TABLE DES MATIÈRES - petit théâtre chambré Ceux qui naissent d'une cause dernière te parlent. Une chimie d'outre-tombe les aura liquidés, liquéfiés, flot de larmes qui ne sont pas permises en scène. Ils te parlent de leurs tribulations et des petites actions entre les paroles qu'aucun jeu de rôle ne saurait réduire à la souplesse du geste et pour cause dernière. Ceux qui se plaisent à ne pas plaire, car ils s'engouffrent dans d'autres questions, pas posées, pas de pose qui leur convienne au BEAU milieu des ruines, te font part et parti vraiment pas pris. N'a-t-on pas conspiré, tous autant qu'on s'imaginait, et conçu - pour s'en rendre infiniment coupables le délabrement de cette maison mémère où les répliques et les motifs sont soufflés? Or, attendu que nous étions enfermés dans des murs de chair et supportés par fondements et poutres invisibles, notre point de mire et de vue briguait cette cible cachée un peu à gauche. Si, comme ce vocable venu des astres, devenu, hélas, un mot passe-partout, semble l'indiquer, le mouvement de la volonté vers un bien et le sentiment de privation en son absence ne sont pas désormais sujets tabou, ceux qui naissent trop naïfs pour se comprendre - autrement dit: ceux qui s'éprennent te demandent en quoi cela relève d'un domaine étranger à l'arbitre et au vœu et par quelle malice cela élude et se dérobe, tout en collant à la langue, bien au centre du visage. Et vis-à-vis de quoi,
précise-t-on. C'est que, vois-tu, il est des recoins grouillants d'une pensée qui refuse obstinément de faire da part des choses. S'agit-il de s'inscrire en faux contre la lumière tapie qui se cherche dans l'ombre, contre les plis jamais lissés d'un corps qui ne s'en remet pas de naître à tour de bras? Je mettrai, pour ne pas me trahir, du vin dans mon eau et pas l'inverse. Car, attendu que nous étions seuls et reclus dans chaque cellule de notre peau, mais pourtant adossés à l'air du large comme des voiles troués, notre point d'attache et de rupture n'en paraissait que plus minime et ferme. Une exégèse de l'inusable nous autorisait à tremper les lèvres dans des thèmes tirant vers le fond, vers la trame, vers l'éclat. Ô lune cuisante, presque pleine sur fond de nuit presque vide - aux plus hautes fenêtres, on aperçoit à cette heure quelle heure le reflet terne des nuages ou l'humeur massacrante des lampes tamisées par et pour. Derrière les jalousies, il n'y a pourtant pas de rideau méritant ce nom théâtral, alors c'est comme si la lueur domestique s'épuisait elle-même avant de dévaler la façade, de déferler enfin, vague mais plus du tout vague, si tu vois ce que j'insinue... Sois sage, ô mon violeur, et tiens-toi comme il faut. Tu réclamais le noir? Courbe-toi, dis merci. Une autruche à deux têtes fait le tour du cerveau, faisant croire à nos yeux qu'ils auront un sursis. Rien de tel que les canons quand on se propose de sonder la distance
entre ce que l'on pige et les pièges rhétoriques. Par exemple: si je te dis je t'aime tu me dis je le sais et, sur ton visage torturé, s'affichent quelques longueurs d'avance. Par suite, ceux qui tentent de récupérer leurs possibles - ainsi que la cible qui les hypnotisait, au dé part, s'estiment parfois en mesure de parler, de déborder le cadre de la conversation. Ils se prennent par la main afin de plumer le duvet d'un peloton de danseuses de cancan et nombre d'accords sucrés, pimentés, pelucheux, incapables de coucher sur la paille mais sonnant comme si. Hélas ils se noient dans leur salive, pauvres andouilles travesties de perroquets - une âme bien intentionnée se cassera le cul pour leur annoncer: «Tout le monde n'est pas indésirable». S'il fallait croire sur boussole la parole de tes masques, on compterait bientôt au nom des formes inédites la figure du mensonge permanent du mensonge transparent, sous les pavés la page et ainsi de suite. Ergo, quand bien même un mensonge paraîtrait pieux au yeux d'un athée, comment faire reculer l'horizon sur la seule base du mirage, le voyeur s'efforçant, mais point trop, de tromper, le voyant se laissant, sans effort, se faire «avoir»? Il est probablement un ton qui justifie tous les tons. Un ton vaut mieux qu'un tien,
