NOUVELLE FORMULE
N°
47
NOVEMBRE DÉCEMBRE 2019
DÉCRYPTAGE
ÉCOLOGIE ET CROISSANCE
COUV SOLUTIONS
LA BANQUE ÉTHIQUE
AUTONOMIE
LE POUVOIR DES CÂLINS
NOËL DOSSIER
PRÉPARER UN
BEL / LUX : 7,20 € - ESP : 7,40 € - CH : 11 FS - MAR : 80 MAD - TUN : 11,90 DT - DOM : 7,40 € - TOM : 850 XPF
ÉCOLOGIQUE
BONNES ADRESSES : METZ PORTFOLIO : AURORES BORÉALES 1
Éditeur SARL EKO LIBRIS au capital de 98 913 € Siège social 19, rue Martel - 75010 Paris info@kaizen-magazine.fr www.kaizen-magazine.com
EDITO
Magazine bimestriel numéro 47 Novembre-décembre 2019 Imprimé sur papier certifié PEFC
DÉCROISSANT
Fondateurs Cyril Dion, Yvan Saint-Jours, Patrick Baldassari et Pascal Greboval Directeur de la publication Patrick Baldassari Rédacteur en chef Pascal Greboval Rédactrice en chef adjointe Sabah Rahmani Secrétaire de rédaction Emmanuelle Painvin
ÉDITO SOUS
Journaliste multimédia Maëlys Vésir Stagiaires pour ce numéro Cypriane El-Chami Louna Boulay Directrice administrative et financière Céline Pageot Abonnements et commandes abonnement@kaizen-magazine.fr Tél. 02 23 24 26 40 Service abonnements et administratif 74A, rue de Paris - 35000 Rennes Responsable commerciale Cyrielle Bulgheroni Direction artistique, maquette et mise en pages • www.hobo.paris hobo.paris - hobo@hobo.paris Tél. 06 12 17 87 33 Photo de couverture © Rayann Elzein Prépresse Schuller-Graphic 18, rue de l’Artisanat 14500 Vire Tél. 02 31 66 29 29 Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (Imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières-les-Vallées SIRET : 539 732 990 000 38 • APE : 5814Z Commission paritaire : 0322 K 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. 05 63 94 15 50
Pascal G reboval R édacteu r en ch ef
E
LE SAPIN
st-ce parce qu’enfant, on nous fait croire au Père Noël qu’adulte, on croit en la croissance infinie ? « Il faut le voir pour le croire ! », dirait saint Thomas. Mais il me semble bien que Noël soit devenu le paroxysme de cette « sainte croissance ». Cette fête, célébrant la naissance de celui qui, après avoir renversé la table des marchands du temple, est mort sur une croix entre deux voleurs, est comme l’apogée du consumérisme. Ironie de l’histoire ou capacité du capitalisme à s’approprier les belles histoires ? Lui n’est pas encore saint, mais Thomas Porcher, à sa manière, nous propose de suivre l’exemple de Jésus et, à notre tour, de renverser la table pour en finir avec le mythe de la croissance [lire page 6]. Certes, à chaud, on adhère. Mais Noël est aussi un bon indicateur de notre aptitude réelle à changer. Car qui est vraiment prêt à dire à ses proches le jour J : « je ne vous ai rien acheté, car on va crever de cette surconsommation, et je préfère favoriser la vie » ? Vous arguerez qu’on n’est pas obligé d’acheter neuf, qu’on peut trouver du seconde main ou faire soi-même… Vrai. On peut effectivement commencer par là. En lisant notre dossier [page 20] et notre hors-série Zéro déchet de A à Z, peut-être vous laisserez-vous tenter par ces pratiques vertueuses… Peut-être… Mais en vérité, combien sommes-nous à fabriquer nos cadeaux ? Ou à regarder en face ceux qu’on aime… sans rien leur offrir ? Très peu ! C’est une question personnelle et centrale. Combien d’entre nous ont déjà passé ce pas ? Notre journaliste, Aude Raux, en a cherché, des exempts de présents… Résultat : chou blanc ! Personne ! Pourtant nous pourrions profiter de cette fête de la Nativité pour retrouver le sens étymologique de la croissance : crescere, « naître, venir à la vie ». Car la vie, c’est davantage être qu’avoir, non ? Toute l’équipe vous souhaite un bon solstice d’hiver.
Distribution Presstalis Vente au numéro pour les diffuseurs Groupe HOMMELL • Tél. 01 47 11 20 12 diffusion-hommell@sfep.fr Aucun texte ni aucune illustration ne peuvent être reproduits sans l’autorisation du magazine. Merci.
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SOMMAiRE RENCONTRE Thomas Porcher
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CHRONIQUE Christophe André Bouchons, climatisation et contraintes
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ENQUÊTE Éthique… et tac ! Votre argent change la finance
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EN QUÊTE DE SENS Pierre-Julien Bouniol, boulanger, plus qu’un gagne-pain
LA NATURE MISE À NU Les chauves-souris, amies du ciel nocturne
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GOÛT DE L’ENFANCE SEVE, philo et méditation dès le plus jeune âge
DOSSIER
CRÉATEURS DE CULTURE 56 La belle aventure des librairies coopératives VENT D’AILLEURS Autriche À Vienne, un hôtel géré par des réfugiés
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MOTS CROISÉS L’homéopathie, effet placebo ou pas ?
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BD 66 Benoît Guillaume Créer une monnaie locale
NOËL,
D.I.Y. Des idées lumineuses pour s’éco-éclairer
SOMMAIRE
CHRONIQUE 10 Quitterie de Villepin Prendre soin de la jeunesse EN CHIFFRES Mails et écologie : faites le lien !
ET SI ON LE FAISAIT ENSEMBLE ? Emmaüs Défi, revivre après la rue
INSUFFLER UN NOUVEL ESPRIT
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JE VAIS BIEN, LE MONDE VA MIEUX 72 Avoine, la nouvelle star ? EN CHIFFRES La langoustine, on décortique ?
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VIVRE EN OASIS 78 R(d’)Évolution, un écosystème au service d’une écologie solidaire BD Art-Mella Les câlins, c’est bon pour la santé
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NOS BONNES ADRESSES Metz
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CUISINE En mode Noël… autrement ! Un repas de Noël pas comme les autres !
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RENDEZ-VOUS
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SÉLECTION KULTURELLE
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CHRONIQUE Pierre Rabhi Noël nous rappelle à l’essentiel
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PORTFOLIO
Rayann Elzein, chasseur d’aurores boréales 36
Origine du papier : pages intérieures : Belgique ; encart : Allemagne ; couverture : Pays-Bas. Taux de fibres recyclées : 0 %. Ce magazine est imprimé sur un papier issu de forêts gérées durablement. Eutrophisation : Ptot = 0,018 kg/t. Pour les abonnés : une relance de fin d’abonnement.
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R e n c on t re
BIO EXPRESS 1977 Naissance à Drancy, en Seine-Saint-Denis 2006 Docteur en sciences économiques (Paris 1-Sorbonne) 2013 Membre du groupe d’experts sur le gaz de schiste dans le cadre du débat national sur la transition énergétique 2016 Membre du collectif Les économistes atterrés 2018 Traité d’économie hérétique, publié aux éditions Fayard 2019 Quitte le mouvement Place publique trois mois après l’avoir cofondé, suite à l’alliance avec le PS
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DÉCRYPTAGE
Pascal G reboval Patr ick L azic
THOMAS RENC PORCHER La croissance serait la seule clef de sortie de la crise économique qui nous suit depuis le choc pétrolier de 1974… Selon Thomas Porcher, « économiste atterré », il est plus que temps de penser autrement et d’imaginer d’autres clefs.
Croissance et écologie sont-elles compatibles ? Quand on regarde la croissance au niveau mondial ces soixante dernières années, la réponse est non. Pas du tout même. L’évolution du PIB reste fortement corrélée à celle des émissions de CO2, car notre modèle économique est encore trop basé sur des énergies polluantes. Or le défi, c’est que ces émissions de CO2 diminuent à partir de 2020 ! Nous devons soit changer radicalement nos modes de production et de consommation, soit décroître. Or dans le contexte actuel, aucune de ces options n’est réellement envisagée. On nous répète que les émissions doivent décroître sans toucher au modèle économique. Pourtant la croissance reste le modèle dominant des politiques nationales ? Oui. La croissance n’est rien d’autre que l’augmentation du PIB, c’est-à-dire la production de biens et services, d’une année sur l’autre. Elle ne prend pas en compte la pollution, le bonheur des individus, les inégalités, la question climatique, etc. Même Simon Kuznets, inventeur du PIB, reconnaissait que c’était un indicateur imparfait et qu’il ne devait pas servir de boussole à l’économie. Or aujourd’hui, c’est quasiment la seule boussole des politiques.
