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Passion et partage La Fondation de bienfaisance du groupe Pictet est fière de soutenir le projet «Les jeunes au cœur du Grand Théâtre». En participant à ce programme de formation, nous nous engageons en faveur de la génération à venir. Nous sommes particulièrement heureux de pouvoir offrir aux talents de demain l’opportunité de découvrir les joies de l’opéra et du ballet, et peut-être même de susciter des vocations. Les associés du groupe Pictet vous souhaitent une très belle saison 2015-2016. La Fondation BNP Paribas en Suisse encourage la création culturelle et la préservation du patrimoine des musées. Elle est le partenaire fondateur et principal de la Troupe des jeunes solistes en résidence au Grand Théâtre de Genève. Elle s’engage aussi pour la recherche dans le domaine de la santé ainsi que dans de multiples projets en faveur de l’éducation et de la solidarité.
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NOUS SOUTENONS LES JEUNES SOLISTES EN RÉSIDENCE AU GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE.
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PARTENAIRE FONDATEUR DE LA TROUPE DES JEUNES SOLISTES EN RÉSIDENCE
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FONDATION VALERIA ROSSI DI MONTELERA
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Le bombardement de l’armée américaine sur les positions des djihadistes du groupe État islamique qui assiègent les kurdes à Kobané en Syrie en octobre 2014
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LES TROYENS GRAND OPÉRA EN 5 ACTES ET 2 PARTIES
HECTOR BERLIOZ
LA PRISE DE TROIE LES TROYENS À CARTHAGE
Livret du compositeur, d’après L’Énéide de Virgile. Les Troyens à Carthage, créé en français le 4 novembre 1863 à Paris, au Théâtre Lyrique Les Troyens créé en allemand le 6 et 7 décembre 1890 à Karlsruhe, au Hoftheater La prise de Troie créé en français le 28 janvier 1891 à Nice, au Théâtre municipal. avec la participation du
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Direction musicale
Charles Dutoit Cassandre Énée Didon Chorèbe / Le Dieu Mercure Panthée Narbal Iopas L’Ombre d’Hector Ascagne Anna Hylas Priam Hélénus Hécube / Le Spectre de Cassandre Un soldat / Le spectre d’Hector Un chef grec 1ère Sentinelle 2ème Sentinelle
Michaela Martens Ian Storey Béatrice Uria-Monzon Tassis Christoyannis Brandon Cedel Günes Gürle Dominick Chenes Sami Luttinen Amelia Scicolone* Dana Beth Miller Bernard Richter Michail Milanov Jérémie Schütz Mi-Young Kim** Aleksandar Chaveev** Nicolas Carré** Rodrigo García** Phillip Casperd** * Membre de la Troupe des jeunes solistes en résidence ** Membre du Chœur du Grand Théâtre
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SOMMAIRE
Prélude Argument Synopsis
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Tragédie & Comédie. Du Théâtre grec aux Troyens de Berlioz par Petya Ivanova Lettres d’Hector Berlioz Quelque chose de grandiose et de nouveau... d’Hector Berlioz Les Troyens et la Tétralogie de Henry Barraud Ô ma noble Cassandre de Pierre de Ronsard Les aventures d’Énée... Extrait de L’Énéide de Virgile La passion de Didon Extrait de L’Énéide de Virgile Didon écrit à Énée Extrait des Héroïdes d’Ovide Cassandre, la loi et l’oracle... d’Anne Dufourmantelle Cassandre : une femme d’aujourd’hui ? de Christa Wolf
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Références Cette année-là... Genève en 1890
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Production Biographies
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Informations pratiques Billetterie du Grand Théâtre Mécénat & partenariat Fondation du Grand Théâtre Cercle du Grand Théâtre Le Grand Théâtre : l’équipe
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Prochainement
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PRÉLUDE
par Daniel Dollé
L’œuvre
En deux soirées, nous allons vivre les conséquences d’une « pomme de discorde », jetée par une divinité jalouse, au cours d’un banquet. La Guerre de Troie aura bien lieu, une reine amoureuse éconduite s’immole par le feu et une marionnette, actionnée par on ne sait quelle puissance, va fonder la ville de Rome. Deux opéras de femme qui encadrent une « offenbachiade ». La tragédie cohabite avec la comédie, l’essence même du théâtre antique, le berceau des civilisations européennes. Les Troyens, une œuvre en cinq actes, qui ne sont pas sans rappeler Richard Wagner, car comme lui, Berlioz vise le Gesamtkunstwerk et écrit le livret, essentiellement, d’après les livres II et IV de L’Énéide de Virgile. Une autre source d’inspiration pour le compositeur est Shakespeare. Hector Berlioz nous propose un antique recomposé, repensé. Il se complaît aux paradoxes et aux superpositions culturelles. Sa vison de l’Antiquité est totale, classique et barbare, et le place dans la lignée de Gluck qui aurait pu dire : « Voilà mon fils ! » Le compositeur effectue une analyse structurale des mythes virgiliens pour les mener vers la modernité. De son vivant Berlioz ne voit que Les Troyens à Carthage, créés au Théâtre Lyrique de Paris, le 4 novembre 1863, cinq ans après la composition de l’œuvre, commencée en mai 1856 et terminée en avril 1858. « Ô ma noble Cassandre, mon héroïque vierge, il faut donc me résigner, je ne t’entendrai jamais ! ». Il faut attendre les 7 et 6 décembre 1890 pour découvrir l’intégrale de l’ouvrage, à Karlsruhe, en Allemagne. Cette création, dirigée par Félix Mottl, a lieu en présence de cinq Français dont André Messager et Albéric Magnard qui signe alors trois articles dans Le Figaro. Il raconte la genèse de l’œuvre, narre La Prise de Troie, et écrit une critique : « … et nous voilà loin des fadaises qu’on rabâche dans le mausolée de M. Garnier. » L’œuvre fut représentée intégralement en France pour la première fois à Lyon en 1987 et à Paris seulement en 2003. Un comble, reflet de l’ambivalence de sa réception, qui a longtemps hésité entre un rejet ignorant et une glorification ambiguë. À sa création, en 1863, l’ouvrage connaît un succès d’estime pour le compositeur, devenu membre
de l’Institut. Au cours des représentations on entend des sifflets, des railleries et les critiques se mettent à pleuvoir. Après 22 représentations, Les Troyens disparaissent de l’affiche. Les personnages des Troyens sont des déracinés solitaires en fuite. Les dieux ont disparu, ils sont morts et Énée, le seul personnage, avec son fils Ascagne, présent dans les deux parties de l’œuvre, est la victime consentante des dieux. Il est responsable de la chute de Troie et de la disparition de Carthage. Cependant, il n’est pas le personnage principal, il doit laisser sa place à Cassandre et à Didon. Énée est un personnage antihéroïque, Cassandre et Didon sont en révolte. Les Troyens est un opéra féminin, une Frauenoper. Le crépuscule des dieux, chez Berlioz, est nettement plus affirmé que chez Wagner, quelques années plus tard. Si La Prise de Troie demeure un drame épique, Les Troyens à Carthage sont plutôt un drame passionnel. C’est à la lecture de la mort de Didon que le compositeur connaît un grand émoi poétique. La passion de Didon pour Énée lui rappelle sa propre passion pour Estelle. Didon et Cassandre sont de véritables holocaustes, elles meurent sans descendance, en laissant derrière elles un état détruit, ou menacé de destruction. La fondation de Rome exige la chute de Troie et de Carthage, les véritables protagonistes qui illustrent la naissance de civilisations fondées sur la destruction de civilisations existantes. Pendant plus de 4 heures, Hector Berlioz nous propose sa vision de la montée et du déclin des civilisations. Mais n’aurait-il pas oublié le troisième volet, la création de Rome ?
Depuis trois ans, je suis tourmenté par l’idée d’un vaste opéra dont je voudrais écrire les paroles et la musique […] Je résiste à la tentation de réaliser ce projet et j’y résisterai, je l’espère, jusqu’à la f in. Le sujet me paraît grandiose, magnif ique et profondément émouvant, ce qui prouve jusqu’à l’évidence que les Parisiens le trouveraient fade et ennuyeux. HECTOR BERLIOZ
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PRÉLUDE
L’intrigue
L’Énéide raconte l’histoire de la fondation de Rome. Berlioz a conservé l’esprit virgilien, mais il a introduit de nombreuses modifications : ainsi Cassandre devient le personnage principal des deux premiers actes, qui se déroulent à Troie. La Prise de Troie Les Grecs semblent avoir abandonné le siège de Troie et se sont retirés, ils ne laissent qu’un immense cheval de bois. Le peuple se réjouit et personne ne veut entendre les prédictions de Cassandre, pas même Chorèbe, son fiancé. Les Troyens rendent grâce aux dieux et, pour célébrer la déesse Athéna, ils traînent en procession le cheval jusqu’à son temple, lui faisant franchir les remparts de la ville, sourds aux avertissements de Cassandre. Hector apparaît à Énée : il lui apprend que l’ennemi est entré grâce au cheval de bois, et que Troie est en flammes. Il lui ordonne de s’enfuir pour aller créer un nouvel empire en Italie. Bientôt Cassandre
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annonce qu’Énée, après avoir sauvé le trésor royal, est parti fonder une nouvelle Troie, puis elle se suicide, imitée par ses compagnes. Les Troyens à Carthage Les trois actes suivants se passent à Carthage où règne Didon. La flotte conduite par Énée, prise dans la tempête, échoue sur la côte de Carthage. Didon offre l’hospitalité aux chefs troyens et tombe amoureuse d’Énée. Mais le royaume est attaqué par des troupes numides. Les Troyens se mêlent alors aux Carthaginois pour repousser les ennemis. Didon et Énée s’aiment et coulent des jours heureux. Les dieux s’impatientent : Énée doit partir pour l’Italie. Il est déchiré entre son devoir et sa passion. Au moment des préparatifs de départ, Didon intervient et supplie Énée. Mais il part accomplir son destin et la reine, folle de douleur, le maudit. Elle s’immole sur le bûcher qu’elle a fait dresser.
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PRÉLUDE
La musique
Hélas ! non, je n’ai pas résisté. Je viens d’achever le poème et la musique des Troyens, opéra en cinq actes. Que deviendra cet immense ouvrage ?… HECTOR BERLIOZ
envahies par les citations littéraires, empruntées à Goethe, Victor Hugo, Thomas Moore ou Shakespeare. D’après Théophile Gautier, qui a entendu La Damnation de Faust, « Hector Berlioz semblerait former, avec Hugo et Eugène Delacroix la trinité de l’art romantique. » Avec Berlioz l’orchestre devient le porte-parole de l’âme. Le duo d’amour dans l’acte IV, Nuit d’ivresse et d’extase inf inie, entre Didon et Énée, emprunte au dialogue de Lorenzo et Jessica du Marchand de Venise (acte V, scène 1 en aggravant le texte, et en le « virgilianisant ». Berlioz compose chaque acte dans l’ordre, sauf l’acte IV qu’il écrit entre les actes I et II. La dernière mesure est datée de 1858, avec ces mots de Virgile : « Quoi qu’il arrive, il faut surmonter chaque revers de fortune en le supportant. » Cassandre et Didon sont les héritières d’Alceste et d’Iphigénie de Gluck. Au moment où le drame wagnérien prend son essor, Berlioz fait appel aux vieilles formules : division en numéros distincts, récitatifs, airs, duos, etc., sans laisser les applaudissements assurer les transitions. Les Troyens présentent une couleur orchestrale exceptionnelle, faite d’une grande variété dans le mélange des timbres. Berlioz exige des chanteurs des modulations inhabituelles. Les successions chromatiques rendent l’intonation délicate. Cependant les voix ne sont jamais mises en péril par une orchestration trop bruyante. Il n’est pas simplement question de logique musicale, mais de sensibilité qui débouche sur une gigantesque mosaïque de notations expressives enchaînées qui génèrent une partition grandiose où triomphent l’inventivité, la créativité et le génie de l’orchestration d’Hector Berlioz. © BRIDGEMAN IMAGES
Albéric Magnard, à Karlsruhe, est convaincu de la beauté de l’œuvre, de sa vérité et de sa puissance. Il reconnaît la double influence classique et moderne illustrée par Virgile et Shakespeare. Il parle de chef-d’œuvre de l’art lyrique de notre siècle (XXème). « Peu importe les systèmes qu’inventent les hommes de génie pour se rendre maîtres de leurs fougueuses inspirations ; ni le récitatif de Gluck ou de Berlioz, ni le leitmotiv de Wagner ne sont des formules définitives : l’art n’en comporte pas. Seule est essentielle l’émotion produite, émotion pure qui délivre ce qu’il y a de désintéressé en nous, nous élève, nous anoblit : bien des pages des Troyens me l’ont fait ressentir… ». Quant à Romain Rolland, il considère l’ouvrage comme l’opéra national des Français. Dans son livret, le compositeur ose le rapprochement de Virgile et de Shakespeare qui suscite l’inspiration mélodique. Dans ses lettres, Berlioz évoque la fascination qu’exercent sur lui les deux auteurs, pourtant séparés par des siècles. Shakespeare serait l’auteur des paroles et de la musique et serait intervenu dans le chef-d’œuvre du poète romain : « Quels chanteurs ces deux ! » Berlioz constitue une preuve éclatante du romantisme en musique. Avec Gluck, le Shakespeare de la musique, s’affirme le genre instrumental expressif, illustré par Spontini, Weber et Beethoven que Berlioz revendique comme ses pères spirituels. « Oh divine musique ! s’écrit Thomas Moore, le langage impuissant et faible se retire devant la magie ! Pourquoi le sentiment parlerait-il jamais, quand tu peux seule exhaler toute son âme ? » Avec le romantisme, la musique n’est plus ornementale, elle devient un langage à part entière, plus adapté que le verbe pour exprimer le monde intérieur et le mystère. C’est l’idée qui plane sur l’ère romantique et Berlioz lui donne son accomplissement et son aura. Ce langage nouveau, conçu par la musique doit parler de l’homme et du monde. Il rivalise avec le langage verbal, mais se tourne vers les mêmes objets, cela explique l’intérêt de Berlioz pour la littérature et la place qu’elle tient dans ses œuvres. Toutes les compositions de Berlioz multiplient les interventions littéraires, elles sont
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Le siège de Troie (détail) École française, XVIIème Musée des Beaux-Arts, Blois, France Huile sur toile
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ARGUMENT *David Cairns est journaliste, écrivain est musicien britannique. Sa biographie de Berlioz parue en deux volumes : Berlioz: The Making of an Artist 1803–1832 et Berlioz: Servitude and Greatness 1832-1869 est distinguée comme un des plus beaux hommages littéraires rendus à un compositeur.
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par David Cairns*
Les deux premiers actes qui se passent à Troie suivent, d’une manière générale, la narration d’Énée (chant II). L’action des troisième, quatrième et cinquième actes se situe à Carthage, cité tyrienne fondée par Didon sur la côte nord de l’Afrique. La prise de Troie Acte I Après dix ans de siège, les Grecs ont abandonné le camp qu’ils occupaient dans la plaine de Troie. À bord de leurs navires, ils cinglent, ostensiblement vers la Grèce, en réalité vers l’île de Ténédos située non loin de leur point de départ. Ils ont laissé, derrière eux, un immense cheval de bois dont les flancs dissimulent un groupe armé. Ce cheval se détache, seul, sur la plaine déserte. Quelques Troyens flairent un piège mais la plupart croient qu’il s’agit d’une offrande à Pallas Athénée. Au début de l’opéra, les habitants de Troie, que leur soudaine délivrance a rendus fous de joie, se répandent dans la plaine, se réjouissant et dansant. Femmes et enfants examinent les restes du camp grec. Un soldat désigne la tombe d’Achille, puis tous se précipitent pour regarder le cheval de bois. Cassandre, qui les a observés, fait maintenant son apparition. Fille de Priam et prêtresse de Vesta, elle a été affligée à sa naissance d’un don de « clairvoyance » auquel personne ne croit. Aussi, les Troyens la prennent-ils pour une folle lorsqu’elle prophétise la catastrophe dont ils seront les victimes. En fait, les fous, ce sont eux. Cassandre se remémore sa vision récente: le spectre d’Hector errant sur les remparts, comme une sorte de gardien de la nuit, les yeux noirs regardant fixement au loin, vers les détroits de Sigée. Cherchant à interpréter le présage, elle distingue vaguement la ruine de la cité, voit le peuple aveugle conduit par un roi aveugle, concourant volontairement à sa propre perte. Et parmi les victimes, son fiancé Chorèbe lequel, pas plus que les autres, n’écoute ses avertissements et qu’elle n’épousera jamais. Chorèbe entre en scène, essaie de rassurer Cassandre, la prie de ne pas se cacher mais de participer aux réjouissances. Cependant, la vision se précise. De plus en plus exaltée, Cassandre
annonce en termes terribles la destruction de Troie. Au paroxysme de la frénésie, elle tombe, à demi défaillante, dans les bras de Chorèbe. Ce dernier la ranime et insiste sur le climat de paix et de sécurité qui règne alentour. Cassandre ne peut que répéter sa prophétie de mort et exhorter avec véhémence son fiancé à sauver sa vie, en quittant la ville à l’instant même. Chorèbe refuse avec une égale détermination. Après quoi, gagnée par un calme soudain, Cassandre lui demande de rester. « La mort prépare notre couche nuptiale », dit-elle. Il l’entraîne, éperdue. C’est maintenant le soir. Priam, les autres chefs troyens et les prêtres arrivent en procession tandis que l’on remercie les dieux par un hymne d’action de grâces. Des offrandes sont déposées aux pieds des autels. Danses devant le roi. Arrivée d’Andromaque, veuve d’Hector, avec son fils Astyanax. Vêtue de blanc en signe de deuil, elle s’agenouille tandis qu’Astyanax dispose quelques fleurs sur l’autel. La foule s’est écartée en murmurant des paroles de sympathie. Priam et Hécube bénissent Andromaque et son fils. Seule Cassandre, restée à l’écart, conserve son impassibilité. Elle conseille à Andromaque de garder ses larmes pour les calamités à venir. Andromaque, pleurant et tenant la main de son fils, sort en silence entre les rangs formés par la foule. Quelques instants plus tard. Énée accourt et conte la mort effroyable du prêtre Laocoon. Dans le cheval de bois, ce dernier soupçonnait un piège. Il s’est emparé d’une lance et en a transpercé le monstre dont il a demandé avec insistance la destruction par le feu. Alors, jaillissant de la mer, deux serpents se sont précipités sur lui pour le dévorer. À l’annonce de ce prodige, le peuple est pénétré d’horreur. Il réalise obscurément que le destin se déclare contre lui : « Laocoon, un prêtre, objet de la fureur des dieux ». Mais Énée interprète le signe: le sacrilège a irrité Athénée. Priam ordonne de pratiquer une brèche dans les remparts et de traîner le cheval en grande pompe jusqu’au temple de la déesse. Ignorant les cris d’avertissement de Cassandre, qu’on laisse seule et désespérée, le peuple rempli d’allégresse s’élance au dehors.
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(La nuit tombe au cours de la scène suivante. La fin se déroule dans une obscurité partiellement dissipée par les flambeaux que portent les guerriers placés à l’arrière-plan.) La procession qui ramène le cheval dans la ville se rapproche. On chante l’hymne sacré de Troie. La foule est en tête. Elle envahit la scène. Fleurs, joueurs de harpe. Soudain, la procession s’arrête. De l’intérieur du cheval, un cliquetis d’armes s’est fait entendre. Mais le peuple, aveuglé, considère ce bruit comme un heureux présage. Qu’importent les cris de Cassandre! Le défilé reprend. Cassandre l’entend qui entre dans la ville. Ainsi, le sort en est jeté. Le destin a choisi ses victimes. La sœur d’Hector mourra sous les ruines de Troie. Acte II Dans le palais d’Énée. Une chambre parcimonieusement éclairée par une lampe. À demi revêtu de son armure, Énée est étendu et dort. On entend, à distance, des bruits de combat. Effrayé, le jeune Ascagne entre, écoute, s’approche de son père mais n’ose pas le réveiller. Il retourne dans sa chambre au moment même où les bruits qui provenaient de la ville s’éteignent. Le spectre d’Hector, soudain présent, reste immobile, abaissant son regard sur Énée et soupirant profondément. Énée s’éveille en sursaut et voit l’apparition qui se dresse devant lui. Il questionne Hector et apprend que Troie est déjà la proie des flammes. L’ennemi s’est emparé des remparts. Tout ce qu’il était humainement possible de faire pour défendre la cité a été tenté. Maintenant Énée doit s’échapper. Dépositaire de la religion troyenne, il ira, en Italie, fonder un nouvel empire. La voix d’Hector s’est graduellement affaiblie. Sa silhouette, de plus en plus floue, finit par disparaître. Le prêtre Panthée, blessé à la face, arrive chancelant et portant les idoles saintes de Troie. Chorèbe, à la tête d’une troupe d’hommes en armes, apporte une nouvelle : la Citadelle résiste. Tous décident de la défendre jusqu’à la mort. À l’intérieur du palais royal, au centre de la cité en flammes. Au fond, une colonnade (avec vue, au loin, sur le mont Ida). Autel de Vesta-Cybèle devant lequel les femmes se tiennent prostrées, implorant
la protection divine. Cassandre annonce qu’Énée, qui a dégagé la garnison de la Citadelle et sauvé le trésor royal, ira fonder une nouvelle Troie en Italie. Mais Chorèbe est mort. Cassandre demande à ses compagnes si elles préfèrent s’exposer comme esclaves à la convoitise des vainqueurs ou rester fidèles à leur serment en se donnant elles-mêmes la mort. Quelques femmes effrayées à l’idée du trépas sont chassées avec dédain. Les autres prennent leur lyre et, avec une exaltation grandissante, chantent à la gloire de leur cité et de leurs vœux respectés jusqu’au bout. Un chef grec arrive en courant, l’épée à la main. Il s’arrête, stupéfait, à la vue des Troyennes. Des soldats le suivent, cherchant à piller. Cassandre les défie et se poignarde. Elle tend l’arme à sa sœur Polyxène qui fait de même. Les Grecs continuent à affluer au milieu de la fumée provoquée par l’incendie du palais. On apprend qu’Énée s’est échappé avec les objets sacrés et le trésor de Troie. Cassandre essaie d’atteindre la colonnade mais tombe et meurt. Les femmes montent sur le parapet tandis que les Grecs regardent et ne peuvent se défendre d’admirer. Avec un dernier cri « Italie », les Troyennes se jettent dans le vide. D’autres se poignardent ou s’étranglent. Le feu submerge le palais. Les Troyens à Carthage Acte III Dans le palais de Didon à Carthage. Une salle décorée pour une fête. Le peuple salue le soleil brillant avec éclat, après les tempêtes qui ont ravagé la côte. À l’entrée de la reine, on entonne l’hymne de Carthage. Didon fait le bilan des sept années qui se sont écoulées depuis le jour où, fuyant la ville de Tyr (pour échapper à son frère Pygmalion, meurtrier de son époux Sichée), elle s’en vint fonder Carthage. Elle escompte une prospérité plus grande encore, remercie le peuple pour son appui loyal et en appelle à lui pour la défendre contre les attaques de Iarbas, roi de Numidie. Il s’agit, dit-elle, de donner un nouvel exemple au monde: après avoir été grands dans la paix, devenir dans la guerre une nation de héros. Des représentants des différents corps de métiers - constructeurs,
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ARGUMENT
marins, agriculteurs défilent devant elle. Didon présente leurs chefs lesquels reçoivent des cadeaux en reconnaissance de leurs travaux. Après de nouvelles réjouissances, le peuple se disperse. Seule, avec sa sœur Anna, Didon admet que malgré toute cette allégresse, une mystérieuse tristesse s’est emparée d’elle. La reine nie aspirer à l’amour. Elle essaie de résister aux arguments que lui oppose Anna et selon lesquels, en raison de sa jeunesse et de sa beauté, pour l’avenir de Carthage, elle devrait oublier son voeu de fidélité à la mémoire de son époux et se remarier. Pourtant, au fond d’elle même, Didon reconnaît que ce conseil la séduit. Les paroles d’Anna font naître en son cœur un dangereux enchantement. Elle prie l’ombre de Sichée de lui pardonner et se raidit contre la tentation. Le barde Iopas annonce l’arrivée d’une flotte inconnue que la tempête a jetée à la côte. Didon n’a pas oublié ses pérégrinations mouvementées sur la mer. Aussi, accorde-t-elle audience aux étrangers. Entrée des chefs troyens. Ascagne présente à la reine des trophées de sa ville. Panthée explique la mission d’Énée : fonder une nouvelle Troie en Italie. Didon souhaite la bienvenue à tous. Soudain, on apprend par le ministre Narbal que les troupes de Iarbas sont passées à l’attaque. Clameurs du peuple appelant aux armes. Énée, revêtu jusqu’alors d’un costume de matelot, révèle son identité et offre son aide à la reine éblouie. Après avoir confié son fils Ascagne à cette dernière, il mène les Troyens et les Carthaginois au combat. Acte IV Une forêt près de Carthage. Au fond un grand rocher au pied duquel on distingue l’entrée d’une grotte. Un ruisseau coule. Deux naïades s’y baignent. Effrayées par le son des cors que l’on entend dans la forêt, elles disparaissent peu de temps avant l’arrivée des chasseurs dans la clairière. Un orage menace et éclate. Les chasseurs se dispersent. Seuls, luttant contre la tempête, Didon et Énée se réfugient dans la grotte, s’avouent leur amour et se donnent l’un à l’autre. On entend, parmi le vacarme des éléments déchaînés, des
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mots incompréhensibles et le cri de « Italie ». Danse sauvage et grotesque des nymphes et des satyres au sommet du rocher. Le ruisseau se transforme en torrent. L’éclair frappe un arbre et y met le feu. Les satyres s’emparent de branches enflammées puis s’évanouissent, avec les nymphes, dans les profondeurs de la forêt. L’orage se calme. Les jardins de Didon près du rivage. Conversation animée entre Anna et Narbal. Anna a le cœur léger. La défaite de Iarbas l’a rendue optimiste. La menace numide s’éloigne. Didon et Énée s’aiment. Peut-on souhaiter pour Carthage un roi plus magnifique que le chef troyen ? Pourtant, Narbal reste inquiet. Énée doit suivre sa destinée et s’installer en Italie. Un désastre se produira sûrement s’il s’attarde à Carthage. La discussion est interrompue par l’arrivée de Didon, d’Énée et de la cour. Des danses sont exécutées en l’honneur d’Énée pour sa victoire sur les Numides. Pour atténuer la mélancolie de la reine, Iopas célèbre par ses chants la déesse Cérès et les fruits de la terre. Insatisfaite, Didon demande à Énée de nouveaux détails sur la ville de Troie. La nouvelle du mariage d’Andromaque avec Pyrrhus, le fils du meurtrier d’Hector, lui donne à réfléchir. Car tout conspire pour chasser ses remords et pour l’absoudre. Armé de son arc, tel un nouveau Cupidon, Ascagne se tient devant elle et enlève, comme en se jouant, l’anneau de Sichée qu’elle porte au doigt. L’assemblée se lève, contemple la beauté de la nuit, écoute les bruits de la mer paisible. Laissés seuls, Didon et Énée expriment leur amour en un long duo, empreint de ravissement. Alors qu’ils s’éloignent lentement du jardin, Mercure se manifeste dans un rayon de lune, près de la colonne portant les armes d’Énée. Frappant le bouclier il lance par trois fois le cri de « Italie ». Acte V Le port de Carthage avec la flotte troyenne au mouillage. La nuit est venue. Hylas, jeune marin phrygien, se balance au sommet du mât d’un navire et traduit, par sa chanson, la nostalgie qu’il éprouve pour les vertes forêts du mont Ida. Il s’endort. Panthée et les chefs sortent de leurs tentes.
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Didon (détail) Johann Heinrich Füssli, 1781 Yale Center for British Art, New Haven, États-Unis Huile sur toile
© PAUL MELLON COLLECTION / BRIDGEMAN IMAGES
Panthée déclare qu’il faut lever l’ancre car les dieux s’irritent et envoient quotidiennement des messages d’avertissement. Marchant de long en large, deux sentinelles discutent de la situation : on est heureux à Carthage ; pourquoi devrait-on s’en aller ? Énée revient, résolu à partir mais déchiré entre les angoisses de la reine et ses propres sentiments. La conscience qu’il a de sa mission héroïque lutte contre sa passion pour la reine. Il faiblit et décide de revoir une dernière fois celle qu’il aime. Mais les spectres de Priam et des chefs troyens morts au combat se dressent devant lui et lui enjoignent de partir. Énée va de tente en tente et éveille l’armée. Tandis qu’on se livre aux préparatifs du départ, Didon, hagarde, échevelée, surgit devant Énée. Mais ses supplications et ses imprécations restent vaines. Les Troyens vont appareiller. Une salle du palais. Ayant abdiqué toute fierté, Didon est prête à s’humilier et à quémander un délai supplémentaire de quelques jours. Mais elle apprend que la flotte troyenne est déjà en mer. Dans une frénésie de désespoir, la reine maudit Énée, ordonne que l’on prépare un bûcher sur lequel elle brûlera tout souvenir de lui et enfin congédie sa suite. Restée seule, décidée à mourir, elle adresse un adieu solennel à la vie ; à ses amis, à Carthage. Une terrasse dominant la mer. Des autels. Didon voilée et portant une couronne de feuilles. Les prêtres invoquent les divinités infernales tandis qu’Anna dénoue les cheveux de sa sœur. Narbal et Anna lancent à l’égard d’Énée l’anathème rituel. Didon monte sur le bûcher et y place les reliques de son amour. Devant le peuple horrifié, elle se frappe avec l’épée d’Énée. Mais avant d’accomplir ce geste, elle a prophétisé la naissance du vengeur : le grand conquérant carthaginois Hannibal. Cependant, à l’instant de la mort, la dernière vision de la reine est celle de la Rome Éternelle. Traduction de l’anglais par Jean Dupart
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SYNOPSIS *David Cairns is a British journalist, nonfiction writer and musician. His two-volume biography Berlioz: The Making of an Artist 1803–1832 and Berlioz: Servitude and Greatness 18321869 has been distinguished as “one of the finest of all biographies of a composer” for its depiction of “Berlioz’s lifelong struggle against the philistinism of Parisian musical life”.
