RH_2023_februari

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NE

TABLE RONDE

L’EMPLOYEUR N’EST PAS RESPONSABLE DU BONHEUR DE SES SALARIÉS

TECH LA PÉNURIE DE TALENTS

EXISTE-T-ELLE?

STRATÉGIE UN HACKATHON RH À L’UNIVERSITÉ

SOYEZ PAS UN MILITANT ISOLÉ

HASSAN AL HILOU FONDATEUR DE L’ASBL CAPITAL

FÉVRIER 2023 / nr 297 / 29 e année / P509202 / Magazine bimestriel / Bureau de dépot: Gand N° 297 29 E ANNÉE
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Cette année, la rédaction de HRmagazine consacrera ses six unes à des personnalités qui incarnent, d'une façon ou d'une autre, l'avenir de la GRH. Ils ne sont pas tous créateurs de technologies innovantes mais ils portent un regard original sur la GRH et exercent leur métier autrement.

UNE PÉNURIE DE TALENTS, VRAIMENT?

Le premier numéro de notre nouvelle formule met en scène Hassan Al Hilou, un exemple parfait de ces francs-tireurs. Il n'est pas DRH, pas manager non plus, du moins au sens classique. Sa vocation? Être entrepreneur. Un entrepreneur qui a fondé Capital, une association qui aide les jeunes Bruxellois moins privilégiés à trouver leur place dans un marché du travail qu'ils ne connaissent pas et dont ils n'attendent rien. Bruxelles compte 25% de jeunes au chômage. 11% n'ont pas obtenu leur diplôme d'humanités et 10% appartiennent à une catégorie préoccupante: ils ne travaillent pas, ne sont pas à l'école, ni ne suivent de formation. Capital veut faire découvrir à ces jeunes des opportunités dont ils n'avaient pas idée et leur montrer ce qu'ils pourraient faire pour saisir leur chance dans les secteurs les plus variés. «Dans le domaine du droit, chacun pense naturellement aux avocats mais quand les jeunes sortent de chez nous, ils ont compris que les juristes ont aussi besoin de spécialistes du marketing ou d'informaticiens.»

Il y a donc du pain sur la planche pour accompagner ces jeunes qui échappent aux canaux de recrutement traditionnels. Mais les recruteurs également devraient se remettre en question. Les préjugés bloquent souvent des candidats potentiels qui pourraient cependant franchir avec succès les étapes de la sélection. Que se passerait-il si des organisations effectuaient leur choix sur la base de CV anonymes et d'entretiens ouverts? Dans notre article «La pénurie des talents n'est

pas une fatalité» (page 38), nous racontons comment trois PME ont relevé le défi.

tout seigneur tout honneur, c'est l'entreprise d'intérim Accent qui a lancé cette expérience originale en s'alarmant de la pénurie de main-d'œuvre. En réalité, selon cette société, ce qui manque surtout, ce sont des recruteurs et des décideurs ouverts d'esprit. De trop nombreux managers s'accrochent encore à des critères stricts. Du coup, Accent suggère une autre démarche: le recrutement ouvert. HRmagazine a donc demandé à ces trois PME comment elles ont vécu cette expérience. Equans par exemple a rencontré des candidats soudeurs, électriciens ou techniciens HVAC sans les sélectionner au préalable sur la base de leur CV.

L'entreprise reconnaît que tous les candidats proposés ne seraient sans doute pas parvenus à l'étape de l'interview si les recruteurs avaient lu leur profil à l’avance. «Nos recruteurs ont l'habitude de soumettre les CV à une analyse très critique», explique Karine Verhulst, responsable de l'acquisition des talents. «Grâce au principe du recrutement ouvert, nous sommes entrés directement en contact avec ces candidats, une expérience positive et surprenante.»

Nous espérons vous encourager tout au long de l'année à adopter un esprit ouvert dans vos recrutements. C'est vrai, les travailleurs immédiatement opérationnels sont trop peu nombreux. Mais peut-on vraiment parler de pénurie des talents? ¶

février 2023 / HR magazine 03 EDITO FRANÇOIS WEERTS
«Que se passerait-il si des organisations effectuaient leur choix sur la base de CV anonymes et d'entretiens ouverts?»
À
« »
BORDEAUX 2023 HR CONGRES 11 - 12 MAY CLAIM YOUR TICKET HERE

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TABLE RONDE

«L'employeur n'est pas responsable du bonheur de ses salariés»

Christ Veermeer, Défense

Tommaso De Mol, Philips Healthcare

Stefaan Arryn, Silverfin

Tim Delye, c&a

Stéphanie Michiels, The Reference

Wim De Jonghe, Delaware Belux

Kirsten Florentie, Telenet

38 TECH

La

Ouvrez-vous l'esprit!

08 VISION

Hassan Al Hilou

«La diversité ne concerne pas votre chaise, mais celles qui restent vides autour de vous.»

Un

Edwin Schenck

«Pour rester fier de votre travail et de votre entreprise, vous devez vous réinventer régulièrement.»

QUE

février 2023 / HR magazine 05 SOMMAIRE
UNE CUISINE PLUS DURABLE 18
13 SHOPPING
STRATEGY
hackathon
pour réinventer la GRH
à l'université
30 TECH
une vraie culture du feed-back
Mertens
Laurent Taskin Professeur de la Louvain School of Management
Pour
Shana
chercheuse de l'université de Gand 32
DIT LA SCIENCE
SUR LES DÉCISIONS MORALES? 06 INSIDE
+ 03 ÉDITO 45 COLOPHON
DROIT & EMPLOI 50 UN·E ÉTUDIANT·E EN POINT DE MIRE
46
pénurie de
talents n'est pas une fatalité
iwant you
«Connaissez votre date d’échéance dans votre fonction.»

/ÉCOUTER ET POSER LES BONNES QUESTIONS/

Satisfaction. C’est le sentiment qui me prend quand je pense à ma carrière et à ma vie privée. Après des missions en France, aux États-Unis et en Suisse, je travaille désormais en Allemagne. Du lundi au jeudi, je suis à l’étranger, le vendredi, j’opère dans mon bureau privé en Campine. Mon entreprise applique une devise claire: Be Bayer, Be You: soyez vous-même, aidez les autres Cela correspond étroitement à ma vision de la vie. Je suis qui je suis. Je n’aime pas parler pour ne rien dire, je préfère agir. Collaborer. Rester humble. Communiquer directement avec les autres.

Je suis fier de mon employeur et de ce qu’il fait en faveur de la communauté. Nourrir les gens, les soigner. Ainsi, nous représentons une partie de la solution à la crise alimentaire mondiale provoquée par la guerre en Ukraine. Je soutiens à fond la mission de mon entreprise.

Du vendredi soir au dimanche soir, la famille est ma priorité. J’en profite pour cuisiner pour mon épouse et mes filles. Des classiques belges, comme des boulettes à la sauce tomate et des vol-au-vent. Je suis un fan du slow cooking J’ai un fumoir qui me permet de préparer du saumon, des spare ribs marinés ou des filets de porc farcis. C’est un ami boucher qui m’a appris la technique. J’adore les expériences, libérer ma créativité. Suivre une recette à la lettre, en peser au gramme près tous les ingrédients, très peu pour moi.

Après le dîner, j’aime me promener en famille dans un bois tout proche. Pour profiter les uns des autres dans la nature. Quand je travaille en Allemagne, je cuisine le soir pour moi. Ou je vais au restaurant avec des collègues et des candidats. J’essaie de découvrir la personne derrière l’expertise. Nous voulons des employés authentiques? Un candidat doit pouvoir être lui-même tout au long du processus de recrutement. Il est essentiel qu’il choisisse en toute conscience la fonction et l’entreprise.

L’inspiration, je la trouve chez mes collègues et mes partenaires en affaires. J’apprécie leurs conseils. Il faut être capable d’écouter et de poser les bonnes questions. Créer la culture adéquate, recruter les bonnes personnes et s’assurer qu’elles puissent donner le meilleur d’elles-mêmes. Je capte les forces de chacun. Et leurs faiblesses.

Pour rester fier de votre travail et de votre entreprise, vous devez vous réinventer régulièrement. C’est positif pour les collaborateurs dont vous êtes responsable. Connaissez votre date de péremption dans votre fonction. Quand vous sentez que vous êtes victime de la routine, il est temps d’écrire un nouveau chapitre dans votre carrière. ¶

février 2023 / HR magazine 07 INSIDE STRATEGY
texte: gert verlinden / photo: wouter van vaerenbergh ID Edwin Schenck — FONCTION Head of Total Rewards, Performance, Culture and Change de Bayer (Leverkusen)

«Ne restez pas un militant isolé»

Hassan Al Hilou, qui fut l’un des plus jeunes entrepreneurs de Belgique, a fondé pendant la pandémie l’association Capital. Cette ASBL aide les jeunes Bruxellois à découvrir le marché du travail grâce à la technologie et s’efforce de les rendre financièrement indépendants. Comment favoriser la diversité? «Imaginez un plan d’action au lieu de lancer un projet stratégique et impliquez vos salariés.»

texte: melanie de vrieze / photos: juan wyns

Capital est installé dans un splendide immeuble art déco près de la station de métro Yser. Ce bâtiment de cinq étages sert depuis 2020 de refuge aux jeunes Bruxellois vulnérables. Ils viennent y étudier, travailler ou poser leur candidature. Pour son fondateur, Hassan Al Hilou, Capital est l’IKEA du développement des jeunes. «Dans cette chaîne de magasins suédois, vous trouvez tout ce qu’il vous faut pour aménager votre intérieur. C’est dans le même esprit que nous avons créé ce hub centré sur le développement des jeunes. Nous proposons un large éventail de programmes pour les aider à déployer leurs talents. Nous sommes toujours en quête de projets innovants et de partenaires désireux de nous proposer des solutions.»

Comment avez-vous eu l’idée de fonder Capital?

Hassan Al Hilou: «Je suis devenu entrepreneur à l’âge de seize ans (lire l’encadré). J’ai réussi à construire un beau réseau et je suis devenu financièrement indépendant. J’ai obtenu mon diplôme en gestion de l’innovation à la VUB en 2020. Pendant la pandémie, j’ai rencontré des jeunes en difficulté qui ne parvenaient pas à progresser, qui n’avaient plus d’espoir… Bruxelles compte aujourd’hui 25% de jeunes au chômage. 11% de cette population n’ont pas décroché leur diplôme d’humanités et 10% ne sont ni au travail, ni en formation, ni à l’école. En cherchant une solution, j’ai observé qu’il y avait déjà beaucoup d’aides. À Bruxelles, plus de 900 organisations s’occupent de la jeunesse. Le problème n’est donc pas du côté de l’offre. En fait,

la solution ne réside pas dans l’approche collective classique qui vous permet d’entrer en contact avec une vingtaine de personnes au maximum. Il faut au contraire apporter des solutions innovantes, que l’on peut faire monter en charge avec souplesse. C’est ce que propose Capital. Nous avons touché en 2020 deux mille jeunes, l’année suivante, cinq mille et cette année, nous atteignons chaque mois entre quinze cents et deux mille jeunes.»

Qu’est-ce qu’une solution innovante que l’on peut déployer en souplesse?

Hassan Al Hilou: «Un exemple: JOBX, le X signifiant explore, expand et experience. Quand vous demandez à un jeune ce qu’il voudrait faire plus tard, il avoue souvent qu’il n’en sait rien. Pas parce que rien ne l’intéresse, mais parce qu’il évolue dans un environnement socio-économique vulnérable. Et c’est là qu’est le danger. Résultat? Démotivation, lassitude de l’école, abandon des études et peut-être plus tard un burn-out parce qu’il n’aura pas choisi le bon métier. Grâce à JOBX, nous voulons apporter des réponses préventives en présentant la réalité du travail à une population très jeune. Tous les jours, nous donnons à une cinquante d’ados des informations sur vingt secteurs et cent cinquante métiers. Au premier étage de notre bâtiment, nous avons installé une exposition ultramoderne, qui utilise des outils de réalité augmentée et de réalité virtuelle, ainsi que des hologrammes, pour montrer aux jeunes Bruxellois la variété des métiers qui existent. Nous avons

«On me dit souvent que je m’investis dans la jeunesse alors que moimême, je suis encore jeune. C’est vrai, et c’est justement ce qui me donne de l’énergie.»

HR magazine / février 2023 08 DIVERSITÉ ET INCLUSION VISION
ID Hassan Al Hilou — FONCTION Fondateur de l'ASBL Capital

trouvé très vite des entreprises qui ont accepté de participer au projet et de le financer. Des sociétés comme Sofina, Colruyt, Nestlé, BESIX et Deloitte présentent leur secteur en exclusivité. Ce projet donne aux entreprises l’occasion d’avoir un impact sociétal et d’attirer de jeunes candidats.»

ÉLARGIR SON HORIZON

Ce résultat n’est cependant pas celui que vous visez directement?

Hassan Al Hilou: «C’est exact. Capital n’est pas un bureau de recrutement. Nous voulons en premier lieu donner à des milliers de jeunes Bruxellois des informations sur le marché du travail, les différentes industries présentes et les étapes à franchir pour y accéder. Près de 90% des jeunes qui visitent JOBX connaissent moins de trois secteurs parmi la vingtaine que nous avons identifiés. Nous voulons enrichir leurs perspectives et élargir l’idée qu’ils se font des métiers. Dans le domaine du droit, chacun pense naturellement aux avocats mais quand les jeunes sortent de chez nous, ils ont compris que les juristes ont aussi besoin de spécialistes du marketing ou d’informaticiens.»

Les salons de l’emploi et les visites d’entreprises ne sontils pas de solutions pour informer les jeunes?

Hassan Al Hilou: «Ces modèles sont datés, ils ne fonctionnent plus. Cette approche n’est pas très inclusive puisque les salons de l’emploi ne concernent que les jeunes qui ont déjà un profil LinkedIn. Dans l’intervalle, la technologie a changé beaucoup de choses. Je compare les salons de l’emploi avec les banques et les distributeurs de billets, alors que les jeunes effectuent aujourd’hui leurs paiements avec leur GSM. Pendant une visite d’entreprise, les jeunes doivent écouter pendant une heure la présentation de ses activités alors qu’ils sont intéressés par des questions plus pratiques: comment décrocher ce job, en quoi consiste-t-il concrètement et combien est-il payé? En revanche, JOBX se veut une action pédagogique qui est aussi inclusive. Le concept est parfaitement évolutif, nous pouvons le déployer sans problème au niveau mondial. Avec JOBX, nous touchons environ 350 jeunes par mois, mais une forte croissance est possible.»

Les entreprises parlent beaucoup d’entrepreneuriat socialement responsable, de diversité et d’inclusion. Quel est votre sentiment à cet égard?

Hassan Al Hilou: «Je constate que les progrès sont positifs. Nous sommes dans une culture qui encourage les entreprises à investir dans la vie en commun. Elles sont conscientes que la pauvreté existe et qu’elles doivent lancer des initiatives dans ce domaine. Leur plus grand défi est de

savoir comment s’y prendre et d’identifier l’action qui aura le plus d’impact. Je leur conseille toujours de commencer par leur environnement proche. Que se passe-t-il dans votre région? Cherchez une solution. Je recommande aussi d’investir dans une réponse évolutive. Investissez plutôt dans une école que dans une classe. Vous aurez beaucoup plus d’impact. Enfin, je pense que l’entreprise doit comprendre qu’elle est un élément de la chaîne. Tenez compte de la phase précédente et de la phase suivante dans votre intervention. Investissez dans le collectif et la cocréation pour soutenir les jeunes.»

Que devrait faire le département RH pour implémenter la diversité et l’inclusion?

Hassan Al Hilou: «Mesurer, c’est savoir. C’est le premier point auquel un DRH devrait s’intéresser. Mais que font généralement les entreprises? Elles constituent un groupe d’étude qui travaille pendant un an sur une enquête. Mais en termes de diversité, un an, cela équivaut à cinq années. Les évolutions sont exponentielles. En même temps, il est déjà possible d’en apprendre beaucoup sans trop d’efforts.

HR magazine / février 2023 10 DIVERSITÉ ET INCLUSION VISION
«La diversité ne concerne pas votre chaise, mais celles qui restent vides autour de vous.»
Hassan Al Hilou pendant le lancement de JOBX.

Hassan Al Hilou: «Un plan d’action se construit dans chaque département.»

QUI EST HASSAN AL HILOU?

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Hassan Al Hilou a des racines iraniennes. Il est connu comme le plus jeune entrepreneur du pays quand il a lancé, à seize ans, YouthTalks, une plateforme en ligne destinée à favoriser les débats entre les jeunes. À dix-neuf ans, il a créé un bureau de conseils, AGE (age, gender and ethnicity) Consultancy, pour aider les entreprises à améliorer leur diversité. Pendant la pandémie, il a fondé Capital au centre de Bruxelles où des jeunes travaillent, étudient et se développent.

Cherchez le nom de votre entreprise sur LinkedIn, passez en revue les contacts du premier niveau. Votre organisation est-elle diverse? Regardez ensuite les contacts du deuxième niveau. Vous vous rendrez peut-être compte que votre entreprise est plus hétérogène que vous ne le pensiez. À moins que vous ne vous aperceviez que la diversité est un problème chez vous, un problème qu’il faudra résoudre en créant un projet plus inclusif.»

AMBASSADEURS

Comment faut-il s’y prendre?