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Certes, il y a eu des moments dans l’histoire où la croissance était un enjeu majeur. Jusqu’au xixe siècle, on avait très peur qu’il n’y ait pas suffisamment de richesses pour nourrir la population. Si la croissance démographique dépassait la croissance économique, il risquait d’y avoir des pénuries. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui, notre production de richesses dépasse largement les besoins de la population mondiale. Nous vivons dans un monde de surabondance, on fabrique 100 milliards de vêtements par an 1, on produit de quoi nourrir 11 milliards d’individus, alors que nous sommes 7,5 milliards, avec près de 800 millions de personnes sous le seuil de pauvreté, souffrant de la faim et n’ayant pas accès aux biens de nécessité essentiels. Le problème n’est donc pas la croissance, mais la répartition des richesses produites qui doit être plus égalitaire. La croissance a néanmoins permis l’élévation du niveau de vie en Occident. Comment dire aux pays émergents de s’en priver ? C’est un vrai débat, qui rejoint celui du climat. Qui doit impulser le changement ? Il est effectivement difficile de dire aux pays émergents de changer quand on a pu se développer sans contraintes et qu’on est responsable de la majorité des
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“LA RÉPARTITION DES RICHESSES PRODUITES DOIT ÊTRE PLUS ÉGALITAIRE."
CONTRE
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C h roni qu e Bas ti e n D u b o i s
Q u it tDÉCRYPTAGE er i e de V i llep i n E X P LOR AT R I CE E N DÉM O CR AT I E
PRENDRE SOIN DE LA JEUNESSE CHRONIQUE
IQuitterie de V
ndéniablement, une génération s’est levée, en France et par-delà le monde, avec les marches des jeunes pour le climat. Une conscience collective aiguë du vivant, bouleversante à observer. Et qu’avonsnous entendu tout l’été ? Des railleries… qui en disent long sur la sclérose des « élites » de notre société. Il y a vingt ans, on disait aux jeunes désireux de s’engager : « apprends d’abord », « comprends les codes, soumets-toi à eux », « c’est comme ça », « fais tes armes ». Ce fut une erreur d’accepter ces règles dictées par une société patriarcale et pyramidale.
« Dès 1940, la philosophe Simone Weil nous mettait en garde sur les méfaits des partis. » Beaucoup ont pris leur carte dans des partis politiques, essayant de l’intérieur. Combien sommes-nous à y avoir perdu idéaux et convictions, épuisés par un système anachronique ? Pourtant, dès 1940, la philosophe Simone Weil, dans sa Note sur la suppression générale des partis politiques, nous mettait en garde sur les méfaits des partis broyant les gens, annihilant leur capacité à créer, à penser, à agir collectivement au service de l’intérêt général. Qui s’y méprend ? Combien de militants dans les partis, et combien de personnes épanouies, fières de leur engagement ? Nous n’avons d’autre choix que d’inventer d’autres voies. Hybridons cette démocratie représentative agonisante, qui ne génère plus que colère, frustration et apathie civique, avec d’autres systèmes plus directs : municipalisme, assemblées citoyennes, budgets participatifs, jurys citoyens, conférences 10
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de consensus… dont la mise en œuvre ne nécessite pas de soumission, parcours du combattant, ou petits meurtres entre amis. Interrogeons notre manière d’investir la société. Comment prendre soin de nos jeunes ? Accueillir leur élan, sans le dévoyer, le manipuler, le corrompre ? Plutôt que de vouloir aspirer leurs forces, intelligences, « capter » leurs futurs votes, interrogeonsles sur leurs intuitions en matière d’action collective. Au bord du gouffre, pouvons-nous encore les railler, en les excluant des décisions qui les concernent au premier chef ? Souvenons-nous qu’au cœur des réseaux de résistants se sont engagés de très jeunes femmes et hommes. Reconnaissons à nos jeunes la même capacité à investir les défis vitaux de notre ère, et dans les heures cruciales de l’Histoire, avec un grand H, sachons compter les uns sur les autres, égaux les uns aux autres, toutes générations confondues. Adultes, parents, grands-parents, enseignants, notre rôle pourrait être de transmettre, ça oui, mais en pointant nos erreurs, les leurres auxquels nous avons cru : le mythe du sauveur, la compétition, les « chefs », le culte de la personnalité, lesquels ont accentué l’instrumentalisation, l’exclusion, le détournement des forces au service de l’intérêt général vers les intérêts privés. Renouons avec « l’éprouvé démocratique » : les élections des délégués à l’école, des associations de représentants de parents d’élèves, la gouvernance de nos associations, de nos entreprises, municipales, présidentielles. Pour paraphraser André Breton, en matière de capitalisme comme de démocratie, il ne s’agit pas de « changer la règle du jeu », il s’agit de « changer de jeu ». n
e n c hiffres
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Mails et écologie : faites le lien !
Fan ny Co s t es J ust in e L e J o n c o u r
INFOG
Dans notre société de communication, envoyer un mail est un geste banal, que l’on accomplit chaque jour et à plusieurs reprises. Son impact sur l’environnement, réel, reste cependant méconnu. Pour le limiter, deux mots d’ordre : tri et sobriété.
SURCONSOMMATION
Des messages très gourmands en énergie Les mails sont une source importante de consommation d’énergie. L’envoi d’un mail avec pièce jointe est aussi énergivore qu’une ampoule allumée durant vingt-quatre heures.
8 à 10 milliards
de mails sont échangés chaque heure dans le monde (hors spams). Une donnée numérique parcourt en moyenne 15 000 kilomètres de câbles pour arriver à destination.
ÉQUIPEMENT ET CONSOMMATION D’ÉNERGIE Ordinateur fixe
Écran Smartphone
Tablette
Ordinateur portable
Box (Internet + TV)
De 2 à 7 kWh/an De 5 à 15 kWh/an
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De 20 à 100 kWh/an
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De 30 à 100 kWh/an
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De 120 à 250 kWh/an
De 150 à 300 kWh/an
B ar n abé B in ctin
E n q u e^ t e
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L e Cil Ver t
ÉTHIQUE…
ET TAC !
ÉCLAIRAGE VOTRE ARGENT
CHANGE LA FINANCE Youpi ! les banques aussi se mettent au vert. C’est en tout cas ce qu’elles affirment. Mais de l’effet d’annonce à la réalité, il reste encore parfois un gouffre… sacrément carboné. Comment alors s’assurer que notre argent ne finance plus des puits de charbon ? On a enquêté.