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by David Cairns
The first two acts of the opera, set in Troy, follow the main lines of Aeneas’ narrative in Book II. The action of the third, fourth, and fifth acts takes place in Carthage, the Tyrian city on the north coast of Africa founded by Dido. The Fall of Troy Act I After ten years of siege the Greeks have abandoned their camp on the plains of Troy and withdrawn their ships (ostensibly to Greece, in fact to the nearby island of Tenedos), leaving behind them a vast wooden horse in whose entrails an armed force is hidden. The horse towers up out of the deserted plain. Some Trojans suspect a trap, but most believe the horse has been left as an offering to Pallas Athene. At the opening of the opera the people of Troy, delirious with happiness at their sudden deliverance, are spread over the plain, rejoicing and dancing. Women and children examine the remains of the Greek camp. A soldier points out the tomb of the dreaded Achilles. Then they all hurry off to look at the wooden horse. Cassandra, who has been watching them, now comes forward. Daughter of Priam and priestess of Vesta, she was cursed at birth with a second sight which no one will believe. When she prophesies disaster the Trojans think her mad. But it is they who are mad. She repeats to herself the vision she has had: “Hector’s spirit pacing our ramparts like a watchman of the night, his darkened eyes staring far off towards the straits of Sigeium.” She tries to interpret the meaning. Dimly she sees the doom of the city, the people in their blindness led by a blind king, plunging voluntarily to ruin, and with them her betrothed, Corebus, who will no more listen to her warnings than the rest, and whom she will never live to marry. Corebus appears and begs Cassandra not to hide herself but to join in the festivities. He tries to reassure her; but as her vision takes clear shape, she falls into a frantic exaltation, prophesying in terrible terms the destruction of Troy. At the height of her frenzy, she falls half-fainting in his arms. Corebus revives her and points to the scene
of peace and security around them. But Cassandra can only repeat her prophecy of death, and vehemently urges Corebus to save his life by leaving Troy at once. He refuses with equal force - at which with sudden calmness she bids him stay: “Death makes ready our nuptial bed.” He leads her away distraught. It is now evening. Priam, the other leaders and the priests enter in procession while a hymn of thanksgiving is sung to the gods. Offerings are placed before an altar. A dance of wrestlers is performed before the King. Andromache, Hector’s widow, and her son Astyanax enter, dressed in the ritual white of mourning. The people make way with murmurs of sympathy. She kneels while Astyanax lays some flowers at the altar. Priam and Hecuba bless Andromache and her son. Only Cassandra, standing apart from the rest, is unmoved; she advises Andromache to keep her tears for disasters yet to come. Andromache, weeping, takes Astyanax by the hand and they go out silently between the ranks of the people. A moment later, Aeneas rushes in and describes the appalling death of the priest Laocoön. Suspecting an ambush in the horse, Laocoön took a spear and transfixed the monster’s flank, urging the people to set fire to it. Then two serpents appeared out of the sea and, coming straight for Laocoön, devoured him. At the news of this portent the whole assembly is struck with horror. Dimly they realise that fate is against them: “Laocoön, a priest, object of the gods’ wrath.” Aeneas interprets the sign: Athene is angry at the sacrilege. Priam orders the walls to be breached and the horse dragged in with full pomp to the temple of the goddess. They ignore Cassandra’s warning cry and hurry out with wild jubilation, leaving her alone and despairing. (During the following scene night falls; at the end there is darkness, illuminated only by the torches carried by the soldiers at the back of the stage.) Cassandra listens as the procession bringing the horse into the city gradually comes nearer, singing the sacred hymn of Troy. The people pour on to the stage ahead of the procession, strewing flow-
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ers, and with harps playing. Suddenly the procession is seen to halt: from inside the horse the clash of arms has resounded. But the people, possessed, take it as a happy omen; heedless of Cassandra’s cries, the procession resumes. Cassandra hears it go into the city and pass into the distance. “They enter, it is done; Fate has seized its victim. Sister of Hector, go, die beneath the ruins of Troy.” Act II A room in the palace of Aeneas, dimly lit by a lamp. Aeneas, half-dressed in armour, lies asleep. There are sounds of distant fighting. The young Ascanius, frightened by the noise, enters, listens, then approaches his father’s bed but does not dare to wake him: he returns to his room just as the distant noise from the town dies down. The shade of Hector appears. It stands motionless looking down on Aeneas: it sighs deeply. Aeneas wakes with a start and sees the apparition standing before him. He questions Hector, who tells him that Troy is already in flames: the enemy holds the walls. They have done all that man could to defend their city: now he must escape, taking with him the holy gods of Troy, to Italy, and found there a new empire. Hector’s voice has been getting gradually weaker: now his form grows more and more indistinct and disappears. Panthus, one of the priests, staggers in wounded in the face and carrying the holy images of Troy. A moment later Corebus enters at the head of a band of armed men, with the news that the Citadel is holding out. They resolve to reach it at all costs. A hall in the royal palace, in the middle of the burning city. There is a colonnade at the back (with a distant prospect of Mount Ida), and an altar to Vesta-Cybele. Women lie prostrate before the altar, praying for protection from the Greeks. Cassandra enters and prophesies that Aeneas, who has relieved the garrison of the Citadel and rescued the royal treasure, will found a new Troy in Italy. But Corebus is dead. Cassandra asks the women whether they prefer to be slaves to the lust of the conquerors or to die by their own hands, obedient to their oath. A few who are too
frightened to face death are scornfully driven out by the others. The rest take their lyres and with growing exaltation sing a hymn to their city and the vows they have kept to the end. A Greek chief runs in, sword held high, and stops in astonishment at the sight of the women. More soldiers enter, looking for plunder. Cassandra defies them and stabs herself. She hands the dagger to her sister Polyxena, who does the same. More Greeks pour in through the smoke of the already burning palace and announce that Aeneas has escaped with the gods and gold of Troy. Cassandra tries to reach the colonnade but falls to the ground, dying. The women have climbed on to the parapet of the colonnade. The Greeks look on in reluctant admiration. With a last cry of “Italy” some of the women throw themselves down, others stab or strangle themselves. Fire engulfs the palace. The Trojans in Carthage Act III A hall in Dido’s palace at Carthage, decorated for a festival. The people greet the sun, now shining brightly after the storms which lately ravaged the coast. At the entry of the Queen, they sing the Carthaginian national hymn. Dido reviews the achievements of the seven years since she fled from Tyre (to escape from her brother Pygmalion, the murderer of her husband Sychaeus) and founded the city of Carthage. She looks forward to still greater prosperity, thanks the people for their loyal support, and appeals to them to defend her against the attacks of the Numidian King Iarbas. “Give one more example to the earth: great in peace, become in war a nation of heroes.” Representatives of different trades – builders, sailors, farm-workers – pass in procession before her, and their leaders are presented by the Queen with symbolic gifts in acknowledgement of their labours. After renewed rejoicings, the people disperse. Alone, Dido admits to her sister Anna that in the midst of all this happiness a mysterious sadness possesses her. She denies that it is love she is pining for, and tries to resist her lively sister’s argu-
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ment that for the sake of her youth and beauty and the future of Carthage, she ought to forget her vow to stay faithful to the memory of her dead husband, and marry again. But to herself she admits the appeal of Anna’s advice: “Her words arouse in my breast a dangerous delight;” and she begs the shade of her husband to forgive her and strengthen her against temptation. The bard Iopas enters and announces the arrival of an unknown fleet, driven ashore by the recent storm. Dido, recalling her own tempestuous wanderings on the sea, gives the strangers audience. Trojan chiefs enter, and Ascanius presents trophies from Troy to the Queen. Panthus explains Aeneas’ mission: to found a new Troy in Italy. Dido gives them welcome. At that moment her minister Narbal enters hurriedly with news of a sudden invasion by Iarbas and his hordes. The cries of the people are heard, appealing for arms. Aeneas, till now disguised as a sailor, reveals himself, and offers the dazzled Queen an alliance: and after entrusting the care of his son Ascanius to Dido, he leads the Trojans and Carthaginians to battle. Act IV A forest near Carthage: at the back is a high crag with a cave entrance at the foot; a stream runs by, flowing into a natural basin. Two naiads bathing in the stream take fright at the sound of hunting horns coming from somewhere near in the forest and vanish, shortly before huntsmen appear in the clearing. A storm gathers and breaks. Huntsmen gallop across the clearing. Dido and Aeneas, separated from the rest, enter, battling against the storm, and take refuge in the cave, and there acknowledge and consummate their love. Through the noise of the storm wordless cries are heard and shouts of “Italy.” Woodnymphs and satyrs appear on top of the crag and dance wildly, with grotesque gestures. The stream becomes a torrent. Lightning strikes a tree and sets it on fire. The satyrs seize flaming branches and dance, brandishing them, then disappear with the nymphs into the depths of the forest. The storm passes.
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Dido’s garden by the sea-shore: sunset. Anna and Narbal enter the garden, deep in discussion. She is light-hearted and optimistic - with Iarbas defeated, the Numidian threat has receded; Dido and Aeneas are in love: what more splendid king could Carthage wish for? But Narbal is anxious: Aeneas’ destiny is to settle in Italy, and only disaster can come if he lingers in Carthage. They are interrupted by the entry of Dido, Aeneas, and the court. The whole company watches the dances performed in honour of Aeneas for his victory over the Numidians. Iopas, to soothe the Queen’s restless mood, sings of Ceres and the fruits of the earth. Still unsatisfied, she asks Aeneas for further tales of Troy, and learns of Andromache’s marriage to Pyrrhus, son of Achilles, the slayer of her husband Hector. Dido reflects on what she has heard - “Everything conspires to overcome my remorse, and my heart is absolved” - while, watched by the others, Ascanius, who resembles Cupid as he stands over her holding his bow, playfully slips the ring of Sychaeus from Dido’s finger. All now rise and contemplate the beauty of the night, and listen to the sound of the sleeping sea. Left alone, Dido and Aeneas pour out their love in a long, rapt duet. As they slowly leave the garden, Mercury appears in a ray of moonlight near a column on which Aeneas’ arms are hung. Striking the shield, he calls three times: “Italy.” Act V The harbour of Carthage with the Trojan fleet at anchor: night. Hylas, a young Phrygian sailor, rocks at the masthead of one of the ships, and sings of his longing for the green forests of Mount Ida. He falls asleep. Panthus and the chiefs come out of their tents. Panthus tells them they must prepare to leave: the gods are angry at the delay and daily send portents to warn them. Two Trojan sentries march up and down and exchange views on the situation: they are happy in Carthage, and do not see why they should have to move. Aeneas now appears, resolved to depart, but torn by the agony of the Queen and his own feelings. His sense of his heroic mission struggles against
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and dismisses her attendants. Alone, she resolves on her own death, and takes a solemn farewell of life, friends, and city. A terrace overlooking the sea, with altars: Dido veiled and wearing a crown of leaves. Priests invoke the infernal deities, while Anna loosens her sister’s hair. Narbal and Anna pronounce a ritual curse on Aeneas. Dido mounts the pyre and consigns to it all the relics of her lover. To the horror of her people, she stabs herself with Aeneas’ sword. Before doing so, she has prophesied the rise of a great conqueror in Carthage - Hannibal - who will avenge her wrongs. But now, at the moment of death, her last vision is of Eternal Rome.
Esquisse des décors de l’acte II de la création des Troyens à Carthage à Paris, au Théâtre-Lyrique en 1863 Philippe Chaperon, 1863 BnF, département Bibliothèque-musée de l’opéra Crayon, plume, aquarelle, gouache et collages
Esquisse des décors de l’acte III de la création des Troyens à Carthage à Paris, au Théâtre-Lyrique en 1863 Charles Cambon, 1863 BnF, département Bibliothèque-musée de l’opéra Fusain sur papier
© BNF/GALLICA
his passionate love for Dido. Weakening, he determines to see her once again; but the ghosts of Priam and other dead Trojan leaders rise up and urge him to be gone. Aeneas goes from tent to tent, rousing the sleeping army. While they are preparing for their departure, Dido, dishevelled and distraught, rushes in and confronts Aeneas. But her entreaties and curses are equally in vain. The Trojans make ready to sail. A room in the palace. Dido’s pride has gone, she is ready to abase herself and beg a few more days from Aeneas. But news comes that the Trojan fleet has already put to sea. In a frenzy of despair the Queen curses Aeneas, commands a pyre to be built on which she will burn all memorials of him,
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© DR
Masque tragique (détail d’une frise) Anonyme, Ier siècle ap. J.-C. Maison du Faune, site antique de Pompéi Mosaïque
Tragédie & Comédie
Du Théâtre grec aux Troyens de Berlioz
D
par Petya Ivanova
ès ses origines sous le signe de Dionysos, le théâtre grec est marqué par l’alliance du comique et du tragique. Né à Athènes à la fin du VIème ou au tout début du Vème siècle, il fait partie intégrante des fêtes en l’honneur du dieu de l’ivresse et de la fertilité. Au temps de la démocratie athénienne, tragédie et comédie se succédaient dans le cadre des concours qui clôturaient les festivités en l’honneur de Dionysos, et qui comprenaient quatre jours de représentations : trois pour la tragédie et un pour la comédie, ou drame satyrique. Les juges du concours étaient tirés au sort parmi le public qui pouvait atteindre jusqu’à vingt mille spectateurs. Tous les spectateurs étaient rémunérés par une allocation – le theorikon, du verbe theorein, regarder. Il s’agissait d’une « grande cérémonie religieuse et civique »1 qui marquait la fin des festivités. Dionysos lui-même a une double nature : fils de Zeus et d’une mortelle, Sémélè, il incarne d’un côté la gaieté et l’abondance, mais il est aussi à l’origine des orgies sauvages auxquelles se livraient les Ménades, ces femmes en transe qui accompa-
gnaient le dieu dans ses errances. Dieu de la végétation sans cesse renaissante, il était également vénéré par le petit peuple des campagnes, dans de joyeuses mascarades où l’on promenait solennellement en l’honneur du dieu un phallus gigantesque, symbole de fécondité. Les fidèles du dieu sont appelées les Bacchantes, dont le délire et la folie bestiale sont évoqués par Euripide dans sa pièce éponyme : mal accueilli à Thèbes, la ville de sa mère Sémélè, Dionysos fait naître le délire et la folie chez les femmes de Thèbes et se venge du roi de la cité, son cousin Penthée, en le faisant déchirer et dévorer tout cru par les Bacchantes conduites par sa propre mère, Agavè. Une « immense Bacchanale » – c’est aussi le fléau dont Venus en colère frappe la Sparte de la Belle Hélène d’Offenbach. Mais Dionysos est aussi associé à l’enthousiasme – cet état induit par le toucher d’un dieu (entheos, enthousiaste, c’est-à-dire « dans la main d’un dieu, manipulé par un dieu ») qui fait retentir, aux oreilles du possédé, une musique – et en particulier la flûte 2. Platon (Socrate) parle de cet état de transport qui relie le rhapsode à son poète de pré-
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Claude Mossé, Dictionnaire de la civilisation grecque, Editions Complexe, 1998.
Philippe Borgeaud, Exercices de mythologie, Labor et Fides, 2004, p. 109-110.
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TRAGÉDIE & COMÉDIE : DU THÉÂTRE GREC AUX TROYENS DE BERLIOZ PETYA IVANOVA
dilection exactement comme le possédé est relié à la musique du dieu qui le possède : « Tous les excellents poètes épiques, ce n’est pas par l’effet d’un art, mais en état d’inspiration et de possession qu’ils composent tous ces beaux poèmes et les poètes lyriques de même, tels ceux qui font les Corybantes qui ne sont pas dans leur bons sens quand ils dansent. De même, les poètes lyriques ne sont pas de sens rassis quand ils font ces belles chansons, mais dès qu’ils ont emboîté l’harmonie et le rythme et qu’ils sont en état de transe bachique et possédés, telles les bacchantes qui puisent au fleuve le miel et le lait lorsqu’elles sont possédées et n’ont pas leur bon sens, mais ne peuvent le faire de sens rassis, l’âme aussi des poètes lyriques vit ce qu’ils expriment… Et tel poète sera soulevé par telle Muse, tel par une autre. Nous disons qu’il est possédé, ce qui est à peu près la même chose. Il arrive, en effet, que, suspendus en quelque sorte à ces premiers anneaux, les poètes s’enchaînent les uns aux autres et deviennent inspirés, les uns c’est Orphée, les autres Musée et, le plus grand nombre, c’est Homère qui les possède et les hante. Et toi, Ion, tu es l’un d’eux et tu es possédé par Homère ; lorsqu’on déclame quelque chose d’un autre poète, tu t’endors et tu n’as rien à dire ; mais dès que se fait entendre un air de ce poète, tu te réveilles immédiatement et ton âme entre en danse et tu ne manques pas de choses à dire. Ce n’est ni l’art ni l’érudition qui te font dire ce que tu dis d’Homère, mais c’est une participation divine (theia moïra) et une possession, comme ceux qui font les Corybantes, qui ressentent immédiatement cet air seul qui est celui du dieu par lequel ils sont possédés et qui, sur cet air, improvisent avec abondance gestes et paroles, sans se soucier des autres.3 » D’un tel enthousiasme ou saisissement semble témoigner aussi Berlioz lorsqu’il s’enivre des passions de L’Énéide encore enfant : « Virgile […] en me parlant de passions épiques que je pressentais, sut le premier trouver le chemin de mon cœur et enflammer mon imagination naissante. Combien 3
Platon, Ion, texte traduit par Henri Jeanmaire, Dionysos, Paris, 1951, p. 134-135.
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de fois, expliquant devant mon père le quatrième livre de l’ “Énéide”, n’ai-je pas senti ma poitrine se gonfler, ma voix s’altérer et se briser ! […] Un jour, déjà troublé dès le début de ma traduction orale par le vers : “At regina gravi jamdudum saucia cura”, j’arrivais tant bien que mal à la péripétie du drame ; mais lorsque j’en fus à la scène où Didon expire sur son bûcher, entourée des présents que lui fit Énée, des armes du perfide, et versant sur “ce lit, hélas ! bien connu”, les flots de son sang courroucé ; obligé que j’étais de répéter les expressions désespérées de la mourante, “trois fois se levant appuyée sur son coude et trois fois retombant”, de décrire sa blessure et son mortel amour frémissant au fond de sa poitrine, et les cris de sa sœur, de sa nourrice, de ses femmes éperdues, et cette agonie pénible dont les dieux mêmes émus envoient Iris abréger la durée, les lèvres me tremblèrent, les paroles en sortaient à peine et inintelligibles ; enfin au vers : “Quaesivit coelo lucem ingemuitque reperta”, à cette image sublime de Didon qui “cherche aux cieux la lumière et gémit en la retrouvant”, je fus pris d’un frissonnement nerveux et, dans l’impossibilité de continuer, je m’arrêtai court […]Voyant combien j’étais embarrassé et confus d’une telle émotion, il [mon père] feignit de ne la point apercevoir, et, se levant tout à coup, il ferma le livre en disant : “Assez, mon enfant, je suis fatigué !” Et je courus, loin de tous les yeux, me livrer à mon chagrin virgilien ». mémoires, chapitre 2 (vers 1848) […] « Quant à l’objet principal de l’œuvre [Les Troyens], à l’expression de la passion et des sentiments, à la reproduction musicale des caractères, ce fut dès l’origine la partie la plus facile de ma tâche. J’ai passé ma vie avec ce peuple de demi-dieux ; je me figure qu’ils m’ont connu, tant je les connais. Et cela me rappelle une impression de mon enfance qui prouve à quel point ces beaux êtres antiques m’ont tout d’abord fasciné. À l’époque où, par la suite de mes études classiques, j’expliquais sous la direction de mon père le douzième livre de L’Énéide, ma tête s’enflamma tout à fait pour les personnages de ce chef-d’œuvre : Lavinie, Turnus, Énée, Mézence, Lausus, Pallas, Evandre, Amata, Latinus,
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PETYA IVANOVA TRAGÉDIE & COMÉDIE : DU THÉÂTRE GREC AUX TROYENS DE BERLIOZ
Camille, etc., etc. ; j’en devins somnambule, et, pour emprunter un vers à Hugo : “Je marchais tout vivant dans mon rêve étoilé”. Un dimanche, on me mena aux Vêpres : le chant monotone et triste du Psaume : “In exitu Israel” produisit sur moi l’effet magnétique qu’il produit encore aujourd’hui et me plongea dans les plus réelles rêveries rétrospectives. Je retrouvais mes héros virgiliens, j’entendais le bruit de leurs armes, je voyais courir la belle amazone Camille, j’admirais la pudique rougeur de Lavinie éplorée, et ce pauvre Turnus, et son père Daunus, et sa sœur Juturne, j’entendais retentir les grands palais de Laurente […] et un chagrin incommensurable s’empara de moi, ma poitrine se serra, je sortis de l’église tout en larmes, et je restai pleurant, sans pouvoir contenir mon affliction épique tout le reste du jour, et l’on ne put jamais obtenir de moi l’aveu de sa cause, et mes parents n’ont jamais su ni pressenti même quelles douleurs s’étaient ce jour-là emparé de mon cœur d’enfant ». lettre à la princesse sayn-wittgenstein (20
juin 1859)
Et plus tard, lorsque l’ouvrage est en train de se faire : « Ah ! je n’ai pas d’illusions, non, et vous me faites rire avec ces vieux mots de mission à remplir ! Quel missionnaire ! […] Mais il y a en moi une mécanique inexplicable qui fonctionne malgré tous les raisonnements et je la laisse faire, parce que je ne puis l’empêcher de fonctionner… » lettre à toussaint bennet (26-27 janvier 1857)
L’ « affliction épique » du compositeur n’obscurcit pas pour autant son sens de l’humour, voire de l’(auto)dérision : « Or il n’y a rien de bête comme un auteur qui, le septième jour, imitant le bon Dieu, considère son ouvrage et trouve cela bon. Figurezvous, qu’à part deux ou trois morceaux, j’avais tout oublié. De sorte qu’en lisant je faisais de véritables découvertes… de là des joies !… J’avais seulement laissé en arrière la scène de pantomime d’Andromaque dont l’importance m’effrayai… la voilà faite, et de tout l’acte, c’est je crois le morceau le mieux réussi… J’en ai pleuré comme dix-huit veaux. Voyez comme j’imite encore le bon Dieu,
qui pourtant n’avait pas une sensibilité très vive, à en croire cet affreux escamoteur de Moïse. » lettre à bennet (5-6 février 1857)
Allier comique et tragique – c’est aussi le procédé employé par le théâtre élisabéthain du temps de Shakespeare, l’autre source majeure d’inspiration pour Berlioz dans Les Troyens. Son intention de faire une œuvre « dans le système shakespearien » anime non seulement les scènes d’apparition du spectre d’Hector à l’acte II et des héros troyens à l’acte V, mais aussi la scène burlesque du premier tableau de l’acte V où Berlioz met en scène deux marins qui se plaignent de devoir quitter les faveurs des Carthaginoises pour « les caresses de l’orage » et qui ne manquent pas d’évoquer les deux fossoyeurs s’échangeant des blagues salaces dans le cimetière d’Hamlet (Acte V, Scène 1). Le duo de Didon et Énée à l’acte IV est quant à lui modelé sur le dialogue de Jessica et Lorenzo dans Le Marchand de Venise : « Par une telle nuit, fou d’amour et de joie /Troïlus vint attendre aux pieds des murs de Troie/ La belle Cressida. » Mais tandis que Shakespeare donne à cette causerie d’amoureux une nuance comique : « Je vous surpasserais en comparaisons savantes si personne ne devait venir » (Acte V, Scène 1), les protagonistes de Berlioz ne quittent pas un seul instant la dignité de leur statut au profit de la passion amoureuse : « ce n’est pas un dialogue d’amants…, ou plutôt c’est un dialogue d’amants imbus de la dignité de leurs fonctions royales, et qui ne se résignent pas encore tout à fait à être un homme et une femme comme les autres. [...] Certes, le drame de Didon et d’Énée est la plus grande histoire d’amour du monde antique. Mais une histoire d’amour comme ce monde pouvait la concevoir…, c’est-à-dire que le ressort n’en est pas l’amour. » 4 Le ressort, c’est le destin. La légèreté du comique shakespearien cède ici à la fatalité de la tragédie grecque.
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Henry Barraud, Hector Berlioz, Fayard, 1979, p. 415-16 et p.424
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Lettre à la princesse Sayn-Wittgenstein le 12 août 1856 À mon retour à Paris [de Bade], je vais essayer de m’affranchir le plus possible de toutes autres occupations, et commencer ma tâche musicale. Elle sera rude; que tous les dieux de Virgile me viennent en aide, ou je suis perdu. Ce qu’il y a d’immensément difficile là-dedans, c’est de trouver la forme musicale, cette forme sans laquelle la musique n’existe pas, ou n’est plus que l’esclave humiliée de la parole ... Trouver le moyen d’être expressif, vrai, sans cesser d’être musicien, et donner tout au contraire des moyens nouveaux d’action à la musique, voilà le problème... Encore un autre écueil pour moi en composant la musique de ce drame, c’est que les sentiments qu’il s’agit d’exprimer m’émeuvent trop. Cela ne vaut rien. Il faut tâcher de faire froidement des choses brûlantes... Votre bien dévoué et reconnaissant Iopas. Lettre à la Princesse le 3 septembre 1856 Je suis tout transporté d’une phrase du père Nestor dans le « Troilus and Cressida » de Shakespeare... Nestor rendant hommage à la sublime générosité du défenseur de Troie, dit qu’au milieu des batailles, il l’a vu maintes fois, pour épargner la foule des soldats grecs tremblants à son approche et incapables de lui résister, passer foudroyant sur son char, en levant en l’air son épée, pour ne pas blesser ces malheureux. C’était, dit le vieux Nestor, Jupiter distribuant la vie. Quel tableau je ferais de cela, si j’étais un grand peintre !... Je travaille. En rêvant dans les bois à Plombières, j’ai fait deux morceaux importants : le 1er chœur de la canaille troyenne, au début du 1er acte, et l’air de Cassandre. Puis, j’ai ajouté deux scènes courtes, mais utiles et curieuses, je crois, au commencement du 5e acte. L’une des deux offre une proposition musicale pleine d’intérêt. Il s’agit de deux soldats troyens montant la garde pendant la nuit devant les tentes, l’un marchant de droite à gauche, l’autre de gauche à droite, et causant quand ils se rencontrent au milieu du théâtre, sur l’entêtement de leurs chefs à aller conquérir cette
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maudite Italie, quand on est si bien à Carthage... Le contraste de ces bas instincts soldatesques avec les héroïques aspirations des royaux personnages est peut-être heureux. Lettre à son fils Louis du 9 février 1858 J’en suis à cette heure au dernier monologue de Didon : « Je vais mourir dans ma douleur immense submergée. » Je suis plus content de ce que je viens d’écrire que de tout ce que j’ai fait auparavant. Je crois que ces terribles scènes du cinquième acte seront en musique d’une vérité déchirante. Mais j’ai encore modifié cet acte. J’y ai fait une large coupure et j’y ai ajouté un morceau de caractère, destiné à contraster avec le style épique et passionné du reste. C’est une chanson de matelot; je pensais à toi, cher Louis, en l’écrivant et je t’en envoie les paroles. Il fait nuit, on voit les vaisseaux troyens dans le port : Hylas, jeune matelot phrygien, chante, en se balançant au haut du mât d’un navire... Lettre à Adèle du 11 mars 1858 Je t’assure, chère petite sœur, que la musique des Troyens est quelque chose de noblement grand; c’est en outre d’une vérité poignante... Il me semble que si Gluck revenait au monde, il dirait de moi en entendant cela : « Décidément, voilà mon fils. » Ce n’est pas modeste, n’est-ce pas ? mais j’ai du moins la modestie d’avouer que j’ai le défaut de manquer de modestie. Lettre à Humbert Ferrand du 28 avril 1859 Les chanteurs-acteurs de l’Opéra sont tellement loin de posséder les qualités nécessaires pour représenter certains rôles ... Shakespeare l’a dit : « Rien n’est plus affreux que de voir déchirer de la passion comme des lambeaux de vieille étoffe... » Et la passion surabonde dans la partition des Troyens ; les morts eux-mêmes ont un accent triste qui semble appartenir encore un peu à la vie; le jeune matelot phrygien qui, bercé au haut du mât d’un navire, dans le port de Carthage, pleure le « Vallon sonore / Où, dès l’aurore / Il s’en allait chantant... » est en proie à la nostalgie la plus prononcée; il regrette avec passion les grands bois du
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Lettres
Caricature d’Hector Berlioz Étienne Carjat, XIXème Musée Carnavalet, Paris Dessin
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mont Dindyme ... Il aime.
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Les Troyens au Théâtre-Lyrique Une du journal satirique Le Journal Amusant Alfred Grévin, 1863 BnF, Paris Estampe
On a imprimé, et on imprime encore de temps en temps à mon sujet des notices biographiques si pleines d’inexactitudes et d’erreurs, que l’idée m’est enf in venue d’écrire moi-même ce qui, dans ma vie laborieuse et agitée, me paraît susceptible de quelque intérêt pour les amis de l’art. HECTOR BERLIOZ, LONDRES, 21 MARS 1848
Quelque chose de grandiose et de nouveau... d’Hector Berlioz, Extrait de Mémoires, Postface, Symétrie, 2010
J
’avais entièrement terminé à cette époque l’ouvrage dramatique dont je parlais tout à l’heure et dont j’ai fait mention dans une note d’un des précédents chapitres. Me trouvant à Weimar quatre ans auparavant chez la princesse de Wittgenstein (amie dévouée de Liszt, femme de cœur et d’esprit qui m’a soutenu bien souvent dans mes plus tristes heures), je fus amené à parler de mon admiration pour Virgile et de l’idée que je me faisais d’un grand opéra traité dans le système shakespearien, dont le deuxième et le quatrième livre de L’Énéide seraient le sujet. J’ajoutai que je savais trop quels chagrins une telle entreprise me causerait nécessairement pour que j’en vinsse jamais à la tenter. « En effet, répliqua la princesse, de votre passion pour Shakespeare unie à cet amour de l’antique, il doit résulter quelque chose de grandiose et de nouveau. Allons, il faut faire cet opéra, ce poème lyrique ; appelez-le et disposez-le comme il vous plaira. Il faut le commencer et le finir. » Comme je continuais à m’en défendre : « Écoutez, me dit la princesse, si vous reculez devant
les peines que cette oeuvre peut et doit vous causer, si vous avez la faiblesse d’en avoir peur et de ne pas tout braver pour Didon et Cassandre, ne vous représentez jamais chez moi, je ne veux plus vous voir. » Il n’en fallait pas tant dire pour me décider. De retour à Paris, je commençai à écrire les vers du poème lyrique des Troyens. Puis je me mis à la partition, et au bout de trois ans et demi de corrections, de changements, d’additions, etc., tout fut terminé. Pendant que je polissais et repolissais cet ouvrage, après en avoir lu le poème en maint endroit, avoir écouté les observations des uns et des autres et en avoir profité de mon mieux, l’idée me vint d’écrire à l’Empereur la lettre suivante : Sire, Je viens d’achever un grand opéra dont j’ai écrit les paroles et la musique. Malgré la hardiesse et la variété des moyens qui y sont employés, les ressources dont on dispose à Paris peuvent suffire à le représenter. Permettez-moi, Sire, de vous en lire le poème et de solliciter ensuite pour l’œuvre votre haute protection, si elle a le bonheur de la mériter.
