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LE
féminin couverture
AU CŒUR DU CHANGEMENT
DES FICHES PRATIQUES, DES POINTS DE VUE, DES REPORTAGES, DES INTERVIEWS : Annick de Souzenelle Patrick Viveret Miranda Gray Cyrille J.-D. Javary Inna Modja
ARCHÉTYPES, STÉRÉOTYPES, YIN YANG… COMPRENDRE ET EXPRIMER SA PART FÉMININE
3 Éditeur SARL EKO LIBRIS au capital de 142 720 € Siège social 19, rue Martel - 75010 Paris info@kaizen-magazine.fr www.kaizen-magazine.com Hors-série numéro 11 Le féminin, au cœur du changement Mai 2018 Imprimé sur papier certifié PEFC Fondateurs Cyril Dion, Yvan Saint-Jours, Patrick Baldassari et Pascal Greboval Directeur de la publication Patrick Oudin Directrice d’EKO LIBRIS Françoise Vernet
Le féminin à la source Où se situe la part féminine en moi, Pascal, né masculin ? Comment se manifeste-t-elle ? Est-ce l’intuition qui guide mes pas, de temps en temps ? Les pleurs qui perlent de mes paupières parfois ? Ma part dans les tâches familiales ? Mon irrémédiable volonté de changer… le monde ? Est-ce cela, ce féminin au cœur du changement, cher à Pierre Rabhi ? Je ne sais pas ! Dès lors comment aider à l’accouchement de ce hors-série sur le féminin ? Comment sortir des stéréotypes misogynes ? En sollicitant des femmes bien sûr pour le rédiger, l’illustrer, mais est-ce suffisant ? Ce sont surtout les échanges avec Sabah, bien davantage que les autres hors-série ou bimestriels, qui nous ont permis de garder le cap d’un féminin pluriel, universel, un féminin qui dépasse le cadre biologique, la femme, et le combat politique, le féminisme. C’est peut-être ça le féminin. Cet espace où le lien se tisse. Les conditions que l’on se donne pour créer un utérus, un cadre relationnel baigné d’amour quelles que soient les situations.
ours + edito
Secrétaires de rédaction Emmanuelle Painvin Diane Routex Sarah Touzeau (stagiaire pour ce numéro) Journaliste multimédia Maëlys Vésir Abonnements et commandes Camille Gaudy abonnement@kaizen-magazine.fr Tél. 01 56 03 54 71 (de 14 h à 18 h) 19, rue Martel - 75010 Paris Comptabilité Patricia Lecardonnel Attachée commerciale Cyrielle Bulgheroni Direction artistique, maquette et mise en pages • hobo@hobo.paris hobo.studio Tél. 06 12 17 87 33 Illustration de couverture caroline_south Caroline South Prépresse Schuller-Graphic 18, rue de l’Artisanat 14500 Vire Tél. 02 31 66 29 29 Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (Imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières-les-Vallées SIRET : 539 732 990 000 38 • APE : 5814Z Commission paritaire : 0322 K 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. 05 63 94 15 50 Distribution Presstalis Vente au n° pour les diffuseurs Groupe HOMMELL • Tél. 01 47 11 20 12 diffusion-hommell@sfep.fr Aucun texte ni aucune illustration ne peut être reproduit-e sans l’autorisation du magazine. Merci.
Un amour qui ferait écho à la dualité de la création, être deux pour créer l’Unité. Et moi, quelle est la part du masculin en moi, Sabah ? Ma féminité serait-elle aussi à la source de ce masculin, mon allié, mon autre moimême ? Unis au plus profond de notre être, ces deux pôles semblent faire jaillir en nous cette part de créativité, d’amour et d’intuition. Gandhi disait : « Vous devez être le changement que vous voulez voir dans ce monde. » Et si le féminin en était le premier pas ? Que l’on soit homme ou femme, le féminin semble créer les conditions d’une re-co-naissance, sensible, sociale et politique pour que l’équilibre soit en effet au cœur du changement en nous et avec nous. Dans ce hors-série, nous avons tenté d’esquisser les premières lignes d’une matrice qui pourrait (r)-éveiller cet élan d’ouverture… pas à pas. Sabah Rahmani & Pascal Greboval
ÉDITO
Rédactrice en chef adjointe Sabah Rahmani
DITO
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LE F É M INI N, A U CŒUR DU CHA NGEM ENT
Rédacteur en chef Pascal Greboval
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HORS-SÉRIE N°11
Un hors-série féminin fait par ces femmes : AUTRICES
DESSINATRICE
Gaëlle Baldassari
Cécilia Pepper
J’œuvre avec passion pour que les femmes fassent alliance avec elles-mêmes, en reconnaissant leurs spécificités, clés puissantes pour booster leur confiance, leur endurance, et atteindre leurs objectifs. Je suis coach et formatrice au service du leadership et des femmes, certifiée en Approche Neurocognitive et Comportementale et diplômée de l’École Française de Coaching-MHD (titre RNCP). J’ai créé Ressources Féminines et Kiffe ton Cycle.
Quand on me demande « depuis quand tu dessines ? », je réponds que tous les enfants dessinent ; moi, c’est juste que je n’ai pas arrêté. Après des études de sculpture à Paris – où je suis née – et de cinéma d’animation en Norvège, je suis devenue illustratrice, notamment pour Kaizen, Actes Sud ou encore L’âge de faire. Je suis aussi décoratrice pour le dessin animé, croqueuse professionnelle et carnettiste au quotidien…
présentation auteur www.ceciliapepper.com
www.ressources-feminines.fr
KAIZEN
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Audrey Guiller Journaliste, j’adore écrire sur la vie des femmes de France et d’ailleurs. Je les trouve fortes et pleines de ressources. J’ai un master d’Études sur le genre et j’ai coécrit Le viol, un crime presque ordinaire (Le Cherche-midi, 2011). J’anime aussi la rédaction de Citad’elles, un magazine de rédactrices détenues en longue peine au centre pénitentiaire de Rennes (www.citadelles.org).
Aude Raux Je suis journaliste, membre du Collectif Argos. Des sujets porteurs d’espoir, tels sont les thèmes de mon travail en France et à l’étranger. En 2015, j’ai été lauréate du Prix Jacques Moreau du meilleur reportage en économie sociale pour un article sur les repair cafés, paru dans Kaizen.
www.collectifargos.com
PHOTOGRAPHE
Caroline South Mère de deux enfants, je vis au Royaume-Uni, dans le Sussex de l’Ouest. Passionément créative, j’aime particulièment les assemblages d’objets glanés dans la nature. Je passe des heures à explorer la côte Sud de l’Angleterre à la recherche de trésors que j’utilise ensuite pour mes photographies. La couleur est centrale dans mon travail : je compose des images à partir de thèmes colorés, avec des objets organisés par ordre de taille.
