Hors Série Cannes 2012 (extraits)

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Cannes Thèmes / débats / critiques

2012

hors-série 13 JUIN 2012 • 7,00 €


En couverture : Holy Motors de Leos Carax (© Les Films du Losange)

LES FICHES DU CINÉMA 69, rue du Faubourg Saint Martin 75010 Paris Administration : 01.42.36.20.70 Rédaction : 01.42.36.10.65 Fax : 09.55.63.49.46 .............................................................. PRÉSIDENT Cyrille Latour RÉDACTEUR EN CHEF Nicolas Marcadé redaction@fichesducinema.com RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT SECRÉTAIRE DE RÉDACTION Michael Ghennam .............................................................. ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO François Barge-Prieur, Anne Berjon, Olivier Bouchard, Isabelle Boudet, Iris Brey, Marguerite Debiesse, Patrick Flouriot, Thomas Fouet, Michael Ghennam, Roland Hélié, Cyrille Latour, Cédric Lépine, Nicolas Marcadé, Gaël Martin, Jean-Baptiste Morel, Marine Quinchon, Chloé Rolland. Les commentaires des «Fiches» reflètent l’avis général du comité

.............................................................. ADMINISTRATRICE Chloé Rolland administration@fichesducinema.com TRÉSORIER Guillaume de Lagasnerie CONCEPTION GRAPHIQUE Sébastien Ragel ragels@wanadoo.fr IMPRESSION IRO - Zone industrielle rue Pasteur 17185 Périgny Tél : 05.46.30.29.29 .............................................................. DÉPÔT LÉGAL Juin 2012 COMMISSION PARITAIRE 0315 G 86313 - ISSN 0336-9331 «Les Fiches du Cinéma». Tous droits réservés. Toute reproduction même partielle des textes est soumise à autorisation.

édito

Problèmes de moteur Cannes 2012 restera assurément comme une année grise. D’abord à cause de la pluie, qui s’était bombardée invitée d’honneur, mais également à cause des films, globalement peu propices à l’enthousiasme et calés, eux aussi, sur une météo mitigée et tristounette : pas d’éclaircies aveuglantes, pas d’orages tonitruants. À l’arrivée, c’est une année comme il y en a régulièrement : terne de sa globalité et dominée par une Palme évidente. Ainsi, 2012 sera l’année d’Amour, comme, par exemple, 2003 avait été l’année d’Elephant. À l’ombre de cette Palme totalement incontestable - et d’ailleurs incontestée - un autre film reste mystérieusement sur la touche : Holy Motors de Leos Carax. Mais après tout, peut-il y avoir un palmarès sans son “grand oublié” (rappelons, pour les dernières années, notamment, L’Apollonide, Another Year, Vincere, Un conte de Noël, La Nuit nous appartient, Les Climats, A History of Violence...) ? L’étrangeté, en revanche, vient du fait de revenir de Cannes si peu “pleins”, si peu nourris. On a traversé en accéléré une projection de ce que seront les grandes lignes de l’année cinématographique, et nous n’avons pas vu clignoter grand-chose sur le chemin. Une brume épaisse et grise, quelques réverbères de faible densité, un ou deux phares plus lumineux, et puis voilà. Une compétition en mode mineur, peu d’événements récréatifs réussis, des sélections parallèles qui n’ont pas remonté dans leurs filets des promesses très bouleversantes pour le futur : que dire ? Plus tard dans l’année, certainement, on réévaluera certains films et on tempèrera ce constat. Mais en attendant, même s’il est dans l’ordre des choses qu’il y ait de bons et de mauvais festivals de Cannes, la faiblesse générale de cette édition, l’ennui qu’elle a distillé de façon assez continue, pose tout de même un peu problème. Certains remettent en cause un travail de programmation se complaisant dans le ronron corporatiste. On peut préférer interroger les créateurs eux-mêmes, qui, coincés entre les attendus du “cinéma de festival” et ceux du “cinéma rentable” - tous deux codés au maximum, désormais - semblent être de moins en moins en mesure (ou capables) de formuler des propositions inédites, ou tout du moins véritablement personnelles et libres. Dans ce contexte, si Holy Motors s’est à ce point distingué, c’est parce qu’il était véritablement l’un des seuls à véhiculer un appétit de fiction, un sens de la magie, une foi dans le cinéma qui aient une dimension authentiquement vitale. Par exemple, on pourrait dire qu’Holy Motors existe parce que Carax a mis sa vie sur la table, alors que le Like Someone in Love de Kiarostami existe parce que les Japonais ont mis de l’argent sur la table… Voilà l’image globale, à gros traits parfois caricaturaux. À présent, entrons dans les détails. Nous étions nombreux à Cannes, nous avons vu tous les films, nous ne les avons pas perçus pareil. Et vous allez voir qu’en fait, nous avons quand même pensé et ressenti des choses…

