Espace pour la vie - Programmation 2020

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PROGRAMMATION

GRANDS DOSSIERS

⊕ Rien de plus naturel que des plantes bizarres ! → 4

⊕ Les écosystèmes du Biodôme → 8

⊕ À la recherche des fruits et des légumes perdus → 11

⊕ La ville, à la source d’adaptations surprenantes → 18

⊕ Parlons conservation → 26

À DÉCOUVRIR

⊕ Le petit monde de l’asclépiade → 16

⊕ L’éco-anxiété… et les gestes à poser pour la contrer → 23

⊕ Un écogeste à la fois, tous ensemble → 29

RÉDACTION

Valérie Levée

Marion Spée

Fanny Rohrbacher

Isabelle Burgun

Sylvie Goulet

André Grandchamps

Marie-Ève André

Lucile Pic

RÉFÉRENCE ET VALIDATION

Espace pour la vie

DESIGN

GRAPHIQUE orangetango

RÉVISION LINGUISTIQUE

Bianca Joubert

TRADUCTION

James Cookson

Karin Montin

Alexandra Mathieu

INFOGRAPHIE

Stéphanie Rivet (Pulsation graphique)

© ESPACE POUR LA VIE 2020

DIRECTEUR D’ESPACE POUR LA VIE

RIEN DE PLUS NATUREL QUE DES PLANTES BIZARRES ! → 4

QUAND L’UNIVERS S’EST DOTÉ D’UNE HISTOIRE → 7

LES ÉCOSYSTÈMES DU BIODÔME → 8

À LA RECHERCHE DES FRUITS ET DES LÉGUMES PERDUS → 11

À LA RESCOUSSE DES MILIEUX HUMIDES → 14

LE PETIT MONDE DE L’ASCLÉPIADE → 16

LA VILLE, À LA SOURCE D’ADAPTATIONS SURPRENANTES → 18

L’AVENIR DE LA PLANÈTE GAGNE DES NUANCES DE BLEU → 20

L’ÉCO-ANXIÉTÉ… ET LES GESTES À POSER POUR LA CONTRER → 23

PARLONS CONSERVATION → 26

UN ÉCOGESTE À LA FOIS, TOUS ENSEMBLE → 29

L’ORIGINE DE L’EAU SUR TERRE → 30 DANS CE NUMÉRO

Le Biodôme est au cœur de Montréal et dans le cœur de tou.te.s les Montréalais.e.s. Il est aussi au cœur d’Espace pour la vie, qui s’apprête à en dévoiler la transformation dès le printemps 2020. Cette « Migration » spectaculaire permettra de redécouvrir les écosystèmes des Amériques sous de nouveaux points de vue et invitera le visiteur à devenir un véritable acteur pour la préservation de la biodiversité.

Nos actions futures devraient nous porter encore plus loin, vers un engagement réel, un « réenchantement » véritable. Peut-on affronter les défis qui nous attendent sans plaisir, sans une affection authentique pour ce qui nous entoure ? Il ne s’agit plus simplement de préserver, par obligation, sous la menace et la peur d’une fin inéluctable. Notre engagement doit être accompagné de la capacité de redécouvrir les merveilles de la nature. Peut-on imaginer le monde de demain simplement entre nous, humains ? Sans toutes ces autres espèces qui, après tout, assurent notre survie en nous soignant, en nous nourrissant et en nous enchantant ? Oui, en nous enchantant. Pour peu qu’on se laisse toucher, transformer, par la magnificence de la nature.

Et si le premier geste, pour assurer la transition écologique, était en fait de redécouvrir ce qui est devant nous, ce qui nous entoure, nous enrichit et nous rend plus complet ?

La biodiversité, si l’on y prête attention, se dévoile à chaque instant. Elle nous révèle. Notre étourderie, notre paresse d’âme ou notre ambition sont en train de faire périr toute cette beauté, alors que nous devrions plutôt lui permettre de s’épanouir, de nous enthousiasmer, de submerger notre cœur, pour finalement nous envahir pleinement. On ne pourra jamais se lasser de ce qui nous émerveille et nous rend meilleurs.

Détruire la nature est insensé. Cela nous amène peu à peu à un appauvrissement des sens, qui nous permettent pourtant de nous repérer dans le monde.

« Ne tuons pas la beauté du monde. Faisons de la terre un grand jardin », chantait Diane Dufresne. Et si c’était finalement aussi simple ? ⊗

Dépôt légal - Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2020

ISBN 978-2-924977-01-9

RIEN DE PLUS NATUREL QUE DES PLANTES BIZARRES !

• PAR VALÉRIE LEVÉE

De l’eau, de la lumière, du CO2 , des éléments minéraux, voilà l’essentiel des besoins d’une plante pour se développer. Ces ressources se trouvant en quantité variable dans les écosystèmes, les plantes doivent maximiser leur captation et les utiliser à bon escient. Mais ce n’est pas tout : il faut aussi se reproduire. Et pour cela, les plantes ont parfois besoin d’un pollinisateur qu’il faut séduire de toutes sortes de façons.

↓ Les lithops sont d'étranges végétaux par leurs formes et leurs couleurs.

Au cours de l’évolution, ces défis ont favorisé chez des plantes le développement de multiples adaptations leur permettant de survivre dans leur milieu. Des solutions ont émergé au hasard des mutations génétiques… conduisant parfois à d’apparentes bizarreries. Voici un florilège d’étrangetés à la manière végétale…

PLANTES OU CAILLOUX ?

Si vous allez en Afrique du Sud ou en Namibie, attention où vous mettez les pieds; ce que vous prenez pour un caillou pourrait être une plante !

Dans les milieux arides, mieux vaut se protéger de la chaleur et faire des réserves d’eau pour survivre à la sécheresse.

C’est ce que font les plantes-cailloux ou lithops, nom qui signifie littéralement apparence de pierre. Ces « cailloux » sont en réalité des feuilles.

Un lithops est constitué de deux feuilles en forme de cônes qui se font face. Voilà tout ! Ces deux feuilles, comme celles d’autres plantes succulentes, sont gorgées d’eau, mais elles sont aussi partiellement enterrées. Elles se protègent ainsi des herbivores, de la chaleur diurne autant que du froid nocturne. Elles peuvent ainsi résister à des températures allant de 0 à 70°C.

L’automne venu, lorsque les conditions sont favorables, une fleur émerge d’entre les deux feuilles, trahissant la nature végétale de ces cailloux pas comme les autres.

FRISER POUR CAPTURER LA ROSÉE

Dans un désert de brume de la côte sud-africaine pousse une plante aux feuilles spiralées, l’Albuca spiralis. Ce n’est pas l’humidité de la brume qui en a fait friser les feuilles, mais bien une adaptation au milieu désertique. Au cours de l’évolution, les conditions du milieu ont favorisé la sélection d’une forme de feuille optimale pour maximiser la collecte d’eau contenue dans la brume et la rosée. En effet, la brume de mer pénètre parfois à l’intérieur des terres. L’humidité relative - qui peut alors atteindre 85 % - se dépose aux heures fraîches sous forme de rosée. Or, il s’avère que les bords de la feuille captent mieux la rosée que le limbe de la feuille. Ils forment une gouttière qui canalise l’eau captée vers la base de la plante. Les feuilles étroites ont aussi l’avantage, en milieu désertique, d’être moins exposées à l’air et donc de limiter la perte d’eau par transpiration.

De nombreuses plantes de cette région sont bouclées, frisées ou spiralées. Pas étonnant !

GOBER LES MINÉRAUX

Dans les tourbières et marécages, les plantes ne manquent pas d’eau, mais elles manquent parfois de minéraux (d'éléments nutritifs). Qu’à cela ne tienne, les insectes qui passent par là en apportent… à condition de les attraper.

C’est ce que fait la Darlingtonia californica, une plante carnivore du nord de la Californie et de l’Oregon, aussi appelée plante cobra. Elle tire son surnom de ses feuilles tubulaires dressées et recourbées à leur extrémité, à l’image du serpent. Plus qu’une simple évocation du cobra, ces feuilles sont avant tout des pièges à insectes. Avec leurs couleurs vives et leurs glandes qui sécrètent un nectar, elles attirent les insectes vers l’ouverture du tube située juste sous la « tête du cobra ». Pour sortir du piège, l’insecte cherche à se diriger vers la lumière. Les cellules du dessus de la « tête du cobra » sont justement translucides et laissent filtrer la lumière. L’insecte s’y dirige, se cogne, glisse sur les parois désespérément lisses et tombe dans le fond du tube. Des poils tournés vers le bas l’empêchent de remonter le long des parois du tube. Il finit noyé dans un liquide digestif duquel Darlingtonia california puisera l’azote dont elle a besoin.

