IN VIVO #3 FRA

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perception www.invivomagazine.com

Penser la santé

N° 3 – JUILLET 2014

cinq SENS / ILLUSIONS / cerveau

méfiez-vous de vos perceptions

In Vivo N° 3 – Juillet 2014

IN EXTENSO La naissance d’un être humain

PAULA JOHNSON Hommes et femmes inégaux face aux médicaments FAT TAX Un impôt contre l’obésité TABOU Le sexe en hôpital psychiatrique Edité par le CHUV www.invivomagazine.com IN EXTENSO La naissance d’un humain


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27.05.14

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jeroen bennink

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IN VIVO / N° 3 / juillet 2014

SOMMAIRE

FOCUS

19 / cerveau Méfiez-vous de vos perceptions Tour d’horizon de la recherche sur nos sens Par serge maillard, melinda marchese et benjamin keller

MENS SANA

30 / Interview Paula Johnson préconise une médecine plus personnalisée Par julie zaugg

34 / tabou La mort, une réflexion à vivre Par béatrice schaad

36 / tendance Haut potentiel? Les parents veulent savoir Par marie-adèle copin

39 / prospection Tests de médicaments: «la loi n’est pas en faveur des patients» Par benjamin keller

42 / décryptage L’impôt sur les calories

Nirwan Malla

Par julie zaugg


CONTENTS

61 21 CORPORE SANO

IN SITU

47 / Innovation

09 / health valley

Les promesses de l’électricité

ObeSense, le t-shirt «intelligent»

Par jean-christophe piot

50 / tabou Par Julie Zaugg

54 / prospection La quête de l’immortalité Par Clément bürge

58 / tendance Tout ce que vos larmes peuvent dire sur vous Par jean-christophe piot

61 / en images La sangsue, une petite bête qui vous veut du bien Par Melinda Marchese et erik freuDenreich

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Des vaisseaux sanguins imprimés en 3D

CURSUS

70 / chronique «L’innovation, notre plus grande valeur»

72 / portrait Daniela Dunker Scheuner enseigne la méditation contre la dépendance

74 / tandem L’ornithologue Alexandre Roulin et le biochimiste Stefan Kunz

oram dannreuther, eric déroze, heidi diaz

36

Sexe et psychiatrie, un mélange explosif ?

14 / autour du globe


Editorial

Voir avec les oreilles

Patrick dutoit

Béatrice Schaad Responsable éditoriale

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«Ceci n’est pas une pipe.» En l’écrivant, Magritte s’est amusé d’un doute universellement partageable: voit-on bien la réalité? Ou celle-ci est-elle le fruit d’une construction mentale que chacun perçoit à sa façon? Autrement dit, le monde n’est pas le monde, mais le regard que l’on porte sur lui et qui le transforme. La perception, fabuleuse de complexité comme en attestent les travaux qui ont conduit des aveugles à littéralement voir avec les oreilles (voir p. 19), est tout à la fois le fruit de sa propre sensibilité, de son histoire de vie, de sa culture, de ses sens et de l’instant. Une expérience infiniment personnelle mais aussi – et c’est sans doute le plus miraculeux – étonnamment partageable. Aristote l’avait bien compris, lui qui avait ajouté un sixième sens aux cinq premiers, très différent de l’ouïe, de l’odorat ou du goût et capable de les fédérer: un sens commun. Une sorte de garantie de tomber d’accord avec son voisin sur ce qui est beau ou ce qui fait mal, un consensus, un rempart contre la solitude. Reste à savoir si ce consensus est amené à perdurer. Car au cours de la dernière décennie, l’essor fabuleux des neurosciences n’en finit plus de chahuter l’idée même de ce sens commun. En étudiant de façon toujours plus fine les mécanismes de la perception, l’imagerie médicale amène à établir à quel point ils sont personnels et extrêmement variables d’un individu à l’autre. Il est frappant de constater que faisant écho à une société qui accorde toujours plus de place à l’individualité, qui encourage chacun à se singulariser, à se mettre en scène, une société d’un moi avide, la technologie médicale conduit elle aussi à se concentrer toujours davantage sur l’individu. Ainsi les premières découvertes de Crick et Watson sur la structure de l’ADN voilà 60 ans ont conduit à l’essor de la médecine personnalisée. Et aux questions éthiques qu’elle soulève: la médecine génomique et les potentialités de développer telle ou telle pathologie modifient l’approche du traitement. Confrontés au risque, le patient comme le médecin pourraient être toujours plus souvent tentés de prévenir que de guérir. Cette médecine qui promet des soins taillés à la mesure de ses gènes est-elle abordable financièrement? Et peut-on la refuser à des patients qui paient des primes toujours plus onéreuses? Cette tension entre l’intérêt porté à la spécificité de l’individu et la nécessité de pouvoir généraliser les découvertes au plus grand nombre est propre à l’histoire des sciences. A la différence près qu’aujourd’hui la pression est sans doute plus forte. Tout l’art pour la recherche va donc consister à maintenir simultanément ses efforts sur l’étude de l’individu mais aussi sur celle du groupe et sur le développement de réponses thérapeutiques applicables également au plus grand nombre. ⁄


post-scriptum la suite des articles de «in vivo» Il est possible de s’abonner ou d’acquérir les anciens numéros sur le site www.invivomagazine.com

Alzheimer IV n° 1

p. 9

Succès sur un poisson

Mario Anzuoni / Reuters

Une nouvelle avancée dans la recherche sur la maladie d’Alzheimer a été effectuée par une équipe de biologistes de l’Inserm. L’équipe française a réussi à rectifier une anomalie comportementale chez un poisson atteint d’Alzheimer en lui injectant une protéine naturellement présente chez l’homme sain. Il s’agit de la protéine FKB52, dont la recherche avait déjà démontré les vertus protectrices pour l’homme en 2010. Ce succès est le premier pas vers un traitement applicable à l’espèce humaine. /

IMPRESSION 3D IV n° 1

p. 62

Tumeurs cancéreuses en 3D L’impression 3D vient en aide à la recherche contre le cancer. Deux équipes chinoise et américaine sont parvenues à créer des représentations de tumeurs cancéreuses grâce à l’impression 3D. Jusqu’alors limitée à la culture de cellules en 2D, ces tumeurs conçues in vitro sont destinées à l’étude de la croissance et de la propagation du cancer, ainsi qu’au développement de nouveaux traitements. /

4

E-Cigarette IV n° 1

p. 14

Aussi nocive que le tabac Une étude américaine vient de démontrer que les cigarettes électroniques pourraient être tout aussi cancérigènes que le tabac. Afin d’analyser la toxicité de la nicotine liquide, des chercheurs des universités de Boston, de Dallas et de Los Angeles ont exposé des cellules de poumon saines à de la vapeur de nicotine durant quatre heures. En comparant les effets de cette vapeur à ceux de la fumée de tabac classique, ils ont constaté que, dans les deux cas, les cellules présentaient des mutations associées avec le développement d’un cancer. /


post-scriptum

IV n° 2

p. 39

Bientôt dans nos veines? La culture de cellules du sang à partir de cellules souches progresse. Le professeur Marc Turner de l’université de Edinburgh a utilisé ce procédé afin de fabriquer du sang artificiel de groupe O qu’il est possible de transfuser vers différents patients. Un essai clinique est prévu pour 2016. En 2011, le professeur Luc Douay avait mené un essai clinique du même type à l’université Pierre et Marie Curie à Paris, mais qui se limitait à l’autotransfusion. /

Cœur artificiel IV n° 2

p. 14

p. 50

Un implant cérébral pour booster la mémoire Les implants cérébraux, permettant aux patients paralysés ou amputés d’actionner des neuroprothèses par la pensée, pourraient un jour stimuler notre mémoire. Une expérience menée pour le compte du Pentagone par le neurologue de l’université de Wake Forest Robert Hampson a ainsi permis d’implémenter une image dans le cerveau d’un singe, que l’animal n’avait jamais vue auparavant. /

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IV n° 2

Carmat veut poursuivre ses essais

Neuroprothèses IV n° 2

Transparence

La société française Carmat, qui a mis au point le premier cœur artificiel, a affirmé en avril dernier vouloir continuer ses essais d’implantation. Le 2 mars, Claude Dany, premier patient des essais cliniques, était décédé 75 jours après l’implantation de l’organe artificiel à l’âge de 76 ans. Pour l’entreprise, cette première tentative s’est malgré tout avérée probante puisque l’objectif était d’atteindre 30 jours de survie avec des patients dont le pronostic vital est engagé à brève échéance. /

p. 26

Essais cliniques disséqués

carmat

Sang artificiel

Une étude réalisée par l’organisme à but non lucratif Cochrane Collaboration vient de mettre en évidence l’inefficacité du médicament Tamiflu pour lutter contre certaines complications liées à la grippe. Un constat basé sur l’analyse de données fournies par le fabricant Roche, obtenues de haute lutte. Cette timide avancée illustre à merveille le besoin accru de transparence autour des essais cliniques, pour les chercheurs et médecins, comme pour les patients. /

Télémédecine IV n° 2

p. 34

Répondre à un AVC à distance Dans la région Nord-Pas-deCalais, des hôpitaux viennent de mettre en place une solution basée sur la télémédecine pour intervenir au plus vite en cas d’accident vasculaire cérébral. Le patient victime d’un AVC pourra désormais être examiné à distance par un neurologue si l’hôpital où il se trouve n’en a pas. Une mesure qui devrait permettre de sauver des vies, car en cas d’AVC, chaque minute compte pour diminuer les risques de décès ou de séquelles. /


Grâce à ses hôpitaux universitaires, ses centres de recherche et ses nombreuses start-up qui se spécialisent dans le domaine de la santé, la Suisse romande excelle en matière d’innovation médicale. Ce savoir-faire unique lui vaut aujourd’hui le surnom de «Health Valley». Dans chaque numéro de «In Vivo», cette rubrique s’ouvre par une représentation de la région. Cette carte a été créée par João Lauro Fonte, illustrateur et graphiste brésilien travaillant à Londres.

in situ

Health Valley Tour d’horizon de l’innovation médicale en Suisse romande.

NEUCHâTEL

p. 09

Le Centre suisse d’électronique et de microtechnique développe un t-shirt équipé de capteurs physiologiques.

RENENS

p. 11

Dédié à la biologie et au design, UniverCité est le plus grand laboratoire communautaire d’Europe.

LAUSANNE

p. 12

MONTHEY

p. 08

Le Centre de recherche Nestlé étudie les liens entre santé et alimentation.

Le test mis au point par la PME Augurix permet de détecter une intolérance au gluten en dix minutes.

João Lauro Fonte

GENèVE

p. 11

La Cité de Calvin accueillera au mois de novembre un congrès consacré aux essais cliniques.

6


in situ

7

HEALTH VALLEY


in SITU

HEALTH VALLEY

Start-up DéTECTION

La start-up lausannoise Lunaphore propose une nouvelle technologie pour la détection de biomarqueurs de cancer: des puces microfluides permettant une analyse d’une tumeur en moins de cinq minutes. Lancée par des chercheurs de l’EPFL, la nouvelle entreprise a gagné le prix PERL (Prix entreprendre Lausanne) en mai 2014.

AUTO-IMMUNES

La start-up de l’EPFL Anokion a développé une méthode permettant de rééduquer les globules blancs, qui serait prometteuse contre les maladies auto-immunes comme la sclérose en plaques. Des investisseurs privés ont injecté plus de 33 millions de francs suisses dans la jeune entreprise.

GLUTEN

Simtomax, le test d’intolérance au gluten développé par la PME montheysanne Augurix, pourra être commercialisé en Australie. Le produit d’Augurix vient en effet d’obtenir l’aval de l’Australian Therapeutics Goods Administration (TGA). Simtomax permet de détecter en dix minutes la maladie de Celiac (intolérance au gluten). Environ 250’000 personnes en souffrent en Australie.

PLANTES ALPINES

Pharmalp vient de signer un partenariat avec Planetsolar: les produits à base de plantes alpines créés par la start-up de Conthey revitaliseront l’équipage du bateau solaire lors de ses prochains voyages. Il s’agit d’un gel apaisant pour les brûlures et irritations de la peau et un probiotique pour la réduction des problèmes digestifs.

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L’objet

L’endoscope du futur Saman Tree Technologies développe un microscope numérique pour la détection et la mesure de tissus cancéreux en chirurgie endoscopique. La start-up lausannoise vient de remporter le deuxième prix du concours «Venture» 2014 (organisé McKinsey & Company, l’EPF de Zurich et de l’agence pour la promotion de l’innovation CTI) pour sa technologie extrêmement prometteuse.

En kilos, le poids d’une tumeur maligne du foie extraite d’une femme de 30 ans aux Hôpitaux universitaires de Genève au mois d’avril. La patiente se porte bien depuis l’intervention.

30’000 En heures, le temps qu’il a fallu à une équipe de l’Université de Lausanne en collaboration avec des chercheurs australiens pour calculer la date d’apparition du chromosome Y, soit il y a 180 millions d’années.

«Nous voulons que le secteur privé investisse dans la Health Valley.» Patrick Aebischer Dans une interview publiée en mai 2014 dans la «Neue Zürcher Zeitung», Patrick Aebischer, président de l’EPFL, encourage les collaborations entre les entreprises et les universités.


in situ

HEALTH VALLEY

ObeSense: un t-shirt «intelligent» pour combattre l’obésité Des ingénieurs suisses élaborent un vêtement permettant de contrôler les conséquences du surpoids. Le t-shirt est muni de plusieurs capteurs, dont un électrocardiogramme. Textiles intelligents Le «syndrome métabolique», terme médical désignant les effets néfastes du surpoids, est un mal qui touche près de 40% des Suisses. Les personnes concernées font face à des risques accrus d’accidents cardiovasculaires ou d’apnée du sommeil. Une situation qui inquiète de plus en plus le corps médical. Parmi les pistes imaginées pour y remédier, l’une des plus originales est sans conteste le projet ObeSense, mené sous l’impulsion du Centre suisse d’électronique et de microtechnique (CSEM) de Neuchâtel. Il vise à créer un vêtement «intelligent» qui anticiperait ce type de complications. «Nous avons déjà développé des systèmes basés sur des t-shirts à capteurs, pour évaluer par exemple les performances de sportifs ou l’état de santé de patients. Mais pour cette nouvelle application médicale, nous devons intégrer davantage de données afin d’établir un diagnostic», explique Mattia Bertschi, directeur de section au CSEM. Pour y parvenir, le centre de recherche collabore avec d’autres laboratoires à travers le pays, dont le CHUV et l’EPFL, mais aussi l’Hôpital universitaire de Zurich (UZH) ou le Centre romand de rééducation (CRR). Chaque pôle se spécialise dans le développement d’une application spécifique sur ce vêtement high-tech. Par exemple, le CSEM s’occupe de l’indice de l’activité physique, évalué au moyen d’un accéléromètre, ainsi que de la santé du cœur, via un électrocardiogramme intégré au t-shirt. L’UZH calcule, quant à elle, le débit cardiaque grâce au niveau de saturation en oxygène des capillaires de la peau, tandis que le CRR mesure la consommation énergétique via la ventilation pulmonaire. «En rassemblant tous ces paramètres, nous pourrons affiner nos observations et prescrire plus efficacement un traitement adéquat aux personnes obèses», précise Etienne Pruvot, médecin au Service de cardiologie du CHUV. 9

Texte Jade Albasini

A.

B.

C. ci-dessus: Le t-shirt intelligent développé par le CSEM de Neuchâtel intègre un accéléromètre et un électro­ cardiogramme. Il mesure notamment le débit cardiaque et la consommation énergétique.

Premier test Ce «smart textile» permettrait non seulement de prévenir les risques liés à l’obésité, mais constituerait également un dispositif peu encombrant pour le suivi des patients. «Les méthodes classiques de mesure calorique sont généralement réalisées au moyen d’un masque ou dans des chambres spéciales. Le t-shirt rendrait obsolètes certaines analyses coûteuses en laboratoire», indique Olivier Dériaz, médecin et directeur de recherche au CRR. Cet outil novateur enregistrerait également une batterie de signaux en même temps – un gain de temps considérable pour le corps médical. Un prototype simplifié a déjà été testé sur 15 volontaires en Valais. «Nous l’avons expérimenté d’abord sur des personnes en bonne santé, de différents gabarits, dont certaines en léger surpoids», souligne le responsable. Les résultats sont en cours d’analyse à l’EPFL. Ils seront connus d’ici à quelques mois. Aussi pour les seniors Si le t-shirt fait ses preuves et se popularise, il pourrait bien révolutionner le quotidien des médecins généralistes. «Notre mission est de transférer nos innovations à l’industrie suisse, explique Mattia Bertschi. Mais avant qu’un produit soit commercialisé, il faut encore valider les premières conclusions et passer par des tests cliniques après avoir reçu l’aval des organes compétents.» Si ces étapes sont franchies, le vêtement intelligent pourrait aussi être utilisé dans d’autres contextes. «Il constituerait un parfait outil de suivi des personnes âgées. Connecté à un smartphone, il pourrait par exemple envoyer un signal d’alerte en cas d’inactivité», précise Etienne Pruvot. Le cardiologue imagine déjà un centre de compétences chargé de traiter les données «alarmantes», capable de déterminer s’il faut alors intervenir en urgence ou simplement transmettre les informations au médecin traitant. ⁄


in SITU

HEALTH VALLEY

3 questions à

David Vernez

Son laboratoire est le seul en Suisse à tester des produits dangereux sur des échantillons de peau humaine viable. Quels sont les enjeux de vos recherches?

Nos études portent sur des produits utilisés sur les lieux de travail et qui pourraient être dangereux pour la santé des employés. Elles permettent d’orienter la prévention et de faciliter la mise en place de réglementations. Les connaissances sur le passage des substances chimiques à travers la peau sont encore très lacunaires, notamment du fait de leur grande diversité.

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Pourquoi est-il essentiel de faire des tests sur de la peau humaine viable?

La peau du porc présente des similitudes avec celle de l’homme, mais sa surface et sa pilosité sont différentes. Les résultats sont moins représentatifs. De même, avec de la peau humaine congelée, nous raterions certains effets. La collaboration d’un service de chirurgie plastique et reconstructive et d’un service de dermatologie, qui nous fournissent les échantillons, nous permet de réaliser des essais avec de la peau viable. Ainsi, les résultats de notre étude sur les phtalates, des plastifiants qui se trouvent notamment dans les gants en vinyle, montrent que le passage de la barrière cutanée existe, contrairement à ce qu’avancent les modèles théoriques.

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Quels sont les métiers les plus concernés?

Le risque d’absorption à travers la peau concerne les métiers dans lesquels les substances chimiques sont utilisées en grandes quantités: industrie chimique, construction ou agriculture. S’agissant des effets locaux, par exemple, les irritations concernent les nettoyeurs professionnels ou les coiffeurs en contact avec divers produits. / David Vernez est directeur ad interim de l’Institut universitaire romand de santé au travail

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Alain Herzog / EPFL

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INNOVATION

Un parc suisse Donner une visibilité mondiale aux différents centres et sites de recherche scientifiques en Suisse. Tel est l’objectif du projet de Parc national d’innovation (PNI) commandité par la Confédération. Microcity à Neuchâtel, Energypolis à Sion, le Bluefactory à Fribourg et le campus Biotech à Genève ainsi que l’EPFL et l’EPFZ ont déposé un projet commun en mars dernier. Le réseau de collaboration sera ratifié par le Parlement en 2015.

En millions, la somme décrochée par l’entreprise Advanced Accelerator Applications (AAA), spin-off du CERN, pour son développement aux Etats-Unis. La société est spécialisée dans l’imagerie moléculaire.


in situ

HEALTH VALLEY

UniverCité  Renens

Foyers d’innovation Hackuarium  Lausanne

Post-doc en biochimie à l’EPFL, Luc Henry vient d’inaugurer le premier centre de biohacking de Suisse. Inspirée par la culture du logiciel libre, cette mouvance se veut une troisième voie entre la recherche universitaire et le monde de l’entreprise. Les biohackeurs souhaitent mettre les avancées des biotechs à la portée de tous.

Le plus grand laboratoire communautaire d’Europe vient d’ouvrir à Renens. Baptisé UniverCité, cet espace de 1’000 m2 dédié à la biologie et au design accueille gratuitement toute personne qui souhaite faire de la recherche dans ces domaines. Le but: faire émerger des innovations hors du cadre académique et entrepreneurial.