Instagram : caroline_south
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HORS-SÉRIE N°11
S
OMMAIRE
Édito ≈ 3 Présentation des autrices ≈ 4 Préface • Annick de Souzenelle et Patrick Viveret : De quoi le féminin est-il le nom ? ≈ 8
Oser ≈ 14 ≈ INTERVIEW ≈ 16
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Rayonner ≈ 40 ≈ INTERVIEW ≈ 42
somm
Inna Modja : « Rien n’est donné aux femmes et c’est de là qu’elles tirent leurs formidables ressources »
Cyrille J.-D. Javary : « Le Yin Yang, c’est la voie de la souplesse »
≈ PORTRAIT ≈ 20
≈ PORTRAIT ≈ 46
Delphine Lhuillier : Le féminin fait son festival
Jack Parker : La (dé)construction en règle
≈ POINT DE VUE ≈ 22
≈ POINT DE VUE ≈ 48
Vers une entreprise plus féminine ? ≈ POINT DE VUE ≈ 24
Le réseau Elles Aussi milite pour la parité politique ≈ BD ≈ 26
T’as de la marge, Chantal ! ≈ POINT DE VUE ≈ 28
Femmes Semencières, un mouvement porteur de vie ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 30
Prendre soin de son périnée ≈ PORTRAIT ≈ 32
Diane Rainard : Au-delà des barrières ≈ POINT DE VUE ≈ 34
Les stéréotypes ? C’est pas mon genre ! ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 38
Connaître son anatomie intime avec l’auto-examen gynécologique
Le slow sex, pour jouir en pleine conscience ≈ BD ≈ 52
Bébé ou pas ? ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 54
Des méthodes de contraception diversifiées ≈ PORTRAIT ≈ 56
Mélissa Plaza : Droite au but ≈ REPORTAGE ≈ 58
L’égalité en marche… exploratoire ≈ POINT DE VUE ≈ 61
C’est quoi ton archétype ? Je le cache à l’intérieur ! ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 64
Osez le clito !
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Abonnements ≈
maire S’interroger
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≈ 66
≈ INTERVIEW ≈ 68
Miranda Gray : « Vivre selon ses cycles » ≈ PORTRAIT ≈ 72
Diane La Blanche : Une louve en quête de féminin sacré ≈ POINT DE VUE ≈ 74
Suède : le royaume des papas poules
Se réaliser ≈ 92 ≈ INTERVIEW ≈ 94
Cheikha Nur Artiran : « La femme est investie d’une sacralité spirituelle » ≈ PORTRAIT ≈ 98
Shamandra : Chamane urbaine ≈ POINT DE VUE ≈ 100
≈ BD ≈ 78
À la ménopause, de nouvelles règles s’imposent
≈ REPORTAGE ≈ 80
Les sorcières modernes
Extrême combat L’autodéfense : prendre conscience, prendre confiance ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 82
La sobriété heureuse au féminin ≈ PORTRAIT ≈ 84
Odile Chabrillac : L’équilibre féminin-masculin en question ≈ POINT DE VUE ≈ 86
≈ BD ≈ 104
≈ POINT DE VUE ≈ 106
Oser se poser
≈ FICHE PRATIQUE ≈ 108
Les protections périodiques écologiques ≈ PORTRAIT ≈ 110
Perla Servan-Schreiber : L’acceptation joyeuse ≈ POINT DE VUE ≈ 112
Le féminin, moteur de l’écologie ?
Mieux comprendre les règles
≈ FICHE PRATIQUE ≈ 90
≈ FICHE PRATIQUE ≈ 116
Les super pouvoirs du cycle menstruel
SOMMAIRE
≈ 118
Les tentes rouges, pour parler librement
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Bibliographie
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HORS-SÉRIE N°11
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Oser chapitre 1 printemps / Inna Modja : « Rien n’est donné aux femmes entreprendre /oseret c’est de là qu’elles tirent leurs formidables ressources » ≈ INTERVIEW ≈ 16
≈ PORTRAIT ≈ 20
Delphine Lhuillier : Le féminin fait son festival Vers une entreprise plus féminine ?
OSER
≈ POINT DE VUE ≈ 22 ≈ POINT DE VUE ≈ 24 ≈ BD ≈ 26
T’as de la marge, Chantal ! ≈ POINT DE VUE ≈ 28
Femmes Semencières, un mouvement porteur de vie ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 30
Prendre soin de son périnée ≈ PORTRAIT ≈ 32
Diane Rainard : Au-delà des barrières ≈ POINT DE VUE ≈ 34
Les stéréotypes ? C’est pas mon genre ! ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 38
Connaître son anatomie intime avec l’auto-examen gynécologique
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Le réseau Elles Aussi milite pour la parité politique
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NTERVIEW
Inna Modja « RIEN N’EST DONNÉ AUX FEMMES
interview-I
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ET C’EST DE LÀ QU’ELLES TIRENT LEURS FORMIDABLES RESSOURCES » À 34 ans, Inna Modja est musicienne et activiste. Elle est la marraine de la Maison des femmes et a enregistré trois albums plusieurs fois récompensés. Elle a appris à ne laisser personne prendre son destin en main. Et sait que ses rêves, comme ceux de toute femme, sont valides. Car le temps, la patience et le travail permettent de déplacer des montagnes.
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Pour quelles raisons avoir choisi de devenir marraine de la Maison des femmes ? Quel est l’objectif de celle-ci ?
La Maison des femmes, à Saint-Denis, accueille chaque jour trente-cinq à cinquante femmes excisées, violées, mariées de force, battues ou ayant besoin d’une IVG. J’en suis la marraine, car je trouve que c’est un endroit exceptionnel. Loin d’être lugubre, il est accueillant et coloré, c’est une bouffée d’air frais. La gynécologue Ghada HatemGantzer l’a créé pour que des femmes victimes ou en situation de vulnérabilité trouvent toute l’aide dont elles ont besoin – médicale, juridique, psychologique – dans un même lieu. Elles sont soutenues par des professionnels et des bénévoles, que ce soit pour déposer plainte, pour se confier ou pour reprendre confiance en elles. La Maison a été inaugurée en 2016 et elle est déjà trop petite : c’est dire combien un tel lieu répond aux besoins des femmes ! Nous avons donc lancé une grande campagne Soyons des héroïnes afin de trouver les financements pour ouvrir, d’ici à cinq ans, d’autres Maisons ailleurs en France 1.
© DR
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D’où vous vient cet engagement ?
Je suis née à Bamako, au Mali. J’ai moi-même été victime d’excision par une grand-tante, à l’insu de mes parents. C’est une fois arrivée en France, à 19 ans, que j’ai pris conscience de l’ampleur des conséquences de cette excision,
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Quelles sont les ressources des femmes, pour ne pas rester à l’état de victimes ?
Aujourd’hui, les femmes dans le monde réussissent à accomplir tellement ! Elles élèvent des enfants, nourrissent des familles, travaillent, prennent des responsabilités, sont attentives à leur développement personnel. C’est difficile d’arriver à faire tout cela. La société patriarcale et misogyne nous voit comme de pauvres petites choses, mais ce n’est absolument pas vrai. Rien n’est donné aux femmes et c’est de là qu’elles tirent leurs formidables ressources : elles apprennent à travailler fort pour obtenir ce qu’elles veulent. Mais ce qui leur permettrait d’aller encore plus loin, ce serait qu’elles croient davantage en elles-mêmes. Par exemple, tout humain, femme comme homme, est capable de créativité. Mais le petit enfant créatif en nous est souvent malmené quand on est une femme. N’attendons pas d’être valorisées par quelqu’un d’extérieur : faisons-nous davantage confiance. Chaque jeune femme doit savoir qu’elle
trait
compte en tant que femme. Les femmes sont intelligentes et capables de modeler leur destin avec le temps. Il n’y a pas de limites à ce qu’elles peuvent être. Même quand tout semble aléatoire. J’ai personnellement toujours eu la certitude que mes rêves étaient valides. Je n’ai jamais eu de doute sur le fait que je suis née toute nue, comme tout le monde, mais que tout le reste dépend de moi. Les jeunes femmes doivent aussi comprendre que l’autonomie et la force qu’elles obtiennent peu à peu grâce au travail des féministes, elles les méritent. On est désormais trop modernes pour accepter l’inégalité. Comment les femmes peuvent-elles consolider leur confiance en elles ?