un tu l'auras, un tu l'as eu, et ainsi de suite... Cependant, l'artiste ou l'amant retranché derrière la chiche conviction que l'autre n'y voit que du feu cet artiste, cet amant, doit-on entendre son appel comme s'il nous venait du vaste champ magnétique de la liberté? Ces gens, des gens, qui prennent l'ascenseur et qui s'enferment dedans simulant la marée montante et je ne sais quel ciel à portée du puits ne sont pas parvenus à me détourner de ma quête à l'horizontale. Plate. Bande. Et en dépit de cette effrayante coïncidence - mais qui effraie qui? qui permet de superposer l'illisible et l'indésirable, je ne me tiens pas sur mes gardes. On ne s'étonne pas assez de la fluctuation des monnaies d'échange chez les humains, de leur notion du cours, du haut et court. Ayant pris l'habitude d'embrasser avec les yeux, de caresser avec les tympans, j'embrasse également la croyance en la chair que l'on ne saurait ceindre et je caresse le mirage de l'enclos de mes tympans troués tels des poches tels que. Ceux qui naissent bravent la muraille de cris qu'on associe à l'enfantement - au leur, par exemple, pour exemplaire qu'il s'avère n'être pas. Ceux qui naissent ne se pourlèchent pas les babines devant la poire coupée en deux et c'est tant pis pour leurs pommes.
Car la cadence du marche ou crève de toutes les heures étriquées, trépanées par quoi de neuf qui nous sèment et qui s'égrènent au petit bonheur la chance effroi et froid d'effrayance idée aux pieds de poupée nous donnent envie de gerber. Faut pas, croyons-nous, chacun de moi, s'en tenir au politique ni à plus forte raison au peaulitique. Ça ne rend pas fou, ça rend sage - ce qui ce qui ne nous engage en rien, m'entends-tu? Gommage gommage gommage des épithètes tendant vers l'avenir des attributs déchiquetant le passé et des majuscules assassines - on n'en est plus à peaufiner, à finasser, ni à jouer les fines bouches pour le plus offrant, chat botté ou autre beauté des sept lieues... Gommage d'images ----------------- bienmalacquis ou malbienacquis et ainsi de suite. Des copistes sans original sous les yeux ont mis le feu à leurs propres cils mais c'est le décor qui a brûlé ----------------- la taise, la chable, la fable, ----------------- la pluche, le parmechin, le machin, se retrouvent au cœur de cet âtre improvisé thé. Mille chansons pour nous confondre, nous aurons, et nous fondrons en larmes de croco trop sincère, te disent ceux qui naissent couverts de croûtes couverts par leurs propres cris. Mille chansons et des savons dont les caresses effacent et se prolongent à rebours d'un goût pour le verdict
faute de fonds de commerce et d'arrière-boutique et de ces arrière-pensées qui font la loi, qui sont la loi. Ô langue de bois, pas cette autre-là, et point de bois dormant s'offrant au plus offrant non plus, car seule la langue se perd au point où la parole nous égare, nous égaie et tait ce qu'il y aurait à distraire de bonne foi, bon pied, bon œil. Du coup, ce n'est pas le silence qui accorde les meilleurs répits, les plus rapsodiques, ajouterons-nous. Enfin, ceux qui naissent tant qu'ils sont privés d'ivresse jouiront à tout le moins du tremblement. Cherche donc, amore mio, que tu sois façade aveugle ou devanture défoncée, toit de chaume sans chaumière ou toit de verre certifié. Cherche-nous afin que nous nous trouvions trouvés d'avance, comme dans ces jeux d'enfants merveilleux - les mômes autant que leur règle conçue pour être transgressée. L'antagoniste se dessine comme un nu Age de poussière Un nUage nu qui a l'air en habit qui nuAge craint le lang Age du tonnerre. Je pense à cor et à cri. Je pense à tue-tête ---------------------------- à toi je pense. Pas de cailloux à lancer. Pas de paroles à livrer. C'est tout mon corps qui s'élance vers ce lieu où tu parais
