et Grégory Gadebois. France 2022, 111 min. Sortie le 29 juin 2022. Résumé du film – Tournage d’un film de zombies dans un bâtiment désaffecté. Entre techniciens blasés et acteurs désorientés, seul le réalisateur semble investi de l’énergie nécessaire pour donner vie à ce petit film d’horreur. Jusqu’à ce que d’authentiques morts-vivants fassent irruption sur la scène. Commentaire – Coupez ! a fait l’ouverture de la cinquième édition du Briff. D’abord intitulée Z comme les films de zombies ou ceux de la série Z, cette parodie a donc été rebaptisée pour éviter la symbolique de la lettre « Z » dans le conflit russo-ukrainien. Car il s’agit bien d’une parodie signée Michel Hazanavicius, un habitué du genre burlesque. Après les pastiches des films d’espionnage avec Jean Dujardin dans le rôle d’OSS 117 ou The Artist sur l’âge d’or du cinéma hollywoodien, le réalisateur se lance ici dans la satire des zombies, un genre dont il se moque avec une franche hilarité. Le sujet lui a été fourni par son producteur Vincent Maraval, à partir du remake d’un film japonais de Shin’ichirô Ueda sur les morts-vivants, dont il s’empare goulûment pour tartiner l’écran d’hémoglobine. Il faut d’abord subir le retour de ces morts-vivants, qui se passe dans un seul plan-séquence de 30 minutes. Regardez bien, vous n’y verrez que du feu : la caméra tournant autour des acteurs, zombies compris, sans aucune cassure. Sans les lâcher d’une semelle. Comme dans 1917, le film de guerre de Sam Mendès. Le réalisateur a dû chercher les raccords invisibles à l’œil nu, mais si on lui dit qu’on en est conscient, il vous rira au nez en vous traitant de faux-cul. Pas commode, ce cher Hazanavicius. A part ce plan-séquence magistralement opéré (des semaines de préparation et quatre jours de tournage), la première demi-heure est « chiante ». Elle devait l’être, pareille à cet acteur qui s’esquive, atteint de diarrhée, pour aller se soulager dans les buissons, tandis que la maquilleuse lui barbouille le visage des marques de la mort. Coupez ! vaut pourtant qu’on rentre dans la suite, vraiment comique, elle : tous les ingrédients du film d’horreur vous attendent au tournant. Là est la vraie surprise. On rentre dans les coulisses du film d’horreur et on voit comment fonctionne la machinerie des têtes coupées, des bras amputés, des yeux qui pleurent sous l’effet du collyre, ou des bouches qui hurlent d’effroi. On voit comment le sang est aspergé par les petites mains de l’ombre. Et là, on rit vraiment d’avoir été dupé par la caméra, après un petit moment de stupeur. De spectateurs, nous devenons réalisateurs. Hazanavicius abat, dans cette parodie qui devient hilarante, les cartes sur l’envers du décor. Il le fait avec des acteurs de talent : Romain Duris qui joue un double jeu, étant à la fois réalisateur et acteur du film qui se tourne, Grégory Gadebois, ivre mort, qui dégobille sur ses partenaires, ou Bérénice Bejo qui pète un câble dans ce remake japonais « rapide, peu cher et dans la moyenne ». Tourné en six semaines dans un hippodrome à petit budget d’Evry, à une trentaine de kilomètres de Paris, avec une équipe qui a fait bloc autour de son réalisateur. Hazanavicius, une fois de plus, a fait appel à sa femme Bérénice Bejo (et à sa fille aussi) pour jouer ce film absolument délirant. Avis – Si vous avez la patience d’attendre la fin de l’introduction « chiante », vous serez récompensé par la suite qui montre l’envers du décor des films d’horreur. Avec une bonne dose d’humour, il va de soi. Michel Lequeux
CINÉMA : ELVIS Biopic de Baz Luhrmann, avec Austin Butler, Tom Hanks, Olivia DeJonge, Yola, Kelvin Harrison Jr., Helen Thomson et Richard Roxburgh. USA-Australie 2022, 159 min. Sortie le 22 juin 2022. Résumé du film – La carrière du « King du Rock’n’roll » est retracée dans ce drame biographique qui mêle chansons, politique et exploitation du chanteur. Plus de vingt ans passés à chanter I need your love d’une voix suave et mâle pour Elvis Presley vêtu de rose ou de blanc sur la scène, les cheveux noirs gominés, devant des filles qui tournaient de l’œil à ses pieds. Commentaire – Ce biopic est dû à Baz Luhrmann, le réalisateur australien du Moulin Rouge (2001), d’Australia (2008) et de Gatsby le Magnifique (2013), restés dans les annales du grand succès populaire. Il s’attaque cette fois à l’icône Elvis Presley, dont il retrace la carrière sur le fond de la ségrégation raciale aux Etats-Unis. Sans doute, le chanteur se sentait coupable d’avoir mis le feu aux poudres dans une Amérique puritaine, divisée entre Blancs et Noirs, entre conservateurs et progressistes. Sa musique, inspirée du gospel noir, est un hymne à l’amour, à la révolte, au sex-appeal. On lui interdisait les mouvements lubriques ou saccadés dans le Nord, venus en fait de son trac. Il brisait les cœurs dans le Sud. Il a ainsi incarné une seconde Sécession du pays qui a coûté la vie à John Kennedy, à son frère Robert et au pasteur Martin Luther King, tous trois morts pour défendre leurs idées. « Si tu ne sais comment les dire, chante-les », clamait Elvis devant son public venu l’applaudir en masse. Il avait trop libéré l’Amérique d’ellemême, pudibonde et hypocrite, qui se défoulait en regardant ses shows. Il était devenu une menace pour la jeunesse blanche américaine. C’est très bien interprété par Austin Butler, choisi dans un panel d’acteurs pour incarner le chanteur. Chanteur lui-même, acteur, musicien et mannequin américain, il ressemble trait pour trait à Elvis. C’est d’ailleurs lui qui chante quatre des trente-six ballades, dont Trouble qui fit fureur, repris ensuite par Johnny Hallyday. Une voix forte et profonde qui galvanisait l’assistance et faisait fondre les cœurs. On revoit le chanteur dans ses costumes de scène, roses au début puis blancs et cloutés, avec son jeu de jambes provocateur qui laissait les demoiselles en plein délire sexuel. Elvis a surtout cette fragilité intérieure qui explique l’emprise du colonel Parker, nom d’emprunt pour un sans-papiers hollandais exilé aux Etats-Unis et accro du jeu. Tom Hanks, qui a dû prendre du poids pour le rôle, joue son imprésario avec un flegme dévastateur et une voix traînante sortie de ses bajoues. Même acculé dans ses retranchements, il arrive encore à donner le change et à nous faire croire qu’il a créé de toutes pièces le talent d’Elvis. Que sans lui il n’y aurait pas eu de Presley, et qu’il n’est pas ce Hollandais rapace que poursuivront ensuite les tribunaux. Seul regret : une fin trop longue (le film dure deux heures quarante), avec des images qui reviennent et un chanteur bouffi qu’il aurait mieux valu passer sous silence les quatre dernières années de sa vie. On connaît tous sa triste fin sous l’effet des drogues, des pilules, de la malbouffe et des glaces dont il s’empiffrait. Il est mort de ce mal d’amour qu’il a chanté toute sa vie : I need your love... Le film a été tourné en Australie et dans les studios du Queensland de janvier à mars 2020. Le tournage, interrompu par le Covid-19 qui a frappé Tom Hanks et son épouse, a repris en septembre 2020. Avis – La vie d’Elvis Presley à travers une quarantaine de tubes. Il fut à l’Amérique ce que fut Johnny Hallyday à la France : une bête de scène qui accroche toujours le public. Michel Lequeux
CINÉMA : IRRÉDUCTIBLE Comédie de et avec Jérôme Commandeur, Laetitia Dosch, Pascale Arbillot, Christian Clavier, Gérard Darmon et Valérie Lemercier. France 2020, 85 min. Sortie le 29 juin 2022. Résumé du film – Depuis 16 ans, Vincent Peltier, paisible fonctionnaire aux Eaux et Forêts de Limoges, profite des avantages liés à son statut. Jusqu’à ce que le gouvernement le pousse vers la sortie. Face à une inspectrice du ministère trop zélée qui le mute dans les pires endroits du monde, et jusqu’au pôle Nord, Peltier est bien décidé à résister pour conserver son travail « garanti à vie ». Commentaire – Cette comédie sur la fonction publique est le remake du film italien Quo vado ? (Où vais-je ?) de Gennaro Nunziante, sorti en 2016. Il n’y a donc pas qu’en France que les fonctionnaires s’accrochent à leur emploi et aux avantages qu’ils peuvent en retirer. Jérôme Commandeur, humoriste français dans la veine tapageuse, a repris le sujet en poussant le bouchon. Du moins en tentant de le faire avec Pascale Arbillot qui campe une inspectrice au garde-à-vous, couture sur le pantalon, Gérard Darmon dans le rôle d’un ministre aux mille manières, ou Christian Clavier qui singe le militant syndicaliste. Les ingrédients étaient donc au rendez-vous pour faire rire, mais il y manque quelque chose pour que la sauce prenne. C’est peut-être parce que le personnage de Peltier, interprété par le réalisateur, est soumis à trop de cures au pays de nulle part. Peut-être aussi parce qu’il manque de souffle pour tenir le film sur la distance. Jérôme Commandeur est meilleur dans le « court » : les sketches qui imitent Johnny Hallyday, Navarro, Joe Dassin, Michel Drucker, Patrick Sébastien, Geneviève de Fontenay et consorts, sur les ondes et à la télévision. Ou encore quand il imite les animateurs du Club Med de Djerba. Ici, dans Irréductible, on a l’impression d’une comédie tirée en longueur, avec trop de chèques que décline le fonctionnaire récalcitrant, après en avoir touché un mot à son ami syndicaliste. Dans une comédie, la surenchère fait toujours redondance. La redondance est donc le point fâcheux de ce second film de Jérôme Commandeur, qui a obtenu le Grand Prix du Festival de la comédie de l’Alpe d’Huez. Mais ce n’est un secret pour personne : la France aime ses humoristes et leur pardonne tout, même une comédie à moitié ratée. Avis – Un bon sujet qui aurait mérité une autre tournure pour que la sauce prenne vraiment. C’est un remake auquel n’échappe pas le réalisateur, meilleur dans ses sketches. Michel Lequeux
