1112 - Programme opéra n°14 - Der Rosenkavalier - 04/12

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saison 11 | 12 opéra | der rosenkavalier | Strauss

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Rosenkavalier Komödie für Musik en trois actes

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Richard Strauss

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Fondation subventionnée par Soutiens de saison Partenaire des récitals Partenaires de productions

Partenaires du programme pédagogique

Partenaire fondateur de la troupe des jeunes solistes en résidence Partenaire du Ballet du Grand Théâtre Partenaires de projets

Ville de Genève Association des communes genevoises Cercle du Grand Théâtre Fondation philanthropique Edmond J. Safra Fondation Valeria Rossi di Montelera Cercle du Grand Théâtre Fondation Leenaards Credit Suisse SA Fondation Neva Vacheron Constantin M. Trifon Natsis Adler Joailliers Fondation de bienfaisance de la banque Pictet Département de l’Instruction publique, de la culture et du sport de la République et canton de Genève Fondation BNP Paribas

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Š OpÊra national de Paris / C. Leiber

Ernst von Schuch dirigeant Rosenkavalier Robert Sterl, 1911 Alte Nationalgalerie, Berlin Huile sur toile

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© Opéra national de Paris / C. Leiber

au Grand Théâtre de Genève Création du Bayerische Staatsoper

29 mars et 3, 5, 10, 12 avril 2012 à 19 h | 1er avril 2012 à 15 h Durée du spectacle : approx. 4 h 20, avec deux entractes

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Rosenkavalier Le chevalier à la rose

OP. 59

Komödie für Musik en trois actes

Richard Strauss Livret de Hugo von Hofmannsthal, créée le 26 janvier 1911 à l'opéra de Dresde. Boosey & Hawkes Ltd, Londres, 1943

avec la participation de l’Orchestre de la Suisse Romande

Chanté en allemand avec surtitres français et anglais.

Diffusion stéréo samedi 12 mai 2012 à 20 h Dans l’émission « à l’opéra ». Une production de Paul-André Demierre Fréquences FM 100.1 et 100.7

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direction musicale

Niksa Bareza mise en scène

Otto Schenk décors & costumes

Jürgen Rose

Assistante à la mise en scène

Martina Weber lumières

Michael Bauer

La Maréchale Soile Isokoski Le Baron Ochs Alfred Reiter Octavian Alice Coote Monsieur de Faninal Lionel Lhote Sophie Kerstin Avemo MArianne Margaret Chalker Valzacchi Paul Kaufmann Annina Doris Lamprecht Un Chanteur italien Alexey Kudrya Le commissaire de police Michail Milanov Le Majordome de la Maréchale Bisser Terziyski Le Majordome de Faninal Fabrice Farina Un Notaire Wolfgang Barta Un Aubergiste Manfred Fink Les trois orphelines Martina Möller- Gosoge Cristiana Presutti Mariana Vassileva La modiste Magali Duceau Le MArchand d'Animaux Rémi Garin Les quatre domestiques de la Maréchale Romaric Braun Phillip Casperd José Pazos Terige Sirolli Les quatre MAîtres d'hôtel Nicolas Carré Peter Baekum Cho Seong-Ho Han Terige Sirolli Un valet Harry Draganov Les gens de Lerchenau Christophe Coulier Harry Draganov Omar Garrido Terige Sirolli Georgi Sredkov Léopold Dimitri Tikhonov

Chœur du Grand Théâtre de genève Orchestre de la Suisse Romande

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Sommaire Contents

Prélude Introduction

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Argument Synopsis

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Naissance d'une collaboration par Bernard Bannoun Correspondance Richard Strauss / Hugo von Hofmannsthal La carrière du Chevalier à la rose de Richard Strauss Le Chevalier à la rose, notice complémentaire de Hugo von Hofmannsthal Le Chevalier à la rose à l'affiche au début du XXe siècle par Jean-François Monnard Tempus fugit par Daniel Dollé Le 20 mai 1927... de Romain Rolland

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Souvenirs au Grand Théâtre Références Cette année-là. Genève en 1911

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Production Biographies

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Informations pratiques Mécénat & partenariat Fondation du Grand Théâtre Cercle du Grand Théâtre Le Grand Théâtre : l’équipe Prochainement

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prélude par Daniel Dollé œuvre Créé en 1911 à Dresde, Der Rosenkavalier, reste une des plus heureuses collaborations de Richard Strauss et de Hugo von Hofmannsthal. C’est le blason de Strauss, sa carte d’identité, c’est ainsi qu’il se présentera au G.I. venus réquisitionner sa villa en 1945 : « Je suis le compositeur de Rosenkavalier. » Après les excès paroxystiques de Salome et d’Elektra, le compositeur cherchait une idée dans la manière de Mozart. L’idée vint de lui, mais l’argument et les personnages sont bien du poète qui utilise les tremplins du passé, tels que la commedia dell’arte ou les farces et les comédies-ballets de Molière. Ensemble, ils imaginent une œuvre originale qui prend ses racines dans le passé, mais explore de nouveaux univers sonores et poétiques. Entre le moment où se déroule l’action de Rosenkavalier et le moment de sa composition, il existe de subtiles analogies. Le milieu du XVIIIe siècle c’est l’âge d’or des bouffons, l’époque de l’ascension de la classe bourgeoise et celui du déclin de la noblesse. 1909-1910 c’est le triomphe absolu de la bourgeoisie. L’Ancien Régime réussit à survivre à Vienne, mais la monarchie austro-hongroise n’a plus que quelques années à vivre. Nous sommes en présence d’une œuvre où flotte un érotisme subtil et raffiné et qui nous parle de la corrosion insidieuse du temps sur les êtres et les civilisations. Hofmannsthal a placé dans l’âme de son héroïne, la Maréchale, l’obsession de tout un chacun : le temps passe et change lentement les corps, mais les mouvements des âmes et des cœurs restent soudains et imprévisibles. Strauss et Hofmannsthal ont mis en scène un personnage silencieux plus fort que les dieux et les rois : le Temps.

Intrigue Octavian et la Maréchale ont passé la nuit ensemble. Au petit matin, leur tête à tête est interrompu par le baron Ochs, cousin de la Maréchale, venu à Vienne pour préparer son mariage avec Sophie, la fille d’un riche parvenu, Faninal, et trouver un chevalier à la rose, tout en faisant la cour à Octavian déguisé en Mariandel. Après son audience matinale, la Maréchale fait porter la rose d’argent à Octavian. Chez Faninal on attend fiévreusement l’arrivée d’Octavian qui remet la rose à Sophie. Leur intimité est interrompue par l’arrivée d’Ochs qui hor-

rifie Sophie par ses manières. Les deux jeunes gens s’avouent leur amour. Ils sont surpris par deux intrigants, Valzacchi et Annina. Au cours d’une altercation, le baron Ochs se blesse au bras. Mais sa bonne humeur revient lorsqu’Annina lui remet un billet doux de Mariandel, alias Octavian. Le rendez-vous a lieu dans une auberge des faubourgs, mais il est en permanence troublé par d’étranges apparitions. Tout n’est qu’une mascarade, la Maréchale propose au Baron de s’avouer vaincu. Sur la scène vide reste le trio, la Maréchale se retire discrètement, laissant seuls les jeunes amants..

Musique La critique du temps de Strauss voit dans le changement stylistique de Strauss un véritable revirement esthétique du trublion compositeur de Salome et d’Elektra. Le citoyen de Garmisch reprenait le chemin d’un havre paisible de la tonalité assurée. Der Rosenkavalier reste cependant une partition extrêmement différenciée. Le matériel musical est réparti en différentes strates. Le génie orchestrateur du compositeur est omniprésent, il a su retenir les leçons des maîtres (Berlioz et Wagner) du passé. Il sait que l’effectif de son orchestre a plus d’influence sur la couleur et la texture de son ouvrage que sur son intensité. Avec une maîtrise rare, son orchestre accompagne l’hystérie des femmes d’Elektra ou le volcanisme de la princesse Salomé, ou se fait presque chambriste pour la méditation de la Maréchale. Lorsque le dramaturge suggère au compositeur de songer à quelque valse viennoise surannée, cela ne gêne pas Strauss qui savait certainement que la Vienne de Marie-Thérèse ignorait encore la valse. Richard Strauss crée des effets sonores exceptionnels grâce à l’association de différentes techniques. Au moment de la remise de la rose par Octavian, il intègre le célesta et deux harpes dans la texture orchestrale. Il y a une omniprésence des mélanges sonores sur lesquels se détachent des couleurs instrumentales pures. Strauss fait chanter les voix sans qu’on s’en aperçoive, un sublime trio, suivi d’un duo accompagné par un orchestre énamouré termine un ouvrage anachronique qui est la constatation qu’une page est tournée. La Maréchale devra frayer avec Faninal.

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Introduction

by Daniel Dollé

The work Der Rosenkavalier (The Knight of the Rose), one of the most felicitous collaborations between Richard Strauss and Hugo von Hofmannsthal, was first performed in Dresden in 1911. It is Richard Strauss’ coatof-arms, the calling card with which he introduced himself to the American G.I. that commandeered his villa in 1945: “I am Richard Strauss, the composer of Rosenkavalier.” After having explored the limits of hysterical excess in Salome and Elektra, the composer sought new ideas in the style of Mozart. The ideas he found were ultimately his own, but the plot and the characters are entirely the fruit of his librettist’s imagination, with a little help from two worthy forebears, the commedia dell’arte and Molière’s comédies-ballets. We owe this profoundly original work to the combined talents of the musician and the playwright who anchored their piece firmly in the past, while designing new and exciting worlds of sound and poetry.There are many subtle analogies between the era in which the story of Rosenkavalier takes place and the period when it was composed. The middle of the 18th century was the golden age of opera buffa and saw the rise of the bourgeoisie as the aristocracy fell in decline. 1909-1910 marks the apex of the bourgeois ascendancy. The old order is still surviving in Imperial Vienna, but the AustroHungarian monarchy is on its last legs. The opera is heady with subtle and refined eroticism and speaks of how time quietly gnaws away at living creatures and civilizations. Hofmannsthal uses his heroine, the Marschallin, to embody an obsession we all share: time goes by, bodies slowly grow old, but the impulses of hearts and souls remain unpredictable. Strauss and Hofmannsthal have placed one silent character at the top of their cast, stronger than any god or king: Time itself.

The plot After a night together, Octavian and the Marschallin are interrupted by the morning visit of a country cousin, Baron Ochs, in Vienna to arrange his marriage to Sophie von Faninal, the daughter of a wealthy merchant, and to find a rose-bearer to declare his intentions, which does not stop him from dallying with Octavian, disguised as a maid, “Mariandel”. After her morning levee, the Marschallin has the sil-

ver rose sent to Octavian. At the Faninal’s, everyone is excitedly awaiting the arrival of the knight of the rose. Octavian gives Sophie the rose but the magic of their first meeting is spoiled by Ochs, whose boorish manners alarm Sophie, already in love with Octavian. Their first kiss is discovered by two shady types, Valzacchi and Annina, who report them to Ochs. A duel with Octavian leaves Ochs with a wounded arm but he recovers his spirits when Annina proposes a tryst with «Mariandel». Their rendez-vous takes place in a suburban inn but is constantly plagued by strange interruptions. When it becomes obvious that the Baron is the victim of a masquerade, the Marschallin suggests her cousin throw in the towel. She remains alone on stage with the young lovers and tactfully retires, leaving Octavian and Sophie in each others arms.

The music Richard Strauss’ contemporaries hailed Rosenkavalier’s shift back to more sedate realms of tonal style, after his previous shockers Salome and Elektra. The opera is a highly complex and stratified composition, permeated by Strauss’ orchestrating genius and a lesson learned from Wagner and Berlioz: that the colour and texture of a piece, and not simply its intensity, are achieved by an orchestra’s diversity and size. Strauss displays the same matchless skill at arranging his instruments as he did in depicting the hysterics of Elektra’s women or Princess Salome’s volcanic passion, muting his tones to chamber music softness for the Marschallin’s meditation on Time. Strauss’ creative liberties are also apparent in his intentionally anachronistic use of Viennese waltzes, unknown at the time of Empress Maria Theresa, but nonetheless suggested by his librettist. The association of different techniques allows Strauss to achieve exceptional musical effects: when Octavian presents the rose, the composer enriches his orchestral texture with a celesta and two harps. The entire work is full of similar assemblages, distinguished by pure instrumental colours. Strauss makes his voices sing effortlessly: a sublime trio, followed by an ecstatic love duet, over an equally rapt orchestra, is the fitting conclusion to an opera outside of time. A page is turned as the Marschallin makes her exit with Faninal.

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Argument L’action se passe à Vienne, au milieu du dix-huitième siècle. Acte I Le jour se lève sur la chambre à coucher où la Maréchale, Marie-Thérèse, princesse von Werdenberg, vient de passer la nuit avec son jeune amant, Octavian comte Rofrano, dit Quinquin. Avec une fougue juvénile, il exprime son ivresse, interrompue quand le petit page noir de la princesse apporte le chocolat matinal. Il déjeune avec sa maîtresse et jubile de sa bonne fortune, sans trop de tact puisqu’il parle du Maréchal qui chasse au loin tandis que lui-même lève ici une plus belle proie. La Maréchale se rembrunit à la pensée de son mari : elle a rêvé de lui cette nuit – ce qui fait réagir Quinquin – et l’a cru de retour : une rumeur aux portes lui fait craindre qu’il ne soit effectivement de retour. Elle envoie Octavian récalcitrant se cacher dans les rideaux du lit, et attend, anxieuse et pourtant résolue. Mais la voix qu’elle entend au dehors n’est pas celle de son mari ; c’est celle d’un cousin de campagne, le baron Ochs auf Lerchenau 1, qui veut forcer l’entrée. Octavian émerge des rideaux, il s’est déguisé en soubrette grâce aux vêtements féminins qu’il a trouvés. La Maréchale enchantée lui conseille de s’esquiver parmi ses gens, quitte à revenir par la suite. Mais sur le seuil, il se heurte au baron Ochs, fort alléché par cette jeune et jolie camériste, et doit retourner faire mine de s’affairer auprès de sa maîtresse. Le baron Ochs s’installe et commence par entretenir sa cousine de ses projets de mariage avec un tendron de quinze ans, fille d’un riche bourgeois récemment anobli, Faninal. L’usage, dans la noblesse, est de faire remettre une rose d’argent à la fiancée par un émissaire du fiancé. C’est sur le choix de ce tiers que le Baron est venu consulter sa cousine ; il veut en outre lui emprunter son notaire pour dresser le contrat de mariage. Tout en parlant, il ne cesse de manifester un vif intérêt pour la soubrette baptisée Mariandel par sa maîtresse, et va jusqu’à lui proposer un rendez-vous clandestin. Son manège n’échappe pas à la Maréchale amusée, qui plaisante sur son éclectisme. Le Baron, mis à l’aise, se lance dans un panégyrique des amours 1

Ochs auf Lerchenau : Bœuf sur le pré aux alouettes

ancillaires qu’il se vante de cultiver assidûment sur ses terres. Et il courtise de plus belle Mariandel, qui fait la niaise. Soudain, la Maréchale a une idée : elle envoie Mariandel chercher un médaillon représentant l’un des ses cousins, le comte Octavian Rofrano, qui sera selon elle un parfait chevalier à la rose. Ochs flatté de l’honneur, accepte aussitôt, non sans remarquer la ressemblance entre l’original du portrait et Mariandel ; la Maréchale fait allusion à quelque lien de bâtardise. Puis elle coupe court en laissant entrer le personnel de son lever ainsi que l’assistance habituelle, traitée de pègre par le majordome, des fournisseurs, solliciteurs, parasites, etc. Trois nobles orphelines implorent la générosité de la princesse, qui leur remet une bourse ; une modiste vante la dernière coiffure parisienne ; un marchand d’animaux propose singes, perroquets, petits chiens ; un intriguant italien, Valzacchi, veut glisser une feuille à scandales, la gazette noire, sans succès. La princesse présente son notaire à Ochs, puis se livre aux mains de son coiffeur, tout en écoutant une cavatine chantée par un maestro accompagné par un flûtiste. Ochs et le notaire discutent le contrat, le Baron réclamant pour lui la part réservée à la mariée ; il s’échauffe jusqu’à frapper du poing sur la table, arrêtant net le chanteur. La Maréchale, coiffée, consulte son miroir et soupire à son coiffeur consterné qu’il l’a aujourd’hui vieillie. L’intrigant Valzacchi et sa soi-disant nièce Annina, apprenant le prochain mariage du Baron, lui proposent leurs services d’espions de sa future épouse, mais le Baron ne prête aucune attention à leurs paumes tendues. Son valet – un enfant de bon plaisir, lui aussi, ditil – lui apporte l’écrin contenant la rose, qu’il remet à la princesse pour le faire porter à son chevalier. Restée seule, la Maréchale songe à la jeune fille inconnue qui va être livrée au lien du mariage, comme elle le fut jadis elle-même. Où sont les neiges d’antan ? Le temps fuit ; de la petite Rési, il a fait la vieille Maréchale. Le mystère est grand et il faut l’accepter ; mais il y a la manière. Ocatvian revient, en habit et botté. En cherchant à dissiper la mélancolie de sa maîtresse, il ne réus-

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L'arrivée d'Octavian en chevalier à la rose dans le salon des Faninal. Décor de Jürgen Rose pour la production de 1972 du Bayrische Staatsoper, inspiré par le salon du pavillon d'Amalienburg au château munichois de Nymphenburg.

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sit qu’à rendre plus vive encore sa conscience de la fugacité des choses de la vie, qui l’oblige à se relever la nuit pour arrêter les pendules. Un jour, prédit-elle, il la quittera pour une femme plus belle et plus jeune qu’elle. Octavian proteste avec une véhémence blessée, puis se fait congédier, tête basse. Une fois seule, la Maréchale s’aperçoit qu’elle l’a laissé partir sans un baiser ; elle envoie son personnel afin de le rattraper, mais il est déjà loin. Elle remet alors au petit page l’écrin qui contient la rose, et lui demande de le porter à Octavian. Puis elle retourne à sa rêverie.

Croquis des costumes de la production de Rosenkavalier en 1972 par Jürgen Rose.

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Acte II C’est le jour de la présentation de la rose dans le salon de Faninal. Comme le veut la tradition, le maître du logis quitte les lieux avant l’arrivée du chevalier, non sans avoir rappelé à sa fille Sophie la noble alliance qu’ils vont contracter. Sophie cherche à répéter les leçons d’humilité apprises au couvent, tandis que Marianne, sa duègne, guette à la fenêtre l’arrivée du chevalier à la rose et en décrit le merveilleux spectacle. Octavian, fort intimidé, entre en portant la rose qu’il remet cérémonieusement à Sophie. Les deux jeunes se

découvrent dans un grand éblouissement et vivent un instant d’éternité. Mais on apporte les chaises, et sous l’œil de Marianne, ils tentent une conversation mondaine. Naïvement, la jeune fille confesse qu’elle s’est instruite dans le « Miroir de la noblesse autrichienne » des prénoms, âge et sobriquet de son visiteur ; elle avoue son bonheur de se marier et son intention de tenir dignement son nouveau rang, dût-elle souffleter quiconque l’oublierait. Mais leur entretien est interrompu par l’arrivée du futur conduit par Faninal. Ochs se montre aussitôt le butor de son patronyme et déplaît souverainement à Sophie. Il l’examine comme une marchandise et la poursuit de grossières assiduités. Sophie se débat, Octavian a peine à se contenir, et Faninal ne rêve qu’à l’honneur qui lui est fait. Ochs et Faninal s’en vont ailleurs discuter avec le notaire des conditions du mariage, et Marianne doit courir rétablir l’ordre parmi la domesticité mise en effervescence par les gens de Lerchenau. Sophie supplie Octavian de l’aider à se dégager de ce mariage. Les deux jeunes gens s’avouent leurs sentiments et échangent avec ravissement leur premier baiser. Soudain Valzacchi et Annina, entrés subrepticement, se précipitent sur eux, les immobilisent

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ARGUMENT

et appellent à tue-tête Ochs, qui arrive. Octavian l’affronte : sa fiancée ne veut pas de lui. Ochs n’en a cure et cherche à entraîner Sophie pour lui faire signer le contrat. Sophie résiste et Octavian dégaine son épée. Le Baron se blesse, son éraflure le fait hurler au meurtre. Faninal laisse éclater sa colère, il obligera sa fille à épouser Ochs, dût-il la traîner à l’autel. Sophie, que la présence d’Octavian rend intrépide, lui tient respectueusement tête ; il la menace du couvent à vie. Marianne emmène Sophie, Octavian se retire. Tout le monde s’empresse autour de Ochs, abattu. Une carafe de vin le ragaillardit ; il est même émoustillé par la résistance de la jeune fille. Un billet apporté par Annina lui rend toute la bonne humeur : c’est Mariandel qui accepte son rendez-vous. Il s’apprête à dicter sa réponse, omettant toujours de récompenser Annina, dont la mimique n’annonce rien de bon. Acte III Le Baron soupera à l’auberge avec Mariandel, dans un cabinet particulier muni d’une alcôve et truffé de comparses qui surgiront de trappes ou de placards. Déjà déguisé en Mariandel, Octavian met la dernière main aux préparatifs, assisté de Valzacchi et d’Annina, grassement payés. Ochs arrive, le bras en écharpe, resté seul avec Mariandel, il l’entreprend aussitôt. Mariandel refuse de boire et découvre le lit. Elle s’en alarme et joue la coquette. Le Baron veut l’embrasser, mais il est déconcerté par sa ressemblance avec ce maudit comte Rofrano. Le vin et la musique font larmoyer Mariandel, qui se met à philosopher sur le temps qui passe. Le Baron se sent mal à l’aise : il a vu à plusieurs reprises des têtes lui apparaître dans la pièce. Il se croit menacé de congestion et enlève sa perruque. Finalement la peur le saisit et il appelle à l’aide. L’aubergiste accourt avec ses valets, et d’une autre porte surgit une femme tout en noir qui se dit son épouse légitime abandonnée ; des enfants l’accompagnent et tournent autour d’Ochs en criant « Papa ! Papa ! » Le Baron appelle à grands cris la police qui arrive. Ochs cherche désespérément sa perruque, Mariandel court se cacher dans l’alcôve. Le commissaire somme Ochs de dire qui est cette jeune fille avec lui.

Ochs déclare qu’elle est sa fiancée, Sophie Faninal. Lorsque Faninal, convoqué par Octavian, arrive, Ochs comprend de moins en moins. Faninal se déclare le beau-père du Baron, mais il nie être le père de la jeune fille, afin de le prouver il fait venir Sophie. Elle affirme avoir rompu toutes fiançailles. Faninal se trouve mal. Le Baron ayant découvert sa perruque, retrouve son aplomb et déclare vouloir épouser Mariandel, rétive, qui souhaite faire une déposition, sans que le Baron l’entende. OctavianMariandel met le commissaire au courant de la comédie montée contre Ochs qui enrage. L’aubergiste annonce l’arrivée de la Maréchale. Ochs croit trouver en elle une alliée. Mais cette dernière conseille au Baron d’abandonner la partie et renvoie le commissaire en l’assurant qu’il s’agit d’une simple farce, une mascarade viennoise. Mais le Baron persiste, lorsque apparaît Octavian, il se rend compte qu’il s’agit d’une conspiration plus profonde. La Maréchale lui suggère de ne rien penser et de se retirer dans la dignité. Tout ce qui touche à cette affaire est terminé. L’arrivée de Valzacchi, d’Annina, d’enfants et de créanciers finit de convaincre Ochs qu’il est grand temps de partir. Après un salut à la Maréchale, il sort précipitamment sous les réclamations des uns et les braillements des autres. La Maréchale, Octavian et Sophie restent seuls. Sophie, songeuse, devine le lien qui unit la Maréchale et Octavian. Sophie repousse Octavian qui sait plaider sa cause, et Sophie ne demande qu’à l’entendre. Dans un trio célèbre, chacun s’interroge : la Maréchale se savait appelée à aimer jusqu’au sacrifice de son amour, mais s’étonne qu’il lui ait été réclamé si vite ; Sophie se sent à la fois sanctifiée et profanée, comblée et dépouillée par le don de la Maréchale ; et Octavian se demande s’il n’y a pas là une grande injustice qu’il n’ose sonder. Rapidement les deux jeunes gens oublient ces ombres, ils s’aiment. La Maréchale va rejoindre Faninal dans une pièce voisine. Sophie et Octavian en extase n’ont pas remarqué le départ de la Maréchale. Ils poursuivent leur duo qui se conclut par un baiser. Sur la scène, restée vide, le petit page noir de la Maréchale entre et prend le mouchoir qui a glissé des doigts de Sophie.

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SYNOPSIS

Act One The bedroom of the Feldmarschallin Princess von Werdenberg. In the absence of her husband, the Marschallin has spent the night with her present lover, the seventeen year old Count Octavian Rofrano. Soon after the Marschallin’s black page boy has brought in breakfast, the couple are startled by an unexpected visitor. The princess thinks it is her husband come back, and tells Octavian to hide himself behind the bed hangings. There he disguises himself as a chambermaid. The guest turns out in fact to be the Baron Ochs auf Lerchenau, the Marschallin’s cousin. He has arrived from his country estate to ask the princess to recommend an envoy who, in accordance with the traditionnal ceremony of betrothal, will take the silver rose to his wife-to-be. Quite unabashed, the Baron admits that he is entering into marriage with the daughter of the new-rich Herr von Faninal for financial reasons alone. Nor does he intend to let marriage stand in the way of his numerous affairs. The Marschallin suggests that Count Octavian be the Knight of the Rose, and she shows the Baron his portrait. Ochs remarks on the similarity between the latter and pretty chambermaid “Mariandel” (the disguised Octavian) to whom he has taken a fancy. In roguish humour, the princess hints that the maid is Octavain’s illegitimate sister. Mariandel manages to slip away from the Baron when the various characters assembled outside are let into the room for the levee. The Marschallin presents gifts to three orphans of noble birth. The intriguers Valzacchi and Annina offer the princess a copy of their scandal sheet (which she refuses), then an Italian singer performs an aria. Whilst the Marschallin’s coiffure is being attended to, Ochs argues with the notary over a clause in the marriage contract, becoming so vociferous in his anger that he interrupts the singer. The Marschallin dismisses everyone and promises the Baron that she will send the silver rose to Count Octavian. Left alone, the princess first vents her anger at the vain Baron and his shameless plan to get married for money, then she becomes wistful and remem-

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bers the time when, as a young girl, she was ordered, fresh from the convent, into holy wedlock and contemplates the inevitability of growing old. Having rid himself of his disguise, Octavian returns as an official visitor, only to find that his unbridled passion is dampened by the Marschallin’s melancholy toughts of the passing of time. To his horror she predicts that Octavian, today, or tomorrow or the day after that will leave her for a younger, more attractive woman. At the Marschallin’s request he leaves, feeling wounded. Realising that she did not even kiss him goodbye, the princess immediately sends her servants after him. But they are to late, for he has already ridden off. She gives the silver rose to her black page boy, bidding him to take it to the Count. Act Two In the house of the wealthy parvenu Herr von Faninal, the young Sophie awaits the arrival of her future husband in joyful but naive expectation. Accompanied by her duenna Marianne she receives Octavian, who gives her the silver rose on behalf of the Baron. The Count is smitten by the charms of the young Sophie and she is attracted to him. Faninal enters with Baron Ochs. Sophie is horrified at the uncouth behaviour and rude words of her husband-to-be. When Ochs’ lackeys start a brawl in another part of the house, Marianne rushes out to restore peace, leaving the young couple alone. Sophie admits that she has no desire to marry the Baron, and asks Octavian to help her. United in their stance against Ochs, they are drawn to one another and embrace. Suddenly Valzacchi and Annina rush in. They are now in the service of the Baron and call him in from the room next door so that he can surprise Sophie in a compromising situation. Ochs puts on a tolerant face and merely ignores Octavian when the latter explains that Sophie does not want the marriage to go ahead. The young Count draws his rapier and provokes the Baron, who call on his lackeys for help. A scuffle ensues, during the course of which the Baron is slightly wounded. Faninal storms in,

© LEBRECHT MUSIC & ARTS

The action takes place in Vienna, in the mid-18th century.


orders Octavian out of the house and is horrified to learn from his daughter that she does not mean to marry the Baron. But he insists on this marriage that will be socially advantageous for his family, dismisses Sophie and attempts to calm the Baron. Left alone, Ochs bemoans the trouble which life in the town brings, but he quickly cheers up when Annina appears with a note from Mariandel asking him for a rendez-vous the next evening. Act Three A private room in an inn near Vienna. Octavian has won over Valzacchi and Annina, and has devised a plot to compromise Ochs in front of his future father-in-law. Disguised as Mariandel, he receives the Baron, but when the latter becomes too bold in his advances, an elaborate practical joke begins to unfold: at a sign given by Mariandel, mysterious faces appear through trap doors and hidden windows, then Annina rushes in with children in tow and declares herself to be the Baron’s abandoned wife. The bewildered Ochs flings open a window and calls for the police. A commissionner duly arrives and quickly restores order, but then begins to question the Baron about his seduc-

tion of Mariandel, who is now sobbing to herself. Ochs says that the girl is his fiancée Sophie. An alarmed Faninal arrives, furiously denies that the girl is who Ochs says she is and send for the real Sophie. Mortified at the Baron’s scandalous behaviour, Faninal collapses and is taken to an adjoining room to recover. To everyone’s surprise, the Marschallin suddenly appears. She dismisses the police commissioner and reveals the true identity of Mariandel to Ochs. When he realises that the marriage will not take place after all, he storms off, followed by a string of waiters. The Marschallin stays behind with Sophie, and Octavian stands between the two women, quite at a loss. The princess has realised that her young lover has lost his heart to the girl, and in calm capitulation decides to renounce her hold on him. To placate the enraged Faninal she decides to take him back home in her coach. Whilst she is fetching him, the two lovers fall into each other’s arms, blissfully happy. Sophie drops a handkerchief, and after everyone has left the inn, the Marschallin’s black page boy appears. He looks for the handkerchief, picks it up and trips out again.

[ PAGE DE GAUCHE ]

Croquis des costumes de la création de Rosenkavalier par Alfred Roller. [ C-DESSUS ]

Dessin du décor du premier acte de la création de Rosenkavalier en 1911 par Alfred Roller.