Hassan Al Hilou: «Je joue souvent le rôle d’intermédiaire parce que les salariés sont du mal à parler de diversité à leur CEO ou à leur DRH. Raison pour laquelle une entreprise doit développer une expertise interne sur le sujet. Grâce à cette expertise, vous engendrez des ambassadeurs. Au lieu de compter sur un militant isolé, vous disposez d’un groupe qui a envie de s’engager en faveur de la diversité. Responsabilisez vos salariés en leur demandant de concevoir un plan d’action. Je parle délibérément d’un plan d’action, et pas d’un plan stratégique parce qu’il est trop tard aujourd’hui pour s’intéresser à la stratégie. Il est

temps de lancer des actions dans les douze prochains mois. Pour donner un exemple, nous avons mis en place un plan d’action avec 150 salariés. Quand ces ambassadeurs parlent à deux ou trois collègues, vous obtenez des centaines de personnes qui sont au courant. C’est plus efficace que l’engagement d’un consultant par un DRH qui réalisera avec lui un plan stratégique que le département RH mettra en œuvre. Un plan d’action part de chaque département. De cette manière, le DRH pourra avoir des alliés qui pourront changer les choses dans la production, le marketing ou la communication.»

Que dites-vous aux entreprises qui prétendent ne pas trouver de collaborateurs représentant une forme de diversité?

Hassan Al Hilou: «Cet argument reflète une situation plus complexe qu’il n’y paraît. Elle signifie que la culture de l’entreprise n’est pas taillée pour les trouver. Un plan d’action clair vous permettra de le faire, c’est d’ailleurs le cas chez nos partenaires. En réalité, la chance qu’ils ne trouvent pas ces candidats est faible quand on sait que le tissu urbain de Bruxelles, Anvers et Gand est divers à 60%. Dans les écoles primaires de ces villes, la diversité culturelle peut être estimée à 70%. Il faut en réalité réussir à attirer les candidats concernés par différents canaux. Les organisations sont frappées de plein fouet par une vague de changements. Pensez aux défis économiques, à la numérisation, à la gouvernance et au climat. S’y ajoute maintenant la problématique de la diversité. Quand on parle de diversité, on pense souvent à des Robins des Bois qui volent aux riches leur argent – ou leur place – pour la donner aux économiquement faibles. Beaucoup de gens pensent qu’ils doivent céder leur place pour s’effacer devant les représentants de la diversité. Mais il ne s’agit pas de leur siège, mais de ceux qui sont vides autour d’eux et qui ne parviennent pas à trouver preneurs. En d’autres termes, il y a un potentiel de diversité qui n’est pas réalisé.»

À Bruxelles, environ 900 ASBL s’occupent des jeunes. En quoi une initiative comme Capital est-elle indispensable?

Hassan Al Hilou: «Il y a un manque de cohésion entre toutes ces associations. C’est le grand défi de la société civile. Les différentes ASBL se connaissent mais manquent de moyens et de temps pour orienter les jeunes entre elles. Il y a souvent une sorte d’égoïsme. Quand une organisation s’occupe d’un jeune, elle a souvent le sentiment qu’il lui appartient. C’est une tendance dangereuse. Quand les besoins du jeune évoluent, il doit pouvoir être pris en charge facilement par une autre association. Nous essayons de formuler une réponse à cet égard en permettant à ces structures de travailler ensemble sous notre toit.»

février 2023 / HR magazine 11

Quels sont vos rêves et vos ambitions?

Hassan Al Hilou: «L’avantage de Capital est que nous sommes établis à Bruxelles. Notre ville est un laboratoire, une ville de diversité, avec tous les problèmes que cela suppose mais aussi toutes les opportunités. On peut y faire des expérimentations. Chaque essai réussi devient un programme, comme JOBX. Nous espérons que ces programmes auront un impact en dehors de la capitale. Notre rêve ultime est d’aider tous les jeunes Belges à accéder au marché de l’emploi. Nous n’allons pas le faire en invitant tous ces jeunes à venir à Bruxelles mais en implémentant JOBX dans différents lieux. Dans les cinq ans, nous souhaitons devenir le point de référence innovant pour le développement de la jeunesse. Cela me semble réaliste.»

RÔLE MODÈLE

Vous êtes un modèle pour de nombreuses personnes. Mais vous, qui vous inspire?

Hassan Al Hilou: «Être un modèle est un mandat que la société vous donne et qui doit être temporaire. Rester un modèle pendant toute sa vie risque d’être lassant. J’ai rencontré dans mon parcours plusieurs personnes qui m’ont inspiré. Je pense souvent à Caroline Pauwels, l’ancienne rectrice de la VUB. J’ai nommé en son hommage un espace de brainstorming dans notre bâtiment pour que la jeune génération apprenne à la connaître. Elle a été un pilier essentiel dans mon développement. Les livres m’inspirent aussi. Généralement, je ne retiens qu’une seule page mais je la garde avec moi très longtemps. Les gens qui ont de l’espoir m’inspirent aussi. Quand je lis l’interview de quelqu’un qui se montre positif, je me sens contaminé par son énergie.»

Quels sont vos défis les plus importants?

Hassan Al Hilou: «Nous travaillons sur l’innovation dans un secteur de niche, dans une optique préventive au lieu de nous en tenir au moment même. La question est de savoir si les entreprises sont prêtes à investir dans ce domaine. Le grand défi et le convaincre les entreprises d’investir de façon préventive dans la jeunesse au lieu de réagir après-coup.»

Mais il n’est pas trop tard selon vous?

Hassan Al Hilou: «Je garde toujours en tête la devise de l’empereur Auguste: festina lente (hâtez-vous lentement). Pour moi, il est toujours trop tard, mais les entreprises peuvent rattraper leur retard en mettant en œuvre de façon graduelle leurs innovations et en abandonnant les pratiques classiques.»

Vous avez des journées bien chargées. Comment essayezvous de vous détendre? Qu’est-ce qui vous donne de l’énergie?

Hassan Al Hilou: «J’aime me retrouver avec mes amis et ma famille pour boire un verre et manger, simplement pour se retrouver en toute tranquillité. On me dit souvent que je m’investis dans la jeunesse alors que moi-même, je suis encore jeune. C’est vrai, et c’est justement ce qui me donne de l’énergie. Bien sûr, j’apprécie moins les corvées administratives qui sont liées à ce travail. Mais j’adore regarder l’un de nos participants jouer au football ou être invité à une pièce de théâtre. Cela me donne de l’espoir quand j’observe un jeune déployer ses talents. En fait, nous avons une vision macro alors que nous devrions nous intéresser aux détails, aux vies individuelles. À long terme, je voudrais découvrir le monde, voyager. Je n’ai pas de préférence pour une destination en particulier, pour autant qu’il y ait du soleil. J’ai visité beaucoup de pays ces dernières années, des destinations atypiques où l’on a souvent peur de se rendre, pour lesquelles il est difficile de se procurer un visa. Ce n’est pas tant le pays qui m’intéresse que les rencontres avec les gens. Et je reste un entrepreneur. En Turquie, je ne m’adresse pas au loueur de jet-skis pour négocier son tarif: je veux savoir combien son commerce lui coûte, combien de temps il doit travailler pour gagner sa vie. Récemment, j’ai pris un train en Iran qui a mis treize heures à traverser le pays. Le moment idéal pour entrer en relation avec les voyageurs locaux. Je suis toujours curieux de découvrir d’autres cultures.» ¶

HR magazine / février 2023 12 DIVERSITÉ ET INCLUSION VISION
— Hassan Al Hilou: «Des jeunes qui progressent et qui déploient leurs talents: de là vient mon dynamisme.»
«Rester un modèle pendant toute sa vie risque d’être usant. Ce rôle est temporaire.»

Du plaisir pour les yeux, du bonheur pour les papilles et des coups de cœur: nous vous présentons dans chaque numéro six produits qui vous facilitent la vie. Six produits durables qui trouveront leur place au bureau ou que vous retrouverez dans votre cuisine après votre journée de travail.

composition: sabrina bouzoumita

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février 2023 / HR magazine 13
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Volkswagen ID. 100% électriques

UNE GAMME COMPLÈTE, MAINTENANT AUSSI EN FINITIONS BUSINESS

Volkswagen ne cesse d’élargir sa gamme de véhicules 100% électriques et propose dès à présent une gamme complète de véhicules sans émissions polluantes à l’usage.

Rassemblés sous la marque ID., ces modèles offrent une expérience de conduite unique, mêlant silence et douceur, associée à des performances de haut niveau en fonction de la puissance retenue. L’autonomie généreuse, jusqu’à 535 km selon le cycle WLTP, s’adapte sans contrainte aux besoins quotidiens, et même les longs déplacements ne seront jamais un problème grâce à la possibilité de charger sur une borne à forte puissance (jusqu’à 135kW) permettant de récupérer 80% de la charge en une demi-heure de branchement.

L’offre Volkswagen ID. 100% électrique se compose d’une berline compacte avec l’ID.3, d’un SUV dynamique avec l’ID.4, d’un SUV coupé sportif avec l’ID.5, d’un monovolume déjà iconique avec l’ID. Buzz, et ils seront rejoint courant 2023 par l’ID.7 une nouvelle berline élégante et spacieuse dans le segment D/E, avec l’espace généreux d’un SUV et un superbe design aérodynamique, contribuant aussi à augmenter son autonomie annoncée au-dessus des 600km.

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HR magazine / février 2023 14

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Prenez le chemin le plus court vers une flotte de véhicules d’entreprise zéro émission avec Volkswagen.
février 2023 / HR magazine 15
ID. RANGE 15,3-19,5 kWh/100 KM 0 G/KM CO2 (WLTP)

BRF

Salaire des CEO: la durabilité joue à peine

Les indicateurs de durabilité ne pèsent que 6% dans le calcul de la rémunération des CEO. De plus, une entreprise seulement sur vingt utilise de ce genre de critères pour fixer le bonus de leur CEO

Ce sont quelques-uns des informations livrées par l’enquête annuelle sur la rémunération des CEO de sociétés belges cotées à la Bourse. Le centre de recherche sur les rémunérations de la Vlerick Business School a analysé 90 rapports (2021) émis par des entreprises du Bel 20, du Bel Mid et du Bel Small.

ÉVOLUTION DES HAUTS SALAIRES EN BELGIQUE

Cette enquête annuelle constate que la médiane de la rémunération totale (salaire fixe, bonus et rémunération à long terme) en 2021 se déclinait comme ceci:

• 2.430.492 euros pour le Bel 20 (+ 23% par rapport à 2020);

• 908.115 euros pour le Bel Mid (+13%);

• 587.482 euros pour le Bel Small (-5%).

Xavier Baeten souligne qu’une grande part des rémunérations des CEO des entreprises du Bel 20 concerne des avantages à long terme (options sur actions, performance shares, etc.). De plus, ce salaire différé est plus élevé dans ces sociétés du Bel 20:

• 2.096.532 euros dans le Bel 20;

• 189.000 euros dans le Bel Mid;

• 207.897 euros dans le Bel Small.

PRESTATIONS ENVIRONNEMENTALES

Cette année, l’enquête s’est intéressée aux critères de prestations pour fixer la rémunération variable.

La rémunération totale des CEO du Bel 20 a augmenté de 23% en 2021.

En premier lieu, on peut souligner que les critères non financiers (durabilité, qualité, innovation…) ont un poids moyen de 32% pour les bonus et de 16% pour la rémunération à long terme.

Mais 5% seulement des entreprises adoptent des critères environnementaux pour les bonus et 26% pour les rémunérations à long terme. Xavier Baeten constate d’ailleurs que ces critères correspondent presque toujours uniquement aux émissions de CO2 «Or, pour certaines sociétés, la consommation d’énergie ou d’eau, le traitement des déchets ou les emballages pourraient être des critères au moins aussi importants.»

SOLVAY ET UMICORE

Deux entreprises sortent du lot. Solvay intègre les résultats environnementaux pour un tiers dans la fixation des prestations du groupe. L’entreprise applique une large gamme de critères: émissions, chiffre d’affaires tiré des produits durables, prélèvement d’eau, déchets, accidents et nombre de femmes managers.

Chez Umicore, la moitié de la rémunération à long terme est déterminée par des résultats environnementaux. La stratégie Let’s Go for Zero veut conduire l’entreprise à zéro émission en 2035. De plus, elle va fixer avec ses fournisseurs des objectifs en matière d’émissions indirectes. De plus, Umicore examine des critères de bien-être dans la chaîne de valeur, d’extraction éthique des matières premières et d’égalité des genres dans le management. ¶

ManpowerGroup a présenté sa Prévision nette d’emploi pour le premier trimestre de cette année. Cet indice a baissé de 10% en janvier par rapport au trimestre précédent mais reste positif (23%). Une majorité d’employeurs en Belgique prévoit donc de créer de nouveaux emplois pendant cette période.

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Le salaire, facteur décisif pour les candidats

La rétention de leur personnel préoccupe la majorité des employeurs belges (84%), selon Robert Half. Ces doutes ne paraissent pas totalement injustifiés, puisque près de la moitié des employés (48%) déclarent être ouverts à un nouvel emploi dans les six mois à venir. «Le salaire reste souvent le facteur décisif lorsque les gens hésitent entre deux emplois, mais d’autres facteurs contribuent à attirer des talents», affirme Joël Poilvache, Regional Managing Director de Robert Half.

HR magazine / février 2023 16
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www.tobahrsolutions.be

L'université s'ouvre aux hackathons

texte: françois weerts

En décembre dernier, la Chaire labor-H a investi la bibliothèque des sciences et technologies de Louvainla-Neuve pour organiser un hackathon. Pendant deux jours, étudiants, professeurs et professionnels se sont rencontrés pour imaginer ensemble des modèles d’entreprise plus durables.

Avant tout, un petit rappel de ce qu’est un hackathon. Comme le définissait Lionel Barets (Convidencia) dans notre numéro de décembre, il s’agit d’un évènement de travail intensif de deux à trois jours qui permet de cocréer des solutions innovantes à forte valeur ajoutée. «Contrairement à un brainstorming qui apporte des idées, un hackathon va beaucoup plus loin en développant des projets concrets comme des prototypes ou même des start-ups», écrivait-il.

C'était exactement l'objectif de l'opération menée par la Chaire labor-H. L'hackathon a réuni pendant deux jours des chercheurs, des professionnels des ressources humaines et des étudiants de la Louvain School of management. «Nous voulions lancer un projet collaboratif pour réfléchir sur la durabilité et sur la quête de sens au travail», explique Laurent Taskin, professeur de gestion des ressources humaines et initiateur du projet. «En partant d’une page blanche, nous souhaitions réinventer des processus RH avec pour thématique centrale la durabilité. Plus concrètement, il s’agissait

de repenser la rémunération, non seulement en termes de salaire, mais aussi en tenant compte de tout ce qui a de la valeur pour les employés. C'est-à-dire le package salarial, les avantages, les formations, l'équilibre privé-professionnel...»

UN MARATHON D'IDÉES

Que s'est-il passé concrètement pendant ce marathon d'un week-end? Dès le premier jour, répartis en plusieurs groupes, les participants et participantes ont eu des discussions animées. Les tableaux blancs se sont remplis de questions, de mots-clés et de post-it de toutes les couleurs. Dans cette ambiance survoltée, les idées ont fusé. Objectif commun? Améliorer le quotidien des travailleurs et répondre à l’évolution du monde de l’entreprise. Différents axes de réflexion se sont dessinés peu à peu.

• Veiller au bien-être des salariés.

• Favoriser l’esprit d’équipe et le sentiment d’appartenance.

• Tenir compte des impacts de la numérisation et du télétravail.

• Améliorer la responsabilité des entreprises.

• Inciter à une consommation plus responsable.

• Favoriser l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée.

HR magazine / février 2023 18 IDÉES STRATEGY
«Nous avons construit des choses ensemble, des choses nouvelles. La dimension collaborative est essentielle.»
ID
Laurent Taskin
— FONCTION Professeur de la Louvain School of Management
Laurent Taskin

LA CHAIRE LABOR-H

::

Cette expérience n'aurait pas été envisageable sans la participation des quinze organisations privées et publiques qui soutiennent la Chaire labor-H, le H soulignant l'objectif de parvenir à un management plus humain. Ces partenaires financent des recherches scientifiques sur le sujet. L'un des trois thèmes de l'année concerne l'attractivité des entreprises mesurée dans une étude de longue haleine.

Les échanges d'idées ont été stimulés par des présentations de chercheurs et chercheuses, des directeurs et directrices des ressources humaines. Chaque groupe a alors sélectionné une problématique et a commencé à réfléchir aux solutions que l'on pourrait trouver.

REMISE EN CAUSE

Les participants sont unanimes: cette approche change des cours académiques. Elle permet de penser en dehors de certaines conventions. En même temps, cela peut être difficile pour des étudiants à qui on demande d’être scolaires, ou à des gens qui sont en poste depuis quelques années dans un métier qu’ils maîtrisent. «Cela dit, les attentes évoluent, ce qui nécessite de repenser les modèles», affirme Laurent Taskin.

L'INDISPENSABLE COLLABORATION

Le professeur insiste sur l’importance de la collaboration entre les différents acteurs du projet. «Nous avons construit des choses ensemble, des choses nouvelles. La dimension collaborative est essentielle.» Le partage d’expériences entre les professionnels, les chercheurs et les étudiants était au centre des ateliers. «Les témoignages des différents DRH nous ont aidés à obtenir des éclairages plus concrets, d'autant plus nécessaires pour les étudiants qui n’ont pas encore d’expérience professionnelle.»

