Savines-le-Lac, un village du XXe siècle

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C’est toute cette histoire, suivie pas à pas, maison par maison que raconte Savines-le-Lac, un village du XXème siècle. Le village reconstruit a obtenu le Label du « Patrimoine du XXème siècle » en 2011.

SAVINESLE-LAC UN VILLAGE DU VINGTIÈME SIÈCLE

La valeur de l'architecture la plus profonde est celle d'une « création humaine », qui donne une forme à la réalité et transforme la matière en fonction d'une conception esthétique. ALD O ROS S I

M A I R I E D E S AV I N E S - L E - L A C

Lorsqu’Achille Tzitzichvili de Panaskhet arrive dans les HautesAlpes, il a juste trente ans et déjà une histoire derrière lui. Parmi ses premiers travaux figure, en 1947, la reconstruction de Cervières, un des villages martyrs de la libération du briançonnais. Achille de Panaskhet prend ensuite fait et cause pour la reconstruction de Savines, dessinant une série de compositions urbaines qui aboutiront au Plan d’Urbanisme de Détail de 1957. Une dizaine d’année durant, il va se consacrer entièrement à la création de Savines-leLac, de l’urbanisme aux espaces publics, de l’architecture publique aux constructions privées. La renaissance de Savines se fera dans l’urgence. L’église Saint-Florent sera terminée en 1962 et l’architecte mettra à profit une convalescence pour en dessiner le détail des vitraux. Le caractère de l’architecture d'Achille de Panaskhet à Savines-le-Lac, c’est le refus du chalet pittoresque au profit d’une architecture de création, horizontale, effilée, soulignée par des bandeaux de bétons clairs, et des toits presque plats. On peut définir cette architecture comme optimiste. C’est le plus bel héritage que pouvait laisser Achille de Panaskhet à Savines-le-Lac ; lui-même possédant, au dire de ceux qui l’ont connu, un tempérament énergique et enthousiaste.

S AV I N E S - L E- L AC U N V I L L AG E D U V I N GT I È M E S I ÈC L E

ACHILLE DE PANASKHET, ARCHITECTE DE LA RENAISSANCE DE SAVINES-LE-LAC

Sur les hauteurs du Forest, un nouveau village s’édifiait après plus d’une demi douzaine d’années de résistance. Le village n’a pas disparu sous la montée des eaux du lac de Serre-Ponçon. Village moderne dans un site redessiné par les eaux, Savines-le-Lac a souvent surpris ceux qui, montant aux sports d’hiver, voyaient là une halte avant d’attaquer la haute vallée de la Durance. Station service, hôtels, restaurants, bâtiments administratifs, église, tout cela ressemblait à la maquette d’un village idéal consacré à l’automobile et aux loisirs, dont la société française commençait à rêver. Loin de l’uniformité des cités de la Reconstruction, le village était pimpant, varié, avec un air de famille pour tous les édifices. Un architecte est à la manœuvre de cette reconstruction : Achille de Panaskhet, qui dès 1955 accompagne la municipalité, tout en veillant à conserver une figure urbaine au nouveau village.

THIERRY DUROUSSEAU

LE 3 MAI 1961, l’église Saint-Florent était le dernier bâtiment de Savines à tomber sous les explosifs. Dès janvier, le conseil municipal avait décidé que la commune de Savines s’appelerait désormais Savines-le-Lac.

THIERRY DUROUSSEAU

I S B N 9 7 8 - 2 - 74 6 6 - 7 5 9 7 - 1

20€

PRÉFET DES HAUTES-ALPES

M A I R I E D E S AV I N E S - L E - L A C


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* GLOSSAIRE EN PAGE 136

ABRÉVIATIONS EN NOTES A.A.d.P. : A.M. : A.N. : Conf. : C. M. : C.R. : D.L. : P.C. : P.V. : T.P.B.M. :

Archives familiales Achille de Panaskhet Archives municipales Archives nationales Certificat de conformité après travaux Conseil municipal Compte rendu Dauphiné libéré Permis de construire Procès verbal Travaux publics, bâtiment, Méditerranée


SOMMAIRE 60

4 VICTOR BÉRENGUEL

CHAPITRE 1

63 64 69 71 78 81 82 84 88 89 92

La place de l’Église L’Hôtel de village La Poste L’église Saint-Florent La Rotonde La Combe d’or Extensions ; Saint-Ferréol Le Chabrières L’Office du Tourisme Les Flots Bleus La station service

DE SAVINES À SAVINES-LE-LAC

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CHAPITRE 4

6 PRÉFACE FRANÇOIS GOVEN 8 ENTRÉE 10

18 21 25 29 31 34 34 37

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François Pavie Villages engloutis Premiers plans Discordes Plan d’Urbanisme de Détail Le pont L’eau vive Ordonnances et disciplines architecturales CHAPITRE2 UN NOUVEAU VILLAGE

46 50 55 59

CHAPITRE 3 ARCHITECTURE ET ESPACE PUBLIC

EDITORIAL

Habitations à Loyer Modéré Usines Ecole Savines-le-Lac

TOURISME LOISIR 97 100 103 104

L’auberge de jeunesse Le C.C.A.S., Camping, Mise à l’eau Le Pré d’Emeraude Le lac comme paysage

108

CHAPITRE 5 L’ARCHITECTURE D’ACHILLE DE PANASKHET

108 123 130

Eléments d’une architecture Repères biographiques Références de l’œuvre

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ANNEXES

136 139 141 142

Glossaire Index des noms propres Orientation bibliographique Remerciements

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CARTE POSTALE, 1975

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ÉDITORIAL VICTOR BÉRENGUEL MAIRE DE SAVINES-LE-LAC VICE PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL DES HAUTES ALPES PRÉSIDENT DE LA COMMUNAUTÉ DE COMMUNES DU SAVINOIS SERRE-PONÇON


L’

histoire de Savines-le-Lac est singulière, elle s’est constituée au travers de destins divers. Dotée d’une économie florissante au début du siècle grâce à l’implantation d’entreprises dynamiques, elle a connu l’exode rural comme grand nombre de communes de montagne, mais de surcroît elle a connu le drame d’un déracinement, le drame de voir son passé à tout jamais englouti dans les eaux du barrage de Serre-Ponçon. Peuton seulement, aujourd’hui, s’imaginer les traumatismes subis par ses habitants d’alors qui, en un instant, ont perdu toutes traces de ce que fut leur vie et de celles laissées par les générations qui se sont succédées. Il est, toutefois, coutume de dire que, ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort. Cette maxime trouve tout son sens dans les péripéties qu’a connues notre commune qui, tel le Phénix, a ressuscité pour devenir plus prospère qu’elle n’était. En effet, désormais devenue une station balnéaire dynamique, Savines-le-Lac s’enorgueillit, de surcroît, d’être classée au « Patrimoine du XXème siècle » pour son choix d’une architecture novatrice, conçue par l’architecte Achille de Panaskhet. Son histoire, riche et mouvementée, a suscité l’intérêt de Thierry Durousseau qui lui a consacré le présent ouvrage qui raconte la vie de notre village durant la période qui s’étend du début du siècle à nos jours. L’auteur nous transporte au fil du récit, tel un passager du train de l’histoire. Nous voyons défiler sous nos yeux les paysages du temps passé, les personnages qui ont marqué l’époque de leur empreinte, nous voyons le territoire progressivement se restructurer, nous suivons page après page les transformations de notre commune qui bascule dans la modernité. Il n’était pas pensable, pour moi, que l’histoire de notre commune, si singulière, si chargée d’émotion se noie dans l’oubli. C’est pour cette raison que j’ai demandé à l’auteur, que je savais animé de passion pour l’histoire de Savines-le-Lac, de nous faire partager son érudition. Cet ouvrage, j’ai souhaité le mettre à la disposition de chaque famille savinoise et leur donner ainsi l’opportunité de renouer avec leurs racines, et de se réapproprier leur histoire. Je forme le vœu que sa lecture puisse rendre chaque Savinoise, chaque Savinois d’autant plus fiers d’appartenir à notre belle commune.

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PRÉFACE FRANÇOIS GOVEN ARCHITECTE, INSPECTEUR GÉNÉRAL DES MONUMENTS HISTORIQUES

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S

i le propre de la cité est de se régénérer sans cesse sur elle-même, Savines offre à cet égard une exception notable, elle qui, en sept siècles d’existence, aura connu trois sites d’implantation successifs; et à chaque fois, que les causes en soient naturelles ou décidées par l’homme, sa destinée sera aussi intimement que douloureusement parfois, liée à la présence de l’eau, cette eau vive, si abondamment dispensée par les massifs environnants. Mais la paisible petite cité de villégiature que l’on peut apercevoir l’été, en partie dissimulée par la profusion de ses géraniums, est, malgré son seul demi-siècle d’existence, déjà riche de plusieurs histoires singulières. Histoire politique autant que technique tout d’abord, quand la décision est prise dans l’ambitieux programme d’équipement et d’aménagement que connaît la France au lendemain de la seconde guerre mondiale, d’installer sur ce territoire le premier barrage en terre conçu sur le modèle américain mis en œuvre sur la rivière Tennessee; mais ici comme souvent, le projet n’est que l’aboutissement d’idées déjà anciennes, lancées dès le début du XXème siècle : bloquer la Durance au verrou de Serre-Ponçon pour en réguler le cours tout en produisant l’énergie moderne qu’est l’électricité. Histoire sociale aussi en raison du traumatisme que connaîtra la population du fait de la destruction en 1961, parmi d’autres, du village ancien avant l’engloutissement de la vallée. Moins violente que quelques années plus tôt à Tignes, la résistance y sera importante et largement relayée par la presse nationale du moment.


Histoire urbaine et architecturale ensuite, où se côtoient grands programmes d’équipements, d’infrastructure, de logements et de tourisme, afin de réaliser, selon un planning très serré, une véritable petite ville nouvelle. Si la maîtrise d’œuvre du barrage est confiée à des ingénieurs ou architectes de renom, la conception du plan de la ville et la réalisation de la plupart des édifices seront attribués à un architecte d’origine géorgienne récemment installé à Gap, Achille de Panaskhet. Savines-le-Lac sera sa réalisation majeure et l’occasion d’exprimer ses multiples talents, de peintre notamment ; en témoignent les remarquables vitraux de l’église dont il réalise l’ensemble des cartons. Histoire romanesque enfin, puisque le film « L’Eau vive », tourné entre 1955 et 1957 et qui connut un vif succès à sa sortie en 1958, a comme toile de fond la construction du barrage de Serre-Ponçon. Commandité alors dans un évident objectif de propagande par E.D.F., son scénario et ses dialogues furent écrit par Jean Giono ; la musique de Guy Béart est quant à elle rentrée dans le patrimoine de la chanson française… Ce sont toutes ces histoires croisées que nous décrivent les pages qui suivent, en prenant soin de les replacer en permanence dans leur contexte, local bien sûr, mais aussi national, voire international. L’exercice, fondé sur une solide recherche archivistique et de terrain, analyse méthodiquement tous les composants (logements, équipements, espaces publics, etc.) de cet atypique programme de « reconstruction » intégrale d’une cité, détruite cette fois, non par catastrophe ou fait de guerre, mais par un rêve de progrès. Quelques années plus tôt, en 2011, ce sont ces même motifs qui avaient conduit les services de la Direction régionale des affaires culturelles ProvenceAlpes-Côte d’Azur à proposer et décerner à la ville de Savines-le-Lac le label « Patrimoine du XXème siècle », sans distinguer tel ou tel édifice remarquable, mais sur l’ensemble de la « ville nouvelle » ; une expérience à cette échelle était alors pionnière en France (seule la Grande Motte dans la région LanguedocRoussillon bénéficiait depuis quelques mois d’une semblable mesure), mais en parfaite adéquation avec l’esprit de la circulaire de 1999, fondatrice de ce label. A suivi la même année, l’attribution du label « Pays d’art et d’histoire » au « Pays Serre-Ponçon, Ubaye, Durance » par le ministère de la Culture. On connaît la fougue avec laquelle la commune de Savines a su dès lors valoriser ces distinctions. La présente publication vient donc à propos compléter la connaissance; mais au delà du travail d’érudition qu’elle représente, formons le vœu qu’elle contribue à garantir un développement harmonieux de la cité, respectueux de l’intégrité et de la mémoire de ce qui reste une remarquable aventure du XXème siècle.

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ENTRテ右

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CARTE POSTALE, 1965


P

assé Chorges, en dessous du village de Prunières, le tracé de la route suit le plissé des collines plongeant dans le lac. Dans un parcours sinueux, déclinant vers le Nord, s’enchaînent les courbes assez amples, nous faisant découvrir à chaque détour un peu plus des rives du lac de Serre-Ponçon. Dans cette vision mobile, les accotements, les fossés, les barrières et les arbres en bordure de route semblent animés d’un mouvement de fuite aux marges du paysage. Plus reculées, les collines paraissent déjà plus ralenties, plus éloignées encore, sommets et cimes marquent les repères fixes de nos déplacements. Les Aiguilles de Chabrières et le Pic du Morgon forment un des verrous de la haute vallée de la Durance. Leur beauté sereine procède d’un sentiment d’inaccessibilité aux confins du grandiose que les paysagistes du XVIIIème siècle nommaient le sublime et dont la montagne, de façon générale, reste porteuse. C’est entre ces deux jalons d’une amplitude saisissante que Savines-le-Lac apparaît en arrière du pont perçu par le travers et dont l’architecte Achille de Panaskhet disait que la douzaine d’arches tendues ressemblaient à un long ricochet sur les pleines eaux du lac. Passé la gare et le pont, on y est, on roule le long de l’hôtel aux fenêtres en bandeaux, puis en front de l’immeuble à la façade plissée, on laisse la route du Sauze à droite pour remonter l’avenue de la Combe d’Or, aussi large que la rue de Rivoli. Une contre-allée longe la Place des Commerces, le biais d’un raidillon nous ouvre les coulisses de la Place de l’Église qui aurait pu aussi bien s’appeler la Place de la Mairie. Nous sommes à une étape de notre trajet, nous irons visiter les magasins qui peuvent en dire plus sur cette escale de bord de route. Un cycle de cartes postales tient lieu d’histoire du village entre Savines et Savines-le-Lac. L’accordéon glacé des phototypes en noir et blanc signe leur origine lointaine. Ainsi découvre-t-on dans les clichés de Paris Match, toute la scénographie de la destruction de Savines. Comme une levée en main, on compulse ces cartes, images fondatrices de l’histoire de Savines-le-Lac.

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CARTE POSTALE, 1965


1 DE SAVINES À SAVINES-LE-LAC

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CARTE POSTALE, 1957

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CARTE POSTALE, 1960


SAVINES, UN CHEF LIEU DE CANTON

Carte postale, 1957 Sur un point de franchissement de la Durance, passé le raidillon en lacets du Faubourg, on aperçoit une ligne serrée de maisons, posées au-dessus de l’horizon géologique d’une petite falaise qui tient lieu de défense contre les caprices redoutés de la rivière. Seule la verticale du clocher de Saint-Florent interrompt cette silhouette continue. Derrière, en raccourci, la perspective des champs ouverts et du hameau du Forest qui montent à l’assaut des piedmonts* boisés de La Gardette, derrière encore les sommets de l’Embrunnais, La Méale et le Pic Saint André. C’est une vraie peinture de genre.

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Carte postale 1960 La vallée est occupée par un ouvrage d’art en construction, le pont de Savines, avec ses hautes piles quatre fois plus larges que le clocher de Saint-Florent, progressant inévitablement vers le village à grandes enjambées. La montée du Faubourg, encore en usage, prend des airs de chemin sous l’intrados* des voûtes tendues, des maisons sont déjà détoiturées, inhabitables, et pour certaines la démolition a commencé. Une gigantesque horizontale de béton clair barre la vallée dans une perspective kilométrique. Au loin, le massif des Ecrins.


Carte postale 1961 Le pont est achevé, les deux rives reliées. Au fond sous les aiguilles de Chabrières, la nouvelle gare ; les gravats des démolitions ont servi de remblai à la ligne de chemin de fer remontée au-dessus de la côte de 780 mètres. La montée des eaux est engagée de façon irréversible. L’église, la mairie et quelques maisons de ville ont déjà perdu leur toiture, leurs fenêtres et tout ce qui pouvait être récupéré, tous ont déjà un air de ruine. Seuls les artificiers circulent encore dans le village déserté.

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3 Mai 1961 La photo d’André Sartres pour Paris Match est célèbre : le curé Ferraro de dos, silhouette poché pur*, en soutane, ceinture et béret sur le côté, quelque chose de l’abbé Pierre, regarde le village partir dans un grand nuage de poussière gris blanc. Pour mettre à bas le clocher, les artificiers s’y reprendront à deux fois. Un seul bâtiment semble échapper au désastre, c’est celui des artificiers. L’auberge départementale de la jeunesse sera détruite le lendemain. En fait, nous ne sommes pas les seuls à observer les ultimes instants de Savines : sur le pont, quelques centaines de spectateurs y assistent eux aussi.


CARTE POSTALE, 1961

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3 MAI 1961


CARTE POSTALE, 1961

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L’USINE


Carte postale 1961 Si l’on revient en arrière, ce que nous autorisent les images, et que l’on change de point de vue, depuis le pont où se tiennent les spectateurs, la scène est toute différente. Derrière les maisons de ville, la mairie et l’église Saint-Florent, entourées par les eaux montantes, il y a le nouveau village au-dessus de la côte de 780 mètres. On distingue les immeubles du Forest, l’école, la gendarmerie, plus haut, la mairie et la salle des fêtes, la nouvelle église et son presbytère, quelques maisons neuves du type Logéco* enfin les logements de la Secilef. L’ancien Savines n’est pas détruit que le nouveau existe déjà, témoignage de l’obstination de ce village à vouloir échapper au destin qui lui était réservé : sa propre disparition. En janvier 1961, le conseil municipal décide que le nouveau village s’appellera désormais Savines-le-Lac.

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Mais revenons à notre première image, celle de 1957. À y regarder de plus près, il y a une autre verticale que le clocher de l’église : une cheminée d’usine, qu’accompagnent les longues lignes de toiture d’une manufacture. Là aussi, il faut déplacer le regard ailleurs, sur l’autre rive de la Durance vers la Chapelle, sorte de faubourg de la gare avec son hôtel, la gendarmerie, une scierie, l’usine de cellulose et la filature qui paraît immense avec ses toitures en dents de scie. Un peu plus haut, la centrale électrique qui alimente tout cela. Avant Savines-le-Lac, il y a Savines, un chef-lieu de canton dont la particularité est d’être un village industriel, caractère constitué en un peu moins d’un siècle et dont l’artisan principal aura été François Pavie.


LA DESTINÉE LÉGENDAIRE DE FRANÇOIS PAVIE

FRANÇOIS PAVIE

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Ce Savinois, issu d’une famille de cultivateurs, voit le jour en 1843 à un moment de forte émigration dans les Alpes, la production locale n’assurant plus les besoins de tous. Aussi part-il pour Marseille dès l’âge de 15 ans. Il travaille dans une librairie où il apprend à lire. De là, il embarque pour l’Amérique du Sud en 1860, où il s’engage comme berger. Là-bas, la laine de moutons n’est pas exploitée, aussi va-t-il en organiser la tonte puis le commerce vers l’Europe. A l’instar des Mexicains de Barcelonnette, fortune faite, il rentre au pays. De retour en 1870, il se trouve en pleine guerre franco-prussienne. Il est nommé capitaine des volontaires de la Garde Nationale Mobile, dont certains corps d’armée assureront la défense de Paris ou de Belfort contre l’armée du Kaiser. Nommé Maire de Savines, en 1871, il est révoqué trois ans plus tard pour ses opinions républicaines. Il retrouvera son mandat peu après, puis est élu Conseiller Général. Avec Albert Catier, un autre Savinois, ils créent une entreprise de travaux publics avant d’être élu en 1896 Député des Hautes-Alpes, mandat qu’il occupera jusqu’en 1906. Il siège à la

MONUMENT À LA RÉUPUBLIQUE


gauche radicale. Il s’investit alors dans le développement du canton. Savines atteint un pic démographique en 1881 avec 1300 habitants. François Pavie est à l’origine d’entreprises de matériaux de construction, four à chaux, carrières ; il crée les Scieries mécaniques de Savines, liées à une petite centrale électrique. Il croit suffisamment en l’avenir de cette énergie pour envoyer son petit neveu faire des études d’électrotechnique à Grenoble, lequel réalisera la centrale de Baratier qui va alimenter Embrun. Il n’est pas le seul à croire dans le développement de ce qu’on appelle alors la houille blanche dans les Alpes. L’ingénieur des Ponts et Chaussées du département, Yvan Wilhem, polytechnicien d’origine russe, a identifié le verrou de Serre-Ponçon pour y faire un barrage. Un des problèmes reste la suppression de la ligne de l’Ubaye, dont les travaux ont débuté en 1909 et à laquelle participe l’Ingénieur Paul Séjourné, auteur du viaduc à double courbure de Chanteloube, aujourd’hui immergé. L’intérêt du projet de barrage amène à réaliser des sondages en 1912 qui révèleront la présence de sources chaudes, peu propices à fonder un tel ouvrage. Le projet sera abandonné. Peu avant 1910, on réalise à Savines, une centrale hydro-électrique de mille chevaux vapeur, qui tire son énergie d’une conduite forcée sur le torrent de Réallon. La centrale, dont les bâtiments de brique sont encore debout, dans le quartier des Naysses, est accompagnée de quelques maisons ouvrières.