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Le théâtre de l’Opéra est en ce moment dirigé par un de mes anciens amis 1, qui professe au sujet de mon style en musique, style qu’il n’a jamais connu et qu’il ne peut apprécier, les opinions les plus étranges ; les deux chefs du service musical placés sous ses ordres sont mes ennemis. Gardez-moi, Sire, de mon ami, et quant à mes ennemis, comme dit le proverbe italien, je m’en garderai moi-même. Si Votre Majesté, après avoir entendu mon poème, ne le juge pas digne de la représentation, j’accepterai sa décision avec un respect sincère et absolu; mais je ne puis soumettre mon ouvrage à l’appréciation de gens dont le jugement est obscurci par des préventions et des préjugés, et dont l’opinion, par conséquent, n’est pour moi d’aucune valeur. Ils prendraient le prétexte de l’insuffisance du poème pour refuser la musique. J’ai été un instant tenté de solliciter la faveur de lire mon livret des Troyens à Votre Majesté, pendant les loisirs que lui laissait son dernier séjour à Plombières ; mais alors la partition n’était pas terminée et j’ai craint, si le résultat de la lecture n’eût pas été favorable, un découragement qui m’eût empêché de l’achever; et je voulais l’écrire cette grande partition, l’écrire complètement, avec une ardeur constante et les soins et l’amour les plus assidus. Maintenant, viennent le découragement et les chagrins, rien ne peut faire qu’elle n’existe pas. C’est grand et fort, et, malgré l’apparente complexité des moyens, très simple. Ce n’est pas vulgaire malheureusement, mais ce défaut est de ceux que Votre Majesté pardonne, et le public de Paris commence à comprendre que la production des jouets sonores n’est pas le but le plus élevé de l’art. Permettez-moi donc, Sire, de dire comme l’un des personnages de l’épopée antique d’où j’ai tiré mon sujet : Arma citi properate viro 2 !, et je crois que je prendrai le Latium. Je suis avec le plus profond respect et le plus entier dévouement, Sire, de Votre Majesté le très-humble et très obéissant serviteur. Hector Berlioz, Membre de l’Institut. Paris, 28 mars 1858.
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Eh bien, non, je n’ai pas pris le Latium. Il est vrai que les gens de l’Opéra se sont bien gardés de properare arma viro ; et l’Empereur n’a jamais lu cette lettre ; M. de Morny m’a dissuadé de la lui envoyer ; « l’Empereur, m’a-t-il dit, l’eût trouvée peu convenable » ; et quand enfin les Troyens ont été représentés tant bien que mal, S. M. n’a pas seulement daigné venir les voir. Un soir, aux Tuileries, je pus avoir un instant d’entretien avec l’Empereur, et il m’autorisa à lui apporter le poème des Troyens, m’assurant qu’il le lirait s’il pouvait trouver une heure de loisir. Mais a-t-on du loisir quand on est Empereur des Français ? Je remis mon manuscrit à Sa Majesté qui ne le lut pas et l’envoya dans les bureaux de la direction des théâtres. Là on calomnia mon travail, le traitant d’absurde et d’insensé ; on fit courir le bruit que cela durerait huit heures, qu’il fallait deux troupes comme celle de l’Opéra pour l’exécuter, que je demandais trois cents choristes supplémentaires, etc., etc. Un an après, on sembla vouloir s’occuper un peu de mon ouvrage. Un jour Alphonse Royer me prit à part et me dit : « Le ministre d’État m’a ordonné de vous annoncer qu’on allait mettre à l’étude, à l’Opéra, votre partition des Troyens, et qu’il voulait vous donner pleine satisfaction. » Cette promesse faite spontanément par son excellence ne fut pas mieux tenue que tant d’autres, et à partir de ce moment il n’en a plus, etc., etc. Et voilà comment, après une longue attente inutile et las de subir tant de dédains, je cédai aux sollicitations amicales de M. Carvalho et je consentis à lui laisser tenter la mise en scène des Troyens à Carthage 3 au Théâtre-Lyrique, malgré l’impossibilité manifeste où il était de la mener à bien. Il venait d’obtenir du gouvernement une subvention annuelle de cent mille francs. Malgré cela l’entreprise était au-dessus de ses forces; son théâtre n’est pas assez grand, ses chanteurs ne sont pas assez habiles, ni ses chœurs, ni son orchestre suffisants. Il fit des sacrifices considérables ; j’en
1
Alphonse Royer.
2
« Apportez vite des armes à ce héros. » (Virgile, Enéide,
j’ajoutai une introduction instrumentale (le Lamento) et
livre XII, v. 425)
un prologue.
3
Deuxième partie du poème lyrique des Troyens, à laquelle
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fis de mon côté. Je payai de mes deniers quelques musiciens qui manquaient à son orchestre ; je mutilai même en maint endroit mon instrumentation pour la mettre en rapport avec les ressources dont il disposait. Mme Charton-Demeur, la seule femme qui pût chanter le rôle de Didon, fit à mon égard acte de généreuse amitié en acceptant de M. Carvalho des appointements de beaucoup inférieurs à ceux que lui offrait le directeur du théâtre de Madrid. Malgré tout, l’exécution fut et ne pouvait manquer d’être fort incomplète. Mme Charton eut d’admirables moments, Monjauze qui jouait Énée, montra à certains jours de l’entraînement et de la chaleur ; mais la mise en scène, que Carvalho avait voulu absolument régler lui-même, fut tout autre que celle que j’avais indiquée, elle fut même absurde en certains endroits et ridicule dans d’autres. Le machiniste, à la première représentation, faillit tout compromettre et faire tomber la pièce par sa maladresse dans la scène de la chasse pendant l’orage. Ce tableau, qui serait à l’Opéra d’une beauté sauvage saisissante, parut mesquin, et pour changer ensuite de décor, il fallut cinquante-cinq minutes d’entracte. D’où résulta le lendemain la suppression de l’orage, de la chasse et de toute la scène. Je l’ai déjà dit, pour que je puisse organiser convenablement l’exécution d’un grand ouvrage tel que celui-là, il faut que je sois le maître absolu du théâtre, comme je le suis de l’orchestre quand je fais répéter une symphonie; il me faut le concours bienveillant de tous et que chacun m’obéisse sans faire la moindre observation. Autrement, au bout de quelques jours, mon énergie s’use contre les volontés qui contrarient la mienne, contre les opinions puériles et les terreurs plus puériles encore dont on m’impose l’obsession ; je finis par donner ma démission, par tomber énervé et laisser tout aller au diable. Je ne saurais dire ce que Carvalho, tout en protestant qu’il ne voulait que se conformer à mes intentions et exécuter mes volontés, m’a fait subir de tourments pour obtenir les coupures qu’il croyait nécessaires. Quand il n’osait me les demander lui même, il me les faisait demander par un de nos
Si Votre Majesté, après avoir entendu mon poème, ne le juge pas digne de la représentation, j’accepterai sa décision avec un respect sincère et absolu; mais je ne puis soumettre mon ouvrage à l’appréciation de gens dont le jugement est obscurci par des préventions et des préjugés, et dont l’opinion, par conséquent, n’est pour moi d’aucune valeur. Ils prendraient le prétexte de l’insuffisance du poème pour refuser la musique. [...] C’est grand et fort, et, malgré l’apparente complexité des moyens, très simple. Ce n’est pas vulgaire malheureusement, mais ce défaut est de ceux que Votre Majesté pardonne. N° 43 | LES TROYENS • GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE
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La première représentation des Troyens à Carthage eut lieu le 4 novembre 1863 [...]. L’ouvrage avait besoin encore de trois ou quatre sérieuses répétitions générales, rien ne marchait avec aplomb, sur la scène surtout. [...] Nous pensions que la soirée serait orageuse, nous nous attendions à toutes sortes de manifestations hostiles ; il n’en fut rien. Mes ennemis n’osèrent pas se montrer; un coup de sifflet honteux se fit entendre à la fin lorsqu’on proclama mon nom, et ce fut tout. [...] D’autres péroraient dans les corridors avec une violence comique, m’accablant d’imprécations, disant qu’on ne pouvait pas, qu’on ne devait pas permettre une musique pareille. 34
amis communs. Celui-ci m’écrivait que tel passage était dangereux, celui-là me suppliait, par écrit également, d’en supprimer un autre. Et des critiques de détail à me faire devenir fou. « Votre rapsode qui tient à la main une lyre à quatre cordes, justifie bien, je le sais, les quatre notes que fait entendre la harpe dans l’orchestre. Vous avez voulu faire un peu d’archéologie. – Eh bien ? – Ah ! C’est dangereux, cela fera rire. – En effet, c’est bien risible. Ha ! Ha ! Ha ! Un tétracorde, une lyre antique faisant quatre notes seulement ! Ha ! Ha ! Ha ! – Vous avez un mot qui me fait peur dans votre prologue. – Lequel ? – Le mot triomphaux. – Et pourquoi vous fait-il peur ? n’est-il pas le pluriel de triomphal, comme chevaux de cheval, originaux d’original, madrigaux de madrigal, municipaux de municipal ? – Oui, mais c’est un mot qu’on n’a pas l’habitude d’entendre. – Pardieu, s’il fallait dans un sujet épique n’employer que les mots en usage dans les guinguettes et les théâtres de vaudeville, les expressions prohibées seraient en grand nombre, et le style de l’œuvre serait réduit à une étrange pauvreté. – Vous verrez, cela fera rire. – Ha ! ha ! ha ! triomphaux ! En effet c’est fort drôle ! triomphaux ! c’est presque aussi bouffon que tarte à la crème de Molière. Ha ! Ha ! Ha ! – Il ne faut pas qu’Énée entre en scène avec un casque. – Pourquoi ? – Parce que Mangin, le marchand de crayons de nos places publiques, lui aussi, porte un casque ; un casque du moyen âge, il est vrai, mais enfin un casque et les titis de la quatrième galerie se mettront à rire et crieront : ohé ! c’est Mangin ! – Ah, oui, un héros troyen ne doit pas porter de casque, il ferait rire. Ha ! Ha ! Ha ! Un casque ! Ha ! Ha ! Mangin ! – Voyons, voulez-vous me faire plaisir ? – Qu’est-ce encore ? – Supprimons Mercure, ses ailes aux talons et à la
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tête feront rire. On n’a jamais vu porter des ailes qu’aux épaules. – Ah ! L’on a vu des êtres à figure humaine porter des ailes aux épaules ! Je l’ignorais. Mais enfin je conçois que les ailes des talons feront rire ; ha ! ha ! ha ! Et celles de la tête bien plus encore ; ha ! ha ! ha ! Comme on ne rencontre pas souvent Mercure dans les rues de Paris, supprimons Mercure. » Comprend-on ce que ces craintes idiotes devaient me faire éprouver ? Je ne dis rien des idées musicales de Carvalho, qui, pour favoriser une mise en scène qu’il avait imaginée, voulait me faire prendre plus lentement ou plus vite le mouvement de certains morceaux, me faire ajouter seize mesures, huit mesures, quatre mesures, ou en supprimer deux, ou trois, ou une. À ses yeux la mise en scène d’un opéra n’est pas faite pour la musique, c’est la musique qui est faite pour la mise en scène. Comme si d’ailleurs je n’eusse pas longuement calculé ma partition pour les exigences de théâtre que j’étudie depuis quarante ans à l’Opéra. Au moins les acteurs se sont-ils complètement abstenus de me tourmenter, et je leur dois la justice de déclarer qu’ils ont tous chanté leur rôle tel que je leur ai donné et sans y changer une seule note. Ceci est peutêtre incroyable, mais cela est, et je les en remercie. La première représentation des Troyens à Carthage eut lieu le 4 novembre 1863, ainsi que Carvalho l’avait annoncé. L’ouvrage avait besoin encore de trois ou quatre sérieuses répétitions générales, rien ne marchait avec aplomb, sur la scène surtout. Mais le directeur ne savait de quel bois faire flèche pour alimenter son répertoire, son théâtre était vide chaque soir, il voulait sortir au plus vite de cette triste position. En pareil cas, on le sait, les directeurs sont féroces. Mes amis et moi nous pensions que la soirée serait orageuse, nous nous attendions à toutes sortes de manifestations hostiles ; il n’en fut rien. Mes ennemis n’osèrent pas se montrer; un coup de sifflet honteux se fit entendre à la fin lorsqu’on proclama mon nom, et ce fut tout. L’individu qui avait sifflé s’imposa sans doute la tâche de m’insulter de la même façon pendant plusieurs semaines, car il revint, accompagné d’un collaborateur, siffler encore au même endroit, aux
troisième, cinquième, septième et dixième représentations. D’autres péroraient dans les corridors avec une violence comique, m’accablant d’imprécations, disant qu’on ne pouvait pas, qu’on ne devait pas permettre une musique pareille. Cinq journaux me dirent de sottes injures, choisies parmi celles qui pouvaient en moi blesser le plus cruellement l’artiste. Mais plus de cinquante articles de critique admirative, en revanche, parurent pendant quinze jours, parmi lesquels ceux de MM. Gasperini, Fiorentino, d’Ortigue, Léon Kreutzer, Damcke, Joannes Weber, et d’une foule d’autres, écrits avec un véritable enthousiasme et une rare sagacité, me remplirent d’une joie que je n’avais pas éprouvée depuis longtemps. Je reçus en outre un grand nombre de lettres, les unes éloquentes, les autres naïves, toutes émues, et qui ne manquèrent pas de me toucher profondément. À plusieurs représentations j’ai vu des gens pleurer. Souvent, pendant les deux mois qui suivirent la première apparition des Troyens, j’ai été arrêté dans les rues de Paris par des inconnus qui me demandaient la permission de me serrer la main et me remerciaient d’avoir produit cet ouvrage. N’étaient-ce pas là des compensations aux insultes de mes ennemis ? ennemis que je me suis faits moins encore par mes critiques, que par mes tendances musicales; dont la haine ressemble à celle des filles publiques pour les femmes honnêtes et dont on doit se trouver honoré. La muse de ceux-là s’appelle ordinairement Laïs, Phryné, très rarement Aspasie 4, celle que les nobles natures et les amis du grand art adorent, s’appelle Juliette, Desdémone, Cordelia, Ophélia, lmogène, Virgilia, Miranda, Didon, Cassandre, Alceste, noms sublimes qui éveillent des idées de poétique amour, de pudeur et de dévouement, quand les premiers ne rappellent qu’un bas sensualisme et la prostitution. J’avoue avoir, moi aussi, ressenti à l’audition des Troyens des impressions violentes de certains morceaux bien exécutés. L’air d’Énée : « Ah ! Quand viendra l’instant des suprêmes adieux » et surtout le monologue de Didon : « Je vais mourir, / Dans ma douleur immense submergée. » me boulever4
Aspasie avait trop d’esprit.
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Enfin, enfin, enfin, après trente ans d’esclavage, me voilà libre ! Je n’ai plus de feuilletons à écrire, plus de platitudes à justifier, plus de gens médiocres à louer, plus d’indignation à contenir, plus de mensonges, plus de comédies, plus de lâches complaisances, je suis libre ! Je puis ne pas mettre les pieds dans les théâtres lyriques, n’en plus parler, n’en plus entendre parler, et ne pas même rire de ce qu’on cuit dans ces gargotes musicales ! [...] C’est aux Troyens, au moins que le malheureux feuilletoniste a dû sa délivrance. 36
saient. Mme Charton disait grandement et d’une façon si dramatique le passage : « Énée, Énée ! / Oh, mon âme te suit ! » et ses cris de désespoir, sans paroles, en se frappant la poitrine et s’arrachant les cheveux, comme l’indique Virgile : « Terque quaterque manu pectus percussa decorum, / Flaventesque abscissa comas »5. Il est singulier qu’aucun des critiques aboyants ne m’ait reproché d’avoir osé écrire cet effet vocal ; il est pourtant, je le crois, digne de leur colère. Dans tout ce que j’ai produit de musique douloureusement passionnée, je ne connais de comparable à ces accents de Didon, dans cette scène et dans l’air suivant, que ceux de Cassandre dans quelques parties de la Prise de Troie qu’on n’a encore représentée nulle part... Ô ma noble Cassandre, mon héroïque vierge, il faut donc me résigner, je ne t’entendrai jamais !... Et je suis comme le jeune Chorèbe. ... Insano Cassandrœ incensus amore 6. On a supprimé dans les Troyens à Carthage, au Théâtre-Lyrique, tant pendant les études qu’après la première représentation, les morceaux suivants : 1° L’entrée des constructeurs, 2° Celle des matelots, 3° Celle des laboureurs, 4° L’intermède instrumental (chasse royale et orage), 5° La scène et le duo entre Anna et Narbal, 6° Le deuxième air de danse, 7° Les strophes d’Iopas, 8° Le duo des sentinelles, 9° La chanson d’Hylas, 10° L e g r a n d d u o e n t r e É n é e e t D i d o n : « Errante sur tes pas. » Pour les entrées des constructeurs, des matelots et des laboureurs, Carvalho en trouva l’ensemble froid; d’ailleurs le théâtre n’était pas assez vaste pour le déploiement d’un pareil cortège. L’intermède de la chasse fut pitoyablement mis en scène. On me donna un torrent en peinture au 5
« Trois fois, quatre fois frappant de sa main sa belle poitrine / et arrachant ses cheveux blonds. » (Virgile, Enéide, livre IV, v. 589-590)
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« Enflammé d’un amour fou pour Cassandre. » (Virgile, Enéide, livre II, v. 343)
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lieu de plusieurs chutes d’eau réelle; les satyres dansants étaient représentés par un groupe de petites filles de douze ans; ces enfants ne tenaient point à la main des branches d’arbre enflammées, les pompiers s’y opposaient dans la crainte du feu; les nymphes ne couraient pas échevelées à travers la forêt en criant: Italie! les femmes choristes avaient été placées dans la coulisse, et leurs cris n’arrivaient pas dans la salle ; la foudre en tombant s’entendait à peine, bien que l’orchestre fût maigre et sans énergie. D’ailleurs, le machiniste exigeait toujours au moins quarante minutes pour changer son décor après cette mesquine parodie. Je demandai donc moi-même la suppression de l’intermède. Carvalho s’obstina avec un acharnement incroyable, malgré ma résistance et mes fureurs, à couper la scène entre Narbal et Anna, l’air de danse et le duo des sentinelles dont la familiarité lui paraissait incompatible avec le style épique. Les strophes d’lopas disparurent de mon aveu, parce que le chanteur chargé de ce rôle était incapable de les bien chanter. Il en fut de même du duo entre Énée et Didon ; j’avais reconnu l’insuffisance de la voix de Mme Charton dans cette scène violente qui fatiguait l’artiste au point qu’elle n’eût pas eu ensuite la force, au cinquième acte, de dire le terrible récitatif : « Dieux immortels ! Il part ! » et son dernier air et la scène du bûcher. Enfin la chanson d’Hylas, qui avait plu beaucoup aux premières représentations et que le jeune Cabel chantait bien, disparut pendant que j’étais retenu dans mon lit exténué par une bronchite. On avait besoin de Cabel dans la pièce qui se jouait le lendemain des représentations des Troyens et comme son engagement ne l’obligeait à chanter que quinze fois par mois il fallait lui donner deux cents francs pour chaque soirée supplémentaire. Carvalho en conséquence, et sans m’en avertir, supprima la chanson par économie. Je fus tellement abruti par ce long supplice, qu’au lieu de m’y opposer de tout ce qui me restait de forces, je consentis à ce que l’éditeur de la partition de piano, entrant dans la pensée de Carvalho qui voulait que cette partition fût le plus possible conforme à la représentation, supprimât, lui aussi, dans une édition, plusieurs de ces mor-
ceaux. Heureusement la grande partition n’est pas encore publiée ; j’ai employé un mois à la remettre en ordre en pansant avec soin toutes ses plaies ; elle paraîtra dans son intégrité primitive et absolument telle que je l’ai écrite. Oh ! Voir un ouvrage de cette nature disposé pour la vente, avec les coupures et les arrangements de l’éditeur ! Y a-t-il un supplice pareil ! une partition dépecée, à la vitrine du marchand de musique, comme le corps d’un veau sur l’étal d’un boucher, et dont on débite des fragments comme on vend de petits morceaux de mou pour régaler les chats des portières !! Malgré les perfectionnements et les corrections que Carvalho leur avait fait subir, les Troyens à Carthage n’eurent que vingt et une représentations. Les recettes qu’ils produisaient ne répondant pas à ce qu’il en avait attendu, Carvalho consentit à résilier l’engagement de Mme Charton qui partit pour Madrid : et l’ouvrage, à mon grand soulagement, disparut de l’affiche. Cependant, comme les honoraires que je reçus, pendant ces vingt et une représentations, étaient considérables, étant l’auteur du poème et de la musique, et comme j’avais vendu la partition de piano à Paris et à Londres, je m’aperçus avec une joie inexprimable que le revenu de la somme totale égalerait à peu près le produit annuel de ma collaboration au Journal des Débats, et je donnai aussitôt ma démission de critique. Enfin, enfin, enfin, après trente ans d’esclavage, me voilà libre ! Je n’ai plus de feuilletons à écrire, plus de platitudes à justifier, plus de gens médiocres à louer, plus d’indignation à contenir, plus de mensonges, plus de comédies, plus de lâches complaisances, je suis libre ! Je puis ne pas mettre les pieds dans les théâtres lyriques, n’en plus parler, n’en plus entendre parler, et ne pas même rire de ce qu’on cuit dans ces gargotes musicales ! Gloria in excelsis Deo, et, in terra pax hominibus bonae voluntatis 7 !! C’est aux Troyens, au moins que le malheureux feuilletoniste a dû sa délivrance. […]
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« Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. »
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Le Cheval de Troie (allégorie anti-wagnérienne) (détail) Georges Tiret-Bognet, 1892 BnF, Bibliothèque-musée de l’Opéra Dessin à la plume et à l’aquarelle
Le Tannhäuser demandant à voir son petit frère Cham, 1863 Caricature parue dans le journal Charivari. Lithographie
Les Troyens et la Tétralogie de Henry Barraud Extrait de Hector Berlioz, Fayard, 1979
* Henry Barraud (1900-1997) est un compositeur et critique français, auteur de pièces de musique et d’opéras dont La Farce de maître Pathelin (1938), Lavinia (1958), Tête d’or (1980). Parmi ses écrits : La France et la Musique occidentale, NRFGallimard, 1956 et Pour comprendre la musique d’aujourd’hui, Le Seuil, 1968.
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es trois ouvrages que Berlioz a écrits pour la scène, Les Troyens sont seuls, par l’ampleur de leur conception et leur dessein ambitieux, à se prêter à un parallèle avec les grands chefsd’œuvre de maturité de Richard Wagner. Pourtant, on ne peut dire que l’ouvrage ait exercé sur le grand public la même fascination que ceux de son rival. Il serait vain ou tendancieux d’en rechercher la cause dans une hiérarchie de valeur. Le génie ne se mesure pas à l’aune. Et, sans aller aussi loin que Darius Milhaud qui aurait donné tout Wagner pour une page de Berlioz, il est raisonnable de se refuser à la controverse dans ce domaine et de constater que les deux musiciens sont de même stature, les différences entre eux étant d’ordre purement esthétique, voire éthique ou doctrinal. Sans doute le gigantisme de Berlioz ne s’est-il pas
haussé jusqu’à celui qui a lancé Wagner dans l’entreprise de la Tétralogie. Mais, à un degré moindre, Les Troyens procèdent déjà d’une démarche analogue. Et cela même pose le premier des problèmes qui n’ont jamais été parfaitement résolus et qui ont nui aux destinées de l’œuvre. Car La Tétralogie va jusqu’au bout de sa démesure. Elle aligne quatre drames lyriques qui ne peuvent être donnés que séparément ou en quatre soirées consécutives. Les Troyens en présentent deux, ce qui est peut-être trop pour un seul spectacle et pas tout à fait assez pour en faire deux. Deux drames juxtaposés, dont l’un est celui de tout un peuple assassiné par traîtrise, quand l’autre est celui de deux amants dont l’union est à la traverse de certains desseins d’origine surnaturelle et devra donc être détruite. Un seul personnage leur est commun: Énée, avec toutefois son fils Ascagne.