© Decca

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Naissance d'une collaboration... par Bernard Banoun*

S

i Strauss et Hofmannsthal avaient des personnalités et des origines artistiques très éloignées, leur collaboration n’est pas, bien entendu, le fruit du hasard. Au-delà des différences, plusieurs éléments communs expliquent sa naissance. En 1905, Strauss et Hofmannsthal étaient deux artistes jeunes, que la gloire avait atteints très tôt et qui étaient parvenus rapidement, pour Strauss, et immédiatement, dans le cas de Hofmannsthal, à un langage très personnel. Tous deux incarnaient une forme de modernité et même, pour Strauss, l’avant-garde. Mais au lieu d’aller vers un bouleversement des formes, phénomène caractéristique de leur temps, ils se voulurent toujours artistes de continuité, non de rupture. Cela est d’autant plus frappant chez Strauss : alors que dans

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Salome et surtout Elektra, son écriture est d’une audace inouïe à l’époque et forçait l’admiration de Schönberg et de Varèse, il n’alla pas plus loin dans cette voie et se contenta d’user du langage qu’il s’était forgé et qui lui permettait d’exprimer ce qu’il avait besoin d’exprimer, quitte à revenir au passé et sans que la modernité fût en soi un critère. L’excellence de chacun des deux artistes dans son domaine respectif ne pouvait donc que remettre en question le rapport d’allégeance traditionnelle du librettiste envers le compositeur. La position du librettiste était encore mal définie, ce dont témoigne la première œuvre achevée de leur collaboration, Elektra. Dans sa perfection, cet opéra est en vérité presque un « fait accompli » devant lequel se trouve placé Hofmannsthal : comme dans le cas de Salome, le compositeur choi-

© DR

Hugo von Hofmannsthal et Richard Strauss Willi Bithorn, 1914 publié comme carte postale d'art en 1932, Munich Découpage


sit une pièce vue au théâtre et y travaille seul, et si les modifications demandées, notamment pour la scène de reconnaissance entre Electre et Oreste se révélèrent décisives, le librettiste n’avait d’autre choix que d’obtempérer. C’est une fois achevée la partition d’Elektra que la collaboration prit sa consistance véritable avec deux nouveaux sujets d’opéra : Semiramis, qui ne cessa jamais de préoccuper Strauss jusqu’à la fin des années 1930, et un projet tiré des Mémoires de Casanova […] C’est seulement à partir de 1909 qu’exista une union véritable entre le poète et le compositeur. En outre, il ne fait aucun doute que le succès immense du Chevalier à la rose scella définitivement leur collaboration. Ce succès (même si Hofmannsthal n’était pas totalement satisfait du traitement musical donné à sa pièce) fut décisif

dans la mesure où il permit aux auteurs de s’imposer au public, et de se prouver mutuellement la viabilité de leur projet ; Le Chevalier à la rose devait demeurer pour tous deux un point de référence absolu ; même si leurs raisons pouvaient s’avérer différentes, ils aspirèrent toujours à écrire un second Chevalier, non pas imitation du premier, mais véritable nouvelle comédie en musique. BB

* Bernard Banoun est l'auteur d’une nouvelle traduction de la correspondance de Richard Strauss et Hugo von Hofmannsthal : Correspondance 1900–1929 parue aux Éditions Fayard en 1992. Il a collaboré à plusieurs reprises aux programmes ainsi qu’au livret de Die lustige Witwe du Grand Théâtre de Genève.

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La photo officielle de la première de Der Rosenkavalier à Dresde le 26 janvier 1911 : [de gauche à droite, debout] le metteur en scène Max Reinhardt, Hugo von Hofmannsthal, le décorateur Alfred Roller, Leonhard Fanto (costumes), le régisseur Georg Toiler. [Assis] Le directeur de l'opéra de Dresde, Nikolaus Graf von Seebach, Richard Strauss et le chef d'orchestre Ernst von Schuch.

Correspondance

© LEBRECHT MUSIC & ARTS

(extraits)

Rodaun, 18 octobre 1908 Mon cher docteur Strauss, Il m’est très pénible de penser que vous puissiez croire que je rechigne à vous donner la comédie ou que je nourrisse des intentions dissimulées ou autre chose de ce genre ; j’espère en revanche que vous voyez les choses aussi simplement qu’elles le sont : en dépit de ce que j’avais escompté, j’en suis déjà à mon 5e mois de travail sur cette pièce, et je n’ai toujours pas terminé. Je crois également devoir vous dire que je ne suis désormais plus en mesure de ne pas faire jouer cette pièce au théâtre. Je croyais cet été que ce serait le cas l’automne venu, mais les choses ont pris une autre tournure. Il me paraissait possible de mettre au plus tard début septembre un point final à cette comédie tirée de Casanova et, ensuite, d’avoir le temps de mener à bien ma comédie en dialecte autrichien, que j’avais écrite pour moitié l’an passé ; de la sorte, j’aurais été en mesure de proposer le cas échéant cette seconde comédie à Reinhardt qui, pour la deuxième fois maintenant, me réserve la fin janvier, c’est-à-dire la meilleure période de la saison. Rien de cela n’a abouti et il est désormais exclu que je puisse me résoudre à autre chose qu’à lui donner cette comédie et, par la même occasion, à la donner à Kainz, qui n’a pas eu jusqu’à présent la moindre nouvelle de moi. Cette situation, qui me contraint à ne pas exaucer entièrement un désir que vous aviez formulé et auquel j’aurais si volontiers accédé, me navrerait si je n’avais l’intime conviction qu’étant donné la tournure prise par ce travail, vous ne pouvez l’utiliser tel quel pour le mettre en musique (de même que ni Mozart ni qui que ce soit n’aurait pu se servir sans la modifier de la comédie en prose Le Mariage de Figaro) ; en outre,

je suis profondément convaincu que jamais nous n’aurions pu obtenir un livret utilisable pour un Spieloper (ce à quoi, je l’espère, nous parviendrons) si je n’avais au préalable écrit le sujet sous cette forme, qui m’est personnelle, de comédie psychologique en prose ; car c’est maintenant seulement que j’envisage cette pièce avec assurance et l’esprit totalement libre, que j’ai le courage et l’envie, si vous, de votre côté, êtes toujours attiré par le fond du sujet et du canevas (et après que la pièce aura, sous forme de comédie, remporté un succès, qu’il soit grand ou petit), que j’ai le courage et l’indispensable brin de frivolité pour réviser cette pièce de telle sorte qu’elle se prête à devenir un Spieloper, pour chercher à faire mieux ressortir l’aspect lyrique tout en atténuant la caractérisation des personnages. De plus, il sera fort bénéfique au livret que les personnages portent en eux de façon latente un modelage psychologique plus subtil, comme c’est tant le cas pour Figaro, Susanne, Chérubin. Cette nouvelle œuvre, à laquelle je m’attaquerai, vous le verrez, avec une joie et un plaisir immenses, exige que nous nous soyons préalablement mis bien d’accord sur le style que vous entendez donner à votre Spieloper. Car, si j’ai bien saisi vos indications, qui m’ont paru plus que prometteuses, vous voulez créer quelque chose d’un style entièrement neuf, quelque chose (puisque toute évolution, en art, procède selon des cycles) qui sera plus proche de l’ancien Spieloper que des Maîtres chanteurs ou de Feuersnot. Vous voulez, si je ne me suis pas totalement mépris sur vos indications, faire alterner les numéros clos avec d’autres passages qui se rapprocheront de l’ancien récitatif secco. Tout cela exigera les mises

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au point les plus subtiles et j’espère bien me rendre par là digne de porter le titre glorieux de librettiste, dont je fais grand cas. Mais, comme je vous l’avais dit, il me semblerait impossible de travailler sans savoir où je vais, tant est grand mon respect pour les difficultés que pose un livret de qualité ; en revanche, en prenant appui sur la comédie, je me sens plein de courage et d’ardeur. Mais quand pourrai-je enfin vous montrer ma comédie ? Vous parliez naguère de venir à Vienne vers la fin octobre. Cela tient-il toujours ? Sinon, j’irai à Berlin dans les premiers jours de novembre et je compte avoir d’ici là fini la pièce. Où donc finirons-nous par nous rencontrer ? Donnez-moi par retour une réponse brève mais rapide sur ce point. Votre sincèrement dévoué, Hofmannsthal

Weimar, le 11 février 1909 Mon cher Docteur, Kautsky, le décorateur du théâtre de la Cour, m’écrit, tout agité, que vous lui auriez dit que ses décors me rendaient « malheureux ». Ce ne peut être qu’une erreur ; je trouve ses décors très bien, j’ai seulement (entre nous soit dit) trouvé stupide la « trouvaille » de M. von Hulsen qui consiste à transformer le palais en basse-cour ; s’il m’avait fait ça dans une de mes pièces, je serais devenu grossier et je l’aurais bien vite fait déguerpir de son propre théâtre ; je n’avais encore jamais eu à souffrir ce genre de stupidité arrogante ; mais puisque je considère vos désirs (dans le cas présent : le désir que tout se déroule sans heurts) et l’effet que produira l’opéra comme les seules choses devant dicter mon attitude, je n’ai jamais mentionné ce détail à quiconque, sinon à vous, par une remarque que je vous avais faite lors d’une répétition – en outre, tout cela est absolument égal. Pour calmer les nerfs de Kautsky, je lui ai télégraphié un compliment passepartout pour ses décors. Voici maintenant qui sera (je l’espère) autrement important pour nous deux : j’ai fait ici, en trois après-midi tranquilles, le canevas complet et entièrement original d’un Spieloper, d’un comique corsé, tant dans les personnages que dans les situations,

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une action colorée possédant presque la transparence d’une pantomime, des passages permettant la poésie, la plaisanterie, l’humour, et même un petit ballet. Je trouve ce canevas ravissant et le comte Kessler, avec qui j’en ai longuement discuté, en est enchanté. Deux grands rôles, l’un pour un baryton, l’autre pour une jeune fille gracieuse à la Farrar ou à la Mary Garden, travestie en homme. L’époque : Vienne sous Marie-Thérèse. À partir de dimanche, je serai à Berlin, Schadowstrasse 4. Nous verrons-nous ? (Mais pas en société, cela ne sert à rien). Votre, Hofmannsthal

Rodaun, le 16 mars 1909 Cher Docteur, Il était irréfléchi et maladroit de ma part de vous écrire que je ne voulais rien vous lire. Au contraire, j’aimerais vraiment vous lire le début et la fin de l’acte I (la partie centrale manque encore) pour être bien sûr de certaines choses. Le canevas est excellent, plein de détails amusants qui sont presque de la pantomime ; je vise une extrême concision et prévois une durée de 2 h 30, donc la moitié des Maîtres chanteurs. Mais ma désinvolture envers les conventions de l’opéra ne m’entraîne-telle pas trop loin ? Est-ce que, dans ma volonté de garder un ton caractérisant bien les personnages, je ne me soucierais pas trop peu de ce qui est chantable ? Voilà ce que j’aimerais entendre de vous et je continuerai ensuite à travailler avec d’autant plus de plaisir. À partir de jeudi 6 heures, je serai à votre disposition chaque jour, ici ou à Vienne, où vous voudrez. Il serait charmant que vous veniez nous voir un soir ici à la campagne ; on causerait de tout dans les détails ; cela nous apporterait beaucoup. Mais si votre épouse est là aussi, cela n’ira pas, parce qu’elle s’ennuiera ; ici, nous n’avons rien à offrir que de la neige qui fond. Et comme j’imagine que, le soir, vous préférez jouer au skat, j’irai volontiers vous trouver en ville entre 6 et 8 heures. Répondez-moi par retour. Votre dévoué, Hofmannsthal


CORRESPONDANCE HOFMANNSTHAL STRAUSS

Garmisch, 21 avril 1909 Mon cher Hofmannsthal, Merci pour vos lettres ainsi que pour les premières scènes reçues ; j’attends la suite avec impatience. Ce début est charmant et se composera comme du beurre ; je couve déjà. Vous êtes à vous seul Da Ponte et Scribe. J’ai écrit à Weingartner une lettre plutôt vive en le priant de s’expliquer. S’il persiste, je vous recommande, puisque vous êtes sur place, de vous adresser directement à la presse pour donner un coup de semonce à W. ; c’est ce qui marche le mieux à Vienne. Adressez également mes remerciements à Bahr pour m’avoir informé si promptement. J’ai également proposé Mlle Paalen à W. pour Clytemnestre ; j’écris moi-même aujourd’hui à Mme Weidt. Ici, c’est magnifique, plus beau que l’Italie, poussiéreuse et crottée. Remerciements et cordiales salutations de votre Dr Richard Strauss

P.-S. La représentation d’Elektra à Milan m’a surpris par sa qualité : l’Electre de Kruszelnicka en tous points remarquable, les autres rôles excellents vocalement ; jamais je n’ai entendu l’opéra si bien chanté. Orchestre très bon, succès colossal, la meilleure recette de la saison. Je crois que maintenant nous avons le vent en poupe avec Elektra. Félicitations à vous et à moi ! Rodaun, 24 avril1909 Très cher Docteur, Avant tout un grand merci pour votre si bonne lettre. Je me réjouis profondément que vous ayez plaisir à travailler avec moi. Nul besoin de vous dire à quel point la réciproque est vraie. La comédie me donne mille tourments, en particulier certains passages : former des transitions fluides, modeler les personnages sans que l’action s’arrête jamais, voilà qui n’est pas un jeu d’enfant ; Scribe et Da Ponte travaillaient sans doute avec des conventions plus simples. Mais je travaille avec le plus grand plaisir et me flatte que le résultat sera bon et même, espérons-le, excellent et que nous battrons avec cette comédie autant de myriades que nous avions battu de milliers avec Elektra, comme Saül et David dans la Bible : et, dans les deux cas,

c’est bien de Philistins qu’il s’agit! La dictée prend beaucoup plus de temps que je ne pensais, à cause des mots de dialecte, de la ponctuation et du reste. J’espérais dicter le premier acte d’une seule traite, mais j’ai déjà dicté pendant deux fois deux heures et n’ai toujours pas terminé ; de plus, le bureau chargé de dactylographier le sténogramme n’a pas suivi ; mais j’espère malgré tout vous envoyer au plus tard lundi la plus grande partie du premier acte. Meilleures salutations de votre Hofmannsthal

P.-S. Bien sûr, tout ne se prêtera pas aussi bien à la composition que cette première scène purement lyrique. Viendront aussi des passages plus communs, mais pas un, je l’espère, qui n’aura été fortement conçu en vue de son utilisation musicale... et les « bons » passages auront le dessus. Tâchez de trouver, pour le dernier acte, une valse viennoise à l’ancienne mode, à la fois sucrée et effrontée, qui traversera l’acte entier. Garmisch, 4 mai 1909 Mon cher Hofmannsthal, Reçu hier le premier acte : je suis tout simplement ravi. C’est vraiment charmant au-delà de toute expression : si raffiné, peut-être un peu trop raffiné pour le gros du public, mais ça ne fait rien. La partie centrale (l’antichambre) n’est pas facile à réaliser, mais j’y arriverai. Est-ce que je n’ai tout l’été devant moi ? Scène finale magnifique, se composera comme du beurre ; j’ai déjà essayé aujourd’hui, j’aimerais bien en être déjà arrivé là. Mais comme je dois composer dans l’ordre pour garder l’unité symphonique, il faut prendre patience. Finale ravissant ; bref, vous êtes un type épatant. À quand le reste ? Tous les personnages sont fameux, avec des contours très nets ; malheureusement, il me faudra encore de très bons acteurs ; avec les chanteurs d’opéra habituels, ça ne marchera pas cette fois non plus. Quand vous aurez fini l’acte II, pourquoi ne viendriez-vous pas me l’apporter vous-même et vous reposer un peu chez moi ? C’est très beau ici, ça vous plaira. J’y suis tout le temps, sauf à la

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CORRESPONDANCE HOFMANNSTHAL STRAUSS

[...] car le vrai succès, le succès durable, se compose de l’effet produit sur la partie grossière et sur la partie raffinée du public, cette dernière conférant son prestige à l’ouvrage, un prestige sans lequel on est perdu, tout comme on est perdu si on ne parvient pas à un impact populaire. Pentecôte, car je vais à Aix-la-Chapelle. Cette semaine, on redonne Elektra à Berlin, Francfort, Munich. Et à Vienne ? Tenez-moi toujours au courant de ce qui s’y passe, avec l’aide de notre cher mouchard de Bahr, pour que je puisse en temps voulu taper sur les doigts du grand directeur-en-même-temps-compositeur. Encore une fois, tous mes remerciements et toutes mes félicitations. Bien des choses (de la part de ma femme aussi) à vous et à votre chère épouse. Votre fidèle, Dr Richard Strauss

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Garmisch, 7 mai 1909 Cher Hofmannsthal, D’où sort cette nouvelle dans la presse ? Je vous avais pourtant prié instamment de ne pas souffler mot de Semiramis ! Comme ça, dans un an, nous aurons un opéra de d’Albert  : Semiramis. Que diriez-vous du titre : Ochs de Lerchenau et la rose d’argent ? Je compose d’arrache-pied : j’espère avoir terminé d’ici à fin juin l’esquisse du premier acte, celle du deuxième d’ici à fin septembre. Cordiales salutations de votre Dr Richard Strauss

Rodaun, 12 mai 1909 Mon cher Docteur, Je vous remercie chaleureusement des aimables paroles que vous avez eues pour me confirmer la réception du premier acte et votre satisfaction. J’éprouve une grande joie à lire de telles choses venant de vous – et pour toute réponse, je ne puis qu’exprimer le plaisir et l’ardeur que j’ai à travailler avec vous et pour vous, et vous dire combien je cherche de toutes mes forces à me pénétrer des exigences, des possibilités et du style des opéras de caractère joyeux ; cela permettra également, je l’espère, de produire quelque chose qui s’accordera bien avec certains aspects de votre personnalité artistique (notamment ce mélange de lyrisme et de grotesque dans la caractérisation) et qui sera à même de rester pendant de longues années, voire des décennies, inscrit au répertoire. Le III e acte sera, j’espère, le meilleur : d’abord effronté et sensuel, burlesque ensuite, pour finir sur un doux pianissimo. Vous craignez que cet ouvrage ne soit trop délicat. La marche de l’action n’est-elle pas simple et compréhensible, même pour le plus naïf des publics ? Un gros prétendant d’âge mûr, imbu de sa personne, soutenu par le père de la jeune fille, est supplanté par un jeune et gracieux amoureux – peut-on faire plus simple ? Il faudra, je crois, s’en tenir au canevas tel qu’il est actuellement, loin de toute trivialité et de toute convention ; car le vrai succès, le succès durable, se compose de l’effet pro-


CORRESPONDANCE HOFMANNSTHAL STRAUSS

duit sur la partie grossière et sur la partie raffinée du public, cette dernière conférant son prestige à l’ouvrage, un prestige sans lequel on est perdu, tout comme on est perdu si on ne parvient pas à un impact populaire. À la rigueur, seul le rôle-titre (Ochs) requiert un chanteur vraiment doué pour la scène. Il paraît que Pini-Corsi, le célèbre Leporello, est un génie dans de tels rôles. À l’Opéra-Comique également, il doit bien y avoir un individu ayant le talent nécessaire. Et dans les théâtres allemands, ce ne sera pas non plus impossible à trouver. À Vienne, je puis m’imaginer une représentation pleine de charme : Roller est tout feu tout flamme pour nous concevoir un cahier de mise en scène définitif avec les décors (maquettes et figurines) que Fürstner pourrait distribuer en même temps que la partition. (C’est ce que fait Sonzogno p. ex.) Nous aurons l’occasion d’en reparler en détail. Votre cordialement dévoué, Hofmannsthal

P.-S. Les commérages des journaux m’ont navré. Aucune idée quant à leur origine. Je n’ouvre pas la bouche, ne rencontre pas un seul quidam du monde journalistique. C’est un étrange amalgame de mensonge et de vérité ; p. ex. Silvia à l’auberge de l’Étoile est en effet le titre d’une comédie que j’avais faite jadis ne peut rien tirer du seul nom de Semiramis, pour la bonne raison que Semiramis n’est ni un sujet, ni une situation précise. Ma Semiramis à moi, si elle voit le jour, sera une œuvre purement originale. Donc ne vous fâchez pas ; le principal, c’est que nous ayons plus de talent ! Garmisch, 16 mai 1909 Cher Hofmannsthal, Un grand merci pour votre aimable lettre. Mon travail coule comme la Loisach, je suis tout entier à la composition. Dès demain, je commence la scène du lever. La scène du Baron est déjà terminée ; mais il faut que vous me rajoutiez quelques vers. À la fin de l’air du Baron, après le passage : « et il faut du foin dans les parages », j’ai besoin d’une grande conclusion musicale en forme de trio : le Baron répète dans le parlando le plus rapide possible :

Dafür ist man kein Auerhahn und kein Hirsch, Sondern man ist der Herr der Schöpfung. [...] Wollt’ ich könnt’ sein wie Jupiter Selig in tausend Gestalten, Wär’ Verwendung für jede. C’est pour cela qu’on n’est ni coq ni cerf, Mais bien le maître de la Création. [...] Je voudrais pouvoir être comme Jupiter Heureux sous mille formes, Pour chacune, il y aurait un usage. Il faut alors qu’il augmente sans cesse en se vantant de tous les exploits qu’il peut accomplir, si possible sur un rythme dactylique : 16 à 20 vers de caractère bouffe. Là-dessus un duo avec la Maréchale, avec le même contenu : Er agiert mir gar zu gut, Lass Er mir doch das Kind, Er verdirbt mir das Mädchen, Schweig Er doch still, usw. Vous êtes trop bon, laissez donc cette enfant en paix, il va me gâcher cette fille, Taisez-vous donc etc. À quoi s’ajoute Octavian que je voudrais, après les derniers mots du Baron : Nur ein Heu muss dabei sein (Il faut seulement du foin dans les parages), faire partir d’un grand éclat de rire et faire dire en aparté des plaisanteries sur le Baron. Cela donne un fameux trio crescendo jusqu’au moment où le Baron se ravise et enchaîne avec les mots : « Geb sie mir doch den Grasaff da, etc. (Qu’elle me donne cette mignonne, etc.) ». Voulez-vous m’écrire encore quelques lignes pour cet endroit ? La musique est déjà prête, il me faut simplement quelques mots pour l’accompagner et la remplir. Ce serait très bien si vous pouviez penser, pour le 2e acte, à un ensemble contemplatif, après le passage où une bombe dramatique viendra d’éclater, où l’action reste en suspens et où chacun se perd dans ses pensées. Ces pauses sont très importantes. Exemples : au 2e acte de Lohengrin, le grand ensemble connu sous le nom de « dumpfes Brüten »

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(sombres pensées) ; le quintette des Maîtres chanteurs. Également dans Le Barbier de Séville, finale du premier acte, l’ensemble en La bémol majeur : « Guarda Don Bartolo » (Regardez Bartolo). N’importe quel musicien connaît ces choses-là et pourra vous les jouer. Si les choses continuent de ce train, l’esquisse du premier acte pourrait bien être terminée début juin. Je serai très content si vous me rendez visite ici ; j’y suis tout le temps à part pour les fêtes de Pentecôte où je dois aller à Aix-la-Chapelle pour le festival de musique. Meilleures salutations à vous et aux vôtres, Dr Richard Strauss

Starnberg, 12 juin 1909, Villa Cantacuzène Mon cher Docteur, Tout ce que vous m’avez joué de l’opéra est vraiment magnifique et m’a donné une grande et durable joie. Depuis, j’ai relu attentivement le IIe acte et je suis résolu à en transformer radicalement les cinq dernières minutes. Trois fins d’acte paisibles sont impossibles. Cela pourrait mettre en péril l’effet de l’ensemble. Je sais déjà comment faire : Annina réclame une gratification pour porter le message ; Ochs, radin, la lui refuse ; Valzacchi accourt pour aider sa comparse ; les deux Italiens s’échauffent, le Baron appelle ses gens à la rescousse et fait renvoyer les Italiens à coups de bâton, ce qu’il regarde d’un air satisfait en fredonnant sa petite chanson ; nous aurons ainsi un finale vigoureux, grotesque, dansant, sur lequel on pourra broder votre thème de valse. Je suis heureux que cela me soit venu à l’esprit avant qu’il ne soit trop tard. Une chose encore ; permettez-moi ici d’être tout à fait franc : dans l’air du Baron, un détail m’a terriblement gêné. La ligne « Muss halt ein Heu in der Nahe dabei sein » (Il faut du foin dans les parages) ne peut être conçue, tant pour le jeu de l’acteur que pour la musique, que d’une seule façon : sur un ton de familiarité balourde, d’un air rusé, mais en chuchotant. Comme une confidence à la fois bête et finaude faite à la Maréchale chuchotée la main devant la

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bouche mais, au nom du Ciel, pas hurlée ! ce fortissimo sur « Heuuu (foin) » m’a donné un choc. Je vous en prie : modifiez ce passage, non pour moi, mais pour le bien de l’opéra tout entier. Pensez aux nuances merveilleuses qu’utilise Wagner pour faire déclamer de tels passages. Je vous envoie demain la nouvelle version, à peine remaniée, de cet air. Une fois que vous aborderez le détail de la composition, il vous viendra sans doute encore plus de nuances de déclamation et de caractérisation pour cet air, qui perd sa raison d’être s’il ne permet pas de caractériser Ochs aussi nettement que l’est, par exemple, Beckmesser. Ici, la musique doit contraindre les chanteurs à jouer bien et dans le ton, comme c’est si bien le cas chez Wagner. Encore mille mercis pour ces belles journées en votre compagnie. Bien cordialement vôtre, Hofmannsthal

Murren, 9 juillet 1909 Cher Hofmannsthal, Trois jours de neige, de pluie et de brouillard ont fait mûrir en moi une décision que je ne veux pas vous cacher plus longtemps. Ne soyez pas fâché, et réfléchissez calmement à ce que je vais vous dire. Dès la première lecture du IIe acte, j’avais senti que quelque chose clochait, qu’il était terne et mou, qu’il manquait d’une véritable progression dramatique. Aujourd’hui, je sais à peu près ce qui ne va pas. Le premier acte, comme exposition, avec sa fin contemplative, est excellent. Dans le deuxième, il manque un contraste nécessaire et un crescendo qu’il est impossible d’amener seulement au IIIe acte. Le IIIe doit renchérir sur le crescendo du IIe, le public ne peut pas attendre aussi longtemps : avec un succès mitigé pour le IIe acte, l’opéra est perdu. Même un bon troisième acte ne pourra plus rien rattraper. Écoutez maintenant comment je me représente le IIe acte. Et si vous avez de meilleures idées, tant mieux ! Donc, jusqu’à l’entrée du Baron, tout est fameux. Mais à partir de là, il faut que ça change. La disposition des deux scènes du Baron avec


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Sophie n’est pas bonne. Tous les points importants de ces deux scènes doivent être là dès la première, dans laquelle le Baron doit être tout de suite tellement antipathique à Sophie qu’elle décide de ne jamais l’épouser. Octavian doit être témoin de toute la scène, il doit bouillir de plus en plus d’une colère rentrée, pendant que le Baron, qui ne se gêne pas pour un sou devant lui et le traite au contraire comme un blanc-bec en se rengorgeant de ses succès auprès des femmes, fait ses cabrioles avec Sophie. Ensuite, le Baron, en sortant pour aller signer, lance à Octavian quelques paroles d’adieu où il lui conseille de « dégourdir » un peu Sophie. Ensuite, déclaration entre Octavian et Sophie avec le coup de théâtre provoqué par l’apparition imprévue des deux Italiens. Mais à partir de là : alerté par les cris des Italiens, le Baron arrive en personne, les Italiens lui racontent tout. Le Baron, d’abord plus émoustillé qu’indigné : eh bien, mon gars, tu as vite compris la leçon. La dispute entre Octavian et le Baron s’envenime ; duel, au cours duquel le Baron est blessé au bras par Octavian. Aux hurlements du Baron : « il m’a assassiné », toute la maisonnée déferle sur scène ; grand tableau, scandale : « le chevalier à la rose a blessé le fiancé ! », Faninal est outré, le Baron est pansé par ses serviteurs, Sophie déclare que jamais elle ne l’épousera. À ce moment-là, on peut rendre le rôle de Faninal un peu mieux défini ; il renvoie Octavian, déclare à Sophie que le contrat de mariage est déjà signé, qu’il l’enverra au couvent si elle ne veut pas du Baron. Exit Octavian, enragé, disant au Baron : nous nous reverrons Baron. On emporte Sophie, qui s’est évanouie. Le Baron reste seul, vainqueur cette fois encore. Petit monologue où il rouspète contre Octavian, se plaint de sa blessure et se réjouit tout à la fois de sa chance de Lerchenau. Sur ce arrivent subrepticement les Italiens, qui lui transmettent l’invitation au rendez-vous galant avec Mariandel. Cela peut, sans problème, produire sur le public un effet de surprise. Ne rien préparer du tout. Le finale reste tel quel ; mentionner peut-être que le

Baron ne donne pas de gratification ; la scène supplémentaire que vous m’aviez envoyée par la suite n’est pas nécessaire. Au début du IIIe acte, on peut mentionner en un mot qu’Octavian et les Italiens se sont mis d’accord, avant que Valzacchi ne livre la camériste au Baron. En apercevant Mariandel, le Baron s’écrie de nouveau : « Die Ähnlichkeit » (la ressemblance). Voilà un joli motif qui peut revenir souvent dans les scènes entre Mariandel et le Baron. Le Baron dans un rendez-vous galant avec son bras droit bandé produit également un effet comique. Qu’en dites-vous ? Pour la façon de justifier le revirement des Italiens, ne vous en faites pas. Vous trouverez bien une occasion, dans le chaos causé par le scandale, au milieu de l’ensemble avec chœurs, d’insérer la petite scène où Octavian l’emporte sur le Baron auprès des Italiens. Le public n’en a pas besoin. Il peut aussi le deviner. Plus Octavian sera entreprenant, mieux ce sera. En tout cas, il faut que ça éclate dès le deuxième acte ; comme ça, la fin diminuendo produit une fameuse impression. Pour le moment, elle ne produit aucun effet du tout, parce que le crescendo qui précède est trop faible. Est-ce que je me suis exprimé clairement ? Pensez-y. Si vous voulez, j’irai à Aussee pour qu’on se mette d’accord. Je ne peux absolument pas utiliser le deuxième acte tel quel. La disposition est mauvaise et molle. Croyez-moi, mon sentiment ne me trompe pas. La chanson : « Mit dir, mit dir, keine Nacht mir zu Lang » (Avec toi, avec toi, aucune nuit n’est trop longue pour moi) peut être placée dès la première et unique scène entre le Baron et Sophie. Avec une réminiscence de ce thème à la fin, c’est fameux. Il peut être aussi très comique, je pense, que le Baron, au troisième acte, pendant qu’il fait des tendresses à Mariandel, soit amené à se souvenir sans cesse de ce gredin de chevalier à la rose et qu’il enrage. Je trouverais ça très drôle. La ressemblance avec ce maudit visage le fait osciller entre la tendresse et la rage. Je crois que c’est un bon motif de comédie. Maintenant, je vous en prie, ne soyez pas fâché. Mais je sens que je ne pourrai rien tirer du ne acte tel qu’il est, c’est trop rectiligne ; il me faut

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Ce dialogue n’est pas à la hauteur du Ier acte. Alors ne m’en veuillez pas si j’éperonne ainsi votre Pégase : mais cet opéra doit être extra et, comme je l’ai dit, le IIe acte ne correspond pas à ce que j’attends de vous ni à ce que vous pourriez créer. une grande construction dramatique pour que je m’intéresse pendant longtemps à cet univers. Octavian pourrait éventuellement faire sa déclaration tout de suite après le duel, se dire prêt à épouser lui aussi Sophie ; on pourrait faire Octavian baron, et Lerchenau comte ; Faninal, avec ses rêves de noblesse, hésite entre comte et baron et finit quand même par donner sa préférence au comte. Ce n’est qu’une proposition ! En tout cas, il est bien qu’Octavian soit battu au deuxième acte et que Lerchenau, même s’il est blessé, sorte vainqueur de l’affaire avant sa déconfiture du IVe acte. Cela pourrait aussi être une bonne façon d’introduire la Maréchale au IIIe acte, si elle a déjà eu vent du scandale qui a eu lieu chez Faninal. Vous voyez, il y a des thèmes à foison. Il ne manque que le poète qui les mettra sur le papier et les habillera de mots,