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LA CENTRALE ÉLECTRIQUE


PLAQUES COMMÉMORATIVES DE LA RÉPUBLIQUE

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François Pavie créé alors la Manufacture Cotonnière du Sud-Est, mue par l’énergie de la centrale. Elle produit des bandages médicaux sur plusieurs centaines de métiers à tisser et emploiera jusqu’à 400 ouvriers. Par ailleurs, il crée La Cellulose des Alpes, une fabrique de pâte à papier, qui utilise les déchets de la scierie et l’eau de la centrale. François Pavie disparaît en 1916 à Nice, non sans avoir créé une Fondation Pavie, maison de retraite installée à Savines dans le Château Pavie, puis en 1957 dans le quartier du Forest. Digne représentant de la classe politique de la IIIème République, réformiste social, François Pavie sera partisan de la suppression de l’impôt foncier, de la décentralisation des services publics, de l’impôt sur le revenu, de la protection industrielle et agricole, du maintien du Sénat et du respect de la liberté de conscience. Il embellira son village de monuments à la gloire des Mobiles, à celle de la République, œuvre parlante. Son buste en bronze, par JeanneClaude Régusse-Payan est toujours dans les jardins de la maison de retraite. La Manufacture Cotonnière du Sud Est, vendue en 1922 à un groupe industriel de la Côte d’Or, prend le nom de Sotex, filature de textiles artificiels. La Grande Guerre puis la crise mondiale de 1929 n’épargne pas Savines, qui voit sa population décroître jusqu’à 920 habitants. C’est cette même crise mondiale qui amène le président américain Franklin Delano Roosevelt à lancer le New Deal, grande politique publique d’aménagement du territoire. En 1933, la Tennessee Valley Authority engage la régulation du fleuve Tennessee par une succession de barrages en terre. Peu technique, très demandeuse de main d’œuvre, la conception recourt massivement à des engins mécaniques qui déplacent des millions de mètres cubes de terre autour d’un noyau étanche. La technique qui présidera à la réalisation du barrage de Serre-Ponçon est déjà à l’œuvre.


VILLAGES ENGLOUTIS Après la seconde guerre mondiale, marquée dans l’Embrunnais et le Briançonnais par de nombreuses destructions d’infrastructures de communication, Savines voit encore sa population diminuer jusqu’à 800 habitants. La Sotex emploie près de 300 personnes, la Cellulose des Alpes pas plus de 30, et la scierie une dizaine. Le travail industriel occupe plus de 40% des habitants, c’est un vrai village ouvrier, un peu à l’image de L’Argentière. Le Maire Léon Isnard appartient à l’extrême gauche qui va ferrailler avec les gaullistes pendant plusieurs années. Nommé à la libération, élu en 1947 puis en 1953, il va, avec les délégués du territoire, s’engager pour la reconstruction de Savines jusqu’aux accords de 1956 et à l’approbation du Plan d’Urbanisme de Détail en 1958. En effet, en mars 1946, va être appliqué le programme du Conseil national de la Résistance avec la nationalisation des sources d’énergie. Le premier plan Monnet (1946-1952) met l’électricité parmi les six secteurs de base à relever et à développer. Créée dès 1946, Électricité de France va relancer le projet de l’ingénieur Wilhem d’un barrage hydraulique à Serre-Ponçon, abandonné après la découverte de sources sur le site.

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SAVINES EN 1950


Dans ces conditions, les fondations d’un barrage en maçonnerie, tel que la France en construit avant le développement du béton armé, seraient problématiques. Il reste que l’exemple de l’aménagement de la rivière Tennessee avait montré la fiabilité des barrages en terre, c’est donc ce procédé qui va être choisi pour Serre-Ponçon. Au même moment se met en place le Plan Marshall qui vise au rétablissement économique de l’Europe. Avec sa technologie simple de déplacement massif de matériaux au moyen d’engins mécaniques – plutôt américains – et par ailleurs grande pourvoyeuse d’emplois, le barrage en terre avec noyau étanche correspond exactement aux conditions locales et à la politique du moment. Dès 1951, E.D.F.1 dépose une demande de concession et de déclaration d’utilité publique auprès du Comité technique des grands barrages. Déjà s’installe à Savines, dans la maison Catier, le bureau d’étude en charge de projeter les déviations des routes et des réseaux susceptibles d’assurer la continuité des communications autour des vallées immergées. En effet, le barrage va générer un lac de retenu de plus de 28 km2, rayant de la carte deux villages, Ubaye et Savines. Une population d’un millier d’habitants est en jeu.

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La période est très sensible, à l’image de Tignes qui disparaîtra pour la construction d’un barrage. Dès 1933, l’administration envisageait la construction d’un barrage au sommet des gorges des Boisses, mais les tignards n’en eurent connaissance qu’en 1941. La construction débute en 1946. Très vite les 40 habitants menacés d’expulsion vont tenter d’empêcher le déroulement des travaux par tous les moyens : actions devant les tribunaux, sabotages, campagne de presse avec Paris Match, dont Savines ne sera qu’une réédition. Après le déménagement du cimetière, le dynamitage des maisons et l’expulsion des habitants réfractaires par les C.R.S.2, le village est finalement noyé en 1952 quand le barrage du Chevril achève sa mise en eau. À Savines, Léon Isnard est réélu à la mairie en 1953. Cependant, Jean Aubin, rapporteur du projet de Serre-Ponçon à l’Assemblée nationale, insiste sur la dimension hydroélectrique, sur l’agriculture ainsi que sur le développement touristique de la région, ajoutant que « devront disparaître : Savines dans les Hautes-Alpes, et Ubaye dans les Basses-Alpes. Au total, 1200 personnes dont 800 à Savines et 150 à Ubaye. »3 Au-delà de la disparition des villages, les conséquences du barrage amènent la création d’une Commission d’aménagement de la région Durance que dirige Georges Meyer-Heine, l’urbaniste du Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme à Marseille. Prolongation de la loi Cornudet qui visait à organiser l’aménagement, l’embellissement et l’extension des villes de plus de 10 000 habitants, les Comités régionaux d’urbanisme, créés en 1935, correspondaient aux communes de moindre importance ayant des intérêts collectifs. En 1943, ils deviennent des Groupements d’urbanisme.

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Electricité de France Compagnies Républicaines de Sécurité Rapport à l’Assemblée Nationale 1953, A.M.


En 1954, René Coty est élu Président de la République. Savines l’ouvrière a près de 1000 habitants, le projet du barrage de Serre-Ponçon est adopté par l’Assemblée nationale, impliquant des expropriations. Dès juillet, alors que les accords de Genève signent la fin de la guerre d’Indochine, des enquêtes sociodémographiques* sont réalisées sur Savines, la population locale commence à manifester son émotion. Georges Meyer-Heine écrit à George Dulery4, Conseiller d’État qui préside la commission en charge de la légalité des opérations foncières. Il lui propose plusieurs hypothèses pour le développement de Savines sur la rive sud du lac : Savines agricole (il ne reste que 13 fermes) ; Savines agricole et industrielle, mais surtout Savines commerciale et touristique, utilisant les ressources de sa situation et celles du futur plan d’eau. En fait, on imagine d’ores et déjà un nouveau destin pour Savines. Avec le projet de submersion de la vallée, de nombreux agriculteurs concluent une vente avec E.D.F. Ils vont rapidement constater que leurs indemnités ne couvrent pas les frais de réinstallation dans la basse vallée de la Durance. Les premiers syndicats de défense des expropriés – les mal-vendus – vont ainsi se créer en 1955. Dans le même temps, de grandes manœuvres industrielles vont avoir lieu, l’entreprise Charmasson envisageant de transférer l’usine de la Cellulose des Alpes à Gap. La Sotex, dont les ateliers doivent être détruits, entend maintenir son activité à des conditions jugées exorbitantes. D’autres entreprises sont candidates à l’installation ; l’une est ardéchoise et produit des parfums, Petro-Carbone prévoit l’embauche de 110 employés à terme ; l’autre, Ferrix, spécialisée dans l’appareillage électrique, envisage 150 emplois. Compte tenu de ces avancées, la commission Dulery projette déjà la construction de logements sociaux sur la rive Nord du Lac dans le quartier de La Paroisse.

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Rapport à l’Assemblée Nationale 1953, A.M.

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PREMIER PLAN : LE CLÔT DU VILLARD


LES PREMIERS PLANS C’est au printemps 1955 qu’apparaît le premier plan de l’architecte Achille de Panaskhet pour l’Aménagement du nouveau Savines sur la rive nord du lac, au Clôt du Villard, un adret* bien ensoleillé. Sur le plan, un semis de maisons individuelles est réparti de part et d’autre d’une voie en écharpe, sur le penchant méridional de ce qui est aujourd’hui le quartier de Picoune. Les maisons sont desservies par des voies secondaires en lacet. À mi-parcours se trouve le centre civique autour d’une place, avec un garage, la gendarmerie, l’école, l’église et son presbytère, le centre communal ainsi qu’un immeuble collectif. De l’autre côté de la voie, on accède à un centre de repos. La voie principale poursuit sa descente passant par un poste d’essence puis la gare qui surplombe le lac et l’école de voile. Plus vers l’est se trouve la zone d’activité industrielle près des bâtiments de la centrale électrique. Sur le plan, le niveau du lac est suffisamment précis pour laisser penser que l’architecte travaille sur le programme d’E.D.F. et surtout celui du Conseil municipal qui prend ainsi son destin en main. Tout s’articule sur le village actif avec sa gare et son secteur industriel, mais aussi le soleil de l’adret et les loisirs nautiques. Dans les déclinaisons de Georges Meyer-Heine cette solution inédite aurait été celle de l’industrie et du loisir. Celui-ci va, au contraire, militer pour une reconstruction de Savines sur l’autre rive du lac. En effet, dans le cadre de la continuité des circulations entre Gap, Embrun et Barcelonnette, et compte tenu des difficultés de rejoindre Embrun par la rive Nord assez abrupte et déjà occupée par le nouveau tracé de la ligne Paris-Briançon qui emprunte plusieurs tunnels, un ouvrage d’art est nécessaire pour changer de rive. L’importance de l’investissement va faire du pont un passage obligé non seulement pour rejoindre Embrun par les Crottes (aujourd’hui Crots) mais aussi Barcelonnette par le Sauze : le nouveau Savines va être pensé comme un village carrefour au lieu du village rue qu’il était jusque là. Dans cette détermination primordiale, la France applique une politique de plans quinquennaux initiés par Jean Monnet ; la modernisation est à l’ordre du jour et le choix des transports automobiles est largement privilégié : le nouveau Savines sera un village organisé par et pour l’automobile.

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LE DEUXIÈME PLAN (DÉTAIL)

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LE SECOND PLAN D’AMÉNAGEMENT Ces choix vont donner lieu à de nouveaux projets d’Achille de Panaskhet, qui prévoient l’implantation du village sur la rive Sud au débouché du futur pont de Savines. Il s’agit de deux plans successifs, datés, en marge, de juillet et septembre 19555. Pour le premier d’entre eux, le cadre est celui de l’arrivée du pont sur le faubourg des Glaudins, la poursuite de la route nationale 94 vers Briançon avec un carrefour à trois branches ouvrant sur la route de Barcelonnette via Le Sauze. L’essentiel de l’urbanisation se condense au sud de la route nationale, la partie septentrionale n’accueillant alors que les activités de loisir : stade, camping, et auberge de jeunesse. La mairie est située à la sortie du pont, sur le faubourg des Glaudins, un peu comme un octroi*. Le monument aux morts est replacé de façon ostentatoire le long de la voie, en face du débouché de la route de Barcelonnette qui se poursuit vers le faubourg des Chaumettes, où se trouve un hôtel. L’hôtel, situé sur une chaussée-digue*, désigne la dimension touristique du projet, il est très emphatique. C’est un bâtiment symétrique, axé sur un avantcorps* central en belvédère sur le lac, sorte de grand auvent en surplomb de la route du Sauze. Au-dessous, plusieurs terrasses descendent vers les rives du lac. Evoquant les grands hôtels de la Côte d’Azur, il rappelle que Savines était située sur la Route des Grandes Alpes – initiée par le Touring Club de France et terminée en 1937 – qui reliait Thonon-les-Bains à Menton. Le très fermé Touring Club comptait alors dans ses rangs des grands noms de l’automobile. Il encourageait un tourisme moderne et chic tout en publiant des guides et installant les premières signalisations routières en France. La digue qui forme le socle de l’hôtel détermine une retenue d’eau à niveau constant alimentée par le ruisseau Barnafret qui descend du Morgon. La permanence de ce plan d’eau est une réponse aux périodes d’étiage* du lac de Serre-Ponçon, dont l’allure désertique est peu propice au tourisme. Cette solution, émise par Georges Meyer-Heine dans son courrier à Georges Dulery en juillet 1954, est parmi les solutions les plus originales du projet. Au-delà de l’hôtel et de son dispositif, la partie ouest du plan s’organise sur un semis de bungalows ainsi que le bâtiment de la maison de retraite de la Fondation Pavie, relogée ici. En revenant sur le carrefour à trois branches, on peut constater que le hameau du Forest a entièrement disparu, remplacé par un premier rang d’immeubles qui s’alignent aux courbes des voies. Au pied des immeubles figurent des commerces. En direction d’Embrun, l’alignement est plus discontinu et on trouve un garage et une station de distribution d’essence soulignant la vocation automobile du village.

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Archives R. Eyglument

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En arrière de ces immeubles de rang, se trouve la place du marché bordée par l’école, l’église et son presbytère enfin, au delà, entre le Forest et l’Auche, sont implantées quelques maisons et même deux fermes. Au nord de la Nationale 94 vers Embrun, sont installées les activités de plein air comme le terrain de sports, l’auberge de jeunesse et le camping dans la pinède de Saint-Ferréol. On trouve aussi le cimetière de l’ancien village, étendu pour l’occasion. On notera que le réseau des voies secondaires réutilise la plupart des chemins existants tel que Camillo Sitte le recommandait. En résumé, la partition du projet d’Achille de Panaskhet se fonde sur la division des trois branches de voirie délimitant trois secteurs. Au sud et face au pont, le village actif avec ses logements, sa place du marché, ses commerces et même ses fermes ; à l’ouest les bungalows, l’hôtel et le plan d’eau ont une vocation touristique, de même que le secteur nord dédié à des loisirs plus populaires comme le camping. Le 10 juillet 1955, le plan d’avant-projet est soumis au Conseil municipal, en présence des directeurs d’E.D.F., du Directeur départemental du ministère de la Reconstruction et du Logement et de Conseillers généraux. Achille de Panaskhet est désigné architecte de la commune. Le plan est envoyé, en août 1955, à Georges Meyer-Heine qui donne un avis favorable. Il suggère d’inverser les positions de la maison de retraite et de l’auberge de jeunesse. Enfin il s’inquiète de l’importance des bâtiments publics et recommande un caractère de bonhomie à l’ensemble6. Un nouveau plan intitulé « Savines Aménagement et Reconstruction », daté en marge de septembre 1955, reprend le projet. La rapidité des études est étonnante.

SEPTEMBRE 1955, LES DEUX RIVES (DÉTAIL)


LE TROISIÈME PLAN D’AMÉNAGEMENT Le cadre est différent puisque la rive nord du lac y figure, avec l’intégralité du pont. L’ouvrage d’art connu dans son tracé n’est pas figuré de façon réaliste : il est réduit par deux jetées qui semblent barrer le lac sur plus de la moitié de sa largeur. La nouvelle voie ferrée Paris-Briançon y figure aussi avec l’implantation sommaire de la gare. Une zone hachurée délimite la zone industrielle sur le secteur des Naysses où se trouve encore la centrale électrique de 1910. Au sud, la partition sur les trois branches du carrefour demeure, avec l’inversion entre la maison de retraite et l’auberge de jeunesse, qui consacre le secteur ouest au tourisme avec l’hôtel, le plan d’eau, l’auberge de jeunesse, des bungalows, et le camping. Au sud de la Route nationale 94, les programmes se sont étoffés, la mairie et la gendarmerie ont intégré le village actif. La composition s’est renforcée, les immeubles et les commerces suivent toujours l’alignement des voies jusqu’au garage et la station d’essence, mais ils sont doublés par une seconde épaisseur de bâtiments jusqu’à constituer un début d’îlots urbains. La place, quadrangulaire, est toujours bordée par l’église et l’école, mais elle semble dominée par la mairie en appui sur une terrasse, avec un plan très plastique. En arrière, le dispositif est le même avec quelques maisons et les deux fermes. Ce plan va être présenté au conseil municipal7 qui émet un avis de principe favorable, tout en manifestant son désir de voir urbaniser la rive nord du lac, enfin il demande à l’architecte de la commune de poursuivre l’étude de détail. À la fin de l’année, le ministère des Travaux Publics, des Transports et du Tourisme engage le rétablissement des routes coupées par le lac de SerrePonçon avec la construction du pont de Savines.

DISCORDES L’année 1956 va être celle de toutes les controverses. Les expropriés de Serre-Ponçon se sont organisés en syndicats qui regroupent les fonctionnaires et les retraités, les commerçants et les artisans, les ouvriers et les salariés, employés et locataires ainsi que les mal-vendus. Certains Savinois ont même rencontré des habitants de Tignes pour connaître leurs manières de faire front aux décisions d’E.D.F. La commission Dulery qui a nommé deux experts pour estimer la valeur des biens expropriés, se voit opposer un refus de la part de l’administration des Domaines. Les cahiers de revendications des syndicats de défenses se multiplient, un comité de coordination se constitue. Le 4 mars, à

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Lettre du 05 091955 A. A.d.P. C.R. des 01 10 1955 et 30 10 1955, A.M.

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PLAN D’URBANISME, 1955

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Savines, une manifestation réunit plus de 800 personnes pour protester contre les conditions d’expropriations qui ne sont toujours pas révisées. Compte tenu de ces tensions, le Conseil général des Hautes-Alpes se réunit pour débattre de la question de Savines et définir une position. Le 21 mars 1956, Guy Mollet, président du Conseil à la tête d’un coalition de centre gauche, fait recevoir à l’Hôtel Matignon les conseillers généraux François-Bénard et Joisson, Pavie le représentant des syndicats d’expropriés, l’ingénieur E.D.F. et les experts Courts et Pellenq. Après discussion, satisfaction est partiellement donnée aux syndicats savinois pour la revalorisation des montants d’expropriation. De nouvelles propositions d’indemnisation seront faites aux syndicats, débattues pendant plusieurs mois au sein de la commission Dulery. De nouvelles manifestations auront lieu à Savines en juillet au sujet de l’emploi des ouvriers de la Sotex et de la Cellulose des Alpes dont les usines sont vouées à la démolition. Les notes autobiographiques de l’architecte Achille de Panaskhet indiquent cette année 1956 pour la commande par la préfecture des Hautes-Alpes, du projet de reconstruction de Savines.

LE PLAN D’URBANISME DE DÉTAIL Les travaux du barrage sont bien engagés, on travaille jour et nuit à déplacer les mètres cubes de terre. En juin 1957, une forte crue de la Durance va endommager le chantier du barrage. Le batardeau* de quinze mètres de haut qui permet le travail à sec est détérioré, plusieurs engins de chantier bouteurs*, tombereaux, tracteurs sont emportés. Au résultat, il faudra doubler la capacité des canalisations de dérivation et les travaux vont prendre du retard. À l’automne, le premier plan d’urbanisme de détail de Savines est réalisé par Achille de Panaskhet sous l’égide du ministère de la Reconstruction et du Logement et celui des Travaux Publics, des Transports et du Tourisme.

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S’il s’agit d’un plan d’urbanisme qui définit des aires dédiées aux différentes fonctions urbaines, il précise peu les formes urbaines sans pour autant être totalement abstrait. Sous les hachures, carreaux et autres symboles graphiques, on reconnaît la structure des plans antérieurs. La légende évoque aussi bien les zones non aedificandi*, les secteurs d’activité que les plantations d’alignement et même les secteurs de plan de masse*. L’autre caractéristique du P.U.D.8 est qu’il est dessiné sur le fond de l’ancien village, donnant une proximité exacte entre les deux villages. D’un premier coup d’œil on voit que des trois hameaux du Forest, des Chaumettes, des Glaudins, seul ce dernier est prévu à disparaître dans les zones non aedificandi* sur le rivage du lac. Le hameau du Forest est épargné par les démolitions, ce qui laisse deviner qu’après les expériences d’expropriations, on recherche à faire des économies tant sociales que financières à une période où l’inflation est à deux chiffres. La structure des voies donne toujours le carrefour à trois branches, à ceci près que la route de Barcelonnette par le Sauze a perdu de son importance par rapport à la Nationale 94 qui se voit doublée de contreallées9. Sur le secteur des Chaumettes, la chaussée digue s’est réduite et l’hôtel a disparu. Néanmoins, le plan d’eau permanent demeure dans la composition,

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LE PLAN D’URBANISME DE DÉTAIL


même s’il semble s’être un peu réduit. Les terrains de l’auberge de jeunesse ont glissé au sud du hameau en contact direct avec le plan d’eau. Au nord de la route du Sauze, jusqu’au bord du lac, est apparue une zone d’ateliers dédiée à l’activité industrielle, ce qui est très nouveau. Le débat sur la séparation du village sur les deux rives du lac, semble avoir trouvé une résolution avec un ensemble urbain commercial, touristique et industriel. On notera encore l’ajout d’un abattoir, de taille modeste, à l’extrême-ouest du village. Le long de la route nationale en direction d’Embrun, la partie la plus septentrionale, en contact avec le lac, accueille de nouveaux programmes. La gendarmerie, proche du pont, se trouve en position stratégique de contrôle d’un passage obligé. L’école est desservie par une contre-allée. Ces services publics semblent bien avoir été implantés là après la décision de maintenir le hameau du Forest. Le cimetière, son extension et les terrains de sports sont toujours prévus sur ce secteur, séparés par un espace boisé. Au sud de la route nationale, le site du village actif et le maintien du hameau du Forest ont changé la donne. L’emprise des maisons existantes empêche toute composition d’ampleur, les constructions nouvelles se condensent donc à l’est du plan. Les commerces sont rassemblés le long d’une contreallée, et la place principale est accessible par une seconde voie en dérivation. La place est délimitée par le bâti qui l’entoure, les services publics municipaux au nord, l’église et son presbytère au sud. Ce qui, compte tenu de la déclivité du terrain, donne à cette dernière la position dominante qu’avait la mairie dans le projet de 1955. Dernier élément déterminant de ce plan : la limite d’emprise de l’agglomération, solide pointillé qui semble bien vouloir restreindre l’extension du chef-lieu de canton. Limite qui ne cessera de poser des problèmes au développement du village. En décembre 1957, le Conseil municipal, délibérant de la reconstruction du village, va approuver ce plan dans ses principes. Après la décision de reconstruire le village de Savines, l’architecte établit un chiffrage du coût de l’opération qui doit être pris en charge par E.D.F. Le programme porte en effet sur la reconstruction du patrimoine immobilier de la commune, appelé à disparaître avec la mise en eau du lac de Serre-Ponçon. Par ordre décroissant de prix, on trouve les logements sociaux, l’église, la maison de retraite, la mairie, l’école, la gendarmerie, la salle des fêtes, le terrain de sport, l’auberge de jeunesse, la perception, la poste, les abattoirs et l’extension du cimetière. Le montant total s’élève à 400 millions de francs (valeur 1958). Le ministère de la Reconstruction et du Logement demande dès lors aux Ponts et Chaussées d’étudier le projet d’adduction d’eau et d’assainissement du nouveau Savines.10

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Plan d’Urbanisme de Détail P.V. 28 08 1957, A.M. Lettre du 20 12 1957, AM

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LE PONT La construction du pont de Savines débute en 1958 ; il sera inauguré deux ans plus tard. C’est l’œuvre de l’ingénieur des Ponts et Chaussées Jean Courbon. Il travaille alors au développement du béton précontraint* pour la société des Grands Travaux de Marseille qui réalisera l’ouvrage d’art. Franchissant plus de neuf cent mètres, le pont-route est formé de 11 travées de 77 mètres de portée chacune. Les arches tendues donnent, toujours lors des plus hautes eaux, l’impression d’une suite de ricochets, comme l’évoquait Achille de Panaskhet. La caractéristique du pont tient à l’utilisation du béton précontraint* non seulement pour le tablier*, mais aussi pour les piles dont la hauteur peut atteindre 43m. Le plus spectaculaire est sans doute la mise en œuvre du tablier construit en encorbellement*. Cette méthode consiste à réaliser les demiarches symétriquement à partir d’une pile, comme pour le fléau d’une balance. Le coulage du béton est réalisé sur place, à partir d’équipements mobiles en appui sur la partie du tablier déjà construite. Une articulation est réalisée entre deux demi-arches, un peu comme une clé de voûte.