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Tous ceux qui, hors lui, ont paru dans le premier disparaissent du second; et si l’on veut considérer l’œuvre comme un tout, c’est évidemment là un élément contraire à son homogénéité. C’est pourquoi, et sans l’approuver pour autant, on peut comprendre la décision de Carvalho, directeur du Théâtre lyrique, qui, dès le début du travail de mise en scène, supprima purement et simplement La Prise de Troie et annonça l’œuvre sous le titre: Les Troyens à Carthage. C’était d’ailleurs une nécessité technique, car, avec la conception que l’on avait alors d’une représentation théâtrale, il y avait sur scène un tel encombrement de décors que certains changements demandaient près d’une heure. Même réduite aux seuls Troyens à Carthage, la soirée durait quatre heures et demie. […] De même qu’il a retrouvé à soixante ans ses premières amours, Berlioz, au soir de sa vie, est retourné aux sources les plus lointaines de sa culture et il s’est enflammé pour Virgile et son Énéide, comme pour l’Estelle des premiers émois de sa treizième année. Ainsi, aux deux pôles d’une production qui passe pour le type même, et, au fond, la seule vraie manifestation musicale de l’esprit romantique en France, apparaissent deux influences dominantes : celle de Shakespeare, celle de Virgile. Dualité assez significative et qui donne la clé de la personnalité créatrice de Berlioz: romantique à la surface, classique dans le fond. C’est, en moins consciente et en moins délibérée, la position de Goethe qui repousse et condamne le romantisme après en avoir été le promoteur..., et il n’est peut-être pas fortuit que Faust marque de sa présence le centre de l’œuvre du musicien français, comme de celle du poète allemand. En nommant Les Troyens son grand ouvrage lyrique, il semble que Berlioz ait indiqué son intention de faire d’un peuple malheureux son personnage principal. C’est une conception que les Russes lui ont reprise par la suite, dans la mesure où Moussorgski a bien précisé que le peuple russe était le personnage principal de Boris Godounov. Mais, de même que le tsar Boris s’affirme, dans le petit nombre de scènes où il lui est donné de paraître, comme une personnalité écrasante, Énée
finit, dans Berlioz, par tirer la pièce à lui, et la collectivité de ses compatriotes troyens s’estompe quelque peu derrière sa haute figure. […] On ne peut qu’admirer le sûr instinct théâtral avec lequel Berlioz a figuré sur la scène des événements dont le foisonnement dans le récit de Virgile lui imposait les choix les plus restrictifs. Sa fidélité au poète latin témoigne de la profonde connaissance qu’il avait de son œuvre et de sa capacité à s’élever au niveau de son lyrisme. On ne pourrait malheureusement en dire autant de son art de versifier. L’éblouissant écrivain qu’était Berlioz s’est obstiné toute sa vie à rédiger en vers fort plats des livrets qu’il aurait infiniment mieux réussis, les eût-il écrits en prose. Les vers des Troyens ne sont pas les plus mauvais qu’il ait sur la conscience. Mais il faudrait beaucoup prendre sur soi pour arriver à les trouver bons. L’essentiel, au demeurant, est qu’ils n’aient pas déteint sur la musique… Berlioz rencontre Wagner…. Wagner alla entendre Berlioz et le trouva mauvais chef d’orchestre. Berlioz alla entendre Wagner et le trouva mauvais chef d’orchestre. Rien que de très normal. On voit cela tous les jours. Mais un soir, à la veille du départ de Berlioz, le Français Sainton les réunit chez lui. Durant cinq heures d’horloge, les deux hommes confrontèrent leurs vues sur toutes choses et les trouvèrent concordantes. Chacun d’eux comprit combien l’autre avait souffert et que c’était pour les mêmes choses. Chacun d’eux reconnut dans l’autre ses propres réactions. Ils se quittèrent, unis comme deux frères. De cette vérité, deux lettres feront foi ; toutes deux adressées au même destinataire. « II est un profit réel que je rapporte d’Angleterre, écrit Wagner à Liszt, c’est la cordiale et franche amitié que je ressens pour Berlioz et que nous nous sommes déclarée mutuellement... Les progrès que j’ai faits en français à Londres m’ont permis de discuter avec lui pendant cinq heures tous les problèmes de l’art, de la philosophie et de la vie dans une conversation fascinante. De la sorte, j’ai conçu une profonde sympathie pour mon nouvel ami ; il m’est apparu tout à fait différent de ce que je pensais. Nous avons découvert que nous étions
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en réalité des compagnons de la souffrance, et j’ai pensé que, tout compte fait, j’étais plus heureux que Berlioz. » La lettre de Berlioz est ainsi conçue : « Il te racontera sans doute son séjour à Londres et tout ce qu’il a eu à souffrir d’une hostilité de parti pris. Il est superbe d’ardeur, de chaleur de cœur, et j’avoue que ses violences mêmes me transportent... II a quelque chose de singulièrement attractif, et, si nous avons des aspérités tous les deux, au moins nos aspérités s’emboîtent. » Mais c’était compter sans les amis, c’était compter sans la mégère que Berlioz s’était donné pour compagne. Le lendemain d’une seconde entrevue qui s’était terminée par des embrassades, Davison publiait dans le Musical World, avec une intention évidemment malveillante, la traduction des attaques de Wagner contre Berlioz dans Musique et drame. Berlioz y est présenté comme un « rejeton immédiat et énergique de Beethoven ». Mais « un chaos confus, multicolore, magique vint troubler sa vue. Il croyait voir des formes colorées et humaines quand, en réalité, c’étaient des fantômes qui hantaient son imagination. Ce vertige ensorcelé fut toute l’inspiration de Berlioz». Il faut noter toutefois que Wagner, dans la même étude, écrivait aussi : « La vérité est que l’orchestre de Berlioz est une merveille de mécanisme. Il a déployé, en mesurant dans tous les sens les possibilités de ce mécanisme, une science véritablement étonnante. Berlioz mérite d’être considéré comme le vrai rédempteur de notre monde musical. » Berlioz trouve l’article « amusant et spirituel », mais Marie, déchaînée, le crible de coups d’épingle. Jusqu’où va-t-il pousser la jobardise ? Est-ce qu’il ne voit pas qu’on se moque de lui ? De la magnanimité, son attitude ? Laissez-moi rire. De la lâcheté... Et le faible Berlioz de se replier sur lui-même. Quand Wagner l’invitera en septembre à venir le voir à Zurich, il déclinera avec gentillesse, mais en donnant d’assez pauvres prétextes : « La réunion que vous me proposez serait une fête ; mais je dois bien me garder d’y penser. Il faut que je fasse des voyages de désagrément pour gagner ma vie. Paris ne présentant pour moi que des fruits pleins de
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cendre. C’est égal, si nous vivions encore une centaine d’années, je crois que nous aurions raison de bien des choses et de bien des hommes. » II est intéressant de rapprocher cette dernière phrase de celle-ci, écrite de Londres à Morel : « Wagner... succombe sous les attaques de toute la presse anglaise. Mais il reste calme, dit-on, assuré qu’il est d’être le maître du monde musical dans cinquante ans.» […] La presse parisienne publie des articles enthousiastes qui mettent Les Troyens au premier plan de l’actualité. Mais c’est l’heure de Wagner qui approche, et non celle de Berlioz. Liszt, ayant quitté son poste à Weimar, adonné au service de La Tétralogie, n’est pas venu à Baden. A Paris, l’ambassadrice d’Autriche, Mme de Metternich, fait le siège de l’empereur pour obtenir la création de Tannhäuser à l’Opéra, et si Carvalho, le grand directeur qui préside aux destinées du Théâtre lyrique, s’adresse à Berlioz, c’est pour lui demander de rendre à sa pureté première la partition, massacrée par les adaptateurs, de l’Orphée de Gluck et de diriger les répétitions de l’ouvrage. Travail auquel le musicien se donne avec passion, mettant lui-même en scène, indiquant le style, les mouvements, les attitudes, menant enfin l’ouvrage à un triomphe qui fera la fortune de Carvalho. […] En janvier 1860 Wagner arrivait à Paris, puissamment protégé et financièrement armé pour entreprendre un assaut décisif. L’élite du public parisien n’ignorait rien de sa renommée croissante et il y eut un grand mouvement de curiosité autour des trois concerts symphoniques annoncés sous sa direction. Quelques jours avant le premier d’entre eux, Wagner envoya à Berlioz la partition de Tristan avec ce mot : « Cher Berlioz, je suis ravi de vous pouvoir offrir le premier exemplaire de mon Tristan. Acceptez-le et gardez-le d’amitié pour moi. » La dédicace, rapprochant à dessein deux partitions symétriquement placées dans l’œuvre des deux musiciens était un hommage de « l’auteur reconnaissant de Tristan et Isolde au cher grand auteur de Roméo et Juliette. » Le 25 janvier 1860, tout Paris était présent au Théâtre italien. Le premier concert de Wagner fut ce
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qu’on pouvait en attendre. Il déchaina les passions dans les deux sens, comme devaient faire Pelléas, ou le Sacre du printemps. Nous sommes payés pour savoir que ces soirées de bataille sont l’annonce la plus sûre d’un durable triomphe. À l’entracte, dans les couloirs houleux, parmi des combattants prêts à en venir aux mains. Berlioz, rendu presque aphone par une laryngite, demeurait méditatif, cependant que son imbécile compagne clamait à tous les échos : « Quel triomphe pour Hector ! » Hector n’était certainement pas de cet avis, mais il avait dès longtemps renoncé à modérer l’incontinence verbale de Marie. Certes, il n’aimait pas cette musique, mais il ne pouvait s’empêcher d’en admirer certains aspects. Il le dit très clairement et sans mesurer ses termes dans une lettre à son ami Morel. Il l’écrivit le 9 février dans les Débats d’une façon nuancée, en forçant sur les éloges, de telle manière que nul lecteur objectif ne peut avoir lu dans cet article autre chose qu’un hommage éclatant, assorti de réserves qui lui donnent d’autant plus de valeur. À un seul ouvrage, Berlioz se montre nettement hostile, c’est l’ouverture de Tristan et Isolde. Nous étudierons plus tard cette réaction pour monter qu’elle était inévitable. Quelques réserves aussi sur l’ouverture du Vaisseau Fantôme. Celle de Lohengrin est un chef-d’œuvre et il dit pourquoi : enchaînements harmoniques mélodieux, merveille d’instrumentation, etc, – et « l’éclat de la pompe superbe » de la scène de Tannhäuser en font « une page magistrale instrumentée, comme tout le reste par une main habile ». On trouve encore dans l’article des expressions telles que « rare intensité de sentiment..., ardeur intérieure..., puissance de la volonté, foi qui subjuguent, émeuvent et entraînent ». Qui osera soutenir, comme on l’a fait, que c’est là un éreintement, même s’il ajoute que « ces qualités auraient plus d’éclat si elles étaient unies à plus d’invention, à moins de recherche et à une plus juste appréciation de certains éléments constitutifs de l’art » ? Et l’article se terminait par une prise de position à l’égard de la « musique de l’avenir », vocable sous lequel, un peu partout en Europe, on
avait pris l’habitude de présenter les idées esthétiques de Wagner et de son école. En fait, il n’y avait là qu’une locution, une locution qui n’avait pas de sens par elle-même et qui n’en aurait revêtu que dans la mesure où une doctrine claire et cohérente l’aurait prise comme en-tête. Or, cette doctrine, on l’ignorait à Paris, et Berlioz ne l’ignorait pas au fond, beaucoup moins que ses compatriotes, malgré ses contacts avec Wagner. C’est pourquoi la fin de son article prend une forme quelque peu équivoque. Si la « musique de l’avenir » est telle chose et telle chose, j’en suis. Si elle est telle autre chose, je n’en suis pas. Mais ce qu’il place dans l’une et l’autre catégorie ne correspond que très imparfaitement à la position de Wagner par rapport à la sienne. On s’est appuyé là-dessus pour accuser Berlioz d’avoir voulu discréditer son adversaire en l’accusant sans l’accuser de tous les péchés d’Israël. La vérité est certainement tout autre. Il semble plutôt que, sans connaître de façon précise les doctrines musicales de Wagner, Berlioz ait discerné en germe, dans ce qu’il venait d’entendre, un certain nombre de virtualités auxquelles il ne pouvait se rallier, en son âme et conscience. C’est là ce que semblent n’avoir pas vu les commentateurs de la polémique Berlioz-Wagner. Le credo de Berlioz… Négligeons la première partie de la profession de foi de Berlioz. Ce à quoi il donne son adhésion, c’est évidemment tout ce qui dans la notion « musique de l’avenir » peut être appliqué à la sienne. Mais abordons la seconde partie : « Si elle vient nous dire... » Et cela introduit une longue énumération des points qu’il suppose être la doctrine de l’école en question et sur lesquels il se sépare de cette « religion nouvelle » en « levant la main et jurant : Non credo ». Premier point : « ... On est las des airs, des duos, des trios, on est rassasié des harmonies consonantes, des dissonances simples, préparées et résolues, des modulations naturelles et ménagées avec art. » Cela définit en grande partie le style de Wagner et totalement celui de ses successeurs, qu’ils aient cru pouvoir tirer de son esthétique, après y avoir
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étroitement adhéré, des conséquences lointaines plus ou moins légitimes (Schonberg, Alban Berg) ou qu’ils aient réagi contre elle, ce qui est une autre manière d’accuser son influence. (Debussy et l’école française, puis l’école russe.) Deuxième point : « Il ne faut tenir compte que de l’idée, ne pas faire le moindre cas de la sensation. » L’école dodécaphonique, tenue à tort ou à raison pour l’héritière la plus directe du wagnérisme dans l’époque actuelle, va au-delà de ce principe, puisqu’elle sacrifie même l’idée à des combinaisons abstraites d’intervalles, sans pour autant bannir la sensation. Troisième point : « Brutaliser, dompter l’oreille..., la musique n’a pas pour objet de lui être agréable. » Si ce principe n’est pas dans la musique même de Wagner, on pourrait penser qu’il y est peut-être en puissance, et la musique du XXème siècle en est l’illustration. Cela dit, reste à se demander si tels passages du Sabbat de la Fantastique ne brutalisent pas l’oreille au moins autant que La Chevauchée des Walkyries. Quatrième point : « Il ne faut accorder aucune estime à l’art du chant. » C’est en effet avec Wagner que la musique a commencé à violenter les voix en exigeant d’elles des performances athlétiques qui touchent au domaine de la haute compétition sportive, tendance qui s’est accusée par la suite et contre laquelle une partie de la musique contemporaine commence à réagir. Cinquième point : « ... Se borner à noter la déclamation, dût-on employer les intervalles les plus inchantables... » Les neuf dixièmes des drames lyriques modernes obéissent à cette directive et l’usage des intervalles les plus « inchantables » est constant dans la musique de Schonberg et de son école. Sixième point : « Ne jamais s’inquiéter des possibilités de l’exécution. » Presque tous les compositeurs depuis Wagner ont vécu dans la confiance que les progrès, dans la technique des instruments, autorisaient toutes les audaces. Les septième et huitième points sont des outrances qui ne valent pas d’être relevées. Mais, dans l’ensemble, il apparaît que Berlioz a parfaitement décelé vers quoi le génie de Wagner menait
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la musique. Nous ne disons pas qu’il ait eu raison de vouloir marquer un coup d’arrêt, mais ce que nous affirmons, c’est qu’il l’a fait en connaissance de cause, en loyal adversaire d’une tendance à laquelle il ne pouvait souscrire, mais sur laquelle il était tout à fait clairvoyant. Nul doute que Wagner n’ait senti que l’attaque allait au cœur même de la question. Si donc il crut devoir répondre à Berlioz dans le même journal, ce n’est probablement pas qu’il ait eu le souci de rétablir une vérité méconnue, mais peut-être simplement parce que cela lui donnait l’occasion de préciser sa position de principe, non sur la musique, mais sur les rapports du théâtre et de la musique. En fait, il ne répondit dans sa réplique à aucun des points abordés par Berlioz : « L’article du Journal des débats... me fournit l’occasion... de vous donner quelques explications sommaires sur ce que vous appelez la musique de l’avenir et dont vous avez cru devoir entretenir sérieusement vos lecteurs... Apprenez donc, mon cher Berlioz, que l’inventeur de la Musique de l’avenir, ce n’est pas moi, mais bien M. Bischoff, professeur à Cologne. L’occasion qui donna le jour à cette creuse expression fut la publication faite par moi, il y a une dizaine d’années, d’un livre sous ce titre : L’Œuvre d’art de l’avenir. » Suivent des considérations sur le fait, reconnu par Berlioz comme par lui, que les théâtres « sont, dans leurs rapports avec le public, guidés par des tendances diamétralement opposées au but que se proposent l’art pur et le véritable artiste ». Ce qui le mène à chercher « dans la Grèce antique son point de départ» pour en arriver à inspirer au public un « inviolable respect » envers une véritable œuvre d’art, et à constater que c’est « par l’alliance de tous les arts concourant ensemble au même but» que les Grecs obtenaient ce résultat. Ces réflexions l’ont conduit à une étude des rapports de la plastique et de la mimique, puis de la musique et de la poésie, étude dont il a consigné les conclusions dans son livre : L’Œuvre d’art de l’avenir : « Jugez d’après cela ce que j’ai dû éprouver au bout de dix ans, en voyant... qu’un homme sérieux, un artiste éminent, un critique intelligent, instruit et honnête tel que vous, plus que cela, un ami, avait
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HENRY BARRAUD LES TROYENS ET LA TÉTRALOGIE
pu se méprendre sur la portée de mes idées à tel point qu’il n’a pas craint d’envelopper mon œuvre dans cette ridicule papillote : musique de l’avenir. » Et de protester que son livre « ne contient aucune des absurdités qu’on me prête et que je n’ai traité en aucune façon de la question grammaticale de la musique. Ma pensée va un peu plus loin : et, d’ailleurs, n’étant pas théoricien de ma nature, je devais abandonner à d’autres le soin d’agiter le sujet, ainsi que la question puérile de savoir s’il est permis ou non de faire du néologisme en matière d’harmonie ou de mélodie ». En somme, ce dialogue entre deux grands musiciens est un dialogue de sourds. Ils mettent en commun dans leurs propos le mot avenir et chacun parle de ce qui le préoccupe et qui n’a rien à voir avec ce qui préoccupe l’autre. Sur le plan humain, pourtant, le contact pourrait à tout moment se rétablir, mais il faudrait encore pouvoir le maintenir à l’abri des tiers, dans cet isolement à deux qu’un hasard heureux aura permis, une seule fois, à Londres. Wagner n’est plus seul. Sa gloire montante met autour de lui une aura, une zone d’attraction qui, pour un homme comme Berlioz, chargé d’une électricité de même signe, est une zone de répulsion. Et puis, les propos de Marie ont circulé dans Paris. Wagner n’a pas manqué d’en recueillir des échos. Pourtant, il fera encore un geste vers Berlioz. Ayant lu un article de lui sur Fidelio, il lui écrit pour l’en « remercier » dans un français macaronique : « C’est une joie toute spéciale pour moi d’entendre ces accents purs et nobles de l’expression d’une âme d’une intelligence où parfaitement comprenant et s’appropriant les secrets les plus intimes d’un autre héros de l’art. » Berlioz lui répondra une lettre affectueuse et très désenchantée : « ...Vous êtes au moins plein d’ardeur, prêt à la lutte ; je ne suis, moi, prêt qu’à dormir et à mourir. Pourtant, une espèce de joie fébrile m’agite encore un peu, si, quand je crie d’amour pour le beau, une voix me répond au loin et me fait entendre au travers des rumeurs vulgaires, son salut approbateur et amical. Merci donc pour votre lettre ; elle m’a fait du bien... Adieu, bonjour, courage, et ne
me dites plus : Cher Maître. Cela m’agace. » Dans le même temps, Wagner écrivait à Liszt : « Berlioz m’avait fourni, une fois de plus, l’occasion d’observer, avec la précision d’un anatomiste, comment une méchante femme peut ruiner à plaisir un homme tout à fait hors de pair, et le faire déchoir jusqu’à le rendre ridicule... Lui aussi est tendre et profondément sensible au point que le monde ne peut que le blesser et abuser de son irritation maladive pour l’entraîner, avec le concours des influences qui l’entourent, dans de prodigieux égarements, et pour lui devenir tellement étranger que, sans le savoir, il se frappe lui-même. Mais j’ai reconnu précisément, à force de creuser cet étrange phénomène, que l’homme richement doué ne peut trouver que dans un homme supérieur un ami qui le comprenne, et je suis arrivé à cette conclusion qu’aujourd’hui nous formons une triade exclusive de tout autre élément, parce que nous sommes tous trois pareils; cette triade se compose de toi, de lui et de moi. Mais il faut bien se garder de le lui dire : il se cache dès qu’on lui en parle. Un dieu qui souffre si cruellement n’est qu’un pauvre diable. » Cette lettre capitale nous semble faire parfaitement le point des relations entre Berlioz et Wagner. Les rôles sont désormais renversés. Le Wagner méconnu et rétracté de jadis n’est plus, mais c’est aujourd’hui Berlioz qui s’éloigne. Il n’en reste pas moins que les deux hommes, à un moment donné, se sont vraiment ouverts l’un à l’autre, se sont compris en profondeur. Ce serait faire beaucoup d’honneur à Marie Recio que de la rendre seule responsable de ce qu’une amitié, qui aurait pu être si féconde, n’eût vécu qu’un soir. De toute manière, leurs conceptions musicales étaient trop opposées pour que Berlioz et Wagner pussent faire cause commune. Mais on ne saurait s’empêcher de rêver à tout ce qui aurait été changé dans la vie de Berlioz s’il avait eu la main moins malheureuse dans le choix de ses femmes..., s’il avait trouvé, pour l’installer à son foyer, un ange de bonté, de clairvoyance, comme sa pauvre sœur Adèle…
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Ô ma noble Cassandre Extrait de Pierre de Ronsard Œuvres complètes, Tome I, Bibliothèque de la Pléiade, n° 46 Édition de Jean Céard, Daniel Ménager et Michel Simonin Le 21 avril 1545, alors qu’il est déjà clerc tonsuré, Pierre de Ronsard (1524-1585) rencontre Cassandre Salviati (1530-1607), fille de Bernardo Salviati, un des banquiers de François Ier. Une année plus tard, Cassandre épouse Jean Peigné, seigneur de Pray. Comme l’avaient fait Dante et Pétrarque avant lui, Ronsard fera naître de cet amour platonique une pléïade de poésies – odes et sonnets dont un premier recueil, Les Amours de Cassandre, paraît en 1552.
Ode à Cassandre, Le Premier Livre des Odes, XVII Mignonne, allons voir si la rose Qui ce matin avoit desclose Sa robe de pourpre au Soleil, À point perdu ceste vesprée Les plis de sa robe pourprée, Et son teint au vostre pareil. [. . .] LXXIX À ton frere Paris tu sembles en beauté, À ta sœur Polyxene en chaste conscience, À ton frere Helenin en prophete science, À ton parjure ayeul en peu de loyauté, À ton pere Priam en brave royauté, Au vieillard Antenor en mieleuse eloquence, À ta tante Antigone en superbe arrogance, À ton grand frere Hector en fiere cruauté. Neptune n’assit onc une pierre si dure Dedans le mur Troyen, que toy pour qui j’endure Un million de mors ; ny Ulysse veinqueur N’emplit tant Ilion de feux, de cris et d’armes, De soupirs et de pleurs, que tu combles mon cœur, Sans l’avoir merité, de sanglos et de larmes. Pièce retranchée du Premier Livre des Amours en 1578
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La Maison de Troie
ZEUS ?
HÉCUBE
ANDROMAQUE
HECTOR
HÉLÉNUS
PÂRIS 1
ILOS
ASSARACOS
PRIAM
ANCHISE
CASSANDRE
CRÉUSE
ASTAYANAX
APHRODITE
ÉNÉE
ASCAGNE
La famille d’Hélène
ARÈS
ÉOLE
ZEUS (CYGNE)
LÉDA
TYNDARE
HÉLÈNE 1
POLLUX
CLYTEMNESTRE
MÉNÉLAS
CASTOR
HERMIONE
La famille de Didon ?
BELOS
PYGMALION
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ANNA
SYCHÉE
DIDON
Pâris va enlever Hélène et déclencher la Guerre de Troie
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Les aventures d’Énée...
[À DROITE, EN BAS]
L’adieu d’Énée à Didon (détail) Guido Reni, 1630 Musée des Beaux-Arts, Béziers Huile sur toile
[CI-DESSOUS]
Énée portant Anchise (détail) Le Bernin, 1618 Villa Borghèse, Rome, Italie Sculpture en marbre
Extrait de L’Énéide de Virgile, livre X Traduction d’Anne-Marie Boxus et Jacques Poucet De son épée, Énée fauche tout au passage et, dans son ardeur, se fraie un chemin à travers les rangs serrés te cherchant, arme en main, Turnus, toi si fier de ton dernier massacre. Pallas, Évandre, tout reparaît à ses yeux : la table qu’il approcha d’abord en étranger, l’alliance scellée par une poignée de mains. Il saisit tout vivants les quatre fils de Sulmon, quatre jeunes gens éduqués par Ufens, pour les immoler aux ombres, à titre de victimes infernales, pour en recueillir le sang et en arroser les flammes du bûcher. Ensuite, il lança de loin contre Magus une pique mortelle. Mais celui-ci, adroit, se baisse, et laisse le trait vibrant le survoler ; 520 étreignant alors les genoux d’Énée, Magus le supplie en ces termes : « Par les mânes de ton père, par l’espoir que te donne le jeune Iule, je t’en prie, épargne ma vie, pour mon fils comme pour mon père. Je possède une haute demeure où sont profondément enfouis, des talents d’argent ciselé, j’ai des tas d’or travaillé et brut. La victoire des Teucères ne se joue pas ici, et la vie d’un seul homme ne fera pas une si grande différence ». Il s’était tu. Face à lui, Énée rétorqua ainsi : « Ces quantités de talents d’or et d’argent, dont tu parles, garde-les pour tes enfants. Par la mort de Pallas,Turnus 530 avant moi a rendu impossibles ces marchandages de guerre. Voilà l’avis des mânes d’Anchise, mon père, voilà celui de Iule ». il tient en arrière son cou et y enfonce son épée jusqu’à la garde.
Carte du Voyage d’Énée, tiré de Virgile (Tracé redessiné) Nicolas de Fer, 1705 Collection privée Gravure
© DR
Alors vraiment Énée resta sans voix, égaré à cette vision ; d’effroi ses cheveux se dressèrent et sa voix s’étrangla dans sa gorge. Il brûle de s’en aller, de fuir et de quitter ce séjour de douceur, atterré par un avertissement si impérieux des dieux. Hélas, que faire ? En quels termes oserait-il affronter la folie furieuse de la reine ? Quelle entrée en matière choisir ? Son esprit rapide, emporté ici, puis là, est tiraillé entre divers partis, qu’il tourne et retourne en tous sens. Hésitant, une décision lui sembla l’emporter : il convoque Mnesthée, Sergeste, et le vaillant Séreste, qu’en secret, ils équipent la flotte et réunissent leurs compagnons sur le rivage, 290 qu’ils préparent les armes et cachent la raison de ce changement. Lui, entre-temps, puisque l’excellente Didon ignore tout et ne s’attend pas à la rupture d’un amour si fort, tentera de l’approcher au moment le plus approprié, avec l’adresse requise en la circonstance. Tous avec joie s’empressent d’obéir et d’exécuter les ordres donnés. 279
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© UTE BRUNZEL / BRIDGEMAN IMAGES
Extrait de L’Énéide de Virgile, livre IV Traduction d’Anne-Marie Boxus et Jacques Poucet
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La passion de Didon... Extrait de L’Énéide de Virgile, livre IV traduction Barthélemy, Paris : H. Fournier, 1836. Didon, blessée au cœur par de cuisantes peines, Nourrit un feu couvert qui consume ses veines. Les exploits, les récits du héros étranger, L’éclat de ses aïeux tout la vient assiéger, Son image est gravée au fond de sa poitrine, Et le sommeil fui sa paupière chagrine. L’astre du jour chassait l’ombre humide des nuits, Quand, l’esprit égaré par ses fiévreux ennuis, Didon parle en ces mots à sa sœur bien-aimée : « Chère Anna ! dans quel trouble, hélas, suis-je abîmée ! 10 Quelle affreuse insomnie a pesé sur mes yeux ? Quel est ce nouvel hôte introduit dans ces lieux ? Quel port majestueux! que de force et d’audace ! Sans doute il est sorti d’une immortelle race; Oui certe ! et ce n’est point un indice trompeur, Un cœur dégénéré se trahit par la peur. Quels destins agités remplissent son histoire ! Que de rudes combats traversés avec gloire ! Si je n’avais juré que mon deuil éternel Fuirait un autre hymen comme un nœud criminel, 20 Que son flambeau pour moi ne devait plus renaître, Cette fois seulement j’eusse failli, peut-être; Car je l’avoue, Anna, depuis que mon époux Reçut aux pieds des dieux de fratricides coups, Cet étranger lui seul fit chanceler mon âme; J’éprouve un souvenir de ma première flamme. Mais que plutôt sous moi la terre ouvre ses flancs, Que le maître des dieux sous ses foudres brûlans Me plonge dans la nuit de l’infernale enceinte Si jamais, ô pudeur! je trahis ta loi sainte. 30 Celui que j’ai perdu, le premier que j’aimais Emporta mes amours; qu’il les garde à jamais, Qu’il les garde avec lui sous la funèbre pierre. » Elle dit : et des pleurs inondent sa paupière. [. . .] 1
Cependant sous les cieux passent de sourds murmures ; Bientôt la nue, ouvrant ses profondeurs obscures, Verse par flots mêlés la pluie et les grêlons, Et des fleuves nouveaux tombent dans les vallons. Iule, les Troyens, les enfans de Carthage, Se dispersent au loin, poursuivis par l’orage. Sous une sombre voûte au plus épais des bois 200 Didon et le Troyen arrivent à la fois : Alors Junon, qui veille au conjugal mystère, 193
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Répondit au signal que lui donna la terre, Les nuages du ciel ouvrirent leurs lambeaux, L’éther illuminé leur prêta ses flambeaux, Les nymphes, en hurlant, troublèrent la colline. Des malheurs de Didon telle fut l’origine; Gloire, vertu, pudeur, tout périt en ce jour; Elle ne songe plus à voiler son amour, Et sa faute en son cœur prend le nom d’hyménée. [. . .] Mais la reine (ah ! qui peut tromper l’œil d’une amante?),] Elle, qui sans danger se trouble et se tourmente, A pressenti le but de ces mouvemens sourds ; Bien plus, la Renommée aux perfides discours Arrive à son oreille, et l’a bientôt instruite Qu’Énée arme sa flotte et qu’il songe à la fuite. Délirante d’amour, ivre de désespoir, Elle court dans Carthage, elle erre pour le voir : Telle, l’oeil flamboyant et la lèvre rougie, Quand s’ouvre dans la nuit la triennale orgie, La Bacchante brandit le thyrse forcené Précipite au hasard son pas désordonné, Et remplit de clameurs les montagnes thébaines. [. . .]
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L’aurore s’élançant de sa couche divine, Etendait sur les monts son aube purpurine; Mais Didon, qui veillait au sommet d’une tour, Aperçoit la première, à la blancheur du jour, La flotte des Troyens qui fuit à voile ouverte Le port sans matelots et la plage déserte. Trois fois, à cet aspect qui détruit tous ses vœux, Elle meurtrit son sein, arrache ses cheveux : « O Jupiter ! dit-elle, il fuirait ce rivage, Il fuirait, le parjure, en riant de Carthage, Et Carthage en fureur, mes sujets, mes soldats, Sur leurs mille vaisseaux ne le poursuivraient pas ! Oh ! courez, courez vite, armez vos mains de flammes, Livrez la voile aux vents, précipitez vos rames.... Où suis-je ? qu’ai-je dit ? quel aveugle transport ! Te voilà, malheureuse, à recueillir ton sort ; Tu rougis maintenant d’avoir connu le traître; Que ne rougissais-tu quand tu le fis ton maître ! » [. . . ]
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Seule enfin, tout entière à son affreux transport, Blême de la pâleur qui précède la mort, La lèvre convulsive et la face marbrée, Roulant des yeux sanglans, Didon, désespérée, Au fond de son palais précipite ses pas, 800 S’élance au noir bûcher dressé pour son trépas, Et tire du fourreau ce fer, ce noble gage, Ce don qu’elle reçut pour un meilleur usage. En voyant sous ses yeux ces tristes vêtemens, Et ce lit trop connu témoin de leurs sermens, Elle médite et pleure, et tombant sur la couche, Ces mots, ces derniers mots s’échappent de sa bouche : « Souvenirs de bonheur, gages chers à mes yeux, Tant que me l’ont permis les destins et les Dieux, Prenez, prenez ma vie, une vie importune. 810 J’ai fourni ma carrière au gré de la fortune, J’ai vécu, c’est assez : maintenant, sans remords, Mon âme avec orgueil descendra chez les morts ; J’ai fondé de mes mains au moment où j’expire, Une ville et des murs berceau d’un grand empire, Et j’emporte avec moi le souvenir bien doux D’avoir puni mon frère en vengeant mon époux ; Heureuse ! Ah ! trop heureuse en mon triste veuvage, Si jamais un Troyen n’eût touché ce rivage ! » Alors sur cette couche où va luire le feu, 820 Attachant un baiser comme un funèbre adieu : « Quoi ! Mourir sans vengeance ! Oh ! Oui, mourons, dit-elle,] Entrons le front serein dans la nuit éternelle; Que du milieu des mers le parjure en fuyant Emporte de ma mort le présage effrayant, Que de ses yeux cruels il aspire ces flammes. » [. . .] 795
[...] [S]a sœur accourt inanimée, Appelant par son nom sa Didon bien-aimée, Se meurtrissant la face et se frappant le sein : « Ainsi donc, ô ma sœur! tu cachais ton dessein! Ainsi, pour déguiser cet affreux sacrifice, Autels, flammes, bûcher, ce n’était qu’artifice ! Quoi ! Tu me laisses seule, et tu ne daignes pas Me choisir pour compagne à l’heure du trépas ! J’aurais subi ton sort; l’une et l’autre frappée, Eût péri d’un seul coup et de la même épée. Malheureuse ! et c’est moi qui suppliai nos Dieux, C’est moi qui préparai ce bûcher odieux, Et toi seule, cruelle, y devais prendre place! Ah! tu perds avec toi, moi, ton peuple, ta race, Ta ville, ton sénat, ton empire naissant ! Versez l’onde, versez, je laverai le sang ; Laissez-moi recueillir, sur cette horrible couche, Ce qui reste de souffle à sa mourante bouche. » Sur le bûcher fatal, en achevant ces mots, Elle embrassait Didon avec de longs sanglots, La réchauffait contre elle, et d’une main peu sûre, Avec ses vêtemens étanchait sa blessure. Didon rouvre les yeux et les ferme soudain ; Le sang qui sort à flots, murmure dans son sein. Trois fois, avec effort, sur son bras redressée, Sur sa couche trois fois elle tombe affaissée, Et de ses yeux errans, que la douleur ternit, Elle cherche le jour, le retrouve, et gémit.
