Kaizen 15 : Faites la fête autrement

Page 1

NUMÉRO 15 JUILLET - AOÛT 2014

CHANGER LE MONDE PAS À PAS

ACHETONS MIEUX,

ACHETONS GROUPÉ

LE BURN-OUT,

BRÛLER POUR REVIVRE ?

LE BON PLAN

LE GERS

DOSSIER

FAITES LA FÊTE AUTREMENT BE/LUX 6,50 € IT/ESP/GR/PORT. CONT. 6,90 € DE 7,50 € CANADA 9,75 $C


SOMMAIRE

15 juillet-août 2014 05 Édito 07 Ils sont Kaizen

40 Portfolio Théotime Collin: Un monde fourmidable !

63 La voie du Kaizen Christophe André : Ne rien faire

64 Portraits

08 Le journal des actus positives

Éconavigateurs

10 Si on le faisait

Le Gers

66 Le bon plan

Achetons mieux, achetons groupé

14 Ensemble on va plus loin Vita'Rue à Mulhouse : Je bénévole, tu bénévoles...

18 Vent du Sud Burkina Faso : la relève agroécologique pour l’autonomie des paysans

20 Désenfumage Peut-on inverser la courbe du chômage ?

70 Do It Yourself 50 Notre santé, notre planète Burn-out, le feu qui redonne sens à la vie

56 Infographie

Je recycle, je décore

74 Sauvage & délicieux Le thym sauvage

La campagne française à vélo

58 Créateurs de culture Une toile sous les étoiles

24

81 Les rendez-vous Kaizen

Dossier

83 Le sourire d’Yvan

Faites la fête autrement !

88 Colibris reporters 90 Le regard de Pierre Rabhi | juillet - août 2014 |

3


Éditeur SARL EKO LIBRIS au capital de 59 000 €. 95, rue du Faubourg-Saint-Antoine 75011 Paris www.kaizen-magazine.com Magazine bimestriel numéro 15 Juillet-août 2014 Imprimé sur papier recyclé blanchi sans chlore Directeur de la publication Patrick Oudin Directeur de la rédaction Cyril Dion Rédacteur en chef Pascal Greboval Directeur Artistique Yvan Saint-Jours Secrétaire de rédaction Diane Routex Contact contact@kaizen-magazine.fr Abonnements abonnement@kaizen-magazine.fr Comptabilité et administration administration@kaizen-magazine.fr Rédaction redaction@kaizen-magazine.fr Couverture Julien Wieser Maquette et mise en page Schuller-Graphic SIREN : 539 732 990 APE : 5814Z Commission paritaire : 0317 k 92284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières les vallées Régie de Publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse, Sandrine Novarino Tél. 05 63 94 15 50 Distribution Presstalis Distribution export : Export Press Vente aux N° pour les diffuseurs : Alexandre Campi Groupe HOMMELL Tél. 01 47 11 20 12 diffusion-hommell@sfep.fr Aucun texte et illustration ne peuvent être reproduits sans autorisation du magazine. Merci. En supplément à ce numéro « 11 magazines pour voir et vivre le monde autrement » (abonnés uniquement).

ÉDITO FAIRE LA FÊTE POUR CHANGER LE MONDE

KAIZEN « Changer le monde pas à pas »

Pour ce numéro d’été, nous parlons fête dans Kaizen ! Non seulement parce que nous aimons la fantaisie, mais aussi et surtout parce que, plus que jamais, nous avons besoin de réinventer les moyens de nous rassembler, de faire corps. Nous croyons que, loin d’être seulement un défouloir, la fête peut jouer un rôle essentiel dans l’émergence d’un nouveau monde. Dans notre société rongée par une forme de malêtre et de maltraitance, le philosophe Patrick Viveret lançait, il y a quelques années, le projet NANOUB (« Nous Allons NOUs faire du Bien »), pariant que seule l’émergence d’une convivialité planétaire, d’une société du « bien vivre » serait à même de contrer les nombreux phénomènes de compensation qui nous conduisent à détruire biodiversité, cultures, tissu social… Alors que les nationalismes s’exacerbent en France et en Europe, que notre modèle démocratique arrive à bout de souffle, trouver de nouvelles manières d’être et de faire ensemble est un défi qui n’a jamais eu autant d’importance. Bel été à tous ! Cyril Dion Directeur de la rédaction

Kaizen késaco ? Kaizen est un mot japonais signifiant littéralement « changement bon ». Mais c’est également une méthode : celle du changement par les petits pas. La perspective de changer brutalement, de passer du tout au tout, réveille nos peurs et attise nos résistances. Commencer par un petit pas, prendre courage, en faire un deuxième puis toute une multitude, chaque jour, avec régularité, peut nous conduire aux plus grandes transformations. Cela s’est déjà vu dans l’histoire et c’est ce que nous espérons, à nouveau.

