Comment devenir
AUTONOME
Comment devenir autonome
C o mmen t d ev en i r A U T O N O M E
est un hors-série du magazine Kaizen. C’est un véritable manuel, dont la rédaction a été assurée par deux femmes et deux hommes dans l’action depuis plus de vingt ans… Il est jardinier-paysagiste et exerce son activité en observant le fonctionnement des écosystèmes, conseiller et formateur à ses heures perdues. Elle est passionnée de plantes médicinales et d’alimentation vivante et promeut l’herbalisme en France pour se réapproprier les savoirs ancestraux. Il est autoconstructeur et passionné d’habitats écologiques, au point d’avoir créé le magazine La Maison écologique. Elle joue des marmites, classiques ou norvégiennes, et est investie dans la promotion de l’alimentation bio. Leurs textes originaux sont mis en couleurs par une illustratrice œuvrant au Muséum national d’histoire naturelle et par son père, professeur d’illustration.
Manuel destiné aux personnes qui ont vraiment envie de prendre leur vie en main
12 €
ISBN : 9 791 093 452 012
Avertissement : attention, la lecture de ce hors-série rend heureux et donne envie de se mettre en action immédiatement.
50 PLANCHES ILLUSTRÉES sur le jardin, l’énergie, la cuisine et la santé
Éditeur SARL EKO LIBRIS au capital de 142 720 € Siège social 19, rue Martel 75010 Paris www.kaizen-magazine.com Comment devenir autonome Hors-série no 3 Janvier 2017 Imprimé sur papier certifié PEFC Fondateurs Cyril Dion, Yvan Saint-Jours, Patrick Baldassari et Pascal Greboval Directeur de la publication Patrick Oudin Directrice d’EKO LIBRIS Françoise Vernet Rédacteur en chef pour ce numéro Yvan Saint-Jours Collaborateur précieux Philippe Pellan Secrétaire de rédaction Raphaële Vidaling Révision Diane Routex Isabel Gonzalez Relecteurs attentifs Pascal Greboval Cyril Dion Pour toute réclamation sur l’état de propreté des toilettes sèches de la page 70 info@kaizen-magazine.fr Abonnements et commandes Camille Gaudy camille@kaizen-magazine.fr 19, rue Martel - 75010 Paris Comptabilité et administration administration@kaizen-magazine.fr
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Couverture Dessin de Marie Doucedame Maquette et mise en pages Schuller-Graphic Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières-les-Vallées SIREN : 539 732 990 APE : 5814Z Commission paritaire : 0317 k 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. 05 63 94 15 50 Distribution Presstalis Vente au numéro pour les diffuseurs Groupe HOMMELL • Tél. 01 47 11 20 12 diffusion-hommell@sfefr Remerciements Merci à tous les animaux qui ont accepté de prendre la pause pour se faire dessiner. Aucun d’entre eux n’a été blessé durant le tournage de ce hors-série (sauf peut-être un bourdon… une enquête est en cours). Aucun texte ni illustration ne peut être reproduit-e sans l’autorisation du magazine. Merci. Malgré tout le soin et l’amour apportés à l’élaboration des articles, nous ne serions être tenus pour responsables d’éventuels problèmes résultant de l’application de conseils et informations publiés dans ce hors-série. Ça, c’est fait !
C
e troisième hors-série du magazine Kaizen tranche radicalement avec les précédents. C’est un concentré d’autonomie conçu comme un manuel vraiment indispensable, dans ces temps où le numérique et le hors-sol font main basse sur notre existence. Alors, pour reprendre de l’autonomie dans nos vies, ce hors-série vous invite à retourner à vos mains. Vos mains qui ont un pouvoir incroyable : celui de semer des graines de légumes, d’arbres, de plantes médicinales pour nous nourrir et faire naître la vie. Mais également pour préparer la terre de tous ceux et celles qui prendront la suite demain. Vos mains vont avoir envie de bricoler, de scier, de clouer, d’assembler pour faire un cuiseur solaire d’abord, des toilettes sèches, puis une véritable maison miniature sur roues, qui vous emmènera là où vos rêves vous ont toujours invité, mais où une réalité trop souvent engluée dans le matériel vous retient en apparence. Vos mains vont trembler de plaisir en préparant des plats dans une marmite norvégienne, en pétrissant une pâte à pain ou en préparant une boisson végétale pour trinquer avec vos amis et retrouver le goût du partage, de la convivialité et de la fête. Et enfin, vos mains vont vous remercier d’être enduites de crème au souci après avoir récolté un panier de plantes sauvages qui vont se transformer en recettes plus magiques les unes que les autres. Celles-là soigneront les petits et les grands maux de votre famille et, par extension, de la société toute entière. Ce sont vos mains qui vont tourner les pages de ce hors-série, et ne pensez pas que ce geste soit anodin, car, une fois que vous aurez goûté à la lecture de ces textes rédigés avec le plus grand soin et merveilleusement illustrés, plus rien ne pourra les retenir. Préparez-vous à suivre le mouvement de vos mains, à changer de vie, car c’est ce qui risque de se passer une fois que vous saurez comment devenir autonome. Yvan Saint-Jours
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Sommaire
Avant-propos p. 5
Les auteurs et illustrateurs p. 8 Préface de Pierre Rabhi p. 9 Cultiver son jardin et bien plus encore ! p. 12 Un jardin extraordinaire p. 14 Révélez le potentiel de votre lieu p. 16 Je planifie un lieu vivrier p. 18 L’incroyable cabane multifonction p. 20 Faut qu’on composte p. 22 Précieux auxiliaires p. 24 Je prends soin de mes plantes p. 26 Je recycle mes eaux usées pour arroser le jardin p. 28 Des légumes tip top p. 30 Ma butte aux multiples buts p. 32 Savoureuses et saines aromatiques p. 34 Je sème mon arbre p. 38 Produisons nos semences p. 40 Le mémo des saisons au jardin p. 42 La ruche solaire p. 46 Mon balcon est splendide p. 48 L’art d’habiter sobrement p. 50 En chantier p. 52 Foyer doux foyer p. 54 Ma magnifique mini-maison p. 56 Une mini-ossature bois p. 58 Bâtir sans argent : le cob p. 60 Je deviens électro-sobre p. 62 Produire son électricité p. 64 Mon beau capteur, roi du soleil p. 66 Un poêle qui fuse p. 68 Des waters sans eau et à compost p. 70
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p. 72 p. 74 p. 76 p. 78 p. 80 p. 82 p. 84 p. 86 p. 88 p. 90 p. 92 p. 94 p. 96 p. 98
Cuisiner l’originalité et l’autonomie
p. 100 p. 102 p. 108 p. 110
L’antre de l’herbaliste Simplement médicinales Des infusions nourrissantes Tisanes, miels et vinaigres : potions magiques Un concentré de plantes : l’alcoolature Protection de la peau : l’huile infusée Distillation à la vapeur : l’hydrolat Aux petits maux, les grands remèdes des simples Aux petits soins du visage De la douceur pour mon corps Tout nettoyer sauf la planète Ressources
p. 112 p. 114 p. 116 p. 118 p. 120 p. 122 p. 124 p. 126
La cuisine de mes rêves Ma cuisine pratique Le mémo qu’il me faut Douces protéines Céréales multiusages Du pain pour tous Savez-vous faire germer vos graines ? Trinquons végétal Succulentes sauvages Cuisons solaire La marmite norvégienne Je conserve facile Santé, cosmétique et hygiène : le retour à la nature
Les personnes qui ont rédigé et dessiné Philippe Pellan Philippe, qui a eu la chance de suivre sa scolarité dans des espaces naturels préservés, s’est ensuite tourné vers plusieurs formations autour de la botanique, l’agronomie, la multiplication des végétaux, l’art du paysage et la gestion écologique de l’eau. Il met en pratique depuis plus de 25 ans une forme d’écopaysagisme fondé sur l’observation du fonctionnement des écosystèmes naturels. Actuellement artisan, conseiller et formateur en écologie appliquée, il propose ses services pour l’étude et l’aménagement de sites selon les principes de l’agriculture naturelle et synergétique.
Mireille Saimpaul Mireille, spécialiste de rien mais curieuse de tout, partage depuis plusieurs années sur Internet ses expériences relatives à une cuisine simple et économique. Son livre, Cuisiner en toute simplicité (Dangles, 2011), est un petit manuel de simplicité volontaire appliquée à la cuisine. Passionnée par la marmite norvégienne, elle lui a dédié un livre (disponible via son blog marmitenorvegienne.com). C’est le seul ouvrage actuel consacré exclusivement à cet ustensile de cuisine, qui permet d’économiser jusqu’à 70 % de l’énergie employée à la cuisson des aliments.
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Yvan Saint-Jours Yvan aime beaucoup les maisons, qu’elles soient en bois, en paille mobiles, dans un arbre… Tout ce qui touche à la construction écologique le passionne. En 2001, il fondait le magazine La Maison écologique. Il aime mettre la main à la pâte et a quelques expériences à son actif. La dernière en date : la construction d’une tiny house, une maison miniature sur roues. Il est également l’un des fondateurs de Kaizen.
Béatrice Mera Passionnée par les plantes médicinales et l’alimentation vivante depuis 25 ans, Béatrice utilise les plantes dans son quotidien, sa cuisine, sa salle de bains et son armoire à pharmacie. Pour son bien-être, celui de ses proches et de la planète. Elle est convaincue que nous pouvons tous prendre en main notre bien-être, prévenir les maladies de civilisation par une alimentation saine et par l’usage des plantes locales de son jardin ou de la nature environnante. Elle transmet avec enthousiasme ses connaissances et remet au goût du jour les pratiques de nos ancêtres pour que chacun se réapproprie les savoirs perdus autour des plantes. Retrouvez ses actualités sur sa page Facebook. facebook.com/latisanelumineuse.
Marie Doucedame Marie est née à Paris mais a grandi aux portes du Lubéron et fait les Arts déco à Strasbourg. Aujourd’hui, ses collègues sont jardiniers, paléontologues ou encore vétérinaires, car elle travaille au jardin des Plantes du Muséum d’histoire naturelle. En 2014, elle a réalisé tous les panneaux du zoo de Paris et elle trouve tous les prétextes possibles pour s’évader au travers de carnets de voyages. En bref, elle s’amuse beaucoup.
Nicolas Doucedame Nicolas travaille dans la région d’Aix-en-Provence. Illustrateur et professeur d’illustration, il passe une bonne partie de son temps à transmettre ce qu’on lui a transmis et à apprendre à voir. Son blog : nicolasdoucedame.blogspot.fr.
« La nature à chaque instant s’occupe de votre bien-être. Elle n’a pas d’autre fin. Ne lui résistez pas. » Henry David Thoreau
Cultiver son jardin et bien plus encore ! Ce premier chapitre est une invitation à éveiller notre potentiel intuitif et inventif par la création d’un lieu vivrier. Les enseignements qui y sont rapportés sont le fruit d’observations et de recherches sur le fonctionnement d’écosystèmes naturels et de leur application à la vie humaine. En suivant une chronologie bien précise, nous allons pouvoir aménager notre lieu de vie grâce à des méthodes simples et peu coûteuses. Nous y rencontrerons aussi un jardin qui n’a plus besoin d’être labouré, des fruits, des légumes qui poussent tout seuls et des hérissons qui discutent autour d’une assiette de limaces. Bref, un émerveillement quotidien.
