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mai-juin 2018
DOSSIER
MIGRANTS couv CHANGER DE REGARD, CHANGER D’ACCUEIL
GUNTER PAULI
JE VAIS BIEN
LES BONNES ADRESSES
ÉCONOMIE BLEUE ESCALADER POUR POUR PLANÈTE VERTE SE RÉÉQUILIBRER CAEN
Belgique 7,20 € Suisse 10,40 CHF
Éditeur SARL EKO LIBRIS au capital de 142 720 € Siège social 19, rue Martel - 75010 Paris info@kaizen-magazine.fr www.kaizen-magazine.com
Édito
Magazine bimestriel numéro 38 Mai-juin 2018 Imprimé sur papier certifié PEFC Fondateurs Cyril Dion, Yvan Saint-Jours, Patrick Baldassari et Pascal Greboval Directeur de la publication Patrick Oudin Directrice d’EKO LIBRIS Françoise Vernet
L’hôte qui est en moi édito
Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (Imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières-les-Vallées
Accueillir, héberger des migrants, j’y pense. Mais à cette heure, je ne suis pas passé à l’acte, je n’ai pas encore ouvert ma porte. Je me trouve plein de bonnes excuses : pas assez disponible, pas assez de place, pas assez proche des administrations dont ils auront besoin… Plein de fausses excuses. À vrai dire, c’est surtout la peur qui annihile mes fragiles désirs d’hospitalité. Pourtant des personnes qui accueillent des migrants, j’en connais. Et tout se passe bien. Ce sont de beaux échanges, de belles rencontres. Dans notre dossier [lire page 34], dans d’autres médias, les mêmes témoignages de moments de fraternité. Alors, de quoi ai-je peur ? D’être condamné pour délit de solidarité ? Non ! Ce serait d’ailleurs plutôt un moteur ! D’être mis en danger ? Pas plus ! Si les migrants quittent la barbarie, ce n’est pas pour en retrouver une autre dans nos jungles, nos camps, nos centres de rétention… Si je suis honnête, c’est une forme d’altérité qui m’effraie. Rencontrer l’autre chez lui, dans son pays, parfois en France, me nourrit, m’enrichit. En Inde, au Laos, au Nicaragua, etc., « l’étranger » m’a fait évoluer, changer de point de vue. Mais j’ai peur de l’accueillir chez moi, de le faire pénétrer dans ma bulle proxémique. Ma compassion ne serait-elle qu’intellectuelle ? J’en découvre ici les limites. Ne suis-je que la pâle copie de Meursault dans L’Étranger ? Au bout de la chaîne, je laisse ces migrants attirés par le mirage de nos métropoles se briser les ailes sur les barbelés de mon détachement. La frontière est ténue entre hôte et hostile. D’aucuns diront qu’il ne sert à rien de culpabiliser. Que chacun fait en fonction de son histoire, de ses moyens, etc. Justement, regardons l’Histoire. Sans les migrants, héros anonymes, que serions-nous ? que serais-je ? Alors, que faire ? Relire ces leçons d’Histoire pour éviter d’en donner. Faire un premier pas pour aider simplement. Et regarder avec admiration ceux qui ouvrent leur porte, leur cœur. On ne change qu’en étant inspiré.
SIRET : 539 732 990 000 38 • APE : 5814Z Commission paritaire : 0322 K 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution
Pascal Greboval Rédacteur en chef
Rédacteur en chef Pascal Greboval Rédactrice en chef adjointe Sabah Rahmani Secrétaires de rédaction Diane Routex Emmanuelle Painvin Journaliste multimédia Maëlys Vésir Abonnements et commandes Camille Gaudy abonnement@kaizen-magazine.fr Tél. 01 56 03 54 71 (de 14 h à 18 h) 19, rue Martel - 75010 Paris Comptabilité Patricia Lecardonnel Attachée commerciale Cyrielle Bulgheroni Direction artistique, maquette et mise en pages • hobo@hobo.paris hobo.studio Tél. 06 12 17 87 33 Illustration de couverture Lison Godet - Hobo Prépresse Schuller-Graphic 18, rue de l’Artisanat 14500 Vire Tél. 02 31 66 29 29
Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. 05 63 94 15 50 Distribution Presstalis Vente au n° pour les diffuseurs Groupe HOMMELL • Tél. 01 47 11 20 12 diffusion-hommell@sfep.fr Aucun texte ni aucune illustration ne peut être reproduit-e sans l’autorisation du magazine. Merci.
KAIZEN MONTRE L’EXEMPLE Cher-e abonné-e, bonne nouvelle ! Le film de routage de Kaizen a changé. Il est désormais biodégradable et certifié Home Compost. En résumé, vous pouvez le mettre dans votre compost.
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Sommaire • Kaizen n 38 • mai-juin 2018 o
ELLES-ILS PENSENT 6
11 14
Rencontre Gunter Pauli : l’économie bleue pour une planète verte Les pièces du puzzle Les moteurs de recherche
Portfolio
ELLES-ILS FONT
JE CHANGE
sommaire 32 Portraits Des citoyens députés 34
Dossier
Migrants : changer de regard, changer d’accueil
66 Je vais bien, le monde va mieux Escalade : se rééquilibrer en grimpant 70 Do It Yourself La levure, un cosmétique vivant 75 Une randonnée, pas à pas… La Côte Vermeille
Ferhat Bouda : les Berbères, la terre au cœur
76 Nos bonnes adresses Caen 80
Cuisine
L’oseille sauvage : délicieusement acidulée !