Erratum : La photo publiée page 10 dans le kaizen 14 est à mettre au crédit de Jan Michael | JUILLET - AOÛT 2014 |

5


achetons

mieux, achetons

groupé

TexTe DOMINIQUE FIRBAL PHOTOs PASCAL GREBOVAL

10

| juillet - août 2014 |


et si on le faisait ?

S’approvisionner collectivement auprès de producteurs locaux, sans contrainte et à un prix juste, tel est l’objectif des groupements d’achats. Reportage au cœur des ces rassemblements de consommacteurs !

Le jour de la livraison, des adhérents pèsent les marchandises et les répartissent.

e

n 2010, le recensement agricole montre qu'un producteur sur cinq vend ses produits en circuit court 1, notamment grâce aux AMAP ou par le biais des plates-formes Internet. À ces systèmes d’approvisionnement s'ajoutent les groupements d'achats qui fleurissent un peu partout dans l'hexagone. Créés à l'échelle d'un quartier ou d'un village par quelques personnes désireuses de consommer local – ou équitable quand il s'agit de denrées provenant de l'étranger –, ils permettent de s'épanouir socialement et de se réapproprier sa consommation alimentaire, vestimentaire ou énergétique. Ces systèmes de vente s'établissent autant en zones rurales qu’urbaines. Depuis octobre 2012, à Paris (75018), UnisVersLocal propose à ses adhérents une livraison de produits frais

tous les 15 jours, ainsi qu’une boutique autogérée de produits secs accessible cinq jours par semaine. « L'alimentaire a beaucoup d'importance pour moi et j'avais envie de créer un système de distribution en circuit court sans avoir à gérer beaucoup de stocks », avoue Laure, initiatrice d'UnisVersLocal. Quand elle constate que les platesformes de vente en ligne comptent deux intermédiaires entre le producteur et le consommateur – ce qui se

de qualité et sans aucun intermédiaire. Nous avons réuni une trentaine d'intéressés puis nous avons démarré. »

traduit par des prix de vente augmentés d'environ 15 % –, cela lui donne envie de faire bouger les choses. « Mes amis du quartier et moi étions d'accord pour monter un système qui nous permette de soutenir des productions paysannes

s'approvisionner directement auprès des petits producteurs ! Bruno Liehn, producteur de pommes et membre du Collectif Percheron témoigne des avantages : « Je suis assez regardant sur la distribution. On peut très vite se

DES PRODUCtEURS LOCAUx Côté producteurs, UnisVersLocal fait confiance au Collectif Percheron, situé à 170 km de Paris. Ce groupement de 18 paysans, éleveurs et fromagers fait figure d'intermédiaire mais, en région parisienne, ce n'est pas si simple de

─ S'épanouir socialement et se réapproprier sa consommation. ─

| juillet - août 2014 |

11


Je bénévole, tu bénévoles…

On change ensemble TexTe VIRGINIE PINCET phoTos CaThERINE PERIN

Vita'Rue est un festival dont l’objet est moins de faire des choses que de les faire ensemble, le tout dans la gratuité la plus totale ! 14

| juillet - août 2014 |


Chacun peut proposer un atelier ou participer à une activité. C’est gratuit, libre et sans inscription.

l

e dimanche matin, à mulhouse, chacun est invité à participer à « sekouévobasket ». selon les jours, 15 à 50 personnes se retrouvent à la maison des berges pour une séance de course à pied. c’est parti pour une heure de sueur et de convivialité. les plus forts cavalent devant, les déterminés gardent le cap au milieu et les mal réveillés s’essoufflent carrément derrière. mais quand les plus athlétiques ont fini leur tour, ils reviennent sur leurs pas chercher et encourager la queue du peloton. voilà un résumé de l’esprit de vita’Rue, mélange de sport et de lien social. « nous nous inspirons de la définition de l’oms : “la