HACKATHONS:

UNE FORMULE

QUI A LE VENT EN POUPE

:: Déjà très populaires avant la pandémie, les hackathons sont devenus incontournables. Pour trois grandes raisons selon Lionel Barets (Convidencia).

• Ils permettent aux équipes de se retrouver en présentiel.

• Les dynamiques d’échange, de créativité et d’innovation qui sont en berne avec le distanciel trouvent un nouveau souffle rafraîchissant.

• Les organisations prennent conscience de la nécessité d’impliquer leurs collaborateurs et leurs partenaires pour répondre aux enjeux complexes qu’elles rencontrent.

À LA RECHERCHE DE RÉSULTATS

La seconde journée était consacrée au partage des résultats. Selon leur principe même, les hackathons doivent déboucher sur des réalisations concrètes, l'exercice de réflexion n'est pas gratuit. À Louvain-la-Neuve, au travers de petites saynètes suivies de séances de questions-réponses, les groupes ont présenté leurs projets à un jury composé d’experts du management, de l’économie, de la GRH et de la durabilité.

Si l’innovation était le maître-mot de ces mises en situation, aucune place n'était laissée à l'approximation: la faisabilité des projets a été passée au crible par des jurés intransigeants, mais toujours bienveillants.

Pari réussi pour Laurent Taskin, dont l’ambition était de pouvoir «vivre un processus très innovant» à travers ce projet. Qui sait, les idées nouvelles qui ont émergé pendant l’hackathon révolutionneront peut-être le monde du travail de demain… En tout cas, elles pourraient donner des pistes aux organisations pour mieux respecter les critères de durabilité définis par les Nations Unies.

«Je pense que les participants ont apprécié d’être à la source de progrès et de contribuer concrètement à une gestion des ressources humaines soutenable», conclut Laurent Taskin. «Que ce soit pour les étudiants, pour les chercheurs ou pour les DRH, c’est une expérience vraiment unique qu'ils se rappelleront longtemps. Cette aventure humaine va au-delà des résultats qui ont été présentés au jury.» Résultats qui seront publiés au cours du premier semestre de l'année. ¶

février 2023 / HR magazine 19

BRF

La mobilité interne, moteur de la culture de la formation

L’époque exige de la flexibilité et de l’agilité. L’opportunité s’offre donc aux départements Learning & Development de faire la différence dans l’organisation. Car, rien n’est plus important pour l’agilité qu’une culture de la formation. Beaucoup d’organisations visent cet objectif, mais dans ce contexte, une stratégie reste sous-estimée: la mobilité interne.

C’est ce que conclut LinkedIn dans son dernier rapport Workplace Learning. Ce rapport souligne que le département L&D peut prendre le leadership en améliorant à la fois l’agilité du travailleur individuel et celle de l’organisation. Pour les individus, l’agilité est une carte maîtresse dans l’évolution de leur carrière. Pour les entreprises, elle augmente les chances de survie et de réussite, y compris quand l’économie traverse des turbulences.

FAVORISER LA RÉTENTION

La mobilité interne contribue à retenir le personnel et permet de développer ses compétences. Un employé qui aura pu varier son travail aura plus de chances de continuer à travailler dans la même entreprise après deux ans. On estime que les salariés qui ont pu changer de poste ont 75% de chances de rester chez leur employeur. Pour ceux qui effectuent toujours le même travail, cette chance s’élève à 56% seulement.

Et parce que les salariés qui pratiquent la mobilité interne étendent leur réseau et leurs compétences, la flexibilité de l’organisation augmente tout naturellement.

CELA SE FAIT TROP PEU

Selon LinkedIn, la direction générale des sociétés semble être convaincue de l’intérêt de cette formule. La mobilité est d’ailleurs la deuxième priorité RH du senior management. Sur la première marche du podium, on trouve la nécessité de cultiver la motivation et l’engagement du personnel. En deuxième lieu vient donc «la possibilité de proposer aux salariés d’autres fonctions dans l’entreprise». Mais sur le terrain, cela se fait trop peu. La plupart des travailleurs ne sont pas encouragés à changer de place en interne.

15% des salariés seulement affirment que leur organisation les stimule à passer à une autre fonction interne;

• 26% des salariés disent que leur organisation les motive à développer de nouvelles compétences;

• 16% des salariés assurent que leur organisation les encourage à établir un plan de carrière.

83% des organisations entendent promouvoir une culture centrée sur l’humain. Cette intention est basée sur la conviction qu’une organisation ne peut s’épanouir que si son personnel s’épanouit lui aussi. D’où l’attention portée à l’expérience des salariés à toutes les étapes: de l’accueil jusqu’à la fin de la relation en privilégiant les besoins humains. (Workplace Learning Report 2023)

CONSEIL

lesEncouragez efforts de formation

LinkedIn

Workplace Learning Report 2023

Autre problème: on ne sait pas toujours qui prend en charge la mobilité interne dans le département RH. En fait, les responsables L&D et ceux de l’acquisition des talents pourraient parfaitement travailler ensemble.

• L’acquisition des talents conçoit une culture et un processus pour les recrutements internes.

• Le service L&D prépare un programme de développement des compétences pour répondre aux besoins de l’entreprise et aux objectifs du salarié. ¶

«Les salariés apprécient d’être récompensés pour les compétences qu’ils ont acquises dans leur travail», affirme Ariel Mendes, HR Global Learning & Development Leader de Rock Content. «Nous mesurons régulièrement le temps passé par chacun à se former et nous attribuons des points pour les compétences acquises qui nous semblent les plus importantes. À la fin du mois, nous publions le top cinq des salariés qui ont consacré le plus de temps à l’apprentissage. Nous leur donnons un coup de projecteur pendant une assemblée de l’entreprise et nous leur accordons une gratification financière.»

HR magazine / février 2023 20
La mobilité interne contribue à retenir le personnel.
83%

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UN EMPLOYEUR N’EST PAS RESPONSABLE DU BONHEUR DE SES SALARIÉS

Nous avons réuni plusieurs responsables RH pour discuter des relations de travail de qualité. Quand les travailleurs donnent le meilleur d’eux-mêmes, l’employeur est tenu de veiller à ce qu’ils se sentent bien, sans toutefois créer de relation paternaliste avec eux.

HR magazine / février 2023 22 QUELLES RELATIONS DE QUALITÉ? TABLE RONDE
texte: jo cobbaut / photos: wouter van vaerenbergh

De gauche à droite

Christ Veermeer, colonel BEM, commandant du recrutement et de la sélection à la Défense

Tommaso De Mol, Global Director Executive Search Services de Philips Healthcare

Stefaan Arryn, VP People de Silverfin

Tim Delye, People & Culture Leader de c&a

Stéphanie Michiels, DRH de The Reference

Wim De Jonghe, DRH de Delaware Belux

Kirsten Florentie, VP People & Engagement de Telenet

Dans quelle mesure pensez-vous qu’il est important de veiller aux relations entre collègues? Jusqu’où peut-on aller dans la vie privée des travailleurs?

Christ Veermeer (ministère de la Défense): «Pour la Défense, les relations personnelles au sein de nos unités sont très importantes et de ce fait, assez atypiques. Nos collaborateurs partent en mission pendant des mois, la communication est essentielle pour eux. En effet, ils veulent partager entre eux leurs expériences et leurs questions, y compris avec ceux qui restent. Lors d’un départ en mission, la famille et les amis sont souvent présents. Donc oui, les relations de travail sont la base de la confiance et sont souvent fortes. Autrefois, nous avions des troupes en Allemagne et toute la famille suivait. À l’époque, ce phénomène était encore plus marqué, mais aujourd’hui, la Défense peut s’appuyer sur les relations informelles qui se créent spontanément à travers les médias modernes. Nous impliquons les partenaires de nos collaborateurs lors d’événements ou d’occasions diverses. Pour être clair, chacun est libre de s’engager ou non dans cette démarche.»

Wim De Jonghe (Delaware): «Notre avis est nuancé. La collaboration est une compétence de base. En même temps, nous essayons de créer un contexte qui nous permet d’approfondir les relations entre nos salariés. Tout est

toujours plus personnalisé, il doit en aller de même pour la prise en charge des collaborateurs. Nous les laissons décider eux-mêmes jusqu’où ils veulent aller. Nous avons des collègues qui ont plutôt tendance à protéger leur famille, mais nous avons aussi plusieurs couples mariés sur le lieu de travail. Certains attendent que nous nous préoccupions de leur bien-être, d’autres en ont moins envie. Chez Delaware, tout est possible.»

Kirsten Florentie (Telenet): «Chez Telenet, les relations sont primordiales et cela correspond à ce que nous promettons à nos clients, à savoir une relation personnelle. Nous insistons sur la qualité des relations avec les clients et les collègues et attendons de chacun qu’il soit prêt à s’engager avec sincérité dans ce domaine. Cela ne signifie pas que vous devez partager des informations privées, mais que vous devez rester vous-même au travail. Cela correspond à nos valeurs, mais rejoint aussi l’importance de l’intelligence relationnelle pour notre entreprise. Ce que nous faisons pour nos clients, nous le faisons également en interne, les uns avec les autres.»

Tommaso De Mol (Philips Healthcare): «Chez Philips Healthcare, nous faisons constamment le lien avec notre Patient Journey et nos Patient Outcomes. Cela implique également pour nous que le travail se fait souvent sur la base

février 2023 / HR magazine 23

d’une conviction et d’un engagement personnels. S’y ajoute une réalité: tôt ou tard nos collaborateurs entrent eux aussi en contact avec nos équipements, nos services et nos solutions. Tout cela rend les relations entre collègues extrêmement importantes. Ils doivent créer des liens chez nous, mais aussi avec des patients ou des clients dans des organisations, des institutions... Pour les collaborateurs de Philips, le travail est de toute façon personnel. Les frontières entre les deux sphères sont généralement floues. Cela s’inscrit par ailleurs dans une longue tradition. Philips a notamment été l’une des toutes premières organisations des Pays-Bas à accorder des congés payés, à mettre en place des activités extrascolaires et, à un moment donné, à construire des maisons pour ses collaborateurs. Et cette préoccupation est restée, tout comme elle est toujours présente pour nos clients.»

CHOIX CONSCIENTS

Stefaan Arryn (Silverfin): «Nous laissons beaucoup de place aux choix individuels. Nous sommes une scale-up technologique, nos collaborateurs ont donc la possibilité de travailler n’importe quand et n’importe où, ce qui implique également qu’ils doivent signaler quand ils ne veulent pas être actifs. Dans une entreprise technologique en pleine croissance comme la nôtre, les choses se mélangent et se confondent un peu. Vous ne vous arrêtez pas de penser simplement parce que nous sommes le samedi. Nos collaborateurs choisissent cet environnement de travail. Il doit leur convenir. Les collaborateurs font ce choix consciemment. Il ressort d’une enquête de Securex qu’un grand nombre de collaborateurs restent accessibles pendant les périodes de vacances. Mais les questions de suivi ont montré que ceux qui le font de leur plein gré sont aussi ceux qui subissent peu de conséquences négatives. En revanche, l’impact sur le bien-être mental est très négatif pour ceux qui le font parce qu’ils s’y sentent obligés. Personnellement, je ne peux pas imaginer fermer mes canaux de communication en dehors des heures de travail, tout comme je ne peux pas imaginer ne pas être autorisé à répondre au message d’un ami pendant les heures de travail. Mais chacun doit faire ce choix pour lui-même. Chacun doit se demander si ce type d’organisation lui convient. Dans un tel environnement, il est également important de s’assurer que les collègues ne se retrouvent pas dans la zone de danger.»

Tim Delye (c&a): «Dans notre activité de vente au détail d’articles de mode, différentes populations sont impliquées. Nos acheteurs et nos designers sont appelés à être en contact avec nos fournisseurs et nos collègues de l’Est à des moments inhabituels. Ce qui entre également en ligne de compte, c’est l’engagement soutenu de nos collaborateurs envers la marque. Sans oublier une culture de la bienveillance très ancrée chez c&a. Mais aujourd’hui, nous nous

engageons toujours plus dans la voie du numérique et reconsidérons l’empreinte écologique de nos magasins. Dans notre cas, les familles des collaborateurs sont aussi des clients. Les membres de notre personnel et leur famille lisent également des articles dans la presse annonçant parfois de mauvaises nouvelles. Ils ont besoin de notre soutien. Ils cherchent également des informations sur ce qu’ils peuvent répondre aux questions de leur entourage. Dans un tel contexte, il est absolument indispensable d’entretenir les relations pour rendre les gens résilients. Les nouveaux arrivants choisissent beaucoup plus en fonction de leurs valeurs. Les nouveaux designers et chefs de produits évoquent immédiatement notre empreinte écologique.»

Stéphanie Michiels (The Reference): «Je pense aussi qu’un employeur n’est pas responsable du bonheur de ses collaborateurs, mais on peut les aider à développer des compétences qui les rendent plus résilients. De plus, nos collaborateurs représentent notre capital et nous savons que ceux qui peuvent être eux-mêmes se sentent mieux, sont plus performants et restent plus facilement et plus longtemps à bord. Pour notre part, nous faisons en sorte que nos collaborateurs se sentent chez eux. Ce n’est pas un hasard si notre niveau d’ancienneté au sein du secteur est élevé. La vie privée s’immisce de toute façon. Celui qui passe une mauvaise journée à cause d’un problème privé se sentira mieux s’il peut en parler et si l’employeur réagit avec l’attention nécessaire. Sans pour autant créer l’espoir que vous leur viendrez en aide en tant qu’employeur. Nous savons maintenant que les facteurs sous-jacents de l’épuisement professionnel (burn-out) forment un ensemble de facteurs contradictoires. Et certains d’entre eux sont liés à la fois au travail et à la vie privée. Nous avons adapté notre assurance afin que les collaborateurs en congé de maladie de longue durée pour cause de burn-out puissent désormais également bénéficier d’un coaching.»

Kirsten Florentie (Telenet): «Des enquêtes nous révèlent que huit collaborateurs sur dix parlent de leurs relations de travail à table, le soir chez eux.»

Stéphanie Michiels (The Reference): «Et inversement. Parfois, à la machine à café, vous demandez comment ça va et puis très rapidement, il n’est plus question de travail. Nous préférons un environnement où les collaborateurs sentent qu’ils peuvent partager ce qu’ils vivent, que ce soit chez eux ou au travail.»

HR magazine / février 2023 24 QUELLES RELATIONS DE QUALITÉ? TABLE RONDE
«Chez Telenet, les relations sont primordiales et cela correspond à ce que nous promettons à nos clients, à savoir une relation personnelle.»
Kirsten Florentie

«Pour les collaborateurs de Philips, le travail est de toute façon personnel. Les frontières entre les deux sphères sont généralement floues.»

Tommaso De Mol

PRENDRE SOIN DE SOI

Stefaan Arryn (Silverfin): «Quand vous savez combien d’heures les collaborateurs passent chez vous pour donner le meilleur d’eux-mêmes, il est de votre devoir de créer un contexte dans lequel ils puissent se sentir bien. Je pense qu’il s’agit presque d’une obligation morale. Cela va même au-delà du réflexe économique visant à assurer de meilleures performances de nos collaborateurs.»

Kirsten Florentie (Telenet): «Il faut faire attention à ne pas tomber dans une relation paternaliste avec les collaborateurs. Donnez-leur surtout la possibilité de prendre soin d’eux. Nous devons nous assurer que chacun est suffisamment fort et dispose des ressources et des possibilités nécessaires pour participer à un système qui lui permette de prendre soin de lui.»

Quels sont vos leviers pour créer un tel environnement bienveillant? Qu’attendez-vous des managers, par exemple?

Tim Delye (c&a): «Je vois que les managers n’ont pas toujours la vie facile. Dans notre secteur, le commerce de détail, le modèle économique est sous pression et nous sommes en pleine transformation. Dans de telles circonstances, il est parfois difficile d’engager ouvertement le dialogue. Nous mettons en place des formations obligatoires et là vous remarquez rapidement qui est avec nous et qui ne l’est pas. La qualité de la relation permet ensuite d’avoir une discussion avec ces managers et de leur ouvrir les yeux.»

Wim De Jonghe (Delaware): «Quelle que soit l’action que vous mettez en place, pour moi, le degré auquel les collaborateurs peuvent s’identifier les uns aux autres constitue la base de toute bonne relation. En tant que manager, vous devez bien savoir ce que la personne concernée doit faire, en évaluer la complexité, mais aussi connaître ses difficultés éventuelles... Et puis vous faites le lien avec la façon dont vous façonnez votre organisation. Il faut aussi réfléchir à qui confier un rôle de leader, de façon permanente ou non. Chez Delaware, l’idée de la durabilité est bien ancrée. Nous traduisons également ce principe par un engagement à transmettre une organisation meilleure que celle dans laquelle vous êtes entré. Nous essayons d’appliquer cela à tous les niveaux. L’un des aspects de cette approche est que les rôles de direction sont temporaires. Nous pensons que cela permet une meilleure compréhension de la situation, mais aussi des limites et des qualités de chacun. Cela signifie que le modèle de leadership garantit ici la qualité de la relation, peut-être même plus qu’à travers des évaluations de performance ou des moments de feed-back.»