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NICOLAS MARCADÉ


Amour

1 LES IMAGES QUI RESTENT

Amour de Michael Haneke Sortie : 24 octobre 2012

Les détracteurs de Haneke en seront pour leurs frais : oubliée, la démarche parfois surplombante - pour ses personnages comme pour son public - du cinéaste, son goût occasionnel pour le sadisme, ses petites mécaniques manipulatrices, l’épais didactisme propre à certains de ses films. Éprouvant, Amour l’est pourtant assurément. Rien ne nous sera épargné de la déchéance tant physique que psychique d’Anne (Emmanuelle Riva), octogénaire qui, victime d’un AVC, entame son lent chemin de croix, accompagnée vers une fin semblet-il inéluctable par son mari, Georges ( Jean-Louis Trintignant, qui signe là, après treize ans d’absence, son retour devant la caméra). Par endroits, la cruauté, les rancœurs tenaces chères à l’auteur affleurent (“Parfois, tu es un monstre”, lance Anne à Georges, avant de vanter sa gentillesse), mais c’est décidément l’empathie qui l’emporte, la piste d’un mélodrame dégagé de tout pathos. En délaissant ses grands sujets pour se replier sur l’intime, Haneke signe son film le plus humain, s’attachant à montrer la façon dont un amour au long cours trouve son ultime expression dans des gestes thérapeutiques, des soins d’hygiène, l’attention portée à la parole de celui qui peine à s’exprimer. Sa mise en scène, idéalement servie par la photographie de Darius Khondji, frappe par sa limpidité, et l’âpreté de son regard, transfiguré, se mue en belle retenue. Parenthèse ou tournant dans l’œuvre de son auteur, la Palme 2012 est une ballade d’amour et de mort au lyrisme rentré, dont les images marquent durablement.

TF 4

La première chose à retenir d’un festival de Cannes, c’est ce qui s’impose. Une poignée de films, et puis une série d’images. Celles auxquelles on repense. Nous en avons chacun retenu une, et l’avons décrite telle qu’elle nous reste en tête... Anne Berjon / La Chasse : Paradoxalement j’ai choisi l’une des rares scènes où Mads Mikkelsen, qui porte magistralement le film, n’est pas présent. Mais cette scène m’a marquée car elle enclenche l’escalade de violence que subissent son personnage et son fils adolescent. Celui-ci, Marcus, vient de voir son père arrêté pour abus sexuels sur la petite Klara et est convaincu, tout comme nous, de son innocence. Il cherche du réconfort et des explications auprès des anciens amis de son père, dont le père de Klara. Ceux-ci l’accueillent avec une compassion gênée, mais quand Marcus commence à questionner Klara et à l’accuser de mensonge avec une rage désespérée, ils l’expulsent de la maison en le frappant avec une violence disproportionnée. Cette scène brutale, au cours laquelle nous comprenons qu’il n’y aura pas de limite au “lynchage” du présumé pédophile, instaure une tension et une émotion qui perdurent jusqu’aux dernières images du film. Cédric Lépine / Post Tenebras Lux : Au fil de scènes aussi marquantes les unes que les autres, naviguant entre réalisme cru et apparitions fantastiques, voici qu’en arrive une particulièrement stupéfiante : un homme, seul au milieu de la nature, se prend la tête entre les mains et, avec une déconcertante facilité, se l’arrache. La scène pourrait être gore et gratuite : elle ne l’est pas, compte tenu de tout ce qui précède dans le film. Elle invite largement à l’interrogation, © les Fiches du Cinéma 2012 - Hors Série Cannes


Paradis : Amour

2 LES IMAGES QUI REVIENNENT L’an dernier, à mesure que l’on avait découvert les films du festival, une grande unité dans les humeurs et les thématiques (la question de la catastrophe, le problème du pouvoir…) s’était fait jour de façon extrêmement nette. Cette fois, rien n’est apparu de façon aussi évidente et sensible tandis que les films se succedaient. En revanche, en réfléchissant a posteriori et en faisant un tour de table, on a pu constater que tout ce que nous avions pu, les uns et les autres, remarquer, avait tendance à se recouper et à décliner, de façons très diverses, une idée directrice sous-jacente : celle d’un rejet des structures sociales, et d’un repli, inquiet et souvent agressif, sur des micro-communautés, religieuses ou familiales, de couple, de classe ou de quartier...

