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septembre octobre 2018
APPRENONS AUTREMENT
L’école est finie…
couv
ÉLISE LUCET
EN QUÊTE DE VÉRITÉ LES BONNES ADRESSES
LILLE LE VIN
BIO ET BON ?
Belgique 7,20 € - Suisse 11 CHF
Éditeur SARL EKO LIBRIS au capital de 142 720 € Siège social 19, rue Martel - 75010 Paris info@kaizen-magazine.fr www.kaizen-magazine.com
Édito
Magazine bimestriel numéro 40 Septembre-octobre 2018 Imprimé sur papier certifié PEFC Fondateurs Cyril Dion, Yvan Saint-Jours, Patrick Baldassari et Pascal Greboval Directeur de la publication Patrick Baldassari
édito Je ne sais pas
Rédacteur en chef Pascal Greboval Rédactrice en chef adjointe Sabah Rahmani Secrétaires de rédaction Diane Routex Sarah Touzeau Journaliste multimédia Maëlys Vésir Abonnements et commandes Camille Gaudy abonnement@kaizen-magazine.fr Tél. 01 56 03 54 71 (de 14 h à 18 h) 19, rue Martel - 75010 Paris Attachée commerciale Cyrielle Bulgheroni Stagiaires pour ce numéro Solène Peillard Marion Mauger Direction artistique, maquette et mise en pages • hobo@hobo.paris hobo.studio Tél. 06 12 17 87 33 Photo de couverture ???????? Prépresse Schuller-Graphic 18, rue de l’Artisanat 14500 Vire Tél. 02 31 66 29 29 Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (Imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières-les-Vallées SIRET : 539 732 990 000 38 • APE : 5814Z Commission paritaire : 0322 K 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. 05 63 94 15 50 Distribution Presstalis Vente au n° pour les diffuseurs Groupe HOMMELL • Tél. 01 47 11 20 12 diffusion-hommell@sfep.fr Aucun texte ni aucune illustration ne peut être reproduit-e sans l’autorisation du magazine. Merci.
Jeune, j’ai longtemps cru que je n’aurais besoin de personne et, je dois l’avouer, que j’étais le meilleur ! J’étais le meilleur à l’école, j’ai été le premier de ma classe pendant très longtemps, obtenant les meilleurs prix. J’étais même le meilleur au catéchisme : notre curé faisait passer un examen et j’ai fini premier ! Je me croyais intelligent. Mais en grandissant, je me suis rendu compte que je ne savais pas réparer une voiture, que je ne savais pas bricoler, fabriquer ma maison, que je ne savais pas reconnaître le chant des oiseaux, que je ne parlais ni chinois, ni arabe, que je ne savais pas cuisiner, coudre, etc. Il fallait me rendre à l’évidence : je n’étais ni le plus intelligent ni le meilleur ! D’ailleurs, ça veut dire quoi « meilleur » ? La chute fut lourde. Je me suis même mis à penser le contraire ! Tel un animal de cirque, pendant toute ma scolarité, j’avais en fait appris à bien faire des exercices. Je découvrais que je ne savais pas ! Et surtout, il me manquait deux choses essentielles : apprendre à coopérer et cultiver le lien social, amical, professionnel ; l’art d’être ensemble, en somme. Pour le premier point, ce fut un changement radical. Passer d’une règle intangible – « il est interdit de copier » – à un impératif entrepreneurial – « arrêter de travailler en vase clos ». Comme tout changement radical, c’est ardu. Pour le second aspect, c’est un apprentissage quotidien. Comment prendre les décisions collectivement, en association, en copropriété, en entreprise, en famille ? Comment gérer mes émotions en fonction des événements qui surviennent ? Comment communiquer avec l’autre qui n’est pas moi ? Comment être un citoyen éclairé, un père, un mari, sans avoir appris ? Entre les manques de savoir-faire et de savoir-être, je dois apprendre tous les jours. C’est à la fois difficile et très enrichissant. Apprendre et encore apprendre. Apprendre que nous avons des intelligences différentes, et que c’est en les conjuguant que nous vivons et réalisons les plus belles choses : celles qui nous dépassent, nous nourrissent, nous émerveillent. Comme le résume Sénèque : « Il faut toute la vie pour apprendre à vivre. » Pascal Greboval Rédacteur en chef
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Sommaire • Kaizen n 40 • septembre-octobre 2018 o
ELLES-ILS PENSENT 6
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Rencontre Élise Lucet : « Plus les gens ont accès à la vérité, plus ils ont envie de changer les choses » Les pièces du puzzle Le vin bio : un meilleur cru ?
ELLES-ILS FONT
JE CHANGE
sommaire 32 Portraits Vignerons en biodynamie, alliés de la nature 34
Dossier
Comment apprendre autrement ?