CINÉMA : ENTRE LA VIE ET LA MORT Thriller de Giordano Gederlini, avec Antonio De la Torre, Marine Vacth, Olivier Gourmet et Fabrice Adde. Belgique-France-Espagne 2021, 95 min. Sortie le 13 juillet 2022. Résumé du film – Leo Castañeda est Espagnol. Depuis dix ans, il vit à Bruxelles où il conduit les rames de métro. Un soir, à bord de sa cabine, il croise le regard fiévreux d’un jeune homme qui l’attendait au bord du quai. Leo reconnaît son fils qu’il n’a plus vu depuis deux ans, lorsque le jeune homme se jette brutalement sur les rails. Leo va découvrir qu’Hugo était impliqué dans un braquage sanglant qui a mal tourné. Commentaire – Entre la vie et la mort est le deuxième film de Giordano Gederlini qui a remporté, avec Olivier Masset-Depasse, le Magritte du meilleur scénario pour Duelles en 2020. Avec ce thriller, venu vingt ans après Samouraïs, il illustre donc la veine noire du cinéma belge. La veine nourrie des « Tueurs fous du Brabant ». Le film s’appuie sur un scénario construit à la manière d’une analepse : il commence par la fin, et l’histoire qui va se dérouler nous raconte pourquoi cette fin. C’est comme si toute l’intrigue était un long flash-back remontant à l’origine des faits. On parle d’analepse plutôt en littérature, comme dans Chanson douce de Leila Slimani, où les premières pages sont en fait les dernières à lire. Ici, dans le scénario qu’a peaufiné le réalisateur, les premières images sont celles qui mettent un point final au suspense de l’histoire. Et du suspense, il y en a : comment ce conducteur de métro, d’apparence inoffensif et casanier, peut-il se retrouver poursuivi à la fois par la police et par les truands, qui l’impliquent dans un braquage sanglant ? De révélation en révélation, le puzzle de sa vie va être reconstruit au fil d’une enquête effrénée qui montrera sa connaissance parfaite des armes et du combat à mains nues. C’est bien, très bien joué même par Antonio De la Torre, figure emblématique du thriller espagnol contemporain, qu’on a vu dans Compañeros se déroulant sous la dictature militaire de l’Uruguay (2018) et dans Une vie secrète sous l’Espagne franquiste (2019). Il a été nommé quatorze fois aux Goya, un record pour un acteur espagnol qui interprète ici le rôle d’un immigré employé au service du métro bruxellois, dont on voit les stations et les rames filer dans le tunnel. Plusieurs autres lieux de la capitale sont identifiables, comme l’Atomium ou la centrale de Drogenbos. Saluons la présence d’Olivier Gourmet dans la peau d’un inspecteur de la PJ qui enquête sur les antécédents douteux du personnage. Il renoue avec la trame des Tueurs de François Troukens et JeanFrançois Hensgens (2017), également scénarisé par Gederlini, dans une fin digne des tireurs fous du Brabant. Il en était l’acteur principal. Présence aussi de Marine Vacth dans le rôle de la fille de l’inspecteur, inspectrice elle-même lancée sur la piste d’un témoin de plus en plus suspect. Seul regret à émettre dans ce thriller bien ficelé au demeurant : la justification de l’analepse. Sans vous révéler l’intrigue pour ne pas vous gâcher le plaisir, on ne voit pas bien ce qui pousse le personnage à agir ainsi au début de l’histoire. On ne voit pas la motivation de son geste, alors qu’il avait tourné la page. On vous laisse donc sur cette fin pour expliquer le début, ce qui en fait un thriller plutôt paradoxal. Avis – A part le paradoxe initial, un bon thriller belge dans la veine de Tueurs et Duelles, déjà scénarisés par le réalisateur qui signe ici son second film. Michel Lequeux
CINÉMA : PICCOLO CORPO Drame de Laura Samani, avec Celeste Cescutti et Ondina Quadri. Italie-France-Slovénie 2020, 89 min. En dialecte italien sous-titré Fr/Nl. Sortie le 27 juillet 2022. Résumé du film – Italie, 1901. Agata, femme de pêcheur, vient d’accoucher d’un enfant mort-né. Comme le village ne veut pas accorder de sépulture à son bébé, elle se charge du petit corps dissimulé dans une caisse pour aller le faire baptiser loin dans les montagnes, là où un sanctuaire, selon la tradition, anime d’un dernier souffle les enfants mort-nés pour leur permettre d’échapper aux limbes et de gagner le paradis. Le chemin de sa quête sera long et semé d’embûches. Commentaire – C’est à partir d’une question posée sur les sanctuaires à répit que Laura Samani a réalisé Piccolo Corpo. Ce premier film, où se mêlent religion et superstition, suit son court-métrage La santa che dorme, centré lui aussi sur un miracle, qui a été sélectionné au Festival de Cannes en 2016. Elle nous assure que ce sera le dernier de ce genre. Et pourtant... Piccolo Corpo a la saveur d’un conte de fée pour adulte, oscillant entre la berceuse qui rythme les images et la sorcellerie. Entre les vieilles coutumes italiennes qui mêlaient sang, salive et lait maternel, et la foi qui a inspiré ces lieux de miracle : des centaines de sanctuaires éparpillés dans les Alpes, où les enfants mort-nés pouvaient revenir à la vie, le temps d’un souffle, pour qu’on leur accorde le baptême et les cieux. Laura Samani en a tiré ce périple d’une femme courant après la rédemption de sa fille. On ne peut s’empêcher d’y voir un lien avec le combat actuel des femmes pour se libérer des préjugés, des servilités, du regard des hommes. En 1901 avec l’éveil de la psychanalyse, comme aujourd’hui avec #Metoo. Ce petit corps qu’Agata tire sur son dos après l’avoir porté dans son ventre, c’est son destin de femme qu’elle emmène au sanctuaire où, dit-on, seuls les hommes allaient à l’époque, laissant l’accouchée au lit. C’est sa douleur à qui elle fait franchir la montagne et qu’elle plonge dans le lac. C’est son corps qui est dénudé dans ses parties les plus intimes, les plus crues : la scène met les spectateurs mal à l’aise dans un contexte clinique qui n’a rien de sexuel, malgré les poils du pubis et les seins gorgés de lait. La caméra à l’épaule, portée par Mitja Licen, le chef opérateur, suit notre héroïne pas à pas, dans la lente traversée du paysage montagneux, très beau. Elle s’attarde sur ses longs cheveux qui feront office de salaire, sur le coffret attaché dans le dos, sur la robe sombre et souillée, sur les pieds qui dérapent dans la pente à gravir. Elle nous fait participer à l’épreuve d'Agata. La caméra s’attarde aussi sur le compagnon de voyage qui a rejoint la jeune femme et qui porte, lui aussi, toute une histoire qu’on finira par découvrir, allant dans le sens de cette émancipation féminine. Il devient « elle » à partir du moment où le duo se sépare. C’est joué par des comédiens qui font leurs premiers pas à l’écran, brûlants de vérité, candides et touchants, où seule Ondina Quadri, qui joue le personnage de Lynx, a déjà pour elle une carrière au cinéma et au théâtre. Le tournage s’est déroulé en Vénétie et dans le Frioul. Il a duré cinq semaines et s’est passé en 2020. La réalisatrice a choisi les dialectes de la région, plus proches de la vérité du moment que l’italien, imposé par l’état à partir de 1861, lorsque l’Italie d’aujourd’hui est née. Avis – Avec les couleurs symbolistes de la fin du XIXe siècle, un conte qui nous plonge dans les superstitions d’alors et dans la foi d’une femme pour réveiller son bébé mort. Fort et poignant tout à la fois. Michel Lequeux
BULLE DE SAVON Les histoires d’amour sont-elles forcément contraintes au désenchantement ? Le roman court de Sylvia Hansel ne contredira pas toutes celles et tous ceux qui clament que l’amour ne dure pas toujours. Zizou, une Parisienne dans la fleur de l’âge, s’éprend d’un jeune Britannique au charme certain. Après une nuit enfiévrée, le beau garçon file … à l’anglaise, abandonnant l’héroïne dans une sorte d’autodestruction fiévreuse. Obsession, jalousie, désirs, troubles alimentaires, … rien n’est épargné au lecteur. Heureusement, un second degré lui permet de ne pas sombrer à son tour dans l’irrationnalité qui foudroie le personnage principal. Bien sûr, en filigrane, on peut retenir les dégâts provoqués par la société de consommation qui pousse à consommer les individus, le culte de l’image, les réseaux sociaux, l’inconstance, la recherche de pulsions sexuelles rapides, le jeu de la séduction, le drame de la désillusion amoureuse et la douleur de la rupture. Bref, la description de la petite mécanique infernale et glaçante du foudroiement d’une femme a priori forte et qui ne sait pas encore que demain laissera sans doute un peu de place à des états d’esprit meilleurs. Ed. Intervalles – 79 pages Julie Plisnier
LA VIE, AU FOND Récit ayant pour cadre l’éternelle Marseille, Hugues Serraf torche un roman qui virevolte à cent à l’heure. Une histoire de beauf qui se croit Alain Delon, qui vit de combines moyennement efficaces et ne songe qu’au beau sexe. Un dragueur de caniveau qui n’a plus toutes ses dents alignées sur les gencives et qui affiche une bedaine saillante. Le jour où il se dispute une fois de trop avec son père et que les conseillers de Pôle-Emploi lui collent un peu de trop près aux fesses, il décide de se refaire une virginité dans la capitale. Objectif : disparaître des radars et retrouver la femme de sa vie, celle qu’il n’a jamais pu oublier et qui ne sait sans doute même plus qu’il existe. Ce roman nous offre une balade en compagnie d’un Hell’s Angel qui s’y croit toujours et qui balade sa carcasse avec nonchalance, affabulateur, magouilleur et physiquement plus vraiment au top. Forcément, le ton est à la drôlerie, avec des phrases assassines, un tempo cool et des dialogues décalés. Rico en devient une sorte de caricature de ce qu’il a été, mais est vraisemblablement le seul à ne pas s’en rendre compte. L’auteur trousse un road-movie plein de liberté, voilé d’une mélancolie et emmené par un héros que tout le monde traite comme un zéro. Ed. Intervalles – 178 pages André Metzinger
UN FAUVE Doucement, le film a été mis en place. Le casting a été bouclé et Claude Lelouch s’est apprêté à tourner les premières prises. Son « Edith et Marcel » ne pouvait qu’être un succès au boxoffice, car l’amour entre la chanteuse Piaf et le sportif Cerdan était encore dans tous les esprits et qui mieux qu’Evelyne Bouix et Patrick Dewaere pour les incarner à l’écran ? Afin de camper au mieux le boxeur, l’acteur s’est astreint à un régime drastique, a cessé de se droguer et a rompu avec l’alcool. Il s’agissait pour lui du film de la renaissance, de la réconciliation avec la presse autant qu’avec le public, après avoir défrayé la chronique pour de mauvaises raisons. Néanmoins, sa vulnérabilité n’était pas un mystère et chacun savait qu’il était confronté à une instabilité psychologique prononcée, capable de tous les écarts. Malgré ses efforts, le spleen le rongeait de façon omniprésente et les souvenirs sombres affluaient sans crier gare. Enguerrand Guépy signe une biographie qui revient sur les dernières semaines de celui qui a été surnommé « Le fauve ». Un ouvrage richement documenté et basé sur le témoignage de proches. On y découvre les coulisses de la création, les souffrances d’un homme mal aimé, ses états d’âme, ses errances, ses fissures, la frustration de n’être qu’un second couteau alors que son talent existait bel et bien et cette espèce de folle concurrence avec Gérard Depardieu qu’il accusait de lui avoir volé la vedette dans, notamment, « Les valseuses ». Ed. du Rocher – 192 pages Daniel Bastié
LA DERNIÈRE VIE DE ROMY SCHNEIDER Elle possédait tout pour elle et, néanmoins, ne s’aimait pas, doutait de chaque geste qu’elle posait et souffrait d’un sentiment mortifère bien loin de l’amour que lui vouait le public. Bernard Pascuito ne se contente pas de replacer Romy Schneider dans le cadre de son dernier tournage éprouvant (« La passante du Sans-Souci »), mais s’offre de nombreux flash-backs afin de retracer son existence à travers ses compositions pour l’écran, ainsi que par le biais de ses amours et de ses relations professionnelles. L’occasion de revenir sur la trilogie « Sissi », l’influence de sa mère Magda, son départ d’Autriche, ses essais à Hollywood et son rôle capital dans une série de longs métrages français devenus depuis des classiques. Grâce à des confidences de proches, l’auteur évoque également le drame qui a scellé son destin : le décès tragique de son fils et tout ce qu’elle a tenté de mettre ensuite en selle pour survivre. Au fil des chapitres, on découvre une existence faite de désillusions malgré les fastes des festivals et la reconnaissance collective, le mal-être et la sensation singulière d’être passée à côté des choses essentielles. L’occasion de rappeler que chaque personne se retrouve seule face à elle une fois les lumières éteintes et que les démons intérieurs rampent insidieusement pour se rappeler lorsqu’on les attend le moins. A travers ses films, nous avons d’une certaine manière vu la comédienne mourir à petit feu ! Ed. du Rocher Poche – 244 pages Daniel Bastié