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Didon écrit à Énée... Extrait des Héroïdes d’Ovide, lettre VII Traduction : Danièle Robert, in Ovide : Lettres d’amour, lettres d’exil, Actes Sud, 2006 Reçois, descendant de Dardanus, le poème d’Élissa1 moribonde: Ces mots que tu lis sont les derniers que tu liras de moi. C’est ainsi qu’à l’appel du destin chante aux eaux du Méandre Le cygne blanc qui s’écroule dans l’herbe mouillée. Et je ne parle pas avec l’espoir que mes prières parviennent À t’émouvoir (je remue tout cela contre la volonté divine) Mais puisque j’ai perdu, hélas ! ma réputation, ma retenue Physique et morale, perdre des mots est sans importance.
Accipe, Dardanide, morituræ carmen Elissæ : Quæ legis, a nobis ultima verba legis. Sic ubi fata vocant, udis abjectus in herbis Ad vada Mæandri concinit albus olor.
Tu as malgré tout décidé de partir, de laisser Didon malheureuse, Et ta foi, tout comme tes voiles, va être emportée par le vent. Tu as décidé, Énée, d’appareiller et de te dégager de ta promesse, À la poursuite d’un royaume d’Italie dont tu ignores où il est. Tu ne te préoccupes ni de la naissante Carthage ni de ses remparts Qui s’élèvent ni du pouvoir suprême qui t’a été offert. Tu fuis ce qui est fait pour aller vers ce qui est à faire ; en quête D’une autre terre dans le monde quand tu as déjà cherché ! Si tu la trouves, cette terre, qui t’en assurera la possession ? Qui donnera à des inconnus ses champs à cultiver ? Est-ce qu’un autre amour t’y attend ? Auras-tu une autre Didon ? Lui feras-tu d’autres promesses que tu trahiras de nouveau ? Quand donc fonderas-tu une ville analogue à Carthage Et regarderas-tu, du haut de sa citadelle, tes sujets ? Si tout cela se réalise sans que les dieux s’opposent à tes désirs, D’où te viendra une épouse qui t’aime comme moi ? […] Peut-être abandonnes-tu une Didon enceinte, scélérat, Et mon corps enferme t-il une part de toi, bien cachée. Un pitoyable enfant connaîtra le sort de sa mère Et, avant d’être né, il mourra par ta faute : Le frère d’Iule périra en même temps que sa mère Et, liés l’un à l’autre, ils seront emportés dans un même châtiment. « Mais un dieu m’ordonne de partir ! » Je voudrais qu’il t’eût défendu De venir, et que le sol punique n’eût pas été foulé par des Troyens. C’est sous la conduite, n’est-ce pas, de ce dieu que tu es malmené Par des vents hostiles et que tu passes longtemps sur la mer en furie ! […] 1
Elissa est le nom tyrien de la reine de Carthage, Didon. Dardanus, quant à lui, était le fondateur de Troie.
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Énée racontant à Didon les malheurs de la ville de Troie (image retouchée) Baron Pierre-Narcisse Guérin, 1815 Musée du Louvre, Paris Huile sur toile
© BRIDGEMAN IMAGES
Quel grief me fais-tu sinon d’être amoureuse ? Je ne tire mon origine ni de Phthie ni de la grande Mycènes Et ni mon mari ni mon père ne se sont dressés contre toi. Si l’épouse te fait honte, je ne me dirai point ta femme mais ton hôtesse : Pourvu qu’elle t’appartienne, Didon acceptera d’être n’importe quoi. Je connais bien les flots qui frappent la côte africaine : Ils permettent ou empêchent de partir à des moments précis. Quand la brise te permettra de partir, tu offriras au vent tes voiles ; Pour l’instant, des algues légères retiennent le navire à quai. Laisse-moi surveiller le temps ; tu partiras plus tard et moi-même Je ne permettrai pas que tu restes, même si tu le veux. Tes compagnons ont besoin de repos, ta flotte endommagée, À demi réparée, nécessite un certain délai. Pour ce service et ceux que je devrai te rendre plus tard, À cause de cet espoir d’union, je te demande un peu de temps Jusqu’à ce que se calment la mer et mon amour, qu’avec le temps Et l’habitude j’apprenne à supporter vaillamment mon chagrin. Sinon, je suis bien décidée à renoncer à vivre : Tu ne peux être cruel envers moi plus longtemps. Si tu pouvais avoir la vision de celle qui t’écrit ! J’écris avec, sur la poitrine, une épée troyenne, Les larmes coulent sur mes joues jusqu’à l’épée que je serre Et qui sera sous peu, à la place des larmes, baignée de sang. Comme ton cadeau convient bien à mon destin ! Tu prépares à peu de frais ma pierre tombale Et mon cœur n’est pas frappé ici pour la première fois : Il est le lieu d’une blessure du cruel Amour. Anne ma sœur, ma sœur Anne, complice de ma faute, Tu donneras bientôt à mes cendres les derniers honneurs Et je ne serai pas incinérée en tant qu’Élissa, épouse de Sychée Mais sur le marbre du tombeau il y aura ces vers : “Énée lui a fourni le motif de sa mort et le glaive ; C’est de sa propre main que Didon est tombée.” Præbuit Æneas et causam mortis et ensem ; Ipsa sua Dido concidit usa manu.
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© THE DE MORGAN FOUNDATION / BRIDGEMAN IMAGES
Cassandre (détail) Evelyn de Morgan, 1898 The De Morgan Foundation, Compton, Royaume-Uni Huile sur toile
« La création est dans l’esprit prophétique » N. BERDIAEV
Cassandre, la loi et l’oracle d’Anne Dufourmantelle * Extrait de La vocation prophétique de la philosophie. Cerf, Collection La Nuit surveillée, 1998
L
’examen des origines du prophétisme, dans la civilisation hébraïque d’une part et grecque de l’autre, m’a conduit à isoler deux grandes figures symboliques : Jonas et Cassandre. La première appartient à la Bible, la seconde à la tragédie grecque, mais toutes deux cependant nourrissent notre mémoire, notre culture et notre perception du destin. Toutes deux également font signe vers la modernité au sein de laquelle elles ont gardé une présence mythique. [...] Il existe de très nombreuses approches du prophétisme selon les époques et à l’intérieur d’une même tradition. Pourquoi alors isoler une seule de ces figures ? Le récit de Jonas, dans le corpus biblique, nous intéresse particulièrement parce qu’il porte témoignage d’une prophétie inaccomplie, alors qu’il reste en droit l’un des plus grands textes prophétiques d’Israël et de la chrétienté (le messie étant, selon le prophète Élie, marqué du « signe de Jonas »). Nous avons choisi la voix de Cassandre pour faire écho à celle de Jonas, parce qu’elle découvre le rapport au temps et au divin du fatalisme tragique. Notre mémoire s’est nourrie du mythe de Cassandre pour comprendre la signification du
prophétisme comme prédiction, signification dont nous découvrirons la face cachée dans la mise en regard de ces deux figures emblématiques.
*Anne
Le monde grec et la prophétie Philosophie et mantique. Dans La Naissance de la tragédie, Nietzsche a montré le paradoxe d’une civilisation qui célébrait tout à la fois le rationalisme des sophistes, leur maîtrise dans l’art d’argumenter, leur déni de l’invisible, et les expériences religieuses, dionysiaques, qui faisaient place aux pulsions irrationnelles débouchant dans l’union intime avec le divin. Ces approches de la connaissance ne s’opposent qu’en apparence, traduisant la nature duelle de l’homme. Celui qui fait l’expérience de la voyance voit « double » comme un homme ivre. « Il est écartelé entre deux façons de voir, écrit Jean-Pierre Vernant, entre sa lucidité « ancienne » désormais troublée et la voyance dionysiaque qui lui demeure inaccessible1. » Cet écartèlement symbolise la situation native de l’être qui se met en chemin vers la
Elle a publié de
1
Dufourmantelle est philosophe et psychanaliste. nombreux essais, entre autres, De l’hospitalité, avec Jacques Derrida, et les ouvrages En cas d’amour : Psychopathologie de la vie amoureuse (Payot, 2012), L’Éloge du risque (2011), Puissance de la douceur (2013), Défense du Secret (2015), ainsi que le roman L’envers du feu (2015).
J.-P. Vernant, Figures, Idoles, Masques, Paris, Julliard, 1990, p. 231.
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CASSANDRE, LA LOI ET L’ORACLE ANNE DUFOURMANTELLE
Dans le monde grec, la voix prophétique trouve son expression la plus haute dans le théâtre, la tragédie. C’est l’œuvre du poète qui donne voix à cette vocation, à ce franchissement du dicible vers l’indicible. Dans la Grèce antique, la langue ne contient aucun mot qui corresponde à notre terme « volonté », le problème grec est celui de l’acte. connaissance, comme le symbolise le récit socratique de l’attelage ailé du Phèdre 2. Le devin, dans la hiérarchie platonicienne du Timée, est placé au cinquième rang entre le philosophe et le tyran. Différents types de « folie » y sont décrits : celle des devins, celle des poètes et celle des amants. Dans le Phèdre, au contraire, la folie divinatoire occupe la première place3, surpassant les formes rationnelles de connaissance. Toutefois Platon s’empresse d’établir des frontières à la reconnaissance de cette folie, par exemple en montrant que la mantique est une connaissance qui procède de manière inductive, à partir de signes, alors que la philosophie, elle, n’a aucune nécessité du signe sensible, n’étant attirée que par l’intelligible et la divination inspirée (délire). Et si Platon admet que le devin est visionnaire, qu’il est un maître de vérité, il ajoute qu’il se trouve cependant « hors de soi » quand il « voit ». Ainsi, son discours n’est pas, comme tel, intelligible, même s’il est révélateur de vérité pour qui sait l’interpréter. Tandis que le phi2
Platon, Œuvres complètes, t. II, Phèdre ou de la beauté, trad. L. Robin, Paris, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1950.
3
Le délire divin, nous l’avons divisé en quatre sections qui dépendent de quatre divinités, attribuant l’inspiration divinatoire à Apollon, l’inspiration mystique à Dionysos, l’inspiration poétique aux Muses, la quatrième enfin à Aphrodite...» (ibid., § 263-265, p. 61). Voir aussi § 244, p. 31.
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losophe est toujours en possession de son savoir. Il interprète lui-même ce qu’il sait, mais il est inférieur au prophète sur le plan de la divination pure, car il ne devine ni l’origine ni l’issue d’un devenir sensible, il appréhende seulement son fondement intelligible séparé. Le philosophe est un visionnaire de l’intelligible. Nous pourrions ajouter que Platon, par le jeu de l’écriture, ne veut pas se faire entendre mais, tel le devin, fait entendre une voix – Socrate – dont il n’est lui-même que le truchement. Dans le monde grec, la voix prophétique trouve son expression la plus haute dans le théâtre, la tragédie. C’est l’œuvre du poète qui donne voix à cette vocation, à ce franchissement du dicible vers l’indicible. La philosophie d’ailleurs n’a cessé de puiser dans ces œuvres magistrales une inspiration pour sa recherche, tout en la maintenant dans les limites imparties à la connaissance rationnelle. Les catégories du prophétique telles qu’elles apparaissent dans la pensée hébraïque peuvent-elles être lues à la lumière de la pensée grecque ? Nous verrons que l’expression du prophétisme mis en scène par la tragédie grecque opère un déplace ment sensible dans la définition des quatre catégories qui en constituent la trame. Il serait absurde, par exemple, de mettre sur le même plan le davar et le logos qui demandent à être compris l’un et l’autre à partir du sol même de la culture qui les a engendrés. Cela étant, la question qui donne sens à la première catégorie du prophétique : « Quelle
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est la place de la vocation, de l’inspiration et de l’incarnation dans l’expérience prophétique ? » demeure, elle, cruciale dans l’appréhension du prophétisme grec. […] Dans la Grèce antique, la langue ne contient aucun mot qui corresponde à notre terme « volonté », le problème grec est celui de l’acte. Ainsi, chez Eschyle, ce qui engendre la décision, c’est toujours finalement (face à l’aporie) l’αναγκη imposée par les dieux, la « nécessité ». Non le libre choix d’un sujet, mais la reconnaissance de cette nécessité d’ordre religieuse qui fait de lui un être intérieurement « forcé » : « Le héros du drame s’approprie cette nécessité, la désire passionnément. Et il expiera cruellement cette faute 4. » La primauté de l’espace sur le temps chez les Grecs se manifeste dans leur rapport au divin. « C’est parce qu’elle repose sur une certaine cosmologie naturelle, sur la référence à un ordre du monde, un cosmos, que la vision des Grecs culmine dans le concept d’excellence 5», écrit Luc Ferry. Ici la nature fixe la fin de l’homme et assigne sa direction à l’éthique. Il ne peut exister de dialogue avec les dieux grecs, seulement un dialogue entre les dieux qui aurait pour sujet l’homme. La parole naît de cet exil hors du domaine des dieux, profane mais appelée à célébrer les rites de passage entre le monde des dieux et celui des hommes. Dans l’éternel recommencement des épreuves subies par Sisyphe ou Tantale, le temps cyclique ne laisse pas d’autre issue à l’homme que la répétition de son incarnation, soumise à la fatalité. Le temps biblique au contraire indique la possibilité d’une transformation du destin par une sortie hors de l’histoire, une eschatologie suspendue aux desseins de la Providence. […] Avant de me tourner vers les figures de Jonas et de Cassandre, je voudrais revenir une dernière fois sur le fait que les frontières séparant la prophétie grecque et la prophétie hébraïque portent d’une 4
J.-P. Vernant et P. Vidal-Naquet, Mythe et tragédie en Grèce ancienne, Paris, Maspero, coll. « Textes à l’appui », 1972, p. 44-46.
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L. Ferry, Homo aestheticus, Paris, Grasset, 1990, p. 334.
part sur la perception du temps – cyclique chez les Grecs, eschatologique pour les Hébreux, perception ordonnant elle-même des rapports à la liberté et à la loi absolument différents –, et d’autre part sur la relation unissant la parole et la connaissance. Cette relation tramée entre le λογος philosophique et la mantique est inconnue des Hébreux pour qui la parole est en elle-même sacrée dès lors qu’elle interroge le nom imprononçable de Dieu. Ces frontières séparant la culture hellénique et le monde biblique nous éclairent sur la prophétie entendue dans son rapport originaire à la divination et à la mantique, mais également sur le questionnement qu’elle suscite sur la liberté, la fatalité ou la mort. C’est en réfléchissant sur leurs différences mais aussi leurs espaces de proximité que nous pourrons lire la filiation du sens du prophétisme tel qu’il s’est établi jusqu’à nos jours et mieux comprendre, peut-être, les zones d’ombre, les oublis et les silences dus aux métamorphoses de ses multiples interprétations, révélateurs des lieux où nous sommes en souffrance, dans l’incapacité de penser le temps ou l’altérité sous d’autres concepts que ceux dont nous avons hérité. […] Cassandre, la loi et l’oracle La fille de Priam. Cassandre est fille de Priam, souverain de Troie. Selon le mythe, elle a reçu d’Apollon le don de prophétie. Mais parce qu’elle a refusé de céder à ses avances, le dieu lui annonce que ses prédictions ne seront jamais crues. Pour les Grecs comme pour les Juifs, la vocation prophétique est accablante, mais, pour les Grecs, la tragédie survient inéluctablement quand l’homme, soumis aux passions, a oublié la loi du destin ordonnée par les dieux. Dans ce contexte, le prophète est celui qui vient rappeler la dette qu’ont les hommes envers les dieux. Nous trouvons dans la mantique grecque la participation entière de la vie du célébrant à son destin de prophète. La pythie ou la prêtresse grecque – comme était destinée à l’être Cassandre – est une femme qui prédit à travers les rêves et la lecture des entrailles sacrificielles, mais elle-même n’est pas
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soumise à la loi qui régit la société des hommes. Elle appartient au temple, et son intelligence est au service des dieux. Elle est tout à la fois libre de la loi de la cité et sacrifiée dans sa vie en tant que prêtresse. « Cassandre, écrit Christa Wolf, fait l’expérience de cette opération exécutée sur son corps même d’orante 6 » Elle est enfermée par son père quand elle prédit la chute de Troie, et jusqu’au dernier moment elle sera reniée par les siens. Cassandre sait ce qui arrivera, parce qu’elle a le courage de voir la réalité telle qu’elle est. Sa clairvoyance l’élève contre les lois et les normes édictées par la cité. Elle dérange l’ordre des choses parce qu’elle demande aux hommes de revenir à la loi souveraine des dieux, mais surtout parce qu’elle transgresse par ses seuls augures, tout autre pouvoir. Dans le monde grec, la notion de choix, au sens d’un libre arbitre, n’existe pas. Il n’y a pas d’échappatoire aux prédictions de l’oracle. La seule chose que l’homme puisse décider, face au destin, c’est d’y consentir librement; ainsi le subi se transforme en un acte assumé par le héros. Cassandre est fille de roi, promise à être prêtresse, mais devenir oracle c’est déjà transgresser le rôle d’orante pour être à l’écoute d’une autre loi, non plus humaine celle-là mais sacrée. La parole prophétique s’insère dans cet espace entre la loi humaine et la loi divine car les deux ne coïncidant plus, il faut qu’il y ait expiation. Et Cassandre sera assassinée par une autre femme, Clytemnestre – un meurtre accompli avec l’invocation de la Δίκη pour venger le sort d’Iphigénie : la dette de sang se perpétue... Il n’y a pas d’issue car il n’y a pas de pardon. Personne n’octroie la grâce par-delà la faute. Les hommes sont sourds aux menaces des prophètes, et les dieux ne croient pas à la conversion des hommes. La loi et les dieux. Dans la philosophie grecque, le divin ne fait plus l’objet d’une révélation mystérieuse mais d’une enquête ; on passe du μύΘoς au λόγoς de l’ordre de la parole octroyée à celui de la parole intentée. 6
Chr. Wolf, Cassandre, trad. A. Lance, Paris, Alinéa, 1985, p. 209.
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« Dans le polythéisme grec, écrit Vernant, un dieu n’est pas une personnalité singulière mais une puissance qui traduit une forme d’action, un certain type de pouvoir, chacune se définissant par sa position relative dans l’ensemble des pouvoirs. La loi de cet univers, c’est la délimitation stricte des pouvoirs, dans un équilibre hiérarchisé, ni la toute-puissance, ni l’omniscience 7 » Dès lors quel peut être le rapport de l’homme avec les dieux ? La tragédie grecque est l’une des réponses les plus magistrales que l’art nous ait jamais donnée de cet affrontement entre l’homme désorienté, soumis à la tyrannie d’une lignée pour laquelle il doit expier une faute qui lui reste le plus souvent inconnue, et les dieux qui lui renvoient l’image de sa destinée. Le prophète est cette voix solitaire qui, à la croisée de ces deux destinées, celle du héros et celle du dieu, porte l’augure auquel nul homme ne peut répondre avec justesse parce qu’il est pris dans l’aveuglement des passions : Agamemnon veut conquérir Troie même s’il doit sacrifier sa fille. Selon la prophétie, Cassandre prédira la chute de Troie à un père qui ne l’entendra pas. Dire que la philosophie a pour vocation d’être prophétique, n’est-ce pas, dès lors, revenir à une pensée archaïque, faire à rebours le chemin historique de la philosophie qui s’est progressivement extraite des contraintes de la pensée tragique ? Si l’on s’en tient à l’image archaïque du prophétisme, subsiste la tentation de se servir de la pensée oraculaire comme d’un instrument de pouvoir. Ce qui est, du reste, le discours mystificateur de l’utopie, qui n’est jamais prophétique au sens jonasien du terme, car à l’image de la prédiction implacable de Cassandre, il demeure fermé de toute part au surgissement du nouveau. Il faut entendre la parole prophétique non plus seulement comme le réceptacle vide d’une révélation qui viendrait de l’extérieur s’imposer à l’élu, mais comme le lien vivant tissé entre la pensée interrogative de l’homme et le mystère infrangible de l’être. « Pour la pensée archaïque, rappelle Vernant, 7
J.-P. Vernant, Religions, histoires, raisons, Paris, Maspero, « Petite collection Maspero », 1979, p. 10.
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la dialectique de la présence et de l’absence, du même et de l’autre se joue dans la dimension d’audelà que comporte en tant que double, εϊδωλoυ, dans ce prodige d’un invisible qui pour un instant se fait voir 8 » Comment comprendre alors le mot « révélation » : est-ce l’impuissance de l’homme à revenir sur ses pas, a dénouer ce qu’il a noué, qui lui est ainsi révélée ? Cassandre dit ce qui arrivera : mais loin d’être seulement une parole interceptée par une puissance plus haute, elle incarne encore cette tentative de briser les apparences, les explications sentencieuses, les rituels, pour trancher dans le vif du temps. Les cercles du temps Dans la temporalité grecque, causes et conséquences sont inéluctablement liées. Le seul acte libre que puisse choisir l’homme d’honneur est d’assumer le destin, de choisir à nouveau ce qui lui a été imposé, en parfaite coïncidence avec ses actes. Œdipe décide de chercher à comprendre ce qui cause le malheur de Thèbes. Le paradoxe est qu’à partir de cette nécessité absolue imposée par le destin de faire lumière sur ce qu’il découvrira comme étant sa propre profanation, il devient libre et accède à sa vérité 9. Dans l’appréhension du temps cyclique, il y a un rapport originaire de spatialité au temps. Pour l’homme de l’époque hellénique solidement attaché à la famille, au clan, à la cité, l’exil est un suicide moral. La prophétie est une autre forme de l’exil social, mais il est assumé. Le messianisme hébreu, au contraire, refuse une pareille fixation, car il considère l’homme comme l’être exilique par excellence, puisque nulle part sur la terre ne se trouve le lieu de sa salvation. La primauté de la spatialité sur le temps se traduit dans le monde grec par les concepts d’ordre, de symétrie, de perfection. Dans la tragédie, cet ordre 8 Ibid., p. 111. 9
Selon J.-P. Vernant, «agir » pour les Grecs c’est moins organiser et dominer le temps que s’en exclure, le dépasser ; ce n’est pas une tension vers un objectif à atteindre dans le futur.
Cassandre est fille de roi, promise à être prêtresse, mais devenir oracle c’est déjà transgresser le rôle d’orante pour être à l’écoute d’une autre loi, non plus humaine cellelà mais sacrée. La parole prophétique s’insère dans cet espace entre la loi humaine et la loi divine car les deux ne coïncidant plus, il faut qu’il y ait expiation. Et Cassandre sera assassinée par une autre femme, Clytemnestre – un meurtre accompli avec l’invocation de la Δίκη pour venger le sort d’Iphigénie : la dette de sang se perpétue... Il n’y a pas d’issue car il n’y a pas de pardon. Personne n’octroie la grâce par-delà la faute. N° 43 | LES TROYENS • GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE
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Est prophétique, selon le langage usuel, le penseur qui aura su lire dans les événements de son époque les signes avant-coureurs du futur : l’imminence d’une guerre, les métamorphoses des mœurs, la prédominance de la technique, l’arsenal des médias face au politique, le déclin des idéologies, le surgissement des religions de masse, etc., autant de symptômes de la postmodernité, autrement dit de la modernité qui s’est faite elle-même miroir, et réfléchie en tant que signe. divin symbolisé par les dieux est troublé par les passions humaines. Pour que l’équilibre demeure, un sacrifice est exigé. Les coupables seront châtiés afin que le désordre (fût-ce l’extrême désir de justice d’Antigone) cesse. Le désordre naît de la démesure (ϋβρις) du héros. Mais nous ne sommes pas ici dans la culpabilité au sens chrétien du terme, car aux yeux des Grecs elle n’est que le reflet du désordre provoqué par les passions humaines sur l’immuabilité des lois cosmiques et divines. Tout doit revenir au même, à la manière des cycles naturels qui se succèdent, et le destin précipitera la chute de celui qui a engendré le trouble afin que revienne la paix. Ainsi le prophète est à la fois celui qui introduit un désordre par sa clairvoyance et celui qui rétablit l’ordre cosmique. Il menace l’équilibre de la cité en lançant sa prophétie, mais il sera impuissant devant l’accomplissement de la fatalité, parce que l’ordre prévaut toujours sur le désordre. Il rappelle à un ordre sacré, à l’image de l’aveugle Tirésias cheminant aux côtés d’Œdipe, car il rend visible la vérité. Cette circularité de l’ordre spatio-temporel ignore la grande rupture qu’établira le monde hébreu dans sa vision d’un
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temps inachevé sur la promesse de l’homme. C’est sans doute la vision la plus profondément et radicalement humaine de la temporalité. Toute l’esthétique grecque est une philosophie de l’ordre et du désordre, une réflexion sur le nombre, davantage que sur le temps. Je montrerai dans le prochain chapitre, consacré à la modernité du prophétisme, que cette conception spatiale du temps est si profondément enracinée en nous qu’elle a survécu à toutes les eschatologies religieuses ou profanes et nous conditionne encore aujourd’hui, peut-être bien plus profondément que nous ne le pensons. C’est à mes yeux l’une des raisons pour lesquelles le prophétisme aujourd’hui, dans son rapport fataliste au destin, est entendu dans sa résonance grecque. Cette résonance signifie la prophétie avant tout comme une parole dé-spatialisée, inspirée par les dieux, du dehors de la communauté humaine, introduisant une rupture dans notre vision de l’avenir et portant l’augure d’un inévitable bouleversement qui replacera l’homme dans son axe: parole re-spatialisante que jamais l’augure ne pourra ouvrir sur l’indétermination de l’avenir. Si tel est notre héri-
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tage, si notre rapport le plus intime et le moins conscient au temps est celui d’une concentricité dont l’espace décrit et ordonne notre vision, alors il faut penser des notions comme celle de répétitivité, de recommencement, d’avenir même, à partir de cette croyance non exhumée 10. La confrontation des figures emblématiques de Jonas et de Cassandre, du point de vue de la question du temps, a-t-elle un sens pour la philosophie ? Quand Nietzsche parle de l’amor fati, il nous fait entrer en résonance avec le tragique grec. Mais ne sommes-nous pas encore très proches, en Occident, de cette manière d’être au temps, même si nous ne croyons plus ni aux dieux, ni au destin, ni aux oracles ? Est prophétique, selon le langage usuel, le penseur qui aura su lire dans les événements de son époque les signes avant-coureurs du futur : l’imminence d’une guerre, les métamorphoses des mœurs, la prédominance de la technique, l’arsenal des médias face au politique, le déclin des idéologies, le surgissement des religions de masse, etc., autant de symptômes de la postmodernité, autrement dit de la modernité qui s’est faite elle-même miroir, et réfléchie en tant que signe. Mais désirer la clairvoyance met la philosophie en danger. Comme si, de même que pour les prophètes, la clairvoyance ne pouvait être désirée, mais uniquement convoquée. La vocation prophétique, en ce sens, est perçue comme étant dangereuse pour la communauté humaine, voire même maléfique11, car une trop claire perception de la réalité menace la structure du temps compté tel qu’il est appréhendé et assigné rationnellement par une société humaine. Si nous nous tenons aujourd’hui sous le signe de Cassandre, après vingt siècles de christianisme, au nom de quelle fatalité devrions-nous écouter les porteurs d’augures ? 10
Bien que la psychanalyse l’ait à sa manière exhumée : la compulsion de répétition chez Freud, ou l’analyse topologique chez Lacan, par exemple.
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Pour Christa Wolf, Cassandre est « coupable » dans la mesure où la prophétie, pour les Grecs, provoquerait le malheur par le simple fait d’être dite (voir p. 63 s.).
Voiles et dévoilements de la vérité. « Œdipe ne sait ni ne dit la vérité, mais les mots dont il se sert, pour dire autre chose qu’elle, la manifestent à son insu de façon éclatante pour qui a don de double oreille comme le devin de double vue. Dans le langage d’Œdipe s’affrontent et se nouent le discours humain et le discours divin. » Cassandre, elle, connaît l’avenir. Elle est orante et prophète. Elle va témoigner des visions qui la hantent. Mais elle sait, par avance, que sa prédiction ne sera pas entendue. La situation est de toute manière irrémédiable ; même si Cassandre avait été écoutée, Troie serait tombée. Cette impossibilité qu’il en soit autrement interdit qu’il y ait une réponse des hommes à la fatalité autre que celle de la soumission. Pour la pensée prophétique envisagée selon l’héritage de Cassandre, il ne peut y avoir d’autre avenir que celui qui s’inscrit dans l’accomplissement de la prophétie. La fatalité ne souffre pas d’être transgressée. Sinon, c’est le υόμος, et par lui l’ordre entier du langage qui se trouverait remis en question. Pourquoi n’avons-nous retenu du prophétisme que le sens attaché au prophétisme de Cassandre ? Cassandre rappelait à son peuple qu’il est lié au destin par une dette à l’égard des dieux. Pouvonsnous nous croire affranchis de cette dette ? Ou bien, croyant à l’histoire et au progrès, sommesnous aveugles au fait que nous croyons encore au destin ? La vocation prophétique telle que la dit Jonas nous oblige à maintenir ouverte l’interrogation, dénoncer la ritualisation, le fétichisme de la pensée et l’enfermement dans une loi fondée sur la dette et l’expiation, sur le sacrifice et l’exclusion de l’autre. La parole prophétique dans le texte de Jonas ne juge pas, elle maintient ouvert le questionnement et permet à l’homme d’aller vers cette conversion qui retourne la fatalité de l’avenir en surgissement du possible. Débusquer nos habitudes de penser, nos anciennes croyances, est l’une des tâches majeures de la philosophie. Entre Cassandre et Jonas passe l’héritage de la pensée prophétique jusqu’au seuil de la modernité.
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Cassandre violée par Ajax implorant revanche à Athena (détail) d’après Jérôme Martin Langlois, 1820 Moma, New York Gravure
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Car les réalités qui font le monde, elles ont besoin du non-réel pour qu’en partant de ce dernier on puisse les reconnaître. INGEBORG BACHMANN, LE CAS FRANZA.