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Le pont aura malgré tout laissé certains problèmes derrière lui. D’abord, avec 7m de voies et 1m pour chaque trottoir, il a été sous-dimensionné pour la circulation de la fin du XXème siècle. Par ailleurs il souffre du décintrement, mal que l’ingénieur Eugène Fressinet avait repéré pour le pont du Veurdre au début du siècle, à savoir les déformations dues au fluage du béton*. Tous ceux qui ont emprunté le pont de Savines se souviennent de ces dos d’âne, et on en est à la troisième intervention en 50 ans, ce qui est beaucoup pour un ouvrage d’art kilométrique. Non réceptionné par l’Etat, ce pont est toujours la propriété de l’entreprise, aujourd’hui Vinci. La construction du pont va rapidement donner au vieux village une allure de miniature tant l’ouvrage est hors de l’échelle locale.

L’EAU VIVE Alors que le général de Gaulle revient aux affaires, que Simca lance le modèle Ariane, et que le festival de Cannes couronne le film de Jacques Tati Mon oncle, sort en juin 1958 le film de François Villiers, L’Eau vive. C’est une œuvre de commande d’E.D.F. dont le scénario et les dialogues sont de Jean Giono. Elle évoque le réaménagement de la Durance, à la gloire de la modernité électrique.


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COULAGE DU TABLIER

LE PONT ET LA RÉPUBLIQUE


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Le tournage commence en 1956 sur divers sites de Provence : le barrage de Chaudanne, Gap, Embrun, Briançon, Névache et bien sûr Savines. Le film obtient un certain succès, il remporte un Golden Globe Award en 1959 et tout le monde se souvient de la chanson de Guy Béart, un autre ingénieur! Pour François Desvignes, auteur de l’ouvrage de référence sur Savines : « Le tournage de cette romance a distrait les Savinois de leur résistance. » La période est propice aux films de barrages : dans la même année 1958, Jean-Luc Godard sort Opération béton sur la construction de l’ouvrage de la Grande Dixence ; une reprise de L’eau vive sera réalisée par Elia Kazan, avec Montgomery Clift et Lee Remick sous le titre Le Fleuve Sauvage en 1960.


ORDONNANCES ET DISCIPLINES ARCHITECTURALES La version définitive du Plan d’Urbanisme de Détail est approuvée par le préfet en juillet 1958. Certaines dispositions ont évolué, à commencer par la limite d’emprise d’agglomération qui s’étend au sud et à l’est du village. L’autre modification porte sur la localisation des logements sociaux, d’une part au nord de la route nationale 94, et d’autre part à l’est de la place principale. Enfin, derniers points, les secteurs de plan-masse sont précisés, les ordonnances et disciplines architecturales sont complétées par des profils qui rendent compte des solutions topographiques envisagées dans ce site de montagne. Apparaît ici la volonté de l’architecte de figurer une composition en volume, ne cédant pas à l’abstraction du seul zonage*. Plusieurs documents retrouvés illustrent cette démarche, ce sont des plans (plus exactement des élévations) donnant lieu à des profils altimétriques. Deux coupes, l’une en long et l’autre en travers, figurent l’aménagement de la partie sud de la route nationale. Sur le profil en long, on comprend la logique d’épannelage* qui part des services municipaux (mairie, salle des fêtes, justice de paix) dont le faîtage donne la référence de hauteur aux

ORDONNANCES ARCHITECTURALES SUR LA NATIONALE 94

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immeubles de deux voire trois étages sur rez-de-chaussée. Le plus étonnant est le caractère très urbain de ces immeubles installés dans la pente ; on est loin de l’idée d’un village et de ses maisons assemblées ! Le profil en travers indique un système de bâtiments en équerre, dont l’emprise correspond à des plateformes en terrasses successives. On retrouve ici des éléments du second plan d’aménagement de 1955, où les immeubles esquissaient une forme d’îlots urbains. Enfin, le troisième profil se situe au nord de la route nationale, il est lié au lotissement du Forest, réalisé par la suite. Sur la déclivité avec des plateformes en escalier, on distingue une suite de maisons particulières d’un seul niveau. Mais à y regarder de plus près, ces habitations comptent des étages en contrebas adossés aux remblais de la route nationale. Ainsi émerge une figure centrée sur la route nationale, et sa plateforme installée en équilibre entre déblais et remblais dans la pente vers le lac. Au nord, l’émergence de maisons basses avec leurs étages inférieurs, laisse passer des vues lointaines vers les berges du lac et les sommets. Au sud, l’inverse se met en jeu avec la mairie de plain-pied, avec la place de l’Église, un niveau plus haut que la route. Là, le bâtiment s’adosse au remblai de la place comme le ferait un mur de soutènement. L’église va amplifier ce mouvement ascendant en dominant la place, tout se dessine en étageant des terrasses successives.

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Avec une telle topographie, et le déplacement de l’école au nord de la route nationale, le conseil municipal fera la demande d’un passage souterrain avec escalier et rampes pour traverser la voie. Cette requête ne sera pas suivie d’effet ; par contre, les Ponts et Chaussées vont encore réduire la chausséedigue de la route du Sauze, supprimant toute possibilité d’y construire un équipement11. Le rôle du plan d’eau fixe se réduira peu à peu, pourtant l’idée était très intéressante, il suffit de voir comment la ville d’Embrun a pu tirer parti d’un tel dispositif.

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P.V. 28 05 1958, A.M.


NOUVEAUX PROGRAMMES On sait l’importance de l’industrie dans le village et le peu d’espoir d’y maintenir les activités existantes. Certes le barrage, la construction du pont et les routes vont créer des emplois dans le bâtiment et les travaux publics, mais le plus souvent peu qualifiés et limités dans le temps. Aussi, les deux premiers permis de construire portent sur l’activité industrielle. La première entreprise est la société Omnitube qui fabrique du mobilier scolaire. En 1954, un renouvellement est décidé par le ministère de l’Éducation Nationale, dont la nouvelle ligne est marquée par les productions de Jean Prouvé qui allient le métal plié et le contreplaqué thermoformé. C’est le cas de cette entreprise d’Ambérieux qui recherche de la main d’œuvre et implante à Savines une unité de production. Une autre entreprise va s’installer dans le nouveau village, c’est la société Lambert qui fabrique des antennes de télévision, un produit d’avenir. Cette entreprise parisienne délocalise sur place certaines fonctions comme le bobinage. Ces deux activités donneront une image avancée de l’usine, loin de l’industrie noire et polluante, usine verte coexistant facilement avec le tissu urbain aéré du nouveau Savines. L’arrivée de nouvelles entreprises va logiquement entraîner un programme de logements sociaux. C’est un ensemble de trente logements que va réaliser l’Office public d’H.L.M. des Hautes-Alpes. Situé au nord de la route nationale, ce projet, tout comme ceux des deux entreprises, sont signés par Georges Languin, Paul Roque et Achille de Panaskhet, architectes installés à Gap. Autre permis de construire, celui de l’extension du cimetière pour lequel seul le nom de Achille de Panaskhet apparaît.

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CARTE POSTALE, 1965


2 UN NOUVEAU VILLAGE

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SAVINES-LE-LAC : LES QUARTIERS

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UN NOUVEAU VILLAGE

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Janvier 1959 : Charles de Gaulle est élu premier président de la Vème République, dont la constitution a été adoptée en septembre 1958. À Savines, le Conseil municipal décide de la reconstruction de la mairie intégrant la perception et la salle des fêtes. Les projets s’enchaînent avec le permis de construire de l’école et ses logements de fonction, les trois architectes de Gap en sont les signataires. Le 15 mars, Louis Imbert est élu maire de Savines. Les nouveaux programmes se poursuivent : le Conseil général propose d’implanter sur la commune une maison médico-éducative grâce au don de Mme Cluzel12. Autres services urbains, la Poste et l’antenne locale des Ponts et Chaussées, sont projetés simultanément. Pour la gendarmerie, Achille de Panaskhet sera seul signataire de ces permis de construire. Le Forest, premier lotissement de Savines conçu par Achille de Panaskhet, ouvre à la construction les terrains non affectés aux équipements ; il est approuvé par arrêté préfectoral en août 1959, le Plan d’Urbanisme de Détail est modifié, il le sera plusieurs fois par la suite. Les permis de construire de maisons particulières vont être déposés telle la maison Léon Silve ou celle d’Henri Marcellin qui comprend des commerces en rez-de-chaussée. Il faut ajouter les projets de Logecos* créés en 1953 dans le cadre du plan Courant visant la réduction des coûts et destiné à l’accession à la propriété. À l’automne, les démolitions des bâtiments du quartier de la Chapelle sur la rive nord du lac sont engagées. Les décombres sont utilisés pour réaliser les remblais* de la voie ferrée Gap-Embrun. Ainsi vont disparaître la chapelle Sainte Marie-Madeleine ainsi que l’usine Sotex. La nouvelle gare sera projetée par la S.N.C.F. Les premiers essais de mise en eau du lac sont réalisés, le niveau s’élève à la cote de 710 mètres. Cette lente montée des eaux est un véritable spectacle que l’on vient voir le dimanche en famille. L’année 1960, qui voit arriver le nouveau franc, va être pour Savines celle de tous les chantiers : destruction du quartier de la Chapelle, du vieux village, construction du pont et des premiers bâtiments du nouveau village.

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Lettre du 23 06 1958, A.M.


MAISON S.

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LA GENDARMERIE


LE FOREST, FAÇADE SUD

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VUE VERS LA RIVE NORD DU LAC


LES IMMEUBLES D’HABITATION À LOYER MODÉRÉS Les habitations à loyers modérés13 du Forest seront les premiers bâtiments édifiés. Une des raisons de leur construction est que les entreprises locales emploient une part significative de la population active du village14. Certaines d’entre elles s’étaient engagées à se réinstaller sur place, exigeant le relogement de leurs employés. Créés en 1950, les H.L.M. remplacent les habitations bon marché, avec de nouvelles formes de financement. Les architectes Georges Languin, Paul Roque et Achille de Panaskhet, qui ont auparavant réalisés pour l’O.P.H.L.M. 0515 la Blâche et le Forest d’Entraï à Gap, réutiliseront ce modèle. Savines aura droit à des H.L.M. « A » correspondant à un sur-financement pour raisons architecturales. Initialement étaient prévus 20 logements qui seront portés à 30 lors du permis de construire de septembre 1958. A ceux-ci s’ajouteront 30 logements de la Secilef16 et 15 autres logements sociaux pour l’O.P.H.L.M. 05 soit 75 logements sociaux. Les plans d’urbanisme développés par Achille de Panaskhet pour le nouveau Savines faisaient des logements collectifs l’armature urbaine du village avec un front bâti le long de la route nationale et des alignements sur la place principale. Disponibilité foncière oblige, il n’en ira pas ainsi, et les logements collectifs sociaux resteront dispersés, assurant le rôle de fond de scène au pied de la Côte du Preynet. Le groupe d’habitations du Forest reste le plus proche des berges du lac. Les logements se situent au nord de l’ancien chemin qui menait vers l’oratoire de Saint-Ferréol et Lounié en passant devant le cimetière. De là partait le chemin de la Flotte qui passait devant le Fondation Pavie et le hameau du Forest. La composition se fait à partir de deux bâtiments symétriques, ménageant entre les deux une faille en belvédère sur le Lac, cadrant une vue sur la rive nord du lac et Chabrières. Il faut imaginer ces immeubles de trois étages sur rez-de-chaussée qui devaient paraître très hauts dans un paysage de hameaux essentiellement constitué de maisons fermes peu élevées. Pour amplifier cet effet de belvédère sur le lac, les parties en rez-de-chaussée situées de part et d’autre de la faille sont libérées à la manière de guichets, sortes de transparences qui dilatent le point de vue, évitant ainsi un effet massif de mur-pignon. Les deux immeubles forment un angle, donnant deux orientations, l’une nord-sud et l’autre plus ouverte vers l’ouest, direction que reprendront les Studios Cravois sur le lotissement Saint Féréol. Chaque immeuble comporte des sous-sols encastrés dans la pente, un rez-dechaussée et trois étages courants, couverts par une toiture monopente ouverte vers le sud. Dans les sous-sols dégagés vers le lac se trouvent des caves ainsi 13 14 15 16

Conf. 18 07 60 A.M. Note du 05 06 1958, A.M. Office Public d’Habitations à Loyer Modéré des Hautes-Alpes Société Embrunaise de Construction et de Gestion Immobilière de Logements Économiques et Familiaux

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qu’une buanderie collective où il était possible de laver et sécher le linge avant l’arrivée des machines à laver familiales. La distribution des immeubles se fait par deux cages d’escaliers avec, à chaque étage, un trois pièces et un quatre pièces. Cuisines, sanitaires et séchoirs donnent au nord sur le lac, séjours et chambres au sud vers le Morgon. La structure constructive, avec façades porteuses et refend* longitudinal est contreventée par les murs des cages d’escaliers. Les divisions se font par des cloisons qui sont doublées pour les séparations entre appartements. Les portées de planchers donnent un immeuble peu épais de moins de 8 mètres. Ce type de structure, peu élaborée, est plus proche des techniques de la reconstruction que de la fin des années cinquante. Les façades avaient été prévues en parement de plaques de béton préfabriquées. De fait, la construction se fera de façon traditionnelle et un calepinage* de faux joints de panneaux sera dessiné dans l’enduit. Seuls les


ÉLÉVATION SUD, BÂTIMENT B

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cadres de baies saillants seront préfabriqués, selon les préceptes du ministère de la Reconstruction. Les balcons situés aux extrémités de chaque bâtiment méritent qu’on s’y attarde. Ils forment un ensemble solidaire depuis le plancher du premier étage jusqu’à l’auvent du troisième. Reliant, à chaque étage, le séjour et une chambre adjacente, ils composent un élément unitaire qui déborde le pignon, un peu à la façon d’un aileron de passerelle* de navire ou encore d’un plongeoir, marque d’une écriture architecturale moderne. L’ensemble apparaît comme une pièce extrudée* indépendante du bâtiment. C’est un détail qui est significatif de la période, indiquant dans sa forme un mode génératif, fût-il géométrique ou conceptuel. Par contre on notera que le bâtiment ne comporte ni comble habillé de bardage de bois, ni soubassement de pierre locale, traits qui feront l’unité de l’écriture architecturale du nouveau Savines.


ANCIENNE USINE LAMBERT

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ANCIENNE USINE OMNITUBE


USINES VERTES17 Omnitube, cette entreprise d’Ambérieux fabriquant du mobilier scolaire en bois et tube métallique, recherchait activement de la main d’œuvre. Si elle trouve dans le nouveau village la cinquantaine d’ouvriers nécessaires, l’issue industrielle ne sera pas heureuse : elle ferme ses portes après seulement deux ans d’activité. Les locaux seront alors repris par l’entreprise Normand. L’usine s’articule sur la continuité de la chaîne de production, avec d’un côté l’usinage des tubes métalliques et de l’autre l’atelier du bois, générant deux halles de production parallèles et inégales. Entre ces bâtiments se trouvent une cour de service, un hall d’accueil et d’exposition des produits ainsi que les locaux du personnel. La direction, ainsi qu’un logement de fonction, sont installés à l’étage. Au résultat, une volumétrie complexe dominée par la grande nef de la halle sud, enchâssée dans la pente et couverte d’une toiture monopente de 58 mètres de long. Cette toiture est soutenue par une charpente métallique, libérant les pignons de leur rôle de contreventement*. Les architectes en ont tiré parti en ajourant ces parois cadrées par les poutres et les poteaux de rive, formant des vides que des bandes de polyester ondulé et translucides posées en chevron viennent fermer. Ils obtiennent ainsi une remarquable et très contemporaine dématérialisation du pignon qui amplifie le profil de la grande halle. Très différente, l’usine Lambert est organisée en ligne dans une halle de fabrication unique. Encastré dans la pente, le bâtiment est accessible sur deux niveaux. En partie haute se trouvent les locaux du personnel et ceux de la direction et des laboratoires donnant en mezzanine sur la halle située en contrebas. La halle de fabrication forme un vaste plan libre de 1200 m2 sur lequel la production s’organise librement. La structure en béton est constituée de files de poteaux extérieurs à l’atelier reliés par une charpente métallique. L’espace est libéré de tout point d’appui par l’exostructure*. Les poteaux espacés de 6 mètres laissent place à de larges verrières qui éclairent généreusement les ateliers sur trois faces. Le projet prévoyait une suite de pare soleil verticaux assez resserrés qui ne seront pas réalisés. Le pignon ouest, là aussi très ouvert, se présente avec de larges pans vitrés et un tympan en losange qui reprend la contreforme de la toiture avec un poteau central dit inversé*. Dans la partie haute du terrain, les locaux du personnel s’ouvrent sur une terrasse couverte. Depuis, un logement de fonction a été ajouté au-delà de la terrasse selon la logique linéaire. La maison reprend l’écriture architecturale des auteurs, avec un pignon en bâtière* articulant rampants, pilastre* en pierre rose, ventilations des combles et profil de cheminée intégrée au dessin d’ensemble. L’usine Lambert sera rachetée, en 1964, par les établissements Normand développant la société Optex, qui reprendra aussi les locaux d’Omnitube.

17

P.C. 4048 et 4570 A.M.

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USINE OMNITUBE, PLAN DU RDC

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6

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3

2

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1 2 3 4 5 6

hall d’entrée, magasin et salle d’exposition locaux sociaux four atelier menuiserie emballage, expedition atelier métalerie

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10 M.


USINE LAMBERT

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USINE LAMBERT, ÉTAGE D’ACCÈS

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3

4 5

1 2 3 4 5

hall d’entrée garages bureaux de la direction et laboratoires locaux sociaux hall de fabrication

1

10 M.


PAVILLON DES TÉLÉMESURES

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L’ÉCOLE, VUE DEPUIS LA COUR


JARDIN Les deux usines sont implantées sur un vaste terrain qui souligne, par l’importance du dispositif paysager, leur caractère d’usine verte de montagne. Talus modelés sur de larges surfaces engazonnées, buissons taillés, arbres en solitaires, haies persistantes en habillage des soubassements qui jouent avec les lignes des rampes d’accès, et le délié des chemins piétons. Un paysage de parc, calme, sert d’écrin aux usines où se trouve encore un étrange petit pavillon hexagonal qui servait à faire des télémesures d’antennes. Il n’est plus en service aujourd’hui.

L’ÉCOLE L’école 18 est parmi les programmes les plus marquants de la renaissance du village. Construite en deux ans, juste avant la gendarmerie, l’école est indépendante de la mairie, contrairement à l’ancien village. D’abord imaginée au hameau du Forest sur les plans de 1955, elle prend définitivement sa place au nord de la route nationale 94, sur le P.U.D. de 1957. Sur le plan de situation de 195819, l’école apparaît sous la forme d’un bâtiment linéaire formant un pli, comme les H.L.M. du Forest. Par la suite, elle prendra la forme d’une équerre orientée et terminée par une rotonde, en forme de note de musique. Éloignée de la route nationale, les extensions successives de l’école se feront vers le sud, en se rapprochant de la Nationale. Implantée en pied de talus, la pente du terrain conduit, là encore, à l’étagement du projet en plateformes successives. La composition initiale fait apparaître deux cours avec un dénivelé de 2 mètres, division liée au site mais aussi à la séparation filles - garçons. En partie haute, se trouvent 2 classes de garçons, leurs sanitaires et un préau prolongé par un auvent de béton galbé soutenu par un poteau inversé*, amorçant l’escalier d’accès à la cour des filles en contrebas. A ce niveau, et dans l’alignement du bâtiment des garçons, on trouve le préau des filles, les sanitaires, la chaufferie et l’accès aux logements des maîtres ainsi que les caves et la loge, de type studio, de l’instituteur suppléant. En retour et à l’équerre, se trouvent l’unique classe des filles et la classe enfantine, circulaire, qu’accompagne une salle de propreté. Les trois logements des instituteurs, dont deux au premier étage, s’ouvrent à l’ouest sur des loggias dont les poteaux prolongent ceux du niveau de la cour. L’appartement du second étage crée une rupture dans la ligne de faîtage*. L’ensemble offre une grande variété de façade.