Révélez le potentiel
DE VOTRE LIEU Pour réaliser le plan de votre jardin idéal, il est sage d’examiner et de noter au fil des saisons quelques points importants. Munissez-vous d’un carnet pour inscrire vos observations et dessiner des croquis qui serviront de bases pour le plan définitif. Un décamètre vous permettra d’effectuer vos mesures. Glaner des informations auprès de vos voisins peut s’avérer également très utile. Voici les neuf points les plus importants à étudier.
L’orientation Vous pourrez facilement repérer les quatre directions cardinales à l’aide d’une boussole. Sinon, examinez les mousses : elles se développent plus abondamment sur la face nord des troncs d’arbres.
faire la sieste). En outre, ces derniers seront placés à l’abri des regards indiscrets. Les ondes électromagnétiques génèrent une pollution qui a une influence sur la phyllotaxie, c’est-à-dire la manière dont les plantes s’organisent dans l’espace.
L’aérologie
Les bâtiments
Le vent est généralement un ennemi des plantes, car il en augmente l’évapotranspiration et provoque ainsi une demande plus importante en eau. Il convient donc de noter les vents présents, leurs orientations ainsi que leurs couloirs de circulation.
Indiquez sur le plan les bâtiments ainsi que les influences environnementales qu’ils suscitent (ombres portées, protection des vents, accumulation de calories, effet brise-vue, etc.). Le démantèlement de constructions telle une ancienne rampe de lancement de missiles devra se faire avant l’aménagement du jardin.
L’ensoleillement Les emplacements ensoleillés et ceux qui sont à l’ombre devront être notés avec précision, afin d’offrir à vos plantes les situations qui leur conviennent le mieux.
Pluviométrie et température Les mesures de pluviométrie et de température selon les périodes de l’année permettront de planifier les cultures de manière optimale, afin de limiter l’apport en eau provenant de ressources artificielles. Un thermomètre mini/maxi et un pluviomètre vous faciliteront la tâche.
Les pollutions diverses Notez les zones de pollution tels les parkings et les routes afin d’éviter de cultiver les plantes aromatiques et médicinales à proximité. Prenez en compte également les pollutions sonores et olfactives – routes, propriétés voisines, animaux – afin de déterminer les zones les plus appropriées aux lieux d’intimité (pour méditer ou
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La végétation présente sur le site Le choix de conserver ou de supprimer un arbre se fera en fonction de son interaction avec les divers aménagements prévus ultérieurement. Certains arbres fournissent l’ombre et la fraîcheur parfois nécessaires, cependant ces dernières ne devront pas porter sur les espaces nécessitant un fort taux d’ensoleillement, tels le potager et la serre. À proximité des résineux, les autres végétaux se développent difficilement.
Je planifie
UN LIEU VIVRIER Lorsque l’analyse du potentiel du site est réalisée, vous êtes fin prêt pour dessiner votre plan. Considérez que c’est en disposant correctement les éléments sur le terrain que la synergie fonctionnera de manière optimale entre les êtres vivants, garantissant ainsi l’autorégulation, l’équilibre et la vitalité des écosystèmes. Vous aurez alors un jardin qui fonctionnera presque tout seul et pourra vous fournir une grande quantité de légumes, fruits, aromates et plantes médicinales.
Préparation du plan
Disposition des aménagements
À partir du plan cadastral et des mesures prises sur site, commencez à dessiner un fond de plan au crayon, sur lequel vous indiquerez le nord. Le choix d’une échelle 1/100 (1 m sur le terrain = 1 cm sur le plan) facilite grandement les calculs. Dessinez ensuite les bâtiments, les végétaux et les diverses installations déjà présentes sur le site et que vous désirez conserver. À cette phase de la réalisation du plan, il est conseillé de faire des copies afin d’étudier d’éventuels changements d’aménagement.
Voici le moment de prendre une grande inspiration et d’imaginer que vous êtes sur le terrain.
Points importants à retenir avant de dessiner sur le plan • Les parties du terrain les plus incultes seront réservées en priorité aux bâtiments, au parking, aux chemins, à une piscine naturelle et à la phytoépuration. • Les zones les plus ensoleillées seront destinées aux végétaux nécessitant du soleil, aux constructions à fonction bioclimatique, à la piscine naturelle et à la phytoépuration. • Les zones les plus à l’ombre accueilleront les plantes de sousbois, les espaces de détente estivale, l’aire de compostage, la cabane des enfants, la maison des hérissons et le parc à voitures (pour ceux qui en possèdent) ou à vélos. • Les zones humides (non inondables) seront réservées à la mare et aux végétaux auxquels ce milieu convient. • Les zones inondables serviront d’habitat à la flore et à la faune sauvages. • Des haies denses peuvent être disposées en travers des couloirs de vents forts, en particulier à proximité du potager et des espaces de détente. Néanmoins, certains vents deviennent utiles en hiver, lorsqu’ils chassent les masses d’air froid stagnant. Une petite brise sera toujours la bienvenue pour rafraîchir l’air en période estivale. • On évitera de planter des végétaux sensibles au gel dans les zones froides, peu ensoleillées.
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Prenez la liste des aménagements à placer sur le plan et commencez à les dessiner au crayon à papier, en suivant une chronologie que vous conserverez lors de la réalisation sur le site.
Les constructions Les bâtiments doivent être placés de préférence sur les parties du terrain les plus incultes et les moins humides. Leur implantation pourra être prévue de manière à offrir une protection efficace contre le vent. Veillez à ce que les ombres portées n’empiètent pas trop sur les zones nécessitant un fort ensoleillement, comme le potager.
La phytoépuration Il est nécessaire de choisir une zone bénéficiant d’une pente ou susceptible d’être terrassée, afin que les eaux s’écoulent naturellement à travers le système. Évitez un site inondable, car il y a un risque de dissémination des eaux non traitées dans la nature. En terrain plat, il est préférable d’installer le système à proximité des bâtiments, pour éviter que les eaux à traiter se refroidissent trop en hiver. De plus, la proximité diminue les risques de colmatage des canalisations. La phytoépuration doit se trouver sur un site bien exposé au soleil pour les raisons suivantes : – les végétaux atteignent leur maximum d’activité photosynthétique et participent mieux ainsi à l’épuration ; – en hiver, cela permettra de maintenir une température suffisante, afin d’optimiser l’activité bactérienne ; – un ensoleillement direct sur les cascades participe à l’épuration de l’eau, grâce aux ultraviolets.
Faut qu’on
COMPOSTE Dans l’ère actuelle, où le recyclage des déchets est une préoccupation majeure, nous pouvons, en utilisant différentes techniques de compostage, participer au retour à la terre des déchets organiques que nous produisons.
Le cycle naturel de la matière organique Pendant les milliers d’années d’évolution de la vie sur Terre, Mère Nature a su élaborer des cycles pour assurer sa survie. C’est sur le cycle de la décomposition aérobie, accomplie dans la litière forestière, que nous porterons notre attention. En regardant de plus près cette couche superficielle sur laquelle nous marchons lors de nos balades en forêt, on observe qu’elle est constituée de plusieurs strates successives. La surface est composée de débris, comme les feuilles et les branches mortes, les fruits pourris et parfois même des cadavres et des excréments d’animaux sauvages. Ensuite apparaît sous ces déchets une couche de fragments noircis qui commencent à se désagréger. Ils sont en cours de décomposition grâce à l’action des bactéries et des champignons. En grattant encore, nous pouvons découvrir une troisième couche noire et fine, que l’on appelle l’humus stable, et qui exhale une odeur .
Le recyclage des matières organiques dans notre jardin Le compostage de surface Le compostage de surface est une technique utilisée pour recycler les feuilles mortes, les branches broyées et les tontes de pelouse. Elle reproduit le cycle de décomposition observé dans les litières forestières par l’épandage sur le sol de matériaux organiques sélectionnés. Les avantages de cette technique : • Elle est plus facile à réaliser que le compostage en tas et demande moins de compétences et de surveillance. • En s’incorporant au sol, les matières organiques favorisent l’activité biologique et, par voie de conséquence, la vitalité des cultures.
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• La couche superficielle, constituée des matières non décomposées, procure au sol une protection contre les rayons solaires et le vent, préservant l’humidité et impliquant moins d’arrosage. • La structure des matériaux utilisés assure une bonne protection contre l’érosion et évite aux fortes pluies de lessiver le sol et de créer les indésirables croûtes de battance. • L’isolation que procure cette litière permet à certains végétaux de résister au froid. • Les herbes sauvages indésirables se développent moins facilement que sur un sol nu.
Comment procéder Commencez par épandre 1 cm de compost mûr sur l’ensemble de vos espaces de culture, afin d’apporter suffisamment de microorganismes et d’azote pour la décomposition des matières que vous y mettrez. Ensuite, déposez une couche de 5 cm d’épaisseur (10 cm si vous êtes en région sèche) de paillis (branches broyées). Grâce à l’action des micro-organismes, elle se transformera à son tour en humus. Cependant, il faut être vigilant, car, pendant leur décomposition, la forte concentration en carbone de ces matières peut engendrer une carence en azote pour certaines plantes (coloration jaunâtre de la feuille). Il sera facile d’y remédier en faisant un apport préventif de purin d’ortie et en y épandant de temps en temps des matières plus riches en azote, comme des feuilles vertes. Vous pourriez aussi y ajouter les déchets organiques ménagers comme les épluchures : cela fonctionnerait, mais ne serait pas très esthétique et vous attireriez les gastéropodes, d’où l’intérêt de réaliser une aire de compostage.
L’aménagement d’une aire de compostage Choisissez un endroit à l’ombre et abrité du vent, afin d’éviter le dessèchement des matières.
FICHE PRATIQUE
Faire un lombricomposteur pour balcon Eisenia foetida Fabriquez deux silos à l’aide de solides palettes d’un mètre de côté et de haut, qui recevront à tour de rôle les matières à composter. Vous aménagerez une porte sur l’un des côtés, en fixant des charnières sur l’une des palettes, afin de pouvoir évacuer le compost lorsqu’il sera mûr. Ensuite, construisez un troisième silo de mêmes dimensions pour stocker des feuilles mortes et équipez-le d’un couvercle pour conserver les feuilles au sec. Dans le premier silo, déposez 10 cm de feuilles mortes, sur lesquelles vous répandrez les déchets de cuisine comme les épluchures, les restes de salade, les fruits pourris. Lorsque les déchets recouvriront intégralement la surface, saupoudrez-les avec du compost mûr que vous aurez conservé dans une poubelle à proximité. Cela permettra d’aider le démarrage de la décomposition, grâce aux précieuses bactéries qui s’y trouvent. Ensuite, répandez de nouveau des feuilles mortes, sur lesquelles vous jetterez une nouvelle couche de déchets, et ainsi de suite jusqu’à ras bord, en finissant par une couche de feuilles. Laissez-le reposer pendant six mois au minimum, en l’arrosant avec de l’eau non chlorée (de pluie, par exemple) une fois par semaine en période chaude et sèche, afin de maintenir l’humidité nécessaire au processus de décomposition. Pendant ce temps, vous remplirez l’autre silo.