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et ce poète, c’est vous. Je vous en prie, ne me laissez pas en plan. Voulez-vous que je vienne à Aussee ? Ou bien est-ce que vous m’avez compris ? Me suisje exprimé assez clairement ? Sans rancune ! J’ai déjà commencé l’esquisse de l’acte II et je vais, en attendant, le composer jusqu’à l’entrée de Lerchenau. Cordiales salutations à vous tous, votre Dr Richard Strauss

À partir du 16 juillet, je serai de retour à Garmisch. Rodaun, 9 juillet 1909 Cher Docteur, J’espère que les deux lettres recommandées contenant tous les compléments pour les actes I et II sont entre vos mains ? Confirmez-le d’un mot ! J’ai conclu l’affaire avant-hier avec Roller en votre nom et sur la base de ce dont nous étions convenus à Garmisch. Il est d’accord pour une somme forfaitaire de 5000 marks et un dividende sur les bénéfices éventuels. Il se fait une grande joie d’entreprendre ce travail et m’écrit aujourd’hui avoir déjà fixé les plans des décors. Avec les très cordiales salutations et les compliments de votre Hofmannsthal

Murren, 10 juillet 1909 Cher Hofmannsthal, Puisque j’en suis à critiquer et que vous aurez surmonté les premières frayeurs causées par ma lettre d’hier, je vais me risquer à poursuivre avec la même franchise. Je continue à réfléchir au IIe acte, et je suis de plus en plus convaincu que, pour l’essentiel de l’architecture et du développement de l’acte, ma lettre d’hier est entrée dans le vif du problème. Il vous sera arrivé à vous aussi, comme c’est souvent le cas pour moi, d’être mécontent de quelque chose, mais de ne pas en prendre pleinement conscience avant qu’un autre ne mette le doigt sur la plaie. Vous-même sentiez bien que quelque chose n’allait pas dans le IIe acte, quand vous me renvoyiez avec tant d’insistance au IIIe acte. Mais, comme je l’ai déjà dit, le IIIe acte tout seul ne peut rien y faire. Le succès, il doit être


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à l’acte II, et l’acte III devra le confirmer. Je vous supplie donc encore de réduire les deux duos du IIe acte entre Octavian et Sophie, mais surtout ceux entre le Baron et Sophie, à une seule scène chaque fois, ou du moins de replacer tous les éléments essentiels de la seconde scène dans la première scène correspondante pour qu’il ne reste de la seconde scène entre Octavian et Sophie que le dernier point culminant. Je m’explique : dans toute la scène entre le Baron et Sophie (et Octavian, qui écoute et enrage de plus en plus), l’atmosphère doit laisser couver tant de menaces, la répulsion qu’éprouve Sophie envers le Baron doit être tellement forte que, aussitôt après que ce dernier est sorti pour signer le contrat (Sophie n’a pas à le signer, ou bien elle l’a déjà fait), Sophie éclate : « Sauvez-moi de ce monstre » et tombe dans les bras d’Octavian, avec un bref duo passionné jusqu’à ce qu’ils s’embrassent et soient surpris par les Italiens. Encore une chose : puisque vous devez retravailler les choses en profondeur, revoyez aussi tout le dialogue entre le Baron et Sophie. Je le trouve assez pauvre et terne par rapport au reste et j’ai le sentiment qu’avec votre goût et votre talent, vous pourriez créer ici quelque chose de beaucoup plus spirituel, plus finement ciselé. Ce dialogue n’est pas à la hauteur du Ier acte. Alors ne m’en veuillez pas si j’éperonne ainsi votre Pégase : mais cet opéra doit être extra et, comme je l’ai dit, le IIe acte ne correspond pas à ce que j’attends de vous ni à ce que vous pourriez créer. J’espère que j’aurai bientôt de bonnes nouvelles de vous et je demeure, avec mes plus cordiales salutations, votre sincèrement dévoué Dr Richard Strauss

Garmisch, 20 juillet 1909 Cher Hofmannsthal, Ne vous laissez surtout pas décourager par mes critiques : je ne peux que juger d’après moi, et rien ne m’est aussi profitable, rien ne stimule et féconde autant mon ambition et ma force créatrice que la critique négative de quelqu’un au jugement duquel j’accorde de la valeur. Ma critique doit vous éperonner, pas vous décourager. Je veux

tirer le meilleur de vous-même. Puisque vous vous êtes engagé si avant, l’affaire avec Roller est bien sûr entendue. Ne lui dites rien d’autre, sinon que ce travail lui reviendra. L’aspect matériel sera réglé d’une façon ou d’une autre. Pour la scène où le Baron fait la cour à Sophie, il vous viendra sûrement en la retravaillant quelque chose de meilleur, de plus cocasse et de plus percutant. Je connais ça ; on est mécontent que quelqu’un d’autre trouve à y redire, mais on n’a pas la paix tant qu’on n’a pas trouvé mieux. Bien reçu entretemps tous les compléments pour le I er acte. Simplement, quand je reçois quelque chose, j’oublie toujours de confirmer aussitôt. Par conséquent, ne vous faites pas de souci. Meilleures salutations de votre Dr Richard Strauss

P.-S. N’oubliez pas que le public devrait aussi rire ! Rire, pas seulement sourire et soupirer d’aise ! Ce qui me manque pour le moment dans notre œuvre, c’est une situation vraiment comique ; c’est seulement gai, mais pas comique ! Aussee, 26 juillet 1909 Cher Docteur, Je suis à l’ouvrage, plein d’amour et d’ardeur; j’ai changé l’ordre des scènes ; du deuxième duo Sophie-Octavian, il ne reste plus que le dernier point culminant sentimental, délesté de tout ce qui retardait l’action ; il s’est enrichi en revanche d’un tendre duo d’amour de 21 lignes, juvénile, très joli, je crois ; le Baron est déjà blessé, le grand ensemble déjà terminé, je pense vous envoyer le tout dans quelques jours et j’espère que vous en serez content ; je me rends bien compte que cette nouvelle version, d’un point de vue purement théâtral, est bien meilleure que la précédente, et je vous suis donc reconnaissant d’être intervenu si énergiquement. Une seule petite chose encore, pour laquelle je vous prie de me répondre immédiatement par carte postale : il s’agit du vers que le Baron et les autres (qui le singent) doivent répéter comme un refrain. Vous avez dans l’oreille la version suivante : « Das ist das Glück von Lerchenau »

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(C’est la chance de Lerchenau), mais cette séquence rythmique, vous l’avez dans l’oreille (le public tout entier aussi) plus ou moins inconsciemment, mais la plupart du temps consciemment, comme refrain de la ballade la plus célèbre de Uhland reproduite dans tous les livres d’école et dont chaque strophe se termine par : « Das ist das Glück von Edenhall! » (C’est la chance des Edenhall !) Cela ne convient donc pas ; en revanche, la version suivante me serait sympathique, elle a un bon rythme, du poids, un côté débonnaire qui va comme un gant au Baron : « Ich hab halt ja ein Lerchenauisch Glück! » (N’ai-je pas une chance de Lerchenau ?) Avec le sous-entendu vulgaire : « ein sauisch Glück! » (Une chance de cochon !) Les autres chantent alors : « Er hat, halt ja, ein Lerchenauisch Glück. » (Il a, c’est vrai, une chance de Lerchenau), précisément à son moment le plus pitoyable. Cette phrase vous convient-elle ? Sinon, je devrai en chercher une autre. Une réponse s.v.p. Votre Hofmannsthal

Aussee, 3 août 1909 Cher Docteur, J’espère que vous prenez désormais plaisir au IIe acte, et ce plaisir, c’est en premier lieu à vous que vous le devez. J’ai appris grâce à tout cela des règles fondamentales sur les œuvres dramatiques destinées à la musique et je ne les oublierai pas. J’ai aussi refondu la scène de la demande en mariage ; c’est maintenant une scène vraiment drôle que cet ensemble sans interruption, avec sans arrêt le jeu très corsé du Baron, culminant dans sa petite chanson effrontée, avec l’enthousiasme grotesque de Faninal (et de la duègne) et la rage grandissante d’Octavian. J’espère également avoir réussi la scène qui culmine dans le duel de telle sorte qu’avec un jeu un tant soit peu corsé de la basse bouffe, le sourire fera place au rire. Car je ne demeure nullement fermé à vos réflexions sur la différence existant entre ce qui est simplement gai et un comique plus direct, mais je me dis qu’une atmosphère de gaieté générale avec des personnages contrastés et

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pleins de vie, sans machinerie ennuyeuse ni temps morts, l’emportera à la longue auprès du public sur toute tentative de se rapprocher d’un genre plus grossier, plus « opérette  ». (Voyez Les Maîtres chanteurs ou Figaro, où l’on rit peu, mais où l’on sourit beaucoup.) D’ailleurs, avec un premier acte agréable, plein de charme sentimental, un deuxième acte très animé et, là-dessus, un troisième qui, dans la scène du souper où survient la police, sera le plus riche en quiproquos et en chassés-croisés, nous sommes, je crois, hors d’affaire. J’espère tirer beaucoup de l’acte III, tant pour le comique que pour le côté sentimental. Notre refrain me donne du fil à retordre. Toutes les versions que vous suggérez conviennent misérablement à la façon de parler du personnage, qui possède un ton bien particulier et riche de multiples nuances. (Beckmesser s’exprime sur un ton analogue). J’ai essayé avec la meilleure volonté du monde d’intégrer ces vers au texte (p.ex. « Nein, so ein Glück wie ein Lerchenau ») ; on dirait qu’ils sont étrangers, ils arrivent comme un cheveu sur la soupe ; dans la bouche de ceux qui se moquent de lui en l’imitant, ils n’ont rien de bien caractéristique non plus. Tenez-vous vraiment à cette petite chose ? Et dans le texte tel que vous l’avez sous les yeux, est-il impossible de conserver les versions qu’il contient actuellement de sorte qu’il ne dise pas à chaque fois exactement la même chose ? Ce qui m’a consterné (moi qui suis un novice en musique), c’est que vous puissiez envisager des possibilités si nombreuses pour la composition de ce passage (vous écrivez même « etc. ») ; si vous m’aviez imposé un rythme et un seul, j’aurais été contraint de m’y tenir... pour le moment, je suis totalement désemparé. Dites-moi en quelques lignes ce que vous pensez de toute cette histoire. Avec les salutations et les compliments de votre Hofmannsthal

Garmisch, 13 août 1909 Mon cher Hofmannsthal, Dans le Falstaff de Verdi, il y a un très joli monologue au début du dernier acte ; il commence par les mots : « Mondo ladro ». (Monde infâme) – Je me


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figure une scène analogue pour le Baron après la sortie de Faninal ; le Baron sur le sofa, le médecin à son chevet, les serviteurs muets debout au pied du lit et le Baron parlant par intermittence, à moitié pour lui et à moitié pour les autres : à moitié triomphant et à moitié dégrisé, sans cesse interrompu par des passages orchestraux, souffrant mille douleurs, pestant contre Quinquin, raillant sa fiancée. La disposition est bonne, mais il faut étoffer encore un peu, de 8 lignes environ. Mais venons-en à quelque chose de plus important ! À partir de la page 19, la scène entre Sophie et Octavian, ça ne me va toujours pas. Ici, il me faut quelque chose de beaucoup plus passionné. Après la scène qui vient de se passer et avant la scène si lourde de conséquences où le Baron les surprend. Pour le moment, c’est trop sage, trop maniéré et hésitant, trop lyrique, et je ne pourrai sans doute pas placer le petit duo à cet endroit, puisque j’ai déjà fortement utilisé le lyrisme au début du Pacte. Vous ne pourriez pas me refaire cette scène ? Sophie, beaucoup plus bouleversée et désespérée, se jetant au cou d’Octavian ; crescendo à partir de la page 21 – crescendo, et plus rien de doux. Ça irait ? Sinon, il faudra bien que je me débrouille avec ce que j’ai. Mais à cet endroit, je ressens tout autre chose qu’une atmosphère de tendresse silencieuse. D’abord une explosion passionnée de Sophie : « Cher cousin, sauvez-moi, débarrassez-moi de ce monstre, je préfère aller au couvent plutôt qu’épouser ce rustre » ; puis, on passe progressivement à la déclaration d’amour pour arriver au point culminant où les Italiens se mettent à hurler ! Meilleures salutations de votre Dr Richard Strauss

J’en suis déjà à composer la page 18 ! Garmisch, 13 août 1909 En post-scriptum à ma lettre d’aujourd’hui : ça peut rester tel quel jusqu’à la page 20. À partir de la page 21, il faut changer : explosion de désespoir, échange direct et passionné, déclaration d’amour. En hâte, salutations de votre Dr Richard Strauss

Garmisch, le 23 avril 1910 Mon cher Hofmannsthal, Je suis à Garmisch et c’est un supplice d’attendre le IIIe acte ! La partition du IIe est déjà sous presse ! Je serai à Vienne mi-juin ! Samedi, il y a à Prague la première d’Elektra en Bohême. Bien des choses pour un achèvement heureux de notre Ochs ainsi que les cordiales salutations de votre sincèrement dévoué Dr Richard Strauss

Les figurines de Raller sont superbes ! Rodaun, 27 avril 1910 Cher Docteur, J’ai réglé dès réception de votre télégramme l’affaire de la Neue Freie Presse en donnant une réponse négative. Je suis très content de voir que la collaboration de Roller vous convainc à ce point. Il est très précieux pour nous de disposer d’une telle aide pour révéler (jusque dans la mise en scène) le nouveau style qui est ici en jeu ; une tâche difficile, mais c’est la condition sine qua non pour le maintien de l’œuvre pendant des décennies, ce que nous souhaitons vivement. Seul peut vivre longtemps ce qui déconcerte d’abord par la nouveauté et la cohérence de son style et se voit ensuite peu à peu accepté. Je suis bouleversé de lire que c’est pour vous un supplice d’attendre. Tout d’abord, j’ignorais que vous fussiez déjà chez vous, désœuvré, puisque je lis continuellement que vous êtes ici ou là. De plus : comme les scènes du souper et de l’interrogatoire, qui se trouvent entre vos mains, forment des touts bien définis, j’espérais que vous pourriez, comme pour l’acte I, commencer par elles. Est-ce impossible ? Envoyez-moi un mot par carte postale. Je dicterai le reste à la secrétaire demain matin et vous le recevrez sous peu. C’est seulement pour l’extrême fin, le trio-duo, qui exige beaucoup de pudeur et en même temps de suavité, que j’ai dû attendre d’être en meilleure santé et dans de meilleures dispositions ; c’est désormais le cas. Mais c’est à en pleurer : après une seule belle journée de printemps, on a toujours, une semaine durant, un vent d’hiver glacial qui souffle sur les vergers en fleurs. La scène finale (ce ne sont que 3 ou 4 pages), j’aurais tant aimé l’écrire au jardin.

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... cette façon d’être lié par une mélodie m’a été sympathique, car j’y trouve quelque chose de mozartien, et la possibilité de m’écarter de ces insupportables vociférations amoureuses de Wagner, aussi interminables qu’elles sont immodérées, de cette chose barbare et repoussante, presque bestiale, cette manière qu’ont deux créatures de se hurler l’une sur l’autre en pleine ardeur amoureuse, telle que Wagner la pratique. 36

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En juin, quand vous viendrez, je ne serai malheureusement pas là. Je ne pouvais pas disposer autrement que réserver au Lido à partir du 10 juin. Bien cordialement vôtre. Hofmannsthal

Garmisch, 20 mai 1910 Mon cher Hofmannsthal, La mort de ma pauvre mère m’a secoué brutalement en plein travail. Je reviens aujourd’hui seulement à nos projets. Pour être bref : la disposition du dernier morceau que vous m’avez envoyé (cijoint !) ne me plaît pas du tout. Trop large, trop étalé, des scènes mises à la queue leu leu, au lieu de tomber l’une sur l’autre en explosant. L’entrée de la Maréchale et la scène qui suit doivent être extrêmement concentrées pour former le sommet de l’action et de la tension dramatique. Une fois le baron sorti et le trouble passé, tout doit devenir progressivement plus lyrique et s’atténuer en lignes souples. Le point crucial, c’est l’extraordinaire embarras du baron quand il voit soudain en face de lui ces trois visages figés : la Maréchale, Octavian, Sophie. Sa façon d’osciller de l’un vers l’autre doit être du comique le plus corsé. Pour cette situation, vous trouverez peut-être des formules meilleures que celles que j’ai esquissées rapidement mais, dans l’ensemble, le schéma que je vous envoie ci-joint est, je crois, satisfaisant. Lisez-le attentivement, améliorez avec votre habileté ce qui est maladroit chez moi, mais la ligne générale doit, je crois, demeurer la même. Le commissaire doit être rapidement liquidé : comme en passant. Il n’a plus rien à faire là quand les 4 personnages principaux se regardent d’un air menaçant. Dites-moi vite ce que vous en pensez ! En hâte, avec les cordiales salutations de votre Dr Richard Strauss

Rodaun, 6 juin 1910, à partir de dimanche : Venise - Lido, Excelsior Palace Cher Docteur, De Vienne doit me parvenir d’un moment à l’autre l’acte III dactylographié, qui vous sera envoyé


CORRESPONDANCE HOFMANNSTHAL STRAUSS

aussitôt. La partie centrale respecte exactement la ligne d’ensemble que vous souhaitiez. Le caractère lyrique du finale vous satisfera, je l’espère. Tout d’abord, il est court : 12 minutes environ du départ du baron jusqu’à la chute du rideau. Cela ne devrait pas être plus court, afin de ne pas ôter à la Maréchale sa signification. Car c’est ce personnage que le public, et notamment les femmes, ressentent comme le personnage principal ; c’est la Maréchale qu’elles garderont avec elles. En outre, j’ai réussi à loger tout le contenu psychologique du finale dans des numéros, duo ou trio, à l’exception de très brefs passages parlando. Il est certainement avantageux que l’acte final ne soit pas seulement le plus comique, mais aussi le plus chantant. Pour l’ultime duo, Quinquin-Sophie, j’étais astreint à suivre le schéma métrique que vous m’aviez donné ; mais cette façon d’être lié par une mélodie m’a été sympathique, car j’y trouve quelque chose de mozartien, et la possibilité de m’écarter de ces insupportables vociférations amoureuses de Wagner, aussi interminables qu’elles sont immodérées, de cette chose barbare et repoussante, presque bestiale, cette manière qu’ont deux créatures de se hurler l’une sur l’autre en pleine ardeur amoureuse, telle que Wagner la pratique. Je vous espère donc satisfait ; pour moi, ce travail m’a été si sympathique que j’ai presque été triste de devoir écrire Rideau en bas de la dernière feuille. Au sujet de Vienne, je voudrais vous dire une chose que je vous prie instamment de ne pas prendre à la légère ; d’ailleurs, cela rejoint sans doute vos intentions : ne vous laissez entraîner à aucun engagement avec Weingartner. Il tombera cet automne, ou au plus tard en mars prochain. Être en possession de notre Spieloper pourrait tout au plus le soutenir ; ou alors, il embrouillera tout en truffant les négociations de mensonges et créera à jamais la discorde entre vous et la direction ou Montenuovo. Gardez plutôt les cartes en main et esquivez toutes ses perfides tentatives d’approche en les remettant à plus tard. Ainsi, nous serons dans une position favorable vis-à-vis de son successeur et nous pourrons obtenir tout ce que nous désirons (pour Elektra également). Différer la création vien-

noise ne peut que faire croître l’intérêt. Il y aura vraisemblablement un intérim, peut-être avec Walter à la tête de l’Opéra (ce qui serait pour vous très avantageux), mais je vous prie de rester d’une extrême discrétion sur ce point. Votre Hofmannsthal

Rodaun, 12 juillet 1910 Cher Docteur, Pardonnez, je vous prie, un tel retard ; je n’étais pas bien du tout. Les objections du comte Seebach ne doivent pas être prises à la légère. Car ce qui le choque tant en choquera d’autres (et pas seulement dans les théâtres de cour) ; n’est-il pas superflu de s’aliéner une partie du public ? Par conséquent : 1. La Maréchale est déjà levée, cela est déjà fixé depuis longtemps avec Roller (dans le cahier de mise en scène et les décors). 2. À l’acte II, je voudrais vous proposer de supprimer le passage où il est question de la coutume parisienne de lancer des invitations pour faire voir ce qui se passe entre les jeunes époux. En espérant que cela vous sera également possible dans la musique. Tout ce que je pourrais mettre à la place n’aurait plus rien de piquant, ce serait un temps mort, car la drôlerie consistait seulement en ce qu’il prononçait ces mots-là. Par conséquent, je vous en prie, coupez ce passage et aménagez une transition. 3. Je vais remplacer les paroles un peu crues prononcées par Ochs dans le trio (acte I) par d’autres plus modérées, sur un rythme identique. 4. Quant aux passages incriminés dans le grand air d’Ochs, notamment le fait qu’« il n’est pas forcé de suivre le calendrier », ils ne me paraissent pas bien méchants. On pourra peut-être en reparler avec Seebach ; j’entends de votre côté, car pour ma part, je ne veux avoir à faire qu’avec vous, les relations avec l’extérieur doivent passer uniquement par vous. Ensuite bien sûr, si vous le désirez, je modifierai ces passages, mais à force d’être allongé d’eau,

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[ CI-DESSOUS ]

Hugo von Hofmannsthal en visite à Garmisch, la résidence d'été de Richard Strauss.

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cet « air » risque de devenir ennuyeux à mourir. – Puisque nous nous trouvons pour ainsi dire au terme de notre travail en commun, laissez-moi vous dire que cette collaboration avec vous, depuis la première de nos discussions jusqu’à la dernière lettre échangée, sans exclure vos précieuses critiques, a été une immense joie, et je vous en remercie de tout cœur. Quant à ce qui suivra, je compte, comme pour Elektra, me tenir à l’arrière-plan et m’opposer vigoureusement à toute tentative visant à insister outre mesure sur le rôle que j’ai joué dans ce travail en commun. Naturellement, dès lors que cela émanera de vous, j’accepterai avec gratitude ce que vous aurez l’amabilité de dire à ce sujet. (Comme pour cette interview accordée à un journal berlinois, qui me fit une grande joie.) La remarque de Bahr sur Sophie, dans la mesure où il ne connaît que l’acte III, est selon moi hors de propos, car dans ce cas, il ne possède pas la clé du personnage tel qu’il est caractérisé par sa façon de s’exprimer. S’il connaissait aussi l’acte II, il aurait remarqué que Sophie, sur un fond de naïveté tant dans la personnalité que dans le langage, n’exprime rien qu’elle ait ressenti personnellement, mais se contente de répéter ce qu’elle a entendu au couvent, ou même dans la bouche de son père. C’est une charmante jeune fille comme il y en a des douzaines, voilà le piquant de la chose... Le charme authentique dans l’expression, ainsi que le charme plus fort de la personnalité, c’est dans la Maréchale

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« Pourrions-nous jamais faire mieux que notre Rosenkavalier ? – Oui, certes. Dans notre prochain opéra, nous mettrons DEUX lits sur la scène. » Caricature de Walter Trier parue dans Lustige Blätter en 1912.

qu’il faut les chercher. Quinquin, dans ce chassécroisé amoureux, tombe sur la première jeune fille venue, et c’est là ce qui confère son unité à l’ensemble et soude les deux intrigues. La Maréchale reste pourtant le personnage féminin dominant, entre Ochs et Quinquin par rapport à ces trois personnages principaux, Sophie est nettement en retrait. La lettre ci-jointe (que je vous prie de me retourner à l’occasion) de la princesse Lichnowsky vous montrera combien les femmes, cette part si importante de notre public, ressentent les choses de cette façon et voient toute cette aventure colorée par les yeux de la Maréchale. Il en va de même pour ma femme, pour la femme de Fischer, mon éditeur, pour la princesse Marie Taxis, etc. J’insiste là-dessus, puisque vous en serez sans doute bientôt à composer la scène finale, si sentimentale : car c’est l’unité musicale et spirituelle de l’ensemble qui s’en ressentirait, si le personnage de la Maréchale était réduit à la portion congrue et si une analogie très nette entre le finale de l’acte III avec celui du premier acte ne laissait pas percevoir la profonde unité de ton que comporte cette aventure. Je suis ici jusqu’au 18. Du 23 au 26, on peut me joindre par lettre à Constance, Hôtel de l’Île. Votre cordialement dévoué, Hofmannsthal

P.-S. Hammerstein veut nous priver de nos dividendes !


La carrière du Chevalier à la rose Richard Strauss (1864-1944)

L

orsque je fis lire le livret de Hofmannsthal à mon intendant berlinois le comte Hulsens il me le déconseilla : ce n’était pas un livret pour moi ! Il regrettait d’avoir « si peu de temps pour lui », sans quoi il m’eût écrit lui-même un « livret authentiquement allemand ! ». Après la centième représentation à Berlin, il vint me trouver au foyer des artistes et me dit : « C’est tout de même un livret ravissant ! » […] Le Chevalier à la rose est l’unique opéra de moi que l’empereur Guillaume eut la condescendance d’entendre sur les instances du prince héritier. Il quitta la salle avant la fin en disant : « Ce n’est pas une musique pour moi ! » Lorsque j’assistai à Dresde à la première répétition avec orchestre, je me rendis compte, au IIe acte déjà, que le brave régisseur local était dans l’incapacité absolue, vu ses conceptions nettement rétrogrades, de s’occuper de la mise en scène de la pièce. Les décors d’Alfred Roller étaient magnifiques. Ils le sont d’ailleurs restés comme au premier jour ! Honneur à lui ! Me souvenant à propos d’une offre bienveillante de Max Reinhardt, je proposai à l’intendant général comte Seebach, de prier Reinhardt de bien vouloir nous porter secours. Seebach accepta contre son gré, à condition que Reinhardt ne montât pas sur la scène ! Le brave Reinhardt vint cependant sans poser une quelconque restriction, il se soumit, en Israélite pas-

sionné pour son art, à l’exigence mentionnée et nous nous retrouvâmes tous sur scène, tandis que Reinhardt figurait le plus modeste des spectateurs et qu’avec maladresse je m’efforçais, aussi bien que je pouvais, de mimer aux chanteurs leurs rôles. Pendant quelques minutes on voyait Reinhardt, debout dans un coin de la salle, chuchotant avec Mme von der Osten, l’instant d’après avec Mlles Siems, Perron, etc. Le lendemain tous ces gens réapparurent sur scène métamorphosés en parfaits comédiens ! Sur quoi Seebach condescendit à autoriser Reinhardt à assister à la répétition et à diriger la régie non plus depuis le parterre, mais depuis la scène. Le résultat en fut l’introduction d’un nouveau style dans l’opéra et une exécution parfaites au cours de laquelle le trio (Siems, von der Osten, Nast) remporta les suffrages unanimes. La soirée avait paru un peu longue. Dans mon enthousiasme j’avais mis en musique le texte au complet sans y apporter de modifications – l’auteur de ce poème trop prolixe avait lui-même escompté que j’y prévoirais des coupures. Celles-ci étaient la spécialité de Schuch ; je crois qu’il n’a jamais dirigé un opéra sans en faire, et sa fierté était incommensurable quand il pouvait couper tout un acte d’un opéra nouveau. Immédiatement après mon départ. il soumit Le Chevalier à la rose à d’effroyables mutilations, qui furent reprises avidement par tous les directeurs sans scrupules des autres scènes.

