la médecine participative www.invivomagazine.com
Penser la santé N° 2 – MARS 2014
bienvenue dans l’ère de
la médecine participative
IN EXTENSO La lecture des rêves In Vivo N° 2 – Mars 2014
réseaux sociaux / biobanques / dossiers électroniques
MATTHIEU RICARD «Les médecins devraient cultiver l’altruisme» DON DU SANG Des critères trop sévères PHARMA Les médicaments meurent aussi Edité par le CHUV www.invivomagazine.com IN EXTENSO La lecture DES RÊVES
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El Bibliomata / El mundo fisico, 1882
sur www.invivomagazine.com
IN VIVO / N° 2 / mars 2014
SOMMAIRE
FOCUS
19 / big data Médecine participative L’avènement du patient transparent Par benjamin keller, melinda marchese et julie zaugg
MENS SANA
30 / Interview Matthieu Ricard encourage la culture de l’altruisme à l’hôpital Par PAULE GOUMAZ
34 / innovation Télémédecine: le chirurgien qui vous opère n’est pas ici Par jean-christophe PIOT
38 / prospection Don du sang: des critères trop sévères Par céline bilardo
42 / tendance Cette médecine qui en fait trop
46 / décryptage Les médicaments meurent aussi Par sophie Gaitzsch
Ce profil virtuel a été calculé à partir de plusieurs photos de personnes réelles. Réalisé pour «In Vivo» par The Face Research Lab de l’Institut de neurosciences et psychologie de l’Université de Glasgow, ce visage moyen est une métaphore du rassemblement de données biologiques individuelles, à la base de la médecine participative.
www.facelab.org
Par stanislas cavalier
CONTENTS
64
30 56 50 CORPORE SANO
IN SITU
50 / innovation
11 / health valley
Des prothèses contrôlées par la pensée
Hans Wallstén, l’inventeur du stent
Par thomas pfefferlé
53 / TENDANCE
58
Méditer pour se soigner
15 / autour du globe De l’os à partir de la graisse
Par geneviève ruiz
Les microbes, nos 100 billions d’amis Par jean-christophe Piot
58 / en images La mort immortalisée Par Bertrand Tappy
64 / innovation Les superpouvoirs des cellules souches Par julie zaugg
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2
CURSUS
70 / chronique Les soins face aux défis de l’innovation
72 / portrait Les recherches de la neuroscientifique Eveline Geiser
74 / tandem La rétinologue Francine Behar-Cohen et le généticien Carlo Rivolta
François Van Zon, istock, EPFL – Hillary Sanctuary, cumRL
56 / prospection
Editorial
Patient digitalisé ou manipulé?
Patrick dutoit
Béatrice Schaad Responsable éditoriale
3
«Ensemble, transformons la médecine», «notre expérience est le ferment de l’innovation»… Les slogans des sites web sur lesquels les patients partagent désormais leur expérience fleurent bon le militantisme. Comme si l’on observait un glissement de l’engagement politique vers une nouvelle forme de citoyenneté médicale. «Indignez-vous», disait Stéphane Hessel dans son pamphlet aux millions d’exemplaires vendus; «Révélez-vous» pourrait être la nouvelle injonction de ceux qui décident d’offrir à des millions de lecteurs l’intimité de leur ADN ou les détails de leur traitement. Raison pour laquelle nous avons intitulé le dossier de ce deuxième numéro de «In Vivo» «Bienvenue dans l’ère de la médecine participative», en clin d’œil au film d’anticipation d’Andrew Niccol, «Bienvenue à Gattaca» (lire p. 19). Une chose est sûre, si elle amène un vrai bénéfice au patient désormais moins seul face à la maladie et à la complexité du système de santé, cette activité sur le net modifie en profondeur la relation médecin-patient. Le praticien omnipotent d’«Ivan Ilitch» de Tolstoï fait aujourd’hui face à un individu devenu l’expert de sa propre santé, capable d’étayer son diagnostic du point de vue de centaines de milliers d’autres malades. Cet «homo scientificus» se mesure aussi en flux tendu: il quantifie les soubresauts de son cœur, la part de gras de ses globules et les nanosecondes consacrées à rêver. Enfin, cette nouvelle façon de vivre la médecine modifie dans la foulée un Saint Graal de la pratique clinique, le secret médical. La génération née avec le web livre indifféremment les détails de sa vie la plus intime, il en découle naturellement que la santé n’y fasse pas exception. La mise en commun des données ne touche pas les seuls patients. Les scientifiques s’y mettent aussi. De cette connaissance partagée pourraient émerger des progrès inespérés dans l’activité clinique et la recherche. C’est le pari que font les équipes engagées dans le projet Human Brain qui vise à simuler le fonctionnement du cerveau sur un supercalculateur (lire p. 8). Mais l’hyper-transparence entraîne de nouvelles exigences: elle demande que ces données soient gérées avec la plus grande attention et surtout qu’elles bénéficient réellement au patient. Car les nouveaux enjeux sont cruciaux, au premier rang desquels les questions financières et de confidentialité. Fort de ses 250’000 contributeurs, le réseau PatientsLikeMe a, sous couvert de recherche, passé des partenariats avec les pharmas comme UCB et Novartis, ou l’entreprise 23andMe qui commercialise des kits de profilage génétique. Une des dérives possibles serait que ces données deviennent un bien de consommation comme un autre. Le patient serait dans le même temps dépossédé de l’essentiel, les informations sur sa propre santé. Le Big Data exige donc un cadre pour que le patient digitalisé ne devienne pas, in fine, un patient manipulé. ⁄
post-scriptum la suite des articles de «in vivo» Il est possible de s’abonner ou d’acquérir les anciens numéros sur le site www.invivomagazine.com
WATSON
INNOVATION
IV n° 1
p. 38
Investissement d’un milliard de dollars
IV n° 1
DON d’organes p. 13
Google étend son activité dans le domaine de la santé
IV n° 1
p. 42
Limitation d’activité La société 23andMe a dû revoir son offre fin 2013: la Food and Drug Administration lui a ordonné de stopper la commercialisation de ses kits de dépistage génétique à cause de l’inexactitude de leur résultat. L’entreprise californienne a cessé de livrer des conclusions d’ordre médical, mais continue de vendre ses kits aux consommateurs qui souhaitent obtenir des informations sur leurs origines ancestrales. Le think thank Techfreedom, qui promeut la technologie, a réuni 10’000 signatures en soutien à 23andMe. /
4
Google lançait fin 2013 Calico, une entreprise qui vise à améliorer la prise en charge des seniors. Elle analyse d’immenses quantités de données récoltées auprès de ces patients afin de trouver de nouveaux traitements. Les ambitions du géant du web en matière de santé ne s’arrêtent pas là. Google développe actuellement des lentilles de contact capables de mesurer le taux de glucose dans le sang. Ce produit permettrait aux personnes diabétiques de se passer des piqûres quotidiennes dans le doigt. Ces «smart contact lens» sont au stade de prototype, mais Google serait déjà en contact avec la Food and Drug Administration pour l’obtention d’une potentielle certification. /
p. 30
Chiffres décevants
En janvier, IBM a créé Watson Group, une nouvelle équipe qui va travailler au développement de son superordinateur. La firme va aussi investir plus d’un milliard de dollars afin de commercialiser d’autres innovations cognitives avec Watson. La nouvelle unité commerciale aura son siège social dans la Silicon Alley de New York et regroupera 2’000 experts. /
ADN
IV n° 1
Le bilan fait par Swisstransplant fin janvier de l’année 2013 n’est pas réjouissant: le nombre des patients transplantés est resté inchangé par rapport à l’année précédente, stagnant à 470. A l’heure actuelle, quelque 1’270 personnes sont en attente d’un organe, ce qui correspond à une augmentation de près de 10% en l’espace d’un an. /
COMA IV n° 1
p. 46
Dépôt de brevet La découverte des équipes du CHUV et de l’UNIL sur la prédiction des chances de réveil de patients dans le coma a fait, par le biais du Bureau de transfert de technologie (PACTT), l’objet d’une demande de brevet avec comme inventeurs Marzia De Lucia et Athina Tzovara. «Nous souhaitons développer un software qui intègre automatiquement les mesures et les calculs, explique Marzia De Lucia du Centre d’imagerie biomédicale du CHUV et responsable du projet. Nous avons déjà eu plusieurs contacts de potentiels partenaires afin de réfléchir au développement d’un instrument qui incorporerait ce programme.» /
post-scriptum
cancer IV n° 1
p. 17
Prudence annoncée
3D-babies
Le dossier principal du premier numéro de In Vivo évoquait la combinaison prometteuse des molécules Yervoy et Nivolumab pour lutter contre le cancer. L’enthousiasme est retombé à la fin janvier lorsque le laboratoire pharmaceutique américain Bristol-Myers Squibb a annoncé vouloir poursuivre les tests avant une mise sur le marché. Ce signe de prudence a aussi fait baisser l’action boursière du laboratoire. L’utilisation de l’immunothérapie pour combattre le cancer a tout de même été élue «avancée scientifique la plus significative en 2013» par la prestigieuse revue Science. /
3D
E-Cigarette IV n° 1
p. 14
IV n° 1
p. 62
Résultats mitigés
Fœtus imprimés
En janvier 2014, la Haute Autorité de santé française s’exprimait sur la nocivité du vapotage, avec beaucoup de prudence: «La cigarette électronique n’est pas recommandée à ce jour, mais son utilisation n’est pas découragée. Nous n’avons pas assez de données scientifiques sur son efficacité et son innocuité.» /
L’impression 3D ne cesse d’ouvrir de nouvelles pistes dans le domaine médical. La société californienne Organovo, spécialiste du bioprinting, a annoncé fin janvier avoir réussi l’impression de tissu de foie humain. Le site américain 3D Babies a fait parler de lui en proposant cette technique pour réaliser des figurines de fœtus en 3D. La démarche coûte de 200 à 600 dollars selon la taille du bambin en plastique. Elle nécessite une échographie prolongée, ce qui n’est pas sans risque pour l’enfant, tout particulièrement pour le cerveau et l’œil du fœtus au cours du premier trimestre de grossesse, selon le Collège national des gynécologues et obstétriciens français. / l’utilisation de la 3d au chuv sur www.invivomagazine.com
5
Grâce à ses hôpitaux universitaires, ses centres de recherche et ses nombreuses start-up qui se spécialisent dans le domaine de la santé, la Suisse romande excelle en matière d’innovation médicale. Ce savoir-faire unique lui vaut aujourd’hui le surnom de «Health Valley». Dans chaque numéro de «In Vivo», cette rubrique s’ouvre par une représentation de la région. Cette carte a été créée par l’illustrateur Steebz du studio de graphisme belge Khuan + Ktron.
in situ
Health Valley Tour d’horizon de l’innovation médicale en Suisse romande.
ROMONT p. 09
NEUCHâTEL p. 09
PAUDEX p. 11
LAUSANNE p. 10
L’entreprise bâloise PharmaFocus va s’installer et créer 200 postes, à Romont.
L’inventeur du stent, Hans Wallstén, cherche constamment des innovations médicales.
MONTHEY p. 12
Les appareils de Swortec améliorent la qualité de vie des personnes handicapées.
GENèVE p. 08
Steebz at KHUAN+KTRON
Le très ambitieux Human Brain Project vise à comprendre la structure et le fonctionnement du cerveau humain.
6
La start-up One Drop Diagnostics développe un dispositif pour confirmer en quelques minutes une attaque cardiaque.
Investir dans le medtech: un sujet discuté en avril au sein du nouveau Swiss Tech Conference Center.
in situ
HEALTH VALLEY
in SITU
HEALTH VALLEY
A la conquête du cerveau humain Dans la région lémanique, plusieurs projets prometteurs se concentrent déjà sur le développement de technologies neurologiques. Le Humain Brain Project vient aujourd’hui renforcer la position de centre d’excellence en neurosciences de la Health Valley.
8
Texte Céline Bilardo
ci-dessus: richard Frackowiak, l’un des initiateurs du Humain Brain Project ainsi que des représentations 3D de neurones colorisées.
roréhabilitation sur le plan international, mène à l’EPFL le projet «Re-walk», destiné à réhabiliter par neurostimulation des personnes victimes de lésions de la moelle épinière. Il a ainsi montré qu’un rat paraplégique pouvait retrouver petit à petit l’usage de ses jambes et les mouvoir volontairement. «Notre réussite se fait par palier. Après des tests sur les rats, nous menons des essais sur des singes, en collaboration avec le professeur Eric Rouiller à l’Université de Fribourg. Par ailleurs, huit patients volontaires du CHUV présentant des lésions incomplètes de la moelle testeront également notre système cette année.» Environnement propice Toujours sur le campus lausannois, la start-up Aleva Neurotherapeutics révolutionne, quant à elle, la technologie des électrodes implantées dans le cerveau. Elle a conçu une microélectrode capable de réduire drastiquement les effets secondaires d’un traitement d’une maladie neurologique telle que le Parkinson. Jean-Pierre Rosat, son directeur, estime que le développement et le succès de la région lémanique comme centre d’excellence en neurosciences est le fruit d’un effort mené par le président de l’EPFL, Patrick Aebischer, depuis plus de dix ans. «Il a créé la faculté des sciences de la vie en 2002 et a tout fait pour y concentrer une masse critique suffisante: il a attiré les meilleurs ingénieurs du monde, capables de collaborer avec les meilleurs biologistes et médecins afin de pousser l’étude des neurosciences et son application clinique.» Un avis que partage Patrik Vuilleumier, directeur du centre des neurosciences de Genève, actif dans l’utilisation de la neuroimagerie pour l’observation des émotions. «La collaboration entre Lausanne et Genève contribue à cette réussite. Nous profitons de la proximité géographique pour l’échange de nos différentes compétences.» ⁄ Voir TEDx sur www.invivomagazine.com
BBP / EPFL, Alain Herzog / EPFL
NEUROSCIENCES «Nous connaissons mal notre cerveau.» Richard Frackowiak, chef du Service de neurologie au CHUV et cofondateur du Human Brain Project (HBP), mesure les défis du projet européen qu’il a initié avec Henry Markram de l’EPFL et Karlheinz Meier de l’Université d’Heidelberg. Objectif: fédérer plus d’un millier d’ingénieurs en informatique, d’experts en neurosciences cliniques et fondamentales pour comprendre la structure et le fonctionnement du cerveau humain. «Aujourd’hui, nous n’avons pas une vision globale du cerveau, de ses connexions et de son mécanisme précis.» Primé par la Commission européenne, le Human Brain Project pèse un milliard d’euros, un budget réparti sur dix ans (à l’heure où nous mettons sous presse, ce budget est remis en question suite à l’acceptation de l’initiative anti-immigration en Suisse). Ce financement permettra d’intégrer dans un superordinateur toutes les données relatives à l’étude du cerveau des hôpitaux participants, afin d’en créer un modèle virtuel. «Si nous parvenons à notre but, nous pourrons utiliser ces informations pour mieux diagnostiquer et pronostiquer des maladies neurodégénératives. Mais aussi élaborer des médicaments plus efficaces et moins coûteux. A l’heure actuelle, pas moins de 35% des diagnostics de la maladie d’Alzheimer s’avèrent erronés!» Le HBP sera en partie coordonné depuis le Campus Biotech de Genève. Il illustre le travail d’innovation sur le cerveau qui est mené en Suisse romande: de Genève à Lausanne, en passant par Fribourg et le Valais, tous les laboratoires des institutions universitaires participent à l’essor des neurosciences dans la Health Valley. «La Suisse romande est particulièrement avancée dans l’application des recherches en neurosciences fondamentales vers les neurosciences cliniques», explique Michel Christoph, président de la Société suisse pour les neurosciences. Grégoire Courtine, considéré comme l’un des chercheurs les plus prometteurs en neu-
in situ
HEALTH VALLEY
Start-up RééDUCATION
Implantations
PharmaFocus s’installe à Romont
Romont Le canton de Fribourg accueillera en 2014 le siège social de l’entreprise bâloise PharmaFocus. La société active dans le commerce en gros de produits pharmaceutiques va s’installer à Romont. Elle va implanter également son nouveau centre de distribution sur le site fribourgeois. 200 postes de travail seront créés et plus de 5 millions de francs seront investis ces cinq prochaines années.
Nouvelle pharma sur La Côte
Eysins Quotient Bioresearch, une entreprise britannique du secteur pharmaceutique, a annoncé son arrivée, dans le courant du premier semestre 2014, à Eysin, au sein du parc d’activité Terre-Bonne. Cinquante collaborateurs occuperont ce qui pourrait constituer le siège Europe, Moyen-Orient et Asie du groupe.
L’application
écho 112 Echo 112 permet la géolocalisation d’une personne en situation d’urgence dans le monde entier et à quelques mètres de précision seulement, le tout sans la nécessité d’être connecté à internet. Gratuite, l’application a été développée par Jocelyn Corniche, Patrick Schoettker et Paul Moix, médecins urgentistes au CHUV. www.echo112.com
le Chiffre
En millions, la somme levée par l’entreprise lausannoise Spinomix, active dans le développement de technologies de diagnostic moléculaire. Ces fonds devraient notamment lui permettre de consolider ses coopérations existantes avec l’industrie du diagnostic in vitro.
3
«Nous transplantons des cellules de porc sur des patients diabétiques.» Philippe Morel, chef du Service de chirurgie viscérale aux HUG, explique, Dans une interview au «Matin Dimanche» de janvier 2014, qu’une technique inédite de greffe d’îlots de pancréas de porc pourrait révolutionner le traitement du diabète.
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La société lausannoise Mindmaze a conçu le MindplayPro, un appareil qui propose des exercices ludiques pour la réhabilitation des personnes victimes d’accident vasculaire cérébral. Le patient peut voir son avatar en mouvement sur deux écrans. Le dispositif est testé au CHUV et au Stanford Stroke Center (USA).
DIAGNOSTIC
Confirmer une attaque cardiaque en moins de dix minutes: c’est l’objectif visé par le dispositif de la start-up One Drop Diagnostics, basée à Neuchâtel. Il suffit de déposer une goutte de sang sur une puce à usage unique et les résultats sont envoyés via bluetooth ou wi-fi sur un ordinateur ou un smartphone. La société cherche à lever 2 millions de francs.
ALLERGIE
Elle a été élue troisième meilleure start-up medtech suisse en 2013: l’entreprise Abionic, spin-off de l’EPFL, innove dans le diagnostic des allergies. Elle a lancé l’Abioscope, un lecteur pouvant établir le profil allergique d’un patient en moins de vingt minutes. Et une goutte de sang suffit. La start-up a obtenu un prêt de 500’000 CHF de la Fondation pour l’innovation technologique.
RéTINE
La société lausannoise Second Sight multiplie les récompenses: désignée «pionnier technologique pour 2014» par le Forum économique mondial et «invention de l’année 2013» par le magazine «Time», elle a développé un implant permettant aux non-voyants de retrouver une vision partielle. 80 personnes ont déjà été opérées.
in SITU
HEALTH VALLEY
Des tests sanguins sur écran tactile
Un film bio à appliquer sur un écran tactile de smarphone, équipé d’un capteur: c’est ce qu’il faut pour effectuer soi-même des tests sanguins. Mis en place par la start-up Qloudlab, ce procédé, en phase de test, permettra par exemple de mesurer la coagulation du sang.
Mhealth la santé sur mobile en plein essor
Une puce pour surveiller des signes vitaux
Intégrée à un smartphone, la puce électronique développée par Leman Micro Devices permet de surveiller plusieurs signes vitaux: en déposant la deuxième phalange de son index sur l’écran, l’utilisateur peut calculer sa tension, sa température corporelle ou son taux d’oxygène dans le sang.
Plusieurs technologies transforment les smartphones en appareils de diagnostics médicaux.
Le cœur sous contrôle
Tour d’horizon d’innovations romandes.
La start-up Smartcardia a développé un minuscule appareil portable qui permet le suivi à distance des patients cardiaques. Le système transmet les données à un smartphone qui, en cas d’anomalie, envoie l’information à un médecin ou à un hôpital.
Agenda Autour du cerveau Du 10 au 16 mars 2014
Investir dans le Medtech 29 et 30 avril 2014, Lausanne
La 15e édition de la Semaine internationale du cerveau se tient en mars dans les grandes villes suisses. Elle réunit chercheurs et médecins pour présenter au public les dernières découvertes sur le cerveau, avec conférences et expositions.
Entrepreneurs et investisseurs occupent le nouveau centre de conférence de l’EPFL (Swiss Tech Convention Center) pour le 18e MedTech Investing Europe Conference. Au menu: conférences pour découvrir les dernières innovations et les astuces pour y faire de bons investissements.
www.lasemaineducerveau.ch
www.medtechinvesting.com
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Les enjeux du E-health 6 juin 2014, Sierre
Le Technoark accueille la 2e édition de la Journée E-health: une série de conférences et de discussions autour des enjeux et des défis du domaine. L’événe ment est ouvert à toute personne intéressée par les technologies relatives à la santé et à la médecine. www.theark.ch/e-health
Synergie de hautes précision Du 17 au 20 juin 2014, Genève-Palexpo
L’horlogerie, la micro-technologie et le Medtech, trois domaines de la haute précision qui réuniront plus de 700 exposants pour le salon annuel EPHJ-EPMT-SMT. www.ephj.ch
in situ
HEALTH VALLEY
Hans Wallstén, l’inventeur du stent Installé depuis les années 1970 dans la région lausannoise, l’entrepreneur a révolutionné la prise en charge de multiples maladies grâce à ses inventions.