Récupérez chez le poissonnier trois caisses en polystyrène de mêmes dimensions (au minimum 10 cm de profondeur afin que les matières ne sèchent pas). Faites 50 trous de 1 cm de diamètre au fond des boîtes. Le bac du bas est, lui, en plastique et aux mêmes dimensions que les caisses ; il reçoit les résidus liquides qui sont de l’engrais concentré (à diluer à 10 %). Pensez à surélever le lombricomposteur afin de pouvoir glisser un arrosoir sous le robinet. Dans le bac du haut, un feutre textile (un vieux vêtement fera l’affaire) est disposé sur les matières afin d’éviter le dessèchement. Lors de la première utilisation, mettez 250 g des vers rouges de compost (récupérés dans un compost existant ou chez un fournisseur de vers, voir page 126). Pour accélérer le processus de décomposition, saupoudrez du compost mûr. Lorsque le bac supérieur est plein, on vide le bac du bas (rempli de compost) pour le remettre par-dessus. En été, le protéger de la chaleur et, en hiver, l’installer dans un endroit suffisament chaud ou le couvrir d’une couverture.
Votre compost sera prêt lorsque la bonne odeur de litière forestière apparaîtra. Il vous reste à le tamiser avant toute utilisation surtout si vous vous en servez pour des semis ou du repiquage. Vous pourrez facilement réaliser un tamis en utilisant un grillage de poulailler fixé sur un cadre (les diverses utilisations du compost sont décrites page 26).
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Ma butte aux
MULTIPLES BUTS La culture sur butte est une méthode qui évite de nombreuses tâches aux jardiniers, tout en permettant d’obtenir des productions exceptionnelles. De plus, elle présente quantité de bienfaits environnementaux. Voici le pourquoi et le comment de la butte…
Pourquoi cultiver en butte ? La préservation de la souplesse du sol sans jamais labourer La forme hémicirculaire de la butte rend celle-là moins sujette au tassement gravitaire. En outre, en utilisant les allées pour circuler, les jardiniers en conservent la souplesse. Comme il n’y a pas de labour, la vie souterraine et la structure du sol sont préservées, garantissant ainsi un environnement idéal pour le développement des cultures.
Esthétique Les buttes peuvent générer de belles ambiances lorsqu’elles ont été dessinées par un jardinier inspiré.
Réalisation d’un jardin en buttes
La forme des buttes permet de bénéficier de pentes exposées au sud, qui sont bien plus chaudes, permettant ainsi de réaliser des cultures plus précoces et d’étaler la maturation des légumes sur une plus longue période. Celles qui sont situées au nord seront plus fraîches ; c’est un avantage pour certains légumes sensibles aux chaleurs estivales. Pendant la saison des pluies, les eaux de ruissellement s’écoulent entre les buttes, permettant ainsi aux cultures de rester émergées.
Une surface de 200 m2 de buttes est suffisante pour produire la quantité de légumes nécessaire à quatre personnes pendant une année (plus de précisions page 30). Sachant que la butte ne sera plus jamais labourée, il est important de s’assurer que la terre qui la constitue est suffisamment riche pour accueillir des cultures légumières. Si ce n’est pas le cas, il faudra incorporer des éléments comme du compost mûr, afin d’offrir aux végétaux la qualité optimale de sol dont ils ont besoin. Il faut d’abord désherber la surface du sol, puis tracer les contours avec une poudre biodégradable telle que de la cendre. Une butte mesure 170 cm de large sur 60 cm de haut. Elle peut être disposée en courbe. Cependant, des chemins d’accès devront être disposés régulièrement entre elles, afin d’éviter « l’effet labyrinthe ». Aucune terre extérieure n’est apportée pour réaliser les buttes, elles sont formées avec la terre extraite des chemins se trouvant entre chacune d’elles. La terre devra être fine et sans trop de mottes, afin qu’il n’y ait pas d’espaces d’air dans le sol, ce qui provoquerait un drainage de l’eau vers le fond trop important. Le passage à basse vitesse d’un motoculteur peut s’avérer bien commode pour affiner la terre et rendre plus aisée sa manipulation à la pelle. De même, si vous devez ajouter du compost à la terre, le mélange peut se faire grâce à cette machine. Lorsque les buttes sont formées, vous devez les ratisser afin d’harmoniser leurs formes et d’enlever les cailloux trop gros, qui gêneraient les semis.
Une augmentation de la surface cultivable
Les couches supérieures de la butte
Une production exceptionnelle Les biotopes sauvages dont se sont inspirés les initiateurs de l’agriculture naturelle ont comme caractéristiques des couvertures végétales permanentes, sans cesse renouvelées. De même, le jardinier devra planifier tout au long de l’année ses interventions, afin de couvrir les buttes de cultures permanentes et d’obtenir ainsi une production exceptionnelle.
Des influences environnementales diversifiées
En réalisant un jardin de buttes sur un terrain plat, on augmente la surface de culture de 24 %.
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Il est important d’appliquer une couche de compost à la surface de la terre (de 1 à 3 cm), afin d’éviter une carence en azote des
Savoureuses et saines
AROMATIQUES Cuisiner et se soigner en même temps, c’est ce que nous proposent les aromatiques. Elles sont faciles à cultiver et peu exigeantes. Elles trouvent toujours une place dans un coin du jardin ou sur le bord d’un balcon.
Cultiver des aromatiques
La culture des plantes aromatiques est devenue incontournable pour ceux qui aiment jardiner et cuisiner. La diversité de leurs formes et de leurs fleurs ainsi que la persistance de leur feuillage permettent de créer des massifs de toute beauté. Leur culture est facile et demande peu d’arrosage. Elles seront installées à proximité de la cuisine, loin des zones polluées (parking, routes) et dans un endroit bien ensoleillé, afin qu’elles génèrent les précieuses substances aromatiques tant recherchées pour cuisiner et se soigner. La qualité exceptionnelle du nectar qu’elles produisent permet aux abeilles de fabriquer des miels savoureux et médicinaux. Elles peuvent être utilisées fraîches ou sèches. Dans ce dernier cas, voici comment procéder.
Conservation
Les plantes sont récoltées par temps sec pour faciliter leur séchage et garantir une bonne concentration des principes aromatiques. Elles sont mises à sécher dans un endroit à l’ombre et aéré. Une fois récoltées, faire un bouquet en formant une boucle pour le suspendre avec les feuilles vers le bas, et le couvrir d’un sac en papier, afin de le protéger des poussières. Le laisser sécher ainsi pendant 2 semaines environ. Lorsque les feuilles deviennent craquantes, les détacher en frottant le bouquet entre les mains au-dessus d’une feuille de papier. Les mettre ensuite dans un récipient opaque pour ralentir l’oxydation et permettre la conservation pendant 1 an. Les feuilles coriaces comme celles du romarin peuvent être réduites en poudre à l’aide d’un moulin à café ou à céréales au fur et à mesure de la demande. Macération dans l’huile : remplir un pot en grès avec les herbes fraîches, les recouvrir avec de l’huile végétale, puis laisser macérer. Deux semaines après, filtrer et mettre en bouteille opaque. Vinaigre aromatique : chauffer le vinaigre et le verser sur les feuilles légèrement écrasées. Laisser macérer pendant quinze jours, puis filtrer et mettre en bouteille.
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Le romarin
Rosmarinus officinalis Description Le romarin est un arbrisseau de la famille des Lamiacées, poussant à l’état sauvage dans les garrigues méditerranéennes. Ses fleurs bleu clair se manifestent à partir de l’automne jusqu’à la fin du printemps. Culture Il aime le soleil et les sols bien drainés et supporte les gelées si le sol n’est pas trop humide. Sa multiplication se fait par bouturage ou marcottage. En cuisine Le romarin relève les mets salés en leur apportant une touche provençale. Il assaisonne bien les pommes de terre, les tomates et le riz. Propriétés C’est un stimulant de la vésicule biliaire et du système nerveux. Il est efficace contre les ballonnements et les maux de tête. Par son action dynamisante, il est idéal pour remplacer le thé et le café.
« Vivre simplement pour que d’autres puissent simplement vivre. » Gandhi
L’art d’habiter sobrement Habiter, avoir un abri, se réfugier… Depuis toujours, Homo sapiens cherche à se protéger des éléments et des animaux. Mais, si habiter, c’est être à l’abri, c’est également vivre dans un lieu, l’investir, s’en nourrir et le nourrir. Quel que soit le type de construction, sa présence ne devrait pas avoir d’impact sur l’environnement, ou le moins possible. Ses matériaux devraient pouvoir disparaître sans laisser de trace ou devraient resservir à d’autres pour bâtir. Et, dans la recherche de l’autonomie, l’habitat devrait être le plus économe possible en énergie et puiser ce dont il a besoin dans les ressources locales. Un défi qu’il est possible de relever plus aisément si l’on opte pour la simplicité. En route pour l’habitat sobre…
Foyer
DOUX FOYER Construire une habitation qui aura pour but d’être totalement autonome est un vrai défi. L’objectif serait donc plutôt d’être « le plus autonome possible », sans basculer dans un système autarcique replié sur lui-même et coupé du monde (pour ceux qui retiennent néanmoins cette option, il reste quelques îles à vendre au milieu de l’océan). Pour devenir le plus autonome possible, il faut y penser dès la conception de son futur habitat… Et très probablement envisager de revisiter son mode de vie.
La superficie et le prix La base d’un habitat sobre est sa superficie. Il faut faire sien l’art de l’ultime simplicité. Il est probablement difficile de se projeter dans une minuscule maison comme celle présentée page 56, mais elle reste une source d’inspiration pour concevoir une maison de taille modeste. Pour se rendre compte des volumes dans un espace que l’on dessine, on pourra tracer des plans au 1/10e (1 cm = 10 cm) sur des feuilles A3, puis, dans une autre feuille, découper tous les équipements indispensables (lit, table, poêle à bois, plan de travail de la cuisine…) pour les bouger comme on veut sur le plan jusqu’à trouver leur bon emplacement. Gardons à l’esprit de toujours faire le plus petit possible et d’agrandir ensuite si nécessaire (arrivée d’un nouvel enfant, accueil d’un ami, d’un vieux parent…). Les prix de la construction sont calculés en euros par m2, et même si chaque projet est unique, les ordres de grandeur des prix sont environ de 2 000 €/m2 pour un habitat clef en main. 1 500 €/m2 si on s’occupe des finitions. Si on fait beaucoup par soi-même : 1 000 €/m2. Et, pour finir, si on fait tout : 500 €/m2.
d’en prendre un coup. Le télétravail, le covoiturage pour les enfants (voire l’instruction en famille pour les plus téméraires), un jardin qui produit (lire page 14), une utilisation fréquente du vélo et très raisonnée de la voiture vous remettront en lice pour la médaille du Best Low Carbon Energy Award. Pour trouver l’endroit idéal, rien ne vaut la promenade sur le lieu. Utiliser également les sites Internet comme le géoportail de l’IGN (courbes de niveaux, ruisseaux, poteaux électriques…) ou celui du cadastre qui offre la possibilité de calculer très précisément la dimension des parcelles et des bâtiments existants.