18 19

P.C. 4488 et 4489, 12 01 59, A.M. P.C. Omnitube 02 1958, A.M.

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Le corps principal de bâtiment associe à la courbe de l’auvent, les quatre baies des classes liées par les membrures* horizontales des appuis et des linteaux. Au delà, avec le dénivelé, le volume creusé de loggias joue avec des ombres marquées. Enfin, avec l’aile en retour au point le plus bas du site, la rotonde semble comme détachée du bâtiment principal. Ici, la rotonde reprend la toiture monopente du bâtiment principal, dessinant comme une casquette sans visière. Seules les nervures évasées vers le haut rachètent la forme de disque de la toiture. Sans doute, la limitation des surfaces vitrées lui a-t-elle fait perdre une certaine sveltesse. Sur la façade est, on notera la présence d’une porte d’accès aux logements de fonction. Son cadre est traité de façon décorative. Surmontée par un auvent en trapèze auquel répond un parement de pierre dure, gris sombre, la pierre borde la baie au-dessus du linteau et sur le jambage droit, où elle est limitée par une découpe rampante. Le linteau lui-même reprend cette dissymétrie, dessinant, avec le jambage gauche, un L inversé tout à fait graphique et ornemental. L’architecture est peu marquée par les matières ; on ne trouve aucun bardage de bois comme pour les autres projets savinois. La pierre n’est utilisée que sur la différence de niveau des cours ; pierre, qui se retrouve sur le mur de soutènement, et de façon décorative sur la façade est.

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L’ECOLE, ÉLÉVATION PRINCIPALE, 1958


LA ROTONDE DE L’ÉCOLE

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L’ÉCOLE, ENTRÉE DES LOGEMENTS DES MAÎTRES

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classe enfantine classe préau cour des filles cour des garçons chaufferie

PLAN DU REZ-DE-CHAUSSÉE (ÉTAGE D’ACCÈS)

5

10 M.


SAVINES-LE-LAC C’est le 22 janvier 196120 que le Conseil municipal demande que la commune de Savines prenne désormais l’appellation de Savines-le-Lac. Le vieux village est détruit en mai, le clocher de l’église Saint-Florent sera le dernier à tomber. Les photographies de Paris Match rejoueront le drame de Tignes, neuf ans plus tard. La différence est que le nouveau village, Savines-le-Lac, est bien avancé en construction. La cote définitive de 780 mètres est atteinte en juillet, signant la disparition de Savines.

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

usines auberge de jeunesse retenue d’eau gendarmerie école H.L.M. mairie Poste Ponts et Chaussées église Saint-Florent

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LE PROJET DU VILLAGE EN 1961

20 C.M. 22 01 1961, A.M


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CARTE POSTALE, 1968


3 ARCHITECTURE DES ESPACES PUBLICS

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LA POSTE, L’ÉGLISE, LA ROTONDE ET LA MAIRIE

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ORDONNANCES DE LA PLACE


LA PLACE DE L’ÉGLISE Au sud de la route nationale, la place de l’Église est en chantier ; la mairie, la poste, les Ponts et Chaussées, les logements sociaux de la Secilef, et les fondations de l’église que l’évêque de Gap viendra bénir, sont en cours de construction. La place de l’Église est reliée à celle des commerces par une déviation qui la situe en retrait de la route nationale. Cette courte rue prend la direction du portail principal de l’église Saint-Florent. La route est très déterminée de la pente : en effet, sa déclivité est d’environ 50 mètres entre le pont et le Clos Saint-Féréol. Elle est conçue dans l’équilibre des déblais* et des remblais*, donnant un profil transversal creusé au sud et taluté au nord. La place, elle, établit une plateforme surélevée dont la mairie, édifice linéaire, constitue la butée de soutènement sur la route nationale en contrebas. Bordant au nord la place de l’Église et au sud l’avenue, la mairie est au centre des plans d’Achille de Panaskhet ; élément d’ordonnancement de l’espace public savinois, à la fois comme programme, représentation de l’édilité, et comme élément d’organisation du site. Avec la place de l’Église, on a affaire à un véritable espace urbain. De l’expérience de Cervières, Achille de Panaskhet dira son regret de n’avoir pas pu réaliser une place publique qui aurait réuni les fermes disséminées en simples rangées comme dans un lotissement21. De là il sera convaincu de la nécessité d’un véritable espace public pour Savines-le-Lac. Pour Aldo Rossi, le monument ne se réduit pas au seul objet architectural, mais correspond à un espace urbain de référence, lieu d’identification de l’architecture de la ville. C’est exactement le cas de la place de l’Église pour Savines-le-Lac. Elle est plutôt barlongue*, orientée est-ouest, traversée par la pente qui réhausse l’église et encastre la mairie qu’elle longe. À l’est, la place est limitée par l’ensemble de la Poste et des Ponts et Chaussées, la voie centrale longe le mur de soutènement de l’église tout en pierre rose de Guillestre, et s’achève sur la rue Serre-Verger par un petit édifice de même nature, qui vient borner la place. Au-delà, c’est l’étagement des immeubles sur la pente qui forme le fond de scène comme une découverte*, un lointain de décor urbain en amphithéâtre. Vers l’ouest, la plateforme compose à la manière baroque et théâtrale avec les trois rues divergentes* : horizontale au centre (rue de Glaudins), ascendante au sud (rue de la Flotte), et descendante au nord vers la place des Commerces et la route nationale. Cette patte d’oie est marquée de séparations bâties. Dans ce dispositif en trident, les deux constructions en tête d’îlot ont une réelle importance urbaine. D’une part, la boulangerie d’Albert Pellenq, dont le profil émergent sur la place reste très modeste, et dont le mur et l’escalier de coupé* a la lourde tâche de soutenir la pente. C’est, d’autre part, avec la rotonde, la seule présence d’activité commerciale sur la place de l’Église essentiellement bordée par des services publics ou religieux.

21

Les villages reconstruits, Alpe Loisir, D.L.

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LA MAIRIE, UN HÔTEL DE VILLAGE

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C’est certainement, avec l’église, un des signes du renouveau du village de Savines-le-Lac22 ; l’idée d’une cité communale, prévue dès 1955, demeure. La mairie ne se limite pas à un simple édifice communal, elle accueille aussi des services de l’État, comme la perception avec son logement de fonction, ou encore la Justice de Paix23 comme le requiert le statut de chef-lieu de canton. On y trouve aussi un foyer rural. Issu du Front Populaire en 1936, les foyers paysans visaient une formation technique, humaine et sociale d‘élites paysannes. En 1945, à la suite du Conseil national de la Résistance, les ministères de l’Agriculture et de l’Education Nationale chercheront à animer et développer le milieu rural. Enfin, la salle des fêtes, véritable programme culturel polyvalent qui peut accueillir des représentations théâtrales, séances de cinéma, le loto ou le bal du samedi soir. En fait, on est bien devant un petit hôtel de ville qui loge divers programmes, autant pour regrouper des services publics que pour donner de l’ampleur au bâtiment dans son vis-à-vis avec l’église. Si la place est dominée par le volume de l’église, à la verticale de Saint-Florent répond l’horizontale de la mairie. Pour Julien Guadet, le programme d’un hôtel de ville se tient entre les façades d’apparat (les mariages, les commémorations, l’espace public) et les besoins fonctionnels (bureaux, logements de fonction ou contact avec le public). La mairie de Savines-le-Lac peut prétendre au titre d’hôtel de village. On accède à l’hôtel de village, dont le plan sera plusieurs fois modifié, par un perron au-dessus du sol de la place, et quelques marches plus haut, à la salle du conseil, et salle des mariages, qui ouvre par un pan de verre sur une loggia. La loggia donne sur la place comme l’aileron de passerelle* d’un navire, dépassant le pignon nord. L’ensemble offre l’image transparente, plénière et laïque de la commune. Un voile de béton suspendu, dont les empreintes du coffrage sont perceptibles, reçoit les armes de Savines-le-Lac et porte la hampe du drapeau français.

22 23

12 02 1959 A.A.d.P. Supprimée en 1958


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1 2 3 4

cuisine séjour chambre salle du Conseil

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bureau du maire foyer rural bibliothèque cabine projection

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PREMIER ÉTAGE

ÉLÉVATION NORD SUR LA RN 94

10 M.


Le bureau du maire était situé à gauche de la salle du conseil. En dessous, divers bureaux de plain-pied avec la galerie couverte entre la mairie et les Ponts et Chaussées. La perception ouvrait sur le passage traversant central avec un accès direct vers le logement du percepteur à l’étage. De l’autre côté de ce passage, se trouve en contrebas, la salle des fêtes, avec la scène à l’extrémité ouest du bâtiment en vis-à-vis d’un balcon associée à la cabine de projection. Le volume en effilé de la salle, décroche le bâtiment vers le nord. Le retrait est racheté par une courte galerie menant aux loges, sous la scène. Le foyer rural, quant à lui, était situé en pont au-dessus de la transparence, ou se trouvait son entrée. L’ensemble linéaire est borné à l’est par la salle du conseil et à l’ouest par la salle des fêtes. Ces deux volumes importants sont couverts par des toitures monopentes de sens opposés. Au centre, le bâtiment joue sur un esprit d’horizontalité par une toiture à deux versants, terminée à l’ouest par une croupe. L’horizontale est soulignée par plusieurs séries de fenêtres en bandes, compartimentées par des meneaux*. Ces séries ne permettent pas de distinguer les différents programmes qu’ils abritent (logements, bureaux, foyer) bien que

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PASSAGE VERS SAINT-FLORENT


l’écriture soit à chaque fois différente : liées par des appuis continus, liées par un encadrement commun poursuivi en retour sur le pignon ou bien encore séparées avec un encadrement à chaque fenêtre. D’anciennes photographies montrent que, sur la place, les meneaux étaient colorés : rouge en rez-dechaussée, bleu au-dessus du passage central et blanc sur le logement du Percepteur. Le drapeau français était inscrit sur la façade, un peu à la manière les poteaux teintés aux couleurs nationales du palais de justice de Chandigarh24. Face à l’église, toute en ascension vers le clocher, l’hôtel de village étire une horizontale déférente, bordant la place, laissant échapper des vues vers le lac et les sommets des Écrins. Sur la route nationale, la façade est plus articulée, avec au centre, en pont, les bandes de fenêtres ; à l’est la salle du conseil avec ses baies verticales ; à l’ouest la salle des fêtes aux modénatures* puissantes. Le décrochement du volume de la salle est mis en scène par un angle vitré, relié par de fines traverses en béton à un écoinçon* oblique. La façade nord est marquée par deux larges poteaux en V, couverts d’une poutre en flexion*, amortie par un panneau de pierre.

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PASSAGE VERS LA ROTONDE

24

Le Corbusier, 1956


ÉLÉVATION DES BÂTIMENTS

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LA POSTE, PASSAGE VERS LE CHABRIÈRES


LES PONTS ET CHAUSSÉES ET LA POSTE25 Dès les premiers plans de masse* figure un espace public qui associe l’église à un centre civique regroupant des services publics autour de la mairie, et quelques commerces le long de la route nationale. Le dessin lui-même de la place, lieu d’identification du nouveau village, appelait des édifices susceptibles de border l’espace public, à partir de projets d’importance modeste. Aussi, était-il nécessaire d’agréger certains éléments dans un ensemble saisi à l’échelle de la place, et capable de la cadrer, de tenir sa face est. Le dispositif se poursuivant avec les immeubles de logements sociaux (Secilef et OPHLM 05) implantés parallèlement au fond de place et étagés sur le versant de la Côte du Prénet. Si la Poste est significative du service et de l’espace public, le bâtiment des Ponts et Chaussées s’avère plus fonctionnel dans un site de montagne où déneigement, salage et entretien des routes reste une préoccupation constante. Ce d’autant, que la décision d’implanter le village au pied du Morgon et sur le nouveau tracé de la nationale 94 est liée au choix du transport routier comme modèle de développement du département de montagne, le réseau de voies ferrées n’ayant pratiquement pas évoluées depuis l’entre-deux-guerres. Les projets des Ponts et Chaussées et de la Poste sont conçus ensemble, les dossiers de permis de construire sont communs. Les constructions mitoyennes forment un bâtiment en T, dont la façade principale donne à l’ouest sur la place de l‘Église, la Poste, plus au sud ; et au nord, les Ponts et Chaussées ouvrant directement sur la route nationale. Situés perpendiculairement à l’hôtel de village, ils y sont reliés par un passage couvert d’un auvent de béton porté par des pilotis évasés. Depuis la route, l’intervalle entre les Ponts et Chaussées et l’hôtel de village ouvre sur l’église et le pied du Morgon, en vue cadrée sur la chapelle d’hiver et le clocher. Inversement, depuis la place de l’église, le passage donne sur l’étagement des façades de l’immeuble, le Chabrières. L’effet est calculé.

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P.C. 4539 et 4537, du 18 02 59 A.M.

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10 M.

PLAN DU REZ-DE-CHAUSSÉE (ÉTAGE D’ACCÈS)

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ENTRÉE DES PONTS ET CHAUSSÉES

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bureau garage dépôt employés public séjour cuisine


L’ÉGLISE SAINT-FLORENT26 L’église du nouveau Savines reprend le patronyme de Saint-Florent d’Embrun. C’est l’édifice dominant du village, non seulement dans la continuité de la communauté mais aussi dans sa modernité. L’architecture la plus ambitieuse de Savines-le-Lac porte cette pérennité, et à voir le nombre de cartes postales qui la représente, c’est un plébiscite. Dès le début, la reconstruction de l’église va servir de charnière à l’espace public en ce qu’il confronte les diverses formes d’un pouvoir local. Dans les premiers plans, installant le village sur l’adret de Picoune, l’église est figurée comme un édifice traditionnel avec une nef, un transept et un chœur en abside* ; même figuration dans les projets suivants sur la rive sud du lac avec l’apparition du presbytère plus ou moins arrimé au bâtiment maître. Les plans d’église triangulaire apparaissent avec les plans de masse de 1958, d’abord avec le presbytère isolé et la chapelle d’hiver vers l’ouest. Le plan de 1961 donne la disposition actuelle avec le presbytère relié par une galerie à l’église et la chapelle d’hiver à l’est.

L’ÉGLISE EN 1970

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P.C. 5165 du 28 04 62 , A.M.

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La période est marquée par le renouveau de l’art liturgique initié par le père dominicain Marie-Alain Couturier, qui écrivait en 1950 « il vaut mieux s’adresser à des hommes de talent dans la foi qu’à des croyants sans intérêt. » Il fera intervenir Auguste Perret à Vence, Le Corbusier à Ronchamp, mais aussi Pierre Bonnard, Fernand Léger, Georges Braque, Henri Matisse ou Marc Chagall, non sans susciter de vives réactions. L’église Saint-Florent apparaît ainsi en figure majeure du village. De loin elle émerge de la masse bâtie du village, plus proche elle domine la place de l’Église, en vis-à-vis de la mairie. En fait la place devait être bordée d’immeubles, ce qui ne se réalisera pas. Au-delà de l’effet signal, c’est le plan triangulaire qui fait sa singularité. Les modèles sont peu nombreux, le plus ancien reste Notre Dame de la Merci à Planes, datée du XIIIème siècle, relevée par Viollet-le-Duc et classée dès 1840. Dans cette famille de forme, on peut trouver Sainte-Agnès à Fontaine-les-Grès (Champagne) de Michel Marot en 1954, Saint-Joseph Travailleur à Avignon par Guillaume Gillet en 1969, ou encore Saint-Paul de Mourenx, plus tardive mais aussi installée dans une ville nouvelle réalisée entre 1957 et 1961, donc contemporaine de Savines-le-Lac. Si le triangle se réfère à la trinité, l’architecture s’impose par sa volumétrie offensive. Si on a beaucoup parlé d’étrave* d’une barque pour le clocher, il faut aussi évoquer, avec l’abat-son*, la référence géologique des Demoiselles Coiffées donnant sur le lac de Serre-Ponçon. Le caractère ascensionnel de l’édifice, sa toiture, à l’origine en cuivre oxydé, s’accordait aux fonds verts du paysage. Les grands tombants de béton, les soubassements tout en rampes et en escaliers mènent à l’entrée sous un arc en paraboloïde* excentrée, construite en pierre de Montalieu. On pénètre par le nartex*, situé à la pointe nord du triangle et sous le clocher, qui donne accès au clocher et aux tribunes par un escalier à vis. Il dessert la salle du trésor qui contient le mobilier liturgique de l’ancienne église, enfin, il ouvre sur la chapelle d’hiver et la nef principale. Dans la nef, le chœur et l’autel occupent la pointe ouest du triangle, organisant les vues convergentes de l’assemblée des fidèles. Le plafond incliné est habillé de voliges* de mélèze avec trois voûtes en berceau. De chaque côté du chœur, les parois sont recoupées, à hauteur d’homme, par une bande continue de vitraux comme « deux bras de lumière » aux dires d’Achille de Panaskhet. Au-delà du chœur, se développe la galerie-cloître qui permet d’accéder aux salles paroissiales et au presbytère. À l’opposé, se trouve l’accès au baptistère, relié à l’église par un porche ouvert sur l’extérieur. C’est un retour aux origines évangéliques que de séparer le baptistère de l’église, réservée aux seuls baptisés. La forme cylindrique du baptistère, son bassin circulaire, les pâtes de verre en dégradés de bleu figurant les eaux du Jourdain, évoquent Saint JeanBaptiste et le baptême par immersion qui demeure dans la tradition orthodoxe. Ces teintes d’eaux lustrales contrastent violemment avec les ajours en dalles de verre ocre et rouge laissant transparaître une certaine violence. L’espace laisse une saisissante impression de force et de claustration.


ÉLÉVATION NORD-OUEST

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LA NEF ET L’AUTEL

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nartex nef principale autel chapelle d’hiver baptistère salle paroissiale presbytère

PLAN DU NIVEAU D’ACCÈS

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10 M.


La chapelle d’hiver, adossée à la nef, permet des offices plus intimes aux saisons froides. De forme barlongue, elle est ajourée sur deux côtés par des arcades vers la nef, et un bandeau à l’extérieur. Ces fenêtres sont aussi pourvues de vitraux colorés. Les vitraux sont en dalles de verre mis en œuvre par le maître verrier Thomas. Ils habillent par la lumière la nudité des murs. Ils sont constitués par des dalles de verre de 2 à 3 cm d’épaisseur, dans un nuancier de 900 couleurs, découpées à la scie et polies. Les joints sont en béton légèrement armé, découpant des panneaux de 80 mètres et pesant 90 kilos pièce, posés sur des barlotières* et scellés entre eux. Les cartons* des vitraux sont de la main de l’architecte, Achille de Panaskhet, réalisés à la suite d’un accident de la route en novembre 1961, qui le clouera au lit. Selon lui, le registre des motifs oscille entre « impressionnisme et abstrait »27. Ils recourent à l’imagerie populaire, avec la création du monde dans la chapelle d’hiver et le chemin de croix dans la nef auquel l’auteur rajoutera deux stations28.

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LE BAPTISTÈRE

27 28

Cahier de l’Alpes, 06 07 1965 D.L. du 15 08 1997


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CARTON DES VITRAUX DE LA CHAPELLE D’HIVER


LA ROTONDE Sur l’autre rive, la rotonde suggère l’urbanisme baroque de la Piazza del Popolo à Rome. Il s’agit ici d’une forme significative d’immeuble urbain d’angle qui permet d’articuler les façades des rues adjacentes. L’ingénieuse rotonde rachète* non seulement les directions mais aussi la pente, étageant un rez-de-chaussée dans le plan de la place et un étage pris dans la montée, reliés par un escalier extérieur. Sorte de tambour circulaire ajouré, la rotonde est conçue, à l’origine, pour un seul et même programme de commerce, un salon de thé communicant avec le premier étage par l’escalier intérieur et une corbeille centrale ajourée. L’étage donne de plain-pied avec une terrasse couverte d’une pergola, ainsi qu’une passerelle circulaire, un peu comme un navire, qui rejoint le refend de pierre ouvrant à la partie d’habitation sur la rue des Glaudins. Un escalier donnant sur la rue de la Flotte est en appui sur un mur d’échiffre* en pierre sombre. La passerelle, portée par de fins poteaux métalliques, forme un auvent qui abrite les terrasses du rez-de-chaussée. La liaison entre les niveaux se fait soit par l’intérieur, autour de la corbeille, soit par l’extérieur par la passerelle et l’escalier.

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LA ROTONDE, 1968


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ÉLÉVATION NORD

Ce schéma se retrouve dans les maisons conçues par Achille de Panaskhet qui utilise ce double dispositif de circulations intérieures et extérieures correspondant aux occupations saisonnières de l’espace architectural : déplacement interne pour la période d’hiver et déplacement externe par les balcons et terrasses pour la belle saison. Avec ces moments particuliers de saison froide où un soleil éclatant coïncide avec les pentes enneigées : l’ambiance des Alpes du Sud ! D’où ces doubles circulations des bâtiments et ces façades en partie couvertes, reliées entre elles par des escaliers.