─ La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social. ─

santé est un état de complet bien-être physique, mental et social », explique stéphane, l'un des cofondateurs. créé il y six ans par l’élan sportif, association spécialisée dans l’accompagnement des personnes vers le bien-être à travers des activités physiques, « sekouévobasket » est l’un des ateliers de vita’Rue. cette manifestation propose, chaque dimanche entre mai et juillet, pendant dix dimanches, des ateliers auxquels le public peut participer gratuitement, sans inscription ni obligation d’aucune sorte : ateliers d’écriture, de poterie, de tricot, mais aussi

yoga, qi gong, musique, jeux... en général, ces animations ont lieu le matin. vers midi, les participants peuvent déguster différents plats préparés sur place ; la journée se prolonge ensuite avec des spectacles au bord de l'Ill autour de la maison des berges. « J’ai confié la rénovation de cette maison à vita'Rue avec pour seule consigne d’en faire quelque chose », explique Jean Rottner, maire de la ville. « avec son petit grain de folie, le collectif en a fait un lieu assez magique. Qu'il y ait 600 personnes présentes certains dimanches ou seulement une vingtaine, c’est une | juillet - août 2014 |

15


la ReLÈVe AGROÉCOLOGIQUE pour l’autoNoMie DeS PaYSaNS TEXTE CLaire eGGermoNT PHOTOS miKaËL DouLsoN-aLBerCa

Associations de cultures en agroécologie.

Trente ans après la formation des premiers élèves de Pierre Rabhi au Burkina Faso, la relève agroécologique se déploie en Afrique de l’Ouest. L’APAD (Association pour la Promotion de l’Agriculture Durable) en fait partie : en 2013, elle a accompagné plus de 500 paysans vers la reconquête de leur autonomie.

L

es grandes sécheresses des années 1970 ont causé l’effondrement des rendements céréaliers en Afrique de l’Ouest. Au Burkina Faso, dans la région du Sanguié, les populations se sont alors tournées vers le maraîchage, à la fois comme complément vivrier et comme source de revenus. Mais l’essor de ces cultures s’est bâti sur la chimie, entraînant une dégradation accrue des terres et une malnutrition grandissante. En 2011, Sam Tokoro Bacye, habitant de la région, se trouve devant un choix à faire : poursuivre le concours d’instituteur ou rejoindre une formation d’animateurs en agroécologie. Il

18

| juillet - août 2014 |

opte pour cette seconde option et part approfondir ses compétences auprès de praticiens expérimentés du Mali et du Burkina Faso. « J’avais reçu une première initiation à l’agroécologie en 2008 par Sylvain Korogo, l’un des premiers élèves de Pierre Rabhi. Cela m’avait tout de suite passionné. Au fil des ans, c’est devenu une vocation pour moi de démontrer que l’on peut produire sans détruire, manger sans tomber malade et répondre à nos besoins vitaux sans dépendre de personne. » En 2012, Sam décide ainsi de se mobiliser dans sa région. Avec l’aide d’amis paysans, il crée dans leur village de Toega l’APAD. « Dans le temps, nos parents

savaient très bien cultiver sans chimie. Aujourd’hui, quand le paysan n’a pas l’argent pour acheter son sac d’engrais, il ne va même pas au champ. La chimie est partout et tout le pays en est dépendant. La nuit, les odeurs de pesticides sont parfois si fortes qu’elles empêchent de dormir ! »

DÉmoNTrer pour CoNVaiNCre En avril 2013, les paysans du village lèguent à l’APAD un terrain sur lequel l'association va aménager une ferme-école. Cet hectare de terre pauvre et sablonneuse, dégradée par


TEXTE CYRIL DION / DESSINS JULIE GRAUX

20

| juillet - août 2014 |

Après le choc pétrolier de 1973 et depuis les années 1980, l’emploi est la préoccupation numéro un des Français, les effectifs du chômage passant de 1 million en 1976 à 2 millions en 1982. Les gouvernements successifs disent en faire leur priorité absolue, et pourtant, malgré leurs promesses et leurs efforts, il semble impossible « d’inverser la courbe du chômage ». Pourquoi ?


