LE L’L’ EE uu rr oo pp E Edd aa nn s st t oo uu tt E Es s aas s pp LE nn dd EE uu rr Moto&Loisirs
hhoor rs s s sé ér ri ei e
hors série vacances à moto 2014
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France Bretagne Drôme Hongrie : Budapest, Perle Danube France : La: La Bretagne et et la la Drôme Hongrie : Budapest, la la Perle dudu Danube •• L’île Man sans Tourist Trophy Italie : les délices l’Emilie-Romagne L’île dede Man sans le le Tourist Trophy Italie : les délices dede l’Emilie-Romagne •• Lecteurs voyage : Jamais sans Lecteurs enen voyage : Jamais sans mama fillefille
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est une édition de Think Media Magazines paraît 12 fois par an
DES QUESTIONS? - ABONNEMENTS? Keetberglaan 1b, B-9120 Melsele tél. +32 - (0)3 20 20 100 e-mail: moto-loisirs@thinkmediamagazines.be TVA BE 0441.120.267 RPR Dendermonde
Chacun son thème On donne généralement un thème au hors-série «Vacances à moto» que vous tenez dans les mains. Cette année, plusieurs choix s’offraient à nous. S’en suivirent d’interminables discussions et pourparlers, desquels aucun consensus n’a pu être dégagé. Jusqu’à cette idée lumineuse : et si on choisissait «aucun thème» comme thème ? Une idée saugrenue,
e-mail: moto-loisirs@thinkmediamagazines.be e-mail: abo@moto-loisirs.be (abonnements) internet: www.moto-loisirs.be
qui tient beaucoup du discours politique, mais qui tient finalement la route. Pourquoi
Nos bureaux sont ouverts du lundi au vendredi de 9 à 12 h et de 13 à 17 h
thème particulier ? Pourquoi ne pas donner libre cours à nos envies de voyage, quelles
RÉDACTION Keetberglaan 1b, B-9120 Melsele e-mail: moto-loisirs@thinkmediamagazines.be REDACTEUR EN CHEF Christophe Jardon RÉDACTION Bart De Schampheleire, Nicolas Franckx, Dirk Gossye, Christophe Jardon, Arno Jaspers COLLABORATEURS Erwin Kennis, Chris Wouters, Pieter Paques, Nicolas Franckx MISE EN PAGE Luk Windels TRADUCTIONS Claudine De Kock, Vincent Deligne, Kevin Gillard Anne-Marie Durieu, Nicolas Franckx, Emmanuel Pons PHOTOS Philippe Buissin (Imagellan), Joost De Bock (YellowSmile), Joost Demuynck (Photojoost.com), David Stockman, Beetlestar LICENCES & DROITS D’AUTEUR Frank Vanhove fvanhove@thinkmedia.be CORRESPONDANTS Alan Cathcart
limiter nos escapades à une région particulière ? Pourquoi limiter nos destinations à un qu’elles soient ? Voyager en famille ? C’est possible, même dans les configurations les plus originales ou inédites, comme un père accompagné de sa fille pendant que maman reste à la maison. Visiter l’île de Man, célèbre pour son Tourist Trophy, mais aussi pour ses innombrables curiosités touristiques ? C’est possible, c’est d’ailleurs un ancien pilote qui vous y emmène. Partir à la découverte des spécialités gastronomiques de l’Italie ? Excellente idée ! Allons goûter du vinaigre balsamique, du jambon de Parme et du Parmesan… Un city-trip à Budapest ? Vous ne le regretterez pas, tout comme notre confrère Nicolas, qui a vécu dans cette région d’Europe dans «une vie antérieur»… Bref, à chacun ses envies, à chacun son thème de voyage, pourvu que le dépaysement, le plaisir de conduite et le partage des sensations soient au rendez-vous. Bonne lecture, et bonnes vacances !
LA RÉDACTION
SALES DIRECTOR Karen De Ridder kderidder@thinkmedia.be tel. +32 (0)3 20 20 100
©
Tous droits réservés pour tous pays. Aucune partie de ce magazine (articles, photos, matériel publicitaire) ne peut être reproduite, en tout ou en partie, sans autorisation expresse et écrite de l’éditeur. Les lettres publiées dans la rubrique courrier des lecteurs n’engagent que la responsabilité de leur auteur. Les textes et photos envoyés par les lecteurs sont les bienvenus, la rédaction se réservant néanmoins le droit de publication. Toute photo non demandée ne pourra être réclamée ultérieurement. Les frais de port sont à charge du destinataire. Les données personnelles communiquées par vos soins sont utilisées pour répondre aux demandes concernant les abonnements, les concours, les actions spéciales, et les questions des lecteurs. Ces données sont reprises dans le fichier d’adresses de Meta Media, afin de vous tenir au courant de nos activités. Sauf opposition écrite de votre part, ces données peuvent être transmises à des tiers. Vous avez toutefois toujours le droit de consulter, de modifier ou de supprimer ces données.
EDITEUR RESPONSABLE Maurice Develder, adresse de la rédaction Membre de la Fédération de la Presse Périodique Belge
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La Bretagne insolite
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Mini-trip à Budapest
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Voyage au ventre de l’Italie
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La Drôme qui fait rêver
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L’île de Man sans le Tourist Trophy
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Lecteurs en voyage : à Paris avec ma fille
Vous trouverez plus d’informations pratiques sur les voyages en surfant sur www.moto-online.be, sous le lien moto&loisirs. MOTO & LOISIRS J UI N 2 0 1 4
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FRANCE EN PASSANT PAR LA BRETAGNE
Le mariage de
l’eau
et du
Baignée de tous côtés par la mer, la Bretagne est une région à part, une terre de caractère. Son littoral, sauvage et découpé, est émaillé de pittoresques petites baies bien abritées. Les tables des restaurants mettent l’eau à la bouche avec leurs alléchants plateaux d’huîtres et de fruits de mer servis sur un lit d’algues et de glace. Ou les marmites de moules fraîchement cueillies qui viennent titiller les narines. Il y a quelques millénaires, les hommes qui vivaient là dressèrent des mégalithes qui nous impressionnent encore aujourd’hui.
TEXTE ET PHOTOS: Erwin Kennis
L
a plage, déserte, est noyée dans la brume que percent les cris stridents des mouettes. Sur les rochers, profitant de la marée basse, des ramasseurs de coquillages sont à l’œuvre, pliés en deux. Une femme se balade à vélo, une baguette dans son panier. Voilà la vue qui s’offre à nous depuis les remparts médiévaux qui ceinturent la ville de Saint-Malo sur près de deux kilomètres. Au Moyen Age, les six portes de la cité corsaire se refermaient inexorablement à 10 heures du soir pile et des chiens féroces étaient lâchés le long des remparts pour mettre la ville à l’abri des intrus. Autres temps, autres mœurs… Il y a belle lurette que les «chiens du guet» ont disparu du paysage, mais ils figurent encore sur les armoiries de la ville et sur les plaques d’égout.
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Le chemin de ronde aménagé sur les remparts est le meilleur moyen pour profiter d’une superbe vue plongeante, sur la ville et sur la côte. Les étroites ruelles de la vieille cité sont engorgées de voitures qui font du coude à coude entre les élégantes façades de magnifiques demeures. Construites au 18e siècle par de riches marchands, celles-ci furent nombreuses à être réduites en cendres par les bombardements… alliés de la Seconde Guerre mondiale. Voici comment cela s’est passé. Les Allemands occupaient la Cité d’Alet, une presqu’île tout à côté de Saint-Malo. Un fort médiéval s’y trouvait, qu’ils renforcèrent d’un réseau de 32 bunkers bourrés d’artillerie. On ne pouvait imaginer meilleur poste d’observation. Mais en 1944, cela commençait à sentir le roussi pour les Allemands. Lorsque les Malouins apprirent que l’arrivée des Alliés était proche, ils crurent bon de renseigner leurs sauveurs en leur disant que la «Cité» était pleine de troupes allemandes lourdement armées. Afin d’en déloger ses indésirables occupants, l’armée américaine décida de bombarder «the city full with Germans». Ils pilonnèrent la ville de Saint-Malo, qui se trouva détruite à 80%. Depuis leur nid d’aigle de la «Cité d’Alet», les nazis se seront bien marrés en admirant ce feu d’artifice gratuit. Eh oui, «city» ou «cité», une nuance mal interprétée qui eut des conséquences désastreuses. Maintenant que nous en savons un peu plus sur le déroulement des événements, il est temps de repartir, en direction de l’ouest. Un impeccable ruban d’asphalte longe par moments la côte, puis bifurque vers l’arrière-pays pour revenir, quelques kilomètres plus loin, flirter à nouveau avec le littoral. Dans le lointain, un énorme phare émerge des brumes matinales. Ce doit être celui du Cap Fréhel, un pouce géant s’avançant en mer, fait de rochers et d’impressionnantes falaises. Le site est grandiose. Les rayons du soleil
France
En passant par la Bretagne
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En passant par la Bretagne
France
Saint Malo
parviennent à percer la brume par endroits, teintant d’or la roche et la mer, mais la grisaille ne semble pas près de s’évaporer. C’est bien dommage, car la route serpente joliment le long de belles falaises. Sans cette purée de pois, la vue doit être sublime. Nous descendons un instant de nos montures pour admirer le spectacle prodigieux qui se déroule une bonne cinquantaine de mètres en contrebas. Les vagues viennent se fracasser contre les rochers dans un vacarme assourdissant. L’écume blanche formée par le ressac s’élève en l’air, s’envole avec le vent et vient se déposer sur les roches de granit.
Abc
de langue celtique
La route serpente de village en village et finit par s’éloigner de la côte. Les Bretons semblent préférer habiter au bord de mer, car l’habitat est nettement plus épars à l’intérieur du pays. Nous
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Chateau
du
Taureau
France
Chateau
du
En passant par la Bretagne
Taureau
Saint Malo
nous enfonçons dans la Bretagne profonde en passant par Saint-Brieuc et Paimpol. Les villages que nous traversons portent des noms bizarres : Plourhan, Kermaria, Treverec… et j’en passe. Le breton est une langue celtique. Il était parlé par les tribus celtes qui peuplaient la Grande-Bretagne et qui débarquèrent en Armorique vers l’an 500 av. J-C. En breton, «plou» signifie «commune, paroisse», «ker» se traduit par «maison» et «tre» désigne un quartier ou un hameau. Après avoir tournicoté dans l’arrière-pays breton, nous débouchons à Perros-Guirec. La station balnéaire est bâtie tel un amphithéâtre encadrant une baie que borde une plage de sable fin. C’est marée basse. Les petits bateaux de pêche et de plaisance gisent sur le sable dans des positions cocasses. On dirait qu’ils sont tombés et qu’ils n’arrivent plus à se relever. Pour y parvenir, il faudra que l’eau revienne avec la marée montante. Sachez qu’entre
marée basse et marée haute, la différence de niveau atteint ici 14 mètres! Un record européen. Perros-Guirec est une petite station balnéaire charmante, typiquement bretonne, qui donne envie de s’y poser. Ce que nous faisons d’ailleurs sans hésiter. Le lendemain matin, nous sommes réveillés aux sons d’un vacarme en provenance de la rue : c’est jour de marché. Chouette ! Les étals regorgent de tout ce que la mer a de meilleur à offrir. Des crabes, des moules, des huîtres à profusion. Un connaisseur nous explique que, pour voir si des huîtres sont fraîches, il faut cogner deux huîtres l’une contre l’autre. Si cela fait «toc-toc», c’est qu’elles sont fraîches ! Bon à savoir… Tous ces délices nous donnent envie d’aller écumer le littoral. A moto bien sûr. Nous suivons la «Corniche bretonne» qui relie Perros-Guirec à Trébeurden. Un mince ruban d’asphalte zigzague sans relâche entre rochers et falaises. De jolies courbes
nous amènent en haut d’un plateau qui domine l’océan d’une cinquantaine de mètres. Cette route porte bien son nom de «Corniche bretonne». On a vraiment l’impression d’admirer le panorama du haut d’une énorme corniche. A hauteur de Ploumanach, nous redescendons au niveau de la mer. Des rochers de granit dans toutes les nuances de rose et de mauve s’y amoncellent dans un étonnant désordre. Ils présentent les formes les plus curieuses qui leur valent les appellations de lapin, tortue ou éléphant. Ce chaos rocheux est entrecoupé de petites criques où des vaguelettes d’eau turquoise et transparente viennent lécher le sable blond. C’est un site superbe, où le temps glisse imperceptiblement, où on resterait des heures à méditer.
Tintin Nous poursuivons notre route vers l’ouest et quittons la côte pour l’arMoto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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En passant par la Bretagne
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France
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EN PASSANT PAR LA BRETAGNE
Un mince ruban d’asphalte zigzague sans relâche entre rochers et falaises. De jolies courbes nous amènent en haut d’un plateau qui domine l’océan d’une cinquantaine de mètres. Cette route porte bien son nom de «Corniche bretonne».
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rière-pays. A hauteur de Morlaix, n ous apercevons à nouveau la mer avec, au loin, les contours d’un fort qui émerge de l’eau telle la proue d’un navire échoué. Parvenus à Carantec, nous mettons la béquille centrale et appareillons sur un petit bateau qui nous emmène au fort. Une bande de joyeux et bruyants écoliers sont également à bord, ils font la même excursion que nous. Le chahut cesse quand le capitaine (et guide) souhaite la bienvenue
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France
dans le haut-parleur. Après les quelques consignes de sécurités habituelles, il nous parle de la petite île, pas plus grande qu’un mouchoir de poche, avec son phare et son unique maison. Elle n’est distante que de 100 mètres de nous, à bâbord. Et voilà qu’il évoque Tintin. Il nous apprend qu’Hergé se serait inspiré de cet îlot pour son album «L’Ile Noire». Les enfants sont tout ouïe. Ensuite, le bateau se dirige droit sur le «Château du Taureau». Il s’agit d’un fort
de forme ovale qui fut édifié au 16e siècle sur un gros caillou allongé qui émergeait à peine de l’eau. A cette époque, les relations entre la France et l’Angleterre ne cessant de se dégrader, les Français entreprirent la construction d’un chapelet de forts le long de la côte et sur des îlots rocheux au large afin de protéger leurs ports et de repousser une éventuelle invasion des Anglais. La vedette accoste au débarcadère. Nous accédons au fort par un pont-levis.