et tu culbutes. Je bute contre l'évanescence. But contre but. Une fois tous les sujets ratiboisés, les autres mots bourgeonnent. Cependant, les phrases ad hoc sonnent aussi creuses que des ventres, bien que mélodieuses comme des poussées de fièvre d'un enfant malade qu'on ne saurait empêcher de grandir. Demeure le sentiment de naître sans aide qui camoufle tous les besoins, y compris celui qui recèle l'appel constant - celui des êtres qui ne sont pas faits pour survivre seuls. Alors la voix, telle une arme à double tranchant, fait entendre les inflexions de sa lame et le sang qui en découle ------------------------------------ ce sang en tête à queue ------------------------------------ ce sang qui est foule. Je crois bien que la voix du vin fait exploser le vieux tonneau, la voix de l'eau embrase les aubes trop longtemps dormeuses, la voix du lait fissure les parois des nuits d'outremer. Mais si je me surprends couchée froissée dans ta pupille, je lis non sans peine extrême que tu as tiré le mauvais numéro: celui du mot à mot arraché aux lèvres dédisantes. Mais si je me berce sous cape aux vagues précises de tes cernes, je lis non sans chagrin dépité que tu me comptes sur les doigts d'une seule main et tous de chiffres ulcérés dans l'autre - petites plaies de la pensée qui voit grand
et s'en prend courroucée à l'en deçà. Dis-moi donc, si tu le peux, que tu reconnais la morsure, l'origine des dents, la menue monnaie de migraine qui tinte à la nuque, comme des appartenances plus anciennes que les vents de guérison devant lesquels les barques se brisent, les bras du compas se referment et les regards s'enlisent inéluctablement. Une délivrance si poisseuse et percutante qu'elle bourdonne encore au bas des reins. Celle-là, oui. Et puis puissssque ton bon vouloir travaille sa mauvaise mine, dis-moi aussi où ça l'habit de feuille jaunie qui mijote sous l'écorce, dis-le par tous les moyens et de toutes tes forces ------------------ car s'écorcher serait sans doute la manière la moins maniérée de retrouver des pans cachés de peau si neuve si veuve sous notre vieille peau de pot aux roses. J'habite clandestinement l'odeur de cette courte tempête tropicale que tu as bue et commentée telle un breuvage renversé et un pur renversement. J'habite là où il est mal venu de bâtir son nid nomade. Haut en couleur, tu réclames. Ça manque d'espace dans ton secret alors que tu en réclamais la transparence la parenté limpide, parure et farce rivalisant dans ce qui sera décrit comme le repos du héros.
Pas l'interrogatoire pas le perquisitoire pas la semblance pas le jeu des irritables tournantes, juste une méditation dévergondée sur le prêt-à-porter, prêt-à-partir, et cette unique excuse à présenter. Souviens-toi, diseur, là où je vais chargée de ton pardon comme un baudet, l'odeur de sainteté n'est pas de mise et nul ne songerait à s'excuser. Lasse d'essayer tous les agrès et les exercices qui vont avec, la pensée trampoline, insuffisamment muselée insuffisamment musclée, se concentre sur la figure de l'arbre sur son ombre ambrée, sur cette platitude jetée au sol, croissante et décroissante, qu'on ne saurait gravir ou sauter - adieu sommes et sommets, c'est en bas que ça se casse et gourmand celui qui se tait la bouche pleine maxillaire hilare celui celle-ci qui se trahit... Les mots ils en sont tous au ce soir théâtre: prière de garder son souffle court. Ils en sont à la nuit des coulisses: prière de bien montrer ses longues dents. Du plus ténor au plus fausset, leur bel canto m'affolerait si par tic de vedette je déchantais tout autant. Esseulée comme cette ombre, ce candélabre bistré, cette nappe tatouée d'herbes folles et miettes aimantes, me voici à la poursuite de ton soleil haletant ------------------------------- me voici en délirance