L
es responsables politiques, les grands groupes industriels, les lycéens et même la presse… la chose est désormais entendue, depuis quelques mois, tout le monde est devenu écolo. Aucune raison, donc, que les banques laissent passer le train. De fait, ces dernières années, le secteur bancaire a déployé tout un arsenal de produits censés répondre à ce désir de sens qui pointe le bout de son nez dans la société : livret de développement durable et solidaire (LDDS), fonds labellisés ISR [investissement socialement responsable, lire encadré], green bonds (« obligations vertes »), etc. La finance verte et « responsable » a le vent en poupe. Au point que le One Planet Summit, organisé en décembre 2017 à l’occasion des 2 ans de l’Accord de Paris, affichait haut et fort ses ambitions : la réunion internationale n’avait pour autre objectif que de mettre « la finance publique et privée au service de l’action climat ». Rien que ça ! 14
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BANQUE VERTUEUSE : UNE GAGEURE ? C’est que le secteur avait besoin de se refaire une santé, après des années de réputation dégradée. Dans l’imaginaire collectif, la banque ne se résumait plus qu’à ces traders gourmands, spéculant sans vergogne sur le cours des matières premières ou investissant sur les actifs les plus rentables, sans égard pour les droits humains. Oui, mais voilà, problème : « si le climat est désormais au cœur de leur stratégie de communication sur leur responsabilité d’entreprise, les banques françaises soutiennent toujours massivement les secteurs les plus émetteurs de carbone, à commencer par les énergies fossiles », nous rappellent Les Amis de la Terre dans un petit guide écocitoyen fort utile, « Climat : comment choisir ma banque ? » [disponible en ligne]. Selon le dernier rapport Oxfam, ce sont ainsi près de 43 milliards d’euros qui auraient été investis dans les énergies fossiles par les banques françaises sur la période 2016-2017, contre seulement 12 milliards dans les
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REPORTAGE énergies renouvelables 1. Et les cas de financements pour le moins contestables sont légion : l’entreprise allemande RWE, premier pollueur en Europe avec ses mines de charbon (dont la plus emblématique, à Hambach), est ainsi financée par la Société générale et BNP Paribas. Tout est donc à refaire, les espoirs d’une banque enfin vertueuse envolés presque aussi vite qu’ils n’étaient arrivés ? De quoi virer fataliste ? C’est pourtant en partie avec l’argent des citoyens, déposé sur un compte épargne, que sont réalisées de telles opérations. Selon le dernier rapport trimestriel de la Banque de France, l’épargne globale des ménages français est évaluée à 5 153 milliards d’euros : un niveau record, et un sacré pactole à disposition des banques. Or les campagnes de « désinvestissement » menées notamment par les ONG 350.org et ATTAC, incitant les acteurs financiers à se désengager des actifs les plus polluants, ont offert quelques premiers succès encourageants. Il y a tout juste un an, en novembre 2018, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) annonçait ainsi retirer tous ses investissements dans les entreprises dont l’activité dans le charbon dépasse 10 % du chiffre d’affaires : loin d’être anodin pour l’institution financière publique qui gère l’essentiel des fonds du LDDS, et ses 24 millions de titulaires en France. Au total, le portefeuille des placements financiers désinvestis par la CDC pourrait s’élever à 150 milliards d’euros 2. Mais la dynamique pourrait s’étendre plus largement : libre à chacun de s’interroger sur l’utilisation qui est faite de son propre argent. Voilà qui ne
manque toutefois pas d’engendrer d’autres questions : s’il faut enlever son épargne des grandes banques françaises, où alors la réaffecter ? Comment s’assurer qu’elle ne participe plus de l’aggravation des inégalités ou de la destruction du vivant ? Sacrée gageure ! Il existe pourtant bel
« Libre à chacun de s’interroger sur l’utilisation qui est faite de son propre argent. » et bien des acteurs alternatifs sur le marché bancaire français, comme l’explique le guide des Amis de la Terre : « Ancrés dans l’économie locale, ni la Nef (coopérative de finances solidaires) ni le Crédit coopératif (banque de référence de l’économie sociale et solidaire) ne sont impliqués dans des grands projets controversés. »
ISR, C’EST QUOI ? Le terme d’investissement socialement responsable (ISR) qualifie les produits bancaires qui intègrent des critères extrafinanciers tels que l’environnement, les questions sociales, éthiques et la gouvernance dans les décisions de placement et la gestion de portefeuilles. Toutes les banques proposent des produits labellisés ISR. N'hésitez pas à les demander, car ils sont rarement proposés spontanément.
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LA na t, ur e mise A nu Fran ço i s L a ss e r re C a rol in e G a m o n
Les chauves-souris DÉCRYPTAGE
AMIES DU CIEL NOCTURNE
DE LA NA MISE
On a raconté à peu près tout et n’importe quoi sur les chauves-souris.
Désormais, le savoir tend à dépasser les croyances et peu d’entre nous craignent qu’une pipistrelle enragée ou un renard volant se prenne dans leurs cheveux. Tant mieux, car c’est totalement irrationnel ! En revanche, leur présence nocturne continue d’inquiéter.
BIOMIMÉTISME Les chauves-souris sont des chiroptères – du grec chiro , la main, et -ptère , l’aile. Elles volent avec leurs mains, dont les doigts sont reliés par une fine membrane. Léonard de Vinci s’en est inspiré pour créer son « ornithoptère ». D’autres biomiméticiens pour soigner les AVC grâce à une molécule anticoagulante de leur salive ou pour aider les personnes aveugles à s’orienter grâce à l’écholocation [lire ci-contre].
ET L’HIVER ? En hiver, il n’y a quasiment plus d’insectes actifs. Les chauves-souris hibernent alors à l’abri, voire migrent. Les nichoirs peuvent ainsi accueillir des chauves-souris.
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MUSES DES SONARS ?
Non. Le fonctionnement du sonar a été découvert au début du siècle dernier, un peu avant le système d’écholocation – localisation par l’écho – par ultrasons des chauves-souris. La propension du son à rebondir sur les objets et à être capté en retour leur est en effet commune.
GRANDES ? Non. Les espèces communes sont vraiment petites, comme la pipistrelle [voir illustration] qui mesure environ 2 centimètres, sans la queue, et 20 centimètres d’envergure. En Europe, une « grande » chauve-souris, comme la grande noctule, avec ses 15 centimètres de long environ, n’est pas plus grande qu’un smartphone ! Dans la moitié sud de la France, son envergure de plus de 40 centimètres peut se faire remarquer dans le ciel, mais reste loin du record mondial du renard volant des Philippines, qui mesure 50 centimètres de long pour 1,50 mètre d’envergure.
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DOSSIER
Au d e Raux J érômi ne Deri g ny, c o llect i f Arg os
DOSSIER-PORTFOLIO
NOËL INSUFFLER UN NOUVEL ESPRIT Plus de liens, moins de biens ! Voici, en résumé, la lettre de Kaizen au Père Noël. On commande ainsi du temps en partage pour savourer la magie de Noël : du temps pour décorer le foyer, ensemble, avec des éléments naturels ; du temps pour réfléchir, lors du choix des cadeaux, à la façon de réduire son impact environnemental et ses déchets, par exemple en privilégiant des présents d’occasion, immatériels ou faits maison ; du temps pour mitonner des repas de fête ; du temps pour chausser ses bottes de sept lieues et se promener en famille ; du temps pour veiller autour de jeux de société… Et puisqu’en cette période, tout est possible, pourquoi ne pas se métamorphoser en Père ou Mère Noël bénévole et créer des liens avec les plus isolés ?
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« NOËL EST LA FÊTE DOSSIER-PORTFOLIO
DE L’ESPOIR » Nadine Cretin est historienne des fêtes, spécialiste des relations entre le territoire et ses usages festifs, rituels et spirituels. Elle nous explique en quoi Noël est « porteur d’espoir ».
© DR
DOSSIER
NOËL , INSUFFLER UN NOUVEL ESPRIT
BIO EXPRESS 1 949 Naissance 1 997 Le Livre de Noël. Fêtes et traditions de l’Avent à la Chandeleur, publié chez Flammarion 2010 Docteur en histoire à l’EHESS 2010 Histoire du Père Noël, publié au Pérégrinateur 2013 Noëls des provinces de France, publié au Pérégrinateur
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Quelle définition donneriezvous du mot Noël ? Étymologiquement, Noël signifie « naissance ». À l’origine, on parlait de Nativité, en référence à la naissance de Jésus. En 1105, dans un écrit retraçant la vie du navigateur irlandais saint Brendan, on trouve l’une des premières mentions du mot dans Al Naël Deu qui veut dire « à la naissance de Dieu ». Pourquoi fête-t-on Noël le 25 décembre alors que l’on ne connaît pas la date précise de la naissance de Jésus ? Effectivement, personne ne connaît cette date avec certitude, car elle n’est pas mentionnée dans les Évangiles. La première attestation de la naissance du Christ un 25 décembre figure dans le chronographe — sorte d’agenda — d’un Romain qui date de 354. Pourquoi les chrétiens ont-ils choisi cette date ? Dans l’hémisphère nord, les peuples germaniques célébraient déjà, avant le IV e siècle, le solstice d’hiver à travers la fête de Yule. De même, deux fêtes importantes existaient chez les Romains. Vers le 17 décembre, étaient ainsi organisées les Saturnales, qui consistaient en de grands banquets domestiques où se mêlaient maîtres et esclaves. Ceux — les militaires en particulier — qui vénéraient le dieu Mithra, né de la pierre un 25 décembre, rendaient, eux, un culte au soleil invaincu. L’Église de Rome a sans doute choisi la date de la fête de la Nativité pour couvrir ces fêtes païennes (dans le sens de « non chrétiennes »).
