RH_2023_april

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OPERATIONS

LES ACADÉMIES INTERNES, OUTILS DE RECRUTEMENT

SAMUSOCIAL COMMENT RÉUSSIR SA TRANSFORMATION?

AVRIL 2023 / nr 298 / 29 e année / P509202 / Magazine bimestriel / Bureau de dépot: Gand +
MARC CROONEN VANDEMOORTELE

Depuis bientôt 40 ans, nous aidons les individus et les organisations à se surpasser. Avec vous, nous construisent et développent le capital humain de votre organisation. On attire le talent le plus pertinent, dans quelque contexte que se soit, et guide vos candidats et vos employés dans leur développement et dans leur croissance afin qu’ils puissent donner le meilleur d’eux-mêmes.

De plus, nos experts vous conseillent dans le domaine de la gestion des rémunérations et notre département R&D reconnu dans le monde entier développe en permanence des outils RH novateurs, avec lesquels vous pouvez prendre des décisions RH éclairées.

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On me pardonnera de recycler un jeu de mot largement utilisé par les membres du personnel de Delhaize qui s'opposent aux plans de la direction de franchiser les 128 magasins intégrés. Une décision rendue publique au début du mois de mars et qui continuait à faire des vagues à la fin du mois de mars.

«MALHAIZE»

Autre exemple, cité par Ralf Caers (lire page 16): le parc d'attractions Plopsa. Le quotidien De Tijd a révélé l'existence d'un management toxique dans cette entreprise et a réuni les témoignages de plus de cinquante anciens collaborateurs. Ils ont fait état de harcèlements, d'humiliations et de non-respect des jours de vacances.

Quelles qu'en soient les motivations, cette restructuration se passe visiblement mal. Pouvait-il en aller autrement? Peggy De Prins, professeure de l'Antwerp Management School, donne l'exemple de JTI-Gryson, une usine de tabac de Wervick. Ici, la bombe a explosé de façon inopinée en octobre 2014, raconte-t-elle (lire page 42). La fermeture de l'usine a été annoncée à l'horizon 2018. Mais en attendant, elle devait continuer à tourner à plein régime. «Ici, c'est un autre récit qui commence, celui de la manière de transformer des emplois fragilisés par la crise en carrières durables, en nouant un dialogue social intensif.»

Outre une communication rapide et transparente, la réussite de l'opération s'est appuyée sur l'engagement d'investir dans la formation et l'employabilité des travailleurs. «L'objectif ultime était celui-ci: six mois avant la date de son licenciement, chacun, salarié ou temporaire, devait savoir ce qu'il allait faire par la suite.» Du coup, si le choc est resté douloureux pour les salariés de l'usine, au moins, il a pu être amorti par une politique soucieuse de l'avenir de ces personnes dont la perte d'emploi était annoncée.

Pour corriger la situation, trois choses sont attendues de la part de la direction de Plopsa: de la compassion, de la transparence et une volonté d’agir. Les deux derniers points semblent sincèrement rencontrés. Mais pour ce qui concerne la compassion, les choses pourraient aller mieux. Cet élément est cependant crucial: un manque d'écoute des victimes se transforme en une diabolisation apparente, ce qui renforce la perception d’une culture toxique. Il appartient donc à la GRH de renverser la vapeur et d’exprimer de la sympathie envers les victimes. Et, en tout cas, d'enquêter sérieusement sur chaque cas.

Bien sûr, chaque conflagration sociale est différente. Et doit donc s'apprécier au cas par cas. Mais certaines leçons peuvent sans doute être tirées de ces exemples. ¶

avril 2023 / HR magazine 03 EDITO FRANÇOIS WEERTS
«Comment transformer des emplois fragilisés par la crise en carrières durables? En s'appuyant sur un dialogue social intensif.»
« »
BORDEAUX 2023 HR CONGRES 11 - 12 MAY CLAIM YOUR TICKET HERE

34 TABLE RONDE Atteindre le bien-être physique et mental

13 SHOPPING SANTÉ PHYSIQUE ET MENTALE

24 OPERATIONS Réintégration après un burn-out

«Nous avons encore du pain sur la planche

08 VISION

Marc Croonen

«La durabilité est un avantage compétitif, y compris pour la GRH»

20 STRATEGY

Samusocial: comment réussir sa transformation?

40 OPERATIONS

On n'apprend pas sans psychologiquesécurité

42

QUE DIT LA SCIENCE SUR LES FERMETURES DURABLES

28 OPERATIONS

«La jeune génération cherche des opportunités de développement»

+

03 ÉDITO

17 COLOPHON

49 DROIT ET EMPLOI

50 UN·E ÉTUDIANT·E EN POINT DE MIRE

avril 2023 / HR magazine 05 SOMMAIRE
Bart Mariman, ISS Facility Services Sarah Van Marcke, Unilin Freya Van Grinderbeek, Kellogg’s Eva Devos, Publicis Groupe
«Osez remettre vos convictions en question.»

/CHERCHEZ L'HISTOIRE CACHÉE/

Le germe de ma passion pour les marchés aux puces remonte à mes années d'études. J'exerçais un job d'étudiant dans un magasin de meubles et malgré mon absence d'expérience, j'étais amené à donner des conseils d'aménagement aux clients. Ce qui a nourri mon intérêt pour l'esthétique. Mon époux éprouve la même passion: il s'occupe de rénovation et de décoration intérieure. Quand nous sommes ensemble à l'étranger, nous ne manquons jamais de visiter les magasins de seconde main. Ce fut le cas l'été dernier en Norvège. On y découvre des objets très différents de chez nous. Nos enfants ont attrapé le même virus. Se balader dans une brocante est un moment de détente, l'occasion de se vider la tête, de découvrir de nouvelles perspectives. Qu'est-ce que j'espère dénicher dans ces marchés aux puces? Jamais rien de concret. Quand je cherche quelque chose de trop précis, je suis certaine de rentrer bredouille. Je rêve toujours de tomber sur la perle rare, un accessoire design à petit prix, une œuvre d'art originale par sa forme ou sa couleur. Mais avant tout, un objet qui a une âme. Avec une histoire cachée. Pour m'émerveiller de sa beauté.

L'intérieur de notre maison compte de nombreux trésors vintage qui nous ont tapé dans l'œil. J'apprécie l'ambiance qu'ils composent. Quand des amis viennent manger chez nous, le charme éclectique des plats et des assiettes dépareillés me rend heureuse.

Deux fois par an, nous nous offrons un voyage le dimanche jusqu'à la place du Jeu-de-Balle à Bruxelles. Un marché authentique, pas une foire commerciale d'objets d'occasion. Nous y rencontrons à chaque fois des gens d'un autre univers que le nôtre. C'est un endroit inclusif que j’aime beaucoup. Je me rends alors compte que le monde est plus vaste et plus varié que mon milieu professionnel.

Dans mon métier, je m'efforce de créer un environnement de travail qui soit ouvert comme la place du Jeu-de-Balle. Collaborer avec des personnes qui ont des racines différentes, qui partagent la même passion pour nos projets: c'est une vraie valeur ajoutée. Même s'il n'est pas toujours facile de rester ouverte à la diversité des opinions tout en visant un objectif commun. Le danger des silos n'est jamais loin. Travailler sur ce qui nous relie est le fil rouge de notre organisation.

Nous recherchons aussi cette unité dans l'équipe de direction de Lantis, même si nous osons remettre en cause nos convictions mutuelles. Nous apprécions les perspectives des collègues qui viennent de secteurs différents. En fait, je reconnais cette même curiosité et cette même ouverture dans un marché aux puces dominical. ¶

avril 2023 / HR magazine 07 INSIDE STRATEGY
ID Caroline Vanwanseele — FONCTION HR Director & Corporate Services de Lantis
texte: gert verlinden / photo: wouter van vaerenbergh

La durabilité est un avantage compétitif, y compris pour la GRH

Le groupe alimentaire Vandemoortele intègre la durabilité dans sa stratégie et veut même en faire un avantage compétitif. À cet égard, son rapport annuel intégré vient d'être récompensé. Ce rapport contient de nombreuses données qui concernent spécifiquement les ressources humaines. Les explications de son CHRO, Marc

texte: jo cobbaut / photos: juan wyns

La stratégie de durabilité de Vandemoortele se traduit dans de nombreuses dimensions de l'activité de l'entreprise: ses produits, ses services, sa gouvernance … Comment cette volonté se décline-t-elle concrètement?

Marc Croonen: «Dans notre département des huiles, des graisses et des margarines, nous nous concentrons sur l'innovation dans les produits végétaux, la réduction des emballages, etc. Dans notre division boulangère, nous souhaitons rendre nos produits plus sains, par exemple en diminuant le sel et le sucre. Dans nos usines, nous abaissons notre empreinte carbone et notre consommation d'eau et d'énergie. Dans une perspective sociale, nous nous efforçons de créer des lieux de travail sûrs et inclusifs où nos collaborateurs peuvent s'épanouir personnellement et professionnellement tout en profitant d'une rémunération équitable. Au niveau de la direction, nous voulons mettre en place les standards éthiques les plus exigeants, en mettant en œuvre les principes des Nations unies (Global Compact) et en respectant une grande transparence. La durabilité devient également un élément intrinsèque de notre politique commerciale. C'est pour nous une façon de nous distinguer de nos concurrents.»

Pourquoi est-ce vous, au poste de Chief Human Resources Officer, qui êtes responsable de la durabilité dans le comité exécutif?

Marc Croonen: «Je suis passionné par la durabilité et je joue un rôle dans ce domaine depuis longtemps. Nous avons décidé de porter nos efforts à un niveau plus stratégique. De plus, nous souhaitions intégrer la durabilité dans nos pratiques professionnelles quotidiennes. Responsable de la GRH et de la communication, je m'efforce de faire comprendre à nos salariés toute l'importance de la durabilité. Et nous rendons publics nos résultats dans notre rapport annuel.»

Que signifie la durabilité pour la GRH?

Marc Croonen: «Nous avions déjà un cadre global que nous avions baptisé People 4 Growth, Growth 4 People et Leaders 4 Growth . Dans chacun de ces domaines, nous avions formulé des objectifs concrets. People for Growth exprime notre stratégie qui vise à recruter, développer et motiver les bonnes personnes pour garantir le succès de l'organisation. Growth 4 People s'intéresse à la sécurité et à l'inclusion de l'environnement professionnel pour permettre aux salariés de progresser, d'apprendre et de

HR magazine / avril 2023 08 VANDEMOORTELE STRATEGY
«Vous devez procéder à des mesures pour rendre vos objectifs clairs.»
Marc Croonen
ID
— FONCTION Human
Vandemoortele
Marc Croonen
Resources, Sustainability and Communication

s'épanouir. Et comme beaucoup de choses dépendent de la qualité du leadership, nous avons lancé notre programme Leaders 4 Growth . C'est l'association de ces trois priorités qui rend notre politique RH durable. Et nous fixons des objectifs mesurables pour chacune d'entre elles. Nous interrogeons aussi nos collaborateurs pour savoir où nous en sommes par rapport à la durabilité.»

COMBLER L'ÉCART ENTRE LES GENRES

Concrètement?

Marc Croonen: «Dans le cadre de notre programme Growth 4 People, nous voulons savoir si nos salariés sont traités équitablement dans tous les domaines. Cette préoccupation se traduit notamment par notre intention d'éliminer l'écart salarial entre les genres. Aujourd'hui, nous sommes presque parvenus à le combler entièrement. Nous voulons aussi que chacun puisse progresser. Du coup, nous prévoyons un certain nombre d'heures de formation. Grâce à une matrice des compétences, nous suivons l'évolution du niveau de compétences. Nous avons bien sûr prévu des objectifs en matière de sécurité, de bien-être, de mobilité interne, d'opportunités internationales, de traitement des plaintes pour harcèlement, etc. La logique durable était déjà présente dans notre stratégie RH. Ce qui a changé aujourd'hui, c'est que nous rendons compte précisément de nos réalisations dans ces domaines.»

Quels sont les premiers résultats?

Marc Croonen: «Nous constatons une forte progression. L'écart salarial s'est considérablement réduit et le nombre d'heures de formation a nettement augmenté. Dans le cadre de notre gestion des performances et du développement, presque tout le monde a bénéficié au moins une fois par an d'un entretien de développement. Nous avons commencé par une participation de 60% chez les cadres pour arriver aujourd'hui à près de 100%. Pour la population totale, nous en sommes désormais à 93%, ouvriers inclus. Tous les salariés ont aussi un entretien sur ce que nous nommons le professional journey. Chaque manager s'entretient avec les membres de son équipe sur

LE

DÉPARTEMENT RH

::

leur prochaine étape professionnelle. Cela concerne aussi l'ouvrier du four ou celui de la ligne d'emballage. Nous discutons avec celui qui veut aller plus loin. Nous pouvons lui proposer des formations pour apprendre une nouvelle technique … En trois ans, nous sommes passés dans ce domaine de 0% à 100%. Nous surveillons ce processus plusieurs fois par an.»

Responsables RH: 8

HR-Business Partners: 28

Experts RH: 10 (juridique, formation, relations sociales, rémunération et avantages extralégaux ...)

Système d'information RH: 4

Gestion des salaires: 18

Hygiène, sécurité et environnement: 10

MESURER, UNE DISCIPLINE ACQUISE

Cette attention ne provoque-t-elle pas un surcroît de travail?

Marc Croonen: «Non, tout se fait automatiquement via SuccesFactors, notre plateforme RH. Un exemple récent: pour tenir compte des résultats de notre sondage sur l'engagement de nos salariés, chaque responsable de site doit réaliser un plan d'action. J'ai reçu 84 rapports sur les 87 qui sont prévus. Les trois manquants ont été immédiatement rappelés à l'ordre. La mesure et le suivi sont une discipline que nous avons acquise, elle est au cœur de notre organisation.»

Aurélie Comhaire

HR magazine / avril 2023 10 VANDEMOORTELE STRATEGY
«Nous avons commencé par sonder les stakeholders internes et externes sur différents sujets. Nous avons reporté dans une matrice les points qui sont les plus importants pour eux.»

UN RAPPORT ANNUEL INTÉGRÉ

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Vandemoortele a publié l'année dernière pour la première fois un rapport annuel intégré qui comprend à la fois les chiffres financiers et ceux de la durabilité. L'entreprise a reçu un prix à cet égard. Comment le document a-t-il été composé? Comment évoluera-t-il?

Marc Croonen: «En toute honnêteté, l'accouchement fut difficile. C'était la première fois que nous intégrions toutes ces données dans notre rapport annuel. Il y avait encore une part d'incertitude l'année dernière dans les directives européennes, comme l'EU Taxonomy et la toute nouvelle réglementation CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive). Après avoir réalisé ce premier rapport en équipe, nous sommes plus sûrs de nous. Tout sera plus facile pour la prochaine édition.»

Herman Van Steenstraeten (CFO): «Ce projet est né de l'impulsion du conseil d'administration. Y siègent des membres de la famille de la cinquième génération qui sont très sensibles à la thématique de la durabilité. Ces jeunes gens sont beaucoup plus concernés par ce sujet et ils ont de l'influence sur leurs parents plus âgés. Le conseil d'administration a donné le mandat à la direction d'investir dans la durabilité dans le cadre d'une stratégie intégrée de rentabilité financière et de durabilité.»

Comment créez-vous le contenu de ce rapport?

Aurélie Comhaire: «Nous avons commencé par sonder les stakeholders internes et externes sur différents sujets. Nous avons reporté dans une matrice les points qui sont les plus importants pour eux. Nous interrogeons nos salariés, mais aussi des parties externes, comme les clients, les distributeurs, les fournisseurs, les ONG (parmi lesquelles le WWF) et des universitaires qui ont beaucoup d'expertise en la matière. Nous discutons alors des résultats dans des groupes de travail internes pour fixer nos objectifs. Nous avons fini par sélectionner cinq thèmes: les achats, le climat, l'emballage, la santé et l'alimentation, la transparence de nos produits. Nous faisons également attention à d'autres sujets. Nous surveillons tous les objectifs de développement durable, mais nous avons synthétisé notre stratégie de durabilité en trois priorités: l'alimentation équilibrée, la protection de la nature et l'amélioration de la vie. Ces thèmes coiffent 48 objectifs et KPI que nous suivons de près. Les chiffres de durabilité n'ont pas encore la même maturité que les résultats financiers. De nombreuses données sont encore collectées manuellement.»

Le nom des programmes Growth 4 People et People 4 Growth suggère que ces entretiens ne se limitent pas à des objectifs opérationnels?

Marc Croonen: «Bien sûr, le pourquoi est essentiel. Et ces entretiens concernent également le développement personnel et le parcours professionnel. Nous voulons savoir comment nos collaborateurs envisagent leur carrière. Veulent-ils se maintenir dans leur fonction, approfondir ou élargir leurs compétences, prendre la direction d'une équipe? Environ 60% de nos salariés ont envie de continuer à se développer dans leur fonction actuelle. Certains veulent approfondir leurs compétences, en se spécialisant ou en acquérant une expertise. Ceux qui veulent élargir leur champ d'action peuvent par exemple passer du département commercial au marketing, ou des fours aux machines d'emballage. Enfin, d'autres préfèrent la progression verticale classique pour devenir leaders. Nous organisons une fois par an ces entretiens de développement personnel.