A 90 ans, Hans Wallstén n’a pas perdu son enthousiasme. C’est assis à son bureau, à Paudex (VD), face au lac, qu’il détaille calmement les étapes de son parcours. Devant lui, des petites boîtes soigneusement préparées et étiquetées: elles renferment des modèles de sa plus grande invention, le stent, une innovation médicale majeure. Ce petit implant métallique, introduit dans le corps sans chirurgie, permet de maintenir ouvert un rétrécissement (sténose) d’une cavité de l’organisme – une artère coronaire – pour éviter un infarctus, par exemple. «Plusieurs variantes du stent ont été développées depuis mon invention dans les années 1980, se réjouit le Suédois d’origine. Aujourd’hui, on estime qu’environ 2 millions de ces dispositifs sont implantés chaque année dans le monde.» Initialement, ce diplômé de l’Ecole polytechnique de Chalmers œuvrait dans un secteur bien différent de celui de la médecine: «Jusqu’à l’âge de 45 ans, je menais une carrière dans l’industrie du papier, en Suède. J’ai notamment développé plusieurs procédés pour améliorer le processus de notre fabrication de papier et, ensuite, j’ai dirigé pendant plusieurs années une papeterie.» A la fin des années 1960, le groupe Bonnier le contacte, lui proposant une aide pour créer une entreprise qui commercialiserait ses inventions. Hans Wallstén accepte, et c’est ainsi que naît sa première société, Inventing. «Je l’ai fondée et développée avec succès en Suède pendant cinq ans, avant 11
dom smaz / rezo
Texte Céline Bilardo
de venir m’installer à Lausanne en 1973, pour créer un centre de développement.» C’est par coïncidence qu’ il s’oriente ensuite vers le domaine médical. «En 1979, le cardiologue zurichois Ake Senning m’a proposé une collaboration dans le but de développer une prothèse en forme de spirale pour lutter contre les sténoses. Mais ce dispositif n’était pas concluant.» Chez Inventing, les recherches se poursuivent et Hans Wallstén conçoit un implant auto-expansible, en forme de tube, composé de fils métalliques tressés. Il dépose un brevet en 1982 et, soutenu financièrement par le groupe suédois Bonnier, fonde la société Medinvent, à Villars-Sainte-Croix, qui lui permet de gérer le développement de cette invention. Suite à de multiples tests sur des animaux, ce premier stent, baptisé «Wallstent», est implanté à l’aide d’un cathéter, en première mondiale en 1986, dans les fines artères coro-
naires d’un patient, à l’Hôpital universitaire de Toulouse, puis au CHUV. Le dispositif connaît un succès fulgurant: en 1989, 1’200 interventions avaient déjà eu lieu. Cette même année, Medinvent a été vendue au géant américain Pfizer. Bien que proche de la retraite, l’inventeur n’abandonne pas sa créativité. Il s’attaque à la ménorragie, un saignement excessif durant les menstruations, dont souffre une femme sur dix et qui requiert une chirurgie ainsi qu’une hospitalisation. Il développe alors le «Cavaterm», une solution qui permet un traitement en quinze minutes à l’aide d’un ballon de chaleur. Le Suédois inaugure sa dernière société, Wallstén Medical (désormais Veldana Medical), à Morges. Et même depuis, Hans Wallstén n’a pas arrêté d’inventer. Il vient de déposer un nouveau brevet destiné au milieu médical. «Je ne cesserai jamais de réfléchir à de nouvelles innovations. Mon métier est mon seul hobby de retraite.» ⁄
in SITU
HEALTH VALLEY
étape n° 2
MONTHEY Swortec
Sur la route
Dans chaque numéro, «In Vivo» part à la rencontre des acteurs de la Health Valley. Rendez-vous à Monthey pour cette deuxième étape.
Favoriser la reprise d’une activité physique Les dispositifs de la société valaisanne Swortec augmentent le contrôle musculaire des personnes handicapées. texte: William Türler
Combiner dans un seul appareil plusieurs techniques de rééducation comme la mobilisation, l’électrostimulation et l’exercice contre résistance de charge: voilà le projet de Swortec. Cette société établie depuis 2006 à Monthey a développé deux dispositifs médicaux révolutionnaires: le MotionMaker™, appareil stationnaire permettant aux patients handicapés de s’entraîner à réapprendre à contrôler leurs membres inférieurs et le WalkTrainer™, engin mobile de rééducation à la marche. «L’électrostimulation musculaire de nos appareils ne se manifeste que lorsqu’elle est nécessaire à la réalisation d’un exercice déterminé. C’est là l’une de nos principales innovations», explique Ismaël Perrin, responsable technique de Swortec. Les premiers résultats se sont très vite révélés encourageants. «Nous avons observé une nette amélioration de la part des patients testés du contrôle de leurs membres inférieurs, ajoute Ismaël Perrin. Guidés par les stimulations, ceux-ci déclaraient mieux comprendre comment utiliser leurs muscles.» 12
A ce jour, la société a fabriqué huit exemplaires de son MotionMaker™. Sa clientèle se compose d’institutions suisses comme la Clinique romande de réadaptation, le CSP Nottwil et d’établissements médicaux étrangers. Au total, plus d’une centaine de patients ont déja utilisé ses dispositifs. «Nos appareils permettent de commencer une activité physique contrôlée quatre à six semaines après un accident», ajoute Ismaël Perrin. En moyenne, il recommande trois séances hebdomadaires individualisées durant une période de trois à cinq mois. Fait surprenant: alors que les appareils avaient initialement été conçus pour des paraplégiques incomplets, ils servent désormais au traitement d’infirmes moteurs cérébraux, de paraplégiques complets et de tétraplégiques. Le but n’étant pas uniquement de réapprendre aux patients à marcher, mais également de réduire les effets secondaires découlant d’une immobilisation de longue durée. ⁄ www.swortec.ch
in SITU
HEALTH VALLEY
benoît dubuis Ingénieur, entrepreneur, président de BioAlps et directeur du site Campus Biotech
L’excellence en matière d’innovation n’est pas un but, mais un point de départ.
Pour la troisième année consécutive, la Suisse enregistre les meilleurs résultats au monde en matière d’innovation, comme le révèle l’indice mondial 2013 de l’innovation (GII). Cette étude, publiée chaque année par l’Insead, école de commerce internationale de premier plan, et par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, n’est qu’un des multiples classements reflétant le dynamisme helvétique, dont les institutions de recherche sont autant d’exemples lumineux. Fort bien, direz-vous, mais qu’en attendre pour nous, citoyens?
Notre Confédération helvétique a bien compris le rôle moteur de l’innovation et la nécessité de la soutenir. Que ce soit au niveau fédéral, cantonal, régional, de façon thématique ou transversale, on ne compte plus les nombreuses initiatives et programmes qui sont là pour soutenir l’innovation et renforcer le tissu économique. Des systèmes efficaces? A en juger par les classements actuels, certes! Pourtant si on écoute nos entrepreneurs et si on se projette dans un scénario intégrant des ressources comprimées, cette cohabitation devra céder le pas à une coordination impliquant une promotion des synergies rigoureuse, une rationalisation effective, une clarification de l’offre qui profitera tant aux payeurs qu’aux entrepreneurs.
Au-delà des statistiques et de l’élan de fierté Notre Confédération, regroupant des organismes légitime, ce qui compte, c’est de convertir cultivant leur autonomie, sera alors devenue cette innovation en valeur économique République. Plus centralisée, à l’écoute et au et en emplois. En effet, dans le contexte service de ses entrepreneurs, cette République de compétition entre régions, entre pays, de l’innovation* saura promouvoir les synergies l’innovation joue un rôle central pour au entre ces organismes et abattre le cloisonnement, moins deux raisons: l’innovation est un un frein à l’innovation. Si l’état d’esprit change, moteur de croissance et la plupart des sociétés les ambitions demeurent, faire que cette nouvelle qui la soutiendront ces prochaines décennies République maintienne son rang de premier de n’existent tout simplement pas aujourd’hui. classe en matière d’innovation et assure sa prospérité Pourtant, dans notre monde globalisé, le savoir dans un monde de plus en plus compétitif... passe les frontières à la vitesse des clics de souris, se concentrant sur l’essentiel: créer un environnement les idées se transformant en valeur économique et en emplois non pas forcément à l’endroit optimal pour des personnes d’exception qui sont le où elles ont été émises, mais là où se trouvent socle du dynamisme tant académique, industriel la volonté et les conditions les plus favorables qu’entrepreneurial. ⁄ pour les concrétiser. En savoir plus
www.bioalps.org la plateforme des sciences de la vie de Suisse occidentale
DR
* L’actualité des sciences de la vie et de l’innovation en Suisse occidentale sur le site www.republic-of-innovation.ch
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in SITU
globe
in situ
autour du globe Parce que la recherche ne s’arrête pas aux frontières, In Vivo présente les dernières innovations médicales à travers le monde.
En pourcentage, le taux de guérison que promet le Sovaldi. La mise sur le marché de ce médicament pour le traitement de l’hépatite C a été approuvée par la Commission européenne en janvier 2014.
Robots infirmiers SOINS A l’image du célèbre da Vinci, les robots assistent depuis quelques années les chirurgiens. C’est à présent aux infirmiers de recevoir le soutien de ces machines: Hospi (en photo), du géant Panasonic, circule déjà dans les hôpitaux japonais. Du haut de ses 1,30 m, il lave les cheveux des patients et va chercher des médicaments. La firme californienne Veebot s’apprête à commercialiser «Veebot Robotic Phlebomist», un robot capable d’effectuer une prise de sang, grâce à une technologie alliant émetteur à ultrasons, laser et caméra infrarouge.
«Le cœur artificiel sera commercialisé d’ici deux à cinq ans.» Jean-Claude Cadudal, président de Carmat. Cette société française a créé le cœur artificiel autonome dont la première greffe a eu lieu en décembre dernier.
L’objet
NANOSTIM Il s’agit d’un pacemaker révolutionnaire: de la taille d’une pièce d’un euro, ce stimulateur cardiaque ne comporte pas de sonde. Installé à l’intérieur du ventricule au moyen d’un cathéter introduit dans la veine fémorale, son implantation ne nécessite aucune intervention chirurgicale. Nanostim, développé par la société américaine St. Jude Medical, a été implanté pour la première fois en France en décembre 2013.
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gLOBE
Clin.univ.St-luc / H. Depasse
in situ
De l’os à partir de la graisse cellules souches Des scientifiques des Cliniques universitaires Saint-Luc (UCL), à Bruxelles, viennent de mettre au point une technique pour créer de l’os artificiel à partir de cellules souches prélevées dans la graisse du patient. Ces dernières sont cultivées et multipliées trois mois avant d’être réimplantées là où l’os du patient manque. Le professeur Denis Dufrane, coordinateur du centre de thérapie cellulaire et tissulaire des UCL, explique que cette découverte présente de multiples avantages. «Jusqu’à présent, nous procédons à une greffe avec de l’os de donneurs; celui-ci est fixé avec des plaques de métal, ce qui implique un risque de fracture très élevé.»
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élec s la vivo in
Alors voilà, les 1 001 vies des urgences
The Story of the Human Body Daniel E. Lieberman, Pantheon Books, octobre 2013
Baptiste Beaulieu, éditions Fayard, octobre 2013
Professeur de biologie de l’évolution à l’Université d’Harvard, Daniel Lieberman décrypte l’évolution du corps humain, de «Comment nous sommes devenus bipèdes» à «Pourquoi les innovations actuelles peuvent nous être nuisibles». L’auteur analyse tant les bénéfices de ces changements que leurs conséquences négatives, telles que l’augmentation de certaines maladies comme l’obésité. Lieberman ose ainsi une critique des modes de vie actuels, encourageant quelques habitudes, comme la course à pieds nus.
Cet ouvrage témoigne du succès rencontré par le blog «Alors voilà», que tient Baptiste Beaulieu depuis novembre 2012. Ce jeune médecin y raconte des scènes vécues aux urgences de l’Hôpital d’Auch, dans le Gers (F). Ces histoires, décrites avec humour et sensibilité, plongent le lecteur dans le quotidien éprouvant, mais profondément humain des soignants: les relations entre infirmiers et médecins, les consultations à domicile et les incroyables rencontres avec les patients.
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Votre cerveau sous jeux vidéo
Ce que les médecins peuvent apprendre les uns des autres
Conférence TED par Daphné Bavelier
Conférence TED par Stefan Larsson
Cette présentation de Stefan Larsson, un manager du Boston Consulting Group, donnée en octobre 2013, est un complément intéressant au dossier sur la médecine participative de ce numéro de In Vivo (p. 19). Son message: la transparence et le partage de données entre hôpitaux peuvent optimiser tant l’efficacité que les coûts des soins.
CHRONIQUES VERS LES .COM LES LIENS AGAZINE M O IV V WWW.IN
ET LES
VIDéO
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Filmée pourtant en juin 2012, cette conférence donnée par Daphné Bavelier qui travaille pour les universités de Genève et de Rochester (NY) a créé le buzz en passant voilà quelques semaines la barrière du million et demi de vues. En se penchant sur les célébrissimes jeux de tir à la première personne (type «Call of Duty»), la scientifique a fait de surprenantes découvertes sur la manière dont ces jeux peuvent nous aider à apprendre, à nous concentrer et, de façon fascinante, à être multitâches.
in SITU
Les enjeux éthiques de l’homme bionique Rex (à droite) est le premier homme bionique: il est la somme de tout ce que la science sait faire aujourd’hui en matière d’organes de synthèse et de prothèses robotisées. Tout est artificiel: membres, système de circulation sanguine, sang, pancréas, rein, rate, cœur et trachée. Il pose au côté de Bertolt Meyer, un psychologue de l’Université de Zurich dont le visage a servi de modèle pour créer Rex. Cet homme bionique, présenté pour la première fois à Londres en 2013, symbolise certes le progrès, mais illustre aussi divers enjeux éthiques majeurs, tels que la gestion des coûts et les limites de ces technologies. En effet, à cause de leur prix, ces dispositifs risquent, à l’avenir, de n’être accessibles qu’aux patients appartenant aux classes sociales les plus aisées. Si aujourd’hui le recours à ces technologies est accepté pour combler une fonction défaillante suite à une maladie ou à un accident, le sera-t-il un jour pour améliorer, voire augmenter, certaines compétences? Des questions que professionnels de la santé, politiques et éthiciens devront se poser. Sans tarder. AFP PHOTO / ANDREW COWIE
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globe
in situ
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gLOBE
médecine participative
BIG DATA
La médecine participative /
Donner ses données: un geste qui permet d’améliorer les traitements et qui ouvre de nouveaux horizons à la recherche. Bienvenue dans l’univers en pleine expansion du patient transparent.
/ Par
Benjamin Keller, Melinda Marchese et Julie Zaugg
www.facelab.org
Visages moyens calculés par The Face Research Lab pour In Vivo
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focus
médecine participative
L
a médecine a toujours été affaire de données. Symptômes, température, pouls, résultats de tests… Autant d’informations qui, depuis des siècles, permettent au praticien d’établir un diagnostic et de prescrire un traitement. Ce processus ancestral connaît depuis une dizaine d’années une formidable accélération. Les données médicales, devenues numériques, se multiplient de manière exponentielle et circulent sans limite, ce qui ouvre de nouveaux horizons aux chercheurs et transforme les relations avec les patients. «La capacité de stockage, alliée à la puissance de calcul des ordinateurs, bouleverse totalement notre manière de faire de la recherche, se réjouit Jacques Fellay, généticien et directeur de laboratoire à la Faculté des sciences de la vie de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). Nous pouvons travailler sur une quantité quasi infinie de données médicales qui proviennent de «vrais» patients, d’horizons très divers. Alors que, jusqu’à présent, nous devions étudier des groupes limités de personnes recrutées pour des essais cliniques.» Les professionnels de la santé ne sont pas toujours à l’origine de ces collections de données: des réseaux sociaux consacrés aux maladies naissent de l’initiative même de patients. L’ensemble des informations
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qu’ils publient sont compilées, permettant ainsi de construire une connaissance collective et documentée de maladies chroniques, parfois rares et méconnues. D’autres types de données proviennent de la numérisation des dossiers des patients, un service au public qui est mis en place dans de nombreux pays, dont la Suisse (lire p. 24). Par ailleurs, sous l’impulsion d’institutions sanitaires, des biobanques se créent à travers le monde pour rassembler des collections d’échantillons biologiques (lire p. 24).
Repères
Big Data
La gigantesque masse de données numériques générées par les individus. Chaque jour, elle s’alourdit de 2,5 trillions d’octets, selon IBM. /
12,4
En milliards de dollars, le chiffre d’affaires du marché du Big Data en 2014 (tous domaines confondus), selon le cabinet Transparency Market Research. /
300
En milliards de dollars, les économies que pourrait enregistrer le système de santé américain grâce aux applications de Big Data, selon le cabinet McKinsey.
Ce partage de données personnelles, qu’il s’agisse de sang, de tissus ou de résultats d’examens cliniques, est un acte consentant de la part des patients, toujours plus nombreux à vouloir contribuer à la science. «Cette tendance ne signifie pas forcément qu’aujourd’hui les gens font davantage confiance à la recherche qu’auparavant, précise Jacques Fellay. Il y a encore dix ans, récolter et stocker tant de données n’était tout simplement pas possible d’un point de vue technologique. Si les scientifiques expliquent correctement leur intention aux patients et que la collaboration entre eux se déroule dans un contexte éthiquement sain, la médecine participative a de beaux jours devant elle. Et surtout, elle ouvrira d’extraordinaires perspectives thérapeutiques pour de multiples maladies.»
Réseaux sociaux – Les malades s’organisent
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Frappé d’une tumeur cancéreuse au cerveau, l’Italien Salvatore Iaconesi décide en septembre 2012 de mettre sur internet toutes ses données médicales «Proposez-moi un traitement!», invite-t-il sur son site baptisé «La Cura». Il recevra plus de 500’000 réponses contenant des conseils, même de médecins. Suite à son opération, il remerciera tout ce réseau d’entraide de lui avoir permis «de ne pas se sentir seul». A l’instar de Salvatore Iaconesi, des milliers de personnes à travers le monde partagent aujourd’hui leur dossier médical sur des plateformes internet spécia20
lement conçues à cet effet, telles que CureTogether et Carenity. Parmi les plus populaires se trouve PatientsLikeMe, un réseau social créé en 2004 aux Etats-Unis. Sur simple inscription, il permet aux internautes de créer un profil sous pseudonyme. Sur cette sorte de Facebook pour malades qui compte 250’000 membres, dont 153 en Suisse, les gens détaillent leurs symptômes, comparent leurs diagnostics et leurs effets secondaires. Pourquoi partager en ligne ces informations très personnelles? L’envie de trouver un traitement à une affection représente la motivation première. «Nous agrégeons les données de nos membres sous forme
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médecine participative
«Le patient a modifié le rôle du médecin»
Le sociologue Alain Kaufmann estime que le paternalisme médical est aujourd’hui mis en cause. propos recueillis par
Patrick dutoit
bartek Mudrecki
En quoi les réseaux sociaux tels que PatientsLikeMe ont-ils modifié le rôle du patient dans sa propre prise en charge? ak Le partage de données sur ce type de plateforme a permis aux patients de gagner en pouvoir grâce à la connaissance collective à laquelle ils ont désormais accès concernant leur pathologie. iv
Cet «empowerment» modifie la relation patient-médecin, puisqu’un certain «paternalisme» médical est mis en cause. Un rapport de force s’installe, et l’expertise se trouve davantage distribuée entre le patient et le médecin. La personne traitée devient alors un partenaire, un co-thérapeute sur le mode du «professionnel-amateur». Le rôle du médecin reste cependant primordial, mais il doit rentrer dans une nouvelle dynamique de dialogue.
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Cela signifie-t-il qu’aujourd’hui les gens ne font plus confiance à leur médecin? ak Le partage de données médicales reflète effectivement une forme de méfiance vis-à-vis de l’expertise médicale. Cela met en lumière le besoin d’autonomie du patient, qui correspond à la vision libérale contemporaine. A cette forme d’autonomie s’ajoute un principe de solidarité, au sein d’un groupe concerné de personnes qui veut produire un savoir collectif. On tend alors vers l’idéal de la cybernétique et du «cerveauruche» où chacun transmet des informations afin que tous les citoyens en retirent les bénéfices. iv
Comment se fait-il que des patients osent mettre des informations confidentielles en ligne? ak Il y a ici une forme de iv
paradoxe. D’un côté, les individus souhaitent protéger leurs données médicales. D’un autre côté, lorsqu’on met en ligne ses données génomiques par exemple, on est facilement identifiable; c’est la manière la plus fiable de retrouver l’identité de quelqu’un. Sauf que le patient prend ce risque, malgré les avertissements des experts, car il souhaite participer à l’augmentation de l’intelligence collective; il a plus à gagner qu’à perdre. Il a accès en contrepartie à une base de données de connaissances sur sa maladie vécue par d’autres. Ce savoir commun permet aussi de donner une signification statistique à des traitements alternatifs, et donc de lui donner des options par rapport à des traitements pharmacologiques classiques par exemple. Alain Kaufmann est directeur de l’Interface Sciences-Société de l’Université de Lausanne.
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PATIENTSLIKEME, LE RÉSEAU SOCIAL DES MALADES Fondé en 2004 aux Etats-Unis, PatientsLikeMe est devenu le plus grand site internet d'échange d’informations sur sa maladie, son traitement et son expérience.
252'206
Nombre de patients
60% femmes
40% hommes
TOP 10 DES MALADIES Nombre de patients
Fibromyalgie 31'958
Diabète de type 2 9'864
Sclérose en plaques 32'474
Parkinson 8'039 Sclérose latérale amyotrophique 6'332 Dépression majeure 5'401
Epilepsie 7'506
Psoriasis 3'523
Lupus Polyarthrite érythémateux rhumatoïde disséminé 4'656 3'687
Fatigue 85'269 Etat dépressif 84'296 Anxiété 84'097 Douleur 82'189
Insomnie 72'246
COMMERCE DE DONNÉES Exemples d’entreprises pharmaceutiques qui collaborent avec PatientsLikeMe Novartis
Maux de tête 37'962 Troubles de la conscience 37'767
Merck Sanofi
Somnolence 28'150 Raideur et spasticité 27'334
Abbott Labs Boehringer Ingelheim
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Problèmes d’équilibre 25'174
Nombre d’études scientifiques basées sur des données de PatientsLikeMe
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Source: PatientsLikeMe, 28 janvier 2014 / infographie: Benjamin Schulte
TOP 10 DES SYMPTÔMES Nombre de patients
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de graphiques, ce qui leur permet de se comparer à d’autres personnes souffrant de la même maladie, de se renseigner sur les effets secondaires de divers traitements ou de glaner des conseils sur les façons de gérer leurs symptômes», détaille Paul Wicks, directeur de la recherche et du développement de PatientsLikeMe. Pour le généticien Jacques Fellay, «les gens veulent aussi que l’expérience difficile qu’ils vivent ait une raison d’être, qu’elle puisse être utile à d’autres».