L’exposition Nous devons privilégier une orientation plein sud. C’est grâce à cette bonne exposition que nous allons faire de grosses économies d’énergie (chauffage et éclairage), ainsi qu’augmenter notre bien-être (rayons infrarouges du soleil – vitamine D – et lumière naturelle). C’est le fameux « bioclimatisme » qui permet aux rayons du soleil d’hiver d’entrer dans la maison. On se préservera du soleil de l’été par un débord de toit, une pergola ou une voile solaire (tissu tendu à l’extérieur).
Généralement on compte 1/ pour les matériaux et 2/ pour les artisans.
L’isolation
La situation L’endroit où se trouve le logement est bien sûr lié au goût de chacun. Toutefois, plus l’environnement sera beau et moins il sera pollué, plus élevé sera le bien-être. Si le beau est très subjectif, il revêt certaines caractéristiques « universelles » : de la nature, du calme, une vue dégagée… Notons ici qu’une démarche respectueuse de l’environnement est à appréhender de manière globale. Si votre travail, l’école ou le magasin bio se trouvent à 25 km et que vous utilisez une voiture, votre bilan carbone risque
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C’est la partie à soigner, et tant pis s’il n’y a plus d’argent pour les clinquants panneaux solaires. L’objectif est de consommer très peu d’énergie pour se chauffer l’hiver ou climatiser l’été. Regardez alentour s’il y a des produits isolants locaux (chanvre, paille, cannes de Provence, sciure…). Ensuite, élargissez votre recherche aux autres isolants les plus écologiques et les moins transformés. Les matériaux sont très faciles à trouver aujourd’hui, et les magasins spécialisés sont nombreux. C’est dans ces lieux que vous trouverez les adresses de bons artisans qui officient dans votre coin.
Je deviens
ÉLECTRO-SOBRE Comment devenir autonome… en énergie ? Il est tellement bon de rêver à une grande et belle centrale photovoltaïque, à des capteurs solaires pour l’eau chaude plein la toiture, à une rutilante chaudière à bois, voire, soyons fous, à une splendide éolienne. Toutes ces envies de « signes extérieurs d’énergie renouvelable » peuvent pourtant nous mener sur une voie glissante. En effet, avant de calculer le dimensionnement de son installation, il est primordial de passer par la moulinette de l’économie d’énergie ! Moins clinquant, mais ô combien plus efficace. Suivez le guide de la sobriété…
La démarche négawatt Un négawatt, c’est un watt que l’on ne consomme pas, donc que l’on n’a pas besoin de produire ! L’association éponyme (lire page 127) nous invite à nous pencher sur nos consommations d’énergie, en suivant un triptyque éprouvé, simple et hautement efficient : sobriété, efficacité et renouvelable. Quelle que soit notre intention, ce triptyque nous permet d’aller droit au but dans la construction (en neuf comme en rénovation). Et, par extension, dans de nombreux domaines. La sobriété, c’est l’économie d’énergie dans notre quotidien. D’un mode de vie « sans compter », on passe à un mode de vie dans lequel nous prenons conscience que les ressources de notre monde ne sont pas infinies. Le moindre geste a son importance : éteindre la lumière en sortant d’une pièce, fermer le robinet quand on se brosse les dents, ne pas laisser ses appareils en veille… Il y a mille et une façons de devenir un adepte de la sobriété énergétique. Et, lorsque l’on est un nouveau venu dans cette sage voie, il suffit d’y aller pas à pas, et d’ajouter une étape lorsque la précédente a été assimilée. La sobriété nous permet de diminuer nos consommations de façon plus importante qu’on ne le pense, mais, si l’on veut passer à la vitesse supérieure, on ouvre le deuxième volet du triptyque, celui de l’efficacité énergétique. Dès que l’on doit changer un appareil (un réfrigérateur, par exemple) ou un consommable (comme une ampoule), on prend le temps de la réflexion : « Quel est le plus efficace ? » La fameuse étiquette énergie, avec ses petites flèches de couleur et ses lettres, va nous aider : A est excellent, G est à bannir. Mais, souvent, un cruel dilemme se posera à nous : « C’est plus efficace, certes, mais c’est aussi plus cher ! » Eh oui, il n’y a pas de secret, mais il faut voir cela comme un investissement à moyen ou long terme : on finit par rentabiliser le surcoût au fil des années, on peut même faire de
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substantielles économies. Et, dans une perspective d’autonomie, plus nos appareils sont efficaces, moins nous aurons besoin d’énergie ! Nous voilà arrivés au terme des deux premiers volets du triptyque. Maintenant que nous avons réduit nos consommations de manière importante, reste à faire le point sur nos réels besoins énergétiques. Il est devenu beaucoup plus facile de dimensionner ses équipements pour les faire fonctionner au maximum avec des énergies renouvelables. L’autonomie n’est donc pas qu’une question de nombre de panneaux solaires, mais bel et bien de connaissance et d’adaptation de son mode de vie à travers une vision globale des questions énergétiques.
Maîtriser la langue kWh Avant de faire le test de « quel consommateur je suis – et qui vais-je devenir ? » en vous aidant du tableau ci-contre, il reste à maîtriser la langue du kWh. Nos consommations en énergie sont exprimées en kilowatts par heure. Un ampoule d’ancienne génération (celle avec le filament qui chauffe plus qu’elle n’éclaire), d’une puissance de 100 watts, consomme, durant 10 heures, 1 000 watts (soit 1 kilowatt que l’on écrit aussi 1 kW). Sa consommation est donc de 0,1 kW durant une heure. C’est aussi simple que ça. Les kWh exprimés sur les étiquettes énergie correspondent à la consommation d’un appareil durant une année. On peut diviser cette consommation par 365 pour connaître la consommation quotidienne d’un appareil (même si cela reste empirique, car un lave-linge ne tourne pas tous les jours par exemple). On peut aussi acheter une prise avec un compteur d’énergie, ou wattmètre, qui nous indique tout sur nos consommations (en temps réel, sur une durée prédéterminée…) : un outil précieux lorsque l’on veut faire des économies d’énergie.
Des waters sans eau
ET À COMPOST Comment terminer le chapitre sur l’habitat ? Peut-être en allant mettre le nez dans nos problèmes quotidiens (pour ceux dont le transit fonctionne bien). Ouvrons donc la porte du petit coin pour aller jeter un œil à ces lieux d’aisance trop souvent délaissés…
Chasse interdite Les toilettes sans eau ou à compost n’ont rien à voir avec l’image des toilettes d’antan qui trônaient au fond du jardin. Ces dernières n’étaient guère hygiéniques et très peu pratiques. Les toilettes d’aujourd’hui répondent aux normes sanitaires en vigueur et sont autorisées par un vrai texte de loi. Les temps changent, donc, car il n’est pas très loin celui où la seule évocation des mots « toilettes sèches » ou « WC à compost » faisait doucement ricaner. Différents systèmes existent à ce jour, et l’on trouve des WC qui ressemblent à des WC, ont la couleur des WC, l’odeur des WC et sont des WC… Mais sans eau. La chasse a disparu, elle est remplacée par un système de ventilateur, une grande cuve ou un simple seau. Il y en a pour tous les goûts… et moins dans les égouts. Dans la tiny house de la page 56, il y a un WC à séparation. C’est un WC équipé pour séparer les urines des matières fécales. Les urines rejoignent le réseau des « eaux grises », c’est-à-dire toutes les eaux usées, à l’exclusion des eaux-vannes ou « noires », chargées en matières fécales. Les matières solides se retrouvent dans un compartiment, à l’arrière, équipé d’un ventilateur qui extrait l’humidité et les odeurs. On vide alors le seau, muni d’un sac, tous les 15 jours, voire tous les mois, suivant la fréquentation du lieu.
Toilettes sèches Le système qui nous intéresse ici est le plus simple de tous (si l’on exclut la version la plus pratiquée par les Hominidés depuis la nuit des temps : chier dans les bois). Il ne sépare pas, il n’a pas de ventilateur, mais un simple seau en inox. Celui-là peut être également en plastique, mais, à la longue, les urines attaqueront le fond et une légère odeur pourra apparaître. À chaque passage, au lieu de tirer la chasse, on ajoute une poignée de matière carbonée, qui va ralentir le processus de transformation des urines en ammoniaque (cette odeur caractéristique et fortement désagréable). Cette matière va équilibrer nos déjections très azotées et rétablir l’équilibre carbone/azote. C’est pour cela que le professeur Országh, qui a développé ce système en Belgique dans
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les années 1990, l’a nommé toilettes à litière biomaîtrisée ou TLB. L’apport de matière carbonée permet, en outre, de recouvrir son « cadeau » et éviter ainsi qu’il ne soit porté à la vue de la personne suivante. Cette matière magique qui fait disparaître odeur et crottes n’est autre que… la sciure de bois. Il existe de très nombreux autres apports possibles dans des WC à compost : feuilles d’arbre fruitier, de frêne ou de bouleau (les autres sont plus longues à se décomposer), paille ou foin haché, carton déchiqueté, terre… Mais, de toutes les matières, c’est la sciure qu’ils préfèrent. La composition idéale de la litière est précisément de la sciure mélangée à des copeaux plus grossiers, qui permettront une meilleure circulation de l’air, afin d’accélérer le processus de décomposition. Le papier toilette peut rejoindre le seau, tout comme les couches et les protections hygiéniques, tant qu’il n’y a pas de plastique. Et ensuite, avec ce seau bien rempli, que fait-on ?
Direction : le compost Le seau est ensuite vidé sur un tas de compost. Ce tas peut tout à fait être celui du compost qui est aménagé sous le châtaignier, en bas à gauche du plan du jardin extraordinaire de la page 14. Mais on devra attendre plus longtemps, deux ans, afin de s’assurer que tous les germes pathogènes potentiels ont disparu. C’est pour cela qu’il est tout à fait possible d’aménager deux tas de compost, l’un pour les déchets de cuisine et du jardin, qui amendera le jardin potager, et l’autre pour les WC, qui trouvera une seconde vie au pied des arbres ou des fleurs. Cette seconde option donnera des scènes mémorables, comme celle où votre belle-sœur, réticente aux toilettes sèches, cueillera un jour un bouquet dans le jardin et y plongera son visage pour le respirer à pleins poumons… Rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme. La transformation est ici l’œuvre de nos fameux vers de fumier ou vers rouges présentés page 23. On pourra déverser un petit paquet de 250 g de ces précieux alliés pour démarrer le lombricompostage de notre nouveau tas de compost. Et, puisqu’ils sont capables d’ingérer tous les jours jusqu’à 100 fois leur propre poids, ils auront vite fait de transformer tout ça en un humus merveilleux.