Herman Van Steenstraeten: «Je dois avouer que je n'y connaissais pas grand-chose en durabilité quand nous avons lancé notre projet. J'ai dû étudier sérieusement le sujet. Le département financier a l'habitude des rapports et nous cherchons à les automatiser à l'aide du logiciel Power BI. Cet instrument consolide automatiquement les données financières et opérationnelles en les extrayant de divers systèmes. Il faut aussi s'entendre avec les différents responsables dans l'organisation sur la qualité et le timing des données. Nous voulons qu'un KPI (par exemple les émissions de CO2, la consommation d'eau ou les déchets) soit mesuré et qu'il nous soit communiqué en respectant les mêmes règles dans toutes nos implantations. Autre aspect de la publication d'un rapport intégré: les deadlines sont absolues.»

Marc Croonen: «La professionnalisation est indispensable pour le rapportage, mais aussi pour la maîtrise effective des paramètres de durabilité. Vandemoortele insiste par exemple sur des science based targets. Il est donc essentiel de mesurer les émissions de CO2, la consommation de gaz, d'électricité, etc. Une fois que ces chiffres sont connus, vous pouvez passer à l'étape de la gestion et de l'amélioration. C'est notre engagement: nous mesurons pour gérer, pour atteindre nos objectifs et enregistrer des résultats.»

Ils abordent les objectifs professionnels de l'individu mais aussi sa carrière dans toutes ses dimensions, la correspondance entre ses valeurs personnelles et celles de la société, etc. Au début de chaque année, nous fixons des objectifs de développement professionnels et personnels. Nous souhaitons que l'entretien sur le parcours professionnel ait lieu au printemps. Ce qui donne des informations pour notre talent review. À l'automne, nous discutons de la matrice de compétences qui servira de base à l'entretien de développement. Je souligne que cette approche s'applique au personnel au sens large, elle n'est pas réservée aux cadres. C'est une manière de rendre notre GRH plus durable.»

Parlons des conditions de travail. Avez-vous des KPI pour l'impact social externe?

Marc Croonen: «Ici, nous nous intéressons avant tout aux fournisseurs de produits importants comme l'huile de palme, le soja, etc. Nous contrôlons sur place, avec l'aide de

avril 2023 / HR magazine 11
«Je dois avouer que je n'y connaissais pas grand-chose en durabilité quand nous avons lancé notre projet. J'ai dû étudier sérieusement le sujet.»
Herman Van Steenstraeten

partenaires, la manière dont nos fournisseurs traitent leurs collaborateurs locaux. Nous travaillons avec des entreprises fiables, comme Cargill, pour l'huile de palme. Nous vérifions s'ils formulent les mêmes attentes à l'égard de leurs propres fournisseurs. Nous déroulons cette approche pour les matières premières les plus critiques, comme le cacao, le soja, les œufs et la farine.»

Vous liez aussi la rémunération aux critères de durabilité. Vos managers doivent-ils respecter des KPI en matière de durabilité?

Marc Croonen: «En effet, nous venons de procéder à l'évaluation de la durabilité pour 670 managers. Nous les avons subdivisés en une quinzaine de groupes très homogènes avec des KPI et des cibles sélectionnées parmi nos trois grands objectifs: l'alimentation équilibrée, la protection de la nature et l'amélioration de la vie. Ces trois objectifs sont traduits en douze critères de durabilité. Chaque cadre a donc trois ou quatre objectifs durables. Les résultats sont plutôt bons.»

Il n'y a donc pas eu de suppression de bonus?

Marc Croonen: «Si, mais l'engagement global est élevé: la plupart des cadres ont atteint leurs objectifs.»

Par exemple?

Marc Croonen: «Un département n'a pas atteint ses objectifs en matière de réduction du CO2. Et certaines équipes n'ont pas obtenu leurs objectifs en sécurité.»

Ce choix stratégique en faveur de la durabilité bénéficiet-il à votre marque d'employeur?

Marc Croonen: «Oui, cela aide. Peut-être moins pour les opérateurs dans nos usines mais certainement pour les jeunes très qualifiés. Pour eux, ce n'est malgré tout pas le seul facteur. Le travail à faire, les opportunités d'évolution et le salaire restent très importants. Cela dit, nous remarquons que beaucoup ont lu notre rapport. Certains assurent explicitement qu'il fait partie des raisons de leur choix en faveur de Vandemoortele. Nous avons réalisé récemment un exercice avec un bureau de communication. Nous avons interrogé nos collaborateurs RH et quelques recruteurs externes. Résultat? La durabilité est l'un des six critères principaux de notre attractivité. La transparence et la cohérence sont cruciales. Dans notre rapport annuel, nous présentons aussi nos échecs. Notre entreprise est en plein apprentissage, il faut faire des essais et accepter de se tromper. L'essentiel est d'être transparent pour conserver notre crédibilité.» ¶

VANDEMOORTELE ::

Vandemoortele produit de longue date des huiles et des margarines, mais le groupe possède aussi une division de boulangerie qui croît rapidement. Dans chaque région où elle est présente, l'entreprise familiale veut être la première ou la deuxième du secteur pour influencer le marché. Ce qui suppose une croissance constante, organique ou par rachats. Vandemoortele est aujourd'hui entièrement entre les mains de la famille.

• Chiffre d'affaires

1,3 milliard d'euros (2021)

• Bénéfice

33 millions d'euros

• Investissements

40 millions d'euros

• Usines en Europe 29

Pays européens qui possèdent des agences commerciales 12

Agence commerciale aux États-Unis 1

• Exportation dans 95 pays

• Employés 3.891

«Ce projet est né de l'impulsion du conseil d'administration. Y siègent des membres de la famille de la cinquième génération qui sont très sensibles à la thématique de la durabilité.»

HR magazine / avril 2023 12 VANDEMOORTELE STRATEGY

Parce qu'un responsable RH cherche toujours la plus grande valeur ajoutée, nous présentons dans chaque numéro des produits susceptibles de vous faciliter la vie. Une chose est sûre: vous connaissez toute l'importance d'une bonne santé physique et mentale. Ces cinq articles y contribueront sans aucun doute.

composition: sabrina bouzoumita

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avril 2023 / HR magazine 13
/SHOPPING/

Sur la fiscalité, le TCO et l’électrification Avant et après le 1er juillet 2023

L’écologisation de notre parc automobile national a atteint sa vitesse de croisière. En 2022, plus d’une nouvelle voiture sur trois était électrifiée. La marque aux quatre anneaux fait encore mieux: l’année dernière, plus de 50 % de tous les modèles Audi vendus en Belgique étaient électrifiés. Idéal pour embrayer sur l’évolution de la fiscalité automobile en 2023.

1er juillet 2023, vous bénéficiez encore d’une déductibilité de 100% sur la voiture en 2024 et 2025. Toutefois, cette proportion sera progressivement réduite à 75% en 2025, 50% en 2026, 25% en 2027 et 0% en 2028.

Si vous achetez une voiture 100 % électrique en 2023, vous faites encore un meilleur choix. Jusqu’au 1er janvier 2027, vous pouvez profiter de la déductibilité à 100 %, tout au long de la durée de vie du véhicule.

LE TCO EST PLUS IMPORTANT QUE JAMAIS

En raison de la tendance actuelle à l’électrification, la comparaison du coût total de possession (TCO) devient plus important que jamais dans le choix de la voiture de société idéale en 2023.

Pour ce faire, vous devez prendre en compte tous les paramètres clés qui influent sur le coût total de la voiture, notamment:

La progression notable de l’électrification de notre marché automobile l’année dernière était prévisible. Puisque le gouvernement avait décidé en 2021 de réduire progressivement la déductibilité fiscale des voitures de société avec émissions de CO2, la popularité de ces modèles allait de toute façon diminuer. Cependant, les modèles plug-in hybrides faisaient exception à la règle, et continuaient de bénéficier d’une déduction fiscale de 100% sur tous les coûts du véhicule (y compris le carburant) jusqu’à la fin 2022.

LA DÉDUCTIBILITÉ FISCALE DIMINUE ENCORE

Depuis le 1er janvier 2023, la fiscalité des véhicules plug-in hybrides fait l’objet d’une modification limitée. Si ces voitures sont commandées avant le 1er juillet 2023, vous bénéficiez toujours de la déductibilité fiscale maximale de la voiture et de ses frais d’électricité, mais la déductibilité des frais de carburant (essence et diesel) est quant à elle plafonnée à 50%. Commander un véhicule plug-in hybride avant cette échéance reste donc intéressant, la date de signature du bon de commande étant déterminante dans ce processus. Si vous commandez une voiture plug-in hybride après le

→ Différence de prix d’achat

→ Déductibilité fiscale entre modèles électrifiés et non électrifiés

→ Déductibilité des frais de carburant et de recharge

→ Coûts variables d’entretien et d’assurance

→ Taxes de circulation et de mise en circulation

La réforme de la déductibilité fiscale est également un facteur important pour le calcul du TCO. Nous avons effectué une comparaison entre une Audi Q3 45 TFSI e commandé avant et après le 1er juillet 2023. Résultat? Alors que le TCO sur 4 ans de cette voiture est de 46 784 € si vous la commandez avant le 1er juillet, elle vous coûtera 59 413 € si vous signez le bon de commande après cette date. Une différence de 12 629€!

En outre, il reste important de rappeler que les émissions de CO2 ont un impact croissant sur l’ATN mais aussi sur la déductibilité fiscale de la voiture. Pour y voir plus clair, Audi a comparé trois modèles de différentes catégories: l’Audi Q4 e-tron 100% électrique, l’Audi Q3 TFSI e plug-in hybride et la version essence de l’Audi Q3. Avez-vous une idée de la voiture qui offre le meilleur TCO?

HR magazine / avril 2023 14 —
FLEET PARTNER CONTENT

FORTE AUGMENTATION DE L’ATN

Pour 2023, les valeurs de référence pour les émissions de CO2 ont fortement diminué : 82 grammes pour les voitures à essence (contre 91 en 2022) et 67 grammes pour les voitures roulant au diesel (contre 75 en 2022). Conséquence: pour les moteurs à combustion, l’Avantage Toute Nature augmente significativement.

❶ DIESEL

Prix catalogue x [5,5 + ((CO2 - 67) x 0,1)] % x 6/7 x coefficient de vétusté du véhicule

❷ ESSENCE, LPG, CNG,HYBRIDE ET FAUSSE HYBRIDE

Prix catalogue x [5,5 + ((CO2 - 82) x 0,1)] % x 6/7 x coefficient de vétusté du véhicule

❸ VÉHICULE ÉLECTRIQUE, HYDROGÈNE ET VÉRITABLE

PLUG-IN HYBRIDE (DIESEL ET ESSENCE)

Prix catalogue x 4% x 6/7 x coefficient de vétusté du véhicule

Par rapport à 2022, l’ATN annuel augmente de 10%, s’élevant désormais à 1 540 €.

La bonne nouvelle: les conducteurs de voitures plug-in hybrides et de voitures électriques font également une belle affaire en termes d’ATN, car la valeur de référence du CO2 n’est pas prise en compte pour ces modèles. Seul le coefficient de vétusté a un impact sur le montant de l’ATN, et celui-ci évolue également à la baisse.

VOUS AVEZ ENCORE DES QUESTIONS? VOUS SOUHAITEZ RECEVOIR DES CONSEILS OU UN CALCUL PERSONNALISÉ?

avril 2023 / HR magazine 15
2024 2025 2026 2027 2028 €1 4k €1 3k €1 2k TCO
2024 2025 2026 2027 2028 €1 8k €1 7k €1 6k €1 5k €1 4k €1 3k €1 2k TCO
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RALF CAERS

CHRONIQUE

Un nouveau CEO pour Plopsa

Il y a du neuf au pays des lutins! Le quotidien De Tijd s'était fait l'écho des doléances de salariés du parc d'attractions qui se plaignaient d'une culture d'entreprise toxique chez Plopsa. Une avocate, Christine Mussche, a été désignée pour faire la clarté sur la situation. Elle a rendu son rapport: il est impitoyable. Cette culture toxique était une réalité. Steve Van den Kerkhof, le CEO de l'entreprise, en a fait les frais. Son génie des affaires était lié à un coût humain trop grave.

Je retiens une chose de cette saga: les réunions punitives. Au cours de chaque réunion de staff, un participant était soumis à des humiliations publiques. La méthode est connue. Grâce au management coercitif, le manager tente d'orienter le comportement de ses subordonnés en agitant la possibilité de sanctions. Si vous savez par exemple que le plus mauvais élève sera systématiquement invectivé devant tout le monde, vous travaillerez plus dur pour ne pas être le dernier de la classe. Ce management punitif est logiquement associé à une valeur ajoutée à court terme (les salariés se démènent pour éviter la punition), mais aussi à une valeur ajoutée moindre à long terme (les salariés finissent par quitter l'entreprise).

Pour moi, le management par la punition est un excès qui n'a pas sa place dans les organisations modernes. Cela dit, je remarque que l'argument de cette gestion par la punition est désormais utilisé chez Plopsa pour promouvoir une culture plus chaude en s'appuyant sur l'idée que les cultures froides seraient par définition toxiques.

Dans les cultures froides, la compétition entre les employés est souvent centrale. De même qu'une

lourde charge de travail et des journées très longues. Si c'est le fun qui vous anime, ce genre d'entreprise n'est pas pour vous. Mais vous pouvez aussi apprécier cette culture plus froide sans la considérer automatiquement comme toxique. Il y a beaucoup de gens qui acceptent la compétition avec leurs collègues et qui y voient une façon de les aider à se développer. Travailler beaucoup peut aussi procurer une grande satisfaction si vous croyez vraiment dans l'entreprise et que vous voulez vous y consacrer entièrement, tout en préservant votre santé physique et mentale. Cela peut être porteur de sens. Les cultures froides ne sont pas forcément synonymes de pouvoir de coercition et de toxicité.

Il y a cependant quelques éléments clés. D'abord, la personne et l'organisation doivent être à l'unisson. Ensuite, il est nécessaire d'avoir une certaine liberté dans ses options. Celui qui choisit en pleine conscience de s'engager dans la compétition et de travailler dur peut avoir le sentiment d'avoir décidé en toute autonomie d'entrer dans cette entreprise. Il peut se sentir très à l'aise dans cette éthique du travail hardcore et très proche de ses collègues parce qu'ils pensent la même chose que lui. L'approche du patron qui encourage ces attitudes n'est pas toxique en tant que telle. Elle est cohérente avec les valeurs qui prévalent dans l'entreprise.

Une politique devient toxique quand l'individu qui cherche une culture chaude se retrouve dans un environnement froid. S'il a le sentiment de ne pas avoir d'alternative (le licenciement équivaut au chômage), il ne décidera pas en toute autonomie de rester en place. Il sera contraint d'accepter une éthique de

HR magazine / avril 2023 16
«Une culture froide n'est pas forcément synonyme de pouvoir de coercition et de toxicité.»
PROFESSEUR
KULEUVEN
GÉRANT
CABINET DE COACHING
RALF CAERS
EN GRH DE LA
ET DE L'UNIVERSITÉ SAINT-LOUIS,
DU
PASSIEMENTO

travail qu'il n'aura pas choisie délibérément mais qui lui sera imposée dans un rapport de force. Il travaillera au quotidien avec des collègues sans se sentir lié avec eux parce qu'ils incarnent une éthique de travail qui lui est étrangère et qu'ils sembleront former un groupe dont il se sentira exclu.

La bonne nouvelle n'est pas que Plopsa adopte une culture plus chaude mais que l'entreprise a bel et bien décidé de s'attaquer au management par la coercition. Je m'en félicite. ¶

D'OÙ VIENT-ON?

::

Plopsa, le parc d'attractions de la compagnie audiovisuelle Studio 100, a été sous les feux des projecteurs ces derniers temps. Le quotidien De Tijd a révélé l'existence d'un management toxique dans cette entreprise et a réuni les témoignages de plus de cinquante anciens collaborateurs.

Ils ne sont pas tendres et font état de harcèlements, d'humiliations et de non-respect des jours de vacances. Pas vraiment une happy company

Au cours des réunions de staff, par exemple, le CEO, Steve Van den Kerkhof, sélectionnait une victime et l'humiliait devant tout le monde. Steve Van den Kerkhof, qui dirigeait le groupe de parcs d'attractions depuis 23 ans, a fait de Plopsa une machine à cash. Ce groupe possède aujourd'hui dix parcs, dont sept en Belgique. Ces bons chiffres ont été obtenus à un coût humain élevé. C'est en tout cas le sentiment de dizaines de témoins.

Studio 100 a désigné Christine Mussche, renommée pour son expertise des comportements indésirables, pour analyser la culture de Plopsa. Son rapport, qui pointe l'existence d'une culture toxique, a pesé dans la balance. Du coup, Studio 100 a annoncé dans un communiqué de presse le licenciement de Steve Van den Kerkhof.