Pour de nombreuses plantes carnivores, la stratégie est la même : attirer, capturer, digérer des proies pour obtenir un complément nutritif précieux au cœur d’un habitat pauvre. Et tout cela grâce à des feuilles modifiées, tout à fait hors du commun.

↑ En haut : Alb uca spiralis, en-dessous : Darlington californica
PHOTO Shutterstock/pr2is
PHOTO Richard Adcock

LES PLANTES ÉTRANGES DE M me Z

JARDIN BOTANIQUE

26 FÉVRIER — 26 AVRIL

Carnivores, Géantes, Succulentes, Énigmatiques et Animales vous y attendent…

TRANSPORT DE POLLEN ADAPTÉ

Chez les plantes à fleurs, l’échange de pollen entre individus permet de brasser les gènes et de créer de la variabilité génétique à partir de laquelle pourra s’opérer la sélection naturelle. Certaines plantes sont pollinisées par le vent, mais cela rend le transport très aléatoire. Les orchidées, elles, profitent d’un transport de pollen, assuré par des insectes.

Un exemple remarquable est celui d’Ophrys bombyx ou ophrys abeille, qui, en plus de ressembler à une abeille femelle, en dégage l’odeur. De quoi attirer le mâle qui, s’il est déjà passé par une autre orphrys abeille, en apportera le pollen.

L’orchidée sabot de Vénus attire aussi des abeilles par son odeur. Mieux, elle les fait tomber dans le piège formé par un pétale en forme de sabot. Pour sortir de ce piège, l’abeille doit se frotter le dos sur le pollen, qu’elle pourra transporter jusqu'à une autre orchidée.

Comme leurs noms l’indiquent, l’orchidée à tête de singe ressemble à un singe et l’orchidée canard volant ressemble à un canard. Mais n’allez pas croire qu’elles sont respectivement pollinisées par un singe ou un canard ! Toute ressemblance n’est que le fruit de notre imagination. Ce sont bien des insectes qui les pollinisent, elles aussi !

Frisure, carnivorie, pièges, transport de pollen inusité sont autant de formes et de stratégies qui permettent aux plantes de croître et de se reproduire dans des habitats particuliers, parfois peu hospitaliers. Ces adaptations hors du commun semblent, à première vue, farfelues, bizarres ou futiles, mais sont pour les plantes de véritables gages de survie. En somme, elles ne sont étranges qu’à notre regard…

↓ Une orchidée à tête de singe.

QUAND L’UNIVERS S’EST DOTÉ D’UNE HISTOIRE

• PAR ANDRÉ GRANDCHAMPS

Au début du XXe siècle, les travaux de deux astronomes vont conduire à une découverte qui changera radicalement la conception que se faisaient les scientifiques de notre monde : l’expansion de l’Univers. Cette découverte entraînera une révolution qui bouleversera, à tout jamais, le domaine de l’astronomie.

George Lemaître, chanoine et astrophysicien, est le premier protagoniste de notre histoire. En étudiant la relativité générale d’Einstein, Lemaître comprend que l’Univers ne peut être statique. Les objets qui le composent doivent s’éloigner les uns des autres. En poussant plus loin sa réflexion, il réalise que dans le passé, l’Univers était beaucoup plus petit, plus dense et plus chaud. Pour Lemaître, l’Univers primitif devait être condensé dans un petit « œuf » extrêmement dense et chaud, pour ensuite s’agrandir en prenant de l’expansion jusqu’à atteindre la taille que nous observons actuellement.

Cependant, les travaux que Lemaître publie en 1927 sont théoriques. Pour être acceptés par les astronomes, il faut trouver des preuves expérimentales de cette expansion.

C’est ici que le deuxième acteur de cette aventure entre en scène. L’astronome américain Edwin Hubble étudie à cette époque les galaxies avec le télescope du mont Wilson, en Californie. Grâce à ses observations, il découvre que les galaxies s’éloignent de nous, comme l’avait prédit Lemaître. Il montre même que plus une galaxie est loin de nous, plus elle s’éloigne rapidement.

Ces observations constituent une preuve éclatante de l’expansion de l’Univers et des travaux de Lemaître.

De nos jours, la relation entre la distance d’une galaxie et sa vitesse d’éloignement est appelée la loi de Hubble-Lemaître.

Cette découverte permet aux astronomes de constater que l’Univers tel que nous le connaissons n’est pas immuable, mais possède une histoire qui l’a fait évoluer avec le temps.

Cela a donné naissance à la théorie du Big Bang.

Dans cette théorie, l’état initial de l’Univers est appelé une singularité. Cette singularité s’est mise à gonfler de façon vertigineuse au début de son histoire, pour ensuite ralentir.

En s’agrandissant, l’Univers s’est refroidi, permettant à la matière d’apparaître et de se structurer. Ultimement, 10 milliards d’années plus tard, la vie a émergé sur une petite planète dans notre Système solaire, pour ensuite évoluer jusqu’à la grande diversité que nous connaissons aujourd’hui.

↓ Vous pourrez découvrir cette fascinante histoireet bien d’autres ! - avec le film Horizon, à l’affiche au Planétarium Rio Tinto Alcan.

PLANÉTARIUM RIO TINTO ALCAN À L'AFFICHE

HORIZON

LES ÉCOSYSTÈMES DU BIODÔME

• PAR MARION SPÉE

Ça y est, le Biodôme est à l’aube de sa réouverture ! Son audacieuse architecture accueille une toute nouvelle scénographie qui, tel un écrin, met en valeur la beauté de la nature, les complexes et fragiles interrelations qui existent au sein des écosystèmes. La visite promet des expériences plus immersives, participatives, introspectives et émouvantes.

GRANDE RÉOUVERTURE

BIODÔME

PRINTEMPS

La nature est si ingénieuse, si irremplaçable. C’est plus que jamais le moment de la mettre à l’honneur, tant on prend conscience qu’elle a été fragilisée ces dernières décennies. Si le Biodôme occupe un rôle dans la conservation d’espèces menacées, il a bien évidemment aussi un rôle à jouer pour ses visiteurs. Alors l’équipe a concentré ses efforts et son attention pour offrir aux êtres y vivant des conditions de vie optimales et au public une expérience unique, offrant de nouvelles perspectives.

La Forêt tropicale humide des Amériques, l’Érablière des Laurentides, le Golfe du Saint-Laurent ainsi que les Îles subantarctiques et les Côtes du Labrador sont toujours les écosystèmes vedettes. Mais, dorénavant, chacun est enveloppé d’une paroi « vivante » : une structure courbée, fluide et souple. Une surface blanche et épurée qui contraste avec le foisonnement multisensoriel des collections vivantes. Aussi, une mezzanine donne un point de vue imprenable sur les écosystèmes et offre aux visiteurs une nouvelle vue d’ensemble. Une mise en scène qui permet d’observer la faune vivant à cette hauteur et qui souligne les interrelations vitales entre les individus, en plus d’offrir une vue « macro », un aspect essentiel : ce sont les liens existant entre les espèces au sein d’un écosystème qui rendent la vie possible.

DES LIENS ESSENTIELS À LA VIE

Dans le golfe du Saint-Laurent, en milieu naturel, ça grouille de vie. Les illustrations de relations entre espèces sont nombreuses. Prenons le plancton, qui regroupe les organismes végétaux (phytoplancton) et animaux (zooplancton) dérivant au gré des courants. Il représente la plus grande biomasse aquatique : le poids de tout le plancton correspond à la quasitotalité de celui de tous les autres habitants de la mer, poissons, crustacés et baleines compris ! Mieux encore, le plancton est le premier maillon des chaînes alimentaires marines. On compte des espèces microscopiques et d’autres pouvant mesurer plus de 5 cm. Il est la proie de petits prédateurs, eux-mêmes dévorés par des plus grands. Aussi, de gros animaux comme le rorqual bleu se servent directement dans les stocks de plancton. Sans lui, les espèces marines ne pourraient tout simplement pas exister ! En fait, c’est avec le plancton que tout commence.