France
D’emblée, un guide nous fait passer par la cour intérieure sur laquelle donnaient les logements des soldats. Ce n’est que fin 17e siècle que le fort prit sa forme actuelle, lorsque Vauban, l’architecte de Louis XIV, transforma la forteresse. Nous montons à l’étage, où logeaient les officiers. Puis, par un escalier en colimaçon, nous gagnons le toit. Il est entouré par un mur d’un mètre et demi d’épaisseur dans lequel sont percées des meurtrières. D’antiques canons tout rouillés sont (encore toujours…) pointés sur l’Angleterre. Lorsque retentit le sifflet du capitaine de notre bateau, nous nous rendons à son bord sans traîner, car nous savons qu’il ne va pas tarder à mettre le cap sur la terre ferme. A peine débarqués, nous enfourchons nos motos, toujours direction Ouest. La D58 traverse un estuaire que le reflux a asséché, avant d’obliquer vers une presqu’île au bout de laquelle se trouve Roscoff. Nous entrons dans la petite ville et laissons nos motos au port. Des pêcheurs s’affairent à réparer
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leurs filets, tandis que de petits bateaux de pêche au nom imprononçable reçoivent une couche de peinture. Nous grimpons sur le mur bordant le quai. Non loin de là, nous apercevons l’île de Batz qui se voit envahie, en été, par les touristes d’un jour. Ils prennent le petit bateau qui fait la liaison et y débarquent en nombre, à pied ou à vélo, le panier de pique-nique bien rempli. Ils viennent ici pour faire bronzette au calme, sur une des nombreuses plages de sable que compte l’île, bordées de végétation subtropicale.
Une
moto en prière
Nous ne passons pas trop de temps à Roscoff et reprenons nos motos en direction de l’intérieur des terres. De Morlaix, une petite route serpente vers le Sud. Le paysage se fait de plus en plus aride, et l’habitat de plus en plus rare. L’avantage est que les routes, bien dégagées, nous donnent l’occasion d’ouvrir à fond la manette des gaz. Nous évoluons à belle
allure dans un paysage bucolique de prairies parsemées de bosquets. Après un léger virage apparaît un bâtiment en ruine. Une église, dont il ne subsiste que quelques vieux murs de pierre décrépits. Le toit a déjà rendu l’âme. Les fidèles peuvent s’adresser au ciel en ligne directe. L’envie nous prend de positionner notre moto en plein milieu de la nef centrale. Voilà une photo originale. Quelques kilomètres plus loin, voici Huelgoat, qui signifie quelque chose comme «bois élevé». La place de la localité ressemble à n’importe quelle place française, avec une église, la mairie, un tabac, une boulangerie et un vieux banc sous un arbre. Jusque là, tout va bien. Là où cela devient plus étrange, disons que cela tient presque du mystique, c’est dans les bois, après les dernières maisons. Nous y allons en reconnaissance, à pied, et découvrons, ébahis, un spectacle étonnant mêlant rochers chaotiques et végétation luxuriante. D’énormes blocs de granit, dont certains sont aussi grands qu’une maison, Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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La route qui longe la «Côte Sauvage» est sublime et procure de belles sensations motoresques. C’est une des plus belles routes de Bretagne à faire à moto. Elle passe à travers des dunes couvertes d’oyats. La mer n’est jamais bien loin, avec ses vagues qui viennent mourir sur la plage ou se briser contre les rochers.
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Huelgoat
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sont éparpillés là, pêle-mêle, prenant les formes les plus étranges. Dans ce pays de légende, on dirait que c’est l’œuvre d’un géant qui, passant par là, aurait négligemment jeté quelques gros cailloux sans s’imaginer que ce décor pourrait se transformer en antre parfait pour le diable. Les rochers sont recouverts d’une mousse d’un vert profond. Un petit chemin permet de se faufiler entre les gros blocs granitiques. Un peu plus loin, nous tombons sur une pancarte «Grotte du Diable». On descend par une petite échelle en fer pour parvenir dans une grotte où l’on entend un murmure entre les rochers. Est-ce un ruisseau ? Est-ce le diable qui siffle entre ses dents ? Nous avons notre compte de mystère et nous remettons le contact pour poursuivre notre route. A Carnac, nous débouchons sur l’océan Atlantique. Nous parcourons la presqu’île de Quiberon, qui est comme un long doigt qui s’avance en mer. La route qui longe la juin 2014 Moto & Loisirs
France
«Côte Sauvage» est sublime et procure de belles sensations motoresques. C’est une des plus belles routes de Bretagne à faire à moto. Elle passe à travers des dunes couvertes d’oyats. La mer n’est jamais bien loin, avec ses vagues qui viennent mourir sur la plage ou se briser contre les rochers. Spectacle permanent garanti, inchangé depuis la nuit des temps…
Au
temps d’Obélix
Quiberon n’est qu’à une dizaine de kilomètres de Carnac. Cette petite station balnéaire a beau avoir une superbe plage de sable fin, ce n’est pas elle qui y attire les touristes en masse. Ce sont des pierres. L’étymologie du nom «Carnac» fait référence au «karn» celtique qui signifie «pierre, rocher». Pas de simples petites pierres bien sûr, mais des mégalithes (grandes pierres), dolmens et menhirs. C’est dans des prairies entourant la ville que se trouvent les fameux alignements.
Ces monuments, érigés à la préhistoire, ont plus que probablement un rapport avec des rituels liés au culte du soleil et de la lune. On en compte près de 3000, rien que dans la région de Carnac. Ces alignements font depuis toujours la célébrité de la petite bourgade, immanquablement associée à la préhistoire et aux menhirs, au même titre que la Britannique Stonehenge. Une balade parmi ces menhirs étant incontournable, nous l’avons faite, nous attendant à chaque instant à voir débusquer Obélix de derrière un menhir. Cela procure un sentiment étrange de se plonger ainsi dans l’époque si lointaine de la préhistoire. Pour clôturer en beauté notre voyage en Bretagne, nous faisons le tour du Golfe du Morbihan via Vannes. Il est parsemé d’une multitude d’îles, toutes plus belles les unes que les autres, particulièrement au soleil couchant. Une étroite route épouse le rivage de la petite mer intérieure. Qu’est-ce qu’un motard peut rêver de mieux ? Peut-
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EN PASSANT PAR LA BRETAGNE
VanneS
être un petit verre de rosé bien frais, à une terrasse, avec vue sur l’eau… •
INFOS
PRATIQUES
Distance Bruxelles - Saint Malo: 640 km, dont , carte Michelin Authorisatuin n° 08-B-09.
600 d’autoroute. Où dormir? • Saint – Malo: Hôtel Chateaubriand (garage pour les motos) www.hotel-chateaubriand-st-malo.com •Perros – Guirec: Hôtel Les Costans (parking fermé pour les motos) www.hotel-les-costans.fr •Carnac: Hôtel Le Tumulus (parking, mais pas fermé) www.hotel-tumulus.com La meilleure période ? De juin à septembre. En évitant la haute saison, du 14 juillet à fin août. Infos générales: www.tourismebretagne.com
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Office Français du Tourisme en Belgique: Avenue Louise 222 à 1050 Bruxelles ©
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La Hongrie Budapest
La Perle du
Danube
Il est des destinations
Pendant ces années passées en Moravie, Budapest était la destination évidente pour un minitrip : proche et exotique à la fois, trépidante avec ses deux millions d’habitants et sa vie nocturne, reposante avec ses cures thermales et ses espaces verts, gourmande avec ses innombrables salons de thé, sportive avec ses interminables boulevards où la promenade se transforme vite en trekking urbain…
dont on ne se fatigue pas, des villes ou des régions où l’on peut toujours revenir avec plaisir, à la fois parce qu’on y a ses petites habitudes, ses lieux de pèlerinage, mais aussi parce qu’on est certain d’avoir encore des choses nouvelles à y découvrir. Pour moi, Budapest est l’un de ces lieux où me ramène périodique-
Deux
ment la douce nostalgie d’une vie antérieure, doublée
Il est bien sûr toujours facile d’écrire sur le thème de «la ville aux cent visages», mais ce qui est certain dans le cas de Budapest, c’est que vous visiterez deux villes en une. La capitale historique, Buda, est nichée sur une colline de la rive nord du Danube. Elle surplombe la cité marchande de Pest. Ces deux parties distinctes de la ville ne se sont administrativement unies qu’en 1873. Aujourd’hui encore, l’atmosphère est très différente d’un côté du fleuve et de l’autre. Sur la colline de Buda, les touristes amateurs d’histoire se régalent de la forteresse et des musées, et jaugent au passage les grosses berlines et les villas imposantes de la haute bourgeoisie hongroise. En bas, à Pest, l’ambiance est plutôt au shopping dans la rue commerçante de Vaci Utca, et à la flânerie sur les berges du Danube. Un conseil : laissez votre moto à l’hôtel pour mieux profiter de la visite. Ici, la circulation est incessante sur les boulevards, et dans les ruelles adjacentes, le plan de circulation est cauchemardesque. Si vous êtes fatigué, vous rentrerez à l’hôtel le soir en métro (attention, contrôle des billets très fréquent !) ou à pied pour vous aider à digérer votre repas. Car autant vous
d’une curiosité jamais assouvie pour la Hongrie.
Texte: Nicolas Franckx Photos: Philippe Buissin – Imagellan
«N
ostalgie d’une vie antérieure» est évidemment une expression à prendre au second degré. Non, l’auteur de ces lignes ne pense pas être la réincarnation d’un guerrier nomade magyar arrivé à cheval dans la plaine du Danube il y a plus d’un millénaire. Pas plus qu’il n’a la conscience floue d’avoir résisté des décennies à l’envahisseur mongol ou ottoman, ou d’être une espèce en voie de disparition au milieu des peuples slaves et germaniques. Mais quelques années passées en Europe centrale suffisent bien, avec le recul, à faire une vie antérieure, non ?
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capitales en une
La Hongrie
Budapest
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Budapest
La Hongrie
prévenir tout de suite, les Hongrois mangent beaucoup, et l’on vous servira des assiettes pantagruéliques dans tous les restaurants. La viande est presque toujours panée, souvent accompagnée de pommes de terre ET de riz, et enfin, la bière, par ailleurs très bonne, est servie par demi-litre, comme partout en Europe centrale… Bref, si vous veniez pour faire régime, passez votre chemin !
Elisabeth
qui ?
Après une journée de tourisme à pied, tout bon motard a la poignée de gaz qui le démange. C’est évidemment aussi notre
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cas, malgré les 1400 kilomètres de route avalés depuis la Belgique. Notre VFR 1200 ne profitera donc que d’une journée de congé, et nous emmènera visiter les alentours de la capitale hongroise. Notre première escapade a pour objectif une petite ville au nom improbable de Gödöllő. Il n’y aurait rien d’extraordinaire ici si l’un des proches conseillers de la reine MarieThérèse d’Autriche n’y avait fait construire un château vers le milieu du XVIIIe siècle. «Pas de quoi en faire un plat», nous direzvous, si ce n’est que ledit château a ensuite été donné au XIXe siècle à l’impératrice Elisabeth et son mari, l’empereur François-
Joseph, en cadeau de mariage. Or, l’impératrice Elisabeth n’est autre que la célèbre Sissi, presque aussi belle en vrai que ne l’était Romy Schneider du temps de sa splendeur. Sissi, passionnée par la langue et l’histoire hongroise, a toujours plaidé pour que plus d’autonomie soit donnée à la Hongrie. Elle y est donc devenue l’objet d’un culte national. Le souvenir de la charmante et généreuse impératrice est donc aussi présent ici qu’à sa résidence principale, le château de Schönbrunn, et la visite du château de Gödöllő est émaillée d’anecdotes à son sujet. Plus sérieusement, et sans suc-
La Hongrie
comber à la Sissimanie, le château vaut le détour pour ses très beaux intérieurs, son théâtre (le seul théâtre baroque de Hongrie) et ses superbes jardins.
Piste
ou piscine ?
Après ce bain de culture et sur le chemin du retour vers Budapest, nous passons par le Hungaroring. Ce circuit est fort récent, puisqu’il date du milieu des années 80. A l’époque, l’inusable Bernie Ecclestone cherchait à convaincre les autorités soviétiques d’organiser un Grand Prix de F1 en URSS. Faute de trouver un accord, il s’était tourné vers les pays satellites d’Europe cen-
trale. C’est la Hongrie qui s’était montrée la plus réceptive : le circuit avait été construit en quelques mois. Le jour de notre passage, les lieux sont quasi déserts, même si on entend quelques voitures de rallye faire des essais. Renseignements pris, aucune séance de roulage n’est prévue pour les motos dans les prochains jours. Tant pis, nous ne tâterons pas de cette piste qu’on dit traître, avec ses enchainements de virages rapides et lents, et sa surface bosselée. D’ailleurs plutôt que de nous faire suer en combi, si nous passions au maillot pour quelques heures de relaxation aux bains publics ? Alterner sauna et douche froide,
Budapest
hammam, piscine, et bain à bulles semble être une bonne manière de poursuivre agréablement l’après-midi. Délaissant la clientèle huppée des bains de l’hôtel Gélert, nous préférerons le public plus populaire des bains du bois de la ville, le Népliget. Les thermes y ont pour cadre de très beaux bâtiments néo-classiques dans les tons jaunes. On y paye l’entrée pour quatre heures, mais les clients qui sortent au bout de deux heures ou trois heures peuvent se faire rembourser une partie du prix. Le personnel aussi jovial que multilingue fait régner une discipline bon enfant de colonie de vacances. Bien détendus après ces Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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Budapest
La Hongrie
Le jour de notre passage, le Hungaroring est quasi désert, même si on entend quelques voitures de rallye faire des essais. Renseignements pris, aucune séance de roulage n’est prévue pour les motos dans les prochains jours. Tant pis,
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La Hongrie
Budapest
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Budapest
La Hongrie
moments de paresse aquatique, nous terminerons notre journée en mangeant «léger», c’est à dire en nous contentant d’une pâtisserie dans une cukraszda (salon de thé). Si vous ne savez pas quoi choisir, goûtez la spécialité locale : le somloi galuska, une composition mêlant de la génoise, de la confiture, de la crème vanille et un coulis de chocolat, le tout parsemé de raisins secs. Rien que ça !