50 Vent d’ailleurs En Finlande, les bébés vont en boîte 55 Politisons ! Cyril Dion 24 Créateurs de culture Un refuge pour les artistes en exil 28 La voie du Kaizen Florence Servan-Schreiber 30 Une nouvelle 25 septembre 1967, imaginée par Isabelle Marrier
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56 Et si on le faisait ensemble ? Les Petites Cantines : la cuisine, pour lutter contre l’isolement
87 Le sourire d’Yvan Saint-Jours
60 Le goût de l’enfance À l’abordage, les enfants, la mer vous attend !
89 Les rendez-vous Kaizen
65 Écologie intérieure Gilles Farcet
94 La chronique de Pierre Rabhi
92 La Fabrique des Colibris
rencontre
Rencontre
Gunter Pauli L’économie bleue pour une planète verte Entre une économie rouge, industrielle, et une économie verte, chère, qui ne tient pas toujours ses promesses écologiques, l’entrepreneur belge Gunter Pauli est à l’origine d’un concept prometteur : l’économie bleue. Son ambition ? Créer un modèle sans impact environnemental en valorisant les ressources locales, le tout à un prix juste. Et ça marche ! Rencontre avec un visionnaire de l’entreprise et citoyen du monde. Texte : Maëlys Vésir, Pascal Greboval 6 • kaizen • numéro 38
rencontre
Comment définissez-vous l’économie bleue ? injonction vient d’en haut, le zéro n’est pas atteint. La nature est au cœur de l’économie bleue. La nature Mais si le personnel participe, les évolutions sont plus ne produit ni déchets ni chômage. Inspirons-nousrapides. Les salariés ont des idées, des suggestions en ! Nous sommes les seuls êtres vivants à produire que les cadres, les dirigeants n’ont pas. Le zéro est des déchets et nous ne savons pas les gérer. une invitation à voir le monde autrement. C’est dans L’économie bleue ne se contente pas de faire « moins cette même dynamique que les Japonais ont mis en pire », elle a pour ambition de faire du bien. Avec place des écosystèmes économiques avec des fourune obsession : travailler avec ce dont on dispose nisseurs proches les uns des autres sur un même sur un territoire, et répondre aux besoins de tout le territoire : proximité, liens, efficacité. Nous devons monde. J’en ai pris conscience travailler avec les économies lors d’un voyage chez un « Ce qui est “bon” pour et les opportunités locales. fournisseur. Ma société était Utiliser des marchandises la planète et la santé doit être venant de l’autre côté du reconnue à la pointe de l’économie verte, pourtant on monde au lieu de les produire continuait de détruire la plameilleur marché que près de nous n’a plus de sens. nète. C’est aussi une éconoC’est un levier fondamental mie intégrative. Par exemple, pour faire face au changece qui ne l’est pas. » quand j’étais patron d’Ecover, ment climatique. L’économie je n’avais que sept places de parking pour cent embleue s’inscrit dans cette double dynamique : tendre ployés. Avec l’économie réalisée sur les quatre-vingtvers le zéro (déchet, défaut) et changer la règle du treize places de parking, j’arrivais à verser 0,50 franc jeu. Elle a aussi pour objectif de sortir d’une débelge 1 du kilomètre aux salariés qui venaient en vélo. marche productiviste à tout prix. Nous devons stopL’économie bleue doit aussi parler au cœur des gens. per cette folie qui consiste à réduire les coûts au seul Si je ne pense qu’au produit et que je n’ai pas un profit d’une plus-value. L’économie bleue se déminimum de clients qui se battent pour moi, je n’ai marque également de l’économie « verte » qui apporte une amélioration pour la planète et la santé, aucune chance. mais coûte plus cher. Alors que ça doit être le C’est surtout une économie du zéro déchet ? contraire. Ce qui est « bon » pour la planète et la santé doit être meilleur marché que ce qui ne l’est Vous avez raison, le zéro déchet est très important. Dans la nature, il n’y a aucun déchet qui ne sert à pas. En résumé, si on joue contre Goliath avec ses rien. Tout a toujours une valeur pour un autre. Dans règles, on perd. Mais si on change la donne du jeu sans en informer Goliath, on peut gagner. les années 1980, les Japonais se sont imposés avec deux concepts : le zéro accident et le zéro défaut. Pour le premier, ça ne veut pas dire qu’il faut ne pas Vous pensez que le bio est plus cher que le avoir d’accident, mais que le cerveau reçoit une inforconventionnel ? mation, une vision, qui in fine réduit les accidents. Le bio est moins cher. On ne compare pas les bonnes La logique du zéro défaut induit, elle, une qualité choses. Par exemple, dans notre système actuel, on totale. Ainsi, le zéro devient un objectif fort ! mesure la récolte des pommes ou des poires en tonnes par hectare, alors qu’il serait plus juste de Mais le zéro est aussi une forme de perfection ? calculer en nutriments, vitamine C, microfibres, etc. Celle-ci n’induit-elle pas une pression ? Avec ces indicateurs, une pomme ou une poire bio, Oui, c’est vrai. Sauf si on change la règle du jeu, le qui contient cinq à vingt fois plus de nutriments, est modèle de gestion, de management. Les Japonais, beaucoup moins chère ! On a totalement oublié la par exemple, ont constaté que lorsque cette fonction de la nourriture. À la fin de la journée, je ne kaizen • mai-juin 2018 • 7
portfolio
Portfolio
Ferhat Bouda Les Berbères, la terre au cœur Photos : Ferhat Bouda/Agence VU Propos recueillis par Pascal Greboval
Les Berbères sont les plus anciens habitants de l’Afrique du Nord. Ils se désignent eux-mêmes comme des Amazighs, des « hommes libres ». Refusant la logique d’État-nation, les Berbères sont malmenés par tous les pouvoirs nord-africains. Ferhat Bouda, né en Kabylie, utilise son appareil photo afin de témoigner de leur lutte quotidienne pour préserver leur identité. Reportage au Maroc.
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portfolio
Brahim doit s’assurer chaque matin qu’aucune de ses chèvres ne manque à son troupeau. Tinfgam, dans le Haut Atlas.
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dossier
dossier Dossier
MIGRANTS : changer de regard, changer d’accueil « La crise des migrants » : des mois, des années, que les télés, les radios, les journaux utilisent cette expression qui a fini par enfermer le phénomène migratoire dans le seul régime de l’angoisse. Cette grille de lecture, à contre-courant de l’Histoire, n’a pourtant rien d’une fatalité : en France s’ouvrent des portes, qui font naître d’autres échanges et fleurir de nouveaux projets. Penser la migration comme une chance, c’est aussi redonner à la situation actuelle son véritable sens, c’est remettre un juste nom sur le symptôme qui frappe nos sociétés contemporaines à plus large échelle : celui du repli sur soi. Car effectivement, il y a bien une crise : celle de l’accueil des migrants.