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Peut-on conclure que la fête de Noël est la christianisation de celle du solstice d’hiver ? Certaines traditions de Noël prouvent qu’il y a eu un amalgame entre ces fêtes. Je précise que le solstice d’hiver ne se limite pas au 21 décembre, jour où la nuit est la plus longue dans l’hémisphère nord et à partir duquel on gagne quotidiennement un peu plus de lumière jusqu’au solstice d’été, le 21 juin. Le solstice d’hiver s’étire du 6 décembre au 6 janvier environ, lorsque l’inclinaison de la Terre, penchée sur son orbite, est éloignée au maximum du Soleil. Lors de ces jours les plus courts du calendrier, on a l’impression que le soleil reste immobile. Étymologiquement, d’ailleurs, le mot solstice signifie que le Soleil (sol, en latin) est à l’arrêt (stare). La vie des paysans, qui représentaient la grande majorité de la population à l’époque, était dépendante des récoltes, des conditions météorologiques et des saisons. À cette période de l’année, ils travaillaient peu dans les champs. Et ils ressentaient le besoin de conjurer le mauvais sort, car beaucoup d’éléments les inquiétaient. À commencer par la présence de la nuit, où les revenants ne sont jamais loin. Ils étaient en outre habités par la crainte que le Soleil ne reprenne pas sa course, que les jours ne se remettent pas à rallonger, que le temps reste hivernal et que les arbres soient éternellement dépouillés de leur verdure. Comme on le constate, les paysans étaient très liés à leur environnement, au cycle de la nature. Que faisaient les paysans pour conjurer le mauvais sort pendant ce solstice d’hiver ? C’est une époque de divination. Aussi, inconsciemment, guettait-on les signes. Par exemple, dans l’espoir d’une nouvelle année prospère, les Provençaux mettaient à germer des grains de blé
LA DE GABEGIE NOËL DOSSIER-PORTFOLIO
SIER
Les décorations lumineuses d’une maison et d’un jardin pour Noël, allumées à raison de quatre heures par jour pendant un mois, représentent
5 millions
1,5 moi s
DE SAPINS
DE CONSOMMATION ÉLECTRIQUE DU FOYER.
— cultivés à grand renfort d’engrais et de pesticides de synthèse — sont coupés en France pour Noël.
Source : Ademe
Source : France nature environnement
75 000 tonnes
20 000 tonnes
DE JOUETS SONT JETÉES
DE PAPIER CADEAU
à la poubelle chaque année en France. Ces jouets sont composés à 90 % de matières plastiques et synthétiques.
sont utilisées à Noël en France, l’équivalent de 380 000 arbres. Source : GreenFlex, société de services en développement durable (SSDD) européenne
Source : ministère de la Transition écologique et solidaire
65 % DES JOUETS
vendus dans l’Union européenne
SONT IMPORTÉS DE CHINE. Source : Fédération française des industries Jouet-Puériculture (FJP)
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DOSSIER
NOËL , INSUFFLER UN NOUVEL ESPRIT M a ëy l i s Vés i r
DOSSIER-PORTFOLIO FAIRE CROIRE AU PÈRE NOËL :
MENSONGE OU MAGIE ? Quand la majorité des parents perpétuent la tradition du Père Noël, certains préfèrent s’en défaire et expliquer dès le départ à leurs enfants que le Père Noël n’existe pas. Faire croire ou ne pas faire croire ? La question anime chaque fin d’année parents et psychologues !
S
e lever la nuit pour déposer discrètement les cadeaux au pied du sapin, disposer un tissu rouge près de la cheminée, vider le verre de lait offert au Père Noël et émietter quelques restes des carottes laissées pour ses rennes… La nuit du 24 au 25 décembre, les parents déploient des trésors d’imagination pour faire croire aux enfants que le Père Noël est passé. « Le mythe du Père Noël est un rite familial qui s’est imposé au milieu du XIXe siècle dans la plupart des pays occidentalisés avec l’apparition d’un personnage bienveillant qui apporte des cadeaux [lire encadré], explique Dominique Tourrès, pédopsychiatre, psychiatre et psychanalyste. C’est un rite de plaisir autant pour les enfants que les parents qui retombent en enfance et leur transmettent un monde de rêverie. » Est-il pourtant sain pour le développement de son enfant de transposer un personnage fictif dans le réel quand luimême ne peut pas bien faire la part des choses ? « C’est un “mensonge” sans danger
DOSS
qui stimule l’imaginaire de l’enfant », répond Dana Castro, psychologue-clinicienne et psychothérapeute, autrice de Petits silences, petits mensonges. Le jardin secret de l’enfant (Albin Michel, 2012). Dans Pédagogie scientifique, Maria Montessori écrivait déjà à propos du Père Noël : « Mais comment ce qui est le fruit de notre imagination pourrait-il développer l’imagination des enfants ? Nous seuls imaginons et non eux : ils croient, ils n’imaginent pas. » Inspirés de sa pédagogie, les créateurs du blog Famille épanouie, Fabien et Émilie, parents de trois enfants, ont fait le choix de ne pas célébrer ce mythe collectif : « Nous ne voulions simplement pas mentir à nos enfants et jouer avec leur crédulité, explique Fabien. Le but, c’est vraiment de ne pas créer de faux espoirs et provoquer une forte désillusion en découvrant la vérité. »
LE PÈRE NOËL : UN RITE INITIATIQUE ? Cette désillusion, Floriane, mère d’un fils de 4 ans, l’a vécue elle-même à l’âge de 6 ans : « Sur le moment, je me suis sentie trahie, écrit-elle sur son blog Parents naturellement. Comment réagir lorsque l’on se rend compte que les personnes à qui on fait le plus confiance nous ont caché un si
on joue
« Tous les ans, aux jeux de société et c’est » un très bon moment.
ensemble
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Jasmine et Lila
DOSSIER
NOËL , INSUFFLER UN NOUVEL ESPRIT
UN NOËL
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ZÉRO DÉCHET
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À « l’ère du Poubellocène », selon l’expression de Baptiste Monsaingeon, auteur de Homo Detritus 1, il est urgent de réduire, en amont, le surplus de déchets provoqués par Noël pour qu’il ne rime plus avec poubelle. Depuis le sapin jusqu’aux emballages cadeaux, en passant par le repas et la décoration, voici des solutions. Preuve que le Père Noël n’est pas une ordure !
MON BEAU SAPIN… VIVANT Les fêtes de Noël terminées, ça sent le sapin ! L’arbre qui a illuminé le réveillon va ainsi finir, au mieux, au compost, au pire, avec les ordures ménagères ou abandonné sur un trottoir. Une alternative à ce funeste sort ? Louer un conifère vivant. France nature environnement, qui fédère les associations de protection de la nature et de l’environnement, recommande deux sites de location : https://treezmas.com et www.ecosapin.ch. Le principe consiste à se faire livrer à son domicile un sapin avec ses racines plongées dans un pot. Après les fêtes, l’arbre est récupéré, puis replanté dans la nature, dans l’attente de reprendre sa croissance pour enchanter un prochain Noël. À noter qu’une fois sa taille devenue trop imposante, l’arbre reste définitivement en pleine terre. Et si le conifère n’a pas supporté l’ambiance chaleureuse des fêtes de fin d’année – ce qui arrive
ts n e i d é r g n i s e u q l « Juste que de e r i a f t n e v u e p s simple se o h c e u q l e u q t en e. » ce mom r i a n i d r o a r t d’ex e
Vital et Vincian
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P O R T FOL IO
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Rayann Elzein
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CHASSEUR D‘AURORES BORÉALES Les aurores boréales illuminent le ciel nordique lorsque les particules chargées du vent solaire interagissent avec les hautes couches de l’atmosphère terrestre. Elles sont visibles pendant la plupart des nuits claires à des latitudes au-delà du cercle arctique, entre la fin du mois d’août et le début du mois d’avril. Les peuples autochtones des régions polaires ont tous élaboré une explication mythologique de ce phénomène. Rayann Elzein, photographe et guide, est chasseur d’aurores boréales. Depuis huit ans, il voyage dans les régions polaires pour les photographier. Il accompagne des petits groupes à travers les forêts et lacs de la partie la plus septentrionale de la Laponie finlandaise, afin de leur faire profiter du spectacle lumineux, mais aussi de l’ambiance particulière liée au silence dans ces régions quasi inhabitées. Au-delà de la science, Rayann Elzein invite chacun à laisser libre cours à son imagination pour trouver la signification de ce spectacle, l’un des plus impressionnants que la nature nous réserve. n POUR ALLER PLUS LOIN • www.rez-photography.com
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TFOLIO
Pendant l’automne, avant le gel hivernal, les aurores boréales se réfléchissent sur les innombrables lacs de la Laponie finlandaise.
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B en oît Hel m e
Et si on le faisait ensemble ?