Paradis : Amour

Misogynie ?

de Ulrich Seidl

Le monde régressif des valeurs 100% masculines d’où la femme serait totalement exclue était de retour à Cannes. Les exemples les plus symptomatiques étaient Des hommes sans loi et Cogan - La Mort en douce, où à plus de soixante-dix ans d’intervalle, on retrouvait le même cadre d’individus exclusivement masculins se débattant entre eux pour maintenir une économie parallèle, et usant pour cela de tout l’attirail extérieur d’une virilité exacerbée. Dans De rouille et d’os également, l’univers décrit est foncièrement masculin, et le couple hétérosexuel se comporte l’un vis-à-vis de l’autre comme deux potes qui auraient peur d’affirmer leurs émotions. La peur de la femme est telle que Mud s’isole sur une île et que toute l’histoire mènera à cette fatale conclusion : il vaut mieux s’entraider entre mecs que risquer une déception avec une femme. Les failles de ce monde se font jour : dans À perdre la raison, le destin d’une femme est complètement régi par deux hommes, ce qui mènera inéluctablement à la tragédie. Cette peur, chez l’homme, de l’altérité incarnée par la femme, trouve une brillante illustration avec une Augustine objet d’étude de Charcot, qui doit s’imposer pour s’affirmer en tant que sujet. CeL

Sortie : 9 janvier 2013

Qu’un réalisateur aussi nihiliste et désespéré qu’Ulrich Seidl (Dog Days, Import/Export) intitule son nouveau film Paradis : Amour tient forcément de la distance ironique, voire de la mauvaise blague potache. D’amour, on ne trouve pas trace dans cette radiographie cruelle des rapports Nord/Sud. Ou alors un amour irrémédiablement limité à des expériences sexuelles : celles d’une quinquagénaire autrichienne en vacances au Kenya. Quant au paradis, il s’agit d’un artifice ensoleillé, un paysage de carte postale qui réduit chacun à un rôle prédéfini : aux autochtones, la mise en scène marchande de leur exotisme ; aux touristes, sa consommation aveugle. Peau blanche contre peau noire : Ulrich Seidl continue là, en de longues séquences statiques et voyeuristes, son exploration du corps comme seule valeur d’échange humain. Si son film apparaît indigne et insupportable, c’est surtout que le thème l’est. Et c’est au fond ce qui fait toute la pertinence et l’intérêt de Paradis : Amour.

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3 LES IMAGES DE MARQUE

Vous n’avez encore rien vu

ARGENTO • AUDIARD • BERTOLUCCI • CRONENBERG • DOLAN • GONDRY • HONG SANG-SOO • KIAROSTAMI • RESNAIS • REYGADAS

Tube du festival 2012 : “Le Hong Sang-Soo” / “Le Bertolucci” / “Le Kiarostami” (etc.) est mineur... Comme Roland Garros, Cannes est, pour les numéros 1 du circuit, une compétition qui détermine leur positionnement au classement ATP. Qui est en hausse ? Qui baisse ? Qui était une fausse valeur ? Qui joue sur ses acquis ? Qui est de retour au plus haut niveau ? Tout cela se joue sur le tapis rouge. Tour d’horizon des mouvements survenus à la bourse des valeurs artistiques. Promenade à travers les films dont il est impossible de parler sans parler de leurs auteurs, et des filmographies dans lesquelles ils s’insèrent.

Dracula 3D

De rouille et d’os

de Dario Argento

de Jacques Audiard - Sortie : 17 mai 2012

Dans les cartons du maître depuis plus d’un an déjà, les bobines de Dracula 3D ont réussi à franchir l’entrée du festival de Cannes. On se pose des questions sur cet hommage tardif du festival au génie italien, puisqu’il s’agit sans doute de l’une des œuvres les plus mineures de son auteur. Argento n’ayant plus rien à prouver, ce Dracula n’était d’ailleurs pour lui qu’une occasion d’expérimenter les caméras 3D, dont on nous dit depuis des années qu’elles vont révolutionner le cinéma. On attend toujours. Ici, Argento échaffaude son exercice de style sur une base malheureusement très académique, qu’il ne parvient pas à pervertir. On se retrouve alors avec une 3D léchée et de bonne facture, mais qui ne peut masquer le manque d’intérêt du réalisateur pour ses acteurs et pour l’histoire elle-même. Au mieux il s’agit d’un hommage au cinéma de Jean Rollin, au pire d’une série Z.