Kirsten Florentie (Telenet): «Nous avons divisé le rôle de manager. Au niveau des RH, nous avons formulé deux rôles: chaque équipe a un product owner, qui est responsable des attentes à l’égard de l’équipe. Chacun a également un chapter lead qui le guide dans le développement de ses compétences. Ces deux pôles de leadership supposent des compétences différentes. Cela permet d’aider les collaborateurs de manière plus diversifiée, car il est parfois difficile de trouver les deux compétences chez la même personne. Je le remarque moi-même très nettement lorsque je demande à un collègue comment il va. Poser cette question en tant que simple collègue est une chose, mais dès que vous posez la même question en tant que manager, elle prend une dimension supplémentaire. En tant que manager, vous n’osez pas demander tout simplement à une personne malade comment elle va. Vous êtes à la fois un collègue et un être humain, mais cela me surprend de voir comment tout est différent dès que vous changez de rôle.»

février 2023 / HR magazine 25
«Dans une entreprise technologique comme la nôtre, les choses se confondent un peu. Vous ne vous arrêtez pas de penser simplement parce que nous sommes le samedi.»’

RESPONSABILITÉ PARTAGÉE

Le manager qui demande à quelqu’un comment il va ne devient-il pas une sorte d’inspecteur?

Kirsten Florentie (Telenet): «Non, je pense plutôt que le manager n’ose plus poser la question, car il craint la façon dont cela va être perçu. Le collaborateur ne risquet-il pas de se sentir contrôlé? Est-ce que je ne pénètre pas trop dans sa sphère privée?»

Stéphanie Michiels (The Reference): «Je constate aussi l’inverse. Je vois des collaborateurs qui sont devenus managers, mais qui sont aussi amis avec d’autres collègues. Et si leur relation amicale se détériore, alors tout va vraiment mal. Ici, la nécessité de leur apprendre à demander comment vas-tu? est même parfois encore plus grande. Comment diriger un collègue que vous fréquentez pendant vos loisirs?»

Kirsten Florentie (Telenet): «Il s’agit de trouver ce qui met un manager à l’aise dans une relation personnelle.»

Stefaan Arryn (Silverfin): «Une certaine routine pourrait-elle aider à désamorcer les sensibilités? J’essaie, à chaque fois que je rencontre quelqu’un, de lui demander comment il se sent. Les collaborateurs le savent. Je constate qu’ils y ont déjà réfléchi et qu’ils sont disposés dans une certaine mesure à les aborder en me disant, par exemple, qu’ils ne dorment vraiment pas bien ces derniers temps. Donc, je crois que c’est faisable, mais c’est vrai qu’on ne s’en rend pas compte quand les managers ne se sentent pas à l’aise.

Tommaso De Mol (Philips Healthcare): «Chez nous, nous examinons ces interactions en partant du principe que prendre soin les uns des autres est une responsabilité partagée. Nous pensons qu’il est du devoir de la GRH de donner à chacun la possibilité de prendre soin de soi et des autres, sans pour autant que cela relève de notre responsabilité exclusive. Pour ce faire, nous avons recours à différentes plateformes et tables rondes et faisons appel à plusieurs acteurs. Lorsqu’un manager est confronté à une situation où il ne se sent pas très à l’aise lorsqu’une personne de son équipe est confrontée à des problèmes, il peut contacter un coach. Nous avons beaucoup de coachs mentaux, des thérapeutes et même des psychologues certifiés, parfois pour des thèmes bien spécifiques. Nous voulons soutenir à la fois l’équipe et l’individu. Aux Pays-Bas, le gouvernement nous pousse fortement dans cette direction. Au niveau international aussi, la question du burn-out commence à prendre de l’importance dans la société et le cadre réglementaire suit le mouvement. Le phénomène du burn-out est complexe et, en effet, les facteurs ne sont pas tous liés au travail, mais ceux qui le sont ne doivent pas être ignorés. Philips investit énormément dans l’accompagnement professionnel à tous les niveaux. Nous le faisons non seulement parce que le gou-

vernement l’impose en partie, mais aussi parce que cette obligation nous sert de guide. Tous nos coachs sont fortement sollicités. Ce sont des coachs externes et internes qui soutiennent à la fois des groupes et des personnes. Chacun peut également profiter d’un accompagnement personnalisé. Certains parcours avec des groupes de travail durent même plusieurs mois.»

Christ Veermeer (Défense): «Chaque jour, une quarantaine de psychologues participent dans mon environnement de travail à la sélection de candidats et à des projets R&D essentiels. L’un d’eux est également formé en tant que coach spécialiste du burn-out. Nous proposons depuis longtemps un soutien psychologique aux opérationnels, mais la vague de burn-outs nous a appris qu’on ne peut plus séparer travail et vie privée. Nous pensons également que la confiance doit être préservée. Chacun peut à tout moment s’adresser à une personne de confiance de son choix et il n’est pas nécessaire que cela se fasse sur son propre site. Je voudrais encore réagir à la question des check-ins: je sais d’expérience que l’on peut remplacer le comment ça va? par une approche personnelle. Exemple: je suis allé hier à un match de football ou à un concert. Je constate que raconter des petites histoires sur soi suscite toujours des réactions. La confiance est cruciale dans un environnement comme celui de la Défense. Vous avez envie de faire confiance à vos collègues quand vous maniez des armes.» ¶

HR magazine / février 2023 26
TABLE RONDE
QUELLES RELATIONS DE QUALITÉ?
«La vague de burnouts nous a appris qu’on ne peut plus séparer travail et vie privée.»
Christ Veermeer
«La collaboration est une compétence de base, mais notre organisation essaie de créer un contexte qui nous permet d’approfondir les relations personnelles.»

LIVRES OPERATIONS

Indexation: le transport routier souffre

À cause de l’indexation des salaires, nos entreprises de transport perdent des clients étrangers. L’indexation de 10,96% qui a eu lieu le 1er janvier a donc un impact négatif.

«Les salaires représentent environ 40% de nos coûts totaux et ils viennent d’augmenter de près de 11% à cause de l’indexation automatique», regrette Benny Smets, CEO de Ninatrans. «Cette hausse s’ajoute à l’évolution générale des prix. Le coût des nouveaux véhicules, des assurances, de l’énergie, des carburants et toutes les dépenses générales est parti à la hausse. Les clients belges connaissent la situation. Nous pouvons compter sur leur compréhension. Mais les entreprises des Pays-Bas, d’Allemagne ou de France nous demandent pourquoi nos nouveaux contrats sont devenus plus chers que ceux de nos concurrents locaux. J’ai déjà perdu deux clients étrangers. Ils ont préféré un transporteur national. Chez d’autres clients, les négociations se poursuivent mais elles se déroulent avec difficulté.»

SURCHARGE CARBURANT

Il existe un mécanisme qui permet d’amortir les évolutions des prix des carburants. «La surcharge carburant est très connue. Ce mécanisme neutralise les augmentations et les baisses des prix parce que vous pouvez les porter en compte. Cela n’existe pas pour les augmentations de salaire.»

À cause de l’indexation salariale, un système typiquement belge et pratiquement unique en Europe, les transporteurs belges sont redevenus les plus chers de l’Union. «Nous étions dans cette position il y a quelques années. Nous avons beaucoup travaillé pour éliminer cette différence mais nos efforts sont réduits à néant en raison de la hausse

Le pouvoir du papier

des coûts salariaux. Récemment, les Pays-Bas étaient un peu plus chers que nous. Ce n’est plus cas aujourd’hui. Nous pouvons parfois améliorer notre position concurrentielle en offrant un meilleur service, mieux adapté. Mais quand nous n’y parvenons pas, nos tarifs nous éjectent du marché», affirme Benny Smets.

AGIR SUR LES COÛTS BRUTS

«Je trouve parfaitement normal que nos chauffeurs et nos autres employés bénéficient d’un salaire net susceptible de compenser l’inflation. Mais notre entreprise doit régler les frais salariaux totaux qui explosent à cause de l’indexation. Le gouvernement devrait faire attention à notre position compétitive qui se dégrade», affirme Benny Smets. Ninatrans est un transporteur de Louvain qui possède des filiales aux Pays-Bas et en Allemagne. Ce groupe international compte plus de trois cents salariés et réalise un chiffre d’affaires annuel de 45 millions d’euros. Le secteur ne souffre pas uniquement de coûts salariaux élevés, il doit aussi affronter une pénurie de main-d’œuvre.

Rien qu’en Flandre, on compte 1.900 offres d’emploi de chauffeurs qui ne sont pas pourvues. SD Worx a analysé les données de plus de 5.000 travailleurs et corrige l’image classique de chauffeurs internationaux toujours sur la route. Il y a au moins trois catégories. Le chauffeur international est régulièrement en dehors de chez lui. Celui qui transporte des conteneurs maritimes franchit les frontières, mais surtout pour se rendre dans l’hinterland des ports. Quant aux chauffeurs qui effectuent des tournées régulières, ils suivent des horaires fixes, sans longues attentes. Sauf dans les embouteillages belges.

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Vous voulez convaincre votre patron, votre client, votre partenaire ou votre enfant? Dans ce cas, évitez de multiplier les arguments, mais entamez la conversation avec de bonnes questions! Avant de chercher à vous comprendre, les autres veulent avant tout se sentir compris. Or, ceci n’est possible que si vous leur posez des questions intelligentes. Oui, il y a des questions idiotes vous aide à concevoir de bonnes questions et vous apprend à mieux écouter votre interlocuteur.

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février 2023 / HR magazine 27
BRF
«Les salaires représentent environ 40% de nos coûts totaux et ils viennent d’augmenter de près de 11% à cause de l’indexation automatique.»
Benny Smets CEO de Ninatrans

Équipes occidentales et orientales: le yin et le yang

texte: jo cobbaut

Jia Li se souvient très bien de ce qu’elle pensait quand elle a atterri en Europe en 2004. «C’était comme si j’arrivais sur une autre planète», dit-elle. Aujourd’hui, elle se décrit comme une eurasiatique heureuse. Son expérience interculturelle enrichit sa réflexion quand elle s’intéresse à son sujet de recherche favori: la nature de la dynamique des équipes.

Jia Li a effectué toute sa carrière dans le monde universitaire. Elle a effectué des recherches et a donné cours aux Pays-Bas et en Allemagne. Son domaine d’expertise? Le comportement organisationnel, plus particulièrement le travail en équipe et le leadership des équipes. En septembre 2022, elle a été nommée professeure en comportement organisationnel de la Vlerick School.

Quelle sorte de recherches faites-vous?

Jia Li: «Je travaille sur des études longitudinales, c’est mon approche spécifique. Les études sur les équipes adoptent souvent une perspective statique, par exemple en distribuant un questionnaire isolé ou en observant une équipe pendant une courte période. Mais certaines équipes vivent quelques semaines, d’autres quelques mois, et d’autres encore, plu-

sieurs années. Si vous voulez comprendre les rapports entre les membres de ces groupes, vous ne pouvez pas vous contenter d’un instantané. Je réalise au fil du temps des enquêtes en plusieurs vagues pour voir comment évoluent les modèles d’interaction entre les équipiers. Je veux étudier le développement des équipes dans le temps et leur manière de gérer les changements dans leur composition. Il y a toujours de nouveaux membres qui arrivent, d’autres qui sont remplacés et certains qui quittent le groupe.»

Pouvez-vous partager quelques-unes de vos découvertes?

Jia Li: «On peut faire la distinction entre les équipes qui investissent dans des actions destinées à améliorer les résultats à court terme et celles qui se consacrent à des actions qui auront des résultats positifs à long terme. La première catégorie choisira plutôt des aspects tangibles, comme la rémunération financière, la différentiation des statuts … La seconde catégorie préférera les facteurs immatériels, comme les objectifs collectifs, la qualité des relations … Ces deux approches diffèrent dans le type de formation qu’elles vont privilégier. La première catégorie d’équipes investira davantage dans des formations destinées à améliorer des compétences

HR magazine / février 2023 28
DIVERSITÉ OPERATIONS ID Jia Li — FONCTION
hoofddocent
Business School
Universitair
Organisatiegedrag Vlerick

Les robots sociaux peuvent compenser le manque de personnel qualifié.

L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE PEUT-ELLE NOUS AIDER À DEVENIR DE MEILLEURS COLLÈGUES?

L’intelligence artificielle devrait nous rendre capables de prendre de meilleures décisions. Mais il est possible aussi que l’IA améliore notre intelligence émotionnelle.Pourrions-nous devenir de meilleurs collègues grâce à elle?

Quand on parle d’intelligence artificielle, on pense en premier lieu à l’optimalisation de processus afin d’augmenter notre productivité. Mais les consultants de Deloitte suggèrent qu’elle pourrait aussi améliorer notre intelligence émotionnelle. Ils décrivent une situation hypothétique: quelqu’un reçoit un e-mail qui l’irrite fortement. Il a dès lors envie de répondre vertement et prépare un message sec. Imaginons maintenant qu’un système intelligent réagisse en proposant une formulation mieux adaptée… En réalité, l’IA ne se limite pas à améliorer votre diplomatie épistolaire. De nombreuses autres applications sont susceptibles d’améliorer nos interactions sociales.

Monica Mahto et al., AI for work relationships may be a great untapped opportunity

cognitives, l’autre s’intéressera aux formations qui favorisent la cohésion de l’équipe. Le premier type de formations a souvent un impact fort et immédiat mais ses effets s’estompent rapidement. Le deuxième type offre des résultats moins directs parce que les équipiers ont besoin de temps pour changer de comportement et concrétiser ce qu’ils ont appris. Je vois le même genre de modèle pour les prestations globales des équipes. Les équipes de la première catégorie ont tendance à en registrer des résultats plus vite mais après quelque temps, les équipes du second type afficheront de meilleures prestations que celles qui se concentrent sur des objectifs à court terme. Cela ne veut pas dire qu’une catégorie d’équipes ou de formations serait meilleure que l’autre. Des questions de priorités à long ou à court terme jouent ici un rôle. En fait, les organisations doivent être conscientes de ces différences de perspectives temporelles.»

Vous vivez depuis 2004 en Europe. Qu’aviezvous en tête en arrivant sur le Vieux Continent pour la première fois?

Jia li: «C’était comme si j’avais atterri sur une autre planète. Pour commencer, les Néer-

landais sont beaucoup plus grands que les Chinois. Plus sérieusement, ils vont droit au but. Ils semblent ne pas avoir de tabous sociaux dans leurs conversations. Il n’y a aucun sujet qui ne puisse être discuté ouvertement. La sexualité, la consommation de drogues… on peut parler de tout de façon informelle. En Chine, nous respectons beaucoup de tabous. Nous ne parlons jamais de la mort, pour ne citer qu’un exemple. La même règle s’applique sur les doutes éventuels à propos d’un responsable ou d’un processus de travail. Dans la culture néerlandaise, ces problèmes sont abordés avec franchise. Quand j’étais étudiante ici, on m’encourageait à exprimer mon opinion. C’était difficile au début. J’ai fini par m’adapter parce que j’ai compris que cette liberté d’expression est cruciale dans le débat scientifique.»

Comment peut-on gérer des équipes culturellement mixtes?

Jia Li: «Je pense qu’il faut adopter une approche différente dans les équipes occidentales et orientales. Je travaille sur plusieurs projets de recherche. Pour certains, j’interviens exclusivement avec des coauteurs asiatiques, pour d’autres, avec des coauteurs exclusivement occidentaux, mais aussi dans des équipes mixtes. Et les dynamiques varient beaucoup. Un exemple? Dans une équipe majoritairement occidentale, la coutume est de répartir les tâches et d’attribuer des responsabilités individuelles. Dans une phase finale, les résultats sont présentés en commun. Les équipes asiatiques définissent aussi différentes tâches mais ses membres les abordent ensemble l’une après l’autre. D’un point de vue occidental, tout se passe comme si les collègues asiatiques manquaient d’indépendance individuelle. Mais d’un point de vue asiatique, on dirait que les collègues occidentaux négligent la cohésion de leur équipe. On voit à quel point il est important que les managers comprennent quelle est l’approche préférée de leurs équipiers.»

Vous avez étudié aussi l’intelligence artificielle et le potentiel des robots dans : «Pour moi, le potentiel de ces technologies se situe surtout dans des environnements comme les hôpitaux et les centres de soins. Les robots sociaux peuvent contribuer à compenser le manque de personnel. Ils peuvent aussi atténuer le sentiment d’isolement social ou de solitude. Je travaille avec des scientifiques des Pays-Bas, de Chine et des ÉtatsUnis pour comprendre comment les robots et les êtres humains peuvent collaborer.» ¶

février 2023 / HR magazine 29
«D’un point de vue occidental, les Asiatiques manquent d’indépendance. Mais d’un point de vue asiatique, les collègues occidentaux négligent la cohésion de leur équipe.»
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Contre la guerre des talents, la culture du feed-back

texte: françois weerts

Séduire de nouveaux collaborateurs et les garder dans l'organisation: ces défis préoccupent tous les DRH de Belgique et d'ailleurs. Il existe une solution puissante: développer une vraie culture du feed-back.

Les recherches sur Google sont toujours un bon indicateur des préoccupations du public. Shana Mertens, chercheuse de l'université de Gand, s'est amusée à ce petit jeu avec trois expressions. Ainsi, «War of Talent» donne 385 millions de résultats. «Great Resignation» en obtient 591 millions et «Quiet Quitting», 305 millions. Il se passe clairement quelque chose dans le marché du travail. Quelque chose qui tourne autour de l'attraction des candidats et de la rétention des salariés.