SOLUTIONS
Patr ick L azic
EMMAÜS DÉFI
REVIVRE APRÈS ET LA SI RUE ON
LE ENSEMB
Au sein d’Emmaüs Défi, à Paris, résonne la voix de l’abbé Pierre. Le bien nommé dispositif Convergence déploie toutes les solutions possibles pour lutter contre la grande exclusion et offrir à ceux qui ont passé des mois ou des années à la rue de prendre soin d’eux, d’intégrer un logement durable, et de retravailler au sein d’une organisation solaire et solidaire.
La boutique Emmaüs la plus grande de Paris, avec 1 200 mètres carrés de produits recyclés à la vente.
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e visiteur entre ici comme dans un souk lumineux. Un local de 1 200 mètres carrés avec toutes sortes de produits recyclés mis à la vente : fringues en mode résolument vintage, meubles originaux, jouets avec ou sans bois, livres, vinyles, CD et DVD d’avant la dématérialisation de la culture, ordinateurs testés, vélos, lampes et autres objets du quotidien… Situé dans le 19e arrondissement de Paris, l’espace Emmaüs Défi occupe une superficie totale de 5 500 mètres carrés : outre le plus grand magasin
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Emmaüs de Paris, on y trouve des ateliers et des bureaux. Défi envisagé ? Lutter contre la grande exclusion. « Je suis arrivé du Brésil en pensant retrouver mes enfants, mais les choses ne se sont pas passées comme prévu, raconte Lucio de Morais, 52 ans. Je me suis retrouvé à la rue pendant neuf mois jusqu’à ce que des assistants sociaux en maraude me proposent de manger dans une cantine municipale et d’y dormir la nuit, entre 19 heures et 6 heures du matin. Puis on m’a proposé de travailler progressivement chez Emmaüs Défi. Dans un premier temps, j’ai travaillé cinq heures par semaine, au SMIC horaire, à faire du tri, de la livraison et de la récupération, puis dix heures, puis quinze heures et enfin vingt-six heures. Parallèlement à cette insertion, je me suis installé dans une chambre durable en centre d’hébergement, dans laquelle je vis encore aujourd’hui. J’ai travaillé chez Emmaüs Défi une quinzaine de mois. Aujourd’hui, grâce à leur dispositif Convergence, je travaille trente-cinq heures par semaine en CDI chez un traiteur. Je prépare les commandes, je les conditionne et je les livre aux clients. Pour remercier Emmaüs, je voudrais devenir un jour bénévole. » Aujourd’hui, cent cinquante personnes en insertion professionnelle travaillent chez Emmaüs Défi. Leur point commun ? Elles ont mordu la poussière de la rue pendant des mois ou des années, après une rupture sentimentale, un handicap mal pris en charge, un licenciement, un plongeon glacial dans l’alcool ou la drogue dure. C’est
Maël ys Vésir
E n q u e^ t e de sens
SOLUTIONS
PIERRE-JULIEN BOUNIOL
BOULANGER, EN QUÊTE PLUS QU’UN GAGNE-PAIN
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Auparavant chargé de communication, Pierre-Julien Bouniol est devenu artisan boulanger. Depuis 2016, les clients se précipitent chez Bella Ciao, « boulangerie utopiste », à Avignon, autant pour la qualité du pain que pour la qualité du lien.
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ravailler une journée entière devant son ordinateur ? Pierre-Julien n’en serait plus capable. Il était pourtant loin d’imaginer devenir artisan boulanger après une formation à Sciences Po Aix, option journalisme. « Après mes études, j’ai enchaîné les piges, mais ma situation étant devenue trop précaire et avec un premier bébé en route, je me suis tourné vers la communication. J’ai toujours eu des convictions, et j’ai eu beaucoup de plaisir à promouvoir au sein de l’Agence pour une économie alternative et solidaire (APEAS) des initiatives porteuses de sens. » Mais en 2014, l’association subit un redressement fiscal et Pierre-Julien est licencié pour motif économique. « Cela a été douloureux, mais c’est arrivé à un moment où je m’interrogeais de plus en plus sur le sens à donner à mon travail et sur mon engagement, en étant moins dans le “dire”, et davantage dans le “faire”. » C’est à ce moment que Pierre-Julien découvre Le Bar à Pain, à Marseille. « Le boulanger faisait les choses différemment, son pain était bio et j’ai commencé à lui poser des questions et à expérimenter dans ma cuisine. Cela m’a tellement plu que je lui ai demandé de me prendre en stage, même si une petite voix me disait : “Tu as passé une partie de ta vie derrière un ordinateur, vas-tu supporter le travail physique et le rythme que ce métier impose ?” » Tout s’accélère alors pour le jeune père de famille, qui intègre l’École internationale de boulangerie
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à Sisteron (Alpes-de-Haute-Provence), école dite « des reconvertis », pour une formation de trois mois. Diplôme en poche, Pierre-Julien se donne pour objectif de faire du pain bio au levain en milieu urbain : « Faire du bio était pour moi une question de simplicité et de bon sens ; le pain, c’est de la farine, de l’eau et du sel, pas besoin de plus. Dans la liste d’ingrédients des pains conventionnels, vous avez une liste de quinze mille produits, une véritable aberration ! » En mettant « toutes ses économies sur la table » et accompagné par la Nef [coopérative financière offrant des solutions d’épargne et de crédit orientées vers des projets d’utilité sociale, écologique et/ou culturelle, lire page 14], Pierre-Julien ouvre sa boulangerie en 2016 en plein cœur d’Avignon. « On a eu un suivi financier et humain exemplaire que l’on n’aurait pas pu imaginer avec des banques classiques. »
UNE « BOULANGERIE UTOPISTE » Insufflant un petit air de révolution, Pierre-Julien baptise sa « boulangerie utopiste » Bella Ciao : « une manière d’interpeller et de résister à ce qu’on voit dans une boulangerie conventionnelle ». Sans chambre à lever ni d’aide à la fermentation, le cycle naturel du pain – qui prend de cinq à six heures – est ici respecté. « C’est essentiel pour avoir du pain de qualité, qui se conserve longtemps. Notre farine vient d’un moulin artisanal près de Sisteron, notre sel de Méditerranée et on fabrique notre levain. On essaye au maximum de privilégier le circuit court. »
SEVE
GoU^t de l'enfance
L ou n a B ou l ay
SOLUTIONS
GOÛT DE
PHILO ET MÉDITATION DÈS LE PLUS JEUNE ÂGE L’association SEVE, présidée par le philosophe Frédéric Lenoir, anime des ateliers de philosophie et de méditation pour les enfants et les adolescents. Au programme : pratique de l’attention, de l’argumentation et construction de la pensée. Reportage à Montreuil.
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a peur est-elle utile ? » Non, ceci n’est pas un sujet du bac philo 2019, mais le thème d’un des ateliers philo SEVE (Savoir être et vivre ensemble) destinés aux enfants et aux adolescents ! Fondée par le philosophe Frédéric Lenoir en 2016, l’association a animé 180 ateliers à Montreuil l’été dernier, dans les centres de loisirs la semaine et les parcs de la ville le week-end. L’occasion pour les jeunes Montreuillois de prendre un « temps d’humanité », pour se questionner, écouter et argumenter à partir de discussions philosophiques. Ce jour-là, Atika Lebret, animatrice SEVE, clôture la semaine d’ateliers dans trois centres de loisirs. Huit filles et trois garçons, âgés de 7 à 12 ans – des habitués depuis quelques semaines – encerclent l’animatrice. La particularité d’un atelier SEVE ? Il débute toujours par une séance de méditation pour favoriser l’attention. Yeux fermés, les participants inspirent et expirent. « À chaque fois qu’une émotion arrive, on se reconcentre sur sa respiration. On peut mettre la main devant le ventre. Pensez au moment le plus joyeux de votre vie qu’on doit lire sur votre visage », les guide Atika. L’exercice est répété à la maison pour certains enfants, comme Robin, 9 ans : « Je fais la méditation avant d’aller me coucher, ça m’aide à mieux m’endormir, plus tôt. » ou encore Max, 7 ans : « Avec la méditation, je contrôle mieux mon énergie. »
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Atika résume ensuite quelques pensées-clés de philosophes : « Hobbes pense que l’homme naît mauvais. Tandis que Kant dit que l’homme naît neutre. Les menaces et les opportunités vont le rendre bon et mauvais. » « Moi, je suis Kant ! », s’exclame un petit garçon, qui s’identifie au penseur allemand.