FICHE PRATIQUE
Les toilettes sèches, modèle de luxe Dans un joli coffre en bois, on trouve à la fois les WC et la réserve de sciure-copeaux, avec sa jolie petite pelle émaillée. Le papier hygiénique recyclé aux tons rosés est à portée de mains. Le seau est en inox 10/18, fabriqué dans une usine française. Une bavette, découpée dans une bassine, permet d’éviter que les petites gouttes de pipi des enfants, dont le jet est parfois mal dirigé (c’est aussi le cas pour les adultes), passent entre la lunette et le seau. Ici, pas d’odeur, que du bonheur.
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« La cuisine : caveau d’alchimiste. La cuisine est vaste. La table assez grande pour que le livre voisine avec les épluchures, avec une lettre commencée, le matériel de peinture d’un enfant, votre dernier manuscrit, le dictionnaire, le bouquet de saison, plus loin le compotier garni. Elle est vaste parce qu’on aime s’y tenir, y siéger. L’idéal serait qu’elle soit pourvue d’une cheminée et d’un four à pain, de fauteuils, de chats endormis, d’un buffet où l’on expose, beau, plus beau qu’une fleur, le chou-fleur ou l’artichaut violacé, de lits et de rayons de bibliothèque. Que la cuisine soit une pièce à vivre où la nourriture s’impose aux gens, qu’elle se prépare ou subsiste comme un odorant souvenir. » Marie Rouanet, Petit traité romanesque de cuisine, Payot, 1997
Cuisiner l’originalité et l’autonomie Tous ces travaux de jardinage, de construction et autres bricolages, ça ouvre l’appétit… Même pas besoin de cuisiner ! Un bon repas tout chaud nous attend dans la marmite norvégienne. Bienvenue dans notre cuisine, où la recherche d’autonomie peut se faire pas à pas, et facilement.
Machine à pâtes
Ma cuisine
PRATIQUE Imaginons, dans notre projet de maison autonome, qu’on en soit déjà à l’étape des plans de la cuisine de nos rêves… La pièce à vivre de la maison ! On commencerait par rassembler nos idées en fonction de nos exigences, et on en profiterait pour se simplifier la vie, non ?
Aménagements chaleureux
Loin des cuisines-laboratoires, outrageusement chères, « équipées » et conçues pour des appareils électriques dont on n’a pas l’usage, la cuisine autonome sera avant tout fonctionnelle et judicieusement encombrée, tout en étant agréable à vivre et accueillante. Le choix d’un appareil, d’un meuble ou d’un ustensile sera envisagé en fonction de son impact sur notre environnement (gourmand en énergie vs ustensile manuel…) et de son utilité réelle au fil du temps. Pour les murs, du blanc ou une couleur claire. Au sol, des carreaux en terre cuite, faciles à entretenir. Comme meubles, une table rustique et des chaises confortables.
Gazinière ou cuisinière à bois
Pour faire la cuisine, on pourra choisir une gazinière avec four à gaz (pour cuire une tarte même pendant les pannes de courant). Mais on peut également se tourner vers la cuisinière à bois, qui, en prime, nous chauffera pendant l’hiver ! Ou alors, plus modestement, un poêle à bois sur lequel on peut cuisiner, réchauffer, laisser mijoter ou faire chauffer de l’eau. Le rêve : un four à pain à bois dans la cuisine… Au-dessus du poêle, on imaginerait bien un dispositif pour faire sécher des fruits et des légumes en tranches, enfilés sur des fils tendus, ou un séchoir à pommes bricolé avec des baguettes d’après un modèle ancien, comme celui qui est présenté page 97. À côté, un coin où installer ce qui doit séjourner près d’une source de chaleur, comme la pâte qui lève doucement. Et, pourquoi pas, un porte-manteau sur pied (perroquet) pour y accrocher de grands bouquets de plantes ou un panier contenant des plantes aromatiques. On pourra aussi y faire sécher du linge, si besoin.
Plan de travail et mobilier
Pour meubler la cuisine, rien de mieux que de vieux placards ou buffets (plus personne n’en veut, ça tombe bien), des coffres, des étagères… La récup’ est notre amie ! C’est le moment de trouver enfin un emplacement pratique et permanent pour la marmite norvégienne (lire page 94), cette grande boîte isolante
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où mitonneront sans cuisson de bons petits plats. Il faut qu’elle soit accessible, facile à déplacer, dans le bas d’un placard ou dans une caisse à roulettes, sous le plan de travail, par exemple. Celuilà, puisqu’on est dans les projets, prévoyons-le grand, solide et à la bonne hauteur. L’essentiel : pouvoir y préparer plusieurs choses à la fois et avoir à portée de main tout ce qui sert vraiment souvent. Avec de la place pour y fixer à demeure une floconneuse ou un autre ustensile manuel d’usage courant, comme un extracteur à jus, un moulin à farine… Attention ! Il doit rester un espace libre suffisant pour y cuisiner à son aise ! Un rideau suffira à masquer ce qu’il y a dessous : étagères, grands tiroirs sur roulettes où entreposer les fruits et légumes qui arrivent du jardin…
Autour de l’eau
L’évier sera plutôt grand, avec, au-dessus, un espace pour y faire égoutter la vaisselle et gagner ainsi de la place sur le plan de travail. On se réservera aussi un endroit pour les graines à germer, les fromages et autres préparations à égoutter. Le robinet sera avec mitigeur et réducteur de débit pour économiser l’eau. Pas loin de l’évier, garder une place pour un système de filtration par percolation, le seul qui fonctionne sans eau et sans électricité, garantissant une eau de très bonne qualité. Sous l’évier se logera facilement un seau avec un couvercle pour les déchets végétaux en attente d’aller rejoindre le tas de compost. Il faut aussi caser les amis du ménage : balais, serpillières, seau, et prévoir d’accrocher les torchons, maniques, chiffons, de façon à les avoir à portée de main.
Le froid, les casseroles et tout le reste
Les alternatives au réfrigérateur – beurrier breton (il conserve le beurre dans l’eau), « frigo du désert » (il prend la place d’un grand pot de fleurs, lire page 97), petit meuble garde-manger… – seront placées de façon à être d’un maniement aisé et à ne pas gêner le passage.
Douces
PROTÉINES Sur le chemin de l’autonomie, et plus particulièrement pour satisfaire nos besoins en protéines, céréales et légumineuses sont nos meilleures amies. Certaines pourront venir du jardin. C’est plus facile pour les haricots, pois chiches et lentilles que pour les céréales communes (blé, avoine, seigle, orge…), qui demandent des savoir-faire et des équipements pour les récoltes et le battage. Pour autant, les céréales peuvent s’inviter au jardin pour ceux qui veulent tenter l’aventure (lire double-page suivante).
S’approvisionner correctement Il est primordial de s’approvisionner en bio (ou équivalent de confiance), car on évite tous les traitements chimiques que subissent les plantes, de la semence à la récolte, et même bien au-delà, avec les gaz de stockage, les conservateurs, etc. Les céréales complètes bio sont contrôlées et garanties sans traces de pesticides, d’engrais ni de produits chimiques (pour les conserver, lire page 96). Leurs farines sont broyées à la meule de pierre (l’équivalent d’un moulin manuel à très grande échelle !), lentement, sans échauffement, et leurs vitamines et minéraux sont préservés sans agents de blanchiment ni vitamines ou minéraux ajoutés (comme ces derniers disparaissent lors du raffinage industriel, on les ajoute artificiellement !).
Céréales et légumineuses ? On a longtemps pensé que l’intérêt nutritionnel des céréales et des légumineuses était limité, car leurs protéines dites « incomplètes » ne contiendraient pas les acides aminés essentiels suivants : la lysine dans les céréales et la méthionine dans les légumineuses. Il suffirait de les associer régulièrement (pas obligatoirement à tous les repas) pour bien assimiler ces protéines. Si ce manque est avéré pour les céréales, ce n’est pas le cas pour les légumineuses qui comptent, en réalité, tous les acides aminés nécessaires. Elles sont une source de protéines importante avec plus de 23 mg/100 g pour les lentilles, les haricots rouges, les haricots mungo verts et le soja, et plus de 20 mg pour les pois jaunes, les haricots blancs et les haricots de Lima, et un peu en dessous pour les pois chiches. Mais le tandem céréales et légumineuses permet d’obtenir un taux d’assimilation des protéines plus important que si les céréales étaient consommées séparément. Ce n’est pas pour rien qu’on retrouve cette combinaison dans de nombreux plats
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traditionnels – couscous et pois chiches (lire recette page 94), maïs et haricots rouges, riz et lentilles, riz et tofu, soupe au pain et haricots… – qui permettent de se passer de viande sans souci de carences. La proportion conseillée dans les plats est de 3/ de céréales pour 1/ de légumineuses, mais on peut adapter et se contenter par exemple de tartiner des purées de haricots ou de pois chiches sur du pain bio. Si le tout est fait maison, c’est encore mieux ! Les produits laitiers seraient plutôt pauvres en méthionine, mais riches en lysine. La consommation de produits céréaliers et laitiers est donc souvent recommandée. Mais, dans notre recherche d’autonomie, si on les apprécie, encore faut-il pouvoir s’en procurer facilement, qui soient bio et locaux, et faire soi-même ses yaourts et fromages blancs…
Recettes traditionnelles ou non Purée de pois chiches (houmous) La veille, mettez 1 bol de pois chiches à tremper dans de l’eau. Le jour même, une fois rincés et égouttés, faites-les cuire dans 4 fois leur volume d’eau, avec quelques feuilles de sauge, pendant 45 minutes environ, ou oubliez-les (après 20 minutes d’ébullition) dans une marmite norvégienne (lire page 94). Salez modérément. Égouttez les pois chiches en récupérant le jus de cuisson. Passez-les au moulin à légumes et, à la pâte obtenue, ajoutez 2 ou 3 c. à. s. d’huile d’olive, du jus de cuisson si besoin, un peu de persil, de basilic ou de sauge et 2 gousses d’ail pilées. Lentilles à l’indienne Faites chauffer un peu d’huile dans une cocotte et ajoutez des épices (piment, graines de coriandre du jardin, par exemple). Remuez, puis faites revenir un oignon émincé. Baissez le feu et laissez cuire le temps de rincer et d’égoutter 1 verre de lentilles vertes et 1 verre de riz complet. Versez les lentilles et le riz
Céréales
MULTIUSAGES La céréale est souvent considérée comme un aliment simple. Pourtant, elle peut cacher de véritables trésors pour la santé. Et, cerise sur le gâteau, tous ses « déchets » pourront retourner à la terre pour la nourrir ou nous servir de multiples façons dans la vie quotidienne. Zoom sur trois céréales…
Méthode de culture naturelle des céréales La céréale (seigle, grand épeautre) est semée à la fin de l’été sur une zone du terrain bien ensoleillée et non inondable. Au préalable, le sol aura été désherbé et ameubli suffisamment pour permettre aux racines d’aller en profondeur. Du compost pourra être apporté afin d’éviter toute carence au démarrage de la végétation. Les graines sont semées avec un espacement de 50 centimètres entre elles et recouvertes d’une fine couche de paille suffisamment aérée pour permettre aux jeunes plantules de passer à travers. Ainsi, pendant l’automne et l’hiver, la céréale peut développer un fort enracinement. Au printemps, un engrais vert de type Fabacées (trèfle rouge, fèves, pois) est semé entre les céréales, afin d’apporter les éléments nutritifs dont ces dernières ont besoin. De plus, ce couvert végétal empêchera les herbes indésirables de coloniser la parcelle. La récolte se fait en été, lorsque les pailles sont sèches. La gerbe de blé est saisie de la main droite, tandis que la gauche, à l’aide d’une faucille, sectionne les tiges (si vous êtes gaucher, inversez les mains). On bat ensuite la gerbe dans une brouette afin de séparer les graines des tiges. Les pailles récoltées seront répandues dans la parcelle. Les années suivantes, le labour ne sera plus nécessaire, car la présence des engrais verts et le retour de la paille au sol permettront de conserver la souplesse de celui-ci. Pour la conservation des céréales, lire page 96.