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LA CARRIÈRE DU CHEVALIER À LA ROSE RICHARD STRAUSS

Pendant des années. je dus me débattre contre les manigances de ces insensés. Il n’est pas vrai qu’un opéra, bien composé et bien équilibré au point de vue dramatique, soit abrégé par des coupures. Un exemple : une année après, l’amie de Seebach, la baronne Knorring, vint voir à Berlin mon Chevalier à la rose. Elle me dit après coup que l’opéra lui avait paru moins long qu’à Dresde. Je répliquai : « Oui, parce qu’on n’y a pas fait autant de coupures ! » Les proportions étaient justement meilleures, les clairs-obscurs mieux équilibrés. Un jour que les coupures inévitables de Schuch m’avaient mis hors de moi, je lui écrivis qu’il avait oublié une coupure importante, que le trio du IIIe acte retardait l’action, et je lui proposai d’abréger ainsi : de Ré majeur : « Je ne sais rien, mais rien du tout ! » jusqu’à Sol majeur, au début du dernier duo ! Il en fut furieux ! Malgré tout, un peu guéri de la maladie de Dresde ! Le prédécesseur de Schuch vint un jour chez Draeseke : « J’apprends Monsieur Draeseke, que vous avez terminé un opéra. » Draeseke : « C’est vrai, l’opéra lui-même est fini, mais il me reste encore à composer les coupures. » La carrière triomphale du Chevalier à la rose fut interrompue à La Scala de Milan d’une manière tragicomique. Serafin avait préparé l’opéra minutieusement, les solistes étaient excellents : Mlle Bori en Octave, Ludikar en Ochs très bon, quoique doué d’un accent bohémien qui mécontentait d’autant plus les Italiens, très susceptibles sur ce point, que l’opéra comique italien croyait posséder l’exclusivité des rôles bouffes (un peu vulgaires) de ce genre. Pauline était assise à mes côtés dans la loge d’avant-scène, avec le duc et la duchesse Visconti, et bavardait avec la princesse au sujet de toilettes françaises. Au bout de quelques instants, la princesse lui dit : « J’ai l’impression, chère Madame, que vous et votre époux êtes aujourd’hui les seules personnes ici qui ne soient pas nerveuses. » Pauline : « Pourquoi devrais-je être nerveuse ! L’opéra a eu un beau succès en Allemagne. » On se rendit compte après le IIe acte combien la princesse avait raison. Le Ier acte se déroula sans incident, il y eut trois rappels. À l’issue du IIe acte éclate soudain un vacarme épouvantable. Pas un

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applaudissement, mais des sifflets, des hurlements, cependant que descendaient de la dernière galerie des centaines de libelles par lesquels la jeunesse (à cette époque on appelait ces blancsbecs des « futuristes ») protestait contre l’auteur de Salome qui s’était « abaissé » à composer une œuvre aussi frivole. Lorsque le scandale se fut apaisé, je montai sur scène et demandai pourquoi les gens étaient devenus si furieux. Réponse : « À cause de la valse ». Moi : « Comment, à cause de la valse ? » Le régisseur : « Oui à La Scala le public ne goûte la “valse viennoise” que dans les ballets. » Je me mis à rire : « Que sera-ce alors au IVe acte où il se trouve plusieurs valses ? » On haussa les épaules, le IIIe acte commença : pendant l’introduction en fugato (musica seria tedesca) silence complet ! Puis voilà qu’on entend derrière la scène la valse en mi majeur. Lorsque la Bori chanta : « Che bella musica ! » une voix sarcastique domina le tumulte : « Eh ! bella musica ! ». Et le scandale recommença de plus belle et prit des proportions inusitées lorsque Lerchenau sortit de scène. J’avais continuellement les yeux fixés sur le rideau craignant qu’il ne tombât. Il ne tomba point, le public s’apaisa peu à peu jusqu’au trio qui fut entonné dans un silence de mort. À la fin, tempête d’applaudissements : la pièce était sauvée. Bravo, mes chers Italiens vous avez un jugement personnel même si parfois vous ratez la cible ! À partir de la deuxième représentation on exécuta la valse toujours piano, ainsi les plus irrédentistes ne purent en prendre ombrage ! Après quatre représentations, l’ouvrage disparut du répertoire pour fêter plusieurs années après, même en Italie, une résurrection triomphale. En fait chaque première à La Scala est une bataille entre les éditeurs Ricordi et Sonzogno. Après le troisième acte du Chevalier à la rose la lutte se poursuivit entre l’orchestre et les premières rangées du parterre, auxquelles le chef d’orchestre ne put s’empêcher de crier: « Asini ! ». Deux suggestions importantes aux organisateurs : De même que Clytemnestre ne doit pas paraître sous les traits d’une vieille sorcière ravagée par la vie, mais d’une cinquantenaire belle et hautaine, dont la décadence toute spirituelle ne laisse


LA CARRIÈRE DU CHEVALIER À LA ROSE RICHARD STRAUSS

aucune trace physique, de même la Maréchale doit être symbolisée par une belle jeune femme d’au maximum trente-deux ans, à laquelle il arrive d’être prise dans un moment d’humeur, pour une « vieille femme » par l’adolescent Octave (il a dix-sept ans) ; en aucun cas elle ne doit être la Madeleine chère à David, dont le rôle est du reste souvent joué par une femme trop âgée. Octave n’est ni le premier ni le dernier amant de la belle Maréchale, qui ne doit absolument pas jouer la fin du Ier acte d’une manière sentimentale, comme s’il s’agissait d’une irrémédiable séparation de la vie. Au contraire, il lui faut garder sa grâce viennoise et sa légèreté, montrer des yeux à la fois humides et secs, cependant que le chef d’orchestre évite les tempi traînants à partir du Fa majeur 2/4 ! Le rôle le plus incompris jusqu’à nos jours a été celui du baron Ochs. La plupart des basses se sont transformées sur scène en d’horribles monstres vulgaires pourvus d’un masque hideux et de manières prolétariennes. Ce n’est pas sans raison que les publics civilisés en ont pris ombrage (ainsi

les Français et les Italiens). Cette conception est totalement fausse : Ochs doit être un Don Juan de village d’environ trente-cinq ans, un noble quelque peu hobereau qui sait si bien observer les convenances dans le salon de la Maréchale qu’elle n’éprouve au bout de cinq minutes aucun besoin de le faire sortir par son domestique à coups de pied dans le derrière. Intérieurement, c’est un porc, mais il arbore un extérieur si présentable que Faninal ne l’éconduit pas au premier coup d’œil. La première scène d’Ochs tout particulièrement, celle de la chambre à coucher, doit être rendue avec une délicatesse et une discrétion extrêmes, il ne faut surtout pas qu’elle paraisse aussi répugnante que l’amour d’une vieille générale pour un portedrapeau. Bref, ce ne serait plus alors une comédie viennoise, mais une farce berlinoise ! Extrait de Richard Strauss Anecdotes et souvenirs. Textes réunis par Willi Schuh. Version française de Pierre Meylan et Jean Schneider. Lausanne : Editions du Cervin, 1951.

Le Chevalier à la rose

Notice complémentaire (1927)

R

Hugo von Hofmannstahl (1874-1929) ien n’est plus difficile que de se représenter ce qui existe comme non existant. Ces personnages se sont détachés il y a bien longtemps de leur créateur. La Maréchale, Ochs, Octavian, le riche Faninal et sa fille, tous des liens vitaux qui se sont tissés entre eux, on dirait que tout cela s’est trouvé ainsi, il y a très longtemps, aujourd’hui ils ne m’appartiennent plus, ni non plus au compositeur, ils appartiennent à ce monde flottant bizarrement illuminé, le théâtre, où ils se conservent en vie depuis déjà un moment et se conserveront peut-être encore un moment. Je feuillette la collection des lettres qui furent

échangées entre Strauss et moi, ces années-là. Il y a, il est vrai, pour celui qui les écrivit et que les reçut, bien des choses autour desquelles flotte l’atmosphère de la vie vécue. Il en monte l’haleine de cet élément vital, spécifique de la production, de cette création tâtonnante à laquelle on croit intérieurement et sur laquelle souffle le doute aussitôt après, quand elle se manifeste à l’extérieur. Il en monte le souvenir de la résistance avec laquelle le monde reçoit et fortifie tout être vivant sorti de l’imagination, en croyant le refuser et lui régler son compte. Il est presque étrange de songer aujourd’hui que lettres sur lettres furent échangées pour apaiser les doutes d’un directeur

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LE CHEVALIER À LA ROSE NOTICE COMPLÉMENTAIRE HUGO VON HOFMANNSTAHL

Il y avait derrière le désir secret de faire naître un ensemble mi-réel, mi-imaginaire, cette Vienne de 1740, toute une ville avec ses classes sociales dont chacune fait ressortir les autres et qui se mêlent entre elles, avec leur cérémonial, leur gradation sociale, leur manière de parler... avec la proximité pressentie de la grande Cour qui domine tout cela, avec la proximité toujours ressentie de l’élément populaire. 42

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de théâtre non sans mérite au sujet de l’ensemble et de nombreux détails, de se remémorer comme tel ou tel détail de comédie légère a pu produire un effet incisif, qui a pris aujourd’hui une certaine harmonie paisible, après que tant d’yeux l’ont contemplé. Il est presque étrange d’imaginer comment, dans un autre théâtre officiel, la première cantatrice a renvoyé au directeur le rôle de la Maréchale en le priant de la dispenser de paraître dans « l’atmosphère équivoque » de cette pièce. Pourtant les débuts furent sans difficulté. Le climat de sociabilité de l’œuvre elle-même entoura sa genèse. Le scénario est véritablement né de la conversation, la conversation avec l’ami auquel le livret est dédié (avec une tournure dans la dédicace qui indique une vraie collaboration), le comte Harry Kessler. Ces figures étaient là et jouaient devant nous encore avant que nous eussions des noms pour elles : le comique, le barbon, la jeune fille, la grande dame, le « Chérubin ». C’étaient des types dont l’individualisation demeurait réservée à la plume chargée de l’exécution. Des relations éternellement typiques des personnages les uns avec les autres, l’action naquit, presque sans qu’on sût comment. La comédie de Molière, elle aussi, repose moins sur les caractères eux-mêmes que sur la relation des personnages souvent très typiques les uns avec les autres. (Cela dit entre parenthèses). Le lieu de ces conversations productives fut Weimar. Je partis pour Berlin sans d’autres notes que la liste des personnages griffonnée au dos d’un menu mais avec, dans la tête, une action pouvant être racontée. L’effet de cette narration sur Strauss m’est restée en mémoire, comme si cela s’était passé hier. Son écoute fut une écoute véritablement productive. Je le sentais distribuer une musique encore à naître entre les personnages à peine nés. Puis il dit : « Nous allons l’exécuter. Nous le ferons représenter et je sais aussi à un mot près ce que l’on dira. On dira qu’une attente générale a été encore une fois outrageusement déçue, que ce n’est absolument pas l’opéra comique que le peuple allemand attend avec un ardent désir depuis des dizaines d’années. Et avec ces commentaires, notre opéra sera un four. Mais


LE CHEVALIER À LA ROSE NOTICE COMPLÉMENTAIRE HUGO VON HOFMANNSTHAL

nous nous amuserons en y travaillant. Rentrez vite chez vous et envoyez-moi le premier acte aussitôt que possible ». Cette conversation doit avoir eu lieu dans les derniers jours de mars (1909). La lettre de Garmisch qui accuse réception du premier acte est du 4 mai. Dans une lettre du 16 mai il est déjà dit : « Mon travail coule comme la Loisach – je compose en m’y mettant tout entier ». Un an après, dans la lettre du 2 mai 1910, il est dit : « Je commence en ce moment à composer le troisième acte. » En janvier 1911, l’ouvrage parut sur la scène de Dresde. Ces conversations fougueuses de Weimar (comme il me souvient de la bibliothèque décorée de quelques-unes des plus belles sculptures de Maillol, avec quelle netteté je me remémore les répliques hâtives, comme accélérées par une légère fièvre que nous échangions entre nous), ce jeu avec les personnages typiques anonymes et les combinaisons possibles, dans lesquelles ils pouvaient entrer, cela n’eût pourtant pas été assez puissant en soi-même pour produire un petit monde de figures vivantes. Il y avait derrière le désir secret de faire naître un ensemble mi-réel, mi-imaginaire, cette Vienne de 1740, toute une ville avec ses classes sociales dont chacune fait ressortir les autres et qui se mêlent entre elles, avec leur cérémonial, leur gradation sociale, leur manière de parler, ou plutôt leurs différentes manières de parler selon leur classe, avec la proximité pressentie de la grande Cour qui domine tout cela, avec la proximité toujours ressentie de l’élément populaire. C’est ainsi que naquit le fourmillement de petits personnages : cette duègne, ce commissaire de police, cet aubergiste, ces laquais et majordomes, ces intrigants, parasites, fournisseurs, coiffeurs, exprès, garçons de taverne, porteurs de chaises, sbires, fainéants. Mais cela ne pouvait être maintenu ensemble que par une langue particulière qui, comme tout dans la pièce, fût à la fois authentique et inventée, une langue pleine d’allusions, de doubles sens, une langue par laquelle chaque personnage se dépeint et dépeint son rang social, une langue qui est la même dans la bouche de tous ces personnages – la langue imaginaire de l’époque – et qui pourtant est autre dans la bouche

de chaque personnage, avec une ouverture assez considérable qui va de la langue très simple de la Maréchale (et c’est dans cette simplicité extraordinaire, maintes fois presque modeste de ce personnage que réside sa grande condescendance) jusqu’à la façon de parler concise et élégante d’Octavian, où se trahit peut-être un peu du manque de cœur de la jeunesse, l’élocution de Faninal qui, dans la bouche de sa fille, est légèrement grandiloquente mais plus naïve, et jusqu’au mélange particulier de pompe et de platitude dans la bouche du personnage ridicule. C’est cette langue – un critique, je crois dans une intention de blâme, l’a nommée un « volapük du XVIIIe siècle » et je trouve cette qualification très acceptable, c’est cette langue qui a fait de ce livret un des moins traduisibles du monde. Des plumes extrêmement adroites se sont efforcées de le transposer en anglais, en français et en italien. Mais ôtées de l’élément de cette langue, les personnages prennent une certaine froideur, ils s’opposent avec des contours beaucoup plus tranchés. Il manque la partie la plus délicate du modèle. Il manque la sociabilité des personnages entre eux, sociabilité qui produit l’atmosphère vitale d’une pièce. Extrait de Lettre de Lord Chandos et autres essais. Trad. Kohn. Paris : Éd. Gallimard, 1980.

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© DR

Margarethe Siems (La Maréchale) [ ci-dessus ] et Eva von der Osten (Octavian) [ à droite ] pour la création à Dresde en janvier 1911.

Le Chevalier à la rose par Jean-François Monnard

A

vec Le Chevalier à la rose on est assez loin d’Elektra. Pourtant, c’est bien cette Komödie für Musik qui va sceller le destin d’un écrivain et d’un compositeur, qu’Elektra avait réunis pour la première fois. Toute la correspondance entre Hugo von Hofmannsthal et Richard Strauss, entre le 22 décembre 1907 et le 25 décembre 1918, témoigne d’une collaboration exemplaire. Ce fut sans doute leur mission d’artiste d’en exclure tout propos nourri d’amour-propre ou d’intérêt personnel. Là réside le secret de la réussite de deux créateurs qui se rencontrent à mi-route et réagissent au moindre appel de l’alter ego. Hofmannsthal est un librettiste idéal qui n’a pas d’autre but que de mettre « son » musicien en valeur. Non seulement prêt à contenter les moindres exigences de son interlocuteur, il répond à ses vœux et réalise ses desiderata. Avec son troisième acte, par exemple, le créateur du Chevalier à la rose croit tenir une réussite. Mais voici que Strauss, mettant à profit « trois jours de neige, de pluie et de brouillard » en plein juillet, le lui démolit de fond en comble. Le poète, protester ? Il s’incline : « Ce que vous me demandez

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est indispensable à votre point de vue et ne contredit ni le caractère des personnages principaux, ni la ligne générale de la pièce ; je m’exécuterai donc, et dès que possible. » Et de même à chaque occasion, ou presque. Éternel apprenti, l’écrivain voit là « de la critique productive » et renvoie ses corrections avec la remarque : « J’espère que vous serez content. » 1 Dresde À cette collaboration s’en ajoute une autre, celle qui lie le compositeur au chef d’orchestre Ernst von Schuch à Dresde. Il a déjà créé Feuersnot, Salome et Elektra et Strauss n’hésite pas à lui confier la partition du Rosenkavalier. La création, le 26 janvier 1911, dans les décors et costumes d’Alfred Roller, est un succès immédiat. La distribution est formée exclusivement d’artistes en troupe : Margarethe Siems (Maréchale), Karl Perron (Ochs), Eva von der Osten (Octavian) et Minnie Nast (Sophie). Heureuse Dresde, qui abritait alors une chanteuse comme la Siems. Avec ses trente et un ans, elle avait l’âge du rôle. Aucune voix sans doute n’a possédé une texture si riche, échappant à toute limite


Richard Strauss avec Hermine Bosetti (Octavian) et Zdenka Fassbender (La Maréchale) pour la première de Munich en février 1911.

Lucie Weidt (La Maréchale) [ ci-dessus ] et Marie Gutheil-Schoder (Octavian) pour la première de Vienne en avril 1911.

à l’affiche au début du XX siècle e

et permettant de maîtriser un répertoire qui allait de la Reine de la nuit et Konstanze jusqu’à Aida et Isolde en passant par Zerbinetta. Il faut se souvenir que la Maréchale est encore une jeune femme qui, dans ses crises de mélancolie, se fait un perpétuel cinéma : « Je ressens jusqu’au fond du cœur… que tout nous coule entre les doigts, que tout ce que nous cherchons à saisir se désagrège, que tout se dissipe comme fumée et rêve. » Elle appréhende la vieillesse, certes, mais son vécu du temps face à un teenager de dix-sept ans comme Octavian la rend réaliste. En ce début du XXe siècle, Dresde est un vivier profitable. Karl Perron en sera l’indispensable basse de 1891 jusqu’à sa retraite en 1913. Sa voix le destinait aux rôles wagnériens qu’il a interprétés à Bayreuth et à Munich. La chronologie nous renseigne qu’Eva von der Osten a débuté à Dresde en 1902 et qu’elle y reste jusqu’en 1927 ; un parcours spectaculaire avec plus de 2550 représentations. Excepté un bref épisode aux États-Unis, Minnie Nast reste fidèle à l’opéra de Dresde qui constitue son seul engagement de longue durée. La critique est enthousiaste : « Le rôle principal

dans cette formidable partition, revient au chef d’orchestre et M. von Schuch a montré toute la fougue juvénile, tout l’éclat et aussi toute la délicatesse que le compositeur pouvait souhaiter. Mme Siems par la concentration de son jeu, la noblesse de son chant s’est révélée une incomparable Maréchale. Le rôle d’Octavian est lourd à porter. Mlle von Osten l’a rempli avec l’effronterie, la hardiesse de l’élégance qui convient. Mme Minnie Nast, toute charmante de voix et de tournure, prête à Sophie la grâce et la force inconsciente de la jeunesse. Elle nous en a donné une image inoubliable. » 2 D’autres échos se font plus nuancés : « M. Perron n’était peut-être pas assez rustre dans le rôle du baron, du moins, a-t-il évité de donner dans « la charge ». 3 Notons que Strauss a toujours souhaité un personnage dont la vulgarité demeure aristocratique, sans jamais aboutir au burlesque. Le succès du Rosenkavalier est sans pareil : cinquante représentations à Dresde jusqu’à midécembre 1911, une bonne douzaine de nouvelles productions nationales et étrangères la même année. Qu’on en juge : le 27 janvier à Nuremberg, le 1er février à Munich, le 15 à Mayence et Bâle, le 22

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à Hambourg, le 28 à Brême, le 1er mars à Francfort et à Milan sous la baguette du jeune Tullio Serafin, le 2 mars à Zurich, le 4 à Prague, le 8 avril à Vienne, le 17 juin à Cologne et le 14 novembre à Berlin. La production originale de Dresde restera longtemps à l’affiche avant de disparaître au profit d’une nouvelle mise en scène le 27 avril 1934 qui réunissait Karl Böhm au pupitre, Marta Fuchs (Maréchale), Ludwig Ermold (Ochs), Tiana Lemnitz (Octavian) et Maria Cebotari (Sophie). Avant d’empoigner les rôles de soprano dramatique, Marta Fuchs avait débuté sa carrière comme alto à Aix-la-Chapelle. Son premier emploi dans Le Chevalier fut Annina au Festival de Salzbourg en 1929, puis Octavian à Berlin en 1931. Avec Tania Lemnitz, on est d’emblée au sommet. Celle qui sera plus tard la Pamina de la première Flûte berlinoise de Karajan demeure le plus bel exemple de longévité vocale : trente-cinq ans de carrière ayant laissé intactes la pureté et la fraîcheur d’une voix dont le piano dans l’aigu a défrayé la chronique. Six ans sous contrat à Aix-la-Chapelle et trois ans à Hanovre précèdent son engagement à l’Opéra royal de Berlin où elle chante jusqu’en 1957. Quant à Maria Cebotari, on la retrouve à Dresde en 1935 lors de la création de La Femme silencieuse où elle incarne le rôle-titre. Pour Richard Strauss, elle devient l’interprète idéale qui sera tour à tour Arabella, Daphne, Ariadne, la Comtesse de Capriccio et Salome. Munich Dans la première moitié du XXe siècle, le prestige des premières scènes lyriques de Munich, Vienne et Berlin repose sur le principe de la troupe.

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Formée d’une pléiade de grands chanteurs, elle permet d’assurer la reprise de nombreux ouvrages juste après leur création. Avec des chefs de premier ordre qui mettent tout leur talent au service d’un répertoire que seule la lecture des partitions permet d’acquérir et dont il n’existe souvent pas le moindre enregistrement. La première audition du Chevalier à Munich, le 1er février 1911, est dirigée par Felix Mottl qui trouve la musique tout à fait « ravissante ». Ce sera son dernier grand succès ; il meurt le 2 juillet à cinquante-cinq ans. Mottl appartient à cette génération allemande en qui se résume la fin d’un siècle : il avait assisté à la création de la deuxième symphonie de Brahms à Vienne et à celle de Parsifal à Bayreuth. À cette production munichoise, Strauss attache beaucoup d’importance, car il avait dédié son opéra « à ses proches parents, la famille Pschorr à Munich ». Mais il fallait qu’on le joue « dans l’esprit viennois, plus Mozart que Lehar » ! 4 C’est bien dans ce climat que l’entendait Mottl qui avait à disposition une distribution qui ne cédait en rien à celle de Dresde : Zdenka Fassbender (Maréchale), Paul Bender (Ochs), Hermine Bosetti (Octavian) et Charlotte Kuhn-Brunner (Sophie). Le portrait de la Maréchale par Zdenka Fassbender avait certainement de quoi séduire. Sa vocation dramatique la destinait plutôt à des rôles comme Isolde ou Brünnhilde, mais elle pouvait se fier à sa diction et son art de dire les consonnes qui devait lui permettre des interrogations devant le miroir empreintes de mélancolie douce-amère : « Comment est-ce possible d’avoir été la petite Resi et de devenir un jour la vieille maréchale ! » Bender a servi surtout Wagner. Une des meilleures basses,


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dans une époque qui en comptait beaucoup, sa voix d’une belle résonance, phénoménale de profondeur, alliait puissance et agilité. Engagé en 1903, il reste attaché plus de quarante ans à l’opéra de Munich. Comme Hermine Bosetti qui passe un quart de siècle à Munich. Plutôt Fille du régiment et Zerbinetta avec un timbre limpide et une agilité à toute épreuve, on s’étonne de la voir en Quinquin. Qu’importe, les voix chez Strauss sont difficiles à répertorier. Pour l’histoire, on retiendra plutôt le Quinquin de Delia Reinhardt qui, avec Bruno Walter au Covent Garden en 1924, saura donner le ton approprié à la nature bouillonnante du jeune Rofrano. De Charlotte Kuhn-Brunner, on ne sait presque rien. D’autres mettront le public à genoux, comme Elisabeth Schumann dont les témoignages évoquent la grâce virginale et l’émoi de l’âme qui ont rendu « sa » Sophie immortelle (à Hambourg, au Met). Schuch, à Dresde, avait fait des coupures qui suscitèrent la grogne du compositeur. « Est-ce raisonnable, écrit-il, de démolir l’architecture d’une œuvre d’art, pour économiser en tout et pour tout quinze minutes ? » 5 Il semble que Mottl, lui, dirigea l’œuvre intégralement, en tout cas lors des trois premières représentations. Strauss, néanmoins, prétend avoir été le premier à diriger son opéra sans coupures, le 17 juin, à Cologne. 6 On le verra se faire une raison plus tard et s’accommoder des quelques coupures qui depuis font partie de la tradition.

© LEBRECHT MUSIC & ARTS

© DR

[page de gauche, de gauche à droite] Richard Mayr (Ochs) pour la première de Vienne en 1911. Lola Artôt de Padilla est Octavian pour la première de Berlin en 1911 avec Frieda Hempel (La Maréchale), [page de droite, de gauche à droite] cette dernière reprend le rôle au Met en décembre 1913 avec Margarete Ober (Octavian). Elisabeth Schumann (Sophie) en février 1911 pour la première de Hambourg. Elle reprendra le role au Met en 1914 et également à Vienne dès 1919 où elle l'interprètera 85 fois jusqu'en 1937. [ci-dessous] L'affiche de la création à Dresde le 26 janvier 1911.

Vienne C’est presque paradoxal, mais le Chevalier à la rose à Vienne est éreinté par la presse. C’est grâce à l’accueil du public que l’ouvrage s’avère rapidement

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incontournable : il est joué trente-sept fois en 1911 et l’on comptabilise cent quatre vingt-neuf représentations jusqu’en 1929. Franz Schalk est à la barre avant que d’autres chefs prennent la relève ; parmi eux, Bruno Walter, le futur Generalmusikdirektor du Hofoper à Munich, et Clemens Krauss. Au pupitre, on trouve également le compositeur. Diriger ses propres oeuvres l’« ennuyait ». Il lui arrivera même de refuser de diriger le Rosenkavalier : « Cela me fatigue trop et m’offre peu de plaisir car je l’ai dirigé trop souvent. » On sait que la battue de Strauss était aussi régulière que le mouvement d’un métronome. Otto Strasser du Philharmonique de Vienne se souvient que « pendant les représentations du Chevalier à la rose, alors que d’autres chefs s’attardaient sur certains beaux passages pour en extraire tout le suc, je me suis souvent dit que le compositeur les prenait avec beaucoup plus de légèreté ». 7 La distribution viennoise repose sur deux piliers de l’ensemble : Lucie Weidt (Maréchale) et Marie Gutheil-Schoder (Octavian). Toutes deux avaient été engagées par Mahler. De voix, Weidt était wagnérienne. Après Elisabeth dans Tannhäuser, elle fut Elsa, Senta, Isolde, Brünnhilde et Kundry. La carrière de Gutheil-Schoder témoigne de cette constance qui est aussi une gageure : à la suite d’une Carmen, le 24 février 1900, elle rejoint la troupe de Vienne et aligne 119 Carmen et 99 Octavian. Vingt-cinq ans de rang et de quoi la sacrer Liebling du public. Si la chronique n’a pas retenu le nom de Gertrud Förstel (Sophie), elle a gardé en revanche celui de Richard Mayr (Ochs). Un brillant comédien, une basse bouffe qui a fait du Baron un portrait légendaire. Avec un bagout scénique étourdissant, même si l’interprétation vocale que nous restitue le disque laisse apparaitre quelques défaillances dans le grave. Berlin En 1911, trois chefs d’envergure se partagent la tâche à la Hofoper de Berlin : Karl Muck, Richard Strauss et Leo Blech. Karl Muck, qui étrenne le Rosenkavalier, passe vingt ans à Berlin, d’abord comme 1er chef (1892), puis directeur général de la musique (1908). À l’expiration de son contrat

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en 1912, il est nommé à Boston où il aura maille à partir avec la justice américaine en 1918 ; en effet, après avoir refusé de diriger The Star-Spangled Banner, on l’accuse de pro-germanisme. Ses tempos lents dans le Parsifal qu’il dirige à Bayreuth en 1901 et 1906 semblent avoir marqué les esprits. La période berlinoise de Richard Strauss dure aussi vingt ans. Engagé comme premier chef en 1898, il succède en 1908 à Felix Weingartner en tant que directeur des concerts d’abonnement de la Kgl. Hofkapelle. Leo Blech est le cadet des trois ; il accède au poste de premier chef en 1906 et reprend la direction générale de la musique au départ de Strauss en 1918. La distribution berlinoise du Chevalier vaut son pesant d’or. Les noms sont carrément de domaine public : Frieda Hempel (Maréchale), Paul Knüpfer (Ochs), Lola Artôt de Padilla (Octavian) et Claire Dux (Sophie). À 26 ans, Frieda Hempel était une chanteuse accomplie. Elle aussi, championne des emplois interchangeables. Engagée en 1907 dans la troupe de Berlin, elle est à l’aise dans les rôles de colorature : Marie dans La Fille du régiment, Lucia, Gilda, la Reine de la nuit. Au Metropolitan ensuite, elle débute le 27 décembre 1912 comme Marguerite dans Les Huguenots à côté de Caruso et d’Emmy Destinn. Le 10 janvier 1913, elle est de plein droit Reine de la nuit avant de réussir dans La Traviata quelques jours plus tard. À peine a-t-elle chanté la Maréchale en décembre 1913 qu’elle ose Eva dans les Maîtres chanteurs sous la baguette de Toscanini, une partie qui semblait tout de même la limite absolue de cette voix née légère. Sa carrière s’achève au concert où, dans les costumes de scène de Jenny Lind, elle ressuscite l’épopée glorieuse de celle qui avait gagné le surnom de rossignol suédois. Berlin a un autre atout dans la distribution : Paul Knüpfer. Il avait rejoint la troupe de l’Opéra royal en 1898 après une dizaine d’années passées à Leipzig. Bayreuth avait suivi aussitôt avec Gurnemanz, Hunding, Pogner et Daland. Pour le Covent Garden à Londres, il sera le premier Ochs et le premier Gurnemanz. Notre souvenir l’associe surtout à Wagner, mais Knüpfer fut un chanteur


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complet. Quelques enregistrements témoignent de son aigu allégé dans Figaro ou de sa noblesse de ligne dans Philippe II. Née à Paris, Lola Artôt de Padilla va très tôt se frotter à la discipline allemande et c’est à Berlin qu’elle a rendez-vous pour une première Charlotte. Un Cherubino d’amore avait débarqué là, auquel s’ajoutera une délicieuse Zerlina. L’heureux résultat peut s’entendre dans les quelques enregistrements qu’elle a laissés, la plupart en allemand. De Claire Dux, qui avait fait ses débuts comme Pamina à Cologne en 1906, on retiendra le verdict de Beecham après sa première Sophie à Covent Garden : « … la plus exquise démonstration de bel canto, que Londres ait connue depuis plus d’une génération ». Paul Knüpfer et Claire Dux faisaient partie de l’équipe que Beecham avait réunie pour la première exécution de l’œuvre à Londres, le 29 janvier 1913. Deux protagonistes de la création la complétaient : Margarethe Siems et Eva von der Osten. On signalera encore, pour compléter le tableau, la distribution de la première américaine qui eut lieu au Metropolitan le 9 décembre 1913. Elle réunissait, sous la direction d’Alfred Hertz, Frieda Hempel (Maréchale), Otto Goritz (Ochs), Margarete Ober (Octavian) et Anna Case (Sophie). Margarete Ober possédait une des plus belles voix de mezzo que le disque ait conservée de cette époque. Au Met, elle chantera une grande partie des rôles qui étaient l’apanage d’Ernestine Schumann-Heink. À quoi la guerre mettra un coup d’arrêt, l’obligeant à revenir en Allemagne où elle eut ses Amneris, Brangäne, Eboli à la Hofoper et tout ce qu’elle pouvait chanter avec sa voix de velours d’une profonde densité d’expression et d’émotion. Anna Case, fille d’un maréchal-ferrant dans le New Jersey, avait tout pour séduire les habitués du Met : un lyrisme raffiné, la fraîcheur vocale et la justesse de l’intonation. Ce qui en faisait une Olympia idéale. La référence au « kitsch » reste le mot-clé des détracteurs du Chevalier à la rose. Trop de « saccharine » pour Adorno alors que Charles Rosen

l’assimilait à une « pâtisserie viennoise ». 8 Même si l’œuvre marque un tournant dans l’esthétique de Strauss, le jugement est bien sévère pour un compositeur qui, dans une large mesure, a consacré son talent aux voix de femme qu’il affectionnait et qui a su les servir aussi bien que le Mozart de Così ou des Noces. JFM

1

Cité dans La Revue Musicale N° 103 du 1er avril 1930.

2

Lazare Ponnelle dans S.I.M. Revue musicale du 15 mars 1911.

3

Émile Heinz dans Comoedia illustré du 15 février 1911.

4

Frithjof Haas : Der Magier am Dirigentenpult - Felix Mottl, Info Verlag GmbH, Karlsruhe 2006, p. 338.

5

Walter Panofsky : Richard Strauss, Partitur eines Lebens, R. Piper & Co. Verlag, München 1965, p. 168.

6

Franz Trenner : Richard Strauss, Chronik zu Leben und Werk (herausgegeben von Florian Trenner), Verlag Dr. Richard Strauss, Wien 2003, p. 328.

7

Michael Kennedy : Richard Strauss, l’homme, le musicien, l’énigme traduit de l’anglais par Odile Demange, Cambridge University Press, 1999 ; Libraire Arthème Fayard, 2001 pour la traduction française.

8

Cité par Christiane Chauviré : Hofmannsthal et la métamorphose, Variations sur l’opéra, Éditions de l’Éclat, 1991.