Texte : Barnabé Binctin - Photos : Éric Coquelin (sauf mention contraire)
Dossier
MIGRANTS : changer de regard, changer d’accueil
En Lozère, les demandeurs d’asile redonnent vie à une commune rurale dossier Accueillir des demandeurs d’asile pour redynamiser le territoire ? C’est le pari mené avec succès, depuis plus de quinze ans, par une petite commune de Lozère. À Chambon-le-Château, une cinquantaine de demandeurs d’asile en provenance des Balkans font revivre école, boulangerie et pharmacie et luttent à leur manière contre la désertification. Reportage.
A
u cœur de Chambon-le-Château se trouve l’école primaire. Une école pas tout à fait comme les autres. Plus du tiers des quarantesix élèves sont étrangers. Une situation particulière, qui a nécessité l’aménagement d’une classe spécifique : une UPE2A, Unité Pédagogique pour Élèves Allophones Arrivants [lire encadré page 45]. « Certains élèves ne parlaient pas un mot de français et n’avaient jamais tenu un crayon de leur vie, cela demande forcément de l’attention », se souvient Peggy Campel, ex-directrice de l’école. Mais entre
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enfants, les liens d’amitié se tissent beaucoup plus vite, en dépit de la barrière de la langue. Nazeni, primo-arrivante arménienne, n’a jamais été scolarisée et ne possède pas le même alphabet : c’est avec Antoine, son camarade de CP, qu’elle fait les exercices de calcul au programme du jour, à l’aide de bouts de papier. La maman du garçon, Florence, par ailleurs élue à la ville, constate les effets immédiats d’un tel brassage : « Mon fils connaît par cœur la géographie des Balkans, il m’a appris à situer la Macédoine sur une carte ! » Cette mixité fait aussi le bonheur des institutrices, à en croire Marion : « L’heure d’éducation morale et civique, obligatoire dans le programme, on la fait tous les jours ! » Cette présence d’enfants étrangers est une volonté politique du maire et le fruit du travail du CADA, Centre d’accueil de demandeurs d’asile. Géré par France terre d’asile, il reçoit une cinquantaine de personnes, essentiellement des familles venues des Balkans 1 qui y trouvent refuge le temps de leur procédure de demande d’asile. L’équipe composée d’une dizaine
Dossier
MIGRANTS : changer de regard, changer d’accueil
Quand migration rime avec innovation
dossier
Parce que l’échange interculturel, inhérent à leur parcours de vie, est source d’inspiration, les migrants sont souvent riches d’idées d’activités en tout genre. Une association, le Grdr Migration-Citoyenneté-Développement, les aide à transformer celles-ci en véritables projets entrepreneuriaux.
I
ls sont une quinzaine, concentrés, à s’écouter attentivement malgré l’heure tardive. Florence prend des notes pour son projet de commercialisation de livres pour enfants au Congo, où elle est née. Marcel et Camille sont également à l’affût : arrivés en France il y a quelques années depuis Yaoundé, eux veulent mettre en place une plateforme d’échanges de services sur Internet au Cameroun. Comme chaque second mardi du mois, le club Dynamiques africaines fait se rencontrer des entrepreneurs aux profils un peu différents des jeunes start-upeurs à la mode : ici, des migrants de tous âges, issus d’Afrique subsaharienne, tentent de construire un projet économique en lien avec leur région d’origine. Créé et piloté par le Grdr, cet incubateur offre mutualisation des expériences et
appui technique : « on sollicite une expertise sur différents enjeux de la création d’entreprise, de la comptabilité au marketing digital en passant par le community management », développe Jonathan Stebig, responsable des programmes Insertion et Entrepreneuriat au Grdr. Ce soir-là, le débat porte principalement sur les formes de société : SAS ou SARL ? Koffi hésite, lui qui monte une entreprise d’hôtellerie en Côte d’Ivoire, son pays natal : « J’ai déjà fait l’étude de marché, mais je voudrais en savoir plus sur les statuts juridiques. » Ça tombe bien : l’invitée du jour, Julie Kappler, est avocate et spécialiste en droit des sociétés. « Les statuts, c’est un contrat dans lequel on inscrit plusieurs choses : l’objet social, le capital, mais aussi le siège social », explique-t-elle. Orienté dès
Odile Ano a fait appel au Grdr pour accompagner son projet de valorisation des noyaux de mangue.
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Vent d’ailleurs
vent d’ailleurs
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En Finlande, les bébés vont en boîte Le « pack maternité » finlandais a fêté ses 80 ans en 2017. Cette boîte, destinée aux futurs bébés, contient tout le nécessaire pour leurs premiers mois et leur sert même de premier lit. Ce modèle, qui commence à s’exporter à travers le monde, dépasse le cadre de la santé et s’inscrit comme une sorte de passage obligé dans la culture finlandaise du devenir parent.