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salon de thé séjour chambre cuisine terrasse jardin

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LA ROTONDE, ÉTAGE

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LA COMBE D’OR

10 M.


Le 15 juillet 1962, le préfet André Dubois-Chabert inaugure Savines-le-Lac. On visite la gendarmerie, l’école (alors en vacances), la mairie, on fleurit le monument aux Mobiles et la mémoire de François Pavie. Dans son discours, le préfet évoque ses quatre prédécesseurs qui ont veillé aux destinées du village, mais aussi le maire, les conseillers municipaux, les conseillers généraux, l’Electricité de France, les ingénieurs des différents ministères, et enfin l’architecte Achille de Panaskhet. Le 12 août suivant, Monseigneur Jacquot consacre l’église qu’il remet au curé Ferraro. La modernité de l’œuvre suggère à l’évêque de Gap « un combat entre la civilisation, les techniques modernes et les valeurs spirituelles »29. Quelques mois auparavant, un référendum national a entériné l’indépendance de l’Algérie ; la guerre est finie. La France semble en avoir terminé avec ses colonies, un vent d’optimisme souffle sur la société française qui a vu ses vacances allongées à trois semaines depuis 1956.

LA COMBE D’OR Au moment de son inauguration, Savines-le-Lac est un village modeste qui compte 408 habitants, finalement assez proche de ce qu’imaginait Georges Meyer-Heine. Plus encore, seuls quelques 40 anciens savinois sont du nouveau village ; beaucoup parmi eux sont des commerçants qui réinstallent leur activité, assurant échanges et services à la population. Le village est pourtant bien équipé, cette dotation étant indexée sur l’état de l’ancien village qui comptait plus de 900 âmes en 1954. Outre la mairie, la perception, le foyer rural et la salle des fêtes, on trouve les services publics : l’école, la Poste, les Ponts et Chaussées, la gare S.N.C.F.30, la gendarmerie, mais aussi 75 logements sociaux. Les logements de la Secilef, à l’est de la mairie, sous-occupés, vont accueillir temporairement quelques familles de harkis de retour d’Algérie. Néanmoins, à l’instar de Rosans, Savines-le-Lac ne comptera pas parmi ces hameaux de forestage où seront cantonnés les supplétifs de l’armée française et leur famille. L’activité est surtout représentée par les deux nouvelles usines. En effet, la Sotex a définitivement abandonné son projet d’implantation, elle délocalise sa production à Vienne ; Pétro-Carbonne reste en Ardèche. Quant aux usines Lambert et Omnitube, elles emploient quelques 150 personnes. Omnitube ne fonctionnera que quelques années, les bâtiments seront rachetés par les établissements Lambert, eux-mêmes vendus à la société Normand dès 1964.

29 Alpes Midi, Août 1962 30 Société Nationale des Chemins de Fer Français

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EXTENSION DU VILLAGE : SAINT-FÉRÉOL Le tourisme et les loisirs sont les nouvelles activités qui se déploient. Savinesle-Lac est une étape vers la haute montagne, on n’y trouve pas moins de deux restaurants et un hôtel : le Morgon, conçu par Achille de Panaskhet, situé sur la place des Commerces juste avant la montée vers la place de l’Église. On s’y arrête, mais on y reste aussi en campant autour du lac à la belle saison. Comme pour renforcer cette vocation touristique, la Commission Départementale d’Urbanisme reçoit, dès 1963, un avis favorable du préfet pour la construction d’un nouvel hôtel près de l’oratoire de Saint-Féréol, hors du secteur d’agglomération. Autour de cette implantation, un nouveau lotissement va être étudié, qui, avec ses 45 parcelles, va doubler les possibilités de construire sur le village. Achille de Panaskhet, choisi par la commune, compose un plan à partir des chemins existants et leurs détours sur l’escarpement de l’oratoire, sans bousculer les logiques du site. L’architecte définit des secteurs de plan

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de masse* et de discipline architecturale, notamment sur la rue de Louiné où il agence un ensemble de maisons de ville à la fois variées et ordonnées. Son dessin illustre la souplesse des règles d’architecture : toiture à faible pente, pierre et bardage de bois limités en surface et dominante d’enduit clair. Modifié plusieurs fois, pour permettre de nouvelles constructions, l’hôtel, lui, sera réalisé en 1968. C’est sur le tracé de la route nationale, espace circulé qui traverse le village, que vont s’implanter les activités consacrées au commerce et au tourisme. Autant la place de l’Église avec sa composition élaborée se réfère à une place de village, les projets du nouveau Savines, autant la route nationale 94, dénommée avenue de la Combe d’Or en 197431, est le lieu des flux, des déplacements. Si l’essentiel des règles urbaines visent à maintenir la perception des grands paysages autour du lac de Serre-Ponçon, il n’en reste pas moins qu’on est devant un espace public circulé qui renvoit à une architecture en bord de route, dédiée à l’automobile. Hôtels, station service, office du tourisme, contre-allée de la place des Commerces et même immeubles de ville accueillant logements et commerces sont autant d’objets architecturaux marqués par une certaine fluidité, évoquant une forme de mobilité.

VARIÉTÉ DES DISCIPLINES ARCHITECTURALES

31

C.R. 01 02 74 A.M.

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LE CHABRIÈRES32 Aligné sur l’avenue de la Combe d’Or, « le Chabrières » est un immeuble barlong* d’une urbanité complexe qui illustre bien les disciplines architecturales du P.U.D. (Plan d’Urbanisme Directeur). Avant d’être une avenue, c’est une route nationale, conçue dans le strict équilibre des déblais* et des remblais*, qui est posée sur un penchant dévalant vers le lac et offrant des vues lointaines vers les Aiguilles de Chabrières. Compte tenu des diverses pentes, l’immeuble n’émerge que de deux étages sur rez-de-chaussée sur l’avenue de la Combe d’Or pour un total de six niveaux ; quant à la ligne de ciel de la résidence, elle possède un profil très varié. En effet, l’ensemble compte trois cages d’escaliers décalées d’un demi-niveau les unes par rapport aux autres. Chaque étage distribue deux appartements, avec, pour les deux cages aval, une différence de niveaux entre les appartements d’un même palier. Cette adaptation en travées décalées restitue une forme proche d’un parcellaire de maisons de ville. D’où l’image aboutie d’une certaine complexité architecturale, renforcée par l’épannelage* d’ensemble, avec la partie centrale surélevée d’un étage par rapport aux autres cages. Ce dispositif évite l’effet de

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L’IMMEUBLE ET SES COMMERCES

32

Conf. 07 1967 A.M.


marches d’escalier, redonnant une ligne de ciel réglée mais non répétitive. Nous sommes bien devant une façon d’établir des continuités urbaines dans une certaine variété architecturale, ce que visaient les règles urbaines sous forme de disciplines architecturales. La variété se retrouve sur la façade sud du Chabrières, où la lecture des travées, d’abord brouillée par les différences de niveaux, l’est aussi par la diversité des espaces extérieurs : loggias, balcons et terrasses. Les loggias, en retrait de la façade, sont souvent divisées par des poteaux formant des lignes de rappels verticales ; elles s’augmentent parfois de balcons qui affirment de longues horizontales. Les balcons qui desservent des pièces au nu de la façade sont la plupart du temps partiellement ou totalement couverts par un auvent de béton, parfois même fermé par des jouées* latérales un peu comme des boîtes ouvertes frontalement. Sur cette volumétrie, la pierre a plutôt un rôle décoratif : une accentuation en bande verticale sur l’immeuble le plus haut, des panneaux en rez-de-chaussée qui réhaussent la matérialité des parois, des séparateurs d’emprise des commerces ou encore l’encadrement des portes des halls d’entrées. La pierre s’accompagne d’une modénature* de béton, chère à l’architecte, faite d’appuis saillants qui protègent le corps de façade et utilisés parfois comme membrures* horizontales pour lier des baies entre elles. Les surfaces commerciales occupent les pieds d’immeubles, les enseignes sont

COUPE-ÉLÉVATION OUEST

32

Conf. 07 1967 A.M.

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ici mieux intégrées qu’ailleurs. Le bâtiment reste clair, soulignant les reliefs de la façade ; la pierre elle-même est ocre clair, couleur qui contraste avec les bardages de bois habillant les combles, soulignés par les rives de toitures monopentes, dont la teinte, proche d’un cuivre oxydé reprend celle, initiale, de la couverture de l’église. Toute autre est la façade arrière, avec ses tombants pouvant atteindre six niveaux. Elle exprime toutes les répétitions possibles, empilant travées de fenêtre et rythme des balcons désignant les pièces de services par des ventelles de béton horizontales ou verticales. Le rez-de-jardin, deux niveaux sous celui de l’avenue de la Combe d’Or, est occupé par des garages, renforçant cette cadence générale de la façade. La paroi reste claire, juste animé par les persiennes de bois, et les portes de garage vertes. Les serrureries des garde-corps n’échappent à un motif croisé assemblant les montants verticaux par paires. Autre dessin pour les grilles des portes d’entrée de l’avenue de la Combe d’Or, composées à partir d’un module carré, subdivisé en losanges et centré sur un cercle. Il reste que l’immeuble, dans des conditions de dénivelé complexes, possède une qualité urbaine démonstrative de la pertinence des profils urbains et architecturaux projetés par Achille de Panaskhet sur l’avenue de la Combe d’Or. Le Chabrières reste un des témoins de cet urbanisme figuré de Savines-le-Lac, garantissant une cohérence entre conception urbaine et réalisation architecturale.

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FAÇADE SUD

SERRURIES (DÉTAIL)


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DE HAUT EN BAS : REZ +1, REZ-DE-CHAUSSÉE, REZ-DE-JARDIN

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FAÇADE NORD


L’OFFICE DU TOURISME33

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Glissé dans la pente de la Combe d’Or, à la pointe des jardins de la Fondation Pavie, l’Office du Tourisme, construit en 1965 et héritier des Syndicats d’initiative, n’oublie pas la leçon des disciplines architecturales34 intitulées Servitudes d’aspect et de hauteur le long de la RN 94. Couvert d’un grand rampant de toiture à l’inverse de l’avenue, le bardage de bois marque une horizontale que soutiennent trois piliers de pierre de Guillestre, dont un est évasé. Plus avant, comme une dunette*, couverte en appentis* et tenue par deux fins poteaux métalliques, un volume vitré désigne la vitrine de l’accueil, l’information et la promotion du tourisme. Le sol se prolonge en terrasse déchaussant de la voirie, à la manière d’une proue de navire. Toutes ces références maritimes soulignent une certaine fluidité du bâtiment, en résonance avec celle des flux automobiles de l’avenue de la Combe d’Or. L’extension, destinée à une salle d’exposition sur l’histoire de Savines-le-Lac, va doubler sa surface. Elle sera réalisée, par Achille de Panaskhet en 1995. L’architecte va jouer la continuité en prolongeant le grand rampant de toiture par son exacte symétrie, dessinant une longue aile de mouette et ne perdant rien de sa dynamique. Reprenant la teinte de couverture vert amande de la première partie, en référence à la toiture de l’église en cuivre oxydé. L’ensemble paraît directement repris du document de 1958.

33 34

Conf. 01 1966, extension P.C. du 27 04 1995 A.M. P.U.D. de Juin 1958


HÔTEL ET RESTAURANT, 1972

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LES FLOTS BLEUS35 L’hôtellerie représente pour Savines-le-Lac une des dimensions touristiques évoquées par Georges Meyer-Heine, dans sa proposition de juillet 1954, où il envisage un développement modeste avec un hôtel d’une vingtaine de chambres. En fait, l’hôtel le Morgon, aujourd’hui disparu, sera assez vite saturé, Savinesle-Lac devenant aussi une étape sur le chemin de la haute montagne. Entre le développement touristique du village et ses limites d’agglomération, la commune a toujours été plutôt à l’étroit. Après la dérogation pour la construction de l’hôtel du quartier Saint-Féréol, sur une zone non aedificandi, un nouvel épisode va se produire pour l’hôtel des Flots Bleus, qu’il faut lier au restaurant le Relais Fleuri. En effet, les établissements sont tous deux bâtis sur des terrains réservés au jardin public des Glaudins36.

35 36

P.C. 19097 du 13 04 72, A.M. P.U.D. de Juin 1958


L’hôtel des Flots Bleus et le Relais Fleuri, signés par Achille de Panaskhet, sont sensiblement à l’équerre et s’étagent dans la pente : la terrasse du restaurant correspond à l’altitude de la toiture de l’hôtel. On retrouve cette solution dans le P.U.D. de 1958; à savoir une architecture qui, pour ne pas masquer les vues sur le lac, émerge le moins possible sur le domaine public en se développant en dessous des niveaux de voirie. C’est un principe d’épannelage* descendant. Cette disposition permet à la fois de dégager des vues sur le lac et de marquer l’angle formé par l’axe du pont, l’avenue de la Combe d’Or et l’avenue du Bourg en direction du Sauze. C’est une excellente situation visible sur tous les angles, que l’on entre ou sorte du village. Le bâtiment est des plus simples : une réception accompagnée d’un logement de fonction ouvrant à l’ouest sur une terrasse, donne accès à un couloir central distribuant de part et d’autre une dizaine de chambres orientées soit à l’est sur le pont de Savines-le-Lac, soit à l’ouest sur le Barnafret et les paysages avals du lac de Serre-Ponçon. Autant sur cette face occidentale, à l’abri des bruits de circulation du pont, on trouve des loggias avec de grandes baies vitrées, prolongeant la chambre ; autant à l’opposé, les chambres orientales sont intériorisées, ouvrant une façade toute en bandeaux de fenêtres horizontales Sorte de façade-enseigne dans la perspective du pont, le pignon nord de l’hôtel décroche un volume vertical. L’ensemble est perçu à la façon d’un objet en mouvement – locomotive, autocar – complétant les fuyantes des fenêtres,

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ÉLÉVATION NORD


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chambre d’hôtel salon cuisine buanderie services garage

1 1

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PLAN DU REZ -1

FAÇADE SUR LE PONT


bandeaux parallèles au pont. On peut ranger l’hôtel des Flots Bleus parmi les architectures des années soixante liées à l’automobile : motels, restoroute, snack-bars et autres station-services. Partiellement réalisée, l’architecture des deux établissements est aujourd’hui difficilement lisible, noyée sous des panneaux publicitaires en surnombre et peu efficaces, jusqu’au rouge paradoxal des Flots Bleus, qui nuisent à la clarté de cette entrée de village au pied du Morgon.

LA STATION SERVICE37 Figurant dès l’origine sur les plans de reconstruction de Savines, notamment au Clot du Villars, la station-service est un des signes de la modernité du nouveau village, étape vers les stations de ski. Distincte du garage, sale et malodorant, on y répare moins qu’on y vend des produits divers : huile, eau déminéralisée, chaînes neige ou bois de chauffage, mais aussi cartes routières et postales, petit matériel de camping, friandises et boissons fraîches : on rend service à la clientèle qui vient faire le plein d’essence. On est en pleine

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STATION SERVICE, FAÇADE OUEST


campagne de démocratisation du supercarburant avec un tigre à mettre dans son moteur... Architecture de série, dédiée à l’automobile, elle passera quand même par le crayon d’Achille de Panaskhet. Le programme est simple : une aire pour la distribution de carburant, réglée par les rayons des pistes d’entrée et de sortie de route, un pavillon qui comprend l’atelier toujours propre, une surface de vente et sa caisse ainsi que le logement du gérant. Le pavillon est posé par le travers, pour être perçu frontalement dès que les pompes apparaissent. La surface commerciale est très largement vitrée, les deux seuls points d’appuis sont traités en pilier de pierre gris jaune de la Rochela-Rame posée en opus romain*. Latéralement, cette même pierre forme le mur d’échiffre* de l’escalier qui mène au logement à l’étage. On y accède par une longue loggia, couverte d’un auvent et fermée au nord par une jouée* en béton, formant une séparation avec l’atelier. Le motif du garde-corps de serrurerie est, ici, le même qu’aux Chabrières. À partir de ces éléments, l’architecte a utilisé les profils de toitures à versants décalés pour donner une silhouette particulière au pavillon. Il utilise la façadepignon en bâtière* pour s’affranchir des toitures et découper un fronton oblique et dissymétrique, qui donne une peu d’ampleur à l’édifice transformé de la sorte en signal de bord de route.

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Conf. 21 09 68 A.M.


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CARTE POSTALE, 1969


4 DU TOURISME AUX LOISIRS

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96 CAMPING DES EYGOIRES, 1973

FAÇADE OUEST


DU TOURISME AUX LOISIRS A l’ouest de la route nationale, sur la route du Sauze, la vocation touristique est imaginée dès les premiers projets du nouveau Savines. Retenue d’eau, grand hôtel, autant de programmes qui ne verront pas le jour. Les loisirs vont prendre la relève du tourisme. Démocratisé avec les congés payés de 1936, c’est à un camping de masse auquel on a affaire durant les Trente Glorieuses. Vacances économiques, sport, le pari du tourisme de loisir et de plein air est une réussite, jeune et populaire, au moment où les congés payés s’allongent, et où perdure l’utopie de la Résistance de faire tomber les barrières sociales. Avec ce tourisme de loisir et ces hôtelleries de plein air, Savines-le-Lac va s’étendre à l’ouest en bordure de lac, en quartiers saisonniers, mobiles et temporaires, sans liaison les uns avec les autres : un urbanisme insulaire, discontinu, un urbanisme d’archipels et de zonage* à l’inverse du projet d’Achille de Panaskhet qui exprime une organisation urbaine aux espaces figurés. Les cartes postales, en couleur, rendent compte de la marée bleue des tentes Trigano qui envahissent un nouveau quartier, des Chaumettes au Pré d’Emeraude.

L’AUBERGE DE JEUNESSE38 L’ancien village possédait une Auberge de jeunesse, sans doute le dernier bâtiment détruit ; elle est reconstruite à partir de 1964. Son implantation apparaît dès 1955 sur les plans de Achille de Panaskhet, d’abord sur l’emplacement actuel de la maison de retraite, puis sur le P.U.D. où elle figure à l’ouest du Barnafret, aménagé en plan d’eau permanent grâce à la digue de la route départementale 954. Le plan d’eau permanent est une solution au problème du marnage* lors des basses eaux du lac. Il ne sera pas réalisé, mais cette présence précoce du programme de l’Auberge de jeunesse montre l’intérêt pour le tourisme social, une des vocations du nouveau Savines, envisagée par Georges Meyer-Heine. L’âge d’or des Auberges de jeunesse, en France, est lié à l’action de Léo Lagrange, en 1936, proposant aux Ajiste de s’instruire, s’entraîner et se distraire tout en voyageant. Après guerre, le mouvement Ajiste, unifié, se définira comme un tourisme éducatif des jeunes. C’est l’architecte des Auberges de jeunesse, Roland Schweitzer, qui va réaliser le projet. Bien que le projet lui échappe, les règles que Achille de Panaskhet a établies vont être mises à l’épreuve d’une autre écriture architecturale.

38

Conf. 1966, 72, 75 A.M

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La construction de l’Auberge de jeunesse se réalise par tranches successives jusqu’en 1975 : le pavillon d’accueil d’abord, puis la salle de cours, le logement du directeur et enfin la voilerie. On retrouve sur le bâtiment d’accueil les principes de l’architecture du nouveau Savines, avec des toitures à faible pente, de la pierre, des menuiseries en bois et un enduit clair mais selon une autre distribution. La pierre, sous forme de blocs irréguliers, gris sombre, en appareil cyclopéen*, se trouve condensée en grands plans sur les pignons nord-ouest. L’enduit, blanc, affirme les volumes sur les trois autres faces. Les menuiseries de bois sombre forment les divisions asymétriques des pans de verre ainsi que les débords de charpente. Seul le grand balcon-tiroir est un élément nouveau. Orienté au nord, c’est une sorte de belvédère sur le lac. On retrouve ici la tension, générale sur le site de Savinesle-Lac, entre la recherche du soleil et les vues lointaines sur le paysage à son exact opposé. Au sud, une annexe servant d’office aux campeurs, limitée sur trois côtés par un mur de pierres et couverte d’une toiture monopente, est séparée du pavillon d’accueil par une courte ruelle. Plus au sud et adossé à la forêt, un long bâtiment abrite des salles de cours de navigation ; il est couvert d’une toiture à simple versant dont le débord, soutenu

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hall d’entrée et salle commune bureau P.A. logement P.A. salle de réunion office cuisine chambre

ÉTAGE

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5 M.


par des solives en bois, forme une galerie. Une suite de fenêtres horizontales s’inscrit entre les poutres. Les salles sont fermées par des panneaux coulissants clairs, l’ensemble est limité par des murs-pignons en pierre sombre. Enfin, plus à l’est, vers le ruisseau Barnafret, la maison du directeur de l’auberge, aux façades plus simplement enduites, reprend la figure du balcon-tiroir du pavillon d’accueil. Seule la cheminée est revêtue de pierres, la toiture est en terrasses. Le camping, en terrasses sous les arbres, est situé entre les trois constructions. Au bord du lac, est installée une voilerie. On retrouve le mur de pierre sur trois côtés couverts d’une toiture-terrasse, marquée d’un large bandeau de béton blanc. Face au lac, une longue paroi presque entièrement vitrée est divisée de menuiseries asymétriques en bois sombre, les allèges sont en verre armé. Seule une large porte en lames de bois à deux battants ouvre sur le hangar à dériveurs. L’architecture de l’Auberge de jeunesse montre ainsi que les règles architecturales pouvaient accepter des variations. La réussite de la réalisation de Roland Schweitzer joue sur une certaine dissociation des matériaux : lignes de bois sombre, plan de pierre et volumes d’enduit blanc.