24

| juillet - aoรปt 2014 |


RÉALISÉ PAR stéPHane Perraud

La fête. Voilà un sujet léger, idéal pour l’été. Maintenant, regardons-le de plus près. La fête est un élément essentiel du vivre ensemble. Elle permet de décrocher du quotidien, mais aussi de créer du lien. On retrouve en elle des valeurs de partage et de convivialité. Si l’on évaluait la richesse des pays en fonction de leur BNB (bonheur national brut) et non de leur PNB (produit national brut) – comme le fait le Bhoutan –, la fête occuperait sans nul doute une place de choix dans les critères. Si elle a longtemps rythmé les saisons, les travaux collectifs et les grandes étapes de la vie, la fête a parfois tendance à devenir plus commerciale. C’est un loisir qu’on consomme comme un produit et qui perd de son sens. Heureusement, il est toujours possible de faire la fête autrement. De repas de quartier en carnavals, de bals en festivals, de spectacles à la ferme en concerts en appartement, partons à la rencontre de ceux pour qui la fête est une raison de vivre. Et organisons, nous aussi, des événements participatifs, intergénérationnels et joyeux. Dans notre société où l’argent est devenu une fin plutôt qu’un moyen, la fête ne serait-elle pas une autre façon de changer de paradigme ? | juillet - août 2014 |

25

© Pascal Greboval

Le BoN PLAN

Dossier


LA rue, lieu de

fete

© Stephane Perraud

un bal folk au cœur de lyon

Nul besoin d’attendre une fête officielle pour s’amuser. Bals sauvages, trocs de vêtements ou repas de quartier sont autant de moments simples et festifs propices au partage. Un maître-mot : autonomie. 30

| juillet - août 2014 |


Transmettre la fête

PeTiT CArNAVALeUX deviendra À Dunkerque, le carnaval est une affaire de famille. Derrière le chahut se cache des valeurs qui se transmettent de génération en génération.

G

aël a dix ans. Yann douze. Et presque autant de carnavals à leur actif. Ces deux petits Dunkerquois ont commencé à défiler dans la poussette, puis sur les épaules de leurs parents, avant de grossir les rangs du carnaval de leur école. Progression logique, c’est désormais au Bal enfantin qu’ils apprennent à « faire la bande » comme les grands, c’est-à-dire à défiler au son de la musique. L’événement réunit chaque année, après Mardi gras, plus de 5 000 enfants au Kursaal, le Palais des congrès de la ville. Indiens, pirates, princesses et super-héros dansent et chantent au milieu des serpentins et des confettis, accompagnés de leurs parents. « Pour nous qui sommes Dunkerquois pure souche, c’est très émouvant de partager ce moment avec eux », témoignent Nathalie et Lionel Quenson, les parents des deux enfants. « Car le carnaval est une affaire de famille. On a transmis à Yann et à Gaël le goût de la fête bien sûr, mais aussi toutes les valeurs qui vont avec : la camaraderie, la solidarité, l’esprit d’équipe, la générosité et le respect

© Ville de Dunkerque

34

| juillet - août 2014 |

des traditions. Derrière cette apparente pagaille, il y a beaucoup de codes et de rites. On est là pour s’amuser, certes, mais pas n’importe comment ! »

Programme Pédagogique

Ici, le carnaval est pris très au sérieux. La preuve, il est même enseigné à l’école ! Dans tout Dunkerque, les enseignants du primaire reviennent sur cette tradition vieille de trois siècles. Selon la légende, le carnaval serait l’héritier des fêtes données par les armateurs avant le départ des marins en Islande pour six mois de pêche. Un périple dont certains ne revenaient

liers de carnavaleux derrière eux qui poussent et qui sautent. Spectaculaire et technique. Figurer en première ligne reste le graal de nombreux carnavaleux, mais cela se mérite. On commence généralement derrière avant de remonter les lignes avec l’aval de ses pairs. « C’est la raison pour laquelle on insiste beaucoup sur l’apprentissages des chants. La bande, ça s’écoute. Quand les fifres jouent par exemple, on marche, on ne pousse pas comme un fou. »

tradition d’HosPitalité

Véritable creuset de la vie dunker-

─ La camaraderie, la solidarité, l’esprit d’équipe, la générosité. ─ pas. Les enfants apprennent les chansons – dont beaucoup, trop grivoises, sont réécrites pour l’occasion – et les écoles organisent leur propre défilé intra-muros. « On revient sur la portée historique de l’événement, son fonctionnement et son état d’esprit », explique Émile Hibon, qui compose des chants pour les plus jeunes. « Pour qu’il perdure et ne devienne pas un événement touristique ou commercial, on se doit de transmettre les règles et le savoir-faire. » Le carnaval peut être très physique, notamment lors du chahut : les cuivres entonnent une chanson entraînante et les premières lignes se bloquent pour retenir les mil-

