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Samuel Laverdière
Penser l’arrimage différemment (2e partie)
Par Samuel Laverdière, CRIA
Si vous ne l’avez pas déjà fait, je vous invite à lire ma chronique de l’édition précédente pour bien comprendre où nous en sommes avec l’arrimage repensé. Nous avons abordé auparavant le volet pré-arrimage, la planification, le chargement et l’arrimage en tant que tel. Nous en sommes donc aux trois étapes suivantes. Allons-y!
➎ Circulation
La tâche principale, quand on pense au métier de camionneur, c’est évidemment la conduite même du camion. Ainsi donc, les déplacements dans les cours des clients ou dans leur terminal peuvent être source d’accidents et de collisions avec les autres véhicules et d’autres travailleurs. Puis, lorsqu’on circule sur la route, le comportement de la cargaison, l’état de la route et les conditions climatiques viennent tester au maximum la stabilité et la tension appliquée à la cargaison. Ajoutons à tout ça les compétences de conduite du conducteur, les distractions potentielles, la fatigue et la charge de travail. Ce n’est pas pour rien que faire du flatbed, c’est du sérieux!
➏ Désarrimage
Une fois le véhicule immobilisé au lieu de déchargement, l’étape suivante est le désarrimage de la cargaison. L’aménagement des lieux doit être propice à un travail en toute sécurité (ex. : sol plat, exempt de glace, éclairage suffisant) et le positionnement du véhicule doit aussi permettre un accès facile et logique pour la machinerie qui déchargera la cargaison. Ensuite, en respectant la séquence de désarrimage, le conducteur du véhicule retire les appareils d’arrimage dans l’ordre prédéterminé, de façon à s’assurer que la cargaison demeure bien en place. Mise en garde face aux techniques de desserrage des chaines et des courroies : de nombreux camionneurs ont subi de graves blessures alors qu’ils ont été frappés par leur barre de serrage. Enfin, on doit s’attarder à la gestion des appareils inutilisés : on les met dans les coffres, derrière la cabine ou on les enroule sur les treuils? Et la bâche, on en fait quoi? On la plie comment? Ces questions méritent d’être posées, car d’une entreprise à l’autre, voire d’une tâche à l’autre, les réponses ne seront pas les mêmes.
(Photo: iStock)
➐ Déchargement
Cette étape est probablement celle qui a engendré le plus grand nombre de décès de travailleurs dans les opérations d’arrimage. L’exemple de Remorquage Auclair en juin 2019 est éloquent. Alors que le conducteur effectuait une livraison de tuyaux de fonte avec un véhicule de type dépanneuse, il est monté sur sa plateforme afin de guider l’opérateur de la chargeuse sur roues dans ses manœuvres de déchargement. À sa demande, bien qu’il ne restait que trois tuyaux à décharger, l’opérateur remplace l’éperon par des fourches de levage, question d’accélérer le déchargement. Au moment où l’opérateur soulève les trois derniers tuyaux de la plateforme à l’aide des fourches de levage, les tuyaux ont roulé en direction du travailleur, qui a reculé sur la plateforme et enfin chuté au sol. Puis, les tuyaux de fonte ont poursuivi leur course et deux d’entre eux ont écrasé le travailleur. Son décès a été constaté sur place. Improviser lors du déchargement peut avoir des conséquences tragiques, et malheureusement on tient trop souvent cette étape pour acquise. Afin de ne pas me répéter inutilement, les moyens de prévention pour cette étape sont les mêmes qu’au chargement (étape 3).
Réflexions post-arrimage
C’est le retour à la case départ, car, dans bien des situations, désarrimer une cargaison engendre son lot de questions. Doit-on déplacer certaines marchandises avant de réarrimer le chargement? Doit-on revoir le nombre et le positionnement des appareils d’arrimage? Est-ce que l’état de la circulation a changé au point de rendre le déplacement du véhicule à risque? Ce sont toutes des questions légitimes pour la sécurité des travailleurs.
Les opérations d’arrimage font partie du quotidien pour de nombreuses entreprises de transport québécoises. Les défis et obstacles sont variés et, malgré tout, l’arrimage est souvent considéré comme étant sous contrôle.
Je termine là-dessus : améliorer la gestion des opérations et la formation des travailleurs en lien avec l’arrimage permettra de prévenir des accidents et ainsi, de sauver des vies. TR
Samuel Laverdière, CRIA, conseiller en prévention chez Via Prévention, possède un baccalauréat en relations industrielles. Il forme et conseille des gestionnaires et travailleurs des entreprises de transport au Québec. On peut le joindre à samuel. laverdiere@viaprevention.com