sèche à l’hectare. On l’utilise pour les toitures (toits de chaume). Il entre également dans la composition de matériaux isolants. Le rempaillage de chaises se fait traditionnellement en paille de seigle. Il sert aussi à la fabrication de paillassons, de paniers tressés dits « paillas », dont on fait même des ruches… En agriculture biologique, le seigle est souvent employé comme engrais vert. L’ergot du seigle est un champignon très dangereux dont dérive le LSD. Il provoque une maladie grave, l’ergotisme (nécrose et gangrène des extrémités, convulsions et hallucinations…), dont il a fallu plusieurs siècles avant de découvrir l’origine. De nos jours, le seigle est strictement contrôlé, afin que le grain destiné aux humains ou aux animaux d’élevage ne contienne pas plus de 0,5 % d’ergot. Question nutriments, le seigle et le blé se valent. Le seigle est riche en protéines, en minéraux (manganèse, sélénium, fer, zinc, cuivre, phosphore, magnésium, calcium…) et en vitamines (B1, B2, B3, B5, B9…). Sa consommation améliorerait, entre autres, la santé intestinale. Le seigle contient du gluten. On le cuisine comme le blé, en grains ou en flocons. On peut mélanger sa farine à celle de blé (pain de méteil) ou l’utiliser pure, dans les pains d’épices ou autres.
L’épeautre
Le seigle
Déjà consommé dans l’Antiquité, très apprécié des Gaulois, l’épeautre a été délaissé par la suite au profit des blés qui présentent un bien meilleur rendement et dont le décorticage est beaucoup plus simple.
Céréale de terre pauvre et froide, le seigle est traditionnellement cultivé là où le blé ne donne pas grand-chose. Toutes les variétés de seigle dérivent de l’espèce sauvage Secale montanum (famille des Graminacées). Le seigle pousse dans des terres maigres et légères, au sol bien ameubli. Quand il est semé avec un mélange de blé, on l’appelle « méteil ». Sa grande hauteur (jusqu’à 2 m) lui permet de produire beaucoup de paille : de 2 à 6 tonnes de matière
Plante rustique, l’épeautre se plaît dans les sols pauvres. On distingue le grand (Triticum spelta) et le petit épeautre (Triticum monococcum ou engrain). Le grand épeautre est plutôt cultivé dans le Nord de l’Europe, en Allemagne, en Alsace. L’engrain s’apparente aux blés primitifs. On le cultive (surtout en bio) dans les Alpes-de-Haute-Provence. Il a un rendement encore plus faible que son grand frère du Nord.
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Du pain
POUR TOUS Le premier pas en autonomie culinaire consiste, en général, à faire son pain. Avec du vrai levain (farine et eau, sans levure), plus besoin d’acheter de la levure spéciale, et le pain obtenu se conserve longtemps. Le levain se fabrique une fois pour toutes (ou se récupère auprès d’amis) et se renouvelle au fil des fournées, à partir d’une petite boule de pâte à pain conservée dans un bocal et recouverte de farine.
Faire son levain Mélangez 4 c. à s. de farine complète bio + 1 verre d’eau de source dans un grand bocal. Couvrez-le avec un linge et laissez-le reposer dans un endroit chaud de la maison. Deux jours après, ajoutez 4 c. à s. de farine + 1 verre d’eau. Mélangez. Recouvrez. Quatrième jour : le levain travaille ! Des bulles apparaissent, l’odeur est aigrelette, mais agréable. Ajoutez 4 c. à s. de farine + 1 verre d’eau. Mélangez, recouvrez. Sixième jour : on voit des petites bulles sur le dessus… Le liquide est jaune d’or, la pâte homogène. Rajoutez encore 4 c. à s. de farine + 1 verre d’eau. Laissez reposer jusqu’à la préparation du premier pain au levain, qui sera possible le lendemain.
Le pain de base Pour 4 pains de 450 g environ, prévoyez : – 4 bols de farine de blé T80 ou T110 (env. 350 g) + une réserve – 1 bol d’eau – 1 bol de levain liquide actif – 1 c. à s. de gros sel Pour la première utilisation du levain, lire ci-dessous « Le jour même ».
La fournée La veille Prenez une bonne tasse de levain issu de la fournée précédente, délayez avec 1 verre d’eau. Ajoutez 4 c. à s. de farine. Posez un linge par dessus et laissez « travailler » toute la nuit dans un endroit chaud.
Le jour même Versez ce bol de levain « actif » dans un grand saladier. Faites chauffer 1 bol d’eau + 1 c. à s. de gros sel dans une casserole, à
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20 °C. Quand le sel est dissous et l’eau tiède, versez sur le levain. Ajoutez les 4 bols de farine et pétrissez dans le saladier, puis sur la table saupoudrée de farine, pendant 5 minutes environ. Rajoutez de la farine, au besoin, afin d’obtenir une pâte molle, aérée, mais qui colle un peu aux doigts. Remettez la pâte dans le saladier, couvrez-la d’un linge. Placez le tout près d’une source de chaleur pendant environ 3 heures ; veillez à avoir au moins 20 °C de façon continue. L’été, c’est plus facile. La pâte doit quasiment doubler de volume. N’oubliez pas de prélever un petit morceau de pâte pour la prochaine fois : c’est le levain ! Mettez-le dans un bocal, enseveli dans de la farine, fermez et entreposez-le à l’abri de la chaleur. Il se gardera pendant une dizaine de jours. Toujours sur la table saupoudrée de farine (ou bien parsemée de graines de sésame ou autres : dans ce cas, mouillez un peu la pâte pour qu’elles adhèrent mieux), aplatissez la pâte avec la paume de la main et tapotez pour l’abaisser à 1 cm d’épaisseur environ. Repliez-la en deux, puis encore en deux (incorporez éventuellement à ce moment olives dénoyautées, cerneaux de noix, raisins secs…) : on obtient une boule, sans avoir à pétrir à nouveau. Divisez-la éventuellement en 4 petits pains et laissez-les lever sur la table enfarinée ou dans un moule huilé au pinceau. Couvrez le tout d’un tissu et attendez pendant 1 heure environ en surveillant que la pâte ne lève pas trop : elle ne doit pas s’étaler. Préchauffez le four au maximum. Quinze minutes après, faites une croix au couteau sur les pains et enfournez-les directement sur la plaque. Pendant 10 minutes, restez au maximum, puis baissez à température moyenne. Dix minutes plus tard, passez au minimum et laissez ainsi jusqu’à la fin de la cuisson, qui dure 30 minutes en tout. Cela suppose quelques essais pour adapter la cuisson à votre matériel. À la sortie du four, les pains gagnent à être placés dans un sac ou dans un tissu, pour les garder tièdes. Les pains au levain sans levure se conservent facilement une semaine, voire davantage.
Savez-vous faire germer vos
GRAINES ? Vos réserves de graines recèlent plus d’un tour dans leur sac : en germant, elles vont se transformer en aliments d’une richesse énergétique extraordinaire, facilement assimilables et dont vous serez les heureux bénéficiaires !
Un concentré de vitamines Lors de la germination, de puissantes réactions biochimiques et enzymatiques entrent en jeu. Les vitamines – presque tout l’alphabet ! – sont multipliées. Les graines germées sont, en prime, gorgées de protéines, de fer, de magnésium, de fibres et de minéraux. La germination maison permet de tirer profit à moindres frais de tous ces bienfaits. Veillez juste à les rincer chaque jour, et vous obtiendrez un concentré vitaminé qui agrémentera vos salades et toutes sortes de plats. Les céréales, vous les avez déjà dans vos placards. Mais, attention, ne consommez pas les graines dont la plante elle-même est toxique : haricots, soja jaune, Solanacées… Les semences en surnombre au jardin (vérifiez leur non-toxicité) ou achetées en magasin bio pimenteront et décoreront vos plats : radis, moutarde, luzerne… Les graines gagnent à être placées au froid la veille du trempage. Certaines germent plus facilement, comme les lentilles ou la luzerne.
Germoirs Il existe de très beaux germoirs en terre cuite ou d’autres en plastique, mais des bocaux de récup’ conviennent très bien. Faites-leur une place sur l’évier ou à proximité, pas trop à la lumière, sinon recouvrez-les d’un tissu fin.
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Mettez à tremper les graines (2 c. à s.) dans un grand bocal rempli d’eau. Le lendemain, rincez-les à l’eau fraîche et videz l’eau de trempage. Fixez un carré de gaze ou de tulle avec un élastique sur l’ouverture du bocal. Au moins une fois par jour, rincez les graines (qui restent dans le bocal) sous le robinet. Ne rajoutez pas d’eau, calez le bocal incliné à 45° sur l’égouttoir à vaisselle ou au-dessus d’un récipient. Les graines doivent être à l’aise. Le troisième jour, les germes auront déjà pointé le bout de leur nez. Vous démarrerez une autre production dans un autre bocal, voire plusieurs, pour varier les plaisirs.
Variante nomade Faites tremper les graines dans un petit sac en coton rigide ou un gant de toilette épais. Le lendemain, rincez (sans vider les graines) et suspendez le sac au-dessus de l’évier. En randonnée, ce petit sac (ce peut même être une chaussette) toujours humide, placé dans une petite boîte en plastique ou accroché au sac à dos, vous procurera un repas vitaminé. Quand on le prévoit, faire germer ses légumineuses en quantité (pois chiches, haricots secs, lentilles vertes…) sur deux ou trois jours diminue considérablement leur temps de cuisson.
Je conserve
FACILE
Si les réserves issues du jardin sont bien à l’abri dans la cabane multifonction (lire page 20) ou dans un cellier, il est tout de même commode d’en avoir une partie sous la main. Avec un peu d’organisation, vous stockerez de manière fonctionnelle vos provisions dans la cuisine ou dans une annexe (balcon, garage).