quoise, le carnaval est le moment où les barrières sociales tombent. Derrière leur maquillage, ouvriers et cadres dansent et chantent ensemble dans la rue. Ce moment de communion intense tisse des liens indéfectibles. L’une des grandes traditions d’hospitalité consiste à « faire chapelle », c’est-à-dire à ouvrir les portes de sa maison et à offrir aux passants à boire et à manger ! « C’est un moment de partage désintéressé. Bien sûr, on invite en priorité ses amis, mais s’ils sont accompagnés de cinq ou six personnes qu’on ne connaît pas, tout le monde entre ! On peut avoir 200 invités qui boivent, chantent, dansent en même temps dans nos 120 m2 », témoigne


40

| juillet - aoรปt 2014 |


POrtfOliO

uN

Monde FOURMIDABLE PORTFOLIO THÉOTIME COLIN

Les fourmis existent depuis 140 à 168 millions d’années. Elles représentent un ensemble de plusieurs millions de milliards d’individus répartis en plus de 12 000 espèces ! Théotime Colin nous ouvre les portes de la fourmilière…

| juillet - août 2014 |

41


t u o n r Bu

feu

quand le

redonne sens à la

vie

Traduisible métaphoriquement par : « incendie de la personne », le burn-out est devenu le mal professionnel de la société postmoderne. Douloureux, ce syndrome d’épuisement peut toutefois devenir le lit d’une renaissance personnelle, en accord avec ses paysages intérieurs. IntervIew de Pascal chabot, PhilosoPhe et auteur de Global burn-out

50

| juillet - août 2014 |

1

par Marie Fuks


Notre saNté, Notre plaNète © jérômine Derigny

Marie Fuks : en tant que philosophe, comment en êtes-vous venu à vous intéresser au burn-out ? Pascal chabot : À l’époque, je travaillais sur la question : « Comment parler de l’âme aujourd’hui ? », et j’ai dû me rendre à l’évidence : le burn-out, dans de nombreux environnements professionnels, est l’un des destins contemporains de l’âme. J’ai cherché à comprendre pourquoi. en outre, il m’est apparu qu’au-delà de leurs impacts positifs sur les mentalités, les technosciences et le techno-capitalisme avaient, entre autres effets nocifs, celui de faire du psychisme humain le réceptacle d’un véritable épuisement. Le burn-out pose la question éminemment philosophique de la manière dont le travail façonne le monde humain.

Voyez-vous un lien direct entre le développement du burn-out et la révolution managériale des années 1980 dont parle le sociologue clinicien Vincent de Gaulejac ? Oui, indiscutablement. Cette révolution inspirée des théories de Milton Friedman, le père du libéralisme économique, s’est opérée lorsque le capitalisme financier « dirigé » par la volonté des actionnaires a supplanté le capitalisme de production. L’humain est devenu une variable d’ajustement financière soumise au management par objectifs, à l’évolution au mérite, à l’organisation par projet et à l’évaluation continue. Même s’il n’y a pas de responsabilité unique, ce modèle de management, en responsabilisant l’individu à

l’extrême et en prônant la culture du travail comme vertu suprême, a été d’une grande violence pour certains. Si le travail est une dimension centrale de l’existence humaine, il n’est pas seul à lui donner du sens. au début des années 1960, on nous avait prédit l'avènement d'une « civilisation des loisirs » qui libérerait les individus des contraintes matérielles grâce aux progrès technologiques. Or, c’est le contraire qui s’est produit. La révolution technologique et managériale qui s’est opérée a placé l’individu dans l’obligation de repousser sans cesse ses limites pour atteindre des objectifs toujours plus ambitieux, jusqu’à ce que le l’excès de stress, le diktat de la rentabilité et la perte de sens finissent par le consumer de l’intérieur. Le burn-out est le révélateur des aspects sombres de l’organisation contemporaine du | juillet - août 2014 |