vent d’ailleurs Texte : Hélène Molinari (collectif Les Plumé•e•s) Photos : Marie-Alix Détrie (collectif Les Plumé•e•s)
D
ans son appartement au nord d’Helsinki, illuminé par une belle lumière de printemps, Anne rassemble les objets contenus dans le pack qu’elle a reçu avant la naissance d’Astor, son fils de 9 mois. Vêtements, gigoteuse, jouets… En les sortant un à un des tiroirs, elle rit : « En fait, tout vient de là ! » C’est dans son grenier qu’elle a entreposé la fameuse boîte en carton et son petit matelas dans laquelle son bébé a dormi ses deux premières semaines. « Il s’y sentait tranquille, en plus on peut prendre la boîte dans le lit, ou juste à côté. » Appelé littéralement « pack maternité », celui-ci a été mis en place en 1937 par l’État finlandais pour réduire la mortalité infantile. Le but était d’offrir aux bébés finlandais un premier lit sécurisé. Une façon de prévenir les risques de mort subite du nourrisson ou tout autre accident lié à de mauvaises conditions de couchage. Mais c’était aussi et surtout un moyen de fournir aux mères en difficulté des équipements essentiels : des habits pour les premiers mois (bodies, combinaison, bonnet, pantalons, chaussettes…), des draps, une couverture, des produits d’hygiène et de santé, un doudou et un premier livre. Avec un taux de mortalité infantile très élevé (65/1 000) dans les années 1930, il fut par ailleurs exigé des futures mères de consulter un médecin et de fournir un certificat de grossesse pour obtenir le pack, ce qui permit d’instaurer un encadrement médical minimum. La mise en place de ce programme des boîtes, le suivi prénatal, puis le développement d’un système national de sécurité sociale dans les années 1960 font qu’aujourd’hui le pays a réussi à atteindre l’un des plus faibles taux de mortalité infantile au monde : 2/1 000 (alors que la moyenne est de 32/1 000 selon l’ONU).
Couple de parents recevant une boîte.
Bien démarrer dans la vie Avant 1949, le programme s’adressait uniquement aux foyers en grande précarité, avant d’être étendu à tous les bénéficiaires de la sécurité sociale, sans exception. D’abord à la charge des municipalités, la gestion des boîtes a ensuite été transférée à Kela, l’agence de sécurité sociale finlandaise. Elle s’occupe depuis 1994 de leur confection et de leur distribution avec un budget de 10 millions d’euros par an. Anniina Kuokka y est coordinatrice pour les Affaires familiales : « Il est possible de choisir entre le pack maternité ou 140 euros d’aide par enfant. Pour leur premier enfant, 95 % des femmes choisissent la boîte plutôt que le chèque. Parce que le contenu vaut bien plus cher que ça ! » Les boîtes concernent les kaizen • mai-juin 2018 • 51
et si on le faisait ensemble ? Et si on le faisait ensemble ?
Les Petites Cantines La cuisine, pour lutter contre l’isolement Elles accueillent chaque jour celles et ceux qui veulent cuisiner et manger ensemble. Les Petites Cantines proposent à Lyon aux habitants d’un même quartier de se rencontrer dans une ambiance conviviale à mi-chemin entre le restaurant et la maison. Texte et photos : Jérémy Pain
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«
L
es menus, c’est comme la vie : parfois, c’est pas ce qui était prévu. » L’article 11 de la charte de l’établissement pourrait résumer à lui seul l’atmosphère du lieu. Entrer dans une Petite Cantine, c’est découvrir un endroit à part où l’on ne s’embarrasse pas de quelques mots écrits sur une ardoise ni des conventions qui régissent nos vies quotidiennes. Ici, on cuisine et on déjeune ensemble, en laissant la place aux rencontres et aux surprises. Ouvertes tous les jours hormis le samedi, Les Petites Cantines reposent sur un concept unique de cuisine participative. Sur la base du bénévolat, chaque matin et certains soirs, les habitués comme ceux qui viennent de manière plus ponctuelle élaborent le repas à partir des ingrédients en stock et selon un planning des menus déterminé collectivement à l’avance. Ici, la cuisine n’est pas séparée de la salle où l’on mange, les deux espaces se confondent dans un joyeux brouhaha. Une idée germée dans la tête de Diane Dupré la Tour et d’Étienne Thouvenot il y a quelques années et qui s’est concrétisée en septembre 2016 avec l’ouverture de la première Petite Cantine dans le quartier populaire de Vaise, dans l’ouest de Lyon. Ceux qui sont alors respectivement journaliste et ingénieur se lancent dans l’entrepreneuriat social et fondent l’association Les Petites Cantines. Soutenus par plusieurs partenaires, dont les Fondations Saint-Irénée et des petits frères des pauvres ou Groupama, ils souhaitent lutter contre l’isolement qui frappe les villes et n’épargne aucun âge ou classe sociale. « Les partenaires financent les travaux de mise aux normes, les équipements et l’ingénierie de projet. Ensuite, les cantines sont pensées
« Le projet a évolué au fil du temps en parlant avec les gens. Par exemple, pour la cuisine, nous n’avions pas pensé tout de suite au côté participatif », admet Étienne Thouvenot. Les plats n’ont rien à envier à ceux d’un restaurant de bonne facture : « poêlée de chou croquant et pommes de terre au miel-sésame doré » ou encore « galettes de pois chiches et mousseline de légumes ». Les bénévoles, entre deux et dix selon les jours, inscrits sur un planning ou venus à l’improviste, commencent la journée à 9 heures 30. « On prend toujours un temps de rencontre avec les bénévoles autour d’un café pour se dire les choses, ce que l’on veut cuisiner. Vers 10 heures, on se lance en cuisine jusqu’à midi. Chacun doit avoir une petite mission. Les recettes sont accessibles. Le soir, les personnes se rejoignent à partir de 16 heures 30 », détaille Juliette, pétillante maîtresse de maison qui met en musique les activités et les personnalités de chacun. Ce rôle est primordial : le maître de maison œuvre pour apporter bonne ambiance et dynamisme. Il faut aussi savoir accueillir des publics de divers horizons. Car outre l’aspect culinaire, Les Petites Cantines, c’est surtout un laboratoire de relations sociales où la facilité de dialogue entre tous est la règle. « Une marmite de liens », dixit la maîtresse de maison. « Nous cherchions cette mixité, déclare Étienne Thouvenot. Tout est fait pour qu’on se sente bien. On peut mettre le couvert, passer le plat. Chacun tombe le masque qu’il peut avoir dans la rue ou au travail. »
et si on le faisait ensemble ?
Une soupe de liens
Les jeunes en service civique facilitent le lien entre bénévoles et sont garants de la convivialité du lieu. (Au centre : Paolo entouré de Lila et Margot)
pour être autonomes sur l’exploitation », déclare la cofondatrice. Rapidement, le 9e arrondissement de Lyon avec ses étudiants, ses personnes âgées, ses nombreux bureaux et un local déniché sur une plateforme en ligne (Le Bon Coin) devient le quartier test.