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TRADUCTIONS

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ISNN 1781-4456

Avec son association Rebron, Nick de Ridder oriente les jeunes en difficulté vers des formations et vers le marché de l'emploi pour les aider à trouver leur place dans la société. Il insiste sur une chose: il est essentiel de s'attaquer très tôt à la problématique.

Dans son enfance, Nick De Ridder avait peu de perspectives d'avenir. Sa vie familiale était compliquée puisque ses parents étaient tous deux toxicomanes. «Au lieu de recevoir de l'aide, j'ai été stigmatisé comme si j'étais coupable alors que j'étais une victime innocente. Quand je retournais à la maison, je résidais chez mon père dans un squat où il n'y avait ni électricité ni chauffage. Ce n'était pas très emballant.»

Nick De Ridder était donc sur la mauvaise pente. Pour survivre, il a commis quelques délits, des cambriolages, des vols. Il s'est retrouvé en prison. Il a été libéré à 29 ans, a payé sa dette et a été embauché dans une menuiserie.

RÉINTÉGRATION

C'est en prison qu'il a commencé à réfléchir. Aujourd'hui, il veut aider ceux qui sont dans une situation difficile afin de leur éviter de connaître le même parcours que lui. Il a alors créé une entreprise de construction et a embauché deux anciens détenus. «Aucun autre employeur ne voulait les engager parce qu'ils avaient trop de trous dans leur CV. Mais quand on a passé dix ans en prison, il est difficile de s'habituer à un environnement de travail.»

Même pour Nick De Ridder, il n'a pas été simple de travailler avec d'anciens détenus, son entreprise a d'ailleurs fait faillite. «Septante pour cent des détenus ont connu une jeunesse désastreuse. Et quand on reste longtemps en prison, on a beaucoup de mal à rattraper le temps perdu pour prendre sa place dans une entreprise.»

«En parlant avec ces jeunes de leurs talents, de leurs qualités et de leurs perspectives d'avenir, je cherche à nouer des rapports de confiance.»

CONFIANCE

Nick De Ridder a dès lors décidé de prendre le problème à la racine en se concentrant sur les jeunes en difficulté. Avec son association Rebron, il les accompagne vers le marché de l'emploi pour qu'ils trouvent leur place dans la société. Il travaille à mi-temps comme coach dans l'institution où il a lui-même passé sa jeunesse. «En parlant avec ces jeunes de leurs talents, de leurs qualités et de leurs perspectives d'avenir, je cherche à nouer des rapports de confiance. De qui ces jeunes accepteront-ils le soutien? De quelqu'un qui a traversé les mêmes épreuves qu'eux, qui en est sorti et qui ressent les mêmes choses qu'eux. Si dans ma jeunesse j'avais rencontré quelqu'un qui m'avait motivé et qui m'avait montré les pièges, ma vie aurait pris un autre tour…»

CROIRE EN SOI

Il a lancé cette activité de coaching dans le centre communautaire de Wingene, et veut l'étendre à Bruxelles, Anvers, Gand, Bruges et Ostende. «Je veux miser sur leurs talents et leurs qualités pour qu'ils rencontrent le succès et qu'ils croient en eux. Ce qui les conduira peutêtre à découvrir d'autres voies. En travaillant intensivement avec eux alors qu'ils sont encore en plein développement, je pense pouvoir sauver beaucoup de jeunes de la prison.» ¶

Nick de Ridder

FONCTION

Fondateur de l'ASBL Rebron

HR magazine / avril 2023 18 STRATEGY SOCIAL
«Miser sur le talent des jeunes en difficulté»
ID
texte: melanie de vrieze

Avec 24% de travailleurs à temps partiel, la Belgique se situe parmi les cinq premiers pays d'Europe. Ce régime apparaît comme positif pour la productivité du travail des entreprises. Il entraîne également une diminution des absences pour cause de maladie. Enfin, il n’existe ni d’impact positif ni négatif sur la rentabilité.

C'est ce que révèle une étude de l'IESE Business School (Barcelone), basée sur les données salariales de SD Worx concernant 800.000 travailleurs de plus de 26.799 organisations du secteur privé entre 2016 et 2022 et sur les données financières de la Banque-Carrefour belge.

LA BELGIQUE DANS LE TOP 5

Le travail à temps partiel est plus courant en Belgique que dans la plupart des autres pays de l'UE: avec 24% de travailleurs à temps partiel, la Belgique se situe dans le top 5 des pays européens.

• Les Pays-Bas sont le leader absolu avec 43%,

• suivis par l'Autriche (30%),

• l’Allemagne (28%)

• et le Danemark à égalité avec la Belgique (24%).

Bien que la popularité du travail à temps partiel ait diminué chez les femmes au cours des dix dernières années, elle augmente légèrement chez les hommes en Belgique. Les femmes sont cependant toujours majoritaires avec plus de 40%. Chez les hommes, on compte plus d'un travailleur sur dix (11% selon Statbel) en 2021. La majorité des travailleurs à temps partiel travaillent en quatre cinquièmes.

DE 20 À 30% DES CONTRATS

Le travail à temps partiel est plus fréquent dans les grandes entreprises: il concerne environ 30% des salariés

BRF

HR (AFTER) WORK

dans les grandes entreprises (plus de 500 travailleurs). Il s’élève à 20% en moyenne. Pour Jeroen Neckebrouck, assistant de l’IESE Business School, le travail à temps partiel a un effet positif sur la productivité des entreprises. «Une augmentation de 10% de la part des travailleurs à temps partiel (par exemple, de 20% à 30%) entraîne en moyenne une augmentation de 2% de la productivité des entreprises, ce qui est considérable. L'effet positif augmente jusqu'à 30% de contrats à temps partiel et reste ensuite stable. Cet effet se manifeste aussi bien dans les grandes organisations plus anciennes que dans les jeunes organisations plus petites.»

RÉTENTION

L'âge des personnes travaillant à temps partiel n'a pas d'importance. Ce qui compte, c'est le nombre d'années d'expérience dans l'organisation: pour les travailleurs ayant plus d'ancienneté, l'effet est plus fort. Enfin, l'effet diffère également selon le secteur: dans des secteurs tels que la construction, l'horeca, l'information et la communication, les services administratifs, les services professionnels scientifiques et techniques et l'immobilier, on observe le plus grand gain de productivité des entreprises avec une augmentation du travail à temps partiel.

Bruce Fecheyr-Lippens, Chief People Officer SD Worx, souligne que les régimes à temps partiel demandent plus d’aménagements à l'employeur en termes de planification, mais ils n'ont pas seulement un effet positif sur le plan individuel. Le travail à temps partiel motive davantage de travailleurs à rester dans leur entreprise et à trouver un équilibre entre vie privée et vie professionnelle.

Brasserie Surréaliste

Il est difficile de rester insensible au charme accueillant de ce nouveau haut lieu bruxellois. Il propose un large éventail de bières au fût, des tapas créatifs, des œuvres artistiques et de la musique, bref, de la nourriture pour le corps et pour l'esprit. L’endroit idéal pour bien terminer la semaine.

Place du Nouveau Marché aux Grains, 22. 1000 Bruxelles brasseriesurrealiste.com

Missy Sippy

-

Dans le centre historique de Gand, ce lieu revisite le Mississippi, patrie du blues, du jazz, du swing et du roots rock. Vous y goûterez de délicieuses préparations à déguster au bar, des cocktails maison originaux et une musique que vous n'écouterez pas sans vous remuer. Let’s boogie!

Klein Turkije 16, 9000 Gent missy-sippy.be

avril 2023 / HR magazine 19
«L’effet du travail à temps partiel est le plus fort pour les travailleurs qui ont le plus d'ancienneté.»
Jeroen Neckebrouck, assistant de l’IESE Business School
Temps partiel: pas d'impact négatif sur la productivité

Comment réussir sa transformation?

La crise migratoire ne cesse de remplir les colonnes des journaux. La guerre en Ukraine a envoyé un flot de réfugiés. Et le sans-abrisme est toujours plus aigu. C'est sur ce terrain difficile qu'interviennent les cinq cents collaborateurs du Samusocial de Bruxelles. Rencontre avec son DRH, Philippe Mercier.

Le Samusocial revient de loin …

Philippe Mercier: «Oui, les choses ont bien changé depuis les polémiques de 2017. Pour redresser la situation, il a fallu mettre en place une toute nouvelle structure juridique. Le Samusocial est désormais une association de droit public régie par une ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale. Et le personnel a été transféré dans cette nouvelle structure juridique en mai 2019. Pour ma part, je suis entré au Samusocial en juillet 2019 avec pour mission de réorganiser le département des ressources humaines. Je devrais dire organiser parce que son fonctionnement en était réduit à une administration des salaires…»

Quelles règles de gouvernance respectez-vous?

Philippe Mercier: «Notre Conseil d'Administration est composé de 5 membres représentants le Collège réuni de la Cocom et 5 autres issus de la société civile, dont le Président. S'y ajoutent deux commissaires du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale qui disposent d’une faculté de blocage. Nous sommes également soumis à des audits externes. En conséquence, le Samusocial se doit de respecter toutes les règles de gouvernance et de transparence qui prévalent dans le secteur public, et va au-delà dans de nombreux cas. Cela dit, nous devons demeurer les plus réactifs possible. Notre âme, c'est l'urgence. Il faut répondre à des situations extrêmes et inopinées. Par ailleurs, nous

collaborons avec des organismes comme BELRefugees (Plateforme Citoyenne de soutien aux réfugiés), MSF, Médecins du Monde et d’autres associations du secteur. Ces partenariats, qui créent une dynamique positive pour tous les acteurs, sont également contrôlés.»

Combien de personnes travaillent pour le Samusocial?

Philippe Mercier: «Au 28 février, nous employions 508 personnes précisément. En été, nous réduisons la voilure pour parvenir à 450 salariés environ. Nous avons 60% de CDI, le reste étant des CDD qui nous permettent d’ajuster le volume de nos effectifs. Quant aux métiers que l'on retrouve chez nous, ils sont très variés. Nous comptons 71 fonctions: beaucoup de travailleurs sociaux, mais aussi des infirmiers et des infirmières, des assistants sociaux, des agents d'entretien, des veilleurs de nuit, des éducateurs…»

Faites-vous des efforts particuliers en faveur de l’insertion socioprofessionnelle, ce qui serait en ligne avec votre cœur de métier?

Philippe Mercier: «Nous estimons en effet qu’il en va de notre devoir. Le Samusocial engage et forme une centaine de personnes par an sous contrat de travail de type Article 60. Par le biais de ces contrats temporaires, des CPAS mettent à notre disposition des personnes en fin de droits afin qu’elles puissent les récupérer. Par la suite, certains sont embauchés au Samusocial sous CDI ou CDD. L'avantage pour eux? Ils retrouvent l’accès à leurs droits sociaux mais surtout, gagnent une expérience professionnelle supplémentaire. De plus, nous mettons un point d'honneur à les aider dans leurs démarches ultérieures. Le département RH dispose d’une cellule d’insertion socioprofessionnelle spécialisée qui les guide dans leur parcours.»

L'ACCUEIL EN HIVER

::

Le 15 novembre 2022, le Samusocial a déployé une capacité supplémentaire de 320 places réparties dans les sites existants, ouvertes 24 h/24, plus propices à la stabilisation et à l’accompagnement vers des solutions de sortie de la rue. Au total, ce sont près de mille personnes qui peuvent être accueillies jour et nuit dans 8 structures pendant la saison hivernale.

HR magazine / avril 2023 20 SAMUSOCIAL STRATEGY
texte: françois weerts / photo: wouter van vaerenbergh

Quels sont les problèmes typiquement RH que vous rencontrez?

Philippe Mercier: «Chez nous, le sens du travail n'est pas en question: chacun sait pourquoi il se lève le matin! Ce qui n’ôte rien à la pénibilité de nos activités. Nos collaborateurs gèrent des problèmes humains et de temps en temps, les chocs peuvent être brutaux. Difficile de dire à un sans-abri que nous n'avons pas de place pour lui. Difficile aussi de s'opposer à un mari qui vient chercher son épouse une arme à la main! En fait, les souffrances que nous gérons sont parfois extrêmes, les violences sexuelles ou intrafamiliales par exemple, et bien d’autres situations humainement douloureuses à vivre. Cela laisse des traces. Donc, l'impact sur le bien-être mental est réel. Et ceci, à tous les niveaux, du veilleur de nuit aux agents de terrain.»

«Notre âme, c'est l'urgence. Il faut répondre à des situations extrêmes inopinées.»

Philippe Mercier

Avez-vous installé une politique pour lutter contre les blessures psychiques?

Philippe Mercier: «Pour la gestion des incidents critiques (agressions, violences, décès dans un centre...), le Samusocial a institué un Plan interne d’intervention psychosociale (PIIP). Ce plan prévoit une intervention d'une équipe interne du Samusocial auprès de travailleurs qui ont vécu un incident critique. Cela consiste à rencontrer les personnes, leur permettre d'exprimer leur ressenti et leur vécu et évaluer avec elles l'éventuel besoin de suivi. Il n'empêche qu'après un incident grave, le retour au travail reste délicat. Être capable de se mettre à distance n'est pas simple, d'autant que nos collaborateurs ont un sens de l’engagement très élevé. Ils peuvent parfois tomber de haut… J’ajoute qu’en cas de violences graves, nous

avril 2023 / HR magazine 21
ID
Mercier — FONCTION
Philippe
DRH, Samusocial, Bruxelles

portons systématiquement plainte. Pour que la personne concernée et le Samusocial soient considérés comme des victimes à part entière.»

Quels sont vos rapports avec les partenaires sociaux?

Philippe Mercier: «Le Samusocial dispose de peu de marge de manœuvre dans les négociations salariales puisque nous devons appliquer des barèmes. Nous sommes contraints par notre environnement de financement: nous dépendons de subventions annuelles dont le cadre est fixé en dehors de l'organisation. Ce n'est pas toujours facile pour les syndicats: leurs revendications doivent souvent être portées à d’autres échelons que celui de l’organisation. Ceci étant, il nous est déjà arrivé de présenter ensemble, syndicat et direction, une proposition auprès de notre ministre de tutelle. Cela dit, nous souhaitons conserver un dialogue continu avec les partenaires sociaux. Nous avons installé un dialogue structuré, organisé les premières élections sociales en 2020 et entrepris des réunions régulières avec la délégation syndicale. Cela ne veut pas dire que nous tombons toujours d’accord et nos appréciations peuvent être divergentes mais nos rapports sont basés sur le respect et la confiance.»

ACTION UKRAINE

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Les premières personnes qui fuient l’agression de la Russie arrivent à Bruxelles le 10 mars 2022. Le Samusocial déploie immédiatement un plan spécifique d’urgence en trois volets.

→ Une équipe mobile sillonne quotidiennement les abords de la gare du Midi et du Heysel pour venir en aide aux réfugiés sans solution d’hébergement.

→ 30 places d’hébergement sont libérées dans l’un des centres d’accueil de transit pour accueillir les personnes les plus vulnérables (familles, femmes avec de très jeunes enfants...)

→ Un appui est fourni au guichet d’accueil de la gare du Midi géré par la Croix-Rouge. Objectif: chercher des solutions d’hébergement temporaire pour les personnes qui arrivent chaque soir et les guider dans leurs démarches pour leur demande de protection temporaire.

Quel est votre objectif aujourd’hui?

Philippe Mercier: «Nous voulons continuer à professionnaliser notre GRH. Nous voulons considérer nos travailleurs sur le terrain comme des partenaires en leur offrant des solutions concrètes. Il faut leur faciliter la vie. En même temps, le fonctionnement historique de notre institution est plutôt organique, il s'agit de s'adapter rapidement à des situations d'urgence. Mais dans les fonctions de support, il est nécessaire d’introduire de la structuration. Ce qui n'est pas toujours bien compris par nos collègues sur le terrain. À nous d'avoir la souplesse suffisante.»

Quel impact a eu la guerre en Ukraine?

Philippe Mercier: «Nous avons participé activement aux opérations d'accueil des réfugiés ukrainiens (lire l'encadré). Nous sommes d'ailleurs devenus un partenaire important de Fedasil qui reconnaît notre expertise et notre fiabilité. Nous ne voulons cependant pas oublier notre cœur de métier: les sans-abris. Et là, la crise est bien réelle aussi. Nous voyons de plus en plus de familles à la rue, des femmes seules et leurs enfants… Une problématique qui ne doit rien à la crise des réfugiés mais qui prend ses racines dans les difficultés économiques de certaines familles. Sans oublier les violences intrafamiliales.» ¶

Le Samusocial dispose d'un numéro d'appel gratuit tant pour les personnes sans abri que les citoyens qui désirent faire un signalement: 0800 99 340. Des dons peuvent être effectués via le site (https://samusocial.be).

HR magazine / avril 2023 22 SAMUSOCIAL STRATEGY
«Chez nous, le sens du travail n'est pas en question: chacun sait pourquoi il se lève le matin!»
Philippe Mercier

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WATERFRONT

Réintégration après un burn-out: peut (beaucoup) mieux faire

HR magazine / avril 2023 24 BIEN-ÊTRE OPERATIONS
texte: patrick verhoest / illustration: tom vanlaere

Toutes les sources concordent: les absences de longue durée provoquées par le burn-out et la dépression ont augmenté en moyenne de 50% depuis cinq ans. Problème: il n'y a pas d'unanimité sur la meilleure manière d'accompagner ces travailleurs pendant leur absence ni au moment de leur retour en entreprise.