Un autre exemple est la balane, ce petit crustacé ressemblant à une crevette qui s’accroche sur la coque des bateaux, les épaves, les roches et même les baleines (surtout les rorquals à bosse, les baleines grises et les baleines noires). Elle sécrète une carapace calcaire qui lui permet de rester fixée sur son hôte et de s’alimenter en sortant ses pattes pour filtrer l’eau et ingurgiter le plancton en suspension. On parle de commensalisme : la relation n’est pas réciproque puisque la balane est la seule à en tirer profit, mais au moins, l’hôte n’est pas embêté. Pour l’anecdote, en analysant la composition

des carapaces fossilisées de balanes, des chercheurs ont pu retracer les routes migratoires des baleines : elles empruntent les mêmes depuis 270 000 ans !

Toujours dans le golfe du St-Laurent, on trouve aussi de vraies formes de mutualisme, notamment entre le bernard-l’ermite et l’anémone de mer. Dans ce type d’interaction, chacune des deux espèces tire des avantages de son lien avec l’autre. En pratique, l’anémone se fixe au bernard-l’ermite pour se déplacer sans effort, avoir un accès facile à la nourriture et même récupérer les restes des repas du crustacé. En retour, celui-ci obtient une protection supplémentaire contre les prédateurs éventuels, les tentacules bardés de cellules urticantes de l’anémone les faisant fuir. En plus, l’anémone produit une substance cornée qui agrandit la coquille que le crustacé squatte… ce qui le fait déménager moins souvent.

C’est gagnant-gagnant.

↓ Un bernard-l'ermite avec une anémone sur sa carapace.

En insistant sur une mise en scène immersive et novatrice, le nouveau Biodôme rend hommage à la nature en soulignant sa beauté. Le but est simple : nous émerveiller et nous rappeler à quel point la biodiversité est précieuse. Et réveiller notre engagement citoyen pour la préservation des écosystèmes.

On dit qu’une expérience est belle si elle procure une sensation de plaisir. Comme on l'entend souvent, « on aime ce que l'on connaît et on protège ce que l'on aime ». Et l’équipe du Biodôme a mis toute son énergie pour faire en sorte que ce soit le cas…

PHOTO Shutterstock/southmind

DE L’AUTRE CÔTÉ

La Bio-machine, nouvelle expérience du Biodôme, propose de découvrir l’envers du décor. Comment fait-on hiberner les tortues de l’Érablière des Laurentides en hiver ? Comment se déroule un examen vétérinaire ? Comment encourager le comportement naturel des animaux ? Grâce à 23 stations interactives, comprenant des jeux, des vidéos ou des objets, il est maintenant possible d’en savoir plus sur les trucs

et astuces déployés pour assurer les soins, l’alimentation et le bien-être général des plantes et des animaux. Aussi, grâce au jeu informatique « Mission : opérateur du Biodôme », les visiteurs peuvent se mettre dans la peau d’un opérateur et s’assurer du maintien des meilleures conditions d’eau, d’air et de lumière dans les milieux de vie.

À LA RECHERCHE DES FRUITS ET DES LÉGUMES PERDUS

• PAR VALÉRIE LEVÉE

De la viande, des fruits et des légumes, mais pas de céréales, ni de produits laitiers, et surtout pas de produits transformés.

Voilà les grandes lignes du régime « paléo », qui prône un retour à l’alimentation de nos aïeuls préhistoriques. Sauf que les fruits et légumes de la préhistoire, métamorphosés par les pratiques agricoles, n’ont pas grand-chose à voir avec ceux que nous dégustons aujourd’hui !

Retour dans le temps pour découvrir les ancêtres de la banane, de la citrouille et du maïs.

↑ La banane que l'on achète à l'épicerie n'a rien à voir avec son ancêtre que l'on retrouve encore à l'état sauvage. (à gauche) / Le téosinte est l'ancêtre de notre maïs. (à droite)

LE FRUIT D’UNE HERBE

Contrairement aux apparences, le bananier n’est pas un arbre, mais bien une herbe géante ! Originaire d’Asie, il est cultivé depuis 7 000 ans en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Mais les bananes de la préhistoire n’avaient pas l’apparence ni la saveur de leurs descendantes modernes. Tout comme les bananes sauvages qui poussent encore en Asie, elles étaient pleines de graines et peu charnues. Rien à voir avec notre banane cultivée.

Ces anciennes bananes avaient cependant l’avantage d’être fertiles. Comme les cultivateurs en avaient plusieurs espèces sous la main, ils ont pu faire des croisements. Au fil du temps, ils ont obtenu des bananes plus charnues, qu’ils ont évidemment sélectionnées pour leur consommation et dont ils ont retenu les graines pour la reproduction. Or, ces croisements ont aussi conduit à un fruit qui se développe à partir de la fleur femelle, sans qu’elle soit fécondée (parthénocarpie).

La banane moderne, sans graines, était née. Mais elle nécessite l’intervention humaine pour la multiplier car elle est stérile !

CITROUILLES ET AUTRES COURGES

Courgettes, citrouilles, courges spaghetti, courges cou droit, pâtissons… Inutile de les chercher dans un menu préhistorique : ces variétés n’existaient pas. Malgré leurs formes, couleurs et goûts différents, elles proviennent tous d’un même ancêtre, Cucurbita pepo, qui poussait au Mexique et dans le sud des États-Unis.

Les fruits de cette espèce ancestrale n’étaient que de petites boules de quelques centimètres, à la chair coriace, amère et fibreuse. C’était plutôt pour leurs graines que les chasseurs-cueilleurs de jadis les ramassaient et qu’ils se sont mis à les cultiver, il y a 10 000 ans, comme en attestent des restes de courges retrouvés dans des grottes du Mexique. Quelque 5 000 ans plus tard, des Autochtones des États-Unis ont aussi commencé à en cultiver. Dans les deux cas, les cultivateurs ont eu des millénaires pour sélectionner les courges pour leur grosseur, leur goût, leur forme, leur couleur…

C’est ainsi qu’au XVIe siècle, la courge est arrivée en Italie à bord des bateaux revenant du Nouveau Monde et qu’au XIXe siècle, les Italiens ont sélectionné la courgette. Cette petite courge allongée et verte est bien modeste devant sa sœur, la grosse citrouille orange, mais son succès lui a fait faire le tour du monde, si bien qu’elle est revenue en Amérique.

PHOTO D'Hont, Angelique CIRAD
PHOTO John Doebley

DU TÉOSINTE AU MAÏS

C’est aussi au Mexique que des chasseurs-cueilleurs ont commencé à cultiver le téosinte, l’ancêtre du maïs. Mais pas question pour eux de faire des épluchettes de téosinte, car les grains n’en étaient pas sucrés et les épis étaient minuscules !

En fait, le téosinte, qui pousse encore à l’état sauvage au Mexique aujourd’hui, est tellement différent du maïs qu’il est difficile de croire qu’il en est l’ancêtre. Au lieu d’une tige forte et unique portant un épi de plusieurs centaines de gros grains, le téosinte est ramifié et porte de nombreux épis constitués d’une poignée de petits grains durs enveloppés dans une coque. Les chasseurs-cueilleurs broyaient-ils ces grains en farine ? En aspiraient-ils les sucres contenus dans la moelle de la tige ?

Mangeaient-ils les fleurs ? Ou faisaient-ils fermenter cette moelle pour en faire une boisson alcoolique ? Toujours est-il que les premiers cultivateurs ont sélectionné les plants les plus intéressants et les vestiges archéologiques montrent qu’il y a 9 000 ans, ce qu’ils cultivaient n’était plus du téosinte, mais du maïs.

Du Mexique, le maïs a voyagé avec l'humain de l’Argentine au Canada, puis dans le reste du monde, et s’est décliné en une multitude de variétés adaptées à autant de climats. Si les épluchettes de blé d’Inde sont possibles aujourd’hui, c’est parce que le grain de maïs a perdu sa coque et que sa teneur en sucre a augmenté suite à une mutation génétique.

UN JARDIN À CROQUER

JARDIN BOTANIQUE

26 JUIN AU 30 AOÛT

Si la beauté du Jardin botanique se voit à première vue, elle se goûte aussi ! C’est ce qui a inspiré notre équipe à créer l’événement « Un jardin à croquer ».

Ainsi, tout l’été, les saveurs du Jardin de Chine, du Jardin japonais, du Jardin des Premières-Nations et de la Maison de l’arbre vous en mettront plein les papilles !