Elles doivent prendre la parole. Dans une de mes chansons, j’invite les femmes maliennes à se faire entendre, à « retirer le foulard devant leur bouche ». Parler est le premier pas vers la guérison. Dans les groupes de parole de femmes excisées, nous avons partagé nos histoires. Cela procure un soutien, crée un sentiment de sororité qui donne de l’énergie. En échangeant, les femmes sortent de l’isolement. Elles reprennent le contrôle ou le pouvoir qu’on leur a ôtés, elles se réapproprient leur personne. Parler de ce qui pose problème, c’est aussi commencer à réfléchir à la solution, entendre que d’autres sont passées par là et comment elles s’en sont sorties. C’est très inspirant. Parler, c’est aussi révéler. Pour moi, les mouvements #MeToo et #BalanceTonPorc ont été formidables pour cela. Longtemps, on a fait tout ce qu’on voulait avec les femmes, en comptant sur leur silence : elles auraient trop honte pour en parler. Aujourd’hui, des femmes, ensemble, disent stop. Elles vont dans la rue, réaffirment leurs droits à ne plus être maltraitées, blessées impunément. C’est un soulagement énorme. Leurs mots
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L E F ÉMI NIN , A U CŒUR DU CHA NGEM ENT
sur ma vie et dans mon corps. Cela a été une période difficile. Puis j’ai compris que si je sombrais dans le négatif, c’est comme si je laissais cette grand-tante prendre la main sur mon destin. À 22 ans, une chirurgie réparatrice m’a fait énormément de bien. Mon militantisme est une façon de redonner ce soutien que j’ai obtenu. À la Maison des femmes, j’ai participé à des groupes de parole pour partager mon vécu avec d’autres, sans honte. Je voulais dire à ces femmes qu’elles ne sont pas condamnées à rester des victimes. Un jour, grâce à leurs efforts et au soutien de leur entourage, elles deviendront des survivantes. Et j’ai beaucoup d’espoir, car je vois le mouvement contre l’excision se renforcer. Je me suis engagée auprès d’ONU Femmes, qui s’est fixé d’éradiquer cette violence d’ici à 2030.
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Inna Modja
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OINT DE VUE
Les
stéréotypes ? C’est pas HORS-SÉRIE N°11
mon
genre !
« Les filles en rose, les garçons en bleu » : voilà un stéréotype de genre facilement identifiable ! Bien d’autres existent, plus subtils, qui attribuent aux femmes et aux hommes des caractéristiques arbitraires, fondées sur des idées préconçues. Sans nier les différences physiologiques, comprenons leurs impacts.
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L
es stéréotypes sont des images préconçues et figées, attribuées à un groupe de personnes de façon arbitraire. Quand ils sont portés sur le sexe, ils concernent l’intégralité de la population en la divisant en deux groupes : filles ou garçons. Cette classification intervient parfois avant même la naissance. La chambre et les vêtements des enfants sont ainsi, bien souvent, des marqueurs visibles de leur sexe. Et il n’y a pas que les objets qui soient soumis aux clichés : les projections des adultes en sont également imprégnées. Delphine Martinot, chercheuse en psychologie sociale et expérimentale au LAPSCO 1, remarque qu’on parle volontiers de la tonicité des petits garçons et de la volubilité des petites filles. Cela se poursuit quand les enfants grandissent : les jouets sont classés par genre – dans les catalogues et les magasins – encourageant les garçons à passer à l’action et les filles à s’occuper du foyer. Par exemple, dans le catalogue en ligne d’une des plus grandes marques de jouets en France, dans la catégorie « véhicules de plein air », 19 sont considérés pour les garçons, 1 seul pour les filles, et sur les 33 véhicules classés « mixtes », 100 % des enfants photogra-
phiés sont des garçons. Enfin, en France, dans les manuels de lecture du CP, 67 % des personnages pratiquant un sport sont des hommes et 70 % de ceux qui font la cuisine ou le ménage sont des femmes 2.
papier fond-Les sté LE SEXE, DÉTERMINANT DU GENRE ? Pour Delphine Martinot, « la fonction principale des stéréotypes est de maintenir la stabilité de la société. Pour assurer un “vivre-ensemble apaisé” alors même que l’ordre social est défavorable à l’un des deux groupes – en l’occurrence les femmes –, cela doit sembler juste à toutes et à tous. » Les stéréotypes se sont construits sur l’argument des différences de nature. Mais Delphine Martinot tient à différencier le sexe du genre : « La classification par sexe observe les différences physiologiques, alors que le genre fait référence aux différences sociales entre femmes et hommes. » Deux points de vue s’affrontent en sociologie comme en psychologie sociale : les essentialistes pensent les différences sociétales entre femmes et hommes comme des conséquences logiques de prédispositions innées de
pas un caractère inné. Des études comparables, menées notamment aux États-Unis et en Hollande, montrent que les femmes occidentales ont un esprit de compétition comparable aux femmes massaï. Pour Nathalie RapoportHubschman, ces résultats sont révélateurs de l’impact des stéréotypes et devraient nous interroger sur les actions à mener pour tendre vers une plus grande liberté d’action des femmes. DES FEMMES PLUS DIPLÔMÉES, MAIS MOINS CARRIÉRISTES D’après le HCE 4, « les stéréotypes de sexe influencent les pratiques pédagogiques, les évaluations scolaires, les contenus des programmes et des manuels, les interactions avec les enseignants, les sanctions, les orientations des filles et des garçons, etc. 5 » Delphine Martinot constate, elle, la « réussite paradoxale des femmes » en France. Alors qu’elles sont plus nombreuses à obtenir un bac général et à poursuivre des études dans l’enseignement supérieur, les femmes font des choix d’orientation moins « rentables » que ceux des garçons – aussi bien en matière de salaire que de pouvoir ou de prestige. Pour tenter de comprendre ce paradoxe, la chercheuse a enquêté sur les bancs des écoles. Elle a notamment mis en évidence qu’en troisième, les collégiens considèrent que les filles ont moins de potentiel intellectuel que les garçons 6. Elle ajoute d’ailleurs qu’aujourd’hui 67 % des individus – femmes et hommes confondus – pensent que les femmes n’ont pas les capacités nécessaires pour accéder à des postes scientifiques de haut niveau.
éréotypes de genre LES GARÇONS PEUVENT-ILS… ? LES FILLES PEUVENT-ELLES… ? Élise, blogueuse de Maman, rodarde !, a réalisé des dépliants antisexistes sur le thème « Les garçons peuventils… ? » – se maquiller, mettre du vernis, pleurer, etc. – et « Les filles peuvent-elles… ? » – aimer les voitures, ne jamais devenir maman, aimer le foot, etc. À télécharger sur www.mamanrodarde.com
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chaque sexe, tandis que les existentialistes y voient une construction du genre liée aux expériences de vie en société. Ces derniers différencient donc le sexe biologique et le genre, qui est la représentation sociale du sexe. Delphine Martinot reconnaît que le sexe – différence biologique – est intangible, alors que le genre est une construction d’une société à un moment donné. « Si on se place dans une perspective historique, on peut voir que les relations entre femmes et hommes ont évolué », rappelle la chercheuse. Celle-ci déplore la mise en avant d’arguments essentialistes qui, selon elle, donnent l’impression qu’il y a une différence sociétale normale « contre laquelle on ne peut pas lutter ». Dans son livre Les Barrières invisibles dans la vie d’une femme, Nathalie Rapoport-Hubschman, médecin et psychothérapeute, cite une expérience qui compare l’esprit de compétition des femmes et des hommes au sein d’une société patrilinéaire – les Massaï du Kenya et de Tanzanie – et d’une société matrilinéaire – les Khasi du nord de l’Inde 3. Dans la société matrilinéaire, ce sont les femmes, qui ont le plus l’esprit de compétition et inversement dans la société patrilinéaire. Si l’autrice reconnaît qu’il est impossible d’affirmer que la position dominante des femmes dans la société khasi encourage la compétitivité, elle en déduit néanmoins que la compétitivité n’est pas identique pour toutes les femmes, partout dans le monde. Ce n’est donc
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Rayonner ≈ INTERVIEW ≈ 42
Cyrille J.-D. Javary : « Le Yin Yang, c’est la voie de la souplesse »
chapitre 2 ete / Jack Parker : La (dé)construction en règle rayonnement / Le slow sex, epanouissement pour jouir en pleine conscience ≈ POINT DE VUE ≈ 48
≈ BD ≈ 52
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≈ PORTRAIT ≈ 46
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≈ FICHE PRATIQUE ≈ 54
Des méthodes de contraception diversifiées ≈ PORTRAIT ≈ 56
Mélissa Plaza : Droite au but ≈ REPORTAGE ≈ 58
L’égalité en marche… exploratoire ≈ POINT DE VUE ≈ 61
C’est quoi ton archétype ? Je le cache à l’intérieur ! ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 64
Osez le clito !