et sur les traces fumantes d'une bonne idée criminelle, je ne sais laquelle, de je ne sais quel scélérat impensable provisoire aussi provisoire qu'un être accepte d'être. Oiseau cherche juchoir. Branche cherche vue imprenable. Bras cherche bras de fer pour finir coincé et toucher du bois. Je me souviens qu'à l'heure de l'ouverture des livres, on ne lisait pas, pas même en diagonale, on se battait plutôt pour un refuge en bas de page, car le grand écart du regard était notre magot, notre mot de passe-impasse. Je me souviens ensuite et sans fin des poussées d'enfer où il y aurait mise à bas. Y étais-tu? Et surtout - réponds, il y va de ma vie que distingue-t-on au loin si aisément? Est-il possible que l'on ne discerne que ce qui fut proche un jour, ce qui est sûr et incertain, ce qui est hors d'atteinte et nous éblouit néanmoins? La parole rampante n'a guère besoin de prise. Elle s'accroche à la plante des pieds et s'offre à ce qui marche vers le déracinement. La parole rampante décide d'une calligraphie incapable de flirter avec l'éphémère et, comme dans un véhicule soudain privé de chauffeur, les fantômes passagers ballottés par les ornières du texte et par un sentiment diffus d'effraction
- à la ligne hurlent de joie et d'effroi. Dissidence calligraphique ou simple coïncidence: - laissons l'accident trancher. La parole rampante s'oblige à formuler un tas de mauvaises questions - pas assez inquiétantes vu qu'elles n'inquiètent personne. L'attrait des sources, des bouches, des lits et des embouchures vaut-il que l'on s'y attarde? L'abstraction et son concret et les ruines attenantes me conseillent, tour à tour, de m'écarter du passage, et d'écourter mon séjour. J'attends la fin la nuit pour me napper de rosée sachant que de ton côté avril mais sans te découvrir d'un fil. Ainsi soit-il? Ô dame au jardin boudeur Ô dame à la tour flambante Ô dame au corps de métier Ô dame à l'esprit de corps Ô dame chercheuse d'or entre limon et gravier Ô dame aux mains dégantées Ô dame aux mains d'ivoire fissuré Ô mains aux doigts édentés Ô mains qu'il fallait toucher - dame! - pour croire et pour s'y fier. Ceux qui naissent se tiennent à l'entrée des entrailles, il voient au travers de fonds de bouteilles, et leur vin amniotique, vitreux, visqueux, te ferait boire du dedans. Ils se rappellent qu'il fut un temps où tu semblais avoir envie de leur montrer ton pays,
mélangeant le c'est et l'est-ce et la fumée sans feu à l'autre, toujours autre à chaque volute. Ils se rappellent et la force de frappe de l'oubli est pourtant très diabolique et plus marchande je tue, car ses modes d'omission, d'étourderie, de manquement, se donnent des airs de conclure les meilleures affaires - celles où l'on fixe son prix et on compose avec la réalité. Ils se rappellent que tu ne lésinais pas sur la palabre, chipotant pour ne pas pleurer, ça ils sont prêts à l'admettre, case de départ oblige. Ils se rappellent le désir ardent d'être attendus et que cela leur paraissait délicat, pas courtois, délicat, grossier, sans-gêne, malappris, voilà. Ceux qui naissent n'en meurent pas moins, au contraire, ils restent dans l'anti-climax et ça les regarde plus qu'on ne saurait l'avouer. Ils entreprennent d'escalader des montages en miroir et récoltent sept ans de malheur - qui aura brisé quoi et dans quelle mémoire garde-t-on amoureusement les éclats des cimes pour se blesser avec en s'entendant dire: avec le temps espérez le pire? Ceux qui naissent soudain ne saignent plus. Il leur arrive de n'être pas arrivés.
C'est ça. Ils se rendent comptent que leur voix est restée amarrée à un quai - introuvable ce quai alors qu'on les avait rassurés sur leur état et vanté les bienfaits du voyage, etc. Ceux qui naissent ne se détournent pas mais on leur reproche d'en avoir trop bavé, c'est salissant et répugnant, cette TRACE et que l'on puisse la suivre aussi. Ceux qui naissent te laissent des dessins de la main gauche, des seins à la poêle des silences de friture. Qui éclaboussent.