LES GRANDES HÉRÉSIES A l’instar de tous les grands courants philosophiques ou religieux, le christianisme a connu des périodes de tourmente avec une totale remise en question des fondements de la foi, des mouvements partis sans crier gare et qui ont mis à mal les socles de l’institution religieuse, amenant des réactions souvent violentes. Hilaire Belloc revient sur les courants qui ont fait bouger le catholicisme et les remet en place dans notre histoire. Avant de débuter son analyse, il précise quelques points dont la définition classique d’une hérésie, la portée de celle-ci et la manière de la réprimer. Encouragé par une encre limpide et une érudition sans défauts, il retrace à travers une vingtaine de siècles le vent de nouveautés qui se sont voulues subversives et révolutionnaires à divers niveaux. L’opportunité de revenir sur l’hérésie arienne au cœur de l’empire romain, l’hérésie albigeoise, la réforme et, parmi plusieurs autres, l’entreprise de déconstruction contemporaine des bases de la Foi par un athéisme majoritaire en Europe centrale. L’auteur, décédé en 1953, est un géant oublié des lettres anglaises et son acuité a longtemps servi de métronome lorsqu’il s’agissait de circonscrire la pensée catholique. Cette première traduction fait figure d’événement dans la mesure où elle comble un vide littéraire. Ed. Artège – 270 pages Sam Mas
LES SEPT DEGRÉS DE L’ÉCHELLE D’AMOUR SPIRITUEL A toutes les époques, la vie spirituelle a été perçue comme une élévation, une ascension et une progression de l’esprit vers Dieu. Ce livre a été rédigé par Jean Ruysbroeck à la fin de son existence sous forme de conseils adressés à une moniale et comprend sept étapes pour accéder à la plénitude de l’âme afin d’entrer en communion avec le Christ. Certains le considèrent comme un disciple de Maître Eckhart et lui confèrent une large place dans le courant de la mystique rhéno-flamande. L’occasion de rappeler que l’image de l’échelle évoque non seulement le récit de Jacob dans l’Ancien Testament mais se réfère à divers auteurs anciens autant que contemporains, tous un chouia férus de mysticisme ou d’ascétisme. Ce livre se veut naturellement fort rhétorique et s’adresse aux croyants à la recherche d’un sens dans leur existence, saisis par les mystères divins et curieux d’absolu. Cette réédition en format de poche à 6,50 euros n’a pas pour but d’enrichir l’éditeur, mais de proposer une réflexion qui guidera le chrétien sur le cheminement de la vérité telle que le conçoit l’Eglise. Ed. Artège – 158 pages Sam Mas
AUTOBIOGRAPHIE MYSTIQUE Marie Guyart est née le 28 octobre 1599 à Tours et est décédée le 30 avril 1672 à Québec. Elle était une mystique ursuline et missionnaire catholique fondatrice des Ursulines de la Nouvelle-France. Elle a également fondé le premier couvent d’enseignement féminin en Amérique. Entrée dans les ordres, elle a adopté le nom Marie de l’Incarnation. Son héritage comporte un manuscrit écrit au cours de ses conditions extrêmes de vie au Canada. Un texte qui témoigne de sa foi et de son engagement. Une prose d’une précision et d’une justesse théologique qui impressionne toujours. Désormais accessible à un large public, cette autobiographie traduit l’esprit d’une époque et impressionnera les historiens autant que les croyants. A travers ses lignes, elle raconte sa relation intime avec Dieu, l’existence au sein de son ordre et n’a eu de cesse de rappeler que son devoir consistait à agir en tant que ferment pour accomplir ce qui devait être accompli. Bien entendu, pour le lecteur lambda, il s’agit d’aller au-delà du contenu doctrinal pour retenir une leçon de vie, d’espérance et de joie. On raconte que, à la demande de son supérieur, elle a été engagée à expliquer son itinéraire spirituel. Chose rare, car les mystiques n’aiment pas s’épancher sur eux-mêmes. Poussée à tout dire, Marie de l’Incarnation s’y est employée avec une force insoupçonnée et une discrétion qui émerveille toujours. Cet ouvrage est le fruit de ce travail ! Ed. Artège – 347 pages Sam Mas
QUI A TUE LUCY DAVIS ? Voilà la grande question que se pose le capitaine Markou. Au cours d’une soirée très prisée sur une île grecque, le corps de Lucy Davis, une journaliste britannique, est retrouvé dans le débarras de la magnifique maison de la richissime Mariama. Tout laisse à croire qu’elle a été assassinée. Remonter le fil de ses dernières heures, confronter les témoignages et chercher des indices n’a rien d’une sinécure. Chaque invité craint à son tour pour sa vie. Y aura-t-il une nouvelle victime et qui sera-t-elle ? Comme la tempête gronde, les convives savent qu’ils seront contraints d’attendre une accalmie pour abandonner l’endroit et se mettre en sécurité bien loin d’ici. L’enquête s’annonce fort complexe, puisque personne ne semble posséder de raisons particulières pour éliminer la jeune femme. Lorsqu’une autre personne succombe de façon violence, l’évidence est telle que quelqu’un est en train de régler certains comptes et que les heures qui suivent risquent de s’avérer particulièrement sanglantes. Sentant le danger se rapprocher de minute en minute, Markou sait qu’il entame une course contre la montre. Christos Markogiannakis reprend les codes chers à Agatha Christie (« Ils étaient dix ») et pose ses pièges pour donner au récit un air de film d’épouvante, avec un tueur invisible qui frappe sournoisement pour générer un vent de panique indicible. Retranchés du monde et dans l’incapacité de fuir, les invités de Miss Mariama ne peuvent que prier les saints du paradis ou espérer que la sagacité du détective soit à la hauteur de sa réputation pour avoir la vie sauve. Le protagoniste s’affirme ici comme étant une relève potentielle d’Hercule Poirot mâtinée à la sauce hellénique. Ed. Plon – 366 pages Daniel Bastié
DICTIONNAIRE AMOUREUX DE L’UKRAINE Cet ouvrage paraît à un moment où jamais l’actualité n’a autant parlé de ce pays, tiraillé entre la Russie et l’Otan, une région du monde qui malgré sa vitalité est devenue l’objet de toutes les attentions avec des frontières que certains contestent, saisie entre passé et présent, entre vie et mort. Comment en est-on arrivé à ce déchirement, à cette guerre qui brise tout, qui annihile la paix et meurtrit le peuple ? Tatiana Andrushchuk et Danièle Georget s’interrogent sur le bonheur d’être Ukrainien, sur sa poésie, ses racines, sa cuisine et son état d’esprit. Bien entendu, on ne peut pas lire ce dictionnaire sans revoir les images des villes pilonnées par l’artillerie de Vladimir de Poutine, sans songer au massacre de Bouchka, à la résistance de Marioupol et à la communication du président Vlodomyr Zelensky, devenu un héros un peu partout en Europe. Mais l’Ukraine ne se résume pas à ces images brutales véhiculées sur les chaînes de télévision depuis quatre mois. Elle reste avant tout la fierté d’une population qui a su resserrer les liens en temps de crise pour faire front d’un seul bloc. L’ouvrage se compose de plusieurs articles classés par ordre alphabétique et qu’on peut donc découvrir sans direction particulière de lecture, en sautant plusieurs pages ou en revenant en arrière. Surtout de définir certains mots tels que liberté, d’effectuer des comparaisons entre des choses forcément comparables et de parler de visages insignes autant que d’Histoire et de culture. Ed. Plon – 420 pages Paul Huet
LES INCORRIGIBLES Retour dans le passé. Le bagne de Guyane a fait couler énormément d’encre depuis qu’il a été dénoncé suite à l’affaire Seznec et le roman d’Henri Charrière dit Papillon. Un lieu d’inhumanité dans lequel les prisonniers perdaient toute référence au monde civilisé, une antichambre de l’enfer. Patrice Quélard nous immerge dans l’après-guerre et suit la détermination de l’ancien gendarme Léon Cognard qui décide de réparer une iniquité. Pour cela : direction l’Amérique du Sud et réhabiliter dans ses droits un homme qu’il a jadis arrêté et qu’il croit aujourd’hui victime d’une injustice. Sur place, il découvre les coulisses de la déportation et les rouages d’un système conçu pour broyer les gens. A l’obsession de sauver Talhouan se greffe bien vite le souhait de venir en aide aux forçats relâchés et livrés à eux-mêmes sans argent ni travail, loin de leur patrie et souvent condamnés à l’errance, à la misère ou à la récidive. Un roman coup de poing qui livre un portrait sans aménité d’un univers qu’on a oublié. Un sujet qui interpelle évidemment sur la notion de peine juste et qui rappelle à quel point les droits humains demeurent une notion très récente. Victor Hugo avait envoyé Jean Valjean au bagne parce qu’il avait volé un pain … Aujourd’hui, on ferait un esclandre au prononcé d’un pareil jugement ! Ed. Plon – 424 pages Daniel Bastié
CRÉER, RÉVÉLER, INSPIRER LE HÉROS QUI EST EN VOUS Disputes, malentendus, lassitude… chacun est confronté aux épreuves. Ces dernières peuvent surgir au hasard, que ce soit dans le cadre individuel, professionnel ou collectif. Des situations le plus souvent inédites et auxquelles on ne s’est pas préparé. Très souvent, la riposte tient dans l’efficacité des gestes posés et les leçons à en tirer, car les instants les plus délicats permettent de se regarder dans une psyché pour se découvrir et circonscrire nos potentialités. Fleurke Combier explique ici de quelle façon affronter ce qui trouble, secoue ou blesse. Elle suggère une méthode qui permet de surmonter les obstacles sans tomber dans l’ornière et se révéler à soi-même en devenant le héros de son existence. Alternant réflexions personnelles, constats, témoignages et anecdotes, il incite chacun à réagir pour s’épanouir en fonction des critères qu’il s’est définis. Le constat ne peut pas être éludé : la société nous entoure et y échapper relève de l’utopie pure, à moins de parvenir à s’exiler en anachorète dans un lieu totalement isolé. Plutôt que d’appliquer la politique de l’autruche, le mieux consiste à saisir la vie par les deux bouts pour la contraindre à adopter le profil qu’on attend d’elle et à s’en rasséréner jusqu’à plus soif. Bref, à ne pas laisser les autres aux commandes, mais déterminer en toute conscience quelle voie emprunter pour ne pas regretter ensuite de s’être laissé entraîner par le bout du nez. Ed. Mardaga – 288 pages Sam Mas