SALLES DE FORMATION

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LE C.C.A.S.39 DE L’E.D.F.40 Construit aux Eygoires durant neuf ans jusqu’en 1975, le centre de vacances comporte un ensemble de services regroupés dans un bâtiment situé au-dessus de la route et ouvert sur le lac. Il reprend les principes établis par Achille de Panaskhet (toiture plate, soubassement de pierre, bardage de bois) mais dans une écriture architecturale largement différente. Les auteurs Paul Faye et Michel Tournaire sont des acteurs de la modernité française d’après-guerre, sensibles à la dimension du paysage dans leurs projets. Ils ont d’ailleurs publié un ouvrage doloriste sur ce thème qui a connu un certain succès41. Leur référence reste Frank

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Lloyd Wright, qui reconsidère le lien de l’architecture à la nature par rapport au modèle européen ; alliance nouvelle de la nature américaine impliquant une certaine échelle, un certain ensauvagement que porte la montagne. Ici, c’est l’œuvre de Taliesin42, où le maître Frank Lloyd Wright enseignait son art, qui sert de modèle aux architectes. La dominante est horizontale, les constructions sont solidement engravées* dans la pente par des soubassements évasés en béton gris. Des plaques de schiste presque argentées sont incluses dans le béton. Au-dessus, les bandes de fenêtres continues sont couvertes d’acrotères déversés* qu’habillent des clins* de bois horizontaux. Etagées dans la pente, de larges terrasses sont en partie couvertes par des vaisseaux de bois en porte-àfaux, en appui sur de longues poutres moisées qu’épaulent de courtes colonnes trapézoïdales en béton. Cet ensemble, qui se réfère au brutalisme japonais de l’époque, précède une série de bungalows installés en bandes dans la déclivité.

CAMPING MUNICIPAL ET MISE À L’EAU Le camping va se développer à Savines-le-Lac. En 1959, un décret réglemente ce tourisme populaire et économique en limitant le camping sauvage, les terrains de camping ne pouvant pas répondre à une demande croissante. Les cartes postales du milieu des années soixante montrent cette marée bleue des tentes familiales. La commune ouvrira son terrain, mais rapidement saturé, il sera déplacé à l’ouest vers le Champ de Restel. On retrouve quelques éléments déjà expérimentés par Achille de Panaskhet : des blocs sanitaires qui reprennent ceux de Rochazal, au sud de Gap, et un autre directement repris du site de la M.G.E.T.43 centre de vacances situé à Chorges de l’autre côté du lac. Un dernier bâtiment est réalisé ici : la mise à l’eau pour l’école de voile créée par des Savinois, qui servira aux enfants du département. L’édifice est couvert par quatre pannes en lamellé collé, dessinant une longue toiture à chéneau central en aile de mouette reposant au centre sur un pan de façade et aux extrémités par de fins poteaux métalliques. L’ensemble ne manque pas d’ampleur.


C.C.A.S. PAVILLON D’ACCUEIL, DÉTAIL

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HANGAR À DÉRIVEURS ET ACCUEIL

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Caisse centrale des activités sociales du personnel des industries électriques et gazières. 40 P.C. 19152, 17 995, 18345 A.M.

41 42 43

Site et sitologie, comment construire sans casser le paysage, J.J.Pauvert, 1974 Construit en 1937 Mutuelle Générale de l’Equipement


QUARTIERS OUEST, LES CONSTRUCTIONS D’ACHILLE DE PANASKHET

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250M

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LES CONSTRUCTIONS D’ACHILLE DE PANASKHET, QUARTIERS OUEST Maison P. Maison A. Villa Jour Résidence de l’Emeraude Camping Les Eygoires Mise à l’eau

5 LES VERGERS

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LE PRÉ D’ÉMERAUDE L’essor du tourisme et l’étroitesse des limites d’agglomération, amène la mairie à envisager un développement du village vers l’ouest en rive du lac au pied de la forêt du Morgon près des torrents des Vernes et du Biaret. C’est ainsi que sur le lieu-dit du Grand Pré, est projeté le lotissement du Pré d’Émeraude, tourné vers des programmes de villégiature dont les maisons ne sont occupées qu’une partie de l’année. Dans ces conditions peu urbaines, Achille de Panaskhet imagine un semis de maisons dans un écrin végétal, sans clôture, et espacées d’au moins 20 mètres les unes des autres. C’est bien sûr le modèle des maisons

de la prairie44 de Frank Lloyd Wright qui préside à ce plan. La distribution allie une avenue plantée – qui attend toujours ses arbres – orientée au nord-ouest, vers les Aiguilles de Chabrières, autour de laquelle s’enroule un réseau de voies en arabesque. L’architecture de villégiature préconisée par l’architecte dans le règlement de 1967 est définie par des volumes limités en hauteur et couverts de toitures plates avec des auvents sur des terrasses. L’ensemble accuse les horizontales, laissant passer des vues au-dessus des maisons en aval. Les bardages de bois sont limités, la pierre ne l’est pas, les enduits doivent être très

MAISON P.

44

Oak Park, Illinois, 1889-1910

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clairs. Comme dans le village aggloméré, il y a des secteurs de plan de masse*, qui devaient assurer à Achille de Panaskhet la maîtrise d’œuvre des immeubles collectifs. Néanmoins, le Pré d’Émeraude, malgré quelques maisons signées de l’auteur, verra se développer le goût pour l’exotisme Far-West. Resteront les maisons, étagées et noyées dans la verdure. L’architecte n’est plus, alors, l’arbitre du projet, il sera remplacé par les représentants de l’État.

LE LAC COMME PAYSAGE En janvier 1966, la chapelle de la baie Saint-Michel à Prunières qui a été sauvée des eaux, avec son îlot, par sa seule altitude, est classée au titre des sites ainsi que ces curiosités géologiques que sont les Demoiselles coiffées du Sauze. Malgré le caractère conservatoire, qui vise à protéger des éléments géologiques naturels autant qu’une construction réchappée de la modernisation du pays, c’est le premier signe d’une révision des représentations du site. Trois ans plus tard, c’est l’ensemble du lac artificiel qui est inscrit au titre des « sites naturels marqués par l’empreinte de l’homme »45. La perception du lac a

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PRÉ D’ÉMERAUDE, L’AXE DES CHABRIÈRES

45

Anthropocène


évolué, il n’est plus seulement ce bouleversement des vallées pour des raisons économiques, lié à la destruction de villages et à la disparition d’une certaine culture et mémoire locale. Le lac est reconnu dans sa dimension paysagère, issu de cette mutation du site par les moyens de la technique, transformations à l’échelle de montagnes. Avec l’inscription du site du lac de Serre-Ponçon, la Commission départementale des sites modifiera les règles du lotissement du Pré d’Émeraude, l’architecte des bâtiments de France formule de nouvelles prescriptions en 1974. Ainsi, la protection elle-même se fera selon les doctrines revivalistes des paysages français, pour qui respecter le paysage c’est respecter l’architecture locale, plutôt artisanale et agropastorale46. Au bord de l’eau, les maisons sont claires et les toits plats, énonçait Achille de Panaskhet à propos de ce projet. Sa réalisation se heurtera aux certitudes du moment. Celles-ci s’appuient sur le paysage dont la déférence est liée au respect de l’architecture traditionnelle et locale, censée être adaptée au milieu dans une sorte de darwinisme architectural. Ce revirement anti-moderne ouvrira à une suite de malentendus dont le village ne profitera pas. Pour le Pré d’Émeraude, les clôtures sont autorisées pour chaque parcelle. Les acrotères des auvents doivent être habillées de clins de bois, les gardes corps traités avec des planches horizontales, le bois doit être de teinte foncé. Enfin, les enduits sont réalisés avec des finitions grattées et de couleur gris beige, qui finiront par

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LA CHAPELLE SAINT-MICHEL

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Gaston Roupnel, Histoire de la campagne française, 1932


s’appliquer dans tout le département. Une nouvelle norme s’installe, au dépend de l’architecture initiale du village, le P.O.S.47 de 1981 la décrit à travers des toitures à deux versants entre 70 et 100%, des lucarnes paysannes, des souches de cheminées au faîtage, des fenêtres plus hautes que larges. Un nouveau modèle de ferme haut-alpine est imaginée pour faire front aux erreurs (horreurs) modernes. Savines-le-Lac vole de ses propres ailes, Achille de Panaskhet n’en est plus l’auteur principal. L’intérêt des édiles pour l’histoire récente du village, sa reconstruction, émergera à la fin de la première décennie du XXIème siècle, l’architecte n’étant plus là pour expliquer, c’est ce que nous avons voulu faire ici.

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En 1977 j’avais rencontré, à Marseille, Marie FrançoisBénard, alors conseiller régional. Conseiller général, il avait fait partie de la mission de mars 1956 pour la reconstruction de Savines, auprès du président du Conseil. Marie FrançoisBénard a été durant presque trente ans maire de Vars où Le Corbusier avait en 1937 élaboré un projet de station d’hiver et d’été. Il avait demandé au grand architecte comment il voyait l’avenir du lac de Serre-Ponçon. Celui-ci lui aurait répondu par un dessin en couleur avec un soleil jaune en forme de roue, l’eau en lignes ondées bleues, l’énergie par une autre roue, et les hommes plongeants dans les flots48. Au thème du tourisme que préconisait Georges MeyerHeine, tout dans l’optimisme des Jours heureux 49 qui assignait aux architectes la mission de construire le cadre nécessaire au bonheur de l’homme, s’est substitué, à Savines-Le-Lac, celui du loisir et de la culture des corps, naturalisant l’architecture elle-même. « Quelques fois je vois au ciel des plages sans fin couvertes de nations en joie » – une saison en enfer50 !

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Plan d’Occupation des Sols, article 11, Zones UA, UB, UD. Si ce dessin existe, il serait bien de le retrouver ! Titre du programme du Conseil National de la Résistance du 15 Mars 1944 Arthur Rimbaud 1873.


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CARTE POSTALE, 1968


5 L’A RCHITECTURE D’ACHILLE DE PANASKHET

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PAVILLON DU BOIS, HENRI JACQUES LE MÊME, 1937


« Le style de Panaskhet, ce sont des bandeaux très saillants et minces, des toitures presques plates, monopentes, de la pierre de Guillestre, de Montdauphin, rose, gris bleu et beige sur les poteaux et les soubassements, des baies et poteaux obliques, un étagement, et des bardages de bois51. » On cherche ici moins un style que les traits récurrents de l’architecture d’Achille de Panaskhet, cette manière d’être hors du pittoresque, mais dans la fabrique d’un sens commun de l’architecture qui ne se départit pas d’une certaine rationalité.

LA VIE MODERNE, LE BEAU ET L’UTILE Achille de Panaskhet a dix huit ans, il est admis à l’École des Beaux-Arts en 1937, année de l’Exposition universelle qu’il a nécessairement vu. L’exposition a pour titre l’Art et la technique dans la vie moderne, c’est un succès public, c’est là que s’expose l’actualité des modernités architecturales. À travers les pavillons nationaux transparaissent les tensions politiques et architecturales entre les nations : avant-garde pour l’Espagne républicaine, néoclassiques pour les plus conservateurs. Sans doute a-t-il vu les pavillons des arts décoratifs comme celui du Métal et les fers forgés de Raymond Subes dont il se souviendra pour la maison de l’Agriculture à Gap. Le Pavillon du bois de Henri Jacques Le Même, avec ses pilotis évasés et dont la façade décline les variations d’assemblages décoratifs de plusieurs essences de bois. Bien sûr, il y a aussi le Trocadéro et les bassins de Roger-Henri Expert, son futur patron d’atelier, d’une modernité éloignée de l’avant garde ; plus proche d’Auguste Perret que de Le Corbusier. Enfin, le jeune élève architecte aura vu les pavillons des provinces françaises, où se fabrique le style régional dont le Pavillon de la Haute Savoie d’Henri Jacques Le Même, image romantisée de l’architecture de montagne.

UN URBANISME FIGURÉ L’Institut d’Urbanisme est créé en France en 1911, cette première institution va chercher une base scientifique à l’urbanisme entre recettes et doctrine. L’enseignement de l’École des beaux-arts ne sera que peu influencé par ces approches, néanmoins, la lecture de Camillo Sitte, de Raymon Unwin, et même l’actualité d’Henri Prost était chose courante entre les deux guerres. Par contre en 1937, il n’est guère possible qu’Achille de Panaskhet n’ait pas eu connaissance de la publication d’Une Cité moderne de Robert Mallet Stevens. Ce manifeste, qui fournit des modèles, est une sorte d’utopie péri-urbaine, faite de pavillons disséminés qui ont chacun un caractère lié à une destination et sont inspirés du palais Stoclet52 de Joseph Hoffmann. C’est une modernité rationnelle et tempérée.

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Entretien avec Raymond Sylve Bruxelles, 1905.

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On retrouve cette approche dans l’élaboration des divers plans du nouveau Savines, sorte de village idéal avec sa place publique, son église, sa mairie, sa gendarmerie, son école et sa station-service. C’est une approche de la ville considérée à partir de points de vue, privilégiant l’esthétique de l’observation à celle des compositions axiales. La ville pensée comme phénomène architectural à partir de formes concrètes, référencées. Tout cela est représenté d’une manière plus proche d’un projet que d’un zonage*, dédiant les terrains à une seule fonction urbaine. On le constate dans les trois plans d’aménagement conçus entre 1955 et 1957, mais aussi dans les divers plans, élévations et coupes des disciplines architecturales où figurent les intentions précises de l’architecte. En ce sens, le dessin des servitudes des lots 16 à 21 du lotissement Saint-Féréol montre une diversité architecturale exceptionnelle pour une époque où la répétition est de mise. Ici, le plan figure tous les possibles pour les pavillons en bande. Sa pratique de l’urbanisme figuré revient à une architecture comme territoire expérimental de l’espace urbain.

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PLAN DE MASSE FIGURANT LE PROJET DU VILLAGE

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T.P.B.M. n° 345, 2001 Jean François Lyon-Caen, Les villages reconstruits dans les Alpes, Alpes Loisir , D.L.


L’ARCHITECTURE DE MONTAGNE On retrouve Henri Jacques Le Même installé à Megève, où il construit, dans les années vingt, d’élégants chalets de villégiature dont celui de Noémie de Rothschild, confortable et symétrique. Achille de Panaskhet, qui entretiendra des relations amicales avec l’architecte savoyard en charge de plusieurs lycées dans le département, n’oubliera pas cette bonne forme pour une des premières fermes reconstruites à Cervières. Cervières est une étape dans l’œuvre d’Achille de Panaskhet, celle du régionalisme. En effet, les fermes du village martyr ne ressemblent pas aux fustes* locales ni dans leur implantation (pour éviter des contagions incendiaires), ni dans leur distribution intérieure hygiénique et fonctionnelle. Quant à l’écriture architecturale : « je ne voulais pas construire comme les anciens »53  ; et on ne retrouve guère la ferme alpine dans les profils de murs rampants blancs, de clins de bois* traité au carbonyle et laissant la découpe des grumes*. Si le chalet Rothschild procède du régionalisme, les fermes de Cervières résultent de l’actualisation des formes et des fonctions de la ferme de montagne. « Ce n’est ni une réhabilitation ni une reconstruction à l’identique du style. Au contraire il existait une volonté d’introduire la modernité »54. Plus proche, c’est à Vars, près du Serre-Meyran, que Le Corbusier va projeter une station d’hiver et d’été en 1937. Organisée autour d’une unité résidentielle et commerciale, les pentes sont occupées par des maisons particulières en semis régulier et orientées toutes de la même manière pour bénéficier du meilleur ensoleillement. Il n’est pas certain que notre architecte ait eu connaissance du projet, cependant, le maire de Vars, le légendaire Marie François-Bénard, avait sollicité l’avis de Le Corbusier sur l’avenir de Serre-Ponçon. Les divers plans de masse de Savines reprendront cette forme de dissémination des pavillons tous orientés nord-est, sud-ouest en fonction de l’ensoleillement et des vues sur le lac.

CHALET À MEGÈVE

FERME À CERVIÈRES 1952

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UN VILLAGE D’ARCHITECTES La première remarque que l’on peut faire sur la construction de Savines-leLac est qu’il s’agit d’un village majoritairement réalisé par des architectes. Alors qu’aujourd’hui en France, 70% des constructions se passent d’architecte, c’est l’inverse ici. Avant 1975, Achille de Panaskhet est le patron, donnant avis sur les permis de construite interdisant les modèles Logéco* et les immeubles types. Plus de 60% des constructions seront signées par une quinzaine architectes, lui-même en réalisera une bonne partie, ce qui est assez exceptionnel pour cette période. Il est intéressant de noter que pour les programmes d’importance réalisés par des confrères (comme l’Auberge de Jeunesse ou le C.C.A.S. d’E.D.F.), les interprétations des règles architecturales ne poseront pas de problème aux auteurs ni à l’harmonie du village. Les solutions diffèrent mais sans contradictions. L’exemple de Saint-Féréol et ses disciplines architecturales figurées montrent que de Panaskhet était ouvert à de larges variations architecturales.

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OUVRAGES EN BÉTON : PORTE-À-FAUX


TECHNIQUE ET ESTHÉTIQUE DU BÉTON D’après un collaborateur55 d’Achille de Panaskhet, dans le trio d’architectes, Paul Languin était l’expert du béton armé, il en faisait les calculs de prédimensionnement. Le béton est alors peu utilisé dans le département, sinon pour les ouvrages d’arts et les fondations. C’est une entreprise de Grenoble, Berger-Perrin qui va construire l’église Saint-Florent. Nos architectes vont utiliser le béton pour les ouvrages saillants. Le porte-à-faux reste une référence directe de l’écriture moderne, c’est la base du cinquième point de l’architecture moderne de Le Corbusier56. Bien sûr, il y a le clocher de Saint-Florent, l’auvent en coque de l’école, mais aussi d’autres dispositifs. Les balcons des immeubles H.L.M. du Forest sont comme extrudés*, ils dépassent le pignon à la manière d’un aileron de passerelle de navire qui va au-delà des bordés. La loggia de la mairie, oblique, excède la façade, elle est maintenue par une jouée* et suspend un panneau de béton qui porte les emblèmes de la cité : les armes et la hampe du drapeau. Le balcon sud de la gendarmerie, lui aussi, avance au-delà de la façade et porte une jouée*. Tous ces exemples empruntent aux formes marines : plongeoirs, navires, pour leur fluidité, leur dynamique moderne, on en retrouve l’expression sur la maison S., la maison J., avec d’autres intensités. Il faut souligner la qualité d’exécution des bétons ; lames minces, qui, par leur finesse, fait d’un plancher un bandeau, d’un appui fait une membrure. Cinquante ans plus tard, on peut observer le bon état des ouvrages, chose que l’on ne vérifie pas sur les bétons de l’Auberge de jeunesse par exemple.

DE LA PIERRE Les Alpes sont naturellement riches en pierre d’œuvre, des marbres roses de Guillestre ou de Mont Dauphin, aux gris jaunes la Roche-de-Rame, des galets du Guil, des blocs de la Durance, aux pierres sombres de l’Ubaye ou du Champsaur. Les règles d’architecture des lotissements en limitent la surface à 25% de la façade, l’appareillage est en opus romain*. La pierre est utilisée en parement souvent en bossage*, plinthes et soubassements, voire à des fins décoratives pour des cadres de baie, avec des formes rampantes comme pour la porte de l’école ou celle des Ponts et Chaussées. Elle est aussi présente sur les éléments de structure comme des poteaux inversés, des pilastres ou des chaînages d’angle ; parfois associée par contraste avec de fines membrures horizontales saillantes en béton clair. Souvent les joints sont peints en fonction de la couleur de la pierre. Pour l’Auberge de jeunesse, Roland Schweitzer utilise de la pierre grise à la pierre rousse des galets de Durance en opus incertum*. Ici, la pierre de pare-

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Entretien avec J.P.Challier Cinq points d’une nouvelle architecture, 1927

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ment est condensée sur des pans de murs entiers, marquant des plans. Paul Faye et Michel Tournayre recourent, eux, aux gris verts ou roux satinés des basaltes d’Abriès, pour le C.C.A.S. Là, sur le fruit des murs*, les pierres sont à fleur de béton maigre, très proche de ce que Frank Lloyd Wright appelait béton du désert au sujet de Taliesin ouest. La pierre n’est donc pas un déterminant absolu de l’architecture mais une manière de distribuer des matières locales sur les façades. Les règlements d’après 1974, puis le P.O.S. chercheront un rendu d’enduit rustique à pierre vue* plutôt que des pierres d’appareil.

DES TOITURES Les règles écrites des lotissements passeront des pentes à 25% pour SaintFéréol à 10% pour le Pré d’Emeraude. En déclarant «  je déteste le folklore »57, de Panaskhet rompt avec les standards provençaux autant qu’avec le chalet de montagne. Pour le reste, il utilisera les formes de toitures avec beaucoup de liberté. La majeure partie des toitures est à un seul versant, comme un appentis. Le monopente reste une expression propre à la Reconstruction, et à la montagne dit-on. Ainsi, sont couverts les H.L.M. de Savines-le-Lac, d’Embrun (boulevard Pasteur) ou de Gap (Forest d’Entraï) mais aussi dans

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RAMPANTS CONTRARIÉS


certaines maisons unifamiliales (maison S.). Il recourt aussi aux doubles versants dissymétriques, avec le faîtage décalé, une disposition propre à la haute montagne (maison A.). La disposition à chéneau central, en aile de mouette, donne une image plus fluide, moderne (l’Office du Tourisme, après l’agrandissement, la maison N. ou la mise à l’eau du camping des Eygoires). Assez fréquente est l’association de deux rampants contrariés, comme deux appentis à l’équerre avec un monopente en pignon allié à un autre en long pan. Cette disposition des toitures permet de créer des césures, comme deux constructions accolées, donnant une rythmique de façade (maison M., La Quinta, les maisons Normand, Rochazal, camping municipal). Enfin, les toitures en bâtière* qui rendent la figure de la façade totalement indépendante de celle de la toiture somme la station-service, la maison C., la maison P. à Baratier ou la maison A. à Embrun. En dernier lieu, les toitures terrasse, concentrées sur le Pré d’Émeraude. « Au bord de l’eau, les toitures sont plates » semble avoir été une règle tacite dans l’agence de Gap, selon un de ses collaborateurs58. La toiture de Saint-Florent était en cuivre, oxydé il deviendra vert. Dans le quartier du Bourg, les toits verts dominaient. Pour l’extension de l’Office du Tourisme, l’architecte parle de vert amande. La couverture de l’église sera reprise en 1981 et remplacée par un bac acier gris.