Risques à anticiper
Reste que certains scientifiques émettent des réserves quant à l’utilité de ces données mises en ligne par le patient lui-même. «Leur qualité dépend de la compréhension que la personne a de sa propre santé, qui peut être défaillante, fait remarquer Pierre Théraulaz, membre de la Commission vaudoise d’examen des plaintes de patients. Il peut arriver qu’une personne n’accepte pas son diagnostic, qu’elle ne rapporte pas ses symptômes de façon précise ou qu’elle exagère les effets secondaires d’un médicament. Il manque le regard externe d’un expert.» Autre motif d’inquiétude, les effets sur la confidentialité de la mise en ligne de cette gigantesque collecte de données médicales. Sur PatientsLikeMe, les gens n’hésitent pas à se servir de leurs vrais noms, à publier des photos d’eux et à indiquer leur ville d’origine. Les participants au Personal Genome Project doivent signer un formulaire de consentement qui indique que les données qu’ils ont fournies pourraient être volées et décryptées (lire interview p. 28). Lorsqu’une personne met ainsi en ligne des informations sur sa santé, elle s’expose à ce qu’un employeur les voie et refuse éventuellement 23
gilles weber
La prise de pouvoir du patient
Se renseigner sur internet confère aussi un tout nouveau rôle au patient: de sujet passif, dépendant des recommandations de son médecin, il va chercher l’information auprès d’autres «patients éclairés», gagnant ainsi en assurance. «Les patients arrivent souvent en consultation avec des pages imprimées de Wikipedia, note Chin Eap, membre de l’Unité de pharmacogénétique et de psychopharmacologie clinique du CHUV. Pour les médecins, il y a des aspects positifs à retirer de cette évolution: le malade est plus attentif à ses symptômes et parvient mieux à les décrire.» Certains iront jusqu’à modifier le traitement prescrit par leur médecin. Un Américain souffrant de sclérose en plaques a, par exemple, découvert sur PatientsLikeMe qu’il prenait une quantité plus basse de Baclofen – l’un de ses médicaments – que les autres usagers du site. «En augmentant le dosage, il a gagné une heure de mobilité par jour», note Paul Wicks.
«Je m’implique pour les générations futures» Hospitalisé en novembre 2012, André Charette a accepté de mettre à disposition de la recherche un échantillon de son sang.
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ndré Charette n’a pas hésité une seconde: lorsque l’équipe de la Biobanque institutionnelle de Lausanne (BIL) lui a demandé s’il acceptait que du sang lui soit prélevé pendant son opération en vue de le mettre à la disposition des chercheurs, il a immédiatement donné son accord. «Si je peux d’une manière ou d’une autre contribuer au progrès de la recherche, je le fais. J’ai également accepté que des tissus soient prélevés.» Ce père de deux enfants, âgé de 42 ans, espère avant tout que les avancées de la médecine génomique profitent aux générations futures.
André Charette souhaite être informé si une anomalie génétique est détectée lors de l’analyse de son ADN. «Mes données ne sont donc pas totalement anonymes puisque les chercheurs ont la possibilité de remonter jusqu’à moi. Mais la BIL m’a assuré que mes informations génétiques ne seront utilisées que dans un cadre de recherche médicale. J’ai signé en toute confiance le consentement général.»
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de l’engager ou à ce qu’un assureur décide de ne pas conclure un contrat d’assurance. Les patients perdent également le contrôle sur ce qui est fait de leurs données. PatientsLikeMe vend des informations sur ses membres à des entreprises pharmaceutiques. CureTogether autorise même ces dernières à leur envoyer des publicités. «Ces organisations de patients sur la toile ont joué un rôle primordial dans l’essor de la médecine participative, et leurs bienfaits sont indéniables, estime Jacques Fellay. Mais il est temps à présent de réfléchir aux garde-fous qu’il faut mettre en place pour garantir la protection de l’individu.»
Dossiers électroniques – pour une meilleure transmission des informations
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La numérisation des données se joue aussi à l’échelle du patient. Avec le dossier électronique, l’ensemble des informations de santé d’un individu, aujourd’hui éparpillées, sont mises en commun et rendues accessibles à tout moment, depuis n’importe quel dispositif connecté. Objectifs: limiter les erreurs de traitement, accélérer la prise en charge et éviter de répéter inutilement des examens. Le dossier médical informatisé est déjà une réalité dans certains cantons suisses. A Genève, pionnier en la matière, il a été déployé en mai 2013. Les patients qui souhaitent en bénéficier doivent faire une demande à un professionnel de la santé. Près de 1’600 personnes avaient déjà sauté le pas en janvier dernier. Une fois le dossier créé, il est lié avec le numéro d’assuré et des données préexistantes y sont automatiquement insérées. Médecins comme patients peuvent ensuite consulter le dossier via une plateforme en ligne (www. mondossiermedical.ch). «Ce sont les patients qui décident qui a accès à quelles informations», précise Adrien Bron, chef de la Direction générale de la santé de Genève. Le dossier électronique ne remplace pas les dossiers médicaux existants. «Tous les renseignements qui y figurent sont considérés comme un plus, mais il n’y a pas de garantie d’exhaustivité, continue Adrien Bron. Les professionnels n’ont pas l’obligation d’y insérer les informations contenues dans leurs propres dossiers. Plus le dossier électronique sera utilisé, plus il devien24
dra un outil efficace, en particulier pour les médecins de premier recours ou pour la prise en charge des patients complexes.» Si des améliorations restent à apporter à la plateforme genevoise, par exemple la possibilité pour les patients d’insérer eux-mêmes leurs données, il s’agit pour l’heure du projet le plus avancé en Suisse. La Confédération veut encourager la création des dossiers électroniques. Un projet de loi fédéral a été établi pour fixer un cadre légal, qui pourrait entrer en vigueur en 2015. «Il n’est pas prévu d’établir une plateforme fédérale, mais des structures décentralisées qui pourront se limiter aux frontières cantonales ou s’étendre au-delà», précise Daniel Dauwalder, porte-parole de l’Office fédéral de la santé publique. D’autres Etats sont allés plus loin. Au Danemark, une plateforme nationale a été créée, donnant autant accès aux dossiers électroniques des patients qu’à des informations médicales ou sur le système de santé. Baptisé Sundhed, le site est plébiscité: à la fin 2013, il enregistrait plus d’un million de visiteurs uniques par mois, alors que le pays compte 5,6 millions d’habitants, selon le directeur Morten Elbæk Petersen (lire son interview sur www.invivomagazine.com).
Biobanques – Des mines d’or pour les chercheurs
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Toujours plus grandes, toujours plus nombreuses. Les biobanques, collections d’échantillons biologiques (sang, tissus, urine) destinés à la recherche, ont vu leur importance s’accroître avec l’essor de la médecine génomique. Appelée aussi médecine personnalisée, cette approche a pour but de traiter chaque patient en fonction de ses particularités génétiques. Elle doit permettre le développement de traitements ciblés et de prévenir l’apparition de maladies. Problème: la plupart de ces variantes génétiques ne concernent qu’une fraction de la population. Pour les déceler, les chercheurs doivent étudier de nombreux échantillons d’ADN. D’où l’importance des biobanques. A Lausanne, un projet unique en Europe de biobanque hospitalière systématique, faisant participer l’ensemble des patients, a été lancé au début 2013. La Biobanque institutionnelle de Lausanne (BIL) doit servir à anticiper les progrès rapides de la médecine génomique. Les patients ont la possibilité de faire don
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Florence Nightingale, pionnière du data management
Millbourn, Wellcome Library, London, www.royal.gov
A la fin du XIXe siècle, cette infirmière a profondément marqué l’histoire des soins en analysant des données récoltées auprès de ses patients. «Les seuls patients anglais qui refusaient du thé souffraient de typhus. Lorsqu’ils avaient de nouveau envie d’un thé, cela signifiait qu’ils commençaient à aller mieux.» C’est à ce genre de petits signes, consignés dans son ouvrage Notes on Nursing, que Florence Nightingale était constamment attentive. Cette infirmière britannique, qui vécut de 1820 à 1910, pratiquait déjà en médecine ce que le XXIe siècle appelle le «data management»: la récolte et l’étude de données de patients dans le but d’améliorer la qualité des soins.
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Egalement statisticienne, elle met ses compétences au service de l’hôpital militaire de Scutari (aujourd’hui Üsküdar, district d’Istanbul) pendant la guerre de Crimée (1853 à 1856). Face aux conditions d’hygiène déplorables et à des dossiers médicaux défaillants, elle met de l’ordre, réunit des données et les analyse. Ce travail méticuleux permet alors de faire chuter de 42 à 2% le taux de décès dans les hôpitaux impliqués dans cette guerre. De retour en Angleterre, soutenue par la reine Victoria, elle continue ce travail d’analyse de données au sein de la Commission royale pour la santé de l’armée, qu’elle dirige. Elle en tire d’importantes conclusions, notamment sur les
causes de décès des soldats. Pour s’assurer que ces statistiques soient compréhensibles pour les membres du Parlement, et que des mesures soient prises, elle les présente sous forme de graphiques (en photo ci-dessus). Grâce à son engagement et à son précieux travail sur les données, Florence Nightingale a permis d’importantes réformes. Celle que l’on surnommait «La Dame à la lampe», en référence à ses nombreuses visites nocturnes auprès des patients, une torche à la main, est aujourd’hui largement considérée comme la fondatrice de l’épidémiologie (l’étude des facteurs influant sur la santé et les maladies de populations) et l’instigatrice des soins modernes.
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médecine participative
Pharma: la bataille de la transparence a commencé Si les données médicales deviennent plus accessibles pour la recherche, les résultats des essais cliniques effectués par les pharmas ne le sont pas toujours. Des chercheurs ont lancé une campagne internationale pour en finir avec cette opacité. Texte: daniel saraga
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aire progresser la recherche, quoi de plus noble? Chaque année, des milliers de Suisses participent à quelque 200 essais cliniques organisés pour juger de manière objective l’efficacité d’un médicament. Le participant peut espérer pouvoir un jour en bénéficier (s’il souffre lui-même de l’affection) ou, au moins, faire avancer la médecine. Hélas, ces efforts se font très souvent en vain: une multitude de résultats d’études cliniques ne sont jamais publiés. Le problème est très sérieux: une étude sur deux n’est jamais rendue publique, selon Carl Heneghan, professeur d’Evidence-Based Medicine à l’Université d’Oxford, qui souligne le problème fondamental: «Il est impossible de déterminer l’efficacité d’une thérapie si tous les résultats des essais cliniques, sans exception, ne sont pas publiés.» «Il s’agit d’un vrai problème éthique pour les participants qui croient aider la recherche. Dans les faits, on trompe la personne», commente Bernard Burnand, directeur du Centre d’épidémiologie clinique du CHUV. Tricher à pile ou face Car ce sont essentiellement les résultats négatifs qui restent cachés, ce qui gonfle artificielle-
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ment la valeur de la thérapie testée. C’est comme jouer à pile ou face en se donnant le droit d’ignorer tous les «piles» afin d’affirmer que nous possédons une pièce extraordinaire qui préfère le côté «face». De la triche, évidemment, mais une pratique courante dans le monde médical. Les conséquences peuvent être funestes: publiée en 2000 dans le «New England Journal of Medicine» et sponsorisée par le fabricant Merck, l’étude principale sur la toxicité de l’anti-inflammatoire Vioxx ne mentionnait pas tous les problèmes cardiaques notés durant les essais cliniques. Il faudra attendre quatre ans pour que Vioxx soit retiré du marché, après avoir été pris par des dizaines de millions de patients. Selon une étude du «Lancet» fin 2004, Vioxx aurait été responsable de quelque 38’000 crises cardiaque fatales. L’opacité qui entoure les essais cliniques a beau paraître scandaleuse, elle continue à être défendue bec et ongles par les pharmas, qui la justifient en général par des raisons de secret commercial. Malgré nos demandes répétées, Interpharma (l’association représentant les entreprises pharmaceutiques
actives dans la recherche en Suisse) est restée injoignable pour une prise de position. Les médecins contre-attaquent Mais la situation pourrait changer. En janvier 2012, Carl Heneghan et des dizaines de médecins (dont le psychiatre britannique Ben Goldacre, auteur de «Bad Pharma») lancent l’initiative internationale «Alltrials». L’objectif: convaincre l’opinion publique, les politiciens et les organisations de patients de l’importance d’un changement de paradigme. Si la charte a été signée par 420 organisations, seules deux entreprises pharmaceutiques l’ont fait, dont le géant britannique GlaxoSmithKline. Ce dernier a joint l’acte à la parole en livrant à des chercheurs le résumé d’études complet sur l’antigrippal Relenza. Autre mini-victoire: après avoir esquivé pendant des années des demandes d’accès aux données, Roche (qui n’a pas rejoint «Alltrials») a mis sur pied un groupe d’experts pour analyser tous les essais cliniques du Tamiflu, dont l’efficacité a sérieusement été remise en question. Les données ont également été fournies aux chercheurs de la Cochrane
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Collaboration, même si c’est dans un format peu pratique: «Nous n’avons pas reçu une base de données électronique mais des PDF», note Peter Doshi de l’Université Johns Hopkins à Baltimore. Les spécialistes se réjouissent de ces évolutions, mais restent prudents: «Le combat n’est clairement pas encore gagné. Nous attendons des faits concrets, pas des promesses», glisse Bernard Burnand, qui participe depuis 2005 au Groupe d’Ottawa, une association qui milite pour l’enregistrement des essais cliniques et la dissémination des résultats. Fait marquant: l’Agence européenne du médicament (EMA) a décidé de publier de manière systématique les résumés complets des études cliniques dès janvier 2014. Mais cette bonne volonté peut se heurter aux actions judiciaires de la part d’entreprises pharmaceutiques: en novembre 2013, les sociétés InterMune et AbbVie ont réussi à empêcher la publication de résumés par l’EMA. Et le mouvement ne la suit pas en Suisse, ou le régulateur Swissmedic déclare ne pas avoir l’intention de publier les résultats d’études. Restera encore à résoudre le problème des milliers d’essais cliniques déjà effectués. Ceux-ci dorment dans les archives, bien à l’abri des regards des premiers intéressés: les médecins et les patients. «Dans deux décennies, les gens se retourneront avec étonnement sur cette période où les données n’étaient pas publiées, prophétise Carl Heneghan. Ils trouveront cela incroyable et ridicule.»
En savoir plus
«Bad Pharma», Ben Goldacre, Ed. Fourth Estate, 2012
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de quelques millilitres de sang qui sont ensuite mis à disposition des chercheurs. Sur 8’500 patients rencontrés jusqu’en janvier dernier, 7’500 ont accepté de contribuer, détaille Vincent Mooser, directeur de la BIL. «Nous nous engageons à informer les participants si nous découvrons parmi leurs gènes une mutation qui les prédisposerait à une maladie», précise le responsable. Seule exception: les affections pour lesquelles il n’existe pas encore de traitement. Des garde-fous existent: «La loi fédérale relative à la recherche sur l’être humain nous oblige à obtenir un consentement écrit de toute personne dont nous souhaitons utiliser les données médicales.» Et lorsqu’une firme récolte des informations sur des patients, elle doit en avertir le préposé fédéral à la protection des données. Chaque canton possède en outre une commission d’éthique qui surveille ces recherches. Aucun cadre légal international n’a par contre été mis en place. «Il est nécessaire de se montrer digne de la confiance des patients qui acceptent de participer, estime Jacques Fellay. Les chercheurs doivent faire preuve de transparence et les informer au maximum des avancées de leurs projets.» D’autres grandes biobanques ont été créées dans le monde, à l’image de la National Biobank of Korea, la biobanque pédiatrique du Children’s Hospital of Philadelphia ou encore la UK Biobank. De nombreuses petites biobanques sont de plus constituées par les hôpitaux, pour des recherches ciblées. /
Un coffre-fort médical
Un groupe d’académiciens et de médecins suisses a fondé en juillet 2012 l’Association «Santé et Données», dont le but est d’encourager la discussion des enjeux scientifiques, éthiques, sociaux, juridiques et politiques liés à l’utilisation de données personnelles. L’association souhaite lancer une plateforme en ligne où les patients pourront entreposer toute sorte de données sur leur santé. «Chacun pourra regrouper les informations le concernant, comme son dossier médical ou des informations qu’il a récoltées lui-même, sur ses heures de sommeil ou son alimentation par exemple», explique le généticien Ernst Hafen, cofondateur de l’association. Les patients seront les seuls à avoir une vue d’ensemble de leur dossier. «Ils seront libres de choisir quelles données ils souhaitent mettre à la disposition des chercheurs.» Ces données seront vendues à des pharmas et autres instituts de recherche. Encore en phase de construction, la plateforme est gérée comme une coopérative. «Notre objectif est de faire profiter du savoir et des bénéfices financiers de la plateforme à ses membres.»
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médecine participative
INTERVIEW «Ces données n’ont de valeur que parce qu’elles sont mises en commun»
propos recueillis par
Julie Zaugg
Le généticien George Church est à l’origine de l’un des travaux scientifiques les plus ambitieux jamais tentés: le séquençage du génome humain. Il explique les bénéfices qui peuvent être tirés d’un tel projet de recherche participative.
Outre la prouesse scientifique, qu’est-ce que le Human Genome Project, achevé en 2003, a permis d’accomplir?
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Il nous a fourni un génome de référence. Mais rétrospectivement, ce n’est pas ce dont nous avions besoin. Il nous fallait une vaste quantité de profils génétiques, pour pouvoir les comparer entre eux et étudier comment ils interagissent avec l’environnement de différentes personnes. C’est l’objectif du Personal Genome Project, lancé en 2004. george church
iv
Parlez-nous de ce projet...
Cette base de données unique au monde a démarré à Boston. Elle regroupe aujourd’hui les profils génétiques de 3’000 personnes, issues de quatre pays. Parmi celles-ci, 200 ont livré des séquences de génome complètes. Mais nous anticipons une rapide augmentation de ce nombre, grâce à la baisse spectaculaire du coût du séquençage génétique (moins de 1’000 francs, ndlr). Chacun peut participer: il suffit de livrer son ADN, assorti idéalement de son dossier médical. Tout cela est ensuite mis en ligne sur une plateforme ouverte à tous, ce qui permet aux chercheurs du monde entier d’y accéder.
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Que va-t-on faire de toute cette information?
Le but principal est de développer des protocoles de conseil et de suivi pour les patients porteurs de certaines mutations génétiques qui les prédisposent à développer une affection grave, comme la maladie de Tay-Sachs (une maladie neurodégénérative, ndlr) ou certains cancers du sein. On peut, par exemple, étudier les effets probables pour une personne de faire un enfant avec telle autre personne, recommander certains tests à la naissance du bébé et dresser le profil des aliments qui lui sont interdits.
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iv Et sur le plan de la recherche, quelle est l’utilité de cette immense quantité de données?
On peut s’en servir pour étudier la progression des maladies génétiques et apprendre à mieux les connaître. Nous avons développé une nouvelle technologie, appelée CRISPR, qui permet d’introduire une mutation ‒ une fois qu’on l’a identifiée comme la cause probable d’une maladie ‒ dans l’ADN d’un petit groupe de cellules humaines, appelé un organoide. On va ensuite pouvoir étudier ses effets sur les cellules et obtenir ainsi une meilleure connaissance de la maladie.
gc
Peut-on imaginer à terme développer des médicaments qui ciblent spécifiquement ces mutations?
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Bien sûr. Plus de 2’000 thérapies géniques sont actuellement en phase de test clinique. L’une d’entre elles, le Glybera (destiné aux patients qui ont une mutation Un pionnier génétique les rendant de la génomique plus sujets aux pancréaProfesseur de génétique à tites, ndlr) a même la Harvard Medical School, déjà été approuvée en l’Américain George Church Europe. Ces thérapies est mondialement reconnu comme étant un pionnier géniques représentent du séquençage du la personnalisation génome. Il démarre en ultime en médecine: 1990 le Human Genome elles agissent en Project. Sitôt cet inventaire modifiant l’ADN à des gènes composant l’intérieur des cellules, l’humain dressé, George pour le rendre Church s’est attelé au conforme à celui Personal Genome Project. d’une personne «saine», Début 2013, le chercheur a fait la une de la presse voire même supérieur internationale en à la normale. gc
présentant une autre ambition: cloner l’homme de Neandertal.
iv Et pour les patients qui ont fait don de
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SAM OGDEN / SCIENCE PHOTO LIBRARY
George Church dirige le Personal Genome Project, une base de données de profils génétiques unique au monde.
leurs données génétiques au Personal Genome Project, quels sont les bénéfices directs? Nous les informons si nous trouvons des indications dans leur génome les prédisposant à une maladie. Mais il faut savoir que seul un très petit nombre de maladies peuvent être prédites ainsi et que, parmi elles, un nombre encore plus restreint peut être traité ou prévenu.
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En acceptant de mettre toutes leurs données en ligne, ces gens renoncent en quelque sorte au secret médical, non? iv
Cela fait partie des conditions de base du Personal Genome Project. Lorsqu’ils acceptent de fournir leurs données, les patients sont conscients qu’ils ne pourront plus contrôler qui y a accès et ce qui en est fait. Nous faisons très attention à obtenir un consentement éclairé de leur part à ce sujet. Nous évitons en outre de leur faire de fausses promesses: en cas de vol de ces données, par un hacker par exemple, il serait très facile de les décoder et de ré-identifier leur source.
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Ce n’est pas dangereux?
Personne n’est à l’abri aujourd’hui de ce genre de mésaventure. Il n’y a pas si longtemps l’administration des vétérans, aux Etats-Unis, a
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perdu dans la nature les dossiers médicaux de 26 millions de personnes. Mais l’introduction de lois qui interdisent la discrimination, par un employeur ou un assureur par exemple, sur la base des données génétiques de quelqu’un ‒ comme celle adoptée par les Etats-Unis en 2008 ‒ a rendu la question moins sensible.
Qui possède les données mises en ligne via le Personal Genome Project?