Les enquêtes montrent qu'une personne sur cinq qui a souffert d'un burn-out rechute après sa réintégration au travail. En réalité, il reste difficile de guérir d'une maladie dont la définition ne fait pas consensus. Christiaan Vinkers, professeur en stress et énergie du Centre médical universitaire d'Amsterdam, fait partie des sceptiques. Il pense que le burn-out n'est pas une maladie que l'on puisse diagnostiquer de façon fiable et correcte. «Bien sûr, les plaintes des patients sont réelles. Mais pour agir sur ses conséquences mentales parfois graves, il est essentiel d'avoir une définition précise du burn-out. Si nous ne parlons pas tous de la même chose, comment pouvons-nous identifier les causes exactes de ces affections et les traiter efficacement?»

RÉINTÉGRATION

Eva Geluk est chercheuse de l'Antwerp Management School. Ces vingt dernières années, peu de recherches ont été menées sur les actions préventives à entreprendre pour accompagner la reprise du travail. Elle s'est dès lors penchée sur le retour durable au travail de personnes souffrant d'un burn-out, sachant que leur nombre augmente, que la moitié d'entre elles a peur de recommencer à travailler et qu'une sur quatre rechute après son retour. «Quand quelqu'un reprend le travail, il le fait sans que le processus ne soit étudié ni au préalable ni par après», regrette Eva Geluk. «Je pense qu'il faut commencer par analyser ce qui s'est mal passé. Nous devons accompagner la personne qui reprend le travail pendant toute l'année qui suit.»

DIALOGUE

Après de longs entretiens avec toutes les parties prenantes, Eva Geluk pense qu'il est nécessaire de mettre en place une forme de coordination ou de facilitation. Il semble en effet que l'employeur et l'employé campent sur leur position au lieu de nouer le dialogue. «Raison pour laquelle je plaide en faveur d'un facilitateur qui soit capable d'ouvrir ce dialogue indispensable», expliquet-elle. «Ce facilitateur neutre peut aussi atténuer l'insécurité que les salariés ressentent quand ils reviennent parmi leurs collègues.» La chercheuse d'Anvers estime qu'il faut attribuer ce rôle à quelqu'un qui puisse garantir cette neutralité. Ce facilitateur peut être un collègue ou

un spécialiste externe, ce qui sera le plus probable dans les petites organisations.

L'ABSENTÉISME CHEZ BPOST

Comme l'assure An Van Beek, responsable de la prévention psychosociale, bpost se concentre avant tout sur la prévention. Pour elle, dans la problématique du bienêtre, les deux acteurs essentiels sont le collaborateur concerné et sa hiérarchie. «Notre service de prévention interne offre le soutien d'assistants sociaux et de conseillers en prévention. Nous travaillons aussi avec plusieurs acteurs-clés de la GRH. Nous essayons d'aider la hiérarchie et l'individu impliqué de façon préventive et curative.» Pour An Van Beek, le manager est en première ligne pour assister le membre de son équipe pendant son absence et à son retour. Raison pour laquelle il reçoit un ensemble d'outils pour organiser les entretiens consacrés au bien-être. L'idée de ces entretiens est de prendre des nouvelles du collaborateur, de savoir de quoi il a besoin et de déterminer ses problèmes éventuels. «Nous avons aussi des entretiens d'absence. Les managers bénéficient de conseils pour s'adresser aux membres de leur équipe qui sont absents depuis un certain temps. Ces entretiens doivent nous apprendre à améliorer notre organisation et, en définitive, à prévenir les absences. Par ailleurs, nous organisons aussi des entretiens de réintégration au moment où les absents reviennent au travail.»

SECRET PROFESSIONNEL

Ces entretiens doivent permettre aux travailleurs de revenir en bonne forme. Toute l'information utile est stockée dans un outil de santé qui permet à la GRH et aux managers de progresser dans leurs connaissances. Il existe aussi la possibilité pour les membres du personnel de contacter une assistante sociale. «Elle est soumise au secret professionnel et peut intervenir comme intermédiaire neutre et objectif sans que cela ne génère des difficultés pour la personne concernée», explique An Van Beek. «Nous examinons ce dont l'absent a besoin pour se rétablir et plus tard, pour revenir au travail en douceur. S'il y a des problèmes privés, qu'il s'agisse des enfants, de soucis financiers ou d'une séparation, nous cherchons ensemble une solution ou nous renvoyons la personne à un spécialiste externe.»

DOULEURS CHRONIQUES

Trente pour cent des malades de longue durée souffrent de douleurs chroniques. Souvent, ils quittent définiti -

avril 2023 / HR magazine 25
«Dans la problématique du bien-être, les deux acteurs essentiels sont le collaborateur concerné et sa hiérarchie.»
An Van Beek
«Je plaide en faveur d'un facilitateur qui soit capable d'ouvrir l'indispensable dialogue.»
Eva Geluk

vement le circuit du travail. Anesthésiste et spécialiste de la douleur, Marie Van Remoortere (hôpital d'Anvers) veut s'attaquer à ce problème. Depuis 2010, elle voit des patients, parfois jeunes, qui se plaignent de douleurs et qui ne travaillent plus depuis des années. L'impact de l'incapacité de travail sur l'individu est énorme. «En plus de la douleur, on voit aussi apparaître des problèmes financiers, un isolement social et une dévalorisation de soi-même: une spirale infernale de désespoir dont on sort difficilement tout seul. Récemment encore, dans cette impasse que représente l'incapacité de travail, les patients étaient peu suivis, voire pas du tout. Nous voulons apporter une réponse globale à cette situation problématique dans notre centre de la douleur.»

DONNER LA PRIORITÉ À CE QUI EST POSSIBLE

Marie Van Remoortere et ses collègues ont noué un partenariat avec des spécialistes du travail (comme le VDAB...) dans leur région pour accompagner les patients dans leur réintégration, en compagnie de professionnels des soins qui les connaissent. «Nous adoptons une approche sur mesure et nous donnons la priorité à ce qu'il est encore possible de faire avec notre patient. Un coach spécialisé est présent pour guider les patients à travers les obstacles dont ils font l'expérience dans le marché du travail.»

Pour la spécialiste de la douleur, il faut considérer l'incapacité de travail comme un effet pervers de la maladie. «Nous devons inclure la réintégration dès le début dans notre plan d'action pour éviter l'incapacité de travail de longue durée.»

MIEUX PRÉVENIR …

Naturellement, travailler sur la prévention des maladies et du burn-out est la meilleure garantie d'éviter les problèmes de réintégration. Ainsi, l'agence de publicité Publicis invite ses 250 salariés belges à prendre des pauses pendant le travail. Ce qui doit contribuer à rompre le tabou sur le sujet. Mais au début, les salariés ont eu du mal. «On ne prend pas une pause sans éprouver un sentiment de culpabilité», assure Eva Devos co-CEO de l'agence. «Mais si votre enfant a été malade pendant toute la nuit et vous a empêché de dormir, vous avez bien le droit de chercher un endroit isolé au milieu de l'après-midi pour vos reposer. Mais je constate que certains hésitent. J'ai dû moi aussi me faire à cette idée. Aller courir à 16 h me

paraissait étrange. Raison pour laquelle nous avons lancé la campagne Right to Rest. Nous voulons dire clairement à nos collaborateurs qu'ils ont le droit de prendre des pauses. Ils peuvent le faire de la manière qui leur convient le mieux tant qu'ils se reposent.»

UN QUART D'HEURE PAR JOUR

Pour le docteur Paul Koeck, les salariés qui souffrent de stress et de surcharge chroniques ont un impact sur l'équipe et sur l'entreprise, parce que le stress est contagieux. «Le stress d'un équipier ou d'un travailleur dans le rouge va passer d'un collègue à l'autre. Certains dans l'équipe développent progressivement un stress invisible et passent de l'orange au rouge. Les managers n'y échappent pas. Les travailleurs verts, compétents, vont eux aussi passer au rouge, s'ils ne perçoivent pas que leurs collègues sont en difficulté. Ils risquent de se retrouver dans une impasse conflictuelle, dans une spirale négative.»

RESPONSABILITÉ PARTAGÉE

Eva Geluk considère que la reprise du travail est une responsabilité partagée. On voit souvent un collègue qui reprend le travail comme quelqu'un qui s'est consumé tout seul. Il faut découvrir ce qui s'est mal passé sur le lieu de travail. Elle a conçu un scan numérique, une sorte de boîte à outils avec des listes de questions. Les managers et les travailleurs répondent à ces questionnaires. Ils doivent révéler les problèmes pour déterminer ce qui pourrait être amélioré à l'avenir. «Nous analysons alors la culture du feed-back, nous cherchons à savoir si le manager est à l'écoute des signaux que lui envoient ses collaborateurs. Ces informations doivent aider le facilitateur neutre à agir pour aider les patients d'un burn-out à reprendre le travail.» ¶

HR magazine / avril 2023 26 BIEN-ÊTRE OPERATIONS
«Le stress d'un équipier ou d'un travailleur dans le rouge est contagieux. Il va passer d'un collègue à l'autre.»
Paul Koeck
«Nous adoptons une approche sur mesure et nous donnons la priorité à ce qu'il est encore possible de faire avec notre patient.»
Marie Van Remoortere

Les salariés se plaignent du télétravail

Un salarié sur deux regrette le manque de contact personnel avec ses collègues à cause du télétravail. C'est l'une des principales conclusions de l’étude «The Workplace of the Future».

Le rapport The Workplace of the Future est basé sur une enquête commandée à Foresight Factory par EPOS, une société spécialisée dans le matériel audio et vidéo. Cette étude livre quelques résultats préoccupants. Ainsi, moins de la moitié des salariés sont satisfaits de l'équilibre qu'ils éprouvent entre leur travail et leur vie privée (43%). Et près d'un tiers (30%) envisagent une réorientation de leur carrière pour améliorer leur qualité de vie. La moitié des salariés affirment que les contacts avec leurs collègues leur manquent depuis qu'ils travaillent à distance. Cette tendance est la plus marquée chez les représentants de la génération Z et les enfants du millénaire (80%), qui aiment utiliser les espaces physiques pour apprendre, progresser et s'intégrer dans une communauté professionnelle. Ils ne veulent pas se sentir isolés et attendent de leur entreprise qu'elle leur donne toutes les opportunités physiques et virtuelles de se connecter et de travailler ensemble.

RISQUES DE BURN-OUT

Plus de la moitié des salariés interrogés (52%) souhaitent donner une plus grande priorité à leur bien-être, physique et mental, qu'avant la pandémie. Ainsi, ils sont 38% à espérer que leur employeur leur octroie un congé pour résoudre un problème de bien-être mental.

Le burn-out est un phénomène criant. 36% des salariés affirment qu'ils en ont subi un au cours des douze derniers mois parce qu'ils ont travaillé trop dur, une souffrance qui est la plus répandue parmi la génération Z (40%) et les milléniaux (42%). Il faut ajouter que l'insatisfaction augmente en fonction de l'intensité du travail à distance.

SURMENAGE COGNITIF

On attend aujourd'hui des travailleurs qu'ils perfectionnent leurs compétences ou qu'ils en acquièrent de nouvelles. Il y a cependant une réalité: 60% des salariés veulent se former pendant toute leur vie professionnelle. 44% affirment qu'ils veulent progresser dans leur emploi actuel et continuer à s'instruire. S'ils ne peuvent pas apprendre et évoluer dans leur fonction, ils s'en iront pour atteindre leurs objectifs ailleurs.

L'étude souligne aussi le risque de surmenage cognitif à cause d’équipements technologiques médiocres. Dans un environnement bruyant, le cerveau travaille à plein régime pour se concentrer, ce qui provoque 35% d'efforts cognitifs en plus, rien que pour écouter ses collègues. Après un certain temps, une fatigue cérébrale peut apparaître, avec des conséquences sur le niveau de stress des salariés, de la mémorisation d'informations et des prestations.

TOUTE LA COMPLEXITÉ DU MONDE

Selon Jeppe Dalberg-Larsen, président d'EPOS, le monde du travail n'a jamais été aussi complexe. Selon lui, les dirigeants d'entreprise qui veulent investir dans l'avenir de leur organisation et dans celui de leur personnel doivent réfléchir sérieusement à leur stratégie hybride. «Il n'y a pas d'approche uniforme. Nous avons vu ces dernières années à quel point la technologie a révolutionné le travail. Mais elle ne remplace pas la qualité du leadership et celle de la culture. Les leaders sont confrontés à de nouveaux défis. Ils doivent placer leurs collaborateurs au centre et créer une communauté de travail qui favorise leur engagement à long terme.» ¶

avril 2023 / HR magazine 27 BIEN-ÊTRE OPERATIONS
«La technologie ne remplace pas la qualité du leadership ni celle de la culture.»
Jeppe Dalberg-Larsen, EPOS
texte: matthias vanheerentals / image: rawpixel.com

«La jeune génération cherche des opportunités de développement»

texte: lieven desmet

À cause de la pénurie dans le marché du travail, les entreprises sont de plus en plus inventives dans leur recherche des renforts adéquats. Dans le secteur des technologies de l'information et de la communication, la création de sa propre académie est devenue un outil de recrutement indispensable. Les canaux classiques ne fonctionnent plus.

Dans la course aux talents, les petites et les moyennes sociétés informatiques ne font pas partie des cibles prioritaires des jeunes diplômés en technologies de l'information et de la communication. «Une rémunération correcte ou une voiture respectueuse de l'environnement sont des critères importants pour la jeune génération mais ils sont loin d'être les seuls. Ils veulent aussi des

opportunités de développement», affirme Anne Jansen, CEO de Cranium. L'entreprise a été fondée en 2016 et a fait ses débuts dans les conseils spécialisés dans la protection de la vie privée.

Aujourd'hui, l'entreprise emploie 75 personnes dans des agences situées à Zaventem, Gand, Hasselt et Utrecht. «Nos clients sont actifs dans divers secteurs. Nous nous adressons à des PME, de grandes organisations, des administrations locales ou des services publics fédéraux», explique Anne Jansen. La société est en pleine croissance et cherche du personnel en permanence. «Pour attirer des candidats, nous devons offrir des opportunités internes de progression. C'est pourquoi nous veillons à ce que nos salariés se développent en continu.»

HR magazine / avril 2023 28
FORMATION OPERATIONS
«Nous puisons tous dans le même vivier de profils hautement diplômés.»
Anne Jansen (Cranium)

MASTER PROGRAM

La société a donc fondé la Cranium Academy, un centre de formation interne accessible à tous les salariés. Les jeunes diplômés bénéficient d'un parcours spécifique, le Master Program . «Ce programme dure un mois. Il est composé de plusieurs formations données par des experts de premier plan, internes et externes. Ensuite, ces jeunes reçoivent une formation sur le terrain et sont accompagnés dans leurs projets par des consultants seniors. Ils bénéficient ainsi d'un soutien permanent», continue Anne Jansen. «Notre académie et notre Master Program sont des outils de recrutement efficaces, y compris pour les personnes plus expérimentées.»

PeopleWare aussi utilise son académie pour appuyer ses recrutements. Ce développeur de logiciels basé à Lier a été fondé en 1994 et connaît une croissance régulière. «Il est difficile de trouver de bons collaborateurs», constate Glen Staes. «Les meilleurs, ceux que nous recherchons, sont déjà employés ailleurs. Et ils n'ont pas nécessairement envie de bouger. Il ne vous reste plus qu'à espérer qu'ils finissent un jour par se lasser de leur job.»

Glen Staes est manager des compétences de PeopleWare. «Nous concevons des logiciels sur mesure pour des clients dans la fonction publique et dans les secteurs de la construction et de la pharmacie. Nous menons de grands projets qui peuvent durer pendant plusieurs mois, et même pendant quelques années. Nous avons donc besoin de vrais experts.»

L'entreprise compte aujourd'hui soixante employés, dont cinquante-cinq développeurs. Pour soutenir sa croissance, PeopleWare recherche du personnel supplémentaire.

«Nous avons besoin de développeurs, des experts qui sont capables de monter un projet après avoir reçu une analyse», affirme Glen Staes. L'idée est alors venue de créer une académie interne pour fidéliser les juniors et les stagiaires.

L'objectif de l'académie est de donner des chances concrètes aux développeurs débutants sans qu'ils ne soient immédiatement plongés dans le bain. Quatre juniors et trois stagiaires ont participé à la première session de l'académie.

«Ces jeunes sortent des études et ont très envie de faire leurs preuves. Nous ne souhaitons pas brider leur enthousiasme en leur assénant des cours supplémentaires. Nous avons donc opté pour une approche pratique: ils entrent sans attendre dans un projet en étant accompagnés par des collègues expérimentés.»