La solution, selon la chercheuse? Il faut réussir à impliquer les travailleurs et à consolider leur lien avec l'organisation. «Les salariés doivent se sentir entendus, savoir qu'ils peuvent donner leur avis et que leur voix sera écoutée», explique Shana Mertens. «La qualité de la relation avec le manager est capitale, de même que la conviction que l'organisation souhaite investir dans leur développement. Enfin, il faut instaurer un dialogue constructif.» Elle en est donc convaincue, c'est la culture du feed-back qui fait la différence. Elle constitue même une arme puissante dans la guerre des talents. Mais comment définir cette culture? «Il s'agit d'une ambiance dans l'organisation qui permet aux dirigeants et aux salariés de se sentir bien dans la recherche d'un feed-back constructif», répond la chercheuse.

FORMATION ET COMMUNICATION

La culture du feed-back rejoint celle de la formation et celle de la communication. «Le feed-back devient un atout de

la politique de formation en apprenant les uns des autres. La communication, elle, est essentielle pour favoriser les échanges.

Bien sûr, la culture du feed-back différera d'une organisation à l'autre. La taille joue un rôle, comme les méthodes de travail (par projet?), le poids des équipes, les grands objectifs de l'entreprise… «Quoi qu'il en soit, certains critères influencent de façon décisive la qualité de cette culture», poursuit Shana Mertens.

• D'abord, les messages de feed-back doivent être constructifs , il faut consacrer du temps à la discussion.

• Il est préférable d'appuyer sur les forces plutôt que sur les faiblesses.

• Le message doit être tourné vers l'avenir, pas ressasser le passé.

• Nous avons tous besoin d'objectifs. Ici, l'idée sera de réfléchir ensemble aux meilleurs moyens de l'atteindre en donnant la priorité au monitoring. «Le voyage vaut mieux que la destination», souligne la chercheuse.

• On l'aura compris: le rôle du responsable doit évoluer vers celui de people manager

• En même temps, cette responsabilité est partagée: le salarié doit aussi participer à l'élaboration de cette culture. Les impulsions doivent venir de la base. On en vient ici à la notion de leadership individuel.

• Enfin, sans sécurité psychologique, pas de culture du feed-back qui tienne. La prise de risques doit être possible.

«En définitive, le feed-back repose avant tout sur le dialogue», conclut Shana Mertens. ¶

FONCTION

Chercheuse de l'université de Gand —

Shana Mertens a présenté ces idées lors de notre événement HRDesign qui a eu lieu fin novembre à Durbuy.

HR magazine / février 2023 30 RECRUTEMENT OPERATIONS
ID
Shana Mertens —
«La culture du feed-back repose avant tout sur le dialogue constructif.»

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DÉCISIONS MORALES

L’un de mes étudiants a rendu son travail très en retard. Un mois après l’échéance, sans prévenir. Comme si c’était la chose la plus normale du monde. Je n’avais jamais vécu une négligence comparable. En principe, cette attitude mérite un zéro. Mais cette décision brutale ne me plaisait pas vraiment. J’ai alors mis le problème sur la table familiale. «Il n’y a donc pas de règle dans ton école?» «Oui, mais je veux surtout que mes étudiants apprennent le plus possible.» «D’accord, mais ce n’est tout de même pas juste pour ses condisciples!» Quelle décision prendre?

Kathleen Vangronsvelt

FONCTION

LA PAROLE DE L’EXPERT

Que dit la science?

Nous prenons des décisions morales dans une perspective de justice ou de sollicitude (Gilligan, 1982). Ce sont deux façons très différentes de regarder les problèmes. Dans une perspective de justice, nous considérons un problème en lui cherchant une solution équitable. Mentir à son père? Pas d’argent de poche. Contrevenir aux lois de la vie en société? En prison. Avec ce type de réponses, nous cherchons à mettre en œuvre une justice objective, qui soit la plus proche possible de l’idéal d’un jugement équitable.

Dans une perspective de sollicitude, nous approchons le problème en recherchant une solution responsable. Un mensonge? Le père et le fils s’assoient pour discuter de l’honnêteté. Une infraction à la loi? Des travaux d’intérêt général vous permettront de constater les conséquences de vos actes. Avec ce type de réponse, nous essayons de modifier la position des acteurs dans la relation, d’arranger autrement les pièces du puzzle.

Vous avez probablement une préférence pour l’une de ces deux approches. Les hommes sont plutôt tentés par la justice, les femmes sont plus partagées. Dans notre culture occidentale, la justice est la perspective dominante.

pouvez changer de perspective à volonté et vous discernerez sans difficulté l’autre dessin.

Qu’est-ce que cela signifie au travail?

Professeure en psychologie des organisations de l’Antwerp Management School —

RÉFÉRENCES

Kohlberg, L. (1971). Stages of moral development. In C. M. Beck, B. S. Crittenden, & E. V. Sullivan (Eds.), Moral education. Toronto: University of Toronto Press.Gilligan, C. (1982). In a Different Voice: Psychological Theory and Women’s Development.

Carol Gilligan. Cambridge, Massachussets: Harvard University Press.

D’où viennent ces perspectives?

On a longtemps pensé que la justice était la norme du progrès moral. C’est elle qui déterminait la maturité du développement moral d’un enfant dans le cadre de son éducation (pensons à Kohlberg ou Piaget).

Aujourd’hui, nous savons qu’il existe (au moins) deux perspectives pour aborder les questions morales. Encore plus important: nous savons qu’il y existe des va-et-vient entre ces deux perspectives. Gilligan compare ce phénomène aux illusions d’optique dans lesquelles on mélange deux images. Vous percevez presque automatiquement le canard en premier, ou le lapin; la vieille femme ou la jeune fille. Mais quand quelqu’un vous montre qu’il y a deux dessins, vous

On peut toujours changer de perspective, quitter le souci de justice pour se tourner vers la sollicitude. Cette perspective, on peut l’adopter soi-même ou la proposer à ses collègues.

Prenons l’exemple des débats sur les I-deals (ces accords personnels entre un salarié et son employeur qui accordent des avantages aux deux parties). «Ce n’est pas juste qu’un tel puisse travailler un jour de plus à la maison.» «Quelle drôle d’idée, ce service de repassage! La moitié d’entre nous vient au bureau en train.» Si l’on suit ces avis qui se placent dans une perspective de justice, on peut se demander si cet I-deal est une décision équitable. Et si la politique de l’entreprise est vraiment juste. Dans une perspective fondée sur la sollicitude, ces questions ne se posent pas. Celles que l’on peut émettre iront dans une autre direction: «Que pourrions-nous faire de plus pour améliorer le sort de certains collègues?»

On peut aussi penser à des conflits dans lesquels les individus sont bloqués dans leur perspective de justice. «Ce n’est pas juste. J’ai consacré à ce projet beaucoup plus d’efforts que toi. Ce projet, c’est à moi qu’il aurait dû revenir.» Si l’on prend en compte l’équité, ce raisonnement est sans doute vrai mais dans une perspective de sollicitude, on peut envisager les choses autrement. On pourrait accepter l’idée que c’est ce qu’elle avait toujours voulu faire, le rêve de sa vie. Du coup, il sera possible d’aider cette collègue déçue à aller de l’avant.

Et l’étudiant, qu’est-il devenu?

J’ai adopté une perspective de sollicitude et je lui ai donné une deuxième chance. Ce n’était peut-être pas parfaitement équitable pour ses condisciples, mais dans la relation entre un professeur et son étudiant, il y a toujours une manière responsable de créer une opportunité d’apprentissage. C’est mon avis. ¶

/QUE DIT LA SCIENCE?/
HR magazine / février 2023 32

Comment les candidats postulerontils en 2023?

La rétention de leur personnel préoccupe la majorité des employeurs belges (84%), selon Robert Half. Ces doutes ne paraissent pas totalement injustifiés, puisque près de la moitié des employés (48%) déclarent être ouverts à un nouvel emploi dans les six mois à venir. «Le salaire reste souvent le facteur décisif lorsque les gens hésitent entre deux emplois, mais d’autres facteurs contribuent à attirer des talents», déclare Joël Poilvache, Regional Managing Director de Robert Half.

Cette incertitude à propos de la rétention de talents incite les entreprises à réfléchir aux facteurs qui poussent un chercheur d’emploi à les choisir eux, plutôt qu’un concurrent. La moitié des employés belges étant désormais disposés à changer d’emploi, et 17% d’entre eux indiquant qu’ils recherchent activement un nouveau défi, il est essentiel de comprendre ce qui peut faire la différence. Robert Half a interrogé 1.500 employés. Résultats?

• Le salaire est la raison décisive pour choisir une entreprise plutôt qu’une autre (38%).

• Les deux autres raisons principales sont la localisation de l’entreprise (20%) et la flexibilité accordée (12%).

• Les avantages sociaux (6%) et un travail stimulant (5%) contribuent également à la décision finale.

«Compte tenu de la situation actuelle, il n’est pas surprenant que le salaire soit toujours aussi important», explique Joël Poilvache. «Mais il est également important que les demandeurs ne s’y attardent pas. Le salaire n’est souvent qu’un incitatif à court terme. À plus long terme, un candidat aura besoin de plus de flexibilité, d’une assurance supplémentaire ou d’un budget de mobilité, par exemple. En même temps, les chiffres ne mentent pas et il faut être compétitif dans votre offre.» ¶

BRF

1-2-3 MINUTES AVEC NIKOLAS VANDELANOTTE

Au moins 36,3% de l’ensemble des salariés indiquent ne pas faire de sport ou d’exercice physique avant ou après le travail. «Pourtant, l’exercice physique permet de réduire l’incidence de nombreux problèmes de santé au travail, comme les problèmes articulaires», soutient Marc Borguet, manager de la prévention et du bien-être chez Liantis, auteur de cette étude.

36,3% jours 7,5

Jamais au cours de ces dernières années il n’y a eu autant de malades au travail qu’en 2022. L’absentéisme pour maladie de courte durée a atteint un pic avec une moyenne de 7,5 jours par travailleur. Cela représente plus d’un jour entier en plus par rapport aux années précédentes. Chiffres d’Acerta.

Les nouveaux travailleurs qui décident de démissionner dans les trois mois bénéficient d’une prime de départ. Une initiative du cabinet d’expertise comptable et d’audit Vandelanotte.

1. Que représente exactement cette prime de départ?

Les nouveaux travailleurs qui donnent leur démission dans les trois mois après leur entrée en service ont droit à une indemnité de départ: 2.500 euros pour ceux qui partent après moins d’un mois, 5.000 euros pour ceux qui démissionnent après deux mois et 7.500 euros pour ceux qui quittent l’entreprise après trois mois. Satisfait ou remboursé. La garantie de satisfaction fait basculer le risque d’un changement de carrière du travailleur vers l’employeur.

2. L’action est-elle un succès?

«En dépit de la pénurie sur le marché du travail, nous recevons aujourd’hui plus de candidatures, et les candidats indiquent qu’ils choisissent délibérément notre culture et nos valeurs», assure le patron du cabinet, Nikolas Vandelanotte. «Par rapport à l’année dernière, nous avons reçu 18% de candidatures en plus. Et parmi les nouvelles recrues, aucune n’a donné sa démission. Notre campagne a manifestement visé juste.»

3. Combien de personnes sont-elles concernées?

Tous les nouveaux travailleurs qui ont au moins deux ans d’expérience et qui viennent directement d’un autre employeur ont droit à la prime de départ. «Sur les 66 nouveaux collaborateurs embauchés par Vandelanotte au cours des six derniers mois, 14 remplissent ces conditions. Aucun d’entre eux n’est parti après moins de trois mois. Dès lors, leurs équipes recevront chacune 2 500 euros pour organiser une activité avec tous leurs membres. La prime de départ fera désormais partie intégrante de notre politique de recrutement.» ¶

février 2023 / HR magazine 33

«La transformation agile améliore la relation avec les clients et les salariés»

Proximus a lancé il y a un an un projet ambitieux de transformation agile pour mieux répondre aux tendances du marché. La collaboration en cercles est l’un des trois modèles: elle se traduit par une nette amélioration de l’efficacité, de la coopération et de la communication entre les salariés. «Il faut aussi adopter une mentalité agile pour nous améliorer en continu», assure Valérie Vermeire.

L’agilité aide les entreprises à réagir plus rapidement aux changements. Proximus a lancé fin 2021 un projet de transformation de cette nature. «Nous ne sommes pas partis de rien», affirme Valérie Vermeire, Director Strategic HR-Solutions de la compagnie de télécommunications. «Nous nous sommes laissés inspirer par plusieurs entreprises belges et étrangères. Plusieurs équipes avaient déjà testé la méthode agile. Elles s’étaient rendu compte que cette manière de travailler a une influence positive sur la satisfaction des clients et l’engagement des salariés.»

En se basant sur ces tests, Proximus a accéléré sa transformation. L’entreprise applique trois modèles: les cercles, les tribus et les équipes agiles. Les premiers tests ont eu lieu dans le service à la clientèle de Katia Battheu, Director Customer Service. Elle a été l’une des premières à mettre en œuvre les cercles chez Proximus. «Nous avions remarqué que l’organisation fonctionnelle du service à la clientèle avait ses limites. On se repassait trop souvent les problèmes entre les différents départements. Réunir différentes compétences dans un cercle et leur confier la responsabilité de trouver une solution de bout en bout, cela fait vraiment la différence pour le client. Pour le traitement d’une plainte, vous avez parfois besoin de collègues de la deuxième ou de la troisième ligne. Comme ils sont désormais à côté de vous, la communication est beaucoup plus facile.»

Katia Battheu a extrait ces collaborateurs de la production pendant une semaine. «Ils ont pu rencontrer des collègues avec qui ils correspondaient uniquement par courriel. Nous leur avons aussi montré toute l’importance de la collaboration. Chaque interaction avec le client prend peutêtre plus de temps pour parvenir à trouver une solution complète, mais cette approche correspond à notre principe selon lequel nous devons être bons du premier coup. Nous vérifions aussi si le client revient avec sa plainte.»

Il était important que l’application de cette méthode dans l’environnement opérationnel n’ait aucun impact sur l’expérience des clients. «Nos clients ne doivent pas s’apercevoir que nous sommes en pleine transformation», affirme Valérie Vermeire. «Et nous y réussissons plutôt bien.»

EFFET BOULE DE NEIGE

Généralement, ce sont les départements informatiques qui se convertissent à l’agilité, plus rarement les services opérationnels, comme les centres d’appel. «Il est en effet très innovant de réunir une équipe multidisciplinaire composée de travailleurs opérationnels venus du back-office, du front-office, de l’administration et du soutien technique», souligne Katia Battheu. Avec un résultat probant: l’enga-

«Nos clients ne doivent pas s’apercevoir que nous sommes en pleine transformation.»

HR magazine / février 2023 34
AGILITÉ TECH
texte: melanie de vrieze / photo: jan locus

gement des salariés s’améliore nettement. Ce qui est aussi le cas de l’expérience des clients: elle a progressé en satisfaction de 10 à 20% en fonction des segments. «Cela a renforcé notre conviction que l’agilité est le modèle opérationnel de l’avenir.»

À l’origine, Katia Battheu s’est reposée sur des volontaires pour le projet test. Depuis, la moitié de son département est organisé en cercles. «En travaillant avec des volontaires, vous obtenez un effet boule de neige positif. Quand nous avons décidé d’étendre les cercles, les résistances s’étaient déjà estompées.»

TÉMOIGNAGES

Proximus est au beau milieu de sa transition, mais ses salariés réagissent déjà positivement. Mais il faut du temps pour s’adapter. «Leur chef hiérarchique est leur Team Facilitator», explique Valérie Vermeire. «Mais ils ne s’adressent pas à lui quand ils veulent parler de leurs compétences. Pour cela, il y a le Learning Professional. Quand nous avons compris que les trois premiers projets tests étaient positifs, nous nous sommes rassurés. Dès que quelqu’un a une question, nous pouvons le renvoyer vers un exemple qui fonctionne bien.»

L’encadrement est au moins aussi important. «Nous vérifions régulièrement si nous restons au même niveau qu’au début. Nous organisons des stand-ups qui permettent aux équipiers de partager leurs progrès, ou des rétrospectives grâce auxquelles ils peuvent identifier les points d’amélioration.»

FACTEURS DE SUCCÈS

Valérie Vermeire et Katia Battheu ont tiré quelques leçons de cette transformation agile. La gestion des stakeholders à tous les niveaux est l’une des clés du succès de l’opération. «Nous y avons consacré beaucoup de temps», assure Valérie Vermeire. «Je ne parle pas seulement de la concertation avec notre CEO, Guillaume Boutin, mais aussi des relations avec nos partenaires sociaux. En les mettant très tôt dans le bain et en leur affirmant que nous croyions beaucoup dans notre modèle, nous avons pu les convaincre que les salariés s’en trouveraient mieux. Nous avons aussi osé parler de ce qui se passait moins bien dans le projet. Quand vous déployez votre projet et que vous rencontrez certains problèmes, il faut avoir le courage de le reconnaître. Nous demandons aussi à notre personnel de nous donner des suggestions d’amélioration.»

Une autre leçon est claire: il faut du temps pour introduire des changements. «Ce problème est souvent sous-estimé», regrette Katia Battheu. «Quand une grande

entreprise comme la nôtre lance un nouveau projet, les salariés sont impatients et veulent des résultats immédiats. Ce n’est pas parce que vous organisez aujourd’hui un nouveau cercle que vous en verrez les résultats demain. Il faut bien communiquer à ce sujet.»