À VOTRE TOUR DE CULTIVER LES PLANTES ANCIENNES

• PAR VALÉRIE LEVÉE

Si vous voulez voir à quoi ressemble le téosinte, rendez-vous au potager d’Amérique-latine, au Jardin des plantes utiles. Il est cultivé par Isabelle Paquin, horticultrice responsable du Jardin des plantes utiles. Il y pousse des plantes alimentaires exotiques comme la poire-melon, la morelle de balbis, le quinoa, le pipicha… Et dans le potager africain adjacent poussent le gombo, le gboma, le niébé… et des arachides ! Oui, ces plantes des pays chauds se plaisent à Montréal ! « L’été est court, mais il est chaud et humide. En démarrant les plants en semis, on peut cultiver ces plantes », confirme Isabelle Paquin.

Les immigrants, heureux de retrouver des plantes de leur pays, pourraient vouloir les cultiver chez eux, comme le fait Hamidou Horticulture avec des aubergines africaines, du coton et aussi des légumes anciens.

D’ailleurs, cultiver des plantes ancestrales revêt un parfum d’exotisme en faisant redécouvrir des saveurs oubliées. Ceux qui veulent se lancer peuvent trouver des conseils sur le blogue Potager d’antan et des graines dans les bibliothèques de semences comme le Santropol Roulant et la bibliothèque de semences Atwater, à Montréal, ou Semences du patrimoine, à l’échelle canadienne. Isabelle Paquin se veut rassurante : les plantes ancestrales se cultivent comme les plantes d’aujourd’hui. Elle suggère de commencer par les plus faciles, comme les haricots ou les pois. Et tant qu’à cultiver des plantes anciennes, pourquoi ne pas en reprendre la pratique ancestrale des trois sœurs en associant le maïs, le haricot et la courge, comme le faisaient les peuples autochtones ?

Le maïs, semé en premier, servira de tuteur au haricot grimpant et le feuillage de la courge protégera le sol de la sécheresse et empêchera les mauvaises herbes de pousser.

PHOTO Shutterstock/Mal

À LA RESCOUSSE DES MILIEUX HUMIDES URBAINS

Tourbières, marais, marécages… les milieux humides sont parmi les écosystèmes les plus riches et productifs de la planète. Grâce aux ressources qu’ils abritent et aux fonctions qu’ils soutiennent, ces milieux nous fournissent de nombreux services écologiques. En zones urbaines et périurbaines, ils agissent comme des bassins de rétention naturels en filtrant et en purifiant une partie des eaux de ruissellement. Ils permettent aussi de diminuer les surcharges d’égouts en retenant les eaux de pluie, tout en offrant un habitat pour la biodiversité citadine vulnérable. Ils sont aussi perçus comme des îlots de fraîcheur esthétiques et accueillent de nombreuses activités ornithologiques et récréatives. Cependant, ces écosystèmes sensibles peuvent rapidement être menacés par des perturbations d’origine humaine ou naturelle.

Stéphanie Pellerin est chercheuse au Jardin botanique de Montréal et professeure associée au Département des sciences biologiques de l’Université de Montréal. Elle tente de comprendre comment différentes perturbations influencent l’évolution des communautés végétales des milieux humides urbains. La scientifique a notamment remarqué que l’urbanisation, en asséchant les milieux humides, affectait leur diversité floristique en permettant notamment l’introduction d’espèces de milieux terrestres, souvent exotiques. Les milieux humides sont alors plus diversifiés, mais les nouvelles plantes qui s’y trouvent n’assurent plus les mêmes fonctions écologiques, de sorte que leur rôle est compromis.

Le but des travaux de la Dre Pellerin est de comprendre le fonctionnement de ces milieux dans le temps et d’ainsi prédire leur évolution. Ses études permettent alors de concevoir des plans de gestion adaptés aux milieux humides urbains et d’aider à la préservation de la diversité végétale qu’ils hébergent. Chaque milieu humide est vu comme un maillon d’un réseau dynamique d’écosystèmes interconnectés, chacun apportant une fonction complémentaire aux autres.

Dans ce contexte, la chercheuse tente d’identifier les sites à conserver, à restaurer, à recréer ou à laisser tels quels. En prenant en compte les changements climatiques qui assécheront davantage ces écosystèmes, Stéphanie Pellerin veut ainsi prévoir si le réseau de conservation établi sera toujours optimal dans le futur. En effet, certains milieux humides n’ont peut-être pas particulièrement d’effets bénéfiques pour les villes aujourd’hui, mais leur impact sera peut-être significatif dans 10, 20 ou 50 ans.

Sachant que les milieux humides sont parmi les écosystèmes les plus menacés à l’échelle mondiale, les travaux de la Dre Pellerin permettront d’établir des bases solides pour leur préservation. Un plan de conservation bien planifié pour ces milieux permettrait par exemple de réduire les risques d’inondation, qui sont une menace en croissance pour les riverains du Québec.

UN CENTENAIRE REMARQUABLE POUR LA RECHERCHE FRANCOPHONE

PAR SYLVIE GOULET

En 2020, l’Institut de recherche en biologie végétale (IRBV) célébrera ses 100 ans ! Un anniversaire exceptionnel, puisqu’il n’existe que très peu d’instituts de recherche francophone au Canada. Issu d’un partenariat unique entre l’Université de Montréal et le Jardin botanique, l’IRBV est aujourd’hui un centre d’excellence en recherche et enseignement sur la biologie végétale qui comprend 21 chercheurs et plus de 180 étudiants universitaires. Le Centre sur la biodiversité, qui vise les plus hauts standards en recherche et en formation et sensibilise aussi le grand public aux enjeux majeurs liés à la biodiversité, s’est ajouté à ce partenariat en 2011. Cette fructueuse synergie repose à la fois sur une expertise scientifique unique, reconnue à l’échelle internationale, et sur une mise en valeur de la recherche au Jardin botanique, qui rejoint chaque année près d'un million de visiteurs. Le frère Marie-Victorin, fondateur du Jardin botanique et de l'Institut botanique de l’Université de Montréal en 1920, serait très certainement fier du chemin parcouru !

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LE PETIT MONDE DE L’ASCLÉPIADE

• PAR MARIE-ÈVE ANDRÉ ET LUCILE PIC

Au cours de leur histoire évolutive, insectes et végétaux ont tissé d’intimes relations, entre eux et avec le monde qui les entoure.

L’asclépiade, dont il existe une douzaine d’espèces au Canada, étonne par l’efficacité de ses adaptations pour freiner l’impact des herbivores sur sa croissance. Latex gluant, molécules toxiques, tous les moyens sont bons pour éviter d’être dévorée !

À leur tour, quelques insectes ont réussi à contrer ses défenses.

C’est ainsi que l’asclépiade et sa mini communauté s’influencent mutuellement : une coévolution complexe qui se façonne depuis des millions d’années…

LE LATEX

En guise de protection, l’asclépiade produit un latex collant et visqueux qui s’écoule copieusement au moindre dommage à ses feuilles ou à ses tiges. Par exemple, si la plante est grignotée par un insecte, un flot abondant de latex dégouline immédiatement sur l’herbivore et adhère à ses mandibules ou à ses pattes… Peu pratique quand on veut casser la croûte ! Bien des insectes choisissent donc de poursuivre leur quête alimentaire ailleurs.

LES COMPOSÉS TOXIQUES

Les tissus de l’asclépiade contiennent des composés toxiques nommés « cardénolides ». En plus de leur goût amer, ces molécules ont des effets désagréables lorsqu’ils sont ingérés par les animaux : palpitations cardiaques, nausées, ralentissement de croissance, etc. Les cardénolides sont présents en différentes concentrations dans plusieurs parties de la plante, des racines aux feuilles, en passant par les tiges. Cela dit, c’est le latex qui en contient le plus ! Il est ainsi d’autant plus efficace pour repousser les mangeurs de feuilles.

PHOTO Espace pour la vie
(Sonya Charest)

L’ADAPTATION À LA TOXICITÉ

Quelques insectes ont développé une résistance aux composés toxiques. Ils tolèrent les cardénolides et ressentent peu d’effets physiologiques à la suite de leur consommation. D’ailleurs, certains insectes sont de grands spécialistes de l’asclépiade et ne se nourrissent d’aucune autre plante. C’est le cas de la chenille du monarque, mais aussi de quelques autres insectes, par exemple la chrysomèle, le longicorne et l’arctiide de l’asclépiade. En outre, ces insectes vont jusqu’à emmagasiner les cardénolides dans leur propre corps pour devenir eux-mêmes toxiques. Ils font d’une pierre deux coups : se nourrir et se protéger des prédateurs.

LE NECTAR

Le nectar des fleurs d’asclépiade contient une faible concentration de cardénolides. Il est donc consommé par un plus grand nombre d’espèces que les feuilles. Des pollinisateurs généralistes comme les bourdons y butinent de temps à autre. Le monarque adulte se nourrit aussi du nectar de l’asclépiade, mais pas exclusivement, à la différence de la chenille. On peut ainsi l’observer butinant sur une myriade d’autres fleurs.