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Bébé ou pas ?
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Cyrille J.-D. Javary « LE YIN YANG, C’EST
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Cyrille J.-D. Javary est consultant et formateur en civilisation et culture chinoises, anciennes et modernes. Il explique comment Yin Yang nous permet de mettre fin aux hiérarchies entre femmes et hommes et rend à chaque individu sa liberté d’action. Car chacun est,
interview-Compren pour etre épanoui a
en même temps et successivement, Yin et Yang.
Que signifient Yin et Yang ?
© François Lollichon
HORS-SÉRIE N°11
LA VOIE DE LA SOUPLESSE »
Yin Yang est un seul mot qui représente un système de pensée. Au cours du dernier millénaire av. J.-C., les Chinois réfléchirent au fonctionnement des choses, le Tao. Ils généralisèrent alors la « pensée par deux », c’est-à-dire l’idée que toute situation se divise toujours en deux. Un jour, par exemple, est toujours constitué d’une journée et d’une nuit. La journée est à la fois le passé et le futur de la nuit. Les Chinois décidèrent d’utiliser un couple de mots courants, Yin Yang, comme emblème de cette pensée par deux. Dans leur sens concret originel, Yin signifie « ubac », le versant d’une montagne exposé au nord, et Yang « adret », le versant exposé au sud. Comme les deux versants d’une même montagne, il ne peut pas y avoir l’un sans l’autre. Le système Yin Yang nous rappelle ainsi que toute situation a toujours deux aspects : Yin et Yang ne sont pas semblables, mais ce ne sont pas des entités contradictoires ni des qualités opposées. Yin marque, par exemple, un début d’orage, Yang sa fin. L’autre principe posé par Yin Yang est que tout change tout le temps. Autrement dit, une chose peut être à la fois une et son contraire. Tout dépend du moment et de l’endroit depuis lesquels on l’observe. Ainsi, les deux aspects d’une même situation oscillent en permanence, dans un battement continuel. Le Yi Jing, texte fondateur de la civilisation
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chinoise [lire encadré page 44], résume cette pensée ainsi : « Un aspect Yin, un aspect Yang, c’est comme cela que tout fonctionne. » Dire que Yin représente le féminin et Yang le masculin est donc incorrect ?
Oui, attribuer des genres à Yin Yang, c’est pervertir la pensée chinoise du changement. On lit trop souvent : « Le Yin est le principe de l’ombre, du froid, de la féminité. Il invite au repli, au repos, voire à la passivité. Le Yang est le principe de la lumière, de la chaleur, de la masculinité, il invite au déploiement des énergies, à l’activité, voire à l’agressivité. » C’est une interprétation erronée. Que les Chinois euxmêmes soient responsables de cette méprise n’est pas une raison pour la reprendre à notre compte ! Yin Yang ne sont ni des attributs ni des sexes. Ce sont des stratégies, des manières d’agir, des vecteurs du changement. Les figer en en faisant des qualités ou des états, c’est oublier le mouvement d’oscillation constant qui les définit. Car chaque être vivant est en même temps et successivement Yin Yang. Yin n’est pas « le » froid, mais le refroidissement automnal. Yang n’est pas « la » chaleur, mais le réchauffement printanier. Pour bien comprendre Yin Yang, il faut employer des verbes d’action, pas des noms ni des adjectifs. Yin est ce qui stabilise et nourrit, Yang ce qui dynamise et pousse à
trait
changer. Yin ce qui défend, Yang ce qui attaque. Yin ce qui mène à terme, Yang ce qui enclenche. Yin ce qui intériorise, Yang ce qui extériorise. Par exemple, « pénis » se dit « tige Yin » en chinois : l’appareil sexuel est Yin, il est toujours là. Et le moment de son activation est Yang. Pourquoi le système Yin Yang a-t-il été sexualisé et donc détourné de sa signification d’origine ?
C’est la dynastie Han (206 av. J.-C. à 220 apr. J.-C.) qui a perverti le système Yin Yang. En lui associant des notions de masculin et féminin, qui lui sont totalement étrangères. Ceci afin de légitimer la restriction injuste de l’espace autorisé aux femmes, et du respect qui leur est dû. Si l’on regarde la graphie ancienne de l’idéogramme de « femme », on discerne la silhouette d’un personnage assis sur ses talons, les deux mains croisées au-dessus des cuisses. Dans l’Antiquité, c’était l’assise noble. La femme croise les mains pour se différencier des esclaves, qui se présentent les mains ouvertes. Mais les Han ont décrété que dans l’idéogramme, ce personnage de femme était à genoux, dans une posture de soumission. De même, partant de l’idée pourtant juste du mouvement centripète de Yin et centrifuge de Yang, ils ont dévoyé Yin Yang pour justifier l’enfermement des femmes dans la maison, leur exclusion de la place publique et leur sujétion aux hommes. Yin Yang a été perverti par une vi-
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ndre le yin et yang, acccepter les deux
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EPORTAGE
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L’égalité en marche…
exploratoire papier fond-marche
58 KAIZEN
explo / violence espace public
Pour permettre aux femmes de se réapproprier l’espace public, l’association À places Égales anime, depuis 2009, des marches exploratoires. Ensemble, les femmes arpentent les rues et proposent des solutions aux problèmes qu’elles rencontrent.
I
nstaurer l’égalité dans le droit de circuler en ville, telle est la philosophie des marches exploratoires. Déployées en Amérique du Sud dans les années 1980-1990, les marches exploratoires ont cheminé jusqu’au Canada avant d’être transposées en France, en 2009, par l’association À places Égales. « Bien plus que des marches sécuritaires, les marches exploratoires visent à permettre aux femmes d’acquérir le droit de circuler librement, en toutes sécurité et tranquillité, dans l’espace public », explique Dominique Poggi. Cette sociologue, spécialiste des questions d’égalité femmeshommes, est cofondatrice de l’association. « Le droit à la ville est un droit citoyen fondamental pour l’égalité, précise-t-elle. Si une femme est conditionnée pour mettre en place des stratégies de contournement, si elle a intégré l’évitement – le fait de ne pas aller dans certains endroits par peur d’être harcelée – comment pourrait-elle participer à un conseil de quartier, par exemple, ou faire partie d’une association ?