LES ILLUSIONS DE LA PSYCHOGÉNÉALOGIE Les secrets de famille, les non-dits, les traumatismes vécus par nos ancêtres influencent-ils ou pas notre existence ? Aujourd’hui, certains thérapeutes affirment que nous subissons le faix des douleurs passées d’une manière quasi inconsciente et que ce poids altère notre capacité à profiter du présent en toute simplicité. Ils conseillent donc une thérapie qui vise à remonter dans le temps pour cerner la douleur et l’éradiquer. Face à pareil défi, il est légitime de s’interroger sur la pertinence de cette méthode autant que d’en mesurer les fruits et les éventuels dangers. Nicolas Gaillard analyse cette technique avec une rigueur scientifique pour en proposer une critique objective. A travers une véritable enquête d’autodéfense intellectuelle, il met en lumière les aspects contestables voire dangereux de la psychogénéalogie, un concept controversé qui croise médecine mentale et sociologie. Difficile de croire que, depuis leur crypte, nos aïeux puissent nous hanter, même s’il est certain que l’éducation transmisse par les parents marque profondément les enfants, réceptacles de liens transgénérationnels qu’ils lègueront à leur tour à leur progéniture. Il convient donc de se prémunir des courants qui peuvent prôner des bases faussement solides et puisque le droit au rêve a pour pendant le devoir de vigilance, le mieux consiste à se remémorer les paroles de James Randi : « Je veux bien avoir l’esprit ouvert, mais pas au point d’avoir un trou dans la tête. ». A méditer ! Ed. Mardaga – 222 pages Willy Smedt
ET SI LES PRINCES PORTAIENT DES ROBES ? Un postulat de départ a priori pas si imbécile ! Pourquoi ne pas permuter les rôles pour ruer dans les brancards et mettre à plat les stéréotypes ? Candice De Léo signe un ouvrage décapant né d’un étonnement et dénonce les injustices flagrantes qui règnent toujours entre les sexes. Une ségrégation issue d’une longue tradition patriarcale et qui a encore énormément de mal à évoluer, même si de sensibles progrès ont lieu dans différents districts. En douze chapitres, l’auteure, née en 2004, se laisse aller à ses réflexions générées par des constats de plus en plus appuyés. Engagée pour la cause féministe, elle a progressivement mis bout à bout le fruit de toutes ses remarques pour dénoncer une série d’incohérences. L’occasion de parler des siens, du sexisme, des idées préconçues du genre « Ma fille, tu dois être souriante, gracieuse, … ». En sa compagnie, on découvre que le sexisme se niche partout. Ainsi, pour quelles raisons habille-t-on les petites filles en rose et les garçons en bleu ? Qu’est-ce qui pousse les parents à acheter des poupées pour les gamines et des voitures miniatures pour leurs rejetons ? Qu’on le veuille ou pas, le machiste sévit ici comme ailleurs. Durant des siècles, les filles ont subi le reflet du miroir doré des habitudes au point de ne pas s’interroger sur ce que la société présentait comme étant une évidence. De nos jours, les choses commencent à évoluer, même si personne ne peut reprocher à aucune de souhaiter être belle, alors qu’il suffirait de vouloir être ! Ed. Livre de Poche – 154 pages Amélie Collard
MAIS LA VIE CONTINUE … Durant des décennies, Bernard Pivot a régné en maître sur le monde littéraire, se faisant le chantre de la qualité selon ses principes. Passer dans l’une de ses émissions relevait de la consécration absolue pour un auteur et annonçait un rebond des ventes. Les meilleures plumes se sont pressées pour se retrouver face à leur présentateur préféré. Aujourd’hui âgé de quatrevingt-deux ans, il revient sur sa très longue carrière et dresse le bilan d’une existence foisonnante, émaillée de rencontres hétéroclites, mais parle surtout de celui qu’il est devenu au fil des ans. Un homme apaisé, mais secoué par les défaillances du corps, l’anxiété de la perte de proches avec lesquels il partage des moments joyeux, la fuite ou la diminution de certains sens. Un âge où la fatalité s’installe à défaut de parvenir à se rebeller contre ce qui déplaît. En se servant d’une encre qui ne manque jamais d’acuité, il évoque le temps qui passe, les projets qui diminuent, la curiosité toujours active mais de plus en plus circonscrite, trois ou quatre recettes pour vieillir heureux et une lucidité qu’on ne prend jamais en défaut. Anti-passéiste, drôle et émouvant, il égrène son quotidien pout nous livrer une merveilleuse leçon d’optimisme et d’élégance. Ed. Le Livre de Poche - 219 pages Daniel Bastié
SI ÇA SAIGNE Quatre nouvelles au menu de cet opus du maître de l’épouvante ! Selon une habitude bien huilée, Stephen King connaît les rouages du suspense et sait mener ses récits à un paroxysme terrifiant, abandonnant sur le bas-côté les clichés du genre pour faire monter la tension crescendo et laisser le lecteur dans un état de stupéfaction totale. « Le téléphone de monsieur Harrigan », « La vie de Chuck », « Rat » et, bien sûr, « Si ça saigne » composent le menu de ce recueil fait de quatre grosses nouvelles à lire sans modération. L’idée de départ est de montrer à quel point l’info se vend lorsqu’il y a du sang à la une. Alors, quand il s’agit de fidéliser les téléspectateurs, certains pourraient-ils enfreindre les règles de déontologie primaire ou devenir eux-mêmes les acteurs pour une mise en scène macabre ? Si les romans du King ont pourvu à établir sa réputation, c’est néanmoins dans la nouvelle qu’il me plaît le mieux car, ici, il va à l’essentiel sans s’encombrer de personnages secondaires ni de récits parallèles. Il concentre toute son attention sur l’action et ses circonvolutions, en appâtant le chaland avec des ressorts efficaces et une intrigue pas piquée des hannetons. « Le téléphone de M. Harrigan » narre l’étrange amitié entre un travailleur et son employeur milliardaire. « La vie de Chuck » parle de la fin du monde, « Rat » revient sur l’angoisse de la feuille blanche pour un écrivain et, enfin, « Si ça saigne », qui donne son titre au recueil et qui en est surtout le plus gros texte, explique de quelle manière une explosion dans une école et le rôle joué par un journaliste suscitent bien de la défiance à Holly Gibney qui dirige une agence de détectives privés. Un petit jeu pourrait consister à faire le lien entre ces nouveaux récits et ceux plus anciens de l’auteur. Il apparaît que certains thèmes font office de récurrence, dont celui des affres de la création, maintes fois exploité dans plusieurs livres, dont certains sont devenus cultes. Frissons garantis à mesure que les chapitres s’égrènent ! Ed. Livre de Poche – 641 pages Sylvie Van Laere
PASSÉ COMPOSÉ Voilà donc en format de poche l’autobiographie attendue d’Anne Sinclair. Livre qui a défrayé la chronique et dont tout le monde attendait la publication. Si cet ouvrage a focalisé les intérêts, c’est principalement à cause du chapitre consacré à DSK et à ses déboires au Sofitel, suivies par toutes les révélations espérées concernant sa libido extrêmement active. Néanmoins, constat est que l’ancienne animatrice de « 7 sur 7 » évite la vulgarité et renonce à dévoiler la face cachée de sa vie privée. Tout au plus, elle reconnaît avoir été sous l’emprise d’un homme séduisant et séducteur, dans un état de déni concernant l’évidence. Elle s’efforce à y être juste, sans juger ni appeler à l’ire populaire. Bien sûr, il lui a fallu du temps avant de prendre la plume pour se raconter, cherchant à ne pas laisser aux autres le soin de tout expliquer. Mais ce « Passé composé » ne s’arrête heureusement pas sur cette affaire qui a brisé son admiration à l’égard de celui qui partageait sa vie. Il devient l’opportunité de raconter d’où elle vient, d’ancrer ses racines dans une histoire familiale marquée par la guerre et la Shoah, de revenir sur ses études, ses premiers pas à la télévision, le succès et, bien sûr, les épreuves qui l’ont écorchée. Elle le sait, le sensationnalisme ne paie pas et la vérité est toujours révélée un jour. Aussi, autant ne pas aller trop vite ni trop fort pour s’y atteler sans se travestir, avec naturel et loin des rodomontades. Au fil des pages, l’auteure se dévoile avec pudicité pour, in fine, reconnaître qu’elle est "fondamentalement craintive, pusillanime et timorée", qu'elle est "sensible à l'extrême, mélancolique souvent et angoissée fréquemment". Des mémoires écrites pour les fans de la journaliste. Les curieux s’abstiendront ! Ed. Livre de Poche – 345 pages Amélie Collard
ORBITE Le tir d’une fusée sur une base spatiale lointaine tourne au désastre. Calli Chase retrouve par hasard sa jumelle et découvre que les apparences ne correspondent en rien à ce que toutes d’eux imaginaient. Elle soupçonne un sabotage et décide de tirer l’affaire au clair, mais c’est sans compter sur des forces qui la dépassent. Elle le sait, la moindre faille risque de lui être fatale. Patricia Cornwell signe un solide roman fait de rebondissements haletants qui ne laissent aucune place à la procrastination. Ce livre fait suite à « Quantum », mais boosté à la puissance 100, avec davantage de suspense et une action qui décolle au quart de tour. Bardée d’un nouvel équipement, l’héroïne ne doit pas seulement faire face à un danger extérieur, mais découvrir que sa propre existence recèle de grandes parts d’ombre. NASA, nanotechnologie, humain augmenté, fusée et espionnage : voilà les ingrédients qui façonnent cet ouvrage atypique rédigé par une des reines du polar contemporain et mitonné aux petits oignons pour convaincre tous les amateurs du genre. Attention, la fin laisse augurer une suite. Ed. Livre de Poche – 470 pages Willy Smedt
SOUVENIRS, SOUVENIRS Le titre fait naturellement référence à Johnny Hallyday, l’idole disparue, que Thierry Luthers interprète toujours en live sur scène. Jeune retraité, il n’entend pourtant pas mettre un terme à ses nombreuses activités, répétant qu’il poursuivra avec assiduité ses interventions dans l’émission « La grand cactus » sur Tipick et ne mettra pas un frein à sa passion qui consiste à visiter les cimetières afin de faire partager ses découvertes érudites. Soixante-trois ans, un âge qui permet de dresser le bilan d’une carrière dans la petite lucarne, à la fois comme journaliste sportif, chroniqueur, présentateur d’émissions populaires et de divertissement, mais surtout d’évoquer maintes rencontres, dont Serge Gainsbourg, Raymond Devos, Claude Nougaro, Jean-Jacques Goldman et bien d’autres, de parler des coulisses de la RTBF à une époque que les moins de quarante ans ne peuvent pas avoir connue, de revenir sur son frère Philippe trop tôt disparu et également présentateur sur la chaîne publique. Enfin, cet album d’un parcours retrace avec une immense pudeur et grand respect des autres les forces et les doutes d’un homme qui tout entier s’est mis au service des téléspectateurs. Une notoriété pas toujours évidente à assumer. L’opportunité de raviver une kyrielle de souvenirs errants dans l’esprit du public. En sa compagnie, on se remémore l’émission « Copie conforme », qui jouait sur la ressemble de compatriotes avec des vedettes. Une de mes connaissances s’était alors présentée comme étant le sosie belge du défunt chanteur Carlos. Une grande partie de pantalonnade ! Une période où le divertissement occupait les heures de grande audience, alors que les séries et la téléréalité dévorent aujourd’hui la grille des programmes. Ah, nostalgie ! Ed. Luc Pire – 157 pages André Metzinger