Céréales et légumineuses Les céréales et légumineuses se conservent dans des bocaux en verre ou des récipients en plastique : bidons d’eau de 1,5 ou 5 l, secs, que l’on remplira avec un gros entonnoir. Pour les grosses quantités, notamment les farines bio achetées en sac de 5 à 25 kg, il peut être utile d’investir dans de grands bidons alimentaires. Des gousses d’ail ou des feuilles de laurier-sauce glissées à l’intérieur des contenants éloigneront les mites. Par ailleurs, sachez que ces bestioles apprécient particulièrement les pièces surchauffées. Posez des pièges à mites à phéromones et vérifiez régulièrement l’état de vos stocks.
Fromages Les fromages seront placés dans un garde-manger finement grillagé ou, pourquoi pas, dans un tambour de lave-linge « top » en inox . C’est celui que l’on peut refermer par le haut après avoir mis le linge, contrairement au lave-linge à hublot. Il est possible d’en récupérer pour pas grand-chose chez un ferrailleur, ou alors de procéder au démontage d’un vieux lave-linge (c’est un peu sportif). Vous récupérerez ainsi un rangement de qualité, solide, aéré, « garanti à vie » et antirongeurs.
Œufs, fruits, légumes… Les œufs, les fruits et les légumes se gardent hors réfrigérateur si la pièce n’est pas surchauffée. Utilisez assez vite les plus fragiles… La salade, lavée et essorée, se maintient fraîche un jour ou deux dans un linge humide ou simplement dans l’essoreuse. Les aromates (persil, basilic frais…), lavés et égouttés, gagnent à être conservés dans un grand bocal en verre, dans le bas du réfrigérateur ou dans un endroit frais. L’ail et les oignons, tressés ou glissés dans des filets suspendus, sont à portée de main et décoratifs.
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Pour le réfrigérateur, choisissez un petit modèle peu gourmand en électricité (lire page 62). Bien rempli, il consommera moins. On pourra y abriter les pots de céréales, les paquets de pâtes… Le froid est un bon antimites. Débranché, il peut toujours servir de placard !
Laitages L’hiver, certains laitages peuvent rester sur le rebord de la fenêtre ou dans un coin de balcon, à l’abri des convoitises animales. Le beurre se conserve facilement à température ambiante pendant plusieurs semaines dans… de l’eau ! Bourrez un petit bol de beurre, placez-le dans un bol plus grand, rempli d’eau un peu salée (si le beurre ne l’est pas), posez un couvercle sur le tout. Le beurre doit baigner dans l’eau (à changer au moins une fois par semaine). Il est à consistance idéale, sans le fameux « goût du frigo ». Il existe de très jolis beurriers bretons (c’est leur nom) en terre vernissée, dont le haut du couvercle fait office de support pour le poser sur la table.
Pains Le pain maison au levain se garde plusieurs jours dans un sachet en papier ou dans un sac en tissu suspendu, mais sous surveillance, car il peut aussi y moisir !
La lactofermentation La lactofermentation est une méthode de conservation par fermentation dite « lactique » (on obtient la choucroute avec ce même processus). Les légumes lactofermentés ne demandent pas d’équipement particulier. Pas de cuisson, et les légumes gardent ainsi leur fraîcheur et leurs vitamines. Leur léger goût piquant se marie bien aux salades d’hiver ou d’été. Carottes lactofermentées Recette de base pour 1 kg de carottes lactofermentées (ou de betteraves, de navets, de chou…)
« Chaque plante sauvage, chaque plante médicinale, chaque choix de guérison qui nous rapproche de notre sentiment d’unité avec la nature est un acte révolutionnaire et un pas en avant vers un mieux-être radical à un niveau planétaire. » Kiva Rose, herbaliste américaine
Santé, cosmétique et hygiène : le recours à la nature L’herbalisme * est l’usage traditionnel, populaire des plantes dans la vie quotidienne. Si la phytothérapie relève plus du domaine médical dans son approche scientifique et demande une étude approfondie, l’herbalisme prône des retrouvailles avec des savoirs traditionnels millénaires. Leur apprentissage, pour utiliser ces connaissances afin de préserver notre santé au quotidien, nous concerne tous. Avec l’effondrement des systèmes de santé, l’herbalisme a plus que jamais son utilité dans notre monde occidental. Nous autoriser à utiliser les plantes autour de nous et à prendre en mains notre santé, soigner nous-même nos petits maux ou conseiller notre entourage est notre droit de naissance, il nous appartient de le réclamer et de le mettre en œuvre. Il y a de la magie dans le monde des plantes... Laissons-les enchanter notre quotidien !
*Herbalisme est un mot d’orignie anglaise volontairement francisé dans ces pages.
Simplement
MÉDICINALES Les simples sont, comme leur nom l’indique, des plantes familières, modestes, pas compliquées, dont l’usage est aisé et commode. Un peu réduites au silence depuis l’avènement des médicaments chimiques, elles reviennent en force et délivrent de nouveau leur message. Les plantes parlent : écoutons-les !
L’ortie
Urtica dioica ou Urtica urens Mon message « Soyez humble : souvenez-vous de vos origines, et soyez courageux : honorez la Terre-Mère. » Mon engagement J’agis sur votre métabolisme, qui est l’ensemble des réactions chimiques de transformation de matière et d’énergie qui s’accomplissent dans tous vos tissus. J’entretiens ainsi l’équilibre des systèmes nerveux, hormonal et immunitaire. Je soutiens plus particulièrement ces organes : les reins, réservoirs de l’énergie vitale qui gèrent la circulation des liquides organiques, et les glandes surrénales, sécrétrices d’hormones qui vont déterminer votre comportement face aux peurs et au stress. Mais je protège aussi les poumons et les intestins, et, surtout, je régénère le sang. Mes actions Je suis une aide précieuse pour les troubles liés à l’accumulation de toxines dans le corps : maladies de peau, allergies, arthrite, rhumatismes… Mon influence puissante sur le fonctionnement des reins soulage infections urinaires chroniques et calculs et favorise la pousse des cheveux (qui dépendent énergétiquement des reins). Ma teneur exceptionnelle en calcium, magnésium, zinc, fer, chlorophylle et protéines, ainsi qu’en vitamines A, C et K, vaut tous les compléments alimentaires utilisés en cas de fatigue passagère et de carences en minéraux. Bien que tonifiante, j’ai aussi un effet calmant sur les nerfs et je facilite le sommeil. Mon effet sur les surrénales permet de soigner une fatigue persistante et de retrouver une vitalité étonnante. Mon usage régulier normalise la glycémie et les problèmes de poids, diminue les effets néfastes du stress, stimule la
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libido, soulage les crampes menstruelles et les maux de tête chroniques. En outre, je calme les allergies saisonnières, je solidifie les os, je préviens l’ostéoporose, je participe à la bonne santé des dents et des ongles, ainsi qu’à l’élasticité d’une peau saine. On peut préparer une huile de massage avec mes feuilles et faire un baume pour traiter les problèmes de peau chroniques, comme le psoriasis, l’eczéma ou l’acné. Mes utilisations Mes feuilles séchées sont utilisées en tisane ou en infusion nourrissante (lire page 108). Elles contiennent 40 % de protéines. Mes feuilles fraîches, récoltées avant la floraison, en début d’été, servent à réaliser alcoolature et vinaigre (lire page 110). Leur jus, pris en petite quantité avec de l’eau et du miel (une cuillère à café par jour), aide à réduire l’excès de mucus et agit favorablement sur les bronches. Mes sommités, récoltées du printemps à l’automne, sont consommées comme un légume. Mes graines, récoltées à l’automne, constituent un formidable adaptogène, indiqué en cas d’épuisement chronique, de burn-out ou d’effondrement du système immunitaire. Elles revitalisent les cheveux et la peau – à essayer en huile infusée. À récolter encore vertes, à mâcher fraîches ou séchées en petite quantité (un quart de petite cuillère par jour seulement), à saupoudrer sur les crudités ou à faire germer. Mes racines, en décoction, ont des propriétés qui permettent d’enrayer la chute des cheveux et de soulager les problèmes de prostate. Ne jamais m’utiliser en fleurs, car je peux provoquer des allergies. Plante nourrissante, je n’ai aucune contre-indication sous ma forme alimentaire. Suivre les précautions d’usage pour les infusions et l’alcoolature en cas de prise de médicaments pour des maladies des reins. Ne jamais surconsommer mes graines fraîches, car elles sont très stimulantes.
Tisanes, miels et vinaigres :
POTIONS MAGIQUES L’herbalisme dans la cuisine : des préparations simplissimes, dénuées d’ostentatoire et pourtant luxueuses, belles, goûteuses et généreuses ! Quand des recettes banales se transforment en potions magiques.
Les tisanes
Le simple fait de préparer une tisane avec des plantes entières nous engage dans une prise en main de notre mieux-être. Et si les tisanes sont moins concentrées en principes actifs qu’une infusion nourrissante ou une alcoolature, elles restent très efficaces pour soutenir l’organisme et soulever des forces de guérison, pour des problèmes chroniques ou récurrents. Elles conviennent bien pour les fleurs délicates, comme la camomille, la rose et les plantes chargées en huile essentielle comme la menthe, la sauge, le romarin, etc., que l’on ne prend pas en infusion nourrissante. Elles sont toutes indiquées pour les enfants et les bébés, à petite dose. Elles peuvent être bues froides ou réchauffées, et elles se gardent au réfrigérateur pendant 48 heures. Compter de 1 à 3 cuillères à soupe de plantes par tasse ou de 4 à 8 cuillères à soupe d’herbe par litre d’eau bouillante. Préparer 1 l ou plus d’avance pour la journée facilite la tâche. Pour un effet médicinal, il convient de les absorber par petite quantité tout au long de la journée. Pour des problèmes chroniques, 3 ou 4 tasses par jour sont recommandées. Pour des maux soudains comme les rhumes, les fièvres, les maux de tête et les indigestions, prendre des gorgées toutes les 30 minutes jusqu’à ce que les symptômes s’atténuent. Pour les enfants, la posologie, 3 ou 4 fois par jour, est la suivante : – en dessous de 2 ans, de ½ à 1 cuillère à café ; – de 2 à 4 ans : 2 cuillères à café ; – de 4 à 7 ans : 1 cuillère à soupe ; – de 7 à 11 ans : 2 cuillères à soupe. Les bains aux tisanes de plantes sont bénéfiques pour les bébés et les enfants, qui peuvent aussi profiter des bienfaits des bains de vapeur de tisanes.