SwissTech Conference Center  écublens

Après le Rolex Learning Center, le Campus de l’EPFL abrite depuis avril dernier un nouveau bâtiment à l’architecture futuriste: le SwissTech Conference Center. Situé dans le quartier nord de l’EPFL, le centre de congrès est totalement modulable: la salle de conférence se transforme en salle d’exposition ou de banquet en quelques minutes. Plus de 500 logements ont été créés à proximité, ainsi que des magasins et un parking souterrain. Microcity  Neuchâtel

Inauguré début mai, le nouveau bâtiment Microcity – Pôle d’innovation a été érigé à Neuchâtel, proche des institutions académiques. Dix chaires de l’EPFL, soit plus de 180 collaborateurs, s’y sont déjà installées avec Neode, le parc scientifique et technologique neuchâtelois. A terme, le nouveau bâtiment pourrait accueillir 12 chaires de l’Ecole polytechnique fédérale. Propriété de l’Etat de Neuchâtel, le campus microtechnique de sept étages a été budgété à 71,4 millions de francs.

Agenda Nano Ingénierie Du 22 au 26 septembre 2014, Lausanne La 40e conférence internationale de micro et nano ingénierie se tiendra cette année dans le nouveau centre de congrès de l’EPFL (SwissTech Convention Center). Les ingénieurs et experts présents dessineront les nouvelles tendances dans le domaine devant un parterre de 500 à 800 participants attendus.

Soigner les maladies orphelines 7 octobre 2014, Yverdon

L’association Swiss Biotech réunit les directeurs des industries suisses actives dans la biotechnologie à l’Y-Parc d’Yverdon pour la deuxième édition du «Swiss Biotech Fall Day». Les conférences de cette journée se concentreront sur le développement de médicaments pour les maladies orphelines.

www.mne2014.org

www.swissbiotech.org

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Autour des essais cliniques Les 11 et 12 novembre 2014, Genève Entrepreneurs de petites et moyennes entreprises, directeurs, investisseurs et producteurs de l’industrie pharmaceutique se rencontreront au Starling Hotel et Convention Center de Genève pour deux jours de réseautage et de discussion sur les derniers essais cliniques et les futurs développements dans la branche. www.terrapinn.com www.swissbiotech.org

Un salon consacré à la santé Du 13 au 16 novembre 2014, Lausanne

Le SwissTech Convention Center accueillera en novembre le Salon Planète Santé. Petits et grands pourront se plonger dans des jeux et des tests sur la santé, ainsi qu’assister à de nombreuses conférences et débats lors de cette manifestation réunissant les leaders de la médecine suisse. www.planetesante.ch


in SITU

HEALTH VALLEY

étape n° 3

Sur la route

Lausanne

Dans chaque numéro, «In Vivo» part à la rencontre des acteurs de la Health Valley. Rendez-vous dans les hauts de Lausanne.

Nestlé

Pour une alimentation saine Le Centre de recherche Nestlé mène des études pour améliorer la qualité des produits que nous ingérons. texte: Jade Albasini

Vers-chez-les-Blanc, dans les hauts de Lausanne. C’est dans cette petite commune de quelque 1’100 habitants que se trouve depuis 1987 le siège du Centre de recherche Nestlé (CRN). Trois antennes de cet institut qui mène des recherches sur notre alimentation ont depuis ouvert à Shanghai (Chine), Saint Louis (USA) et Tokyo (Japon). Sa direction tient à ce que la maison mère reste dans la Health Valley. «La densité d’ingénieurs qualifiés et de scientifiques accomplis est unique dans la région lémanique, note Thomas Beck, directeur du CRN depuis 2012. Notre position géographique nous permet de collaborer étroitement avec de nombreux établissements à la pointe des dernières technologies, comme l’ETH Zurich ou l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). La proximité avec les secteurs pharmaceutiques est également une plus-value pour nous.» La mission des 600 collaborateurs du CRN, répartis sur les quatre sites à travers le monde, consiste à améliorer la qualité des produits en réduisant le taux de sucre ou de 12

sel qu’ils contiennent, sans en altérer les saveurs. Ils tentent aussi de saisir les relations complexes qui associent le bien-être et l’alimentation. «Notre santé est directement liée aux ingrédients que nous ingérons, explique Thomas Beck. C’est pourquoi nous menons plusieurs études pour mieux comprendre l’impact des denrées sur l’organisme.» Par année, plus de 200 travaux scientifiques du CRN sont publiés dans des revues médicales. A titre d’exemple, en 2014, les chercheurs de Nestlé ont découvert que le café réduit considérablement la résistance à l’insuline chez les hommes sains. Ils ont également mis en lumière le fait que les enfants qui cuisinent, développent des meilleurs reflexes alimentaires. 76% d’entre eux mangent davantage de légumes verts. Et que la bactérie probiotique Lactobacillus rhamnosus favoriserait la perte de poids chez des sujets féminins. Autre mission du CRN: anticiper les besoins futurs de l’être humain en matière d’alimentation dans le but de prolonger son espérance de vie. /


in SITU

HEALTH VALLEY

benoît dubuis Ingénieur, entrepreneur, président de BioAlps et directeur du site Campus Biotech

L’histoire de la Suisse est une histoire d’intégrations réussies. Il nous faut perpétuer cette tradition. Nestlé a été fondée par le pharmacien d’origine allemande Henri Nestlé; Xavier Givaudan est Français; c’est un binational anglais, Charles E.L. Brown, qui fonda aux côtés de Walter Boveri, natif de Bamberg en Allemagne, la société Brown, Boveri & Cie; et plus récemment, de nombreux industriels à l’image des familles Bertarelli et Mauvernay ont rejoint notre pays pour y créer et développer leurs sociétés.

Intégration et diffusion de savoir Au XVIe siècle, de grands chercheurs en médecine, tels que Paracelse, ou Erasme de Rotterdam, viennent à Bâle et y font imprimer leurs thèses ou traités. La ville participe ainsi au courant humaniste de la Renaissance et à ses progrès scientifiques. Plus près de nous, une clé du succès de la Suisse est sa capacité à innover. Pour cela, nos hautes écoles attirent les meilleurs talents, suisses et étrangers dans un environnement globalisé. Cette ouverture est un atout précieux qu’on peut mesurer, entre autres, par son degré de compétitivité internationale dans le domaine du savoir.

Intégration de connaissances Diderot, dans sa célèbre encyclopédie, disait: «Il y a deux moyens de cultiver les Sciences: l’un d’augmenter la masse des connaissances par des découvertes…; l’autre de rapprocher les découvertes…» Vérité au XVIIIe siècle, nécessité au XXIe. Peu visible pour le grand public et pourtant véritable moteur du changement, l’approche interdisciplinaire constitue notre meilleur atout.

Intégration et valorisation de savoir-faire Notre essor industriel s’est construit autour de générations d’entrepreneurs qui ont franchi nos frontières. Parmi les contributions Intégration des nouvelles trajectoires les plus déterminantes, citons les huguenots de l’innovation qui nous ont apporté la chimie et l’horlogerie. Les processus d’innovation ne sauraient survivre en Fuyant leur pays après la révocation de l’Edit s’appuyant uniquement sur des ressources internes. de Nantes, des négociants en soie firent de Ils doivent répondre au fait que les frontières entre Bâle la capitale du ruban. Le besoin de une organisation et son écosystème tendent à se teintures favorisa l’implantation de l’industrie dématérialiser. La tendance est à l’ouverture, une chimique, qui se diversifia dans la chimie fine démarche qui consiste à aller chercher en dehors puis le domaine pharmaceutique. L’histoire de de l’organisation des connaissances et ressources. l’horlogerie suivit un destin parallèle s’appuyant sur d’habiles artisans qui importèrent en Suisse En résumé, nous ne saurions survivre sans notre le savoir-faire horloger ainsi que des capitaux écosystème. Les collaborations, les échanges nécessaires à son essor. l’enrichissent à chaque instant. La Suisse l’a compris avant tous en prônant intégration et ouverture. Intégration d’entrepreneurs et de valeurs Sachons préserver et développer cet acquis. ⁄ Derrière toute grande innovation, il y a des Hommes. Ici également, En savoir plus www.bioalps.org les exemples d’intégration sont légion. la plateforme des sciences de la vie de Suisse occidentale

à LIRE

DR

Number One: Tome 3 - Next, Les Clefs du savoir, 2014

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in SITU

globe

in situ

autour du globe

Khademhosseini lab

Parce que la recherche ne s’arrête pas aux frontières, In Vivo présente les dernières innovations médicales à travers le monde.

Des vaisseaux sanguins imprimés en 3D  technologie  Les personnes nécessitant une transplantation pourraient bientôt profiter d’une nouvelle avancée en matière d’organes artificiels. Des chercheurs du Khademhosseini Lab à Boston viennent en effet d’annoncer la mise au point des premiers vaisseaux sanguins conçus à l’aide d’une imprimante 3D. «Dans un avenir proche, nous serons capables de développer des tissus créés sur mesure pour les patients ou les tests de nouveaux médicaments» remarque Ali Khademhosseini, directeur du laboratoire en charge du projet.

étude

L’hormone qui rend intelligent L’hormone Klotho améliore la longévité des êtres vivants lorsqu’elle est présente à un niveau élevé dans le corps. Récemment, des chercheurs de l’Université de Californie à San Francisco ont décidé de tester un panel de 700 patients âgés de 52 à 85 ans pour voir si Klotho permettait également de prévenir le vieillissement du cerveau. La réponse est non, mais les performances cognitives des patients présentant un fort taux de l’hormone étaient plus élevées. En d’autres termes, Klotho rendrait intelligent.

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56

C’est le pourcentage de réduction des cas de dengue obtenu grâce à l’utilisation d’un nouveau vaccin, d’après une étude publiée par le laboratoire Sanofi Pasteur. Fruit de plus de vingt ans de travail, le vaccin développé par la compagnie française représente un nouvel espoir dans la lutte contre cette maladie virale qui infecte plus de 100 millions de personnes dans le monde chaque année.


in situ

gLOBE

jeff chiu / associated press

Une pilule qui protège du sida

médicament Truvada est le nom d’une pilule qui, prise quotidiennement, permet de prévenir une infection du virus du sida dans plus de 90% des cas. Disponible depuis 2012 aux Etats-Unis, le médicament devrait être prochainement mis sur le marché au Canada et dans certains pays européens. Pour l’instant, très peu de médecins américains ont prescrit Truvada à leurs patients, notamment en raison d’un manque d’informations sur le produit. Mais aussi en raison des discussions controversées à son sujet, notamment sur les réseaux sociaux. La pilule y est critiquée pour être un médicament favorisant les relations sexuelles non protégées.

io t c

le sé vo la vi Face au risque Pour l’égalité des in épidémique sexes chez les rats Didier Houssin, Odile Jacob, 2014

de laboratoire

Dans son dernier livre, Didier Houssin, professeur de chirurgie à l’Université Paris-Descartes et conseiller de l’OMS, aborde la gestion des grandes épidémies de ces dernières années: le sida dans les années 1980, la vache folle en 1990, le SRAS et les attaques bioterroristes du début des années 2000, puis le chikungunya et la pandémie grippale de 2009. L’auteur retrace les temps forts de ces événements et les réponses qui y ont été apportées, afin d’en tirer les leçons pour la sécurité future des populations.

Chronique de Janine A. Clayton et Francis Collins, «Nature»

Conférence TED par David Sengeh

Chronique de Donna Zulman et Keith Humphreys, «New York Times»

Margaret Chan, Dans son allocution du 19 mai dernier, la directrice générale de l’Organisation mondiale pour la santé a souligné qu’au XXIe siècle, les maladies nontransmissibles étaient devenues l’une des principales causes de mortalité dans le monde. Une situation qui exige un changement de paradigme.

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Une étude américaine a montré que 40% des recherches cliniques excluaient les personnes de plus de 65 ans. Bien des scientifiques invoquent la crainte de complications et de problèmes de santé liés à l’âge qui fausseraient les résultats. Une situation inacceptable selon les chroniqueurs, pour qui les patients participant aux études cliniques devraient être sélectionnés sur d’autres critères que l’âge. Ils estiment que les médecins se trouvent souvent dans le flou par rapport aux effets de certains médicaments sur leurs patients seniors. CHRONIQUES VERS LES .COM LES LIENS AGAZINE M O IV V WWW.IN

Les chroniqueurs demandent un rééquilibrage des sexes chez les rats de laboratoire, majoritairement masculins. Une disparité justifiée par l’idée que les mâles seraient moins soumis aux fluctuations d’hormones. Non seulement il n’en serait rien, mais cette situation a des conséquences négatives pour les femmes. Souffrant davantage des effets secondaires de certains médicaments, elles nécessiteraient des dosages mieux adaptés à leur morphologie.

Le douloureux problème des prothèses artificielles

Jamais trop vieux pour être étudié

«Il faut favoriser la prévention des maladies non-transmissibles.»

n

ET LES

Chercheur au MIT Media Lab à Boston, David Sengeh a grandi au Sierra Leone, dont la guerre civile a fait plus de 8’000 victimes d’amputations. Pour aider les personnes possédant des prothèses inconfortables ou mal adaptées, il a mis au point une prothèse sur mesure imprimable en 3D, grâce à une technologie basée sur l’imagerie par résonance magnétique. Les premiers essais effectués il y a quelques mois sur des vétérans de l’armée américaine se sont montrés concluants.

VIDéOS

SUR


in SITU

Le poisson-zèbre au service de la médecine Capturée à l’aide d’un microscope électronique, cette image montre l’embryon d’un poissonzèbre au quatrième jour de son développement. Pour réaliser ce portrait, le poisson-zèbre a été attaché à un porte-échantillon par la queue et incliné à 65 degrés. Comme les embryons de poisson-zèbre mesurent environ 1 cm de long, une taille trop importante pour être capturée en une seule fois, trois images prises séparément ont été combinées numériquement. L’image en noir et blanc a ensuite été coloriée, de manière à représenter la réflectivité des écailles du poisson. Le poisson-zèbre, Danio rerio, est un poisson d’eau douce tropicale originaire d’Asie de l’Est qui est fréquemment utilisé comme organisme modèle pour étudier la biologie du développement et la neurodégénérescence chez les vertébrés. Annie Cavanagh et David McCarthy / Wellcome Images

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globe


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PERCEPTION

cerveau

méfiez-vous de vos perceptions /

Les recherches récentes mettent à rude épreuve les idées reçues sur nos cinq sens. Des aveugles peuvent «voir» avec les oreilles et des adolescents améliorent leur acuité visuelle grâce aux jeux vidéo. Exploration d’un continent encore largement méconnu, celui de la perception.

/ Par

SERGE MAILLARD, Melinda Marchese et benjamin keller

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P

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PERCEPTION

endant longtemps, le mécanisme de la perception est resté un pur mystère. De quelle manière percevons-nous une information sensorielle? Comment cette information «extérieure» est-elle transmise au cerveau? Puis, comment le cerveau transforme-t-il ces données? Peut-on assimiler sensation et perception? Des questions, complexes, qui sont demeurées durant des millénaires la chasse gardée des philosophes.

(IRM), l’électro-encéphalographie (EEG) ou encore la stimulation magnétique transcrânienne (TMS) lèvent une partie du voile sur les mécanismes de la perception. Et aussi sur les troubles associés, comme la schizophrénie, l’autisme, l’anorexie mentale, la dyslexie ou encore la dyschromatopsie (trouble de la perception des couleurs).

Les découvertes sont surprenantes. «Nous constatons par exemple que le cerveau traite les informations de Dans son traité De l’âme, Aristote a développé la pre- manière beaucoup plus rapide qu’on ne l’imaginait, mière véritable théorie de la perception, un concept explique le Prof. Micah Murray, neuroscientifique qui se distingue pour lui de la simple sensation. spécialiste de la perception au CHUV et à l’Université Le penseur grec «étudie chacun des cinq sens ex- de Lausanne (UNIL). On peut suivre des stimuli sensoriels au millième de seconde.» ternes – vue, ouïe, odorat, goût, Contrairement à l’IRM, qui donne toucher – avant d’introduire une La perception: une image statique, l’EEG est un notion originale et inédite, celle de quoi outil qui fournit des données dyd’un sens commun, irréductible parle-t-on? namiques. «Ainsi, nous sommes aux sens externes et pourtant incapables de retracer en temps réel hérent à leur exercice», rappelle Tout ce que nous ressentons, les informations qui parviennent Michel Nodé-Langlois, professeur via les yeux, les oreilles, la bouche, au cerveau, d’établir par exemple de philosophie au lycée Fermat de la peau ou encore le nez est quelle zone du cerveau perçoit Toulouse, dans la revue Philopsis. perception. Mais elle ne saurait se confondre avec une réalité quelle information en premier.» Pour Aristote, ce sens commun «objective». Car la perception va De son côté, la stimulation magnérecouvre une perception dépasau-delà des sens et est étroitement tique transcrânienne permet sant les fonctions sensorielles exconditionnée par notre cognition: d’«activer» ou de «désactiver» des ternes. Il englobe la conscience de les informations extérieures qui parviennent à nos sens sont fonctions du cerveau et des capacette perception, mais aussi celle «traitées» par des mécanismes qui cités sensorielles. des différents sens. Mais aujourd’hui, tout comme les autres philosophes, Aristote a perdu son monopole sur la notion de perception. Les chercheurs ont investi ce champ de réflexion, et surtout d’expérience. Des outils neuroscientifiques comme l’imagerie par résonance magnétique

leur attribuent une signification. Plus précisément, le processus se base sur la traduction des informations sensorielles en réponses neuronales. Par exemple, la lumière est traduite par les photorécepteurs dans l’œil et les sons par les cellules «ciliées» dans l’oreille. Ces réponses neuronales constituent les bases de la perception. Parfois, des troubles surviennent, qui creusent l’écart entre «réalité» et perception, comme des hallucinations.

voir avec les oreilles En mars 2014, des chercheurs de l’Université hébraïque de Jérusalem ont annoncé une innovation surprenante: la mise au point d’un logiciel permettant aux personnes aveugles de se représenter dans l’espace et de distinguer des formes. Cela grâce à un algorithme qui convertit en musique une image scannée au moyen d’une caméra, 20

Ils ne sont pas les seuls outils high-tech qui permettent de réparer ou d’améliorer nos capacités de perception. Aujourd’hui, des webcams innovantes et des jeux vidéo jouent aussi ce rôle. Et c’est tout un champ inexploré qui s’ouvre pour les chercheurs.

de droite à gauche. Ce nouvel outil offre ainsi aux aveugles la possibilité de «voir», du moins de mieux percevoir leur environnement. Comment est-ce possible? Les aveugles adaptent leur perception. A défaut de la vision, l’ouïe, en particulier, est fortement stimulée. Le logiciel traduit donc l’image en son: les pixels sont représentés par le volume sonore, la géolocalisation par les durées des sons. Des études par IRM ont permis de constater que des aires du cerveau spécialisées dans la vision sont dès lors activées par des


focus

PERCEPTION

«Je vois la musique» Le Français Vincent Mignerot est un synesthète: son cerveau associe spontanément plusieurs perceptions sensorielles. L’étude de ce mystérieux mécanisme neurologique vise à mieux comprendre la gestion de l’information par le cerveau. par melinda

marchese

oram dannreuther

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nfant, Vincent Mignerot ressentait un délicieux goût de prune à chaque fois qu’il prononçait ou entendait le mot «immeuble». Lorsqu’il était malade, il visualisait ses symptômes: la fièvre s’apparentait par exemple à une boule blanche et chaude. Autrement dit, il associait spontanément et inconsciemment plusieurs perceptions sensorielles – le goût à un son ou une douleur à une forme et une couleur. Ce n’est qu’à 20 ans que ce Lyonnais, aujourd’hui âgé de 36 ans, comprend par hasard que ces associations mentales ne sont pas présentes chez chaque être humain. «Au cours de mes études de psychologie, j’ai lu un article qui décrivait un phénomène dont j’ignorais l’existence, que je vivais pourtant moi-même depuis toujours: la synesthésie.» Reconnue scientifiquement depuis le début du XVIIIe siècle, cette faculté neurologique touche 4 à 5% de la population mondiale. Elle se manifeste sous de

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nombreuses formes: certains synesthètes voient la musique, d’autres associent des chiffres à des couleurs ou encore perçoivent des sons lorsqu’ils sentent une odeur. Vincent Mignerot vit six d’entre elles: «Aujourd’hui, j’ai perdu la «lexicale-gustative» (association du mot à un goût), mais j’ai gardé la nociception (association d’une couleur à une douleur). Je vis aussi intensément la synesthésie cognitive: toutes mes pensées se génèrent sous forme de couleurs

et de formes, qui se meuvent dans l’espace, en 3D.» Désormais passionné par ce phénomène, Vincent Mignerot lui consacre un site depuis trois ans (http://synestheorie. fr), qui réunit les dernières études scientifiques sur le sujet. Avec l’aide d’un graphiste, il crée des animations permettant à chaque internaute de «tester» ce que lui-même perçoit au quotidien. «Il ne s’agit absolument pas d’un super pouvoir, ni même d’un handicap, précise le synesthète. Je peux tout à fait ne pas y prêter attention, cela n’a jamais été gênant.» Au-delà du caractère philosophique et artistique de son projet, Vincent Mignerot espère aussi que les recherches sur la synesthésie aboutiront à des avancées scientifiques: «L’imagerie par résonance magnétique (IRM) a déjà pu démontrer que des connexions neuronales spécifiques se produisent chez les synesthètes et que le cerveau humain est capable de multimodalité sensorielle. Tout cela contribue à la compréhension générale et du fonctionnement du cerveau humain.»