Mix des générations, des nationalités, des conditions sociales : souvent très difficile à atteindre, le brassage est bien une réalité aux Petites Cantines. « C’est comme la soupe, on met plusieurs ingrédients, on mixe et on obtient un bon mélange. La cuisine, c’est la vie », résume Geneviève, jeune retraitée qui avait besoin de retrouver ce lien avec les autres, un lien qui tend à disparaître à la sortie de la vie active. Avec Marie, elle-même bénévole retraitée, elles sont inséparables, ce sont « les habituées du mardi », la « team desserts » comme on les surnomme ici. Elles sont heureuses de pouvoir offrir leur expérience aux plus jeunes. « Ils nous apportent aussi en retour, c’est ça le partage », renchérit Geneviève. En cette kaizen • mai-juin 2018 • 57
Le goût de l’enfance
À l’abordage, les enfants, la mer vous attend ! À La Rochelle, l’association Echo-mer œuvre depuis 2001 à la protection de la mer et au recyclage des déchets en milieu marin. Toute l’année, elle anime des ateliers pour enfants et des balades écocitoyennes pour sensibiliser petits et grands au respect de l’environnement, dans l’espoir de réconcilier l’humain et la nature.
goût de l’enfance
Texte : Sabah Rahmani - Photos : Éléonore Henry de Frahan, collectif Argos
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Fondateur de l’association Echo-mer, David Beaulieu interroge les enfants au Musée maritime de la Rochelle.
«
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d’intervention pédagogique de l’association. Un objectif intégré cette année au projet « Océan » de l’école élémentaire Raymond Bouchet qui participe à la balade. « Avec une collègue, nous avons souhaité travailler à la fois sur les animaux marins, avec la visite de l’important aquarium de La Rochelle, et sur la pollution des océans que l’on peut relier à notre programme d’enseignement moral et civique », explique Carole Bernier, professeure des écoles qui accompagne ses élèves à la sortie. Avec 5 000 bateaux amarrés, La Rochelle est l’un des plus importants ports de plaisance de France : minimiser son impact sur la nature relève du défi. Animatrice Sécurité-Environnement à la régie du port de plaisance de la ville, Angélique Fontanaud souligne la biodiversité des lieux, souvent méconnue : « Nous avons 15 kilomètres de pontons avec des flotteurs qui sont colonisés par des algues et une centaine d’espèces d’organismes qui viennent s’y accrocher. Sans compter toute la vie des vases sous-marines, les poissons, les bivalves ou encore toutes les espèces d’oiseaux qui se réfugient dans le port. »
goût de l’enfance
our préserver les océans, écoute ta mer ! » Sur le bassin des Chalutiers à La Rochelle, David Beaulieu capte l’attention des enfants avec humour et pédagogie. Ce matin-là, le fondateur de l’association Echo-mer guide les élèves d’une classe de CE2/CM1 pour une balade écocitoyenne sur le thème des océans. « Est-ce qu’un bateau est plus lourd qu’un éléphant ? », l’interroge spontanément un jeune garçon. « Ah ! ça, je ne sais pas ! », sourit David, ancien marin peu accoutumé à la savane. Sur le ponton du Musée maritime, bateaux et voiliers se succèdent sous le regard ébahi des enfants. Lorsque soudain, David les interpelle sur la présence d’un gobelet en plastique et d’une pomme sur l’eau ; l’occasion pour lui d’aborder concrètement la question des déchets et des pollutions en milieu marin. Que vont devenir les déchets ? Combien de temps vont-ils flotter là ? Les animaux vont-ils les manger ? Est-ce qu’il y a déjà eu une marée noire ? Curieux, attentifs, les enfants s’interrogent et s’inquiètent rapidement des conséquences. Si, dans le port, les déchets flottants sont régulièrement ramassés, au large, la pomme mettra plus d’un mois à se décomposer si elle n’est pas consommée par les poissons ou les animaux, et le plastique mettra, lui, plus de cent cinquante ans à se dégrader. L’association Echomer, l’Éducation nationale, la mairie et la régie du port de plaisance de La Rochelle ont souhaité s’allier pour « sensibiliser les enfants des écoles de la ville à la pollution de la mer et leur apprendre à respecter le milieu marin en leur faisant prendre conscience de la nécessité de la protéger, et de faire les bons choix au quotidien », peut-on lire sur le dossier
Réfléchir aux solutions « Il ne faut jamais jeter les déchets à la mer parce que ça peut engendrer des grandes pollutions, comme le “7e continent” de déchets. Les humains forment une pollution énorme ! », s’exclame Élio, un élève de la classe. « On doit trouver beaucoup d’idées pour arrêter de jeter des déchets, car au bout d’un moment, il n’y aura plus rien et on ne saura pas quoi faire. Alors on regrettera de ne pas avoir fait quelque chose pour sauver la planète », renchérit Justin. Préparés à la visite grâce aux deux ateliers animés par David Beaulieu dans la classe, les enfants comprennent rapidement les enjeux écologiques. « Pendant les séances, l’association délivre une sensibilisation à la protection des océans en parlant de la pollution de la mer, de l’origine des déchets, du “7e continent de plastique”, de la durée de vie des déchets, mais aussi des solutions et de l’économie kaizen • mai-juin 2018 • 61
Je vais bien, le monde va mieux
je vais bien le monde va mieux
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je change
Escalade Se rééquilibrer en grimpant Longtemps réservée aux chevronnés de la montagne, l’escalade se démocratise. Avec le développement de l’escalade de bloc et l’ouverture de nombreuses salles, un large public peut désormais profiter des bienfaits de cette discipline, idéale pour renforcer son dos en douceur tout en travaillant la confiance en soi. Immersion dans une salle parisienne. Texte et photos : Véronique Bury
«
B
je vais bien le monde va mieux