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Tempus

« Sed fugit interea tempus fugit irreparabile, dum singula amore capti circumvectamur… »* VIRGILE LES GÉORGIQUES

Évanescence

J

extrait de Sigmund Freud. Vergänglichkeit (1915)

e me promenais il y a peu en compagnie d’un ami taciturne et d’un jeune poète à la réputation déjà établie et nous traversions un paysage d’été florissant. Le poète s’émerveillait devant la beauté de la nature qui nous entourait, mais il n’en jouissait pas. Ce qui le dérangeait, c’était la pensée que toute cette beauté fût appelée à disparaître, qu’à l’hiver, elle se serait déjà envolée, à l’instar de toute beauté créée par les hommes — et de toutes les choses belles et nobles qu’ils créeraient encore. Tout ce que lui, le poète, avait aimé et admiré lui semblait dévalué en raison du destin provisoire auquel tout était voué. On sait que deux mouvements psychiques différents peuvent découler du fait que l’on ravale la beauté et la perfection à leur caractère transitoire. Le premier mouvement aboutit à un dégoût douloureux du monde dont témoignait notre jeune poète ; l’autre, à une révolte contre la réalité évoquée : non, il est impossible que toutes ces splendeurs de la nature et de l’art soient véritablement vouées au néant, ainsi que notre univers sensible et le monde existant au dehors. Ce serait insensé, il serait sacrilège de le croire. Ces splendeurs doivent nécessairement continuer à exister d’une façon quelconque, à l’abri de toutes influences destructrices. Déjà, il me paraît évident que ce souhait d’éternité découle de notre imaginaire pour être ainsi crédité d’une valeur réelle, même si cela n’empêche pas une sensation douloureuse de signifier quelque chose. Pour ma part, je ne pouvais ni m’inscrire en faux contre l’idée de cette caducité générale, ni m’obliger à faire une exception quant au sort imparti à la beauté et à la perfection. Toutefois, je m’opposai au pessimisme du poète sur son idée * Mais en attendant, il fuit : le temps fuit sans retour, tandis que nous errons, prisonniers de notre amour du détail… 50

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que la caducité du beau impliquerait la dévalorisation de ce dernier, alors que, bien au contraire, elle entraîne son relèvement ! Qu’un objet soit caduc lui confère une valeur de rareté dans le temps. La possibilité d’un plaisir restreint en augmente le prix. Je fis valoir à notre poète qu’il était incompréhensible que le caractère transitoire de la beauté dût gâcher notre joie devant celle-ci. La beauté de la nature revient l’année suivante après chacune des détériorations effectuées par l’hiver : comparé à notre vie humaine, on peut même considérer ce retour comme éternel. Durant notre existence, nous pouvons voir la beauté d’un corps humain et d’un visage s’évanouir à jamais, et pourtant leur courte durée de vie contribue à ajouter un charme nouveau à ceux qu’ils possèdent déjà. Qu’une fleur naisse qui ne fleurira qu’une seule nuit, sa floraison ne nous apparaît pas moins magnifique.


fugit…

par Daniel Dollé

Kann mich auch an ein Mädel erinnern, die frisch aus dem Kloster in den heiligen Ehestand kommandiert word’n. Wo ist sie jetzt? Ja… such’ dir den Schnee vom vergangenen Jahr ! Das sag’ ich so – aber wie kann das wirklich sein, dass ich die kleine Resi war, und dass ich auch einmal die alte Frau sein werd? Die alte Frau, die alte Marschallin! “Sieht es, da geht’s, die alte Fürstin Resi!” Wie kann denn das geschehen? Wie macht denn das der liebe Gott? Wo ich doch immer die gleiche bin. Und wenn er’s schon so machen muss, warum lasst er mich zuschaun dabei mit gar so klarem Sinn! Warum versteckt er’s nicht vor mir? Da alles ist geheim, so viel geheim. Und man ist dazu da, dass man’s ertragt. Und in dem “Wie” da liegt der ganze Unterschied…

Moi aussi, je m’en souviens, j’ai été cette jeune fille à peine retirée du couvent pour être livrée sans discussion aux liens sacrés du mariage. Où est-elle à présent ? Oui… cherche la neige de l’an passé ! Je dis cela, mais – comment croire que j’ai été la petite Rési et qu’il me faille un jour devenir vieille dame ?

Dans la bouche de la Maréchale, Hugo von Hofmannsthal essaye de définir le temps. N’est-ce pas là une tâche impossible à laquelle les philosophes et les scientifiques travaillent sans relâche, alors que dans la clepsydre, l'eau s’écoule sans égard. Maîtriser le temps ou ses effets, reste une quête vaine. La Maréchale ne chante pas les passions, mais les subit. Elle nous tient sous le charme des mots à travers un monologue intelligemment construit, il renvoie au passé, au futur, mais également au présent énigmatique, tout aussi insaisissable. Avec la Maréchale nous touchons à l’indicible. La vie

nous rend différent alors que nous croyons toujours être les mêmes, et la Maréchale sait que tout réside dans le « comment ». Avec Richard Strauss, elle nous invite à découvrir l’art et la manière. C’est une méditation sur le temps qui passe, illustrée par l’histoire du renoncement à la passion. Le retour d’Octavian près de la Maréchale, nous offre le contraste de celle qui agit et de celui qui subit. La Maréchale reste sereine, sa ligne de chant est fluide, mais Octavian chante avec emphase et agitation. DD

Une vieille dame, la vieille Maréchale ! « Vous voyez, c’est elle, la vieille princesse Rési ! » Comment cela peut-il arriver ? Et comment le Bon Dieu s’y prend-il ? Quelque part, je demeure la même. Et si Dieu veut agir comme il le fait, pourquoi me laisse-t-il tant de lucidité, pourquoi ne m’aveugle-t-il pas ? Pourquoi ne pas tout me cacher ? Tout cela est mystérieux, trop mystérieux. Et notre lot, sur cette terre, est de le supporter. Et c’est dans le « comment » que réside toute la différence.

Der Rosenkavalier. La Maréchale, Acte I

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Octavian Octavian

Ja, ist sie da? Dann will ich sie halten, dass sie mir nicht wieder entkommt! Packen will ich sie, packen, dass sie es spürt, zu wem sie gehört – zu mir ! Denn ich bin ihr und sie ist mein !

Ah, elle est là ? Alors je veux la tenir bien, afin qu’elle ne m’échappe plus jamais ! Je veux la serrer dans mes bras, la serrer, pour qu’elle sente à qui elle appartient – à moi ! Car je suis à elle et elle est à moi !

Marschallin

La Maréchale

Oh, sei Er gut, Quinquin. Mir ist zumut, dass ich die Schwäche von allem Zeitlichen recht spüren muss, bis in mein Herz hinein, wie man nichts halten soll, wie man nichts packen kann, wie alles zerläuft zwischen den Fingern, wie alles sich auflöst, wonach wir greifen, alles zergeht wie Dunst und Traum.

Oh, sois bon, Quinquin. On dirait qu’aujourd’hui il me faudra éprouver la fragilité de toutes les choses ephémères, jusqu’au fond de mon cœur ; apprendre qu’on ne doit rien vouloir retenir, que les bras se referment sur du vide, que tout glisse entre nos doigts, comment tout se délie quand on croit le serrer, comment tout se dissipe comme rêve et brume.

Octavian Octavian

Mein Gott, wie Sie das sagt, Sie will mir doch nur zeigen, dass Sie nicht an mir hängt.

Mon Dieu, comme tu dis cela. Tu veux seulement me montrer qu’il t’est facile de te détacher de moi.

Marschallin

La Maréchale

Sei Er doch gut, Quinquin! Jetzt muss ich noch den Buben dafür trösten, dass er mich über kurz oder lang wird sitzen lassen.

Sois donc gentil, Quinquin ! Et voilà maintenant qu’il faut que je console ce garçon Parce que tôt ou tard il m’abandonnera.

Octavian Octavian

Über kurz oder lang? Wer legt dir heut’ die Wörter in den Mund, Bichette?

Tôt ou tard ? Mais qui donc aujourd’hui parle par ta bouche, Bichette ?

Marschallin

La Maréchale

Dass Ihn das Wort so kränkt! Faut-il que ce seul mot te blesse ! Die Zeit im Grunde, Quinquin, Le temps, au fond, Quinquin, die Zeit, die ändert doch nichts an den Sachen. Le temps ne change rien à l’affaire. Die Zeit, die ist ein sonderbar’ Ding: Le temps est une étrange chose : wenn man so hinlebt, ist sie rein gar nichts. Quand on se laisse vivre, il ne compte pas, Aber dann auf einmal, da spürt man nichts als sie. mais tout à coup on ne sent plus que lui. Sie ist um uns herum, sie ist in uns drinnen. Il est autour de nous, il est en nous. In den Gesichtern rieselt sie, Il ruisselle sur nos visages, im Spiegel da rieselt sie, il ruisselle dans nos miroirs in meinen Schläfen fliesst sie. Il coule sur mes tempes. Und zwischen mir und dir Entre moi et toi, das fliesst sie wieder; lautlos wie eine Sanduhr. Il coule à nouveau ; sans bruit comme un sablier. Oh, Quinquin! Manchmal hör’ ich sie fliessen – Oh, Quinquin ! Parfois je l’entends couler unaufhaltsam. inlassablement. Manchmal steh’ ich auf mitten in der Nacht Parfois je me lève au milieu de la nuit, und lass die Uhren alle, alle stehn. Et je fais arrêter toutes les horloges : toutes. Allein man muss sich auch vor ihr nicht fürchten: Pourtant, il ne faut pas avoir trop peur de lui : Auch sie ist ein Geschöpf des Vaters, der uns n’est-il pas, lui aussi, alle erschaffen hat. une créature de notre Père à tous ?

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Der Rosenkavalier, Acte I


TEMPUS FUGIT DANIEL DOLLÉ

Le temps, au fond, Quinquin, voilà le leitmotiv hofmannsthalien, un thème obsessionnel que l’on retrouve dans toute son œuvre qu’il met dans la bouche de la Maréchale. Elle se lève la nuit pour arrêter les horloges, pour arrêter le temps, mais n’est-ce pas là l’obsession de tout un chacun ?

Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
 Suspendez votre cours :
 Laissez-nous savourer les rapides délices
 Des plus beaux de nos jours !

 Assez de malheureux ici-bas vous implorent,
 Coulez, coulez pour eux ; Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ;
 Oubliez les heureux.
 Mais je demande en vain quelques moments encore, Le temps m’échappe et fuit ;
 Je dis à cette nuit : Sois plus lente ; et l’aurore
 Va dissiper la nuit.
 Aimons donc, aimons donc ! de l’heure fugitive,
 Hâtons-nous, jouissons !
 L’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive ;
 Il coule, et nous passons ! Temps jaloux, se peut-il que ces moments d’ivresse, Où l’amour à longs flots nous verse le bonheur, S’envolent loin de nous de la même vitesse
 Que les jours de malheur ?
 Eh quoi ! n’en pourrons-nous fixer au moins la trace ?
 Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! tout entiers perdus !
 Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface, Ne nous les rendra plus !
 Éternité, néant, passé, sombres abîmes,
 Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?
 Parlez : nous rendez-vous ces extases sublimes
 Que vous nous ravissez ? ALPHONSE DE LAMARTINE
LE LAC

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TEMPUS FUGIT DANIEL DOLLÉ

Les Amies Gustav Klimt, 1916-17 brûlée en mai 1945 au château d'Immendorf, Allemagne Huile sur toile

La Cacanie,le pays englouti Extrait de Robert Musil. L’Homme sans qualités. Paris : Seuil, 2004.

L

à, en Cacanie, dans cet État depuis lors disparu et resté incompris qui fut sur tant de points, sans qu’on lui en rende justice, exemplaire, il y avait aussi du « dynamisme », mais point de trop. Chaque fois qu’on repensait à ce pays de l’étranger, venait flotter devant vos yeux le souvenir de ses routes larges, blanches, prospères, datant de l’époque de la marche à pied et des malles-poste, qui le sillonnaient en tous sens, fleuves d’ordre, clairs rubans de coutil militaire, bras administratifs, couleur de papier timbré, étreignant les provinces... Et quelles provinces ! Il y avait les glaciers et la mer, le Karst et les champs de blé bohèmes, les nuits au bord de l’Adriatique, grésillantes de l’activité des grillons, et les villages slovaques où la fumée sortait des cheminées comme d’un nez retroussé, où les maisons étaient tapies entre deux collines comme si la terre avait entrouvert ses lèvres afin d’y réchauffer son enfant. Naturellement, il y avait aussi des automobiles sur ces routes ; mais pas trop. Ici aussi, l’on préparait la conquête de l’air; mais point trop intensivement. De loin en loin, point trop souvent, l’on envoyait un bateau en Amérique du Sud ou dans l’Extrême-Orient. On n’avait nulle ambition économique, nul rêve d’hégémonie ; on était installé au centre de l’Europe, au croisement des vieux axes du monde ; les mots de colonie et d’outre-mer ne rendaient encore qu’un son lointain et comme trop neuf. On déployait quelque luxe ; mais en se gardant d’y mettre le raffinement des Français. On pratiquait les sports ; mais avec moins d’extravagance que les Anglo-Saxons. On dépensait pour l’armée des sommes considérables ; juste assez cependant

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pour être sûr de rester l’avant-dernière des Grandes Puissances. La capitale elle-même était un rien plus petite que les plus grandes métropoles du monde, et pourtant considérablement plus grande que ne le sont de simples « grandes villes ». Et ce pays était administré d’une manière éclairée, à peine sensible, tous les angles prudemment arrondis, par la meilleure bureaucratie d’Europe, à qui l’on ne pouvait reprocher qu’une seule faute : qu’elle vît dans le génie et les initiatives géniales des particuliers, s’ils n’en avaient pas reçu le privilège de par leur haute naissance ou quelque mission officielle, une attitude impertinente et une sorte d’usurpation. Mais y a-t-il personne qui aime voir des incompétents se mêler de ses affaires ? Et puis au moins, en Cacanie, on se bornait à tenir les génies pour des paltoquets : jamais on n’eût, comme ailleurs, tenu le paltoquet pour un génie. Sur cette Cacanie maintenant engloutie, que de choses curieuses seraient à dire ! Elle était, par exemple, kaiserlichkoniglich (impériale-royale) et aussi bien kaiserlich und koniglich (impériale et royale) ; il n’était chose ni personne qui ne fût affectée là-bas de l’un de ces deux sigles, k. k. ou k. u. k. ; il n’en fallait pas moins disposer d’une science secrète pour pouvoir décider à coup sûr quelles institutions et quels hommes pouvaient être dits k. k., et quels autres k. u. k. Elle s’appelait, par écrit, Monarchie austro-hongroise, et se faisait appeler, oralement, l’Autriche : nom qu’elle avait officiellement et solennellement abjuré, mais conservait dans les affaires de cœur, comme pour prouver que les sentiments ont autant d’importance que le droit public, et que les prescriptions n’ont rien à voir avec

© DR

Traduit de l’allemand par Philippe Jaccottet


« Robert Musil opère une synthèse intellectuelle que je n’ai trouvée dans aucune œuvre philosophique ou scientifique de notre siècle. » MILAN KUNDERA

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le véritable sérieux de la vie. La Constitution était libérale, mais le régime clérical. Le régime était clérical, mais les habitants libres-penseurs. Tous les bourgeois étaient égaux devant la loi, mais justement, tous n’étaient pas bourgeois. Le Parlement faisait de sa liberté un usage si impétueux qu’on préférait d’ordinaire le tenir fermé ; mais l’on avait aussi une loi d’exception qui permettait de se passer du Parlement ; et chaque fois que l’Etat tout entier se préparait à jouir des bienfaits de l’absolutisme, la Couronne décrétait qu’on allait recommencer à vivre sous le régime parlementaire. Parmi nombre de singularités du même ordre, il faut citer aussi les dissensions nationales qui attiraient sur elles, à juste titre, l’attention de toute l’Europe, et que les historiens d’aujourd’hui défigurent. Ces dissensions étaient si violentes que la machine de l’État s’enrayait plusieurs fois par année à, cause d’elles ; mais dans ces intervalles et ces repos de l’État, chacun s’en tirait à merveille, et l’on faisait comme si de rien n’était. D’ailleurs, il n’y avait rien eu de réel. Il y avait simplement que cette aversion de tout homme pour les efforts de son prochain dans laquelle nous communions tous aujourd’hui, s’était fait jour très tôt dans cet État pour atteindre à une sorte de cérémonial sublimé qui eût pu avoir de grandes conséquences si son évolution n’avait pas été prématurément interrompue par une catastrophe. Ce n’était pas seulement, en effet, que l’aversion pour le concitoyen se fût élevée là-bas au niveau d’un sentiment de communauté, mais encore que la méfiance envers soi-même, envers son propre destin, y avait pris le caractère d’une profonde assurance. En ce pays (et parfois jusqu’au plus haut point de passion, et jusque dans ses extrêmes conséquences), on agissait toujours autrement qu’on ne pensait, ou on pensait autrement qu’on n’agissait. Des observateurs mal informés ont pris cela pour du charme, ou même pour une faiblesse de ce qu’ils croyaient être le caractère autrichien. C’était faux ; il est toujours faux de vouloir expliquer les phénomènes d’un pays à travers le caractère de ses habitants. Car l’habitant d’un pays a toujours au moins neuf caractères : un caractère professionnel, un caractère de classe, un caractère sexuel,

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un caractère national, un caractère politique, un caractère géographique, un caractère conscient, un inconscient, et peut-être même encore, un caractère privé ; il les réunit dans sa personne, mais s’en trouve dissocié, et n’est plus finalement qu’un petit vallon creusé par cette multitude de cours d’eau vallon dans lequel ils viennent s écouler pour en ressortir ensuite et remplir d autres vallons avec d’autres ruisselets. C’est pourquoi tout habitant de la terre possède encore un dixième caractère qui n’est rien d’autre que l’imagination passive d’espaces non encore remplis ; ce caractère donne à l’homme toutes les libertés, sauf une : celle de prendre au sérieux ce que font ses autres caractères (neuf pour le moins), et ce qui leur arrive ; donc, en d’autres termes la seule liberté précisément, qui pourrait remplir cet espace. Cet espace, dont il faut avouer qu’il n’est pas facile à décrire sera coloré et formé autrement en Italie qu’en Angleterre parce que tout ce qui se détache sur son fond possède une autre forme et une autre couleur ; et pourtant, il reste le même, ici comme ailleurs, c’est-à-dire précisément un espace invisible et vide dans lequel la réalité se dresse comme une petite ville de jeu de construction abandonnée par l’imagination. Dans la mesure où le fait peut devenir visible à tous les yeux, voilà ce qui s était passé en Cacanie, voilà en quoi la Cacanie sans que le monde le sût encore, s’affirmait l’État le plus avancé ; c’était un État qui ne subsistait plus que par la force de l’habitude, on y jouissait d’une liberté purement négative dans la conscience continuelle des raisons insuffisantes de sa propre existence et baigné par la grande vision de ce qui ne s’est point passé, ou point irrévocablement du moins, comme par l’haleine des Océans dont l’humanité est sortie. Es ist passiert disait-on là-bas, quand d’autres gens croyaient ailleurs que Dieu sait quoi avait eu lieu ; c’était un terme singulier, qui n apparaît nulle part ailleurs, ni en allemand ni dans une autre langue, et dans le souffle duquel les faits et les coups du sort devenaient aussi légers que des pensées ou du duvet. Oui, malgré tout ce qui parle en sens contraire, la Cacanie était peut-être, après tout, un pays pour génies ; et sans doute fut-ce aussi sa ruine.


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La Vienne d’hier (extraits) Stefan Zweig, La Vienne d’hier. Conférence à Paris, en 1940.

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n vous parlant de la Vienne d’hier, je n’ai pas l’intention de vous livrer une notice nécrologique, de prononcer une oraison funèbre. Nous n’avons pas encore enterré Vienne dans nos cœurs, nous nous refusons de croire que subordination temporaire soit synonyme de soumission totale. Je pense à Vienne de la même façon que vous pensez à des frères, à des amis qui sont en ce moment (1940) au front. Vous avez passé votre enfance avec eux, vous avez vécu des années en leur compagnie, vous leur devez bien des heures de bonheur commun. À présent ils sont loin de vous et vous les savez menacés sans pouvoir leur venir en aide, sans pouvoir partager ce danger. C’est justement en de tels moments d’éloignement forcé que l’on se sent le plus uni à ses proches. C’est ainsi que je veux vous parler de Vienne, ma ville natale et l’une des capitales de notre culture européenne commune. […] Elle était la capitale d’un immense empire qui, dépassant largement les frontières de l’Allemagne vers l’est et l’ouest, le sud et le nord, s’étendait en haut jusqu’à la Belgique, en bas jusqu’à Venise et Florence, et englobait la Bohême, la Hongrie, ainsi que la moitié des Balkans. Son importance et son histoire ne furent jamais liées au peuple allemand et à des frontières nationales mais à la dynastie des Habsbourg, la plus puissante d’Europe ; et plus l’empire des Habsbourg se développait, plus s’accroissaient la grandeur et la beauté de cette ville. C’est de la Hofburg, qui en était le cœur, et non de Munich ou de Berlin, petites cités insignifiantes à l’époque, que pendant des centaines d’années se décida l’Histoire. On refaisait sans cesse dans ses murs le vieux rêve d’une Europe unie ; un empire supranational, un « Saint Empire romain », voilà ce qu’imaginaient les Habsbourg – et non pas une hégémonie germanique. Tous ces empereurs étaient cosmopolites dans leurs pensées, leurs projets, leurs paroles. D’Espagne ils avaient rap-

porté l’étiquette, par l’art ils se sentaient liés à l’Italie et à la France, et ils l’étaient par le mariage à toutes les nations d’Europe. Deux siècles durant on parla davantage à la cour d’Autriche l’espagnol, l’italien et le français que l’allemand. De même la noblesse assemblée autour de la maison impériale était parfaitement internationale ; il y avait là les magnats hongrois et les grand seigneurs polonais, il y avait aussi de vieilles familles de Hongrie, de Bohême, d’Italie, de Belgique, de Toscane, du Brabant. Parmi tous les prestigieux palais baroques groupés autour de celui d’Eugène de Savoie, il en est à peine un qui porte un nom allemand ; ces aristocrates se mariaient entre eux et épousaient des membres de la noblesse étrangère. Ce milieu culturel voyait constamment affluer de l’extérieur un sang nouveau, et le même phénomène se produisait au sein de la bourgeoisie. Les artisans et les marchands venaient de Moravie, de Bohême, des régions montagneuses du Tyrol, de Hongrie, d’Italie ; le flux des Slaves, des Magyars, des Italiens, des Polonais et des Juifs se dirigeait vers le cercle toujours plus étendu de la ville. Leurs enfants, leurs petits-enfants parlaient allemand mais leurs origines n’étaient pas totalement effacées. Par le jeu de ces mélanges permanents, les oppositions se firent simplement moins marquées, tout devint plus souple, plus courtois, plus conciliant, plus prévenant, plus amène – en un mot plus autrichien, plus viennois. Composée de tant d’éléments étrangers, Vienne fut le terrain idéal pour une culture commune. Ce qui venait de l’extérieur ne passait pas pour ennemi, pour antinational ; loin de le refuser avec morgue comme non allemand, non autrichien, on le recherchait et on l’honorait. […] Hofmannsthal, pour un quart originaire de Haute-Autriche, pour un quart viennois, pour un quart juif et pour un quart italien, montre d’une façon tout à fait symbolique quelles nouvelles

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Un vent de légèreté descendait le Danube et les Allemands nous regardaient de haut, avec un certain mépris, comme des enfants qui se refusent à comprendre le sérieux de l’existence. valeurs, quels raffinements et quelles heureuses surprises sont le fruit de tels mélanges. Que ce soit dans ses vers ou dans sa prose il a porté la musicalité de la langue allemande à son comble, accordant le génie allemand et le génie latin – entreprise susceptible de réussir uniquement en Autriche, ce pays situé entre deux cultures. Tel a bien toujours été le véritable secret de Vienne : recevoir, intégrer, relier, en faisant preuve de conciliation, et résoudre les dissonnances. C’est pour cette raison, et non par l’effet du hasard, que Vienne est devenu la ville de la musique. […] Métastase, le roi de l’opéra, s’installe en face de la Hofburg, Haydn vit dans la même maison, Gluck est le professeur des enfants de Marie-Thérèse, Haydn voit apparaître Mozart, Mozart voit apparaître Beethoven, près d’eux on rencontre Salieri et Schubert, après eux viendront Brahms et Bruckner, Johann Strauss et Lanner, Hugo Wolf et Gustav Mahler. Pas une seule pause pendant cent, cent cinquante ans, pas une décennie, pas une année sans qu’une

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œuvre immortelle ait vu le jour à Vienne. Jamais ville n’a été plus comblée par le génie de la musique que Vienne au XVIIIe et XIXe siècles. […] L’amour de la musique habitait la maison impériale : l’empereur Léopold composait lui-même, Marie-Thérèse surveillait l’éducation musicale des ses enfants, Mozart et Gluck jouaient chez elle, l’empereur Joseph connaît jusqu’à la moindre note des opéras qu’il fait représenter dans son théâtre. Leur passion de la culture les amène même à négliger la politique. Leur orchestre, leur théâtre sont leur orgueil, et il n’est aucune autre affaire, dans le vaste domaine de l’administration, dont ils s’occupent aussi personnellement. Quel opéra sera joué, quel maître de chapelle, quel chanteur doivent être engagés, tel est leur principal souci […] Tout musicien, tout artiste le savait : à Vienne aucun relâchement ne lui serait permis, il lui fallait donner le meilleur de lui même pour se maintenir. Ce contrôle se retrouvait dans les couches les plus basses de la population. Les orchestres de chaque régiment rivalisaient entre eux et les chefs de la musique de notre armée – je me contenterai de rappeler les débuts de Lehár – étaient meilleurs que ses généraux. La moindre petite formation féminine au Prater, chaque pianiste dans les Heurigen était soumis à cet examen sans indulgence, car la qualité de l’orchestre dans ces guinguettes avait pour le Viennois moyen la même importance que celle du vin et l’exécutant était donc obligé de bien jouer, sinon il était perdu, sinon il était renvoyé. Oui c’était curieux : dans l’administration, dans la vie publique, dans les mœurs, partout régnait à Vienne une grande nonchalance, une grande indifférence, beaucoup de mollesse, de « laisseraller », comme nous le disons. Dans une seule sphère, celle de l’art, aucune négligence n’était excusée, aucune indolence n’était tolérée. Il est possible que cette surévaluation de la musique, du théâtre, de l’art, de la culture ait privé Vienne, les Habsbourg, l’Autriche, de nombre de succès politiques. Mais c’est à elle que nous devons notre suprématie dans le domaine musical. […] C’est sûr, la vie à Vienne était agréable, facile, on


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cherchait, par une plaisanterie, à se débarrasser du moindre désagrément, de la moindre gêne. On aimait les fêtes et les plaisirs. Quand la musique militaire défilait, les gens abandonnaient leurs affaires pour la suivre dans la rue. Au moment du corso fleuri au Prater, trois cent mille personnes étaient sur pied et même un enterrement prenait des allures de fête fastueuse. Un vent de légèreté descendait le Danube et les Allemands nous regardaient de haut, avec un certain mépris, comme des enfants qui se refusent à comprendre le sérieux de l’existence. Vienne était pour eux Falstaff, le jouisseur impudent, spirituel et joyeux, et Schiller nous traitait de Phéaciens, ce peuple pour lequel c’est tous les jours dimanche et chez qui la broche tourne continuellement dans l’âtre. Ils trouvaient que tous les Viennois aimaient une vie trop relâchée et étourdie. Ils nous reprochaient notre jouissance et nous blâmèrent deux siècles durant de trop profiter, nous les Viennois, des bonnes choses de l’existence. […] La jouissance me semble être chez l’homme un droit et même une vertu, tant qu’elle ne contribue pas à l’abêtir ou à l’affaiblir. Je l’ai toujours constaté : ceux-là précisément qui, tant qu’ils le pouvaient, profitaient librement et honnêtement des plaisirs de l’existence s’avéraient les plus coura-

geux dans les situations difficiles et dans le danger, de même que les peuples et les hommes qui ne se battent pas par amour du militarisme mais simplement en y étant contraints se révèlent en fin de compte les meilleurs combattants. […] Aucune ville n’a été aussi profondément marquée par la paix de 1919 que Vienne. Imaginez un peu la situation : la capitale d’une monarchie de cinquante-quatre millions d’habitants soudain n’en compte plus que quatre autour d’elle. Elle n’est plus ville impériale, l’empereur a été chassé, et avec lui disparaît tout l’éclat des festivités. Toutes les artères reliant la capitale aux provinces d’où elle tirait sa subsistance sont coupées, les trains n’ont pas de wagons, les locomotives pas de charbon, les magasins sont vides, il n’y a ni pain ni fruits ni viande ni légumes, l’argent se dévalue d’heure en heure. Partout on prophétise la fin irrévocable de Vienne : l’herbe poussera dans les rues ; des dizaines, des centaines de milliers de gens devront partir afin de ne pas mourir de faim. Et on pense sérieusement au jour où il faudra vendre les collections d’art pour se procurer du pain et démolir une partie des maisons à cause de la menace de désertification. […] La guerre est finie. Repartons à zéro ! Reconstruisons Vienne, reconstruisons l’Autriche !

Marschallin

La Maréchale

Heut’, oder morgen oder der übernächsten Tag. Hab’ ich mir’s denn nicht vorgesagt? Das alles kommt halt über jede Frau. Hab’ ich’s denn nicht gewusst? Hab’ ich nicht eine Gelübde tan, Dass ich’s mit einem ganz gefassten Herzen Ertragen werd’… Heut oder morgen oder den übernächsten Tag.

Aujourd’hui ou demain, ou bien le jour d’après. Ne me l’étais-je pas prédit ? En vérité, c’est le destin de toute femme. Ne le savais-je donc pas ? Ne m’étais-je pas fait le serment d’avoir l’âme assez forte pour supporter… Aujourd’hui ou demain, ou bien le jour d’après.

Octavian Octavian

Ich hab’ Sie übermässig lieb.

Je vous aime plus que tout.

Sophie Sophie

Das ist nicht wahr. Er hat mich nicht so lieb, als wie Er spricht. Vergess’ Er mich.

Ce n’est pas vrai. Vous ne m’aimez pas autant que vous le dites. Oubliez-moi.

Der Rosenkavalier, Acte III

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Avec le départ d’Ochs : « Leopold, wir gehn! », la comédie s’achève. Elle quitte la scène en laissant trois femmes, c’est l’aboutissement sur un grand moment de chant féminin. La prophétie du premier acte est devenue réalité, irrésistiblement Octavian se rapproche de Sophie qui vient de comprendre, « et moi… je ne compte plus à ses yeux. » Les personnages sont devenus si fragiles que l’orchestre s’efface et laisse parler les cœurs à nu. Une dernière fois, Octavian plonge son regard dans celui de celle qui fut sa maîtresse. Le génie de Strauss et de Hofmannsthal fait basculer l’ouvrage. La Maréchale donne le plus beau gage d’amour, d’un amour absolu, à Octavian, elle cède sa place. Sophie remplace la Maréchale, l’opéra est virtuellement terminé. Et à la fin du sublimissime trio, chacun aura appris sa vérité, le renoncement, la difficulté du choix et la complexité de la réalité. La Maréchale

Le garçon est là, et je suis là, et avec cette fille étrangère il sera heureux, heureux de son point de vue d’homme, pleinement.