PERCEPTION

gabriel numbers

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Art synesthète

DR

L’image ci-dessus représente les jours de la semaine tels que les perçoit l’artiste et synesthète Gabriel Numbers. Son dessin n’est pas organisé chronologiquement car il visualise les jours de la semaine comme étant un espace-temps non-linéaire.

représentations mentales de nombres

Les «cartes de nombres» ci-dessus ont été compilées dans les années 1880 par l’Anglais Francis Galton à partir de dessins réalisés par ses patients. Ce cousin de Charles Darwin fut le premier scientifique à remarquer que certaines personnes associaient les nombres à des représentations visuelles. Le concept de synesthésie était né.

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PERCEPTION

sons. «Même ceux qui sont aveugles depuis la naissance peuvent ainsi percevoir leur environnement, souligne Micah Murray. Selon les critères établis par l’OMS, légalement, ils ne sont plus aveugles!» Coauteure de l’étude, le Dr Ella Striem-Amit en déduit, selon des propos rapportés par Le Figaro, que «la division du cerveau en zones définies par le type d’information sensorielle qu’elles traitent – cortex visuel, cortex auditif – est imprécise. Il semble en fait que cet organe soit organisé en fonction des tâches qu’il accomplit, et non des sens auxquels il est relié.» Des conclusions qui peuvent s’appliquer également aux personnes en bonne santé, suggère Micah Murray. Et d’ajouter: «Tous nos sens interagissent, et les informations provenant des différents sens ne sont pas traitées indépendamment. Ces processus «multi-sensoriels» sont en train de remodeler notre compréhension de la perception, et donc des troubles qui peuvent apparaître.» Pour parvenir à une perception des formes environnantes, les aveugles doivent d’abord apprendre les codes du logiciel. Lors des expériences menées par les scientifiques israéliens, les participants ont pu progressivement améliorer leur perception des formes qui les entourent, au fil des écoutes. La maîtrise de ce nouveau langage requiert des dizaines d’ heures d’entraînement. Toujours en mars de cette année, un artiste britannique souffrant d’«achromatopsie» (il ne voit qu’en noir en blanc) a déclaré s’être fait implanter dans le cerveau une sorte de «prothèse auditive» reliée à une caméra. Celle-ci analyse les fréquences des couleurs et les traduit en vibrations sonores. Neil Harbisson

affirme ainsi être en mesure de percevoir à nouveau les couleurs. Et se revendique même comme le premier «eyeborg» au monde!

Les pouvoirs des jeux vidéo Et si les jeux vidéo, honnis par de nombreux parents, n’étaient pas si néfastes pour leur progéniture? Des études récentes montrent que, dans certaines conditions, ils peuvent s’avérer bénéfiques pour les capacités de perception de leurs adeptes. «Lors de nos études, nous avons constaté des effets positifs sur l’acuité visuelle et la sensibilité au contraste chez les participants qui jouent régulièrement aux jeux vidéo, c’est-à-dire plus de cinq heures par semaine», indique Daphné Bavelier, à l’Université de Genève. Mais les opus disponibles sur le marché ne provoquent pas tous de tels effets: «Nous les avons observés dans des jeux de tir, les «first-person ou third-person shooter» en anglais, durant lesquels le joueur doit à la fois viser et détruire ses ennemis, et en même temps garder un œil sur tout ce qui se passe autour de lui. Dans ces conditions, il doit prendre des décisions très rapidement, en continuant à évaluer les différentes actions à venir. Le contrôle attentionnel est accru.» La chercheuse explique qu’il est aussi bénéfique pour la perception de devoir distribuer son attention sur l’écran («attention divisée») et de constamment réévaluer ce qui est important, pour mieux anticiper les situations. «Jouer vingt à quarante minutes par jour

Lexique Schizophrénie La schizophrénie est une maladie psychique qui se distingue par un repli sur soi et une perte de contact avec la réalité. Dans sa phase aiguë, cette psychose provoque des hallucinations auditives qui peuvent être très troublantes. Les facteurs liés à l’apparition de la schizophrénie sont multiples: sociaux, psychologiques ou génétiques. Mais les causes de la maladie restent encore largement incomprises.

Achromatopsie Cette maladie rare empêche la distinction des couleurs, la vision de la personne atteinte se faisant alors en nuances de gris. D’origine congénitale ou acquise suite à une lésion cérébrale, la pathologie s’accompagne par ailleurs d’une acuité visuelle réduite, de nystagmus (mouvement d’oscillation involontaire du globe oculaire) et de photophobie (aversion à la lumière).

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Autisme Les troubles du spectre autistique se caractérisent par une interaction sociale et une communication anormale. Les symptômes sont généralement remarqués par les parents durant les deux premières années de vie de l’enfant. L’origine des troubles autistiques peut être génétique ou environnementale, mais son étiologie exacte demeure sujette à controverse.

Anorexie mentale Ce trouble psychique, à ne pas confondre avec la perte d’appétit liée à une autre pathologie, se manifeste par une préoccupation exagérée de l’apparence physique, ce qui entraîne des restrictions alimentaires pouvant s’avérer mortelles. L’anorexie mentale, touche principalement les jeunes femmes, qui peuvent se percevoir comme étant en surpoids sans que ce soit vraiment le cas.


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PERCEPTION

sur plusieurs semaines est suffisant pour ressentir les premiers effets positifs sur les capacités de perception.» La thérapie par les jeux vidéo permet de lutter contre les troubles de la vision, mais pourrait aussi aider des patients atteints de pathologies comme la schizophrénie, la dépression ou encore le déficit de l’attention. Pour l’heure, les effets les plus concrets restent limités à la vision: «Certains patients ont déjà guéri de l’amblyopie grâce aux jeux vidéo. Cette pathologie, qui se déclare à l’enfance, rend un des deux yeux «paresseux», ce qui annule la vision de la profondeur.» Les

jeux vidéo mettent ainsi à mal une théorie dominante depuis les années 1970, selon laquelle une période «sensible» de développement de la vision survient durant la jeunesse, avant de s’interrompre. «En réalité, nous pouvons rattraper ces capacités plus tard, si nous stimulons de manière appropriée le cortex visuel.» Mais les jeux vidéo thérapeutiques ne s’adressent pas qu’aux personnes souffrant de troubles de la perception, loin de là. «On trouve également tout un pan éducatif à notre projet. Grâce aux jeux vidéo, chacun de nous est capable d’augmenter la précision de son système visuel, mais aussi sa capacité à discerner des

Modifier sa perception de la douleur par marie-adèle copin

des phobies, à se libérer d’une dépendance ou à traiter une allergie par exemple.

L’hypnose permet d’apaiser les douleurs aiguës. Les explications de Maryse Davadant, infirmière spécialisée en soins intensifs.

philippe gétaz

Un homme de 71 ans est opéré à cœur ouvert sans anesthésie générale. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, il n’a subi qu’une anesthésie locale et a supporté l’opération, éveillé. Il était sous hypnose. Cela s’est passé en 2007, à la clinique du Sacré-Cœur de Roulers, en Belgique. Malgré les croyances populaires, les scientifiques sont formels: l’hypnose n’a rien d’ésotérique. C’est un outil thérapeutique efficace pour aider les patients à affronter

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Le CHUV utilise l’hypnose pour apaiser les patients qui souffrent de douleurs aiguës, comme les grands brûlés ou les personnes greffées. «Je voyais à une époque un jeune patient brûlé aux deux jambes, raconte Maryse Davadant, infirmière du CHUV spécialisée en soins intensifs et en hypnose. Je lui ai demandé de décortiquer cette douleur. Il m’a dit avoir l’impression que des flammes de chalumeaux le brûlaient. Je lui ai donc proposé de baisser mentalement l’intensité de ces flammes. Cela n’a pas fonctionné, mais il a spontanément imaginé des plaques de glace sur les chalumeaux, ce qui lui a permis de se sentir mieux.» Cette première étape de «décortication» est indispensable, selon l’infirmière. «Lorsque la personne éprouve des douleurs aiguës, on ne peut pas lui proposer tout de suite de s’évader mentalement car la souffrance est trop forte.» En réalité, le patient se trouve déjà sous hypnose, envahi par ce qu’il ressent physiquement. C’est en jouant sur les métaphores que Maryse Davadant parvient à le soulager. L’utilisation de métaphores se poursuit durant les soins. «Le changement de pansements, c’est-à-dire le nettoyage des plaies, est très pénible pour un grand brûlé. Le corps est à vif.» La

personne est emmenée mentalement dans un lieu où elle se sent en sécurité, de façon à focaliser son attention. L’infirmière fait des suggestions qui permettent au patient de vivre autre chose que sa situation présente. «Je sais quelle étape du soin va être difficile. Je vais donc intégrer la douleur dans les images. S’il choisit d’être dans une rivière, je vais lui dire, par exemple, qu’il s’érafle légèrement contre des pierres.» Contrairement aux a priori, les personnes sous hypnose se trouvent en total contrôle de leur corps. Elles sont même extrêmement concentrées. «Il s’agit d’un état de conscience modifiée.» Les neurosciences ont prouvé que certaines parties du cerveau s’activent avec l’hypnose. «Lorsque le patient s’imagine dans une forêt et qu’il sent des champignons, l’imagerie médicale montre que la zone olfactive du cerveau est stimulée. Ce qui signifie que le patient vit l’expérience d’être dans les bois.» Cet état de conscience modifie le ressenti du patient, sa perception de la douleur, et lui permet de l’éprouver de façon acceptable. L’hypnose rend aussi le malade plus autonome. «L’idée consiste à apprendre l’autohypnose, souligne Maryse Davadant. Le patient comprend qu’il agit pour lui. Il ne subit plus son traitement et devient acteur de sa prise en charge.»


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PERCEPTION

objets dans son champ de vision. On intègre plus rapidement toutes ces informations.» Daphné Bavelier collabore avec des sociétés d’édition de jeux vidéo pour mener ses études. Mais créer un jeu vidéo adapté aux patients coûte cher et se révèle être un long processus: «Une grande partie de notre travail consiste à créer des niveaux faciles. Certains de nos patients ont 85 ans!»

Meilleurs diagnostics de la schizophrénie

En étendant les investigations sur l’état de la vision ou l’ouïe des patients, la découverte permet un meilleur diagnostic de la schizophrénie. La maladie, qui touche environ une personne sur 100, se manifeste généralement au début de l’âge adulte. «Jusqu’à présent, le diagnostic de la schizophrénie était basé sur des critères largement subjectifs: les psychiatres sont obligés de compter sur l’ honnêteté des té­ moignages des patients et de leurs proches, précise Micah Murray. Après tout, on ne peut pas encore faire des tests sanguins pour diagnostiquer cette pathologie!»

Dans la série télévisuelle américaine Perception, le protagoniste est un neuroscientifique de talent, atteint de schizophrénie paranoïde. Une pathologie dont il fait paradoxalement un atout: il est engagé par le FBI comme consultant, car ses hallucinations l’aident à résoudre des enquêtes. Si les ressorts de la série n’ont pas une grande valeur scientifique, elles ont le mérite de mettre en lumière cette maladie complexe.

Selon le spécialiste, l’IRM et l’EEG permettent désormais d’établir un «facteur de risque» supplémentaire liant troubles sensoriels et schizophrénie. Et d’aboutir ainsi à un diagnostic plus solide. Cette évolution n’est toutefois pas encore enracinée dans la pratique clinique: «L’emploi de l’EEG et l’IRM dans le diagnostic de la schizophrénie va se propager dans les cinq prochaines années dans les hôpitaux, prédit Micah Murray. Ces outils pourraient également entraîner un impact bénéfique sur le traitement de la pathologie, en aboutissant à un meilleur pronostic du fonctionnement d’une thérapie, par l’évaluation de ses effets sur les capacités sensorielles.»

«Les gens pensent que la schizophrénie est un trouble purement cognitif, explique Micah Murray. En réalité, nous avons découvert, grâce au soutien du Fonds national suisse et du Pôle de recherche national SYNAPSY, que cette pathologie recouvre aussi des troubles auditifs et visuels. Mais il reste difficile de distinguer la cause de l’effet. Les hallucinations surviennent-elles en raison des troubles de la vision, ou mènent-elles à l’inverse à des troubles de la vision? Autrement dit, le problème se situe-t-il d’abord dans l’œil ou dans le cerveau?»

D’autres pathologies devraient également être mieux diagnostiquées et traitées via des tests accrus par EEG. A titre d’exemple, Micah Murray donne celui de la dysphasie, un trouble du langage: «Des tests sur la rapidité du traitement de l’information par le cerveau peuvent servir à établir s’il y a pathologie ou non et si, par exemple, un enfant va gagner en perception via une rééducation ou une autre. Dans le cas de la dysphasie, on évalue la capacité à discerner les sons /ba/ et /ga/ pour prédire la pathologie chez un enfant.» /

Daltonisme Ce terme signale une affection congénitale de la vue qui empêche de discerner certaines couleurs, notamment le rouge et le vert. C’est le chimiste anglais John Dalton, lui-même affecté, qui décrivit pour la première fois cette pathologie en 1798. Le daltonisme touche entre 2 et 8% de la population, avec une prévalence bien plus importante chez les hommes que chez les femmes.

Dyslexie Il s’agit d’une affection liée à la lecture qui peut être acquise suite à une lésion cérébrale, ou apparaître comme un trouble développemental au moment de l’apprentissage chez l’enfant. La dyslexie s’exprime différemment suivant l’environnement linguistique, selon qu’il s’agisse d’une langue transparente (italien, espagnol) ou opaque (français, anglais).

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Amblyopie Venant du grec ancien amblús («obtus») et ópsis («vue»), l’amblyopie désigne une acuité visuelle affaiblie qui annule la vision de la profondeur. Pouvant toucher l’un ou l’autre œil, voire les deux, cette affection peut être fonctionnelle (liée à un problème d’apprentissage de la fonction visuelle) ou organique (liée à une lésion organique curable ou non).

Dysphasie La dysphasie – «mauvais langage» – indique un trouble lié à l’apprentissage et au développement du langage oral. La dysphasie peut toucher l’expression, la compréhension ou les deux à la fois. La pathologie se caractérise par une production verbale mal structurée et un champ lexical appauvri, entraînant troubles scolaires et handicaps dans la vie courante.


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PERCEPTION

Quand nos sens nous jouent des tours Certains phénomènes bouleversent complètement notre perception de ce que l’on voit, entend ou ressent. Exemples d’illusions optiques, visuelles et gustatives à tester.

Grille d’HermanN

Illusion du mur de café

Cette illusion d’optique fait apparaître des droites parallèles comme des courbes. Les colonnes de carreaux sombres et clairs sont légèrement décalées à chaque rang, formant une ondulation. Pour que l’illusion fonctionne, il est nécessaire que chaque brique soit entourée d’un mortier d’une teinte intermédiaire à celle des carreaux. Elle fut décrite pour la première fois par le docteur Richard Gregory, après qu’il eut observé ce curieux effet sur le mur extérieur d’un café de Bristol.

Découverte il y a plus d’un siècle, l’illusion de la grille d’Hermann provoque l’apparition de taches grises entre les carrés noirs. L’effet est obtenu à cause d’une fonction de l’œil appelée inhibition latérale rétinienne, qui augmente le contraste entre les zones éclairées et les zones sombres.

Effet McGurk

Effet phi

couleurs et alimentation

Cet effet se produit lorsque nos yeux disent à nos oreilles ce qu’elles doivent entendre: si vous regardez une personne chuchotant consécutivement une syllabe de type «VA», mais qu’une bande-son prononce «BA» vous entendrez probablement «VA». Il s’agit de l’un des premiers exemples d’interaction sensorielle décrit par le psychologue britannique Harry McGurk en 1976.

A chaque fois que vous visionnez un film, l’effet phi se produit: les images sont projetées les unes après les autres, mais vous ne percevez pas qu’il s’agit d’images fixes et séparées. Cela s’explique par un mécanisme neuronal: lorsque la rétine voit une image, le cerveau persiste à la retenir en mémoire pendant une mini-fraction de seconde. Il suffit alors que l’œil voie pendant ce temps une deuxième image légèrement différente pour que le cerveau la rattache automatiquement à la première qui reste en mémoire. C’est ainsi que la perception de mouvement se produit.

Selon des chercheurs de l’Université d’Oxford, utiliser des couverts de couleur rouge découragerait la consommation d’un aliment. «Le rouge pourrait être utilisé pour présenter de la nourriture aux gens qui doivent rationner leur alimentation, mais certainement pas pour ceux dont le poids est trop faible», rapporte l’étude publiée dans la revue Flavour en juin 2013.

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Effet Troxler

Fixez le point central de l’image. Au bout de quelques secondes, le cercle alentour semble s’évanouir. C’est l’effet Troxler, du nom du physicien suisse Ignaz Paul Vital Troxler, né au XVIIIe siècle. L’explication à cette illusion est à chercher du côté de la rétine. Ce tissu nerveux situé au fond de l’œil capte les signaux lumineux par ses cellules photoréceptrices (cônes, bâtonnets) et les communique au nerf optique, qui les transmet ensuite au cortex visuel. Le cerveau interprète alors l’influx nerveux pour «construire» la vision.

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perception

Les photorécepteurs signalent toujours un changement. Pour les stimuler, l’œil bouge donc en permanence, de manière imperceptible, avec des oscillations parfois extrêmement rapides. «Si les récepteurs cessent d’être stimulés et que l’image est stabilisée sur la rétine, elle disparaît complètement», indique Daniel Kiper, chercheur à l’Institut de neuroinformatique de l’Université et de l’ETH Zurich. Or, la périphérie de la rétine a besoin de fluctuations plus importantes que le centre pour être activée, d’où l’effet Troxler: «Lors de la fixation du point, l’amplitude des mouve-

ments oculaires diminue et n’est plus suffisante pour stimuler les récepteurs périphériques et faire passer l’image du cercle jusqu’au cerveau.» Daniel Kiper souligne que le cortex agit, lui, au moment où le cercle est remplacé par la couleur du fond: «Comme le cerveau ne reçoit plus d’information en provenance de la rétine, il comble les vides avec ce qui se trouve sur le reste de l’image.» Comment? «On ne sait pas, c’est très mystérieux.» A noter que plus le cercle alentour est fin, faiblement contrasté, flou et distant du point de fixation, plus l’effet Troxler est renforcé.


focus

PERCEPTION

INTERVIEW «Nous devons mieux prêter attention à la manière dont les patients perçoivent le monde»

propos recueillis par

Erik Freudenreich

Daniel Javitt s’intéresse de longue date au fonctionnement du cerveau. L’unité qu’il dirige à l’université Columbia étudie notamment les effets de la glycine pour contrer certains troubles de la perception.

Est-il exact que l’un de vos axes de recherche principaux porte sur la perception?

Pourquoi vous êtes-vous penché sur la pathologie schizophrénique?

in vivo

iv

daniel javitt Je m’intéresse à la perception avant tout du point de vue de la schizophrénie. Mon travail est basé sur ce que l’on appelle les récepteurs N-méthyl-D-aspartate (NMDA), qui se trouvent entre autres au niveau des cortex visuels et auditifs. Nos études mettent en évidence un disfonctionnement de ces récepteurs en lien avec certains troubles de la perception comme la schizophrénie. Les personnes affectées expliquent souvent que le monde leur apparaît comme brisé en mille morceaux, que les choses vont trop vite. Pendant longtemps, les chercheurs et les psychiatres ont ignoré ces remarques, car ils pensaient que la psychose schizophrénique impliquait uniquement le cortex frontal et les récepteurs de la dopamine. Mais une fois que l’on fait le lien entre la pathologie et les récepteurs NMDA, les remarques des malades deviennent logiques. De manière générale, nous ne prêtons pas assez d’attention à la manière dont un patient souffrant de troubles mentaux perçoit son environnement.

dj A l’époque où je terminais mes études de médecine, les Etats-Unis connaissaient de graves problèmes avec le PCP, une drogue synthétique qui est devenue le sujet de ma thèse de doctorat. Curieusement, les personnes sous l’effet de ce produit affichent les mêmes symptômes que les patients atteints de schizophrénie. Le fait de pouvoir reproduire les effets de la schizophrénie en prenant une substance chimique signifiait qu’il y avait un problème très basique derrière la pathologie. Nous avons par la suite pu identifier un disfonctionnement en lien avec les récepteurs NMDA, qui sont essentiels à le mémoire et aux connections neuronales. D’où l’idée qu’en stimulant ces récepteurs, notamment à l’aide de glycine, nous pourrions traiter les troubles schizophréniques.