CONSTRUIRE SA PENSÉE En partenariat avec l’Éducation nationale, l’association intervient également dans de nombreuses écoles et antennes jeunesse de l’Hexagone, et aussi en Belgique, au Luxembourg, en Suisse, au Maroc et au Canada. Pour animer ses ateliers de philosophie et pratique de l’attention, SEVE accompagne tout adulte qui s’intéresse à la question. Atika, 43 ans, fait partie de la première promotion de formateurs. Cette ancienne juriste, lassée de « voir des jeunes bourrés de talent qui ne le savaient pas », a tout plaqué pour suivre une formation de psychologie de l’enfance. Pour elle, plus les enfants grandissent, plus ils s’autolimitent et prêtent attention au regard des autres. « Les plus petits sont plus spontanés, mais ont plus de mal à argumenter. Ils lancent le truc et les grands raisonnent à partir de là. » Pour Frédéric Lenoir, « les animateurs SEVE ne sont pas là dans un but d’apprentissage ou de transmission de connaissances. Ils ne sont pas professeurs de philosophie, mais contribuent au développement de la pensée et à l’élargissement du vocabulaire. »
, CRE ATEURS DE CULTURE
Au rél ie D u n ou au
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Maël ys Vésir
LA BELLE AVENTURE
DES LIBRAIRIESKRÉ
COOPÉRATIVES Qu’elles se créent ou se transforment, les librairies coopératives ont le vent en poupe. Valeurs humaines, projet démocratique et pérennité économique : la forme coopérative réunit de nombreux atouts et de plus en plus de librairies indépendantes, confrontées à la tempête Amazon et à la fermeture des commerces de proximité, adoptent les statuts de Scop ou Scic 1. Pour survivre et donner du sens.
Bruno Cochard (gauche), directeur de la librairie, et Pierre-Jean Fichet (droite), président de la Scic.
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ercredi, 10 heures, jour de livraison. Les cartons s’empilent dans la petite librairie de la rue Beaulieu. L’enseigne n’est pas encore installée, de simples feuilles de papier indiquent « L’Autre Librairie » sur la devanture. « J’ai besoin d’aide, Bruno, j’ai de petits bras ! », plaisante Marie, enjouée par le déballage de nouveaux livres. « Ah ! il est arrivé celui que j’attendais ! » La bonne
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humeur est de mise, les mots chantonnent dans la bouche des deux libraires qui travaillent ensemble depuis l’ouverture de la librairie coopérative en juin 2019, dans le centre historique d’Angoulême, en Charente. Le point de départ de cette belle aventure ? Une énième fermeture de librairie de quartier qui attriste les habitués. Nous sommes en septembre 2018. Ils s’associent, sont au départ soixante, cogitent, trouvent une nouvelle formule… et créent L’Autre Librairie juste en face de l’ancienne. Et voilà la Scic lancée ! Aujourd’hui, ils sont près de deux cents souscripteurs. Au départ monde inconnu, ils se sont très vite approprié le fonctionnement coopératif grâce à une formation de l’Urscop 2. Pierre-Jean Fichet, président de la Scic, explique : « Avec une part sociale à 50 euros, l’accès à la société coopérative est aisé et les souscripteurs augmentent régulièrement. Notre motivation était double : soutenir une librairie en cœur de ville et participer à sa vie démocratique. Sans leadership et avec un mode de décision « une personne, un vote », la société coopérative s’est imposée à nous. » Les membres associés au capital peuvent être des salariés, mais aussi des clients, des associations, des partenaires privés ou encore des collectivités territoriales. La Scic permet donc de réunir au sens large.
N ej m a B rah im
vent d'ailleurs
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À VIENNE,
AUTRICHE
UN HÔTEL GÉRÉ VENT D’A
PAR DES RÉFUGIÉS Dans cet hôtel situé au nord-est de Vienne, en Autriche, le personnel est constitué en grande majorité de réfugiés. Avec ce concept, unique en Europe, Magdas Hotel vise à mettre en lumière leurs nombreux talents tout en les accompagnant dans leur intégration.
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«
e n’aurais jamais pu imaginer que ce lieu était aussi spécial », sourit Omid. Derrière le comptoir, le jeune homme s’interrompt pour accueillir, dans un anglais parfait, un couple de touristes. Il est 18 heures, et le soleil couchant vient redorer la façade jaune du Magdas Hotel, au nord-est de la capitale autrichienne. Omid pioche parmi les clés suspendues au mur et propose aux clients de les accompagner jusqu’à leur chambre. Coquet, il prend le temps de passer une main dans son épaisse chevelure noire et réajuste sa chemise blanche.
« UNE GRANDE FAMILLE » Les murs qui longent les escaliers sont parés de couleurs vives et de nombreux portraits encadrés. Avec sa décoration alliant vintage et moderne et des tarifs attractifs, l’établissement séduit un public venu du monde entier. « Il arrive que certains me demandent d’où je viens, car ils se sont renseignés sur l’hôtel avant leur venue, chuchote le réceptionniste. Mais d’autres ne connaissent pas du tout le concept et c’est amusant de voir leur réaction en direct ! » Une réaction qui, d’après lui, se veut toujours positive et bienveillante : avec sa devise « Restez ouvert d’esprit », Magdas Hotel ne désemplit pas. Sa particularité ? Embaucher des réfugiés quand l’heure est souvent à la 60
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discrimination. « Celles et ceux qui travaillent ici nous disent avoir eu du mal à trouver un job auparavant », souligne la directrice, Martina Healy *, prenant pour témoin Jamal, accoudé au bar. Dès son lancement, en 2015, le projet est financé et soutenu par Caritas, l’organisme humanitaire de référence à Vienne qui vient en aide aux plus démunis, dont les migrants. Le lieu, qui héberge alors une maison de retraite, est entièrement réhabilité, notamment à l’aide de dons, pour offrir une expérience unique à la fois au personnel et aux clients. Chaque chambre est ainsi singulière et il arrive que certains employés dorment sur place. La responsable en est fière : « Cela se nomme entreprise sociale, mais pour nous, c’est surtout une grande famille. Cette forme d’entrepreneuriat, qui privilégie une logique d’ouverture et d’humanisme plutôt que de profit, est une solution aux problématiques sociales et économiques. » Au total, pas moins de seize nationalités se côtoient ici parmi les employés, de la Syrie au Nigeria, en passant par l’Iran, l’Afghanistan ou le Congo. Omis, de retour à la réception, s’occupe de comptabiliser le nombre de réservations du jour. Cela fait près de trois ans qu’il travaille là. « J’avais 14 ans lorsque je suis arrivé en Autriche. Mon père est parti le premier dans l’espoir d’une vie meilleure loin de la guerre. Puis il nous a fait venir, mes neuf frères et sœurs et moi, de façon
TRANSITION
BD REPO
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D.I.Y. Auré l ie A i m é J é rô m in e D e r i g ny, c o l l e ct if A rg o s
AUTONOMIE
DES IDÉES
D.I LUMINEUSES
POUR S’ÉCO-ÉCLAIRER L’éclairage domestique représente une part non négligeable de notre consommation d’électricité. Quelques habitudes simples à adopter permettent à la fois d’alléger considérablement sa facture et son empreinte écologique. Et pourquoi ne pas fabriquer vos propres lampes en récup, et ainsi donner du charme à votre intérieur sans surcoût pour la planète ?
DES ASTUCES SIMPLES… Nous éclairons nos intérieurs environ 6,7 heures par jour, ce qui représente 12,8 % de la consommation d’électricité par foyer 1. Une part non négligeable, qu’il est facile de réduire en changeant quelques habitudes. D’abord, des astuces simples permettent de limiter l’éclairage artificiel : utiliser des peintures aux couleurs claires dans nos pièces de vie, des jeux de miroirs, et orienter les meubles de manière à ne pas entraver la lumière naturelle. De même, il est recommandé d’ajuster l’intensité lumineuse de nos ampoules en fonction de nos besoins : les pièces à vivre nécessitent de 200 à 300 lumens par mètre carré (lux) contre 100 à 200 lumens par mètre carré pour les chambres et couloirs. Le choix de l’ampoule a lui aussi son importance. Les ampoules fluocompactes (basse consommation) consomment quatre à six fois moins d’électricité que les ampoules à incandescence classiques. Plus chères à l’achat, elles permettent de réaliser des économies d’électricité et sont donc amorties à moyen terme.