L’espace et le temps du Chevalier à la rose sont à la fois passés et futurs, réalités et fictions. L’œuvre devient le reflet d’une sociéte, d’un monde qui refusent la décadence, le changement inéluctable, d’un monde qui n’accepte ni le temps, ni la réalité. La société s’est réfugiée dans le paraître et la théâtralité. C’est la fin de la monarchie des Habsbourg. Les fractures sociales et psychologiques sont masquées par les apparences. Dans le travestissement, dans le jeu de rôle, dans une liesse artificielle chacun et chacune subliment les tensions et les angoisses accumulées. La permanence de la valse marque le changement d’une époque et la fuite de la réalité. Le tournoiement incessant de la valse, au cours duquel le temps s’arrête, est la métaphore de fuite et de l’évasion à la veille de la première guerre mondiale. Valser suspend le temps et libère des contraintes terrestres, elle devient la sublimation du passé, du présent et du futur. Mais plus on persiste dans l’immobilité, plus on se sous-

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trait aux responsabilités, d’autant plus on subit les changements. Dans le Chevalier à la rose, tous les personnages sont soumis au temps qui passe en eux et autour d’eux. Leur fuite de la réalité les entraîne dans un jeu de rôle, dans un permanent travestissement au cours duquel ils perdent leur identité. La Maréchale est le seul personnage qui prend réellement conscience de la fuite du temps et de la réalité. Elle ne se cramponne pas à de faux rêves, à de fausses utopies. L’acceptation de son évanescence et de l’évolution des choses confère une certaine sérénité pour accepter la fin d’une relation, mais également d’un monde : « Es ist halt vorbei ». Ce n’est pas une rébellion, mais un sourire sublimé de celle qui a saisi l’ironie des choses et des relations qui confère à la Maréchale de Hofmannsthal sa grandeur. Dans son sourire métamorphosé se trouve la distanciation, avec lui se résoud la cognition du tragique. Par son effacement, en laissant Octavian et Sophie seuls, elle ouvre la porte au rêve, à la féerie : « Ist ein Traum, kann nicht wirklich sein, dass wir beieinander sein, beieinand’ für alle Zeit, und Ewigkeit! » chante Sophie à la fin de l’œuvre. DD

« Qui n’a pas l’esprit de son âge, De son âge a tout le malheur. » VOLTAIRE


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Noch spür ich ihren Atem auf den Wangen; Wie kann das sein, dass diese nahen Tage Fort sind, für immer fort, und ganz vergangen?

Je perçois encore leur souffle sur mes joues ; comment se peut-il que ces jours si proches aient disparu, à jamais disparu, et complètement passé ?

Dies ist ein Ding, das keiner voll aussinnt, C’est une chose que personne ne comprend vraiment, Und viel zu grauenvoll, als dass man klage: elle est bien trop horrible, qu’on se plaigne : Dass alles gleitet und vorüberrinnt. que tout fuit et demeure éphémère. Und dass meine eigenes Ich, durch nichts gehemmt, Et que mon propre moi, par rien entravé, Herüberglitt aus einem kleinem Kind s’est échappé d’un petit enfant Mir wie ein Hund unheimlich stumm und fremd. comme un chien dans un silence inquiétant et bizarre. Dann: dass ich auch vor hundert Jahren war Und meine Ahnen, die im Totenhemd, Mit mir verwandt sind wie mein eigenes Haar;

Ensuite : que je fus il y a cent ans et mes aïeux, qui dans leur linceul, me sont proches comme mes propres cheveux ;

So eins mit mir als wie mein eigenes Haar.

ne faisant qu’un avec moi, comme mes propres cheveux.

HUGO VON HOFMANNSTHAL ÜBER VERGÄNGLICHKEIT (À PROPOS DE L'ÉPHÉMÈRE)

Aphorismes sur les différents âges de la vie...

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Arthur Schopenhauer, Aphorismes sur la sagesse de la vie ans la jeunesse, c’est la contemplation ; dans l’âge mûr, la réflexion qui domine ; l’une est le temps de la poésie, l’autre plutôt celui de la philosophie. Dans la pratique également, c’est par la perception et son impression que l’on se détermine pendant sa jeunesse ; plus tard, c’est par la réflexion. Mais la jeunesse n’en reste pas moins la racine de l’arbre de la connaissance, bien que ce soit la couroone de l’arbre qui porte les fruits. Mais de même que chaque époque, même la plus pitoyable, se croit plus sage que toutes celles qui l’ont précédée, de même à chaque âge l’homme se croit supérieur à ce qu’il a été auparavant ; tous les deux font souvent erreur. Pendant les années de la croissance physique, où nous grandissons également en force intellectuelles et en connaissances, l’aujourd’hui s’habitue à regarder l’hier avec dédain. Cette habitude s’enracine et persévère même alors que le déclin des forces intellectuelles a commencé et que l’aujourd’hui devrait plutôt regarder l’hier avec considération : on déprécie trop à ce moment les productions et les jugements de ses jeunes années. Mais particulièrement vers son terme, la vie rappelle la fin d’un bal masqué, quand on retire les

masques. On voit à ce moment quels étaient réellement ceux avec lesquels on a été en contact pendant la vie. En effet, les caractères se sont montrés au jour, les actions ont porté leurs fruits, les œuvres ont trouvé leur juste appréciation, et toutes les fantasmagories se sont évanouies. Car il a fallu le temps pour tout cela. On a coutume d’appeler la jeunesse le temps heureux, et la vieillesse le temps triste de la vie. Cela serait vrai si les passions rendaient heureux. Mais ce sont elles qui ballottent la jeunesse de ça de là, tiout en lui donnant peu de joies et beaucoup de souffrances. Elles n’agitent plus l’âge froid, qui revêt bientôt une apparence contemplative : car la connaissance devient libre et prend la haute main. Or la connaissance est, par elle-même, exempte de douleur ; par conséquent, plus elle prédominera dans la conscience, plus celle-ci sera heureuse. La vie humaine, à proprement parler, ne peut être dite ni longue ni courte, car, au fond, elle est à l’échelle avec laquelle nous mesurons toutes les autres longueurs de temps. Car quelque longtemps que l’on vive, on ne possède rien au-delà du présent indivisible ; mais le souvenir perd, chaque jour, par l’oubli plus qu’il ne s’enrichit par l’accroissement.

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© LEBRECHT MUSIC & ARTS

Octavian, Sophie, la Maréchale et Faninal dans la scène finale Alois Kolb, 1922 Gravure parue dans la revue sur l'art nouveau Jugend à Munich

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© DR

Der Rosenkavalier de Richard Strauss Orchestre et troupe de l’opéra de Dresde Direction musicale : Fritz Busch La Maréchale : Meta Seinemeyer Baron Ochs : Ludwig Ermold [photo à gauche] Octavian : Elisa Stuenzner [photo ci-contre] Sophie : Marguerite Nikisch Faninal : Rudolf Schmalnauer

Le 20 mai 1927, représentation à Genève du Rosenkavalier.

© DR

A

ucun artiste hors ligne, mais un excellent ensemble ; très bien chanté et joué ; les deux meilleurs interprètes : le baron Ochs et Octavian. C’était la première fois que nous entendions l’œuvre, bien que nous eussions pour elle une particulière tendresse. Et nous reconnaissons que cette tendresse était méritée. De toutes les œuvres de Richard Strauss, aucune n’assurera la durée de son nom, autant que Rosenkavalier (et la Domestica). Il a mis le meilleur de lui-même – de l’homme et du musicien. La Les premières fleur de sa poésie Premières (trop cachée, trop gâtée, dans le reste Dresde 26 janvier 1911 de sa musique). Nuremberg 27 janvier 1911 Munich 1er février 1911 La première renHambourg 21 février 1911 contre des deux er Milan 1 mars 1911 enfants, au II ème Zurich 2 mars 1911 Prague 4 mars 1911 acte, l’exquise déliVienne 8 avril 1911 catesse, le juvénile Budapest 21 mai 1911 Berlin 14 novembre 1911 éveil d’un amour Rome 14 novembre 1911 virginal, – quelques Strasbourg 28 mars 1912 pages d’ivresse Londres 29 janvier 1913 New York 9 décembre 1913 amoureuse chez Stockholm 20 avril 1920 un adolescent, au Paris 11 février 1927 début du I er acte ; Genève 20 mai 1927 Bruxelles 15 décembre 1927 le beau trio ému et le duo si pur qui

terminent l’œuvre, sont dignes de prendre place dans le trésor classique des Weber et des Mozart. – Mais jamais aucun musicien n’eut le bonheur, échu à Richard Strauss, de travailler sur un poème comme celui de Hofmannsthal. Même sans la musique, c’est un régal à savourer. Quelle finesse de touche, quelle grâce et quelle malice ! C’est presque trop riche et trop nuancé pour être pleinement exprimé, au théâtre musical : l’auditeur en perd plus de la moitié ; il faut le lire pour le pleinement goûter. – J’admire les petits imbéciles de la critique de Genève, qui lui font la leçon ! Ils lui reprochent la confusion des genres, et, tout en devant évoquer le souvenir de Molière, ils croient l’écraser sous ce nom. Ils ne se doutent pas qu’ils ont affaire à un des plus parfaits artistes qui aient jamais manié la langue allemande, – et que le Rosenkavalier est peut-être son chef-d’œuvre au théâtre. – Depuis les Nozze du divin Mozart, la musique n’a jamais été à pareille fête. (Naturellement, je vois aussi les longueurs, et les fautes de goût, – et surtout, ce genre faux du « réciter en chantant » ! Mais que m’importe, si je cueille dans la prairie un bouquet de fleurs les plus pures et les plus tendres de la musique-poésie !) Extrait de Romain Rolland. Richard Strauss et Romain Rolland. Correspondances et fragments de journal. Paris : Albin Michel, 1951. (Cahiers Romain Rolland, n°3)

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SOUVENIRS AU GRAND THÉÂTRE 1964 Dir. musicale : Christian Vöchting Mise en scène : Herbert Graf Décors & costumes : Thierry Bosquet Elisabeth Schwarzkopf (La Maréchale) Michael Langdon (Baron Ochs) Kerstin Meyer (Octavian) [photo] Teresa Stich-Randall (Sophie) [photo] Jacques Doucet (Faninal) © ARCHIVES GTG / FREDDY BERTRAND

1973 Direction musicale : Theodor Guschlbauer Mise en scène : Lotfi Mansouri Décors & costumes : John Moore Elisabeth Söderström (La Maréchale) Michael Langdon (Baron Ochs) Anne Howells (Octavian) Patricia Wise (Sophie) Andrew Foldi (Faninal) © ARCHIVES GTG / FREDDY BERTRAND

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1981 Direction musicale : Berislav Klobucar Mise en scène : Michael Dittmann Décors & costumes : Ezio Frigerio Arlene Saunders (La Maréchale) Aage Haugland (Baron Ochs) [photo] Sylvia Lindenstrand (Octavian) [photo] Britt-Marie Aruhn (Sophie) Raymond Wolansky (Faninal) © ARCHIVES GTG / CLAUDE GAFNER

1998 Direction musicale : Philippe Auguin Mise en scène : Patrice Caurier & Moshe Leiser Décors : Christian Fenouillat Costumes : Agostino Cavalca Tina Kiberg (La Maréchale) [photo] Markus Hollop (Baron Ochs) [photo] Angelika Kirchschlager (Octavian) [photo] Elisabeth Norberg-Schulz (Sophie) [photo] Franz Josef Kapellmann (Faninal) © ARCHIVES GTG / CAROLE PARODI

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RÉFÉRENCES À LIRE

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Avant-scène Opéra n°69/70 Richard Strauss Dominique Jameux Hachette, 1986 Richard Strauss. L’homme, le musicien, l’énigme Michael Kennedy Collection : Bibliothèque des grands musiciens Traduit par Odile Demange Grandeur et décadence des opéras de Richard Strauss René Leibowitz In Histoire de l’opéra Buchet-Chastel, 1957 L’Opéra selon Richard Strauss Bernard Banoun Fayard, 2000 Correspondance 1900-1929 Richard Strauss – Hugo von Hofmannsthal Fayard, 1992 Traduction Bernard Banoun Richard Strauss ou le voyageur et son ombre André Tubeuf Actes Sud, 1980 Correspondance et fragments de journal Romain Rolland, Richard Strauss Michel, 1951 Richard Strauss et le postromantisme allemand Piotr Kaminski Collection : Références, 2011 Livre d’or d’un jeune chef d’orchestre Richard Strauss, 1925 Richard Strauss, mode d’emploi Christian Merlin L’Avant-scène opéra, 2007

À ÉCOUTER

Parmi plus de 100 enregistrements intégraux… Robert Heger (DM)* Vienne 1933 EMI Lotte Lehmann Maria Olszewska Elisabeth Schumann Richard Mayr Orchestre philharmonique de Vienne

Version abrégée autorisée par Strauss.

Fritz Reiner Met (live) 1949 Arlecchino Eleanor Steber Risë Stivens Erna Berger Emmanuel List Giuseppe di Stefano Chœur et orchestre du Metropolitan Opera de New York

Herbert von Karajan Vienne 1960 Arkadia Lisa Della Casa Sena Jurinac Hilde Güden Otto Edelmann Regolo Romani Chœur et orchestre philharmonique de Vienne

Erich Kleiber Munich 1952 Myto Maria Reining Elisabeth Grümmer Erna Berger Kurt Böhme Lorenz Fehenberger Orchestre d’état de Bavière

Herbert von Karajan Londres 1964 EMI Elisabeth Schwarzkopf Christa Ludwig Teresa Stich-Rendall Otto Edelmann Nicolaï Gedda Orchestre et chœur Philharmonia de Londres

Erich Kleiber Vienne 1954 Decca Maria Reining Sena Jurinac Hilde Güden Ludwig Weber Anton Dermota Orchestre philharmonique et chœur de l’opéra de Vienne

Georg Solti Vienne (studio) 1968 Decca Régine Crespin Yvonne Minton Helen Donath Manfred Jungwirth Luciano Pavarotti Chœur et orchestre philharmonique de Vienne

POUR LES INTERNAUTES

www.musicologie.org/Biographies/s/strauss_richard.html sites.radiofrance.fr/francemusique [Rubrique Biographie] Pour une biographie complète www.richardstrauss.at/ Le site complet sur le compositeur (en anglais et allemand ) www.all-art.org/world_literature/hofmannsthal1.htm Une courte biographie et quelques poèmes du librettiste

À VOIR

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Carlos Kleiber (DM)* Otto Schenk (MS)* Opéra de Munich 1979 Gwyneth Jones Brigitte Fassbaender Lucia Popp Manfred Jungwirth Décors et costumes : Jürgen Rose Herbert von Karajan R. Hartmann Paul Czinner (Réal) Festival de Salzbourg 1960 Elisabeth Schwarzkopf Sena Jurinac Annelise Rothenberger Otto Edelmann Orchestre philharmonique de Vienne Herbert von Karajan (DM & MS) Opéra de Salzbourg 1983 Sony Anna Tomowa-Sintow Agnes Baltsa Janet Perry Kurt Moll Orchestre philharmonique de Vienne Carlos Kleiber Otto Schenk Opéra de Vienne 1994 DG Felicity Lott Anne Sofie von Otter Barbara Bonney Kurt Moll Chœur et orchestre philharmonique de Vienne Christian Thielemann Herbert Wernicke Baden-Baden 2009 Renée Fleming Sophie Koch Diana Damrau Franz Hawlata Chœur de l’opéra de Vienne Orchestre philharmonique de Munich Prod. de Salzbourg 1995, et Paris 1998

www.thomas-baum.eu/rose.html La liste des enregistrements incontournables www.operadis-opera-discography.org.uk/CLSTROSE.HTM La liste des 101 enregistrements connus de Rosenkavalier

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h

* (DM) : Directeur musical (MS) : Metteur en scène


CETTE ANNÉE-LÀ... GENÈVE EN 1911

par Prohistoire 1

« Depuis longtemps le canon n’avait parlé si fort, » observe, angoissé, le 30 décembre, un chroniqueur du Journal de Genève. De fait, l’été et l’automne ont été marqués par la « crise d’Agadir », différent francoallemand né d’une intervention française au Maroc visant à soutenir le sultan menacé par des révoltes. En quelques mois, l’affaire grossit, l’Angleterre s’en mêle, la guerre entre la France et l’Empire allemand est proche. Fin septembre, c’est l’Italie, revendiquant la Libye, alors possession ottomane, qui débarque ses fantassins dans le sable d’Afrique du Nord. Partout, des hommes politiques imprudents jouent avec le feu, excitant un nationalisme populaire prêt à en découdre. L’Allemagne, puissance montante, redoute de rester en dehors du grand jeu colonial alors dominé par la France et l’Angleterre qui, en retour, craignent ses appétits territoriaux ; l’Italie a peur de perdre ses débouchés sur le continent africain et profite de la faiblesse de l’Empire ottoman, tigre de papier sur lequel vient s’acharner le nationalisme balkanique, dont on connaît le rôle joué dans l’éclatement du Premier conflit mondial. De l’express « Atlantique – Léman » au raccordement Cornavin – Eaux-Vives Dans cette Europe où les nations se font peur et ont peur, les alliances se cristallisent et les arsenaux se remplissent, Genève rêve encore de grands voyages autour du monde. En début d’année, la discussion qui agite la bonne société du bout du lac tourne autour d’un train de luxe, cet express « Atlantique– Léman » maintes fois évoqué, qui partirait de Saint-Nazaire à destination de Genève. Ne reste qu’à construire la ligne de la Faucille et à raccorder les deux gares de Cornavin et des Eaux-Vives afin de porter ce grand train jusque sur les rives de l’Adriatique en empruntant la rive sud du lac puis le tunnel du Simplon inauguré cinq ans auparavant. Dans les salons cossus des financiers genevois on parle avec délectation de ce fameux canal de Panama, promis à une ouverture prochaine – il le sera en 1914 – et qui dopera le commerce transatlantique. Et, le doigt traçant un long trait continu sur la mappemonde, on ne doute pas que cette transversale Atlantique–Adriatique, ce lien

entre le canal de Panama et le canal de Suez par Genève connaîtra un succès phénoménal ! Dans le courant de l’année, la perspective de voir un jour des trains franchir la Faucille s’estompe. Afin d’amener le trafic français en direction du Simplon, on a commencé à percer le Jura à Vallorbe (Mont-d’Or) et on finit de creuser le Loetschberg dans les Alpes bernoises. Creuser une seconde ligne à travers le massif du Jura n’est, pour l’instant, plus d’actualité. Dès lors ne demeure que la volonté de raccorder les deux gares de Genève, celle de Cornavin – en passe d’être rachetée à la compagnie française du Paris-Lyon-Méditerranée (PLM) – à celle des EauxVives. La Confédération semble prête à financer une partie des travaux. Ce projet, qui paraît acquis fin 1911, connaîtra un long sommeil de près de cent ans. Il renaîtra, passé à la moulinette du temps et des nouveaux impératifs d’agglomération, non plus doté du nom mystérieux de « Raccordement », zébrant en tout sens les colonnes de la presse de 1911, mais de la barbare abréviation de CEVA. Soupçons de spéculation foncière autour de la nouvelle usine à gaz En décembre 1910, la construction d’une nouvelle usine à gaz à Châtelaine (actuel siège des SIG) est adoptée par le Conseil municipal : après l’explosion de l’usine à gaz de la Jonction en 1909, plus personne ne s’oppose à un déplacement en périphérie de cette industrie. Début février 1911 cependant, une polémique éclate, mettant aux prises les radicaux et les démocrates, des rangs desquels est issu Gampert, le conseiller administratif délégué aux Services industriels. On lui reproche le prix prohibitif d’un terrain que la ville doit acquérir afin de relier la future usine à gaz à la ligne ferroviaire. On soupçonne le possesseur du terrain, un Zurichois, d’avoir acquis ce bien immobilier dans le seul but de le revendre à la ville et d’empocher un substantiel bénéfice. Le Conseil d’État, à majorité radicale, refuse d’autoriser l’exécutif municipal à procéder à l’achat. Une commission indépendante finit cependant par donner raison au Conseil administratif. Les travaux débutent en novembre et l’usine à gaz de Châtelaine entre en fonction en janvier 1915.

1 Prohistoire est

un cabinet d’études historiques créé en 2006 par Gérard Duc et Olivier Perroux, deux historiens indépendants issus du milieu académique. Prohistoire a participé à l’élaboration d’expositions (centenaire du tunnel du Simplon ; transports dans la zone Salève), et à la rédaction d’ouvrages historiques, dont une histoire des énergies à Genève parue fin 2008. Prohistoire collabore à divers projets privés de mise en valeur du patrimoine historique industriel, commercial et familial. www.prohistoire.ch

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PRODUCTION

Chefs de chant Xavier Dami K. McKutcheon Régisseur de production Jean-Pierre Dequaire Chef de plateau Stéphane Nightingale Régisseur Jean-François Kessler Régie lumières Valérie Tacheron Réalisation des surtitres Richard Neel Régie surtitres Saskia van Beuningen

Orchestre de la Suisse Romande Premiers violons Sergey Ostrovsky (1er VS) Bogdan Zvoristeanu (1er VS) Abdel-Hamid El Shwekh (1er VSR) Sachiko Nakamura (VS) Medhat Abdel-Salam Yumiko Awano Caroline Baeriswyl Elodie Bugni Theodora Christova Cristina Draganescu Yumi Kubo Dorin Matea Florin Moldoveanu Bénédicte Moreau Muriel Noble Hisayuki Ono Hans Reichenbach Yin Shen Gaubert Marie Sirot Seconds violons Sidonie Bougamont (1er S) François Payet-Labonne (1er S) Jonas Erni (SR) Rosnei Tuon (SR) Linda Bärlund Kerry Benson Florence Berdat Gabrielle Doret Véronique Kümin Ines Ladewig Claire Marcuard Eleonora Ryndina François Siron Claire Temperville Clasen David Vallez Cristian Vasile Altos Frédéric Kirch (1er S) Elçim Özdemir (1er S) Emmanuel Morel (SR) Barry Shapiro (SR) Hannah Franke Hubert Geiser Stéphane Gonties Denis Martin Stella Rusu Tsubasa Sakaguchi Verena Schweizer Catherine Soris-Orban Yan-Wei Wang

(1er VS) 1er VIOLON SOLO

Violoncelles François Guye (1er S) Stephan Rieckhoff (1er S) Cheryl House (SR) Hilmar Schweizer (SR) Jakob Clasen Laurent Issartel Olivier Morel Caroline Siméand-Morel Silvia Tobler Son Lam Tran Willard White Contrebasses Bo Yuan (1er S) Steven Zlomke (1er S) Jonathan Haskell (SR) Alain Ruaux (SR) Mihai Faur Adrien Gaubert Daniel Gobet Gergana Kusheva Cléna Stein Flûtes Sarah Rumer (1er S) Loïc Schneider (1er S) Robert Thuillier (SR) Jane Elliott-Maillard Jerica Pavli Flûtes piccolos Jane Elliott-Maillard Jerica Pavli Hautbois Jérôme Capeille (1er S) Roland Perrenoud (1er S) Vincent Gay-Balmaz (SR) Alexandre Emard Sylvain Lombard Cors anglais Alexandre Emard Sylvain Lombard Clarinettes Dmitry Rasul-Kareyev (1er S) Michel Westphal (1er S) Benoît Willmann (SR) Camillo Battistello Guillaume Le Corre Petite clarinette Benoît Willmann Clarinette basse Camillo Battistello Guillaume Le Corre

(1er VSR) 1er VIOLON SOLO REMPLAÇANT

(VS) VIOLON SOLO (1er S) 1er SOLISTE (SR) SOLISTE REMPLAÇANT

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Bassons Céleste-Marie Roy (1er S) Afonso Venturieri (1er S) Raynal Malsan (SR) Katrin Herda Norio Kato Contrebassons Katrin Herda Norio Kato Cors Jean-Pierre Berry (1er S) Julia Heirich (1er S) Isabelle Bourgeois (SR) Brian Mihleder (SR) Pierre Briand Jacques Robellaz Klaus Uhlemann Trompettes Olivier Bombrun (1er S) Stephen Jeandheur (1er S) Gérard Metrailler (SR) Claude-Alain Barmaz Laurent Fabre Trombones ténors Matteo De Luca (1er S) Alexandre Faure (1er S) Andrea Bandini (SR) Edouard Chappot Trombone basse Laurent Fouqueray Tuba Pierre Pilloud (1er S) Timbales Yves Brustaux (1er S) Olivier Perrenoud (1er S) Percussions Christophe Delannoy (SR) Michel Maillard Michael Tschamper Harpe Notburga Puskas (1er S)

Régisseur général Guillaume Bachellier Régisseur d’orchestre Grégory Cassar Régisseur de scène Marc Sapin Garçons d’orchestre David Gonzalez y Costas Aurélien Sevin


Chœur du Grand Théâtre Sopranos Fosca Aquaro Magali Duceau Györgyi Garreau Nicola Hollyman Iana Iliev Victoria Martynenko Martina Möller Gosoge Cristiana Presutti Daniela Stoytcheva Altos Vanessa Beck Hurst Rosale Bérenger Audrey Burgener Dominique Cherpillod Lubka Favarger Varduhi Khachatryan Mi-Young Kim Tania Ristanovic Mariana Vassileva

Ténors Jaime Caicompai Yong-Ping Gao Rémi Garin Omar Garrido Lyonel Grelaz Vladimir Iliev Shanghun Lee José Pazos Terige Sirolli Georgi Sredkov Bisser Terziyski Basses Krassimir Avramov Peter BaeKeun Cho Wolfgang Barta Romaric Braun Nicolas Carré Phillip Casperd Aleksandar Chaveev Christophe Coulier Harry Draganov Seong-Ho Han Slobodan Stankovic Dimitri Tikhonov

Figuration Femmes Clara Cantos Ingrid Freitag Marie Rychner Ghislaine Stoll Jenny Stutzmann Hommes Christophe Arnould David Ayllon Christophe Balissat Alain Bonaire Aurélien Bourdet Mattia Buffon Joao Marcelo da Silva Jean-Quentin Haefliger Alexandre Juillet Viktor Kossilov Philippe Lecoq-Vallon Diego Lerma Jean Lottaz Jeremy Mayor Pedro Mendes da Costa Micha Milenkovski Mehdi Mokkedem Aurèle Nicolet Sergio Norbis Jacques Pallas Romain Paoletti Marsio Pepe Jacques Perrodeau Patrick Petit Edgar Rauber Quentin Rychner Benoît Salamin Solal Sananes del Castillo Juan Sanchez Jean-Pierre Tantucci Bruno Toffano Jonathan Truffert Enfants Amélie d’Arenberg Luna Arzoni Marion Buendia Jisoo Han Maël Nguyen Tang Elvira Queta Leshwange

Personnel supplémentaire Direction Étienne Mounir (stage) Ballet Christine Ceconnello (danseuse) Marketing et communication Alessandro Mäder, Wladislas Marian, Nadia Martins (stage) Pédagogie Nadir Laguerre (stage), Fosca Aquaro*, Marie-Camille Vaquié* Terchnique Bureau d’étude Fabrice Bondier, Benjamin Puget Technique de scène Machinerie Chann Bastard*, Fabien Campoy*, Florian Cuellar*, Thierry Ferrari*, Christian Fiechter*, Luis Enrique Pisconte Cunas*, Eddy Rummel*, Aurélien Serafini*, Carlos Villalba*, Gala Zackyr* Son et vidéo Amin Barka Electricité Clément Brat, Romain Toppano* Accessoires Frédérique Cabaille*, Vincent De Carlo*, Stéphanie Mérat*, Mélina Küpfer* Electromécanique Florence Jacob, William Bernardet (apprenti) Habillage Sébastien Bressant*, Sophie Degrond*, Suzanne Marchi* Perruques et maquillage Lina Bontorno*, Nicole Chatelain*, Ania Couderc*, Delphina De Giorgi*, Sorana Dumitru*, Nicole Hermann*, Fabienne Meier*, Cristina Simoes*, Nathalie Tanner*, Mia Vranes* Ateliers décors Menuiserie Grégory Didriche Tapisserie-décoration Samy Beressa Ateliers costumes Atelier de couture Dominique Chauvin,Valentine Savary, Vérena Gimmel, Muhammed Ramadhan Atelier cuir Clara Matthaüs Billetterie Olivia Grenon, Luca de Matteis (apprenti), Ressources Humaines Priscilla Richon-Carinci, Vincenzo Murgo (stage) * Personnel supplémentaire pour cette production

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BIOGRAPHIES

Niksa Bareza

Otto Schenk

Niksa Bareza est né à Split. Il étudie la composition et la direction d’orchestre au conservatoire de musique de Zagreb auprès de Milan Sachs et Lovro von Matacic. Il se perfectionne par la suite au festival de Salzbourg, avec Hermann Scherchen et Herbert von Karajan, notamment. Niksa Bareza est appelé à travailler sur nombre d'œuvres de compositeurs contemporains dont Orff, Messiaen, Dallapiccola, Malipiero, Petrassi, Chostakovitch, Nono et Britten. De 1972 à 1975, il dirige plusieurs opéras au Théâtre Kirov de Leningrad, puis de 1978 à 1981 à l’Opernhaus de Zurich et de 1981 à 1990, l’Orchestre philharmonique de Graz. Parmi les succès de ces dernières saisons, citons des œuvres de Wagner et de Strauss à Chemnitz, Salome avec Inga Nielsen et Anja Silja et Un ballo in maschera avec Michèle Crider au Staatsoper de Hambourg. Il est aussi l’invité du Norske Opera d’Oslo, Teatro Comunale de Florence, Teatro Regio de Parme, Bayerische Staatsoper de Munich, Deutsche Staatsoper de Berlin et Teatro alla Scala de Milan, où il dirige Götterdämmerung, Fidelio, Tosca, Manon Lescaut, Il Trovatore et Andrea Chénier. De 2001 à 2007, il est directeur musical de l’Orchestre philharmonique et de l’opéra de Chemnitz. Durant sa dernière saison, il y a dirigé Carmen, Iris de Mascagni, Ariadne auf Naxos, Idomeneo et Lohengrin. Il dirige, entre autres, Madama Butterfly, Tosca et La Bohème à La Scala, Il Trittico au Deutsche Oper de Berlin et Tosca au Bayerische Staatsoper de Munich. Il travaille aussi avec les orchestres philharmoniques de Rotterdam, du Mozarteum de Salzbourg, symphoniques Toscanini et de la radio croate de Zagreb. En 2010, il est invité pour Fidelio lors de la réouverture du Palacio de Bellas Artes à Mexico, puis y est nommé chef principal et y dirige, en 2011-2012, Tosca et Cavalleria rusticana. En 2010, il dirige La Bohème au Capitole de Toulouse. En 2011-2012, il est aussi à la tête de l’Orchestre symphonique de Taipei pour Aida. Débuts au Grand Théâtre de Genève.