Un spécialiste de la schizophrénie Diplômé en neurosciences et en psychiatrie, l’Américain Daniel C. Javitt est à la pointe de la recherche mondiale concernant de nouveaux traitements contre les troubles mentaux graves. Il dirige la division de thérapie expérimentale au sein du département de psychiatrie de l’université Columbia à New York. Il est par ailleurs le directeur de recherche en matière de schizophrénie de l’institut Nathan Kline, également basé à New York. 28

iv Les personnes souffrant de schizophrénie peuvent être victimes d’hallucinations auditives. Pour quelle raison? dj Il faut retourner la question.

Pourquoi les personnes saines n’ont-elles pas d’hallucinations en temps normal? Car si vous prenez un sujet qui n’est pas schizophrène et que vous le placez dans un containeur étanche qui élimine tous les sons, il va aussi commencer à entendre des hallucinations. En fait, c’est le flux constant d’informations venant de l’extérieur qui nous permet de ne pas sombrer dans nos pensées et d’entendre ces voix. Ce qui est intéressant, c’est qu’en analysant l’imagerie cérébrale d’une personne schizophrène lors d’une hallucination auditive, vous allez voir s’activer les régions du cerveau qui ont trait au langage. Il ne s’agit pas seulement d’un problème cognitif, mais également sensoriel. Le cerveau d’un schizophrène réagit comme s’il percevait véritablement des voix.


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PERCEPTION

Qu’en est-il des illusions d’optique?

iv

dj C’est une question que nous étudions depuis longtemps. En effet, ces illusions provoquent différentes réactions au sein du cerveau. Une partie de nos patients réagit normalement, mais d’autres se montrent très sensibles à certains effets d’optique. L’illusion dite de la grille d’Hermann est celle qui leur pose le plus de problèmes (voir p. 26, ndlr). Normalement, vous êtes sensé voir apparaître des points gris entre les lignes de la grille, car votre cerveau essaye de coller ensemble les pièces du puzzle. Ce n’est pas le cas chez certains schizophrènes. Car les interconnexions neuronales qui permettent de voir ces points ne sont pas opérationnelles. Leur perception de la grille correspond pour ainsi dire à la réalité.

Combien d’années nous séparent d’une bonne compréhension de notre cerveau?

dj Nous ne pourrons jamais Daniel Javitt est totalement comprendre son à la pointe de la fonctionnement. Mais nous recherche mondiale possédons aujourd’hui déjà en matière de de nombreux d’outils qui nous nouveaux traitements permettent d’analyser et de contre les troubles mesurer bien des fonctionnalimentaux graves. tés importantes. Prenez mon travail ou celui de mon collègue lausannois Micah Murray sur ce que l’on appelle la négativité de discordance. Il s’agit-là d’une onde qui traduit un changement Notre défi consiste à permettre aux patients de stimulus dans le cerveau. Par exemple, si d’activer les automatismes dont ils ne disposent vous habitez à la campagne, vous allez automapas actuellement. Un aspect important lié aux tiquement faire attention au fait que les oiseaux récepteurs NMDA qui fait souvent défaut aux s’arrêtent soudainement de chanter. C’est une schizophrènes, concerne par exemple la maîtrise fonction codée dans notre cerveau très imporde la lecture. Si nous arrivons à réparer cette tante pour la survie dans un environnement carence, notamment grâce aux traitements à hostile. Nous avons pu démontrer que cette base de glycine que nous étudions en ce moment, fonctionnalité est produite par les récepteurs nous aurons fait un grand pas pour redonner NMDA au niveau du cortex auditif. une vie sociale et professionnelle aux patients. ⁄ 29

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iv


«Nous vivons dans un monde fondé sur un modèle masculin. Une plus grande diversité de profils, et surtout davantage de femmes, au sein de la profession médicale et parmi les chercheurs aurait sûrement pour effet de changer la donne.» PAULA JOHNSON

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Boston Globe via Getty Images

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INTERVIEW

Paula Johnson Les femmes ne sont pas suffisamment incluses

dans les essais cliniques. Paula Johnson, spécialiste de la santé féminine reconnue internationalement, estime que cela les défavorise lors de leur prise en charge. interview: Julie Zaugg

«Il faut améliorer la compréhension des différences entre les deux sexes» cardio-vasculaires provoquent comme Les hommes et les femmes ne sont pas affectés de la même symptôme une oppression de la poitrine manière par les maladies. Certaines sont même réservées chez les deux sexes, mais les femmes ont aux femmes. Professeure de médecine à la Harvard Medical bien plus de risques d’éprouver également de School (USA) et directrice du Centre Connors, qui étudie l’essoufflement ou de la gêne dans l’abdomen la biologie des genres, Paula Johnson explique pourquoi la supérieur. Comme on a moins étudié ces malamédecine ne peut pas ignorer ces différences. dies chez les femmes, ce dernier symptôme est souvent confondu avec un trouble de la vésicule IN VIVO En quoi les hommes et les femmes sont-ils difbiliaire, ce qui peut mener à un diagnostic erroné. férents face à la maladie? PAULA JOHNSON Le sexe est une construction génétique: il existe des différences fondamentales entre les hommes et les femmes au IV Au-delà de ces différences génétiques, les niveau de leurs gènes. Lorsque ces divergences sont hommes et les femmes réagissent-ils aussi autrecumulées à l’influence de nos hormones, de notre enviment à leur environnement? PJ Bien sûr. Le stress ronnement et de notre genre – soit les rôles, comportouche, par exemple, beaucoup plus les femmes que tements et attitudes que la société attribue à chaque les hommes. Il existe un syndrome, appelé «cœur sexe –, cela débouche sur une expression différenciée brisé», qui survient lorsqu’on vit un événement traude la maladie chez les hommes et les femmes. matique, comme la perte subite d’un être cher ou un changement majeur dans son environnement physique suite à un tremblement de terre, et qui provoque un IV Pouvez-vous nous donner un exemple disfonctionnement du muscle cardiaque. Or, la vaste d’une maladie qui affecte différemment les majorité des patients qui contractent ce syndrome sont deux sexes? PJ Les femmes diabétiques ont des femmes d’âge moyen. Il n’y a presque pas d’hommes. beaucoup plus de risques de développer de Les deux sexes ne sont pas non plus égaux face à l’obésité. l’hypertension que les hommes souffrant Les zones du cerveau liées au désir de nourriture ne sont pas de cette affection. De même, les maladies

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les mêmes chez les hommes et les femmes. Une étude vient de démontrer que lorsque les femmes se retrouvent dans un contexte violent, leur risque d’obésité augmente, ce qui n’est pas le cas chez les hommes. IV Existe-t-il carrément des maladies réservées aux femmes? PJ Oui, la lymphangioléiomyomatose (LAM), une maladie rare

«Les médecins doivent se souvenir qu’il existe des différences entre les sexes.»

qui provoque un dérèglement des cellules pulmonaires et finit par détruire cet organe, n’affecte que les femmes. Elle n’est souvent diagnostiquée que très tardivement, lorsqu’il est déjà trop tard, car les médecins ne pensent pas à tester leurs patientes pour voir si elles ont cette affection. De même, la plupart des maladies auto-immunes, comme la sclérose en plaques, le lupus ou l’arthrite rhumatoïde, sont beausonger à utiliser ces méthodes. Ils doivent se soucoup plus fréquentes chez les femmes. Lorsqu’un homme venir qu’il existe des différences entre les sexes. contracte l’une de ces affections, les conséquences sont en revanche bien plus mortelles pour lui. IV Et lorsqu’un médecin soigne un patient, doitil penser à lui prescrire un traitement différent IV Face à ces divergences, faut-il prévoir des méen fonction de son sexe? PJ Cela vaut la peine d’y thodes de diagnostic différenciées entre hommes et femmes? PJ Pour certaines maladies, oui. Lorsqu’on songer. Souvenez-vous de cette étude parue au début des années 1990 qui préconisait la prise d’une aspirine applique un cathétérisme cardiaque, le test standard par jour pour prévenir les crises cardiaques. Eh bien, utilisé pour détecter une maladie cardio-vasculaire, à elle était fondée sur une cohorte de patients exclusiveune femme, le résultat est souvent négatif. Cet exament mâles. Lorsqu’on a finalement testé cette hypomen, qui consiste à observer la circulation sanguine thèse chez les femmes, il y a un peu plus de huit ans, et la pression dans le cœur et les vaisseaux au moyen on s’est rendu compte que l’aspirine ne faisait de l’effet d’une sonde et d’un produit contrastant, permet qu’aux patientes de plus de 55 ans et permettait de préde repérer la formation d’un blocage des artères venir les attaques cérébrales, pas les crises cardiaques. lorsqu’il est très visible, ce qui est en général le cas chez l’homme. Chez les femmes, en revanche, il Autre exemple: il y a quelques années, on s’est mis à ne parvient pas à détecter la plaque qui est répartester une thérapie contre le cancer du poumon qui s’en tie de façon plus uniforme et diffuse le long des prenait aux mutations génétiques présentes à la surface vaisseaux sanguins. Il arrive donc fréquemment des cellules cancéreuses. Initialement, les résultats ne qu’on renvoie une femme chez elle en lui disant semblaient pas très prometteurs. Mais en y regardant qu’elle est en bonne santé, alors qu’elle souffre de plus près, on s’est rendu compte que ce traitement d’une maladie cardio-vasculaire. fonctionnait très bien auprès d’une majorité de femmes (82%). En fait, on a constaté que les mutations génétiques IV Que faire alors? PJ Nous disposons d’outils qu’il ciblait n’existent pratiquement que chez les femmes. de diagnostic mieux adaptés aux particulaIl s’agit d’une découverte cruciale, qui favorise l’élaboration rismes des maladies cardio-vasculaires chez les de traitements personnalisés en fonction du sexe. femmes: une échographie intravasculaire ou une FFR (fractional flow reserve), qui permet de mesurer le flux dans les artères, seraient IV Comment faire pour que ce genre de succès ne reste plus à même de repérer une présence dispas un cas isolé? PJ On doit améliorer la compréhension des crète de plaque dans les vaisseaux sanguins. différences entre hommes et femmes. Vous savez, il a fallu atMais, encore une fois, les médecins doivent tendre l’adoption d’une loi en 1993 pour que les femmes soient

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même incluses dans les études cliniques aux IV Concrètement, comment faire pour changer les choses? Etats-Unis. Les premières informations dont PJ Les journaux scientifiques pourraient adopter comme prénous disposons sur leurs réactions face à la requis l’obligation pour les chercheurs de systématiquement maladie ne datent que d’une vingtaine d’anrapporter leurs résultats par sexe. On pourrait aussi imaginer nées. Souvent, on sait que les femmes vivent la la création d’un label qui permette de voir en un coup d’œil maladie différemment, comme dans le cas des si un médicament ou un appareil médical a pris en compte affections cardio-vasculaires, mais on ne sait la dimension du sexe lors de son élaboration et a été testé à pas pourquoi. Il faut s’assurer que les femmes la fois sur les hommes et les femmes. Enfin, on doit absolusoient systématiquement incluses dans les esment inclure ce qu’on sait déjà dans la formation des médesais cliniques – tout comme les animaux de sexe cins. Cela permettra de briser le cycle. féminin dans la phase pré-clinique – et que les résultats soient rapportés en tenant compte du IV Les patientes peuvent-elles faire quelque chose? PJ Elles sexe, ce qui n’est pas toujours le cas. Aujourd’hui doivent systématiquement poser des questions autour du encore, seuls 33% des participants aux études sur sexe à leur médecin. Lorsqu’il leur prescrit un traitement, les maladies cardio-vasculaires sont des femmes. elles doivent lui demander: «Va-t-il m’affecter différemDe même, en neuroscience, 66% des études précliment parce que je suis une femme?»; «A-t-il été testé sur niques sont réalisées uniquement sur des animaux les femmes?» Cela obligera les praticiens à se pencher sur mâles ou dont le sexe n’a pas été rapporté. la question et à partir en quête de réponses. Cela peut faire bouger les choses dans la bonne direction. IV Comment expliquer ces déficiences? PJ Suite à certains scandales atroces, comme celui de la IV Ce manque de prise en considération est-il limité Thalidomide (un médicament utilisé dans aux femmes? PJ Non, on observe à peu près le les années 1950 et 1960 comme anti-naumême phénomène avec les minorités raciales, séeux chez les femmes enceintes qui provo- BIOGRAPHIE qui sont également affectées de façon difféquait de graves malformations congénitales, Pionnière de la renciée par la maladie et souvent exclues des médecine centrée ndlr), on a longtemps voulu éviter à tout prix essais cliniques. On sait, par exemple, que sur les femmes, d’inclure dans des essais cliniques des per- notamment dans les fumeurs afro-américains développent un sonnes qui pourraient être enceintes. Mais ce le domaine des cancer du poumon plus rapidement que les n’est pas l’unique raison: nous vivons dans un maladies cardioblancs, mais on ne sait pas pourquoi. Il y a vasculaires, monde fondé sur un modèle masculin. Une aussi un effet cumulatif: les femmes afroPaula Johnson a plus grande diversité de profils, et surtout plusieurs cordes américaines sont le groupe de la population davantage de femmes, au sein de la profes- à son arc. Elle qui a le plus de risques de développer une masion médicale et parmi les chercheurs aurait enseigne la méde- ladie cardio-vasculaire et d’en mourir jeunes. cine à Harvard, sûrement pour effet de changer la donne. dirige le Centre IV Au final, cela ne nous mène-t-il pas vers Connors, consacré à la biologie de une médecine toujours plus personnaliIV Ces inégalités se retrouvent-elles sur le plan financier? PJ Oui. La recherche sur les genre, et se trouve sée? PJ Tout à fait. Plus on intègre ces divers à la tête de la divimaladies féminines ou qui touchent davanparamètres – le sexe, l’ethnicité – dans la sion chargée de tage les femmes est souvent sous-finan- la santé féminine recherche médicale, et plus on peut dévelopcée. Le cancer du poumon reçoit très peu au Brigham per des solutions de diagnostic, des thérad’argent. Or, il tue davantage de femmes and Women’s pies et des méthodes de prévention adaptées Hospital, à aux Etats-Unis que les cancers des ovaires, aux spécificités de chacun. Cela ne profite Boston. Cette de l’utérus ou du sein cumulés. Les femmes chercheuse de d’ailleurs pas qu’aux femmes ou aux minorinon fumeuses ont aussi trois fois plus de 54 ans a aupatés. Les hommes aussi bénéficieraient d’une risques de le contracter que les hommes ravant travaillé prise en charge médicale davantage fondée durant près de non-fumeurs. sur leurs particularismes biologiques. / vingt-cinq ans dans divers départements de cet établissement, comme le service des transplantations cardiaques ou du contrôle de la qualité.

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La mort, une réflexion à vivre Gian Domenico Borasio, publie «Mourir», un livre clair et étonnamment anxiolytique. Avec cette proposition tentante: bien penser à sa mort, c’est peutêtre mieux songer à sa vie.

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texte: Béatrice Schaad

n matière de fin de vie, il y aurait donc trois règles: parler, parler et parler. Evoquer la mort avec ses proches et avant tout avec soi-même, c’est l’invitation iconoclaste que formule Gian Domenico Borasio, professeur titulaire de la chaire de médecine palliative de l’UNIL et chef du service de soins palliatifs du CHUV, avec son livre Mourir qui sort en français après avoir occupé la tête des ventes en librairie en Allemagne où près de 150’000 personnes auront cédé à cette tentation apparemment paradoxale de penser à la mort de leur vivant. Une activité qui, il faut bien le reconnaître, peut faire l’objet d’une certaine procrastination et de multiples tentatives d’esquive. Ainsi, comme l’écrit Gian Domenico Borasio, «si nos connaissances sur le commencement de la vie sont multiples et précises, la mort, elle, reste un domaine encore largement inexploré (…). Si l’on sélectionne la rubrique «mort» dans l’index d’un manuel de physiologie, on trouve des informations, mais seule-

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ment sur la mort de cellules individuelles, celle de parties de tissus ou éventuellement celles d’organes.» L’auteur construit son ouvrage sur des questions qui n’ont de simple que l’apparence: pourquoi mourrons-nous? demande-t-il ainsi en passant en revue les différentes étapes caractéristiques de la mort pulmonaire ou de celle liée au cerveau; où mourrons-nous? En EMS, à l’hôpital, à la maison? Mais surtout de quoi avons-nous besoin au moment de mourir? Il évoque premièrement ce «lubrifiant» qu’est la communication entre le médecin et son patient «indispensable à tout

accompagnement réussi» d’une fin de vie. Sur un mode enlevé, Gian Domenico Borasio n’hésite pas à préciser que «les médecins prouvent malheureusement assez souvent» qu’il est plus facile de mal communiquer que de dépasser les peurs et les difficultés d’aborder le sujet. Il milite pour un enseignement différent de la médecine, moins strictement orienté sur ses développements technologiques mais aussi sur des


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dimensions plus sensibles, comme les émotions suscitées par l’accompagnement de patients en fin de vie. Il étudie la communication au sens large, en famille ou entre spécialistes, n’épargnant pas sa propre profession toujours sur un mode élégant mais direct, assaisonné d’une pointe d’humour: un lubrifiant, un de plus. «Vous avez travaillé en équipe? Montrez-moi vos cicatrices», cite-t-il en évoquant les collaborations parfois houleuses entre les différents professionnels qui se retrouvent au chevet d’un mourant. Gian Domenico Borasio décrit nombre d’autres besoins du patient et de ses proches face à la finitude. Dans son style qui traduit une intelligence et une force de conviction hors du commun, il amène ainsi des éléments percutants voire provocants dans le débat, notamment dans les chapitres consacrés aux «pièges à éviter».

Le premier d’entre eux étant de croire que l’on soigne en prodiguant force traitements jusqu’au dernier souffle: «Pourtant les faits sont têtus. Les bénéfices et les effets indésirables d’une alimentation et d’une hydratation artificielles pour les patients en fin de vie sont documentés par des études scientifiques.» Construit sur une alternance d’analyses et de témoignages de patients et de proches, il étaye ses démonstrations

par des récits souvent sensibles. Interroger sa pratique, la frontière subtile entre conviction de soigner et risque de s’acharner, autant d’axes qui dessinent au fil des pages le domaine dans lequel Gian Domenico Borasio se distingue depuis des années sur le plan international. Or, regrette-t-il: «De nombreuses personnes ne savent tout simplement pas ce que recouvre la médecine palliative». Citant une enquête de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), il écrit qu’à peine un tiers des Alémaniques peuvent en donner la définition. Les Romands sont les mieux informés (78%). Gian Domenico Borasio n’étant sans doute pas étranger à ce score élevé, lui qui occupe depuis 2011 la première chaire de soins palliatifs de Suisse romande et la promeut dans différentes instances fédérales. Son credo? «Dans l’idéal, elle (la médecine palliative, ndlr) pourrait durablement rendre la médecine moderne plus proche du patient, pluridisciplinaire et davantage portée au dialogue ainsi qu’à la réflexion sur ses limites. Cela n’ira pas sans difficultés. Il existe des résistances considérables au sein du système médical.» Ces résistances, Gian Domenico Borasio en a déjà surmontées de nombreuses. A commencer par la séduction qu’il opère sur le lecteur, même le plus rétif à réfléchir à sa propre mort. Son livre s’intitule Mourir, il pourrait tout aussi bien être titré «Vivre». Car à se pencher de façon très pragmatique sur les différentes étapes qui précèdent la mort, il invite à une forme d’introspection profonde sur le sens de sa propre vie. Si ses lignes nous apprennent à mourir, elles nous apprennent donc tout autant à vivre, ici et maintenant, faisant écho aux écrits de Sénèque, comme un utile avertissement: «On remet la vie à plus tard. Pendant à lire ce temps, elle «Mourir, Ce que l’on sait, ce que l’on s’enfuit.» /

peut faire, comment s’y préparer.» Presses polytechniques et universitaires romandes, Le Savoir Suisse. Le livre est disponible en librairie ou chez l’éditeur: www.ppur.org

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Texte Marie-Adèle Copin

Haut potentiel? Les parents veulent savoir

Les bilans psychologiques se multiplient pour identifier les enfants précoces. Un effet de mode qui cache une réalité complexe: les jeunes surdoués peuvent aussi surprendre par leurs échecs.