Autant d’activités inclusives dans la société et qui font des femmes des citoyennes à part entière. » Depuis 2009, l’association a guidé des marches exploratoires dans une vingtaine de villes françaises, comme Gennevilliers, Rouen, Bordeaux ou encore dans le 18e arrondissement de Paris. Sa méthode s’articule en trois étapes principales, réparties sur une période de six mois en moyenne. SENSIBILISER À LA QUESTION DU GENRE DANS LA VILLE L’association À places Égales intervient à la demande des mairies soucieuses de favoriser la réappropriation de l’espace public par les femmes. Ces mairies s’appuient sur un relais local, par exemple un centre social, qui constitue un groupe d’une dizaine de femmes volontaires aux profils variés. Pourquoi un groupe uniquement féminin ? « Quand on fait partie des discriminés, il est nécessaire d’avoir un temps entre soi, c’est-à-dire sans la présence des “dominants”, pour libérer au mieux la parole », explique Dominique Poggi. Marie-Dominique de Suremain, urbaniste sociologue et cofondatrice de l’association, ajoute : « La méthode que nous avons mise au point repose sur la parole de femmes qui savent ce qu’elles disent à force d’expérimenter l’oppression. Elles ne vivent pas l’espace public de la même façon que les hommes. » Par ailleurs, l’aména-
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gement urbain a été conçu majoritairement par des hommes. D’après Yves Raibaud, spécialiste de la géographie du genre au CNRS, « les architectes, urbanistes, directeurs des services équipement et concepteurs des programmes urbains sont presque exclusivement des hommes. De plus, l’offre de loisirs est destinée aux garçons : skateparks, city stades, activités liées aux cultures urbaines, etc. Même si le foot et le skate ne sont pas réservés aux garçons, il faut reconnaître que les pratiques sont consacrées par l’usage. » C’est ainsi l’occasion pour les femmes de questionner cet aménagement. Et comme le note Marie-Dominique de Suremain, « lorsque les femmes ne sont plus exclues, l’inclusion profite à tous. » Lors de cette première étape, les cofondatrices d’À places Égales sensibilisent le groupe de femmes constitué, les élus et les acteurs locaux à la question du genre dans la ville, à travers l’aménagement urbain et l’animation de l’espace public. LES EXPLORATRICES EN MARCHE Les participantes sont ensuite invitées à identifier l’origine de leur sentiment d’insécurité. Lors d’un atelier de cartographie sociale, elles échangent sur leurs déplacements et
tracent le parcours des marches, qui se situent le plus souvent dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Leurs outils : des pastilles à coller sur une carte. La couleur rouge signifie « je ne vais jamais à cet endroit » ; orange, « cela dépend des moments » ; enfin, la couleur verte indique « je m’y sens bien ». « C e moment d’échange est essentiel, remarque Dominique Poggi. Parler permet de lutter contre l’omerta et le conditionnement. Certaines pensent, par exemple, que “cela va de soi qu’une jeune femme ne sorte pas le soir”. C’est aussi un moyen de prendre conscience que l’on n’est pas “un cas isolé” ou que ce n’est pas parce que l’on est “froussarde” que l’on ne passe pas par telle rue. » Marie-Dominique de Suremain se souvient d’une femme qui lui avait confié : « “J’ai dépassé la barrière des regards.” Sous-entendu : ceux des hommes qui monopolisaient la terrasse d’un café où elle avait fini par s’installer avec ses amies alors que, jusque-là, elles s’autocensuraient. C’est
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Osez le clito ! À l’instar du livre du Dr David Reuben, édité en l’année érotique 1969, Kaizen vous dévoile Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur…
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le clito sans jamais oser le demander !
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UN MANUEL SCOLAIRE LÈVE LE VOILE
EXCLUSIVEMENT DÉDIÉ AU PLAISIR
Pour la première fois, à la rentrée scolaire 2017, un manuel de sciences et vie de la Terre destiné aux collégiens a osé lever le voile sur le clitoris. Une demande exprimée depuis plusieurs années par le collectif Osez le féminisme ! Les éditions Magnard ont ainsi représenté correctement cet organe féminin, jusque là tronqué sous la forme d’un seul petit bouton rose ou tout simplement oublié. Il était temps : selon un rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes publié en 2016, « une fille de 15 ans sur quatre ne sait pas qu’elle a un clitoris et 83 % des adolescentes de 4e et 3e ne connaissent pas sa fonction 1. »
« C’est seulement en comprenant comment le clitoris se déploie et englobe toutes les parties de notre sexe que nous saisissons de quel formidable instrument de plaisir nous sommes dotées », observent Nina Brochmann et Ellen Støkken Dahl. Le clitoris est même le seul organe du corps humain destiné uniquement au plaisir, et non à la reproduction. Dans La Fabuleuse Histoire du clitoris, de Jean-Claude Piquard, on apprend que Mateo Realdo Colombo serait le premier à avoir exploré cet organe, en 1559. Aux yeux de l’anatomiste italien, « le clitoris est par excellence le siège du plaisir féminin. » Par la suite, d’autres hommes l’étudièrent. La première encyclopédie française de Diderot et d’Alembert, datant du xviiie siècle, livra, par exemple, une définition longue et complète du clitoris. Même l’Église donna sa bénédiction à cet organe : certes, la masturbation était formellement prohibée, mais son usage était recommandé dans le lit conjugal. Non seulement pour une raison nataliste, puisque le clergé pensait que le clitoris améliorait la fécondité de la femme, mais aussi par peur que celle qui ne serait pas libérée de ses tensions sexuelles ne commette des péchés. Des médecins diagnostiquèrent en effet des troubles associés à cette rétention des humeurs, telle l’hystérie (du latin uterus, matrice). Forts de leur expertise, ils prodiguèrent même des massages de la vulve à leurs patientes. Puis, dans les années 1880, peut-on lire dans La Fabuleuse Histoire du clitoris, « le terrible verdict tomba : le clitoris ne participe pas à la procréation. Un plaisir sans fonction étant inconcevable pour les religieux et les médecins, commença pour le clitoris une longue descente aux enfers. » Descente qui atteignit son paroxysme avec « l’excision psychique » du clitoris à laquelle procéda Freud. En effet, selon le psychanalyste, le plaisir clitoridien n’était qu’une expression immature de la sexualité féminine [lire page 48].
DE LA MÊME TAILLE QU’UN PÉNIS ! Comme l’écrivent joliment Nina Brochmann et Ellen Støkken Dahl, les autrices de Les Joies d’en bas, « Le clitoris, tel qu’il est habituellement décrit, est de la taille d’un raisin sec et se trouve sur le haut du sexe féminin, à la jonction des petites lèvres. Mais, en réalité, ce petit bouton n’est que le sommet d’un iceberg ! Dans les ombres du bas-ventre se cache un organe qui dépasse l’entendement. » Si ce gland recouvert d’un capuchon, doté d’environ 8 000 terminaisons nerveuses, fait entre 7 millimètres et 1 centimètre de diamètre, le clitoris entier, dont la forme est comparable à celle d’un boomerang, mesure ainsi de 9 à 11 centimètres. Soit la même taille qu’un pénis ! Ce sont d’ailleurs les deux versions d’un même organe. Comme le pénis, le clitoris est érectile : sous l’effet d’une excitation, il se gorge de sang et gonfle.
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ue-Le Clitoris
Il a fallu attendre la fin des années 1990 pour que le clitoris fasse l’objet de nouvelles études. En 1997, grâce à l’imagerie par résonance magnétique, une chercheuse australienne a publié, avec exactitude, une anatomie du clitoris. Dix ans plus tard, la gynécologue obstétricienne Odile Buisson et le médecin Pierre Foldès, co-inventeur d’une chirurgie réparatrice des clitoris excisés, ont réalisé les premières échographies de cet organe. Comme l’expliquent Alexandra Hubin et Caroline Michel, les autrices d’Entre mes lèvres, mon clitoris, les travaux échographiques d’Odile Buisson et Pierre Foldès ont démontré qu’il existait une zone de contact entre la partie interne du clitoris et la zone vaginale, généralement désignée comme le point G. Loin d’être un point précis, il s’agirait en fait d’une zone plus ou moins étendue sur la paroi antérieure du vagin. Enfin, en 2015, Odile Fillod, une chercheuse indépendante, a modélisé un clitoris grandeur nature imprimable en 3D. Pour permettre l’éducation de tous, son modèle téléchargeable en ligne est libre de droits.