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Les participants peuvent en tout temps accéder à leurs données et en demander une copie. Mais elles sont en parallèle mises à la disposition des chercheurs du monde entier, qui peuvent en faire ce qu’ils veulent sans demander leur autorisation. Elles appartiennent donc à tout le monde.
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Ne faudrait-il pas rémunérer ceux qui font don de leur matériel génétique?
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Certaines choses n’ont de valeur que lorsqu’elles sont mises en commun et partagées librement. Qu’on songe à l’information contenue dans l’encyclopédie en ligne Wikipedia. Or, si on se mettait à rémunérer la fourniture de ces informations, on se retrouverait avec une multitude de bases de données payantes, ce qui rendrait un tel partage impossible. ⁄
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«Pour réduire le burn-out qui affecte les professionnels de la santé, et ne pas déshumaniser une profession dont l’essence même est l’humanité, il serait utile d’offrir à ceux qui s’y engagent des moyens de développer les qualités intérieures dont ils ont besoin pour mieux secourir les autres.» Matthieu Ricard
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Léa Crespi / PASCO
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MENS SANA
INTERVIEW
Matthieu Ricard L’altruisme pourrait régénérer la pratique
de la médecine. C’est l’avis du docteur en génétique cellulaire, moine bouddhiste et interprète français du dalaï-lama. interview: Paule Goumaz
«Les professionnels de la santé devraient cultiver l’altruisme» nuellement confrontée aux souffrances et Personnalité hors du commun, Matthieu Ricard propose avec aux problèmes des patients dont elle s’ocson dernier livre, Plaidoyer pour l’altruisme, l’aboutissement cupe. Elle me disait que, dans les nouvelles d’années de réflexions menées avec des scientifiques, philoformations de personnel soignant où elle prasophes et économistes. Face aux crises actuelles, tant dans tique, l’accent est mis sur la «nécessité de garle domaine financier que social et écologique, le docteur en der une distance émotionnelle vis-à-vis des magénétique cellulaire nous convie à une nouvelle manière lades» pour éviter le fameux burn-out. Elle m’a de penser: chacun de nous peut – et gagnerait à – cultiver ensuite confié: «C’est curieux, j’ai l’impression de l’amour altruiste. gagner quelque chose lorsque je m’occupe de ceux qui souffrent, mais lorsque je parle de ce «gain» à IN VIVO Dans votre ouvrage, vous dites que «l’almes collègues, je me sens un peu coupable de restruisme n’est pas un luxe, mais une nécessité.» sentir quelque chose de positif.» Contrairement à la Faudrait-il favoriser l’entraînement à l’altruisme? détresse empathique, l’amour et la compassion sont Matthieu Ricard Il semblerait logique de former à des états d’esprit positifs, qui renforcent la capacité l’amour altruiste et à la compassion ceux dont le intérieure à faire face à la souffrance d’autrui. métier consiste à s’occuper quotidiennement de personnes qui souffrent. Une telle formation aiderait également les proches, parents, enfants, IV Qu’entendez-vous par «états d’esprit positifs»? conjoints, qui prennent soin de personnes maMR Cela ne signifie nullement que les observateurs lades ou handicapées. considèrent la souffrance comme acceptable, mais qu’ils réagissent à celle-ci par des états mentaux constructifs, comme le courage, l’amour maternel, le sentiment d’affiIV Pensez-vous que les soignants et les médeliation, la détermination à trouver un moyen d’aider, et cins ne sont pas suffisamment altruistes? non des états mentaux «négatifs», qui engendrent plutôt la MR J’ai discuté avec une infirmière qui, détresse, l’aversion, le découragement et l’évitement. comme la plupart de ses collègues, est conti-
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INTERVIEW
Qu’en est-il du côté des professionnels de la santé? Le curriculum des études médicales ne mentionne quasiment pas le mot «compassion», encore moins les méthodes pour la cultiver, en dépit du fait que la bienveillance et la compassion font partie intégrante de l’idéal de la médecine, du serment d’Hippocrate et du code déontologique. Les étudiants en médecine et les jeunes médecins qui commencent à exercer dans les hôpitaux sont plus souvent mis à l’épreuve par des horaires draconiens qui exigent souvent vingt-quatre heures de présence ininterrompue auprès des malades. IV
«Les études médicales ne mentionnent quasiment pas le mot compassion.»
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Il existe bien sûr partout dans le monde d’innombrables médecins, infirmières et aides-soignants qui se consacrent inlassablement au bien-être des autres avec un dévouement admirable. Mais pour réduire le burnout qui affecte les professionnels de la santé, et ne pas compassion, qui est le désir de remédier à la soufdéshumaniser une profession dont l’essence même est france et à ses causes. L’empathie est un signal l’humanité, il serait utile d’offrir à ceux qui s’y engagent d’alerte qui nous informe sur la situation de l’autre. des moyens de développer les qualités intérieures C’est une résonance affective qui fait que si l’autre dont ils ont besoin pour mieux secourir les autres. Si est en joie, vous ressentez de la joie, et s’il souffre, le personnel soignant avait la possibilité de cultiver vous êtes éprouvé par sa souffrance. C’est aussi une la compassion et de l’introduire au cœur expérience cognitive qui vous fait imaginer même des pratiques courantes des hôpice que l’autre ressent, ou, ce qui est différent, taux, les patients se sentiraient mieux BIOGRAPHIE ce que vous ressentiriez à sa place. entourés et les médecins et infirmières en Né en France en 1946, Matthieu retireraient davantage de satisfaction et un Mais l’empathie laissée à elle-même ne sufRicard est le fils meilleur équilibre émotionnel. fit pas. Si vous vous contentez de souffrir de Jean-François de la souffrance de l’autre, jour après jour, Revel, philosophe, journaliste et mois après mois, vous pâtirez très vite d’un IV La technologie occupe une place granacadémicien, et épuisement émotionnel, le burn-out. Aux dissante dans les hôpitaux et institutions de l’artiste peintre Etats-Unis, une étude a d’ailleurs montré de soins. N’établit-elle pas une distance Yahne Le Touque 60% du personnel soignant souffre entre le patient et le soignant? MR Les ma- melin. Il termine ou a souffert du burn-out et qu’un tiers en chines en elles-mêmes n’ont évidemment son doctorat en génétique celluest affecté au point de devoir interrompre que du bon dans la mesure où elles servent laire en 1972 à momentanément ses activités. à mieux dépister les maladies et à les soi- l’Institut Pasteur, gner. La technologie peut aujourd’hui faire sous la direction des merveilles. Mais l’usage d’instruments du Prix Nobel IV L’empathie ne présente donc pas que de médecine performants ne devrait pas, bien entendu, des vertus? MR Selon les circonstances et François Jacob. reléguer à l’arrière-plan la présence bienles individus, l’empathie peut évoluer en veillante du médecin et du personnel soi- Fasciné par le sollicitude et engendrer le désir de pourbouddhisme gnant, qui est essentielle pour le patient. voir aux besoins d’autrui. Mais elle peut tibétain, il part aussi déclencher une détresse qui focalise étudier auprès notre attention sur nous-mêmes et nous IV Votre livre aborde également une disdes grands détourne des besoins de l’autre. Pour cette tinction claire entre l’altruisme et l’empa- maîtres spirituels thie. MR Il ne faut en effet pas confondre et s’installe défini- dernière raison, l’empathie ne suffit pas en tivement dans elle-même à engendrer l’altruisme. l’empathie avec l’amour altruiste et la le monastère de Shechen, au Népal, où il vit maintenant depuis quarante ans. Depuis, il a publié des ouvrages, traduits en plus de 20 langues.
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de l’égoïsme et de l’altruisme. Si nous avons de la considération pour le sort des générations futures, nous ne pouvons Reste la compassion, dont l’essence est pas endommager à ce point la planète que nous allons leur une motivation altruiste, nécessaire et suffilaisser. Ils nous diront: «Vous saviez et pourtant vous n’avez sante pour que nous désirions le bien d’aurien fait.» trui et engendrions la volonté de l’accomplir par l’action. En effet, cette compassion est De même, si nous avions davantage de considération pour consciente de la situation de l’autre, elle est la qualité de vie de ceux qui nous entourent, nous veilleassociée au désir de soulager sa souffrance et rions à améliorer leurs conditions de travail, de vie famide lui procurer du bien-être. Enfin, elle n’est liale et sociale, et de bien d’autres aspects de leur existence. pas parasitée par une confusion entre les émoEn particulier, nous nous efforcerions de remédier à la tions ressenties par l’autre et les nôtres. précarité qui subsiste au sein de la richesse. IV Plusieurs recherches, auxquelles vous avez d’ailleurs participé, montrent scienIV Vous dénoncez aussi les dérives du tifiquement ces différences. MR En effet, En savoir plus libre-échange et défendez une économie responsable envers les autres. MR Si les Tania Singer, directrice de l’Institut Max- «Plaidoyer pour Planck des neurosciences de Leipzig, et ses l’altruisme. La force investisseurs avaient plus de considération de la bienveillance», collègues ont entrepris une étude longitu- Matthieu Ricard. pour le bien-être d’autrui, ils ne joueraient dinale, un projet baptisé «ReSource», qui NiL Editions, 2013 pas comme au casino avec les économies vise à entraîner sur une année un groupe des épargnants qui leur ont fait confiance, «L’art de la médide 400 volontaires novices à une multitude tation», Matthieu dans le but de récolter de plus gros divide capacités affectives et cognitives, des Ricard. NiL Editions, dendes en fin d’année. Ils ne spéculeraient 2008 capacités mentales qui incluent l’empathie pas sur les ressources alimentaires, les seet la compassion. Une étude préliminaire a «L’infini dans la mences, l’eau et autres ressources vitales à déjà montré que, chez la plupart des gens, paume de la main», la survie des populations les plus démunies. Matthieu Ricard et l’empathie ressentie face à la souffrance de Trinh Xuan Thuan. l’autre est systématiquement corrélée avec Editions Pocket, Regardez la crise! N’est-elle pas une exades sentiments entièrement négatifs – dou- 2002 cerbation des intérêts personnels, entièleur, détresse, inquiétude, découragement. «Plaidoyer pour le rement centrés sur soi? N’a-t-elle pas été La signature neuronale de l’empathie est bonheur», Matthieu déclenchée par l’avidité, les spéculations Ricard. NiL Editions, similaire à celle des émotions négatives. sauvages, les manipulations liées aux sub2003 primes? Tout cela vient d’une vision réductionniste, déshumanisée, de l’être humain, IV Tandis que l’altruisme est corrélé avec celle de l’Homo economicus. Ne vaut-il pas des sentiments positifs? MR Les premiers mieux encourager l’émergence, en nous-mêmes résultats montrent qu’à l’issue d’une semaine de médiet dans la société, de l’Homo altericus, celui qui tations orientées vers l’amour altruiste et la compassion, construit son bonheur avec les autres, dans la des sujets novices perçoivent de manière beaucoup plus solidarité et le souci d’autrui? L’altruisme est positive et bienveillante des extraits de vidéos montrant bien le fil d’Ariane qui nous permet de retroudes personnes en souffrance. ver notre chemin dans ce dédale de préoccupations graves et complexes. / IV Y a-t-il d’autres domaines pour lesquels l’altruisme pourrait se révéler bénéfique? MR La question de l’environnement, en particulier, nous concerne, nos enfants, nos proches et nos descendants, ainsi que l’ensemble des êtres, humains et animaux, maintenant et dans l’avenir. Or, aussi complexe cette question soit-elle, elle se résume à l’opposition IV Comment s’approcher alors de cet état?
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INNOVATION
Le chirurgien qui vous opère n'est pas ici La télémédecine a déjà transformé le monde de la santé en l’affranchissant des distances. Mais sa révolution n’en est qu’à ses débuts.
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ous sommes le 7 septembre 2001. Dans un des blocs chirurgicaux de l’Hôpital de Strasbourg, une patiente subit avec succès une ablation de la vésicule biliaire. Un geste courant? Oui, à ceci près que le chirurgien se trouve à plus de 6’000 km de la malade, opérée par le biais d’un robot baptisé Zeus. Avec bien d’autres, «l’opération Lindbergh» contribuait à faire entrer la médecine
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Texte: Jean-Christophe Piot ILLUSTRATION: joëlle flumet
dans une nouvelle ère. Douze ans plus tard, la puissance de calcul croissante de terminaux toujours plus mobiles et la généralisation du haut débit ont changé les pratiques médicales en profondeur, dans toutes les disciplines et partout dans le monde. Consultation déportée, échanges entre confrères à des fins d’expertise, transmission et interprétation des paramètres d’un patient…
La médecine à distance réunit une large gamme d’actes et de soins, du plus banal au plus complexe, de la vidéoconférence à la chirurgie robotique. Ces technologies permettent aussi aux personnes âgées ou handicapées de rester à leur domicile plutôt que de se déplacer. «Les dispositifs mobiles dont ces patients sont équipés envoient aux professionnels des informations qui permettent de suivre leur état, explique Alain Junger, responsable des systèmes d’information à la Direction des soins du CHUV. Nous pouvons répondre à leurs questions ou à leurs inquiétudes sans qu’ils aient à se déplacer, et réagir rapidement le cas échéant.» Après une opération ou en cas d’affection de longue durée, la même logique permet d’éviter aux convalescents
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INNOVATION
Grâce à la télémédecine, les personnes âgées ou handicapées n’ont plus besoin de se déplacer: le praticien suit leur évolution par écrans interposés.
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INNOVATION
de multiplier des allers-retours épuisants – et coûteux. Réactivité high-tech
«L’impact quotidien des nouvelles technologies est considérable, notamment en matière de soins infirmiers, note Alain Junger. Le CHUV est truffé d’outils qui permettent le telenursing des patients hospitalisés.» Au-delà des signes classiques (rythmes cardiaque et respiratoire, tension artérielle…), médecins et infirmiers sont ainsi en mesure de connaître en permanence, par écrans interposés, le taux d’oxygène dans le sang d’un patient, mais aussi de savoir s’il se déplace ou dans quelle position il se trouve. Ces outils permettent une réactivité souvent déterminante, dans la médecine d’urgence en particulier. «En cas d’accident ischémique, la fenêtre thérapeutique est courte, indique le professeur Mikael Mazighi, du Service de neurologie de l’Hôpital Bichat à Paris. Après l’apparition des premiers symptômes, nous ne disposons que de quatre heures trente pour déclencher une thrombolyse intraveineuse. Le cerveau d’une victime d’AVC perd chaque minute 2 millions de neurones: la vitesse de réaction est essentielle pour libérer une artère cérébrale obstruée par un caillot.» Or, ce soin ne peut être prescrit que par des neurologues. La télémédecine permet de gagner des minutes précieuses pour les personnes éloignées d’un «stroke center». Les urgentistes contactent des neurologues qui
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Une aubaine pour
examinent le patient par caméra interposée, précisent l’examen clinique, consultent le scanner ou l’IRM et décident du traitement approprié, administré sur place par leurs confrères. En termes techniques, les possibilités semblent sans fin, dans tous les domaines, selon Alain Junger. «La généralisation du haut débit ou le développement des nanotechnologies ouvrent tous les jours de nouvelles perspectives.» Collaboration des spécialistes
Pour Andy Fischer, directeur de Medgate, plus grand service de télémédecine suisse et président de la Société internationale de télémédecine et de cybersanté, la pratique de la consultation à distance pourrait gagner en efficacité en améliorant la collaboration entre les différents acteurs (médecins traitants, spécialistes et hôpitaux) impliqués dans une prise en charge. «Lorsqu’un praticien répond par téléphone à un patient, il doit pouvoir, si nécessaire, le diriger vers un collègue ou vers un établissement hospitalier. Le transfert de données digitales réunies lors de la téléconsultation doit pouvoir se faire facilement.»
L’accès aux soins pour les personnes résidant dans des zones reculées s’est amélioré ces dernières années grâce aux nouvelles technologies de la communication. En Inde par exemple, un habitant d’une région rurale peut aujourd’hui retirer un médicament en pharmacie sur présentation du SMS de prescription envoyé par le centre de télémédecine gratuit dont il dépend. La fondation Terre des Hommes - aide à l’enfance a lancé début 2014, grâce au soutien de la Bill & Melinda Gates Foundation, la mise en place d’un projet de télémédecine au Burkina Faso. «Un enfant sur huit n’atteint pas l’âge de 5 ans dans les régions rurales du pays principalement à cause de diagnostics erronés, explique Thierry Agagliate, chef du projet de l’ONG suisse. Les infirmiers de 400 centres de santé de brousse auront accès à des tablettes de dernière génération, qui leur permettront d’être reliés en temps réel à des médecins de l’hôpital de leur district. Par ailleurs, les hôpitaux de référence pourront aussi accéder aux dossiers électroniques de patients de ces centres de brousse, détecter les tendances épidémiologiques pour ainsi mieux comprendre les difficultés qu’ils rencontrent.»
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INNOVATION
les déserts médicaux
Medgate a intégré l’an dernier, en plus de 1’000 médecins et 15 cliniques, de nouveaux partenaires dans son réseau «Medgate Partner network»: les pharmaciens. «Dans 200 pharmacies suisses, les patients peuvent bénéficier d’une consultation à distance avec l’un de nos médecins, explique le directeur de l’entreprise. L’objectif étant toujours de faciliter au maximum l’accès aux soins.»
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RAFT
Crainte d’une médecine désincarnée
Narayana Health
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1 En 2012 au Mali, 2’000 personnes ont bénéficié d’une échographie interprétée à distance. Ces opérations sont notamment menées par le RAFT, le Réseau en Afrique francophone pour la télémédecine, développé par les HUG, à Genève.
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En Inde, la Narayana Hrudayalaya Foundation, a lancé un vaste projet de télémédecine: il permet aux personnes résidant loin des centres médicaux de bénéficier d’une consultation tout en restant chez elles.
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Une bonne collaboration nécessite également une harmonisation du langage utilisé dans les e-communications. «Le nombre de données transmises et interprétées est tel qu’il est nécessaire de se doter d’une terminologie commune, estime Alain Junger. Nous devons standardiser la communication clinique.»
Si la télémédecine suscite l’enthousiasme, elle crée quelques craintes également. L’absence de contact physique est l’une d’entre elles. Car la simple présence du praticien est pour beaucoup de patients la première étape du traitement. Tous les praticiens connaissent l’importance du langage corporel et des attitudes d’une personne en consultation. L’outil numérique le plus performant du monde ne transmet pas l’atmosphère d’une salle de soins, le stress des malades, les odeurs ou ce qui se passe hors du champ des caméras. «La télémédecine ne remet pas en cause le lien entre le médecin et le patient, estime Alain Junger. Ce n’est pas l’ordinateur ou l’écran qui fait le soin. Ces outils sont un support rassurant dans bien des cas. Aujourd’hui comme hier, la sensibilité et l’intelligence du soignant comme du soigné restent déterminantes. Même à travers un écran, ce sont toujours deux êtres humains qui se font face.» ⁄
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prospection
Don du sang: des critères trop sévères Des milliers de donneurs potentiels en Suisse ne peuvent pas donner leur sang. Face à la menace de pénurie, les spécialistes remettent en questions certaines mesures d’exclusion. Texte céline bilardo
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a Suisse craint chaque année une pénurie de sang.» Le message de Rudolf Schwabe, directeur de l’organisation nationale du service de transfusion sanguine Croix-Rouge Suisse (CRS), est clair. Le pays est globalement autosuffisant mais plusieurs cantons comme Genève, Bâle ou Vaud doivent régulièrement faire appel à d’autres centres de transfusion suisses pour recevoir suffisamment de poches de sang. «Nous importons 10% de nos besoins chaque année, soit environ 3’000 poches sur les 30’000 nécessaires au canton de Vaud, explique Jean-Daniel Tissot, chef du Centre de transfusion sanguine du CHUV. Et ces besoins augmentent avec les avancées technologiques en matière de soins, qui permettent de traiter des patients toujours plus âgés.»
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prospection
Globules rouges, mais aussi plaquettes et plasma sont prélevés lors d’un don de sang: trois composants utilisés principalement par les médecins des services d’onco-hématologie et de chirurgie hémorragique. «Malheureusement, quand nous faisons un appel au don de sang, nous envoyons un message contradictoire, poursuit le spécialiste. Nous cherchons toujours plus de donneurs et en même temps, nous refusons toujours plus de volontaires, les mesures de précaution étant très contraignantes.» Pour pouvoir donner son sang, il faut effectivement répondre à des critères très précis, qui peuvent exclure un volontaire de manière temporaire, voire définitive. Tour d’horizon des principaux obstacles au don de sang.
1.
L’homosexualité
Les hommes qui ont des rapports sexuels avec des partenaires du même sexe entre 1977 ‒ date de découverte du premier rétrovirus humain lié au sida ‒ et aujourd’hui, sont exclus à vie du don de sang, au même titre que les personnes qui se droguent ou qui ont des rapports sexuels rémunérés. Emmanuel Rigal, chef du Centre de transfusion sanguine des HUG à Genève, s’interroge: «Il a été démontré qu’une poche sur 3 millions est contaminée tous les huit ans. En assouplissant cette mesure, le risque encouru serait de trois ou quatre personnes contaminées en plus par année
Les solutions alternatives 1. Purifier le sang La Suisse est pionnière du procédé dit «d’inactivation des pathogènes», qui consiste à détruire toutes les bactéries qui pourraient être présentes dans le sang et donc se rapprocher d’un sang pur. Cette technique est déjà réalisée sur les plaquettes et sur le plasma, deux composants du sang qui permettent la coagulation. Et les recherches sont en cours pour la suppression totale de ces agents néfastes dans les globules rouges. «Quand l’on saura également détruire les pathogènes dans les globules rouges, les risques d’infection seront maîtrisés. Tous les critères de restriction devront être revus», se réjouit Jean-Daniel Tissot.