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néa a de bonnes notes. Mais elle perturbe la classe, bavarde et se plaint souvent. Une situation qui étonne sa mère, Stéphanie Laurent. A la maison, cette écolière lausannoise alors âgée de 7 ans est calme, responsable et pas du genre à embêter les autres. Le problème? A l’école, Enéa s’ennuie. Une amie enseignante conseille alors à Stéphanie Laurent de faire passer un test à sa fille pour déterminer si elle est une enfant à haut potentiel. Le diagnostic est positif. Les enfants à haut potentiel (HP) sont qualifiés de surdoués ou précoces. On les compare parfois à des enfants prodiges, ce qui contribue à l’augmentation des demandes de bilans psychologiques. «L’intérêt pour ce test est grandissant, confirme Pierre Fumeaux, pédopsychiatre au CHUV, qui réalise actuellement une étude sur le sujet. Il y a quelques années, face à un élève en difficulté, les parents ou les enseignants demandaient au médecin s’il était hyperactif. Aujourd’hui, c’est le

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Chiffres

2%

Le nombre d’enfants HP au sein de la population, selon l’Organisation mondiale de la santé.

55% Le nombre d’enfants HP présentant des troubles dépressifs, selon l’Association suisse pour les enfants précoces.

33% Le nombre d’enfants HP qui réussissent à l’école, selon l’Association française pour les enfants précoces.

terme «haut potentiel» qui se retrouve sur le devant de la scène médiatique.» Contrairement aux idées reçues, surdoué ne rime pas toujours avec réussite. Les enfants à haut potentiel peuvent aussi surprendre par leurs échecs. Un cerveau différent

Pour être «diagnostiqué HP», il faut obtenir un score égal ou supérieur à 130 aux tests de quotient intellectuel (QI). «Mais ce chiffre ne suffit pas. Il s’agit également de comprendre dans quel contexte familial et social l’enfant s’insère, et saisir sa personnalité», explique Claudia Jankech, psychothérapeute à Lausanne, spécialiste de l’enfant et de l’adolescent. Paradoxalement, un nombre important d’enfants HP rencontrent des problèmes scolaires. «Quand c’est trop facile pour eux, ils prennent l’habitude d’être en pilote automatique, relève la psychologue. Ils n’ont jamais appris à apprendre.» Ces difficultés s’expliquent en partie par ce que les spécialistes appellent la pensée en arborescence: «Les personnes standards


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enéa 10 ans Sage comme une image à la maison, Enéa bavarde et perturbe ses camarades en classe.

Mathys 8 ans Mathys a connu une période d’angoisses irraisonnées parce qu’il avait connaissance du noyau de feu se trouvant au centre de la Terre.

construisent un raisonnement logique par une pensée linéaire et séquentielle. La réflexion de l’enfant HP, en revanche, se caractérise par un feu d’artifice d’idées et d’intuitions redoutables. Il arrivera à résoudre des équations complexes mais aura beaucoup de peine à expliquer son raisonnement», détaille Pierre Fumeaux. Des études suggèrent que les enfants HP possèdent un cerveau qui fonctionne différemment. Ils bénéficieraient d’une meilleure transmission de l’information entre leurs deux hémisphères cérébraux. «On peut supposer qu’ils utilisent facilement leur cerveau droit et gauche et peuvent allier de très bonnes capacités en logique et en créativité», précise le pédopsychiatre. D’autres travaux mettent en lumière que les enfants HP parviennent à jongler plus facilement avec des concepts et à réfléchir à des choses abstraites comme le calcul mental. «En faisant une imagerie cérébrale fonctionnelle, c’est-à-dire en injectant un produit qui va allumer les zones les plus vascularisées, on peut visualiser sur un scanner quelles zones du cerveau sont activées. Un stimulus ou une tâche donnée va activer certaines zones chez les individus standards. Chez l’enfant HP, plusieurs zones parfois plus étendues s’activent en même temps», ajoute-t-il. Ces indices guident les médecins sur la manière dont fonctionne l’esprit HP. «Mais nos connaissances en neurosciences restent limitées, admet le chercheur. Le haut potentiel n’est pas une maladie mais un profil cognitif singulier, ce qui n’en fait pas la priorité des chercheurs.» Hyper-sensibilité

Les enfants HP se caractérisent également par des particularités émotionnelles avec une grande sensibilité et beaucoup Nathael

eric déroze

6 ans Nathael pleure pendant les fêtes de Noël parce que les pauvres souffrent du froid et de la faim. 37


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d’empathie. Les deux autres enfants de Stéphanie Laurent, des garçons, ont aussi été diagnostiqués à haut potentiel. «Nathael, 6 ans, pleure à Noël parce que les pauvres ont froid et n’ont rien à manger.» Une hyper-sensibilité qui l’affole. «Cela prend des proportions parfois énormes. A une période, Mathys, 8 ans, avait des angoisses irraisonnées parce qu’il savait qu’il y avait un noyau en feu au centre de la Terre.» Pour Myriam Bickle Graz, pédiatre du développement au CHUV, qui a rédigé un mémoire sur le sujet, «les enfants vus en consultation sont souvent débordés par leurs émotions. Certains sont des écorchés vifs, ils n’ont pas de filtre. La peur de la mort, par exemple, est très précoce.» Ils développent alors des symptômes comme l’anxiété, des troubles du sommeil, des relations difficiles avec les autres enfants ou de l’agressivité. Comme dans la famille Laurent, il y a souvent plusieurs enfants surdoués au sein de la même fratrie. «Cela ne signifie pas forcément que toute la fratrie est HP, mais on observe un certain héritage génétique, sans pour autant le prouver scientifiquement, explique Myriam Bickle Graz. Cela reste une observation clinique.» Si certains enfants à haut potentiel souffrent, la majorité d’entre eux vit normalement. Comme le résume Pierre Fumeaux, «les enfants HP les plus heureux sont ceux qui ne sont pas identifiés et qui parviennent à s’adapter». ⁄

INTERVIEW «Les méthodes de diagnostic sont discutables» Dans le cadre d’une enquête menée sur les enfants surdoués, le sociologue français Wilfried Lignier a constaté que les tests censés détecter la précocité ne faisaient pas l’unanimité parmi les spécialistes. Vous observez que les enfants précoces n’ont, pour la plupart, pas de problèmes scolaires ou psychologiques. Pourquoi les parents leur font-ils passer des tests? WL Il s’agit de parents particulièrement inquiets qui anticipent les difficultés, alors que leurs enfants ont toutes les chances de réussir. A leurs yeux, l’évaluation des enfants par l’école ne suffit pas. La psychologie offre un supplément de légitimité. IV

Vous abordez la question de la précocité comme une conception «discutée et discutable». Pourquoi? WL La non-reconnaissance de la précocité par de nombreux psychologues est avant tout liée au crédit très relatif accordé aux tests de QI. Ces tests sont censés évaluer autre chose que les compétences scolaires, alors qu’ils ont une forme assez proche de l’exercice d’école. D’ailleurs, les enfants ne s’y trompent pas et disent parfois, à l’issue du test, qu’ils ont réussi les «maths» pour parler des épreuves de logique, ou le «français» pour parler des tests de vocabulaire. Le fait que ces tests se rapprochent d’exercices scolaires contrevient à l’idée que l’intelligence ce ne serait pas la même chose que le niveau scolaire. Or l’essentiel des effets sociaux attendus d’un test repose sur cette idée qu’ils donneraient accès à une vérité que ne dit pas l’école. IV

Vous montrez que le diagnostic est sexué: comment expliquer que le haut potentiel soit détecté plus souvent chez les garçons? WL Les parents ont tendance à s’inquiéter davantage de leur devenir, sur lequel portent plus volontiers les espérances d’ascension sociale. Le fait que les garçons ont plus de chance de présenter des «symptômes», comme ne pas tenir en place ou manifester explicitement son ennui, joue aussi un rôle. IV

En savoir plus

«La petite noblesse de l’intelligence: Une sociologie des enfants surdoués», Wilfried Lignier, Ed. La Découverte, 2012. 38


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Tests de m é d i c am e n t s: «l a

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r

ts»

L’encadrement des essais cliniques a été renforcé en début d’année par un changement législatif relatif à la recherche sur l’être humain. Ces mesures sont jugées insatisfaisantes. Texte Benjamin Keller

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peutiques. Or les personnes qui prennent part aux études ne sont pas assez protégées lorsqu’elles subissent des effets secondaires graves, juge l’Organisation suisse des patients (OSP).

L’

an dernier, 205 essais cliniques de médicaments ont été autorisés en Suisse, incluant chacun des centaines, voire des milliers de participants. Des tests non sans risques: 78 cas d’«effets indésirables graves inattendus» (voir lexique) ont été recensés par Swissmedic, l’autorité suisse de contrôle des produits théra-

La nouvelle loi relative à la recherche sur l’être humain (LRH), entrée en vigueur le 1er janvier 2014, a amélioré l’encadrement des essais cliniques de médicaments, grâce notamment à la mise en place d’un registre national et à une meilleure classification en fonction des risques. Elle n’a cependant pas introduit la revendication phare de l’OSP: l’inversion du fardeau de la preuve en cas de dommages. «La législation n’est pas en faveur des patients, s’insurge la déléguée romande de l’OSP, Anne-Marie

Bollier. En cas de complications, il revient au lésé de prouver le lien avec le médicament administré dans le cadre des essais.» Ce qu’indique noir sur blanc le rapport explicatif sur les ordonnances découlant de la LRH. Une «absurdité», critique la responsable: «Le rapport de force avec l’industrie et les assurances est inégal. Les patients n’ont pas 35 avocats payés à l’année pour les défendre.» L’OSP réclame que ce soit à la recherche et à son assurance d’infirmer le lien de causalité, et non aux participants de le démontrer. Batailles juridiques

Sans pouvoir fournir de chiffres précis, la présidente de l’OSP Margrit Kessler évoque «plusieurs cas» lors desquels des sujets d’essais cliniques victimes de

Gaetan Bally / Keystone

«Il est absurde qu’en cas de complications, il revienne à la personne lésée de prouver le lien avec le médicament administré dans le cadre d’essais cliniques», s’indigne Anne-Marie Bollier, déléguée romande de l’Organisation suisse des patients.

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complications n’ont pas reçu de compensation financière ou ont dû batailler pour être dédommagés. Outre l’intransigeance des assurances et des promoteurs des études, l’OSP dénonce le déni des médecins investigateurs. Sur son site internet, l’organisation donne des exemples concrets. Tel celui de cet homme souffrant d’un mélanome avancé et qui, ne souhaitant pas subir de chimiothérapie, a participé à un projet de recherche sur la base d’une autre substance. Neuf jours après le début des tests, il est frappé d’une paralysie partielle du visage, effet secondaire jamais mentionné auparavant. Tout lien avec le traitement est d’abord nié par le corps médical. C’est l’épouse du patient, infirmière, qui parvient à le prouver, après une longue procédure. Désormais, et après intervention de la Commission d’éthique, la parésie faciale figure dans le protocole d’information initial. Du côté des professionnels de la santé, on considère que les garanties pour les patients sont suffisantes. «Je vois difficilement comment mieux protéger les participants, étant donné le nombre de règles et de bonnes pratiques à respecter», lance Bernard Waeber, directeur du Centre de recherche clinique du CHUV. «Avant de se prononcer sur une éventuelle modification du fardeau de la preuve, il s’agit d’abord de tirer les enseignements de la première année d’application de la nouvelle LRH», indique pour sa part Maximiliano Wepfer, responsable

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suppléant de la communication de la Fédération des médecins suisses (FMH). Encadrer les tests individuels

Le sort des sujets d’études cliniques de médicaments n’est pas le seul à préoccuper l’OSP. L’association faîtière exige également davantage de protection lors d’essais thérapeutiques individuels. Il s’agit d’une pratique légale, à la condition que le patient donne son «consentement éclairé» et qu’il soit informé correctement. Mais la réalité diffère parfois, relève Anne-Marie Bollier, de l’OSP. «Les patients dont la vie est en danger sont prêts à essayer n’importe quoi et l’information n’est pas toujours optimale», constate-t-elle. L’OSP a demandé en vain que les essais thérapeutiques individuels soient inclus dans la nouvelle LRH. «Nous voulons que la loi oblige à conserver une trace écrite de ce que savait le patient au moment de tester le traitement», précise Anne-Marie Bollier. L’organisation a remporté une demi-victoire: suite à ses doléances, l’Académie suisse des sciences médicales a mis en consultation des directives relatives à la distinction entre thérapie standard et thérapie expérimentale, incluant notamment des règles précises quant aux informations à fournir aux patients. La déléguée salue cette avancée tout en restant prudente: «Cela permet au moins de bénéficier d’un texte de référence en cas de contestation devant les tribunaux.» ⁄

Termes clés 1. Essai clinique Etude réalisée sur l’être humain et visant à vérifier la sécurité, l’efficacité ou d’autres propriétés d’un produit thérapeutique (par exemple d’un médicament) clinique.

2. Promoteur

Personne ou institution qui prend l’initiative d’un essai clinique.

3. Investigateur

Personne responsable de la réalisation pratique d’un essai clinique (par exemple un médecin).

4. Effet indésirable grave inattendu Réaction novice (qui entraîne la mort, met en danger la vie ou encore nécessite une hospitalisation prolongée) inattendue liée à l’emploi d’un médicament expérimental lors d’un essai clinique.

5. Essai thérapeutique individuel Expérimentation d’une thérapie non standard (par exemple d’un médicament non autorisé) dans le cadre d’une consultation individuelle.


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L’impot sur les calories Faut-il taxer les aliments gras ou sucrés pour décourager les consommateurs? Plusieurs pays s’y sont essayés. Leurs expériences sont révélatrices. de 10% sur les sodas aboutirait à une n Suisse, 41% de la diminution de 7% des calories consompopulation est en surpoids mées par ce biais, a calculé une étude et un dixième est obèse. parue dans le journal Archives of Internal Ailleurs, la situation est Medicine. De même, une taxe de 18% sur pire. Près de 70% de la les aliments malsains aurait pour effet de population des Etats-Unis faire perdre seulement 2 kilos par an aux a trop de kilos et un tiers 18-30 ans en surpoids. est obèse. Face à cette «Si on veut modifier le épidémie, comportement des consomqui favorise mateurs, il faut que le le diabète et  Danemark  Texte montant de la taxe soit les maladies Le Danemark a Julie Zaugg imposé en octobre suffisamment élevé, indique cardiovas2011 une taxe sur Oliver Mytton, un chercheur culaires les aliments dont le au Centre for Diet and ou même la réapparition contenu en graisses Activity Research de d’affections oubliées trans excédait 2,3%, l’Université de Cambridge comme la goutte, plusieurs ce qui a abouti à une (GB) qui a analysé 30 études pays ont décidé de taxer hausse de 10% environ de leurs prix. Elle internationales portant sur les aliments sucrés ou gras. a été abandonnée fin un tel impôt. Sinon, les gens 2012, suite à la presne la remarquent même pas Mais quelle est l’efficacité sion de l’industrie et ou elle est absorbée par les de ces mesures? Une taxe des syndicats, tout comme un impôt sur le sucre prévu pour 2013.

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magasins.» Pour qu’elle fasse mal au porte-monnaie, il faut qu’elle atteigne au moins 20%, dit-il. Il préconise de taxer en priorité les boissons sucrées. «Elles ne sont pas nécessaires à notre alimentation, n’amenant que des calories «vides» qui ne procurent aucun sentiment de satiété, détaille-t-il. Il est donc tout à fait légitime de les cibler.» Les rares exemples de taxes mises en œuvre livrent aussi des enseignements. Le Danemark a introduit un impôt sur les graisses trans en octobre 2011, abrogé

KEYSTONE / SCIENCE PHOTO LIBRARY / PETER MENZEL

Etats-Unis:  Près de deux tiers des Etats américains (35 en 2011) ont introduit un impôt sur les boissons sucrées, mais il dépasse rarement 4%. New York a interdit à ses restaurants de cuisiner avec des graisses trans en 2006. En revanche, une loi limitant la taille des sodas à 16 onces (un demilitre) a été annulée à la dernière minute.

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début 2013. «Durant cette période, on a constaté une baisse de 10 à 15% de la consommation de graisses et d’huiles, indique Sinne Smed, une chercheuse du Département de l’alimentation et des ressources économiques de l’Université de Copenhague. Les résultats préliminaires d’une nouvelle étude montrent une diminution de 6% de la consommation des acides gras saturés. Les gens semblent avoir particulièrement renoncé au beurre et à la margarine.» Plus anecdotique mais tout aussi parlant, lorsque la cafétéria du Brigham and Women’s Hospital de Boston (Etats-Unis) a instauré une hausse de 35% sur les sodas, leur consommation a diminué de 26%.

Le routier Conrad Tolby et le fermier José Angel Galaviz Carrillo (p. 44) ont été photographiés par Peter Menzel pour le livre «What I Eat: Around the World in 80 Diets», qui présente des hommes et femmes de 30 pays autour du globe, accompagnés de leur nourriture journalière.

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Mais taxer la nourriture génère aussi des effets pervers. «Si on cible des aliments comme l’huile ou le beurre, que tout le monde consomme, on risque de pousser les gens à se tourner vers un produit de substitution tout aussi malsain, relève Oliver Mytton. Les consommateurs ont tendance à remplacer le gras par le salé.» On risque aussi de pénaliser les aliments gras mais néanmoins sains, comme les avocats ou les noix. A l’inverse, il n’existe que peu de substituts malsains aux boissons sucrées. «Les gens boiront de l’eau ou du jus de fruits à la place», note-t-il.

Mexique:  Le parlement mexicain vient de passer une taxe de 8% sur les aliments comportant plus de 275 calories pour 100 grammes et un impôt de 1 peso par litre sur les sodas. Le pays est le premier consommateur de boissons gazeuses au monde, avec 163 litres bus par personne par an.

«Certains consommateurs pourraient même réduire leur consommation de fruits et légumes pour pouvoir se payer des produits malsains, renonçant aux carottes pour s’offrir un paquet de chips», relève Sinne Smed. En 2012, 48% des Danois ont aussi franchi la frontière pour faire leurs courses en Allemagne ou en Suède. L’impôt sur le gras et le sucre, qui est dégressif, a en outre pour effet de frapper les pauvres de façon disproportionnée.

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«Les familles à bas revenu ont tendance à vivre dans des «déserts nutritionnels», où l’on ne trouve que des aliments gras et pré-cuisinés», souligne Roberta Friedman, directrice des politiques publiques au Centre Rudd pour la politique nutritionnelle et l’obésité de l’Université Yale (USA). Mais Jim O’Hara, de l’ONG Center for the Science in the Public Interest, qui a été l’une des

KEYSTONE / SCIENCE PHOTO LIBRARY / PETER MENZEL

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premières à prôner la fiscalité nutritionnelle, rappelle que «les populations défavorisées sont aussi celles qui souffrent le plus d’obésité et de diabète et profiteraient donc en premier lieu des améliorations apportées par de telles taxes».

François Pralong, chef du service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme au CHUV.

Autre obstacle, les taxes sur les aliments malsains doivent passer le barrage de l’industrie alimentaire. «Elle est parvenue à tuer une taxe sur les boissons sucrées à New York en 2010», rappelle Jim O’Hara. L’American Beverage Association a investi 9,4 millions de dollars dans cette campagne. En face, les organisations favorables à la taxe ont dû se contenter de 2,5 à 5 millions de dollars. Sinne Smed a observé le même phénomène au Danemark. «Avant l’introduction de la taxe, une majorité de la population y était favorable. Mais l’industrie a passé des mois à argumenter que cela pesait sur les salaires, détruisait des emplois et générait une surcharge administrative pour les paysans et les petits producteurs. Résultat, l’opinion publique a changé de bord.» En avril 2012, 75% des Danois étaient contre la taxe. Si la fat tax ne représente pas la panacée pour lutter contre l’obésité, il s’agit d’une pièce importante du puzzle. «Cet impôt peut servir à générer du revenu pour financer des mesures de prévention, comme l’introduction de repas sains dans les écoles ou la promotion du sport», souligne Roberta Friedman. «On pourrait utiliser cet argent pour subventionner les fruits et légumes, ce qui ferait baisser leur prix au fur et à mesure que celui des aliments gras augmente», ajoute Sinne Smed. Au Danemark, la taxe sur les graisses trans avait permis de lever 216 millions de dollars. ⁄

«Nous aidons à faire le lien entre alimentation, activité physique et prise de poids» interview Pour François Pralong, favoriser l’activité physique et développer l’éducation alimentaire constituent des éléments essentiels dans la lutte contre l’obésité.