Saint-Trop’
sur fleuve
Le lendemain, nos pérégrinations nous mènent dans ce qu’il est de coutume d’appeler «la boucle du Danube», région au
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nord de Budapest où le fleuve change de cap, se mettant à couler du Nord au Sud plutôt que d’Ouest en Est. Boisée, vallonnée, la boucle du Danube est riche en curiosités touristiques, et nous réserve quelques paysages exaltants. Notre premier arrêt est Szentendre, dont le nom vient du saint patron local, Saint-André. Ce village est depuis l’entre-deux-guerres devenu un lieu célèbre, apprécié des artistes, dont beaucoup s’y sont installés ou y ont acheté une résidence secondaire. Sous le régime communiste, les cadres du parti aimaient aussi y parader pour marquer leur appartenance à l’élite. Ils ont depuis été remplacés par
les hommes d’affaires, industriels et politiciens, qui s’y font beaucoup plus voyants encore que les stars. Les jours d’été, des milliers de curieux et quelques paparazzis achèvent de donner à ce lieu des allures de «Saint-Trop’ sur fleuve». Heureusement, lorsque nous nous y arrêtons, il fait frais et un peu couvert, ce qui nous permet de profiter du charme des ruelles du village sans devoir nous frayer un chemin à travers la foule.
Rencontres
au sommet
Une vingtaine de kilomètres plus loin, nous arrivons à Visegrad. Le toponyme
La Hongrie
Budapest
La capitale historique, Buda, est nichée sur une colline de la rive nord du Danube. Elle surplombe la cité marchande de Pest. Ces deux parties distinctes de la ville ne se sont unies qu’en 1873. Aujourd’hui encore, l’atmosphère est très différente d’un côté du fleuve et de l’autre. n’est pas hongrois, il est slave et signifie «château haut». On trouve d’ailleurs le même à Prague et en Bosnie. Planté sur une colline dominant le Danube, le château s’aborde évidemment par une petite route viroleuse comme on les aime, qui se prêterait idéalement à une course de côte. Plus prosaïquement, il est fort probable que vous fassiez une bonne partie de la montée derrière un car de touristes, avant de trouver l’ouverture pour dépasser cet infâme engin qui vous pourrit la route ! Il vous restera alors à nous imiter, c’est à dire à monter et descendre plusieurs fois, à la recherche du bon «spot» pour
les photos de paysage et photos d’action. Une fois les clichés dans la boîte à souvenirs, n’oubliez tout de même pas d’aller visiter le château, qui est bien plus qu’un chouette arrière-plan pour une VFR en virage. Lieu habité depuis peu après l’an mil, Visegrad n’est devenu une place forte qu’après l’invasion des Mongols, repoussés avec succès par les Hongrois. Mais ce n’est qu’au XIVe siècle que la forteresse acquiert ses lettres de noblesse : lorsqu’en 1335 s’y rencontrent les rois de Hongrie, de Pologne et de Bohême, pour y signer une alliance. Abandonné après les invasions turques du XVIe siècle, le château ne sera restauré que
tardivement, fin XIXe. Ayant retrouvé toute la splendeur du temps jadis, il accueille à nouveau les dirigeants des trois mêmes pays (des présidents, cette fois), en 1991. Un nouvel accord y est signé, qui met l’accent sur la coopération économique.
Le Vatican
hongrois
Une petite descente de route plus tard – on commence à la connaître par cœur ! – le V4 Honda continue son chemin en ronronnant vers la ville d’Esztergom, autre haut lieu historique du pays. Haut lieu tout d’abord parce que le monument principal de la ville est une fois de plus juché au Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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Budapest
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La Hongrie
La Hongrie
Budapest
Une petite descente de route plus tard, le V4 Honda continue son chemin en ronronnant vers la ville d’Esztergom, autre haut lieu historique du pays.
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Budapest
La Hongrie
sommet d’une colline dominant le fleuve. Mais il ne s’agit pas cette fois d’un château, mais bien d’une basilique, la plus grande de Hongrie et même d’Europe centrale. Erigée en presque 50 ans au XIXe siècle, la basilique d’Esztergom arbore un style néo-classique un peu pompier… enfin, c’est un avis personnel, vous ne trouverez ça dans aucun guide de voyage ! Si les architectes ont vu si grand, c’est qu’il fallait bien célébrer les 240 ans (de 972 à 1242) pendant lesquels Esztergom a été capitale de la Hongrie. C’est ici qu’est né en 975 le roi Etienne 1er, qui s’est converti au christianisme, emmenant le peuple hongrois dans sa foulée. Le roi Etienne a ensuite créé à Esztergom un archidiocèse, en faisant le centre religieux du pays. Pour ceux qui souhaitent se rafraîchir en été ou se réchauffer en hiver, l’entrée à la basilique est gratuite. Seules certaines parties réservées aux âmes ferventes (les cryptes notamment) ont un accès payant.
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Bassement matérialistes et épicuriens que nous sommes, nous préférons garder nos sous pour un dernier gueuleton au restaurant, généreusement arrosé de bière. Nous rentrons donc à notre hôtel, en passant par les collines serties dans la boucle du Danube. Une fois la monture au garage, nous prenons le «tram souterrain», c’est-à-dire le premier métro de Budapest. Construit peu profond, contrairement au métro soviétique beaucoup plus tardif, ce «tram souterrain» a été mis en service en 1896, et est donc le second plus vieux métro d’Europe après celui de Londres. Superbement restauré, il offre au voyageur, à défaut de déplacements très rapides, une plongée dans un délicieux univers fin de siècle.
attirent aussi bien les touristes comme nous que les Budapestois. On y apprend d’ailleurs qu’une bonne moitié du foie gras du Périgord est en fait hongrois… et vendu moins cher ici ! Une petite conserve trouvera sa place dans nos valises, en compagnie d’un peu de paprika, d’ail, et de la liqueur d’abricot. Les emplettes sont terminées, il est temps de rentrer ! •
Info
pratique
Trajet : Budapest est à environ 1.350 km de Bruxelles en passant par l’Autriche, et 1450 en passant par la Tchéquie. Le plus raisonnable est de faire le voyage en deux jours, avec par exemple un arrêt touristique à Prague ou à Salzbourg.
Un voyage dans le temps, c’est aussi ce que nous procure notre dernière excursion du lendemain matin aux halles. Les échoppes bien rangées et débordant de fruits, légumes et spécialités locales
Vignettes : Les motos sont exemptées de vignettes sur les autoroutes tchèques et slovaques, mais pas sur les autrichiennes et hongroises. La vignette hongroise peut main-
La Hongrie
Budapest
tenant se payer sous forme électronique sur le
Devise, change : La monnaie hongroise
Logement : Ce ne sont pas les hôtels qui
site www.motorway.hu
est le forint (code HUF). 1 euro vaut plus ou
manquent à Budapest. Voici le site internet
moins 300 forints. Vous pourrez retirer de
du nôtre, décentré, mais bien desservi par le
Sécurité routière : On ne rigole pas avec la
l’argent à n’importe quel distributeur à l’aide
métro, calme, accueillant et disposant d’un
sécurité routière en Hongrie ! Les contrôles
d’une simple carte Maestro, avec des frais de
parking intérieur : www.manzardpanzio.com
radar sont assez fréquents, et le taux d’alcoo-
change très limités.
lémie autorisé est de 0,0 tout comme dans les autres pays d’Europe centrale. Vous voilà prévenus !
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Italie Dans le ventre de l’Italie
une d’été Entre la mer adriatique et les Apennins, la région appelée Emilie-Romagne forme le «ventre» de l’Italie. Parler de «ventre» pour évoquer cette région du monde n’est pas sans conséquence sur notre imagination. On pense immédiatement à de délicieuses choses à manger, et notamment à du parmesan, ou à d’autres ingrédients typiques qui font le charme de la gastronomie italienne, comme le vinaigre balsamique. Stefan Meyer et Lars Wennersheide ont sillonné les routes cette région également bien connue des amateurs de vélo et de sport moteur.
Texte: Lars Wennersheide Traduction: Bart De Schampheleire/Christophe Jardon Photos: Stefan Meyer
L
e petit village de Rubbiara di Nonantola ne compte pas plus d’une dizaine de maison, et ses ruelles sont si étroites que nos grosses BMW six cylindres ont pas mal de difficultés à les parcourir. C’est pourtant ici que se trouve la taverne «Osteria Pedroni». Pas étonnant que les anciens du village nous suivent du regard, cachés derrière leur petit verre à grappa. Malgré la taille réduite du village, il serait facile de passer à côté de l’Ostéria Pedroni. Il faut donc être bien attentif pour ne pas la louper. Derrière les portes à moitié fermées nous attend Italo, un petit homme aux cheveux blancs comme neige et aux lunettes démodées. Il parle lentement, mais sa modeste stature et ses mouvements souples réussissent sans problème à remplir chaque pièce dans laquelle il apparait. Et tout le monde l’écoute : Aberto, qui s’occupe amoureusement de la vigne, sa belle-fille Fabrizia et son fils Giuseppe, qui s’affairent ensemble pour faire «tourner la boutique», mais aussi la mama de la maison, Franca. Tous tendent l’oreille quand Italo parle. A l’ombre d’un noisetier, Franca profite du calme de l’extérieur pour écrire le menu du soir. Pour ce qui est de la cuisine, la patronne, c’est elle. Dans cette région, La Mama cuisine encore mieux que dans le reste de l’Italie, car c’est ici que l’on trouve les meilleures recettes de toute la botte. C’est la raison pour laquelle les mamas d’ici devraient s’appeler Emilia…
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Dans le ventre de l’Italie Traditions Plus loin fume un vieux tracteur sur lequel on distingue un étrange écusson. Etrange, mais surtout sportif, même s’il n’est pas question de performances ou de vitesse pour ce Lamborghini d’une autre époque. A la moitié du siècle passé, Italo n’avait que sept ans quand il est devenu orphelin de père et qu’il fut chargé, avec sa mère, de maintenir la longue tradition familiale d’agriculteur, de vigneron, de producteur de vins et de spiritueux, de distillateur de grappa et de vinaigrier. Dès son plus jeune âge, le chemin d’Italo était donc clairement tracé, et le décrire comme «traditionnel» ou «de la vieille école» n’est pas lui faire offense. Il n’a d’ailleurs que faire de la frivolité moderne, comme le prouve sa Fiat, dont les meilleurs jours semblent bien lointains, ou le fait que le téléphone mobile de ses hôtes soit verrouillé pendant leur passage en ses murs. «La qualité requiert du temps et du repos», c’est en suivant cet adage qu’Italo est progressivement devenu un «Maître» du vinaigre. Ce n’est pas un hasard s’il est actuellement le producteur le plus décoré de vinaigres balsamiques traditionnels de Modène (Aceto Balsamico Tradizionale di Modena en italien dans le texte.) Il règne un étrange parfum dans la loggia. Comme une association de l’air avec le parfum de la vigne, même s’il s’y ajoute une odeur méconnaissable. Un agréable parfum du Sud, pas écrasant, mais néanmoins présent. Comme dessert, on nous sert une originale «Gelato di Crema con Aceto Balsamico 7 Anni». En français : une glace vanille arrosée de vinaigre balsamique de sept an d’âge. Ici, le vinaigre accompagne chaque repas à la manière dont l’huile moteur accompagne chaque rotation d’un six cylindres moderne. En termes d’apparence et de texture, la comparaison entre une huile moteur et un vinaigre balsamique de la région tient d’ailleurs assez bien la route. Mais au jeu des ressemblances, attention à ne pas comparer le vinaigre d’Italo avec les vinaigres balsamiques disponibles en grandes surfaces. Ce serait comme comparer une Ferrari à une Volkswagen. Ferrari dont le cœur ne bat pas très loin d’ici, à Maranello, où sont fabriqués les bolides au cheval cabré. Le vinaigre d’Italo, c’est du bonheur à la (petite) cuillère, un incroyable mélange d’acide et de saveurs sucrées intenses. Servi sur une crème glacée à la vanille, il goûte un peu comme du caramel. Mamma Italia !
Cave
ou grenier?
Mais d’où vient cet espèce d’or liquide ? «L’Acetaia est l’endroit où le vinaigre murit», explique Giuseppe en nous invitant à le suivre au grenier, où l’air est si épais que la respiration en devient difficile. L’humidité
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est si élevée que l’on pourrait presque la sentir avec les mains. «Contrairement au vin, la température élevée sous la toiture est idéale pour laisser vieillir le vinaigre. En été, la température peut facilement atteindre 40 degrés dans le grenier, alors qu’il n’y gèle que très rarement en hiver», explique Giuseppe alors que nous essayons de nous frayer un chemin à travers les fûts soigneusement alignés par six selon leur taille. Dans les grands tonneaux, le vinaigre atteint son niveau d’acidité approprié. Le processus de maturation commence dans les barils moyens et les plus petits sont réservés au vieillissement du précieux liquide. Tous les tonneaux sont pourvus d’une ouverture juste assez grande pour laisser passer la cuillère destinée à goûter le vinaigre. Ce passage libre n’est recouvert que d’un mince chiffon afin d’éviter que le
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Dans le ventre de l’Italie
récipient et son contenu ne soit en contact direct avec l’environnement extérieur. Tout comme pour le sherry en Espagne, un peu de vinaigre est extrait des petits tonneaux pour la consommation en février ou mars de chaque année. Après quoi on procède à un transvasement des plus grands aux plus petits tonneaux. Le vinaigre voyage ainsi de fût en fût, si bien qu’après douze étés chauds et autant d’hivers froids, il se retrouve finalement dans le plus petit récipient, prêt à être dégusté. «Plus le vinaigre est vieux, plus il est intense, crémeux et profond», poursuit Giuseppe. Quant à savoir ce qui se passe exactement dans les tonneaux, c’est à chacun de deviner. Comment le vinaigre balsamique se transforme reste à ce jour une question sans réponse, que ce soit pour les scientifiques ou pour les artisans. Mais
Italo et ses confrères savent parfaitement ce qu’ils doivent faire pour produire un vinaigre de haute qualité. Pour les motards, le passage par la Plaine du Pô est souvent considéré comme un mal nécessaire, un passage obligé pour atteindre leur destination. Pour nous, la fin de l’été et ses magnifiques journées permettent d’apprécier cette plaine d’une autre manière, beaucoup plus agréable.