La belle idée du film est d’excéder, très tôt, son pitch introductif (une jeune femme - Cotillard -, amputée des deux jambes, retrouve goût à la vie au contact d’un taiseux porté sur la castagne - la révélation Schoenaerts), et de voir, en substance, l’enjeu se déplacer des jambes de la première aux poings du second. S’y confirme la dimension performative du cinéma d’Audiard qui, comme on le dirait d’un sportif, excelle dans l’engagement physique, et emporte le morceau par la grâce d’une mise en scène robuste et sensitive. À condition, toutefois, de passer sur un script qui s’égare dans des intrigues secondaires, et accouche en bout de course d’une rédemption au forceps. À condition, surtout, de passer sur un tableau social régulièrement douteux (l’enfant dans la niche du chien, dispensable), et d’accepter que le film ne soit, dans le fond, qu’une resucée de l’équation de Sur mes lèvres (virilité butée, affleurement progressif des affects entre deux paumés).

GM

TF

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Abel

4 Tous les films du festival

Compétition

La Chasse

Des auteurs confirmés qui, sans démériter, n’auront pas ébloui (Loach, Hong, Cronenberg), à l’exception notable de Haneke ; des fautes de goût (Daniels), des soupçons d’imposture (Seidl et Reygadas : aux Fiches, les avis divergent), des œuvres exhibant leur esprit de sérieux (Mungiu, Loznitsa), d’autres fleurant parfois l’académisme (Salles en tête) : le palmarès, convenu, aura donc sanctionné une sélection relativement terne, où trônait un joyau (le Carax), reparti bredouille de la Croisette...

Amour de Michael Haneke [v.p. 04]

Après la bataille de Yousry Nasrallah S’inscrivant dans la vague d’un cinéma voulant rendre compte “à chaud” du Printemps arabe, Après la bataille choisit de traiter le fait historique en s’intéressant à ce qui lui succède immédiatement. Le film plonge tout d’abord dans le quotidien d’une jeune militante du Caire, et s’immerge ensuite dans la périphérié, tout près des pyramides, dans la vie d’un chamelier devenu un paria après la mise en ligne d’une vidéo montrant son lynchage sur la place Tahrir, où il était venu “bastonner” les manifestants. Plutôt que de sauter à pieds joints dans le registre politique,

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Yousri Nasrallah (Les Femmes du Caire) s’aventure sur le chemin de traverse de la romance, à la faveur de la rencontre entre ces deux personnages opposés. Amour et politique font un bel enjeu, mais le récit s’étire et se perd dans la confusion des sujets : la place des femmes dans la société égyptienne, la manipulation des citoyens analphabètes, la corruption… Et si certaines scènes permettent de “sentir” l’esprit qui règne dans cet “après” (notamment avec le témoignage d’une institutrice désabusée), la narration reste déséquilibrée. D’autant plus qu’elle n’est supportée que par une mise en scène assez fade.

ChR

Au-delà des collines de Cristian Mungiu [v.p. 10]

La Chasse de Thomas Vinterberg Sortie : 14 novembre 2012 Un homme, fraîchement divorcé et séparé de son fils, est accusé de pédophilie par la fille de son meilleur ami. Licencié du jardin d’enfants où il travaillait, c’est bientôt le village entier qui se ligue contre lui. Jusqu’ici, Thomas Vinterberg était perçu dans le monde du cinéma un peu comme l’est Patrick Hernandez dans celui de la chanson : il était l’homme d’un mégatube (Festen, 1998), incessamment repris (il est cité systématiquement à propos de n’importe quel film rappelant de près ou de loin l’esthétique Dogma), mais sans suite. La sélection, cette année, de son dernier film en compétition officielle a donc créé la surprise et attisé la curiosité. © les Fiches du Cinéma 2012 - Hors Série Cannes


Djeca

Un Certain Regard Comme chaque année, Un Certain Regard s’est constitué en véritable melting-pot de cinéma, accueillant des films venus du monde entier, et de qualités très variables. Parmi les bonnes surprises, Le Grand soir, Les Bêtes du Sud sauvage, Después de Lucia, À perdre la raison ou encore Djeca. Parmi les moins bonnes, 25 novembre 1970..., Trois mondes, Antiviral ou encore Confession d’un enfant du siècle. Entre les deux extrémités du spectre, on aura voyagé entre Argentine, Colombie, Sénégal, Kazakhstan et Inde... Dépaysant !