AFFICHER SES COULEURS

Les insectes qui accumulent les cardénolides dans leur corps affichent souvent des couleurs vives et des motifs contrastés comme des rayures ou des taches. Ces couleurs dites « aposématiques » permettent de signaler leur toxicité à des prédateurs potentiels. Ces derniers apprennent rapidement à reconnaître les couleurs éclatantes de ces insectes pour mieux les éviter.

PARTEZ EN MISSION !

Vous désirez vous familiariser davantage avec cette plante et la surprenante communauté d’insectes qui l’habite ? Participez à Mission monarque ! Il s’agit d’un programme de science participative coordonné par l’Insectarium. Il suffit de trouver de l’asclépiade, de compter les œufs et les chenilles de monarque qui s’y trouvent et de consigner vos observations sur mission-monarque.org. C’est simple, amusant et très utile pour étudier la reproduction du monarque. En effet, les données sont analysées par les scientifiques pour mieux comprendre l’habitat de reproduction de ce papillon emblématique.

PHOTO André Sarrazin
PHOTO André-Philippe Drapeau-Picard
PHOTO André Sarrazin
PHOTO Espace pour la vie (Sonya Charest)
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André Sarrazin

LA VILLE, À LA SOURCE D’ADAPTATIONS SURPRENANTES

• PAR FANNY ROHRBACHER

En bâtissant des villes, l’humain modifie l’environnement et crée des habitats uniques. Certains végétaux, oiseaux, insectes tirent parti de ces changements de façon impressionnante. Zoom sur quelques espèces.

UNE OPPORTUNITÉ POUR CERTAINES ESPÈCES VÉGÉTALES ?

D’après certaines études, le pissenlit, l’herbe à puce et l’herbe à poux tireraient bénéfice de l’augmentation du CO2 dans l’air. Absorbé par les végétaux lors de la photosynthèse, le CO2 présent en plus grande concentration dans les villes risque d’augmenter considérablement le nombre d’inflorescences et de semences du pissenlit d’ici la fin du XXIe siècle. D’autre part, l’herbe à puce deviendrait plus toxique en développant une forme plus allergénique d’urushiol (la substance responsable d’une douloureuse inflammation de la peau). L’herbe à poux produirait également plus de pollen, ce qui la rendrait plus allergène.

DES HIRONDELLES DE HAUTE VOLTIGE

Le cas de l’hirondelle à front blanc est un exemple typique d’adaptation urbaine. Celle-ci utilise les ponts d’autoroute et les viaducs comme sites privilégiés pour construire son nid. En se retrouvant en bordure de route, l’hirondelle vit au plus près du danger de collisions avec des véhicules. En quelques décennies, les individus ayant des ailes plus courtes et arrondies ont été favorisés et se sont multipliés. Grâce à ces ailes, l’hirondelle réalise des décollages verticaux plus rapides et des virages plus efficaces afin d'éviter les véhicules. Cette évolution lui a permis de survivre bien mieux que ses congénères aux ailes plus longues, moins habiles.

UN DÉFI DE TAILLE

POUR CERTAINS INSECTES

Plus chaud que la campagne, le milieu urbain influence une caractéristique clé des insectes : leur taille, que ce soit à la hausse pour certaines espèces ou à la baisse pour d’autres. En effet, lorsque la température est plus élevée, les insectes dépensent plus d’énergie pour vivre. Par conséquent, certains d’entre eux, comme des scarabées et des charançons, grandissent moins s'ils ne peuvent pas compenser par leur diète les pertes énergétiques liées à leur croissance. À l'inverse, la hausse des températures associée à des saisons de croissance plus longues pourrait permettre à d’autres espèces d'obtenir plus de ressources et de grossir, comme le puceron russe du blé. Ces deux mécanismes peuvent agir en même temps, se compenser ou s’annuler. Face à des insectes plus petits ou plus grands, comment évolueront leurs prédateurs ? Seul l’avenir le dira.

DES OISEAUX URBAINS MOINS FAROUCHES

Dans toutes les villes du monde, les oiseaux tolèrent de mieux en mieux la proximité des humains. Cette adaptation comportementale est même parfois inscrite dans leur ADN, et donc transmissible aux générations suivantes. Chouettes des terriers argentines, merles communs européens, cygnes noirs australiens… Face à l'arrivée d'un piéton, ces oiseaux devenus urbains fuient plus tardivement et sur une moins longue distance que leurs congénères volatiles campagnards. La foule urbaine influencerait l'évolution de leurs gènes d’anxiété et de méfiance, jusqu’à diminuer toute crainte envers d'éventuelles menaces.

TISSER SA TOILE EN VILLE

En milieu urbain, certaines araignées n’ont plus peur de sortir de leur petit coin sombre. La malmignatte des maisons, cousine de la veuve noire, semble s’être adaptée à la lumière de l’éclairage public. Alors que les jeunes araignées campagnardes évitent les lieux éclairés et tissent leurs toiles dans la pénombre, les juvéniles urbaines les tissent à la lumière. Ce comportement leur permettrait de capturer les nombreuses proies attirées par la lumière, telles que les papillons de nuit, un mets de choix pour les malmignattes. Cette adaptation à la lumière artificielle s’avérerait maintenant largement ancrée dans l’ADN de ces populations spécifiques. Un comportement qui ne semble toutefois pas être partagé au sein du grand groupe des araignées.

HUMAIN DES VILLES, HUMAIN DES CHAMPS

Rapide et persistante, l’urbanisation influence l'évolution de notre espèce. Une sélection naturelle peut s’opérer à la suite d’épidémies : des populations qui vivent depuis longtemps dans des zones urbaines sont mieux adaptées pour résister naturellement à certaines infections, comme la lèpre ou la tuberculose. Dans le futur, la pollution extrême des mégalopoles pourrait également jouer un rôle sur notre génome, en activant ou en désactivant certains de nos gènes ou en engendrant des mutations. Par exemple, un quart des Argentins de San Antonio de los Cobres sont actuellement porteurs de mutations qui leur permettent d'assimiler l'arsenic présent dans leur eau potable. En bref, à travers le monde, les génomes des populations évoluent et continueront d'évoluer par rapport à la vie urbaine.

L’AVENIR DE LA PLANÈTE GAGNE DES NUANCES DE BLEU

• PAR ISABELLE BURGUN

Sommes-nous capables de réparer nos erreurs en matière d’environnement ? De nombreuses initiatives prouvent que l’humain peut remettre au beau fixe certains indicateurs. Il n’y a qu’à penser à l’amélioration de l’état de la couche d’ozone. Cette couche qui absorbe le rayonnement solaire et nous protège des ultraviolets affichait dans les années 80 un trou de deux fois et demie la taille du Canada ! Les responsables ? Les chlorofluorocarbones (CFC), des composés chimiques utilisés pour la réfrigération, le nettoyage ou les aérosols. Depuis le Protocole de Montréal adopté en 1987, et particulièrement depuis les années 2000, la couche guérit : on note une amélioration de 1 à 3 % de son épaisseur par décennie.

L’engagement actuel de 196 États de la planète à réduire leurs émissions de ces substances destructrices donne l’espoir de voir la couche d’ozone se régénérer entièrement dans l’hémisphère nord et les latitudes moyennes d’ici 2030 et d’ici 2060 dans les régions polaires.

Même chose pour les pluies acides, en forte diminution. Ces précipitations faisaient dépérir de larges forêts de conifères d’Amérique du Nord en raison de leur acidité issue de l’augmentation du dioxyde de soufre (SO2) libéré par les combustibles fossiles dans l’atmosphère. Les mesures prises dès le début des années 80 pour munir les véhicules de pots catalytiques, la fermeture des usines de charbon et la réduction de la teneur en soufre des carburants ont fait reculer considérablement ce problème et ses conséquences nuisibles à l’environnement.

DES PLUMES ET DE L’AIL DES BOIS

Plus localement, notre liste des espèces menacées diminue. Le faucon pèlerin, connu pour sa vulnérabilité depuis 40 ans, a retrouvé des plumes dans tout le Canada. L’implantation d’un programme d’élevage destiné à le réintroduire au sein de son ancien écosystème ainsi que l’interdiction du DDT (dichlorodiphényltrichloroéthane), un pesticide toxique, redonne des ailes à ce petit prédateur du ciel.