Don Camillo C’est une journée typiquement italienne, lumineuse et chaleureuse, dont le souvenir nous aidera à traverser le long et froid hiver qui nous attend. Avec les aérations de nos équipements entièrement ouvertes, le cruise-control enclenché et de la musique italienne diffusée par les haut-parleurs de la BMW K 1600 GTL, nous Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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C’est une journée typiquement italienne, lumineuse et chaleureuse, dont le souvenir nous aidera à traverser le long et froid hiver qui nous attend.
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profitons au mieux et par tous de nos sens de ce que l’Italie a de meilleur. Nous nous arrêtons à Brescello, village où le Français Fernandel et l’Italien Cervi ont à cinq reprises enfilé les costumes de Don Camillo et Peppone entre 1952 et 1965. Le fait que l’église se dresse légèrement de travers face à l’hôtel de ville sur la Piazza Matteotti a sans doute joué un rôle clé dans le choix de cette localité. Dans les années 50, la plaine du Pô marquait une ligne de démarcation entre l’Emilie communiste et la Lombardie catholique. Aujourd’hui, la place est assommée par une chaleur étouffante. Un couple de touristes se photographie à côté des statues de Don Camillo et Pepponne, qui se font face d’un air maussade, comme toujours. Pour ce qui est de la nourriture et des boissons, nous devons faire un choix. Il faut presque choisir son camp : celui du «Don Camillo», un établissement anciennement connu sous le nom «Café Ristorante Italia», ou du «Caffé Peppone», situé quelques maisons plus loin. L’idée a sans doute déjà germé dans l’un de ses bars d’ouvrir un Museo Don Camillo e Peppone, un musée dans lequel des souvenirs des films et de
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cette époque seraient accessibles au public. On pourrait y admirer des vestiges de cette «superproduction», des vélos, scooters Piaggio ou Moto Guzzi de Peppone en passant par la célèbre soutane de Don Camillo. Un jour peut-être…
Encore
des futs…
Retour dans la périphérie de Modène, à mi-chemin entre les poids lourds culturels de la Toscane et la Vénétie, une région sous-estimée sur le plan de l’art et de la culture. Nous zigzaguons à travers des rues et des ruelles visiblement très fières de porter des noms chics comme «Canale Grande». Les peupliers fournissent ombre et protection contre le vent, alors que les vaches blanches donnent au paysage étouffant une touche belge rafraîchissante. Les poires suspendues dans les vergers sont prêtes à être expédiées dans des régions où leur culture a disparu. Les champs de maïs et de légumes ainsi que les vergers sont peignés par des canaux rectilignes dans un décor qui ressemble à un marais drainé. Nous nous offrons une courte pause à la fabrique de tonneaux Renzi. A l’avant de la salle d’exposition de la petite entreprise,
des photos jaunies donnent une idée de l’activité qui régnait autrefois ici. Du petit tonneau en réduction qui n’était pas plus grand qu’un verre à grappa à la mégatonne de 250 hectolitres qui fut fabriqué en 1928 : autant d’illustrations qui témoignent de l’artisanat de cette famille originaire de Bavière. Tout comme chez Italo, on parle des activités de la maison avec beaucoup de respect et une petite pointe de mysticisme : «La construction d’un bon baril n’est pas une histoire de métier, mais d’art». Et tout comme la fabrication du vinaigre ne se fait pas en un jour, la construction d’un baril est un travail de longue haleine. En laissant le bois à l’air entre six et douze ans, la pluie se charge de le rincer du tanin. Bon à savoir pour ceux qui voudraient se lancer dans la construction de tonneaux en bois : le choix du matériau de base (frêne, chêne, acacia, châtaignier...) joue un rôle dans le goût du vinaigre. «Les planches de bois sont cuites et arrondies au-dessus du feu, puis elles sont coupées à la bonne longueur et rabotées. L’assemblage du tonneau se déroule dans une étape ultérieure. Il est important que les côtés des planches soient parfaitement
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«La construction d’un bon baril n’est pas une histoire de métier, mais d’art». Tout comme la fabrication du vinaigre ne se fait pas en un jour, la construction d’un baril est un travail de longue haleine. lisses afin qu’elles puissent être pressées ensemble afin d’obtenir une étanchéité parfaite. Nous ne pouvons utiliser ni colle ni autre ingrédient qui pourrait altérer le goût du contenu», nous apprend Giuseppe.
Petite
fête
Pour les motards, le véritable attrait de l’Emilie et des Apennins se profile à proximité de Spilamberto. Sans son musée du vinaigre et son centre de recherche, Spilamberto ne serait sans doute qu’un village parmi tant d’autres. «C’est d’ici que nous pompons le sang des veines de cette région. C’est d’ici que nous donnons l’oxygène aux artisans qui gagnent leur vie grâce au vinaigre balsamique», explique Rino, dont la carte de visite indique le titre de «Gran Maestro assagiatore dell’aceto balsamique». Un titre inimaginable si vous n’avez pas au moins neuf années de pratique et 80 dégustations par an à votre actif. Comme un sommelier, il doit entraîner ses papilles gustatives et olfactives pour être en mesure de départager tous les producteurs de la région et d’en extraire les meilleurs au cours de compétitions annuelles.
Après chaque élection de vinaigre, le village est le théâtre d’une grande fête. Voilà sans doute une raison supplémentaire de bien choisir sa date quand on veut venir faire un tour dans les parages. Rino goûte et évalue les vinaigres Tradizionale sur base de leur odorat, du goût, du poids et de la viscosité. «En utilisant toujours la même lumière, l’évaluation est plus juste», explique-t-il en nous montrant son antique source de lumière. Un critère important dans l’évaluation du vinaigre est ce que les Italiens appellent camicia, ce que l’on pourrait décrire comme l’huile qui s’attarde sur les bords intérieurs du verre lorsque l’on y fait tourner du vinaigre. «Plus la substance s’accroche à la paroi du verre, meilleur est le vinaigre. Mais pourquoi un tel vinaigre est meilleur qu’un autre, c’est une question très complexe à laquelle chacun pourrait répondre d’une manière différente.»
Repos
ou action
En compensation au calme extrême qu’il règne chez Rino, nous décidons de laisser nos six cylindres allemands s’exprimer avec toute leur fougue dans les
Apennins, un paysage qui pourrait sans problème être comparé à une mer verte agrémentée de vagues de plusieurs mètres de haut. Nous voici dans une Emilie complètement différente, loin des grands centres urbains, des usines et des autoroutes. Une région où il y a plus de virages, d’épingles à cheveux et de belles courbes que d’habitants. Peu d’habitations signifie également qu’il faut moins souvent partager la route avec d’autres usagers, et que la conduite d’une moto prend un autre sens, bien plus agréable. Parce que tous les Italiens ont ceci en commun : ou bien ils sont immobiles, ou bien ils bougent à toute vitesse. Il n’y a quasi aucune position intermédiaire entre ces deux extrêmes. Pour nous, c’est plutôt une bonne nouvelle puisque nous n’avons pas tardé à adopter le style de conduite local et que nous prenons du coup beaucoup de plaisir sur la route et dans les virages. Stefan semble coller à ma roue arrière, à tel point qu’il pourrait bientôt se faire appeler Valentino. Mais nous profitons aussi de la beauté et de la variété des paysages, sans oublier la majestueuse variété de couleurs. Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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Nous décidons de laisser nos six cylindres allemands s’exprimer avec toute leur fougue dans les Apennins, un paysage qui pourrait sans problème être comparé à une mer verte agrémentée de vagues de plusieurs mètres de haut.
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L’intérieur de la trattoria d’Alberto est au moins aussi impressionnant. Cet établissement a été récompensé par la police du goût Michelin par une étoile. Des nappes à damier rouge et blanc, un large choix de grappa et une vieille machine à café Faema dans le coin : le décor de cette adresse de Savigno pourrait aussi bien être la scène d’un film de Fellini. Cette ambiance typique n’empêche pas Mick Hucknall, le chanteur du groupe Simply Red, de déguster son repas à la table à côté de nous. Alberto est un peu le chef du village. Ce matin, alors que j’essayais de rassembler sur une même photo l’agitation du marché et l’ambiance «motard», Alberto s’arrangeait avec le policier de quartier pour qu’il me facilite la tâche. Alberto s’exprime dans un excellent anglais, un héritage qui lui vient de l’époque où il était actif comme homme d’affaires dans le milieu de la mode. Quand il en a eu assez de ce milieu, il s’est fait une place dans celui de la cuisine grâce aux recettes de sa grand-mère. «Nos mots d’ordre sont «local» et «timing». Ce sont les ingrédients actuellement disponibles dans la région qui déterminent les plats de notre menu», explique Alberto, dont la mère Giuglia et la collègue Anna s’efforcent néanmoins de proposer chaque jour des repas classiques comme les Tortellini in Brodo ou les Tagliatella al Ragú. Dans ses préparations, Alberto utilise le moins possible d’herbes et d’épices, histoire de laisser ses ingrédients exprimer toute leur saveur. Quant au plat le plus demandé de sa carte, Alberto ne doit pas réfléchir longtemps avant de citer les truffes. Logique si vous habitez dans l’une des rares régions où les six variétés de truffes européennes peuvent être trouvées.
quand nous avons fini par le trouver. Pour faire du bon fromage, il faut savoir se lever tôt puisque le meilleur fromage est obtenu à l’aube en mélangeant le lait de la veille avec celui du matin. A l’aide d’un tissu en lin, Luca et un de ses collègues hissent le lait caillé de grands chaudrons en cuivre pour obtenir des formes rondes. Après, le paquet de 90 kilos est divisé en deux moitiés égales et doit vieillir pendant au moins 12 mois dans un bain de sel. Seize litres de lait frais pasteurisé se transforment en un kilo de fromage parmesan. Dans les chambres sont en train de mûrir les fromages empilés jusqu’à cinq mètres de haut, avec un beau spectacle de nuance de couleurs comme résultat. Et l’odeur se glisse dans les vêtements, au propre comme au figuré.
Chercher…
et trouver !
Même les oiseaux sont encore dans leur nid quand nous nous levons trop tôt le lendemain matin. Les chercheurs de truffes sont des gens très matinaux dont la condition physique permet de longues promenades. Des feuilles humides étouffent nos pas. Margot, la chienne de Gianluca, suit son flair et nous nous entrecroisons derrière le quadrupède à travers la forêt. De temps en temps, nous creusons un trou dans le sol, à la recherche de ce délice rare appelé truffe. Sans beaucoup de succès. Les déceptions se suivent. Nous avons l’impression d’être à la recherche d’une lentille de contact. Plus tard dans la journée, nous serons dans une situation similaire, à la recherche de la Fromagerie Oratorio San Giorgio, un fromage Parmigiano-Reggiano à Carpi. Aussi bien Google Maps que notre Garmin ont semblé ne pas vouloir prendre de risque quand nous leur avons soumis l’adresse… «Le parmesan fait partie de l’Italie comme la glace ou l’amore», sourit Luca Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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Exclusivité
absolue
Dans la région de Modène, les amateurs de voitures ne savent plus où donner de la tête. Toutes les voitures de sport italiennes sont produites dans la région, et régulièrement testées sur les routes. Ferrari, Lamborghini et Maserati ont ici leur siège central, et de nombreux musées et autres collections privées leur sont consacrés, comme celle du spécialiste des vignettes autocollantes Umberto Panini, qui a investi une partie de sa fortune dans une collection de Maserati. Le musée Stanguellini est également unique, parce que cet homme était, aux côtés d’Enzo Ferrari, un de ceux qui ont ouvert la voie à la Formule 1. Mais sa marque de voiture n’y a pas survécu. Le nec plus ultra en matière d’exclusivité dans cette région, c’est Pagani Automobili, un constructeur d’automobiles super-sportives encore plus chères et plus spéciales que tout ce que propose la concurrence locale. Mais comme notre cœur reste malgré
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tout plus près des motos que des voitures, nous préférons le musée Ducati de Bologne à Borgo Panigale. Le guide porte fièrement un tatouage Ducati au pied, des machines uniques comme la Cucciolo trônent à côté de tasses qui portent l’emblème de la marque chérie des Italiens. Allez, encore un peu de route, à nouveau dans les montagnes. En montant le Passo di Radici, on flirte avec la frontière entre la Romanie et la Toscane. Au sommet, Graziella vend des souvenirs directement importés d’Extrême Orient. Dans une mer de Ducati, nos BMW attirent sur elles une certaine attention, nous en profitons pour vérifier le bon fonctionnement du système de verrouillage à distance des valises latérales et du top-case. On n’est jamais trop prudent ! Beaucoup de monde aussi à la station essence de Casi Balocchi, où se retrouve un nombre impressionnants de motards, probablement comme lieu de rendez-vous avant leur randonnée.