Acteur, metteur en scène, professeur, Otto Schenk étudie le droit à l’université de Vienne, puis suit des cours d’art dramatique au Max Reinhardt Seminar. Il commence sa carrière a u Th e a t e r J o s e f s t a d t et au Wiener Volkstheater. Dès 1953, il crée ses propres mises en scènes ; parmi ses premières créations figurent Umsonst de Johann Nestroy (1955), Kennen Sie die Milchstrasse de Karl Wittlinger (1958) et O Wildnis d’Eugene O’Neill (1960). Au Münchner Kammerspiele, il met en scène Kasimir und Karoline (1964 et 1969) et Geschichten aus dem Wiener Wald d’Ödön von Horváth (1966) et au Deutsches Schauspielhaus de Hambourg, Viel Lärm um nichts (1975). Il est aussi invité comme metteur en scène et acteur au festival de Salzbourg pour Was ihr wolt, Wie es euch gefällt, Der Talisman et Der Zerrissene de Johann Nestroy. Parmi ses nombreux rôles : Vladimir dans Warten auf Godot, Thisbe dans Ein Sommernachtstraum (Salzbourg, 1966). Sa première mise en scène d’opéra remonte à 1957 avec Die Zauberflöte au Landestheater de Salzbourg. Parmi ses succès dans ce domaine figurent, au Wiener Staatsoper, Lulu en 1962, Tannhäuser en 1982 et 1988, Manon Lescault en 1986, Die Zauberflöte en 1988; au Nationaltheater München Der Rosenkavalier en 1972, Die Fledermaus en 1975, Rusalka en 1981, Les Contes d’Hoffmann en 1986 ; au Hamburger Oper Ariadne auf Naxos en 1979, Arabella en 1983 et Faust en 1885. Citons encore : Wozzeck à Berlin en 1976, Baal de Friedrich Cerha au festival de Salzbourg en 1981. Il est aussi fréquemment invité au Metropolitan, notamment pour Fidelio (1970), Die Fledermaus (1984), Tannhäuser (1978) et Der Ring des Nibelungen (1986-1987). De 1990 à 2009, il joue 470 fois dans Othello darf nicht platzen, ainsi que dans Alltagsgeschichten, Halpern & Johnson et Der Talisman. De 1986 à 1997, Otto Schenk dirige le Josefstädter Theater, où il mettra en scène bien sûr nombre de pièces.

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Débuts au Grand Théâtre de Genève.

© MORITZ SCHEL

Mise en scène © DR

Direction musicale


Jürgen Rose

Martina Weber

Natif de Bernburg, Jürgen Rose étudie à l’Akademie der Bildenden Künste de Berlin. À seulement 22 ans, il est engagé en tant qu’acteur et décorateur au Städtische Bühnen d’Ulm. De 1961 à 2001, il crée les décors et costumes du Kammerspiele de Munich. Sa collaboration avec John Cranko commence en 1962, lorsqu’il crée les décors et costumes de Roméo et Juliette pour le Ballet de Stuttgart, suivront, entre autres, Le Lac des cygnes, Onéguine, L’Oiseau de feu, Poème de l’extase et Traces (repris par de nombreux ballets prestigieux). Dès 1972, il travaille aussi avec John Neumeier et le Ballet de Hambourg, notamment pour Peer Gynt et Cinderella (aussi repris par de nombreuses compagnies de ballet). Dès 1970, il est invité par les opéras de Vienne, Hambourg, Stuttgart, Berlin, Londres, Paris, Milan et New York, ainsi que par les festivals de Bayreuth et de Salzbourg. Parmi ses réalisations notoires figurent Salome au Staatsoper de Vienne et à La Scala de Milan, Der Rosenkavalier au Staatsoper de Munich et à La Scala, Così fan tutte au Staatsoper de Vienne et au Deutsche Oper de Berlin et Don Giovanni au Staatsoper de Munich et au Deutsche Oper de Berlin. Il convient aussi de citer Parsifal et Die Entführung aus dem Serail au Staatsoper de Vienne, Arabella, Eugène Onéguine, Das Rheingold, Die Walküre au Staatsoper de Hambourg, Un ballo in maschera au Royal Opera House de Londres, Tannhäuser au Festival de Bayreuth, ainsi que Wozzeck et Ariadne auf Naxos au festival de Salzbourg. De 1973 à 2000, il est nommé professeur honoraire à l’Akademie der Bildenden Künste de Stuttgart. Il travaille régulièrement au Staatsoper, Staatsballett et Staatsschauspiel de Munich. Durant la saison 2011-2012 du Staatsoper de Munich, il signe, entre autres, les décors et costumes de Die Zauberflöte, Così fan tutte, Don Carlos et Le Nozze di Figaro. Au Grand Théâtre de Genève : Concerto de Kenneth McMillan avec l’American Ballet Theater (décors) 69-70, Roméo et Juliette de John Cranko (décors) 74-75.

Née en Bavière, Martina Weber étudie la littérature, le théâtre et l’histoire à Munich. Parallèlement, elle assiste August Everding et Franz Winter et fait ainsi ses premières expériences dans le domaine de l’opéra. Encore étudiante, elle est engagée comme assistante à la régie au Bayerische Staatsoper. Elle travaille au Nationaltheater de Munich sous la direction de Peter Jonas jusqu’en 2008, avec des metteurs en scène comme Andreas Homoki, David Pountney, Christof Loy et David Alden. Andreas Homoki lui demande de l’assister sur I Pagliacci / Von heute auf morgen au Teatro La Fenice. Elle suit aussi des cours de gestion culturelle à Dresde et travaille dans ce domaine pour Kunst aus der Zeit au festival de Bregenz ainsi qu’à l’Europäische Kirchenmusikfestival Schwäbisch Gmünd.

© DR

Assistante à la mise en scène © DR

Décors & costumes

Débuts au Grand Théâtre de Genève.

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BIOGRAPHIES

Michel Bauer

Soile Isokoski

Né à Munich, il est engagé en 1980 au Bayerische Staatsoper, puis, dès 1987, par diverses maisons d’opéra en Allemagne et à l’étranger. Depuis 1998, il est à la tête du service lumières du Bayerische Staatsoper de Munich. Il crée notamment les lumières de Tosca, Don Carlo, Die Fledermaus, Der fliegende Holländer, L’Elisir d’amore, Luisa Miller, Medea in Corinto, Mitridate, rè di Ponto, Der Freischütz, Der Ring des Nibelungen, Der fliegende Holländer, Werther, Jenůfa, Palestrina et Saint François d’Assise.

Née en Finlande, Soile Isokoski étudie au conservatoire Sibelius d’Helsinki. Sa carrière débute à l’opéra de Finlande dans le rôle de Mimì. Elle est ensuite invitée sur toutes les majeures scènes lyriques. Ces dernières saisons, on a pu l’entendre dans Ariadne auf Naxos (rôle-titre) à MonteCarlo, Capriccio (La Comtesse) à Dresde, Così fan tutte (Fiordiligi) à Bilbao, Londres et Vienne, Don Giovanni (Donna Elvira) à Tanglewood, Vienne, Los Angeles, Chicago et New York, Falstaff (Alice Ford) à Toulouse, Faust de Gounod (Marguerite) à Savonlinna, au Met, à Vienne et à Helsinki, Le Nozze di Figaro (Contessa Almaviva) au Met, à Tokyo, Vienne et Londres, La Juive (Rachel) au Met et Vienne, Dialogues des Carmélites (Madame Lidoine) à Munich, Lohengrin (Elsa) à Dresde, Vienne et Los Angeles, Otello (Desdemona) à Paris, Berlin et Vienne, Peter Grimes (Ellen Orford) à Dresde, Der Rosenkavalier (La Maréchale) à Dresde, Helsinki, Cologne, San Francisco, à Covent Garden et à Vienne, Turandot (Liù) à Helsinki et Vienne, La Fiancée vendue (Marenka) à Covent Garden, Eugène Onéguine (Tatiana) à Helsinki, Die Zauberflöte (Pamina) à Helsinki, Londres, Milan et Orange et Der Freischütz (Agathe) à Barcelone. Elle donne de nombreux récitals avec sa pianiste accompagnatrice Marita Viitasalo. Ses enregistrements comprennent : les Vier letzte Lieder de Strauss avec Marek Janowski et deux CD consacrés à Sibelius, sous la direction de Leif Segerstam, Luonnotar et Kullervo avec Tommi Hakala. Parmi ses projets : Der Rosenkavalier à Dresde, Otello à Vienne, Ariadne auf Naxos à Glyndebourne et Vienne. Elle reçoit en 2002 la médaille Pro-Finlandia, et en 2007 la médaille Sibelius; elle est aussi honorée en 2008 du titre autrichien de Kammersängerin. En 2011, elle est nommée docteur honoris causa de l’université d’Helsinki.

Débuts au Grand Théâtre de Genève.

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Au Grand Théâtre de Genève : récital 03-04, Lohengrin (Elsa von Brabant) 07-08.

© DR

La Maréchale • Soprano © DR

Lumières


Alice Coote

Kerstin Avemo

Alice Coote suit les classes de la Guildhall School of Music and Drama de Londres, du Royal Northern College of Music et du National Opera Studio, études durant lesquelles elle reçoit le prix Decca Kathleen Ferrier et Brigitte Fassbaender (lied). Ses rôles de prédilection comprennent : Deianeira, le Prince charmant, Poppea, Carmen, Charlotte, Dorabella, Lucretia, Marguerite, Penelope, Octavian, Le Compositeur, Orfeo, Idamante, Nerone, Hänsel, Sesto, Maffio Orsini, Ruggiero et Ariodante ; rôles qu’elle chante à Opera North, au Welsh National Opera, Scottish Opera, English National Opera, Glyndebourne et Royal Opera House, ainsi qu’à l’Opéra national de Paris, au Théâtre des Champs-Élysées, au Met et sur les scènes lyriques d’Amsterdam, Munich, Francfort, Salzbourg, Chicago, Seattle et San Francisco. Plus récemment, elle interprète le Prince charmant au Royal Opera House de Londres, le Compositeur au Staatsoper de Munich et au Chicago Opera et Hänsel au Metropolitan de New York. Avec Julius Drake, elle se produit en récital au Wigmore Hall, Concertgebouw, Lincoln Center et Carnegie Hall. Aux BBC Proms, elle interprète The Voice of Desire de Judith Weir. Elle se produit en concert avec des orchestres comme le London et Boston Symphony, New York Philharmonic, Concert d’Astrée, Halle et Concertgebouw et collabore avec des chefs tels que Valery Gergiev, Christoph von Dohnanyi, Jiří Bělohlávek, Marc Elder et Pierre Boulez. Ses enregistrements comprennent : The Power of Love (mélodies anglaises), Robert Schumann et Gustav Mahler, Messiah, The Dream of Gerontius, Ariadne auf Naxos, Orfeo, The Choice of Hercules et la Rhapsodie pour alto de Brahms. Parmi ses projets : Das Lied von der Erde avec le Nederlands Philharmonisch et les Rückert Lieder avec le BBC Symphony Orchestra, La Favorite (rôle-titre) au Théâtre des Champs-Elysées et Giulio Cesare (Sesto) au Met.

Kerstin Avemo étudie au collège universitaire de l’opéra de Stockholm. Après sa Lulu à l’opéra de Göteborg en 2002, elle est invitée sur toutes les principales scènes lyriques européennes. En 2007, elle interprète le rôle de Wendla Bergmann dans la première mondiale de Benoît Mernier Frühlings Erwachen à La Monnaie. Elle incarne aussi, notamment, Blondchen (Die Entführung aus dem Serail), Servilia (La Clemenza di Tito), La Musique et Eurydice (L’Orfeo de Monteverdi), Ophélie (Hamlet) et Kristin (Julie de Boesmans) sur les scènes des opéras de Francfort, Zurich, Copenhague, du Deutsche Oper am Rhein à Dusseldorf-Duisbourg, de La Monnaie à Bruxelles, des Wiener Festwochen et du Festival d’Aix-en-Provence. Son répertoire comprend aussi Violetta (La Traviata), Gretel (Hänsel und Gretel) et Juliette (Roméo et Juliette). Durant la saison 20072008, elle retourne au Deutsche Oper am Rhein pour Cinna (Lucio Silla), Olympia (Les Contes d’Hoffmann) et Oscar (Un ballo in maschera). Ses engagements récents comprennent: Wendla Bergmann de Frühlings Erwarten à Strasbourg, Giunia de Lucio Silla à Dusseldorf, Gilda de Rigoletto à Weimar, Adele de Die Fledermaus à l’opéra royal de Suède et Zerlina de Don Giovanni à Aix-en-Provence. Durant la saison 2010-2011, elle chante Iris (Semele) sous la direction de William Christie au Theater an der Wien, Gilda à Stockholm, Zerlina au Bolchoï et Lucia di Lammermoor à Göteborg. En concert, elle chante Les Illuminations, les Passions de Bach, Ein deutsches Requiem, les Carmina burana, La Resurrezione et Messiah, la 2e Symphonie de Mahler, la Messe en do mineur de Mozart, des airs de Weill et de Poulenc et, récemment, Mater gloriosa dans la 8e Symphonie de Mahler. Ses enregistrements CD, Cypres (Julie de Boesmans), Amor (Orfeo ed Euridice) et Messiah dirigé par René Jacobs et en DVD, la production Die Entführung aus dem Serail par Christof Loy à l’opéra de Francfort.

Débuts au Grand Théâtre de Genève.

© PETER KNUTSON

Sophie • Soprano © DR

Octavian • Mezzo-soprano

Débuts au Grand Théâtre de Genève.

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BIOGRAPHIES

Alfred Reiter

Lionel Lhote

Alfred Reiter est né à Augsbourg. Après des études de musique sacrée, il suit les cours de chant de la Staatliche Hochschule für Musik de Munich. En 1995, il remporte le 1er prix du concours Richard Strauss à Munich. Après ses études, il passe cinq ans à l’opéra de Wiesbaden et de Nuremberg. Le festival de Bayreuth l’invite à chanter Titurel dans Parsifal. Il fait ses débuts en 2001 au Covent Garden avec le même rôle. Il est aussi engagé pour Seneca à Stuttgart, Fafner (Das Rheingold) au Staatsoper de Vienne, aux festivals d’Aix-en-Provence, de Pâques de Salzbourg, de Lucerne, Fafner (Siegfried) à Cleveland, Sarastro à l’Opéra national de Paris, à Lisbonne (avec la production du Festival d’Aixen-Provence), à Berlin, Vienne, Munich, Bologne, Tokyo, à Covent Garden, aux festivals de Salzbourg, Glyndebourne, San Lorenzo de El Escorial et au Hollywood Bowl (Los Angeles). En 2002, il fait ses débuts en Timur (Turandot) à San Francisco. En 2003, il est salué en Gurnemanz (Parsifal) à Cardiff, puis en 2006 à Leipzig. En 2004, il chante pour la première fois Hunding (Die Walküre) à Bruxelles, Londres et Budapest et reprend le rôle à Paris et Valence, il est ensuite Rocco à Bologne et Rome. Il incarne le Roi Marke (Tristan & Isolde) en 2006 à Cardiff et en 2009 à Cologne. Il interprète aussi Daland à Bruxelles, Rocco à Madrid, Tommaso (Tiefland) à Barcelone. À l’opéra de Francfort, il incarne Sarastro, Rocco, Gurnemanz, le Roi Marke, le Comte Waldner (Arabellla), Pape Pius / Cardinal Madruscht (Palestrina), Fasolt (Der Ring) et Kalervo (Kullervo de Sallinen). Il se produit aussi régulièrement en concert. À Francfort, il chante Sarastro, Fasolt, Arkel (Pelléas et Mélisande) et Trulove (The Rake’s Progress). Projets : Sarastro à Berlin et Munich, Fasolt (Das Rheingold) au Grand Théâtre de Genève, Le Comte Waldner (Arabella) à Barcelone. Au Grand Théâtre de Genève : Siegfried (Fafner) 00-01, Parsifal (Gurnemanz) 03-04, Tristan & Isolde (Le Roi Marke) 04-05, Die Zauberflöte (Sarastro) 07-08.

Lionel Lhote commence ses études musicales à l’Académie de musique de la Bouverie-Frameries, il poursuit sa formation vocale au Conservatoire royal de Mons chez Marcel Vanaud et Jacques Legrand et la conclut au Conservatoire royal de Bruxelles en obtenant un Premier Prix de chant concert et un diplôme supérieur de chant opéra avec la plus haute distinction. Sa carrière débute à l’Opéra royal de Wallonie dans Les Contes d’Hoffmann et Don Carlo. Il est ensuite Germont (La Traviata) et Scarpia (Tosca) à l’opéra d’Aix-la-Chapelle. Il regagne l’Opéra royal de Wallonie où il se produit dans Andrea Chénier (Mathieu), dans La Forza del destino (Fra Melitone), ainsi que dans Così fan tutte (Don Alfonso). L’opéra des Flandres l’invite pour Ariane et Barbe Bleue (Barbe-Bleue), Il Barbiere di Siviglia (Figaro) et Don Giovanni (Leporello). À La Monnaie, il interprète A Midsummer Night’s Dream, Monsieur Choufleuri, Giulio Cesare (Curio), La Cenerentola (Dandini), Lucia di Lammermoor (Enrico) et, plus récemment, Don Quichotte (Sancho Panza), rôle qu’il interprète aussi à l’opéra de Palerme. Depuis 2002, il se produit régulièrement sur les grandes scènes lyriques de France en Germont (Traviata) et Figaro à l’opéra d’Avignon et Chorèbe (Les Troyens) à l’OnR à Strasbourg. À l’opéra de Lyon, il chante La Traviata (Germont), Werther (Albert), Così fan tutte (Don Alfonso) et Don Giovanni (Leporello). Le Festival Massenet l’invite pour Le Jongleur de Notre-Dame. Récemment, il se produit à l’opéra de Bordeaux (Sharpless de Madama Butterfly), à La Monnaie (Pandolfe de Cendrillon, à l’Opéra royal de Wallonie (Guesler de Guillaume Tell de Grétry), aux Chorégies d’Orange (Schaunard de La Bohème), à l’opéra de Nancy (Don Alfonso de Così fan tutte). À son répertoire figurent aussi Lucia di Lammermoor (Enrico), La Grande Duchesse de Gérolstein (le Général Boum), Faust (Valentin) et Die Fledermaus (Frank) et Les Pêcheurs de perles (Zurga). Projets : Rivière de Volo di notte à Francfort. Débuts au Grand Théâtre de Genève.

Le Baron Ochs • Basse

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© DR

© DR

Monsieur de Faninal • Baryton


Margaret Chalker

Paul Kaufmann

Originaire de Waterloo (États-Unis), elle est diplômée de l’université de Syracuse (New York). Actuellement citoyenne suisse, elle fait partie de l’ensemble de l’opéra de Zurich depuis 1987. On a pu l’apprécier dans de nombreux rôles : Pamina (Die Zauberflöte), Micaëla (Carmen), Nedda (I Pagliacci), Elvira (Don Giovanni), Marta (Tiefland), Elisabetta (Don Carlo), Iseut (Le Vin herbé). De Richard Strauss, compositeur qu’elle affectionne particulièrement, elle interprète Sophie et la Maréchale (Rosenkavalier), Naïade, Echo et Ariane (Ariadne auf Naxos) ainsi que la Cinquième Servante et la Surveillante (Elektra). Ses différents rôles l’ont amenée à collaborer avec des chefs comme Christoph von Dohnányi,Vladimir Fedoseyev, Nikolaus Harnoncourt, Jiří Kout, Fabio Luisi, Zoltan Pesko, Wolfgang Sawallisch, Christian Thielemann, Marcello Viotti, Ralf Weikert ainsi que de nombreux metteurs en scène tels que Grisha Asagaroff, John Dew, Brigitte Fassbänder, Martin Kusej, Maurice Lehmann, Nikolaus Lehnhoff, Cesare Lievi, Christof Loy, Marco Arturo Marelli, Jean-Pierre Ponnelle et Robert Wilson. Plus récemment, elle est Freia (Das Rheingold) dans une mise en scène de Robert Wilson, Nella (Gianni Schicchi) et Gertrud (Hänsel und Gretel) à l’opéra de Zurich. Elle se produit aussi en concert, entre autres dans Pierrot Lunaire de Schoenberg, Concerto per la notte di Natale dell’anno 1956 de Dallapiccola, mais aussi dans les Vier letzte Lieder de Strauss et la Missa Solemnis de Beethoven (Tonhalle de Zurich).

Paul Kaufmann est né à Halle. Après des études musicales dans sa ville natale, il est engagé, de 1999 à 2004, en tant que compositeur au Theater Apron, tout en poursuivant des études de chant auprès de Roland Schubert à la Hochschule für Musik de Leipzig. Il reçoit une bourse de deux ans de la Franz-Josef-Weiswieler Stiftung puis est engagé dans la troupe du Deutsche Oper Berlin. Il y interprète des rôles comme Don Basilio (Le Nozze di Figaro), Monostatos et le 2 e Prêtre (Die Zauberflöte), Nando (Tiefland), Le Timonier (Der fliegende Holländer), Brighella (Ariadne auf Naxos), Remendado (Carmen), le 2e Juif (Salome), Le Bossu (Die Frau ohne Schatten), Un aubergiste (Der Rosenkavalier), David (Die Meistersinger) et Heinrich le Scribe (Tannhäuser). Paul Kaufmann est aussi engagé au Komische Oper de Berlin (2e Prêtre de Die Zauberflöte), aux opéras de Dresde, Leipzig, de Toulouse (Euryanthe et Elektra) et à la fondation Gulbenkian de Lisbonne (Scaramouche d’Ariadne auf Naxos). Il se produit dans la série « Paradisi Gloria » du Bayerische Rundfunk en octobre 2010. Parmi ses projets : Lohengrin (Un noble de Brabant) au Deutsche Oper de Berlin et Tannhäuser (Heinrich le Scribe) au Capitole de Toulouse.

Au Grand Théâtre de Genève : E l e k t r a (La Surveillante) 10-11.

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Valzacchi • Ténor © DR

Marianne • Soprano

Débuts au Grand Théâtre de Genève.

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BIOGRAPHIES

Doris Lamprecht

Alexey Kudrya

Née en Autriche, Doris Lamprecht étudie au Conservatoire national supérieur de musique de Paris dans la classe de Jane Berbié avant d’entrer à l’Ecole d’Art Lyrique de l’Opéra de Paris. Son vaste répertoire s’étend de Monteverdi, Bach, Haendel (Scipione à Beaune) et Rameau (Platée à l’Opéra de Paris) aux compositeurs contemporains (créations du Maître et Marguerite de York Höller au Palais Garnier, Lettres de Westerbork d’Olivier Greif, La Frontière de Philippe Manoury). À l’opéra, elle interprète aussi bien Verdi (Rigoletto à Strasbourg, La Traviata à Orange), qu’Offenbach (Les Brigands à l’Opéra Bastille, La Belle Hélène à Zurich sous la direction de Nikolaus Harnoncourt, La Périchole à Marseille, La Vie parisienne à Tours), Mozart (Die Zauberflöte à Aix-en-Provence, Lyon et Orange), Berg (Lulu à à Metz) ou encore Humperdinck (Hänsel und Gretel à l’Opéra des Flandres). On a pu l’entendre dans Faust (Dame Marthe) à l’opéra de Lille, Pollicino de Hans Werner Henze, Arabella et Cyrano (La Duègne) au Théâtre du Châtelet, Elektra, Platée et Die tote Stadt (Brigitta) à l’Opéra national de Paris, Eugène Onéguine (Madame Larina) à l’Opéra national du Rhin et en Avignon, la reprise du Marteau sans Maître de Boulez à l’opéra d’Arras, Véronique sous la direction de J.C. Spinosi au Théâtre du Châtelet, Zampa (Rita) de Herold et Les Boulingrin (création de G. Aperghis) à l’Opéra Comique, Fra Diavolo d’Auber (Lady Pamela) à l’Opéra Comique et à l’Opéra royal de Wallonie, Hamlet à Saint-Etienne, Le Nozze di Figaro à Tours et Reims, Roméo et Juliette à Amsterdam. Parmi ses projets figurent : La Fille du régiment à l’Opéra de Paris, Cendrillon au Liceu de Barcelone, Roméo et Juliette à Massy et Tours, Otello à Marseille, Marouf à l’Opéra Comique. Elle chantera aussi sa première Madame de Croissy dans Dialogues des Carmélites à l’opéra de Nantes. Au Grand Théâtre de Genève : Juliette ou La Clé des songes (La Marchande de poisson / La Petite Vieille) 11-12.

Né à Moscou, il étudie le chant et la flûte à l’Académie Gnessine et termine des études de direction d’orchestre. À Moscou, il chante des rôles tels que Nemorino (L’Elisir d’amore), Lenski (Eugène Onéguine), Alfredo (La Traviata) et Ferrando (Così fan tutte). En 06-07, il est Nemorino (L’Elisir d’amore) à Klagenfurt et Lord Arturo (Lucia di Lammermoor) à Bonn. En 07-08, il chante un concert Rossini au Festival de St Pölten et participe à une nouvelle production de Der geduldige Sokrates de Telemann sous la direction de René Jacobs à Innsbruck, Hambourg, Berlin et Paris, il est également Lenski à Lübeck et le Comte Almaviva (Il Barbiere di Siviglia) en Avignon. Il se produit en concert à Munich, Leipzig, Halle, Berlin et Hambourg. En 08-09, il chante Libenskof (Il Viaggio a Reims) à Pesaro, Avignon, Montpellier et Metz, Nemorino (L’Elisir d’amore) à Berne et Mannheim, Ferrando (Così fan tutte) à Anvers et Munich et donne un concert de bel canto avec l’Orchestre philharmonique du Wurtemberg. En 09-10, il se produit à Nancy, St-Étienne, Marseille, Toulouse, Nice, Montpellier et Bordeaux dans Il Viaggio a Reims, Palma de Majorque dans Il Barbiere di Siviglia, à Reims dans Cenerentola, Bari dans L’Elisir d’amore, St Margarethen dans Die Zauberflöte, à La Corogne dans Don Giovanni et Cologne dans Don Pasquale. En 11-12, il est invité au Metropolitan pour Il Barbiere, au Staatsoper de Munich pour Così fan tutte et Mitridate, au Vlaamse Opera pour Il Viaggio a Reims et Il Duca d’Alba (Henri de Bruges). Parmi ses projets : La Cenerentola à Munich, Il Barbiere di Siviglia à Vienne et en Avignon, La Clemenza di Tito à Marseille, Rigoletto à Strasbourg et Bruxelles, Così fan tutte à Tokyo et Die Zauberflöte à Aix-enProvence. Alexey Kudrya a remporté de nombreux prix : le concours « Neue Stimmen » en Allemagne, le 1er prix du concours « Iris Adami Corradetti », le 2e prix du concours Galina Vishnevskaya à Moscou, et le 1er prix du concours « Operalia » en 2009. Au Grand Théâtre de Genève : I Puritani (Lord Arturo Talbot) 10-11.

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Un chanteur italien • Ténor © DR

Annina • Mezzo-soprano


BIOGRAPHIES

Michail Milanov

Bisser Terziyski

Originaire de Bulgarie, il effectue des études de chant à la Haute école de musique de Sofia. Il remporte le premier prix du concours international Puccini à Trévise. Depuis, il incarne des rôles tels que Rocco (Fidelio), Osmin (Die Entführung aus dem Serail), Sarastro (Die Zauberflöte), Basilio (Il Barbiere di Siviglia), le rôle-titre de Boris Godounov, Khovansky et Dosifei (La Khovanstchina), Colline (La Bohème) et Timur (Turandot). Ses prises de rôles l’amènent sur les scènes lyriques de Leipzig, Brême, Bonn, Wuppertal, Munich, Kiel, Essen, Dortmund, Dusseldorf, Stuttgart, Vérone ainsi qu’aux Etats-Unis et en Angleterre. Il interprète aussi les rôles de Ramphis (Aida), Philippe II (Don Carlos), Guardano (La Forza del destino), le Comte Walter (Luisa Miller), Banquo (Macbeth), Zacharias (Nabucco), Fiesco (Simone Boccanegra), Keçal (La Fiancée vendue), Grémine (Eugène Onéguine) mais aussi le rôle-titre de Mefistofele de Boito, Falstaff (Die lustige Weiber von Windsor), Dikoï (Kátia Kabanová), Vodnik (Rusalka) ou encore L’Ermite (Der Freischütz), Daland (Der fliegende Holländer), le Roi Marke (Tristan und Isolde), Fafner / Hunding et Hagen (Der Ring des Nibelungen) et le rôle-titre de Don Quichotte de Massenet.

Né à Varna en Bulgarie, il étudie le chant à l’Académie nationale de musique de Sofia puis débute au Théâtre national de Burgas dans le rôle du Duc de Mantoue (Rigoletto). En 1993, il entre à l’Opéra Studio de Bâle et au Conservatoire de Genève. De 1993 à 1996, il chante Alfredo (La Traviata), Lenski (Eugène Onéguine), Percy (Anna Bolena) et Rodolfo (La Bohème) en Bulgarie, Suisse, France, Allemagne, Japon et Pays-Bas. Il participe aussi à de nombreux concerts et récitals. Avec le Motet de Genève, il interprète Les Sept jours de la Passion d’Alexandre Gretchaninov et Les Vêpres de Rachmaninov en 2001.

Au Grand Théâtre de Genève : L’Amour des trois oranges (Tchélio) 10-11, Richard III (2e Assassin / Le Maire ) 11-12.

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Le Majordome de la Maréchale • Ténor © DR

Le Commissaire de police • Basse

Au Grand Théâtre de Genève : Noces 95-96, I Pagliacci (Un villageois) 96-97, La Fille du régiment (Un paysan) 97-98, Les Fiançailles au couvent (Pablo et 2e novice) 97-98, Der Rosenkavalier (Un laquais) 98-99, Fête de la musique 99-00, Lady Macbeth de Mzensk (3e commis) et Les Contes d’Hoffmann (Nathanaël) 01-02, Le Nozze di Figaro (Don Curzio) et La Dame de pique (Tchaplitski et Le Majordome) 02- 03, Boris Godounov (Un boyard), Katia Kabanova (Un homme), Die Vögel (Un flamant rose), Parsifal (1er Chevalier) 03-04, De la maison des morts (Le Jeune Prisonnier) et Fidelio (1er prisonnier) 04-05, La Petite Renarde rusée (Le Moustique) et Galilée (Le Philosophe) 05-06, L’Incoronazione di Poppea (2e soldat) et Lady Macbeth de Mzensk (2e commis et Le Maître d’école) 06-07, Lohengrin (Un des quatre nobles brabançons) 07-08, Les Contes d’Hoffmann (Nathanaël) 08-09, Alice in Wonderland (Un soldat) 09-10. MEMBRE DU CHŒUR DU GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE

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BIOGRAPHIES

Fabrice Farina

Wolfgang Barta

Titulaire d’une maîtrise de musicologie, il obtient, au Conservatoire national supérieur de musique de Lyon, le premier prix de chant avec la mention très bien ainsi qu’un certificat d’études générales de chant et de musique ancienne. Il chante dans le chœur Elyma dirigé par Gabriel Garrido, puis avec l’ensemble Eloquentia sous la direction de MarieClaude Vallin, et avec les solistes de Bernard Tétu à Lyon. En 2004, il interprète Don Ottavio lors du Festival des Dominicains de Guebwiller avec l’Opéra-Studio de Genève. Reçu simultanément dans les opéras-studios de Zurich, d’Anvers et du Deutsche Oper am Rhein, il choisit de s’engager dans le Junges Ensemble Rheinoper avant de rejoindre la troupe pour deux saisons. Au cours de son séjour au Deutsche Oper am Rhein, il est remarqué par Christof Loy. Il interprète Rodolfo dans Les Scènes de la vie de Bohème, le Comte Belfiore (La Finta Giardiniera), Pâris (La Belle Hélène), Andreas/Cochenille/Franz/Pitichinaccio (Les Contes d’Hoffmann), Eurimaco (Il Ritorno d’Ulisse in patria) ainsi que L’Innocent (Boris Godounov). Dans des mises en scène de Tobias Richter, il incarne Albazar dans Il Turco in Italia et le Comte Almaviva dans une adaptation du Barbiere di Siviglia pour jeune public. Il interprète Richemond (Richard III de Giorgio Battistelli) à l’Opéra national du Rhin. Il chante Danieli (Les Vêpres siciliennes) à Amsterdam.