LA LUNE DE l’ÂPRE NEIGE La vie suit un fil d’Ariane que personne ne semble mettre en doute. Les membres de la tribu indienne anichinabée s’enracinent dans une tradition ancestrale sans trop se soucier de la modernité qui sévit ailleurs. La chasse leur permet de stocker des vivres pour l’hiver. Toutefois, lorsqu’une panne électrique survient, ils découvrent qu’ils sont dépendants de moyens extérieurs et que vivre retranchés totalement du monde les coupe de la civilisation. Lentement, un malaise s’installe et la situation se complexifie. De nombreux signes laissent entendre que la civilisation a sombré dans un chaos apocalyptique et que tout sera à réinventer pour la survie du groupe. Des étrangers qui viennent chercher refuge auprès du clan apparaissent bien vite telle une menace, tandis qu’un nouveau leader s’érige en chef, prend de nouvelles mesures, dégonde les règles et en instaure de nouvelles. Waubgeshig Rice nous interroge sur notre résilience et notre capacité à rebondir après une onde de choc. Avec de récit de survie, il parle de tout ce qui nous hante, de la violence qui croît au sein du clan et qui s’avère parfois plus menaçante que les dangers réels venus d’ailleurs. Traduit de l’anglais par Antoine Chainas, on assiste à l’extinction d’un univers pour voir renaître le suivant sur les ruines de l’ancien. L’auteur nous offre enfin une réflexion sur l’être humain dans toute sa fragilité, les fondements de la société, les pouvoirs ancestraux et la faculté à s’adapter. Ed. Les Arènes – 291 pages André Metzinger
LA VENGEANCE DES PERROQUETS Voilà un roman bien de notre temps ! A Los Angeles, un professeur de Stanford se volatilise, spécialiste des algorithmes et le secret de leurs boîtes noires. A l’autre bout du monde, dans la capitale française, une artiste alerte l’opinion en laissant des marques au pochoir sur les façades de la métropole, convaincue qu’il faut agir face à la censure sanitaire de plus en plus menaçante et les fake news qui pullulent sur les réseaux sociaux. Bien vite, ses œuvres sont relayées sur le Net, faisant d’elle l’artiste à abattre. Pia Pertersen signe un livre 2.0 avec des préoccupations qui nous harcèlent. Elle y parle de frontières fermées, de diktat politique, de crise sanitaire et nous renvoie à l’époque de la pandémie Covid pour réveiller des angoisses douloureuses. Bien entendu, il s’agit de parallèles qu’elle n’évoque pas ouvertement mais qui parlent au lecteur. On a tous en tête le confinement, l’obligation d’aller se faire vacciner, le pass vaccinal, les amendes infligées à certains réfractaires, l’interdiction de bouger à plus de X kilomètres de son domicile, cette impression d’étouffement dans des appartements souvent trop petits pour loger 24 heures/24 toute une famille, le télétravail, les accusations portées à l’encontre du pangolin, ensuite des chauves-souris, etc. Bien que paranoïaque, ce thriller joue à fond la carte du suspense avec une course effrénée contre la montre et peut apparaître comme une dénonciation des dérives qu’emprunte notre société de consommation lorsque la situation se délite. Y a-t-il un énorme complot ? A découvrir en lisant ce roman ! Ed. Les Arènes – 254 pages Amélie Collard
LES RICOCHETS DE LA VIE Nous sommes en 1986. L’été miroite de tous ses feux. Max et Jacquotte accueillent leurs petits-enfants Nans et fanny. Des vacances ordinaires, si ce n’est que c’est la première fois que les gamins sont confiés par leur mère à ses parents. L’occasion de faire connaissance et d’en apprendre davantage sur la famille. Jacquotte préfère se taire et ne pas dévoiler ce qui pourrait paraître comme étant un secret. Par contre, Max offre le meilleur de lui-même. Puis, il y a cette découverte dans un placard : une toile peinte par le papy ! Sera-t-elle révélatrice de quelque chose. Du moins, Nans y croit fortement. Dany Rousson dépeint le quotidien d’une fratrie confrontée à un passé familial qu’elle entend décadenasser. En partant d’une réalité banale, l’auteur parvient à fissurer les certitudes pour laisser poindre une autre réalité, celle des non-dits et des mots qu’on terre pour ne pas paraître impudique. Tout en usant de ressorts subtils, il propose un saut dans le passé pour exhumer ce qui a été enseveli et montrer que l’amour est un présent tellement précieux qu’il convient de ne jamais le galvauder. A défaut d’y prendre garde, on perd un temps rare à se fuir, à garder les distances et à oublier à quel point les relations humaines doivent être ménagées avec intensité. Une manière bien à lui de prouver qu’il importe de savoir faire le ménage dans son crâne, en s’abstenant de tout nombrilisme pour garder l’essentiel bien en tête et de ne pas rater les rendez-vous que la vie nous fixe. Ed. Presses de la Cité 232 pages Paul Huet
LES FILLES DE LA SECTION CAMÉLÉON La section caméléon est ce groupe de femmes qui dès l’aube de la première guerre mondiale s’est organisée dans un petit village non loin d’Amiens sous la direction du peintre Scévola pour se familiariser à l’art du camouflage, afin d’épargner la vie des combattants français face à l’entrée en force dans le pays de l’armée allemande. De leur talent naissent des filets feuillus, des kilomètres de bâches … Sous la forme d’un roman dynamique, Martine Marie Muller revient sur ces oubliées de la Grande Histoire et raconte leur quotidien dans une communauté ouvrière solidaire, gouailleuse et courageuse. Ensemble et en se serrant les coudes, elles tissent de vrais liens d’amitié, s’encouragent mutuellement et retrouvent l’estime d’elles-mêmes par l’action. La question qu’on se pose inévitablement reste celle-ci : ce groupe a-t-il réellement existé ? Oui, selon l’auteure qui précise avoir effectué maintes recherches avant de se mettre à la rédaction, tout en saupoudrant son récit de surprises de son cru. Qui a dit que les femmes se terraient loin des champs de bataille et attendaient sagement le retour d’un mari, d’un frère ou d’un père ? Un récit magnifique au féminin passionnant et qu’on ne lâche pas avant la fin ! Ed. Presses de la Cité – 507 pages Daniel Bastié
RAINBOW APOCALYPSE Voilà un roman formaté pour la jeunesse, avec une couverture attrayante et prometteuse d’aventure ! Une fille type guerrière et une licorne, comment ne pas séduire l’imaginaire et l’emporter loin des pavés des cités éclaboussées par le soleil ? Dans un futur pas si éloigné, rien ne va plus. Electricité, eau courante, infrastructures modernes : tout fait partie des récits qu’on raconte de génération en génération. Les règles ont changé et la survie devient bien plus importante que le confort matériel. Par quel sortilège les humains ont-ils été métamorphosés en animaux inimaginables, on ne le saura pas immédiatement. Toutefois, le résultat est probant avec une prolifération de créatures issues du crétacé, de minotaures, de kangourous verts et de lapins roses. Sarah la licorne et Léo la dragonne s’en sortent plutôt pas mal et mènent leur bonhomme de chemin sans trop avoir à se soucier de ce que la terre est devenue. Néanmoins, leur tranquillité est perturbée lorsque Sarah se voit assigner une mission qui consiste à assassiner un homme aux pouvoirs dangereux. Tristan Valroff déploie une imagination incroyable pour créer un univers où tout est autorisé. Avec lui, les codes éclatent et on vacille loin des socles habituels. Ce nouveau monde ressemble à une sorte de Moyen Âge qui abrite mille dangers, hanté par la magie et dont on découvre peu à peu le mode de fonctionnement. Fidèle à son idée de départ, l’auteur arrête le temps et présente des protagonistes qui ne sont pas des héros mais qui connaissent le travail à abattre, presque sans peur et sans reproches ! Ed. du Rouergue – 408 pages Willy Smedt
MAISON MIROIR Bien que vivant l’une à côté de l’autre, deux familles s’ignorent. A cause du prix des loyers devenus inabordables, le confort a été restreint et la promiscuité n’est pas loin. Une cloison sépare les deux ménages. Si Rose peine à surmonter la perte d’un bébé, elle sait qu’elle ne doit pas compter sur le soutien de son mari et de leur petite fille. A quelques centimètres d’eux, Nour, issue de l’immigration marocaine, peine à trouver sa place entre ses frères et ses sœurs et souffre de la tradition qui impose aux filles de garder leur distance, soumises au père avant de passer entre les mains d’un époux. D’un côté comme de l’autre de la paroi, tout s’entend et se sait, même si rien n’encourage le dialogue. Lorsque Rose croise Nour dans le magasin dans lequel cette dernière travaille, elles entament une conversation qui les amène fort vite à parler du sens qu’elles donnent à leur existence, à leur féminité, aux pulsions de leur corps et au poids de la société. En partant du quotidien d’une cohabitation non désirée, Aliénor Debrocq évoque sans fatalisme la condition féminine aujourd’hui, les avancées à produire, la remise en cause des diktats matrimoniaux, la sexualité, l’amour … L’œuvre se présente sous la forme d’un long récit sans temps morts, creuset d’interminables grilles de lecture qui visent à donner un sens à ce qu’on vit. Une réflexion jamais vaine et faite pour ôter les œillères ! Ed. du Rouergue – 304 pages Andrea Cerasi
ELON MUSK : CHANGER LE MONDE Depuis son annonce de racheter Twitter, Elon Musk n’a jamais autant fait parler de lui. Un homme qui a révélé ses capacités de self-made man en empoignant la vie à bras-le-corps, en payant lui-même ses études et en grimpant peu à peu les échelons de la hiérarchie sociale. Un homme d’une exigence phénoménale habité par un doute permanent et en quête de défis pour changer notre vision des choses et du monde. A la tête de SpaceX, Tesla ou encore PayPal, il n’arrête pas de tout voir en grand. Un de ses projets : partir à la conquête de Mars pour y installer une colonie. On ne se trouve pas dans la sciencefiction mais dans un rêve qu’il entend concrétiser. Pour certains, il est un génie touche-à-tout doublé d’une incroyable intuition. Pour d’autres, on se trouve en présence d’un mégalomane impitoyable et ambitieux, voire dangereux. Denis Granjou nous propose une biographie raisonnée d’un des champions de l’économie actuelle pour mieux comprendre sa démarche, la manière dont il transforme en or ce qu’il touche, ses challenges et le succès de sa réussite. Une raison aussi de gratter le vernis pour découvrir ce qu’il dissimule. Ce livre révèle de surcroît mille anecdotes pas connues. Qui sait que son père lui a coupé les vivres lorsqu’il était ado et qu’il a exercé une série conséquente de petits boulots avant de se lancer dans les affaires ? Ed. City – 256 pages André Metzinger