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PIGNONS EN BÂTIÈRE

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Entretien avec Madeleine Fauchâtre 2001 Entretien avec J.P. Challier

TOITURE À CHÉNEAU CENTRAL


DU BOIS

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C’est un des paradigmes de l’architecture de montagne, le chalet aux murs blancs et toit de bardeaux… Le bois dessine les fermetures de toits, les combles, les tympans*, avec de faibles pentes, tout cela compte presque comme des bandeaux. A l’inverse des fermes de Cervières où le bois et les maçonneries blanches se partagent l’espace des façades, ici, l’utilisation du bois est limitée à 30% des surfaces de façades pour Saint-Féréol et à 15% pour le Pré d’Emeraude. Le bardage devient un élément actif de la façade. A l’image du pavillon de Henri Jacques Le Même, il prend, par de simples jeux d’assemblage, des allures variées comme des parquets sans que cela devienne un décor de lambrequin. Il s’agir d’un simple planchéiage droit marquant une horizontale comme pour l’Office du Tourisme, le Chabrières, ou la rotonde, dont les photos d’origine montrent que le bois était clair. Les orifices de ventilation des combles donnent une cadence au couronnement de la construction. Pour le centre de traitement médical de Montjoie à Briançon, le bardage est redivisé en damiers où alternent lames horizontales et verticales. L’assemblage le plus fréquent est le chevron où chaque lame d’un module est posée à l’oblique, coupée en bout et reprise par sa symétrique sur le module suivant. C’est une pose en chevron comme pour le point de Hongrie. C’est le cas de la maison C. sur l’avenue de la Combe d’Or, de la Quinta ou des studios Carvois, mais aussi des logements sociaux de la Secilef, avenue Pasteur à Embrun. C’était surtout le cas pour l’hôtel de village et la poste qui donnaient une homogénéité à cet espace public. Aujourd’hui, ces bardages ont été remplacés par des bacs aciers posés verticalement.

FERMETURES DE COMBLES, PORTES ET PERSIENNES


LA FERRONNERIE MODERNE Grilles et garde-corps ont, dans l’architecture d’Achille de Panaskhet, une importance particulière. Ils sont une forme de signature par l’attention portée à ce type d’ouvrage qui était largement normé à l’époque. Les variations sont importantes, un peu comme les divers points en couture. L’exemple le plus frappant est la Maison de l’Agriculture à Gap où grilles, portails et défenses s’inspirent des modèles de Raymond Subes. Bien sûr tout est plus simple, mais tout y est : fers plats, barreaux ondés, cercles chaînés à des barreaux horizontaux, roues à rayons, serpentins. Surtout, cette grille d’entrée qui prend une dimension monumentale. On retrouve des formes élaborées sur les garde-corps de la mairie, traités en fer plat avec des motifs qui peuvent s’apparenter au point de chausson en couture. Les grilles les plus simples allient traverses et montants liés par des frettes redoublées de losanges. Les plus complexes forment un canevas losangé, avec des cercles liés par des plats horizontaux et des petits éléments qui dessinent des cristaux de neige. Il n’est pas de projet qui n’ait quelque finesse de serrurerie.

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GRILLES ET GARDE-CORPS


MATÉRIAUX ET COMPOSITION On ne trouvera pas dans l’architecture d’Achille de Panaskhet les agencements dépouillés du Style international, mais pas non plus de revivalisme. Ici on a affaire à des maisons et non des machines à habiter. Proche d’une poétique de l’espace qu’accompagne une certaine importance accordée aux masses, un certain amour des maçonneries marquant aussi une forme de réalisme. La pierre de parement ancre les constructions, les assoie ; elle dessine des accents structurels et parfois décoratifs. Le bois, clair à l’origine, étaye les lignes de ciel, sans jamais verser dans le chalet suisse ; enfin, les ferronneries signent un art décoratif singulier. Tout cela matérialise un enracinement dans ce paysage de haute valeur esthétique et spirituelle qu’est la montagne, à l’image du désert pour les architectes américains. On peut aussi penser, dans le territoire ultramontain, à Carlo Mollino, lorsqu’il construit la casa Cattaneo, ou le capanna Lago Nero, où pierre, bois et béton font bon ménage.

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PIERRES DE GUILLESTRE, MONT DAUPHIN ET ROCHE DE RAME

LA CASA CATTANEO, PAR CARLO MOLLINO


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ARTCHIL, DATH ET ELLICO, 1924, PARIS

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ATELIER DES BEAUX-ARTS

1941, EL ADJEB


REPÈRES BIOGRAPHIQUES ARTCHIL TSITSICHVILI PANASKHETELI est né le 17 juillet 1916 à Borjomi, station thermale à l’est de Tiblissi. La Géorgie, alors sous domination de l’empire russe, retrouve son indépendance en 1918. Elle devient une république, dirigée par un gouvernement social démocrate, reconnu des nations, y compris le gouvernement bolchévique de Moscou avec lequel elle signe un traité de paix en 1920. L’année suivante, l’armée rouge envahit la Géorgie. Son père, Simon, est alors géologue à Marseille et travaille pour une compagnie pétrolière. Sa mère, Marie Kantcheli, quitte Tiblissi en 1921, pour Constantinople et rejoint son mari et la communauté géorgienne à Paris avec ses trois enfants : Ellico, la sœur ainée, Artchil, et son frère Dath. Rapidement Artchil apprend le français dont « la sonorité m’était familière, puisqu’à Tiblissi, j’avais une gouvernante française, Amélie »59. Elève au lycée Saint-Louis, il obtient son baccalauréat en 1935 et prépare son entrée à l’École des Beaux-Arts dans la section architecture, au titre d’élève étranger. 60 Entré dans l’atelier Patouillard, il présente le concours d’admission qu’il réussit en février 1937, avec comme sujet la façade d’une église, il sera le seul étranger de sa promotion. Il est admis en deuxième classe en juillet 1937 et travaille alors chez l’architecte Jacques Carré. La guerre est déclarée en août 1939. Engagé volontaire, il est rattaché à Laval dans un régiment d’infanterie puis intègre l’école d’officier à Saint Cyr. Démobilisé en 1940, il rejoint la Légion étrangère au Maroc, puis en Algérie. Avec le débarquement des Alliés en Afrique du Nord en 1942, son régiment est dissout. Il revient en France et reprend, muni d’une dispense, ses études d’architecte en octobre. En souvenir de la Première guerre mondiale, l’École des Beaux-Arts gardera une haute considération pour les élèves engagés ou prisonniers. Il est inscrit en classe de première et poursuit sa scolarité sous forme de concours (Bourgeois et Godebœuf ; Rougevin, Delaon, Laloux), se confrontant à des sujets divers tels qu’une Cour de Cassation, une bibliothèque, un hôtel, une école ou un théâtre. En 1943, il se marie avec Nathéla Jordania, fille de l’ancien président du gouvernement géorgien avant l’annexion par l’Union Soviétique. Au printemps 1944, il retrouve le Régiment de marche de la Légion étrangère au Maroc puis en Algérie, avec lequel il fera entre novembre 1944 et mai 1945 la campagne d’Europe en Alsace, en Allemagne et en Autriche, au cours de laquelle il sera blessé. Au grade de lieutenant, il est décoré de la croix de guerre 1939 - 1945, et obtient la nationalité française.61 Sa fille ainée, Marie Hélène, naît en mai 1944. Irène, elle, voit le jour en décembre 1945. Il termine alors ses études dans l’atelier de Roger-Henri Expert, par un diplôme dont le jury est présidé par Auguste Perret, le sujet en est : La maison d’un grand couturier à la Muette. Diplôme qu’il obtient en 1946.

59 D.L. 04 10 2000 60 Lettres de l’Office Georgien des réfugiés 24 01 36 et Comité central de la jeunesse universitaire Russe à l’étranger 22 07 37. A.N. 61 Le R.M.L.E. sera cité à l’ordre du président Harry Truman pour son courage.

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LA PALETTE, 1946

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FÊTES DU RÉVELLY

PAUL ROQUE ET ACHILLE DE PANASKHET

PORTE DE VILLE, 1948

THÉÂTRE EN LIBERTÉ, 1955


Ce sont ses camarades d’atelier qui vont faire appel à lui, pour le projet d’une maison de l’Agriculture62 à Gap. « C’est avec Fort et Guillaume que les jeunes

Languin et Roque, anciens de l’atelier Expert travaillent sur un projet de maison de l’Agriculture. C’était un projet formidable comme un Grand Prix de Rome. »63 Le programme, difficile à monter dans cette période de restrictions, s’avèrera moins important que prévu. De facture classique et ordonnancé, Achille de Panaskhet va développer une touche d’art décoratif sur les grilles et défenses du bâtiment. C’est peut-être de là que viendra la commande, avec Georges Languin et Paul Roque, de la reconstruction des fermes de Saint-Chaffrey, Villard SaintPancrace et de Cervières, incendiées par l’armée allemande en pleine débâcle en 1944. En effet, le ministère de l’Agriculture établit les programmes de fermes fonctionnelles que les architectes doivent suivre à la lettre. Cervières est un chantier difficile d’accès64 qu’Achille de Panaskhet prend en charge. Le résultat reste d’un grand intérêt. C’est l’architecte de Briançon Henri Muraillat qui, à partir de 1952, terminera les travaux. D’abord logé dans les combles de la rue Lesdiguières, au dessus de l’atelier des architectes, sa famille vient le rejoindre à Gap en 1947. Ils habiteront deux ans rue des Jardins, chez Mr Bertrand, au rez-de-chaussée d’une menuiserie, puis en 1949, au Forest d’Entraï dans une petite maison avec jardin. Le logement est un problème partout en France, mais difficilement concevable pour la famille d’un architecte. « J’avais failli partir en 1948, mes amis m’ont rattrapé sur le quai de

la gare. Je n’arrivais pas à loger ma famille. J’ai fini par habiter un appartement dans les bâtiments HLM de La Blâche que j’avais construit. »65 La famille s’installe donc fin janvier 1953 à La Blâche, où va naître Catherine, sa troisième fille. Les trois architectes demandent en 1954 une copie de leur diplôme pour l’inscription à l’Ordre régional et l’agrément du M.R.U. À cette occasion, Tsitsichvili Panaskheteli demande à transformer son nom en de Panaskhet, le premier terme du patronyme lui paraissant « rébarbatif aux oreilles françaises ». C’est une forme d’intégration complète au milieu local. L’élève des Beaux-Arts portait un grand intérêt au théâtre, il était connu comme organisateur de fêtes comme le Rougevin ou les Quat’z’arts. Dans les années 1950, il organise des défilés de fanfares et des cavalcades pour les carnavals du Révelly, quartier populaire de Gap, sorte de petit Montmartre local. Avec son ami Jean Morel, il réalise le décor d’une porte de ville sur l’avenue de la Libération, célèbre pour être resté en place une dizaine de jours en 1948. A partir de 1955, il participe, activement au Théâtre en Liberté comme comédien, décorateur ou metteur en scène : il monte Anouilh, Guitry et Giraudoux. On se pose toujours la question, dans les ateliers d’architectes du rôle de chacun des associés. Tous sont des hommes de projets mais chacun a une qualité particulière. Les témoignages de collaborateurs indiquent que Paul Roque avait le goût des structures et du calcul du béton ; Georges Languin, musicien, avait des commandes dans le domaine hospitalier 66. Achille de Panaskhet,

62 63 64 65

C’est aujourd’hui le conservatoire de musique. D.L. 04 10 2000 A trois heures de Gap en moto. Entretien avec Madeleine Fauchâtre T.P.B.M. 05 05 2001.

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puisque c’est devenu son nom, possède des qualités d’organisateur et l’autorité nécessaire. Son passé d’officier, blessé et médaillé pour fait de guerre ne pouvait que susciter la confiance des représentants de l’État. C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre son implication dans le renouveau de Savines, où il prend fait et cause pour un village ouvrier dont le maire d’extrême gauche, Léon Isnard, ne correspond guère à son histoire personnelle qui l’inclinait plutôt vers la démocratie républicaine. Son expérience de Cervières a sans doute joué en sa faveur, où il a expérimenté les façons d’agencer les dossiers administratifs pour les services de l’État. L’aventure de Savines, qui devait être détruite, va occuper l’agence de Gap pendant sept années intenses, exclusivement consacrées à ce projet, l’ensemble de son intervention durera vingt ans. Les premiers projets, sur un adret du lac, sont dessinés au début de l’année 1955, une seconde esquisse, sur le site actuel, est présentée en octobre. En 1956, il est désigné par le préfet pour conduire les études d’urbanisme avec le ministère de la Reconstruction et du Logement et les Ponts et Chaussées. Fin 1957, le Plan d’Urbanisme de Détail est approuvé par le conseil municipal. Les permis de construire au nom des trois architectes de Gap arrivent en rafales. L’usine Omnitube en mai 1958, l’usine Lambert en juillet, les logements sociaux en septembre. En deux ans sont étudiés les projets des usines, l’école, la mairie,

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MAISON DE L’ARCHITECTE À GAP

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Entretien avec J.P. Challier.

SERRE CHEVALIER, 1961


les Ponts et Chaussées, la poste, la gendarmerie et l’église. Ce qui fait que lors de la démolition de l’ancienne église, en 1961, le nouveau village est déjà debout. Le reste de l’aventure est décrite dans les chapitres précédents. 1961 est aussi une date importante puisque la maison des Hauts de Valbonne, sa maison, est terminée. Auparavant il aura divorcé de sa première épouse en 1956, deux ans plus tard, il se remarie avec une gapençaise, Jacqueline Eyglunent, qui lui donnera deux filles : Sophie en 1960 et Véronique en 1964. En 1965, il retrouvera la Géorgie qu’il avait quitté enfant, plus de quarante ans auparavant, mais où son père et sa sœur étaient retournés dès 1947. Il y retournera plusieurs fois par la suite. Il dessinera un ensemble culturel pour son pays natal, avec musée, hôtel et théâtre, le tout dans un grand parc. La suite de la carrière d’Achille de Panaskhet est scandée par les réalisations de l’architecte, la vie de l’agence – qui est marquée en 1968 par le décès de Paul Roque –  qui va amener de grands changements. « Je rachète les parts de mes confrères et je reste seul. »67 Son atelier prend de l’importance dans les années 1970 ; une quinzaine de personnes y travaillent, on compte 6 dessinateurs, 2 apprentis, 2 métreurs, 2 secrétaires, 1 aide comptable. Les projets sont rapides, en charrettes terminées au champagne. Certains projets, détaillés, occupent un dessinateur pendant un an. On fait peu ou pas de maquette : tout est dans le plan - distribution, détails d’intérieur dont il avait le goût, culture du plan. « Un dessin est un devis »68 déclare le patron. L’architecte fait beaucoup de dessins à la main, des vues lointaines et des fonds de paysages. Il y a une bonne documentation, avec des revues comme l’Architecture d’Aujourd’hui. On travaille avec le bureau d’étude SIRAMI, le bureau de contrôle SOCOTEC. L’agence est fidèle à certaines entreprises comme Cezanne (Chateauroux), Hyot (Embrun), Imbert, Ragussi, Chaminade, Chiorino, Gillot Frères, Ronducci ou Caveglia. Les commandes sont de plus en plus celles d’un architecte qui a la confiance de ses clients et rayonne dans le département. Une production fournie en découle qui embrasse plusieurs secteurs d’activité. Le domaine de la santé domine, avec les instituts médicaux à Gap et Rosans, les hôpitaux d’Embrun, de Gap et Rosans, le foyer pour personnes âgées à Briançon ou le foyer Soleil à Rosans. Caractéristiques du département sont les programmes scolaires et sportifs : centre de montagne à Vars, stade nautique, écoles et crèche à Gap. Les équipements de loisirs sont présents dans les projets de l’agence : les stations de ski de la Joue du Loup, et du Pic de l’Aiguille et hôtels de montagne, restaurant de la M.G.E.T., la salle des fêtes et les cinémas d’Embrun, cabarets le Kontiki ou le Modul. Enfin, dans le domaine institutionnel : la gendarmerie de Rosans, l’Hôtel des impôts d’Embrun, Sécurité sociale et Banque de France à Gap. Le logement social va être plus rare dans les projets de l’agence après Embrun, Gap et Savines-le-Lac. La production est plutôt liée aux opérations immobilières gapençaises : le groupe Jeanne d’Arc, le Pasteur, les Coteaux, le Bellevue jusqu’à la construction de l’immeuble Ladoucette où il installera son atelier d’architecte sur tout un étage.

67 68

Entretien avec Madeleine Fauchâtre in T.P.B.M. 05 05 2001. Entretien avec J.P.Challier

127


Une mention particulière est à faire pour les maisons familiales réalisées pour une clientèle aisée, parmi laquelle on comptera des entrepreneurs, des commerçants, un conseiller d’État ou le président d’une grande société de production cinématographique. Ces villas ne figurent pas dans les références que Achille de Panaskhet rédigera, assez tard. Selon l’un des propriétaires, il lui arrivait de dessiner gracieusement des projets pour des personnes qu’il pouvait considérer comme des amis proches.69 Ce sont en général des maisons basses, d’un seul tenant et horizontales. De larges toitures débordent de la façade et couvrent d’importantes terrasses ou galeries qui permettent des circulations saisonnières, dedans ou dehors. A l’intérieur, les distributions enchaînent les pièces de façon assez fluide, centrées sur un coin cheminée, souvent en décaissé. Certaines baies, sur les paysages sont au format 16/9ème. L’aspect extérieur combine des matériaux locaux : pierre, bois et des plans en béton pour les auvents, terrasses, galeries et circulations en porte à faux. Il fera quelques projets hors des Hautes-Alpes, sur la Côte d’Azur (Gigaro), aux Antilles (Saint-Martin) et dans le New Hampshire (Orford). L’échec de ce dernier programme entrainera la cessation de son activité d’architecte : « Je me suis fait planter pendant

128

un an pour rien. J’ai quatre vingt ans, j’arrête ! » note-t-il en 1996.70 À la fermeture de son agence, il veut céder ses archives, comme on lui demande d’en faire une sorte AUTOPORTRAIT d’inventaire ; il décide de les rendre à ses maîtres d’ouvrages, éparpillant cinquante années de travail d’une agence d’architecture ! Au tournant du siècle, il part s’installer dans le Var où il peint, activité qu’il avait envisagée avant d’entrer aux Beaux-Arts de Paris. « C’est un exutoire, j’ai vraiment besoin

de peindre » confie-t-il à Agnès Braizaz.71 C’est dans le Var qu’il s’éteint le 6 mai 2010, il sera inhumé à Gap, laissant derrière lui des projets et des réalisations d’importance.

69 70 71

Entretien avec Gérard Hyot Archives A.d.P. D.L. 10 04 2000


1966

129

1970

1973, L’AGENCE


RÉFÉRENCES DE L’ŒUVRE BRIANCON SANTE 1968 1982

1981

Sanatorium Montjoie Foyer pour personnes agées

IMMEUBLES 1963 1963

SANTE

Hôtel Monetier les Bains Le Pelvoux

AMENAGEMENTS 1973

Plan d’ensemble, Reconstruction des maisons fermes et de l’école avec Henry Muraillat qui se poursuit après 1952

Maison Maison Maison Maison Maison

1948-50

130

MGET : Maison du Gardien, Restaurant Panoramique, Garage à bateau, Maison individuelle, Blocs sanitaires

1952 1959

Les Hauts de Gigaro

CROTS 1978

1962 Habitations collectives 1963

EMBRUN SECILEF 1961 1963 1972

Le Rochelaire La Chaussière Champs de Mars Saint Surnin

1968 1972 1973

AUTRES 1970 1976 1978 1980

Le Roc Paramart Le Bastion Le Champ de Foire Foyer de travailleurs migrants

1974 1985 1986

ENSEIGNEMENT

SANTE

1970

1972 1972 1974 1977

Maternelle et groupe scolaire

EQUIPEMENTS PUBLICS 1978

Hôtel des Impôts Salle des fêtes, Bibliothèque, Cinémas Le Roc

Maison de l’Agriculture, aujourd’hui conservatoire de musique

LOGEMENTS COLLECTIFS

CROIX VALMER 1973-80

Al. H. B.-L. L. P. (Baratier)

GAP

CHORGES 1969-74

Parc des 4 Soleils

MAISONS INDIVIDUELLES

CERVIERES 1947-52

Centre de soins pour personnes âgées

1979 1981 1982

Immeubles La Blache avec Languin et Roque La Camargue avec Languin et Roque Le Lamartine avec Languin et Roque Ladoucette (Bureaux) avec Languin et Roque La Cigalière avec Languin et Roque La Marjolaine avec Languin et Roque Sainte Marguerite Foyer Bellevue extensions Le Pasteur Le Champolion Les Côteaux du Forest Les Molines Serrebourges Les Ursulines Le cadet de Charance

Ecole d’Infirmières Foyer Bellevue extensions Laboratoire d’analyses L’Adret, centre de soins pour personnes âgées Service d’hémodyalise SAMU et Service de réanimation Blanchisserie et ateliers


1983 1970 1980

Extension chirurgie, hélistation avec Gilles Pellenq Institut médico-éducatif Foyer handicapés lourds

ENSEIGNEMENT 1970 1971 1977 1975

SAINT-VERAN 1970

SAVINES-LE-LAC 1955-59

Maternelle et Groupe Scolaire de Fontreyne Gymnase et terrains de sport Crèche, Garderie Lycée de jeunes filles

1961

Immeuble Banque BECRD Stade Nautique Direction départementale de l’agriculture Immeuble de la Sécurité sociale Banque de France, aménagements

1962 1963 1965

SPORT 1973 1974 1984 1986 1996

GUILLESTRE 1970 1971 1972 1974

Immeubles Centre de Secours Subdivision EDF Mairie, Perception, Bureau de Poste, Maison individuelle

1964 1970 1972 1975 1978

1982-84

1966 1967 1968 1969 1971 1972

1960

LARAGNE Centre de Secours Piscine Centre médico-social Centre médico-éducatif Hôpital Rural Subdivision EDF Immeuble de la Place des Aires HLM, Habitations Collectives Foyer Soleil et Immeubles

1962 1965 1968 1969

Centre de Montagne de Romainville

VEYNES

1970 1971

PELVOUX 1971

ROSANS 1972 1973 1980 1986

Institut médico-éducatif HLM Le Buisson Village de harkis Aménagements du Temple

SAINT-BONNET 1971 1972 1973 1974

Piscine Centre de Secours Maison de retraite de la Fare-en-Champsaur Perception

Centre de Montagne Saint-Ouen

1970 1976 1978

Plan d’Urbanisme de Détail, Lotissement Le Forest Ecole, Gendarmerie, usine Lambert, usines Omnitube, Mairie, Poste, Perception, Salle des fêtes, Foyer rural. Logements collectifs : OPHLM 05, Le Forest Logements collectifs : Sécilef La Poste Église Saint-Florent Le Relais Fleuri, Syndicat d’Initiative, Ponts & chaussées Maison de Retraite Le Chabrière La Rotonde Station-service La Voilerie Studio C Accueil Camping Les Flots Bleus Maisons : Maison S. Villa la Quinta Maison Ch. Maison D. Villa Bellevue Maison Na. Maison Al. Maison Ca. Maison M. Maison No Maison P . Maison Au.