À perdre la raison de Joachim Lafosse [v.p. 12]

Antiviral de Brandon Cronenberg Le postulat de départ est intéressant. Dans le futur, les stars nous fascineront tant que nous dépenserons nos

économies dans l’achat de leurs virus. L’homme sera voué à se laisser aller à souffrir, à l’instar de ses idoles. Et Brandon Cronenberg de chiper le virus de son idole de père, celui du Septième Art. Parce qu’il l’aime, le cinéma paternel, et même s’il s’en défend, son Antiviral en est plus qu’imprégné. C’est d’ailleurs certainement dans ce flagrant mimétisme que réside l’intérêt principal

du film, dans cette incapacité qu’a le fiston à tuer le père. Car le film en luimême, s’il démarre plutôt fort, notamment grâce à un univers visuel intéressant, suscite au fur et à mesure que l’intrigue à tiroirs se déroule un ennui de plus en plus profond. Cronenberg fils a beaucoup d’idées, les lance toutes sans réellement y croire, et laisse alors bon nombre d’entre elles en plan. Il faudra probablement que Brandon structure un peu ses pensées pour pouvoir espérer se faire un prénom.

JBM

Les Bêtes du Sud sauvage de Benh Zeitlin [v.p. 07]

Les Chevaux de Dieu de Nabil Ayouch

Antiviral

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Un bidonville aux portes de Casablanca : pauvreté, délinquance et drogue sont le quotidien des gamins qui ont eu la malchance d’y naître. Bien que Yemma tente de tenir sa famille, en dépit d’un mari dépressif et d’un fils aîné autiste, elle © les Fiches du Cinéma 2012 - Hors Série Cannes


Semaine de la Critique

Aquí y allá

Le Mexique sans misérabilisme dans Aqui y allá, l’Inde sans bidonville dans Peddlers, une ambulance sans patient dans Sophia’s Last Ambulance, un deuil sans larmes dans Au Galop, La Semaine de la Critique a choisi des films qui ont su donner une nouvelle vision sur des thèmes familiers ou méconnus ; un regard sensible sur la sexualité dans Hors les murs, la fraternité dans Les Voisins de Dieu et l’entraide dans Los Salvajes.

Aquí y allá de Antonio Méndez Esparza Grand prix de la Semaine de la Critique, Aquí y allá séduit par son sujet et le caractère attachant de ses personnages. Pedro retourne dans son village mexicain après avoir travaillé pendant plusieurs années aux États-Unis. Il reprend lentement ses marques, retisse des liens avec ses deux filles, qui ont grandi, et retrouve l’amour de sa femme, Teresa, avec laquelle il a rapidement un autre enfant. Pedro essaie de monter un groupe de musique et de vivre des concerts. La beauté du film est saisissante, tant par la photographie que par la tendresse avec laquelle est filmé ce retour au pays. Pedro, malheureusement, se rend compte qu’il ne peut offrir à sa famille la vie qu’il souhaiterait s’il continue à travailler aux champs. Il décide donc de repartir. Son départ est déchirant et avec beaucoup de pudeur le réalisateur Antonio Méndez Esparza montre le dilemme auquel Pedro doit faire face : vivre avec sa famille dans la précarité où lui laisser pour lui permettre d’avoir une vie meilleure. Sans

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misérabilisme et avec une grande délicatesse, Aquí y allá conte une triple histoire d’amour contrarié : celle entre un homme et sa femme, celle entre un homme et sa famille, et celle entre un homme et sa patrie.

IrB

Au galop de Louis-Do de Lencquesaing Le comédien français Louis-Do de Lencquesaing réalise ici son premier long métrage. Il y interprète le rôle de Paul, un

écrivain qui rencontre Ada, une femme travaillant chez son éditeur. Le film décrit les débuts de cette histoire d’amour, alors que le père de Paul est mourant, que sa fille vit sa première histoire amoureuse, et que le mari d’Ada tente de la reconquérir avant la naissance de leur enfant. Scénario des plus classiques donc, et le film prend, au début, la mauvaise pente de la comédie familiale à la française... Avant que son ton, léger et détaché, ne finisse par le sortir honorablement du lot. Cette

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Camille redouble

Quinzaine des Réalisateurs Pour sa première sélection, Édouard Waintrop a misé, chose rare et appréciable à Cannes, sur l’humour (The We and the I, Adieu Berthe, Camille redouble) et la légèreté (Ernest et Célestine dans une salle remplie d’enfants enthousiastes). Si certains films ont brillé par l’intensité de leur propos et la force de leur mise en scène (Le Repenti, Rêve et silence ou Fogo), d’autres n’ont pas semblé à la hauteur de la réputation de la Quinzaine (Dangerous Liaisons, par exemple, n’aurait jamais dû venir sur la Croisette).