Portfolio
66 Je vais bien, le monde va mieux La camomille et la matricaire 70 Do It Yourself La pomme, le fruit des peaux douces et des cheveux brillants 75 Une randonnée, pas à pas… La Vallée de Gaube, au cœur du massif de Cauterets
Olivier Grunewald : Chaos originel
76 Nos bonnes adresses Lille 80
Cuisine
Le pied-de-mouton : un champignon à aiguillons !
50 Vent d’ailleurs Un champ de possibles s’ouvre aux Philippines 55 Politisons ! Cyril Dion
24 Créateurs de culture La Rêv’othèque : la roulotte des rêves 28 La voie du Kaizen Florence Servan-Schreiber 30 Une nouvelle Le cercle, imaginée par Guillaume Le Touze
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56 Et si on le faisait ensemble ? Une médiation nocturne retisse les liens avec les jeunes 60 Le goût de l’enfance Pour le bien-être des enfants handicapés, des parents se mobilisent 65 Écologie intérieure Gilles Farcet
87 Le sourire de Roukiata Ouedraogo
89 Les rendez-vous Kaizen 92 La Fabrique des Colibris 94 La chronique de Pierre Rabhi
© Charlotte SCHOUSBOE – FTV
rencontre
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Rencontre
Élise Lucet « Plus les gens ont accès à la vérité, plus ils ont envie de changer les choses »
rencontre
En revalorisant le journalisme d’enquête, la présentatrice de l’émission Cash Investigation sur France 2 contribue à enrichir les débats démocratiques. En prenant conscience des dysfonctionnements du système, les citoyens ont ainsi accès à une information qui peut les encourager à participer au changement. Rencontre avec une Élise Lucet en quête de vérité. Texte : Pascal Greboval, Sabah Rahmani, Sarah Touzeau Comment définissez-vous le rôle du journaliste aujourd’hui ? Le rôle d’un journaliste, c’est d’établir la vérité. Ce qui est assez simple. Mais nous sommes dans un monde de plus en plus complexe où la communication prend de plus en plus de place. Dans les entreprises, le monde politique et les institutions, les services de communication servent un discours officiel, en général positif et formidable, avec un message qu’on veut faire passer aux citoyens et aux consommateurs. Le rôle d’un journaliste est de rétablir la vérité. Vous parlez de « la vérité » : serait-elle unique ? Il ne s’agit pas de La Vérité mais d’une vérité, parce qu’il n’y a jamais « la » vérité seule et unique. Le journaliste doit rechercher du factuel : il doit étayer des propos, des démonstrations, avec des documents. Il recherche une vérité de ce qui s’est déroulé ou de ce qui est en train de se dérouler, pour laisser aux personnes – téléspectateurs, auditeurs et lecteurs – la liberté de se faire leur propre opinion, de se construire leur esprit critique et de chercher leur propre vérité. Un journaliste ne peut pas imposer à qui que ce soit La Vérité. C’est cette recherche de cette vérité qui constitue le travail des journalistes. Cette démarche ne s’approche-t-elle pas de celle d’un juge ? Pas du tout ! Il y a une énorme différence entre les deux ! Notre travail d’investigation est au service d’un tiers : le téléspectateur, l’auditeur, le lecteur. Nous lui donnons une information. Ensuite, il s’en empare
ou pas. Nous n’avons aucune volonté, aucun pouvoir de condamner ou de punir. Vous préférez la dimension pédagogique ? Oui, il y a une vraie dimension pédagogique. Il y a aussi une dimension de recherche des choses qu’on ne veut pas nous révéler. Ensuite, il y a une volonté très pugnace de ne pas lâcher, face à une vérité qu’une entreprise ou des personnalités politiques vont essayer de nous présenter. Aller voir l’envers du décor. Ne pas se satisfaire des discours prémâchés. Aller vraiment rechercher l’essence de ce qui se déroule dans une entreprise, dans un ministère. Si le fait brut est caché, le donner c’est déjà permettre en soi à toutes les personnes qui nous lisent, nous regardent ou nous écoutent de reprendre une liberté pour se refaire un avis. Il y a quand même une volonté de changer les choses ? Changer les choses, c’est se décoller de ce discours préétabli. Quand j’étais toute petite, à l’école, et qu’on me disait « c’est comme ça », ça m’énervait prodigieusement. Ce serait trop facile si le monde était comme ça et pas autrement. Il y a toujours énormément de nuances, des choses cachées, des révélations, des décryptages, des explications dans lesquelles le journaliste doit aller. Est-ce changer les choses ? Je ne sais pas. En tout cas, c’est donner des armes, à tous ceux qui sont en face de nous, ou pour changer les choses, ou pour mieux appréhender un problème, un enjeu. Je crois que plus les gens ont accès à la vérité, plus ils ont envie de changer les choses. Mais je ne suis kaizen • septembre-octobre 2018 • 7
portfolio
Portfolio
Olivier Grunewald Chaos originel Photos : Olivier Grunewald
Pendant trente années, le photographe français Olivier Grunewald a parcouru le globe pour raconter la naissance et l’évolution de la Terre en images. Dans l’exposition Origines, il dépeint, à travers la série Chaos, la puissance de l’énergie primordiale terrestre : le volcanisme, qui a contribué à la formation des reliefs de notre planète et à l’émergence de la vie. Un processus de 700 millions d’années, dont les traces subsistent encore aujourd’hui sur Terre.