2. Produire du sang artificiel Il n’existe aujourd’hui toujours pas de substitut au sang, et les différentes recherches menées sur la fabrication de sang synthétique sont pour l’heure interrompues à la suite de complications sanitaires, telles qu’une augmentation du risque d’infarctus, comme l’a révélé une étude parue dans le «Journal of the American Medical Association» en 2008. En revanche, le développement de globules rouges à partir de cellules souches embryonnaires est en passe de devenir réalité. Le professeur Luc Douay, chef du Service d’hématologie à l’Hôpital Saint-Antoine de Paris, a mené un premier essai clinique réussi en 2011 et place ses espoirs sur une nouvelle cellule découverte en 2007
en Europe. En termes relatifs, cela reste très faible. Mais quel est le seuil d’acceptabilité de la société d’un risque supplémentaire, même minime de transmission du virus du VIH? Le débat est plus sociétal que médical.» Selon Jean-Daniel Tissot, «personne n’a le courage de prendre cette décision, mais la discussion sera relancée avec les nouvelles techniques médicales étudiées» (lire «solutions alternatives» p. 39). En 2012, l’autorité Swissmedic a par ailleurs refusé d’entrer en matière après une année de débat parlementaire au sujet de cette mesure de précaution. «Tout risque avéré ou même suspecté pour les receveurs doit être écarté», tranche Hans-Beat Jenny, directeur adjoint de l’institut.
2.
Le changement de partenaire sexuel
Fixé à 12 mois jusqu’en janvier 2012, le délai pour une personne qui a changé de partenaire avant d’être autorisé à donner son sang a été abaissé à quatre mois. Mais pour le chef des transfusions au CHUV, ce critère peut être repensé, notamment en tenant compte des relations protégées et de la valeur des tests pouvant compenser le risque d’infection: «Avec cette mesure, nous devons opposer un refus à pas moins de 30 à 40% des jeunes donneurs.» Au CRS, Rudolf Schwabe déplore lui aussi cette restriction: «La population de jeunes donneurs est importante, nous espérons réduire cette attente à trois mois.»
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3.
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Les séjours à l’étranger
La malaria, le chikungunya et le chagas sont autant de maladies émergentes virales ou parasitaires qui empêchent temporairement le don de sang en Suisse. Aucune remise en question de ce principe n’est cependant envisagée. «Le risque de transmission d’un pathogène inconnu est encore trop élevé», explique Jean-Daniel Tissot. En 2013, c’est la fièvre du Nil occidental qui a paralysé les centres de prélèvements: les voyageurs de retour des EtatsUnis et du Canada, entre autres, devaient observer un mois de quarantaine. Un phénomène qui affecte particulièrement Genève, où la population est très mobile – il s’agit de l’un des cantons les plus concernés par la pénurie de sang.
4.
La maladie de Creutzfeldt-Jakob
Tout individu ayant séjourné six mois au moins en Angleterre de 1980 à 1996 n’est pas autorisé à donner son sang. La maladie de Creutzfeldt-Jakob, virus apparu pendant ce laps de temps en Grande-Bretagne, a une période d’incubation très longue et les tests ne sont pas toujours en mesure de le détecter. En 2004, une variante de cette maladie, la «vache folle», a interdit de don toutes les personnes ayant déjà bénéficié d’une transfusion sanguine après 1980. «A cause de cette mesure, nous avons perdu 11% de nos
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donneurs, les plus fidèles, souligne Jean-Daniel Tissot. Cette règle devrait être rediscutée, voire supprimée. Comme pour la maladie de Creutzfeldt-Jakob, aucun cas n’a été observé en Suisse et la mesure n’est plus d’actualité.»
5.
L’âge et le poids du donneur
Autorisé dès l’âge de 16 ans aux Etats-Unis, le don ne peut se faire avant 18 ans en Suisse. Une mesure acceptée par les spécialistes, qui évoquent le besoin de laisser aux patients le temps de
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prospection
Jean-Daniel Tissot, chef du Centre de transfusion sanguine du CHUV, estime que certains critères de don de sang devraient être rediscutés.
et baptisée «pluripotente induite», qui peut produire des globules rouges de façon illimité (lire article sur les cellules souches p. 64). «Le plus gros défi est de parvenir à adapter les conditions de culture en laboratoire à une production de volume industriel, explique-t-il. J’espère observer des premiers résultats d’ici à quatre ans.»
3. Diminuer les transfusions sanguines
grandir. Quant au poids minimum de 50 kg, rien ne devrait changer non plus. «Nous prélevons 450 ml de sang, ce qui n’est pas négligeable pour la santé du donneur, explique Jean-Daniel Tissot. Si nous prenions moins de sang à une personne de moins de 50 kg, c’est la qualité du sang qui ne serait plus optimale.»
6.
La fréquence des dons
En Suisse, les femmes volontaires peuvent donner leur sang deux fois par année au maximum et les
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hommes trois fois, contre quatre et six fois respectivement en France. Emmanuel Rigal estime que la règle est satisfaisante: «Prélever plus serait faire prendre des risques chez les donneurs de diminuer leurs réserves en fer et causer ainsi une anémie mais aussi une fatigue chronique.» Jean-Daniel Tissot trouve même ce critère excessivement permissif: «Nous prélevons déjà trop sur les mêmes personnes en Suisse. Je préférerais qu’on augmente d’une fois et demie le nombre de donneurs et qu’on diminue d’une fois et demie le nombre de prélèvements chez nos volontaires.» ⁄
Si le don de sang restera toujours nécessaire pour les cas d’urgences hémorragiques, les transfusions sanguines ne sont pas indispensables dans toutes les situations. «En réalisant un travail en amont dans les services hospitaliers, il est possible de réduire le besoin de don de sang au moins de moitié», assure Donat Spahn, chef du Service d’anesthésiologie de l’Hôpital universitaire de Zurich. Il a imaginé un concept, nommé «Patient Blood Management», qui vise trois objectifs: renforcer les examens médicaux des malades et les traiter contre toute anémie possible, avant hospitalisation; diminuer la perte de sang durant une opération par une révision de certaines techniques chirurgicales. Enfin, prévenir tout besoin postopératoire de transfusion par un traitement suffisant du patient en fer et érythropoïétine, une hormone qui augmente la production de globules rouges. Un programmepilote est déjà instauré en Australie pour les chirurgies orthopédiques.
Texte: Stanislas Cavalier
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tendance
Cette médecine qui en fait trop
Certains dépistages détectent des anomalies sans conséquence pour la santé. Ce surdiagnostic a d’importantes répercussions sanitaires et économiques.
«T
out homme bien portant est un malade qui s’ignore», écrivait Jules Romains dans sa pièce de théâtre Knock ou le triomphe de la médecine (1923). Aujourd’hui, «une personne en bonne santé est surtout quelqu’un qui n’a pas encore subi de dépistage», ironise Sauveur Boukris, médecin généraliste et auteur du livre La fabrique de malades: ces maladies qu’on nous invente. La situation s’avère plus contrastée. Grâce aux techniques médicales modernes, il est désormais possible de détecter d’infimes anomalies dans le corps humain, tels des amas de cellules cancéreuses de quelques millimètres. Les bénéfices sont parfois clairement démontrés. Ainsi, les dépistages du cancer du col utérin ou du cancer du côlon permettent une meilleure prise en charge de ces maladies. «Mais avec certains dépistages, il peut arriver que soit identifiée une véritable anomalie non associée à un risque pour la santé. C’est ce qu’on appelle le surdiagnostic», explique le Dr Arnaud Chiolero, privat-docent, médecin épidémiologue à l’Institut universitaire de médecine sociale et préventive du CHUV et auteur d’une revue de littérature sur le sujet, publiée dans le Swiss Medical Forum.
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Sensibiliser les suisses Le débat va s’intensifier en Suisse: la Fédération romande des consommateurs, aux côtés de ses consœurs tessinoise et alémanique, va lancer cette année une campagne d’information pour sensibiliser le public à la question de la surmédicalisation. Une série d’actions sur le sujet sera aussi mise sur pied. «Il s’agit d’une problématique complexe et délicate à communiquer, qui ne doit pas être amalgamée avec une médecine au rabais, mais clairement identifiée à des actes médicaux dont les bénéfices pour la santé n’ont pas été scientifiquement démontrés», écrit la fédération sur son site en janvier 2014.
Le surdiagnostic est le corollaire d’une médecine préventive et hautement technologique. En effet, la prévention, via des dépistages, repose sur le fondement que plus une maladie est détectée tôt, mieux elle pourra être traitée. «Il est clair que la prévention a fait ses preuves dans de nombreux domaines, que cela soit dans les maladies cardiovasculaires (par ex. dépistage et traitement de l’hypertension artérielle sévère pour la prévention des accidents vasculaires cérébraux) ou les cancers (par ex. dépistage du cancer du col utérin), poursuit Arnaud Chiolero. Malheureusement, dans certains cas, l’identification d’une anomalie chez une personne entraîne la mise en place d’un traitement, alors même que cette anomalie n’aurait jamais causé de symptôme ou entraîné le décès. C’est un problème majeur, car le surdiagnostic aboutit à un surtraitement qui n’apporte aucun bénéfice pour le patient mais qui peut être source d’effets secondaires et de complications. Et qui implique des coûts parfois élevés pour la santé publique.» éviter les traitements invasifs
Le dépistage du cancer de la prostate est un cas emblématique. La détection des tumeurs de cet organe se fait lors d’analyses sanguines par le dosage du PSA (Prostate Specific Antigen). Cette protéine est naturellement produite par les cellules prostatiques. Mais les cellules cancéreuses
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normalité de la pression artérielle augmente automatiquement le nombre de personnes considérées comme hypertendues. A partir de certains seuils, le bénéfice du traitement devient minime, voire trop faible au regard des coûts et des risques secondaires au traitement. La difficulté est donc, pour les médecins, d’établir le bon seuil, celui qui évite le surdiagnostic sans tomber dans le sous-diagnostic.»
en sécrètent dix fois plus que les normales. Mesurer la concentration du PSA permet donc de suspecter le développement d’un cancer chez le patient. «Des études indiquent que 30 à 70% des hommes âgés de plus de 60 ans auraient une tumeur de la prostate. Si on la détecte du vivant de la personne, le problème devient de comprendre comment elle va évoluer. Va-t-elle se transformer en cancer agressif ou croître très lentement sans jamais mettre en danger le patient? interroge Arnaud Chiolero. Les estimations sont très incertaines, mais il semble que 17 à 66% des cas détectés par le PSA répondent à la définition du surdiagnostic: le patient ne développera pas de symptômes secondaires à cette tumeur et n’en décédera pas, qu’il soit pris en charge ou non.» Outre le stress d’un tel diagnostic, le traitement chirurgical du cancer de la prostate n’est pas sans conséquence pour le patient, provoquant fréquemment une impuissance et une incontinence. De nombreuses anomalies sont découvertes fortuitement à l’occasion d’examens radiologiques, qui sont une autre source majeure de surdiagnostic. Ainsi, des chercheurs américains ont analysé les images de CT-scanner du corps entier réalisés chez 1’192 personnes ne présentant pas de problème de santé particulier. Leurs résultats, publiés dans la revue Radiological Society of North America (RSNA), montrent que 86% d’entre eux présentaient des anomalies. La plupart, sans conséquence pour la santé des patients. «Outre les dépistages, une forme plus subtile de surdiagnostic est liée à la diminution des valeurs seuils des facteurs de risque, poursuit Arnaud Chiolero. Par exemple, l’abaissement des taux de
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Un acronyme qui dénonce Un nouvel acronyme se répand depuis quelques années dans les milieux médicaux anglo-saxons: «VOMIT», pour «Victim of Modern Imaging Technology» (victime de la technologie de l’imagerie moderne). Il dénonce les traitements et opérations inutiles dont sont victimes certains patients suite à des examens d’imagerie médicale. La plupart de ces cas seraient dus à des erreurs d’interprétations des images.
Le souci des médecins de ne pas manquer un diagnostic et les demandes des patients d’être rassurés quant à l’absence d’anomalies peuvent générer du surdiagnostic. «Tout test de dépistage devrait s’accompagner d’une information sur les bénéfices et les inconvénients d’un tel examen, et sur le risque de surdiagnostic. Il faut anticiper les conséquences de découverte d’anomalies, et viser à une décision informée et partagée avec le patient, précise Arnaud Chiolero. La prévention du surdiagnostic est possible en évitant de faire certains examens dont l’efficacité n’est pas démontrée et, dans certains cas, en faisant des dépistages ciblés. Une autre approche, sujet de nombreuses recherches, est de mieux caractériser les anomalies découvertes afin de distinguer celles qui vont bien évoluer permettant un suivi sans traitement (par exemple: surveillance active de certains cancers de la prostate), de celles qui vont mal évoluer et nécessiter un traitement.» ⁄
INTERVIEW
«DSM-5» le manuel qui rend fou
La nouvelle édition de la bible de la psychiatrie ne fait pas l’unanimité parmi les spécialistes.
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La publication en mai 2013 de la 5e édition de la bible de la psychiatrie, le «DSM-5» (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux), a suscité de vives critiques. Allen Frances, psychiatre américain reconnu pour avoir dirigé la rédaction du «DSM-IV», lui reproche notamment d’induire des surdiagnostics dans son essai «Sommes-nous tous des malades mentaux?» L’avis de Pierre Bovet, médecin-chef au Département de psychiatrie du CHUV. Pourquoi le «DSM-5» suscite-t-il autant de polémiques? pb En 1980, la sortie du DSM-III a été perçue comme un soulagement par de nombreux psychiatres. Il visait à proposer une classification et des définitions des pathologies mentales, qui puissent être partagées par tous les psychiatres. Les concepteurs de cette troisième édition n’ont retenu comme critères pertinents pour définir les troubles mentaux que des symptômes qui pouvaient être «objectivés», vus par un observateur comme des objets indépendants de la personne du patient et ont négligé toute une partie fondamentale de ce qui fait la nature des pathologies psychiatriques et de leur aspect relationnel. Au fil des années, les défauts de cette épistémologie sont apparus de plus en plus criants, non seulement aux yeux des psychothérapeutes, mais aussi à ceux des chercheurs. Dans ce contexte, le «DSM-5» était très attendu, et divers échos des groupes de travail qui le préparaient laissaient entendre qu’un début de réflexion épistémologique aurait lieu. Celle-ci n’a pas vraiment été menée au bout et même les plus enthousiastes promoteurs des éditions antérieures ont commencé à se plaindre.
Pour le psychiatre Pierre Bovet, le «DSM-5» peut induire des problèmes de surdiagnostic.
En quoi le «DSM» influence-t-il la pratique de la psychiatrie? pb Le problème est particulièrement aigu aux Etats-Unis, car les critères du «DSM» ont une force légale dans les domaines des assurances et de la justice. En outre, l’enseignement de la iv
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psychopathologie y est souvent restreint à ce qu’en dit le manuel; autrement dit, un trouble mental donné n’est «que» ce qu’en dit le «DSM». La situation est moins dramatique en Europe, le «DSM» n’y a pas de poids légal et une psychopathologie plus fine, profonde, est encore enseignée dans de nombreux endroits. Mais le danger guette! Les journaux scientifiques tendent à n’accepter des articles que s’ils suivent les critères du «DSM» – ce qui appauvrit beaucoup la recherche. Allen Frances reproche également au «DSM-5» d’induire un surdiagnostic… pb Dans cette dernière édition, les critères «seuils» pour définir certains troubles, comme l’hyperactivité avec déficit d’attention chez les enfants, ont été abaissés. Par ailleurs, certaines réactions considérées dans les éditions précédentes comme «normales» iv
(par exemple une période dépressive après un deuil) sont maintenant considérées comme pathologiques; des comportements quelque peu excessifs (sexuels ou avec l’internet) sont catalogués comme des «addictions sans substance» sur la base de critères mal établis d’un point de vue scientifique et des troubles cognitifs légers qu’il est normal de voir apparaître avec l’âge sont «pathologisés», ce qui contribue à accroître l’inquiétude des personnes chez qui ces petites défaillances de mémoire apparaissent, car ça leur laisse croire, à tort, qu’elles sont au bord d’un syndrome d’Alzheimer. Il faudra voir comment, en Suisse, ces nouveautés seront appliquées dans la pratique par les psychiatres. Actuellement, il y a plutôt des problèmes de sous-détection et de sous-traitement de certaines pathologies mentales tels les troubles dépressifs majeurs, en raison de la stigmatisation dont sont encore l’objet les troubles psychiatriques.
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DéCRYPTAGE
Les médicaments meurent aussi De nombreux brevets arrivent aujourd’hui à échéance. Ce phénomène, baptisé «patent cliff», fait trembler les géants de la pharma. e sont plusieurs milliards de dollars qui ont été effacés d’un Texte coup des résultats Sophie du groupe américain Gaitzsch Pfizer. En 2010, les ventes de son anti-cholestérol vedette Lipitor, l’un des médicaments les plus vendus au monde, atteignaient la somme colossale de 10,7 milliards de dollars. Le produit est ensuite tombé dans le domaine public, en novembre 2011, entraînant l’arrivée de génériques moins chers. L’entreprise a alors vu les revenus du Lipitor s’effondrer de plus de moitié. Le cas du Lipitor illustre une tendance globale. Depuis 2012, l’industrie pharmaceutique est confrontée à une vague d’expirations de brevets sans précédent. Appelé «patent cliff», littéralement en français «falaise des brevets», le phénomène devrait se poursuivre jusqu’en 2018. Le cabinet spécialisé EvaluatePharma estime la somme totale en jeu à 230 milliards de dollars pour la période 2013 et 2016. Les géants suisses Novartis et Roche ne sont pas épargnés, notamment avec la perte d’exclusivité pour d’importants produits oncologiques.
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«De nombreux médicaments pour la prévention des maladies cardio-vasculaires (contre le cholestérol, le diabète ou l’hypertension) ont été créés dans les années 1990, explique Thierry Buclin, médecin-chef de la Division pharmacologie clinique du CHUV. Utilisés par de nombreux patients à longueur d’année, ils ont connu un immense succès. Aujourd’hui, ces préparations
Nom: NORVIR De: Abbott Laboratories Pour: Traitement du VIH Le Norvir perdra son brevet en 2015. Une nouvelle qui réjouit les défenseurs de la santé publique: «Il s’agit d’un médicament très utilisé comme «booster» en combinaison avec d’autres médicaments pour le traitement du VIH. Il est considéré comme essentiel par l’OMS, souligne Peter Beyer, conseiller spécialisé dans la propriété intellectuelle pour l’organisation. Avec la fin du brevet, les prix baisseront, ce qui profitera aux patients et aux programmes d’aide humanitaire. Aujourd’hui, le produit est déjà commercialisé à moindre coût dans les pays les moins développés. Le passage aux génériques fera surtout une différence dans les pays à revenus intermédiaires.» En 2012, le Norvir a rapporté 405 millions de dollars à Abbott Laboratories, le groupe américain qui le commercialise.
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tombent dans le domaine public.» Dans l’industrie pharmaceutique, les brevets durent vingt ans, un moyen d’assurer un profit aux laboratoires qui investissent – un milliard de dollars en moyenne – pour le développement d’un médicament.
recherche sur le sujet publiée dans la revue médicale américaine PLOS Medicine. Grâce à un marketing affûté, elles redirigent les consommateurs vers ces produits.» Autre tactique des pharmas: elles misent sur la diversification de leurs activités, par exemple en se lançant dans la fabrication de matériel médical ou de génériques, comme Novartis avec sa filiale Sandoz.
Face à ces pertes de revenus massives, on pourrait s’attendre à voir les pharmas redoubler d’efforts dans l’innovation. A tort: les dépenses pour la recherche ralentissent depuis 2008. «Les chances de trouver le prochain blockbuster sont très minces, car des traitements pour les maladies chroniques – les plus rentables – se trouvent déjà sur le marché, souligne Lisa Urquhart, rédactrice en chef de la publication spécialisée EP Vantage. De plus, les régulations pour l’homologation de nouveautés sont beaucoup plus sévères que par le passé. Les domaines du cancer et de la maladie d’Alzheimer restent très prometteurs, mais il s’agit de recherches extrêmement difficiles à mener.»
Et les patients, que retirent-ils du «patent cliff»? Pour Peter Beyer, conseiller spécialisé dans la propriété intellectuelle pour l’Organisation mondiale de la santé (OMS), «ce n’est pas parce qu’un médicament se vend bien qu’il est forcément très utile. Le «patent cliff» ne comporte que peu de médicaments considérés comme essentiels par l’OMS. Mais ces expirations de brevets sont positives pour les coûts de la santé.» ⁄
Nom: RITUXAN De: Roche Pour: Traitement du cancer Le géant suisse Roche a encore quelques années de répit. Le Rituxan, vendu sous le nom MabThera aux Etats-Unis, perdra son brevet en 2018. Il s’agit d’un des médicaments phares du groupe, utilisé dans le traitement de certains lymphomes. Il a totalisé des ventes de plus de 7 milliards de dollars en 2012. Le Rituxan est un traitement biologique, et non chimique, ce qui le rend plus difficile à copier. Cette caractéristique le protégera en partie de la concurrence des fabricants de génériques. Les experts estiment que le chiffre d’affaires pour un produit chimique dont le brevet expire recule de 80 à 90% en deux ans. Pour les produits biologiques, la baisse est de l’ordre de 30 à 50%.
Les entreprises consacrent en revanche une certaine énergie à prolonger au maximum l’effet des brevets existants, une stratégie appelée «evergreening» («rendre impérissable»). «Elles mettent sur le marché des versions légèrement modifiées d’un médicament, par exemple avec une nouvelle formulation ou un nouveau procédé de fabrication, explique Nathalie Vernaz, pharmacienne des HUG qui a réalisé une
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Nom: NEXIUM De: AstraZeneca Pour: Traitement de l’ulcère gastrique Le Nexium est considéré comme un cas emblématique d’«evergreening». Le médicament est le successeur de l’oméprazole, un traitement similaire contre l’ulcère gastrique. Le laboratoire britannique AstraZeneca a lancé le Nexium sur le marché en 2001, avant la fin du brevet de l’oméprazole. En pratiquant des prix moins élevés et grâce à un marketing intensif auprès des médecins, il est parvenu à rediriger sa clientèle vers le nouveau médicament, se mettant ainsi à l’abri de la concurrence des génériques. De nombreux spécialistes ont dénoncé le fait que le produit ne présente pas de réelle différence avec son prédécesseur. Malgré les critiques, le Nexium, qui tombera dans le domaine public en 2014, est un succès commercial. En 2012, il a rapporté 3,9 milliards de dollars à AstraZeneca. Selon des données publiées par le Parlement fédéral, le Nexium se classait deuxième sur la liste des médicaments les plus vendus de Suisse en 2008.