MORTELLE MASCARADE Et un nouveau meurtre à résoudre ! Voilà la mission qui incombe à Eleanor Swift, une lady beaucoup plus à l’aise dans la savane africaine que dans les salons cosy de la bonne société britannique. Invitée à un bal costumé, elle doit rejoindre son nouveau cavalier. Pas un problème en soi, si ce n’est que le crime s’invite à la fête. Fendant la foule de ses épaules de guerrière, elle retrouve le beau Lancelot brandissant un chandelier en argent au-dessus d’un cadavre et face à un coffre vide. Il n’en faut pas davantage pour qu’il soit appréhendé par la police. Toutefois, la scène de crime ne convainc pas notre belle héroïne qui croit en l’innocence du suspect. Secondée par des amis sûrs, elle décide de mener des investigations complémentaires à celles des forces de l’ordre. Vérity Bright, pseudonyme de plume, mélange les codes du polar traditionnel à son goût de la manipulation pour créer une atmosphère so very british qui n’aurait pas déplu à M.C. Beaton. Avec un style léger, elle joue avec le récit et emporte le lecteur dans un univers qui allie sérieux et second degré, avec des personnages caricaturaux et jamais vains. Si le ton est bien sûr au thriller, les références à la comédie abondent et ne lassent jamais. Certains peuvent trouver ce roman un peu léger, mais c’est justement cette légèreté qui en fait le charme. A titre de comparaison, on pourrait le mettre en parallèle avec les aventures d’Agatha Raisin et celles de Miss Jessica Fletcher de la série « Arabesque ». Ed. City - 336 pages Daniel Bastié
LA SOURICIÈRE Hallucinations, crimes sanglants et Darknet se mettent en place pour consolider un thriller pas piqué des hannetons. La capitaine Valentine Varga se trouve confrontée à la plus complexe enquête de sa déjà longue carrière. Pour elle, la souricière se referme, une prison surnommée de la sorte et dans laquelle un violeur en série vient de se suicider. Alors que tous les services de police se mobilisent pour retrouver la trace d’un politicien qui s’est volatilisé, un étrange justicier condamne et élimine ceux qu’il estime nuisibles pour la société. Affublé du nom d’Hadès, il frappe tous azimuts et sans pitié. Danielle Thiéry, première femme divisionnaire de l’histoire de la police française, s’est reconvertie en romancière à succès et depuis plusieurs années signe des polars extrêmement sombres, réalistes et machiavéliques. Avec « La souricière », elle propose un jeu de piste où rien n’est prévisible. En huilant les codes du thriller, elle fourbit une intrigue complexe qui fait bien plus que se concentrer sur le quotidien pour distiller un rythme et une tonalité qui explosent lors du final dantesque. Un beau triomphe de librairie en perspective. Ed. Flammarion – 414 pages Sylvie Van Laere
QUAND LA BELLE SE RÉVEILLERA A la surprise générale, Alma a disparu. Des signes augurent qu’il lui est arrivé quelque chose de grave. En effet, elle a été kidnappée par un inconnu qui la séquestre dans une grange, enchaînée à un mur. Bien vite, elle se doute avoir été droguée. Son ravisseur s’avère un défenseur de la cause animale. Néanmoins, elle n’arrive pas à comprendre son mobile. Que lui veut-elle ? Pourquoi l’avoir arrachée à l’amour de son mari ? Janine Boissard signe un thriller haletant qui rend hommage aux classiques américains et qui s’amuse à tordre les codes du thriller. Au fil du récit truffé de retournements de situation, elle interroge habilement le lecteur sur les poncifs du genre, le jusqu’auboutisme lorsqu’il s’agit de défendre un intérêt, le fanatisme de certains militants et les moyens dont disposent les forces de l’ordre pour investiguer. Pour vêtir le récit, elle met en place les paysages grandioses du Jura qui servent d’écrin pour laisser l’intrigue progresser à pas de loup. Aidé par un adjudant-chef de la gendarmerie, Mathis, le mari, réussira-t-il à tirer son épouse d’un piège dont personne ne connaît l’issue ? Un roman tranchant comme une lame de rasoir. Ed. Fayard – 247 pages Andrea Cerasi
LE LOUP BLANC ET LE DIABLE D’emblée, Christian Lanza prévient les lecteurs. Bien qu’inspiré largement de souvenirs de jeunesse, ce roman met en scène des personnages fictifs. Entré dans une institution religieuse, Jérôme, à peine douze ans au compteur, ne sait pas encore qu’il va éprouver les sentiments les plus difficiles de son existence. Nous sommes à l’aube des années 60 et l’Eglise possède encore une aura qui s’est effritée en France pour toute une série de raisons plus ou moins avérées. L’assassinat d’un enseignant devient la source de nombreuses supputations et de révélations tardives, malgré une enquête compliquée menée par la justice. En réveillant les spectres du passé, l’auteur mêle son propre vécu à une intrigue émouvante et révoltante. L’occasion de rappeler ce qui pouvait se dérouler dans l’enceinte de certains collèges religieux et de dénoncer des cas d’abus sexuels que plus personne ne met aujourd’hui en doute. Une période funeste trop longtemps scellée par la loi du silence. L’auteur parle également d’amitié, de loyauté et de pardon. Une descente en apnée dans l’univers de l’enfance et la rencontre avec des démons qui meurtrissent l’âme humaine. Dur ! Ed. Favre – 408 pages Sammy Loy
LE PETIT LAROUSSE ILLUSTRÉ 2023 Comme le vin nouveau, le Petit Larousse sort de presse chaque année avec son lot de surprises. Pour ne pas faillir à la coutume, il trône à nouveau dans les rayons des librairies avec cent cinquante nouveaux mots qui apparaissent désormais dans ses pages. Comme tout le monde s’y attendait, la pandémie s’est invitée au menu avec des expressions en lien avec le Covid : passe vaccinal, vaccinateur, distanciel, vaccinodrome, déconfinement, mais également des termes issus de la société civile et entendus maintes fois à la télévision, à la radio ou lus dans un journal : wokisme, grossophobie, etc. Bien entendu, ces ajouts annuels prouvent à quel point la langue française ne possède rien d’intangible et qu’elle vit dans la rue, les cours de récré ou, encore, les bistrots. L’immigration est également vectrice de nouveautés avec, notamment, l’apparition de kakapo (qui désigne une espèce de perroquet) ou de baignassoute qui qualifie certains touristes. Les spécialités culinaires ne sont pas laissées à la traîne avec la glorification du Merveilleux, pâtisserie constituée principalement de meringue et de crème fraîche. La partie noms propres accueille maintenant de nouveaux élus tels que François Cluzet, François Damien et Misty Robin. La version 2023 comprend quelque 64.000 mots, 125.000 sens, 20.000 locutions et 28.000 noms propres, ainsi que 5.500 cartes, dessins et schémas. Faut-il préciser que le Larousse reste une référence pour les écoliers, mais également pour les amateurs de scrabble et tous ceux qui souhaitent s’instruire chez eux en lisant. Une carte d’activation offre un accès privilégié au dictionnaire Internet du même éditeur version 2023. Ed. Larousse Paul Huet
LA SORCIÈRE DE MIDI TOMES 1, 2 ET 3 Michel Honaker est un romancier français, spécialisé dans la littérature populaire et la littérature d'enfance et d’adolescence Avec plus d’une centaine d’ouvrages à son palmarès, il fait partie des auteurs les plus lus dans les écoles. Pourtant, son parcours ne le destinait pas à l’écriture mais à l’hôtellerie. A peine ses études terminées, il se consacre à la rédaction et publie ses premiers textes mâtinés de suspense et de science-fiction. Succès au rendez-vous qui l’encourage à poursuivre en multipliant les couvertures, avant de se tourner vers les récits jeunesse. Bien lui prend, car c’est vraiment là qu’il s’impose comme un écrivain majeur, explorant la fantasy et le fantastique en les plaçant à hauteur d’épaules. Si "Le Prince d'Ebène" (1992) et "Croisière en meurtre majeur" (1993) le font durablement entrer dans les bibliothèques des athénées et les lycées, c’est avec le cycle "La Sorcière de midi" qu’il appuie sa renommée et devient incontournable. Pour célébrer les trente ans de la parution de la trilogie consacrée à cette fameuse sorcière, les Editions Mijade ont l’heureuse intuition de ressortir ces trois livres avec une nouvelle couverture en format A5 grand caractère. L’occasion de se replonger dans ces histoires à la première personne qui ont fait frémir des poignées de lecteurs. Une saga menée par des intrigues rondement construites et qui se composent d’une bonne dose de mystère. Le ton direct est parfaitement accessible à un public qui s’identifie aisément aux protagonistes. En évitant un vocabulaire pointu, Michel Honaker parle de choses qu’il connait avec des mots de tous les jours (parfois des expressions un peu triviales) sans chercher à faire des phrases rondes justes bonnes à entrer dans les anthologies du beau langage. Ed. Mijade – 183 pages – 214 pages et 247 pages André Metzinger
AVEC LES COMPLIMENTS DU CHEF Fred Jannin, l’ex-Snul, est de retour avec cette bédé à son image, bien décidé à ne s’encombrer d’aucune limite lorsqu’il s’agit de rire et de brocarder le monde qui l’entoure. Parrainé il y a bien longtemps par Franquin et Yvan Delporte, cet Ucclois de naissance a fourbi ses armes au journal Spirou et s’est fait connaître avec les bédés « Germain et nous ». Incapable de s’accrocher à une seule activité, il s’est bien vite dégondé pour se lancer des défis qu’ils soient musicaux, télévisuels ou scéniques, avec toujours en ligne de mire l’humour. Un humour bien de chez nous, parfois un peu lourdingue mais toujours sincère. Pour changer (une fois n’est pas coutume) son fusil d’épaule, il croque ici savoureusement les coulisses d’un restaurant gastronomique sous forme de gags en une planche. Une débauche de situations cocasses, mordantes, cyniques ou bon enfant. La force de cet album permet à chacun de s’identifier à l’un ou à l’autre personnage, de reconnaître une scène vécue personnellement ou narrée par un proche. A la question, peut-on rire de tout ? La réponse reste assurément oui ! Au menu : trouvailles culinaires, exigences saugrenues de la clientèle, fournisseurs en retard, etc. Gilles Dal a fourni à l’artiste plusieurs idées pour surfer dans cet univers singulier. A savourer naturellement sans faire la fine bouche ! Ed. Anspach – 48 pages Andrea Cerasi
OPÉRATION SURVIE AU COLLÈGE Voilà un récit estampillé ados. Une histoire qui colle au plancher et qui suit l’entrée d’une presque femme dans une nouvelle école, avec le cou bien accroché aux épaules, les chevilles serrées dans des baskets neuves et le buste compressé dans un tee-shirt. Elle se prénomme Pénélope et panique un peu avant de franchir la porte de l’établissement qui risque devient sa seconde résidence pour quelques années. Lorsqu’elle trébuche sur Jaime, l’intello du coin, un surnom lui est collé d’office : elle sera la petite copine du geek. Face à une situation qu’elle ne souhaite pas, elle repousse le garçon au moment de faire demi-tour, puis … Svetlana Chmakova nous parle d’une tranche d’adolescence que nous avons peut-être éprouvée, celle du regard des autres, des premiers émois amoureux, de l’émulation entre étudiants et de la concurrence entre ateliers scolaires (ici celui de sciences et celui de dessin). Les aventures de Pénélope se déplient comme un feuilleton rose-bonbon, avec un zeste de drôlerie et des bons sentiments qui papillonnent. Naturellement, l’héroïne mettra tout en œuvre pour rattraper le coup. A savoir : ne plus être la risée de ses condisciples et se faire remarquer par Jaime. Survivre au collège, pas forcément une mince affaire ! Ed. Jungle – 256 pages Amélie Collard