Cassandre : une femme d’aujourd’hui ? de Christa Wolf *. Extrait de Cassandre : les prémisses et le récit, trad. Alain Lance et Renate Lance-Otterbein. Bibliothèque cosmopolite Stock, 1994
S
chiller a écrit un poème intitulé « Cassandre » qui commence ainsi : La joie régnait sous les voûtes troyennes Avant que la citadelle ne tombât, Des hymnes d’allégresse retentissaient Accompagnés du jeu doré des cordes. Épuisées toutes les mains se reposent D’un combat qui a coûté bien des larmes, Car le f ier et glorieux f ils de Pélée Épouse la plus belle des f illes de Priam. C’est une situation qu’on ne trouve pas dans l’Iliade, mais dans d’autres sources: le héros grec Achille, un débauché en fait, s’est épris de Polyxène, sœur de Cassandre, elle a réussi à lui faire révéler l’endroit au talon où il est vulnérable, lui arrachant en outre la promesse qu’il lèverait le siège de Troie si elle consent à l’épouser. Afin de sceller cet accord par un sacrifice, il vient pieds nus et sans armes dans le temple d’Apollon Thymbréen – dont Cassandre est la prêtresse – où Pâris transperce son talon d’une flèche empoisonnée. Ce n’est donc pas vraiment d’un mariage qu’il s’agit, nul besoin de recourir à une prophétesse pour prévoir la fin sinistre de cette journée dont
l’issue a été préméditée ; Schiller modifie les préliminaires pour opposer Cassandre à l’atmosphère générale:
*Christa Wolf
Sans joie au milieu de la joie de tous, Toute seule, à l’écart de la foule Cassandre s’en est allée silencieuse Dans le bosquet de lauriers d’Apollon.
l’ex-RDA. Elle
(1929-2011) est une romancière et essayiste de compte parmi les femmes de lettres allemandes
C’est dans des strophes calmes au rythme bien régulier que nous apparaît une Cassandre se plaignant de son sort de prophétesse, un personnage sorti tout droit de l’époque de la sentimentalité, qui préférerait l’existence tranquille d’un mariage bourgeois au fardeau de ses visions, qui la font perpétuellement gémir : Et tous insultent mes lamentations, Et pour ma douleur n’ont que railleries, Mon cœur torturé doit se réfugier Dans la solitude, dans le désert, Les gens heureux s’écartent de moi Ceux qui sont joyeux n’ont que quolibets ! Quel pesant destin tu m’as imposé Ô Pythien, ô dieu impitoyable !
contemporaines les plus importantes. Parmi ses œuvres, distinguées par de nombreux prix nationaux et internationaux, figurent : Ce qui reste, Alinéa, 1990 (Stock, 2009) ; Médée. Voix, Fayard, 1997 ; Lire, écrire, vivre, Christian Bourgois, 2015.
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Dis-moi pourquoi tu m’as jetée ici Clairvoyante dans la ville des aveugles Pour qui je dois proclamer tes oracles ? Pourquoi m’as-tu donné le don de voir Ce que je ne pourrai pas empêcher ? Le funeste destin s’accomplira, Malgré les craintes, inéluctablement. Et ainsi de suite. Difficile d’imaginer une Cassandre plus casanière et plus vertueuse, qui n’a rien à envier à la répugnance générale des philistins vis-à-vis de la grandeur, et particulièrement de la grandeur chez une femme. Cela s’explique non seulement par l’idéal féminin de Schiller, mais aussi par son idéal classique, qui interdit d’envisager qu’une héroïne connaisse une longue et contradictoire évolution historique. Et me voici ramenée aux Mères de Goethe, quand Méphisto demande à Faust de rapporter de chez elles un trépied : C’est un trépied ardent qui te fera connaitre Que tu es parvenu jusqu’au tréfonds de l’être. Les Mères paraitront alors à sa clarté, Assises ou debout; marchant en liberté, Formes se transformant au gré de leur nature, De l’éternelle cause entretien éternel, Avec l’image aussi de toute créature, Invisible à leurs yeux - pour elles n’est réel Que l’idéal - tu vas, t’armant d’ardeur nouvelle, Car le danger est grand, marcher droit au trépied, Le toucher de ta clé ! - Comme cela. Parfait ! Il te suivra dès lors en serviteur f idèle. Remonte posément, de bonheur éperdu, Et reviens avec lui sans qu’elles ne t’aient vu. Tu pourras évoquer, par son pouvoir antique, Héroïne ou héros de leur nuit fantastique ... Ce trépied donc, à l’aide duquel Faust fait apparaître Hélène par la suite, est un objet sacré qui remonte aux temps les plus éloignés, nous le voyons sur les sceaux crétois à côté des représentations des déesses les plus anciennes. On s’en sert dans les pratiques cultuelles. Dans l’acte d’Hélène de Faust, Phorkus-Méphisto le recensera parmi les objets nécessaires aux préparatifs d’un sacrifice.
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On sait que la plus célèbre des prêtresses d’oracle en Grèce, la Pythie de Delphes, était assise sur un trépied, apparemment depuis des temps immémoriaux, et pas seulement depuis que le dieu multiforme Apollon, quand s’imposa le patriarcat, s’est aussi emparé des cultes et des mythes et a pris en main ce sanctuaire : le premier à avoir vaincu le dragon. Il lui fallut tuer d’une flèche le dragon Python enfanté par Gaia, ce qui ne peut signifier autre chose que détrôner la lignée féminine des diseuses d’oracles (celles qui précédèrent Cassandre) pour installer ses augures masculins, venant semble-t-il de la Crète minoenne. Sans aucun doute, cet Apollon, fils de Léto, frère d’Artémis (Phoebus le resplendissant) fut progressivement dégagé des cultes matriarcaux d’Artémis en provenance d’Asie Mineure et fit, vers l’an mille avant notre ère, un bond qui le conduisit de Délos ( où il serait né, comme fils de Zeus !) au continent grec, où il se hissa non seulement au rang de dieu suprême, « le plus clairvoyant » des oracles, mais aussi à celui de Musagète, chef des Muses (fonction légitimée par son attribut, la lyre à sept cordes) et au rang de « Moiragète », chef des Moires, fileuses du destin qui, à l’origine, en tant que « Moirai» ont dû être ses plus anciennes parentes, sages-femmes ayant aidé cet enfant à naître et lui ayant tissé ses premiers voiles magiques qui le distinguèrent des autres ; grâce auxquels tous les parents, tous les membres du clan purent le reconnaître – de même qu’on peut reconnaître à un certain signe le prince abandonné dans d’innombrables contes. Fascinante, cette métamorphose des ancêtres en déesses du Destin (lorsque le clan devient tribu, et la tribu royaume) ; leur parenté avec les Erinnyes crétoises ; leur transformation en Heures qui, comme elles, incarnent la loi et l’ordre, la paix et la justice, ne sont apparues qu’avec la société de classe, avec la formation des cités. Eschyle se souvient encore qu’au commencement le monde fut dominé « par la trinité des Moires et la fidélité des Erinnyes ». Zeus lui-même qui ne peut être représenté que lorsque existe un royaume consolidé par l’ordre masculin de succession - fut pendant longtemps obligé de s’en tenir
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CHRISTA WOLF CASSANDRE, UNE FEMME D’AUJOURD’HUI ?
aux décisions des anciennes déesses du Destin, les Moires. Parallèlement au processus de formation des États, les anciennes déesses de la tribu sont soumises aux nouveaux dieux officiels de l’État. Et c’est au cours de ces mêmes siècles qu’à partir du culte de la nymphe des montagnes Daphné («laurier»), installée comme prêtresse divinatrice par la mère-terre Gaia et accomplissant son service à Delphes dans une simple hutte faite de branches de laurier au second millénaire avant notre ère (l’époque de la Cassandre « historique » !), à partir donc de ce culte exclusivement matriarcal des prêtresses qui accompagnaient de chants choraux, de danses, de sacrifices rituels et d’oracles chaque événement public important de leur clan, de leur tribu; que plus tard, à partir d’un « temple de cire et de plumes » construit dit-on par des abeilles (cet animal du clan féminin), se dressa finalement, au septième siècle, le premier grand temple de bronze à Delphes qui, consacré cette fois sans équivoque au seul Apollon, aurait eu recours aux « chanteuses dorées » comme seul ornement de façade : « les femmes qui appellent », allant une fois par mois aux carrefours pour invoquer la lune - un culte lié à Déméter et à Artémis, la sœur d’Apollon [...] En haut, les femmes étaient incorporées dans la frise d’un temple de ce dieu masculin. Mais en bas, dans le temple même, c’était la place de la Pythie, la seule femme qui soit restée dans le culte de l’oracle par ailleurs exclusivement masculin. Elle n’est plus qu’un médium manipulé par les prêtres tout-puissants, mise en transe par des vapeurs enivrantes, mâchant des feuilles de laurier, agissant sous l’effet de l’autosuggestion ou de l’hypnose, balbutiant et se tordant, elle proférait ses oracles incohérents dont l’interprétation, dont la formulation en partie poétique était l’apanage exclusif des hommes: les prêtres, les premiers poètes. Auparavant, les hommes s’identifiaient aux femmes, mimaient les gestes de l’accouchement, s’émasculaient pour devenir prêtres (c’est ce qu’aurait fait Apollon luimême), se glissaient en vêtements féminins dans la fonction de prêtresse (Apollon, encore). Cette situation est désormais renversée, la femme est un outil dans la main des hommes. C’est dans le métier
de poète, de devin et de prêtre, qui a des racines magiques, que cela apparaît le plus clairement : la femme, jadis exécutante, est à présent exclue ou réduite à un objet. Des siècles sont passés là-dessus. Cassandre se trouve à l’une des charnières de ces événements si riches de conflits. Fille d’une maison royale où la succession patrilinéaire semble consolidée, sans que la reine Hécube – qui, comme certains le pensent, vient de la civilisation matriarcale des Locriens – soit pour autant déjà réduite à l’insignifiance, où cette forme transitoire qu’est le rapt de la princesse par le prétendant (Pâris-Hélène) – puisque seule la femme pouvait transmettre le trône à l’homme – est encore très familière aux gens ; où l’on perpétue probablement encore les anciens cultes du matriarcat à côté des cultes récents des nouveaux dieux, notamment au sein de la population rurale et des couches inférieures du peuple ; où une jeune femme peut devenir prêtresse, mais très rarement diriger toutes les autres prêtresses ; où, terrassée par des visions, elle peut exercer la fonction de « voyante » et être reconnue comme telle sans toutefois être officiellement chargée d’interpréter l’oracle. Ce sont des hommes qui lisent l’avenir dans le vol des oiseaux et les entrailles des animaux sacrifiés : Calchas, Hélénos, Laocoon. Une civilisation qui n’était peut-être pas à la hauteur de celle, implacablement patriarcale, des Achéens de Mycènes et de leur implacable volonté de conquête. Peut-être Cassandre n’était elle pas « en réalité » – je t’en prie, pas d’objection : elle a existé ! – une prêtresse d’Apollon ? Ou en tout cas la prêtresse d’un autre Apollon que « celui qui resplendit », « celui qui porte loin » de l’Olympe classique des Grecs ? D’un Apollon plus ancien, auquel revenait le surnom de « Loxias », le sombre ; dont l’origine lycanthrope et la nature de double de sa sœur jumelle Artémis étaient encore présentes à l’esprit des gens. De même qu’Athéna, qu’on vénère dans un autre temple de la ville, ne peut pas être la Pallas Athéna classique mais un symbole culturel à mi-chemin entre les idoles des ancêtres chthoniennes et la déesse vierge et dominatrice, qui n’est sortie du ventre d’aucune mère mais de la tête de son père Zeus : telle la pen-
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sée, dont les hommes grecs – des intellectuels bien sûr – se saisissent, pour la pousser à des sommets surprenants, à une abstraction admirable, et qui n’a pas de mère, rien que des pères. Te paraît-il aberrant de croire que si des femmes y avaient uni leur réflexion depuis deux mille ans, la « pensée » vivrait autrement aujourd’hui ? (Nous oublions trop facilement que la femme en tant qu’intellectuelle n’existe en nombre appréciable que depuis 60 à 70 ans seulement. Nous connaissons des histoires qui parlent d’elle, mais son histoire – une histoire faite d’efforts et d’actes de bravoure incroyables, mais aussi d’incroyables négations et du renoncement à ses ambitions naturelles – elle resterait encore à écrire. Ce serait en même temps l’histoire de l’une des faces cachées de notre civilisation.) « Retour à la nature » donc ou, ce qui pour beaucoup revient au même, aux premiers âges de la condition humaine ? Chère A., ce ne peut être cela que nous voulons. « Connais-toi toi-même », la formule de l’oracle de Delphes, avec laquelle nous nous identifions, est un mot d’ordre d’Apollon ; cette phrase n’aurait pu venir à l’esprit d’aucune déesse d’une époque indifférenciée. Sauf que pour ce dieu qui porte, parmi beaucoup d’autres surnoms, celui d’« Hécaté/Hekatos », l’éternellement lointain, allusion à sa « pureté rayonnante » et à l’« éternel éloignement des choses terrestres » – sauf que pour ce dieu de la noble beauté spirituelle qui, par définition, n’entre pas en contact avec la terre, la connaissance de soi-même à laquelle il aspire demeure interdite. On ne lui fournit pas l’occasion de faire ses preuves dans la réalité pratique. Elles sont froides, ces régions diaphanes où lui et ses disciples se retirent par peur des contacts, pour s’y livrer à la poésie et à la réflexion. Pour échapper à la mort par le froid, il leur faut recourir à des artifices. Leur tentative pour trouver chez les femmes une source de vigueur fait partie de ces artifices. En les adaptant de force à leurs modèles de vie et de réflexion. Autrement dit, en les exploitant. Je ne résiste pas à l’envie, sautant par-dessus deux millénaires et demi, de te recopier quelques phrases d’un dialogue du Poisson des profondeurs de Marie-Luise Fleisser, entre Wollank, un ancien
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champion de course cycliste, et Tütü, le chef d’une chapelle littéraire. Époque : les années vingt. Lieu : Berlin, capitale de l’Empire. Wollank : Terribles, ces femmes qui grouillent autour de vous, toutes dépérissent à qui mieux mieux en portant secours. Tütü : Pourquoi ne devrais-je pas prendre ce que je peux avoir ? J’en ai fait un système. Tout ce qui peut me stimuler, on me l’apporte sur un plateau sans que j’aie à remuer le petit doigt. Toutes les tâches mineures qui usent inutilement les nerfs me sont épargnées. Wollank : ça ne vous fait pas peur ? Tütü : Peur de quoi ? Wollank : Mon vieux, vous allez vous anémier. Tütü : Au contraire, je me développe plus rapidement. Les temps forts se bousculent dans ma vie si bien que je la vis d’une façon plus intense. Mes forces sont libérées pour l’essentiel… Je pense m’adonner sans retenue à mes instincts, mes idées, mon appétit d’agir. Chère A., crois-tu qu’il s’agisse ici de la pensée objective d’où naît une esthétique « objective » ? Passe en revue tous les grands noms de la littérature occidentale, n’oublie ni Homère ni Brecht, et demande-toi auquel de ces géants de l’esprit tu pourrais te rattacher, toi qui écris ? Nous n’avons pas de modèles authentiques, cela nous demande du temps, des détours, des erreurs, mais ce n’est pas forcément un inconvénient. Il y a peu, très peu de voix féminines qui parviennent jusqu’à nous, depuis que vers 600 avant notre ère Sappho chanta : La lune a fui Et aussi les Pléiades. Il est minuit ; l’heure passe Mais moi je dors toute seule. Ou bien : L’un chante les cavaliers L’autre la piétaille Pour un autre une escadre Est ce que la terre noire a de plus beau Mais pour moi : c’est l’amour D’un être pour un autre.
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RÉFÉRENCES À LIRE
O À ÉCOUTER
Les Troyens Avant-scène Opéra N°128-129 1990 Les Troyens at the Théâtre-Lyrique Hugh McDonald The Musical times, n°1519 (1969) Berlioz Hector In The New Grove’s dictionnary of music and musicians Hugh J. McDonald Mémoires Hector Berlioz Symétrie, 2010
Charles Dutoit (DM) Montréal (1993) Decca Gary Lakes Gino Quilico Michel Philippe Jean-Philippe Courtis Jean-Luc Maurette Catherine Dubosc Deborah Voigt Françoise Pollet Claudine Carlson Chœur & Orchestre Symphonique de Montréal
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Hector Berlioz Henry Barraud Fayard,1989 Les indispensables musique
À REGARDER
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Hector Berlioz (Tome I & II) David Cairns Fayard, 2002 2213612498 2213612501 Berlioz et l’Europe romantique Guy de Pourtalès Gallimard, 1939 Le masque et le fantasme Michel Guiomar Éditions José Corti, 1970 B0000DV6DV
L’Énéide (Tome I & III) Virgile Texte établi et traduit par Jacques Perret. Les Belles Lettres, 1936, 1977 2226209107
h
On connaît environ 38 enregistrement des Troyens. Les enregistrements qui sont sélectionnés sont tous en langue française.
Antonio Pappano (DM) David McVicar (MS) Londres (2013) Opus Arte Bryan Hymel Fabio Capitanucci Ashley Holland Brindley Sherratt Ji-Min Park Barbara Senator Anna Caterina Antonacci Eva-Maria Westbroek Hanna Hip Chœur et Orchestre du Royal Opera House B00EWT186A
James Levine (DM) Fabrizio Melano (MS) New York (2007) Deutsche Grammophon Placido Domingo Alan Monk John Cheek Paul Plishka Douglas Ahlstedt Claudia Catania Jessye Norman Tatiana Troyanos Jocelyne Taillon Chœur, Orchestre & Ballet du Metropolitan Opera B000OONQ1M
Colin Davis (DM) En studio (1969) Decca Jon Vickers Peter Glossop Anthony Raffell Roger Soyer – Anne Howells Berit Lindholm Josephine Veasey Heather Begg Chœur & orchestre du Royal Opera House - Covent Garden B003TVNMI4
a Sylvain Cambreling (DM) Herbert Wernicke (MS) Salzbourg (2000) Bel air media / Arte Jon Villars Russell Braun Tigran Martirossian Robert Lloyd Ilya Levinsky Gaële Le Roi Deborah Polaski Deborah Polaski – Orchestre de Paris et Kammerphilharmonie de Salzbourg Chœur de l’Opéra de Vienne
Thomas Beecham (DM) Londres (1947) Somm Recording Jean Giraudeau Charles Cambon Charles Paul Charles Cambon – Irène Joachim Marisa Ferrer Marisa Ferrer Yvonne Corke Royal Philharmonic Orchestra BBC Theatre Chorus B0035L72UC
Georges Prêtre (DM) En studio (1965) EMI Studio Guy Chauvet – Jean-Pierre Hurteau Lucien Vernet Gérard Dunan Jane Berbié Régine Crespin Régine Crespin Marie-Luce Bellary Chœur et Orchestre de l’Opéra de Paris B00008LOM3
B00006L3WR
Valery Gergiev (DM) La Fura dels Baus (MS) Valence (2011) C Major Entertainment Lance Ryan Gabriele Viviani Giorgio Giuseppini Stephen Milling Eric Cutler Oksana Shilova Elisabete Matos Daniela Barcellona Zlata Bulicheva Cor de la Generalitat Valenciana Orquestra de la Comunitat Valenciana B004Y9DF4G
Ordre de distribution : Énée, Chorèbe, Panthée, Narbal, Iopas, Ascagne, Cassandre, Didon, Anna
POUR LES INTERNAUTES
Mémoires d’Hector Berlioz hberlioz.com/Writings/HBMindex.htm Berlioz par David Cairns hberlioz.com/champions/cairnsf.htm Les Troyens et L’Éneïde par David Cairns www.persee.fr/doc/ roman_0048-8593_1976_num_6_12_5040 Virgile, L’Énéide bcs.fltr.ucl.ac.be/Virg/VirgIntro.html
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CETTE ANNÉE-LÀ... GENÈVE EN 1890 par Gérard Duc (Prohistoire*)
* Prohistoire est un atelier d’écriture de l’histoire créé en 2006 par Gérard Duc et Olivier Perroux, deux historiens indépendants issus du milieu académique. Prohistoire a participé à l’élaboration d’expositions, à la rédaction d’ouvrages historiques, dont une Histoire des énergies à Genève et à plusieurs projets historiques, notamment pour la Banque Lombard Odier & Cie. En 2015, dans le cadre des festivités du bicentenaire de l’entrée de Genève dans la Confédération Suisse, Prohistoire a conçu l’exposition Genève et la Suisse. Un bicentenaire en 200 chroniques, pour le compte de l’Association GE200.CH. Cette exposition a été présentée entre mai et fin juillet dernier sur le quai Wilson.
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Les Quatre Chevaliers de l’Apocalypse À lire le constat dressé par le Journal de Genève fin 1890, nul doute qu’en des temps plus religieux, certains esprits prédicateurs illuminés auraient décelé les signes avant-coureurs de l’œuvre des Quatre Chevaliers de l’Apocalypse, symbole biblique de la fin des Temps. La maladie d’abord. Dès janvier, une épidémie de grippe ravage la planète, causant la mort de plus d’un million de personnes : « pénétrant partout, à la plaine et à la montagne, chez le pauvre et chez le riche, à la façon des grandes pestes du Moyen Âge ». Pour comparaison, la grippe H1N1 de 2009-2010, responsable d’une gigantesque psychose planétaire, a emporté environ 20 000 vies. Dès le printemps, le choléra s’installe, notamment dans le sud-ouest de l’Europe, faisant planer la menace d’une pandémie. Les dérèglements climatiques ensuite. Hiver tardif, printemps court, été pluvieux, notamment marqué par un ouragan d’une violence inouïe qui ravage la Vallée de Joux, détruisant la toiture d’une soixantaine d’habitations, provoquant une émotion intense à Genève, où le Conseil d’État lance un appel aux charpentiers afin qu’ils se rendent dans la proche vallée vaudoise. Les désordres économiques et sociaux enfin. En 1890, une récession relance les craintes d’une crise durable du système capitaliste. Parmi les élites, on redoute d’autant plus le retournement conjoncturel que le monde ouvrier, en pleine organisation, est en ébullition et réclame, dans une déferlante qui traverse tout le monde occidental, le désormais célèbre « trois huit » pour huit heures de labeur, huit heures de sommeil, huit heures de repos. Est-ce dire que tout va mal ? Certes non. Sur le plan social, un article vient compléter la Constitution fédérale et donne au gouvernement le droit de légiférer en matière d’assurance contre les accidents et la maladie. Le débat sur la première assurance sociale de l’histoire suisse est lancé en cette année 1890. D’autres innovations sociales et une centralisation visant à donner à la Confédération plus de pouvoir sont discutées : le Parlement adopte une réglementation sur la durée du travail des employés de chemins de fer ; le Conseil des États invite le Conseil fédéral à provoquer une entente
internationale en faveur du repos dominical, cause défendue becs et ongles par les protestants évangéliques, au premier rang desquels le banquier genevois Alexandre Lombard. À Genève, l’année 1890 est placée sous le signe d’une pacification politique. Aux violentes frictions entre radicaux et conservateurs du milieu du siècle avaient succédé les polémiques liées au Kulturkampf. Signe évident de la pacification du tournant du siècle, les autorités cantonales établiront le système électoral proportionnel, incessante revendication des courants minoritaires. Sur le plan des maladies infectieuses, le médecin allemand Robert Koch, annonce, en août, la découverte d’un remède contre la tuberculose, fléau causant en une année autant de victimes que les autres épidémies en dix ans. L’annonce entraîne un immense espoir, vite tempéré lorsque l’on se rend compte que la tuberculine n’est pas la panacée que l’on avait un moment espéré. Le drapeau rouge flotte dans les rues de Genève Au matin du 2 mai, le chroniqueur du Journal de Genève s’étrangle d’offuscation. Alors que le jour d’avant, à l’appel des délégués de la IIème Internationale socialiste, des défilés pacifiques se sont déroulés dans de nombreuses villes occidentales à l’occasion de la première Fête du Travail de l’histoire – le désormais traditionnel 1er Mai –, le chroniqueur du quotidien libéral-conservateur considère comme une insulte le fait que le drapeau national suisse ait été vu, flottant dans le cortège des manifestants genevois au côté du drapeau rouge, symbole de l’insurrection. Un nouveau musée pour la ville En décembre, Gustave Revilliod, âgé de 73 ans, décède au Caire. Disposant d’une fortune considérable, il a parcouru nombre de pays, amassant une imposante collection d’objets d’art. À partir de 1877, il fait construire, sur son domaine de Varembé, un musée susceptible d’abriter ses collections. Il le baptise du nom d’Ariana, en souvenir de sa mère. À sa mort, le musée et toutes les collections qu’il abrite sont légués à la Ville de Genève.
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PRODUCTION ROYAL PHILHARMONIC ORCHESTRA Directeur artistique et chef principal Charles Dutoit Directeur général Ian Maclay Directeur général adjoint Huw Davies Directrice financière Michelle Johnson Responsable des concerts Elizabeth Forbes Responsable des tournées Rosemary Anthony Responsable presse et marketing Chris Evans Responsable pédagogique Ruth Currie Responsables de l’orchestre Jane Aebi Kathy Balmain Bibliothécaire Patrick Williams Régisseur Chris Ouzman
Pour le Grand Théâtre Chef de chant Xavier Dami Régisseur de production Chantal Graf Chef de plateau Stéphane Nightingale Réalisation des surtitres Richard Neel Régie surtitres Joëlle-Anne Cavat Roulin
Personnel technique auxiliaire Technique de scène Éclairage Louis Riondel Romain Toppano Accessoires Elsa Ventura
Premier violons Duncan Riddell Tamás András Sulki Yu Judith Templeman Shana Douglas Kaoru Yamada Kate Suthers Andrew Klee Kay Chappell Anthony Protheroe Erik Chapman Joana Valentinaviciute Cindy Foster Jeff Moore Seconds violons Andrew Storey Elen Hâf Richards Jennifer Christie Charlotte Ansbergs Jennifer Dear Peter Graham Siân McInally Stephen Payne Charles Nolan Sali-Wyn Ryan Manuel Porta Robin Wilson Altos Fiona Bonds Abigail Fenna Liz Varlow Michelle Bruil Chian Lim Jonathan Hallett Felix Tanner Andrew Sippings Clive Howard Pamela Ferriman
Violoncelles Tim Gill Jonathan Ayling Roberto Sorrentino Niamh Molloy William Heggart Rachel van der Tang Anna Mowat Naomi Watts Contrebasses Anthony Alcock Nicholas Worters David Gordon Benjamin Cunningham John Holt Kylie Davies Flûtes Karen Jones Joanna Marsh
Cors Laurence Davies Samuel Jacobs Meilyr Wyn Hughes Phil Woods Andrew Fletcher Hugh Seenan Mark Wood Trompettes James Fountain Adam Wright Mike Allen Simon Cox Trombones Matthew Gee Matthew Knight Trombone basse Roger Argente
Flûte piccolo Helen Keen
Tuba Kevin Morgan
Hautbois John Roberts Tim Watts
Timbales Matt Hardy
Cor anglais Tim Watts Clarinettes Katherine Lacy Katy Ayling Clarinette basse Katy Ayling
Banda de coulisse Hautbois Nicola Holland Lydia Griffiths Fraser MacAulay Trompette piccolo Benjamin Godfrey Trompettes Matthew Williams Jonathan Clarke Gabriel Dias Helen Quayle Trombones Ryan Hume Simon Baker Rupert Whitehead Tuba David Powell
Percussions Stephen Quigley Martin Owens Gerald Kirby Richard Horne Joe Cooper Harpe Hugh Webb Fiona Clifton-Welker
Bassons Jonathan Davies Graham Hobbs Rosie Burton Luke Tucker
Chœur du Grand Théâtre Sopranos Fosca Aquaro Alida Barbasini* Chloé Chavanon Floriane Coulier* Magali Duceau Sandrine Duplat* Györgyi Garreau Nicola Hollyman Cécile Houillon* Celia Kinzer Cornu* Victoria Martynenko Martina Möller Gosoge Claire de Monteil* Hélène Pelourdeau* Elena Preda Iulia Cristiana Presutti Elodie Tuca* Eliette Ximenes*
Altos Flavia Aguet* Elsa Barthas* Vanessa Beck Hurst Inès Berlet* Audrey Burgener Dominique Cherpillod Marianne Dellacasagrande Magali Duceau Lubka Favarger Kirsty Griffiths* Natacha Hummel* Varduhi Khachatryan Mi-Young Kim Stéphanie Mahue* Johanna Rittiner Sermier Marie-Hélène Ruscher* M. Vassileva-Chaveeva Liisa Viinanen*
Ténors Humberto Ayerbe P.* Esteban Barranquero* Jaime Caicompai Frédéric Caussy* Yong-Ping Gao Rémi Garin Omar Garrido Lyonel Grelaz Gil Hanrion* Sanghun Lee José Pazos Aurélien Reymond* Terige Sirolli Georgi Sredkov Bisser Terziyski Nauzet Valerón Marin Yonchev* Louis Zaitoun*
Basses Krassimir Avramov Wolfgang Barta Romaric Braun Nicolas Carré Phillip Casperd David Cervera* Aleksandar Chaveev Peter BaeKeun Cho Christophe Coulier Harry Draganov Juan Etchepareborda* Rodrigo García Seong-Ho Han Khachik Matevosyan* Mihai Teodoru* Dimitri Tikhonov *Chœur supplémentaire
N° 42 | LA BELLE HÉLÈNE • GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE
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BIOGRAPHIES
© DR
Royal Philharmonic Orchestra
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Fondé en 1946 par le chef d’orchestre Thomas Beecham, le Royal Philharmonic Orchestra est actuellement sous l’autorité inspirée de son directeur artistique et principal chef, Charles Dutoit. L’orchestre collabore avec des chefs aussi prestigieux que Rudolf Kempe, Antal Doráti, André Previn et, plus récemment, Daniele Gatti, ainsi que Pinchas Zukerman (principal chef invité), Alexander Shelley (principal chef associé) et Grzegorz Nowak (chef permanent associé). À Londres, l’orchestre se produit principalement au Cadogan Hall, à Chelsea, cette saison il joue notamment avec Alexander Shelley, Eduardo Portal et Laura van der Heijden. Point d’orgue de sa programmation, la série de concerts annuels au Southbank Centre du Royal Festival Hall, verra à l’affiche, en 2016, Charles Dutoit, Pinchas Zukerman, Thomas Dausgaard, Gautier Capuçon et Chloë Hanslip. Cette saison, l’orchestre est invité au Royaume-Uni à l’Aylesbury Waterside
Theatre, au Cheltenham Town Hall, au G Live de Guildford, au Rose Theatre à Kingston, au Birmingham Symphony Hall et au Forkstone Leas Cliff Hall. On peut aussi entendre le RPO au Royal Albert Hall de Londres. Le RPO entreprend chaque année d’importantes tournées à l’étranger. Parmi ses engagements récents figurent des concerts au Mexique, en Suisse, Allemagne, Espagne, Pologne et Chine. Il donne des concerts à Lyon et Rolle, avec la pianiste Khatia Buniatichvilli, en Turquie et en Italie, avec Pinchas Zukerman, Sarah Chang et Denis Matsouïev et aux ÉtatsUnis avec Pinchas Zukerman et Jonathan Biss. En 2015, le RPO lance sa propre radio digitale (www.rpo.co.uk), The Sound of the Royal Philharmonic Orchestra. Le RPO est très prolifique en matière d’enregistrements, il possède aussi son propre label au vaste catalogue. Débuts au Grand Théâtre de Genève.