eaucoup d’aspects de l’escalade ressemblent à la méditation de pleine conscience », remarque Jordane, l’un des moniteurs d’Arkose, l’une des dernières salles d’escalade de bloc à avoir ouvert dans la capitale. « Notamment dans cette capacité à s’écouter, à être attentif à son corps, à sa respiration, aux changements d’équilibre d’une prise à l’autre. Avec l’escalade, on apprend à mieux se connaître, à faire confiance à son corps, à se mouvoir dans une infinité de mouvements. » Et pas besoin d’être musclé pour y prendre du plaisir. Bien au contraire ! « Il vaut mieux commencer l’escalade en étant en déficit de puissance musculaire, assure le moniteur. C’est un gage de meilleure progression, car on est alors obligé de trouver les meilleurs placements pour réussir là où d’autres avancent en force. Si on arrive à bien se placer, tout est possible en escalade ! » Une activité sportive très ludique qui permet donc de se muscler en douceur, à son rythme. Et ce, quels que soient son âge ou ses éventuelles pathologies. « C’est une très bonne activité, par exemple, pour ceux qui ont des maux de dos chroniques, car elle permet de travailler l’ensemble des muscles du corps, notamment les paravertébraux, tout en étirant la colonne », reconnaît Pierre Belleudy, responsable de la commission médicale de la Fédération française de la montagne et de l’escalade. En observant évoluer le public hétéroclite sur les parois, tels des chats qui s’approchent lentement de leur proie, on comprend mieux pourquoi certains grimpeurs font aussi le parallèle entre escalade et yoga. Pauline en a fait son cheval de bataille après son accident vasculaire cérébral qui l’a laissée hémiparétique. « Les médecins voulaient me mettre en fauteuil, mais grâce à l’escalade, j’ai pu garder une certaine mobilité », explique-t-elle dans un sourire. Elle vient tous les deux jours. Seule ou avec ses nouveaux amis. Car
le bloc, c’est aussi « un moment très convivial », précise Laetitia. À 34 ans, cette psychologue s’est elle aussi trouvé une nouvelle passion en poussant la porte d’Arkose. « L’avantage, c’est que l’on n’est jamais seul ici. Il y a toujours d’autres grimpeurs avec qui échanger, partager. » Et ainsi continuer à progresser.
L’escalade pour tous
L’escalade de bloc est adaptée à tous. Dans cette ancienne manufacture de blouses d’écolier transformée en un vaste terrain de jeu de 1 000 m2, on marche sur de gros tapis mous. Et on grimpe sur de hautes parois plus ou moins inclinées sur lesquelles sont fixées des prises colorées aux formes étranges. Ou
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Nos bonnes adresses
Caen, ça déborde d’énergies alternatives Proposer des adresses, c’est en théorie faire des choix, hiérarchiser. Mais nous ne vivons pas en théorie. La réalité, c’est qu’à Caen, les lieux alternatifs fleurissent de partout. Alors exhibons l’opulence de ce luxe alternatif ! Texte et photos : Pascal Greboval
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BOIRE Et si on commençait par goûter le raisin au pays du calvados ? « Quand vous mangez un camembert, vous préférez le camembert moulé à la louche ou industriel ? Pour le vin, c’est la même démarche. D’un côté, vous avez des vins vivants ; de l’autre, des vins uniformisés. Ils ne sont pas mauvais, mais on s’ennuie. » Depuis qu’il a repris ROUGE ET BLANC 1 , c’est ainsi que Ronan résume sa démarche de caviste spécialisé en vins bio, naturels et en biodynamie. Nous sommes prêts pour la visite…
MANGER « À quoi servent les emballages ? Principalement à transporter nos courses entre le lieu de vente et notre maison. Or ils sont néfastes pour la planète, et notre santé. » C’est en faisant ce constat qu’Amélie 76 • kaizen • numéro 38
et Mathilde ont créé LA MAISON DU VRAC 2 au cœur du quartier des Quatrans. Elles y vendent graines, farines, céréales, légumes, savons, thés ou huiles, dans un local chaleureux et lumineux. Les produits sont bio, et elles cherchent au maximum des producteurs locaux. Amenez vos sachets et bocaux, elles s’occupent du reste. On y trouve aussi les cups et autres produits d’hygiène féminine de l’entreprise caennaise DANS MA CULOTTE. Envie de manger bon, bio, végane et vite ? Rendezvous au TRIPLE V 3 . Hugo propose des plats 100 % bio et végétaliens à emporter, qui changent tous les jours. Au-delà des bonnes recettes, dont certaines sans gluten, le jeune homme s’inscrit dans une approche globale. Il travaille avec des producteurs locaux, et les contenants sont en fibres végétales entièrement biodégradables et compostables. Il ne
je change lui manque plus que l’autorisation de la mairie d’installer un composteur dans le square en face pour toucher la perfection. Envie de manger bon, bio, végétarien, végane et en prenant votre temps ? Vous avez l’embarras du choix. Commençons par le plus classique… en apparence. Une crêperie : L’AVALOU (« pomme » en breton). Julie la Normande « n’a même pas peur des Bretons qui viennent ici », car elle met au cœur des crêpes des produits bio et locaux, mais surtout la notion de plaisir, et ça se sent. Résultat : des crêpes originales, et savoureuses. Pour les véganes et végétariens, direction le GREEDY GUTS ou le PANCAKE NIGHT FEVER 4 . Deux restaurants créés par Élise Taylor. Aujourd’hui indépendants, ces deux lieux s’inscrivent toujours dans une démarche similaire. Dans 4 d e s c a d re s très sympathiques, on y mange au maximum bio, l o c a l , ave c des plats qui
colore vos cheveux dans la joie, avec des produits naturels uniquement. L’avantage est que vous pouvez manger dans la salle de restaurant pendant la colorisation. Composée de mobiliers récupérés et hétéroclites, vous vous fondrez à merveille dans son décor. En résumé, un lieu singulier et sympa comme le joyeux trio de cette Scop : Cloé, Stéphanie et Juliette.