Après ses études à la Musikhochschule de Vienne, il chante Don Alfonso (Così fan tutte) au théâtre du château de Schönbrunn, Figaro (Le Nozze di Figaro) et le Maître de musique (Ariadne auf Naxos). Puis il se produit sur différentes scènes autrichiennes, dont le Wiener Kammeroper. Il donne aussi des récitals et effectue, en 1986, une tournée au Japon. Au Wiener Konzerhaus, il interprète, sous la direction de Gianandrea Gavazzeni, Arteneo (Axur, Re d’Ormus de Salieri) en 1987, et Serse de Haendel en 1088. En janvier 1998, il tient un rôle de soliste dans Peer Gynt au Victoria Hall, sous la direction de Guillaume Tourniaire. Il tient le rôle du Majordome (Ariadne auf Naxos) à Covent Garden.

Au Grand Théâtre de Genève : L’Étoile (Tapioca), Parsifal (1er chevalier) et La Donna del lago (Serano) 09-10, Die lustige Witwe (Raoul de St Brioche), I Puritani (Sir Bruno Roberton), La Petite Zauberflöte (Tamino), Les Vêpres siciliennes (Danieli) et L’Amour des trois oranges (Le Maître des cérémonies) 10-11, Andrea Chénier (L’Abbé), La Petite Zauberflöte (Tamino), Juliette ou la Clé des songes (Le Jeune Matelot / L’Employé) 11-12. MEMBRE DE LA TROUPE DES JEUNES SOLISTES EN RÉSIDENCE

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Au Grand Théâtre de Genève : notamment : Ariane et Barbe-Bleue (3e Paysan) 89-90, Daphné ( 3e Berger) 90-91, Louise (Le 1er Philosophe) 92-93, Billy Budd (Jones) 93-94, Idomeneo (Un Troyen) et La Bohème (Un douanier) 94-95, Rigoletto (Ceprano), Venus (2e Serviteur) et Die Frau ohne Schatten (Gardien du Temple) 96-97, Madama Butterfly (Yakusidé) 97-98, Der Rosenkavalier (L’Aumonier et L’Aubergiste) 98-99, Susannah (First Man) 99-00, Die Entführung aus dem Serail (membre du quatuor) 00-01, Le Nozze di Figaro (Antonio) 02-03, Parsifal (2e Chevalier) 03-04, De la Maison des morts (Tchekounov) 04-05, Tosca (Un geôlier) et Galilée (Un moine) 05-06, Così fan tutte (Quatuor) et Lady Macbeth de Mzensk (Le Meunier) 06-07, Die Zauberflöte (L’Orateur) et Lohengrin (Un noble) 07-08, Salome (1 er Soldat) 08-09, Lulu (Le Banquier / Le Directeur de théâtre), Parsifal (2e Chevalier) et Alice in Wonderland (Juré) 09-10, Die lustige Witwe (Kromow) 10-11, Andrea Chénier (Schmidt) 11-12. MEMBRE DU CHŒUR DU GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE

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Un notaire • Basse © DR

Le Majordome de Faninal • Ténor


BIOGRAPHIES

Manfred Fink Né à Karben (près de Francfort), Manfred Fink débute sa carrière de chanteur dès l’âge de douze ans en faisant de nombreuses apparitions à la télévision, notamment aux côtés d’Annelise Rothenberger. Après des études de chant à Francfort et à Modène, il fait ses débuts à l’opéra dans le rôle de Tamino au Staatstheater de Mayence. En 1981, il entre dans la troupe du Deutsche Oper am Rhein, où il interprète notamment Alfred (Die Fledermaus), Macduff, David, Tamino, Rodolfo (La Bohème) et Werther. Il est aussi l’invité des Deutsche et Komische Oper de Berlin, Semperoper de Dresde et Staatsoper de Hambourg, ainsi que des Staatsoper de Vienne, Opernhaus de Zurich, New Israeli Opera de Tel  Aviv, Opéra national de Paris, Scala de Milan, Monnaie de Bruxelles et festival de Savonlinna. Il travaille avec des chefs tels que Colin Davies, Seiji Ozawa, Wolfgang Sawallisch, Nikolaus Harnoncourt et Alberto Erede. Durant les saisons 2010-2011 et 2011-2012, il est engagé pour Die Frau ohne Schatten, Die lustige Witwe, Salome et Lucia di Lammermoor à Dusseldorf/Duisbourg, Guerre et Paix à Cologne.

Au Grand Théâtre de Genève : Elektra (Un jeune serviteur) 10-11.

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Un aubergiste • Ténor


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INFORMATIONS PRATIQUES

Adresse postale, administration Grand Théâtre de Genève 11, boulevard du Théâtre CP 5126 CH-1211 Genève 11 T +41 22 418 30 00 F +41 22 418 30 01 grandtheatre@geneveopera.ch Renseignements du lundi au samedi de 10 h à 18 h. sur place, dans le hall par téléphone T +41 22 418 31 30 Location au guichet 5, place Neuve par courrier postal Grand Théâtre de Genève - Billetterie 11, boulevard du Théâtre CP 5126 - CH-1211 Genève 11 par téléphone T +41 22 418 31 30 du lundi au samedi de 10 h à 18 h. par fax F +41 22 418 31 31 par courriel billetterie@geneveopera.ch depuis notre site internet www.geneveopera.ch Programmes et affiches Les programmes et les affiches des spectacles passés ou en cours sont en vente à la billetterie du Grand Théâtre. Enregistrements Il est interdit de photographier, de filmer ou d’enregistrer les spectacles. Billets jeunes Les jeunes de moins de 26 ans et les étudiants bénéficient d’une réduction de 25% sur les places des spectacles dès la catégorie C.

Étudiants / Chômeurs Des places à tarif préférentiel sont proposées juste avant le début des spectacles aux étudiants et aux chômeurs dans la limite des places disponibles, sur présentation d’une pièce justificative. Titulaires du chéquier culture Réduction de Fr. 10.- par chèque (2 chèques cumulables au maximum) sur l’achat de billets de spectacle au guichet du Grand Théâtre. 20 ans / 20 francs Billets à Fr. 20.– pour les spectacles d’opéra et de danse en vente exclusivement au Grand Théâtre. Une pièce d’identité doit être présentée à l’entrée des spectacles. Publicité et soirées d’entreprises Les entreprises souhaitant organiser une soirée au Grand Théâtre peuvent prendre contact avec Johanna Lachenmann T +41 22 418 30 58 j.lachenmann@geneveopera.ch

Les personnes qui s’intéressent aux arts lyrique et chorégraphique peuvent devenir membres des associations suivantes : Association genevoise des Amis de l’Opéra et du Ballet 3, chemin de la Grand-Cour 1256 Troinex T + 41 22 784 34 37 www.amisdelopera.ch Cercle Romand Richard Wagner 14, rue de Beaumont CH-1206 Genève T +41 22 310 18 91 www.crrw.ch

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MÉCÉNAT&PARTENARIAT Le Grand Théâtre de Genève souhaite remercier et rendre hommage à ses partenaires et mécènes. Leur soutien contribue de manière essentielle au développement de ses activités et au rayonnement de l’opéra et du ballet en Suisse et à l’étranger. Fondation subventionnée par Ville de Genève Association des communes genevoises Soutiens de saison Cercle du Grand Théâtre Fondation philanthropique Edmond J. Safra CARIGEST SA comme conseiller d’un généreux mécène Partenaire des récitals Fondation Valeria Rossi di Montelera depuis 1998 Partenaires de productions Cercle du Grand Théâtre depuis 1986 Fondation Leenaards depuis 1999 Credit Suisse SA dans le cadre de 2012 Rousseau pour tous Fondation Neva depuis 2010 Vacheron Constantin M. Trifon Natsis depuis 2011 Adler Joailliers

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Partenaires de projets Office fédéral de la culture Geneva Opera Pool En partenariat avec la Ville de Genève et grâce à plusieurs partenaires, le Grand Théâtre accueille la communauté internationale en collaboration avec le Centre d’accueil – Genève internationale (CAGI) et la Fondation pour Genève, avec l’appui de la Confédération et de la République et du canton de Genève et des partenaires privés : Banque Pictet & Cie Cargill International SA Credit Suisse SA Mirelis InvesTrust SA Totsa Total Oil Trading Union Bancaire Privée SA Bory & Cie Partenaires d’échange Le Temps Espace 2 Generali Assurances Fleuriot Fleurs Perrier Jouët Exersuisse Unireso Visilab

Partenaires du programme pédagogique Fondation de bienfaisance de la Banque Pictet depuis 2008 Département de l’Instruction Publique, de la culture et du sport (République et canton de Genève)

Ayant à cœur d’établir un dialogue avec tous les acteurs de la Cité, le Grand Théâtre ouvre ses portes aux entreprises désireuses de développer des partenariats, d’associer leurs opérations de relations publiques à des projets artistiques et de parrainer des initiatives uniques répondant à leurs objectifs de responsabilité sociale.

Partenaire fondateur de la troupe des jeunes solistes en résidence Fondation BNP Paribas depuis 2009

Le service Mécénat et Partenariat est à votre écoute afin de vous conseiller

Partenaire du Ballet du Grand Théâtre JTI depuis 2011

Contact Johanna Lachenmann T + 41 22 418 30 58 F + 41 22 418 30 98 j.lachenmann@geneveopera.ch

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FONDATION DU GRAND THÉÂTRE

But La Fondation a pour but d’assurer l’exploitation du Grand Théâtre de Genève, notamment en y organisant des spectacles d’arts lyrique, chorégraphique et dramatique. C’est une fondation d’intérêt public communal subventionnée par la Ville de Genève, dont l’objet est artistique et culturel. La Fondation est composée de quatorze membres désignés par le Conseil municipal et le Conseil administratif de la Ville de Genève. Le Bureau compte cinq membres du Conseil de Fondation. Le Statut de la Fondation a fait l’objet d’une loi cantonale de 1964.

Conseil de Fondation Mme Lorella Bertani, présidente M. Guy-Olivier Segond, vice-président Mme Anne Carron-Cescato, secrétaire M. Sami Kanaan M. Rémy Pagani M. Claude Demole M. Manuel Tornare Mme Françoise de Mestral M. Philippe Juvet Mme Florence Kraft-Babel Mme Danièle Magnin M. Albert Rodrik M. Pierre Scherb M. Jean Spielmann M. Guy Demole, président d’honneur M. Jean-Flavien Lalive, président d’honneur Secrétariat Mme Francine Kolly Lainé T +41 22 418 31 71 F +41 22 418 30 01 situation au 01.01.2012

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CERCLE DU GRAND THÉÂTRE Fondé en 1986, le Cercle du Grand Théâtre s’est donné pour objectif de réunir toutes les personnes et entreprises qui tiennent à manifester leur intérêt aux arts lyrique, chorégraphique et dramatique. Son but est d’apporter son soutien financier aux activités du Grand Théâtre et ainsi, de participer à son rayonnement. Bureau (février 2012) Mme Françoise de Mestral, présidente M. David Lachat, vice-président M. Gabriel Safdié, trésorier Mme Véronique Walter, secrétaire Autres membres du Comité (février 2012) Mme Diane d’Arcis S. A. S. la Princesse Andrienne d’Arenberg M. Luc Argand M. Friedrich B. Busse Mme Muriel Chaponnière Rochat M. Gerson Waechter M. Pierre-Alain Wavre Membres Bienfaiteurs M. et Mme Luc Argand Mme René Augereau M. et Mme Guy Demole Fondation de bienfaisance de la banque Pictet Gonet & Cie, Banquiers Privés M. et Mme Pierre Keller MM. Lombard Odier Darier Hentsch et Cie M. et Mme Yves Oltramare Mrs Laurel Polleys-Camus SFG - Société Fiduciaire et de Gérance SA Union Bancaire Privée – UBP SA M. Pierre-Alain Wavre M. et Mme Gérard Wertheimer Membres individuels S.A. Prince Amyn Aga Khan Mme Diane d’Arcis LL. AA. SS. Le Prince et la Princesse Etienne d’Arenberg Mme Dominique Arpels Mme Véronique Barbey Mme Christine Batruch-Hawrylyshyn

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M. et Mme Gérard Bauer M. et Mme Pierre Benhamou M. et Mme Philippe Bertherat Mme Antoine Best Mme Saskia van Beuningen Mme Françoise Bodmer M. Jean Bonna Prof. Julien Bogousslavsky M. Alain Boucheron Comtesse Brandolini d’Adda Mme Robert Briner M. et Mme Yves Burrus M. Friedrich B. Busse Mme Caroline Caffin Mme Maria Livanos Cattaui Mme Muriel Chaponnière-Rochat Mme Anne Chevalley M. et Mme Neville Cook M. Jean-Pierre Cubizolle M. et Mme Alejandro Dahlhaus M. et Mme Claude Demole Mme Virginia Drabbe-Seemann Grace, Countess of Dudley M. et Mme Olivier Dunant Mme Denise Elfen-Laniado Mme Maria Embiricos Mme Diane Etter-Soutter Mme Catherine Fauchier-Magnan Mme Clarina Firmenich Mme Pierre Folliet Mme Pierre-Claude Fournet M. et Mme Eric Freymond Mme Elka Gouzer-Waechter Mme Bibi Gritti Mme Claudia Groothaert M. et Mme Philippe Gudin de La Sablonnière M. et Mme Philippe Jabre Mme Marie-Josèphe Jacquet M. et Mme Jean Kohler Mme Maria Pilar de La Béraudière M. et Mme Pierre de Labouchère M. David Lachat M. Marko Lacin Me Jean-Flavien Lalive d’Epinay M. Christian Langlois-Meurinne


M. et Mme Pierre Lardy Mme Michèle Laraki M. et Mme Guy Lefort Mme Eric Lescure M. et Mme Thierry de Loriol Mme Eva Lundin M. Ian Lundin M. Bernard Mach Mme France Majoie Le Lous M. et Mme Colin Maltby M. Thierry de Marignac Mme Mark Mathysen-Gerst M. Bertrand Maus Mme Anne Maus M. Olivier Maus M. et Mme Charles de Mestral M. et Mme Francis Minkoff M. Pierre G. Mirabaud M. et Mme Bernard Momméja M. et Mme Christopher Mouravieff-Apostol Mme Pierre-Yves Mourgue d’Algue M. et Mme Trifon Natsis Mme Laurence Naville M. et Mme Philippe Nordmann M. et Mme Alan Parker M. et Mme Shelby du Pasquier Mme Sibylle Pastré M. Jacques Perrot M. et Mme Gilles Petitpierre M. et Mme Charles Pictet M. et Mme Guillaume Pictet M. et Mme Ivan Pictet M. et Mme Jean-François Pissettaz Mme Françoise Propper Mme Ruth Rappaport Mme Karin Reza M. et Mme Gabriel Safdié Comte et Comtesse de Saint-Pierre M. Vincenzo Salina Amorini M. et Mme René Sanchez M. et Mme Paul Saurel M. et Mme Julien Schoenlaub Mme Noëlie Schoenlaub Baron et Baronne Seillière M. Thierry Servant

Marquis et Marquise Enrico Spinola Mme Christiane Steck Mme Isabelle Stoffels M. André-Pierre Tardy M. et Mme Riccardo Tattoni M. et Mme Kamen Troller M. Richard de Tscharner M. et Mme Gérard Turpin M. et Mme Jean-Luc Vermeulen M. et Mme Olivier Vodoz M. Gerson Waechter Mme Véronique Walter M. et Mme Lionel de Weck Mme Paul-Annik Weiller Membres institutionnels 1875 Finance SA Activgest SA Christie’s (International) SA Fondation BNP Paribas Suisse Fondation Bru Fondation de la Haute Horlogerie Givaudan SA H de P (Holding de Picciotto) SA JT International SA Lenz & Staehelin Mandarin Oriental, Genève MKB Conseil & Coaching MM. Mourgue d’Algue & Cie, Genève Notz, Stucki & Cie, SA La Réserve, Genève SGS SA Inscriptions Cercle du Grand Théâtre de Genève Mme Gwénola Trutat 11, boulevard du Théâtre • CH-1211 Genève 11 T +41 22 321 85 77 F +41 22 321 85 79 du lundi au vendredi de 8 h à 12 h cercle@geneveopera.ch

Compte bancaire N° 530 290 MM. Pictet & Cie Organe de révision Plafida SA

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LE GRAND THÉÂTRE L’ÉQUIPE DIRECTION GÉNÉRALE Directeur général Tobias Richter Assistante du directeur général Zoé Roehrich SECRÉTARIAT GÉNÉRAL Secrétaire générale Silvia Bono Adjointe Corinne Béroujon ARTISTIQUE Conseiller artistique et dramaturge Daniel Dollé Responsable planification artistique Jean-François Monnard Responsable Médias Illyria Pfyffer BALLET Directeur du Ballet Philippe Cohen Adjoint Vitorio Casarin Coordinatrice administrative Emilie Schaffter Maîtres de ballet Susanna Campo, Grant Aris Pianiste Serafima Demianova Danseuses Fernanda Barbosa, Hélène Bourbeillon, Gabriela Gomez, Virginie Nopper, Yu Otagaki, Isabelle Schramm, Sara Shigenari, Sarawanee Tanatanit, Madeline Wong, Yanni Yin, Daniela Zaghini Danseurs Joseph Aitken, Damiano Artale, Loris Bonani, Pierre-Antoine Brunet, Aurélien Dougé, Grégory Deltenre, Paul Girard, Armando Gonzalez, Clément Haenen, Vladimir Ippolitov, Nathanaël Marie TECHNIQUE DU BALLET Directeur technique du ballet Philippe Duvauchelle Régisseur lumières Alexandre Bryand Régisseur plateau Yves Fröhle Service médical Dr Jacques Menetrey HUG

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GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE • N° 14 | DER ROSENKAVALIER

Physiothérapeutes François Fiaux, Cécile Rouge Ostéopathe Bruno Soussan TROUPE DES JEUNES SOLISTES EN RÉSIDENCE Fabrice Farina, Sophie Gordeladze, Isabelle Henriquez, Khachik Matevosyan, Emilio Pons, Marc Scoffoni, Carine Séchaye, Clémence Tilquin CHŒUR Cheffe des chœurs Ching-Lien Wu Assistant/pianiste Jean-Marc Perrin Pianiste répétiteur Réginald Le Reun Régisseur et chargé de l’administration Omar Garrido Sopranos Fosca Aquaro, Rosale Bérenger, Magali Duceau, Györgyi GarreauSarlos, Nicola Hollyman, Iana Iliev, Victoria Martynenko, Martina Möller-Gosoge, Cristiana Presutti, Daniela Stoytcheva, NN Altos Vanessa Beck-Hurst, Audrey Burgener, Dominique Cherpillod, Lubka Favarger, Varduhi Khachatryan, Mi-Young Kim, Tanja Ristanovic Valkovic, Mariana Vassileva Chaveeva Ténors Jaime Caicompai, Yong-Ping Gao, Omar Garrido, Rémi Garin, Lyonel Grélaz, Vladimir Iliev, Sanghun Lee, José Pazos, Terige Sirolli, Georgi Sredkov, Bisser Terziyski Basses Krassimir Avramov, Wolfgang Barta, Romaric Braun, Nicolas Carré, Phillip Casperd, Aleksandar Chaveev, Peter BaeKeun Cho, Christophe Coulier, Harry Draganov, Seong-Ho Han, Slobodan Stankovic, Dimitri Tikhonov, NN PRODUCTION ARTISTIQUE Responsable Ivo Guerra Assistante & Respons. figuration Matilde Fassò

Resp. ressources musicales Eric Haegi Pianistes / Chefs de chant Todd Camburn, Xavier Dami, Réginald Le Reun RÉGIE DE SCÈNE Régisseure générale Chantal Graf Régisseur de scène Jean-Pierre Dequaire Assistant mise en scène Jean-François Kessler-Créteaux MARKETING ET COMMUNICATION Responsable marketing et communication Albert Garnier Responsable des éditions et de la création visuelle Aimery Chaigne Adjoint Frédéric Leyat Assist. presse & communication Isabelle Jornod Chargée du mécénat et des partenariats Johanna Lachenmann Chargée du service pédagogique Kathereen Abhervé Chargé du public jeune Christopher Park Archiviste Anne Zendali ACCUEIL ET PUBLICS Responsable de l’accueil des publics Pascal Berlie Personnel d’accueil Herminia Bernardo Pinhao, Ludmila Bédert, Sophie Berret, Philippe Boaron, Vincent Bourgain, Karla Boyle, Mickaël Cacioppo, Caroline Cariage, Michel Denis Chappellaz, Chantal Chevallier, Marie-Odile Clementz, Patricia Diaz, Valentin Herrero, Feka Iljaz, Etienne Jacquemet, Teymour Kadjar, Maëlle Kolly, Na Lin, Ada Lopez Linarez Hunziker, Nelli Kazaryan Peter, Guillaume Louis, Morgane Manni, Ivano Marchi, Jacky Merteau, Nicolas Muller, Vincenza Munoz, Flavio Perret-Gentil, Juliette Riccaboni, Kim Schmid, Chantal

Siegenthaler, Mahmoud Tamim, Kevin Udrisard, Drangan Valkovic, Pablo Venturelli, Alihuen Vera TECHNIQUE Directeur technique Jean-Yves Barralon Adjointe administrative Sabine Buchard Chargée de production technique Catherine Mouvet Ingénieur bâtiment et sécurité Pierre Frei Responsable d’entretien Thierry Grasset BUREAU D’ÉTUDE Ingénieur bureau d’études Alexandre Forissier Assistant Chistophe Poncin Dessinateurs Stéphane Abbet, Denis Chevalley, Antonio Di Stefano MANUTENTION ET TRANSPORTS Responsable a.-i. Thomas Clément SERVICE INTÉRIEUR Huissier responsable Stéphane Condolo Huissier-ère-s Jean-Pierre Barras, Valdemar De Almeida, Antonios Kardelis, Michèle Rindisbacher Coursiers Bernard Bouchet, Bernard Thierstein TECHNIQUE DE SCÈNE Adjoint au directeur technique Philippe Alvado Chefs de plateau Gabriel Lanfranchi, Stéphane Nightingale MACHINERIE Chef de service Olivier Loup Sous-chefs Pascal Chevalley, Juan Calvino, Patrick Savariau Sous-chef cintrier Patrick Werlen


Brigadiers Stéphane Desogus, Jean-Claude Durand, Henrique Fernandes Da Silva, Yannick Sicilia Sous-brigadiers Stéphane Catillaz, Manuel Gandara, Johny Perillard Machinistes cintriers Vincent Campoy, Stéphane Guillaume, Alfio Scarvaglieri, Nicolas Tagand Machinistes Gérard Berdat, Philippe Calame, Eric Clertant, Jérôme Favre, Sedrak Gyumushyan, Michel Jarrin, Daniel Jimeno, Sulay Jobe, Alain Klette, Jean-François Mauvis, Julien Pache, Hervé Pellaud, SON ET VIDÉO Chef de service Michel Boudineau Sous-chef Claudio Muller Techniciens Charles Mugel, Jean-Marc Pinget, NN ELECTRICITÉ Chef de service Simon Trottet Sous-chefs Robin Minkhorst, Marius Echenard Opérateurs de jeu Florent Farinelli, Stéphane Gomez, David Martinez, Blaise Schaffter Électricien-ne-s de plateau Serge Alérini, Dinko Baresic, Salim Boussalia, Stéphane Estève, Hélène König, Juan Vera, Patrick Villois, Camille Rocher, NN Électricien d’entretien Fabian Pracchia ACCESSOIRES Chef de service Damien Bernard Sous-chef Patrick Sengstag Accessoiristes Vincent Bezzola, Joëlle Bonzon, Françoise Chavaillaz, Cédric Pointurier Solinas, Anik Polo, Padrut Tacchella, Cécilia Viola, Pierre Wüllenweber

ELECTROMÉCANIQUE Chef de service Jean-Christophe Pégatoquet Sous-chef José-Pierre Areny Electromécaniciens David Bouvrat, Robert De Almeida, Stéphane Resplendino, Christophe Seydoux, Emmanuel Vernamonte HABILLAGE Cheffe de service Joëlle Muller Sous-cheffe Cécile Cottet-Nègre Habilleur-euse-s Caroline Bault, Raphaële Bouvier, Julie Delieutraz, Gloria del Castillo, Angélique Ducrot, France Durel, Philippe Jungo, Olga Kondrachina, Christelle Majeur, Lorena Vanzo Pallante, Léa Perarnau PERRUQUES ET MAQUILLAGE Cheffe de service Karine Cuendet Sous-cheffe Christelle Paillard Perruquier-ère-s et maquilleur-euse-s Bernd Goetze, Cécile Jouen, Muriel Pignon-Heinis ATELIERS DÉCORS Chef des ateliers décors Michel Chapatte Assistant Christophe Poncin Magasiniers Maurice Bossotto, Marcel Géroudet MENUISERIE Chef de service Stéphane Batzli Sous-chef Claude Jan-Du-Chêne Chef d’équipe Roberto Serafini Menuisiers Grégory Benjamin, Pedro Brito, Giovanni Conte, Christian Furrer, Frédéric Gisiger, NN SERRURERIE Contremaître Serge Helbling

Serruriers Patrick Barthe, Yves Dubuis, Patrice Dumonthey, Marc Falconnat PEINTURE ET DÉCORATION Chef de service Fabrice Carmona Sous-chef Christophe Ryser Peintres Gemy Aïk, Ali Bachir-Chérif, Stéphane Croisier, Bernard Riegler TAPISSERIE-DÉCORATION Chef de service Dominique Baumgartner Sous-chef Philippe Lavorel Tapissier-ères-s et décorateur-trice-s Pierre Broillet, Fanny Silva Caldari, Dominique Humair, Raphaël Loviat ATELIERS COSTUMES Cheffe des ateliers costumes Fabienne Duc Assistant-e-s Mahi Durel, Tara Matthey, Armindo Faustino-Portas ATELIER DE COUTURE Responsable de fabrication Martine Roy Costumières Marina Harrington, Gerda Salathé Tailleur-e-s Sarah Tina von Däniken, Lurdes Do Quental Couturières Sophie de Blonay, Ivanna Costa, Enrica Desideri, Marie Hirschi, Gwenaëlle Mury, Deborah Parini, Ana-Maria Rivera, Soizic Rudant, Liliane Tallent, Astrid Walter, NN ATELIER DE DÉCORATION & ACCESSOIRES COSTUMES Responsable Isabelle Pellissier-Duc Décoratrice Corinne Baudraz, Emanuela Notaro

Cordonnières Salomé Davoine, Catherine Stuppi, SERVICE FINANCIER Chef de service Jean-Luc Christen Comptables Paola Andreetta, Andreana Bolea, Chantal Chappot, Laure Masnaghetti, Sandrine Perotti BILLETTERIE Responsable billetterie et développement commercial Jean-Pascal Cottalorda Adjointe Carine Druelle Collaboratrices billetterie Fanny Claivaz, Hawa DialloSingaré, Nathalie Lecuyer INFORMATIQUE Chef de service Marco Reichardt Administrateurs informatique & télécoms Lionel Bolou, Ludovic Jacob RESTAURATION Responsable restauration, Christian Lechevrel Cuisinier Olivier Marguin Collaborateur-trice-s Norberto Cavaco, Maria Savino RESSOURCES HUMAINES Responsable des ressources humaines Marie-Laure Deluermoz Assistante NN Gestionnaires ressources humaines Valérie Aklin, Marina Bello, Luciana Hernandez

ATELIER CUIR Responsable Michel Blessemaille

Situation au 01.02.12

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PROCHAINEMENT OPÉRA

DANSE

MIGNON

Opéra-comique en trois actes et cinq tableaux d'Ambroise Thomas Au Grand Théâtre 9 | 11 | 16 | 18 mai 2012 à 20 h 13 | 20 mai 2012 à 15 h Direction musicale Frédéric Chaslin Mise en scène Jean-Louis Benoît Décors Laurent Peduzzi Costumes Thibaut Welchlin Chorégraphie Lionel Hoche Lumières Dominique Bruguière Chœur Ching-Lien Wu Avec Sophie Koch (Mignon), Andrej Dunaev (Wilhelm Meister), Diana Damrau (Philine), Nicolas Courjal (Lothario), Carine Séchaye (Frédéric), Emilio Pons (Laërte), Frédéric Goncalves (Jarno) Chœur du Grand Théâtre Orchestre de la Suisse Romande Production de l'Opéra Comique de Paris Conférence de présentation par Florent Lézat En collaboration avec l’Association genevoise des Amis de l’Opéra et du Ballet. Mardi 8 mai 2012 à 18 h 15 au Grand Théâtre

ANNA KARENINA

Ballet en deux actes d'après le roman de Tolstoï Musique de Rodion Chtchedrine Orchestre du Théâtre Mariinski Direction musicale Valery Gergiev (17/04) et Alexei Repnikov (18 | 19/04) Au Grand Théâtre 17 | 18 | 19 avril 2012 à 20 h Chorégraphie Alexei Ratmansky Décors & costumes Mikael Melbye Scénographie video Wendall Harrington Lumières Jørn Melin Ballet du Théâtre Mariinski Production du Théâtre Mariinski

RÉCITAL

WALTRAUD MEIER

Mezzo-soprano 20 juin 2012 à 20 h Piano Joseph Breinl Au Grand Théâtre

Directeur de la publication : Tobias Richter Responsable de la rédaction : Daniel Dollé Responsable de l’édition : Aimery Chaigne Coordination : Albert Garnier & Frédéric Leyat Traduction et révision : Christopher Park ont collaboré à ce programme : Isabelle Jornod, Wladislas Marian Impression : m+h genève ACHEVÉ D’IMPRIMER EN MARS 2012

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GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE • N° 14 | DER ROSENKAVALIER


Passion et partage

La Fondation BNP Paribas soutient la troupe des jeunes solistes en résidence du Grand Théâtre de Genève

La Fondation de bienfaisance de la banque Pictet est fière de soutenir le projet «Les jeunes au cœur du Grand Théâtre». En participant à ce programme de formation, nous nous engageons en faveur de la génération à venir. Nous sommes particulièrement heureux de pouvoir offrir aux talents de demain l’opportunité de découvrir les joies de l’opéra et du ballet, et peut-être même de susciter des vocations. Les associés de Pictet & Cie vous souhaitent une très belle saison 2011-2012.

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