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portfolio
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Créateur de culture
Créateurs de culture
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La Rêv’othèque : la roulotte des rêves Créateur
de culture
Depuis 2010, Christian Hanser sillonne les routes, à bord de sa Rêv’othèque. Ancrée à Cormatin (Saône-et-Loire), cette roulotte invite les gens à rêver, mais aussi à ralentir. Son abri prend le temps de la rencontre pour mieux se raconter. Texte : Aude Raux - Photos : Éléonore Henry de Frahan, collectif Argos
«
V
enez ! Tout le monde peut entrer dans la Rêv’othèque. Même les adultes ! » Le temps de la fête du quartier de la Fontaine d’Ouche, à Dijon (Côte-d’Or), Christian Hanser, 35 ans, silhouette de colosse du haut de ses 2 mètres, a ancré sa roulotte de berger dédiée aux rêves. Intrigués, une maman, Elsa Debarnot, et ses deux fils adolescents, Joseph et Simon, en franchissent le seuil. Celui qui se présente comme un « artisan de l’hospitalité » les accueille au son d’un tambour d’océan 1 : « Bienvenue à Dijon plage ! » Les flots de la mer rugissent, embarquant les passagers de la roulotte vers des rivages imaginaires, loin de la cité de béton construite il y a cinquante ans. Tel un magicien, Christian Hanser a d’autres tours dans sa roulotte. La famille, installée sur les banquettes, découvre une collection de toupies artisanales en bois qu’il fait danser devant leurs yeux émerveillés. « Vous voulez essayer ? » leur demande-t-il. Les éclats de rire fusent pendant que l’un des garçons essaye de maîtriser une toupie sauteuse. Christian Hanser sort ensuite une petite boîte à trésor qu’il confie à la maman, l’invitant à lire à voix haute le papier caché à l’intérieur. « Imagine qu’on t’offre vingt-quatre heures de plus dans ta semaine, que ferais-tu ? » « Tellement de choses. Par exemple, j’irais me promener, je jouerais du piano », répondelle, rêveuse. Rêver, telle est l’une des quatre roues qui fait cheminer la Rêv’othèque. Mais pas des rêves tout prêts et formatés, comme ceux que la télévision ou la publicité nous assènent. « Moi qui suis un introverti, je propose un espace de liberté propice à
l’introspection. Une bulle dans la société qui permet à chacun de valoriser sa singularité et d’être à l’écoute de ses propres rêves. Parce qu’il est essentiel d’avoir des aspirations pour l’avenir, même si nous vivons une époque qui ne fait pas rêver », explique Christian Hanser. En écho à ses paroles, il a punaisé une phrase inspirante sur l’un des murs de la roulotte : « N’essayez pas d’être quelqu’un d’autre, la place est déjà prise ! » « La Rêv’othèque est le symbole de la convivialité introvertie », précise-t-il, avant de décortiquer cet oxymore : « Il s’agit, non pas d’une singularité nombriliste, individualiste, mais d’une singularité tournée vers l’autre. Quand on a pris un moment pour soi, on est davantage disponible pour s’ouvrir. En somme, pour reprendre les mots du poète québécois Bernard Pozier, “plus on est singulier, plus on est universel”. »
L’urgence de ralentir Autre roue de la Rêv’othèque : le cheminement au ralenti. « Tout va beaucoup trop vite, déplore Christian Hanser. Difficile de ne pas se laisser stresser par cette accélération des rythmes de vie. Or, c’est lorsque l’on ne fait rien que l’imagination et la créativité émergent. Je préfère un temps à être, plutôt qu’à faire. À la performance, je choisis la présence. » Né à Nuremberg, en Allemagne, Christian Hanser est parti étudier le journalisme à Londres. C’est dans la capitale du Royaume-Uni qu’il a pris conscience de l’urgence de ralentir : « Dans les couloirs du métro, les gens, kaizen • septembre-octobre 2018 • 25
© Philippe Brulois
COMMENT APPRENDRE AUTREMENT ?