Cette communication s’effectue à tous les niveaux et par tous les canaux possibles: via une présentation, sur place avec les salariés ou de façon numérique. «Je ne me contente pas de communiquer avec les collaborateurs dans le cercle mais aussi à l’extérieur de lui. Quand vous essayez quelque chose de neuf, vous avez parfois la tentation de vous intéresser surtout à ceux qui sont au cœur du changement. Mais il faut aussi impliquer les autres, ils sont tout aussi importants.»

Il y a une chose au moins aussi essentielle que les cercles: l’état d’esprit agile, centré sur l’idée de l’amélioration continue. Cela veut dire que Proximus revoit et affine en permanence ses processus et ses systèmes pour pouvoir continuer à répondre à l’évolution des besoins de ses clients. «Les salariés se rendent compte qu’ils sont parties prenantes de cette amélioration continue», conclut Valérie Vermeire. «Nous ne finirons jamais ce projet, nous devrons le porter toujours plus loin pour nous perfectionner.» ¶

De gauche à droite Valérie Vermeire

Director Strategic HR-Solutions de Proximus et Katia Battheu

Director Customer Service de Proximus

HR magazine / février 2023 36 TECH AGILITÉ
«Le changement demande du temps. Or, les salariés ont envie de voir très vite les premiers résultats.»
Katia Battheu

ID Jef Cumps — FONCTION

Coach spécialisé dans l'agilité des organisations

Jef Cumps a présenté ces idées lors de notre événement HRDesign qui a eu lieu en décembre à Durbuy.

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Équipes autogouvernées: mythes et idées reçues

Pour Jef Cumps, coach spécialisé dans l'agilité des organisations, toutes les grandes idées sur l'autogouvernance ou les équipes autonomes partent d'une bonne intention. Mais la réussite n'est pas toujours au bout du chemin.

texte: françois weerts

QUELLE LIBERTÉ?

iNe dites pas: «Les équipes autogérées doivent avoir une liberté complète.»

«Bien sûr, la liberté favorise la créativité, l'engagement, la collaboration et l'agilité, mais qu'en est-il du pilotage de l'organisation?», demande l'expert. «Il ne faut pas perdre de vue plusieurs choses: il y a des résultats à atteindre, l'efficacité doit être optimale. Bref, il faut une certaine dose de contrôle. «Autrement dit, l'idéal est de concilier ces deux pôles. Une équipe autogouvernée poursuivra un objectif partagé, inspirant et mesurable. Elle évoluera dans un cadre motivant où les règles sont transparentes. Elle procédera aussi à des évaluations régulières pour améliorer ses résultats et la coopération entre ses membres.

rDites: «Les équipes exercent leur autonomie dans un cadre clair, qui les aide à atteindre leurs objectifs.»

LA PLACE DES MANAGERS

iNe dites pas: «Les managers deviennent inutiles dans les équipes autogérées.»

«C'est vrai», explique Jef Cumps. «Les équipes autogérées prennent en charge certaines fonctions traditionnellement dévolues aux managers. La planification des tâches, par exemple, la coordination ou la résolution de problèmes. Cela ne veut pas dire qu'ils deviennent superflus, au contraire: ils doivent assumer d'autres rôles.»

Le premier de ces rôles est celui de leader. «C'est la personne qui indique la direction, qui donne le sens de l'action de l'équipe, qui définit les grands objectifs. Elle fixe aussi les limites du terrain de jeu.»

Une équipe autogouvernée a également besoin d'une fonction de coach. «Il s'agit ici d'être capable de diriger les membres de l'équipe en misant sur la communication et la collaboration. Le manager crée la sécurité nécessaire pour que chacun puisse s'exprimer sans risque et il poursuit un objectif fondamental: il aide son équipe à progresser.» Il faut noter que les rôles de leader et de coach ne sont pas nécessairement endossés par la même personne.»

rDites: «Les équipes ont besoin de leaders et de coachs forts.»

i Ne dites pas: «Il faut oser se lancer à fond dans l'aventure.»

Quand une entreprise ou un département se décide à se convertir aux équipes autogouvernées, la tendance est grande d'avoir de l'audace et de mettre les bouchées doubles. «Mais le processus doit rester lent parce qu'il réclame beaucoup d'apprentissage. Il faut apprendre à communiquer, à planifier le travail ensemble, à prendre des décisions collectivement… On ne peut progresser dans cette voie qu'en prenant le temps de s'améliorer en continu.»

Le même principe s'applique aux managers. Eux aussi doivent apprendre leur nouveau rôle de leader et de coach. Ils doivent oser lâcher prise, ce qui ne se fait pas en un jour. Ils doivent entretenir leurs réseaux, savoir communiquer et acquérir de nouvelles compétences pour mener leur équipe à bon port. Bref, une équipe n'étant pas l'autre, il faut accepter d'évoluer à son rythme. «La précipitation vous expose à connaître de douloureuses déconvenues.»

rDites: «Le parcours vers l'autogouvernance est unique, évoluez à votre rythme.» ¶

février 2023 / HR magazine 37 ORGANISATION TECH
«Une équipe autogouvernée est capable de s'organiser, de prendre des décisions dans son champ de responsabilité et de corriger ses processus de travail.»
LA CHANCE SOURIT-ELLE AUX AUDACIEUX?

La pénurie de talents n’est pas une fatalité

Les préjugés bloquent souvent des candidats potentiels qui pourraient cependant franchir avec succès les étapes du recrutement. Que se passerait-il si des organisations effectuaient leurs sélections sur la base de CV anonymes et d’entretiens ouverts? Trois PME ont tenté l’expérience.

À tout seigneur tout honneur, c’est l’entreprise d’intérim Accent qui a lancé cette expérience originale en s’alarmant de la pénurie de main-d’œuvre. En réalité, selon cette société, ce qui manque surtout, ce sont des recruteurs et des décideurs ouverts d’esprit. De trop nombreux managers s’accrochent encore à des critères stricts. Du coup, Accent propose une autre démarche: le recrutement ouvert.

OUVERTURE D’ESPRIT

Dans le cadre de l’open-minded hiring, l’employeur rencontre les nouveaux collaborateurs potentiels sans connaître préalablement leurs informations personnelles, ou bien de manière limitée. Les coachs d’Accent continuent à sélectionner les candidats sur la base des critères qui leur sont fournis par les entreprises, mais la manière dont les

candidats sont présentés aux employeurs est complètement différente.

• Première méthode: les CV anonymes. Seules les informations sur les compétences et l’expérience sont soumises aux entreprises, les informations personnelles sont anonymisées.

• Autre voie choisie: des moments de sélection en aveugle. Les entreprises et les candidats se rencontrent sans que l’entreprise voie le CV du candidat, en faisant entièrement confiance au choix et à la sélection du coach d’Accent.

1. CULINOR FOOD GROUP: DES CANDIDATS EN AVEUGLE

HRmagazine a interrogé trois entreprises qui ont pris part à l’expérience d’Accent. Première d’entre elles: Culinor Food Group. Cette expérience est considérée comme positive par Nathalie Van Gheluwe, responsable RH de Culinor Food Group, et par Mark Geraerts, Interim HR Manager. Culinor avait des difficultés à trouver du personnel pour des fonctions d’opérateur ou d’emballeur. «Les canaux classiques ne sont plus suffisamment efficaces», regrette Nathalie Van Gheluwe. «Les candidats ne se bousculent pas

HR magazine / février 2023 38
texte:
cobbaut et matthias vanheerentals RECRUTEMENT TECH ID Karine Verhulst — FONCTION Manager RH de Cras
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et leur qualité laisse à désirer. Il y a trois ans, nous avions lancé une opération similaire mais la pandémie avait étouffé ce projet dans l’œuf.»

MENTALITÉ INTERNE

Grâce au projet d’Accent, Culinor a réussi à toucher beaucoup plus de monde. «Aujourd’hui, la plupart de nos fonctions vacantes sont pourvues plus rapidement et la qualité des candidats est bien meilleure», affirme Mark Geraerts. «Nous donnons la priorité aux compétences et à l’intégration des nouveaux venus dans le collectif. Ce projet nous a conduits à adopter un autre regard sur nos processus RH.» Culinor a d’ailleurs lancé un projet pour faire évoluer les mentalités en interne. Plusieurs processus ont été remis en question avant d’être repensés. «Alors qu’auparavant, nous recherchions des salariés à temps plein, nous ne négligeons plus les personnes qui souhaitent travailler à temps partiel», affirme Mark Geraerts.

2. CRAS: ÉLARGIR SA CIBLE

Le secteur du bois a aussi beaucoup de difficultés à trouver des renforts qui ont le bon profil. «Nous cherchions des solutions innovantes pour résoudre ce problème», expliquent Evi Waterbley, chef de projet, et Nele Vandaele, responsable RH. «Depuis le mois de janvier, nous effectuons des recrutements sur la base de CV anonymes», explique cette dernière. «Grâce à cette sélection en aveugle, nous voulons toucher des candidats potentiels qui nous auraient échappé. Nous espérons ainsi interviewer plus de personnes et donc, trouver plus rapidement de nouveaux renforts.»

PLUS D’ANNONCES INCLUSIVES

Pour l’équipe RH de Cras, cette initiative s’est révélée particulièrement inspirante. «Pendant les sessions d’Accent, les animateurs nous ont beaucoup appris», continue Evi Waterbley. «Nous avons analysé une série d’offres d’emploi et nous avons réfléchi à la meilleure manière de les rendre plus inclusives. Grâce à ces exercices pratiques, nous avons pu identifier nos problèmes. Aujourd’hui, nous nous y attaquons systématiquement, avec toute notre organisation.»

3. EQUANS: CONTRE LES PRÉJUGÉS

Equans cherche chaque année un millier de travailleurs, essentiellement des profils techniques. «Contrairement à la Wallonie, le marché du travail flamand souffre d’une forte pénurie de main-d’œuvre», explique Karine Verhulst, responsable de l’acquisition des talents. «Nous investissons dans tous les canaux pour trouver ces profils difficiles à pourvoir. Le candidat est au centre de notre processus de recrutement. En tenant compte du profil du nouvel engagé, nous cherchons le poste dans lequel il pourra faire ses premiers pas chez nous. Le principe du recrutement ouvert d’Equans correspond parfaitement à cette approche.»

Concrètement, Equans applique le principe du recrutement ouvert à certaines fonctions, comme les soudeurs, les électriciens et les techniciens HVAC.

Les recruteurs de cette société spécialisée dans les services techniques ont déjà interviewé une quinzaine de personnes proposées par Accent. «C’est pendant l’entretien que nous avons découvert les qualités des candidats proposés», explique Karine Verhulst. «Résultat? Environ 75% des personnes que nous avons rencontrées seront engagées.»

UN ŒIL TROP CRITIQUE

Equans reconnaît que tous les candidats proposés ne seraient sans doute pas parvenus à l’étape de l’interview si les recruteurs avaient lu leur CV au préalable. «Nos recruteurs ont l’habitude de soumettre les CV à une analyse très critique. Grâce au principe du recrutement ouvert, nous sommes entrés directement en contact avec ces candidats, une expérience positive et surprenante.» ¶ — FONCTION

«Le système des CV anonymes n’est pas un problème pour Cras», continue Nele Vandaele. «Pour notre département RH non plus et encore moins pour les managers qui décident des embauches. Chacun est conscient que certains préjugés peuvent jouer un rôle dans le processus de recrutement. Ces préjugés sont évacués grâce à ce projet. Des sessions d’information organisées par Accent ont permis à chacun de se préparer soigneusement. Nous avons pu lancer le projet dès le mois de janvier.»

février 2023 / HR magazine 39
Head of talent acquisition d’Equans
«Grâce à cette sélection en aveugle, nous voulons toucher des candidats potentiels qui nous auraient échappé.»

Sans débriefing, on n'apprend rien

L'expérience reste le meilleur maître. Mais en tant que telle, elle ne suffit pas. Elle ne présuppose en tout cas pas que les gens tirent toutes les leçons de ce qui leur arrive. Ce n'est qu'au moment où l'on réfléchit sérieusement à ce par quoi on est passé que l'on peut tirer des leçons précieuses.

L'expérience est la méthode d'apprentissage la plus puissante. Pas uniquement dans le contexte d'une formation organisée, mais aussi dans la pratique professionnelle quotidienne. Et même si la plupart des formateurs professionnels ne tarissent pas d'éloges sur la puissance de cet instrument, les résultats de l'apprentissage proprement dit s'estompent rapidement à cause du manque de réflexion et de débriefing. Voici comment l'expert Sivalailam Thiagargam, surnommé Thiagi, résume cette idée: «Le débriefing est le processus qui aide les participants à réfléchir sur leur expérience, à acquérir des connaissances précieuses et à les partager entre eux.»

DEBOUT SUR LES PATINS, SANS BOUGER D'UN POUCE

J'ai commencé à prendre des leçons de patinage récemment, à un âge avancé. Je n'avais pas eu l'occasion d'apprendre ce sport pendant mon enfance et je voulais rattraper le temps perdu. L'instructeur m'a expliqué tranquillement ce qu'il fallait faire. De mon côté, j'étais certaine de suivre ses conseils à la lettre mais pour une raison que j'ignore, je ne suis pas parvenue à avancer même d'un seul mètre. À ce moment-là, j'étais devant un choix. Je pouvais continuer sans réfléchir à tenter de réaliser encore et encore le même mouvement. Mais j'avais toutes les chances de ne pas avancer d'un pouce. L'autre solution était de s'arrêter et de réfléchir ensemble aux erreurs que j'avais commises pour déterminer les mouvements que je devais modifier pour parvenir à avancer sur la glace. Ces instants de réflexion paraissent logiques… Pourtant, dans un contexte de formation professionnelle, nous semblons minimiser ou oublier ces moments. Le débriefing est indispensable. Ce n'est qu'en se penchant sur nos actes, nos prestations, nos pensées et nos émotions que l'expérience prend son sens et s'ancre dans notre cerveau.

CHOISISSEZ LA FORME, LA STRUCTURE ET L'APPROCHE

Il est parfaitement possible d'aménager des moments de réflexion pendant un apprentissage on the job ou au cours d'une formation organisée. On peut penser ici à des situations comme des simulations, des jeux de rôle, des activités en équipe ou même des jeux.

L'ampleur du débriefing peut varier jusqu'à impliquer une centaine de personnes en même temps. Concrètement, de petits sous-groupes discuteront d'abord ensemble pour partager leur expérience plus tard en séance plénière. Mais on peut aussi discuter d'expériences, d'idées et de perspectives en petits groupes de trois à dix personnes. Enfin, la réflexion individuelle reste essentielle.

Une précision par rapport à la préparation: elle détermine le succès. En planifiant des moments de débriefing dès le début de la formation, vous les ferez entrer dans le processus d'apprentissage. Qu'est-ce qui s'est bien passé? Qu'aurait-on pu faire autrement? Quelles idées emporterez-vous avec vous? Ce sont des questions classiques qui peuvent toujours être prévues. Vous pouvez aussi utiliser la méthode stop ou encore. Quelles actions ai-je envie d'entreprendre désormais? Qu'est-ce que je veux arrêter de faire?

UN DÉBRIEFING EN SIX ÉTAPES

«Pour réussir un débriefing, il faut le préparer, lui donner une structure et lâcher prise.»

Il ne faut pas se contenter de réfléchir aux résultats. L'expérience elle-même, le processus donc, est riche d'enseignements. Thiagi utilise à cet effet une structure en six étapes. —

Sivasailam Thiagarajan: «Le débriefing aide les participants à réfléchir à leur expérience et à partager des idées entre eux.»

HR magazine / février 2023 40
texte:
sofie willox
FORMATION TECH

Dans une première phase, il faut s'arrêter sur les émotions. En demandant aux participants comment ils se sentent juste après la formation. Ils peuvent alors exprimer des sentiments comme la frustration, la confusion, le doute ou la satisfaction. Ce n'est pas un luxe: il faut laisser sortir les émotions avant de pouvoir passer à l'évaluation rationnelle.

Il faut ensuite se poser une question: que s'est-il passé? Ici, on examine les observations rationnelles et chronologiques de chacun. Les apprenants ont-ils vécu la même chose? Dans cette phase, les participants parviennent à avoir une vue holistique des faits.

Dans une quatrième phase, il faut faire le rapport entre le contexte protégé de la formation et les troubles du monde extérieur. On peut poser des questions comme celle-ci: où voyez-vous le lien avec votre contexte professionnel spécifique? Les participants sont alors encouragés à jeter des ponts avec la dure réalité.

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Troisième étape: la formation en elle-même. Qu'avez-vous appris? La question est simple mais efficace.

ATTENTION!

Un débriefing soigneux permet d'apprendre mieux. Mais il faut faire attention à plusieurs points.

Pour réussir un débriefing, il faut avoir de l'expérience et se montrer flexible. Le facilitateur doit avoir en tête une structure claire, comme celle en six étapes que nous avons décrite. Son rôle est de conserver la maîtrise du processus, il doit le tenir bien en main. En même temps, il doit être flexible. Un professionnel expérimenté accompagnera la dynamique du groupe: il retiendra les remarques spontanées, il veillera à l'équilibre entre la liberté laissée aux digressions et le piège du bavardage sans fin. Enfin, le temps est un problème: le débriefing en réclame beaucoup. On peut l'évaluer grossièrement mais ce calcul ne sera jamais précis. Il faut en tout cas en tenir compte dans le programme de formation en sachant qu'il faudra le prendre sur la formation elle-même.