Adieu Berthe de Bruno Podalydès Sortie : 20 juin 2012 Bancs publics, délirant patchwork aux allures de film-somme, avait pu décontenancer les fans des frères Podalydès. Avec Adieu Berthe, Bruno, réalisateur, et Denis, acteur, reviennent aux fondamentaux : une comédie plus modeste sur les errances sentimentales d’un homme partagé entre deux femmes, chargé d’organiser l’enterrement d’une grand-mère dont il ignore tout. On retrouve là tout ce qui fait la sève comique du duo depuis Versailles rive gauche : un mélange de gags potaches, de digressions savoureuses, de jeux de mots subtils et d’observations amusées où, derrière le rire, perce l’amertume. Si, parmi toute une pléiade d’acteurs familiers (Isabelle Candelier, Michel Vuillermoz, Jean-Noël Brouté, Pierre Arditi), Denis Podalydès excelle dans le rôle du quinqua dépassé, tout en lâcheté et enfantillage, c’est surtout la performance de son frère Bruno que l’on retient.

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Le réalisateur se met ici en scène en chef détaché et flegmatique, à la tête de l’entreprise de pompes funèbres “Obsécool”, dont la devise résume en soi tout le programme de son cinéma : “Hop c’est fait, mais cool”. [voir aussi Fiches N°2026, p. 16]

CL

Alyah de Élie Wajeman Pour fuir son grand frère, envahissant et toxique, Alex, petit dealer parisien, met tout en place pour aller avec un cousin ouvrir un restaurant à Tel-Aviv. Alyah ressemble à une étude très prometteuse mais dont on se sentirait tout de même frustré qu’elle ne parvienne pas, ici et maintenant, à prendre pleinement la forme et la consistance d’un tableau. En effet, il y a là un style d’une grande tenue, une manière nerveuse, rigoureuse et sans chichis de poser une atmosphère et des personnages. Il y a des acteurs justes, un montage sec, une réalisation sobre et

percutante. Tout cela ne demande qu’à être mis au service d’une histoire pour livrer toute sa puissance de feu. Mais hélas l’histoire n’advient jamais véritablement, le scénario se contentant de piétiner dans une forme d’indécision et de trop grande timidité. Si bien que les bases excitantes que le film avait su poser restent en suspens, et que le beau film noir promis se contente alors de n’être qu’un élégant exercice, traversé de quelques vraies bonnes scènes, mais dénué d’un enjeu réellement consistant.

NM

Camille redouble de Noémie Lvovsky Sortie : 17 octobre 2012 La classe que Camille redouble c’est vingt-cinq ans après qu’elle y retourne. À la faveur de quelques verres bien chargés lors d’une fête avec ses amies d’enfance, Camille se réveille, en effet, dans sa chambre de jeune fille, chez ses parents, peu de temps avant d’entendre sa mère s’écrouler sur le plancher, morte, et de © les Fiches du Cinéma 2012 - Hors Série Cannes


Michael Haneke Wes Anderson Bernardo Bertolucci Takashi Miike Leos Carax Ken Loach Carlos Reygadas Benoît Delépine & Gustave Kervern Ben Wheatley Matteo Garrone Jeff Nichols Pablo Trapero Alain Resnais Joachim Lafosse Cristian Mungiu Jacques Audiard Pablo Stoll Ward Michel Gondry

Compétition. Hors Compétition. Un Certain Regard

les 105 films du festival Quinzaine des Réalisateurs. Semaine de la Critique. ACID

David Cronenberg Raoul Ruiz Merzak Allouache Noémie Lvovsky Jaime Rosales Fatih Akin Pablo Larraín Abbas Kiarostami Claude Miller Hong Sang-soo Aida Begic Xavier Dolan Ulrich Seidl Thomas Vinterberg Lou Ye Andrew Dominik ...

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