COIFFURE ET BEAUTÉ Vous avez peur que vos cheveux finissent dans la soupe du voisin ? Heureux-ses Caennais-es. La couleur végétale naturelle se répand à Caen ! Stéphanie, en cocréant Comme un cheveu sur la soupe, a cédé à son (ex)apprentie le SALON49 6 . Vous y rencontrerez Zoé : « l’optimisme à côté de chez vous », selon sa cliente en attente de coloration. Le salon de Zoé est à son image : funky-groovy et naturel. Tête joyeuse assurée à la sortie ! À deux pas, et toujours dans une dé6 marche de coloration végétale, vous profiterez
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5 varient quotidiennement. Bref, faites une battle de burgers, buddha bowls, pancakes et recommencez : plaisirs garantis. Pour les personnes en proie à une digestion difficile du gluten, Frédéric et Hermione vous attendent chez CHÂTAIGNE ET SARRASIN. Ce jeune couple axe son offre autour du sans gluten. Vous trouverez des plats véganes et carnés, bio et locaux. Ainsi que desserts et bières. Et pour servir le plus grand nombre de personnes, ils se sont associés à une entreprise de livraison à vélo locale, KEBI, pour que leurs plats soient livrés sur les lieux de travail ou à domicile. Pour finir, un concept encore peu répandu : un restaurantsalon de coiffure. COMME UN CHEVEU SUR LA SOUPE 5 , le bien nommé ! Mais soyez tranquille, ici, tout est au bon endroit. Les plats finissent dans votre assiette et les couleurs végétales sur votre cuir chevelu. Côté cuisine, laissez-vous surprendre par le plat unique sans gluten, sans lactose et végétarien qui change tous les jours, en fonction de la livraison du maraîcher bio. Un plat goûteux qui mélange quatre textures : une soupe, une légumineuse, un gratin et un houmous. Équilibre alimentaire assuré. Côté cheveux, Stéphanie coupe et
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au KOKLIKO 7 des bons soins de toute l’équipe d’Aurélie, incarnation de notre capacité à changer. Alors qu’elle coiffait, en début de carrière, de façon classique et n’avait aucune sensibilité environnementale, Aurélie pilote aujourd’hui un salon de coiffure engagé dans une approche globale. Outre les teintures végétales, le cadre est cohérent : électricité d’Enercoop, point relais pour les colis Bio14, poêle à bois et toilettes sèches. Le point Godwin de l’écologie ! Le coin salon de thé où vous pourrez lire Kaizen est la cerise sur la mèche ! Et si vous cherchez des produits cosmétiques pour d’autres parties du corps, direction CORPS ET ÂME. kaizen • mai-juin 2018 • 77
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Cuisine
L’OSEILLE SAUVAGE Délicieusement acidulée ! Plante printanière par excellence, l’oseille sauvage relève les plats avec ses notes fringantes et acides qui ne laissent pas les papilles indifférentes. Elle s’identifie facilement grâce à ses feuilles en forme de fer de flèche et comme tout Rumex, elle se révèle bio-indicatrice du sol. Textes et photos : Linda Louis
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IDENTIFICATION DE RUMEX ACETOSA (POLYGONACÉES)
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a particularité de l’oseille, grâce aux oxalates qu’elle contient, c’est son goût acidulé qui lui a d’ailleurs valu la première place des plantes à marier avec les poissons. Choix de gourmet ou usage médicinal empirique, son usage permet de dissoudre dans notre estomac les éventuelles petites arêtes passées à travers… Dans la nature, le genre botanique Rumex auquel l’oseille appartient indique, tel un Petit Poucet, la nature d’un sol. Ce dernier est bien équilibré si on note la présence de Rumex acetosa (grande oseille), l’espèce la plus savoureuse, saturé d’engrais avec Rumex acetosella (petite oseille), déséquilibré et asphyxié aux métaux lourds avec Rumex obtus (rumex à feuilles obtuses), engorgé d’eau avec Rumex crispus (oseille crépue), compacté avec Rumex pulcher (patience-violon). Ces oseilles ont toutes comme point commun d’indiquer la présence d’eau 1. Leur rôle sur le sol est le même que sur les hommes : agir comme des agents détoxifiants. C’est ainsi que ces « plantes-filtres » se mettent dans les poches des métaux et des oxalates. Absorbés dans le corps humain, ceux-ci se combinent avec le calcium et/ou le fer pour former les cristaux d’oxalates correspondants, qui seront ensuite excrétés dans l’urine sous forme de petits calculs pouvant obstruer douloureusement les tubes rénaux. Voilà pourquoi on déconseille par prudence l’oseille 2 aux personnes souffrant des reins. Mais tout est question de mesure, une petite soupe ne risque pas de vous mettre en danger ! Notez que certaines plantes, comme les Crassulacées, ont l’étonnante capacité de dissoudre ces résidus. Ajoutez par exemple dans vos salades de printemps un peu de nombril de Vénus (Umbilicus rupestris) ou de joubarbe (Sempervivum tectorum).
Plante herbacée vivace de 30 cm à 1 m de hauteur (une fois montée en fleurs), entièrement glabre (sans poils), dont le port et la forme des feuilles évoquent l’oseille cultivée. • Feuilles de 4 à 15 cm de long, alternes, vert foncé (couleur épinard), légèrement épaisses, en forme de fer de flèche et semblant embrasser la tige à leur base (« sagittées »), acidulées. • Fleurs dioïques disposées en panicule (grappe) allongée. • Fruits d’environ 2 mm, entourés par des valves arrondies, en forme de cœur et striées de rouge. • Habitat naturel dans les prairies, généralement sur sol frais, parfois dans les coupes et les clairières forestières. • Récolte des jeunes pousses de mars à juin.
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En cuisine
Comme l’oseille flétrit vite, conservez-la dans un torchon humide, consommez-la rapidement ou congelez-la après l’avoir ébouillantée et égouttée comme des épinards. On peut la consommer crue, détaillée en lanières dans une salade avec d’autres crudités, en pesto dans des pâtes, ou cuite dans des omelettes, des quiches, des cakes ou des sauces crémeuses en accompagnement de plats doux ayant besoin d’être relevés. Elle est savoureuse en soupe avec des pommes de terre, du riz, des petits pois, des haricots verts. Pour limiter l’absorption d’acide oxalique (soluble dans l’eau), jetez le jus de cuisson de l’oseille. Lorsque vous la cuisinez, n’utilisez jamais de contenant en fer ou en aluminium : l’acide oxalique le décaperait et contaminerait le plat (même conseil pour les papillotes réalisées avec de l’aluminium et contenant du jus de citron).