Ensuite, cinquième étape, un facilitateur peut aller plus loin en posant des questions du type: que se passerait-il si? On pousse ici le participant à entrer dans une nouvelle zone de réflexion en lui demandant d'appliquer les acquis de la formation dans d'autres situations professionnelles que celle que visait le cours. Le contexte devient à la fois plus large et plus réaliste.

En d'autres termes, il n'est pas facile de procéder à ces exercices de réflexion. On en revient donc au début de cet article: l'expérience en tant que telle ne suffit pas. Ce n'est qu'au moment où l'on réfléchit sérieusement à ce par quoi on est passé que l'on peut tirer des leçons précieuses. ¶

C'est la question ultime du débriefing: et maintenant? Ici, les participants sont encouragés à réaliser un plan d'action concret afin de mettre en application les acquis de la formation dans le monde réel, en dehors du contexte d'apprentissage.

février 2023 / HR magazine 41
«On n'apprend pas sans réfléchir à ce que l'on a appris.»

Accorder plus de place au silence

Pour Céline Faidherbe, présidente de l’Association belge de la communication interne, sa discipline a un rôle central à jouer pour reconnecter le top management avec les collaborateurs. Tout comme la GRH. C’est d’ailleurs pour cela que la frontière entre les deux métiers paraît de plus en plus floue.

Dans votre vision pour de l’Association belge de la communication interne (ABCi), vous défendez l’idée d’une ouverture vers la communauté RH. Pourquoi?

Céline Faidherbe: «Il existe aujourd’hui un mouvement de rapprochement naturel, voire nécessaire, entre communication interne et ressources humaines. Ces métiers ont longtemps évolué sur base d’informations données par des outils: les tableaux de bord, les instruments de gestion… Or, on voit aujourd’hui ces professionnels réfléchir à une autre connexion avec les collaborateurs. Du côté de la communication interne, il ne s’agit plus par exemple de faire percoler des messages du sommet de l'organisation vers la base, en passant d’un outil à l’autre, de manière assez mécanique. On sait qu’un taux d’ouverture ou de clic ne dit pas tout.»

L’évolution se pense-t-elle avec la GRH ou bien chacun évolue-t-il dans son coin?

Céline Faidherbe: «J’ai plutôt vécu des relations très frileuses entre la communication et la GRH en début

de carrière. Chacun défendait son pré carré. Or, je vois qu’aujourd’hui les deux disciplines s’abreuvent aux mêmes sources des sciences sociales, s’ouvrent à de nouveaux champs comme la psychologie, la sociologie, la philosophie ou encore l’anthropologie. Lors de notre dernier congrès ABCi, nous avions étendu notre invitation aux collègues RH de nos membres. Ce fut une première très appréciée.»

Comment se traduit l’ouverture de l’ABCi vers la GRH?

Céline Faidherbe: «Cet élargissement du terrain de jeu se traduit clairement dans notre programme pour 2023, où nous allons aborder des thématiques qui se trouvent à la frontière entre communication et RH. Je pense notamment au volet Se projeter: les mutations sociétales et leurs impacts sur notre rapport au travail vont alimenter nos réflexions pendant une partie de l’année.»

Quelle différence faites-vous entre informer et communiquer?

Céline Faidherbe: «L’information est univoque et traitée de manière somme toute assez militaire: on vise une cible avec un message, et pour l’atteindre on va utiliser un outil. La communication est beaucoup plus équivoque. Elle va davantage tenir compte du profil des différentes parties prenantes. Elle peut aussi faire preuve d’une certaine vulnérabilité car elle n’a pas les réponses à toutes les questions. Être dans la communication, c’est laisser la place

HR magazine / février 2023 42
COMMUNICATION INTERNE TECH
texte: liliane fanello
«La posture du communicant requiert une parole plus indépendante, réaliste et authentique.»

aux questions, engager la conversation avec les différentes parties prenantes. La communication, c’est prendre soin du destinataire final en l’intégrant dans ce dialogue de manière à ce que lui-même puisse apporter des réponses. Cet échange pourra alors amener de la créativité, de l’innovation, et donc des solutions… Car les solutions ne se trouvent pas uniquement du côté de la direction.»

Quelle est la juste place du communicant?

Céline Faidherbe: «La thématique de l’identité du communicant et de sa place nous tient fort à cœur à l’ABCi. Cela fera d’ailleurs l’objet d’un module de formation en 2023. Si certains communicants internes passent encore beaucoup de temps sur les outils, ils souhaitent pouvoir accompagner leurs entreprises autrement, en étant médiateurs entre un terrain et une direction, mais aussi en travaillant sur des aspects plus stratégiques. Selon moi, la posture du communicant requiert aujourd’hui de la neutralité, avec une parole plus indépendante, réaliste et authentique sur ce qu’est l’entreprise. Son rôle est aussi de faire remonter des messages du terrain auprès de la direction de manière à ce que celle-ci puisse en tenir compte. Je le vois dans ma pratique de communicante: on n’est plus dans l'enjolivement! Les collaborateurs attendent des messages qui reflètent la réalité et ne la travestissent pas.»

De toute façon, les collaborateurs vont de plus en plus sanctionner les langues de bois et la communication qui les infantilise…

Céline Faidherbe: «Absolument! Dans une entreprise, il faut à un moment avoir le courage de pouvoir dire ce qui va, mais aussi ce qui ne va pas.»

Le communicant doit aussi accompagner le dialogue social…

Céline Faidherbe: «Tout à fait. L’entreprise est un peu un miroir du monde dans lequel nous vivons, c’est-à-dire un monde bousculé par des crises et mutations successives, et de plus en plus rapides. L’entreprise est elle aussi challengée par ces différents chocs sociétaux. Comment fait-on pour conserver le respect de l’humain dans un monde hybride? Comment tenir compte du vieillissement de la population? Que faire des mutations en matière de diversité et d’inclusion? Les entreprises doivent aussi rendre des comptes sur ces sujets. Et c’est là que selon moi le rôle du communicant interne évolue: en accompagnant ces transformations et le dialogue social avec les collaborateurs.»

À terme, cela a-t-il toujours du sens de garder un service RH et un service communication interne distincts?

Céline Faidherbe: «Cela a toujours été une question: où

placer la communication dans l’entreprise, surtout la communication interne? Doit-elle être toujours proche de la direction générale, ce qu’elle est souvent? Ou bien doitelle intégrer les services RH, ce qui est parfois le cas? Je n’ai pas de réponse. Cela dépend de l’ADN et de l’histoire de chaque entreprise. Que l’interaction entre direction, département RH et communication aient lieu, c’est là l’essentiel!»

Néanmoins, le communicant a bien toujours sa place dans l’organisation…

Céline Faidherbe: «Oui! Si le communicant se remet en question, tout comme la GRH d’ailleurs, ce n’est pas pour dissoudre son profil et son identité, mais au contraire le redessiner. Je pense notamment que le communicant est là pour imprimer un rythme. Aujourd’hui, on pourrait communiquer tout le temps. Le risque est qu’au final, collaborateurs et managers de proximité soient bombardés en permanence d’injonctions. L’expertise du communicant permet de donner un rythme, et de prévoir aussi des moments de pause, de silence.»

Pourquoi ces silences sont-ils aussi importants à vos yeux?

Céline Faidherbe: «Ceux-ci sont sains car ils permettent de soigner le bien-être des collaborateurs. La vigilance du communicant en lien avec le terrain lui permet de sentir quand il est bon de communiquer ou de laisser les gens tranquilles. Pour que les messages puissent encore être reçus et compris. Il joue ainsi un rôle un peu rebelle dans l’organisation, rappelant à la direction qu’à un moment, la retenue est nécessaire sous peine de provoquer une saturation, un trop-plein, avec à la clé un risque de perte de sens et de désengagement interne. Tout comme il doit aussi veiller à communiquer en temps de paix. Il apporte ainsi une vision à long terme de la communication.»

Quand on vous entend, on ne peut s’empêcher de se demander comment on a fait pour perdre les bases à ce point. Céline Faidherbe: «C’est vrai qu’aller à la rencontre, discuter et prendre soin de ses collaborateurs paraît tellement élémentaire. Aurait-on perdu le mode d’emploi?» ¶

février 2023 / HR magazine 43 ID Céline Faidherbe — FONCTION Présidente de l’Association belge de la communication interne

tous les chiffres au même endroit»

texte: peter ooms

Les différentes entités du groupe Aertssen, spécialisé dans la logistique et la construction, demandent de plus en plus d'informations sur les congés maladie, l'absentéisme et d'autres critères RH. Les managers souhaitent mieux connaître les conséquences financières et budgétaires de ces événements. Cette entreprise familiale s'est donc tournée vers une solution logée dans le cloud.

«Nous avions beaucoup de rapports contenant des informations RH, mais ils émanaient souvent de feuilles de calcul qui réclamaient beaucoup de travail manuel», explique Alain Bastiaens, DRH du groupe Aertssen. «Les managers veulent pouvoir consulter régulièrement ces chiffres. Ils souhaitent en disposer tous les mois et les membres du conseil d'administration reçoivent tous les trimestres une synthèse de ces données. Jusqu'à présent, ces informations étaient issues de notre logiciel ERP centralisé (Microsoft Dynamics 365) et de plusieurs feuilles de calcul séparées. Il fallait souvent une journée de travail à un professionnel RH pour composer l'un de ces rapports. Aujourd'hui, nous avons développé avec SD Worx un outil de business intelligence dans le cloud qui produit plusieurs rapports et tableaux de bord standards. Les leaders, les managers et les administrateurs ont directement accès à ces données via Power BI. Ils extraient les rapports dont ils ont besoin ou creusent plus profondément dans les données pour détecter des causes sous-jacentes.»

DE PLUS EN PLUS DE DONNÉES

La plus grande partie des données qui sont rendues disponibles par la solution dans le cloud était déjà en possession du secrétariat social. Ce sont des informations dont il a besoin en effet pour calculer les salaires. «Nous les complétons avec des données RH, comme les statistiques du recrutement ou celles du système Quality, Environment, Safety & Health . Il s'agit par exemple de données sur les accidents du travail. À ces thèmes RH nous avons ajouté des informations financières. De cette manière, tous les chiffres importants sont groupés au même endroit. Une fois que c'est fait, il ne vous reste plus qu'à pousser sur un bouton pour consulter les données. Vous avez toujours à votre disposition les données les plus récentes», explique le DRH.

Alain Bastiaens dispose désormais d'un rapportage de business intelligence avec des KPI et des visualisations. Ce qui se traduit par des relevés clairs du chiffre d'affaires par salarié par exemple, ou de son niveau d'absentéisme. Ce sont des KPI qui permettent d'agir de façon proactive. «Si les absences pour maladie augmentent, les HR Business Partners savent à qui ils doivent parler dans leur département. Ces données RH aident donc le management et les finances», affirme Alain Bastiaens.

HR magazine / février 2023 44 TECH ANALYTIQUE
«Les chiffres de l'absentéisme prédisent assez bien le taux de départ futur.»
Alain Bastiaens
AERTSSEN CONSOLIDE LES DONNÉE RH ET LES CHIFFRES FINANCIERS 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 00110111001011010011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 1011100101101001 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 0011011100101101 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 1011100101101001 0011011100101101 Q N F r C W v E c
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NOUER LE DIALOGUE

Pour lui, l'analyse n'est pas la finalité de l'opération, mais bien l'action qui en découle. «Si vous remarquez que l'absentéisme augmente et que vous savez quel département est le plus concerné, vous pouvez essayer de découvrir si ce phénomène a une raison particulière: un conflit avec un manager, une charge de travail croissante… Il s'agit alors de nouer le dialogue avec le manager dont le coefficient de Bradford s'oriente dans la mauvaise direction. Parce que ce coefficient pronostique assez précisément le taux de départ futur. Nous sommes désormais capables d'intervenir activement et de vérifier si notre action a été couronnée de succès par la suite», ajoute Alain Bastiaens.

LE COÛT TOTAL D'UN SALARIÉ

Depuis, la nouvelle solution a été implémentée en Belgique, ce qui sera bientôt le cas dans les filiales internationales. Par ailleurs, le département RH veut inclure les avantages extralégaux (compensation & benefits) pour connaître le coût total de chaque salarié.

Le groupe Aertssen va plus loin encore. Il a pris goût à l'architecture centralisée des données et veut donc gérer de façon centralisée aussi les informations provenant d'autres départements. «Cela ne se fera pas dans la plateforme du cloud de SD Worx, mais nous savons que ce genre de solutions permettent de réaliser très facilement des interfaces, ce qui facilite un échange rapide des données», conclut Alain Bastiaens.

41% NE FONT PAS D'ANALYSE

RH

Dans le domaine de l'analytique RH, la Belgique se situe dans la norme européenne: environ 41% des entreprises admettent qu'elles ne procèdent à aucune analyse de leurs ressources humaines. Jurgen De Jonghe, spécialiste des données de SD Worx, constate cependant qu'il est possible d'en faire beaucoup sans grands investissements. «Quatre employeurs sur dix marient des sources de données stockées séparément. La technologie actuelle permet aux utilisateurs de relier très efficacement des ensembles d'informations. Leur interprétation est également plus facile.» ¶

UN GROUPE VARIÉ

Aertssen est une entreprise familiale de Stabroek qui a commencé par réaliser des travaux d'infrastructure. Aujourd'hui, elle est devenue un groupe varié qui s'occupe de location de grues, de transports spéciaux, de logistique et de trading. Elle opère à l'étranger, notamment à Abu Dhabi et au Qatar. Elle a été désignée en 2021 Entreprise de l'année. Le groupe emploie plus de 1.700 personnes.

EST PUBLIÉ PAR NMG.

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RÉDACTEUR EN CHEF

François Weerts

ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO

Sabrina Bouzoumita, Frederic Brasseur, Jo Cobbaut, Melanie De Vrieze, Liliane Fanello, Stefanie Huybrechts, Peter Ooms, Kathleen Vangronsvelt, Matthias Vanheerentals, Gert Verlinden, François Weerts, Sofie Willox.

PHOTOGRAPHES ET ILLUSTRATEURS

Jan Locus, Tim Oeyen, Tom Vanlaere, Wouter Van Vaerenbergh et Juan Wyns

TRADUCTIONS

François Weerts, Élan CONCEPTION GRAPHIQUE

Oeyen en Winters

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Frederic Brasseur

FONCTION Avocat de DLA Piper UK LLP

Dans de nombreuses entreprises, une grande partie du personnel n’est pas employée sous un contrat de travail traditionnel à durée indéterminée et à temps plein, mais sous un contrat de travail à durée déterminée, un contrat de remplacement, un contrat à temps partiel avec un horaire fixe ou variable, en tant qu’intérimaire, etc.

La loi du 7 octobre 2022 transposant partiellement la directive (UE) 2019/1152 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne et la convention collective de travail n° 161 concernant le droit de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres qui est entrée en vigueur le 1er octobre 2022, ont désormais introduit un droit pour le travailleur de demander des conditions d’emploi différentes.

Ce droit existe pour tous les travailleurs comptant au moins 6 mois d’ancienneté ininterrompue chez le même employeur. Les périodes prestées en tant que travailleur intérimaire doivent également être incluses. L’ancienneté est considérée comme continue en cas d’interruption entre deux contrats à durée déterminée, si cette interruption a eu pour seul objet d’empêcher le travailleur de remplir cette condition de 6 mois d’ancienneté.

Les travailleurs intérimaires comptant au moins 6 mois d’ancienneté jouissent également de ce droit. La convention collective de travail n° 161 précise qu’ils doivent adresser leur demande à l’agence d’intérim. Il appartient alors à l’agence d’intérim d’obtenir de l’utilisateur les informations nécessaires pour formuler une réponse à la demande.

Dans cette rubrique, les spécialistes du bureau d’avocats DLA Piper répondent aux questions de nos lecteurs sur la très large thématique du droit du travail. Vous pouvez également poser vos questions en les envoyant à redaction@hrmagazine.be www.dlapiper.com/

La demande n’est soumise à aucune condition formelle, si ce n’est qu’elle doit expressément indiquer qu’elle est fondée sur cette loi du 7 octobre 2022, afin que l’employeur sache qu’il s’agit d’une demande formelle et non d’une simple demande informelle et non contraignante. Dans sa demande, le travailleur doit indiquer quelles

conditions de travail plus prévisibles il souhaite. Parmi les possibilités, mentionnons le cas d’un travailleur sous contrat à durée déterminée qui demande un contrat de travail à durée indéterminée ou d’un travailleur en horaire variable qui souhaite un horaire fixe.

L’employeur est tenu de répondre dans un délai d’un mois s’il est d’accord avec la proposition du travailleur. Les employeurs comptant moins de 20 travailleurs disposent d’un délai de 2 mois.

L’employeur est libre d’accepter ou de refuser la demande. En cas de refus, il est tenu de communiquer les motifs concrets du refus. Les motifs possibles d’un refus incluent le fait que la forme d’emploi demandée n’est pas disponible, que le travailleur ne possède pas les qualifications ou les compétences associées à la forme de travail demandée, ou le fait que le travailleur n’accepte pas l’horaire de travail et les conditions salariales associés à la forme d’emploi demandée.