dossier
Dossier
Et si nous apprenions autrement, de l’école à l’EHPAD ? Si nous dépassions la trinité des programmes scolaires « lire, écrire, compter » ? Notre cerveau a soif d’apprentissage tout au long de notre vie, comme le démontrent les travaux des neurobiologistes ; comment le satisfaire ? Autant de questions pour aider le citoyen à appréhender le monde de demain. Alors observons le quotidien des enseignants qui expérimentent de nouvelles pédagogies dans leurs classes. Réfléchissons à de nouvelles formes d’apprentissage actif et ludique. Cultivons notre curiosité, nous avons tant à construire… Texte : Anne Lamy, Pascal Greboval
dossier
Dossier
Comment apprendre autrement ?
À la recherche d’une autre pédagogie pour petits et grands
dossier
L’école traverse une crise de foi : parents et enseignants rêvent d’autre chose, et quantité d’enfants s’ennuient en classe… Quel gâchis, alors que la soif d’apprendre est le propre de l’être humain ! Heureusement, les initiatives innovantes foisonnent, même dans le public. Et de nombreux adultes se forment tout au long de leur vie, parce que le travail les y contraint ou simplement pour le plaisir. plus aujourd’hui. Mais elle bute toujours sur la même réalité : ce sont souvent les mêmes élèves qui réussissent… et les mêmes qui échouent. L’école ne sait pas accompagner les plus fragiles 2 vers la réussite. Ce système focalisé sur la note pervertit le rapport à l’apprentissage. Pour Isabelle Peloux, professeure des écoles et fondatrice de l’école du Colibri à La Roche-sur-Grane (Drôme) 3, « le problème, c’est que les professeurs ne savent pas forcément faire autrement. Cette école fondée sur la compétition leur a plutôt réussi. Mais la compétition ne stimule que les élèves forts : sur 100 enfants, elle en motive disons 15… et en perd 85. » Enfin, comme l’explique François Taddei 4, la mission de l’école doit changer : depuis le xviiie siècle, elle forme une élite en sélectionnant les « meilleurs ». Désormais, elle doit former des citoyens, créatifs et adaptés à ce monde qui change. Mais elle a gardé les outils du passé : notation, examen, concours. © Antoine Boureau / Biosphoto
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ertical, trop centré sur le français et les mathématiques, élitiste et amplificateur d’inégalités sociales, notre système scolaire tangue. Pour Sylvain Connac, professeur en sciences de l’éducation 1, « l’un des enjeux de l’école du xxie siècle sera de réussir la démocratisation des apprentissages, après avoir réalisé celle de la scolarisation au xxe siècle. » Depuis les années 1960-1970, l’école est parvenue à ce qu’un enfant d’ouvrier ait droit à la même éducation qu’un enfant de patron. Il y avait 1,5 million de collégiens en 1960 ; il y en a deux fois 36 • kaizen • numéro 40
Quand les pédagogies différentes séduisent Déçus, de plus en plus de parents se tournent vers des écoles « différentes » [lire encadré]. Et ce, pour plusieurs raisons, note Marie-Laure Viaud, maîtresse de conférences en sciences de l’éducation 5 : « Le développement d’une parentalité plus respectueuse de l’enfant oblige à se questionner sur l’éducation. Ensuite, le numérique a permis à ceux qui avaient envie d’une autre école de se rassembler. Par ailleurs, un mouvement d’initiative citoyenne progresse, qui incite chacun à faire sa part. Et, avec la vague du développement personnel, les parents souhaitent
Dossier
Comment apprendre autrement ?
Clisthène : un collège expérimental dossier Comment rendre le collège plus équitable et plus à même de développer les compétences scolaires, humaines et créatives de chaque enfant ? À Bordeaux, le collège expérimental Clisthène – l’un des rares établissements publics de ce type – multiplie les innovations. Un laboratoire à bonnes idées, que l’on voudrait voir semer ses graines partout en France…
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n matin lumineux, 8 heures 15. Au pied de la cité du Grand Parc, nous demandons notre chemin à un collégien. Avec un grand sourire, il répond : « Clisthène ? C’est juste là, j’y vais moi aussi. » Un ado réjoui d’indiquer son collège… c’est louche ! Nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Dans la cour, se dresse une table. Un garçon y installe un gâteau au chocolat maison et des quartiers d’orange. En petites grappes joyeuses, les élèves piochent. Il est 9 heures, le garçon nettoie et range la table. Était-ce son anniversaire ? Une sanction ? « Pas du tout, s’amuse Lucile, élève en 5e. Ce matin, c’est Milo et son Gété qui s’occupent du goûter. » Ici, les deux cents élèves sont répartis par classe, mais aussi par Groupe de Tutorat (le fameux « Gété »). Chaque groupe, composé et encadré par les enseignants, est constitué d’une douzaine d’élèves de la 6e à la 3e. Ceux-ci se retrouvent chaque semaine pendant 3 heures 30 pour s’entraider aux devoirs ou simplement pour débattre. À tour de rôle, chaque groupe assure pendant deux semaines les tâches collectives comme le goûter du matin ou le pointage à la cantine.