Nous improvisons une courte pause dans la paisible Villa Minozzo. Ensuite, direction Carpineti et Castello. En arrivant près de Langhirano, nous devons composer avec les rafales de vent imprévisibles de l’automne, qui ont aussi pour mission de s’assurer que les jambons de Parme profite pleinement de leur de maturation. Carlo explique : «Pour le jambon de Parme original, seule la viande provenant des porcs des régions d’Emilie-Romagne, de Lombardie, de Vénétie et du Piémont est utilisée. Et les bêtes doivent en outre suivre un régime alimentaire strict pendant au moins un an. Quant aux jambons, ils doivent ensuite sécher au vent pendant douze mois.» Polesine Parmense est un village isolé dans la vallée du Pô. À seulement quatre cent mètres du Pô se situe la propriété de Massimo : l’Antica Corte Pallavicina, qui date du 13e siècle. A l’extérieur, les cochons à tâches roses grognent. Et dans les caves
Dans le ventre De l’italie pendent les jambons les plus nobles du monde, emballés dans des sacs en tissu naturel. Sur les étiquettes, on peut lire les noms des clients. Armani, le Prince Albert de Monaco et le prince Charles sont apparemment des adeptes de l’un des meilleurs jambons du monde, un Culatello di Zibello, qui mûrit ici dans ce microclimat humide 18 à 28 mois. Le jambon est tranché finement et servi sur une planche de bois. La viande fond dans la bouche, le plaisir pur au carré. Comme un voyage à travers le ventre de l’Italie... •
PRATIQUE Comment s’y rendre : Cremona est le point de départ idéal pour ce voyage. Cette ville est située à seulement un petit millier de kilomètres de Bruxelles. Facilement accessible par la E35 entre Milan à Modène. Le train de voiture jusqu’Alexandrie est également une option. Hébergement: On trouve à l’intérieur même de l’Emilie-Romagne des logements dans toutes les gammes de prix. Nous avons dormi dans : • Agriturismo «Le Vigne della Duchessa» 41019 Soliera (Mo) www.levignedelladuchessa.eu • Locanda Amerigo 1934 40060 Savigno (Bo) www.amerigo1934.it • Antica Corte Pallavicina 43010 Polesine Parmense (Pr) www.acpallavicina.com A visiter (en général uniquement sur réservation !) • Acetaia Pedroni www.acetaiapedroni.it • Bottaio Renzi www.renziartigianobottaio.com • Museo e consorteria del Balsamico Tradizionale www.museodelbalsamicotradizionale.org • Museo di Peppone e Don Camillo www.visitbrescello.it • Maserati-Collezione Umberto Panini , Carte Michelin Authorisatuin n° 08-B-09.
www.paninimotormuseum.it • Sammlung Stanguellini www.stanguellini.it • Pagani Automobili www.paganiautomobili.it • Ducati Motor Holding S.p.A www.ducati.com • Vue d’ensemble de tous les musées et collections voiture: www.motorvalley.it • Parmigiano-Reggiano fromagerie Fromagerie Oratorio San Giorgio www.caseificiosangiorgio.it • Salumifio „La Perla“ di Lanfranchi Carlo e Fabrizio
©
www.salumificiolaperla.it
Téléchargement GPS
www.moto-online.be Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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France La Drôme
Le
rêvodrôme À l’heure où certains rêvent de devenir pompier, policier ou tout simplement «comme papa», mon aspiration la plus profonde était de découvrir le monde. Beaucoup de jeunes gens ont trop vite oublié comment rêver, à mesure qu’ils entraient dans le monde souvent trop réaliste des adultes. Il existe heureusement une quantité d’entre nous pour qui ces rêves, profondément ancrés dans leurs gènes, finissent par se réaliser. Me voilà donc vingt ans plus tard, journaliste moto fraîchement embauché, envoyé pour mon baptême du feu à la découverte de la Drôme au guidon d’une BMW F800GT flambant neuve.
Texte: : Arno Jaspers Photos : Arno Jaspers , Thomas Kraemer
I
l est à peine six heures du matin quand le réveil sonne. J’enfile ma combinaison moto, me prépare vite un sandwich et accroche mes bagages sur la moto avant de prendre la route pour 850 km monotones d’autoroute en direction de Tain-l’Hermitage. Nous sommes le premier mai, la fête du travail, et la circulation est assez fluide. Avant même de m’en rendre compte, nous nous trouvons au Luxembourg où je m’octroie un bref pit-stop pour recharger essence et café, et faire une vidange (lisez un petit pipi). Entre temps, le soleil a malheureusement disparu, nous décidons dès lors de passer, par sécurité, une combinaison de pluie. De retour sur la voie rapide, je réalise que pas mal de motards ont pris la route, du moins des adeptes du Bar & Shield.
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Impossible de traverser un péage ou de s’arrêter à une station d’essence sans croiser toute une ribambelle de Harley-Davidson. Il y a coïncidence et coïncidence. Entre Metz et Nancy, je me décide à interpeller un camarade sur deux roues pour lui demander ce qu’il se passe. «Tout le monde est en route pour Port-Grimaud, un des plus grands meetings Harley de toute l’Europe !» Voilà qui semble intéressant, mais je ne serais pas dans le ton au guidon de ma BMW Touring. Qui plus est, cela impliquerait de dépasser ma destination de 300 kilomètres. Sur ces entrefaites, il s’est mis à pleuvoir et ma combinaison de pluie Macna commence à percer. Malgré une courte pause déjeuner, l’orage qui déchire les cieux refuse catégoriquement de se résorber. Je reste autant que possible caché derrière la bulle de la F800GT, mais il n’existe aucun remède miracle contre la pluie battante. Fort heureusement, le sac de réservoir BMW est bien étanche lui et c’est un ticket quasiment sec que je tends au receveur du péage entre les doigts de mon gant détrempé. Une fois Lyon dépassée, le soleil commence à percer les nuages, nous offrant l’opportunité de sécher quelque peu avant d’atteindre Tain-l’Hermitage. Cette petite cité se situe en bordure du Rhône, frontière naturelle entre la Drôme et l’Ardèche. Avant de partir à sa conquête, nous prenons le temps de nous enregistrer à la réception de l’hôtel des Deux Coteaux afin d’échanger ma combinaison dégoulinante pour un jeans moto sec et une veste de cuir.
Reprendre
son souffle
La combinaison du cuir et du jeans est définitivement à la mode au sein de la communauté des motards du midi qui rejoignent en masse les rives du Rhône. La grande majorité d’entre eux se déplace au guidon de roadsters sportifs, équipés d’un tapis de réservoir en cuir et d’un top case. C’est sous un ciel couleur pourpre que nous traversons l’un des plus grands fleuves de France en direction de
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La Dr么me
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l’Ardèche et tombons presque tout de suite sur un bar où tous les motards de la région semblent s’être rassemblés. L’ambiance est conviviale et toutes les têtes se tournent à chaque fois qu’une moto se fait entendre. Pourtant, c’est principalement les pétarades de motos de cross de 50 cc (ou plus…) qui se font le plus fréquentes. On croirait presque que l’iPhone n’a pas (encore) droit de cité dans cette contrée tant chaque gamin de quatorze ans préfère parader fièrement à moto. Voilà qui est rafraîchissant ! Une bière ou deux plus tard, nous décidons de rentrer à l’hôtel. Un voyage aussi pluvieux sur autoroute a le don de vous tremper jusqu’aux os. De plus, c’est une journée au programme chargé qui nous attend le lendemain.
Côtes
du
Rhône
Après une bonne nuit de sommeil et un buffet de petit déjeuner, nous nous rendons
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dans l’un des vignobles les plus réputés des Côtes du Rhône. La moto reste néanmoins là où elle est. Les randonnées à travers les vignobles qu’organise «Au Sommelier» se font au guidon de vélos électriques. De cette façon, même les moins sportifs peuvent s’attaquer aux chemins de montagne pentus et étroits qui sillonnent les vignobles. C’est une balade que je conseille tout particulièrement aux amateurs de vin, bien qu’il ne faille pas être un connaisseur pour profiter des splendides panoramas qui vous sont servis sur un plateau d’argent tout au long de la balade. Il ne s’agit en réalité que d’un tout petit avant-goût de ce qui arrive. Une fois les vélos remisés, j’enfile à nouveau ma combinaison moto et me prépare pour les choses sérieuses. Les valises latérales et le sac de réservoir sont à nouveaux accrochés à la Béhème. Me voilà prêt pour l’escalade du premier col de la journée.
Overdose
de virolos
Nous chevauchons à nouveau vers le Sud. Après quelques kilomètres quasiment tout droit à travers la vallée du Rhône, nous bifurquons enfin en direction du Col du Tourniol. Le soleil est au rendez-vous, ma monture bavaroise en excellente forme et je suis impatient d’attaquer la montée. Il ne faut pas longtemps pour tomber sur le premier virage en épingle et la route grimpe à une allure certaine. Par moment, la chaussée devient très étroite, mais l’asphalte est toujours d’excellente qualité. Le Col du Tourniol offre un parcours idéal pour éprouver sa moto à l’extrême comme vous avez déjà certainement pu le lire dans l’essai voyage de la BMW F800GT paru dans le numéro de juin 2013 de M&L. Je prends malgré tout garde de ne pas gaspiller toute mon énergie parce que le plus dur reste à venir. Nous redescendons ensuite sur Combe Laval où nous nous octroyons une
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rapide pause-café. Ce qu’un p’tit café peut être délicieux quand vous avez dévoré des kilomètres d’asphalte ! Le propriétaire du bistro inspecte ma machine dans le détail et me propose de l’échanger contre une Renault 5. Après l’avoir remercié cordialement, je paie ma boisson et nous reprenons la route qui mène au Col de la Machine. Tandis que nous sommes en pleine séance photo, un motard du coin s’arrête pour discuter et nous confie que, durant l’été, cette route se transforme en véritable circuit de course. «Pour l’instant, c’est plus calme parce que la température n’est pas encore très élevée, mais à partir de juillet, tous les malades de vitesse débarquent pour offrir du grand spectacle. Que ce soit sur des bécanes de course ou dans des voitures de rallye tunées. Parfois, ces démonstrations d’audace ont de graves conséquences.» Voilà qui explique tout de suite les différentes croix que nous avions aperçues au
bord de la route, de même que les rails de sécurité enfoncés et les murs endommagés que l’on peut observer dans les différents virages. Un homme averti en vaut deux, je serai donc d’autant plus prudent chemin faisant vers le Col de Rousset. Cette multitude de montagnes est le rêve de tout touriste sur deux-roues. Je dois véritablement me retenir pour ne pas m’arrêter et prendre une photo à chaque panorama qui se présente. Après tout, il arrive qu’aucune photo ne soit capable de rendre la splendeur de certains sites…
D’embarcation
en embarcation
C’est finalement à l’un de ces endroits, situé à proximité du Col de Rousset, que nous décidons de nous arrêter. La veille au soir, nous avions fait le plein de marchandises au supermarché de Tain. C’est devant un spectacle magnifique que nous prenons
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le temps de pique-niquer. Exception faite du chant des oiseaux et du rugissement occasionnel des motos, l’atmosphère est imperturbable, en contraste total avec le tumulte des autoroutes belges que j’emprunte quotidiennement pour rejoindre la rédaction. C’est avec du pain, du Boursin et hem… un «coca» dans l’estomac que nous reprenons la route qui mène à Saillans. Après une nouvelle descente sinueuse à souhait, nous arrivons enfin à la rivière qui prête son nom à la région tout entière, la Drôme. Sa réputation n’est plus à faire auprès des amateurs de kayak et de canoë, nous décidons donc d’échanger nos combinaisons de moto contre un exemplaire de plongée et, par la même occasion, nos machines contre un petit bateau. À cette époque de l’année, le courant n’est malheureusement pas assez fort pour descendre la rivière en kayak ou en canoë, c’est donc en raft que je prends le large. Pour autant Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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Cette multitude de montagnes est le rêve de tout touriste sur deux-roues. Je dois me retenir pour ne pas m’arrêter et prendre une photo à chaque panorama qui se présente. Après tout, il arrive qu’aucune photo ne soit capable de rendre la splendeur de certains sites…
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que vous écoutiez attentivement le guide, aucune expérience spécifique n’est requise. Le temps de mettre notre embarcation à l’eau et je saute à bord les pieds déjà mouillés. La rame à la main, nous évoluons en direction de Die. Notre escapade démarre tranquillement, j’ai donc tout le temps d’intégrer les indications de mon guide. Le plus important est de s’écarter à temps du boudin gonflable et de bien tenir la corde de sécurité. Alors que le courant
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gagne en vitesse, je perds déjà une rame et me retrouve complètement trempé. La pratique du rafting est avant tout une manière ludique de découvrir une parcelle de nature sauvage. Avant d’accoster à Die, la Drôme s’élargit considérablement et je remarque alors une wagonnette hippie de la marque VW sur la rive. «Durant l’été, de nombreux saisonniers débarquent dans la région à bord de leur minivan», nous confie notre guide. Ils élisent domicile au bord de la
rivière ou le long des routes abandonnées qui sillonnent les bois et passent leurs journées à travailler dans les vignobles. Le camping sauvage sur les bords de la Drôme est aussi devenu une pratique très répandue chez les étudiants. Cela n’a rien pour ravir les propriétaires des différents campings, tandis que la police elle-même adopte une politique de plus en plus stricte à l’encontre de cette pratique. Mais pendant la haute saison, ils sont parfois tellement
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nombreux qu’il est pour ainsi dire inutile d’entamer une quelconque procédure.» C’est à cet endroit où la rivière est la plus large et la plus calme que nous amarrons le raft avant de le charger sur la remorque du minibus qui nous ramène à Saillans. Notre agréable aventure se termine sur un verre de Clairette de Die, un vin pétillant très doux qui – sans aucune raison apparente – est très peu connu en dehors de la région. Si seulement il restait un peu de place dans mes valises…
La Petite Auberge Malheureusement, tous les espaces de rangement aménagés sur la moto sont pleins à craquer, voilà qui constitue une excuse parfaite pour prendre encore un petit verre de Clairette. Ce sera chose faite, mais pas avant de rentrer à l’hôtel La Petite Auberge de Die. Dans mon plus beau français, je procède à l’enregistrement auprès de la réception et j’en profite pour demander s’il y aurait un endroit sûr pour stationner les motos. Après un
court échange avec le propriétaire sur la splendeur des environs et des routes qui sillonnent la Drôme, nous nous rendons à la cantine où nous sera servi un délicieux repas. Puis un dessert, et un digestif, avant de finalement nous avouer vaincus, mais repus, et de prendre congé pour rejoindre notre chambre d’hôtel en vue d’une nuit de sommeil bien méritée. Le jour suivant commence à nouveau par un buffet de petit-déjeuner et la préparation des motos. Le chargement/déchargement des bagages se fait avec de plus en plus de naturel et nous sommes prêts à repartir en direction du camping des Foulons de Luc-en-Diois en deux temps, trois mouvements. Tant que nous roulions sur les départementales, pas de problème, mais arrivés sur les petites routes, les choses se corsent. Envisagerai-je peut-être de prendre un GPS la prochaine fois ? Après un bref (mais non moins sympathique) détour, nous arrivons à bon port. Non pas pour déplier notre tente, mais
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parce qu’il s’agit du quartier général d’Hugues, un motard de la région qui joue les guides pour les touristes qui débarquent ici à moto, comme nous. Sur sa Triumph Speed Triple d’un vert éclatant, il nous emmène en dehors de Diois par les plus belles routes de Valdrôme en direction du Col de Carabès tout d’abord, puis jusqu’à la source de la Drôme. Tout comme ce fut le cas les jours précédents, nous profitons des routes sublimes qui donnent à rêver aux pauvres belges que nous sommes. «Vous, vous avez une économie bien rôdée et de l’argent, donc il est assez juste que, à défaut, nous ayons la nature et de belles routes», plaisante Hugues. Mais il n’a pas tort car il est impossible de traverser la Drôme sans remarquer les innombrables maisons décrépites et les tacots stationnés le long des chaussées. «En dehors de la saison touristique, c’est très calme par ici», précise-t-il. «Avant, nous avions encore l’industrie textile, mais toutes les usines ont fermé. Certaines ont été reconverties en hôtels, mais il n’est pas facile de vivre Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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exclusivement du tourisme. Je joue les guides moto, je donne des leçons d’escalade et je donne un coup de main au camping. Quant aux jeunes, ils partent presque tous dans les grandes villes pour pouvoir faire des études ou trouver du travail. On peut difficilement leur en vouloir.»