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Le miel de plantes
Le miel non chauffé et non pasteurisé est l’un des aliments remèdes les plus anciens de l’humanité. Il contient plus de 180 substances naturelles différentes, des vitamines, des minéraux et des enzymes. Il a des propriétés antioxydantes, antimicrobiennes et anti-inflammatoires. Il combat les infections de la peau, des intestins, du système respiratoire. C’est un désinfectant efficace et cicatrisant pour les plaies. Il est hygroscopique, c’est-à-dire qu’il absorbe l’eau et, en contact avec les plantes, il en extrait les composants solubles et les huiles essentielles, anti-infectieuses. Le miel de plantes est une façon délicieuse de consommer des plantes et de profiter de leurs bienfaits rapidement et simplement ! Faire un miel de plantes Couper grossièrement les plantes. En remplir un bocal jusqu’au bord. Chauffer légèrement le miel pour le liquéfier et recouvrir les plantes. Mélanger avec une baguette pour homogénéiser. Rajouter un peu de miel pour remplir le bocal à ras bord. Fermer et étiqueter le bocal. Retourner le bocal de temps en temps. Le miel peut être consommé 1 ou 2 jours après, mais il est plus médicinal s’il a infusé pendant 6 semaines. Selon la taille des plantes, on peut les laisser dans le miel ou filtrer celui-ci en le réchauffant pour le liquéfier et bien presser les plantes. Les herbes indiquées pour les miels L’anis (galactagogue), la camomille (diarrhées), les graines de fenouil (constipation), la mélisse (calmante nerveuse), la lavande (quelques cuillères à soupe de plantes fraîches suffisent dans le miel infusé), la marjolaine, la menthe, les pétales de rose, la monarde, les fleurs de l’aubépine, le romarin, la sauge, le millepertuis, la verveine, l’achillée. Le thym, l’hysope, le radis noir, l’oignon, l’ail soignent les rhumes, les toux, les gorges irritées et les sinus encombrés.
Un concentré de plantes :
L’ALCOOLATURE
Les alcoolatures sont des préparations liquides de plantes macérées dans de l’alcool, qui constituent des extraits concentrés de plantes, connues et réalisées depuis des siècles. La simplicité de fabrication des alcoolatures, ainsi que leur facilité d’utilisation et leur longue durée de conservation, est bien adaptée à notre vie moderne. Outre l’intérêt de renouer avec la tradition, les alcoolatures font aussi appel à notre créativité pour fabriquer nos propres compositions personnalisées.
Les bénéfices à faire vous-même vos alcoolatures de plantes Il était autrefois courant de faire macérer les plantes dans les alcools de distillation issus du terroir : chaque famille préparait ses propres liqueurs à base de plantes présentes dans son environnement. Ces savoirs, transmis de génération en génération, sont la marque d’une relation étroite avec la flore, qui prédominait dans la société traditionnelle. Ils peuvent être remis au goût du jour avec profit. Les préparations d’herbes macérées dans l’alcool vont garder pendant très longtemps leurs propriétés. Une alcoolature a une durée de conservation de plusieurs années, voire illimitée. À la différence des plantes en vrac, les alcoolatures prennent moins de place dans les placards de la cuisine. Elles sont faciles à emporter en voyage et pratiques quand on a besoin de remèdes d’urgence. Elles sont simples à utiliser telles quelles, elles ne nécessitent pas de préparations supplémentaires. Elles peuvent être administrées directement sous la langue, mais sont mieux assimilées par le corps une fois mélangées à de l’eau, du jus de fruit, une infusion… Elles sont rapidement absorbées dans l’estomac, facilement digérées et atteignent la circulation sanguine en sept minutes. Tout le monde est capable de faire des alcoolatures de bonne qualité. Il n’y a pas de mystère ni de technique compliquée pour les préparer. La méthode de fabrication des alcoolatures présentée ici est inspirée de la tradition populaire, et se différencie nettement des alcoolatures du commerce vendues en pharmacie ou par des laboratoires de plantes sous le nom de teintures mères, qui répondent à un protocole de fabrication bien précis. Les alcoolatures maison utilisent une méthode empirique, simplifiée, qui n’a pas recours à des ratios et aux calculs scientifiques des préparations des teintures mères. Il n’empêche que leur efficacité est bien réelle.
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Elles nécessitent simplement des plantes de bonne qualité, un alcool de très bonne qualité et un bocal, et se préparent en très peu de temps. L’alcool est un solvant puissant et efficace pour extraire des résines, des cires, la plupart des alcaloïdes ainsi que la plupart des composants des plantes. Les vitamines et minéraux sont extraits aussi, mais en moindre proportion. Comme on ingère peu d’alcoolature à la fois, on aura intérêt à recourir aux infusions ou aux vinaigres à cet effet. Quand on utilise l’alcool, on utilise aussi de l’eau, parce que ces deux substances sont nécessaires pour extraire les différents composants chimiques des plantes. Pour préserver les propriétés et optimiser le processus d’extraction, un alcool titré à 25° est le minimum, le plus efficace cependant est d’utiliser des alcools qui titrent à 50°, 45° étant acceptable. Le calvados jeune, la gnôle, le cognac, la vodka, le gin, le whisky et le rhum conviennent. Toujours utiliser un alcool de grande qualité alimentaire et jamais d’alcool de pharmacie.
L’alcoolature à base de plantes fraîches Il est toujours préférable de faire des alcoolatures avec des plantes fraîches : elles n’en seront que de meilleure qualité et donc plus efficaces. Cueillir les plantes de son choix, trier et ne garder que les plus belles : enlever les parties qui sont abîmées, noircies, mais éviter de laver la plante, sauf si c’est nécessaire (notamment pour en garder les racines). Couper la plante en morceaux, sauf les fleurs. Remplir jusqu’au bord un bocal en verre avec les plantes coupées ; les herbes doivent être légèrement tassées. Recouvrir de l’alcool de son choix et fermer le bocal. Étiqueter avec le nom de la plante, les parties utilisées, l’alcool choisi et la date de fabrication. Le lendemain, ajouter de l’alcool si le niveau a baissé. Laisser macérer pendant six semaines ou plus, en agitant le bocal une fois par semaine au moins, pour activer le processus…
Protection de la peau :
L’ HUILE INFUSÉE Une huile végétale extraite à froid est riche en acides gras et en vitamines. Elle protège la peau de la déshydratation, des agressions et du vieillissement. Les plantes macérées dans de l’huile végétale libèrent leurs principes actifs et apportent des actions spécifiques selon leurs propriétés. Les huiles infusées aux plantes sont de véritables soins pour la peau qui ont fait leurs preuves depuis des millénaires. Elles s’utilisent pour les soins du visage, des cheveux et du corps, et servent de base à la fabrication de baumes et de crèmes. Il est conseillé d’utiliser des huiles qui résistent bien au rancissement, comme l’huile d’olive, l’huile de tournesol, désodorisée de préférence, ou l’huile de pépins de raisin.
Matériel pour faire votre huile infusée de plantes
• Des bocaux préalablement lavés à l’eau chaude savonneuse et stérilisés pendant 10 minutes dans une casserole d’eau bouillante. Il est indispensable de bien sécher les bocaux, car l’eau est facteur de problèmes dans la fabrication de l’huile aux plantes. Passer les bocaux dans un four chaud pendant quelques minutes ou les faire sécher en plein soleil. • Une passoire à thé assez large, une baguette en bois et des étiquettes. • Des plantes de votre choix. Une multitude de plantes se prêtent à la fabrication d’une huile infusée. Les plantes aromatiques sont très adaptées, car l’huile végétale « récupère » les huiles essentielles de la plante et devient légèrement parfumée : romarin, lavande, camomille, rose, graines de fenouil, géranium odorant, menthe, sauge, hysope, achillée millefeuille, aiguilles de printemps des sapins, etc. D’autres plantes médicinales non aromatiques conviennent tout à fait à la macération dans l’huile : calendula, consoude, plantain, pissenlit, millepertuis…
Mode opératoire La meilleure façon de bien capter les propriétés des plantes est de les faire macérer fraîches et à froid dans l’huile. L’heure de la cueillette est importante : attendre que l’eau de la rosée se soit évaporée et éviter de ramasser par temps humide. Récolter les plantes, les examiner et les essuyer délicatement au besoin. En cas de présence d’insectes, les secouer. Les laisser sécher pendant quelques heures. Le calendula et la consoude nécessitent un séchage de 12 heures avant d’être mis en macération dans l’huile, de façon à faire évaporer l’eau
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qu’ils contiennent en grande quantité. Surtout ne pas les laver ! Les broyer légèrement ou les couper au couteau ou aux ciseaux. Remplir le bocal jusqu’au bord, sans tasser. Verser ensuite l’huile végétale jusqu’à ras bord. Utiliser une baguette en bois pour brasser légèrement l’huile afin que les éventuelles poches d’air remontent à la surface. Quand il n’y a plus de bulles, fermer le bocal, l’étiqueter, le ranger dans un placard et attendre ! Contrairement à ce qui se dit souvent, il vaut mieux faire macérer les huiles aux plantes dans l’obscurité, car l’exposition au soleil ou près d’une source de chaleur peut créer une condensation qui générera de l’humidité et sera néfaste à la macération. Une durée minimale de macération de 3 semaines est nécessaire, 6 semaines étant l’idéal. En vérifiant le bocal 2 ou 3 fois par semaine, en brassant avec une baguette en bois, en observant comment se comportent les plantes, vous êtes quasiment assuré d’un résultat parfait ! Pour filtrer, verser l’huile macérée dans une passoire à tamis fin au-dessus d’une casserole propre et sèche. Presser légèrement les plantes pour dégager l’huile chargée de leurs actifs. Jeter le résidu de plantes au compost. Laisser l’huile décanter pendant une nuit afin que l’eau – libérée par les plantes – se dépose au fond de la casserole. Le lendemain, verser l’huile dans un bocal propre et sec en prenant soin de laisser le dépôt d’eau au fond de la casserole. Il est possible aussi de fabriquer son huile aux plantes en suivant une méthode plus rapide ; les plantes libèrent un peu moins d’actifs, mais l’huile obtenue est de belle qualité. Remplir un bocal de plantes, ajouter l’huile et verser le contenu dans une petite casserole au bain-marie ou dans un appareil à bain‑marie comme une chocolatière. Mettre le feu au minimum,
Comment devenir
AUTONOME
Comment devenir autonome
C o mmen t d ev en i r A U T O N O M E
est un hors-série du magazine Kaizen. C’est un véritable manuel, dont la rédaction a été assurée par deux femmes et deux hommes dans l’action depuis plus de vingt ans… Il est jardinier-paysagiste et exerce son activité en observant le fonctionnement des écosystèmes, conseiller et formateur à ses heures perdues. Elle est passionnée de plantes médicinales et d’alimentation vivante et promeut l’herbalisme en France pour se réapproprier les savoirs ancestraux. Il est autoconstructeur et passionné d’habitats écologiques, au point d’avoir créé le magazine La Maison écologique. Elle joue des marmites, classiques ou norvégiennes, et est investie dans la promotion de l’alimentation bio. Leurs textes originaux sont mis en couleurs par une illustratrice œuvrant au Muséum national d’histoire naturelle et par son père, professeur d’illustration.
Manuel destiné aux personnes qui ont vraiment envie de prendre leur vie en main
12 €
ISBN : 9 791 093 452 012
Avertissement : attention, la lecture de ce hors-série rend heureux et donne envie de se mettre en action immédiatement.
50 PLANCHES ILLUSTRÉES sur le jardin, l’énergie, la cuisine et la santé