© Alexandre Sattler
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Vent d’ailleurs
vent d’ailleurs
Un champ de possibles s’ouvre aux Philippines Le fondateur de l’ONG Gawad Kalinga privilégie une approche holistique du développement de son pays, les Philippines. Tony Meloto bâtit des ponts entre ruraux et urbains, nationaux et occidentaux, pauvres et riches, pour mettre un terme à la pauvreté des habitants des bidonvilles. Texte : Aude Raux - Photos : Laurent Weyl «
N
ous avons tellement lu “l’évangile selon Harvard” que nous avons oublié les véritables besoins des Philippines : l’agriculture biologique et locale est notre avenir. » Si le poids des années a voûté la silhouette et blanchi les cheveux de Tony Meloto, 68 ans, son sens de la formule est toujours aussi vif. En 2003, ce Philippin a fondé 50 • kaizen • numéro 40
l’ONG Gawad Kalinga (GK). Dans la langue officielle, le tagalog, ces mots signifient « prendre soin ». Celui que l’on surnomme avec respect Tito Tony, « oncle Tony », fustige : « Un quart des Philippins (sur 100 millions d’habitants) ne mangent pas à leur faim alors que nous avons 12 millions d’hectares de terres fertiles inexploitées, une biodiversité et des
et si on le faisait ensemble ?
Et si on le faisait ensemble ?
Une médiation nocturne retisse les liens avec les jeunes Prévention, mixité et dialogue : un trio gagnant pour l’association Médiation nomade qui sillonne les quartiers populaires de France. Son fondateur, Yazid Kherfi, a fait le pari d’une initiative originale qui cherche à essaimer. Texte : Sabah Rahmani - Photos : Jérômine Derigny, collectif Argos
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Le goût de l’enfance
Pour le bien-être des enfants handicapés, des parents se mobilisent
goût de l’enfance
Entre rendez-vous médicaux, visites à l’hôpital, traitements, apprentissage à la maison… les enfants porteurs de handicaps n’ont parfois plus beaucoup le temps d’être simplement des enfants au quotidien. Pour retrouver le plaisir de s’amuser et permettre aux parents de se ressourcer, l’association S.A.S.H.A., située à Paris, propose des ateliers ludiques et des moments de partage ouverts à tous. Texte et photos : Maëlys Vésir
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je change
Les plantes indispensable à votre santé La camomille et la matricaire La camomille, c’est un peu la tisane « à l’ancienne », celle que l’on prend au coin du feu pour bien digérer la soupe au lard, avant de se coucher avec les poules ! Or, derrière cette image désuète, se cachent deux espèces médicinales majeures, dont l’intérêt n’est pas démenti par la science moderne.
je vais bien le monde va mieux
Texte : Sylvie Hampikian - Photos : Olivier Degorce et Amandine Geers Céramiques : Alice Lothon
Leur portrait La camomille romaine, ou camomille noble (Chamaemelum nobile, Anthemis nobilis), et la camomille allemande, ou matricaire (Matricaria recutita), sont deux très proches cousines appartenant à la riche famille des Astéracées (composées). Toutes deux évoquent de petites marguerites, blanches à cœur jaune, au parfum agréable. Elles se ressemblent tant qu’on les confond souvent, malgré quelques petites astuces pour les distinguer. Ainsi, le cœur (réceptacle) de la camomille allemande est bombé et apparaît creux à la coupe. En outre, sa tige est glabre, tandis que celle de la camomille romaine est velue. Quoi qu’il en soit, vous ne courrez aucun risque en prenant l’une pour l’autre tant leurs propriétés sont voisines.
antioxydants et sédatifs nerveux. Ainsi, il a été montré que plusieurs flavonoïdes contenus dans les deux espèces, notamment l’apigénine, ont une affinité pour les récepteurs des benzodiazépines, ce qui explique leurs propriétés calmantes et anxiolytiques. Par ailleurs, les deux camomilles exercent chacune des actions intéressantes dans la prévention des maladies cardio-vasculaires (hypoglycémiantes, légèrement hypotensives, antithrombotiques). En ce qui concerne les soins cutanés, les deux camomilles sont antiseptiques, cicatrisantes, décongestionnantes, anti-inflammatoires. En cosmétique, on les emploie sans distinction, surtout pour les soins des peaux sensibles, irritées. Il n’y a que dans le domaine des soins capillaires que leur usage diffère quelque peu, puisque c’est surtout la camomille allemande qui est traditionnellement réputée pour accentuer les reflets des cheveux blonds.