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DéCRYPTAGE
«Le potentiel des génériques n’est pas assez exploité en Suisse» interview Pour Thierry Buclin, le système de santé pourrait faire des économies en révisant la loi en matière de remboursement des médicaments. iv
Assiste-t-on à un afflux de nouveaux médicaments génériques grâce au «patent cliff»? tb De nouveaux génériques apparaissent régulièrement sur le marché depuis des années. Le phénomène du «patent cliff» occasionne une certaine accélération de leur rythme d’apparition. Mais sur la quantité totale de préparations à disposition, cela ne représente pas un changement massif.
problème d’acceptabilité, pour des questions parfois très subjectives: on préfère l’original à la copie. Dans les faits, les problèmes posés par les génériques sont extrêmement rares, mais volontiers montés en épingle par les grands groupes pharmaceutiques, qui tentent ainsi de défendre leurs intérêts. Il y a aussi un souci de prix: les génériques demeurent relativement chers, plus chers que partout ailleurs en Europe.
Le système de santé suisse bénéficie-t-il du phénomène? tb L’accès à des préparations équivalentes à moindre coût est une bonne nouvelle. Malheureusement, le potentiel des génériques n’est pas assez exploité en Suisse. Il y a un
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eric déroze
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Pourquoi cette différence de prix? tb Une fois un médicament tombé dans le domaine public, les différentes entreprises qui l’exploitent se trouvent en concurrence les unes avec les autres, ce qui
devrait faire chuter le prix. Mais ce mécanisme ne fonctionne pas bien en Suisse en raison des conditions de remboursement fixées par la loi: pour être pris en charge par l’assurance de base, les génériques doivent être seulement 10 à 60% moins chers que la préparation originale selon leur volume de marché. Cette règle permet aux fabricants de s’entendre tacitement sur les prix. En Grande-Bretagne, par exemple, certains génériques se vendent 90% moins cher que l’original. Il existe donc en Suisse des possibilités d’économies qui ne se trouvent pas exploitées. Thierry Buclin est médecin-chef de la Division pharmacologie clinique du CHUV.
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DéCRYPTAGE chronique
pierre-yves geoffard Directeur de l’Ecole d’économie de Paris et directeur de recherche au CNRS
Une politique de santé publique est nécessaire pour régir le tourisme médical: les populations locales doivent pouvoir profiter de ses retombées.
Dans de très nombreux secteurs, les nouvelles technologies de l’information mettent en relation des consommateurs et des producteurs parfois très éloignés les uns des autres. Cette évolution nourrit le développement du commerce international, et les soins de santé n’échappent pas au phénomène dont l’une des manifestations est le «tourisme médical». Il est en effet de plus en plus fréquent que des patients vivant dans un pays se rendent dans un autre pour y recevoir des soins, notamment lorsque ceux-ci sont mal couverts par leur assurance maladie: un pontage coronarien peut coûter 100’000 $ aux Etats-Unis, et 12’000 $ en Thaïlande...
Les services concernés ne se limitent pas aux soins hospitaliers, mais concernent également, y compris en Europe, des soins de santé moins bien remboursés comme les soins et les prothèses dentaires. Enfin, une part importante du phénomène porte sur des mouvements de patients venant d’un pays du sud, et qui se rendent vers un autre pays du sud. En santé comme dans d’autres domaines, la mondialisation irrigue l’ensemble de la planète. Pour les patients des pays d’origine, ces choix sont bénéfiques: ils offrent de nouvelles possibilités de traitement, souvent beaucoup moins onéreuses.
Pour le pays de destination, le bilan est moins clair: certes, cette activité apporte au pays des devises, contribue à financer des structures hospitalières modernes, et permet d’offrir aux meilleurs professionnels de santé des conditions Qui plus est, dans les pays les plus engagés dans la fourniture de soins à des patients de travail similaires à celles qu’ils pourraient étrangers, notamment en Inde, à Singapour, ou trouver dans des pays plus riches. Mais il n’est pas en Thaïlande, les hôpitaux sont de plus en plus toujours clair que les patients bénéficient de cette souvent accrédités par des organismes offre de soins de meilleure qualité. Au contraire, internationaux, selon des normes de qualité la clientèle étrangère est parfois traitée en priorité, et de sécurité des soins exigeantes. alors même que la densité médicale est déjà faible et les services de soins congestionnés.
PROFIL
Spécialiste des politiques de santé, Pierre-Yves Geoffard dirige l’Ecole d’économie de Paris depuis février 2013. Chroniqueur à Libration, il a co-écrit de multiples ouvrages sur les coûts de la santé.
Afin d’éviter un tel effet d’éviction, certains pays imposent aux hôpitaux ouverts aux «touristes médicaux» de consacrer une part de leur activité aux populations locales, à des tarifs accessibles. Une telle politique de santé publique est nécessaire pour garantir un accès aux soins équitable tout en faisant bénéficier le pays des gains du commerce international. ⁄
en savoir plus
DR
www.parisschoolofeconomics.eu
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Des prothèses contrôlées par la pensée Des patients tétraplégiques ou amputés parviennent déjà à actionner des membres artificiels. Ces neuroprothèses pourront un jour permettre de retrouver des sensations tactiles.
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Texte: Thomas Pfefferlé
es prothèses directement connectées au cerveau: ces membres artificiels, issus de la collaboration entre la recherche technologique et chirurgicale, vont révolutionner la vie des personnes amputées ou paralysées. «Ces dispositifs fonctionnent comme des prolongements du corps, explique Wassim Raffoul, chef du Service de chirurgie plastique et de la main du CHUV. CORPORE SANO
Branchées au système nerveux, elles reproduisent les gestes auxquels le patient pense. Il existait déjà des prothèses que l’on actionne par la contraction de certains muscles. Mais, loin d’être instinctive, leur utilisation nécessitait une trop grande adaptation de la part des patients.» Aux Etats-Unis, la recherche sur les neuroprothèses se focalise sur les personnes tétraplégiques. Ces patients n’ont plus d’activité électrique dans les nerfs qui traversent leurs membres. Afin qu’ils puissent faire bouger un membre artificiel, il faut donc le connecter directement à la source des impulsions nerveuses: le cerveau. L’Université Brown, située dans l’Etat de Rhode Island, a mis au point un
implant neuronal qui permet à une personne entièrement paralysée de commander par la pensée un bras robotisé: l’implant est inséré dans le cortex moteur, la zone cérébrale qui contrôle les mouvements volontaires, où il capte les ordres émis lorsque l’on pense à bouger. Ces ordres sont relayés à un ordinateur qui décode les informations et les transmet au membre artificiel. Un essai clinique a été réalisé en 2012 par le Département américain des anciens combattants, l’Institut américain de recherche en santé, l’Université Brown, le Massachusetts General Hospital, la Harvard Medical School et l’Agence spatiale allemande, qui a construit le bras robotisé. Une patiente devenue tétraplégique suite à un accident vasculaire cérébral est parvenue à saisir un thermos de café grâce au prototype. Sensations tactiles
«L’avancée majeure consiste à contrôler les mouvements d’une neuroprothèse dans un espace en trois dimensions», détaille John Donoghue, directeur de l’Institut des sciences du cerveau
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à l’Université Brown, dans la revue «Nature». Les scientifiques travaillent désormais à rendre l’ensemble du dispositif moins encombrant et développent un système wi-fi afin de supprimer les fils qui connectent l’implant à l’ordinateur. Le projet européen Epione, qui rassemble plusieurs universités et laboratoires du continent, CORPORE SANO
vise à long terme à développer des neuroprothèses pour les personnes amputées. Durant l’année 2014, le CHUV, en collaboration avec l’EPFL, va procéder à des essais cliniques. «L’idée de ce projet est de développer des membres artificiels à travers lesquels on peut percevoir à nouveau des sensations tactiles», explique Wassim Raffoul. INNOVATION
Lifehand 2, Patrizia Tocci
En mars 2013, le Danois Dennis Aabo Sorensen, amputé de sa main gauche depuis dix ans, a saisi plusieurs objets et ressenti des sensations, grâce à une neuroprothèse développée par l’EPFL ainsi que plusieurs universités et hôpitaux italiens et allemands.
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Le mécanisme d’une neuroprothèse
Silvestro Micera, qui dirige un laboratoire d’ingénierie neurale à l’EPFL et participe au projet Epione, est parvenu à des résultats impressionnants lors d’autres essais cliniques menés à Rome. Il a permis à des patients amputés au niveau de l’avant-bras d’actionner par la pensée une main robotisée et de percevoir des sensations tactiles. Pour réaliser cette prouesse, le chercheur a connecté des électrodes implantées dans les fibres nerveuses des patients à une main artificielle. «En 2009, nous sommes déjà parvenus à d’excellents résultats, se réjouit le chercheur. Le patient percevait à nouveau des sensations tactiles, ce qui a permis de réduire significativement les douleurs fantômes, Sur une échelle de 1 à 10, elles étaient passées de 9 à 4 grâce à ce prototype. Et sur le plan chirurgical, cette opération est beaucoup plus simple qu’une greffe de main humaine. En 2013, nous avons renouvelé cette opération sur un autre patient (Dennis Aabo Sorensen, en photo p. 51). Là, il a pu contrôler sa prothèse en temps réel, et les sensations étaient encore plus précises.» D’ici cinq à dix ans, des neuroprothèses complètes et commercialisables pourraient voir le jour. Toujours dans le domaine des sensations retrouvées, Stéphanie Lacour, responsable de la chaire neuroprosthétique de l’EPFL, travaille sur des micro-canaux artificiels qui permettront de reconnecter des nerfs rompus lors d’une blessure. Ce type de CORPORE SANO
lésion peut provoquer une perte de sensibilité et de motricité dans un membre, car il n’est plus connecté au cerveau. «Jusqu’à présent, les médecins utilisaient des tubes en collagène dans lesquels les extrémités des nerfs se ressoudent en partie, explique Stéphanie Lacour. Ce procédé permet de retrouver une sensibilité et une motricité partielles car les axones, des sortes de fils minuscules qui composent les nerfs, ne se reconnectent pas assez rapidement. Les tubes que nous avons conçus sont plus petits, ils aideront les axones à se lier plus facilement.» Les chercheurs tentent également de comprendre quel type d’information circule dans quelle partie d’un nerf. «Actuellement, on ne sait pas encore où, à l’intérieur d’un nerf, circulent exactement les informations relatives aux mouvements volontaires et aux différentes perceptions sensorielles, explique le chirurgien Wassim Raffoul. Il faut imaginer l’échelle sur laquelle nous travaillons: à titre d’exemple, le nerf sciatique du rat mesure 1,5 mm de diamètre. Mais heureusement, nous n’avons pas besoin de reproduire les détails de notre anatomie à la perfection pour parvenir à connecter des neuroprothèses au système nerveux. En captant de manière globale l’activité électrique qui y circule, on parvient déjà à de très bons résultats.» Si toutes ces recherches aboutissent, les personnes amputées INNOVATION
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Après l’amputation, les terminaisons nerveuses restent actives.
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Grâce à cela, le muscle en question se contracte lorsque le patient pense à bouger son bras.
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Une opération permet de rediriger les nerfs vers un autre muscle.
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La contraction est détectée par des électrodes, qui transmettent l’information à un ordinateur, situé dans la prothèse.
L’ordinateur décrypte les signaux et active le mouvement du membre.
Ce schéma illustre l’une des méthodes utilisées aujourd’hui pour activer une neuroprothèse.
pourront espérer retrouver un membre extrêmement proche de leurs bras ou jambe originels. «Notre objectif est de redonner à ces patients la meilleure qualité de vie possible, note Wassim Raffoul. Les neuroprothèses semblent une excellente piste pour l’atteindre.» /
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Ramon Espelt Gorgozo / 123rtf
Méditer pour se soigner
Texte Geneviève Ruiz
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Les techniques méditatives rencontrent un vif succès auprès des patients et des médecins. Elles se révèlent efficaces pour prévenir et gérer la maladie, ainsi que pour améliorer le bien-être.
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Vrai ou faux? Les idées reçues sur la méditation
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est une histoire qui a commencé il y a 2’500 ans en Asie. Dans les monastères bouddhistes et les grottes tibétaines, les moines passaient des heures, des années à méditer. Ils ont ainsi développé une multitude de techniques et un immense savoir-faire. En 1979, Jon Kabat-Zinn, professeur de médecine à l’Université du Massachusetts, est le premier à s’inspirer de cette tradition millénaire pour créer une méthode appelée Mindfulness Based Stress Reduction (MBSR) ou «réduction du stress basée sur la pleine conscience». Son objectif: initier les patients aux techniques méditatives lors d’un programme de huit semaines.
La méditation sert à se relaxer – faux L’objectif de la méditation n’est pas la relaxation, même si elle peut en être un bénéfice collatéral. Il s’agit simplement d’observer ses sensations corporelles, ses pensées et ses émotions, sans jugement.
La méditation est une pratique spirituelle – vrai L’origine bouddhiste de la méditation réside dans différentes traditions religieuses, notamment bouddhiques. Mais les méthodes actuellement enseignées dans les hôpitaux ou les écoles Des effets bénéfiques prouvés sont laïques et Les résultats obtenus avec la méthode de Jon Kabat-Zinn ont été tels qu’elle est désor- n’impliquent aucune croyance mais utilisée dans plus de 900 hôpitaux particulière.
dans le monde, dont 200 aux Etats-Unis. «L’immense mérite de Jon Kabat-Zinn a été de laïciser les pratiques bouddhiques, d’en synthétiser les éléments les plus puissants et de les structurer en une méthode accessible à tous, explique Jean-Gérard Bloch, rhumatologue et instructeur MBSR. Cette méthode a ensuite permis de donner un cadre aux nombreuses recherches scientifiques qui ont été menées sur la méditation.» Avec les progrès des neurosciences et de l’imagerie cérébrale, ces recherches ont connu un essor considérable depuis le début des années 2000. De nombreux CORPORE SANO
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scientifiques ont contribué à la mise en lumière de cette activité millénaire, notamment Richard Davidson de l’Université du Wisconsin, qui a fait participer à ses expériences des moines bouddhistes, tels que le biologiste français Matthieu Ricard (lire interview p. 30) ou le dalaï-Lama. Il a ainsi pu démontrer par électro-encéphalographie qu’une pratique intensive de la méditation transformait la structure et le fonctionnement du cerveau. Par la suite, les chercheurs ont continué à observer les multiples effets positifs de la méditation, à la fois physiques et psychiques. Des centaines de publications paraissent désormais chaque année sur le sujet. En avril 2012, près de 700 chercheurs du monde entier se sont retrouvés à Denver aux EtatsUnis pour le premier symposium international sur les sciences contemplatives. Parmi les bienfaits de la méditation mesurés par la science se trouve par exemple l’épaississement du tissu du cortex préfrontal gauche, impliqué dans les processus cognitifs et émotionnels. Il y a aussi l’augmentation de la capacité d’attention et la réduction du stress, avec une baisse du cortisol (hormone du stress). D’autres recherches démontrent une amélioration des troubles tels que l’insomnie, les problèmes cardiaques ou l’hypertension. Les patients pourraient également mieux gérer leur douleur. Prévenir la rechute dépressive La méditation a pour l’instant été moins intégrée dans les hôpitaux européens qu’aux Etats-Unis. Mais depuis quelques années, elle commence à y être proposée comme thérapie complémentaire pour prévenir la rechute en cas de dépression ou d’addiction. La psychologue-psychothérapeute lausannoise Valérie Rossier propose, par exemple, des séances collectives ou individuelles de méditation de pleine
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La psychologue Valérie Rossier propose des séances de méditation au CHUV: «Nous avons énormément de demandes de la part des patients.»
conscience aux patients suivis en addictologie dans le Service de psychiatrie communautaire du CHUV. «Plusieurs études ont observé que la pratique méditative diminuait l’impulsivité des personnes et donc leur envie irrépressible de consommer une substance, commente Valérie Rossier. La recherche en est au stade de l’hypothèse et il n’existe pas encore d’explication claire. Mais j’observe que les patients qui pratiquent régulièrement la méditation ont moins de risques de rechute.» Même constat du côté des HUG avec la psychologue Françoise Jermann, qui propose depuis plusieurs années une autre méthode de Jon Kabat-Zinn appelée thérapie cognitive basée sur la pleine conscience (MBCT – MindfulnessBased Cognitive Therapy) à des patients en rémission de dépression: «Nous avons de bons retours de la part de nos patients. Pour beaucoup, il s’agit d’un outil complémentaire à leurs traitements médicamenteux. Parfois, c’est même le déclic pour un changement de vie. Seule une minorité ne croche pas du tout.» Les deux praticiennes constatent que l’engouement des patients pour la méditation est très fort. «J’ai énormément de demandes de patients confrontés à de nombreuses pathologies, notamment en oncologie, commente Valérie Rossier. Je ne peux malheureusement pas répondre à toutes.» CORPORE SANO
La méditation est accessible à tous – vrai N’importe qui a le potentiel de devenir méditant. Cependant, la pratique de la méditation requiert beaucoup d’entraînement et de régularité. Les études qui évoquent les bienfaits de la méditation soulignent souvent que ses effets sont proportionnels au nombre d’heures de méditation pratiquée. L’objectif de la méditation est de ne plus penser – faux Il ne s’agit pas de stopper le flux des pensées, mais de le laisser défiler. La méditation consiste à entraîner sa capacité d’attention et à l’ancrer dans le moment présent. Pour cela, elle utilise plusieurs techniques comme la focalisation sur sa respiration, le passage en revue du corps ou la fixation sur un objet.
TENDANCE
Ce succès s’observe également au sein du corps médical. En février 2012, le rhumatologue Jean-Gérard Bloch a lancé le premier diplôme européen en méditation destiné au personnel soignant. Il a dû refuser de nombreux candidats. «Je constate un réel intérêt chez mes confrères et je pense que les techniques méditatives vont faire évoluer la médecine occidentale. On peut sentir les prémices de ces changements dans l’émergence de nouvelles disciplines comme la neuropsychoimmunologie, qui intègre l’étude de l’esprit, du cerveau, du système nerveux et des hormones pour comprendre l’impact du cerveau sur les défenses immunitaires et inversement. Après avoir séparé durant plusieurs siècles le corps de l’esprit – ce qui a permis d’immenses progrès – la médecine les intègre à nouveau, grâce notamment aux effets prouvés de la méditation.» Outre la médecine, la méditation pourrait également transformer d’autres domaines de la société comme le management ou l’éducation. De plus en plus d’écoles l’inscrivent à leur programme aux Etats-Unis, en GrandeBretagne, en France ou aux Pays-Bas. Il en résulterait de meilleures performances scolaires et moins d’agressivité entre les élèves. Certaines prisons commencent également à proposer des séances de MBSR à leurs détenus. «Cet engouement est porteur d’espoir, se réjouit Jean-Gérard Bloch. Mais il comporte également des risques: la méditation est une pratique complexe qui nécessite beaucoup d’entraînement. Elle ne peut pas être enseignée par n’importe qui. Dans le contexte actuel, certains s’autoproclament professeurs de méditation sans posséder ni l’expérience, ni les connaissances nécessaires.» ⁄
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Texte Jean-Christophe Piot
Les microbes, nos 100 billions d’amis Bactéries, levures, champignons et autres virus pèsent près de 2 kg chez chaque être humain. Apprivoiser ces micro-organismes permettra de s’en faire de précieux alliés.