Comment fait-on pour traiter les patients obèses? fp Le traitement comporte trois volets. Le premier est diététique: il s’agit d’apprendre aux patients à identifier les graisses et les sucres cachés, à mieux évaluer les quantités consommées et à connaître la valeur de différents nutriments. Le deuxième est psychologique: on va travailler sur les troubles du comportement alimentaire à l’origine de la prise de poids. Le troisième a pour but de favoriser l’activité physique. iv

Et si cela ne suffit pas? Environ la moitié des patients qui consultent chez nous auront recours iv

fp

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à la chirurgie de l’obésité, sous la forme d’un bypass gastrique. Comme il s’agit d’une opération irréversible, il faut prendre garde à ce que la personne soit bien préparée, que son poids soit stabilisé et qu’elle soit suivie à vie. Peut-on aussi agir en amont? fp Nous venons de créer une consultation pour les patients en surpoids. Elle a pour but d’attraper les gens avant qu’ils ne développent une obésité morbide, en les aidant à faire le lien entre ce qu’ils mangent ou leur activité physique et la prise de poids. Certains n’en ont pas conscience ou sont dans le déni. ⁄ iv

philippe gétaz

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chronique

Allen Frances Professeur de psychiatrie à l’Université Duke

L’intérêt croissant pour les neurosciences dessert vivement les patients atteints de maladie mentale.

Les neurosciences vivent leur âge d’or: les connaissances en la matière ne cessent de croître et l’outillage à disposition est d’une sophistication qui dépasse toutes les attentes. Les patients atteints de maladies psychiatriques ne bénéficient pourtant pas de ces progrès. Le cerveau est la machine la plus complexe qui soit et ne révèle ses secrets que par bribes. Mais plus on en sait sur son fonctionnement, moins on comprend ses failles. Autrement dit, les découvertes faites dans le domaine des neurosciences ne nous aident pas à comprendre les troubles mentaux. Car chaque trouble mental est la manifestation de centaines de processus pathologiques impliquant l’interaction du cerveau avec son environnement physique, psychologique et social.

En finançant et en soutenant en priorité les futures découvertes, on ignore honteusement les besoins criants des patients. Aux Etats-Unis, les ressources considérables du National Institute of Mental Health (NIMH) sont exclusi­ vement dédiées aux neurosciences. Son portefeuille de recherche est désespérément limité en matière d’essais cliniques et ne compte que très peu d’études psychosociales. Cet institut promet de résoudre les énigmes futures des neurosciences sans se soucier de l’état déplorable des soins aujourd’hui.

IMAGETRUST

Depuis 50 ans, les Etats-Unis ont supprimé près d’un million de lits en psychiatrie pour cause de «désinstitutionnalisation». L’argent devait servir au traitement communautaire et à la construction de logements décents; cela n’a pas été le cas. Les budgets de santé mentale, jamais suffisants, ont été progressivement, mais drastiquement réduits. Les patients recevant D’ailleurs, malgré des efforts considérables et des soins insuffisants et souvent sans domicile coûteux, on ne sait toujours rien d’utile sur la sont fréquemment incarcérés pour atteinte à pathophysiologie des troubles mentaux. Et il l’ordre public, des situations facilement évitables n’existe aucun examen biologique pour les avec la prise en charge de leurs besoins basiques. diagnostiquer. Leur référencement se fera petit La plupart des pays européens ont mieux géré la à petit, minutieusement et difficilement sur désinstitutionalisation, le traitement communaudes dizaines d’années, sans que cela engendre taire et la construction de logements décents. des découvertes époustouflantes. Les bienfaits espérés, mais incertains, censés découler des progrès technologiques, ont triomphé PROFIL Allen Frances est de la tâche plus ingrate mais bien plus utile consisprofesseur de psychiatrie tant à fournir soins et logement à ceux qui en ont à l’Université Duke. besoin maintenant. Si la recherche en neuroscience Il a présidé le groupe est une bonne chose, notre propension à exagérer de travail chargé de la 4e édition du Manuel ses potentialités a contribué à alimenter le fléau de diagnostique et stala criminalisation des maladies mentales. ⁄ tistique des troubles mentaux (DSM-IV), bible internationale des troubles psychiatriques.

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en savoir plus

http://psychiatry.duke.edu/


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Les promesses de l’électricité Asthme, troubles cardiaques, maladie de Parkinson: le courant électrique suscite l’intérêt des médecins pour le traitement de certaines pathologies. Les pistes de recherche se multiplient.

Image de synthèse illustrant le traitement par stimulation cérébrale profonde.

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TIM VERNON, LTH NHS TRUST/SCIENCE PHOTO LIBRARY

Texte: Jean-Christophe Piot


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Influx nerveux, pulsations cardiaques, fonctionnement neuronal: le corps humain est une centrale électrique et les diagnostics médicaux pourraient difficilement se passer de courant – il suffit d’avoir passé une électrocardiographie (ECG) pour en prendre conscience. L’utilisation thérapeutique de l’électricité, en revanche, a toujours fait débat. Pour beaucoup, son usage se limite à la stimulation électrique transcutanée (TENS). Cette technique, qui consiste à fixer des électrodes à la surface de la peau, est largement répandue dans les hôpitaux allemands et américains. En jouant sur la fréquence électrique et la durée du traitement, les algologues (spécialistes de la douleur) soulagent les patients atteints de rhumatismes ou d’arthrose et résistants aux analgésiques. Mais d’autres applications thérapeutiques de l’électricité sont explorées. L’électrothérapie est déjà une réalité pour le traitement des troubles du rythme cardiaque. Fréquentes après 65 ans – 5% de la population mondiale dans cette classe d’âge souffrent d’arythmie – ces pathologies peuvent toucher des malades plus jeunes. Or, «les traitements médicamenteux ne fonctionnement pas toujours et la recherche pharmaceutique peine à trouver des molécules efficaces», explique Martin Fromer, médecin-chef de l’Unité des troubles du rythme cardiaque au CHUV. Lui et son équipe traitent depuis plusieurs années les arythmies grâce à des CORPORE SANO

C’est l’année durant laquelle le physicien genevois Jean Jallabert met au point une machine électrostatique permettant de produire des contractions dans les muscles de patients paralysés.

cathéters placés dans le cœur des malades: «Les progrès de l’imagerie nous — permettent de fusionner les informations électriques et La fréquence en hertz des courants anatomiques utilisés en neurostimulation pour disposer d’une cartograélectrique transcutanée, phie précise une technique utile dans le des zones à traitement contre la douleur. l’origine des troubles.» Le praticien oriente sous-claviculaire. La technique a les cathéters pour traiter les fait ses preuves chez les patients anomalies structurelles par des sévèrement atteints en réduisant courants électromagnétiques nettement les manifestations les de différentes fréquences. Cette plus sévères, notamment l’akinésie technique stabilise la maladie (impossibilité d’effectuer certains chez les patients les plus âgés mouvements) et la rigidité du et réduit les risques de mort corps. Prometteur, le procédé subite. La guérison est définitive souffre encore d’un suivi postchez les moins de 30 ans. opératoire important, d’autant Stimulation cérébrale que les effets indésirables sont profonde lourds dans 2 à 3% des cas: L’électricité se prête également confusion mentale, hémiparésie au traitement des maladies (paralysie partielle), hématomes… neurodégénératives comme celle de Parkinson. Depuis une La stimulation cérébrale provingtaine d’années, la stimulation fonde intéresse les spécialistes cérébrale profonde permet d’autres pathologies neuroloaux neurologues de bénéficier giques. A l’Institut des neurosd’une approche thérapeutique, ciences de Grenoble, l’équipe réversible et modulable qui du physicien Olivier David s’est affinée au fil du temps. travaille en étroite collaboration Les médecins implantent une avec les neurologues du CHU électrode dans chaque hémissur certaines formes d’épilepphère cérébral et les positionnent sie résistantes aux traitements à l’aide d’une reconstruction tridi- classiques: «Lorsque l’électrode mensionnelle du cerveau. Les implantée dans le cerveau électrodes sont ensuite connecperçoit une anomalie de l’activité tées à un boîtier de contrôle électrique neuronale, elle émet

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une stimulation électrique pour la réguler.» Les premières études cliniques sont encourageantes: «Chez un patient sur deux, nous parvenons à réduire le nombre de crises de moitié», indique Olivier David. Pour autant, valider cette nouvelle prise en charge prendra du temps: «Techniquement, l’intervention est maîtrisée, mais cinq à dix ans seront nécessaires pour affiner les protocoles et imaginer un remboursement de ce type de thérapies par les assurances.»

à l’époque romaine déjà

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Sous l’Empire romain, des médecins recouraient déjà à l’électricité pour guérir leurs patients, à partir d’une source naturelle de courant: les poissons. Scribonius Largus, médecin personnel de l’empereur Claude, est resté célèbre pour avoir cherché à soulager son patient de ses crises de goutte et de ses migraines fréquentes. Il plaçait une torpille entre les sourcils de l’empereur et laissait cette «raie électrique» décharger son courant jusqu’à ce que les sens du malade soient engourdis. Les torpilles sont capables de délivrer des chocs électriques dépassant les 30 ampères.

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PAUL D STEWART/SCIENCE PHOTO LIBRARY

Soulager les asthmatiques

A San Antonio, au Texas, Pedro Sepulveda, pneumologue à l’Alamo Clinical Research Center, en est à un stade de développement similaire. Lui et son équipe ont expérimenté l’électrothérapie chez des patients atteints d’asthme sévère et non réactifs aux traitements pharmacologiques (corticoïdes oraux ou bronchodilatateurs): «La procédure consiste à placer, après une anesthésie locale, une électrode en percutané (par absorption à travers la peau, ndlr) à l’aide de guidage par ultrasons à proximité de la gaine carotidienne (au niveau du cou, ndlr)», détaille le spécialiste. La zone a ensuite été stimulée électriquement pendant trois heures. Avec des résultats probants: le volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) des patients a augmenté de 10 à 15% dans la demi-heure suivant l’intervention. «A l’avenir, ces traitements non pharmacologiques pourraient soulager les patients les plus fragiles.» /


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Sexe et psychiatrie, un mélange explosif? Les professionnels s’interrogent sur la question des relations sexuelles entre patients en hôpital psychiatrique de soins aigus. Certaines institutions romandes ont commencé à faire appel à des assistants sexuels.

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laude a passé plus de deux tiers de sa vie en hôpital psychiatrique. Condamné en 1975 pour avoir assassiné l’amant de sa compagne, le Français, aujourd’hui âgé de 69 ans, a d’abord passé huit ans en prison, avant d’être interné dans une unité pour malades difficiles.

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texte: Julie Zaugg

En 2008, alors qu’il se trouvait dans le Centre hospitalier de Cadillac, à Bordeaux, il a revendiqué le droit d’avoir des relations sexuelles, «contestant le règlement interne de son unité, qui prohibait tout rapport de ce type», indique son avocat Pierre Burucoa. L’affaire est remontée jusqu’à la cour administrative d’appel de Bordeaux, qui lui a donné raison en janvier 2013, estimant que la sexualité était un droit fondamental, au même titre que le droit au respect de la vie privée garanti par la Convention européenne des droits de l’homme. Ce cas – de par son contexte sécuritaire particulier – est exceptionnel. «On a toutefois affaire à un vrai tabou en France, note Pierre Burucoa. La question des relations sexuelles entre patients se pose dans tous les hôpitaux psychiatriques, mais aucun ne dispose de règles claires à ce sujet.» La situation est différente dans le canton de Vaud, où les personnes comme Claude ne séjournent pas dans les hôpitaux psychiatriques, dans lesquels la durée moyenne de séjour est inférieure à un mois. «A l’hôpital de Cery (VD), les relations sexuelles, qui sont un droit fondamental, ne sont pas formellement interdites, mais

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le livre d’accueil demande aux patients de s’en abstenir durant leur séjour», confirme Philippe Conus, le chef du service de psychiatrie générale du CHUV. Il précise que «les hôpitaux psychiatriques vaudois ne sont plus des lieux de vie: les patients se trouvent pour la plupart en situation de crise aiguë et y résident pour une courte durée (20 jours en moyenne à Cery). Dans un tel contexte d’instabilité psychique, certains patients peuvent être vulnérables, ou leur discernement peut être gravement perturbé, ce qui justifie un certain degré d’attention de la part des soignants.» Cette prudence renvoie à la crainte de provoquer de la souffrance. «Les personnes qui se font hospitaliser en psychiatrie sont dans une situation de grande détresse et vulnérabilité, souligne la psychiatre Giuliana Galli Carminati, ancienne médecin-adjointe à l’hôpital de Belle-Idée, à Genève. Ils ne sont pas à même de prendre une décision réfléchie sur leur sexualité.» Derrière ce postulat se trouve la question du discernement, particulièrement difficile à évaluer chez les personnes soumises à des pulsions ou des hallucinations. Le désir sexuel peut également conduire à la remise en question du traitement médicamenteux: «Les neuroleptiques peuvent induire l’impuissance, indique Philippe Conus. Il arrive ainsi que des patients arrêtent de les prendre pour éviter cet effet désagréable. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous discutons régulièrement CORPORE SANO

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avec eux de tous les effets secondaires, pour chercher des alternatives et les aider à vivre une vie normale.»

«Derrière l’interdit de la sexualité des patients en psychiatrie, se cache la peur que le rapport ne débouche sur une grossesse inassumable.» Jean-Louis Korpès

Autre danger, le désir sexuel fait parfois carrément partie des symptômes de la maladie. «Certains états maniaques chez les patients bipolaires sont associés à une tendance à la promiscuité et à la désinhibition», détaille Philippe Conus.


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Certains troubles sont associés à des comportements imprévisibles. «Les personnes avec des perversions sexuelles peuvent devenir violentes ou dangereuses, indique Catherine Agthe, sexopédagogue et présidente de l’association Sexualité et Handicaps Pluriels. D’autres présentent des tendances pédophiles ou des pulsions fétichistes qu’elles cherchent à imposer à autrui.» La question de la sexualité des patients en psychiatrie soulève en outre un énorme non-dit. «Derrière cet interdit se cache la peur que le rapport ne débouche sur une grossesse, sur un enfant dont l’éducation ne pourra pas être assumée», relève Jean-Louis Korpès, professeur à la Haute école fribourgeoise de travail social. «Il n’est évidemment pas question d’interdire à une patiente de tomber enceinte, mais avant qu’elle ne prenne cette décision, on va discuter avec elle, voir si c’est le bon moment dans sa vie et quelles sont ses capacités pour entourer l’enfant, note Philippe Conus. Cela permettra de mettre sur pied un encadrement étroit en cours

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de grossesse et après l’accouchement.» Il précise que le risque de dépression post-partum est exacerbé chez les femmes souffrant d’un trouble psychique et que certains médicaments n’étant pas compatibles avec une grossesse, il faudra ajuster le traitement. Il semblerait que la prohibition des relations sexuelles soit peu judicieuse. «Une partie des patients cherchera de toute manière à transgresser l’interdit», fait remarquer Catherine Agthe. Et lorsque les relations sexuelles se déroulent de façon clandestine, elles peuvent mener à des dérives bien plus graves que l’acte lui-même. «On en arrive à des situations scabreuses, des gens qui ont des relations dans les toilettes ou dans les jardins, détaille Jean-Louis Korpès. En raison du manque d’information fourni et de l’absence de moyens de contraception, cela risque aussi d’aboutir à la transmission de maladies sexuelles.» Dans certains cas, le recours à des assistants sexuels pourrait représenter une nouvelle piste. Ces personnes formées pour apporter une aide sexuelle aux personnes handicapées œuvrent en Suisse romande depuis 2009 et outre-Sarine depuis le début des années 2000. «A Genève, les services de psychiatrie collaborent déjà ponctuellement avec nous, indique Catherine Agthe, dont l’association gère la formation des assistants et assistantes sexuels romands. A Lausanne, ils commencent à s’y intéresser.» Quelque 20% des demandes enregistrées par l’association Sexualité

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et Handicaps Pluriels émanent de personnes avec des troubles psychiques. «Si l’un de nos patients était agressif ou tendu, et que cela paraissait lié à une frustration sexuelle, il arrivait que nous fassions appel à une assistante sexuelle», confirme Giuliana Galli Carminati, en évoquant la pratique de l’hôpital genevois de Belle-Idée. Chaque cas devait cependant faire l’objet d’une évaluation soignée.

«Cette solution ne peut être envisagée que pour les malades qui possèdent un minimum de maîtrise sur soi et une certaine maturité affective», dit-elle. Et cela doit rester une prestation ambulatoire, effectuée en dehors de l’hôpital. «Il n’est pas question de mélanger les genres, insiste-t-elle. La prise en charge médicale et les relations intimes ne doivent pas se dérouler dans le même lieu.» /

Chez les handicapés mentaux, le tabou est tombé depuis longtemps Si les relations sexuelles entre patients en psychiatrie sont vues d’un mauvais œil, celles impliquant les handicapés mentaux font désormais partie de la norme. «Le personnel des structures d’accueil est formé aux questions de la vie affective et sexuelle et les résidents bénéficient d’espaces de parole, détaille Catherine Agthe, sexopédagogue et directrice de l’association Sexualité et Handicaps Pluriels. Depuis une vingtaine d’années, on dispose également de réponses concrètes sous la forme de soirées de rencontres, de «slow dating,» de chambres doubles pour les couples et, depuis les années 2000, d’assistance sexuelle.» Carmen Wegmann, de l’organisation Insieme, pense que la ratification par la Suisse de la Convention de 2006 relative aux droits des personnes handicapées a donné un coup d’accélérateur à la «normalisation» de tous les aspects de leur vie, y compris intime. Il subsiste toutefois de grandes différences entre institutions: «Certaines autorisent le partage de chambres et discutent très ouvertement de la sexualité de leurs résidents, alors que d’autres la nient, assurant que «ça» n’existe pas chez elles», indique-t-elle. La sexualité des personnes souffrant d’un handicap mental a aussi créé de nouveaux défis. «Leur soutien par une assistance sexuelle est essentiel, mais il arrive qu’elles s’attachent trop ou tombent amoureuses de la personne qui prodigue ce service», détaille Carmen Wegmann. La question d’une éventuelle grossesse n’est pas non plus réglée. «Avoir un enfant fait partie des droits fondamentaux, mais cela reste très compliqué en pratique, dit-elle. Souvent, ces femmes ont elles-mêmes besoin d’un soutien au quotidien.»

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Texte: clément Bürge illustration: Leha van kommer

La quête de l’immortalité Un nombre croissant de projets scientifiques cherchent à prolonger l’espérance de vie. Les tests sur les êtres humains commenceront prochainement.

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a science de l’immortalité a de tout temps fait rêver les chercheurs. En 1914 déjà, le chirurgien français Serge Voronoff espérait prolonger la vie des humains en leur implantant des testicules de singe. Ces dernières années, la recherche d’une méthode pour stopper – ou du moins ralentir – le vieillissement a bénéficié d’un regain de jeunesse. En 2013, Google a fondé une start-up, Calico, qui a pour objectif de trouver un remède à la vieillesse. Autre exemple, Dmitry Itskov, un multimillionnaire russe, a réuni des chercheurs du monde entier pour travailler sur la thématique. «Le nombre de projets augmente pour une simple raison: nous nous approchons du but final, explique Aubrey de Grey, un spécialiste de la question. Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, nous disposons CORPORE SANO

d’un bagage de connaissances assez large pour savoir comment augmenter l’espérance de vie. Ce n’est plus qu’une question de temps.» Tour d’horizon des projets les plus intéressants.

1 Rajeunir le cœur des souris

Amy Wagers et Richard T. Lee, des chercheurs du Harvard Stem Cell Institute (USA), ont connecté chirurgicalement la circulation sanguine d’une souris âgée à celle d’un rongeur plus jeune. Après seulement quatre semaines, les symptômes d’insuffisance cardiaque liés à l’âge du rongeur plus âgé avaient disparu. «Les muscles du cœur d’une souris, comme celui d’un être humain d’ailleurs, s’épaississent avec l’âge, ce qui augmente les risques de maladies cardiaques, explique Richard T. Lee. Lors de notre expérience, le cœur de la souris plus âgée avait clairement retrouvé la taille prospection

de celui du rongeur plus jeune. On pouvait le constater à l’œil nu.» Les chercheurs ont aussi remarqué que ce rajeunissement était causé par la présence d’une hormone sanguine, GDF-II. Ils essaient maintenant d’établir quels sont les effets de cette hormone sur d’autres organes. «Nous souhaitons lancer des essais cliniques dans quatre ou cinq ans.»

2 Le paradoxe de la sélection naturelle

La sélection naturelle favorise les organismes qui ont les meilleures aptitudes de survie et de reproduction. Selon cette logique, elle devrait a priori empêcher la transmission de gènes qui déclenchent le processus de vieillissement. Ce qui n’est pas le cas. Le chercheur britannique John Pannell, professeur au Département d’écologie et évolution de l’UNIL, a voulu comprendre pourquoi.