Même l’ail des bois, emblème québécois des espèces menacées, connaît un nouveau printemps grâce à la sensibilisation écologique des gourmets des sous-bois et à l’implantation d’un programme d’éducation et de restauration de l’ail des bois. Le Québec s’est aussi doté de l’une des premières lois canadiennes sur les espèces vulnérables et menacées en 1989, qui protège l’ail des bois de l’exploitation et de la destruction.

Mené par le Biodôme de Montréal, le programme Sem’Ail se déploie dans six régions québécoises très affectées par le déclin de l’ail des bois : Montérégie, Laurentides, Lanaudière, Outaouais, Montréal et Laval. Ce programme de conservation qui fait appel à la participation des citoyens a permis de semer un million de graines et de replanter 440 000 bulbes dans les sous-bois. De plus, un volet éducatif du programme se poursuit au sein des écoles pour sensibiliser les jeunes et en faire des acteurs de conservation puisque ceux-ci vont semer en forêt pour créer de nouvelles colonies dans leur localité.

L’ATMOSPHÈRE ET LES SOLS

Le rapport du Groupe Intergouvernemental d’Experts sur le Climat (GIEC), publié à automne 2018, énonce des solutions pour limiter le réchauffement à moins de 1,5 °C. Certaines sont déjà mises en œuvre pour nous aider à sortir de l’impasse climatique : rendre les villes et les communautés durables en misant sur le verdissement et la diminution d’îlots de chaleur, favoriser la préservation de l’eau de qualité et l’assainissement des eaux, choisir des énergies propres et renouvelables, réduire la pauvreté et les inégalités, mais aussi valoriser l’éducation et la sensibilisation aux questions environnementales.

Captage et stockage du carbone, afforestation ou reforestation : le GIEC met aussi de l’avant des solutions de géo-ingénierie destinées à modifier la composition de l’atmosphère afin de tempérer son réchauffement. Même s’il vaut tout de même mieux limiter la perte de diversité forestière et la déforestation, replanter des arbres dans des zones où il n’y en a pas (afforestation) contribuerait à compenser l’émission de 1 à 7 gigatonnes de CO2 par an d’ici 2050 grâce à 500 millions d‘hectares supplémentaires d’arbres plantés.

Le GIEC a même présenté un « rapport spécial » sur le changement climatique et l’usage des sols qui met de l’avant des solutions pour prendre soin de nos sols et les rendre résilients face aux aléas climatiques. La régénération des sols vise ainsi à absorber le carbone actuellement présent dans l’atmosphère, atténuant ainsi le réchauffement dû aux GES.

Le mouvement Régénération Canada propose lui aussi différentes manières de régénérer les sols en privilégiant les cultures de couverture, destinées à conserver l’humidité et à réduire les mauvaises herbes, ou encore le retour de certains gestes d’autrefois : éviter de retourner le sol pour moins l’épuiser, y cultiver des plantes comestibles et privilégier une grande variété de plantes.

Aujourd’hui, nous disposons tous d’outils de changement pour redonner des nuances de bleu à notre avenir. À nous de nous les approprier afin d’agir de manière positive pour notre planète !

PHOTO Shutterstock/Carlos Amarillo
De l'ail des bois.

ORIGINES

PLANÉTARIUM RIO TINTO ALCAN

TOUTE L'ANNÉE

RETOUR AUX SOURCES

L’exposition Origines témoigne de 4,5 milliards d’années d’évolution de notre planète, en présentant l’extraordinaire richesse géologique, végétale et animale dont elle est l’hôte.

Du chaos originel jusqu’à l’émergence et l’explosion de la vie, les photographies nous guident sur les chemins de la biodiversité. Éclairs, aurores boréales, myriades d’étoiles, torrents incandescents, fontaines de lave, séismes… Autant de phénomènes qui témoignent de la formidable énergie qui continue d’animer notre planète.

Les œuvres saisissantes présentées sont une réalisation du photographe Olivier Grunewald, en collaboration avec la journaliste Bernadette Gilbertas. L’exposition sera présentée à partir du 28 janvier 2020, au Planétarium Rio Tinto Alcan.

L’ÉCO-ANXIÉTÉ …

• PAR MARION SPÉE

Récemment, une nouvelle notion a émergé dans les médias. De plus en plus de gens sentent une épée de Damoclès suspendue au-dessus des nuages. Ils se sentent déprimés, impuissants face aux changements climatiques en cours et à venir. On entend parler d’angoisse climatique, de dépression verte, parfois de burn-out écologique, mais le terme qui semble s’imposer, c’est l’éco-anxiété.

Si les scientifiques qui étudient les changements climatiques sont parmi les premiers à avoir fait part de la fragilité de leur santé mentale, le phénomène touche aujourd’hui les citoyens.

« Dans ma pratique clinique, je ne voyais pas ce genre de cas il y a encore un an ou deux, affirme Joe L. Flanders, psychologue. Maintenant, j’en ai plusieurs ».

Les plus jeunes, plus susceptibles de subir les retombées de la poussée de fièvre de la planète, semblent plus nombreux à souffrir de cette dépression verte. D’ailleurs, c’est après avoir visionné un documentaire sur les ours blancs que la jeune suédoise Greta Thunberg a sombré… avant de devenir la figure de proue de la jeunesse en rébellion écologique.

Mais de quoi s’agit-il exactement ? Quand on parle d’anxiété, on parle d’une montée d’hormones de stress qui prépare le corps

à se défendre. « Face à un lion, par exemple, la peur fait en sorte que les systèmes biologiques vont s’activer et nous faire déguerpir. Là c’est un peu la même chose, sauf que la menace est plus abstraite, bien qu’elle reste importante pour notre survie », détaille Joe L. Flanders.

L’Association américaine de psychologie (APA) l’évoque dans son rapport de mars 2017 qui se consacre aux conséquences des changements climatiques. Selon la définition, l’éco-anxiété désigne une « peur chronique d’un environnement condamné ».

Qui dit peur, dit réaction, alors peut-être faudrait-il y voir l’occasion d’un élan individuel ou collectif… Dans tous les cas, que faut-il faire pour ne pas craquer face à la hausse des températures, à la fonte des glaciers, à la disparition des espèces ? Agir, agir, agir. « Ne rien faire serait pire », assure Joe L. Flanders. C’est en effet le principal remède, pour sentir que l’on a un certain pouvoir sur la situation et ainsi faire diminuer cette anxiété. Agir selon ses possibilités, en fonction du temps dont on dispose, à son échelle : militer, écrire, parler, s’impliquer dans son quartier. Ou identifier les secteurs où on peut avoir une incidence : consommation, plastique, déchets, transport…

… ET LES GESTES À

POSER POUR LA CONTRER

MUTATION VERTE

Verdir son balcon, son mur, sa rue, créer un jardin ou un potager : ce sont des gestes concrets pour préserver la biodiversité et favoriser la venue des pollinisateurs. Le programme Mon Jardin Espace pour la vie peut vous aider. En prime, on profite aussi des avantages des végétaux, qui sont capables de séquestrer du CO2 et de produire de l’O2, de capturer les contaminants et les particules fines, de créer des îlots de fraîcheur.

Planter un arbre sur son terrain est par exemple un geste très significatif puisqu’un petit arbre d’un diamètre de 8 à 15 cm qui pousse doucement peut séquestrer 16 kg de CO2 tous les ans. Quand il atteint son niveau de croissance maximale, ce chiffre passe à 360 kg. Et s’il est proche de la maison, un arbre peut réduire jusqu’à 30 % les besoins en climatisation.

CADEAUX ÉCOLOS

Offrir des expériences pour créer des souvenirs mémorables (sorties culturelles, sportives, gastronomiques, etc.), donner de son temps (bons de gardiennage, de l’aide pour pelleter, etc.) ou encore redonner vie à des objets existants : des gestes simples pour remplacer l’achat d’objets neufs pour les fêtes, les anniversaires, Noël.

De plus, utiliser des emballages en tissus, en papier brun recyclé ou encore réutiliser d’anciens emballages permet de réduire énormément les déchets. Plus de 500 000 tonnes de papier d’emballage et de sacs cadeaux sont jetés tous les ans au Canada. Le hic, c’est que ces sacs, tout comme les rubans qui les décorent et le ruban adhésif, ne vont pas au recyclage.

BIO ET LOCAL

Opter pour un panier bio et local, c’est manger au rythme des saisons, encourager une agriculture sans produits de synthèse, mais aussi favoriser un circuit court en approvisionnement.