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Charles Dutoit
Michaela Martens
Directeur musical de l’Orchestre national de France depuis 1991, Charles Dutoit est aussi, depuis 1977, directeur artistique de l’Orchestre symphonique de Montréal et, depuis 1998, de l’Orchestre de la NHK. Il est par ailleurs régulièrement invité à diriger les grands orchestres internationaux (Concertgebouw d’Amsterdam, Philharmonie de Berlin, orchestres londoniens, notamment) ainsi que les plus célèbres formations américaines (Boston, New York, Philadelphie, Cleveland et Chicago). Depuis 1990, il est directeur artistique et chef principal de la série de concerts du Philadelphia Orchestra au Saratoga Performing Arts Center. Il a aussi dirigé jusqu’en 1999 le Festival d’été de cet orchestre au Mann Music Center de Philadelphie. Dans le domaine lyrique, il fait ses débuts au Covent Garden en 1983 avec Faust de Gounod et au Metropolitan en 1987 avec Les Contes d’Hoffman. En 1992 on a pu l’applaudir au Deutsche Oper de Berlin dans La Damnation de Faust. Il dirige, en 1991, Les Troyens au Los Angeles Music Center Opera. En 1996, au Théâtre des Champs-Elysées, il présente la création française de l’opéra de Szymanowski Le Roi Roger en version de concert, à la tête de l’Orchestre national de France. Plus récemment, il dirige, entre autres opéras, L’Heure espagnole et L’Enfant et les Sortilèges à l’opéra de Rome, Elektra au Beijing Music Festival, L’Heure espagnole et Le Rossignol au Concertgebouw d’Amsterdam, La Damnation de Faust et Le Château de Barbe-Bleue au Festival de Verbier. Avec l’Orchestre national de France, il participe à plusieurs enregistrements consacrés à Henri Dutilleux, Saint-Saëns, Respighi et Poulenc. Plus de 75 enregistrements ont été édités à ce jour, dont 40 furent distingués par des prix internationaux.
En 2006-2007, elle est invitée au Spoleto Festival pour le Requiem de Verdi, au Metropolitan Opera pour Andrea Chénier (la Contessa), puis pour The First Emperor, Il Trittico et Jenůfa. En 2007-2008, elle fait des débuts triomphants en prenant au piedlevé le rôle d’Amme (Die Frau ohne Schatten) au Lyric Opera de Chicago, rôle qu’elle reprend à l’opéra de Graz. Elle commence la saison 2008-2009 au Metropolitan avec Alisa de Lucia di Lammermoor, puis y chante dans La Damnation de Faust et dans Götterdämmerung. En 2009-2010, elle se produit avec le Cleveland Orchestra dans la 9 ème Symphonie de Beethoven, puis incarne Judith (Le Château de Barbe-Bleue) à l’English National Opera, ainsi que Kostelnicka (Jenůfa). En 2010-2011, elle est à l’affiche du Metropolitan Opera dans les productions de Capriccio et Die Walküre mises en scène par Robert Lepage, elle chante dans le Requiem de Verdi au Grant Park Music Festival et dans la 9ème Symphonie de Beethoven, avec l’Indianapolis Symphony. La saison suivante, elle interprète Marilyn Klinghoffer (The Death of Klinghoffer) à l’English National Opera, elle fait ses débuts au Carnegie Hall dans le rôle-titre de Bérénice d’Albéric Magnard avec l’American Symphony Orchestra. En 2012-2013, on a pu l’entendre notamment en Kundry (Parsifal) et 2ème Norne (Götterdämmerung) au Metropolitan. En 2013-2014, elle se produit à nouveau à l’opéra de Graz en Ortrud (Lohengrin) - rôle qu’elle reprend au Wiener Staatsoper – et à l’Opernhaus de Zurich en Kostelnicka (Jenůfa). Durant la saison 2014-2015, elle incarne Gertrud (Hänsel und Gretel) au Metropolitan Opera, puis au Bayerische Staatsoper. Elle est Marilyn Klinghoffer et Judith du Château de Barbe-Bleue au Metropolitan et Herodias de Salome au Santa Fe Opera.
Débuts au Grand Théâtre de Genève.
© DR
Cassandre • Mezzo-soprano
© DR
Direction musicale
Débuts au Grand Théâtre de Genève.
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BIOGRAPHIES
Ian Storey
Béatrice Uria-Monzon
Né en Angleterre, il obtient un diplôme en design de meubles à l’université de Loughborough, puis enseigne en NouvelleZélande. C’est là qu’il c o m m e n c e l’ é t u d e d u chant auprès d’Anthea Moller, se perfectionnant ensuite à Londres et en Italie. Sa carrière lyrique débute en 1991 à l’Opera East avec le Chœur masculin (The Rape of Lucretia), puis Rodolfo (La Bohème) et Radamès (Aida). En 1993, il étudie au National Opera Studio à Londres. Il se produit dans maintes productions au Scottish Opera et au Welsh National Opera. Il fait ses débuts en Italie au Festival Puccini de Torre del Lago et au Teatro Verdi de Trieste en Calaf (Turandot), puis il est Turiddu (Cavalleria rusticana) à Trévise, Gregor (L’Affaire Makropoulos) et Steva (Jenůfa) à Naples, Lorenzo (Nozze istriane) à Trieste, Don José (Carmen) à Cagliari, Alwa (Lulu) à Palerme, Samson (Samson et Dalila) à Gênes, Hermann (La Dame de pique) à Bologne, Bacchus (Ariadne auf Naxos) à Venise et Lisbonne, Calaf à Vérone et Dick Johnson (La Fanciulla del West) à Turin. Il fait ses débuts à La Scala en Erik (Der fliegende Holländer) et au Teatro Real de Madrid en Hermann. Il chante dans Otello à SaintGall et Naples, Fidelio à Glasgow et Édimbourg, Turandot à Montpellier et Londres (Covent Garden), Tannhäuser à Francfort et Jenůfa à Milan (Scala), Les Troyens à Berlin, Boris Godounov à Turin et Rienzi à New York. Il interprète le rôle-titre de Tristan und Isolde à La Scala en 2007-2008, puis à Zurich, Berlin (Deutsche Oper et Staatsoper), Barcelone, Gênes, Glyndebourne, Bregenz et Düsseldorf. Parmi ses engagements récents, citons : Götterdämmerung à Berlin, Der fliegende Holländer à San Francisco, La Fanciulla del West à Francfort, Tristan und Isolde à Venise, Washington, Strasbourg et Amsterdam.
B é at r i ce Ur i a-Mo n z o n co m m e n c e s e s é t u d e s musicales dans sa ville natale, Agen. En 1984, elle entre au Centre national d’insertion professionnelle des artistes lyriques (CNIPAL) de Marseille. Elle perfectionne ensuite sa formation musicale à l’École d’art lyrique de l’Opéra national de Paris. Artiste de renommée internationale, elle est particulièrement saluée pour son interprétation de Carmen sur presque toutes les scènes lyriques majeures depuis ses débuts à l’Opéra Bastille en 1993. Son vaste répertoire comprend des rôles tels que Charlotte (Werther) aux opéras de Rome, Genève, Toulouse et Lyon, Eboli (Don Carlo en version française et italienne) à Covent Garden, au Staatsoper de Berlin et de Vienne, aux opéras de Toulouse et Buenos Aires, Leonor (La Favorite) à Bordeaux, Liège et Paris, Judith (Le Château de Barbe-Bleue) à l’Opéra national de Paris, Adalgisa (Norma) à Lausanne et Monte-Carlo, Venus (Tannhäuser) à Barcelone, Rome et Strasbourg, Ducinée (Don Quichotte) à l’Opéra national de Paris et la Grande Vestale (La Vestale de Spontini) au Théâtre des Champs-Élysées. Elle incarne sa première Tosca en 2012 en Avignon, rôle qu’elle reprend à l’Opéra national de Paris et au Staatsoper de Berlin en 2014 et à La Scala de Milan en 2015. Citons encore Santuzza (Cavalleria rusticana) à Orange, Marseille et Zurich, Chimène (Le Cid) à Marseille, Amneris (Aida) à Houston et Dalila (Samson et Dalila) à Zurich. Béatrice Uria-Monzon revient au Grand Théâtre de Genève pour le rôle de Didon, qu’elle a interprété au Deutsche Oper de Berlin, à l’Opéra national de Marseille et à l’Opéra national du Rhin de Strasbourg.
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Didon • Mezzo-soprano
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Énée • Ténor
Au Grand Théâtre de Genève : Les Contes d’Hoffmann (La Mère d’Antonia) 89-90, La Damnation de Faust en version concert
Débuts au Grand Théâtre de Genève.
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(Marguerite) 97-98, Werther (Charlotte) 99-00.
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BIOGRAPHIES
Tassis Christoyannis
Brandon Cedel
Il étudie le piano, le chant, la direction d’orchestre et la composition au conservatoire de sa ville natale, Athènes. Il devient membre de la troupe de l’opéra d’Athènes, puis, de 2000 à 2007, du Deutsche Oper am Rhein. Au cours des dernières saisons, il chante Hamlet à Düsseldorf, Bajazet (Il Tamerlano) à Athènes, Germont (La Traviata) à La Monnaie, aux opéras de Düsseldorf, Nantes et Genève, ainsi qu’au Festival de Glyndebourne, Figaro au Staatsoper de Berlin, à Rouen, Genève, Vienne et Paris, Enrico (Lucia di Lammermoor) à Düsseldorf, Tours et Amsterdam, Faustszenen à Athènes, Don Giovanni à Düsseldorf, Tours et Budapest, Alfonso (La Favorita) à Montpellier, Guglielmo à Las Palmas et Budapest, Ulisse à Düsseldorf et Hambourg, Posa à Düsseldorf et Francfort, Pelléas à Düsseldorf, Ford (Falstaff) à Glyndebourne et Nantes, Oreste (Andromaque de Grétry) à Paris (Théâtre des Champs-Elysées) et à Bruxelles, Valentin (Faust) à Paris, Macbeth à Bordeaux et Athènes, Silvio (I Pagliacci) à Paris, Renato (Un ballo in maschera) à Tours, Égée (Thésée de Gossec) à Liège et Versailles, Danaüs (Les Danaïdes de Salieri) à Versailles, le rôle-titre d’Ali Baba de Lecocq à Paris (Opéra Comique), Marcello (La Bohème) à Paris, Conseiller de Thou (Cinq-Mars de Gounod) à Munich, Vienne et Versailles, Michele (Il Trittico) et Gianni Schicchi à Tours, Duparquet (Ciboulette) à Paris (Opéra Comique) et Yeletski (La Dame de pique) à Strasbourg. Parmi ses projets : Simon Boccanegra à Bordeaux, Ali Baba à Rouen, Rodrigo (Don Carlo) à Strasbourg et Germont (La Traviata) à Londres (Covent Garden).
Natif de Charleston en Caroline du Sud, il obtient son Master en musique au Curtis Institute of Music. Il étudie ensuite à la Music Academy of the West, à la Chautauqua Institution, à la Juilliard School et au Young Artist Development Program du Metropolitan Opera. Il reçoit de nombreux prix, notamment au concours Gerda Lissner en 2011 et George London en 2012, il reçoit une bourse des fondations Sullivan et Richard Tucker Music en 2012 et figure parmi les finalistes des Metropolitan Opera National Council Auditions. Ces dernières saisons, il interprète, entre autres rôles, le Portier (Lady Macbeth de Mzensk) sous la direction de James Conlon, le Député flamand (Don Carlo) mis en scène par Nicholas Hytner et dirigé par Yannick Nézet-Séguin au Metropolitan Opera, Masetto et Leporello (Don Giovanni) dirigé par Andrés OrozcoEstrada au Festival de Glyndebourne et Isacio (Riccardo Primo) à l’opéra de St. Louis. Il donne un récital à la Vocal Arts Society de Washington D.C. et un au Metropolitan dans le cadre des Recital Series 2013. Parmi ses engagements récents en concert figurent : la 9ème Symphonie de Beethoven avec l’orchestre national de Russie au Napa Valley Festival del Sole et Der Rose Pilgerfahrt de Schumann au Festival de Lanaudière sous la baguette de Jean-Marie Zeitouni. En 2015-2016, il se produit au Boston Lyric Opera en Colline (La Bohème), au Pittsburgh Opera en Don Basilio (Il Barbiere di Siviglia), au Metropolitan Opera en Sergent des archers (Manon Lescaut), au Bayerische Staatsoper en Masetto (Don Giovanni) et dans Salome, en version de concert, avec le Detroit Symphony Orchestra et Leonard Slatkin. Il interprétera aussi Theseus dans A Midsummer Night’s Dream au Grand Théâtre de Genève.
Au Grand Théâtre de Genève : Il Barbiere di Siviglia (Figaro), Les Vêpres siciliennes (Guy de Montfort) 10-11, Il Barbiere di Siviglia (Figaro), La Traviata (Giorgio Germont) 12-13.
Panthée • Baryton-basse
© PETER KONERKO
Chorèbe / le Dieu Mercure • Baryton
Débuts au Grand Théâtre de Genève.
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BIOGRAPHIES
Günes Gürle
Dominick Chenes
Günes Gürle a été finaliste du Concorso internazionale per cantanti Toti Dal Monte à Trévise en 2003 et de la Belvedere Competition à Vienne l’année suivante. À l’opéra national d’Istanbul, le baryton-basse turc incarne le rôle-titre de Don Giovanni. Son répertoire comprend notamment Figaro (Le Nozze di Figaro), Leporello (Don Giovanni), Don Alfonso (Così fan tutte), Osmin (Die Entführung aus dem Serail), le Comte Robinson (Il Matrimonio segreto), le Prince Selim (Il Turco in Italia), Sparafucile (Rigoletto), Ferrando (Il Trovatore), le Grand-Prêtre (Nabucco), Colline (La Bohème), Basilio (Il Barbiere di Siviglia), les rôles-titres de Giulio Cesare in Egitto et Castor et Pollux, ce dernier lui ayant valu la récompense du meilleur chanteur lors des Donizetti Classical Music Awards d’Istanbul en 2013. Depuis 2005, il est membre de la troupe du Deutsche Oper am Rhein. Il s’est aussi produit à Trévise, Strasbourg, à l’Opéra des Flandres, lors des Opernfestspiele de St. Margarethen et des Wiener Festwochen, ainsi qu’au Bayerische Staatsoper et avec le Münchner Rundfunkorchester. Lors des deux dernières saisons du Deutsche Oper am Rhein, il a chanté les rôles suivants : Leporello, Oroveso (Norma), Angelotti (Tosca), Swallow (Peter Grimes) et le Fossoyeur lors de la création mondiale du nouvel opéra de Marius Felix Lange, Vom Mädchen, das nicht schlafen wollte. Il chantera encore Timur (Turandot) à l’Opéra national d’Oslo.
Dominique Chenes est diplômé de la section chant de l’université du Nevada à Las Vegas, où il chante des rôles comme Don José (Carmen), Ferrando (Così fan tutte), Tamino (Die Zauberflöte) et Rodolfo (La Bohème). En 2013, Dominick Chenes reçoit le 2ème prix de la fondation Gerda Lissner, le 3ème prix du concours Mario Lanza et une bourse de la fondation Albanese-Puccini. Il se perfectionne actuellement auprès de Bill Schuman. En 2013, il fait ses débuts à l’Alice Tully Hall avec le soutien de la fondation Licia Albanese-Puccini et au Zankel Hall avec celui de la fondation Gerda Lissner. En 2014, il fait ses débuts professionnels avec le rôle de Riccardo (Un ballo in maschera) à l’Austin Lyric Opera. Avec l’Academy of Vocal Arts de Philadelphie, il interprète des rôles comme Rodolfo (La Bohème) sous la direction de Christopher Macatsoris, Alfredo (La Traviata) et Grémine (La Dame de pique). Récemment, il fait ses débuts européens en Alfredo au festival Opera på Skäret en Suède. Parmi ses projets : Cavaradossi (Tosca) au Minnesota Opera, la Messe en Do de Beethoven au Carnegie Hall avec la New York Choral Society, Don José au Palm Beach Opera et Pinkerton à l’Austin Lyric Opera.
Au Grand Théâtre de Genève : Fidelio (Don Fernando) 14-15.
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Iopas • Ténor
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Narbal • Baryton-basse
Débuts au Grand Théâtre de Genève.
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BIOGRAPHIES
Sami Luttinen
Amelia Scicolone *
D’origine finlandaise, Sami Luttinen étudie à l’Académie Sibelius d’Helsinki. Il remporte le concours de chant Timo-Mustakallio au festival de Savonlinna en 1993, où il fait aussi ses débuts. De 1995 à 1997, il est engagé à l’opéra de Kiel et fait partie de la troupe du Deutsche Oper am Rhein depuis 1997. En 2000, il fait ses débuts à l’Opéra national de Helsinki en Leporello (Don Giovanni), puis à La Scala en Truffaldino (Ariadne auf Naxos). Il est réinvité à La Scala en 2003, où il est le Commissaire de police (Der Rosenkavalier). En 2006, il interprète Seneca (L’incoronazione di Poppea) au Bayerische Staatsoper de Munich, où il retourne en 2008 pour le rôle de Kadmos dans la première version scénique de Die Bassariden de Henze. Son répertoire comprend aussi : Rocco (Fidelio), Basilio (Il Barbiere di Siviglia), Raimondo (Lucia di Lammermoor), Banco (Macbeth), Ramfis (Aida), Filippo II (Don Carlos), Colline (La Bohème), Grémine (Eugène Onéguine), Pimène (Boris Godounov), Fasolt (Das Rheingold), Daland (Der fliegende Holländer), Pogner (Die Meistersinger von Nürnberg), Landgraf (Tannhäuser), Méphistophélès (Faust), Lindorf / Coppelius / Miracle / Dapertutto (Les Contes d’Hoffmann) et le Père (Louise). Il se produit en concert en Europe, sous la direction de chefs tels que Roger Norrington, Jiří Kout et Rafael Frühbeck de Burgos. Il donne aussi régulièrement des récitals. Parmi ses enregistrements : Friedenstag (le Prélat) et Ariadne auf Naxos (Truffaldino). Au Deutsche Oper am Rhein, il interprète plus récemment des rôles comme Wurm (Luisa Miller), John Claggart (Billy Budd), Sarastro (Die Zauberflöte), Hunding (Die Walküre), Daland, Bartolo (Le Nozze di Figaro), Ramfis, le Bailli (Werther), Faust (The Fiery Angel) et prochainement le Général Polkan (Le Coq d’or) et Le Grand Inquisiteur (Don Carlos).
Elle étudie la musique au conservatoire de Bâle, où elle reçoit en 2013 son diplôme avec félicitations du jury, présidé par Isolde Siebert. Elle est lauréate de la Fondation Friedl-Wald (2011), boursière du Hirzen Pavillon de Riehen (2012), deux fois vainqueur du Pour-cent culturel Migros (2012 et 2013) et du prix de la Basler Orchester Gesellschaft (2014). Elle est finaliste du concours international Mozart à Salzbourg, du concours européen DEBUT et demifinaliste du concours Cesti d’Innsbruck. Elle est en outre soliste lors de divers concerts, notamment au Festival de Lucerne avec Die Schuldigkeit des ersten Gebots, au Festival de Nyon avec un récital de chant composé de mélodies françaises et d’airs du répertoire verdien, elle donne aussi un récital de Lied, accompagnée par le guitariste Stephan Schmidt, et participe à plusieurs concerts de musique sacrée comme la Grande Messe en Ut mineur de Mozart, la Messe en Si mineur et le Magnificat de Bach, ainsi que la Petite Messe solennelle de Rossini. Elle collabore avec des chefs tels que Alessandro De Marchi, Michael Hasel et Jan Schultsz, des orchestres comme le Basel Sinfonietta, l’Academia Montis Regalis et le Camerata Schweiz et des metteurs en scène comme Tom Ryser et Frank Hilbrich. En 2013, elle interprète la Reine de la nuit au Festspielhaus de Baden-Baden dans une production intitulée Zauberflöte für Kinder avec le Berliner Philharmoniker. Durant la saison 20142015, elle se produit au Theater Basel dans L’Enfant et les Sortilèges (le Feu et le Rossignol) et aux opéras de Lausanne et de Fribourg dans Die Entführung aus dem Serail (Blondchen). Au Grand Théâtre de Genève, elle sera, en 2015-2016, Papagena (Die Zauberflöte) et Nanetta (Falstaff).
L’Ombre d’Hector • Basse
© © PATRICK DR STADLER
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Ascagne • Soprano
Au Grand Théâtre de Genève : La Calisto (Giove) 09-10, Rigoletto (Sparafucile) 14-15.
Au Grand Théâtre de Genève : Guillaume Tell (Jemmy) 15-16.
*Membre de la Troupe des jeunes solistes en résidence
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BIOGRAPHIES
Dana Beth Miller
Bernard Richter
La mezzo-soprano américaine Dana Beth Miller se produit sur des scènes lyriques telles que les Metropolitan Opera de New York, Lyric Opera de Chicago, Deutsche Oper de Berlin, New York City Opera, Boston Lyric Opera, ainsi que les opéras de San Francisco, Washington, Seattle, Dallas et Cincinnati. Sa saison 2014-2015 débute avec Verlobung im Traum de Hans Krása dans le rôle de Maria Alexandrovna, au Badisches Staatstheater de Karlsruhe. Elle est ensuite invitée au Deutsche Oper de Berlin pour Mrs Quickly dans une reprise de la production de Christof Loy de Falstaff, Annina dans Der Rosenkavalier, Sonietka dans une nouvelle production de Lady Macbeth de Mzensk, la 1ère Servante dans Elektra et Princesse Clarisse dans L’Amour des trois oranges. Elle se produit aussi au Washington Opera dans le rôle de Mary (Der fliegende Holländer) et fait ses débuts dans celui d’Azucena (Il Trovatore) au Knoxville Opera. Ses engagements en 2015-2016 comprennent : Hippolyta (A Midsummer Night’s Dream) au Grand Théâtre de Genève, Adalgisa (Norma) au Florida Grand Opera, Mrs Quickly (Falstaff) à l’Arizona Opera de Phœnix et au Badisches Staatstheater de Karlsruhe, Dalila (Samson et Dalila) au Tulsa Opera, Erda (Das Rheingold) au Badisches Staatstheater, le Messiah de Händel avec le Tucson Symphony Orchestra, Mrs Sedley (Peter Grimes) et Azucena (Il Trovatore) au Deutsche Oper de Berlin.
Il commence ses études à Neuchâtel dans la classe d’Yves Senn puis devient membre de l’Opéra Studio Suisse de Bienne. En 2001, il est finaliste du Concours international de Paris puis débute une carrière internationale à Leipzig dans le rôle de Tamino (Die Zauberflöte), Il Regista (Un Re in ascolto de Berio) à Francfort et Lucerne, Ferrando (Così fan tutte) au Théâtre de Bâle, Pâris (La Belle Hélène) et Fritz (La Grande-Duchesse de Gérolstein) au Théâtre du Châtelet. En 2005, il est Guidobaldo (Die Gezeichneten) et Hylas (Les Troyens) à l’Opéra national de Paris. En concert, il interprète Publio (Il Sogno di Scipione) à la Philharmonie de Berlin, Acis (Acis e Galatea) au Festival de Salzbourg et Ariel (Faust Szenen) au Festival Styriarte. En 2009, il apparaît dans un programme Schubert à Turin et dans Tobia (Il Ritorno di Tobia) à Rome et au Konzerthaus de Vienne. Il chante Don Ottavio (Don Giovanni) à l’Opéra de Zurich, Ecclitico (Il Mondo della Luna) au Theater an der Wien, Clotarco (Armida) au Festival de Salzbourg, Alphonse (Zampa de Hérold) à l’Opéra Comique, Tamino (Die Zauberflöte) à l’Opéra national de Paris, les rôles-titres de Mitridate, Idomeneo et Lucio Silla au Theater Freiburg, le Chevalier de la Force (Dialogues des Carmélites) au Bayerische Staatsoper, Steuermann (Der fliegende Holländer) à l’Opéra national de Paris et le rôle-titre d’Atys à l’Opéra Comique. Plus récemment, il est Belmonte (Die Entführung aus dem Serail) à l’Opéra national de Paris, Eginhard (Fierrabras) à La Monnaie de Bruxelles, Pelléas (Pelléas et Mélisande) à l’Opéra de Lyon et George (Der fliegende Holländer) au Theater an der Wien.
© JAK BUEHNE
Hylas • Ténor
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Anna • Mezzo-soprano
Au Grand Théâtre de Genève : Ariadne auf Naxos (Brighella) Débuts au Grand Théâtre de Genève.
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06-07, Die lustige Witwe (Camille) 10-11.
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BIOGRAPHIES
Michail Milanov
Jérémie Schütz
Michail Milanov effectue des études de chant à la Haute École de musique de Sofia, sa ville natale. Il est ensuite engagé par les scènes lyriques de Mainz, Brême, Bonn, Wuppertal et au Gärtnerplatztheater de Munich, notamment. Son répertoire comprend, entre autres rôles, Sarastro (Die Zauberflöte), Boris (Boris Godounov), Philippe II (Don Carlos), Ramphis (Aida), Zacharias (Nabucco), Tchélio (L’Amour des trois oranges), Grémine (Eugène Onéguine), Daland (Der fliegende Holländer) et Marke (Tristan und Isolde). Dès la saison 2001-2002, il fait partie de la troupe du Deutsche Oper am Rhein, où il interprète notamment Priam (Les Troyens), Stromminger (La Wally) et chante dans Moses und Aron. Plus récemment, il incarne Il Commendatore (Don Giovanni) et Obdachloser (Lola rennt) au Theater Hagen, Yunus Güner (Gegen die Wand) et Simone (Gianni Schicchi) au Deutsche Oper am Rhein.
Très jeune, Jérémie Schütz s’intéresse à la scène. Adulte, il se tourne vers l’opéra et choisit d’étudier la musique. Il intègre alors la classe de Hiroko Kawamichi à la Haute École de musique de Lausanne, où il rencontre Armand Deladoëy avec qui il se penche sur le travail scénique, étudiant des rôles tels que Werther (Massenet), Don Carlos (Verdi) ou le Chevalier de la Force des Dialogues des Carmélites de Francis Poulenc. Il participe à plusieurs classes de maître, entre autres, avec Helmut Deutsch, Martin Katz, John Fiore et, plus récemment, Ludovic Tézier. En janvier 2015, il rejoint une formation d’escrime de scène et de cascade afin d’approfondir ses compétences scéniques. Il participe à la Petite Messe solennelle de Rossini, aux Sept Paroles du Christ de César Franck. Il se produit au Victoria Hall de Genève dans la Messe en Ut mineur de Mozart et dans le Requiem de Bottesini. Il chante aussi le Requiem de Mozart à la Cathédrale de Lausanne. Dans le répertoire lyrique, il interprète le rôle du Marginal dans Les Musiciens de la ville de Berne (création de René Falquet), Rinuccio dans Gianni Schicchi et Ferrando dans Così fan tutte. En 2014, il est lauréat de la bourse Colette Mosetti et remporte, la même année, le Prix de la mélodie ainsi que le Prix du jeune espoir au concours international des Symphonies d’Automne de Mâcon. En 2015, il obtient le prix d’études du Pour-cent culturel Migros. Au cours de la saison 2015-2016, il interprètera le rôle de Raflafla dans Mesdames de la Halle à Lyon, dans le cadre de l’opéra-studio de l’Opéra de Lyon.
© YUKI TSURUSAKI
Hélénus • Ténor
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Priam / le Spectre de Priam • Basse
Au Grand Théâtre de Genève : L’Amour des trois oranges (Tchélio) 10-11, Richard III (2 ème Assassin / le Maire), Der Rosenkavalier (le Commissaire de police) 11-12.
Au Grand Théâtre de Genève : Guillaume Tell (Rodolphe) 15-16.
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Mi-Young Kim*
Aleksandar Chaveev*
© NICOLAS SCHOPFER
Nicolas Carré* Un chef grec • Basse
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Mi-Young Kim étudie le chant, le piano et la composition à l’université Yonsei de Séoul et au conservatoire de Santa Cecilia à Rome. Elle fait ses débuts dans le rôle de Suzuki (Madama Butterfly). Elle a donné de nombreux concerts en Europe et aux États-Unis, notamment au Jefferson Memorial de Washington. Son répertoire va du baroque au contemporain sans oublier la musique sacrée. En tant que chef de chant, Mi-Young Kim a, entre autres, travaillé au Teatro Manzoni de Rome et au Concours international de chant de Zenzano. Elle est saluée par la critique pour sa prestation dans l’opéra Madonna Oretta. En 2009, elle reçoit le 1er prix du concours de Bourgogne, à l’unanimité du jury présidé par Natalie Dessay. En 2010, elle chante Orphée (Orphée et Eurydice de Gluck, dans la version de Berlioz), au Victoria Hall de Genève. En 2014, elle était Berta (Il Barbiere di Siviglia) au Teatro Moderno de Grossetto. L’été dernier, une compilation de gospels composés par Mi-Young Kim a été commercialisé en Corée.