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… AU SURCYCLAGE Enfin, pour s’éclairer écolo, pourquoi ne pas faire vous-même votre système d’éclairage ? Afin de créer un luminaire, deux possibilités s’offrent à vous : utiliser une lampe préexistante et lui donner une nouvelle vie, ou en créer une de toutes pièces, avec des notions très basiques en électricité. Pour cela, rien de tel que l’usage de matériaux récupérés : bois de palette, branches, tuyaux, boîtes de conserve, livres, cartons, chutes de tissu… Une infinité d’objets sont propices à la création. Le fait de récupérer des éléments dont nous n’avons plus l’usage et d’en faire des produits dits « d’utilité supérieure » s’appelle le surcyclage, ou upcycling. Contrairement au recyclage classique pour lequel le produit aura a priori une qualité moindre ou égale à celui d’origine, on recycle donc « par le haut », économisant ainsi l’énergie grise (énergie consommée lors du cycle de vie d’un matériau ou produit) et les matières premières. n 1. Association française de l’éclairage - www.afe-eclairage.fr
AUTONOMIE
I.Y
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Syl v ie Ham pikian
je vais bien, le monde va mieux
AUTONOMIE
Ol iv ier D egorce
AVOINE JE VAIS BIEN LE M LA NOUVELLE STAR ? L’avoine est un aliment énergétique précieux, indispensable dans les mueslis, les porridges, les biscuits et même les potages. La nouvelle star des céréales est aussi très présente dans les savons et cosmétiques tout doux. Mais connaissez-vous ses nombreuses propriétés médicinales ? PORTRAIT L’avoine (Avena sativa) est une céréale gracieuse, qui balance au gré du vent ses hautes tiges souples portant des panicules dorées, et dont les épillets abritent les précieuses graines. Cultivée depuis plus de deux mille ans, elle n’a pourtant fait son entrée dans nos assiettes que vers la fin du xixe siècle, sous l’influence de l’abbé Kneipp, qui comprit ses atouts nutritionnels. Aujourd’hui encore, l’alimentation humaine ne concerne que 5 % de la production d’avoine, la majorité étant destinée aux animaux domestiques. Son usage médicinal est encore plus anecdotique, bien qu’il soit fort ancien lui aussi, figurant notamment dans des recueils ayurvédiques. PROPRIÉTÉS Les propriétés de l’avoine se résument en deux termes qui peuvent sembler paradoxaux : énergie et douceur. D’une part, c’est une céréale tonifiante, source notamment d’acides aminés et d’amidon. C’est ce même amidon qui lui confère en grande partie ses effets adoucissants pour le tube digestif et pour la peau, universellement appréciés. D’autre part, elle contient des composés bio-actifs (flavones, gramines, bétaglycanes, GABA) aux propriétés sédatives (facilitant le sommeil), déstressantes et relaxantes. De plus, sa consommation régulière permet d’abaisser le « mauvais cholestérol » (lipoprotéines de faible
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densité, ou LDL) qui favorise les maladies cardiovasculaires. Il faut toutefois savoir que l’avoine contient de l’avénine, une protéine apparentée à la gliadine du gluten de blé, mais qui serait moins allergénique. Si vous souffrez d’intolérance au gluten ou de maladie cœliaque, commencez de préférence par de petites quantités d’avoine, afin d’évaluer votre tolérance à cette céréale.
ON L’EMPLOIE COMMENT ? Flocons, farine : consommés à la dose moyenne de 75 grammes par jour, les flocons et la farine d’avoine donnent du tonus tout en prévenant le stress, la constipation et le mauvais cholestérol. Pensez-y dans vos mélanges de céréales, galettes, salades, potages, entremets. Les flocons et la farine d’avoine sont également très utiles pour les soins de la peau, grâce à leurs propriétés adoucissantes. Ils s’emploient notamment en masques visage pour les peaux sèches, matures, sensibles ou dilués dans le bain (en farine ou en sachets de flocons) pour calmer les eczémas et les peaux irritées. Paille : la paille d’avoine est constituée des parties aériennes de l’avoine, récoltées encore vertes. Elle est surtout employée en tisane pour favoriser le sommeil. Faites infuser une cuillère à café de plante pendant 5 à 10 minutes dans une tasse d’eau bouillante, sous couvercle. Filtrez et buvez environ 30 minutes avant le coucher.
Gabrielle Paoli
vivre en oasis
AUTONOMIE
R(D’)ÉVOLUTION
UN ÉCOSYSTÈME AU SERVICE COL D’UNE ÉCOLOGIE SOLIDAIRE Depuis sa création, R(d’)Évolution, association d’éducation populaire située dans les Cévennes, s’appuie sur le collectif pour préserver les écosystèmes et soutenir les personnes dans le besoin en mêlant création d’emploi, sensibilisation à l’environnement et mise en réseau à l’échelle du territoire. Avec Le Village du Possible, elle œuvre aujourd’hui pour créer une Terre de Convergence…
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ès sa création, à Lyon, en 2004, l’association R(d’)Évolution e n t re p re n d d e n o m b re u s es actions de sensibilisation à l’environnement : grande marche de trois mois des Pyrénées à Paris en 2006 ; festival Le Souffle du Rêve réunissant 15 000 personnes dans les Cévennes en 2013, etc. En 2014, le collectif d’artistes activistes cofondé par Violette, Élise, Uto et Antoine investit une usine de 3 500 mètres carrés au Vigan, dans le Gard. Ils y ouvrent La Ressourcerie du Pont : un lieu de collecte d’objets, de réparation, revalorisation, Colibris fait sa part dans l’histoire de revente et sensibilisation à la réduction des déchets. « Quand Kaizen ; présent dès l’origine du magaon est arrivés, les habitants ont zine, il l’inspire et l’accompagne au tout de suite pris l’habitude de quotidien. nous apporter leurs objets. Et Envie d’agir ? Rejoignez le mouvequand ils ont vu que ça générait ment : www.colibris-lemouvement.org Une oasis est un lieu de vie ou de resdes emplois, d’autres formes de soutien sont apparues, le bénésources qui incarne des valeurs d’écologie et de partage. volat par exemple… », explique Uto. Aujourd’hui, la ressourceEnvie de créer, rejoindre une oasis ? rie donne une seconde vie à Toutes les informations sur www. 90 % de la centaine de tonnes colibris-lemouvement.org/projets/ d’objets qu’elle collecte tous les projet-oasis ans, dont 55 % de réemploi 78
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direct. Le reste est réutilisé par des artisans, envoyé au recyclage ou à la déchetterie (6 %). Membre actif du Réseau national des ressourceries, le lieu est animé par une équipe d’une vingtaine de bénévoles et de six salariés, en CDI ou contrat aidé. « Bertrand, le deuxième salarié, a d’abord été bénévole pendant quelques mois. Âgé de 56 ans, cet habitant du coin a été formé dans sa jeunesse par un compagnon en ébénisterie, marqueterie et menuiserie. Aujourd’hui, c’est un valoriste hors pair qui transmet son savoir-faire », raconte Élise. La ressourcerie met en effet des ateliers et outils à disposition d’artistes et d’artisans pour de la couture, menuiserie, soudure, vannerie, vidéo, musique, peinture… Ceux-ci peuvent aussi travailler à partir d’objets et de matières issues du réemploi. Grâce à son activité, à des subventions, à des emprunts auprès de particuliers (apports avec droit de reprise) et à des dons, l’équipe a réussi à réunir en 2018 les 300 000 euros nécessaires à l’achat de la ressourcerie et en est maintenant propriétaire.
ARTIMBAL, « L’ART POUR BÂTIR DES PONTS » Une partie du groupe qui assure l’activité de La Ressourcerie du Pont habite à Artimbal, un écolieu sur les hauteurs du Vigan. Les espaces et
AUTONOMIE LES CÂLINS, C’EST BON POUR LA SANTÉ
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NOS bonnes adresses
METZ ? ADRESSES
Natif de Metz, le botaniste Jean-Marie Pelt a, toute sa vie, semé des graines pour mettre en place des mesures écologiques, ici et ailleurs. En guise d’hommage, des adresses belles et bio, à glaner tels les fruits de cet éternel semeur d’espoir…
M O B I LI T É VÉLOMET’ 7, place du Général-de-Gaulle https://lemet.fr/ garages-a-velo-velomet/ Avec une ville globalement plate, mais un peu étendue, le vélo est un bon moyen pour se déplacer dans Metz, et ses belles rues piétonnes. Vélomet’ est un service de location de vélos, accessible à tous, qui vous permet de découvrir la ville en liberté et à moindre coût : 3 euros les 24 heures ! Qui dit mieux ? Leur bureau est juste en face de la gare.