Dégustation
de vins
Après avoir pris quelques clichés de la source de la Drôme, nous passons le Col de Cabre où nous quittons par la même occa-
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sion notre guide français qui doit retourner à Diois, tandis que nous prenons la route de Crupies. La D106, puis la D60, nous amènent dans le village idyllique de Remuzat, peu de temps avant que nous arrivions au Moulin de Crupies. Comme son nom l’indique, cette résidence est en réalité un ancien moulin à eau reconverti en hôtel moderne. Elle compte sept chambres, toutes aménagées selon un thème différent. La nôtre est déguisée en chambre kenyane. Ce pourrait-il que je vienne de trouver la
source d’inspiration pour un futur voyage à moto ? Le propriétaire de l’hôtel a programmé une dégustation de vins pour clôturer le repas du soir, mais ce ne sera pas long. En dépit du crachoir prévu pour les œnologues en herbe que nous sommes, la plupart des hôtes choisissent d’avaler les différents jus de raisin. En un rien de temps, tout le monde finit plus ou moins ivre et nous allons nous glisser sous la couette. Et puis, il ne faudrait pas sous-estimer le changement de selle qui nous attend demain…
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«Vous, vous avez une économie bien rôdée et de l’argent, donc il est assez juste que, à défaut, nous ayons la nature et de belles routes», plaisante Hugues. la sCouRtineRie Derrière le Moulin de Crupies se trouve en effet un manège où logent les chevaux du propriétaire de l’hôtel. Ils sont à la disposition des clients qui souhaitent explorer les alentours à cheval. Une telle offre ne se refuse pas, c’est donc sans concession que nous échangeons nos casques de moto contre une toque (casque porté pour monter à cheval, ndlr) et sortons faire un tour. Mon cheval, Skippy, suit sagement le guide et cela me convient parfaitement. Comme il
en va pour la moto, l’équitation comporte aussi sa part de risque. Or, la dernière chose que je souhaite est de parcourir 1.000 km à moto pour finalement tomber d’un cheval. Quoi qu’il en soit, je n’aurais manqué cette expérience réjouissante pour rien au monde. Après avoir laissé les chevaux paître à côté de l’ancienne chapelle de Crupies, nous voilà de retour à l’hôtel pour récupérer la F800GT. Nous descendons alors en direction de Nyons, où nous avons rendez-vous à la Scourtinerie. Ce musée consacré à la révo-
lution industrielle et, plus précisément, aux «scourtins». Il s’agit en fait de petit tapis de jute ronds que l’on trouve un peu partout dans la Drôme provençale. Ce n’est pourtant pas leur objectif premier, étant donné que l’on en remontait les extrémités pour en faire un sac en forme de ballon. C’est sous cette forme qu’ils étaient utilisés à l’époque pour transporter les olives avant de les presser directement dans le sac. Ce dernier, étant fait de jute, permettait de retenir les pépins et la chair du fruit tout en laissant Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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passer l’huile. Et voilà : les voyages ont bien la réputation de forger le savoir, non ?
Route
fermée
La petite leçon d’histoire bien apprise, il est temps de profiter de nos bolides. Je peux vous affirmer que nous avons gardé le meilleur pour la fin. Nous empruntons donc la D938 et la délicieusement sinueuse D974 pour rejoindre la montagne la plus réputée de la Drôme, une icône du Tour de France : le mont Ventoux. Tout motard devrait, au moins une fois dans sa vie, gravir cette montagne à l’aide de sa monture, ne serait-ce que pour sa notoriété. Avant même de commencer l’escalade, nous sommes rejoints par quantité de motards. On peut également apercevoir de belles machines sur quatre roues. Le mont Ventoux n’est manifestement pas seulement un site de pèlerinage réservé aux cyclistes, les brûleurs de carburant y ont leur place eux aussi. Des enchaînements viroleux aux épingles à cheveux en passant par les sections droites rapides, nous découvrons un nouveau décor parfait pour éperonner à l’envi la BMW. Le bicylindre se montre en outre sous son meilleur jour et nous grimpons toujours plus haut sur les notes d’une mélodie envoû-
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tante. Il faut certes prêter attention aux cyclistes qui entreprennent l’escaladent sur le bord des routes, cependant tout se déroule pour le mieux, du moins jusqu’à ce que… une barrière entrave la chaussée. Les intempéries des jours passés n’ont pas épargné le célèbre mont et, plus haut, il a neigé. Cette dernière portion de l’escalade sera donc pour une prochaine fois, voilà qui me donne au moins une bonne raison pour revenir visiter cette superbe région du sud de la France. Avant cela, il nous faut redescendre le mont Ventoux mais, alors que nous rejoignons l’hôtel Saint-Marc de Mollans-sur-Ouveze, une réalité s’impose tout doucement : c’était le dernier jour de notre voyage de rêve…
nougat, nous voilà à nouveau prêts pour plus de 900 km d’autoroute. Ce rêve aurait pu durer plus longtemps… •
Adresses
conseillées
• Hôtel Les 2 Coteaux Tain l’Hermitage www.hotel-les-deux-coteaux-26.com • Dégustation de vins et randonnée guidée à vélo à travers les vignobles des Côtes du Rhône, www.ausommelier.com • Descente de la Drôme en canoë Au départ de Saillans www.canoe-drome.com • Hôtel (propriétaire flamand) à Die www.lapetiteauberge.com • Camping de Luc-en-Diois Avec Hugues, le guide moto local (sur réser-
D’aucuns diront que la plupart des rêves sont imaginaires, mais il n’y avait rien d’imaginaire dans ce voyage. La Drôme est une région rêvée pour les motards qu’elle gratifie de parcours viroleux dont l’asphalte est digne des circuits de course et de panoramas naturels à perte de vue. Le seul inconvénient qui me vient à l’esprit après ces trois jours au pays des merveilles est qu’elle soit si loin de chez moi. Après un arrêt obligatoire à Montélimar pour nous procurer du
vation), www.camping-les-foulons.com • Hôtel de Crupies Avec manège attenant et possibilité de monter à cheval www.lemoulindecrupies.com • La Scourtinerie de Nyons Musée consacré à la spécialité locale, le ‘scourtin’ www.scourtinerie.com • Hôtel de Mollans-sur-Ouveze www.saintmarc.com
La Drôme
, Carte Michelin Authorisatuin n° 08-B-09.
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www.moto-online.be
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l’ile de Man
Bien plus qu’un circuit! Début juin, les amateurs de sport moteur du monde entier auront les yeux tournés vers une petite île ovale sise entre l’Irlande et la Grande Bretagne : l’Ile de Man. L’endroit est charmant. Les plages de sable succèdent aux bois, aux tourbières et à quelques Highlands. L’attraction principale de l’île reste depuis plus de cent ans la course la plus ancienne sur circuit routier. Les épreuves de l’Isle of Man sont époustouflantes. Les dizaines de milliers de motocyclistes qui empruntent le «Steam Packet Ferry» viennent encourager et admirer les pilotes au cœur bien accroché qui iront taquiner les 320 km/h en vitesse de pointe sur route ouverte. Mais au-delà de cet évènement majeur, l’île recèle bien des trésors à découvrir. On ne peut que vous encourager à vous y rendre aussi en dehors des jours de course.
Texte: Alan Cathcart/DG Photos: Kyoichi Nakamura 52
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llan Vannin, nom celtique de l’île, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ne fait pas partie du RoyaumeUni. Les Britanniques appellent cela une «Crown Dependancy», comparable aux statuts de Gibraltar ou des îles anglo-normandes de Jersey et Guernesey. C’est la raison pour laquelle le Prince William prit place dans la tribune principale du Tourist Trophy en 2003 pour voir renaître Triumph en compétition sur ce tracé mythique. C’est l’Australien Bruce Anstey qui pilotait pour la première fois une Daytona 600 préparée par Valmoto. C’est pour la même raison que l’on retrouve le portrait d’Elisabeth II sur les billets de banque de l’île de Man. L’argent est l’un des piliers de l’économie locale. Avec une imposition maximale de 18%, l’endroit est connu pour être un paradis fiscal offshore. 80.000 habitants se partagent l’île dont 26.000 logent à Douglas, la capitale. C’est ici que l’on trouve quelques personnages majeurs du sport moto comme Cal Crutchow, James Toseland et Andrew Pitt.
Unique En tant qu’ancien pilote du TT, je suis venu une bonne douzaine de fois sur l’île. A force de pratique, chaque recoin des 60,4 kilomètres du circuit sont mémorisés. Si j’ai pu finir à la quatrième place et une fois à la cinquième place, deux accidents ont émaillé cette période de compétition, à l’endroit même où d’autres concurrents laissèrent la vie. En dehors des courses, il y avait toujours du temps pour découvrir les 572 km² de cette petite île. Lors de ma dernière participation, mon fils Andrew était haut comme trois pommes. J’en ai profité pour l’emmener derrière moi pour un tour de
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reconnaissance sur une Bonneville Thruxton SS puis sur une Daytona 675. La première permettait de se promener le nez au vent. Avec la seconde, on enquillait vertement les virages. Il faut savoir que rouler vite sur l’île prend tout son sens. Oubliez les 70, 90 ou 120 km/h. Sur une bonne partie de l’île, en dehors des zones urbaines, aucune limitation de vitesse n’est imposée. Cela fait de cet endroit un lieu presque unique en Europe pour tous les amateurs de motos.
Au Pays
des
Elfes
«Il ne reste que peu d’endroit sur terre où le temps semble réellement s’être arrêté. Les couloirs du temps se sont emmêlés les pinceaux et le calendrier s’est bloqué sur
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l’année 1957.» C’est en ces termes, partagés entre nostalgie et humour, que l’humoriste anglais AA Gill a décrit cette île à la fin de sa toute première visite. En y regardant bien, il a fait mouche avec cette description succincte. On retrouve à chaque coin de rue les antiques cabines de téléphone dans une peinture verte approximative. En Grande Bretagne, elles ont été reléguées au rang de patrimoine classé. Les autobus à Impérial et les tramways tirés par des chevaux font toujours partie du décor. Il n’est pas rare de trouver sur les parkings d’anciennes Austin Morris ou quelques Riley. Les portails en fer forgé laissent deviner les cours intérieurs aux pavés luisants et aux murs décorés de quelques mosaïques.
Les enseignes peintes à la main invitent à acheter des œufs frais du jour ou des tartes faites maison. Le chemin de fer, à vapeur s’il vous plait, relie Douglas à la côte sud. La vie sociale et communautaire est privilégiée. Chaque arrêt aux stations-services se transforme en agréable conversation avec le gérant ou avec un client venu acheter un bidon d’huile. S’ajoute à cela une kyrielle de traditions ancestrales qu’il faut honorer. Un exemple : en traversant le pont «Fairy Bridge», il faut impérativement saluer et invoquer les dieux en lançant un «Bonjour les Elfes» retentissant. Sans cela, une catastrophe pèsera sur vos épaules. Vous l’aurez compris, chaque coureur du TT se plie volontiers à cette coutume…
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En tant qu’ancien pilote du TT, je suis venu une bonne douzaine de fois sur l’île. A force de pratique, chaque recoin des 60,4 kilomètres du circuit sont mémorisés. Si j’ai pu finir à la quatrième place et une fois à la cinquième place, deux accidents ont émaillé cette période de compétition, à l’endroit même où d’autres concurrents laissèrent la vie. Passé (re)composé De nombreuses vieilles fermes et maisons de campagne sont disséminées à travers toute l’île. Pour mieux comprendre et se faire une idée du «way of life» adopté par les anciens, une visite au Cragneash National Folk Museum à la pointe Sud s’impose. Vous y recevrez des informations claires sur les activités pratiquées par les habitants au
19e siècle. Fait étrange, c’est un professeur norvégien qui est à l’origine de ce musée. Dans le courant des années 30, il est venu enregistrer le témoignage d’Harry Kelly, le plus vieil homme de l’île qui maîtrisait le Manx, le dialecte propre à cet endroit. Les propriétaires de l’ancien Manx Museum ont réalisé qu’il serait dommage de perdre un tel patrimoine. Ils décidèrent de restaurer la
ferme du vieux Kelly et d’en faire un musée vivant. Dans les décennies qui suivirent, plusieurs fermes typiques furent rachetées pour former un ensemble cohérent pour mieux (faire) comprendre la vie rurale au 19e. Des bénévoles expliquent par le geste comment la laine était filée. La traite à la main des vaches laitières, la fabrication du beurre et du fromage n’auront plus de Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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secrets pour vous. Le forgeron aura à cœur de vous montrer comment l’on fabrique les fers qui garniront les sabots des chevaux de l’île. Avant de quitter Cragneash, ne manquez de gouter un traditionnel Bonnag, un délicieux cake aux fruits.