51


Une

e l i o T

sous les

TEXTE cArole testA

58

| juillet - aoรปt 2014 |


L

oin de la simple sortie cinéma, c'est à une expérience originale et multiple que vous invite l'équipe de Cinéma solaire. En ville ou à la campagne, les séances se déroulent toujours en plein air. « J'ai envie de sortir des habitudes de la salle de cinéma, confie Thomas Virat, fondateur du projet. Pendant la projection, les gens réagissent, discutent ; les enfants jouent à côté... C'est vivant ! » Ce n'est pas que l'offre cinématographique ou que la possibilité d'accéder à des salles obscures soient insuffisantes mais, selon Thomas, « beaucoup de petites salles […] ont fermé leurs portes ces dernières années au profit de complexes industriels » qui privilégient les films à gros budget. Par conséquent, les documentaires et les fictions suscitant la réflexion ont une diffusion restreinte. Cinéma solaire vient donc répondre à une demande alternative en matière de découverte culturelle et de lien social. Les cinémas itinérants sont nombreux en France, mais celui‑ci se démarque par sa dimension nationale, son utilisation de l'énergie photovoltaïque, ses prix libres et, surtout, par sa sélection de films non « commerciaux ». de notre-dAMe-des-lAndes À nu Pour lA PlAnÈte

Thomas a beaucoup baroudé avant de créer, en 2013, Cinéma solaire. L'association est ancrée dans le Lot et en Dordogne, mais ses membres sont disséminés dans toute la France. Cette équipe de huit personnes âgées de 25 à 65 ans réunit professionnels du cinéma et simples passionnés : Valentin – le frère de Thomas – et Louise animent la crêperie bio qui accompagne les projections, tandis que Lydia, Charlotte, Juliette, Annie et Thomas s'occupent des aspects cinématographiques ; Valentin Walker, photographe, light painter et DJ, enrichit les soirées de projections de photographies et de concerts. La première action de Cinéma solaire a eu lieu en avril 2013 sur la ZAD (Zone À Défendre) de Notre‑Dame‑des‑Landes. Thomas et son ami Arnaud soutiennent alors les opposants au projet d'aéroport. Ils diffusent gratuitement des films, notamment ceux tournés par les militants eux‑mêmes. Ils font ensuite halte à Angoulême, où ils partagent leur programmation avec un collectif de cinéastes attachés à la diffusion de films libres de droit. À Concots (Lot), ils sont sollicités par l'association Nu pour la planète, qui souhaite « sensibiliser à l'écologie par le nu, indique Anne B., co‑fondatrice. Notre corps est une arme, c'est même tout ce que nous avons face aux puissants. » Photographies, dessins, photo + ci-contre : © anne, nu pour la planète

| juillet - août 2014 |

59

Créateurs de Culture

À la nuit tombée, les spectateurs s'installent sur un tapis ou sur des chaises pliantes devant un grand écran alimenté par des panneaux photovoltaïques. Cinéma solaire, ce sont des projections itinérantes et engagées qui ont lieu, non pas dans les salles obscures, mais sur les places publiques, en forêt ou sur la plage.


PAYS

des mousquetaires

verts

TEXTE ET PHOTOS PaSCal GreBoVal

En choisissant le Gers, terre d'origine de l'impétueux d'Artagnan, pour décor de vacances, vous entrez dans un territoire ayant l’une des plus faibles densités en France : moins de 30 habitants par kilomètre carré. De quoi vous assurer un peu de tranquillité cette été. Visite au sud de la route nationale 124.

66

| juillet - août 2014 |


D.I.Y fais-le toi-même TEXTE ANNE-SOPHIE NOVEL PHOTOS JÉRÔMINE DERIGNY

70

| juillet - août 2014 |


Cuisine SAuVAGE &DÉLiCieuX !

Le Thym

Sauvage

… ou la Méditerranée dans le panier !

Plante cultivée et compagne de nos jardins, elle colonise, à l'état sauvage, la garrigue. Pleins feux sur une essentielle culinaire et médicinale. TEXTE ET PHOTOS linda louis 74

| juillet - août 2014 |


L'envie de ramasser un petit bouquet se fait ressentir et plein de recettes se mettent à nous trotter dans la tête… Avant cela, munissez-vous d'un petit canif car le thym sauvage, sous-arbrisseau ligneux, ne se laisse pas cueillir aussi facilement. En coupant net ses tiges boisées, vous éviterez l'arrachement qui nuit clairement à la plante. La cueillette de la « farigoule » dans les garrigues fait partie d'un savoir-faire traditionnel qui perdure encore, mais différemment. Dans les années 1960, on évaluait les quantités ramassées à l'aide d'un sac en toile porté en bandoulière (appelé boudole, bourole, bouraine…), correspondant à environ 15 kg de thym frais. On glanait aussi les feuilles après les vendanges, quand la plante offre une belle repousse (plus de poids, donc plus de rentabilité pour ces populations souvent pauvres). Aujourd'hui, la cueillette est de plus en plus pratiquée à l'aide de seaux (moins de pénibilité, moins d'oxydation de la plante) et à la floraison (printemps-début de l'été) pour la production d'huiles essentielles. L'autre différence, c'est la diminution de l'aire de répartition du thym sauvage, menacée par les surfaces urbaines qui ne cessent, elles, de s'étendre. Même si son usage est avant tout culinaire, le thym fait aujourd'hui encore partie intégrante de la pharmacopée méditerranéenne. Beaucoup de familles provençales connaissent et mettent en application ses vertus médicinales, sous forme de tisane par exemple. Le développement des huiles essentielles et l'engouement du grand public pour ces produits naturels et puissants ont permis de pérenniser la récolte du thym sauvage dans le maquis et, espérons-le, sa préservation.