Leurs propriétés
On les emploie comment ?
Les deux camomilles ont des vertus digestives, qui ont fait leur réputation dans les tisanes de fin de repas. Mais les études récentes se sont surtout intéressées à leurs effets antimicrobiens, anti-inflammatoires,
En tisane : elle se prépare en laissant infuser 5 minutes, sous couvercle, 1 c. à c. de camomille séchée dans 25 cl d’eau. On peut en prendre jusqu’à trois tasses par jour, pour digérer, soulager le foie,
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diy
DIY
Do It Yourself
La pomme, le fruit des peaux douces et des cheveux brillants L’étymologie est formelle : le terme pommade vient de la pomme. On confectionnait jadis des onguents à base de pulpe du fruit, additionnée de graisse. Aujourd’hui, on trouve la pomme sous forme d’extrait dans les cosmétiques, mais on peut aussi aller puiser directement à la source les secrets de la bonne mine et des cheveux brillants. Texte : Sylvie Hampikian - Photos : Olivier Degorce et Amandine Geers
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© OTCL Lille / Laurent Ghesquière
le bon plan Nos bonnes adresses
Lille, le repaire des consomm’acteurs Texte et photos : Pascal Greboval - Dessin : Manu Thuret
MANGER Au cœur de la ville, entrez dans LA CLAIRIÈRE. Depuis 2017, ce restaurant à la décoration simple et cosy est une place sûre pour manger sainement. « En prenant conscience des conséquences écologiques du régime carné, je suis devenue végétarienne, puis végane », explique la sympathique Claire. Autodidacte, elle propose une carte raffinée à base de légumes bio
et de saison, qui change toutes les semaines. Et le bouche à oreille fonctionne, car depuis l’ouverture, c’est souvent plein. À deux pas, au coin de la place de la République, VERY GOOD FOOD est un bon endroit pour manger vite, sur place ou à emporter. Depuis avril 2018, Déborah propose des burgers végétariens et véganes avec des légumes bio qu’elle prend le temps de préparer. Et si vous fuyez le gluten, Déborah s’adapte. Sans gluten et sans lactose, telles sont les spécificités des plats et desserts proposés au HAPPY F’EAT. Avec une carte qui change tous les mardis pour respecter les saisons, des brunchs savoureux qui mélangent sucré et salé le dimanche… Amoureux de la cuisine saine, vous devriez trouver fourchette à votre palais dans ce restaurant et salon de thé. Pour satisfaire le plus grand nombre, 50 % des plats sont végétariens. Enfin, dans un souci de cohérence globale, la jeune équipe s’est inscrite dans une démarche zéro déchet et propose des ateliers sur cette thématique.
Cuisine
cuisine Le pied-de-mouton Un champignon à aiguillons ! Sa peau douce et parfumée comme la croûte d’un camembert souligne la délicatesse de ce comestible, bien connu des amateurs de champignons. Le pied-de-mouton se cuisine de mille façons et embaume nos plats d’effluves forestiers et fruités, alors à vos paniers ! Textes et photos : Linda Louis
D
’août à octobre, il fait partie des champignons les plus faciles à identifier, grâce à ses petits aiguillons nichés en ligne sous son chapeau, qui se détachent simplement au toucher. Rappelonsle : on identifie dans un premier temps un champignon en regardant sous sa jupe ! On pourra ainsi distinguer des tubes (cèpes et bolets), des plis (girolles, chanterelles, trompettes de la mort) ou des aiguillons comme pour le pied-de-mouton qui nous intéresse ici. Ses autres noms vernaculaires, barbe-de-chèvre, langue-de-veau ou oursin, soulignent cette caractéristique mycologique. Certains cueilleurs le grattent sur place, pour éviter d’avoir justement ces petits picots blancs plein le panier ou en contact avec les autres champignons glanés. Mais on laisse ainsi des traces de son passage et les promeneurs suivants 80 • kaizen • numéro 40
auront alors trouvé votre coin à pieds-de-mouton… À vous de voir ! Passez votre chemin devant les spécimens trop âgés qui se révèlent amers 1 et choisissez les plus jeunes, bien veloutés au toucher et fermes. À noter qu’ils ont tendance à casser comme de la craie. Soyez donc délicats aussi bien dans la récolte que dans la dépose dans le panier. Le pied-de-mouton a l’avantage d’être non véreux, et à part le bout de son pied terreux, vous ne jetterez quasiment rien. Autre atout, il pousse rarement seul. Si vous en dénichez un, jouez à saute-mouton avec vos yeux, poussez doucement feuilles et mousses : il est fort probable que vous en trouverez d’autres. L’espèce la plus connue est blanc crème mais il existe également une autre espèce couleur abricot tout aussi délicieuse.