Des queues d’acier
et des nerfs
Il est caractéristique de trouver sur une île des espèces absentes ailleurs. L’île de
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Man ne fait pas exception, avec entre autre le célèbre «Manx-cat». Cette famille de chat se partage en trois sections distinctes : les «rumpy», célèbres par l’absence de queue, les «Stumpy» avec une queue de quelques centimètres et les «Longy» possédant une queue presque normale, mais souvent tordue. Ces chats sans queue résultent d’une mutation génétique spontanée. Le pelage est plus épais alors que les pattes postérieures sont longues et robustes. Outre une
intelligence supérieure aux félidés habituels, ces chats débordent d’affection. Ils reçoivent souvent le surnom de «Dog-Cat» tant leur attachement à leur maître est grand. Et je peux vous en parler longuement. Trois de ces chats (une de chaque sorte) ont trouvé un foyer chez moi… Au Sud de Santon, on découvre Castletown. Cette ancienne capitale est sans doute le village le plus pittoresque de l’île. Dominé par le château médiéval de
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Rushen dont les fondations remontent à l’an 1.090, c’est l’un des lieux les plus anciens de toutes les îles britanniques. Les petites rues étroites, les petites huttes en pierre des pêcheurs, et les activités du port confèrent à cet endroit un charme indéniable. Les motocyclistes y trouveront également leur bonheur. Une triple concession (Triumph, BMW et Ducati) y présente les derniers modèles rutilants de chaque marque. A proximité de
Castletown, le circuit de Billown s’anime en juillet pour les célèbres courses de motos du «Southern 100». Ne vous trompez pas sur le mot «circuit». Il s’agit d’un ruban bitumeux de 4,25 miles de long, entouré des célèbres murets de pierre. Encore un endroit réservés aux motocyclistes aux nerfs d’acier. Lors des dernières épreuves de Superbike l’an dernier, le chrono affichait en fin de boucle 2m15sec. Cela correspond à une vitesse moyenne de 180 km/h !
Pierres
et
Collines
En arrivant par bateau sur l’Ile de Man, vous pourrez profiter pleinement du raffinement de Port Saint-Mary. Vous serez baigné dans une ambiance typiquement victorienne. Pour rejoindre la plage de sable fin de Port Erin, vous emprunterez l’une des plus belle routes que l’on puisse servir à un motocycliste. Il n’est pas surprenant d’apprendre que plus de 70 films de cinéma ont été tourné ici. Même si les célèbres Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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«tax incentives», des incitants fiscaux, font partie des motivations des producteurs ! Pour compléter ce paysage idyllique, l’endroit est dominé par la colline «Cronk ny Irrey Lhaa», à vos souhaits ! Cela peut se traduire par la colline de l’aube. Le sommet sert de phare pour les marins-pêcheurs qui attendent que le premier rayon de soleil dépasse la butte pour rentrer au port. Dans et autour de la vieille ville portuaire de Peel, on est confronté aux restes des premiers habitants de l’île. Les mégalithes circulaires auraient plus de 5.000 ans d’existence. Plus loin, nous partons à la découverte d’un lieu important pour les insulaires : Tynwald Hill. Cette autre colline est une création humaine. A l’origine, l’endroit était un tumulus qui abritait les défunts de l’île. Il y a près de mille ans, quand les Vikings débarquèrent, ils utilisèrent ce lieu comme parlement et comme cours de justice à ciel ouvert. Chaque
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année les parlementaires de l’Ile de Man se déplacent et tiennent une session ici-même, pour perpétrer cette tradition séculaire.
Homards, harengs
bières, pâtes et
Saint-Johns était le point de départ du tout premier Tourist Trophy organisé en 1907. Les pilotes s’élançaient pour un long sprint de 25 kilomètres sur des routes de terre et de gravier vers Ballacraine où l’actuel TT passe sur des routes bitumeuses. Parcourir cette ancienne boucle est un ravissement. En longeant la côte Ouest, vous aurez peut-être la chance de voir une baleine venir se reposer près du rivage. Le petit port de Peel est aussi l’endroit idéal pour découvrir la gastronomie locale. Les fruits de mer sont à l’honneur. La qualité des homards pêchés à proximité des côtes est de toute première catégorie. Les «Queenies», des petits crustacés goûtus,
font partie des «must» à ne manquer sous aucun prétexte. Quel que soit l’endroit où vous les gouterez, la qualité sera toujours au rendez-vous. Une petite glace de chez Davidson pour vos enfants et une bière Manx pour vous, en combinaison avec l’inaltérable joie de vivre des habitués des «pubs» locaux, contribueront à clôturer une journée sans ombre ! Vous souhaitez un brin d’exotisme sur votre assiette ? Pas de problème, de nombreux restaurants italiens émaillent toute l’île. Cela mérite un peu d’explication. Durant la première et la seconde guerre mondiale, l’île était utilisée par les alliées comme centre pénitentiaire pour les prisonniers de guerre. A la libération, quelques Italiens décidèrent de s’installer ici en pleine mer d’Irlande plutôt que de retourner dans une Italie postfasciste. Le port de Peel avec ses arrivages quotidiens de poisson alimente les différents fumoirs de l’île. Ces fumoirs
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De nombreuses vieilles fermes et maisons de campagne sont disséminées à travers toute l’île. Pour mieux comprendre et se faire une idée du «way of life» adopté par les anciens, une visite au Cragneash National Folk Museum à la pointe Sud s’impose. produisent une autre spécialité : les harengs Manx. «La seule différence avec la méthode ancestrale, est l’intervention d’une machine pour enlever les écailles et la peau des poissons. Tout le reste de la recette et les différents traitements sont effectués dans le respect de la tradition», nous explique Paul Desmond, le propriétaire du fumoir Moores. «Les harengs, une fois nettoyés, passent 10 minutes dans une saumure avant d’être pendus dans les fumoirs.» Les poissons y resteront une douzaine d’heure dans les fumées dégagées par la combustion de bois de chêne, ce qui donne ce goût unique. L’achat de hareng chez Moores (ou chez son concurrent Devereau dans le centre de Douglas) est hautement recommandé.
Triskèle
et
Métier
à tisser
L’avantage de la taille réduite de cette île est incontestablement de pouvoir loger
dans le même Bed&Breakfast durant tout votre voyage. Votre lieu de séjour servira de camp de base pour organiser vos excursions d’un jour. Nous avons profité du B&B River House à Ramsey. La plupart des visiteurs logent à Douglas, la capitale offrant le plus de possibilités de logement. Partout où vous passerez, vous rencontrerez l’emblème de l’Ile de Man : le triskèle. Ce symbole est composé de trois jambes enroulées en cercle concentrique qui illustre la devise latine de l’île : Quocunque Jeceris Stabit. Cela se traduit à peu près ainsi : «peu importe comment vous le jetez, il retombera toujours sur ses pieds». On ne peut malheureusement pas en dire autant de tous les pilotes de course qui sont tombés sur l’île. Suivez la «Scenic Route» de Ramsey vers Douglas et vous passerez par Laxey. Cette petite cité minière abandonnée sur la côte Est s’enorgueillit de posséder la plus Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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iSle OF Man
grande roue à eau de l’île. Construite en 1854, elle accomplit trois tours par minute pour aller pomper 400 litres d’eau par rotation à 460 mètres de profondeur dans le puits de mine. Durant plusieurs décennies, cette mine était la première productrice de zinc, de cuivre, de plomb et d’argent de tout le Royaume-Uni. En 1930, elle était épuisée. Ailleurs dans le village, vous découvrirez les anciens métiers à tisser qui produisent le célèbre «tweed» depuis 1880. Observer les tisserands en plein ouvrage, maniant avec dextérité la navette et les fils est un spectacle fascinant.
Point d’orgUe Le désavantage de visiter l’île à moto est de ne pas emprunter les 30 kilomètres de la ligne de tramway qui vous emmène à Douglas. Ces voitures électriques de la compagnie Manx Electric Railways arborent fièrement leurs 120 printemps ! Une autre
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ligne de trams de 8 kilomètres de long vous emmène de Laxey au sommet de Snaefell. La balade prendra tout de même trente minutes tant les pentes sont raides et franchies au rythme d’un piéton. Douglas sera le point d’orgue de votre séjour sur l’Ile de Man en dehors de la frénésie et de l’ambiance électrique qui règne lors du Tourist Trophy. Il ne vous reste plus qu’à profiter d’une promenade le long de la Douglas Bay pour clôturer en beauté cet agréable voyage de 4 ou 5 jours. Pas étonnant que chaque année, des milliers de motards épargnent chaque centime d’euros pour s’offrir un séjour sur l’Ile de Man en expliquant à leur épouse : «Chérie, je vais regarder les compétitions et les courses de vitesse !» •
PLUS D’INFOS
de Castletown se trouve sur www.jasongriffiths.im Pour le «Southern 100-races», c’est ici : www.southern100.com
sur l’Ile de Man en visitant l’excellent site
Et pour tout savoir sur les harengs fumés :
Internet www.isleofman.com
www.manxkippers.com ou
La triple concession Triumph, BMW et Ducati
www.isleofmankippers.com
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france paris
SuperMeen à
Paris
Une demoiselle qui n’a pas froid aux yeux, ma fille ! Neuf
De
ans et 270 km à l’arrière d’une moto. La nouvelle loi sur
Nous sommes partis ce matin aux alentours de 11h30 avec l’intention de trouver un petit hôtel avant la nuit. À 12h30, nous avions déjà avalé une bonne centaine de kilomètres d’autoroute. Il était temps de faire une courte halte pour enfiler un polar supplémentaire. Ensuite, nous avons suivi un itinéraire qui se composait principalement de routes rectilignes et vallonnées. Je n’avais pas trop envie de ce type de route. Cette antipathie était plus que probablement due à l’angoisse des conséquences que ces routes monotones pouvaient avoir sur mon petit duo. Meen n’a pas vraiment bien dormi ces derniers jours et l’association routes droites, ronronnement monotone du moteur boxer, joints des plaques de béton et paix totale que vous ressentez quand vous êtes passager en a mis en transe plus d’un. À chaque arrêt, je traque le passage du marchand de sable, mais Meen repousse sans la moindre difficulté les assauts de ce collaborateur du service d’épandage. Ses yeux sont vifs, elle chantonne dans mon dos et elle apprécie manifestement le voyage. Finalement, la balade prend quand même une tournure différente. Après un petit 100 km de départementales, voilà qu’on nous offre sur les 60 - 70 derniers kilomètres une France à s’en
les enfants à l’arrière de la moto a donné une connotation un peu bizarre à la notion de «responsabilité». Meen m’accompagne à moto depuis deux ans et demi déjà. Elle est habituée et se comporte comme une passagère «pro», même si elle reste bien évidemment un enfant. Mais, indépendamment de ce fait, une personne n’est-elle prête à prendre sa place dans le trafic que quand elle en a l’âge ou si elle a passé un examen ou si elle a été qualifiée de «mentalement apte» par un jury intellectuel ? Pfff, mais avec quoi je viens, moi ? Nous sommes en vacances !
Texte et photos: Pieter Paques 64
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monotone à pittoresque
Paris
France
Après un petit 100 km de départementales, voilà qu’on nous offre sur les 60 - 70 derniers kilomètres une France à s’en pourlécher les babines ! Des routes magnifiques, des panoramas qui exigent de restreindre les gaz et des villages qui ont chaque fois un petit extra à offrir : châteaux, ruines, cathédrales… pourlécher les babines ! Des routes magnifiques, des panoramas qui exigent de restreindre les gaz et des villages qui ont chaque fois un petit extra à offrir : châteaux, ruines, cathédrales… La France est peut-être bien un «vieux» pays, mais tout cela n’a rien à voir avec ce qu’il m’a déjà été donné de constater dans d’autres destinations.
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Une
pizza sinon rien !
Bingo ! Le premier arrêt dans notre quête d’un toit fait immédiatement mouche. 80 euros et le petit-déjeuner gratuit pour les moins de 10 ans. Notre «Spirit» (la GS-A) est enfermée dans le parking. Il ne reste plus qu’à décrocher les valises et trimbaler le tout dans notre chambre pour la nuit. Nous
nous changeons immédiatement et partons à la recherche d’un restaurant. Cette quêteci est plus ardue. En ce lundi de Pâques, on dirait que tout ce qui a trait à l’horeca et au tourisme a fermé boutique. Nous n’avons le choix qu’entre un sushi bar (O-K pour moi, «bèèèk» pour Meen) et une pizzeria où nous sommes les seuls clients. Dommage pour
France
le restaurateur franco-italien, mais plutôt chouette pour nous car nous avions justement envie d’une pizza (d’ailleurs est-ce que nous n’en avons pas toujours envie ?). Je suis au lit en train d’écrire le compte rendu de cette première journée et je jette un coup d’œil sur la gauche. Meen dort paisiblement en serrant son doudou dans ses bras. Elle ne ronfle pas, heureusement ! Elle m’a dit tout à l’heure à table que sa maman lui manquait. Ce n’est pas grave, c’est normal et c’est tant mieux. C’est quand même un autre type d’expérience, ce voyage à moto avec ma fille. Les conversations sont généralement d’un autre niveau, les arrêts plus fréquents et au lieu de chercher dans le rétro la présence d’un autre compagnon de voyage motocycliste, je recherche constamment dans ce même rétro le regard de ma petite passagère. Est-elle encore là ?