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Mais qu’en est-il d’un point de vue purement sexuel ? Alexandra Hubin et Caroline Michel concluent : « Puisque le clitoris, qui est mobile sous les contractions du périnée pendant l’acte d’amour, travaille de concert avec le vagin (même si ce dernier est bien plus pauvre en terminaisons nerveuses) et que tous dansent ensemble, tout le monde est ravi : la pénétration, c’est bien, la stimulation externe aussi. » n
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« Rapport relatif à l’éducation à la sexualité. Répondre aux attentes
des jeunes, construire une société d’égalité femmes-hommes », Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, juin 2016.
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LA REDÉCOUVERTE DU CLITORIS
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S’interroger ≈ INTERVIEW ≈ 68
Miranda Gray : « Vivre selon ses cycles » Diane La Blanche : auchapitre 3 Une louve en quête de féminin sacré tonme / Suède : le royaume des papas poules zone d’ombre Extrême combat plus L’autodéfense complexe: ≈ BD ≈ 78
≈ REPORTAGE ≈ 80
prendre conscience, prendre confiance ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 82
La sobriété heureuse au féminin ≈ PORTRAIT ≈ 84
Odile Chabrillac : L’équilibre féminin-masculin en question ≈ POINT DE VUE ≈ 86
Le féminin, moteur de l’écologie ? ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 90
Les super pouvoirs du cycle menstruel
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Miranda Gray HORS-SÉRIE N°11
« VIVRE SELON SES CYCLES »
depuis trente ans 1. Elle observe que les femmes qui tiennent compte de leur nature cyclique et des besoins qui y sont liés s’épanouissent en se découvrant de nouveaux potentiels : des jours dans le mois où elles sont plus efficaces dans certains domaines.
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La Britannique Miranda Gray, artiste et coach, écrit sur les cycles menstruels
Comment la nature cyclique des femmes influence-t-elle leur vie ?
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Pendant une longue partie de leur vie, en moyenne de l’âge de 12 à 45 ans, le corps des femmes connaît des cycles, liés au fonctionnement de leur utérus et à la variation des taux de leurs hormones. Il n’y a rien en nous et dans nos vies de femmes qui ne soit affecté par cette nature cyclique : nos énergies physiques, notre endurance, nos émotions et nos manières de penser le sont. Nos capacités – notre créativité, notre sexualité et même notre sensibilité spirituelle – varient selon ce cycle. De même que notre façon de percevoir nos relations, notre travail, notre entourage, notre objectif de vie et nous-mêmes.
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Pourquoi les femmes ont-elles oublié leur nature cyclique ?
Le développement de la médecine moderne, considérant que l’esprit et le corps sont séparés et que le corps est une horloge qui peut être réparée, nous a fait perdre de vue que nous sommes un tout. On a oublié que l’utérus, avec ses cycles, est le point central des femmes et nous l’avons relégué au statut d’« usine à bébés », qu’on peut mettre en marche ou stopper sur demande. La société ne reconnaissant pas notre féminité, c’est-à-dire notre nature cyclique, nous nous sommes identifiées à la nature constante des
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Quelles sont les différentes phases d’un cycle et quelles opportunités apportent-elles ?
Il nous révèle que les femmes ont des talents multiples et On peut diviser le cycle menstruel en quatre phases. J’ai qu’elles peuvent aborder toute situation par quatre apfait ce constat en croisant les connaissances sur les femmes proches [lire page 90] et savoir-faire différents. À des transmises dans la mythologie et le folklore, notre savoir moments opportuns, les femmes sont « optimales » : elles sur les étapes physiologiques du cycle et mes observations, sont capables d’agir plus vite et en tant que coach, du fonctionnemieux. Elles développent des ta- « LA SENSIBILITÉ ET L’EMPATHIE ment de nombreuses femmes. lents et aptitudes supplémentaires Pendant la période des règles, si FONT PARTIE DE L’HOMME qui peuvent améliorer concrèteles femmes respectent leur besoin ment leur quotidien et leur procude repos, elles accèdent à un plus COMME DE LA FEMME. » rer un profond sentiment d’accomprofond niveau de réflexion, y plissement. Cela peut sembler surprenant parce qu’on compris spirituelle, qui leur permet particulièrement de s’attend à avoir des savoir-faire constants au cours d’un prendre du recul, d’accepter les autres tels qu’ils sont, de mois. Il n’est pas nécessaire d’effectuer d’énormes changepardonner et d’oublier. Lui succède la phase préovulatoire. ments dans nos vies pour commencer à ressentir les bénéBeaucoup de femmes ressentent alors une hausse de leurs fices de vivre selon ses cycles. Déjà, la compréhension de capacités intellectuelles. Elles se sentent plus sûres d’elles, nos besoins et des manières d’y répondre nous aide à réont une énergie physique et une endurance accrues. Elles duire un stress latent et à ressentir plus de respect et de ont les idées claires, un bon niveau de concentration et de confiance pour nous-mêmes. Il ne faut pas non plus oublier mémorisation. Elles peuvent travailler plus longtemps. que nos vies sont affectées par d’autres facteurs que nos Vient ensuite la phase d’ovulation : l’empathie et les capacycles : toutes les circonstances extérieures que nos vies cités de communication des femmes sont à leur maximum, nous apportent influent sur notre état. ainsi que leur envie et leur force physique et émotionnelle
Miranda Gray
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En quoi le cycle menstruel est-il un atout pour les femmes ?
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hommes. Nous percevons donc notre cycle comme constitué de deux phases : une phase « normale » et une phase « anormale », où nous nous sentons coupables d’être nulles ou malades. La clé est de comprendre qu’avoir des énergies et des perceptions changeantes au cours de son cycle est complètement légitime pour une femme. Deux autres facteurs ont influencé notre façon de nous considérer. Le premier est l’idée selon laquelle chacun détient en soi une part masculine et une part féminine. Cela a poussé la société à considérer hommes et femmes de manière réductrice. La sensibilité et l’empathie font partie de la nature de chaque être humain, homme comme femme, tout comme le côté actif et fonceur, qui ne sont des caractéristiques ni féminines ni masculines, mais humaines. Le second facteur est la révolution sexuelle de la fin des années 1960. Les femmes y ont gagné beaucoup. Mais dans cette lutte pour l’égalité, elles ont perdu de vue l’idée que si hommes et femmes sont d’égale valeur, ils sont cependant différents. On a alors pensé que les femmes réussiraient en pensant, ressentant et agissant de la même manière que les hommes et non pas grâce à la richesse de leur approche féminine.
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Extrême combat
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bd-Les “requins” ce nos têtes qui vi
es petites voix dans iennent sabote LE F É M INI N, A U CŒUR DU CHA NGEM ENT
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Cheikha Nur Artiran : « La femme est investie d’une sacralité spirituelle » Shamandra : Chamane urbaine chapitre 4 hiver / À la ménopause, temps de repos, de nouvelles règles s’imposent compréhensionLes sorcières modernes ≈ BD ≈ 104
≈ POINT DE VUE ≈ 106
Oser se poser ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 108
Les protections périodiques écologiques ≈ PORTRAIT ≈ 110
Perla Servan-Schreiber : L’acceptation joyeuse ≈ POINT DE VUE ≈ 112
Mieux comprendre les règles ≈ FICHE PRATIQUE ≈ 116
Les tentes rouges, pour parler librement
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Cheikha Nur Artiran HORS-SÉRIE N°11
« LA FEMME EST INVESTIE D’UNE SACRALITÉ SPIRITUELLE »
Que dit le soufisme au sujet du féminin ? Influencée par le poète Djalal ad -Din Rumi, dit Mevlana 1, cette branche mystique de l’islam nous rappelle la complémentarité du masculin et du féminin. Rencontre avec Cheikha Nur Artiran, mère de trois enfants, née en 1954 dans une famille soufie, qui vit à Istanbul. Elle est la seule femme, en quatre cents ans, à être devenue cheikha, une guide spirituelle mevlevi.