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prospection


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Pour cela, il a étudié la longévité d’une plante, la «Silene latifolia»: «C’est un paradoxe, le vieillissement et la détérioration de l’organisme empêchent la survie et la reproduction», dit-il. Son

Mettre des garde-fous Réglementer la production Le développement de médicaments qui soignent le vieillissement peut être sensible du côté de l’industrie pharmaceutique. «Les traitements qui seront développés seront principalement préventifs, explique Hugo Aguilaniu. L’industrie pharmaceutique pourra en théorie vendre un nombre infini de médicaments. Jusqu’où ira-t-elle? Je crains que ces compagnies ne soient pas à même de fixer des limites raisonnables.» Le chiffre d’affaires généré par ces médicaments pourrait potentiellement être quasi infini: «Il faudra une régulation externe», affirme l’expert de la longévité. Autre obstacle, pour prouver que ces médicaments augmentent la longévité, il faudrait réaliser des essais cliniques sur une durée de 50 ans. «Ce qu’aucune compagnie n’aurait les moyens de faire», dit-il. CORPORE SANO

équipe a mené une étude expérimentale de génétique quantitative. «Nous avons découvert que les organismes ne développent pas des mutations génétiques au début de leur vie, car ils ont plus

Prévenir les répercussions sociales Tout être humain doit mourir un jour. Certaines personnes estiment que prolonger artificiellement la vie d’un être humain serait contre nature. «Certaines personnes pensent qu’il faut distinguer le vieillissement et les maladies liées à l’âge, ce qui est absurde, estime Aubrey de Grey. Nous cherchons à ralentir l’accumulation des dégâts corporels pour finalement soigner les maladies causées par le vieillissement. Il s’agit uniquement de médecine préventive.» Rallonger l’espérance de vie va aussi poser un énorme défi à la société: «Les répercussions sociales vont être dramatiques, explique Rafael de Cabo. Comment vont s’occuper des gens qui vivent jusqu’à 120 ou 150 ans? Comment payer leur prise en charge? Il faudrait prévoir une profonde refonte de la société.» Le chercheur japonais Shin Kubota estime aussi que la croissance démographique risque d’être ingérable. prospection

de chances de se reproduire, explique le scientifique. Par contre, dès qu’ils commencent à prendre de l’âge, ces organismes ont moins de chances de se reproduire. Ils développent alors des signes de sénescence.» Les gènes qui causent le vieillissement sont ensuite transmis de génération en génération pour une raison importante: «On aurait pu attendre que la sélection naturelle supprime ces gènes, mais ils offrent une série d’avantages, notamment reproductifs, dont il est difficile de se passer.» Un constat qui permet de mieux comprendre le fonctionnement du vieillissement, et d’augmenter les chances de trouver un traitement.

3 Les sept causes du vieillissement

Le Britannique Aubrey de Grey est un symbole de la lutte contre le vieillissement. Avec sa barbe, son teint pâle et sa longue silhouette, l’ancien informaticien formé à l’Université de Cambridge (GB) et autodidacte en biogérontologie, a un air shakespearien. Il a identifié sept causes au processus du vieillissement, comme le nonremplacement des cellules qui meurent, la rétention des cellules qui devraient mourir, les mutations dans le génome nucléaire et mitochondrial et l’accumulation des déchets à l’intérieur et à l’extérieur des cellules. Il a fondé SENS – Strategies for Engineered Negligible Senescence – une


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fondation basée aux Etats-Unis, qui travaille sur ces sept points. «Nous finançons des projets de médecine régénérative et nous en conduisons un certain nombre, explique Aubrey de Grey. Notre but est de prévenir les maladies liées à l’âge.» L’homme est convaincu que le premier homme qui va vivre jusqu’à 1’000 ans est déjà en vie: «J’estime qu’il y a 30 à 40% de chances que les gens de mon âge, dans la quarantaine, soient assez jeunes pour profiter de ces thérapies.»

4 La reproduction, clé de la longévité?

Les recherches de Hugo Aguilaniu, de l’Ecole normale supérieure de Lyon (F), sont parties d’un constat: au moment de la reproduction, les organismes animaux rajeunissent radicalement. «Au moment de la conception d’un enfant, des cellules âgées de plusieurs dizaines années – celles de ses parents – fusionnent pour créer des cellules d’âge zéro, explique Hugo Aguilaniu. Je voulais comprendre comment cela fonctionnait.» Le chercheur français a notamment observé un ver nématode nommé «Caenorhabditis elegans», et découvert que le taux d’oxydation de ses ovocytes diminuait fortement au moment de la reproduction. «Une fois le processus mis en évidence, nous serons capables d’identifier les gènes et les protéines correspondantes CORPORE SANO

qui pourraient ralentir le vieillissement chez l’être humain.» Le chercheur emploie aussi une autre approche: «Nous analysons l’impact de certains gènes qui ont le potentiel d’augmenter la longévité de l’organisme.» Il en existerait une cinquantaine, ayant notamment un impact sur la résistance au stress. «Le problème, c’est que si on les active, on risque de mettre en danger les capacités reproductives de l’humain.» Le chercheur a déjà déposé des brevets sur certains gènes, comme le nhr-80: «Nous continuons notre travail, mais nous sommes encore à plusieurs années avant de commencer des expérimentations sur un être humain.»

5 Les promesses de la méduse immortelle

En 1988, un jeune chercheur allemand, Christian Sommer, découvre la méduse «Turritopsis dohrnii» sur les côtes italiennes, lors d’une recherche sur les hydrozoaires. Il remarque alors que les petits êtres transparents ne meurent pas. En 1996, une équipe de chercheurs constate que cette méduse peut retourner à l’état de polype, la plus jeune étape de sa vie, à n’importe quel moment. L’être gélatineux peut ainsi «échapper à la mort» et devenir immortel. Une transformation comparable à celle d’un poulet qui pourrait redevenir un œuf, puis un poussin. Cette découverte a attiré l’attention d’un chercheur japonais, Shin prospection

Kubota, qui est convaincu que cette méduse détient la clé de la longévité chez les humains. L’homme a publié plus d’une cinquantaine d’articles scientifiques sur le fonctionnement de ces créatures. Il n’a pas encore percé le secret de leur immortalité.

6 Une molécule pour rallonger la vie

Rafael de Cabo travaille pour le National Institute on Aging, un institut gouvernemental créé par le Congrès américain en 1974 pour étudier le prolongement de la vie. Il a notamment découvert que l’activation de la protéine sirtuine 1 retardait le déclenchement des maladies causées par la vieillesse. «Nous avons utilisé une petite molécule nommée SIRT1720 sur des souris, pour augmenter leur taux de sirtuine 1», explique le chercheur d’origine espagnole. Il a donné une dose de 100 mg de SRT1720 à des souris âgées de 6 mois jusqu’à la fin de leur vie. Résultat: l’espérance de vie des souris a augmenté de 8,8% et leurs fonctions musculaires se sont améliorées. A l’inverse, leur poids et la proportion de graisse dans leur organisme ont diminué. «Notre recherche a montré que nous pouvons développer des molécules pour diminuer les effets des maladies métaboliques et chroniques liées au vieillissement.» Le National Institute of Aging prévoit de lancer des tests cliniques d’activateurs de sirtuine 1 courant 2014. ⁄


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Tout ce que vos larmes peuvent dire sur vous Texte Jean-Christophe Piot

Le sang ou les urines ne sont plus les seuls fluides corporels qui permettent de livrer un diagnostic. De nouveaux terrains d’analyse médicale font leurs preuves.

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n va faire une prise de sang.» Face à bien des symptômes, c’est dans un échantillon d’hémoglobine ou d’urine qu’un médecin va chercher les éléments qui lui permettent de poser un diagnostic. «Ces deux fluides sont une mine d’informations précieuse sur l’état de santé d’un patient: marqueurs biochimiques, anticorps, protéines…», note Natacha Turck, maître-assistante au département de biologie structurale de l’Université de Genève. Les scientifiques s’intéressent pourtant aujourd’hui à d’autres substances CORPORE SANO

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corporelles pour effectuer des analyses biologiques. «Les tests de sang et d’urine ont leurs limites: l’urine est très riche en sel et en cristaux, ce qui compromet la recherche de biomarqueurs protéiques. Le sang, lui, regorge de protéines comme l’albumine qui masquent les traces plus faibles laissées par d’autres indicateurs.» Un souffle qui en dit long Parmi les champs de recherche les plus encourageants, les composés organiques volatils (COV) – des substances qui se


Rose-lynn fisher

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Basée à Los Angeles, la photographe Rose-Lynn Fisher s’intéresse aux liens entre art et science. Les deux photos ci-contre, intitulées «Tears for those who yearn for liberation» («larmes pour ceux qui cherchent à se libérer»), et «Tears of ending and begining» («Larmes de début et fin») sont extraites de son travail sur la «topographie des larmes». CORPORE SANO

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trouvent dans l’air ambiant et que l’être humain ingère en respirant – sont incontestablement les plus en vogue. Certains protocoles sont déjà courants, en particulier en gastroentérologie où ils permettent d’identifier les bactéries présentes dans le système digestif. Le principe: le patient ingère une quantité fixée de différents sucres (lactose, fructose…) que dégrade ensuite son tube digestif. Ne reste qu’à comparer les traces de ce processus dans l’hydrogène expiré aux normes de référence pour détecter une éventuelle anomalie. Le «breath test» à l’urée, le plus courant, permet ainsi de détecter la présence de la bactérie «Helicobacter pylori», responsable d’une large part des ulcères gastriques ou duodénaux. Et demain? Les chercheurs espèrent pouvoir accélérer le diagnostic de maladies graves que les premiers symptômes, voisins d’affections courantes, ne permettent pas toujours d’identifier suffisamment tôt: cancers de l’estomac ou du poumon, maladies hépatiques… L’enjeu n’est pas mince en oncologie où la précocité du diagnostic est essentielle. Le potentiel est immense et les études se multiplient partout dans le monde. Le but: identifier et recenser les biomarqueurs pertinents et associer telle ou telle pathologie à telle ou telle variation d’une signature chimique, détectée par des «nez» électroniques. Chez Tecnalia, l’un des plus grands groupes privés de recherche d’Espagne, on développe des biocapteurs «capables de détecter la présence d’une large gamme de marqueurs du cancer du poumon dans l’air expiré, explique Eva Ibanez, responsable du département d’innovation médicale. En parallèle, nous avons amélioré la sensibilité des appareils.» Après avoir recueilli des échantillons d’haleine auprès des CORPORE SANO

Les tests d’autodiagnostic créent le débat Les progrès techniques ont permis de commercialiser à bas coût différents examens biologiques autrefois réservés aux laboratoires: glycémie, cholestérol et certains cancers peuvent désormais être diagnostiqués à domicile grâce à des tests facilement utilisables. De là à envisager une vente libre, il n’y a qu’un pas. Si les autorités de santé y voient une piste de réduction du coût et la durée des parcours de soins, certains médecins restent dubitatifs, redoutant les effets d’une mauvaise utilisation de ces tests: faux positifs, interprétation erronée… Même son de cloche du côté de l’Office fédéral de la santé publique (OSFP), qui estime que toute analyse biologique ne peut s’interpréter que dans un contexte professionnel.

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patients d’un hôpital associé, les équipes de Tecnalia les ont comparés avec ceux de personnes saines afin d’identifier les composés les plus pertinents. De la sueur et des larmes Au-delà du souffle, le futur de l’analyse pourrait bien se situer dans les yeux ou sous les aisselles des patients: les larmes et la sueur font partie des fluides les plus prometteurs. Natacha Turck travaille depuis des années à repérer les biomarqueurs protéiques mais aussi les parasites présents dans les larmes. Ils seraient susceptibles de détecter une infection virale, d’orienter le diagnostic médical, d’identifier des risques d’AVC ou de faciliter le suivi de maladies comme la sclérose en plaques. «Ces tests ont l’avantage d’être indolores, peu coûteux, rapides et pratiques: il suffit de placer un buvard contre la cornée pour récupérer un échantillon», explique Natacha Turk. La sueur? Un peu plus long, mais aussi pratique: un simple patch, porté quelques jours, permet de rassembler les quantités nécessaires à l’analyse de marqueurs métaboliques capables de donner des indications sur l’évolution de l’état de santé des patients cancéreux. Et donc d’adapter le suivi thérapeutique. «Dans le cas de patients jusqu’ici soumis à des ponctions lombaires régulières, le gain est évident. Et financièrement parlant, les systèmes de santé pourraient y gagner», anticipe Natacha Turk. Comme pour les COV, le principe est acquis. Reste à mener à bien le patient travail d’études cliniques qui permettra d’étendre le champ de ces nouvelles analyses biologiques. «Nous n’en sommes qu’aux débuts mais les applications concrètes sont à portée de main.» D’ici 5 à 10 ans, l’analyse des larmes pourrait ainsi être aussi pertinente que celle du sang. ⁄


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La sangsue, une petite bĂŞte qui vous veut du bien Texte: MELINDA MARCHESE et Erik Freudenreich

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Hirudothérapie Les propriétés médicinales des sangsues sont connues depuis l’Antiquité. Au CHUV, elles sont utilisées en cas de greffe d’urgence ou de chirurgie reconstructive.

Animal invertébré appartenant à la famille des vers annelés, la sangsue revient au goût du jour tant dans certains cabinets médicaux privés que dans les services de chirurgie des hôpitaux universitaires. «Il y a deux branches principales d’utilisation de la sangsue à l’heure actuelle, explique le docteur Dominique Kähler Schweizer, spécialiste du sujet et cofondatrice de Hirumed, unique élevage de sangsues médicinales en Suisse. Dans les hôpitaux, la sangsue est surtout employée pour son effet mécanique, qui permet d’évacuer le sang en cas de congestion après une intervention de chirurgie réparatrice.» Il n’existe aujourd’hui pas de meilleur moyen pour sauver un greffon. La salive de la sangsue est également appréciée pour ses propriétés anti-inflammatoires et anticoagulantes. «Sa salive comporte plus de 100 composants actifs, dont seulement une trentaine sont bien connus aujourd’hui. Dans les cabinets privés, on l’apprécie tout particulièrement pour ses excellents résultats en cas de tendinites, d’arthroses et de furoncles, mais aussi pour certaines douleurs du dos.»

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élevage

Installée à Wil, dans le canton de Saint-Gall, la société Hirumed possède le seul élevage de sangsues du pays. «Les œufs de sangsue se développent à l’intérieur de cocons pendant six semaines (ci-contre). Entre la naissance d’une sangsue et son utilisation médicinale, il s’écoule ensuite en moyenne près de deux ans», précise Dominique Kähler Schweizer, qui a fondé l’entreprise avec son mari en 2002. CORPORE SANO

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commande

Le CHUV commande régulièrement des sangsues médicinales chez Hirumed. Livrées par camion, elles sont placées dès leur arrivée dans un aquarium situé au sein de la pharmacie principale. Lorsqu’un médecin estime qu’un patient nécessite l’intervention de sangsues, une ordonnance est transmise à la pharmacie de l’hôpital. Cinq ou six sangsues sont alors placées dans un bocal, qui est ensuite remis à l’infirmière du service concerné.

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soin

La sangsue est extraite du bocal à l’aide d’une pince stérile. La première difficulté consiste alors à distinguer la tête de la queue de l’animal, afin de poser la bouche de la sangsue sur la zone à traiter. Une fois en place, l’effet de succion exercé par la sangsue permet de drainer le surplus de sang dans la zone congestionnée. L’hirudine contenu dans la salive de l’animal favorise aussi la fluidification du liquide sanguin. L’infirmière va régulièrement surveiller l’action de la sangsue, qui stoppe sa succion après environ trente minutes. Une fois son repas terminé, elle doit immédiatement être retirée de la plaie du patient. En effet, la sangsue rejette souvent une partie du sang ingéré, avec le risque de provoquer une infection.

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IMAGES: Heidi diaz, philippe gétaz, thierry parel

Le soin terminé, l’infirmière place la sangsue dans un bocal contenant un puissant désinfectant destiné à l’euthanasier. Le récipient étanche est jeté dans un bac pour déchets spéciaux, dont le contenu est ensuite détruit par l’incinérateur de la ville de Lausanne.

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Morphine C 17H 19NO 3

C 17H 19NO3 une molécule, une histoire Texte: bertrand tappy

De manière cyclique, son image continue d’osciller entre sanctification et diabolisation. Une vie tumultueuse pour cette molécule dont la découverte remonte au début du XIXe, même si le pavot – dont elle est issue – était déjà utilisé par l’homme depuis des millénaires.

«On savait de tout temps que l’ingestion d’opiacés était dangereuse et pouvait provoquer une dépendance, explique Thierry Buclin, chef du Service de pharmacologie clinique du CHUV. On a cru avoir trouvé la solution avec l’introduction de la seringue dans les années 1850, remplaçant l’administration orale.» A cette époque, la chirurgie connaît un fabuleux essor grâce à l’invention de l’anesthésie. On n’opère plus seulement les cas désespérés, hurlant de douleur: on peut dorénavant réaliser des interventions sur un patient qui recevra dès son réveil une analgésie convenable.

S’il y a un produit dont la perception n’a jamais cessé de se transformer au fil des années, c’est bien la morphine.

Le produit est puissant, facile à transporter et fait rapidement son apparition sur les champs de bataille. Mais le problème de la dépendance demeure, aggravé même par le recours aux injections. On ne compte plus les récits de patients dépendants et de personnels soignants qui détournent les stocks pour leur consommation personnelle. La situation dégénère à tel point que débute une campagne énergique de restriction et de contrôle des stupéfiants durant la Première Guerre mondiale. «Cette crise s’expliquait peut-être aussi par le

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moralisme de l’époque, et s’accompagnait d’une négligence tragique envers la souffrance des patients, ajoute Thierry Buclin. Je me souviens que des décennies plus tard, durant mes études, la morphine véhiculait encore une image d’extrême-onction, réservée principalement à ceux qui étaient condamnés.» La tendance s’inversera dans les années 1960 suite à l’activisme de pionniers de l’antalgie tels que Cicely Saunders, révoltée par les souffrances endurées par ses patients. Elle mènera un long combat, créant notamment le premier centre de

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soins palliatifs du RoyaumeUni. «C’est le début d’une prise de conscience globale de la souffrance à l’hôpital, continue Thierry Buclin. De nombreux ouvrages sont rédigés dans cette voie (notamment «Anthropologie de la douleur» de David Le Breton) et transforment la manière d’enseigner la gestion de la douleur aux professionnels en promouvant un recours précoce et abondant à la morphine.» Près de 150 ans après son arrivée, la morphine reste donc un produit irremplaçable: «Mais tout n’est pas dit, conclut Thierry Buclin. Alors que l’antalgie reste très insuffisante dans les pays en développement, la consommation d’opiacés augmente nettement dans les régions industrialisées, mais les surdosages, les abus et même les décès reprennent l’ascenseur.» De nouveaux virages en vue? /


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Prof. Diane Morin, directrice de l’Institut universitaire de formation et de recherche en soins

Pour mieux contrôler les coûts de la santé, on attend des soins dispensés qu’ils prouvent scientifiquement leur efficacité. Ce mouvement a aussi suscité le rehaussement des exigences en recherche pour tous les professionnels de la santé afin qu’ils prennent mieux en considération le niveau d’efficacité de leurs interventions. De même, l’implication accrue des patients et des familles est devenue un attribut essentiel des prises de décision complexes.

Un des précurseurs de la pratique clinique basée sur des preuves est certainement Archibald Cochrane qui, en 1972, publie un important ouvrage intitulé Effectiveness and Efficiency: Random Reflections on Health Services. Il y explicite que les ressources disponibles pour les soins de santé seront toujours limitées et qu’en conséquence, elles devraient être utilisées pour offrir des soins dont l’efficacité clinique a été démontrée par la recherche. Il invite les professionnels à s’intéresser davantage à la mise en relation des coûts que les soins engendrent face aux bénéfices qu’ils procurent. Quarante années plus tard, son propos reste contemporain.

Mais des facteurs faisant obstacle à l’utilisation des preuves dans la pratique clinique ont aussi été identifiés. Le manque d’expérience en recherche y figure parmi les plus contraignants. L’Institut universitaire de formation et de recherche en soins, à Lausanne, a entre autres été créé par sept partenaires romands pour participer au rehaussement de l’efficacité des soins pour les professions non médicales de la santé. Il le fait notamment par une offre de programmes de master et de doctorat, par le développement de programmes structurés de recherche, ou encore par des collaborations locales, nationales et internationales dédiées à la recherche sur l’innovation, l’efficacité et l’efficience.