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IDENTIFICATION DE HYDNUM REPANDUM (HYDNES)
• Champignon trapu (pas très haut et bien épais partout), rappelant une grande girolle blanche étalée, et poussant en touffes. • Chapeau blanc crème tirant vers l’orange clair, à chair cassante comme de la craie, non véreuse et parfumée, de 5 à 15 cm de large, bosselé, avec des lobes irréguliers, à marge enroulée pour les spécimens jeunes et étalée pour les spécimens vieux.
• Dessous du chapeau : aiguillons de couleur crème, très serrés, facilement détachables, décurrents sur le pied. • Pied court et trapu d’environ 5 cm de haut, central ou excentré, irrégulier et de la même couleur que le chapeau. • Habitat sous les feuillus et les conifères. • Récolte d’août à novembre.
cuisine En cuisine
Comme pour la plupart des champignons, évitez de laver le pied-de-mouton à l’eau courante et préférez le nettoyage avec un chiffon humide (chapeau et pied) afin de préserver ses arômes. Retirez les aiguillons avec le plat d’un couteau. Coupez le bout du pied terreux puis découpez-le en lamelles. Selon son humidité, il rendra peut-être de l’eau de végétation à la cuisson. Vous pouvez égoutter la poêlée et conserver ce jus uniquement si vous avez ramassé des jeunes, non amers. Une fois sautés à la poêle avec du beurre, de l’ail et du persil (facultatif), les pieds-de-mouton peuvent être mangés tels quels ou ajoutés dans une omelette, un cake salé, une quiche, une salade composée. Ils peuvent être mixés avec des panais pour réaliser une soupe, ou avec des noix de cajou réhydratées et des châtaignes pour réaliser un pâté végétal de type faux gras. Ils sont délicieux confits dans du vinaigre. Pour les conserver, optez pour la congélation, après les avoir saisis à la poêle et égouttés, plutôt que de les déshydrater. Le séchage développe une amertume non souhaitée. n 1 Même remarque pour ceux achetés en supermarchés, provenant souvent d’Europe de l’Est, car cueillis depuis plusieurs jours.
AUTRES ESPÈCES DE PIEDS-DE-MOUTON
• Le pied-de-mouton roux (Hydnum rufescens) comportant un chapeau moins épais et un pied plus long et plus fin. • Le pied-de-mouton blanc comme de la craie (Hydnum albidum), appréciant les forêts de pins sèches et calcaires, mais peu fameux car plus amer.
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je change
Rendez-vous
L’AGENDA SEPTEMBRE - NOVEMBRE 2018
9 juin au 6 octobre / Paris-Bayonne Tour Alternatiba : 5 800 km à vélo dans 200 territoires afin de promouvoir les alternatives au dérèglement climatique. Il y a forcément une étape près de chez vous ! https://etapes.tour.alternatiba.eu
SEPTEMBRE
30 septembre de 9 h 30 à 18 h / Toulouse (31) Foire Garo’bio : 13e édition. Thème : Quelles sciences pour quelles bios ? Marché bio et local, conférences, animations, restauration. www.garobio.fr
8 et 9 septembre / Embrun (05) Foire Bio Génépi : 20e édition. Thème : la forêt. 200 exposants, 20 conférenciers, spectacles, concerts, animations, expositions. www.genepi-foire-bio.com KAIZEN PARTENAIRE 15 au 30 septembre / partout en France Fête des possibles. www.fete-des-possibles.org
OCTOBRE
KAIZEN PRÉSENT ET PARTENAIRE 21 au 23 septembre / Montpellier (34) Festival pour l’école de la vie. Château de Flaugergues www.festival-ecole-de-la-vie.fr ATELIER KAIZEN 25 septembre de 18 h 30 à 20 h 30 / Paris 1er Atelier sur le vin bio : Pour la sortie du livre Découvrir les vins bio et nature dans la collection « Je passe à l’acte », Kaizen propose une soirée en compagnie d’Olivier Le Naire. Une heure d’atelier avec l’auteur puis une heure de dégustation et découverte des vins bio. Prix : 35 euros. Réservation obligatoire sur www.kaizen-magazine.com 26 au 28 septembre / La Roche-sur-Grane (26) Stage : Fonder ses actions sur les valeurs émergentes. Nourries par la pensée philosophique d’Olivier Frerot et le pinceau d’Hélène Causse, ces journées en immersion aux Amanins vous proposent de fonder vos actions et vos projets sur un management humble, respectueux des altérités. www.lesamanins.com