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Malgré le hadith du prophète Mahomet – « parmi les biens de votre monde, il m’a été donné d’aimer trois choses : le parfum, les femmes et – la fraîcheur de mes yeux – la prière » –, l’islam est souvent considéré par les Occidentaux comme une religion hostile aux femmes. Qu’en est-il vraiment selon vous ?
La femme a été privée de ses droits et dénigrée tout au long de l’Histoire. Avant l’avènement de l’islam, elle n’était pas considérée comme un être humain à part entière. Elle était vendue et échangée telle une vulgaire marchandise. Avec l’avènement de l’islam, l’esclavage fut aboli, la vente de la femme comme simple objet et son exploitation par son propriétaire, la faisant déambuler à moitié nue, furent proscrits. Lors de son dernier sermon, le prophète Mahomet a exprimé avec limpidité l’idée que les femmes ont également des droits sur les hommes : « Ô hommes ! Il est vrai que vous avez des droits sur vos femmes, mais elles ont aussi des droits sur vous. Souvenez-vous que vous les avez prises comme femmes seulement avec la permission de Dieu, et en remplissant un pacte avec Lui. » Dans le Coran, aucune distinction n’est faite entre l’homme et la femme. Tous deux sont égaux face aux commandements et aux interdits de Dieu. Tous les versets coraniques ayant trait à la femme ont une dimension protectrice. Malheureusement, certains versets n’ont pas été compris. Le Prophète a souligné
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le fait que tous les hommes sont, en tant que tels, « égaux comme les dents du peigne ». Il a défini l’homme et la femme comme les deux moitiés d’un tout. Pour cette raison, selon l’islam, la supériorité d’un être réside uniquement dans sa proximité avec Dieu et dans la conscience de sa responsabilité à son égard. À l’époque du prophète Mahomet, la femme et l’homme pouvaient accomplir leurs actes de dévotion dans un même lieu de prière. Bien plus, les versets qui parvenaient au Prophète sous forme de révélations étaient à la fois consignés par écrit sur divers objets et mémorisés par des hommes et des femmes. Avec l’avènement de l’islam, des responsabilités spirituelles furent pour la première fois confiées aux femmes. Celles-ci furent alors en mesure de prendre leur place dans la vie sociale. Considérées comme des êtres humains à part entière, leurs droits furent préservés. Tandis que les femmes chrétiennes étaient laissées-pour-compte dans le domaine spirituel, les femmes musulmanes faisaient ériger des lieux de prière et y dispensaient des enseignements. Des monuments en attestent à Istanbul. À titre d’exemple, c’est une femme qui a fait ériger le mausolée de Mevlana et sa fameuse coupole verte, il y a de cela presque huit cents ans. Nous pourrions donner des centaines d’autres exemples. Ni l’islam ni aucune autre religion céleste ne devraient être les ennemis de la femme. La religion appartient à Dieu et se
résume au noble caractère, à la miséricorde et à l’unicité. Une religion authentique ne devrait donc laisser aucune place à la dualité. S’il y a une dualité et une discrimination au sein d’une religion, on aurait tort de considérer celles-ci comme des vérités inhérentes à cette religion. La religion n’est rien d’autre qu’unité, paix, compassion, miséricorde et générosité. Les erreurs ne procèdent pas d’elle, mais de la manière dont les hommes l’interprètent et la pratiquent. Mais la situation de la femme est, à l’heure actuelle, tout autre. Qu’en pensez-vous ?
L’ignorance qui prévalait dans la société préislamique n’a pas pu être supprimée d’un seul trait, elle s’enracine dans un passé multiséculaire. Il faut admettre que les gens ne renoncent pas aisément à leurs habitudes. C’est le nœud du problème. L’islam a instauré les droits et devoirs des hommes et des femmes avec justice et justesse. Néanmoins des modes de pensée ignorants, propres à la culture et à la tradition arabes de l’époque préislamique, ont gardé de la vitalité depuis des siècles et des siècles. C’est la cause majeure de l’incompréhension vis-à-vis de la femme musulmane. Aucune ignorance, aucun trait culturel ou tradition ne font partie intégrante de la religion en tant que telle. Toutefois, certaines coutumes restent vécues, à tort, comme des réalités religieuses.
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À la ménopause, de nouvelles règles
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Contrairement à ce que l’on croit parfois, la ménopause est loin d’être « le début de la fin » pour les femmes entre 45 et 55 ans. C’est même l’occasion de prendre soin de soi et de devenir pleinement ce que l’on est.
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our aider les femmes à « fleurir, et non flétrir, au moment de la ménopause », la Québécoise Rita Payeur propose de les accompagner sur le chemin de ce qu’elle appelle la « maturessence ». Selon la conceptrice de cette approche, « l’arrêt des règles est une belle occasion de se mettre de nouvelles règles en partant de la personne que l’on est vraiment. » Étymologiquement,
ménopause signifie « arrêt des mois », et donc des règles. Pour que cette étape de la vie des femmes ne se résume pas à des symptômes, Rita Payeur les invite à « l’utiliser comme un tremplin pour accoucher de soi-même. Il s’agit d’accepter cette offre de transformation intérieure, telle la chenille se métamorphosant en papillon, au lieu de l’étouffer, notamment par la médication. Après une vie passée à remplir le projet social de l’humanité, qui est – selon l’inconscient collectif – de procréer, la femme devient sa propre mère, dans le sens où elle peut enfin s’occuper d’elle. » Rita Payeur puise son inspiration dans La Sagesse de la ménopause, un bestseller édité pour la première fois en 2001, signé de l’Américaine Christiane Northrup. Cette obstétricienne de profession écrit : « Tirez profit de la lucidité d’esprit dont vous fait cadeau la ménopause et utilisez ce présent pour que cette deuxième partie de votre vie vous appartienne véritablement. » Son approche positive – si rare sur ce sujet – fait écho à celle de Maïtie Trélaün. Coach en métamorphose, cette Française de 58 ans accompagne les femmes dans leur réalisation. De sa voix douce, elle confie : « Si on lui ouvre
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S’accorder le temps de se ressourcer permet d’aller chercher en soi ce qu’il nous faut pour mieux agir, explique la coach Edith Lassiat. Accepter que le repos soit nécessaire, c’est s’autoriser à vivre plus détendue, plus clairvoyante et au maximum de son énergie.