Legal Studio possède également son académie. Cette société n'est sans doute pas la plus connue mais elle opère dans une centaine de pays et compte, parmi ses clients, de nombreuses multinationales. Filip Corveleyn a fondé l'entreprise avec Anthony Verhaegen, deux avocats qui ont

troqué leur toge contre le costume d'entrepreneur. Avec KLEA (Knowledgeable Legal Entity Automation), ils ont développé une plateforme qui centralise et optimalise les processus juridiques. «Chaque entreprise doit respecter des obligations récurrentes», explique Filip Corveleyn. «Le dépôt des comptes annuels, par exemple, ou la désignation des administrateurs et l'attribution de mandats. Ce sont des formalités à accomplir régulièrement et qui exigent beaucoup de paperasserie.»

Une petite structure est sans doute capable de prendre ces travaux en charge. Mais quand il s'agit de multinationales, on parle alors d'activités dans des pays différents et d'un nombre élevé de sociétés. «C'est notre groupe cible: ces groupes opèrent dans le monde entier et ont besoin d'optimaliser et d'automatiser leurs processus juridiques.»

SURCHAUFFE DU MARCHÉ

Legal Studio est en pleine croissance et travaille au niveau mondial, avec une trentaine de salariés seulement. «Ces profils internationaux viennent de pays aussi différents que l'Azerbaïdjan ou le Costa Rica», précise Filip Corveleyn. «Le cocktail culturel est donc plutôt unique. J'ajoute que la charge de travail est trop forte. Nous cherchons donc des renforts.»

Mais la guerre des talents fait rage. «Nous recevons beaucoup moins de réponses à nos offres d'emploi qu'il y a quatre ans», regrette Filip Corveleyn. «Le réservoir s'amenuise. On sait que le vieillissement de la population provoque une surchauffe du marché du travail mais je pense que ce phénomène est sous-estimé.»

De plus, la barre est placée très haut chez Legal Stu-

avril 2023 / HR magazine 29
Glen Staes (PeopleWare):
«Nous ne voulons pas brider l'enthousiasme des jeunes en leur assénant des cours supplémentaires.»

dio qui a choisi une niche très spécialisée. «Nous recherchons des profils qui ont une formation juridique, qui maîtrisent la gestion de projets, qui sont trilingues et qui ont des affinités avec la technologie. La flexibilité est évidemment un plus!»

Ces profils ne courent pas les rues mais Filip Corveleyn refuse le débauchage dans d'autres sociétés. «Dans ce cas, l'argent devient l'unique motivation, ce qui ne constitue pas une base intéressante pour une relation à long terme.»

D'où l'idée de créer une académie. «Nous avons conçu notre propre programme de formation pour combler l'écart entre l'enseignement et nos besoins. Je le vois comme un mini MBA, qui dure de cinq à six semaines. Ce cursus comprend le partage d'informations, des tests, des exercices, des présentations à donner.»

À la fin, les nouveaux salariés passent un examen formel. «Nous pouvons ainsi engager les bons profils au bon endroit.» L'académie compte actuellement treize personnes.

UNE START-UP SÉDUISANTE

Même une entreprise aussi séduisante comme une licorne éprouve des difficultés dans le marché de l'emploi. Deliverect est l'une de ces licornes belges, une société non cotée qui vaut un milliard d'euros. Cette entreprise de Gand a été fondée en 2018 par Jan Hollez, Jelte Vrijhoef, Jerome Laredo et Zhong Xu. Elle fournit une plateforme logicielle qui permet d'organiser les livraisons à domicile de plats. Elle s'adresse à des acteurs connus comme Deliveroo ou Uber Eats, mais aussi à des fournisseurs locaux ou à des restaurants qui ont leur site Internet.

Deliverect relie les commandes aux modules d'approvisionnement et de commande et à la comptabilité des restaurants concernés. La société compte parmi ses clients 32.000 commerces horeca dans 30 pays. Elle emploie 500 personnes, réparties dans 14 pays. «Nous recevons beaucoup de candidatures spontanées pour les fonctions géné-

ralistes», assure Ingrid De Clercq, Chief People Officer. «Pour les profils informatiques, c'est une autre histoire.» Le problème est comparable dans tous les pays où opère l'entreprise.

Selon Glen Staes, des entreprises comme PeopleWare ne se battent pas à armes égales. «Nous nous heurtons à des géants de la technologie et nous ne sommes pas une start-up sexy qui fait tourner les têtes chez les jeunes diplômés. Mais tout dépend de ce que vous cherchez. Un jeune peut avoir envie de travailler 70 heures par semaine chez Microsoft, nous préférons mettre en avant l'équilibre entre le travail et la vie privée. Nous donnons plus d'autonomie à nos salariés qui profitent néanmoins des avantages d'une entreprise solide. Le meilleur des deux mondes.»

PAS SEULEMENT LA PROGRESSION VERTICALE

Pour Ingrid De Clercq, l'entreprise doit savoir ce qu'elle veut représenter. «Le programme de formation de Deliverect veut faire progresser nos collaborateurs, dans tous les sens du terme. Les salariés privilégient souvent l'évolution verticale, mais on peut progresser en largeur et en profondeur.»

Le programme a fait l'objet d'une communication externe pour le présenter comme un atout supplémentaire de Deliverect. «Il a fallu attendre qu'il soit parfaitement au point. Impossible de livrer un repas si vous êtes toujours en train de le préparer en cuisine.» Filip Corveleyn (Legal Studio) insiste: les canaux classiques de recrutement ne fonctionnent plus. «Notre académie rencontre le succès, même s'il est modeste. Il s'agit d'une opération de longue haleine.» ¶

Filip Corveleyn (Legal Studio)

HR magazine / avril 2023 30 FORMATION OPERATIONS
Ingrid De Clercq (Deliverect):
«Notre programme de formation veut faire progresser nos collaborateurs, dans tous les sens du terme.»
«Nous sous-estimons l'ampleur du vieillissement de la population.»

La réintégration des malades de longue durée ne se fait pas toujours sans heurts. «Ces problèmes sont souvent dus au manque de suivi du phénomène», explique Bart Teuwen, directeur général de Certimed. Il nous donne les trois clés d’une réintégration réussie.

1. «Définissez clairement votre politique et votre vision.

Décrivez les rôles et les responsabilités»

Bart Teuwen constate que de nombreuses organisations échouent dès cette première étape. Lorsqu’il est question de réintégration, tout le monde s’observe, sans que personne ne prenne ses responsabilités. Il est important que chacun sache dès le départ comment l’organisation appréhende la réintégration. «En cas d’absence, il doit être question d’employabilité et de travail adapté. Aujourd’hui, il est trop souvent question de l’aspect médical et de ce qui ne peut plus être fait, alors que l’accent devrait être mis sur ce qui peut encore être fait et sur les possibilités d’employabilité qui en découlent.» L’ambition est de passer au travail adapté et d’explorer les possibilités qui s’offrent encore au collaborateur et à l’entreprise. Bart Teuwen: «La pandémie a joué un rôle important à cet égard. Il a été un facteur d’accélération. Si avant la pandémie, le travail adapté et le télétravail n’étaient pas possibles, les travailleurs du savoir et les employés sont aujourd’hui entrés dans un monde totalement différent. Pourtant, nous constatons que seuls trois employeurs sur dix disposent d’une politique écrite claire à ce sujet.»

Réintégration:

2. “Meten is - alweer - weten: monitor je acties” Lors du suivi de leur absentéisme, il est indispensable que les organisations analysent leurs chiffres et leurs tableaux de bord. Elles doivent collecter suffisamment de données pour corriger leurs procédures. Si bon nombre d’entreprises ont une notion de leur taux d’absentéisme, elles n’ont par contre aucune idée de la fréquence à laquelle leurs collaborateurs s’absentent. «Les entreprises ne suivent pas non plus leur taux d’absentéisme zéro, alors qu’il est important d’être attentif à ceux qui sont bel et bien présents», déclare le directeur général de Certimed. «La diminution de l’absentéisme zéro est révélatrice de l’évolution de la culture et des choix que font les gens. On y voit, par exemple, la personne qui est toujours fidèle au poste, qui remplace d’autres personnes malades et qui prend en charge leur travail, se déclarer soudain malade à son tour. Il faut percevoir ce signal d’alarme.

3. «Discutez ensemble, en veillant à un bon équilibre entre la confiance et les

Bart Teuwen appelle cela l’attention professionnelle chaleureuse, un mélange d’attention sincère lors de l’entretien avec le collaborateur, d’une part, et du suivi des accords pris en matière de réintégration, d’autre part. «Le supérieur hiérarchique doit garder le contact avec le collaborateur qui revient au travail et chercher des solutions, des possibilités d’emploi et prendre des accords à ce

HR LIVRES

Stéréotypes de genre

et inégalités professionnelles entre femmes et hommes

Clotilde Coron

-

Ce livre se fonde sur des données européennes pour étudier la prévalence des stéréotypes de genre, en France comme dans d'autres pays européens, et la manière dont ces stéréotypes contribuent aux inégalités entre femmes et hommes dans la sphère professionnelle. Il s'intéresse aussi aux pratiques de gestion des ressources humaines et aux fonctionnements organisationnels qui favorisent ou au contraire portent atteinte à l'égalité.

Éditions EMS, 2023

Ingénierie des libertés

Être plus libre, lucide et efficace

Maurice Thévenet -

Ce livre permet de comprendre les principes et les rouages de l'ingénierie des libertés et propose de la mettre en pratique dans l'entreprise à l'aide de 22 exercices pour rendre, les managers et leurs équipes, plus libres, engagés, lucides et plus efficaces. Les auteurs ont conçu une gymnastique de l'efficacité, articulée autour de ce qu'ils appellent les exercices en liberté.

Vuibert, 2022

avril 2023 / HR magazine 31
BRF
«Ne négligez pas ceux qui sont au travail»
«En cas d’absence, il doit être question d’employabilité et de travail adapté.»
Bart Teuwen directeur général de Certimed

Vous voulez apprendre? Jouez maintenant!

Le marché du travail est de plus en plus orienté vers le développement en continu de compétences. Bien que les jeux vidéo soient traditionnellement décriés, de plus en plus de voix s’élèvent pour affirmer qu’ils peuvent contribuer au développement de compétences dites «douces», utiles tout au long de la carrière.

Pour vérifier l’existence d’un lien entre la pratique des jeux vidéo et le développement de compétences, Randstad a mené une enquête auprès de 3.763 personnes. En tout, huit jeux vidéo ont été analysés: Minecraft, League of Legends, Apex Legends, Public Grounds Unknown Ground (PUBG), Call of Duty: Warzone, FIFA, Fortnite: Battle Royale et The Legend of Zelda: Breath of The Wild/Links Awakening/Skyward Sword

Les participants étaient ensuite invités à indiquer, dans une liste de douze «compétences transférables», celles qu’ils pensaient développer en jouant au jeu en question. Pour

chaque compétence pointée suivait un test diagnostique, basé sur l'expérience de jeu d'un jeu spécifique, visant à déterminer le niveau de compétence.

NEUF COMPÉTENCES

Pas moins de neuf compétences sur les douze avancées seraient développées en jouant à au moins un (ou plusieurs) des huit jeux vidéo suggérés: leadership, travail d’équipe, communication, sens critique, perception visuelle, facultés multitâches, persévérance, capacité décisionnelle et automotivation. Les trois compétences pour lesquelles aucune preuve de développement n'a été trouvée pour le moment sont la résolution de problèmes, la gestion de conflits et la gestion du temps. Des recherches supplémentaires devraient permettre de clarifier ce point. Sur la base de la théorie, on considère qu'il est probable que l'on trouve encore des preuves de ce phénomène.

ID

Christien Gebruers

FONCTION

Responsable de l'acquisition des talents et de la marque d'employeur de SD Worx

HR magazine / avril 2023 32 FORMATION OPERATIONS
«En utilisant certains jeux, on peut facilement tester des aptitudes professionnelles, comme l'agilité, le dynamisme ou l'auto-leadership.»
Christien Gebruers
tekst: matthias vanheerentals et françois weerts

David

— FONCTION

POUR MESURER LES SOFT SKILLS

BELGIANGAMES

:: La fédération BelgianGames représente les entreprises belges et étrangères actives dans ce secteur. En 2021, on comptait 112 acteurs présents en Belgique.

Christien Gebruers, responsable de l'acquisition des talents et de la marque d'employeur de SD Worx, est convaincu que le jeu permet de mesurer plus efficacement les soft skills d'un candidat. Mieux, en tout cas, qu'une interview classique. «En utilisant par exemple les leadership games, on peut facilement tester des aptitudes professionnelles, comme l'agilité, le dynamisme ou l'auto-leadership. Les compétences douces, qui gagnent en importance, sont mises en évidence par le jeu. En y ajoutant un entretien traditionnel, nous obtenons une image complète de la motivation et des compétences professionnelles du candidat.»

Christien Gebruers souligne que ces jeux sont également plus attrayants pour les candidats parce qu'ils offrent une plus grande variété. «Grâce à la dimension ludique, qui peut s'exprimer dans un quiz par exemple, les candidats sont plus nombreux à répondre à nos offres d'emploi.»

Depuis l'année dernière, SD Worx mise aussi sur le jeu pour faire découvrir à des demandeurs d'emploi des fonctions auxquelles ils n'auraient pas pensé de prime abord.

SD Worx Staffing a donc lancé un jeu pour les préparateurs de commandes et les opérateurs de production.

SD Worx utilise aussi le jeu dans le contexte du travail, mais de façon plus limitée, notamment en organisation des activités pour le département informatique: plusieurs équipes s'opposent pour résoudre un problème concret dans le cadre de hackathons.

FORMER LES CARISTES

Responsable de la fédération professionnelle BelgianGames

David Verbruggen, responsable de la fédération professionnelle BelgianGames, n'est pas surpris par les résultats de l'étude de Randstad. Il souligne que les jeux vidéo sont utilisés depuis longtemps pour la formation. «Ces serious games (ou applied games) sont conçus sur mesure pour atteindre un certain objectif. Je pense que cette formule est intéressante pour développer les compétences douces, ou pour évaluer et tester des candidats. La société Play It (Courtrai) s'est spécialisée dans la conception de jeux destinés à former des salariés. Elle a par exemple développé un jeu qui apprend aux utilisateurs à manœuvrer un chariot élévateur. Dans un autre jeu, les infirmières apprennent à répondre des patients agressifs.»

CONTRE LES PRÉJUGÉS

Selon Daniel Verbruggen, les entreprises ont toujours regardé d'un œil méfiant les jeux qui ont fait l'objet de l'étude

de Randstad. «On dit souvent que ces jeux sont réservés aux enfants de moins de 14 ans. Ils sont accusés d'être violents, médiocres et asociaux. Ce n'est pas du tout le cas. En fait, jouer avec ses amis en ligne est une activité parfaitement sociale. Notre secteur doit affronter beaucoup de préjugés.»

En jouant, on peut apprendre beaucoup de choses. «Dans Fortnite, qui est analysé par Randstad, vous êtes notamment confronté à une situation où vous devez abattre des ennemis», précise David Verbruggen. «Mais ce jeu ne se limite pas à tirer en rafale. Pendant qu'ils éliminent leurs ennemis, les membres de l'équipe communiquent entre eux. L'enquête de Randstad change la perception que l'on peut avoir de ces jeux.»

AUTOMOTIVATION ET TRAVAIL D’ÉQUIPE

::

L’automotivation, le travail d’équipe et le sens critique sont les compétences favorisées par le plus grand nombre de jeux. Les liens les plus forts ont été dégagés entre:

• l’automotivation et Public Grounds Unknown Ground,

• le leadership et League of Legends,

• et la pensée critique et Warzone

Mention spéciale à Fortnite: ce jeu permet de développer le plus de compétences, avec pas moins de six compétences dégagées (communication, sens critique, perception visuelle, automotivation, persévérance et travail d’équipe).

David Verbruggen est convaincu que ces jeux sont bénéfiques pour les compétences douces des travailleurs. «Ces jeux vidéo provoquent des situations stressantes. Vous devez imaginer en permanence de nouvelles stratégies pour survivre. Vous avez besoin de soft skills que vous devez enrichir pour faire face à des situations qui se complexifient. Vous devez aussi répondre à des événements qui surviennent de façon imprévisible. Vous opérez toujours en équipe et vous interagissez avec des joueurs dans le monde entier. Dans les forums, vous pouvez discuter de votre stratégie alors que vous continuez à jouer en temps réel. Ce qui n'est pas mauvais non plus pour votre connaissance des langues.» ¶

avril 2023 / HR magazine 33
«Les infirmières apprennent par le jeu à répondre des patients agressifs.»
David Verbruggen
ID

COMMENT CONCRÉTISER LE BIEN-ÊTRE PHYSIQUE ET MENTAL?

Les participants de notre table ronde sont unanimes: le bien-être physique et mental est avant tout une responsabilité individuelle. Dans le même temps, les employeurs doivent apporter leur aide là où ils le peuvent. Par intérêt économique, mais aussi pour respecter leurs valeurs. Mais comment mettre ces belles intentions en œuvre?

HR magazine / avril 2023 34 TABLE RONDE TECH
texte: jo cobbaut / photos: wouter van vaerenbergh

De gauche à droite

Bart Mariman, Chief Commercial Officer

d'ISS Facility Services

Sarah Van Marcke, Learning & Wellbeing Manager

d'Unilin

Freya Van Grinderbeek, HR-Business Partner de Kellogg’s

Eva Devos, Co-CEO de Publicis Groupe

Quelles sont les priorités de votre organisation en matière de ressources humaines?

