Ecran total Spécial NAMUR

Page 11

St-Jean-de-Luz

H

Le Festival international du f ilm de Saint-Jean-de-Luz revient du 5 au 11 octobre. Son directeur artistique évoque la volonté inébranlable dont il a dû faire preuve pour organiser cette nouvelle édition.

à la construction d’un couple contre l’ordre moral de son époque. Dans Un triomphe, c’est une troupe de théâtre qui se forme, et une troupe, cela s’apparente fort à une famille… L’aura du festival grandit, aussi bien en France qu’à l’étranger. A quoi l’attribuez--vous ?

Avez-vous dû beaucoup lutter pour organiser coûte que coûte votre manifestation malgré la crise ?

Nous avons effectivement eu une certaine appréhension en constatant que les festivals s’annulaient les uns après les autres. Tout d’abord le Nikon, puis Séries Mania, malgré tous les efforts de Laurence Herzberg, et, bien sûr, Cannes… Néanmoins, du fait que notre manifestation se déroule plus tardivement, en octobre, nous gardions l’espoir de pouvoir nous maintenir. D’ailleurs, au printemps, bien des organisateurs espéraient encore que la chaleur aurait raison du virus. Nous avons lancé l’affiche le 5 avril afin d’affirmer clairement notre volonté de tout faire pour nous maintenir en présentiel. Mais les incertitudes demeuraient, jusqu’à encore récemment avec l’annulation du Festival du film britannique de Dinard et le report du Festival de musique de films de La Baule. Quoi qu’il en soit, nous tenions à ramener le public dans les salles et à organiser une grande fête du cinéma. Avec toutes ces annulations, avez-vous été davantage sollicité par les distributeurs souhaitant positionner leurs films ?

Nous avons contacté les distributeurs dès le mois d’avril pour leur signifier qu’on prenait le pari d’exister et qu’ils pouvaient nous envoyer leur film. Certaines œuvres avaient d’ores et déjà été présentées dans des festivals étrangers ; dès lors, ils ne pouvaient plus concourir à Cannes. Puis nous avons dû attendre la sélection de Cannes ; elle a été annoncée vraiment tard, ce qui a impacté le fonctionnement de plusieurs festivals indépendants, dont le nôtre. En effet, de nombreux distributeurs ne savaient pas où placer leurs films. Ils ignoraient s’ils pourraient être sélectionnés à Angoulême ou même à Venise et Toronto, car la tenue de tous ces grands événements restait incertaine. Durant toute cette période extrêmement floue, nous nous sommes résolus à prendre des décisions fermes, quitte à nous priver de certains films. Ma position était d’organiser le festival quoi qu’il arrive, même si pour cela, il nous fallait renoncer à certaines exclusivités. Mais cela n’a pas été la philosophie d’autres manifestations, qui se sont montrées particulièrement agressives. Vous diffuserez des exclusivités, mais aussi des films labellisés “Cannes 2020” et d’autres, déjà primés à Angoulême. Cela bénéficie-t-il à votre notoriété ?

Il est vrai que nous bénéficions d’une présence toujours plus importante des médias. Nous sommes même devenus un événement Télérama. Nous avons également de plus en plus d’exclusivités de qualité en compétition. La beauté de la région aide elle aussi à en faire une manifestation conviviale. Notoriété grandissante, belles exclusivités, beaux paysages, convivialité… tous ceux qui viennent au Festival souhaitent y revenir. Et les distributeurs internationaux ne s’y trompent pas : ils se servent de plus en plus des prix glanés ici pour assurer la promotion d’un film sur tous les territoires étrangers.

Patrick Fabre « Nous défendons un cinéma d’avenir » Quand on organise un festival, on a deux approches différentes pour s’adresser au public et aux médias. Il faut attirer les spectateurs, mais il faut aussi acquérir de la notoriété auprès de la presse. Car plus notre notoriété dans les médias sera grande, plus nous aurons accès à des films intéressants. C’est la raison pour laquelle il nous faut toujours des exclusivités , qui inciteront les journalistes à se déplacer. Je tenais à ouvrir le festival avec Un triomphe car ce film présente un intérêt pour les spectateurs, comme le montre le Valois du public qu’il a reçu à Angoulême, même si les journalistes l’ont déjà vu. A l’inverse, la presse pourra assister, en même temps que le public de Saint-Jean-de-Luz, aux premières projections françaises d’Ammonite, A Good Man et bien d’autres. Lors des éditions précédentes, je sélectionnais hors compétition les films

déjà présentés dans d’autres festivals. Mais avec l’année que nous vivons, il fallait ouvrir la compétition à des films non exclusifs, qui ont déjà été présentés dans d’autres festivals français, comme Slalom et La Terre des hommes. Quelles sont les thématiques importantes qui se dégagent de votre sélection ?

Beaucoup de films traitent de la famille. Sûrement parce qu’en ces temps difficiles, nous avons besoin de nous recentrer sur des valeurs fortes. La famille reste une valeur refuge qui résiste aux pressions de la société. Ainsi, Le Père de Nafi traite d’un affrontement entre deux frères. Le seul titre de Mère et Fille est assez explicite. De nos frères blessés raconte le combat d’un couple pour survivre en pleine guerre d’Algérie. A Good Man s’intéresse au désir d’enfant dans une famille atypique. Et Ammonite

30 septembre 2020 / Écran total  n°1298

11

En sélectionnant avant tout des premiers et des deuxièmes films en compétition, œuvrezvous délibérément en faveur du renouvellement des talents ?

Nous sommes clairement un festival du renouveau. J’aime aussi l’idée de constituer une famille du cinéma luzien. Quand j’étais journaliste, j’avais plaisir à découvrir un talent puis à suivre sa carrière. La démarche vaut pour le festival. Des personnalités comme Stéphanie Pillonca, Audrey Estrougo ou Marie-Castille Mention-Schaar sont des amies de la manifestation. Elles y ont présenté des œuvres, en présentent aujourd’hui de nouvelles et ont même, pour certaines d’entre elles, été membres du jury. Cette volonté de renouvellement se reflète, sans doute, dans la mise en place de la compétition de courts métrages, ainsi que dans la diffusion des films du Nikon Film Festival ?

Nous défendons un cinéma d’avenir. J’ai donc toujours pensé que nous devions présenter des courts métrages, mais pas amont de la projection d’un long métrage, car ce sont des univers trop différents. Il doit y avoir une volonté des spectateurs de voir ces courts métrages. D’où l’idée d’aménager un programme qui leur soit dédié. Cela s’inscrit aussi dans la tradition familiale du festival, puisque Charlène Favier avait présenté son dernier court métrage chez nous et elle revient cette année avec son premier long, Slalom. Concernant le Nikon Film Festival, on trouve tellement d’idées de cinéma dans ses films de moins de deux minutes que je souhaitais leur apporter une visibilité sur grand écran et pas seulement sur une plateforme. Ils le méritent. Vraiment. Propos recueillis par Nicolas Colle


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.