«C
haque individu baigne en permanence dans une vaste soupe de micro-organismes.» C’est l’image que Thierry Calandra, chef du Service des maladies infectieuses au CHUV, utilise pour expliquer que l’être humain se compose en bonne partie de microbes. Pourtant, la science n’en sait que très peu sur ces visiteurs invisibles, estimés à 100 billions chez chacun (100’000 milliards), soit dix fois plus nombreux que les cellules humaines, pour un poids total de quelque 2 kg. Pour y remédier, un vaste projet d’étude baptisé Human Microbiome Project (HMP) a été entamé en 2007. Lancé par les Instituts américains de la santé (NIH), ce programme de longue haleine à 195 millions de dollars vise à recenser les microbes, et à décrypter leur génome pour comprendre la façon dont ils affectent l’être humain. Un travail de fourmi qui ouvre CORPORE SANO
des perspectives prometteuses en matière de nouveaux traitements. Cette quantité gigantesque de microbes n’a pas de quoi affoler: loin d’agresser l’organisme, les microbes contribuent à sa protection. «L’essentiel de ces micro-organismes aide le corps à conserver son équilibre de fonctionnement, explique Thierry Calandra. Mieux, il éduque en permanence le système immunitaire pour permettre à notre corps de leur faire face.» Au point que la cohabitation entre un hôte humain et les micro-organismes qui le colonisent prend des allures de partenariat stratégique. Certains microbes constituent une première ligne de défense, s’attaquant aux pathogènes ou les empêchant de se développer. Des fortifications fragiles: une modification de l’alimentation, un voyage, un traitement antibiotique peuvent perturber la finesse de cet équilibre et renforcer le risque d’infection ou d’inflammation. Peut-on faire volontairement évoluer cet équilibre, dans un but prospection
préventif ou curatif? «C’est déjà le cas, note Thierry Calandra. On sait de longue date qu’une transplantation de matières fécales issues d’un individu sain vers un patient atteint de diarrhées contribue à son rétablissement.» En affinant leur connaissance des influences croisées entre le monde microbien et notre organisme, microbiologistes et médecins peuvent espérer réduire à terme certains risques, voire traiter différentes pathologies en procédant à des «réglages» du microbiote. Les études engagées laissent entrevoir des possibilités considérables dans des domaines variés: psoriasis, maladie de Crohn, obésité, colites ulcéreuses, allergies, acné… Le potentiel est immense, mais «la complexité de cette équation à inconnues multiples ne permet pas de savoir quand nous pourrons passer à des applications cliniques concrètes», souligne Thierry Calandra. Si les chercheurs travaillent sans relâche, la route est
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Les bactéries «Lactobacillus casei» (colorées en bleu sur cette image de microscopie électronique à balayage) produisent des bactériocines, des protéines aux propriétés antibiotiques. Elles permettent ainsi de prévenir certaines infections chez l’être humain.
encore longue: le HMP comptabilise plus de 2’600 projets au référencement du génome microbien. Seuls 15 d’entre eux sont à ce jour consacrés à la recherche de corrélations entre le microbiome et la santé humaine. Une lenteur qui s’explique par la complexité des protocoles et par un effort d’indexation hors du commun: alors qu’un humain compte 20’000 gènes environ, les 80 laboratoires impliqués dans le HMP ont déjà recensé 8 millions de gènes microbiens en 6 ans seulement. Au-delà des perspectives thérapeutiques, les travaux du HMP CORPORE SANO
contribuent à affiner lentement la connaissance du microbiote, battant en brèche certaines idées reçues. «La plupart des microbes sont soit utiles, soit inoffensifs», explique Amelio Telenti, professeur à l’Institut de microbiologie du CHUV. Ceux qui pullulent dans nos intestins assurent ainsi des fonctions digestives essentielles: des bactéries y décomposent certains glucides et favorisent l’absorption par l’organisme de la très indispensable vitamine K. Cette cohabitation complexe de centaines d’espèces différentes fait de chaque être humain prospection
un macrocosme peuplé d’un microcosme particulier: «A terme, nous pourrions probablement identifier un individu en analysant l’ensemble de sa flore», précise Amelio Telenti. En théorie du moins: «Le microbiote d’un être humain change en permanence en fonction de l’âge, de l’environnement, de l’alimentation. Ce qui ne facilite pas la recherche.» Avant que des policiers ne passent de la relève des empreintes digitales à celle d’un échantillon de flore intestinale, il risque donc de s’écouler encore un peu de temps. ⁄
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La mort immortalisée Imagerie forensique Après être resté figé pendant près de deux siècles, le monde de l’autopsie et de la médecine légale connaît un bouleversement sans précédent en s’ouvrant à l’imagerie. Texte: bertrand tappy
«Je lui ai tiré dans la tête pour abréger ses souffrances.» La phrase est courte, mais pour les médecins du Centre universitaire romand de médecine légale (CURML), c’est surtout une énigme de plus à résoudre: celui qui a tiré dit-il la vérité? Ou a-t-il plutôt agi pour se débarrasser de l’autre? Ces situations, Silke Grabherr, responsable de l’Unité d’imagerie forensique, y a déjà été confrontée des centaines de fois. «Notre mission ne consiste pas seulement à trouver les causes de la mort. Il faut systématiquement confronter les témoignages à la réalité que raconte le corps. Et pour y arriver, nous ne pouvons pas nous permettre de passer à côté de la moindre des lésions.» C’est ainsi que la spécialiste et son équipe ont développé une technique unique: le passage systématique de tous les corps qui arrivent à l’institut médico-légal au scanner, avec – si nécessaire – une angiographie effectuée à l’aide d’une technique révolutionnaire. Explications en sept cas.
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MORT PAR BALLE
Les trois images ci-contre représentent le crâne et le cerveau d’une même personne, décédée suite à un coup de feu. La balle est visible sous la forme d’une tâche brillante sur la coupe frontale de cerveau (à gauche). Ce cadavre fait partie des 500 à 600 cas traités chaque année par la médecine légale lausannoise. CORPORE SANO
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EXAMEN DES VAISSEAUX SANGUINS
Lorsqu’une mort est déterminée «suspecte» ou «violente», le corps est amené au Centre de médecine légale pour un scanner et un examen externe. C’est ensuite au procureur chargé de l’affaire de déterminer si les spécialistes doivent poursuivre avec une autopsie, éventuellement associée à une angiographie (image ci-dessus). Cette technique d’imagerie médicale permet la visualisation des vaisseaux sanguins.
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Bulles de gaz
Pour le radiologue néophyte, les images d’un corps sans vie sont un spectacle étonnant. «Six à huit heures après la mort, des bulles de gaz peuvent déjà se former dans le corps (zones noires dans l’image de droite). Si le spécialiste ne sait pas que la personne est morte, il conclura qu’il s’agit d’une embolie ou une autre pathologie, explique Silke Grabherr. Ce qui serait compréhensible, mais erroné. Chez un cadavre, ces bulles peuvent être dues au sang qui sédimente en fonction de la position du corps ou à des distorsions provoqué par la rigidité cadavérique.» en images
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Fracture du crâne
La personne ci-dessus, dont le crâne présente une importante fracture, a été victime d’une chute sur son lieu de travail. Le médecin légiste peut ici définir avec précision le point d’impact.
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trajectoire de BALLE
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Ci-dessous, une deuxième reconstitution 3D du crâne d’une victime d’un coup de feu porté à la tête. Grâce à l’imagerie, la trajectoire de la balle a pu être reproduite (image ci-contre) sans faire bouger les éclats d’os ni les fragments de projectile à l’intérieur de la tête. Voir à l’intérieur du corps sans devoir l’ouvrir est l’un des grands avantages de l’imagerie forensique, tout comme le gain de temps: s’il faut maximum 2 heures pour une angiographie, une autopsie traditionnelle d’un corps victime de plusieurs coups de couteau peut durer jusqu’à dix heures environ.
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Cœur contrasté
Quand on meurt, le cœur ne bat plus. Derrière cette lapalissade se cache un problème pour l’injection du produit de contraste nécessaire à la réalisation d’une angiographie: plus de rythme cardiaque, plus de circulation naturelle et donc pas de transport du produit de contraste au sein du système vasculaire. «Pour contourner le problème, nous devions trouver un moyen pour faire passer le produit, explique Silke Grabherr. Plusieurs années d’études ont été nécessaires pour trouver le mélange idéal afin de fournir des images qui nous permettent de reproduire les vaisseaux sanguins.» CORPORE SANO
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Reconstitution du THORAx
Cette reconstitution des vaisseaux du thorax et de l’abdomen n’aurait jamais pu être observée lors d’une autopsie classique. Aujourd’hui, des spécialistes de nombreux pays viennent se former aux techniques d’imagerie forensiques développées à Lausanne. «Des raisons culturelles poussent également certains pays à se tourner vers cette méthode non invasive, explique Silke Grabherr. Notamment les pays arabes, où l’ouverture du corps d’une personne décédée pose un problème lié à la religion.»
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IMAGES: CURML / unité d’imagerie forensique
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Les superpouvoirs des cellules souches La médecine régénérative pourrait permettre un jour aux tissus humains de s’auto-réparer. Tour d’horizon de pistes prometteuses. Texte: Julie Zaugg
cepteurs.» Fin mai, deux mois à peine après l’intervention, l’acuité visuelle de Billy Whitfield était passée de 20/800 à 20/40 (20/20 représente une vision parfaite). Il pouvait à nouveau monter à cheval et même lire des livres.
vec son chapeau de cow-boy, sa moustache tombante et son gilet en cuir, Billy Whitfield ressemble à un rancher modèle. Pendant plusieurs années, cet éleveur de bétail du Kansas ne pouvait plus lire, monter à cheval ou conduire: atteint de dégénérescence maculaire sénile, il avait commencé à perdre sa vision. Tout a changé le 26 mars 2013. Enrôlé dans un essai clinique de phase 1 mené par l’Université de Californie en collaboration avec la firme Advanced Cell Technology (ACT), il a reçu ce jour-là une injection de cellules de la couche externe pigmentée de la rétine, dérivées de cellules souches.
de cette fine couche qui agit comme une barrière naturelle entre les vaisseaux sanguins et les photorécepteurs, siège de la vision, explique Matthew Vincent, l’un des directeurs de ACT. Notre méthode permet de les remplacer et donc de rétablir la fonction des photoré-
Une cellule souche, c’est quoi? Il s’agit d’une cellule «indifférenciée», c’est-à-dire qui ne s’est pas encore spécialisée en cellule de peau, d’os ou de tout autre organe. Si elle est d’origine embryonnaire, elle pourra se transformer en n’importe quel tissu ou organe (on dit qu’elle est pluripotente). Si, au contraire, elle est d’origine adulte, elle ne deviendra que ce pour quoi elle est programmée. Depuis 2007, une technique permet toutefois de rendre pluripotentes les cellules adultes.
«La dégénérescence maculaire provoque une détérioration CORPORE SANO
«Nous avons traité une trentaine de patients de cette façon, indique Matthew Vincent. Chez plus de la moitié d’entre eux, dont Billy Whitfield, nous avons constaté une amélioration de la vision, modeste pour certains, spectaculaire pour d’autres.» A terme, ACT espère pouvoir remplacer également les cellules détruites par d’autres maladies de l’œil, comme le glaucome ou la rétinite pigmentaire.
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Déposée au sommet d’une aiguille, cette cellule souche d’origine embryonnaire est pluripotente: elle peut engendrer la plupart des types de cellules de l’organisme selon le type de signal biochimique qu’elle reçoit.
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Les thérapies à base de cellules souches sont en train de révolutionner la médecine régénérative. «Aujourd’hui, nous nous contentons de gérer les dégâts cellulaires provoqués par une maladie, relève le Dr Deepak Srivastava, l’un des directeurs de la Société internationale pour la recherche sur les cellules souches (ISSCR) à Skokie, dans l’Illinois (USA). A l’avenir, nous pourrons carrément remplacer le matériel abîmé par de nouvelles cellules et régénérer ainsi des tissus et des organes entiers.» De la paralysie à l’infarctus
Martin Marsala, professeur de biomédecine à l’Université de San Diego, s’est intéressé aux propriétés réparatrices des cellules souches sur la moelle épinière. Il a testé la méthode sur des rats et s’apprête à commencer son premier essai clinique sur huit humains paralysés. «Lors des tests sur les animaux, les cellules injectées ont créé des connexions avec les cellules hôtes, détaille-til. Les cellules souches ont aussi rempli complètement la cavité créée par la blessure.» Martin Marsala refuse d’évoquer la possibilité de faire remarcher un jour ses patients. Il a néanmoins constaté chez les rats «une réduction de spasticité (mouvement involontaire des muscles, ndlr) et une légère amélioration des fonctions motrices dans les pattes». Le professeur Marsala n’est pas seul dans sa quête. Un peu CORPORE SANO
partout dans le monde, des chercheurs ont commencé à exploiter les capacités régénératrices des cellules souches pour guérir des maladies aussi diverses que le diabète, la maladie d’Alzheimer, la surdité, les attaques cérébrales, la sclérose en plaques ou l’arthrose. En Suisse, Thierry Pedrazzini, directeur de l’Unité de cardiologie expérimentale du CHUV, cherche à activer, in situ, les cellules souches qui se trouvent dans le cœur pour qu’elles réparent les tissus nécrosés suite à un infarctus. «Nous nous inspirons des mécanismes utilisés par la peau ou le système intestinal pour se régénérer», détaillet-il. Sa collègue aux Hôpitaux universitaires de Genève, Marisa Jaconi, développe pour sa part un patch cardiaque à base de cellules souches cultivées en 3D dans une biomatrice. «Cela facilite leur implantation», précise la chercheuse. Pour l’heure, les deux méthodes n’ont été testées que sur les animaux. L’équipe de Marisa Jaconi s’apprête également à produire des cellules souches périvasculaires (à la périphérie des vaisseaux). Celles-ci ont déjà permis à des chercheurs milanais de traiter cinq enfants atteints de dystrophie musculaire. Les résultats de cet essai clinique sont attendus prochainement. Une banque de cellules souches provenant de fœtus avortés pour créer des pansements de peau destinés aux grands brûlés a également été mise sur pied au INNOVATION
CHUV. L’espoir placé dans les recherches sur les cellules souches est tel qu’un Institut suisse de la thérapie cellulaire a été créé en 2010, dans le but de fédérer et de soutenir ces différents efforts. Débat éthique
Au-delà de ces promesses, un point clé reste problématique: la provenance des cellules souches (voir illustration ci-contre). Les cellules embryonnaires ont l’avantage d’être pluripotentes, contrairement aux cellules adultes, mais sont interdites dans plusieurs pays pour des raisons éthiques. «Dans certains pays, comme l’Allemagne, l’Autriche, l’Irlande, l’Italie, le Portugal, la Pologne ou le Japon, leur usage est carrément interdit ou soumis à des règles très strictes», note Martin Marsala. En Suisse, la Loi relative à la recherche sur les cellules souches autorise leur prélèvement à des fins de recherche. Mais, en pratique, il n’y en a presque pas, puisque la Loi sur la procréation médicalement assistée exige qu’on évite de produire des embryons surnuméraires. Une innovation, survenue en 2007 simultanément à l’Université du Wisconsin et de Kyoto, semblait pour voir rendre ces questions obsolètes. «On est parvenu à produire des cellules souches pluripotentes à partir de cellules adultes, qu’on a reprogrammées pour qu’elles retournent à cet état initial», explique Bob Palay, le CEO de Cellular Dynamics, une entre-
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Embryon Les cellules souches embryonnaires, qui peuvent se différencier en n’importe quelle cellule du corps, sont prélevées sur des embryons surnuméraires issus de la fécondation in vitro. Ces derniers sont détruits pendant la procédure, ce qui pose un problème éthique. Mais une découverte récente pourrait y remédier: des chercheurs suédois ont réussi à obtenir des cellules souches sans compromettre la viabilité de l’embryon.
Cordon ombilical Le sang du cordon ombilical est congelé à la naissance. Plus tard, des cellules souches sanguines peuvent en être extraites pour traiter des maladies du sang comme des leucémies, avec des risques de rejet limités. En revanche, on ne peut pas s’en servir pour guérir d’autres types de maladies pour le moment. D’un point de vue éthique et légal, ces cellules bénéficient d’un statut plus ouvert que les cellules souches embryonnaires.
prise qui s’est spécialisée dans la fabrication de ces cellules souches pluripotentes induites (iPS). Concrètement, la procédure consiste à injecter au sein de ces cellules adultes un cocktail de gènes normalement présent dans les cellules souches. Cela provoque la répression des gènes associés à la spécialisation cellulaire et les fait retourner à un état pluripotent, caractéristique du stade embryonnaire. Elles présentent les mêmes avantages que celles issues d’embryons, mais échappent aux controverses éthiques entourant ces dernières et, une fois différenciées, ne risquent pas non plus de provoquer une CORPORE SANO
Cellules souches pluripotentes induites Une cellule de peau, de sang ou d’un autre organe prélevée sur le patient est reprogrammée génétiquement en cellule souche capable de se différencier en n’importe quelle cellule du corps. Cette technique permet de contourner les questions éthiques liées aux cellules souches embryonnaires, mais en raison de leur découverte récente, il manque encore de recul quant à la sécurité de leur utilisation.
réaction de rejet chez le patient, puisqu’elles sont produites à partir de son propre matériel biologique (en général de la peau ou un échantillon de sang). Elles seront utilisées pour la première fois en 2014 à Kobe dans le cadre d’un essai clinique portant sur six patients affectés de dégénérescence maculaire. Malgré leurs promesses, les iPS ne sont cependant pas exemptes de risques. «Elles sont censées se comporter exactement comme les cellules souches embryonnaires, mais ce n’est pas toujours le cas, relève Matthew Vincent. Passablement instables, elles ont tendance à vouloir retourner à leur état INNOVATION
Cellules souches adultes Partout dans le corps, des cellules souches participent au renouvellement naturel des tissus. On peut en prélever chez un patient, notamment à partir de sa moelle osseuse ou de sa graisse. Ces cellules souches peuvent seulement régénérer certains tissus, car on ne peut pas les diriger dans tous les types cellulaires. Comme elles sont prises chez le patient directement, elles ne présentent pas de risque de rejet.
précédent (une cellule de peau, par exemple, ndlr).» Ce n’est pas tout. «La recherche a montré que les iPS peuvent provoquer des tumeurs, surtout lorsqu’elles ne sont pas complètement différenciées», indique Lee Ann Laurent-Applegate, spécialiste de la régénération de la peau et directrice de l’Unité de thérapie cellulaire du CHUV. Thierry Pedrazzini pense néanmoins que «si on apprend à maîtriser leur processus de différenciation, les iPS finiront par s’imposer». Faciles à prélever, disponibles en quantités illimitées et exemptes de considérations éthiques, elles ont toutes les cartes en main pour devenir incontournables. ⁄
infographie: La tigre
La provenance des cellules souches
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Iprioniazide C 9H 13N 3O
C 9H 13N 3O une molécule, une histoire Texte: bertrand tappy
L’histoire des antidépresseurs commence par hasard: «A la fin des années 1950, on a découvert que l’iprioniazide, un médicament utilisé comme antituberculeux, avait également un effet bénéfique sur les patients souffrant de dépression, explique Thierry Buclin, chef de la Division de pharmacologie du CHUV. Cette découverte a laissé croire qu’il allait être possible de soigner la dépression comme n’importe quelle infection, ce qui était une erreur.»
Une vingtaine d’années plus tard, les résultats sont mitigés. «Il y avait passablement d’effets secondaires, continue Thierry Buclin. Dans les années 1990, on s’est donc tourné vers une nouvelle piste, les sérotoninergiques, bien mieux tolérés et pouvant par conséquent être mis largement dans les mains des médecins généralistes.»
L’apparition des antidépresseurs a été marquée par de multiples polémiques, qui illustrent le manque de transparence dans la recherche pharmaceutique. Le marché est juteux et le nombre de produits augmente à un rythme soutenu. Mais, en 1995, l’enthousiasme diminue progressivement. Une étude du «British Médical Journal» confirme que l’usage de ces antidépresseurs «nouvelle génération» facilite le passage à l’acte suicidaire. Ce n’est qu’en 2005 que la Food and Drug Administration (FDA) américaine – critiquée pour son manque de rigueur – décide de serrer la vis. Simultanément, plusieurs procédures sont ouvertes aux Etats-Unis dans les tribunaux
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par des associations de patients, provoquant la divulgation des dossiers déposés par les pharmas auprès des organismes de santé. On découvre alors que la très grande majorité des recherches qui démontraient des résultats négatifs avaient été passées sous silence, alors que les recherches donnant des résultats positifs étaient régulièrement publiées. Concrètement, une entreprise pouvait choisir de faire «oublier» une recherche si ses conclusions étaient peu flatteuses, sans que personne ne vienne lui
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demander de rendre des comptes (lire page 26). Une situation compréhensible lorsque l’on sait que 80% des essais cliniques sont payés... par les entreprises pharmaceutiques. «De nouveaux règlements très stricts ont fait leur apparition depuis lors. Ils donnent des difficultés en particulier aux chercheurs académiques indépendants. Il leur faut en effet encore plus de ressources pour mener une recherche clinique désormais.» Seul l’avenir nous dira si une réglementation de plus en plus rigoureuse constitue le meilleur rempart pour éviter que la recherche, à son tour, ne sombre dans la dépression. En savoir plus
«Le temps des antidépresseurs», David Healy. Ed. Les Empêcheurs de tourner en rond, 2002
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ANN B. HAMRIC
Professeure et doyenne adjointe à la Virginia Commonwealth University’s School of Nursing (USA)
Dans un système de santé de plus en plus complexe, les professionnels des soins au bénéfice d’une formation de pointe sont tout simplement indispensables. Les infirmiers «de pratique avancée» (APNs pour «advanced practice nurses» en anglais) sont justement équipés de compétences leur permettant d’individualiser les soins tout en adoptant une approche globale des situations rencontrées. Ils développent des partenariats avec les patients, de manière à les guider et à les coacher pour leur santé et lors des nombreuses phases de transition qu’impose la maladie.
VCU School of Nursing
Les soins infirmiers ne cessent de gagner en importance et en responsabilité dans la prise en charge des patients. Plusieurs facteurs ont contribué à l’essor de la discipline, notamment les avancées médicales et technologiques, l’évolution démographique ou encore les mutations des cadres politiques et financiers. Dans bon nombre de pays, cette évolution reste néanmoins méconnue du grand public.
Les APNs leur apportent un soutien précieux et les aident à utiliser au mieux les ressources présentes dans leur environnement. Devant faire preuve d’une expertise clinique renforcée dans leur champ d’activité et d’une meilleure compréhension des bases scientifiques des soins, les APNs font appel à une multitude d’approches pour prévenir les maladies et accroître la qualité de vie de leurs patients. Leurs compétences résultent d’une formation de niveau Master en sciences infirmières.