Sarah Van Marcke (Unilin): «Le bien-être a toujours eu sa place chez nous. Il fait d'ailleurs partie explicitement des priorités de notre vision durable de notre GRH. Ce cadre plus large est important. Nous travaillons avec 80 responsables RH et HR Business Partners dans le monde entier et dans toutes les divisions. Chacun d’entre eux façonne concrètement la politique de bien-être.»

Eva Devos (Publicis Groupe): «Avec mon co-CEO Karel Vinck, j’ai fusionné huit sociétés de Publicis Groupe pour n'avoir plus qu'un seul compte de résultat, un seul emplacement, une seule culture, etc. Il s’agissait bien sûr d’un processus intense, car ces huit entités belges ont dû renoncer à leur propre identité. J’avais besoin d’une directrice des talents (Veerle Devos) à mes côtés pour créer un environnement de travail où les gens peuvent être eux-mêmes, osent prendre la parole, voient des opportunités d’évoluer et d’apprendre, y compris sur eux-mêmes. Je crois fermement en cette connaissance de soi. Certaines personnes connaissent étonnamment mal leurs propres sentiments, leurs talents et leurs défauts. Pour toutes ces raisons, je voulais également que nous soyons certifiés Great Place to Work. C’est

important dans un secteur réputé pour son approche work hard, play hard.»

Bart Mariman (ISS): «Le public connaît ISS comme une entreprise de services d’infrastructure et de nettoyage, mais ces activités ne représentent qu’environ 60% de notre chiffre d’affaires. Nous sommes également le troisième plus grand fournisseur de services de catering en Belgique. En tant que Chief Commercial Officer, je transmets aujourd’hui à nos clients le message que le Facility Management ne relève pas du CFO, mais du DRH. Le CFO pense trop en termes de prix de revient au mètre carré, alors que le DRH doit aujourd’hui relever des défis qui s'appuient notamment sur l’infrastructure. La génération Z a des attentes professionnelles différentes par rapport aux générations précédentes. Il y a aussi les défis de la pénurie de talents, du travail hybride… Nous ne parlons plus de nettoyage, de restauration, de chauffage ou d’ascenseurs mais d’experience management. Nous en avons récemment eu un bel exemple avec un client. Lorsque le CFO gérait encore le catering, le personnel du restaurant n’était jamais renforcé aux heures de pointe, quelle que soit la longueur de la file d’attente. Aujourd’hui, le département RH s’en occupe pour amélio -

avril 2023 / HR magazine 35

rer l’expérience des travailleurs dans le restaurant d’entreprise. Nous appliquons également cette philosophie dans notre position d’employeur.»

Freya Van Grinderbeek (Kellogg’s): «Dans ma position de HR Business Partner, je suis responsable de 75 travailleurs de Kellogg’s au Benelux. En raison de notre structure matricielle, je reçois également de nombreux signaux de toute l’Europe et du siège à Dublin, où le processus de gestion des talents est en cours de déploiement. Ici, l'accent est clairement placé sur la diversité, l’inclusion et la politique de bien-être. Nous pouvons cependant ajuster les choses localement. Penser en termes d’ESG (environnement, social, gouvernance) est également devenu important pour nous et nous avons un spécialiste local qui se concentre sur ces aspects depuis deux ans maintenant. Le bien-être s’inscrit désormais dans cette dimension.»

LE MODÈLE DES TROIS E

Comment les employeurs peuvent-ils apporter leur soutien à leurs salariés?

Sarah Van Marcke: «L'être humain est au cœur de notre activité. Les choix stratégiques que nous faisons en sont la preuve. Nous n'engageons pas de collaborateurs prêts à l’emploi, par exemple. Nous recherchons la bonne adéquation avec notre culture, le bon état d’esprit. Les compétences peuvent toujours s’apprendre. Nous avons récemment ouvert notre propre centre de formation, The Dive. Nous y organisons des ateliers pour les étudiants des écoles techniques et leurs professeurs. Ou nous formons des personnes sans aucune expérience afin d’en faire des opérateurs de machines. Notre personnel peut suivre des formations en communication, en leadership, dans toutes sortes de domaines fonctionnels, mais aussi des parcours qui favorisent la santé et la résilience. The Dive fournit le cadre, nos travailleurs choisissent en fonction de leur intérêt, de leurs besoins et de leur ambition. Comme Publicis, nous investissons dans le dialogue avec nos salariés pour leur permettre de mieux se connaître, d'identifier leurs talents. Les managers prennent le temps de faire des entretiens de développement et de feed-back. Nous leur apprenons à poser des questions pertinentes. Dans quel domaine excellez-vous? Qu’est-ce que vous aimez faire? Qu’est-ce qui ne va pas parfois? Comment pouvons-nous vous aider? En fait, c’est très simple. Avec

The Dive, nous traduisons les réponses à ces questions en opportunités d'apprentissage. L’idée est que les travailleurs n’apprennent pas seulement par le biais d’un enseignement formel, mais davantage en agissant et en bénéficiant d’un encadrement approprié. Les collaborateurs apprennent aussi beaucoup les uns des autres, surtout de manière informelle. Intervisions, feed-back quotidien, mentorat, communautés et réseaux internes... Notre philosophie s’articule autour des trois E: éducation, exposition, expérience.

Freya Van Grinderbeek: «Nous utilisons aussi ce modèle des trois E, centré sur l’éducation, l’expérience et l’exposition, mais nous avons ajouté le E de l’environnement. Nous aussi, nous avons abandonné le recrutement fondé sur les qualifications au profit de la recherche de l'adéquation culturelle. Kellogg’s développe une culture spécifique autour de la collaboration, car nous pensons qu’elle est liée à l’apprentissage mutuel. Nous considérons également l’environnement comme l’ensemble des systèmes de Kellogg’s dont nous pouvons tirer parti. L'entreprise met désormais fortement l’accent sur les plans de développement individuel. Tous les People Managers reçoivent les outils nécessaires pour mettre en œuvre une approche individuelle, dans laquelle le travailleur suit son propre trajet. Notre rôle est de rendre possible cette réalisation individuelle. Nous recherchons des trajets sur mesure. Pour ceux qui travaillent aujourd’hui dans la vente mais qui sont intéressés par la chaîne d’approvisionnement, nous examinons s’il y a des projets transversaux à venir ou nous recherchons des possibilités de mentorat.»

HR magazine / avril 2023 36 TABLE RONDE TECH
«Notre directrice des talents est explicitement mandatée pour tendre un miroir à tous les membres du conseil d’administration afin de vérifier que nos actions correspondent à ce que nous annonçons.»
Eva Devos

Bart Mariman (ISS): «De notre côté, nous faisons une promesse à nos collaborateurs, qu'ils soient ingénieurs ou agents de nettoyage. Plus encore qu’avant, nous endossons la culture scandinave avec l'accent porté sur le bien-être individuel, le sentiment d’appartenance et le sentiment d’apporter sa contribution personnelle.»

LE RÔLE DES MANAGERS

Quel rôle les managers jouent-ils dans cette approche?

Eva Devos: «De par ma propre expérience, je sais que lorsqu’on apprend à mieux se connaître, on comprend plus facilement les événements et on dirige mieux. Qu’est-ce qui vous donne de l’énergie? Comment êtes-vous dans vos relations? Dans le travail d’équipe? Quel est votre style de leadership naturel, etc. Cette connaissance de soi est importante non seulement pour les managers, mais aussi pour tous les collaborateurs de l’entreprise. C’est pourquoi nous nous efforçons de favoriser l’épanouissement personnel de chacun. Mon objectif est que chaque personne qui travaille avec nous ait appris quelque chose sur elle-même à la fin et ait grandi en tant qu’être humain. Cette dimension est importante pour moi, même dans ma vie privée. En même temps, je suis assez ambitieuse et je veux des résultats. Pour moi, la gestion des talents commence par la création d’un environnement où les travailleurs peuvent être performants et en tirer satisfaction et fierté. J’aime que les gens reviennent sur leur semaine avec satisfaction autour d’un verre le vendredi soir et voient où ils ont eu un impact. Dans la culture centrée sur l’humain que nous avons construite, l’empathie est cruciale. Surtout pour les managers qui sont des modèles. Ma directrice des talents travaille à plein temps sur des projets relatifs aux compétences et au leadership.»

Les valeurs, ce sont les mots de la charte sur le mur Sarah Van Marcke: «Chez nous, elles descendent des murs. Elles se manifestent dans la manière dont nos

collaborateurs montrent chaque jour leur engagement et leur passion. Nous nous appuyons beaucoup sur ces valeurs. Prenez le leadership. C’est là qu’intervient pour nous l’équilibre entre l’empathie et la sollicitude d’une part, et l’ambition et le progrès d’autre part. Nous donnons le meilleur de nous-mêmes. Nous innovons et voulons exceller, mais dans le respect de chacun. De même, l’accent mis sur le bien-être physique et psychosocial part également de ces valeurs.»

Eva Devos: «Nos managers sont formés à diriger en s'inspirant de nos valeurs. Notre directrice des talents est également explicitement mandatée pour tendre un miroir à tous les membres du conseil d’administration afin de vérifier que nos actions correspondent à ce que nous annonçons. Nous parions sur le leadership de l’âme comme contrepoids à une culture axée sur l’ego. Nous observons heureusement les premiers signes d’un revirement, mais l’image des managers demeure généralement celle de personnalités dominantes, décisives, affirmées, uniquement obsédées par les chiffres. En réalité, il est possible d’obtenir des résultats et d’être empathique en même temps. Nous examinons régulièrement comment nos valeurs sont interprétées. Que signifie concrètement pour chacun notre valeur de la curiosité? Un tel exercice résonne encore par la suite, car vous sentez comment vous pouvez intégrer ce sens des valeurs aux réunions, discussions, situations, contacts... Notre conseil d’administration évalue les décisions importantes par rapport à ces valeurs.»

Freya Van Grinderbeek: «Dans tous les cas, la culture est déterminante dans le recrutement et pour cela, nous nous appuyons sur nos valeurs. Elles sont récurrentes dans de nombreux processus tels que les entretiens d'évaluation. Chaque trimestre, nous avons un comité de développement du personnel. Nous discutons brièvement de tous les membres de l’organisation avec l’équipe de direction. Nous examinons les besoins de développement, la mobilité et la possibilité pour les collaborateurs d’aller à l’étranger, ou nous examinons qui a besoin d’un mentor, ou de franchir de nouvelles étapes dans sa carrière. Nous établissons également un lien entre les valeurs et les étapes de la carrière. Par exemple, nos responsables du personnel partent de la valeur fondamentale “we love success” et explorent ce que cela signifie pour les membres de leur équipe individuellement. Chez Kellogg’s, nous sommes également attentifs au rôle d’exemple des leaders. Il est important de montrer l’exemple et un certain nombre de nos programmes internes sont conçus pour aider les managers à agir en fonction des valeurs. Et là aussi, admettre que l’on n’est pas parfait est essentiel.»

avril 2023 / HR magazine 37
«Garantir et créer un contexte sûr est le travail de tous, pas seulement des managers.»
Sarah Van Marcke

NOMMER LES ÉMOTIONS

Eva Devos: «Au cours de sessions particulières, nous nous efforçons de reconnaître, d'admettre et de nommer les émotions, par exemple lorsqu’un projet ne s’est pas bien déroulé. Cette approche est également précieuse dans notre vie privée. Pouvoir mettre des mots sur les émotions est important pour la qualité de la communication.»

Sarah Van Marcke: «Je suis d’accord. Nous n’osons pas toujours nommer les choses difficiles, tant à propos de nous-mêmes que des autres. Pourtant, le fait de montrer sa vulnérabilité est un signe de force. Je pense que nous progressons dans ce domaine.»

Bart Mariman: «Récemment, notre patron européen a utilisé notre traditionnel moment consacré à la sécurité (où sont les escaliers de secours? que faire en cas d’incendie?) pour partager une histoire intime sur sa relation avec sa mère. Notre génération n'en parlait même pas en privé, et encore moins au travail. Mais cela commence à changer maintenant.»

Freya Van Grinderbeek: «Une tâche importante pour les managers est de montrer que le bien-être psychosocial de chacun n’est pas un tabou. Il est de plus en plus important de consacrer du temps au bien-être lors d’une réunion et de ne pas se limiter exclusivement aux questions opérationnelles.»

Eva Devos: «Si je demande à quelqu’un comment il va et que je sens que sa réponse est superficielle, je creuse davantage. Je ne passe jamais directement à l’ordre du jour. Je veux ressentir une connexion, être capable d’évaluer l’énergie mentale des gens.»

Bart Mariman: «À mesure que ces habitudes s’enracinent auprès de nos collaborateurs, nous pouvons faire une démarche similaire auprès de nos fournisseurs. Notre souci du bien-être ne doit pas venir de la crainte de perdre des collaborateurs et du coût de leur remplacement. J’ai du mal à accepter que certaines organisations ne se gênent pas pour mettre beaucoup de pression sur leurs fournisseurs. J’ai récemment écarté un client pour ce motif. C’était une belle référence, mais je ne veux pas épuiser mon personnel avec un client qui a des exigences impossibles à tenir. Ça aussi, c’est un signal.»

Sarah Van Marcke: «Garantir et créer un contexte sûr est le travail de tous, pas seulement des managers. Prendre soin de soi, mais aussi de ses collègues, crée du bien-être. Notre organisation insiste beaucoup sur ce point.»

Eva Devos: «La camaraderie a obtenu un excellent score dans l’enquête Great Place to Work . Ceci est aussi lié au recrutement fondé sur les valeurs, car vous savez alors que vous attirerez des personnes qui ont cette même attitude bienveillante. Mais sans un leadership exemplaire, c’est un processus lent.»

Bart Mariman: «L’atmosphère que vous créez dans une entreprise a aussi toute son importance. J’entends par là la conception des bâtiments et des services. Dans le premier cas, il s’agit de créer un endroit agréable, dans le second, une atmosphère où les collaborateurs sont heureux et productifs. La plupart du temps. Je plaisante parfois en disant que tout le monde a le droit d’être un peu moins satisfait un jour par semaine. Mais pas plus: à ce moment-là, il faudrait se demander si on occupe le bon job. J’entends de nombreuses organisations se plaindre qu’elles n’arrivent pas à faire revenir leurs employés au bureau. Ma sœur, une universitaire qui fait des recherches sur le sommeil, m’a appris qu’un adulte sur trois a des problèmes de sommeil. Eh bien, peut-être que les entreprises peuvent exercer une influence sur cet aspect.»

Eva Devos: «Nous avons lancé notre campagne Right to Rest en décembre. Nous conseillons aux collègues qui passent des nuits blanches — car elles doivent s’occuper de proches ou d’enfants malades, par exemple — de prendre une pause pendant la journée de travail. J’ai remarqué que ce thème était encore tabou. Nous avons également invité deux experts du sommeil. L’un d’entre eux était spécialisé dans le sommeil des parents de jeunes enfants. Même ceux qui dorment bien sont invités à faire des pauses pendant la journée. Il a été prouvé que ce sont justement ces moments de repos qui alimentent les nouvelles idées, ce qui est essentiel pour notre entreprise active dans le secteur de la création.»

Bart Mariman: «Nous avons récemment acheté une série de livres de la pédopsychiatre Karlien Dhondt sur les enfants et les problèmes de sommeil. Je veux l’offrir en cadeau à chaque collaborateur qui attend un enfant, notamment pour dissiper le mythe du mauvais dormeur. Cela n’existe pas. On peut appliquer des trucs pour ne pas avoir à se lever quatre fois par nuit, mais dormir paisiblement, quand on est parent.» ¶

«En tant que Chief Commercial Officer, je transmets aujourd’hui à nos clients le message que le Facility Management ne relève pas du CFO, mais du DRH.»

«Kellogg’s développe une culture spécifique autour de la collaboration, car nous pensons qu’elle est liée à l’apprentissage mutuel.»

HR magazine / avril 2023 38 TABLE RONDE TECH

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ZONE DE CONFORT

On n'apprend pas sans sécurité psychologique

texte: sofie willox / source du tableau: amy edmondson

La sécurité psychologique n'est pas un sujet réservé aux leaders. Les professionnels de la formation aussi doivent prendre ce thème à bras-le-corps. Car, on ne peut apprendre qu'à partir du moment où l'on sort de sa zone de confort. Ce qui est loin d'aller de soi.

Les organisations s'intéressent de plus en plus à la sécurité psychologique de leurs travailleurs. HRmagazine s'était entretenu en 2018 avec la professeure Amy Edmondson de l'université de Harvard University, une chercheuse experte en la matière. Elle définit la sécurité psychologique comme «l'assurance que l'on ne sera pas puni ou humilié quand on exprime des idées, des questions, des préoccupations ou que l'on commet des erreurs». Ses recherches montrent que les équipes qui réussissent font des erreurs, ont des doutes, autorisent l'expression d'opinions contradictoires et se basent sur cette approche pour s'améliorer.