CONFUSION POSSIBLE AVEC…
• La petite oseille (Rumex acetosella), comestible, de 10 à 50 cm, prospérant dans les friches, les lieux secs et acides. Ses feuilles plus petites, lancéolées à linéaires, sont souvent teintées de rougeâtre et forment à leur extrémité des petites oreillettes divergentes ou relevées. • D’autres Rumex [lire ci-contre], sans grand intérêt gustatif et potentiellement exposées à la pollution. • L’arum tacheté (Arum maculatum), toxique, dont la forme des feuilles rappelle celle de l’oseille, mais elles sont plus brillantes, souvent tachées de brun.
Vertus médicinales
Plante apéritive, rafraîchissante et digestive, l’oseille sauvage est également tonique avec sa bonne teneur en vitamines C, E, ses oméga-3 et ses nombreux oligo-éléments (fer, magnésium…). Dépurative et diurétique, elle est recommandée pour assainir les peaux grasses et revitaliser les cheveux ternes. En compresse, elle atténue les démangeaisons dues à des piqûres d’ortie. L’oseille est contre-indiquée pour les personnes souffrant d’hyperacidité gastrique, d’ulcères, de rhumatismes, d’arthrite, de goutte et de calculs rénaux. Rumex Crispus 5 CH est un traitement homéopathique préconisé contre la rhinite, la trachéite, la laryngite aiguë, la toux sèche et les irritations dermatologiques accentuées par l’air frais ou l’intolérance au froid et à l’humidité. n 1 Gérard Ducerf, Encycloplédie des plantes bio-indicatrices du sol, 2 vol., Éditions Promonature. 2 Et autres aliments riches en acide oxalique comme la rhubarbe, l’épinard, l’asperge, la betterave, le cacao, le thé bien infusé...
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Rendez-vous L’AGENDA MAI-JUIN 2018 MAI KAIZEN PARTENAIRE 10 au 12 mai / île de Groix (56) Salon Ressources : pour réveiller nos consciences et nos possibles, et pour réenchanter le monde. Avec Francis Hallé, Claude Aubert… https://laressource.lelieuagroix.com KAIZEN PRÉSENT ET PARTENAIRE 10 au 13 mai / Colmar (68) Foire Écobio d’Alsace. Thème : Quel futur pour le travail ? Parc Expo de Colmar www.ecobio.alsace • 09 72 45 29 55
CONFÉRENCE KAIZEN 31 mai à 19 h 30 / Paris Migrants : changer de regard, changer d’accueil. L’accueil des migrants peut être vécu comme une chance pour chacun d’entre nous. Moult initiatives positives émergent dans des univers aussi variés que l’agriculture, l’artisanat ou l’informatique. Venez à leur rencontre. Avec François Gemenne. Animation : Sabah Rahmani, rédactrice en chef adjointe de Kaizen. Goethe-Institut - 17, avenue d’Iéna - 75016 Réservations : https://www.kaizen-magazine.com/ participer-a-nos-evenements/
rendez-vous JUIN
CINÉ KAIZEN 17 mai à 20 h 15 / Paris Ciné-débat autour du film On a 20 ans pour changer le monde de Hélène Médigue, en présence de Xavier Mathias, formateur, paysan. Cinéma Le Chaplin 24, place Denfert-Rochereau - 75014 www.lescinemaschaplin.fr/denfert
KAIZEN PARTENAIRE 18 mai / Paris Symposium international Yoga et Santé : rencontre des plus grands spécialistes internationaux de la recherche sur le yoga. Cité des sciences et de l’industrie - Espace Louis Armand - 30, avenue Corentin-Cariou - 75019 http://www.yogaetsante.org/inscriptions/ KAIZEN PARTENAIRE 18 au 20 mai / Correns (83) Festival Joutes musicales de Printemps : le festival des musiques du monde en Provence Verte. www.le-chantier.com ATELIER KAIZEN 26 mai de 10 h à 13 h et de 15 h à 18 h / Paris Cycle naturo : été. Optimiser sa santé au rythme des saisons ! Animé par Christine Duvieusart, praticienne de santé naturopathe. 19, rue Martel - 75010 Réservations : https://www.kaizen-magazine.com/ event/cycle-naturo-ete-atelier-matin/
9 juin au 6 octobre / Paris-Bayonne Tour Alternatiba : 200 étapes en France et dans les pays limitrophes pour sensibiliser, mobiliser et former les citoyen-ne-s aux enjeux du dérèglement climatique et à la désobéissance civile non-violente. https://tour.alternatiba.eu/ KAIZEN PARTENAIRE
DÉBATS À LA RECYCLERIE 7 mai à 18 h 30 / Paris Végane, plus qu’un régime alimentaire ? Avec Nicolas Cheval, membre de L214 ; Dr Jérôme Bernard-Pellet, nutritionniste ; Anne-Cécile Canon, fondatrice de Merci Bernard ; Gilles Daveau, auteur de Manger moins (et mieux) de viande, collection Je passe à l’acte, Actes Sud-Kaizen, 2017. 11 juin à 18 h 30 / Paris Les abeilles et autres insectes pollinisateurs, acteurs-clés de notre alimentation. Avec François Lasserre, entomologiste ; Mathieu Angot, apiculteur ; Paul Fert, auteur de Abeilles, gardiennes de notre avenir. De la prise de conscience à la protection, Rustica éditions, 2017. 18 juin à 18 h 30 / Paris Des insectes dans nos assiettes. Avec Cédric Auriol, fondateur de Micronutris et Romain Fessard (sous réserve), auteur de Délicieux ! 60 recettes à base d’insectes, Héliopoles, 2013. La Recyclerie - 83, boulevard Ornano - 75018 www.larecyclerie.com
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