29 et 30 septembre / Île-de-France Jardins ouverts en Île-de-France : 2e édition. Jardins patrimoniaux, jardins urbains et producteurs locaux proposent des animations artistiques et pédagogiques autour du thème du potager. www.iledefrance.fr/jardinsouverts
4 octobre à 18 h 30 / Colmar (68) Rencontre-débat : Conversations pour la Terre et les Hommes. Avec Jacques Lecomte, docteur en psychologie et écrivain, et Pierre Rabhi, paysan, écrivain et humaniste. Animé par Richard Nicolini, journaliste. Parc des expositions www.jardinsdegaia.com
13 et 14 octobre / Paris Veggie World Paris. Le Centquatre - 75019 www.veggieworld.de/fr/event/ veggieworld-paris-octobre CONFÉRENCE KAIZEN 16 octobre à 19 h 30 / Paris L’école est-elle finie ? Pouvons-nous apprendre autrement ? Avec André Stern et Satish Kumar. Entrée payante : 6 euros. Goethe Institut - 17, avenue d’Iéna - 75016 www.kaizen-magazine.com 17 au 21 octobre / La Roche-sur-Grane (26) Forum “L’éco-entrepreneur : pour une transition entrepreneuriale écologique”. Un séminaire d’intelligence collective dédié aux entrepreneurs, intrapreneurs, consultants et citoyens investis qui veulent réconcilier économie et écologie. www.lesamanins.com
rendez-vous
21 septembre de 18 h à 23 h / Lyon (69) Forum La Nuit nous appartient : 4e édition. Salle Jean Couty www.mediationnomade.fr
27 septembre au 1er octobre / Paris Salon Zen. Espace Champerret - 75017 www.salon-zen.fr
29 et 30 septembre / Cherisy (28) Salon Vivre et habiter écologique et bio. Thème : l’agriculture en mutation. Exposants, conférences, ateliers, jeux, promenades en carriole à traction humaine… www.avern.fr/agenda/ salon-vivre-et-habiter-ecologique-et-bio
5 au 7 octobre de 10 h à 19 h / Nantes (44) Salon Zen et Bio. Expo Nantes Atlantique Parc de la Beaujoire Halls 1 et 2 www.exponantes.com 6 et 7 octobre / Lablachère (07) Stage Plantes sauvages comestibles organisé par Terre et Humanisme. www.terre-humanisme.org/formation/ plantes-sauvages-comestibles KAIZEN PARTENAIRE 9 au 14 octobre / Courbevoie et La Défense (92) Festival Atmosphères : questionner le monde, s’émouvoir, découvrir et envisager les solutions pour un monde durable dans un esprit festif et enthousiaste. Projections inédites, créations, tables rondes, expositions. www.atmospheresfestival.com CONFÉRENCE KAIZEN 10 octobre à 18 h 30 / Paris Le journalisme de solutions peut-il sauver le monde ? : présentation du journalisme d’impact. En présence de l’équipe Kaizen. Le Consulat - 2, rue Vercingétorix – 75014 www.kaizen-magazine.com ATELIER KAIZEN 13 octobre de 10 h à 13 h et de 15 h à 18 h / Paris Cycle naturo : automne. Optimiser sa santé au rythme des saisons ! Animé par Christine Duvieusart, praticienne de santé naturopathe. 19, rue Martel - 75010 Réservations : www.kaizen-magazine.com/ participer-a-nos-evenements
19 au 21 octobre / Marseille (13) Salon Zen et Bio Artemisia. Parc Chanot www.salon-artemisia.com 20 au 24 octobre / Montlahuc (26) Stage : Accompagner une éducation différente, vers un enseignement porteur de sens, de joie et de vie. À destination des professionnels de l’éducation ou de créateurs de nouvelles structures éducatives : un parcours pour accompagner une éducation différente. École de la nature et des savoirs www.ecolenaturesavoirs.com KAIZEN PRÉSENT ET PARTENAIRE 26 au 29 octobre / Strasbourg (67) Salon Bio & Co Strasbourg. Parc des expositions du Wacken www.salonbioeco.com/ strasbourg-automne 30 octobre au 4 novembre / Ménigoute (79) Festival international du film ornithologique : un des événements mondiaux majeurs du cinéma animalier. www.menigoute-festival.org
NOVEMBRE CONFÉRENCE KAIZEN 6 novembre à 19 h 30 / Paris Peter Wohlleben : La vie secrète des arbres. Palais de la Femme 94, rue de Charonne - 75011 Réservations : www.kaizen-magazine.com/ participer-a-nos-evenements
kaizen • septembre-octobre 2018 • 89