Les résultats des enquêtes mettent en avant quatre facteurs qui influencent fortement la perception de la sécurité. Il y a d'abord la mesure dans laquelle les membres de l'équipe sont prêts à s'entraider, l'attitude par rapport aux risques et aux erreurs, l'attention portée à la diversité et à l'inclusion ainsi que le degré réel d'ouverture dans les entretiens.

La liberté d'expression ne représente que la moitié de la recette du succès. La professeure de Harvard souligne que pour constituer des équipes très performantes, il faut mettre la barre très haut. Un sympathique club de discussion ne suffira pas: il faudra que l'équipe accepte de changer de cap le cas échéant et tienne compte des opinions contraires.

Pour résumer, si on attend que les personnes sortent de leur zone de confort, il faut qu'elles se sentent dans un climat de sécurité. C'est exactement ce qui doit se passer dans les formations.

HR magazine / avril 2023 40 FORMATION OPERATIONS
«Sans sécurité psychologique, les apprenants n'oseront pas sortir de leur zone de confort.»
ZZZ
Challenge
ZONE D'APATHIE ZONE D'ANGOISSE psychologique +
ZONE + - D'APPRENTISSAGE - Sécurité Quand apprenons-nous?

Y A-T-IL ENCORE DES QUESTIONS?

En réalité, il n'est possible d'apprendre qu'à la condition de sortir de sa zone de confort. Ce sera le cas quand on exerce une nouvelle compétence, qu'on regarde d'un œil critique ses modèles de pensée, qu'on pose des questions ou qu'on partage des erreurs.

La théorie est alléchante, la pratique est souvent plus décevante. Cette forme de vulnérabilité se heurte à notre nature humaine. Ainsi, nous voulons préserver notre égo tout en continuant à faire partie du groupe. Nous ne voulons pas perdre la face en participant à un jeu de rôle sans être certains de bien nous en sortir … Mieux! Vous avez déjà entendu cette petite phrase résonner dans un silence de mort: quelqu'un a-t-il encore une question? Et vous semblez être le seul et unique à en avoir justement une! Mais tout laisse à penser que vous ne lèverez pas le bras parce que vous aurez peur de montrer votre incompétence. Et si vous étiez le seul participant de la formation à avoir une opinion qui s'oppose à celle qui domine dans le groupe? On comprend que vous soyez tenté de garder vos réflexions pour vous. Surtout si vos condisciples sont des experts ou vos supérieurs …

PETITS GESTES AUX GRANDES CONSÉQUENCES

Les professionnels de la formation peuvent augmenter la sécurité psychologique dans la préparation de leur cours mais aussi pendant leur intervention. Voici quelques conseils qui découlent des quatre facteurs qui influencent, selon la professeure Edmondson, la sécurité.

- Envoyez à l'avance le programme du séminaire aux participants et expliquez ce qu'ils vont faire, présentez votre approche et donnez la liste des présents. De cette manière, vous éliminerez en amont les inquiétudes sur la composition du groupe ou sur le déroulement des travaux.

- Pour accueillir la diversité (ou la neurodiversité), vous pouvez demander au préalable aux participants de quoi ils ont besoin pour apprendre de façon effective. En tenant compte de cette information dans le corpus de votre séminaire, vous donnerez aux participants un sentiment de reconnaissance et d'inclusion.

- Autre conseil: le matériel. Votre public peut-il se reconnaître dans les exemples et les photos que vous lui présentez? Les schémas classiques hommes-femmes ou employés-ouvriers sont loin d'être les plus représentatifs.

- Et le vocabulaire que vous utilisez? Employez-vous des mots complexes dans votre discours? Rien n'est plus embarrassant que de forcer des participants en séance plénière à vous demander la définition d'un mot.

D'ABORD LA CONNEXION, ENSUITE LE CONTENU

Pendant leur intervention, les formateurs ont de nombreuses possibilités de créer un climat de sécurité. Tout commence par la connexion qui permet à chacun de se sentir bien par rapport au formateur mais aussi par rapport aux autres participants. Il faut absolument accueillir correctement le groupe et bien prendre congé de lui. Je ne parle pas uniquement de décrire les objectifs de la formation: il s'agit aussi de poser des questions ouvertes aux participants pour savoir comment ils se sentent et ce qui les préoccupe. En écoutant sincèrement leurs réponses, bien sûr. Cette approche augmente la confiance, surtout dans les programmes de formation plus longs. Tant qu'il n'y a pas ce sentiment de connexion et de sécurité, le résultat de la formation s'évapore et les participants risquent de se montrer réticents.

Autre recommandation: inscrire les erreurs et les échecs dans les moments d'apprentissage. Le formateur devra s'intéresser à ceux qui se sont trompés, les écouter et toujours leur demander ce qu'ils ont appris de cette erreur, de ce qu'elle leur a apporté dans leur processus d'apprentissage. Cette approche est plus fructueuse que le feed-back visant la correction de la faute. Au fond, le formateur devrait oser se présenter dans sa vulnérabilité dans le groupe. Racontez des histoires d'échec personnel, parlez de ce que ces erreurs vous ont appris. Et si vous commettez une erreur pendant votre formation? Reconnaissez-le ouvertement au lieu d'essayer de la dissimuler. Donnez le bon exemple!

EXIT LE SURHOMME, VIVE LA VULNÉRABILITÉ

Un bon professionnel de la formation ne se présentera donc pas comme un surhomme qui se vanterait de tout savoir. Un vrai facilitateur est capable de mettre son public au défi de repousser ses limites et en même temps de créer un climat de sécurité psychologique. Les formateurs qui admettent leur vulnérabilité, qui écoutent activement, qui autorisent le silence, qui luttent contre les biais et qui encouragent les opinions contradictoires partent du bon pied. ¶

avril 2023 / HR magazine 41 ID Sofie Willox — FONCTION Fondateur de sowegrow
«Notre égo nous empêche de montrer notre vulnérabilité.»

FERMETURES DURABLES

— La GRH adopte généralement un discours positif, qui se place dans une perspective de croissance. Les organisations et leur personnel progressent ensemble, au bénéfice des unes et de l'autre. Mais que se passe-t-il quand une entreprise ne s'inscrit plus dans cette vision positive? Quand une restructuration menace de provoquer un bain de sang social? Quel rôle doit alors jouer la GRH? Prenons le cas de Makro. À une époque, cette chaîne de supermarchés était réputée pour son approche avantgardiste. Au début de l'année, la société est tombée en faillite et 1.400 personnes ont été licenciées. Le personnel a réagi avec beaucoup d'émotion et d'indignation.

LA PAROLE DE L'EXPERT

Que dit la science?

Une récente recherche en Flandre confirme l'optimisme des acteurs économiques sur leurs perspectives de croissance. Les organisations qui connaissent un taux élevé d'engagement de leurs collaborateurs et qui favorisent le dialogue s'attendent plus souvent à une croissance future. Dans ce cas, le risque de faillite est aussi perçu comme plus faible (Notebaert & Delagrange, 2022).

En d'autres termes, le dialogue augmente le dynamisme et les capacités d'innovation des organisations. Le raisonnement peut aussi être retourné: les entreprises en croissance investissent davantage dans leur personnel et se donnent plus de liberté pour entrer en dialogue avec leurs salariés.

FONCTION

Professeure et chercheuse de l'Antwerp Management School

2. Investissez dans les formations et l'employabilité des travailleurs. Soyez ambitieux. L'objectif ultime était celui-ci: six mois avant la date de son licenciement, chacun, salarié ou temporaire, devait savoir ce qu'il allait faire par la suite.

3. Nouez le plus vite possible le dialogue avec les syndicats. Le plan social a été rédigé en trois mois. Les départs anticipés ont été soutenus financièrement.

RÉFÉRENCES

Notebaert, S. & Delagrange, H. (2022).

Ondernemingsenquête: invloed van werknemers of werknemersvertegenwoordigers op managementbeslissingen in ondernemingen in Vlaanderen. Brussel: rapport van de Sociaal-Economische Raad van Vlaanderen/Stichting Innovatie & Arbeid.

McLachlan, C.J. (2022)

Developing a framework for responsible downsizing through best fit: the importance of regulatory, procedural, communication and employment responsibilities, The International Journal of Human Resource Management, 33:1, 16-44.

Entretiens personnels de l'autrice avec des employeurs et des syndicalistes.

Chez Makro, cette communication n'existait pas. En s'appuyant sur les articles de la presse généraliste et les documents syndicaux, on se rend compte qu'à cause de longues années de restructurations, de changements de direction et de scénarios variés de revente, il n'était plus question de récit positif, de perspective de développement. On a vu au contraire apparaître la méfiance, la sclérose et l'impuissance. Le résultat a été une lente agonie désespérante.

Une approche de longue haleine

Une autre issue était-elle possible? Peut-être bien que oui. Prenons l'exemple de JTI-Gryson, l'usine de tabac de Wervick. Ici, la bombe a explosé de façon inopinée en octobre 2014. La fermeture de l'usine a été annoncée à l'horizon 2018. Mais en attendant, l'usine devait continuer à tourner à plein régime. Ici, c'est un autre récit qui commence, celui de la manière de transformer des emplois fragilisés par la crise en carrières durables, en s'appuyant sur un dialogue social intensif.

J'ai eu l'occasion de m'entretenir longuement avec la responsable RH de l'époque, Evelien Vanden Brande (aujourd'hui DRH de Decospan). Voici quelques enseignements que je peux tirer de ces conversations sur une politique de fermeture durable.

1. Communiquez et agissez vite. Jouez cartes sur table, pour que les salariés sachent où ils en sont et ce qui les attend.

4. Organisez un groupe de travail pour réfléchir aux actions que l'entreprise pourrait mener afin de dépasser le simple cadre de l'outplacement. Par exemple, organiser des visites d'autres entreprises et des salons de l'emploi, promouvoir des journées de stage dans d'autres sociétés, offrir des primes de formation, stimuler la mobilité interne, etc.

Meilleure pratique ou meilleur accommodement?

Cette politique est-elle la seule possible? Non. Un article universitaire récent (McLacklan, 2022) sur le down-sizing responsable, plaide pour le meilleur accommodement, au lieu d'une approche basée sur les meilleures pratiques. Dans un contexte international, la réalisation d'une fermeture ou d'une restructuration responsable peut varier fortement. La loi Renault par exemple impose certaines choses en Belgique alors qu'elle est inexistante dans d'autres pays.

La situation du marché du travail joue également un rôle. Dans un marché en pénurie, il est plus facile d'accompagner les travailleurs vers une autre fonction. À l'inverse, si le chômage structurel est élevé, c'est beaucoup moins simple.

En raison de ces facteurs contextuels, l'entreprise doit prendre toutes ses responsabilités dans quatre domaines essentiels:

• le réglementation,

• les procédures,

• la communication,

• l'emploi.

En conclusion, il serait naïf de croire que la GRH ne peut jouer un rôle intéressant que dans les entreprises en pleine croissance. Cela serait injuste pour cette discipline. ¶

HR magazine / avril 2023 42
Peggy De Prins
/QUE DIT LA SCIENCE?/

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«Nous écoutons les idées de nos salariés»

texte: peter ooms

La productivité est essentielle pour la performance financière d'une entreprise de production. Bekintex applique une nouvelle approche qui s'appuie sur l'autonomie des ouvriers. Ce projet a débouché sur des améliorations significatives.

«On ne peut imaginer un environnement de production qui fonctionne bien sans programmes d'amélioration permanente», affirme Filip Lanckmans, responsable de l'usine de Bekintex. «Traditionnellement, ce sont les ingénieurs et les responsables de production qui s'occupent des adapta-

tions techniques, de l'achat de nouvelles machines, etc. Les équipes qui produisent les brûleurs mènent actuellement un projet d'amélioration original qui se concentre sur leur organisation interne.»

Le site de Wetteren de Bekintex, une filiale de Bekaert, transforme des fibres métalliques en produits textiles. 150 personnes réparties en trois départements travaillent sur des applications spécialisées: des câbles chauffants flexibles, des textiles résistants à de hautes températures pour la production de verre automobile et des éléments de brûleurs pour les chaudières à condensation.

HR magazine / avril 2023 44 AMÉLIORATIONS OPERATIONS
«La numérisation renforce le système des équipes autoorganisées.»
Filip Lanckmans
Bekintex donne la priorité au travail d'équipe dans un environnement agréable.

EFFICACITÉ

«Dans le département des brûleurs, nous appliquons le principe de l'équipe auto-organisée. Cela ressemble à une équipe autogérée, avec l'accent mis sur l'autonomie, mais sous la direction d'un responsable. Les équipiers établissent le planning et prennent en charge euxmêmes la coordination. Certains membres endossent un rôle spécifique: il y a la coordination, la résolution de problèmes, le contrôle de la qualité, les 5S (ordre et propreté, sécurité) et l'informatique. S'y ajoute un responsable global de la qualité qui assiste les trois équipes du département dans leurs projets. L'autonomie est au cœur de cette approche. En conséquence, l'équipe prend en charge plus de tâches qu'auparavant. Par exemple, les travailleurs interviennent d'abord eux-mêmes quand survient une panne. Ils se tournent vers l'équipe de maintenance uniquement quand ils ne peuvent pas assurer eux-mêmes la réparation. Ces interventions permettent de gagner du temps. L'approche prévient aussi beaucoup de perturbations dans l'organisation.»

L'ENGAGEMENT AUGMENTE

Angélique Timmerman, responsable RH: «Le département des ressources humaines est étroitement impliqué dans la nouvelle approche. Nous apportons notre soutien à la réaffectation des rôles, en fonction notamment de l'expérience et de l'intérêt de chaque salarié. Nous voulons avant tout limiter les chevauchements entre les responsabilités. Nous avons assumé un rôle spécifique dans le suivi des résultats et la mesure de la satisfaction des travailleurs.

L'engagement dans les équipes était déjà élevé mais il a encore augmenté depuis la nouvelle politique.»

Pour Filip Lanckmans, il est important de préserver cet engagement. Il constate que les membres des équipes continuent à proposer des idées d'amélioration, y compris techniques. «Il faut y répondre, bien sûr. Si quelqu'un pense que l'on peut rendre une étape de production plus performante en augmentant la température, nous faisons un test. Nous ne pouvons pas rester sourds à ces idées. Nous procédons actuellement à des investissements pour éliminer un goulet d'étranglement

grâce à l'une de ces idées», explique Filip Lanckmans.

COMMUNICATION NUMÉRIQUE

Bekintex a également beaucoup investi dans la communication entre le département et les autres parties concernées. La numérisation a accéléré la diffusion de la bonne information, ce qui renforce le système des équipes auto-organisées. Les documents sur papier ont été supprimés, ce

qui simplifie l'administration. La concertation interne dans les trois équipes du département est concentrée sur les tableaux centraux grâce auxquels les salariés peuvent suivre les principaux KPI.

«Dans le groupe Bekaert, toutes les business units s'efforcent en permanence d'améliorer leur productivité. Nous définissons des objectifs annuels mais grâce à notre nouvelle approche, nous avons atteint des objectifs bien meilleurs que ceux qui étaient prévus», affirme Filip Lanckmans.

La politique est bien documentée, elle est d'ailleurs largement diffusée dans le groupe Bekaert. C'est le département Operations Excellence qui diffuse ces meilleures pratiques dans toute l'entreprise. Lors de l'introduction de cette approche, Bekintex a pu compter sur l'aide de Workitects et du département de l'ingénierie industrielle de l'université de Gand. ¶

avril 2023 / HR magazine 45
«Nous voulons limiter les chevauchements entre les responsabilités.»
Angelique Timmerman
«Grâce à notre nouvelle approche, nous avons atteint des objectifs bien meilleurs que ceux qui étaient prévus.»
Filip Lanckmans

Le conflit est souvent tabou, un événement négatif qu'il faut éviter à tout prix. C'est ce que Gosia Kozusznik, psychologue du travail et de l'organisation de l'université de Gand, constate dans ses recherches. Quand elle demande à des individus s'ils ont des conflits au travail, ils s'empressent d'affirmer que ce n'est pas le cas, que tout le monde est traité avec respect et qu'ils évitent les désaccords. Ce qui l'étonne toujours. «Je vois ici un grand malentendu. Les conflits sont des processus interactifs, qui font apparaître des tensions mais qui sont nécessaires pour avancer. Il n'est pas obligatoire que le conflit s'accompagne de cris, d'accusations et d'énervement. On peut aussi l'aborder en douceur. En réalité, il faut s'assurer que les divergences d'opinions puissent toujours s'exprimer.»

CONFLITS QUOTIDIENS

Tous les jours, nous rencontrons de petits conflits que nous résolvons pratiquement sans nous en apercevoir. Et ces conflits quotidiens sont nombreux. Celui qui en est conscient est prêt à gérer des confrontations plus importantes, peut-être plus douloureuses en les abordant plus sereinement. «Il faut considérer les conflits comme des opportunités de mieux se connaître», explique la psychologue. «Si vous abordez un conflit de façon constructive, vous apprendrez à mieux identifier vos valeurs mutuelles. Votre relation pour en être améliorée. Cela vaut aussi pour les équipes. Il faut bien sûr d'abord établir des relations

de confiance entre les équipiers. L'environnement doit être suffisamment sûr pour que chacun puisse donner son avis. Cette sécurité est le premier pilier d'une controverse constructive. Ne faites pas comme si les différences d'opinions n'existaient pas, affrontez-les et conciliez-les.»