Merci à Guillaume Bouguet, auteur du livre Le Thym et le chirurgien (éditions du Rocher, 2013), ingénieur en écologie et gestion de la biodiversité et président de Flore en Thym,

entreprise de cueillette et vente de plantes aromatiques et médicinales.

ProPriétés médicinales Pour l'usage médicinal, on récolte le thym au moment de la floraison (tiges et fleurs). Si vous optez pour les huiles essentielles, plus besoin de se poser la question. De manière générale, le thym est recommandé pour les personnes affaiblies, convalescentes ou âgées ; il agit sur de nombreuses infections respiratoires, intestinales, cutanées, et tonifie l'organisme. • tisane (1 c. à c. de feuilles sèches pour 200 à 250 ml d'eau à 90 °C, 3 fois par jour) : digestive, antispasmodique, expectorante, pour la toux, le rhume, la grippe. • miel de thym (1 c. à c. diluée dans 1 c. à s. de jus de citron, en gargarisme) : angine, toux, inflammations buccales.

identification de thymus vulgaris l. (lamiacées) • sous-arbrisseau vert blanchâtre à grisâtre, de 10 cm à 40 cm de hauteur, comportant des tiges ligneuses, dressées, tortueuses, formant un petit buisson dense et aromatique. • Feuilles très petites (2 mm à 5 mm de longueur), lancéolées (allongées et pointues) ou linéaires (allongées) et obtuses (à sommet arrondi). • Fleurs blanches à rosées, réunies au sommet des tiges sous forme de glomérules (sortes de « boules de fleurs ») ou d'épis, très odorantes, mellifères. • Habitat : dans les garrigues, les sols caillouteux, rocailleux, calcaires, mais aussi en moyenne montagne (pas au-delà de 1 500 m), dans les vallons les plus ensoleillés. • récolte des jeunes branches fleuries (d'avril à juillet) ou des repousses (octobre). confusion possible avec des variétés de thym cultivées au jardin et avec le thym serpolet (thymus serpyllum) qui possède des branches plus flexibles, non ligneuses, tapissantes.

| juillet - août 2014 |

75

Cuisine

C

'est toujours une belle découverte lorsque l'on arpente pour la première fois au printemps les collines du Sud de la France. Le soleil déjà, pénétrant et réconfortant. D'instinct, on ferme les yeux pour s'imprégner de ses rayons, bercé par l'hypnotique chant des cigales. Soudainement, un parfum enivrant et reconnaissable entre tous nous tire de ce songe… celui du thym sauvage. Sous le ciel azuré et dans les vallons les plus ensoleillés, il s'étire à perte de vue, formant souvent au loin des taches circulaires teintées de gris-vert et de mauve clair.


Agenda Kaizen 15 – juillet/août 2014

LES RENDEZ-VOUS Juillet 1 juillet : Maison Paris Nature – Parc floral de Paris – Paris 12 Rencontre avec les auteurs de Débuter en ornithologie, les oiseaux d’Île-de-France et Sur la piste des reptiles et des amphibiens www.graine-idf.org er