N.E.O. - LES DEUX CHÂTEAUX Dans un monde postapocalyptique, les adultes ont disparu. On y trouve deux bandes rivales qui se sont relevées après le cataclysme. La première chasse pour se nourrir, tandis que l’autre tente de vivre en autarcie, sans chercher le moindre contact. Néanmoins, l’heure de la confrontation peut-elle être repoussée ? Voilà le volume 3 de cette saga imaginée par le romancier Michel Bussi et adaptée pour la bande dessinée par Maxe L’Hermenier, Stéphane Robert dit Djet et De Martino. L’occasion de retrouver les protagonistes confrontés à de nouveaux défis. Assurément, dans ce monde qui ne ressemble plus du tout à l’ancien, le danger règne sous de multiples visages et la lutte pour le pouvoir s’endurcit. Les questions sont basiques et universelles : Sommes-nous seuls ? Le danger vient-il de l'autre ou émane-t-il de nos croyances et de nos superstitions ? Le niveau du récit a été ciselé pour un public ado tout en réveillant chez les aînés des réminiscences liées à la lecture de classiques tel que « Sa majesté des mouches » de William Golding. Sur un plan beaucoup plus violent, il y a sans doute un zeste de de « Mad Max ». Enfin, demeure cette interrogation qui soulève bien des suspicions. Les enfants prématurés sont-ils des êtres humains comme les autres ou au contraire … Pour le savoir, je ne peux que vous conseiller la lecture de cette bédé ! Ed. Jungle – 64 pages Daniel Bastié
LES HÉROS DE L’ÉTOFFE Ce titre un peu fantaisiste dissimule un sujet fort sérieux et revient sur la fabuleuse histoire du textile à travers les âges. L’occasion de se rendre compte à quel point la mode peut s’avérer un curseur volatile et de quelle manière les mentalités évoluent d’un siècle à l’autre. Séverine Laliberté, Audrey Millet et Nicola Gobbi ont opté pour l’humour afin d’établir la chronologie de ce que les gens ont enfilé en guise de vêtements pour avoir chaud, masquer certaines parties du corps qui ne peuvent pas être exhibées au nom de la décence, paraître sous leurs plus beaux atours ou afficher leur pouvoir d’achat par le truchement de textiles onéreux. Loin de découler de quelques innovations géniales, l’art de se vêtir a été un processus minutieux qui s’est inscrit dans le temps, passant de la nécessité au confort, bien que modelé par les inégalités et les luttes sociales, politiques autant qu’économiques. Plus que tout autre domaine, cet univers a été révélateur de l’état de la société, avec ses perspectives culturelles, morales ou identitaires. Mieux qu’une leçon d’histoire, cet ouvrage pousse le lecteur à voyager de la préhistoire au XXIe siècle en le saisissant doucement par la main et en veillant à ne pas le brusquer tout en lui faisant comprendre de quelle façon les choses se déroulent, loin des salons où défilent des top-models engagés pour défendre la dernière collection du designer Machin. Un livre pour celles et ceux qui ont aimé les albums « Philosophia » et « Philosophix » qui prônent la vulgarisation pour mieux apprendre. Vivement conseillé pour s’instruire en se délasser. Jamais stupide ! Ed. Steinkis – 138 pages André Metzinger
PRIMO LEVI Matteo Mastragostino et Alessandro Ranghiasci reviennent sur la vie de Primo Levi, ce chimiste italien passé à l’écriture. Ils l’imaginent face à des étudiants dans l’école où il a passé lui-même plusieurs années de jeunesse. Le groupe l’attend pour l’interroger, lui faire évoquer son expérience dans les camps de la mort, la manière dont il a survécu et le témoignage qu’il compte laisser aux générations futures. Membre de la résistance, il a été arrêté et déporté. Son incarcération dans le camp d’Auschwitz a déterminé le restant de sa vie, devenant le principal thème de son œuvre, mais aussi l'aune à laquelle il mesure les événements ultérieurs de son existence. Puis, à la libération, de quelle manière a-t-il réussi à se réinsérer dans la société, à réapprendre le goût des choses ? Bien entendu, ce récit sert avant tout à parler de l’Holocauste, à décrire son horrible mécanisme et à mettre en garde les générations futures. Question après question, on se surprend à en apprendre davantage sur cette page terrible du XXe siècle et à découvrir que pareil crime contre l’humanité pourrait se reproduire si on poursuit la course effrénée à l’égoïsme primaire et à ne plus s’étonner de la montée des extrémismes en France comme ailleurs. Ed. Steinkis – 128 pages Sammy Loy
PIÈCE MANQUANTE Aborder les derniers soubresauts d’une vie portant les flagrances de l’Europe pour laquelle on a œuvré avec la conviction d’avoir forgé les battements de l’Histoire, voici qui me laisse comme une impression que l’auteure nous dévoile ici les regrets d’un rêve inachevé. Serait-ce le sentiment fleurissant à l’esprit lorsque l’on songe à nos vertes années alors que beaucoup d’entre nous songeaient que tout était possible malgré la tiédeur des cendres de la guerre qu’il convenait d’éteindre ? Qu’on-t-il fait de ton âme pour en arriver à fissurer les fondations d’une utopie devenue pourtant réalité ? Dans « Pièce manquante », Claire de Viron aborde la gériatrie sans pour autant la dévoyer par de faux attendrissements. Charles, homme de l’ombre ayant tout donné pour que l’Europe existe, témoin privilégié de ces instants ou la France par l’entremise du Général de Gaule s’inclina pour accueillir le Royaume-Uni au cœur de cette même Europe, souffre viscéralement devant les prémices d’un Brexit alors qu’il se débat contre l’essoufflement de son propre avenir. Le temps s’écoule inexorablement, ramenant les ressacs des blessures impossibles à cicatriser parce que d’un premier amour on n’efface pas les traits tracés par un fusain si délicat qu’il vous laisse à l’esprit comme une œuvre admirée à l’infini. La vie, les trahisons, ces questionnements époumonés par l’absence de réponse, par l’absurdité de silences si soudains pour découvrir ensuite la trahison de l’un de ses compagnons de route. Ne nous y trompons pas, l’ouvrage rédigé par Claire de Viron est comme un puits sans fond. Un regard incisif devant les soubresauts d’une Europe en souffrance et ce même regard s’attarde telle une appréhension devant les heures à venir, cette vieillesse qui nous attend en cruelle fanaison. Je dois bien avouer que je n’ai pas lu ce roman avec empressement. C’est comme si j’avais envie d’homéopathie d’esprit, de déguster un vin à la saveur puissante, de revenir constamment pour savourer les mots en raison de la richesse puisée à la source d’un vocabulaire envié. Enfin, dans un soubresaut que l’on pourrait croire sénile, Charles se lance dans une quête à la Don Quichotte. Une mission qu’il s’offre une dernière fois sans se soucier de l’orage qu’il laisse derrière lui, des regards qui le prennent pour un fou alors que justement, par ce geste désespéré, il vient d’offrir une sorte de clef ouvrant les portes de nouveaux espoirs à ces nations qui se donnent la main le temps que les photographes transpirent. Et j’ose, au risque de me répéter, reprendre le mot espoir. Pourrions-nous continuer à rêver sans puiser à la source de l’optimisme, ce souffle qui nous aiguillonne malgré le temps usant notre avenir ? C’est bien de ça que nous parlons, de ces êtres qui luttent malgré les ans passés, ces humains qui n’abandonnent jamais malgré la déchéance provoquée par le temps. Ensuite ? Le courage d’une rencontre dévoile la vérité. L’amour n’est pas un sentiment gâché, jamais, qu’importent les blessures, la douleur que l’on croit insurmontable, car vient ce jour alors qu’on se persuadait brisé, ou la vérité vous gifle, mais quoi ? Resteront tout de même les vibrations vécues. Pièce manquante est un livre d’amour. L’amour d’une femme pour le projet européen, l’amour d’un homme pour une femme perdue, l’amour des lettres d’un écrivain que je ne puis que vous inviter à découvrir. Éd. Académia -148 Pages Philippe De Riemaecker
OWEN Molly, jeune et jolie femme, prend une décision importante : tout quitter pour fuir son ex-conjoint violent. Elle change de ville, intègre une nouvelle équipe dans une entreprise réputée, achète un appartement et tente d’oublier son passé. Consciente que pour dépasser cette peur qui est encrée en elle, elle doit apprendre à vivre seule dans une ville inconnue, elle se plonge dans le travail et tente de s’approprier son appartement pour y ressentir le bien être qu’elle attend depuis si longtemps. C’est sans compter la sérénade que je joue un SDF, tous les soirs, sous ses fenêtres, cette musique qui stimule l’éveil nocturne des habitants et empêche Molly de dormir. Owen, ce musicien sauvage, est l’opposé de Molly. Il est rustre, maniaque et poursuit sa quête de vérité pour retrouver sa vie, celle qu’il avait avant de connaître la rue. Un point commun unit pourtant Molly et Owen, celui de tendre la main à ceux qui en ont besoin. Dans ce roman, on trouve au beau milieu d’une histoire d’amour, la réalité de la vie, celle qui dérange les uns et accapare les autres : la violence dans un couple, la violence de la rue, la pauvreté qui croise la richesse… Mais ce roman est avant tout une leçon de vie, écrit avec passion et bienveillance. Cette belle histoire démontre les multiples facettes des êtres humains : l’hypocrisie, le déni, le rejet, la quête du pouvoir mais le plus important, il apprend à ceux qui en doute, que l’amour, la bienveillance, la tolérance et la patience sont des qualités bien plus fortes si nos propres convictions sont encrées en nous et ne nous quittent jamais. Matthieu Biasotto est un auteur rencontré dans ma ville natale, Toulouse, lors d’une soirée entre écrivains et lecteurs et son roman m’a permis de découvrir son style d’écriture. Vous ne pourrez pas vous arrêter de lire ce roman dès l’instant où vous aurez commencé les premiers chapitres. Vous attendrez de connaître la fin de cette histoire sans pouvoir refermer ce livre. Et si un jour vous croisez un Owen dans la rue, soyez comme Molly, n’oubliez pas de lui tendre la main ! Autoédition – 514 pages Elise Jane
JULES LE JARDINIER Il est parfois surprenant d’accomplir un simple geste, un mouvement quotidien auquel on ne prête aucune attention sauf, peut-être, lorsque les nouvelles sont bonnes. C’est ainsi qu’en vérifiant la présence de courrier, j’ai été agréablement surpris par un grand coup de tendresse débordant de cette simple boite destinée à récolter les missives que le facteur me porte sous le soleil d’été ou sous la pluie d’automne en souriant toujours à ceux qui le saluent. Bien que j’aperçus des livres, je sus dès le premier regard que nous étions loin des romans habituels quoique ? Et pourtant, ce serait réducteur de les nommer ainsi et quoiqu’on en dise, évitons de dévoyer notre vocabulaire pour besoin de qualifier ces petits chefs-d’œuvre qui se dévoileront à mon regard, tel un quatuor de préciosité. Ici nous approchons la littérature destinée à nos petits moutons, nos plus jeunes, ceux que nous espérons aimer malgré quelques ronchonnades qu’il nous est impossible d’esquiver comme peuvent en témoigner toutes les mamans du monde. C’est qu’on les aime ces apprentis de vie même si parfois ils nous consument au point d’espérer que l’heure du coucher résonne plus tôt que d’habitude. Qu’ils sont beaux les ouvrages de la maison d’édition Marmottons. N’est-ce pas un nom câlin ? Prononcer « Marmottons », c’est un peu comme si on réveillait les heures heureuses de l’innocence en nous éclaboussant par des ressacs d’affections.