OUVERTURE ET VULNÉRABILITÉ

Gosia Kozusznik constate depuis des années que les équipes qui gèrent leurs conflits font émerger plus d'idées nouvelles, sont plus innovantes et plus productives. Selon elle, le niveau de performance est plus bas dans les équipes où les individus gardent leur opinion pour eux et qui, de ce fait, connaissent beaucoup moins de conflits. Mais il arrive que le couvercle saute et qu'un conflit éclate qui peut alors dégénérer. «Il arrive qu'une différence d'opinions minime au départ dérape en conflit relationnel. Avec le risque que les salariés s'affrontent personnellement. Or, on sait que les arguments ad hominem sont les plus pénibles. Raison pour laquelle chacun, et surtout le responsable de l'équipe, doit faire attention aux conflits larvés. Tous les membres de l'équipe doivent apprendre à se montrer ouverts et vulnérables. Ce qui demande du tact et du courage. Laissez chacun présenter son point de vue et assurez-vous que ses collègues se comprennent bien. Cherchez toujours une solution. Vérifiez après coup qu'il n'y a plus de non-dits, de problème sous-jacent. Si cela ne marche pas dans l'équipe, faites appel à une personne de confiance interne ou externe.» ¶

«Les équipes qui gèrent leurs conflits font émerger plus d'idées nouvelles, sont plus innovantes et plus productives.»

FONCTION

Psychologue du travail et de l'organisation de l'université de Gand

HR magazine / avril 2023 46
tekst: patrick verhoest
TECH RELATIONS
«Ne fuyez pas les conflits avec vos collègues»
ID

Trois travailleurs sur dix ont déjà été victimes de ragots, vexations, contacts physiques non désirés et propositions indécentes. Malheureusement, les victimes éprouvent toujours une grande appréhension à solliciter la personne de confiance de leur entreprise.

(Enquête de Tempo-Team et de la KU Leuven)

Le leadership positif fait la différence

-

Un tiers des managers sur le marché du travail belge adopte un style de leadership positif qui permet de prévenir le burn-out. C'est ce que révèle une étude réalisée par Securex, en collaboration avec la KU Leuven. Elle révèle notamment que le style de leadership aurait jusqu'à 32% d’incidence sur le bien-être mental des travailleurs, et jusqu'à 24% sur leurs performances. 54% des travailleurs ayant un manager toxique risqueraient un burn-out et 38% seraient même prêts à démissionner à tout moment.

Le style de leadership définirait

• 16 % du comportement lié à l’innovation,

• 21% de la motivation et

• 24% de la productivité d'un collaborateur, indépendamment du sexe, de la fonction ou de l’expérience.

L'étude montre que les travailleurs obtiennent des scores nettement plus élevés sur ces critères lorsqu'ils bénéficient d'un style de leadership soutenant. Par exemple, 92% des travailleurs seraient performants sous un style de leadership soutenant, alors que ce chiffre tombe à 51% sous un leadership toxique.

1-2-3 MINUTES AVEC SANDER VERMEULEN, DRH D'UNIBRICKS

Marie Vanden Berghe vient d'être nommée Chief Human Resources Officer du Group S. Cette spécialiste du droit social a commencé sa carrière dans la GRH puis a endossé rapidement des fonctions opérationnelles. Elle est revenue dans les ressources humaines en devenant responsable du changement de Group S dont elle est désormais CHRO. «Beaucoup d'experts RH commencent leur carrière dans les ressources humaines et progressent en exerçant le même métier. Pour ma part, j'ai pensé que j'allais devenir une meilleure professionnelle RH en connaissant mieux les activités opérationnelles. Je comprends plus précisément les besoins de l'autre camp dans l'organisation. Une expérience qui m'est très utile.»

Le jeu aide à recruter. C'est la conviction d'Unibricks qui a mis en scène un faux meurtre au Radisson de Spa.

1. Pourquoi passer par le jeu?

«Unibricks est un promoteur immobilier qui recherche en permanence de nouveaux collaborateurs. Parmi les emplois vacants, on retrouve un poste de directeur général du Radisson Blu Balmoral Hotel de Spa. Avec l'aide d'une société externe, nous avons repensé le concept du recrutement. Une escape room est une façon ludique de mener un entretien qui nous permet aussi d'évaluer les performances du candidat.»

2. Quel est le scénario?

«Le Radisson de Spa, où Unibricks a entamé le développement d'une nouvelle aile avec 70 suites de luxe, constitue le décor de cette escape room . Une équipe de divers collaborateurs internes a coécrit le scénario. La mission des candidats semble simple: le directeur général de l'hôtel a été assassiné et les participants doivent aider la police à résoudre cette affaire de meurtre. Chaque session d'escape room se joue par équipe de quatre personnes.»

3. Concrètement?

«Trois chambres d'hôtel ont été transformées en escape room . Chaque groupe dispose d'une heure pour trouver l'assassin et son mobile. Nous observons les candidats de très près. Le candidat qui parviendra à sortir de la pièce ne se verra pas offrir un contrat directement. Il recevra un feed-back sur la façon dont il s'est débrouillé.»

avril 2023 / HR magazine 47
BRF
33%
CONSEIL DE CARRIÈRE image: rawpixel.com

BRF

La semaine de quatre jours au banc d'essai

80 employés de SD Worx adoptent désormais la semaine de travail de quatre jours à temps plein ou un régime de travail alterné.

«Ce nouveau régime est un projet pilote qui durera six mois, du 1er janvier au 30 juin 2023», explique Bruce Fecheyr-Lippens, Chief People Officer chez SD Worx. «Il s'inscrit dans notre culture de travail flexible, et nécessite une certaine personnalisation. Grâce aux volontaires, nous voulons examiner en profondeur ce qui fonctionne pour chaque employé, nos clients et l'équipe. Au départ, 99 employés (soit 4,6%) étaient intéressés pour essayer la semaine de quatre jours à temps plein ou le régime alterné pendant six mois. Au final, 80 d’entre eux ont été mis à l’essai. La plupart des participants sont intéressés par le régime de deux semaines consécutives. Un sur trois a opté pour la semaine de quatre jours à plein temps.»

Le programme semble déjà porter ses fruits. «Avec chaque responsable, nous avons considéré le nombre de demandes par équipe et leur faisabilité, sans toucher à notre service client. Dix pour cent des candidatures n'ont pas été retenues parce que l'employé ne répondait pas aux critères requis, ou parce qu'ils avaient des rendez-vous spécifiques avec des clients ou que leur candidature n'arrivait pas au bon moment dans leur carrière (trop jeune dans le poste). Nous sommes convaincus que nous pouvons réussir ensemble par cette voie et nous nous engageons donc davantage dans une culture de flexibilité, d'autonomie, de confiance et de leadership personnel.»

BIEN INFORMER

Il est important de tenir tout le monde

bien informé. Quelques employés intéressés n’ont finalement pas pu intégrer le programme. Bruce Fecheyr-Lippens: «Le passage à un autre régime ne modifie pas seulement vos horaires de travail, mais, en raison des horaires de travail chez SD Worx, il a également un impact sur l'accumulation de vos jours de RTT, le nombre de chèques-repas par jour de travail et les éventuelles indemnités journalières et de poste. La question est aussi personnelle: il faut savoir si une journée de travail structurellement plus longue de 9,25 heures contribuera à améliorer le niveau d'énergie, la satisfaction au travail et l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Avec le régime de deux semaines consécutives, il n'y a pas de perte de

QUELS EMPLOYÉS?

Les profils des participants sont variés, allant du personnel de soutien en comptabilité, TIC, RH, marketing, aux conseillers juridiques et consultants qui ont des contacts avec les clients.

• La majorité d'entre eux sont des femmes (58, soit 72,5%).

• 22 sont des hommes (soit 27,5%).

• Chez les hommes, 73% ont choisi le cycle de deux semaines.

• Chez les femmes, ce chiffre est légèrement inférieur: deux tiers d’entre elles choisissent le cycle de deux semaines; un tiers ont opté pour la semaine de quatre jours à temps plein.

• La majorité des participants (62%) a moins de 45 ans, bien que toutes les catégories d’âge ont montré un intérêt pour ces nouveaux régimes.

• Si l'on tient compte du nombre d'employés par âge, cette nouvelle formule rencontre le plus de succès chez les 25-29 ans ainsi que chez les 45-55 ans.

DEAL POUR L'EMPLOI Semaine de quatre jours: surtout pour les ouvriers

Près de trois mois après l’introduction de ce système, 0,5% des travailleurs bénéficient de la semaine de travail de quatre jours. Le fait de prester un temps plein en quatre jours de travail est nettement plus populaire chez les ouvriers (0,69%) que chez les employés (0,4%).

C’est ce qu’il ressort de la première analyse de l’entreprise de services RH Acerta, sur la base des chiffres de 35.000 employeurs et 320.000 travailleurs.

Depuis le 20 novembre 2022, les travailleurs peuvent prester leur semaine de travail à temps plein en quatre jours, dans le cadre du deal pour l’emploi. Annelies Bries (Acerta Consult) ne s'attend pas à un raz-de-marée. «L'augmentation est légère. Selon une enquête que nous avons menée auprès des PME, seulement 8% d'entre elles considèrent le système comme viable dans leur organisation.»

Il est intéressant de noter que, pour le moment, ce sont surtout les ouvriers qui semblent convaincus par la semaine de travail de quatre jours. 7 ouvriers sur 1.000 (0,7%) travaillent actuellement selon ce régime en quatre jours. Le pourcentage ne s’élève qu’à 0,4% chez les employés.

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photo: Annelies Bries (Acerta Consult)

HR magazine / avril 2023 48
«Nous voulons étudier ce qui fonctionne pour chaque employé, pour nos clients et pour l'équipe.»
illustration: peter willems

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Dans cette rubrique, les spécialistes du bureau d’avocats DLA Piper répondent aux questions de nos lecteurs sur la très large thématique du droit du travail. Vous pouvez également poser vos questions en les envoyant à redaction@hrmagazine.be

Dès octobre 2021, le gouvernement a annoncé qu’il supprimerait le certificat médical pour les absences d'un jour. Toutefois, ce changement n’a finalement été introduit que par la loi du 30 octobre 2022 portant des dispositions diverses relatives à l’incapacité de travail, qui est entrée en vigueur le 28 novembre 2022. Le nouveau règlement étant assez complexe, nous résumons ici toutes les conditions.

Tout d’abord, le travailleur est tenu d’informer immédiatement l’employeur s’il ne pourra pas commencer le travail pour cause de maladie ou d’accident. La loi sur les contrats de travail ne prévoit pas comment procéder.

Un certificat médical n’est exigé que si une convention collective de travail ou le règlement du travail le prévoit, ou à la demande de l’employeur. Là encore, la loi sur les contrats de travail ne précise pas comment un employeur doit demander un certificat médical.

Si un certificat est requis, celui-ci doit en principe être envoyé dans les 2 jours ouvrables, sauf si la convention collective ou le règlement de travail prévoient un délai différent. Un travailleur prudent veillera à ce qu’il y ait une preuve d’envoi, par exemple en envoyant une copie du certificat par e-mail plutôt que d’envoyer l’original par courrier ordinaire.

TROIS PREMIÈRES ABSENCES

Suite à la modification de la loi, aucun certificat n’est désormais requis lors des 3 premières absences pour maladie par année civile si l’absence est limitée à un jour. Ainsi, si la maladie dure plus d’un jour, les règles existantes continuent de s’appliquer, et un certificat médical est donc toujours requis si cela est prévu par une convention collective de travail ou le règlement du travail ou à la demande de l’employeur.

Les entreprises de moins de 50 salariés peuvent déroger à la réglementation sur les 3 premières absences

d’un jour par an par convention collective ou dans le règlement de travail. La loi sur les contrats de travail parle d’«entreprises», on peut donc faire valoir que ce seuil doit être évalué au niveau de l’unité technique d’exploitation, et non pour chaque société séparément.

LA QUESTION DU RÈGLEMENT DE TRAVAIL

Le Service public fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale estime que pour faire usage de cette dérogation par le biais du règlement de travail, il convient de suivre la procédure de modification du règlement de travail. Le simple fait que le règlement de travail (rédigé avant le changement de loi) prévoirait qu’un certificat médical est toujours requis serait insuffisant. Ainsi, dans les entreprises dotées d’un comité d’entreprise, l’accord serait requis, et les entreprises sans comité d’entreprise devraient consulter leur personnel sur le fait qu’un certificat médical serait exigé même pour les 3 premières absences d’un jour, même si la nouvelle version du règlement de travail était la même que la version actuelle.

La loi sur les contrats de travail n’interdit nulle part le certificat rétroactif. Ces certificats sont susceptibles d’être plus fréquents, étant donné qu’un travailleur, le premier jour de sa maladie, peut espérer être rétabli le lendemain, et qu’il ne consultera un médecin que s’il est toujours malade le deuxième jour, et ne déterminera donc que ce deuxième jour qu’un certificat médical est nécessaire.

Les règles concernant le médecin-contrôleur n’ont pas changé. Ainsi, même dans les cas où aucun certificat médical n’est requis, l’employeur peut faire appel à un médecin-contrôleur pour faire examiner le travailleur. ¶

DROIT & EMPLOI
en/belgium/ avril 2023 / HR magazine 49 LEGAL DLA PIPER
Quelles sont les règles actuelles concernant le certificat médical ?
ID Frederic Brasseur — FONCTION Avocat de DLA Piper UK LLP

ID

Ruth Engelbeen

ÉTUDES

Graduat en HR Support (VIVES)

FONCTION

Senior consultante de Randstad

Ruth Engelbeen

IJe travaille comme consultante senior chez Randstad, au sein de la Key Account Unit. Cela signifie que je m’occupe principalement du recrutement et de la sélection de profils d'employés pour les grandes entreprises de la région gantoise. Par exemple, pour des acteurs présents dans le port comme Volvo, Honda et Essers. Je suis toujours à la recherche de ce que nous appelons des collaborateurs non pool. Ce sont des profils plutôt rares. Le jeudi, je suis une formation de graduat à l’école supérieure VIVES destinée aux professionnels des ressources humaines qui souhaitent rafraîchir leurs connaissances. L’objectif poursuivi par VIVES dans le cadre de ce graduat, qui porte le nom de HR Support, est de nous permettre d’apprendre les uns des autres, tout en profitant de l'enseignement des experts. C’est pourquoi les cours ont lieu en présentiel de fin septembre à mijuin pendant deux années académiques. Cette formation débouche sur un diplôme de l’enseignement supérieur.

2. Où en êtes-vous et qu’avezvous déjà accompli?

Je suis actuellement les cours de la deuxième année et je serai diplômée en juin. J’ai suivi des cours sur le recrutement et la sélection, ainsi que sur la politique d’accueil, le pay-roll, la législation sociale, la psychologie et la sociologie du travail. Un large éventail de sujets RH sont abordés. Mon employeur m’a proposé de suivre cette formation et d’y consacrer le temps et l’énergie nécessaires. J’ai pu utiliser des travaux du programme d’études pour réaliser des choses importantes pour Randstad. Par exemple, au cours de ma première année, je me suis penché sur ce que nous pouvions faire concrètement lorsqu’une collègue partait en congé de maternité. J’ai créé une feuille de route pour chaque client afin que les nouveaux collègues puissent être facilement opérationnels. Cette année, j’ai rédigé un mémoire sur l’off-boarding. Randstad a déjà bien avancé dans ce domaine. Néanmoins, je vois encore des possibilités d’amélioration des entretiens de sortie et de maintien des contacts avec les personnes qui ont quitté l’entreprise. Cela nous permet, par exemple, de leur demander régulièrement si elles sont intéressées de revenir chez leur ancien employeur.

3. Que signifie pour vous un diplôme supplémentaire?

J’ai un sentiment de fierté d’obtenir un diplôme supplémentaire à mon âge. Après mes études, j'avais choisi de voyager, je considérais que les diplômes n'étaient pas si importants. Aujourd’hui, je peux prouver mon engagement et ma capacité de réussir. Il peut également m’offrir des possibilités et des opportunités chez mon employeur. La formation vous rend plus complet. Le travail et les études sont parfaitement compatibles à condition de faire preuve de discipline. Les travaux à rendre sont répartis sur l’année, tout comme les examens. Il ne faut pas se laisser dépasser et dans ce cas, c’est faisable.

RECTIFICATIF ::

L'étude dont parlait Frédérique Van der Heyden dans notre dernier numéro portait sur le secrétariat international d'Amnesty International à Londres, et non sur les deux organisations belges (Amnesty International Vlaanderen et Amnesty International Belgique francophone).

/UN·E ÉTUDIANT·E EN POINT DE MIRE/
1. Quelle est votre fonction et quelle formation suivez-vous?
«Apprendre les uns des autres»
HR magazine / avril 2023 50
«Avec un peu de discipline, on peut parfaitement concilier les études et le travail.»

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