Il est interdit à l’employeur d’adopter une mesure défavorable à l’encontre du travailleur du fait qu’il fait usage de ce droit. La sanction consiste en une indemnité de 3 mois de salaire, et en cas de licenciement, en une indemnité comprise entre 4 et 6 mois de salaire.

Toutefois, un travailleur ne peut introduire une telle demande qu’une seule fois par période de 12 mois.

Les travailleurs peuvent désormais demander des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres après 6 mois, mais l’employeur n’est pas obligé de toujours les accorder. ¶

HR magazine / février 2023 46 DROIT
LEGAL DLA PIPER
& EMPLOI
en/belgium/ ID
Le droit d’exiger des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres est entré en vigueur
— Frederic Brasseur

Avec cinq voitures entièrement électriques et trois hybrides plug-in, le classement des dix voitures les plus commandées en 2022 est dominé par les voitures électriques, comme le révèle une analyse effectuée par Arval. La voiture de société préférée en 2022 est la BMW X1 PHEV.

Seul un dernier sprint mené par plusieurs hybrides plug-in et modèles à moteur hybride ou classique a empêché que le bilan final de 2022 ne soit entièrement électrique. Néanmoins, la majorité des voitures de société commandées l’année dernière, mais immatriculées cette année en raison des longs délais de livraison, sont rechargeables. Les motorisations classiques (essence et diesel) représentaient au second semestre de 2022 un tiers des commandes passées chez Arval, avec 30% de voitures entièrement électriques et quelque 35% de voitures hybrides plug-in à l’issue du sprint final de fin d’année.

3 RECHARGEABLES DANS LE TOP 3

De nombreux conducteurs de voitures de société ont opté dès la mi-2022 pour la dernière version de la BMW X1 PHEV (Plugin Hybrid Electric Vehicle), avec seulement 23 g d’émissions de CO2. D’autres ont choisi très souvent tout au long de l’année le SUV entièrement électrique ID.4 de Volkswagen ou l’EQA de Mercedes.

«La X1 figurait déjà parmi les véhicules favoris de société, mais dans cette nouvelle version à faible émission de CO2, ce SUV hybride qui, sur le plan fiscal, est aussi avantageux pour les entreprises en termes de déductibilité que pour les travailleurs en termes d’avantages de toute nature, s’en sort quasiment aussi bien qu’une voiture entièrement électrique», souligne Yves Ceurstemont, Head of Arval Mobility Observatory Belgium. «Il faut néanmoins avoir la bonne discipline de recharge.»

BRF

L’électrification des véhicules de société s’accélère. Mais qu’en est-il des camionnettes? La tendance semble ici aussi être en marche. Chez Athlon Belgium, la demande d’eVans a augmenté de 150% en 2022.

Les objectifs climatiques visant la réduction des émissions de CO2 garantissent que de plus en plus de villes introduisent des zones à faibles émissions. Dans des villes comme Gand, Bruxelles et Anvers, les véhicules diesels plus anciens sont interdits depuis un certain temps et le seuil de protection se déplace vers la norme Euro 5 et au final, Euro 6. Dans quelques années, les eVans seront les seules camionnettes encore autorisées à pénétrer dans ces zones à faibles émissions. Et bien que jusqu’à présent seule une minorité de la

flotte de véhicules utilitaires légers soit électrique, l’opérateur de mobilité Athlon Belgium ressent une forte croissance de la demande (+150% par rapport à 2021) pour le leasing opérationnel de camionnettes électriques.

«Pour le moment, il n’y a aucun changement concernant la déductibilité des camionnettes», regrette Steve Somers, spécialiste LCV (Light Commercial Vehicle) chez Athlon Belgium. «Mais nous nous attendons à ce que le système fiscal suive la tendance des voitures particulières et donne la préférence aux moteurs électriques. En tout cas, nous sentons clairement que l’intérêt auprès de nos clients est clair.»

Une première modification de la législation fiscale est entrée en vigueur le 1er janvier, réduisant la déductibilité des frais de carburant pour une voiture hybride plug-in, commandée à partir de cette date, à 50% contre 100% auparavant. Mais la modification la plus importante aura lieu le 1er juillet 2023.

Les employeurs devront payer la taxe CO2 , multipliée par un certain facteur, pour toute nouvelle voiture à émission de CO2 . Par ailleurs, la déductibilité fiscale sera dégressive pour ce type de voitures dès 2025 pour arriver à 0% en 2028. «Pour autant que le PHEV soit utilisé à bon escient, il peut encore s’avérer intéressant de le commander jusqu’au 30 juin 2023», affirme Yves Ceurstemont (Arval). «En raison de leurs faibles émissions de CO2, leur déduction est

fiscalement avantageuse et le calcul de l’avantage tout nature reste attrayant. Mais dès le 1er juillet, toutes les voitures de société à émissions de CO2 seront sanctionnées fiscalement. L’augmentation du nombre de voitures rechargeables commandées au cours des 12 prochains mois ne fait par conséquent aucun doute.»

Les voitures de société électriques ne seront toutefois pas les seules sur les routes à partir du 1er juillet. «En effet, les contrats de leasing actuels peuvent encore durer jusqu’à leur date d’expiration», souligne Olivier Marcq, expert en mobilité d'Acerta Consult. «Comme ces contrats n’ont une durée que de quatre à cinq ans, nous verrons les véhicules de société à moteur thermique parcourir leurs derniers kilomètres en 2028.»

février 2023 / HR magazine 47
Les voitures de société s'électrifient
MOBILITÉ
Où en est la fiscalité?
L'électricité pour les camionnettes aussi +150%

Leasing de vélos: pas aussi simple

Le prix historiquement élevé des carburants et l’intérêt croissant pour la durabilité suscitent un engouement pour les vélos en leasing. Mais attention: cette formule est plus complexe qu’il n’y paraît.

Le leasing de vélos a atteint des records au cours du premier semestre 2022. Dans notre pays, 1,3% des salariés utilise un vélo en leasing du travail. Charlotte Thijs, experte en mobilité chez Acerta Consult, explique que se rendre au travail à vélo peut rapporter à un salarié un maximum de 0,24 euro d’indemnité vélo par kilomètre effectivement parcouru. «Environ 20% des salariés cyclistes reçoivent une indemnité de leur employeur pour se rendre au travail à vélo.»

LA NÉCESSITÉ D’UN CONSEIL INDÉPENDANT

Selon Bart Vingerhoets du secrétariat social Securex et Koen Van Mol du cabinet de conseil Libra Vélo, le leasing de vélos ne va pas de soi dans tous les secteurs ou entreprises. Koen Van Mol: «Souvent, les salariés des secteurs des soins de santé, de la construction, des transports, de l’hôtellerie ou du tourisme ne peuvent pas bénéficier du leasing de vélos de la part de leur employeur. Bien souvent, les syndicats ne sont pas favorables à l’introduction d’un plan de leasing de vélos, car cela réduit les ressources sociales.» Aujourd’hui, il n’existe en outre aucun acteur indépendant fournissant des informations sur ce dispositif, ce qui limite la confiance des syndicats (locaux). Les employeurs qui souhaitent proposer le leasing de vélos doivent s’informer auprès des sociétés de leasing, mais celles-ci sont évidemment mues par leurs intérêts commerciaux.

AVANTAGE DE TOUTE NATURE

Souscrire un plan de leasing sans étudier suffisamment la situation peut être contre-productif. «J’ai par exemple un client qui a souscrit avec enthousiasme un plan de leasing et qui est bien embêté aujourd’hui parce que ses salariés ont choisi des vélos trop chers. Le montant du leasing qui ne peut pas être compensé par l’avantage de toute nature est intégralement déduit du salaire net», prévient le spécialiste en leasing.

«En fin de compte, nous sommes parvenus à limiter les dégâts en imputant le coût du vélo sur une plus longue période dans l’avantage de toute nature», explique Koen Van Mol de Libra Vélo. Il est parfaitement possible de prendre un vélo en leasing sur une période de trois ans et d’étaler l’avantage de toute nature sur une plus longue période. Évidemment, le montant de l’avantage de toute nature ne peut pas dépasser le coût du leasing du vélo, mais aucune règle n’impose que les deux aient la même durée.

L’avantage de toute nature est un concept où une partie du salaire, sous quelque forme que ce soit, est remplacée par un avantage équivalent, comme la mise à disposition d’un vélo. Il peut s’agir de la rémunération mensuelle classique, mais aussi de tout autre élément de l’enveloppe salariale annuelle. Un avantage de toute nature n’est possible que si une partie du salaire est flexible.

SALAIRE OCTROYÉ CONTRE SALAIRE BARÉMIQUE

Avec un avantage de toute nature, le salarié peut obtenir un certain

HR magazine / février 2023 48
texte: stefanie huybrechts
MOBILITÉ REWARD

avantage par rapport à l’achat privé d’un vélo équivalent avec services associés. Cet avantage sera visible dans son revenu net car une partie du salaire brut assujettie aux cotisations ONSS et à d’autres charges salariales disparaît.

De plus, le calcul étant réalisé sur le coût salarial, charges patronales comprises, l’impact brut sera généralement inférieur à la valeur de l’avantage. L’avantage de toute nature peut – mais ce n’est pas une obligation – être simultané à l’avantage. Le coût exact doit cependant être connu avant que l’avantage de toute nature puisse avoir lieu, car l’employeur ne peut jamais le dépasser.

C’est la partie flexible du salaire qui peut être utilisée pour l’avantage de toute nature. Dans le cadre d’un avantage de toute nature mensuel, il s’agit de la différence entre le salaire octroyé et le salaire barémique ou revenu minimum mensuel moyen garanti (RMMMG). Dans certaines CCT sectorielles, d’autres composantes salariales, comme la prime de fin d’année, sont flexibilisées. Cela doit être expressément mentionné dans la CCT. Si tel n’est pas le cas,

une entreprise peut toutefois conclure une CCT d’entreprise avec l’accord des syndicats pour mettre en place un plan vélo de cette manière. Techniquement, une solution hybride (partie salaire mensuel et partie prime) est également envisageable. Dans la pratique toutefois, cette solution est si complexe sur le plan administratif qu’elle n’est recommandée que dans des cas exceptionnels, lorsque la partie flexible mensuelle est relativement faible et que la prime est basse.

UTILISATION RÉGULIÈRE

Tant que l’on ne sort pas du cadre des règles de la politique salariale sectorielle, aucune règle supplémentaire ne s’applique, à une exception près. Le gouvernement impose un avantage de toute nature aux employeurs qui veulent financer via le salaire un avantage particulier pour le salarié. Pour le leasing de vélos, le gouvernement annule cette charge, à condition que le vélo soit régulièrement utilisé pour les déplacements domicile-lieu de travail. Dans deux cas concrets, l’administration fiscale a fixé cette

utilisation à 10% (ruling fiscal du 12 mars 2019) et 20% (ruling fiscal du 7 juillet 2020) du trajet domicile-lieu de travail annuel.

COMMENT CALCULER?

Le calcul de l’avantage de toute nature n’est pas évident. C’est pourquoi les employeurs demandent généralement à leur secrétariat social de s'en occuper. «Un secrétariat social facture des frais pour chaque calcul», explique Koen Van Mol. «Pour maîtriser les coûts, il est donc préférable de limiter le nombre de demandes. Il ne faut évidemment pas qu’un salarié fasse trois fois une demande pour un vélo de 4.000, 3.500 et 3.000 euros», poursuit-il.

Les calculateurs fournis sur les sites web des sociétés de leasing donnent une indication, mais pas un résultat exact. «Même en saisissant les mêmes données, vous arriverez souvent à un résultat différent pour chaque société de leasing», avertit Koen Van Mol.

Une fois le calcul de l’avantage de toute nature effectué, l’employeur peut voir quels vélos sont dans le budget et le communiquer à son ou ses salariés.

COMMUNICATION TRANSPARENTE

Ne commencez pas sans une étude préliminaire approfondie, conseille Securex. Cherchez notamment à savoir si vos salariés sont suffisamment intéressés et dans quelle mesure la marge est suffisante pour un avantage de toute nature brut.

Une communication efficace et transparente avec vos salariés est également importante. Informez-les de l’impact concret d’un avantage de toute nature et travaillez avec des exemples chiffrés concrets. ¶

février 2023 / HR magazine 49
«Un client a souscrit avec enthousiasme un plan de leasing et est bien embêté aujourd’hui parce que ses salariés ont choisi des vélos trop chers.»
Koen Van Mol, Libra Vélo

Frédérique Van der Heyden

2. La professeure Peggy de Prins semble avoir apprécié votre approche de la gestion des relations sociales. Qu'avez-vous fait?

ID Frédérique

Van der Heyden

ÉTUDES

1. Pourquoi avoir choisi cette orientation?

J'ai suivi des cours en sciences économiques appliquées, avec une priorité donnée au marketing et à la gestion à l'université d'Anvers. J'ai reçu surtout une base théorique mais je voulais aussi avoir une vision plus concrète du monde de l'entreprise. J'ai donc cherché une spécialisation qui pourrait répondre à cette préoccupation. J'ajoute que pour moi, le leadership et le travail avec d'autres personnes sont essentiels. J'aime lancer des projets pour les piloter de A à Z. La dimension internationale joue aussi un rôle dans ma motivation. Pendant ma dernière année, je suis partie à Rome dans le cadre du programme Erasmus. Finalement, je suis entrée à l'Antwerp Management School, où je suis une maîtrise en gestion des ressources humaines.

Nous devions présenter un cas de mauvaise pratique en GRH dans une organisation belge. Au départ, j'ai eu du mal à en dénicher une, personne n'aime parler de ses problèmes. Je suis finalement tombée sur le cas d'Amnesty International. Une étude m'a appris qu'Amnesty International connaissait une culture de travail toxique, due principalement à l'équipe de direction. Il était question de harcèlements réguliers de la part des managers à l'égard des salariés. L'environnement professionnel offrait donc peu de sécurité: des travailleurs subissaient même des discriminations pendant certaines réunions. Selon ma conclusion, cette culture a pu persister parce que les salariés sont très motivés. Ils ont vraiment envie de travailler pour une association qui a autant d'impact sociétal et qui veut rendre le monde meilleur. En acceptant cette motivation intrinsèque, ils acceptaient le comportement de leurs managers et plaçaient leur travail au-dessus de leur santé. Amnesty International a fait sa propre enquête sur le sujet et a lancé des actions pour lutter contre cette insécurité au travail.

3. Quels sont vos loisirs?

Je joue au volley-ball à un niveau récréatif. J'ai un vrai groupe d'amies et je me sens bien dans l'équipe. Je siège également au conseil d'administration d'une organisation de jeunesse à Melsele. Ainsi, nous avons récemment organisé un brunch pour récolter de l'argent afin de financer nos locaux. Cette activité m'a révélé mon goût pour le leadership et le travail en équipe. Responsable financière de cette association, je gère les dépenses et je joue souvent le rôle d'une croquemitaine pour m'assurer que nos comptes restent dans le vert.

4. Qu'avez-vous envie de faire après vos études?

Je ne sais pas encore. Je donne la priorité à une culture ou un environnement de travail qui me permettrait d'avoir un impact. Si vous vous sentez bien dans votre job, le secteur a moins d'importance. J'apprécie aussi les contacts internationaux. En Belgique, j'aimerais travailler avec des nationalités différentes ou, idéalement, partir régulièrement à l'étranger. Au cours des deux derniers mois de cette année académique, nous suivrons un stage pour apprendre à aborder concrètement des problèmes ou des projets dans une entreprise. Le moment idéal pour transposer la théorie dans la pratique. C'est là que j'en apprendrai le plus. ¶

«Ma priorité? Une culture ou un environnement de travail qui me permettent d'avoir un impact»
/UN·E ÉTUDIANT·E EN POINT DE MIRE/
Maîtrise en GRH, Antwerp Management School
HR magazine / février 2023 50
texte: melanie de vrieze

EVENT PROGRAM 2023

MARCH 23-24

CFO CONFERENZ

Façonnez le secteur financier de demain en tant que CFO lors d’un événement exclusif dans un lieu encore plus exclusif. Seulement 70 places disponibles.

HR CONGRES

MAY 11-12

Un moment de rencontre, de réunion et d’inspiration. Nous discuterons ensemble des nouveaux défis et des nouvelles opportunités qui apparaissent dans le monde de la GRH.

JUNE 7-8

MOBILITY TOMORROW

La mobilité évolue. Chaque jour. Une chose est sûre : elle va complètement se métamorphoser. Des flottes de véhicules électriques aux transports publics en passant par les voitures volantes.

OCT 4-5

HRTECH

La technologie prend le dessus. Non seulement dans la vie quotidienne, mais aussi dans le secteur des RH. Qu’est-ce que la technologie a à nous offrir ?

Risque-t-elle de faire disparaître des emplois ?

DEC 7-8

HRDESIGN

Traduire les tendances en tenant compte de la réalité sur le terrain. Telle sera la mission d’un groupe sélectionné de 70 DRH partageant les mêmes valeurs lors de cet événement très spécial.

save the date!

HR CONSULTANCY NOT AS YOU KNOW IT.

Vous avez raison de choisir un partenaire de conseil avec soin. Nos talentueux professionnels des ressources humaines sont prêts à vous aider : temporairement ou pour une plus longue période, pour des tâches opérationnelles ou pour de purs conseils. Vous ne savez pas encore exactement quelle sera la durée et le contenu du projet ?

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