Joliment présentés sous une couverture solide sur laquelle des couleurs apaisantes aspirent nos regards d’enfants perpétuels. D’un simple glissement des yeux on devine par avance qu’ici le temps s’offrira une pause. Ensuite ? Nous ouvrons les ouvrages afin de nous plonger au cœur d’un monde extraordinaire. Saluons le graphisme, il le vaut bien, amusant, surprenant, empli de détails que l’on découvre encore et encore alors que l’on croyait avoir tout découvert en oubliant ceci et puis ce truc, ce petit machin qui se marie admirablement à l’œuvre en son entier. Auriane de Pierpont et Colombe Casey ont tout compris, rien à redire, elles offrent non pas de simples histoires gagatisantes, mais au contraire, un univers qui mérite notre respect. « Plus vite Elliot, nom d’une carotte ! ... », « Jules le jardinier », « Sur les pas de Sacha », « éléFantastique » bien qu’ils portent des titres d’une amusante originalité on ne s’arrêtera pas au premier de couverture au contraire. Je gage que pas un de nos enfants ne fuira l’envie de se saisir de ces ouvrages pour en dévorer le contenu encore et encore jusqu’au jour où, devenus adultes, ils reprendront les pages chiffonnées par une vorace envie de lire (ou de se faire lire), barbouillées de confitures comme le sont ces « doudous » littéraires que nous ne perdons jamais de vue parce qu’ils sont une part intégrante de nos bonheurs d’enfance. Et puis ? Et puis, rien ne s’arrête puisqu’en jouant avec votre smartphone nous pouvons scanner le QR code qui nous conduira vers une chanson composée par Geoffroy Grandjean et : une histoire audio. Coup de cœur ? Certainement et plus encore, coup d’amour pour des ouvrages qui ne prennent pas nos enfants pour des légumes sans intérêt. Les éditions Marmottons portent l’espoir d’un avenir solide. Maison d’édition originaire de notre belgitude, l’occasion de rappeler qu’au cœur de nos terroirs se cultivent quelques trésors. Ed. Les Marmottons - 48 pages Philippe De Riemaecker HAUTE VOLTIGE « Pour nom de code, il ne mit pas longtemps à adopter « L'attaque de la diligence ».Ce nom de code était plus qu'un titre. Il délivrait l'esprit de l'affaire, sa quintessence. En dépit de ses mille efforts de concentration, ses pensées se brouillèrent. En lui, quelque chose moulinait en tâche de fond. Quoi, précisément ? » Commandant de la brigade de répression du banditisme (BRB), Stéphan Suarez n'en mène pas large. L'affaire qui le préoccupe ? Le braquage aux abords de Paris du convoi d'un riche saoudien, un braquage qui s'est révélé violent, et même sanglant, dont le butin le plus précieux n'est apparemment ni l'argent ni les diamants. Quel est donc ce mystère ? Une équipe soudée autour d'un Suarez très déterminé, une légende vivante du cambriolage de haut vol hyperactive, un solitaire endurci, d'une incroyable volonté, une jeune femme aussi belle qu'égarée ancienne patineuse artistique de renom, un boss le genre parrain régnant sur un empire de casses, les personnages principaux ; l'art, les échecs, la boxe et l'alpinisme parmi les thèmes et thématiques développés, il n'y a vraiment pas de quoi s'ennuyer avec « Haute voltige », guerre et amour planant comme des vautours au coeur de ce récit-fleuve proche, des 600 pages en grand format, romantique, fiévreux, homérique et habile croisement entre le roman policier et le roman d'aventures s'ouvrant par cette citation de Xavier Tartakover : « Celui qui prend des risques peut perdre, celui qui n'en prend pas perd toujours. » Une particularité à mentionner ? L'apparition surprise de l'une ou l'autre personnalité de notre monde, entre autre celle du célèbre organiste Jean Guillou. L'auteur de ce roman ? La très inspirée Ingrid Astier qui nous a déjà offert par le passé les haletants « Quai des enfers » et « Angle mort », une référence, les éditions Gallimard ne s'y étant point trompés : mystère, tension, action et psychologie fouillée s'alliant ici pour le meilleur, une belle maîtrise autant sur la forme que sur le fond et surtout un fameux casse-tête pour le commandant Suarez : « Impossible de mettre le doigt dessus. La fatigue sans doute. Mais non, ce n'était pas la fatigue. Le vrai tourbillon au fond de son cerveau, il l'admit vite, c'était le Gecko. Déjà trois mois qu'ils travaillaient sur lui et ils n'avaient pas trouvé sa faille. N'importe quel malfrat a pourtant un point de faiblesse, une zone
lâche... » Aucun solide point d'accroche pour Suarez. Combien de temps cela durerait-il encore ? A chaque casse perpétré, aucun indice probant, Ingrid Astier nous menant parfois sur de curieux sentiers. « Haute voltige » ? Un roman sortant de l'ordinaire, au langage trempé dans ce siècle, dont on ne sort ni serein ni indemne tant l'immersion se révèle intense, puissante, profonde, abîme et abysses au rendezvous. A vos crampons ! Ed. Gallimard – 502 pages Thierry-Marie Delaunois
LE VENIN DES FRÈRES Syrie, décembre 1098. Une armée redoutable envahit le territoire, et tue des civils. Belgique, mars 2016. Un flot de migrants déferle sur le pays. Des attentats tuent des innocents. Suite à l'attentat dans le métro de Bruxelles, un professeur d'histoire médiévale, indemne physiquement mais perturbé psychologiquement, se réfugie dans un local de maintenance, dans le tunnel du métro . Obsédé par ses travaux de recherche historiques, il perd le contact avec la réalité. Les événements de la première Croisade se fondent avec les attaques terroristes de ce début de XXIe siècle. Qui sont les assaillants ? Qui sont les victimes ? Qui sont les barbares ? Ma’arra, Syrie, décembre 1098, un flot de migrants animés par un souffle religieux, encadrés par des barons implacables et soutenus par le pape Urbain, génère des milliers de morts en carnages atroces. Bruxelles, Belgique, mars 2016, un flot de migrants infiltrés par des fanatiques religieux sous les ordres de l’État Islamique, sème la terreur. On les dit assoiffés de vengeance. Lors d'un attentat dans le métro, un professeur d'histoire médiévale échappe miraculeusement à la mort lorsqu'un migrant, devant lui, le protège inconsciemment et meurt à sa place. Traumatisé psychologiquement par la déflagration, l'homme perd le sens du réel et sombre dans une confusion complexe, confondant et mêlant ses recherches sur les croisades et le temps présent. Il s'isole dans le tunnel du métro, muni du pistolet que cachait son sauveur, sans pouvoir s'expliquer les raisons de ce geste. Son désarroi est d'autant plus intense que sa femme et sa fille viennent de le quitter au terme d’une dispute. La crainte de se voir inculpé pour terrorisme (à cause du pistolet) le pousse à se cacher dans le tunnel du métro lors des recherches de la police. De plus en plus perturbé, il en arrive à intégrer les personnages d’aujourd’hui dans un épisode particulièrement interpellant de la première Croisade, jusqu’à s’y inclure lui-même. Sa confusion est telle qu’il s’y identifie totalement ; le chevauchement de cet épisode et l'organisation de sa vie clandestine l’amène à prendre progressivement la place de son sauveur, de songer à poursuivre et achever un geste de vengeance qu'il prête à son sauveur. Il finira dans l'absurde, par « abattre » Godefroid de Bouillon, le chef de la croisade, se sentant investi d'une mission revancharde. Membre de l'Association des Écrivains de langue française de Belgique (A.E.B.) et de l'Association Royale des Écrivains et Artistes de Wallonie et de Bruxelles (AREAW), Georges Roland a publié des romans noirs, nouvelles, pièces de théâtre, œuvres de terroir etc. Avec ‘Le venin des frères’, il propose une fiction exceptionnelle aux nombreux rebondissements. Un récit surprenant. Éditions Auteurs d'Aujourd'hui (Ed2A) - 114 pages Joseph George