Institut médico-éducatif Collège CES Foyer de personnes âgées. Château de la Batie Montsaléon Maisons individuelles

STATIONS DE SPORT D’HIVER Laye en Champsaur La Joue du Loup Serre Eyraud

131


V ER S G A P

19

15 18

12 17 9 6 7 4

16

13 10

8

5

36

11

35

23

28

PL AC E D ES CO M M ER C ES

P L AC E D E L’ ÉG L I S E

29

27

26

LE

954

37

14

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EN

TA

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EM

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31 34

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RO

2

1

VE

RS

LE

SA

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25

E

SAVINES-LE-LAC, LES CONSTRUCTIONS D’ACHILLE DE PANASKHET

32


1

N

20

21

N VER S EM BRU TIO NA RO UT E NA

22

LE 94

SAVINES-LE-LAC, LES CONSTRUCTIONS D’ACHILLE DE PANASKHET

250M

1 2 3 4 5

Usine Lambert Usine Omnitube La Voilerie Les Flots Bleus Le Relais Fleuri

6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37

La gendarmerie Maison A. Maison C. Maison D. Ecole Office du Tourisme HLM du Forest Maison de retraite Le Chabrières Les studios La Victorine Maison M. Maison C. Le Boscodon Villa Bellevue HLM Saint-Féréol La station service Maisons Normand HLM le Morgon Résidence Le Forest Caisse d’épargne Poste et Ponts et Chaussées Mairie La Rotonde Église Saint-Florent Villa la Quinta Maison B. Maison P. Maisons S. Maison E. Arrêt de bus, WC L’Albatros

133


134


ANNEXES

135


GLOSSAIRE ABAT-SON : n.m. Dispositif destiné conduire le son des cloches. ABSIDE : n.f. Espace de plan intérieur en partie cintré, ouvrant sur une nef ou une pièce. ADRET : n.m. Versant sud d’une montagne. AILERON DE PASSERELLE : n.m. Partie de passerelle de navire qui va au delà des bordées. APPAREIL CYCLOPÉEN : n.m. Assemblage polygonal de pierres. APPAREIL : n.m. Façon d’assembler des moellons ou des pierres de taille. APPENTI : n.m. Bâtiment dont la toiture est constituée d’une seule pente.

136

CHAUSSÉE DIGUE : n.f. Chaussée sur remblais, formant obstacle à l’écoulement de l’eau. CLIN DE BOIS : n.m. Disposition de planches ; se recouvrant l’une l’autre pour former un bardage. CONTREVENTEMENT : n.m. Dispositif permettant d’assurer la stabilité d’un ouvrage aux efforts horizontaux DÉBLAI : n.m. Terre qu’on extrait d’une excavation. DÉCOUVERTE : n.f. Terrain dégagé, au cinéma qui permet de larges panoramiques. DIVERGENTE: adj. Qui s’écarte de plus en plus d’un point de départ.

AVANT-CORPS : n.m. Partie de bâtiment en avancé sur la façade principale.

DUNETTE : n.f. Superstructure sur le pont d’un navire qui en occupe la largeur.

BARLONG, BARLONGUE : adj. Se dit d’une construction plus longue que large.

ECOINÇON : n.m. Partie pleine entre deux baies non jumelles.

BARLOTIÈRE : n.f. Fer en T qui maintient les verres d’un vitrail.

ENDUIT À PIERRE VUE : n.m. Enduit de façade où affleurent les différents moellons des murs.

BATARDEAU : n.m. Retenue d’eau provisoire pour des travaux immergés. BÉTON PRÉCONTRAINT : n.m. Béton dont les armatures sont mises en tension avant le coulage du béton. BOSSAGE : n.m. Décor saillant sur une pierre, ici bossage rustique. BOUTEUR : n.m. Terme français pour bulldozer. CALEPINAGE : n.m. Schéma de pose de pierres, de carrelage. CARTON : n.m. Modèle ou maquette colorée des vitraux. CHANFREIN : n.m. Angle abattu formant une surface biaise.

ENGRAVER : v. Entailler une paroi de maçonnerie. ENCORBELLEMENT : n.m. Saillie qui porte à faux par rapport à un aplomb de façade. ENQUÊTE SOCIO-DÉMOGRAPHIQUE : n.f. reposant sur les caractères sociaux et démographique des habitants. Mis en place par Gaston Bardet pour mieux connaître la population d’une ville ou d’un quartier. ENTRELAC : n.m. Ornement fait de lignes courbes enchevêtrées formant un motif. EPANNELAGE : n.m. Terme de sculpture, ébauche ou volume général, en urbanisme définit la forme générale des volumes bâtis.


ESCALIER DE COUPÉE : n.m. Escalier qui longe les flancs d’un navire qui permet l’embarquement et le débarquement à quai. ETIAGE : n.m. Niveau le plus bas d’un fleuve, d’un lac. ETRAVE : n.f. Partie la plus avant de la coque d’un navire. EXOSTRUCTURE : n.f. Structure porteuse extérieure à un bâtiment, laissant libre de points d’appuis le volume interne. EXTRUDÉE : adj. Génération par une filière donnant la section de la pièce. Forme définie par des génératrices parallèles. FAÎTAGE : n.m. Sommet d’une toiture, et recouvrement de plusieurs rampants. FLUAGE DU BÉTON : n.m. Processus de déformation différé sous l’effet d’une charge ou de la nature du béton FLEXION D’UNE POUTRE : n.f. Déformation qui se traduit par une courbure. FUSTE : n.f. Ferme du Queyras en rondins de bois. FRUIT DES MURS : n.m. Partie oblique d’un pan de mur. GRUME : n.f. Bois dont l’écorce a été conservée. INTRADOS : n.m. Surface intérieure d’une voûte. JOUÉE : n.f. Face latérale d’une baie, d’une loggia. LOGÉCO : acro. Logements Economiques et Familiaux, financement mis en place en 1953 par Pierre Courant pour accélérer la construction privée. MARNAGE : n.m. Fluctuation des niveaux de l’eau du lac.

MENEAU : n.m. Division verticale d’une fenêtre par un montant. MEMBRURE : n.f. Partie saillante d’une construction d’une façade. MUR D’ÉCHIFFRE : n.m. Mur supportant ou limitant les marches d’un escalier. MODÉNATURE : n.f. Ensemble des reliefs de corniches et pilastres d’une façade. NARTHEX : n.m. Espace qui précède la nef d’une église. OCTROI : n.m. Edifice à l’entrée d’une ville où se percevait une taxe sur les marchandises. OPUS INCERTUM : n.m. Appareil de pierres de formes et de tailles irrégulières. OPUS ROMAIN : n.m. Appareillage irrégulier des pierres carrées et rectangulaires. PARABOLOÏDE : n.f. Surface du second degré dans l’espace euclidien, sa section par un plan peut créer une ellipse. PIEDMONT : n.m. Plaine formant un glacis au pied d’un massif montagneux. PIERRE FROIDE : n.f. Pierre dure comme les pierres marbrières. PIGNON EN BÂTIÈRE : n.f. Pignon non couverts par la toiture et qui se trouve plus haut que celle-ci PILASTRE : n.m. Colonne, organe de stabilité encastré dans un mur. POCHÉ PUR : n.m. Surface d’un dessin à l’encre de chine entièrement noire. POTEAU INVERSÉ : n.m. Poteau qui s’évase vers le haut à l’inverse des colonnes classiques. REMBLAI : n.m. Terre rapportée pour élever une plateforme ou combler une excavation.

137


GLOSSAIRE RACHAT : n.m. En architecture, dispositif visant à corriger un défaut d’un espace, d’une façade etc. REFEND : n.m. Mur maître divisant la portée d’un plancher. SECTEUR DE PLAN DE MASSE : n.m. Partie d’un plan d’urbanisme où les implantations doivent respecter un plan d’ensemble. TABLIER : n.m. Structure horizontale qui supporte des charges passantes, et les transmet aux appuis. TYMPAN : n.m. Surface verticale délimitée par les rives de toitures. VOLIGE : n.f. Planche de bois posée sur des chevrons et formant un plancher horizontal ou pas. ZONAGE : n.m. Découpage d’un territoire en zones, auxquelles est attribué un usage plus ou moins exclusif.

138

ZONE NON AEDIFICANDI : n.f. Terrain ou partie de ter


INDEX DES NOMS PROPRES NOM

PAGE

André Sartres

photographe

L’abbé Ferraro

curé de Savines

François Pavie

conseiller général

Albert Catier

entrepreneur

18 - 22

Yvan Wilhem

ingénieur

19 - 21

Paul Séjourné

ingénieur

19

Jeanne-Claude Regusse-Payan sculptrice

20

14 14 - 81 17 - 18 - 19 - 20 - 27 - 31 - 47 - 81 - 88

Franklin D. Roosevelt

Président

Léon Isnard

maire de Savines

21 - 22 - 126

Jean Monnet

directeur du Plan

21 - 25

Jean Aubin

rapporteur parlementaire

Georges Meyer-Heine

urbaniste

René Coty

Président

George Dulery

commission

20

22

22 - 23 - 25 - 27 - 81 - 89 - 97 - 106 23 23 - 27 - 29 - 31

Guy Mollet

président du Conseil

Marie François-Bénard

maire de Vars

Joisson

expert

Courts

expert

Albert Pellenq

ingénieur

31 - 63

Jean Courbon

ingénieur

34

Eugène Fressinet

ingénieur

34

Charles de Gaulle

Président

34 - 44

Jacques Tati

cinéaste

François Villiers

cinéaste

Jean Giono

auteur

Jean-Luc Godard

cinéaste

36

Elia Kazan

cinéaste

36

Montgomery Clift

acteur

36

Lee Remick

actrice

36

Jean Prouvé

ingénieur

Georges Languin

architecte

39 - 47 - 115 - 125 - 130

Paul Roque

architecte

39 - 47 - 124 -130

Auguste Perret

architecte

72 - 111 -123

Le Corbusier

architecte

67 - 72 - 106 - 111 - 113 - 115

Pierre Bonnard

peintre

72

Fernand Léger

peintre

72

31 106 - 113 31 31

34 34 7 - 34

39

139


140

Georges Braque

peintre

72

Henri Matisse

peintre

72

Marc Chagall

peintre

72

Viollet-le-Duc

architecte

72

Guillaume Gillet

architecte

72

Jean & Michel Thomas

maîtres verriers

76

André Dubois-Chabert

préfet

81

Monseigneur Jacquot

évêque

81

Trigano

industriel du loisir

97

Léo Lagrange

ministre

Roland Schweitzer

architecte

97 - 99 - 115

Paul Faye

architecte

100 - 116

Michel Tournaire

architecte

100

Frank Lloyd Wright

architecte

100 - 103 - 116

97

Raymond Subes

ferronnier d’art

Henri Jacques Le Même

architecte

110 - 111 - 113 -118

Roger-Henri Expert

architecte

111 - 123

Camillo Sitte

urbaniste

28 - 111

Raymon Unwin

urbaniste

111

Robert Mallet Stevens

architecte

111

Joseph Hoffmann

architecte

111

Noémie de Rothschild

skieuse

113

111 - 119

Marie Kantcheli

123

Ellico Tchitchisvili de Panaskhet

123

Dath Tchitchisvili de Panaskhet

123

Amélie

bonne d’enfant

123

Atelier Patouillard

architecte

123

Marie Hélène de Panaskhet

123

Irène de Panaskhet

123

Paul Fort

architecte

125

Maurice Guillaume

architecte

125

Catherine de Panaskhet

125

Jacqueline Eyglunent

127

Sophie de Panaskhet

127

Véronique de Panaskhet

127


ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE Louis Jacques, Savines et son église, Bulletin de la Société d’Etude des Hautes Alpes, 1963

Madeleine Fauchère, Achille de Panaskhet, Revue TPBM N° 345, Mai 2001

Pierre Blanchard, Le nouveau village de Savines-le-Lac, Revue Techniques et Travaux, 1964

Claude Gouron et Hélène Vésian, Serre-Ponçon, Edition A. Barthélémy et Hangar, 2004

Giovanni Brino, Carlo Mollino, Monographie, Editions Centre Georges Pompidou, 1989

Les Villages Reconstruits, Magazine Alpes Loisirs (Dauphiné Libéré)

Robert Brès, Savines-le-Lac 1789-1990, Société d’Etude des Hautes Alpes, 1990

Marie Wozniak, L’architecture dans l’aventure des sports d’hiver, Société savoisienne d’histoire et d’archéologie, 2006

François Desvignes, Le Canton de Savines, Edition de la Librairie des Hautes Alpes, 1996 Jean Driabec, Jeannot de l’Ile, Gap 2010 Maurice Culot, Megève, Henry Jacques Le Même, Norma, 1999 Le Corbusier, Station de sports d’hivers et d’été de Vars, in Œuvre Complete Volume 4, Birkhauser 1999. CAUE 05, Mémoire d’un siècle, Architecture et Patrimoine, Embrun, 2000 Pierre Yves Playoust & alii : Hautes Alpes, Editions Guides Gallimard 2003

L’aventure architecturale des stations de sports d’hiver, J.P. Hardy http://www.sabaudia.org/v2/ dossiers/archimontagne/public1.php Henry Jacques Le Même http://henryjacqueslemememegeve. ifrance.com/biographie.htm Thierry Durousseau, Savines-le-Lac, un village du XXème siècle, étude historique et documentaire en vue de la labellisation Patrimoine du XXème siècle, Ville de Savines-le-Lac, Direction régionale des affaires culturelles PACA, Conseil général des Hautes-Alpes, EDF, 2011.

141


REMERCIEMENTS Victor Bérenguel, maire de Savines-le-Lac, Président de la communauté de communes du Savinois et Vice-président du Conseil Général

MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION

Raymond Honoré, premier adjoint au maire de Savines-le-Lac

DIRECTION RÉGIONALE DES AFFAIRES CULTURELLES PROVENCE-ALPES-CÔTE D’AZUR

Gérard Calvisi, adjoint au maire de Savines-le-Lac en charge des finances, de la culture et du patrimoine PERSONNEL MUNICIPAL Claudine Martinoli Isabelle Peyron Pascale Olive Roger Cezanne (Crots)

142 CONSEIL GÉNÉRAL DES HAUTES-ALPES : Gael Chenard : conservateur des archives 05 Daisy Haquin : urbaniste C.A.U.E. 05 Aude Tochon-Danguy : animation de l’architecture et du patrimoine du pays d’art et d’histoire Serre-Ponçon Ubaye Durance

François Goven : inspecteur général des monuments historiques

Sylvie Denante : service architecture et espaces protégés Sylvaine Le Yondre : conservation régionale des monuments historiques Philippe Grandvoinnet : service territorial de l’architecture et du patrimoine des Hautes-Alpes FAMILLE DE PANASKHET Irène de Panaskhet Jacqueline de Panaskhet Sophie de Panaskhet Mr & Mme Eyglunent HABITANTS DES MAISONS D’ACHILLE DE PANASKHET Mr & Mme Andrzejewski Mr Hyot Mme Levantini Mme Magallon Mr & Mme Miniot Mr & Mme Peyron Mr & Mme Pichard Mr & Mme Poujaud Mr Sylve


ACTIVITES LOCALES

Editeur : Mairie de Savines-le-Lac

C.C.A.S. E.D.F. Auberge de jeunesse Entreprise Optex

Directeur de publication : Victor Bérenguel Auteur : Thierry Durousseau

ENTREPRISES Gérard Hyot (Hypotra) Roger Cezanne (Châteauroux) Entreprise Allamanno Entreprise Caveglia Michel Warnet

Comité Editorial : Gérard Calvisi, Gael Chenard, Sylvie Denante, Philippe Grandvoinnet, Sylvaine Le Yondre, Aude Tochon-Danguy Corrections : Arno Calleja, La Manufacture Documentation, cartographie : Thierry Durousseau, La Manufacture

ARCHITECTES

Photographies : Claude Fortoul, Philippe Piron, Thierry Durousseau

René Borruey Guy Desgrandchamps Gilles Pellenq Michel Tournayre Roland Schweizer Paul Wagner

Cartes postales : Images des 4 saisons, collections particulières Conception graphique, mise en page : La Manufacture, Nice

Collaborateurs de l’agence Achille de Panaskhet : Jean Pierre Challier Jacqueline Simon

Imprimerie du Fournel, L’Argentière Partenaires financiers : Conseil général des Hautes-Alpes, Direction régionale des Affaires culturelles Provence-AlpesCôte-d’Azur, Eléctricité de France, Primagaz, Routière du Midi, Société S.P.G.E. Décembre 2014 ISBN 978-2-7466-7597-1

PRÉFET DES HAUTES-ALPES

143


C’est toute cette histoire, suivie pas à pas, maison par maison que raconte Savines-le-Lac, un village du XXème siècle. Le village reconstruit a obtenu le Label du « Patrimoine du XXème siècle » en 2011.

SAVINESLE-LAC UN VILLAGE DU VINGTIÈME SIÈCLE

La valeur de l'architecture la plus profonde est celle d'une « création humaine », qui donne une forme à la réalité et transforme la matière en fonction d'une conception esthétique. ALD O ROS S I

M A I R I E D E S AV I N E S - L E - L A C

Lorsqu’Achille Tzitzichvili de Panaskhet arrive dans les HautesAlpes, il a juste trente ans et déjà une histoire derrière lui. Parmi ses premiers travaux figure, en 1947, la reconstruction de Cervières, un des villages martyrs de la libération du briançonnais. Achille de Panaskhet prend ensuite fait et cause pour la reconstruction de Savines, dessinant une série de compositions urbaines qui aboutiront au Plan d’Urbanisme de Détail de 1957. Une dizaine d’année durant, il va se consacrer entièrement à la création de Savines-leLac, de l’urbanisme aux espaces publics, de l’architecture publique aux constructions privées. La renaissance de Savines se fera dans l’urgence. L’église Saint-Florent sera terminée en 1962 et l’architecte mettra à profit une convalescence pour en dessiner le détail des vitraux. Le caractère de l’architecture d'Achille de Panaskhet à Savines-le-Lac, c’est le refus du chalet pittoresque au profit d’une architecture de création, horizontale, effilée, soulignée par des bandeaux de bétons clairs, et des toits presque plats. On peut définir cette architecture comme optimiste. C’est le plus bel héritage que pouvait laisser Achille de Panaskhet à Savines-le-Lac ; lui-même possédant, au dire de ceux qui l’ont connu, un tempérament énergique et enthousiaste.

S AV I N E S - L E- L AC U N V I L L AG E D U V I N GT I È M E S I ÈC L E

ACHILLE DE PANASKHET, ARCHITECTE DE LA RENAISSANCE DE SAVINES-LE-LAC

Sur les hauteurs du Forest, un nouveau village s’édifiait après plus d’une demi douzaine d’années de résistance. Le village n’a pas disparu sous la montée des eaux du lac de Serre-Ponçon. Village moderne dans un site redessiné par les eaux, Savines-le-Lac a souvent surpris ceux qui, montant aux sports d’hiver, voyaient là une halte avant d’attaquer la haute vallée de la Durance. Station service, hôtels, restaurants, bâtiments administratifs, église, tout cela ressemblait à la maquette d’un village idéal consacré à l’automobile et aux loisirs, dont la société française commençait à rêver. Loin de l’uniformité des cités de la Reconstruction, le village était pimpant, varié, avec un air de famille pour tous les édifices. Un architecte est à la manœuvre de cette reconstruction : Achille de Panaskhet, qui dès 1955 accompagne la municipalité, tout en veillant à conserver une figure urbaine au nouveau village.

THIERRY DUROUSSEAU

LE 3 MAI 1961, l’église Saint-Florent était le dernier bâtiment de Savines à tomber sous les explosifs. Dès janvier, le conseil municipal avait décidé que la commune de Savines s’appelerait désormais Savines-le-Lac.

THIERRY DUROUSSEAU

I S B N 9 7 8 - 2 - 74 6 6 - 7 5 9 7 - 1

20€

PRÉFET DES HAUTES-ALPES

M A I R I E D E S AV I N E S - L E - L A C


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