Un soldat / Le Spectre d’Hector • Basse
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Hécube • Mezzo-soprano
Au Grand Théâtre de Genève : Les Troyens (Une nubienne) 07-08, Der Freischütz (Une demoiselle d’honneur) 08-09, Alice in Wonderland (Juré / Lézard) 09-10, La Petite Zauberflöte (3ème Dame) 10-11, Juliette ou la Clé des songes (3ème Monsieur) 11-12, JJR (chef de chant), Les Aventures du roi Pausole (Une girl) et Madama Butterfly (la Mère de Cio-Cio-San) 12-13, Iphigénie en Tauride (1ère Prêtresse) 14-15.
*Membre deu Chœur du Grand Théâtre de Genève
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*Membre deu Chœur du Grand Théâtre de Genève
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Rodrigo Garcia*
© NICOLAS SCHOPFER
1ère sentinelle • Basse
Philip Casperd*
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2ème sentinelle • Basse
*Membre deu Chœur du Grand Théâtre de Genève
*Membre deu Chœur du Grand Théâtre de Genève
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INFORMATIONS PRATIQUES Horaires des représentations Les représentations ont lieu généralement à 19 h 30 en soirée et à 15 h en matinée. Pour certains spectacles, ces horaires peuvent être différents. Les horaires sont toujours indiqués sur les billets
1 heure avant le spectacle les bars du hall, des foyers et du sous-sol vous proposent boissons et petite restauration.
Ouverture des portes L’accès à la salle est possible trente minutes avant le spectacle.
Dès 30 minutes avant le spectacle Le bar des foyers vous propose boissons et petite restauration.
Retardataires Par respect pour le public et les artistes, après le début du spectacle l’accès à la salle se fait à la première interruption et aux places accessibles. Un circuit vidéo permet généralement de suivre le début du spectacle. Aucun remboursement ou échange de billet ne sera effectué en cas de retard.
À l’entracte Les bars du hall, des foyers, du sous-sol et de l’amphithéâtre vous proposent boissons et petite restauration.
Vestiaires Des vestiaires payants sont à la disposition du public aux différents niveaux du Grand Théâtre de la place de Neuve et à l’entrée de l’Opéra des Nations (Fr. 2.-). Jumelles Des jumelles peuvent être louées dans tous les vestiaires (Fr. 5.-). Rehausseurs Disponibles aux vestiaires (service gratuit).
CONFÉRENCE DE PRÉSENTATION
Trente minutes avant chaque opéra, un musicologue vous donne quelques clés pour mieux apprécier le spectacle.
SUR L’ŒUVRE
Pour chaque opéra et création chorégraphique de la saison 15-16, une conférence très complète sur l’œuvre est organisée quelques jours avant la première représentation, toujours à la même heure, 18 h 15, par l’Association genevoise des amis de l’opéra et du ballet www.amisdelopera.ch
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BARS
RESTAURANT Avant le spectacle et durant l’entracte Le restaurant du sous-sol propose, lors de certains spectacles, une assiette composée servie directement à la table qui vous a été préalablement réservée (Fr. 35.- avec une boisson). Menu sur www.geneveopera.ch, réservation obligatoire à la billetterie.
Enregistrements Il est interdit de photographier, de filmer ou d’enregistrer les spectacles. Tout contrevenant peut être soumis à des poursuites. Surtitrage Les ouvrages font généralement l’objet d’un surtitrage bilingue français-anglais. Le Grand Théâtre remercie vivement la Fondation Hans-Wilsdorf grâce à laquelle ce surtitrage vous est proposé. Programmes et affiches Les programmes et les affiches des spectacles passés ou en cours sont en vente à la billetterie du Grand Théâtre. Boutique du Grand Théâtre de Genève Avant chaque représentation, des CDs, des articles en lien avec le spectacle en cours vous sont proposés.
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BILLETTERIE DU GRAND THÉÂTRE Au Grand Théâtre de Genève 5, place de Neuve. Du lundi au samedi de 10 h à 18 h et jusqu'à 19 h 30 les jours de spectacle. Le dimanche dès 1 h 30 avant le début de la représentation. Par téléphone T + 41 22 322 50 50. Du lundi au samedi de 10 h à 18 h Par courriel, fax ou courrier Billetterie du Grand Théâtre CP 5126 - CH 1211 Genève 11 billetterie@geneveopera.ch F + 41 22 322 50 51 En ligne sur le site www.geneveopera.ch Réservez vos places et collectez-les à la billetterie du Grand Théâtre ou imprimez-les directement à votre domicile. Les places réservées sont à régler dans les 48 h. Selon les délais, les billets réservés et payés peuvent être envoyés à domicile (Frais de port : Fr. 4.-). Modes de paiement acceptés : Mastercard et Visa Dans le réseau FNAC en Suisse et en France Tarifs réduits Un justificatif doit être présenté ou envoyé pour tout achat de billet à tarif réduit. Remboursement / échange Les billets sont remboursés ou échangés seulement lors d’annulation de spectacle et non en cas de modifications de programmation ou de distribution en cours de saison. Les abonnés du Grand Théâtre ainsi que les détenteurs de la carte fidélité du Grand Théâtre de Genève peuvent changer leurs dates de spectacles jusqu’à la veille de la représentions avant midi (1 er échange gratuit, puis Fr. 5.- par commande sauf pour les détenteurs du Grand abonnement Carré d’or). Réservation de groupe Les associations et groupements à but non lucratif peuvent réserver des places de spectacle à tarifs préférentiels durant toute la saison. Dossier spécial et réservation T +41 22 322 50 50 F + 41 22 322 50 51 groupes@geneveopera.ch
Soirées entreprises Les entreprises souhaitant organiser une soirée au Grand Théâtre peuvent prendre contact avec Aurélie Élisa Gfeller, notre responsable du mécénat. T +41 22 322 50 58 F + 41 22 322 50 98 mecenat@geneveopera.ch
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TARIF SPÉCIAUX BILLETS JEUNES 25 % de réduction sur le plein tarif billetterie à partir de la catégorie C pour les jeunes de moins de 26 ans. CARTE 20 ANS/20 FRANCS Réduction de Fr 2.- sur l’achat de billet au tarif jeune et un programme de spectacle offert (Une pièce d’identité sera demandée pour accéder à la salle). TITULAIRES DU CHÉQUIER CULTURE Réduction de Fr. 10.- par chèque sur l’achat de places de spectacle à la billetterie du Grand Théâtre (chèques cumulables) PASSEDANSE Avec le Passedanse (valeur de Fr. 20.-), vous obtenez des réductions tarifaires sur les spectales chorégraphiques du Grand Théâtre de Genève et des partenaires du Passedanse. TARIFS PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP Gratuité pour l’accompagnant d’une personne malvoyante ou aveugle ; surclassement pour les personnes à mobilité réduite, malentendantes ou sourdes. OFFRE 30-30-30 Dans la limite des places disponibles, des places à Fr. 30.sont proposées une demi-heure avant le début des spectacles aux personnes ayant jusqu’à 30 ans révolus sur présentation d’une pièce justificative.
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an
BILLETS LAST MINUTE Dans la limite des places disponibles, des places à Fr. 30.- ou Fr. 50.- sont proposées une demi-heure avant le début des spectacles pour tout étudiant ou demandeur d’emploi de plus de trente ans sur présentation d’une pièce justificative.
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MÉCÉNAT & PARTENARIAT EN SOUTENANT LE GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE VOUS ÊTES PARTENAIRE DE L’EXCELLENCE
Depuis plusieurs années, le Grand Théâtre de Genève mène une politique de partenariat évolutive avec les entreprises. Chaque proposition vise à offrir à nos partenaires à la fois un service inédit comportant une large palette d’approches avec les différents secteurs artistiques et techniques inhérents à la vie d’un théâtre, mais également un service utile et flexible tout au long de la saison. En soutenant le Grand Théâtre de Genève vous devenez partenaire de l’excellence. Vous touchez un public large et diversifié – plus de 100 000 spectateurs par saison – et bénéficiez ainsi d’un impact médiatique fort et positif. Vous montrez votre attachement à la diffusion de spectacles des arts vivants et permettez la réalisation de projets culturels innovants.
Contactez-nous pour une offre personnalisée. Aurélie Élisa Gfeller T + 41 22 322 50 58 F + 41 22 322 50 98 a.gfeller@geneveopera.ch
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LA FONDATION DU GRAND THÉÂTRE La Fondation du Grand Théâtre de Genève est une Fondation d’intérêt public communal, subventionnée par la Ville de Genève, dont l’objet est artistique et culturel. Le but de la Fondation est d’assurer l’exploitation du Grand Théâtre de Genève, notamment en y organisant des spectacles d’art lyrique, chorégraphique et dramatique. Le Statut de la Fondation a fait l’objet d’une loi cantonale de 1964. La Fondation est composée de quatorze membres désignés par le Conseil municipal et le Conseil administratif de la Ville de Genève. Le Bureau compte cinq membres du Conseil de Fondation. Conseil de Fondation (au 03.09.2015) Mme Lorella Bertani, présidente M. Guy-Olivier Segond, vice-président M. Pierre Conne, secrétaire M. Claude Demole M. Sami Kanaan M. Rémy Pagani M. Manuel Tornare M. Jean-Pierre Jacquemoud M. Pierre Losio Mme Danièle Magnin Mme Françoise de Mestral M. Albert Rodrik M. Pascal Rubeli Mme Salika Wenger M. Guy Demole, président d’honneur M. Jean-Flavien Lalive d’Epinay, président d’honneur †
Secrétariat Cynthia Haro T +41 22 322 51 71 F +41 22 322 50 01 c.haro@geneveopera.ch
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LE CERCLE DU GRAND THÉÂTRE Fondé en 1986, le Cercle du Grand Théâtre s’est donné pour objectif de réunir toutes les personnes et entreprises qui tiennent à manifester leur intérêt aux arts lyrique, chorégraphique et dramatique. Son but est d’apporter son soutien financier aux activités du Grand Théâtre et ainsi, de participer à son rayonnement. Bureau (septembre 2015) M. Luc Argand, président M. Pierre-Alain Wavre, vice-président M. Jean Kohler, trésorier Mme Véronique Walter, secrétaire Mme Françoise de Mestral Autres membres du Comité (septembre 2015) Mme Claudia Groothaert Mme Vanessa Mathysen-Gerst Mme Coraline Mouravieff-Apostol Mme Brigitte Vielle M. Gerson Waechter Membres bienfaiteurs M. et Mme Luc Argand M. et Mme Guy Demole Fondation de bienfaisance du groupe Pictet Fondation Hans Wilsdorf M. et Mme Pierre Keller Banque Lombard Odier & Cie SA M. et Mme Yves Oltramare Mrs Laurel Polleys-Camus M. et Mme Adam Saïd Union Bancaire Privée – UBP SA M. Pierre-Alain Wavre M. et Mme Gérard Wertheimer Membres individuels S. A. Prince Amyn Aga Khan Mme Diane d’Arcis S. A. S. La Princesse Etienne d’Arenberg Mme Dominique Arpels M. Ronald Asmar Mme René Augereau Mme Véronique Barbey Mme Christine Batruch-Hawrylyshyn
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Mme Maria Pilar de la Béraudière M. et Mme Philippe Bertherat Mme Antoine Best M. et Mme Rémy Best Mme Saskia van Beuningen Mme Françoise Bodmer M. Jean Bonna Prof. et Mme Julien Bogousslavsky Mme Christiane Boulanger Mme Clotilde de Bourqueney Harari Comtesse Brandolini d’Adda Mme Robert Briner M. et Mme Yves Burrus Mme Caroline Caffin M. et Mme Alexandre Catsiapis Mme Maria Livanos Cattaui Mme Muriel Chaponnière-Rochat M. et Mme Julien Chatard M. et Mme Neville Cook M. Jean-Pierre Cubizolle M. et Mme Claude Demole M. et Mme Olivier Dunant Mme Denise Elfen-Laniado Mme Maria Embiricos Mme Diane Etter-Soutter Mme Catherine Fauchier-Magnan Mme Clarina Firmenich M. et Mme Eric Freymond Mme Elka Gouzer-Waechter Mme Claudia Groothaert M. et Mme Philippe Gudin de La Sablonnière Mme Bernard Haccius Mme Théréza Hoffmann M. Patrick Houitte de la Chesnais M. et Mme Philippe Jabre M. et Mme Eric Jacquet M. Romain Jordan Mme Madeleine Kogevinas M. et Mme Jean Kohler M. David Lachat M. Marko Lacin Mme Michèle Laraki M. et Mme Pierre Lardy Mme Eric Lescure Mme Eva Lundin
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M. Bernard Mach Mme France Majoie Le Lous M. et Mme Colin Maltby Mme Catherine de Marignac M. Thierry de Marignac Mme Mark Mathysen-Gerst M. Bertrand Maus M. Olivier Maus Mlle Lizy Maymard Mme Béatrice Mermod M. et Mme Charles de Mestral M. et Mme Francis Minkoff Mme Jacqueline Missoffe M. et Mme Christopher Mouravieff-Apostol Mme Pierre-Yves Mourgue d’Algue M. et Mme Philippe Nordmann M. et Mme Alan Parker M. et Mme Shelby du Pasquier Mme Sibylle Pastré M. Jacques Perrot M. et Mme Wolfgang Peter Valaizon M. et Mme Gilles Petitpierre M. et Mme Charles Pictet M. et Mme Guillaume Pictet M. et Mme Ivan Pictet M. et Mme Jean-François Pissettaz Mme Françoise Propper Comte de Proyart Mme Ruth Rappaport M. et Mme François Reyl M. et Mme Andreas Rötheli M. et Mme Gabriel Safdié Comte et Comtesse de Saint-Pierre M. Vincenzo Salina Amorini M. et Mme Paul Saurel M. Julien Schoenlaub Mme Claudio Segré Baron et Baronne Seillière M. Thierry Servant Marquis et Marquise Enrico Spinola Mme Christiane Steck M. et Mme Riccardo Tattoni M. et Mme Kamen Troller M. et Mme Gérard Turpin M. et Mme Jean-Luc Vermeulen
M. et Mme Julien Vielle M. et Mme Olivier Vodoz Mme Bérénice Waechter M. Gerson Waechter Mme Stanley Walter M. et Mme Lionel de Weck Mme Paul-Annik Weiller Membres institutionnels 1875 Finance SA Banque Pâris Bertrand Sturdza SA Christie’s (International) SA Credit Suisse SA FBT Avocats SA Fondation Bru Givaudan SA H de P (Holding de Picciotto) SA JT International SA Lenz & Staehelin MKB Conseil & Coaching SGS SA Vacheron Constantin
Inscriptions Cercle du Grand Théâtre de Genève Mme Gwénola Trutat 11, boulevard du Théâtre • CH-1211 Genève 11 T +41 22 321 85 77 F +41 22 321 85 79 du lundi au vendredi de 8 h à 12 h cercle@geneveopera.ch Compte bancaire N° 530 290 MM. Pictet & Cie Organe de révision Plafida SA
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LE GRAND THÉÂTRE L’ÉQUIPE DIRECTION GÉNÉRALE Directeur général Tobias Richter Assistante du directeur général Sandrine Chalendard SECRÉTARIAT GÉNÉRAL Secrétaire général Claus Hässig Secrétaire Cynthia Haro ARTISTIQUE Conseiller artistique & dramaturge Daniel Dollé Assistante dramaturge Petya Ivanova BALLET Directeur du Ballet Philippe Cohen Adjoint Vitorio Casarin Coordinatrice administrative Émilie Schaffter Maîtres de ballet Grant Aris, Grégory Deltenre Pianiste Serafima Demianova Danseuses Céline Allain, Yumi Aizawa, Louise Bille, Ornella Capece, Andie Masazza, Virginie Nopper, Lysandra van Heesewijk, Angela Rebelo, Sara Shigenari, Sarawanee Tanatanit, Madeline Wong Danseurs Natan Bouzy, Valentino Bertolini, David Bernt Lagerqvist, Zachary Clark, Armando Gonzalez, Vladimir Ippolitov, Xavier Juyon, Nathanaël Marie, Simone Repele, Geoffrey Van Dyck, Nahuel Vega TECHNIQUE DU BALLET Directeur technique du ballet Philippe Duvauchelle Régisseur lumières Alexandre Bryand Régisseur plateau Mansour Walter Service médical Dr Jacques Menetrey HUG Physiothérapeute Florence Nguyen Huu Ostéopathe Bruno Soussan
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TROUPE DES JEUNES SOLISTES EN RÉSIDENCE Mary Feminear, Ahlima Mhamdi, Amelia Scicolone, Michel de Souza Erlend Tvinnereim CHŒUR Chef des chœurs Alan Woodbridge Assistant/pianiste Jean-Marc Perrin Pianiste répétiteur Réginald Le Reun Régisseur et chargé de l’administration Omar Garrido Sopranos Fosca Aquaro, Chloé Chavanon, Magali Duceau, Györgyi GarreauSarlos, Nicola Hollyman, Iana Iliev, Victoria Martynenko, Martina Möller-Gosoge, Iulia Elena Preda, Cristiana Presutti Altos Vanessa Beck-Hurst, Audrey Burgener, Dominique Cherpillod, Marianne Dellacasagrande, Lubka Favarger, Varduhi Khachatryan, Mi-Young Kim, Johanna RittinerSermier, Mariana Vassileva Chaveeva Ténors Jaime Caicompai, Yong-Ping Gao, Omar Garrido, Rémi Garin, Lyonel Grélaz, Sanghun Lee, José Pazos, Terige Sirolli, Georgi Sredkov, Bisser Terziyski, Nauzet Valerón Basses Krassimir Avramov, Wolfgang Barta, Romaric Braun, Nicolas Carré, Phillip Casperd, Aleksandar Chaveev, Peter Baekeun Cho, Christophe Coulier, Harry Draganov, Seong-Ho Han, Rodrigo Garcia, Dimitri Tikhonov PRODUCTION ARTISTIQUE Responsable production artistique & mise en scène Ivo Guerra Assistante & Respons. figuration Matilde Fassò Resp. ressources musicales Éric Haegi Pianistes / Chefs de chant Todd Camburn, Xavier Dami, Réginald Le Reun RÉGIE DE SCÈNE Régisseure générale Chantal Graf Régisseur de scène Jean-Pierre Dequaire
MARKETING ET COMMUNICATION Resp. marketing & communication Mathieu Poncet Adjoint & responsable Presse Frédéric Leyat Responsable des éditions et de la création visuelle Aimery Chaigne Assistante communication Corinne Béroujon Assist. presse & communication Isabelle Jornod Concepteur communication web Wladislas Marian Chargée du mécénat et des partenariats Aurélie Gfeller Chargée des actions pédagogiques Elsa Barthas Responsable du public jeune Fabrice Farina Archiviste Anne Zendali ACCUEIL ET PUBLICS Responsable de l’accueil des publics Pascal Berlie Personnel d’accueil Herminia Bernardo Pinhao, Ludmila Bédert, Patrick Berret, Karla Boyle, David Blunier, Nguyen Phuong Lé Bui, Aude Burkardt, Michel Denis Chappellaz, Chantal Chevallier, Marie-Odile Clementz, Patricia Diaz, Nicolas Dutour, Feka Iljaz, Pouyan Farzam, Xénia Mahaut Gobet, Stephen Hart, Valentin Herrero, Na Lin, Ada Lopez Linarez Hunziker, Teymour Kadjar, Nelli Kazaryan Peter, Tamim Mahmoud, Marlène Maret, Jacky Merteau, Sophie Millar, Matteo Pallante, Flavio Perret-Gentil, Lydia Pieper, Lucas Seitenfus, Alihuen Vera, David von Numers, Quentin Weber, Céline Steiger Zeppetella TECHNIQUE Directeur technique Jean-Yves Barralon Adjointe administrative Sabine Buchard Ingénieur bâtiment et sécurité Pierre Frei Responsable d’entretien Thierry Grasset Menuisier de plateau et chargé de l’entretien Jean-François Mauvis Chargée de production technique Catherine Mouvet
Logistique Thomas Clément Chauffeur Alain Klette BUREAU D’ÉTUDES Ingénieur bureau d’études Alexandre Forissier Chargé d’études de productions Fabrice Bondier Assistant Christophe Poncin Dessinateurs Stéphane Abbet, Denis Chevalley, Antonio Di Stefano SERVICE INTÉRIEUR Huissier responsable Stéphane Condolo Huissier-ère-s Valdemar De Almeida, Valentin Herrero, Antonios Kardelis, Michèle Rindisbacher Coursiers / huissiers Bekim Daci, Bernard Thierstein TECHNIQUE DE SCÈNE Adjoint au directeur technique Philippe Alvado Chefs de plateau Gabriel Lanfranchi, Stéphane Nightingale MACHINERIE Chef de service Olivier Loup Sous-chefs Pascal Chevalley, Juan Calvino, Patrick Savariau Sous-chef cintrier Patrick Werlen Brigadiers Stéphane Desogus, Jean-Claude Durand, Henrique Fernandes Da Silva, Yannick Sicilia Sous-brigadiers Stéphane Catillaz, Manuel Gandara, Johny Perillard Machinistes cintriers Vincent Campoy, Stéphane Guillaume, Alfio Scarvaglieri, Nicolas Tagand Machinistes Killian Baud, Gérard Berdat, Philippe Calame, Éric Clertant, Jérôme Favre, Sedrak Gyumushyan, Michel Jarrin, Daniel Jimeno, Sulay Jobe, Julien Pache, Hervé Pellaud
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SON ET VIDÉO Chef de service Michel Boudineau Sous-chef Claudio Muller Technicien-ne-s Amin Barka, Jean-Marc Pinget, NN ÉCLAIRAGE Chef de service Simon Trottet Sous-chefs de production Marius Echenard, Robin Minkhorst Sous-chef opérateur lumières et informatique de scène Stéphane Gomez Coordinateur de production Blaise Schaffter Technicien-ne-s éclairagistes Serge Alérini, Dinko Baresic, Salim Boussalia, Stéphane Estève, Hélène König, Camille Rocher, Juan Vera Electronicien Jean Sottas Opérateurs lumière et informatique de scène Clément Brat, Florent Farinelli, David Martinez Responsable entretien électrique Fabian Pracchia ACCESSOIRES Chef de service Damien Bernard Sous-chef Patrick Sengstag Accessoiristes Vincent Bezzola, Joëlle Bonzon, Françoise Chavaillaz, Cédric Pointurier Solinas, Anik Polo, Padrut Tacchella, Cécilia Viola, Pierre Wüllenweber ELECTROMÉCANIQUE Chef de service Jean-Christophe Pégatoquet Sous-chef José-Pierre Areny Electromécaniciens David Bouvrat, Stéphane Resplendino, Christophe Seydoux, Emmanuel Vernamonte, NN HABILLAGE Cheffe de service Joëlle Muller Sous-cheffe Sonia Ferreira Responsable costumes Ballet Caroline Bault
Habilleur-euse-s Julie Deulieutraz, Raphaële Bouvier, Gloria del Castillo, Cécile Cottet-Nègre, Angélique Ducrot, France Durel, Philippe Jungo, Olga Kondrachina, Christelle Majeur, Lorena Vanzo Pallante, Léa Perarnau PERRUQUES ET MAQUILLAGE Cheffe de service Karine Cuendet Sous-cheffe Christelle Paillard Perruquier-ère-s et maquilleur-euse-s Aurélie Escamez, Cécile Jouen, Muriel Pignon-Heinis ATELIERS DÉCORS Chef des ateliers décors Michel Chapatte Assistant Christophe Poncin Magasiniers Maurice Bossotto, Marcel Géroudet, Roberto Serafini MENUISERIE Chef de service Stéphane Batzli Sous-chef Claude Jan-Du-Chêne Menuisiers Pedro Brito, Giovanni Conte, Christian Furrer, Frédéric Gisiger, Philippe Moret, Manuel Puga Becerra SERRURERIE Contremaître Serge Helbling Serruriers Patrick Barthe, Yves Dubuis, Patrice Dumonthey, Marc Falconnat PEINTURE ET DÉCORATION Chef de service Fabrice Carmona Sous-chef Christophe Ryser Peintres Gemy Aïk, Ali Bachir-Chérif, Stéphane Croisier, Bernard Riegler TAPISSERIE-DÉCORATION Chef de service Dominique Baumgartner Sous-chef Philippe Lavorel Tapissier-ères-s et décorateur-trice-s Pierre Broillet, Fanny Silva Caldari, Daniela De Rocchi, Raphaël Loviat, Dominique Humair Rotaru
ATELIERS COSTUMES Cheffe des ateliers costumes Fabienne Duc Assistant-e-s Armindo Faustino-Portas, Carole Lacroix ATELIER DE COUTURE Chef de service Khaled Issa Costumier-ère-s Deborah Parini, Gerda Salathé Tailleur-e-s Amar Ait-Braham, Lurdes Do Quental Couturier-ère-s Sophie de Blonay, Ivanna Costa, Julie Chenevard, Marie Hirschi, Eva Krähenbuhl, Gwenaëlle Mury, Xavier Randrianarison, Ana-Maria Rivera, Soizic Rudant, Liliane Tallent, Astrid Walter
RESTAURATION Responsable restauration, Christian Lechevrel Cuisinier Olivier Marguin Collaborateur-trice-s Norberto Cavaco, Maria Savino RESSOURCES HUMAINES Responsable des ressources humaines - Juriste NN Assistante Priscilla Richon Gestionnaires ressources humaines Valérie Aklin, Marina Della Valle, Luciana Hernandez
ATELIER DE DÉCORATION & ACCESSOIRES COSTUMES Responsable Isabelle Pellissier-Duc Décoratrices Corinne Baudraz, Emanuela Notaro ATELIER CUIR Chef de service Michel Blessemaille Cordonnières Salomé Davoine, Catherine Stuppi SERVICE FINANCIER Chef de service Philippe Bangerter Comptables Paola Andreetta, Andreana Bolea Tomkinson, Chantal Chappot, Laure Kabashi, Sandrine Perotti BILLETTERIE Responsable billetterie et développement commercial Christopher Bugot Adjointe Carine Druelle Collaborateur-trice-s billetterie Fanny Claivaz, Hawa Diallo-Singaré, Chloé Huard INFORMATIQUE Chef de service Marco Reichardt Administrateurs informatique & télécoms Lionel Bolou, Ludovic Jacob
PERSONNEL SUPPLÉMENTAIRE TEMPORAIRE SAISON 15-16 Création visuelle & édition Sandra Gonzalez (apprentie) Marketing & Communication Santiago Lopez Tallon Pascale Petro Technique de scène Bryan Mouchet (apprenti) Serrurerie Alexandre Lehmann Menuiserie René Clasen Grégory Gabriel Peinture-décoration Yoany Andino Diaz Line Helfer (apprentie) Ateliers costumes Sylvianne Guillaume Cuir Kim Scheidegger (apprentie) Ressources Humaines Romina Giusti (apprentie)
Situation au 25.09.2015
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PROCHAINEMENT OPÉRA
BALLET
A Midsummer Night's Dream
Casse-Noisette
Opéra en 3 actes de Benjamin Britten Nouvelle production Au Grand Théâtre de Genève 20, 24, 26, 28, 30 novembre 2015 à 19 h 30 22 novembre 2015 à 15 h Direction musicale Steven Sloane Mise en scène Katharina Thalbach Décors et costumes Ezio Toffolutti Lumières Ezio Toffolutti / Simon Trottet Chorégraphie Darie Cardyn Avec Christopher Lowrey, Bernarda Bobro, Anna Thalbach, Brandon Cedel, Dana Beth Miller, Shawn Mathey, Stephan Genz, Stephanie Lauricella, Mary Feminear, Alexey Tikhomirov, Stuart Patterson, Erlend Tvinnereim, Michel de Souza, Jérémie Brocard, Paul Whelan Maîtrise du Conservatoire populaire de musique de Genève Direction Magali Dami et Serge Ilg Orchestre de la Suisse Romande Conférence de présentation par Pierre Michot en collaboration avec l’Association genevoise des amis de l’opéra et du ballet. Au Grand Théâtre de Genève (Foyer) Lundi 16 novembre 2015 à 18 h 15
Ballet-féerie en 2 actes, 3 tableaux et 15 scènes Reprise de la production de novembre 2014 Au Grand Théâtre de Genève 21, 23, 25, 27 novembre 2015 à 19 h 30 29 novembre 2015 à 15 h Direction musicale Philippe Béran Chorégraphie Jeroen Verbruggen Scénographie et costumes « On aura tout vu » Livia Stoianova et Yassen Samouilov Assistante scénographie Émilie Roy Lumières Ben Ormerod Ballet du Grand Théâtre de Genève Direction Philippe Cohen Basel Sinfonietta
SPECTACLE
Opéra de Pékin
Accueil du Jingju Theater Company of Beijing Ensemble Au Grand Théâtre de Genève
Les Femmes générales de la famille Yang Samedi 31 octobre 2015 à 19 h 30
La Bourse à la licorne
Dimanche 1er novembre 2015 à 15 h Avec Li Hongyan, Shen Wenli, Zhang Jianfeng, Chi Xiaoqiu, Jiang Yishan, Mei Qingyang
Directeur de la publication Tobias Richter Responsable de la rédaction Daniel Dollé Responsable de l’édition Aimery Chaigne ont collaboré à ce programme Sandra Gonzalez, Petya Ivanova, Isabelle Jornod Impression Atar Roto Presse SA ACHEVÉ D’IMPRIMER EN OCTOBRE 2015
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Passion et partage La Fondation de bienfaisance du groupe Pictet est fière de soutenir le projet «Les jeunes au cœur du Grand Théâtre». En participant à ce programme de formation, nous nous engageons en faveur de la génération à venir. Nous sommes particulièrement heureux de pouvoir offrir aux talents de demain l’opportunité de découvrir les joies de l’opéra et du ballet, et peut-être même de susciter des vocations. Les associés du groupe Pictet vous souhaitent une très belle saison 2015-2016. La Fondation BNP Paribas en Suisse encourage la création culturelle et la préservation du patrimoine des musées. Elle est le partenaire fondateur et principal de la Troupe des jeunes solistes en résidence au Grand Théâtre de Genève. Elle s’engage aussi pour la recherche dans le domaine de la santé ainsi que dans de multiples projets en faveur de l’éducation et de la solidarité.
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NOUS SOUTENONS LES JEUNES SOLISTES EN RÉSIDENCE AU GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE.
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LES TROYENS GRAND OPÉRA EN 5 ACTES ET 2 PARTIES
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LA PRISE DE TROIE LES TROYENS À CARTHAGE
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