Les aliments parcourent en moyenne 2 500 km entre leur lieu de cueillette et votre assiette (soit l’équivalent d’un trajet entre Montréal et La Havane à Cuba), alors l’option locale est un sacré geste pour contribuer à réduire les gaz à effet de serre.

Acheter des produits québécois, c’est aussi favoriser l’économie d’ici. Selon le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), si chaque consommateur achetait 30 $ de produits québécois en plus par an, l’économie québécoise bondirait d’un milliard de dollars en cinq ans.

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CONTENANT RÉEMPLOYÉ

Choisir une bouteille d’eau réutilisable, c’est économiser de l’eau et de l’énergie ! Cela évite d’avoir recours aux bouteilles de plastique. La fabrication de chacune d’elles exige 3 litres d’eau, 0,25 litre de pétrole, émet 0,09 kg de CO2 et nécessite jusqu’à 2 000 fois plus d’énergie que le traitement et l’acheminement de l’eau du robinet. En plus, une bouteille de plastique met jusqu'à 1 000 ans pour se décomposer.

Pour le café, l’une des boissons préférées des Canadiens, on peut opter pour des tasses réutilisables et oublier les gobelets jetables… qui ne sont pas recyclables. En effet, les gobelets en carton sont enduits d’une pellicule imperméabilisante et coiffés d’un couvercle de plastique. En buvant un café moyen (16 oz ou 475 ml) dans une tasse de voyage en acier inoxydable, par exemple, on rejette cinq fois moins de CO2 qu’avec ces tasses jetables.

TRANSPORT ACTIF OU COLLECTIF

Privilégier le transport actif, le transport collectif, l’autopartage, le covoiturage ou encore le véhicule électrique… et éviter la voiture solo, c’est considérablement réduire les émissions de gaz à effet de serre. Dans le secteur du transport, les véhicules solos sont responsables de plus de 75 % de ces émissions.

Par exemple, sur de courtes distances, les vélos sont plus rapides que les automobiles et permettent d’éviter les embouteillages. La moitié des travailleurs en ville pourraient se rendre au travail en vélo… puisqu’ils habitent à moins de 8 km de distance. Pour des trajets plus longs, un véhicule d’autopartage peut remplacer 9 à 13 véhicules personnels et un autobus peut en substituer 40 à 50.

Dès sa réouverture, le Biodôme offrira une vitrine à des acteurs de changements. Vous pourrez ainsi découvrir des organismes ou individus qui œuvrent pour la protection de l’environnement.

Pour encore plus d’idées, vous pouvez visiter les sites d’Equiterre (equiterre.org), de Unpointcinq (unpointcinq.ca) ou de Ça commence par moi (cacommenceparmoi.org)

PARLONS CONSERVATION

• PAR MARION SPÉE

Il fut un temps où les ménageries exhibaient des animaux sauvages et exotiques et collectionnaient toutes sortes d’espèces pour émerveiller les visiteurs. « Aujourd’hui, les institutions zoologiques modernes cherchent toujours à sensibiliser les gens à la beauté de la nature et des animaux, mais elles ont aussi pour vocation de participer au maintien de la biodiversité et à la conservation des espèces en péril », analyse Emiko Wong, cheffe de la division Collections vivantes et Recherche du Biodôme de Montréal. On a fait du chemin.

↓ La grenouille dorée du Panama.

Des normes ont été développées par des organismes indépendants pour offrir aux espèces sauvages les plus hauts standards en matière de garde en captivité, afin de maintenir leur intégrité, leur santé et leur bien-être. Au Canada, c’est l’AZAC (Aquariums et zoos accrédités du Canada) qui s’en charge. La mission est triple : éducation, recherche et conservation.

Au Biodôme, par exemple, le programme de conservation de base vise les espèces qui font partie d’une gestion de population captive, en collaboration avec toutes les autres institutions qui en possèdent. L’idée, c’est de maintenir une population génétiquement saine au gré des transferts et des échanges entre institutions. « On évite par exemple de faire s’accoupler des individus avec une génétique trop proche, on s’assure au contraire qu’il y ait un brassage suffisant », détaille Emiko Wong. L’autre objectif de ce genre de programme, c’est de constituer une sorte de « réserve » de plusieurs espèces qui pourrait servir dans le cas d’une catastrophe écologique.

Il y aussi des programmes de conservation in situ, au Biodôme, tout comme au Jardin botanique et à l’Insectarium, qui tentent de remédier au déclin de populations d’espèces en péril. Dans le cadre de ces programmes, une partie du cycle de vie se fait dans les locaux ou dans les serres, puis les individus sont réintroduits dans la nature.

AU BIODÔME : LA GRENOUILLE DORÉE

DU PA NAMA

La grenouille dorée du Panama (Atelopus zeteki) est un symbole écologique et culturel du pays. Mais la dernière fois qu’elle a été répertoriée à l’état sauvage, c’était en 2009. Alors le Biodôme, avec 50 autres institutions zoologiques aux États-Unis et au Canada, s’est engagé à la protéger en participant au maintien d‘une population génétiquement saine.

Le défi est surtout environnemental. « Les grenouilles viennent des montagnes et pondent dans des ruisseaux dans lesquels il y a beaucoup de courant. En milieu zoologique, on doit pouvoir recréer des conditions optimales pour que les femelles pondent : reproduire une chute, un mouvement d’eau perpétuel… », précise Roxan Ouimet, technicienne en soins animaliers. En pratique, les couples se mettent en amplexus, c’est-à-dire que le mâle s’accroche sur le dos de la femelle. Une fois qu’elle a trouvé un lieu adéquat, elle libère ses œufs et le mâle les féconde. Le risque, si elle ne trouve pas l'endroit approprié pour pondre, c’est que les œufs restent dans l’abdomen… et qu’elle en meurt.

Aujourd’hui, il existe plus de 1 600 grenouilles dorées du Panama en captivité. L’étape ultime, bien sûr, c’est de pouvoir les réintroduire. « Mais d’abord, prévient Roxan Ouimet, il va falloir que les chytrides, ces champignons parasites qui ont fait disparaître les populations de leur habitat naturel, disparaissent à leur tour ».

À L’INSECTARIUM : UN RÉSEAU DE SUIVI DES POPULATIONS D’INSECTES VOLANTS DU QUÉBEC

Dans les régions tempérées du globe, les populations d’insectes chutent dramatiquement. Le Québec n’échappe pas à la règle, mais il n’existe pas d’infrastructures de suivi pour le quantifier. Alors un nouveau projet de surveillance des communautés d’insectes volants a été initié à l’hiver 2018-2019. Le premier du genre dans la province. Le but est d’installer des pièges à insectes pour pouvoir documenter la diversité, l’abondance mais aussi la biomasse de différents groupes d’indicateurs. Plus on en saura sur nos insectes, mieux on pourra les protéger.

« Dans un premier temps, on veut tester la méthodologie et s’assurer qu’elle est simple et efficace, puisque les pièges seront opérés par des collaborateurs volontaires », note l'entomologiste de l'Insectarium, Michel Saint-Germain. Deux sites ont été équipés de pièges capables d’intercepter les insectes au vol : le parc national d’Oka et le parc-nature de la Pointe-aux-Prairies. « Ces pièges capturent les insectes volants qui se déplacent vers le haut quand ils rencontrent un obstacle, comme les mouches ou les guêpes, mais aussi ceux qui au contraire se laissent tomber, comme la plupart des coléoptères ou encore les criquets », précise Michel Saint-Germain.

Traiter ce genre d’échantillons est exigeant en temps et en expertise. Alors, la première étape, c’est de classifier les insectes récoltés par grands groupes et de prendre des mesures de biomasse. « Ce paramètre est un meilleur indicateur que la simple abondance, explique l’entomologiste, puisque l’impact d’un insecte dans l’écosystème est en partie en fonction de son poids ».

L’objectif d’ici trois ans est d’avoir une quinzaine de stations qui fonctionnent chaque année. C’est aussi de couvrir des territoires présentant des menaces plus ou moins marquées pour obtenir un état des lieux précis, par exemple au niveau du degré d’urbanisation ou de l’activité agricole intensive.

AU JARDIN BOTANIQUE : LE

CA REX FAUX-LUPULINA

Le Carex faux-lupulina pousse dans les milieux humides riverains. Au Québec, il a le statut d’espèce menacée, le plus critique qui existe. En 2005, on ne comptait par exemple que 3 populations (des ensembles d’individus) pour un total de seulement une trentaine d’individus.