3 juillet : La Malassise – Longuenesse (62) Conférence : AquaPRIS Event : l’or bleu, une ressource stratégique. Préserver la ressource en eau est un enjeu tout aussi économique qu'environnemental. 03 20 63 77 73 4 au 6 juillet : Mornant (69) Festival Festbouc www.festbouc.com 4 au 6 juillet : Chamonix (74) Chamonix Yoga Festival www.chamonixyogafestival.com 4 au 6 juillet : Parc de la Tête d’Or – Lyon (69) Dialogues en humanité : « Pour réussir le XXe siècle... construisons les alternatives à la peur, à la violence et à la guerre. » www.dialoguesenhumanite.org 04 26 99 38 72 4 au 12 juillet : Le Festiva – Foix (09) Festival international de cinéma Résistances. www.festival-resistances.fr 5 au 6 juillet : Méaudre (38) 14e édition : foire bio « Grand festival du bio sur le Vercors, les 5 sens ». 04 76 95 20 68 5 juillet au 29 août : Sallanches (74) Stages naturalistes du Centre de la Nature Montagnarde. www.centrenaturemontagnarde.org 04 50 58 32 13 8 juillet : Centre social de l’Orgère – Rives (38) Journée d’échange : « Concilier biodiversité et espaces à vocation économiques ? » Association Le Pic Vert. Contact : Martial Botton 04 76 91 34 33 33 11 au 13 juillet : Tours (37) Kaizen partenaire et présent Festival Terre du Son www.terresduson.com/2014/

11 au 13 juillet : Font-Romeu (66) 5e marché Bio Zen, artisanat et écologie saine. www.marchebiozen.fr 04 68 30 97 60 13 juillet : Mende (48) Foire Bio « La cardabelle » - Rencontre écologique et foire bio. www.foirebiomende.over-blog.com 13 juillet au 19 juillet : Terre du Ciel – Bruailles (71) Rencontre « Du travail à l’œuvre, s’épanouir dans son action. » www. terre-du-ciel.org 03 85 60 40 33 20 au 26 juillet : Les Amanins – La Rochesur-Grâne (26) Association EPHATA - Pratique de l'écologie intérieure : corps, âme, esprit. www. lesamanins.com 04 75 43 75 05 26 juillet au 3 août : École de la nature et des Savoirs – Val Maravel ( 26) 9 jours d’immersion et de pratique de la nature, autour de la construction d’une « nuhé » inspirée des temples traditionnels Kogis. www.ecolenaturesavoirs.com 27 juillet au 1er août : La Lune en bouche – Die (26) Un stage Kaizen en familles. www.kaizen-magazine.com 01 56 03 54 71 27 juillet au 2 août : Terre du ciel – Bruailles (71) Rencontre : « Parents-enfants : grandir ensemble. Quelle éducation ? » Avec P-Y Albrecht, D. André, P. Nicolas, I. Peloux, M-L Hairie, K. Mazevet. www.terre-du-ciel.org 03 85 60 40 33

AOÛT 2 au 28 août : Ver-sur-Mer (14) Exposition « Objectif Mare : de l’autre côté du miroir ». Photographies de François Nimar.

Passons à l’acte 30 juin au 4 juillet : La Lune en bouche – Die (26) Un stage Kaizen cueillette et cuisine sauvage. www.kaizen-magazine.com 01 56 03 54 71 30 juin au 6 juillet : Les Amanins – La Roche-sur-Grâne (26) Stage « créer son éco-projet ». www.lesamanins.com 04 75 43 75 05 13 août : Saint-Laurent-de-Lévézou (12) Stage fabrication de cosmétiques. Réalisation de quelques cosmétiques à base de plantes que vous ramènerez chez vous. www.naturellementsimples.com 06 80 89 33 01

3 août : Lafrançaise (82) 21e foire bio et artisanale www.lafrancaise-tourisme.fr 05 63 65 91 10 9 au 10 août : ferme d’alpage Le Gros Nondance – Chapelle des Bois (25) 13e Week-end Bio et Environnement www.fete.bio.free.fr 03 81 69 29 75 10 août : Beaulieu-sur-Dordogne (19) Foire bio www.agrobio19.com 16 au 17 août : Correns (83) Fête de la bio et du Naturel 04 94 37 21 31 – www.correns.fr 17 au 23 août : Terre du ciel- Bruailles (71) Rencontre : « L’art de soigner, une approche holistique du Vivant », avec notamment Françoise Wilhelmi de Toledo. www.terre-du-ciel.org 03 85 60 40 33 23 au 24 août : Condom (32) Salon « BioGascogne » Convergence écologique Condom Ténarèze contact@biogascogne.fr 05 62 28 66 65 - 06 10 93 13 74 31 août : Écomusée du pays de Rennes – Rennes (35) Animations : « Tout savoir sur le miel et l’abeille ». www.ecomusee-rennes-metropole.fr 02 99 51 38 15 | JUILLET - AOÛT 2014 |

81


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.