Sur
la route de
Paris
Il est 21h30 et nous venons juste de nous glisser sous la couette dans le petit hôtel des Lilas. C’est un peu tard, mais dans cette région parisienne la règle est «pas de repas avant 19h30» ! Il est temps de coucher aussi sur papier cette deuxième journée. À 4h33, mon horloge interne me fait savoir que j’ai assez dormi. Elle est perturbée car elle n’a pas l’habitude d’aller dormir avec les poules ! Je prends un petit-déjeuner frugal, mais amplement suffisant. Je sais entretemps de source fiable que le produit que nous connaissons sous le nom de «yakult» est introuvable en France et je comprends maintenant pourquoi. Leur café va en effet participer pour le reste des vacances au bon fonctionnement de mon transit intestinal ! L’hôtelier répond «Bien sûr !» à la question de savoir si la cathédrale du cru est déjà ouverte
Paris
aux visiteurs. Nous voilà partis. Un immense édifice, avec toutes les statues d’anges, de diables et de gargouilles là où il faut sur ses façades. Si on a déjà ce genre d’édifice dans un village comme Noyons, alors nous sommes curieux de ce que Paris va nous offrir. À 10h30, nous prenons quand même la route. Nous devons parcourir une bonne centaine de kilomètres aujourd’hui, donc nous avons du temps à perdre.
Stop & Go Les routes formidables, les beaux villages, les vieux vestiges et le riche passé sont toujours de la partie. C’est de nouveau une journée de voyage mémorable. Toutes les 20 minutes, la moto est béquillée parce qu’il y a quelque chose à voir et à photographier. J’ai établi notre itinéraire comme une sorte de jeu de piste entre le plus de châteaux, de ruines Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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Paris
France
ou d’églises possible. Sur la piste des ruines d’une église, la route passe de l’asphalte aux graviers pour se terminer en ornière. De profondes flaques et des bas-côtés boueux. Si jamais nous devions chuter, la vitesse est quand même très faible et le sol mou. La GS-A chargée ne fait toutefois pas le moindre faux pas. Nous rentrerons cependant bredouilles, car les ruines sont murées et la grille fermée. Le soleil nous accompagne toute la journée. Nous profitons à chaque halte de la chaleur qu’il donne déjà si tôt dans l’année. Nous commençons à sentir cette chaleur en roulant au fur et à mesure que nous approchons de Paris et le trafic qui s’engorge fait baisser notre tempo. Tout près de Paris, Svetlana madame GPS - décroche. Elle n’a pas de visa pour Paris ou plus précisément, nous ne lui
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avons pas téléchargé de cartes pour la ville. C’est vrai que j’aime rouler avec mes bonnes vieilles cartes en papier… Nous trouvons sans la moindre difficulté un hôtel qui nous convient et nous réservons dans la foulée pour deux nuits. Nous faisons ici une jolie prise : 45 euros pour 2 personnes, plus 5 euros pour le petit-déjeuner ! Ma petite demoiselle a un nez pour les bonnes affaires. Nous voici au lit, moi en train d’écrire et elle déjà en train de dormir. Le réveil de voyage indique 22h04, j’éteins la lumière. Bonne nuit !
Carrefours
et vapeurs
Aujourd’hui, nous prenons la direction de «Paris centre-ville». Nous avons beau
loger près du centre, les rues étroites associées au trafic parisien engorgé nous font mettre une bonne heure pour atteindre le cœur de la grande ville. Une certaine expérience des techniques de pilotage de survie n’est pas un luxe ici, si vous ne voulez pas après 20 minutes - c’est garanti sur facture – offrir les clés de votre auto ou de votre moto au premier clochard venu. Avec un peu d’expérience, de culot et d’optimisme, vous pouvez encore arriver à voir le bon côté des choses et dominer la situation. Finalement, la Spirit est bel et bien garée dans l’un des innombrables parkings pour motos et nous adoptons le dresscode ad-hoc. Notre-Dame sert de mise en bouche. Cette dame est d’ailleurs encore plus imposante que je ne le pensais. Les
France
files devant l’entrée le sont aussi et on n’y parle pas beaucoup français. Nous passerons notre tour aujourd’hui. Nous avions déjà balisé à l’avance une sorte d’itinéraire. Il ne nous laissait pas vraiment le loisir de faire la file pendant des heures. Le Louvre est un bon point deux, mais d’abord aller manger un morceau sur la place devant la mairie, suivi d’un coca/ d’une bière sur une terrasse avec vue sur Le Louvre, enfin sur l’arrière, car il se compose de pas mal de «couches». Puis nous plongeons encore un peu plus dedans, jusqu’à la cour intérieure avec la pyramide de verre et les pièces d’eau et les fontaines surélevées. Pas trop de files, mais… nous passons à nouveau notre tour. Via quelques curiosités touristiques de plus petites tailles, nous
poursuivons vers le Centre Pompidou et la place où se réunissent des artistes, parfois un peu trop amateurs. Nous flânons encore un peu le long de la Seine avant de revenir à la Spirit, qui trépigne à l’idée d’enfiler quelques feux verts en direction de la tour Eifel. Il y a moins de files par ici. Nous abandonnons à nouveau la moto et restons bouche bée devant le mastodonte d’acier. C’est vraiment magnifique. Nous nous donnons un quart d’heure pour faire la file et évaluer, sur base de jusqu’où nous aurons avancé pendant ce temps, si nous allons faire ce que tous les touristes font à Paris : grimper au sommet de la tour Eifel. 45 minutes plus tard, nous avons nos tickets et 10 minutes plus tard, nous sommes au niveau 2 (de 3). Encore 45 minutes plus tard
Paris
et le sommet est à nous. En compagnie de cent autres personnes, grosso modo, mais cela ne gâchera pas notre joie devant la vue magnifique. Nous descendons nettement plus vite que nous ne sommes montés. Nous voulons regagner notre hôtel via Montmartre et arrivons super vite jusqu’au Trocadéro. À partir de là, c’est l’enfer sur deux, trois (une foule de scooters MP3) et quatre roues ! La Spirit a une «vapeur» après l’autre, les autos sont en train de surchauffer et fument comme si on venait d’élire un nouveau pape. Les bus encombrent tous les ronds-points et les carrefours. Les scooters et les motos envahissent les trottoirs et une scootériste va même jusqu’à remonter les files en sens inverse sur plusieurs dizaines de mètres. La plupart des chauffeurs ne Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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Aujourd’hui, nous prenons la direction de «Paris centre-ville». Nous avons beau loger près du centre, les rues étroites associées au trafic parisien engorgé nous font mettre une bonne heure pour atteindre le cœur de la grande ville. Une certaine expérience des techniques de pilotage de survie n’est pas un luxe ici.
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France
Paris
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Paris
France
s’en offusquent pas et lèvent le pouce en voyant passer cette audacieuse amazone. Pour passer le pire rond-point, je suis un moment son exemple et, enfin, nous laissons la mêlée derrière nous. Nous passons à Montmartre, mais n’avons plus le courage de mettre pied à terre. Vite, une photo prise en selle, de l’église, puis de la ville, et hop une pizzeria !
Paris
by night
Dans une petite rue, j’aperçois un modeste restaurant, déjà ouvert, mais complètement désert. Je jette un coup d’œil à l’intérieur, encore toujours juché sur ma moto, fais signe à la patronne qui me fait en retour un signe de tête amical. Cela suffit à nous décider. Nous garons la BMW et
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entrons dans le restaurant, le sourire de la dame s’agrandit encore. L’apéritif de la maison apparaît en moins de temps qu’il ne faut pour le dire sur notre table, encore avant que nous ne nous soyons complètement débarrassés de notre équipement de moto. Un petit prodige s’accomplit alors : le temps que nous soyons servis, le restaurant est bourré. Bon choix et manifestement juste à temps. Nous prenons tout notre temps pour bavarder entre père et fille et ne reprenons la moto qu’une fois le soleil couché. Nous sommes tous les deux fatigués, mais le citron parisien n’est pas encore totalement pressé ! «Paris by night» nous fait de l’œil, d’autant plus que la circulation est revenue à la normale dans le centre. Donc retour au Trocadéro pour une vue sur la tour Eifel et
son éclairage d’ambiance… si romantique. Encore un tour le long de la Seine et de ses ponts éclairés et de ses bateaux et puis, indispensable, retour à notre point de départ : Notre-Dame.
Et maintenant que vais-je faire ? Il est 22h30 et nous trouvons que les bonnes choses ont une fin. Nous parquons la Béhème à l’hôtel, enlevons les valises, traversons la rue, clé de l’hôtel en main… et la porte ne veut pas s’ouvrir ! La réception ferme à 21h et il n’y a pas la moindre lumière. Meen panique pendant une milliseconde, mais se reprend bien vite. Quelques immeubles plus loin, il y a un magasin de nuit, ils peuvent peut-être nous aider. Non, ils ne peuvent pas ! Retour à la porte fermée
France
Paris
Le contexte des panneaux est clair : ici des événements horribles se sont produits, donc comportez-vous avec dignité et retenue. Meen et moi, nous sommes quasi les seuls touristes. Combinez à cela le décor, les récits et le code de conduite et Meen est immédiatement très respectueuse.
et nouvel essai. La clé entre bien dans la serrure, mais elle ne tourne pas. Chercher un autre hôtel à 23h ? Je pense qu’il n’y a plus que deux types d’hôtel encore ouverts à cette heure. Ceux où la nuitée nous coûtera la peau des fesses et ceux où ils appelleront la police en constatant que je veux réserver une chambre en compagnie d’une petite fille de 9 ans. Bon, essayons encore calmement, même la façon la plus illogique d’actionner une clé, et c’est alors que ça marche : la clé entre dans n’importe quel sens dans la serrure, mais n’ouvre la porte que quand on l’inverse. Soulagés, nous n’avons pas besoin de plus de cinq minutes pour éteindre la lumière et attendre le passage du marchand de sable. Quelle journée !
Champagne à basse température Le lendemain, à 10h, nous sommes déjà sur la Spirit, qui a besoin d’un peu de vacances après son aventure parisienne et aussi d’essence et d’un contrôle de la pression des pneus et du niveau huile! Vers 11h, nous quittons Paris. Une heure et demie plus tard, nous retrouvons la compagnie de notre cheffe tank russe «Svetlana». Nous fendons la Champagne dont il n’y a pas beaucoup de bien - uniquement aujourd’hui il est vrai - à dire. Un vent du nord froid déporte la Spirit sur la gauche pendant plus de 150 kilomètres successifs, de même qu’il nous apporte son lot de pluie. Juste après 17h, nous arrivons à Verdun et poussons la porte de l’office de tourisme. Nous n’avons pas envie de chercher au petit bonheur la chance
un toit pour la nuit et nous demandons assistance. Deux étoiles et un prix à l’avenant nous suffisent. Une chambre correcte, spacieuse et propre, mais aussi à la gloire fanée, c’est ce que nous recevons. Des vêtements propres, une petite promenade, une petite salade, encore une promenade et des photos. Suivis d’une douche et de quelques parties de jeu de société dans la chambre d’hôtel. «Lights out» chez Meen. Encore le compte rendu de deux jours à écrire pour moi. Hier, mes yeux se fermaient. Et demain visite de quelques monuments de la Première Guerre mondiale avant de revenir à la maison.
Jusqu’à
la moelle
Ce 5e jour débute très tôt car nous avons à nouveau un sacré horaire à Moto & Loisirs j ui n 2 0 1 4
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Paris
France
respecter. Bien avant 10h, nous sillonnons déjà les champs de bataille de Verdun, en direction de l’ossuaire de Douaumont. Plus nous approchons, plus la fréquence des panneaux indiquant ce qui est permis et surtout ce qui ne l’est pas sur ce site augmente. Le contexte des panneaux est clair : ici des événements horribles se sont produits, donc comportez-vous avec dignité et retenue. Meen et moi, nous sommes quasi les seuls touristes. Combinez à cela le décor, les récits et le code de conduite et Meen est immédiatement très respectueuse. L’ossuaire l’impressionne visiblement et, même si je l’ai déjà visité, cela reste un spectacle imposant.
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Ce que je n’ai toutefois pas encore vu (je ne l’avais lu que quelques jours avant notre départ) c’est ce qui se trouve sous le sol : un empilement – littéralement – des dépouilles mortelles des plus de 130.000 soldats morts à la guerre à cet endroit. Par de petites fenêtres ternes, vous découvrez avec stupéfaction ces montagnes d’os !
Retour
à la vie normale…
Profond soupir, un moment de silence, même Meen ne bavarde et ne chantonne plus. Le trajet sur Sedan se déroule sur un ruban d’asphalte frais au marquage blanc comme neige. Un paysage verdoyant, légè-
rement vallonné, flanqué d’une Meuse juvénile et d’une succession de gentils virages. Un ciel bien bleu et 15°C : le nec plus ultra en pays motard. Nous approchons de la frontière et je dois encore matérialiser une promesse faite à ma petite Meen : un bon dessert en conclusion de notre voyage. Une gaufre au sucre blanc pour elle et un morceau de tarte aux pommes avec glace et crème fraîche pour moi. Le tout avec vue sur Bouillon. Joli point d’orgue. Près de 160 kilomètres nous séparent encore de maman Jo. Cette dernière étape servira de transition entre la vie dans la Ville lumière et la vie normale. Enfin, c’est quoi normal ? •
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Des Desnouvelles nouvellestous tousleslesjours jours••lalacote cotededel’occasion l’occasion••tous tousleslesdealers dealers test test••sport sport••tourisme tourisme••Technique Technique••Films Films••Roadbooks Roadbooks
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