À
34 ans, Julie a choisi de travailler moins, de remplacer l’obstination à finir une tâche par une sieste réparatrice et d’écouter son corps : « Quand je deviens très irritable, que j’ai du mal à me concentrer ou que je fais répéter mon conjoint, car je l’entends mal, c’est que je suis fatiguée », décrit la blogueuse, nomade en Asie. Il lui a fallu un cancer et un surmenage professionnel pour apprendre à se débarrasser de la culpabilité de se reposer. Pour Sabrina, 37 ans, relieuse restauratrice d’archives dans l’Ouest, l’épuisement se traduit par une tension dans les reins : « Je cherche mes mots. Tout devient plus difficile, j’ai le sentiment d’être en perpétuelle lutte et je me focalise sur ce qui n’avance pas ou tourne en rond. » Un corps tendu, sans énergie ou qui fait mal, une sensation d’être en apnée ou en mode automatique sont autant d’alarmes. « Le repos est une prise de recul, résume Edith Lassiat, conférencière et coach de femmes dans leur vie et leur travail. On laisse le monde tourner, on se centre sur
soi. On se dépose comme les flocons d’une boule à neige souvent secouée par la vie. Le cœur ralentit, l’esprit s’apaise, les tensions se lissent. » Les femmes ont pris l’habitude de mener beaucoup d’activités de front. « Elles ont été éduquées à travailler, tout en étant le pilier émotionnel de la famille et en assumant la majorité des tâches ménagères et parentales, poursuit Edith Lassiat. Cela les pousse à se dépasser, mais aussi à s’effacer. » Lune, 24 ans, écrivaine jeunesse en Occitanie, a parfois du mal à s’arrêter, car elle remarque que « l’hyperactivité est souvent socialement admirée ». Mais ne pas se poser, « c’est risquer de nous oublier au profit d’un projet, d’épuiser notre corps ou de pousser notre entourage à ne pas nous respecter », rappelle Edith Lassiat. ACCÉDER À SES RESSOURCES INTÉRIEURES Le repos est l’un des outils du respect de soi. Et de la force, selon Edith Lassiat : « On a l’illusion que la puissance est mouvement. Mais la véritable puissance est intérieure et le repos nous permet de la rejoindre. Dans ce silence, on se libère des influences extérieures et on a alors accès à nos ressources, à notre sécurité et à notre paix. C’est cela qui nous permet de faire les bons choix pour agir. » Chaque femme trouve peu à peu ses propres façons de se reposer : recevoir un massage, marcher en forêt, s’aménager des siestes, boire des tisanes diurétiques, méditer, nager ou contempler un feu de cheminée. Ou tout simplement s’asseoir tranquillement dans son canapé en rentrant chez soi.
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Perla Servan-Schreiber L’ACCEPTATION JOYEUSE À 74 ans, Perla Servan-Schreiber transmet son chemin de vie aux jeunes femmes d’aujourd’hui dans son inspirant recueil Ce que la vie m’a appris. Parmi ses mantras,
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« l’acceptation joyeuse de la réalité » qui, « seule, nous guide dans l’action juste ».
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erla Servan-Schreiber est invariablement vêtue de les hommes. Certes, elles peuvent faire aussi bien, voire blanc, la couleur du Yin. Du haut de ses 74 ans rayonmieux, mais avec leurs spécificités. La richesse réside dans nants, elle rassemble ses expériences de vie dans son le fait que nous sommes égaux, différents et complémendernier livre, Ce que la vie m’a appris. « Les jeunes taires. En prenant ainsi modèle sur les hommes, nous avons femmes d’aujourd’hui sont en demande de transmission, trop longtemps empêché la femme de développer son propre observe-t-elle. Aussi, ai-je endossé avec joie le rôle de grandmodèle féminin. » Le revers de la médaille est lourd à porter mère pour leur faire partager ce que le poète Joseph Delteil pour certaines femmes : « Aujourd’hui, si la liberté sexuelle, appelle les “points d’or”, à savoir mes essentiels. » Celle qui se l’autonomie financière et juridique leur sont acquises, elles présente comme une « apprentie à vie » s’est nourrie de renme racontent combien il est difficile de vivre en couple dans contres : films, livres, hommes et femmes de différentes la durée. Je pense que l’amour et la rencontre invitent à être cultures et générations. Elle confie : « Aimer ; écouter ; ressensoi, au lâcher-prise, sans préalable. Pour accueillir, il faut tir, davantage que comprendre : telle est ma manière d’être. » être vraiment disponible. En aimant de façon inconditionDe toutes ses rencontres, Perla Servan-Schreiber a retenu nelle, nous recevons beaucoup. » « que vivre est plus simple qu’on ne le croit : il suffit de dire Assise sur le fauteuil blanc de son bureau, Perla ServanOUI à ce qui advient, de s’imprégner des propos de Swâmi Schreiber poursuit son cheminement de pensée : « L’autre Prajnânpad 1 qui nous invite à “l’acerreur, nous la devons à Mai 68. ceptation joyeuse de la réalité”. » C’est la sacralisation de la jeunesse. « J’AI CHOISI DE DEVENIR Car, précise-t-elle, « seule la vie ne À partir de 45 ans, les femmes ont cesse de nous révéler à nous- AUTONOME POUR ÊTRE LIBRE. » du mal à retrouver du travail et sont mêmes, de clins d’œil en crocheatteintes dans leur féminité. La sepieds. Sa manière à elle de s’excuser d’être absurde. » C’est conde libération de la femme sera de se réconcilier avec son ainsi qu’elle a fait confiance à son intuition : « Très tôt, j’ai âge, pour le vivre le mieux possible. Les magazines féminins écouté ma petite voix intérieure qui me conseillait de vivre ont réduit la vieillesse aux rides, mais vieillir, c’est tellement ma propre vie, et non celle que mes parents ou les autres d’autres choses : éviter l’isolement, rester active et curieuse projetaient pour moi. Adolescente, j’ai choisi, notamment, intellectuellement, transmettre, etc. » de devenir autonome pour être libre. » Promesse tenue, à Perla Servan-Schreiber a accepté de vieillir. Le regard pétillant, feuilleter le cahier de sa vie : née au Maroc, dans une famille elle s’exclame : « C’est formidable d’avoir mon âge ! Ma chance de condition modeste, mais cultivée, Perla Servan-Schreiber est d’avoir appartenu à la génération de femmes qui a découa fait carrière à Paris comme publicitaire dans la presse fémivert la contraception et l’autonomie. Et, aujourd’hui, d’apparnine. À 42 ans, elle a rencontré « l’homme de sa vie », le tenir à la première génération de femmes dont l’espérance de journaliste et patron de presse, Jean-Louis Servan-Schreiber. vie est aussi élevée : 85 ans. » Serait-ce aussi parce qu’il est plus Ensemble, ils ont fondé Psychologies Magazine et Clés. facile d’être enfin soi-même à 74 ans ? Celle pour qui « cuisiner Des années 1970, Perla Servan-Schreiber garde en mémoire est devenu un exercice de spiritualité » écrit : « À mon âge, je « le combat libérateur des femmes, soutenu par la presse me dépouille, pour ne garder que l’essentiel. Tel l’oignon que féminine ». Un vibrant hommage qui ne l’empêche pas d’être j’épluche à cœur avant de le savourer. » n critique : « L’erreur – inévitable – du mouvement féministe 1 a été de dire que les femmes sont capables de faire “comme” Maître spirituel indien (1891-1974).
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AU CŒUR DU CHANGEMENT
Le terme « femme » désigne un aspect physiologique ou une image sociale. Le terme « féminisme » un combat politique. Mais le « féminin », de quoi est-il le nom ? Selon Pierre Rabhi, « le féminin est au cœur du changement. »
Quel féminin ? Quel changement ? Suivant la ligne éditoriale de Kaizen, c’est bien d’un changement de société dont il est question dans ce hors-série. Une société plus joyeuse, plus juste, plus solidaire, plus écologique. Pour tendre vers cet objectif, le temps du retour aux équilibres est venu. Cet opus est une invitation à réintroduire une énergie féminine au cœur de nos sociétés à dominantes masculine et patriarcale. Parce que le mouvement, la créativité naissent de la rencontre de deux polarités, le féminin et le masculin sont les deux faces d’un même trésor : la vie. Il ne s’agit donc plus d’une lutte de pouvoir, mais d’un appel à la métamorphose pour en finir avec la dualité et les logiques de domination. Une quête d’harmonie et de complémentarité.
Présent en chacun de nous, découvrons, exprimons, libérons notre féminin ! Articulé selon les quatre énergies du cycle menstruel, Oser, Rayonner, S’interroger, Se réaliser , retrouvez dans ce hors-série : des fiches pratiques, des points de vue, des reportages, des interviews, des BD…
979-10-93452-31-9
« L’éternel féminin nous attire vers le haut. » Goethe