Pour tenter d’élever ce maigre chiffre, un projet de conservation et de réintroduction a été lancé en 2006. Il s’agissait de faire pousser des semences en serres et de réintroduire les plants dans la nature. « Souvent, quand il est question de plantes rares, les gens croient que la viabilité des graines est faible. Mais, en serre, on a des taux de succès de 98 % », s’enthousiasme la botaniste Stéphanie Pellerin. Ce n’est donc pas difficile de faire pousser le Carex faux-lupulina, mais c’est une autre affaire de le réintroduire. « On n’avait pas encore beaucoup de connaissances sur son habitat préféré au début du projet, alors on a fait beaucoup d’essais-erreurs », poursuit la scientifique. Il faut dire que la plante est capricieuse, elle aime les habitats pas trop ombragés ni trop lumineux, pas trop inondés ni trop peu non plus…

L’équipe peut se targuer aujourd’hui de compter plus de 200 individus dans la nature, soit près de 7 fois plus qu’en 2005, et une dizaine de populations. Les résultats sont très encourageants, le Carex faux-lupulina est sur la bonne voie… et entre de bonnes mains !

← Le carex faux-lupulina.

UN ÉCOGESTE À LA FOIS, TOUS ENSEMBLE

• PAR VALÉRIE LEVÉE

La sauvegarde de l’environnement et les changements climatiques appellent à l’action, mais l’ampleur de la tâche a de quoi figer l’écocitoyen en nous. Voici quatre exemples d’actions citoyennes démontrant au contraire que le pouvoir d’agir est en chacun de nous.

UNE ACTION CONTAGIEUSE

En 1992, Yvon Camirand, enseignant en mathématiques et en sciences, lançait l’activité pédagogique Un arbre – Une vie

Les élèves devaient faire germer un gland et suivre le développement de leur chêne jusqu’à le mettre en terre. Depuis, de nombreuses écoles se sont approprié l’activité pédagogique, si bien qu’en 25 ans, 26 000 arbres ont été plantés ! Si Yvon Camirand a posé le premier geste et continue de promouvoir cette activité, d’autres enseignants la perpétuent et sont la courroie de transmission pour que des milliers de jeunes en sèment à leur tour.

RUELLES À VERDIR

À Montréal, dans le quartier Rosemont, un groupe de résidents mené par David-Alexandre Boutin a transformé le terrain vague mal fréquenté qui jouxtait la place Basile-Patenaude en ruelle comestible. Véritable garde-manger ouvert à tous, il y pousse du maïs, des pommes, des raisins et autres fruits et légumes, sans oublier les plantes nourricières indigènes comme le sureau et l’amélanchier. Les ruelles vertes se multiplient à Montréal et le mouvement s’étend à Québec. Chaque ruelle a son histoire et sa personnalité, insufflées par ses riverains. D’autres ruelles et bouts de terrain abandonnés attendent d’être verdis à leur tour...

DES FRAISES EN MINGANIE !

Loin des grands centres, des citoyens passent aussi à l’action avec audace et imagination. Ainsi est née, sur la Côte-Nord, en 2013, la Coop de solidarité agroforestière de Minganie, Le Grenier boréal. Cette entreprise coopérative récolte en forêt des bleuets, des champignons, de la chicouté, etc. En serre, elle produit des fraises, des tomates, des concombres... Dans un esprit de développement durable, Le Grenier boréal allie activité économique et respect de l’environnement. Si les fraises poussent en Minganie, pourquoi pas ailleurs ?

ILS MARCHENT POUR LE CLIMAT ET LEUR FUTUR

Inspirée par Greta Thunberg, Sara Montpetit, élève à l’école Robert-Gravel, a fondé le mouvement Pour le futur Montréal et Albert Lalonde, élève à l’école Joseph-François-Perrault, l’a rejointe. Depuis le début de l’année 2019, chaque vendredi, ils organisent des marches et d’autres activités pour préserver le climat et leur avenir. Même l’été, car comme ils le disent, la planète ne prend pas de vacances. Catalysés par la présence de la jeune Suédoise, ils étaient des centaines de milliers, tous âges confondus, à lui emboîter le pas dans les rues de Montréal le 27 septembre 2019, et le mouvement se poursuit.

Ce ne sont que quatre exemples parmi tant d’autres. D’ailleurs, l’exposition « À moi d'agir » au Biodôme vous fera découvrir une multitude d’actions environnementales inspirantes. Comme autant d’exemples à suivre, ces écocitoyens agissent chacun à leur manière, en entraînant d’autres dans leur sillage. Et si c’était votre tour, notre tour à tous et à toutes de passer à l’action, de suivre l’exemple ou d’en inventer un autre ?

L’ORIGINE DE L’EAU SUR TERRE

• PAR ANDRÉ GRANDCHAMPS

Indéniablement, la présence de l’eau sur la Terre a été une condition déterminante pour l’apparition de la vie. Mais comment y est-elle arrivée ? Deux modèles tentent d’expliquer cette étape cruciale qui s’est produite environ 150 millions d’années après le début de la formation de notre planète.

EN PROVENANCE DES ENTRAILLES DE LA TERRE

Dans un premier modèle, les géologues et les astronomes émettent l’hypothèse que l’eau serait venue de la Terre elle-même.

Le Système solaire est né il y a 4,56 milliards d’années, lorsqu’un nuage de gaz et de poussière s’est contracté sur lui-même. La grande majorité de la matière s’est alors concentrée au centre du nuage pour former le Soleil. La matière résiduelle, elle, s’est mise à tourner autour du Soleil sous la forme d’un disque à l’intérieur duquel se trouvaient des poussières microscopiques enrobées d’une couche de glace d'eau.

Par collision, les poussières se sont agglomérées et ont grossi pour former des embryons de planètes. La Terre, comme toutes les planètes de notre Système solaire, provient de ces embryons.

L’eau qui enrobait les poussières s’est ainsi trouvée prise dans les roches qui composaient la jeune Terre. Lorsque le magma s’est mis à remonter des profondeurs par le phénomène volcanique, cette eau a elle aussi été poussée à la surface.

La température de la jeune Terre étant élevée à cette époque, l’eau s’est rapidement évaporée pour former une atmosphère. Il a fallu attendre que la température diminue suffisamment et que le magma crée une croûte solide à la surface de notre planète pour que la vapeur d’eau contenue dans l’atmosphère tombe finalement au sol sous forme d’eau liquide.

LA GLACE DES COMÈTES

Une autre hypothèse pourrait, elle aussi, expliquer l’apparition de la précieuse denrée liquide sur notre planète. Certains astronomes avancent que notre eau proviendrait de comètes, ces blocs de roche entourés d’une épaisse couche de glace, tombées sur la surface de la Terre.

Toutefois, cette hypothèse a été mise en doute par l’exploration spatiale, qui a démontré que la signature moléculaire de la glace des comètes est différente de celle de l’eau sur Terre.

L’étude de l’eau contenue dans les météorites primitives, qui se sont formées en même temps que les embryons de planètes, montre qu’elle ressemble à l’eau des océans. Il est donc plus probable que l’eau terrestre provienne de ce type de roche, ce qui soutient la première hypothèse.

↓ L’apparition de l’eau sur Terre n’est qu’une des multiples étapes fascinantes ayant mené à la formation de notre planète bleue. Dès le 28 avril, le Planétarium Rio Tinto Alcan présentera le film « La naissance de la planète Terre », qui lèvera le voile sur cette histoire captivante !

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JARDIN BOTANIQUE

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PANGU, CE GÉANT QUI CRÉA LE MONDE

• PAR SYLVIE GOULET

On raconte qu’avant que le monde n’existe, l’Univers ressemblait à un œuf gigantesque où se mêlaient le Ciel et la Terre. À l’intérieur, tout était chaos et obscurité. Pourtant, Pangu y dormait paisiblement. À son réveil, il ouvrit ses énormes mains et, dans un puissant coup rappelant le tonnerre, il brisa la paroi de cet œuf devenu trop petit pour lui. Tous les éléments figés depuis des milliers d’années se répandirent alors dans tous les sens.

Pangu dut alors les remettre en place. Il commença par tenir le Ciel à bout de bras pour le séparer de la Terre.

À la fin, épuisé par tant d’efforts, il s’effondra. Son corps commença alors à se transformer. Sa chair devint le sol fertile, son sang les fleuves, sa sueur la pluie, ses os les pierres précieuses, sa chevelure les arbres et les plantes, ses yeux le Soleil et la Lune, son souffle le vent, sa voix le tonnerre et les poux et les puces de son corps… les êtres humains.

PHOTO Claude Lafond

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