L’objectif prioritaire des soins infirmiers consiste à répondre toujours mieux aux besoins, parfois complexes, des patients. Certaines maladies autrefois incurables sont désormais mieux contrôlées, mais accompagnent celles et ceux qui en souffrent durant de nombreuses années. Une chronicité souvent ponctuée d’épisodes aigus nécessitant une hospitalisation. Et bien La pratique infirmière avancée est aujourd’hui que l’hôpital accueille des patients dont l’état un phénomène réellement international. Là est globalement plus critique qu’auparavant, où les APNs sont présents depuis plusieurs il doit composer avec la forte pression qui décennies – on compte par exemple déjà plus s’exerce sur les coûts de la santé et sur de 250’000 APNs aux Etats-Unis aujourd’hui – les durées d’hospitalisation. Jour après les systèmes de santé nationaux ne sauraient jour, les patients souffrant de maladies d’ailleurs plus se passer de leur contribution. chroniques sont confrontés à une multitude Etre moderne, c’est avant tout savoir répondre de professionnels. Au cœur de ce système aux besoins les plus actuels de la population! ⁄ complexe, on attend désormais d’eux qu’ils «gèrent» leur propre santé, par exemple sous forme d’actes techniques qu’ils réalisent eux-mêmes et de décisions quotidiennes. En savoir plus www.nursing.vcu.edu/people/administrative/AnnHamric
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chronique
cursus
chronique
de la région et un cadre de vie des plus agréables. Ce formidable environnement constitue un bien précieux qu’il s’agit Hélène Brioschi Levi de cultiver au quotidien. Directrice des soins du CHUV Il implique un certain nombre de responsabilités que nous formulons sous forme d’engagements observés tant par les es professionsoignants que par la Direction des soins. nels de la santé Tout d’abord, celui d’exiger de noussont aujourd’hui mêmes des soins professionnels, concrè mobiles et élisent tement traduits sous forme d’une préoclibrement le lieu cupation constante pour la gestion des dans lequel ils risques et l’accès à des soins de qualité. souhaitent travailler ou se former. Plus de Cela nécessite non seulement une excel3’500 soignants, médecins non compris, lente collaboration entre les différents ont choisi de travailler au Centre hospitacorps de métier, mais aussi de solides lier universitaire vaudois (CHUV). compétences. Nous nous engageons donc Ce faisant, ils bénéficient des condiavec force en faveur de la formation, de la tions exceptionnelles réunies au niveau national, régional et local. La Suisse est un qualité de l’encadrement et de la relève. Le statut universitaire de l’hôpital et l’essor pays politiquement stable et économiqueacadémique des professions soignantes ment prospère dans lequel les trois quarts offrent par ailleurs des conditions propices de la population active œuvrent dans le secteur tertiaire et où le chômage n’excède pour relever le défi de l’innovation dans le domaine de la recherche et du transfert que rarement 4%. La région lausannoise des connaissances dans les pratiques de abrite le plus grand campus universitaire soin. Enfin, et c’est le cœur de notre propos, du pays et bon nombre de hautes écoles l’ensemble est accompli avec une infinie réputées ainsi qu’un très dense tissu considération pour la vraie place dont économique. Les synergies entre formadoivent bénéficier nos patients. Le savoir tion, recherche et économie positionnent n’a de sens que dans la mesure où il est mis Lausanne et sa région comme un pôle au service des personnes atteintes dans leur de compétence et d’expertise dans les secteurs à haute valeur ajoutée. Le tableau santé qui placent leur confiance en nous, dans le plus strict respect des valeurs, des ne serait pas complet si l’on n’y ajoutait le caractère traditionnellement multiculturel attentes et du caractère unique de chacun. ⁄
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Matthieu Martin
curSUS
une carrière au chuv
Les soins face aux défis de l’innovation
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cursus
Chercheur récompensé
actualité
Au cœur de l’anatomie
L’European Research Council (ERC) vient de faire connaître les lauréats des Starting Grants 2013. Parmi eux, l’immunologiste Dietmar Zehn, chef de groupe au Service d’immunologie et allergie du CHUV et à l’Institut suisse de recherche sur le vaccin. Intitulé «Identify novel pathways to enhance the induction of protective CD8 T cell responses», ce projet bénéficie d’un «ERC Starting Grant» doté de 1,5 million d’euros sur une durée de cinq ans. BT
IMMUNOLOGIE
Un nouvel hôpital pour les jeunes patients C’est le groupement GMP Hamburg – JB Ferrari qui a été retenu par le jury pour la construction du futur Hôpital des enfants, prévue sur le site de la Cité hospitalière à Lausanne. Le Grand Conseil vaudois avait octroyé le 23 avril 2013 un crédit de 170 millions de francs pour sa réalisation. BT pédiatrie
Interactive et immersive, l’exposition Anatomies propose un voyage au cœur des représentations du corps humain. Les visiteurs y découvrent un florilège d’images, d’objets et de témoignages entre passé et présent, entre art et science, entre médecine et société. Des ouvrages anciens aux technologies d’imagerie les plus récentes, des préparations anatomiques aux installations virtuelles, Anatomies est une exposition sous le patronage de l’Académie suisse des sciences naturelles. BT
EXPOSITION
à voir
«Anatomies», Musée de la main, rue du Bugnon 21, 1011 Lausanne. Jusqu’au 17 août 2014
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Prix partagé La Prof. Monika Hegi, cheffe du Laboratoire de biologie et génétique des tumeurs cérébrales du Département des neurosciences cliniques du CHUV, a reçu le Victor Levin Award fin novembre à San Francisco lors de la 4e rencontre de la «World Federation of Neuro-oncology». Elle a reçu ce prix conjointement avec Roger Stupp, directeur du Département d’oncologie de l’Hôpital universitaire de Zurich et du Centre de cancérologie de Zurich. BT
neuro-oncologie
Effets de l’électrochoc L’équipe du Laboratoire de recherche en neuro-imagerie du CHUV a publié une étude sur les effets potentiels de l’électroconvulsivothérapie sur le cerveau dans le magazine Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America. Ces résultats peuvent être profitables pour d’autres traitements tels que la simulation cérébrale profonde et la stimulation magnétique transcrânienne. BT
Cerveau
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portrait
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Une carrière au chuv
Eveline Geiser est venue du MIT mener ses recherches sur la perception du «timing global». Texte: Bertrand tappy, photos: HEIDI DIAZ
orsqu’on lui demande d’expliquer le thème de ses recherches, Eveline Geiser n’a pas besoin de nous inonder de théories abstraites. Pour cette chercheuse au sein du Laboratoire des investigations neurophysiologiques du CHUV, le «timing global» est quelque chose auquel notre cerveau fait appel chaque jour pour forger notre perception de l’environnement: «Imaginez-vous dans une fête. Au milieu du brouaha des conversations et du bruit, vous tentez d’entretenir une conversation avec quelqu’un. Cette ituation, qui sort quelque peu de la routine pour votre cerveau, implique qu’il va travailler autrement et s’adapter au contexte. Mais quelle partie de notre système cérébral travaille dans ces moments-là, et comment fait-il pour s’adapter? Pour l’instant, les scientifiques l’ignorent. Pourtant, cette capacité est souvent altérée après une lésion cérébrale, dans des conditions neuro-dégénératives, ou simplement en âge», explique la chercheuse.
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La perception du «timing global» intéresse Eveline Geiser depuis de nombreuses années. Après avoir mené des études de psychologie dans la cité de la Limmat, la chercheuse d’origine zurichoise réalise son travail de master au prestigieux Institut Max Planck de Leipzig. C’est ici que va naître sa passion pour le cerveau et, déjà, la question du rythme: «J’ai décidé de me tourner vers une recherche qui me permettrait de mêler mon intérêt pour le fonctionnement du cerveau à celui pour les expériences auditives.» Pour parfaire ses compétences en imagerie du cerveau, la chercheuse se rend ensuite aux Etats-Unis pour un postdoc avant d’être recrutée comme Research Scientist par le prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT). Et c’est après avoir reçu le soutien du Fonds national suisse de la recherche scientifique qu’elle a pu finalement rejoindre le CHUV. Dans son travail, la neuroscienti-
fique utilise toutes les méthodes d’imagerie connues: IRM anatomique et fonctionnelle, encéphalogramme... «Certaines techniques nous permettent de visualiser la manière dont les zones du cerveau interagissent, tandis que d’autres nous renseignent sur leur temps de réaction.» Ce besoin technologique est l’une des raisons qui l’ont amenée au CHUV. «Le Centre d’imagerie biomédicale au CHUV possède des appareils IRM 3 et 7 tesla, qui sont les meilleures machines pour reproduire le fonctionnement du cerveau. C’est aussi pour moi l’occasion de travailler avec des gens comme Stephanie Clarke, Micah Murray ou Richard Frackowiak, et surtout d’avoir la possibilité de travailler au plus près des patients.» A terme, ses recherches pourraient générer de nouveaux tests pour dépister des déficiences du cerveau dans le cas de maladies neuro-dégénératives telles que Parkinson. «Ma recherche devrait aussi ouvrir des pistes concernant la médecine personnalisée afin de proposer, à l’avenir, une thérapie spécifique au patient. C’est ma vision et le but de mon travail.» ⁄
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Une carrière au chuv
Certaines techniques d’imagerie permettent à Eveline Geiser de voir les zones du cerveau en activité, tandis que d’autres la renseignent sur leur réactivité.
Le Centre d’imagerie biomédicale du CHUV possède des appareils IRM 3 et 7 tesla. Selon Eveline Geiser, «ce sont les meilleures machines pour reproduire le fonctionnement du cerveau.»
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Carlo rivolta
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Francine behar-cohen
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Une carrière au chuv
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u’ils La rétinologue Francine Behar-Cohen clairement distribués: soient les premiers ont la et le généticien Carlo Rivolta bleus, mission de diagnostitravaillent sur une thérapie contre marron ou verts, quer les pathologies les yeux ont été les des patients et fournir les dégénérescences de la rétine. premiers organes à aux seconds des Texte: Bertrand Tappy, photos: eric déroze mettre en évidence échantillons d’ADN. les principes des maladies héréditaires et par conséquent de notre patrimoine génétique. «Autrefois, décrypter le génome était une opéraCe n’est donc pas un hasard si nos gènes et tion chère et laborieuse, se souvient Carlo Rivolta. nos globes oculaires constituent aujourd’hui l’un Il fallait cibler ses recherches en espérant avoir de des duos les plus étudiés en génétique humaine. la chance. Aujourd’hui, nous pouvons avoir toute l’information d’un coup.» «Le rôle des cliniciens Dans son laboratoire de la Cité hospitalière laus’est ainsi complexifié, ajoute Francine Beharsannoise, Carlo Rivolta compte parmi les génétiCohen. Ils doivent analyser les mécanismes des ciens les plus reconnus en la matière. Il dirige un maladies pour orienter sur des cibles moléculaires laboratoire chargé de trouver les déterminants potentielles et pour trouver des mécanismes comgénétiques des dégénérescences rétiniennes, muns qui permettent de réconcilier les absences des maladies difficiles à dépister et qui touchent de corrélations entre phénotype et génotype.» environ 1 personne sur 3’000. Une quête qui a déjà donné ses premiers fruits, avec l’identification de nouveaux gènes. «Les maladies que nous étudions peuvent être causées par l’altération de plus d’une centaine Et à l’avenir? «Nous pourrons développer des de gènes, explique le spécialiste. On peut donc thérapies personnalisées en fonction du gène voir 100 patients atteints par la même maladie sans touché, espère Carlo Rivolta. Dès que nous aurons trouver de liens entre eux au niveau de l’ADN!» Pour identifié tous les gènes pouvant causer la maladie, les aider, Carlo Rivolta et ses collègues peuvent il restera à répondre à la question: quel est le aujourd’hui compter sur deux éléments essentiels: mécanisme commun pour lequel de si nombreux les progrès de la technologie et la mise en réseau et différents défauts de l’ADN peuvent causer la de leurs résultats grâce au projet «Transvision» même maladie? Une fois qu’on aura trouvé ce mis sur pied par Francine Behar-Cohen, directrice mécanisme, on aura trouvé aussi une cible thémédicale de l’Hôpital ophtalmique Jules Gonin à rapeutique potentielle pour toutes les personnes Lausanne. «Transvision est un réseau multidiscilpliatteintes.» Une longue démarche que les sciennaire qui associe l’Inserm, l’Hôpital ophtalmique tifiques de «Transvision» auront à effectuer dans et ses chercheurs, explique-t-elle. On compte les années à venir. «Il n’y a qu’un réseau multidiségalement des partenaires du CHUV et de l’EPFL.» ciplinaire – à l’image du nôtre – pour y arriver», Entre les cliniciens et les généticiens, les rôles sont conclut Francine Behar-Cohen.
En savoir plus
Portraits des chercheurs sur www.invivomagazine.com
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Les clés du sommeil
Mathevet PATRICE fonction Chef du Service de gynécologie
Le pneumologue Raphaël Heinzer et le neurologue José Haba-Rubio collaborent tous deux au Centre d’investigation et de recherche sur le sommeil du CHUV. Alliés à la journaliste Elisabeth Gordon, ils ont rédigé ce petit ouvrage de 11 chapitres qui permettra au lecteur de découvrir quelques secrets sur cette activité qui occupe tout de même un tiers de notre vie. A quoi sert le sommeil? Quels sont les troubles qui peuvent venir le perturber et comment s’en prémunir? Grâce à des paragraphes courts, des encadrés, des témoignages, des conseils pour bien dormir, un test et des illustrations, ce livre répond aux fréquentes questions que nous nous posons sur le sommeil et ses dysfonctionnements. BT
Le Prof. Patrice Mathevet, 53 ans, a réalisé son cursus à Lyon. A l’œuvre durant treize ans comme adjoint du Prof. Daniel Dargent au sein du Service de gynécologie de l’Hôpital Edouard Herriot, il s’est spécialisé dans le traitement des cancers gynécologiques. Deux séjours au MD Anderson Cancer Center à Houston, au Texas, en 1992 et en 1998, lui ont permis de travailler sur la dissémination des cancers, complétant ainsi ses recherches cliniques par une approche biologique.
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à LIRE
PRéNOM
Le professeur Raymond est spécialiste des cancers du système digestif ainsi qu’expert en pharmacologie moléculaire et dans nominations le développement NOM Wildhaber précoce de médiPRéNOM BARBARA caments, compéfonction Cheffe du Service tences qui lui permettent de précode chirurgie pédiatrique niser l’application d’une «médecine intelligente» dans le traitement des D’origine argovienne, Barbara cancers, basée sur des médicaments Wildhaber a étudié la médecine à ciblés. Cette approche s’alliera avec l’Université de Zurich. En 2007, elle les traitements d’immunothérapie s’expatrie pendant un an à Paris développés au CHUV par le Prof. pour se perfectionner en chirurgie George Coukos, pour venir hépato-biliaire et transplantation traiter l’entier de l’écosystème hépatique pédiatrique au Centre dans lequel prolifèrent les hospitalier universitaire de Bicêtre cellules cancéreuses. avant de revenir en Suisse et d’occuper la fonction de cheffe de service aux HUG à Genève. Lauréate à plusieurs reprises de prix de recherche, Barbara Wildhaber est par ailleurs présidente de la Société suisse de la chirurgie pédiatrique.
CEMCAV, DR
«J’ai envie de comprendre... le sommeil», Ed. Médecine et Hygiène, 2013
Raymond ERIC fonction Chef du Service d’oncologie médicale NOM
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Une carrière au chuv
migration
Stéphane Morandi raconte son séjour d’une année à Oxford. Pourquoi avez-vous effectué ce séjour? Dans la perspective de l’introduction en Suisse de traitements psychiatriques ambulatoires sous contrainte, je souhaitais passer mon séjour scientifique dans un pays qui avait de l’expérience dans le domaine, en l’occurrence l’Angleterre. En 2011, j’ai organisé une rencontre avec le Prof. Burns, personnalité incontournable dans le domaine et directeur de la chaire de psychiatrie sociale à Oxford, lors d’une de ses visites à l’Université de Zurich. Un accord a été passé pour que je puisse rejoindre son équipe de recherche l’année suivante. Mon projet intéressait beaucoup le Service de la santé publique vaudois qui m’a soutenu financièrement, tout comme le CHUV. Et une fois sur place, quelles ont été vos impressions? A Oxford, le Département de psychiatrie occupe essentiellement des chercheurs. Les profils mixtes «recherche + clinique» identiques à la Suisse n’existent quasiment pas. En outre, malgré la crise financière, le gouvernement anglais continue à investir massivement dans la recherche pour maintenir son aura internationale. Mais une fois que l’on est intégré, on peut échanger avec les responsables d’autres projets. J’ai également reçu un appui important de la part de ma hiérarchie à Lausanne, notamment pour préparer mon retour et la suite de ma carrière.
Morgane rosseti
Vous en tirez donc un bilan positif? C’est sûr. J’ai eu la chance de travailler avec les réfé-
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Morandi
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Stéphane
AU CHUV DEPUIS 2006 TITRE Médecin associé au Service de psychiatrie communautaire
rences mondiales dans mon domaine et de publier plusieurs articles. Le fait d’avoir un peu de distance avec la Suisse permet un regard plus global sur la situation. J’ai, par exemple, profité de mon séjour pour contacter les offices de santé publique de tous les cantons et me renseigner sur les pratiques locales en termes de traitements psychiatriques contraints, ce que je n’aurais pas pu faire en devant simultanément m’occuper de la gestion du service et de mes patients habituels. Et pour ma famille, ce fut une période fantastique. Mes enfants de 4 et 7 ans ne parlaient pas un mot d’anglais avant de partir, et maintenant ils le parlent couramment. Ma femme a aussi pu bénéficier de cours dispensés par l’Université aux conjoints de chercheurs. Tout le monde y a trouvé son compte! ⁄ BT
BACKSTAGE LA CARTE DE LA HEALTH VALLEY L’illustrateur Steebz a réalisé la carte de la Suisse romande (p. 6) en plusieurs étapes. Ce premier jet à la main lui a permis d’y placer tous les éléments qui symbolisent la Health Valley. Cette sélection de bâtiments a été réalisée par la rédaction de «In Vivo».
LA FABRICATION DE «IN EXTENSO»
DR
Le supplément infographique «In Extenso» sur les rêves a été réalisé grâce aux compétences réunies des journalistes Céline Bilardo et Benjamin Bollmann, de l’infographiste Thibaud Tissot (ci-dessous) et de l’illustrateur Emmanuel Romeuf.
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contributeurs
dr, Gilles weber
Céline Bilardo La journaliste Céline Bilardo a récemment intégré l’équipe de LargeNetwork. Elle a multiplié les rencontres pour ce numéro de «In Vivo»: le fondateur du stent Hans Wallstén (p. 11), les chercheurs en neurosciences de la région lémanique (p. 8) et les spécialistes de la question du don de sang (p. 38). Elle a aussi contribué à la rédaction de «In Extenso».
Eric Déroze Pour ce numéro de «In Vivo», Eric Déroze, photographe au CEMCAV, le Centre d’enseignement médical et de communication audiovisuelle du CHUV, a réalisé les portraits de Thierry Buclin (p. 36), de Carlo Rivola et de Francine Behar-Cohen (p. 74).
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Sabrine Elias Ducret
Thibaud Tissot
Paule Goumaz
Chez LargeNetwork, Sabrine Elias Ducret occupe le poste d’iconographe. Titulaire d’un diplôme en communication visuelle de la HEAD, elle imagine les concepts des prises de vue et des illustrations. Son travail de recherche à travers les banques d’images scientifiques permet de compléter l’univers visuel du magazine.
La direction artistique du supplément infographique «In Extenso» a été assurée par le graphiste Thibaud Tissot. Originaire de La Chaux-de-Fonds, il codirige avec Nicolas Bourquin le studio onlab à Berlin. Le duo a coédité «Data Flow 1 et 2», des ouvrages de référence dans le domaine de l’infographie.
Paule Goumaz a réalisé l’interview du moine bouddhiste Matthieu Ricard (p. 30). Originaire de Sydney (Australie), elle a notamment travaillé pour l’exposition nationale Expo.02. Elle rejoint le CHUV en 2003, où elle occupe aujourd’hui le poste de rédactrice et responsable de différents projets web de l’institution.
In Vivo
Une publication éditée par le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) et l’agence de presse LargeNetwork www.invivomagazine.com
édition
CHUV, rue du Bugnon 46 1011 Lausanne, Suisse T. + 41 21 314 11 11, www.chuv.ch redaction@invivomagazine.com Réalisation éditoriale et graphique LargeNetwork, rue Abraham-Gevray 6 1201 Genève, Suisse éditeurs responsables T. + 41 22 919 19 19, www.LargeNetwork.com Béatrice Schaad et Pierre-François Leyvraz Direction de projet et édition online
Bertrand Tappy remerciements
Responsables de la publication
Gabriel Sigrist et Pierre Grosjean
Direction de projet
Melinda Marchese Alexandre Armand, Aline Hiroz, Anne-Renée Leyvraz, Anne-Marie Barres, Anne-Marie Vuillaume, Brigitte Morel, Cannelle Keller, Céline Vicario, Christian Sinobas, direction graphique Christine Geldhof, Deborah Gonzales, Denis Orsat, Diana Bogsch et Sandro Bacco Diane de Saab, Elise Méan, Emilie Jendly, Enrico Ferrari, Fiona Amitrano, Gilles Bovay, Jeanne-Pascale Rédaction Simon, Jocelyne Bouton, Katarzyna Gornik-Verselle, Laure Espie, Laurent Meier, Lauriane Bridel, LargeNetwork (Benjamin Bollmann, Céline Bilardo, Stanislas Cavalier, Sophie Gaitzsch, Antoine Harari, Benjamin Keller, Serge Maillard, Melinda Marchese, Bartek Mudrecki, Manuela Palma, Marie-Cécile Monin, Marité Sauser, Massimo Sandri, Muriel Cuendet-Teurbane, Thomas Pfefferlé, Jean-Christophe Piot, Geneviève Ruiz, Daniel Saraga, Julie Zaugg), Muriel Faienza, Nathalie Jacquemont, Nicolas Paule Goumaz, Bertrand Tappy Jayet, Odile Pelletier, Pauline Horquin, Philippe Coste, Philippe Dosne, Serge Gallant, Sonia RECHERCHE iconographique Ratel, Stephan Studer, Stéphane Coendoz, Sabrine Elias Ducret et Olivia de Quatrebarbes Stéphanie Dartevelle, Thuy Oettli, Virgnie Bovet, Valérie Blanc et le Service de communication du CHUV. Images CEMCAV (Eric Déroze, Heidi Diaz, Patrick Dutoit, Philippe Gétaz, Morgane Rossetti, Gilles Weber), Joëlle Flumet, Khuan+Ktron, Benjamin Schulte, Dom Smaz/Rezo, La Tigre Partenaire de distribution BioAlps
mise en page
Sandro Bacco, Diana Bogsch et Fany Hemidi COuverture
Visuel créé pour «In Vivo» par The Face Research Lab de l’Institut de neurosciences et psychologie de l’Université de Glasgow, un laboratoire dont les recherches sur la reconnaissance de visages sont soutenues par The Economic and Social Research Council (ESRC) et The European Research Council (ERC). TRADUCTION
Technicis IMPRESSION
PCL Presses Centrales SA Tirage
17’000 exemplaires en français 3’000 exemplaires en anglais Les propos tenus par les intervenants dans «In Vivo» et «In Extenso» n’engagent que les intéressés et en aucune manière l’éditeur.
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El Bibliomata / El mundo fisico, 1882
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la médecine participative www.invivomagazine.com
Penser la santé N° 2 – MARS 2014
bienvenue dans l’ère de
la médecine participative
IN EXTENSO La lecture des rêves In Vivo N° 2 – Mars 2014
réseaux sociaux / biobanques / dossiers électroniques
MATTHIEU RICARD «Les médecins devraient cultiver l’altruisme» DON DU SANG Des critères trop sévères PHARMA Les médicaments meurent aussi Edité par le CHUV www.invivomagazine.com IN EXTENSO La lecture DES RÊVES