L’adhésion internationale à ce mouvement a donné lieu à la création d’initiatives pour produire des méthodes rigoureuses et outils standardisés permettant de poser des jugements sur l’efficacité et le rapport D’ailleurs, au-delà de guider la prise de décision coût-bénéfice d’interventions de soins. Ainsi, coût-efficacité, la pratique clinique fondée sur on retrouve le Cochrane Collaboration Centre des preuves favorise le leadership, l’imputabilité, et le Joanna Briggs Institute qui ont tous deux l’innovation et la collaboration entre professionnels des ancrages dans plusieurs pays incluant de la santé et avec les patients et leurs familles. ⁄ la Suisse, ou encore le National Institute for Health and Care Excellence de GrandeBretagne qui a inspiré plusieurs instituts nationaux dédiés à la valorisation des pratiques cliniques efficaces et efficientes. patrick dutoit

En savoir plus

www.unil.ch/sciences-infirmieres/

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chronique


cursus

chronique

Pour soutenir l’innovation, il est essentiel que les ressources humaines soient pleinement intégrées à la stratégie de Antonio Racciatti développement de l’instiDirecteur des ressources tution ou de l’entreprise. humaines Au CHUV, elles sont représentées au sein du Comité de direction. ue ce soit dans Partenaires clés, elles participent au l’industrie, les rayonnement de l’hôpital avec des prestanouvelles techtions à haute valeur ajoutée telles que le nologies ou le domaine médical, développement des compétences, l’accompagnement au changement, le coaching l’innovation est et le conseil en optimisation des processus devenue le prinde travail. Cette intégration garantit aussi cipal moteur de que la politique de recrutement réponde développement. parfaitement aux besoins stratégiques Sa capacité constitue une valeur absolue de l’hôpital. autant pour les entreprises privées que Les ressources humaines ne doivent pour les institutions tel le CHUV. Or, ce ne sont pas les organisations qui innovent, donc plus être pensées uniquement comme une fonction de soutien, mais mais bien les personnes qui y travaillent. comme un acteur qui participe pleinement Dans ce contexte, les ressources à la création de valeurs pour l’organisahumaines du CHUV ont un rôle central tion. Tous les projets de développement à jouer: imaginer l’environnement le et de modernisation de la gestion des plus attractif possible pour que ceux ressources humaines au CHUV tendent qui ont la capacité d’innover viennent le faire dans notre institution. L’aménage- ainsi vers cet objectif: faire de la fonction RH un catalyseur d’innovation. ⁄ ment du temps de travail et les perspectives de développement sont des facteurs clés d’attractivité et d’épanouissement des collaborateurs. Cela présuppose que nous soyons nous-mêmes créatifs dans nos modes de gestion, par exemple en favorisant le télétravail quand celui-ci est possible.

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Willy Blanchard

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«L’innovation, notre plus grande valeur!»

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actualité

Fièvre chez les enfants

Publication dans Nature Neuroscience

Une étude publiée dans le New England Journal of Medicine a permis de décrire pour la première fois les causes précises des épisodes fébriles présentés par des enfants vivant en Tanzanie. Cette étude a été menée par un groupe de recherche, dirigé par la Dresse Valérie D’Acremont, spécialiste en médecine tropicale et infectiologie à la Policlinique médicale universitaire à Lausanne. BT

Les travaux de recherche des Drs Alexandre Croquelois et Michel Kielar, du laboratoire de pathologie du développement cérébral du Département de neurosciences cliniques, ont été publiés le 25 mai dans Nature Neuroscience. Cette étude concerne les troubles du développement du cortex cérébral causés par une prolifération neuronale anormale. Dans ce modèle, des amas de neurones normalement différenciés s’organisent en des lieux où ils ne devraient pas être durant la période de gestation du fœtus et de la construction du cerveau, causant par la suite chez l’humain un déficit moteur, un retard mental et de l’épilepsie. Les travaux du Dr Croquelois avaient débuté voilà huit ans, lorsqu’il avait découvert par hasard une souris qui présentait spontanément cette affection au sein de la colonie du laboratoire du Prof. Egbert Welker du département de neurosciences fondamentales de l’UNIL, avec qui il a étroitement travaillé sur ce projet. En collaboration avec plusieurs

pédiatrie

Le CHUV primé à Madrid Plus de 750 projets étaient présentés lors du Congrès de l’European Wound Management Association. Le e-learning de Lucie Charbonneau, infirmière spécialisée, et Raul Prieto du Centre des formations du CHUV, intitulé «An e-learning program to enhance professionnal’s knowledge», a reçu l’un des trois prix décernés aux meilleurs projets. Il traite de la formation des professionnels en matière d’escarre. BT formation

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neurosciences

groupes parisiens, le gène «eml1», responsable de la malformation chez la souris, a ensuite été identifié. Les auteurs de l’étude ont alors examiné des enfants atteints de malformations corticales d’origine inconnue et ont trouvé plusieurs cas humains, issus de deux familles, présentant une mutation du même gène. Ces résultats viennent élargir notre connaissance des gènes et des mécanismes impliqués dans les affections du développement cortical. Ils pourraient être utiles à l’avenir pour le diagnostic pré-natal de ces pathologies et éventuellement, dans un futur plus lointain, permettre de corriger certaines d’entre elles par thérapie génique. BT


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Daniela Dunker Scheuner apprend aux personnes souffrant d’une dépendance à l’alcool à méditer pour éviter le risque de rechute. Texte: émilie Veillon

apis de sol, couvertures, bancs ou coussins ronds. La salle épurée de l’un des pavillons de Cery, siège du Département de psychiatrie du CHUV, se teinte d’une ambiance sereine quelques heures par semaine. Assis dans la position du lotus, une petite dizaine de patients méditent, les yeux fermés, guidés par la douce voix, à l’accent ensoleillé, de Daniela Dunker Scheuner.

Psychologue, responsable de l’Unité d’enseignement des thérapies comportementales et cognitives du Département de psychiatrie et associée au Service d’alcoologie du CHUV, elle invite à porter son attention tantôt sur les bruits alentour, la respiration, les sensations corporelles, les émotions, les envies ou encore les pensées qui traversent l’esprit tels des nuages, sans les juger. «Prendre pleinement conscience de ce qui se passe en soi permet d’identifier et de sortir des

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réactions automatiques qui gouvernent nos actions, pensées et émotions. Cela augmente ainsi notre capacité à tolérer nos états émotionnels, nos envies et y faire face», explique-t-elle. Proposées aux patients présentant une dépendance à l’alcool qui sont dans une démarche d’abstinence, ces séances hebdomadaires sont basées sur une nouvelle approche en pleine expansion en Suisse. Inspirée de deux domaines que tout oppose au premier abord, à savoir la pratique de la méditation orientale et la science occidentale, la «Mindfulness-based relapse prevention», ou prévention de la rechute basée sur la pleine conscience (MBRP), a pour but d’apprendre aux personnes concernées à accepter leurs tentations avec bienveillance, plutôt que de les combattre. «Cela n’a rien d’ésotérique. Au contraire, porter son attention sur les sensations physiques qui sont déjà là, c’est très concret»,

assure cette trentenaire brésilienne qui a mené son cursus académique en psychologie à São Paulo, à l’Université de Genève, puis à l’Université Claude Bernard à Lyon. En 2004, dans le cadre de son nouveau poste au Service d’alcoologie du CHUV, elle se met en contact avec Alan Marlatt, professeur de psychologie et directeur du «Addictive Behaviors Research Center» de l’Université de Washington, à l’origine du modèle de prévention de la rechute et de la MBRP. La psychologue s’investit de plus en plus dans ces deux approches, au point de participer à la traduction française de l’ouvrage de son fondateur, «Prévention de la rechute: Stratégies de maintien en thérapie des conduites addictives» publiée en 2008. Elle se forme ensuite comme instructeur et formateur officiel MBRP auprès de l’équipe d’Alan Marlatt. Elle partage désormais son temps entre ses groupes de patients, ses consultations individuelles et la formation d’autres professionnels afin de diffuser cette méthode en Suisse et en France, tout en pratiquant elle-même quotidiennement la méditation pleine conscience. ⁄


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Inspirée à la fois de la pratique de la méditation orientale et de la science occidentale, la «Mindfulnessbased relapse prevention», ou prévention de la rechute basée sur la pleine conscience (MBRP) est proposée aux personnes souffrant d’une dépendance à l’alcool ou entreprenant une démarche d’abstinence. Cette méthode venue des Etats-Unis permet aux patients l’acceptation de leurs tentations, de manière à mieux prévenir les rechutes.

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vec leur convie les différents L’ornithologue Alexandre Roulin regard chercheurs de la et le biochimiste Stefan Kunz perçant Faculté de biologie étudient les corrélations génétiques et leur hululement et médecine de qui retentit dans la Lausanne (FBM) entre la chouette et l’homme. campagne, au clair pour leur exposer Texte: émilie Veillon, photos: eric déroze de lune, les chouettes les fruits de ses intriguent depuis la nuit des temps. Espèces recherches l’an dernier. Face à lui, Stefan Kunz, protégées pouvant donc être étudiées uniquement biochimiste et professeur associé en virologie à l’état sauvage, elles sont méconnues des milieux fondamentale à l’Institut de microbiologie du scientifiques... A l’exception de l’ornithologue CHUV (IMUL), comprend qu’une collaboration passionné Alexandre Roulin qui concentre depuis scientifique entre leurs deux disciplines s’impose. plus d’une vingtaine d’années ses recherches sur ce rapace nocturne, par le biais de 250 nichoirs Depuis six mois, une équipe composée notaminstallés dans les granges et les hangars à tabac ment par Antonella Pasquato, spécialiste des des vallées de la Broye et de l’Orbe. protéases (des enzymes qui dégradent les protéines) au sein de l’IMUL, et la postdoctorante Professeur de biologie évolutive à l’Université Karin Löw au Département d’écologie et évolution, de Lausanne (UNIL), son travail de terrain sur les se réunit donc une fois par mois pour échanger chouettes effraies cible un constat en particulier: sur l’actualité des deux domaines de recherche le fait qu’elles n’aient pas la même couleur. Leur et créer une méthodologie commune. But de plumage passe du blanc au roux foncé, plus ou l’opération: cibler ces systèmes de gènes et moins tacheté, au sein d’une même population. tenter de les moduler afin d’influer sur certaines Plus curieux encore, ces variations du taux de maladies métaboliques, comme l’obésité. «Il est mélanine sont associées à certains comporterare que des chercheurs de laboratoires et des ments, tels que l’appétit, la sexualité et la résisbiologistes de terrain travaillent ensemble et tance au stress. «Ces nuances seraient causées tentent de développer un langage commun. par une hormone qui stimule la synthèse de la Or avoir accès à une telle base de données sur mélanine, la mélanocortine. Plus son niveau est des animaux sauvages, qui présentent une grande élevé chez une chouette foncée, plus elle sera diversité génétique, est une opportunité extraoragressive, résistante aux parasites et au stress», dinaire pour des microbiologistes qui n’ont en détaille Alexandre Roulin. général accès qu’à des souris de laboratoire», se réjouit Stefan Kunz. Et le biologiste de rappeler Pressentant que cette corrélation entre facteurs qu’une telle collaboration est rendue possible moléculaires et comportements physiologiques grâce au fait que l’UNIL, et c’est la seule en Suisse, pourrait aussi s’appliquer à l’organisme humain, réunisse la biologie et la médecine au sein d’une notamment dans le contexte des maladies, il même faculté. ⁄

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Les TEDxCHUV reviennent Le CHUV organise la seconde édition de ses conférences TEDx! L’événement aura lieu le jeudi 13 novembre au nouveau Swiss Tech Convention Center de l’EPFL. Plusieurs spécialistes du centre hospitalier vaudois, dont le prof. George Coukos et la Dresse Jocelyne Bloch (voir In Vivo n° 1) se produiront autour du thème «Sparlking Innovation». Rendez-vous dans notre édition de novembre pour plus de détails. BT événement

À l’écoute des maladies rares Le CHUV et les

orientation

Bongiovanni Massimo fonction Service de pathologie clinique NOM

PRéNOM

Formé en pathologie et en cytologie aux HUG, Massimo Bongiovanni œuvrait comme vice-directeur de l’Institut cantonal tessinois de pathologie à Locarno. Nommé Professeur associé de l’UNIL, il entrera en fonction au CHUV dès juillet 2014. NOM Müller «J’estime que la pathologie doit vivre PRéNOM Pierre-Yves et évoluer avec les autres spécialités fonction Chef du Département de la médecine, dans un contexte de la logistique hospitalière hospitalier. L’échange avec mes pairs, Ingénieur en mécanique de la recherche en milieu universitaire formation, Pierre-Yves Müller a et la participation à la formation de assumé différentes la relève sont égaresponsabilités de lement primordiaux direction au sein du pour moi.» nominations groupe Bobst entre 1999 et 2012 où il a notamment travaillé NOM Simeoni comme directeur de l’approvisionPRéNOM Umberto nement, de la production et de la fonction Chef du Service logistique ainsi que comme direcde pédiatrie teur général de Bobst SA. Avant de rejoindre le CHUV, Pierre-Yves Umberto Simeoni a enseigné Müller a été le directeur opérationjusqu’en 2001 à l’Université Louis nel du groupe Tornos SA à Moutier. Pasteur et au CHU de Strasbourg, au sein duquel il a assuré la responsabilité des Unités de réanimation néonatale et pédiatrique, ainsi que de la Délégation régionale à la recherche clinique. Auteur d’environ 130 articles scientifiques référencés, de différents livres dans le domaine de la néonatologie, il a également présenté plus de 250 conférences sollicitées, sur un plan global.

cemcav, dr

HUG lancent un service d’assistance téléphonique dédié aux personnes atteintes d’une pathologie rare, mais aussi à leurs familles, aux professionnels et à toute personne qui souhaite obtenir des informations. Il a pour objectif d’écouter les malades et les orienter vers les ressources spécialisées à disposition. Tél: 0848 314 372 (lun-ve 9-12h); www.info-maladies-rares.ch. BT

nominations

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Une carrière au chuv

migration

Joachim Rapin est parti un an et demi au Canada pour étudier au sein de la Faculté de soins infirmiers de l’Université de Montréal. Quelques semaines après son retour, il nous a reçu pour faire le bilan. Pourquoi avez-vous voulu effectuer votre Master en soins infirmiers à Montréal? Nous avions eu la chance d’avoir une présentation de Danielle D’Amour, professeure titulaire de la Faculté de soins infirmiers, durant l’un de nos colloques au CHUV. J’avais été impressionné par la qualité de ses recherches. J’ai donc décidé que si je voulais continuer ma formation, il fallait que je me rende là-bas! Comment s’est déroulée l’organisation du séjour? Les préparatifs ont duré environ une année. Je ne voyageais pas seul: nous avons fait le voyage à quatre avec ma femme et mes deux enfants. En ce qui concerne le budget, on peut estimer que le CHUV a financé un tiers des frais. Pour le toit, nous avons eu de la chance en faisant une rencontre fortuite en Suisse qui nous a permis de trouver une maison en location. Et une fois sur place, nous avons été épatés par le soutien du voisinage, qui a grandement facilité notre intégration.

philppe gétaz

Et concernant les études? J’ai suivi la Maîtrise en soins infirmiers notamment pour son option en administration, orientée spécifiquement pour les services infirmiers.

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NOM Rapin PRénom Joachim AU CHUV DEPUIS 2000 TITRE Infirmier chef de service au Département médico-chirurgical de pédiatrie

J’ai pu effectuer le cursus de manière condensée et resserrer le programme de 24 à 16 mois. La masse de cours – dont certains sont maintenant également enseignés à Lausanne – avait de quoi impressionner. Il faut dire que la Faculté en sciences infirmières de Montréal date de 1926! Vous venez tout juste de rentrer. Quel bilan tirez-vous de cette expérience? Si c’était à refaire, ce serait oui sans aucune hésitation. On gagne toujours à s’ouvrir à d’autres horizons, d’autres cultures professionnelles, que l’on soit soignant, médecin, etc. Je ne pouvais pas imaginer me former dans un seul endroit. Cela laissera une empreinte durable dans ma pratique, dont j’espère pouvoir également faire profiter mon hôpital! ⁄ BT


BACKSTAGE SANGSUES Les photographes Heidi Diaz (CEMCAV) et Thierry Parel sont partis à la découverte des sangsues médicinales dans les coulisses du CHUV à Lausanne et au sein de l’élevage de la société Hirumed à Wil (p. 61).

JEUNESSE éTERNELLE

DR

L’artiste lausannoise Leha Van Kommer a réalisé pour «In Vivo» l’illustration accompagnant l’article consacré à la quête de la jeunesse éternelle (p. 54).

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thierry parel, DR

contributeurs

julie zaugg

romain guerini

Journaliste freelance basée à New York, Julie Zaugg est partie pour «In Vivo» à la rencontre de la scientifique Paula Johnson (p. 30). Elle s’est également intéressée au tabou entourant les relations sexuelles entre patients dans les hôpitaux psychiatriques (p. 50), ainsi qu’à l’impact des impôts sur les aliments gras dans la lutte contre l’obésité (p. 42).

Titulaire d’un Bachelor en communication visuelle et fort d’expériences variées en matière de design, Romain Guerini a rejoint LargeNetwork en 2013. Le poste de graphiste qu’il y occupe lui offre l’occasion de concevoir l’aspect visuel de différentes publications de l’agence, avec pour objectif d’être toujours à la recherche de la belle page.

Benjamin Keller

Heidi Diaz

Journaliste au sein de LargeNetwork, Benjamin Keller détient un Bachelor en relations internationales et un Master en journalisme de l’Université de Genève. Pour ce numéro de «In Vivo», il a enquêté sur les tests de médicaments sur patients en Suisse (p. 39) et a décrypté «l’effet Troxler», une illusion d’optique étonnante (p. 27).

Après des études au Centre d’enseignement professionnel de Vevey, Heidi Diaz a rejoint en 2008 l’équipe du CEMCAV, le Centre d’enseignement médical et de communication audiovisuelle du CHUV. Pour ce numéro de «In Vivo», elle a réalisé une partie du reportage photo consacré aux sangsues médicinales (p. 61).

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In Vivo

Une publication éditée par le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) et l’agence de presse LargeNetwork www.invivomagazine.com

édition

CHUV, rue du Bugnon 46 1011 Lausanne, Suisse T. + 41 21 314 11 11, www.chuv.ch redaction@invivomagazine.com Réalisation éditoriale et graphique LargeNetwork, rue Abraham-Gevray 6 1201 Genève, Suisse éditeurs responsables T. + 41 22 919 19 19, www.LargeNetwork.com Béatrice Schaad et Pierre-François Leyvraz Direction de projet et édition online

Bertrand Tappy remerciements

Responsables de la publication

Gabriel Sigrist et Pierre Grosjean

Direction de projet

Melinda Marchese Alexandre Armand, Aline Hiroz, Anne-Renée Leyvraz, Anne-Marie Barres, Anne-Marie Vuillaume, Bertrand Hirschi, Brigitte Morel, Cannelle Keller, Céline Vicario, direction graphique Christian Sinobas, Christine Geldhof, Deborah Diana Bogsch et Sandro Bacco Gonzales, Denis Orsat, Diane de Saab, Dominique Kähler Schweizer, Elise Méan, Emilie Jendly, Rédaction Enrico Ferrari, Fernando Mendes, Fiona Amitrano, Gilles Bovay, Jeanne-Pascale Simon, Jocelyne LargeNetwork (Jade Albasini, Benjamin Bollmann, Céline Bilardo, Clément Bürge, Marie-Adèle Copin, Erik Freudenreich, Benjamin Keller, Serge Maillard, Bouton, Katarzyna Gornik-Verselle, Laure Espie, Laurent Meier, Lauriane Bridel, Manuela Palma, Melinda Marchese, Jean-Christophe Piot, Geneviève Ruiz, Emilie Veillon, Julie Zaugg), Marie-Cécile Monin, Marité Sauser, Massimo Béatrice Schaad, Bertrand Tappy Sandri, Muriel Cuendet-Teurbane, Muriel Faienza, Nathalie Jacquemont, Nicolas Jayet, RECHERCHE iconographique Odile Pelletier, Pauline Horquin, Philippe Sabrine Elias Ducret Coste, Philippe Dosne, Serge Gallant, Sonia Ratel, Stephan Studer, Stéphane Coendoz, Stéphanie Dartevelle, Thuy Images Oettli, Virginie Bovet, Valérie Blanc, CEMCAV (Willy Blanchard, Eric Déroze, Heidi Diaz, Patrick Dutoit, Philippe Gétaz, Gilles Weber), Véronique Séchet et le Service de Oram Danreuther, Leha van Kommer, João Lauro, Thierry Parel communication du CHUV. Partenaire de distribution

BioAlps

mise en page

Diana Bogsch et Romain Guerini

TRADUCTION

Technicis IMPRESSION

PCL Presses Centrales SA Tirage

17’000 exemplaires en français 3’000 exemplaires en anglais Les propos tenus par les intervenants dans «In Vivo» et «In Extenso» n’engagent que les intéressés et en aucune manière l’éditeur.

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27.05.14

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jeroen bennink

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PAULA JOHNSON Hommes et femmes inégaux face aux médicaments FAT TAX Un impôt contre l’obésité TABOU Le sexe en hôpital psychiatrique Edité par le CHUV www.invivomagazine.com IN EXTENSO La naissance d’un humain


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