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ALIMENTATION ET BIEN-ÊTRE GARDEN TEA SHOP 66, En Fournirue « Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années », écrivait Pierre Corneille dans Le Cid. Du haut de leurs 22 ans de moyenne d’âge, les quatre patrons du lieu lui donnent raison ! Copains depuis l’enfance, Camille, Jonathan, Allan, Loïc ont décidé de se réunir autour des valeurs qu’ils partagent, pour trouver un peu d’autonomie dans leur vie, et ne pas céder aux sirènes du salariat. En mars 2019, ils ont créé à deux pas de la cathédrale un lieu, divisé en trois espaces, à mi-chemin entre le salon de thé et l’espace bien-être. La clé de voûte ? « Prendre soin de soi. » Ici, les produits à boire et à manger – café, thé, maté, sandwiches, salades, cookies, etc. – sont 100 % bio. Le dimanche matin, c’est aussi un bon endroit pour prendre son brunch. Et si vous trouvez celui-ci trop copieux, vous pourrez repartir avec votre petit sac pour le dîner. Côté cosmétiques, les jeunes entrepreneurs ont trouvé des fabricants s’inscrivant dans la même démarche bio.
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selbrecht / Vil
C’EST BIO, BONNES
© Philippe Gis
Pascal Greboval
le de Metz
AUTONOMIE
AUTONOMIE
CHEZ VALENTINE
VERDURA 27, En Chaplerue
12, rue de la Fontaine www.chezvalentinemetz.com Naturopathe de formation, Valentine propose une cuisine saine, inspirée de cette approche, où l’alimentation est le premier levier d’une bonne santé. Elle fait à sa sauce des plats 100 % véganes, à manger sur place ou à emporter, où les légumes sont cuits uniquement à la vapeur. Ici, pas de poêle : « la surchauffe dénature les aliments », argumente Valentine. La jeune femme fait également en sorte de satisfaire les papilles des personnes intolérantes au gluten. Tous ses produits sont bio et majoritairement locaux, servis dans des boîtes en carton compostables.
Simultanément épicerie et restaurant avec, en guise de trait d’union, des produits 100 % bio, Verdura est une adresse à tester aussi bien pour faire quelques courses que pour prendre un petit-déjeuner équilibré, un déjeuner ou un goûter. Des plats véganes et sans gluten y sont proposés tous les jours.
BONNES ADRESSES FOX
6, rue Gambetta www.foxcoffee.fr
MOUGEL BIO GOURMAND 53, rue Haute-Seille www.bio-mougel.fr « J’avais 3 ans et j’accompagnais mon père, agriculteur bio, sur toutes les manifestations écolos », se souvient Isabelle. Autant dire qu’elle est tombée dans la marmite bio très tôt ! Alors, en 1996, quand son mari, boulanger, décide de faire du pain avec le moins de mécanisation possible, c’est assez naturellement qu’ils se tournent vers un meunier qui fait sa farine dans la région sur une meule en pierre. Depuis, ils vendent du pain bio et local. Le succès aidant, ces pionniers ont élargi leur offre et sont devenus épiciers, en gardant la même éthique : des produits bio et locaux.
Voilà un bel endroit, cosy à souhait. On n’est pas chez soi, mais on s’y croirait ! Les fauteuils, les tables, chinés, créent une ambiance très agréable. Si l’on se sent ici comme à la maison, c’est aussi parce que l’on peut y boire du café à volonté grâce à l’offre « café-travail ». On paye 3,50 euros et on peut rester toute la journée en prenant autant de café équitable et bio que l'on veut avec, cerise sur le caoua, une bonne connexion WiFi ! À deux pas de la gare, c’est un spot idéal pour les travailleurs nomades. Et si le café n’est pas votre truc, vous pourrez aussi déguster des jus de fruits locaux et des thés bio. Côté grignotage et brunch, l’accent est mis sur les produits locaux.
PALAIS DES THÉS 9, rue de Ladoucette www.palaisdesthes.com Envie de boire un bon thé ? Entre les grands crus « bio de par leur lieu de zone de culture » et les thés labellisés, vous trouverez à n’en pas douter un thé à votre goût au Palais des thés.
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cui sin e ..
E N M O D E NoEL... A UT R EM ENT ! Linda Louis
NOËL
UN REPAS DE AUTONOMIE
CUISINE
PAS COMME LES AUTRES ! Noël est la période de tous les excès, surtout en cuisine où le principe de « se faire plaisir » ne rime pas toujours avec respect de l’animal et de la planète. La quantité devrait céder la place à la qualité, le local devrait être envisagé presque pour chaque ingrédient et… l’oncle Maurice qui taquine le végétarien de la table avec le fameux cri de la carotte mériterait d’être privé de dessert (ou de digestif) ! POURQUOI SE RENDRE MALADE DE NOURRITURE ET FRÔLER L’INDIGESTION ? Vous vous sentez mal à l’aise face à cette profusion de nourriture ? Vous n’êtes pas seul(e) ! Sans pour autant vous transformer en prêtre moralisateur, donnez l’exemple en recevant autrement, plus modérément, mais toujours avec générosité, simplicité et créativité. • Réalisez des amuse-bouches et des entrées sans viande telles que des gougères au comté, des terrines végétales aux lentilles, aux châtaignes et
SUJET ÉPINEUX (OU DOULOUREUX ?) : LE FOIE GRAS En bloc ou entier, « extra », « premier choix » ou « tout-venant », issu de volailles élevées en Europe de l’Est ou en France… il existe toutes sortes de foies gras. Interdit dans plusieurs pays en raison de la souffrance imposée aux oies et aux canards, cette recette dite « de fête » n’en est pas vraiment une quand on se penche sur le sujet. Si vous n’achetez pas de foie gras, croyez-vous vraiment que vos invités vous le reprocheront ?
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aux fruits secs, un velouté de potimarron servi dans des verrines, un tarama végétal aux tomates séchées, poivre rose et aneth [lire page 89], une tartinade à la betterave et au chèvre [lire page 89], un tartare d’algues aux échalotes et au citron, des rillettes aux artichauts confits, poireaux et fromage frais… • Impossible pour vous de faire Noël sans saumon fumé ? Remplacez-le alors par quelques tranches de truite fumée artisanale et locale ; achetez un filet de saumon bio ou labellisé MSC et transformez-le en gravlax ; achetez-en moins et servez-le avec des blinis, un tzatziki maison et des graines germées. • Oubliez les viandes issues de pays hors Union européenne telles que l’agneau et l’autruche de Nouvelle-Zélande ou le bœuf d’Argentine. Si vous souhaitez proposer un plat de viande, préférez là encore une volaille achetée chez un petit producteur, servie en moins grande quantité, mais avec une bonne purée de panais, des légumes anciens rôtis, des pommes dauphine à la courge butternut… • Pour épater vos invités, optez plutôt pour des ingrédients qui en jettent et locaux, comme la truffe noire française (environ 40-45 euros la truffe de 50 grammes, pour parfumer une
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RENDEZ-VOUS L’A GE N DA N O VEM BRE-DÉ CEM BRE 20 19
RENDEZ-VOUS
NOVEMBRE
31 octobre au 7 novembre Montpellier (34) Salon de l’écologie : 11e édition Thème : Reconstruire la Nature Sauvage en Europe ? Ce rendez-vous national annuel réunit la filière professionnelle de l’écologie, la fait découvrir aux étudiants et sensibilise le grand public aux enjeux actuels. Il est composé de trois temps forts : Écolo’Tech (congrès scientifique), Écolo’Job (forum des métiers et formations) et Festi’Versité (festival de la biodiversité). Faculté des sciences de Montpellier, Palais des sports Veyrassi et parc zoologique du Lunaret www.salon-ecologie.com KAIZEN PRÉSENT ET PARTENAIRE 2 au 11 novembre Paris (75012) Salon Marjolaine Le plus grand salon bio en France Parc floral de Paris www.salon-marjolaine.com
9 et 10 novembre Céret (66) Stage : Initiation à l’apiculture écologique Organisé par l’association Permaterra Pour acquérir les compétences indispensables pour poser une ou plusieurs ruches dans votre jardin ou votre exploitation. Participer à une
formation avant l’hiver vous laissera tout le temps pour préparer le matériel pour être prêt dès le début de la miellée au printemps ! www.permaterra.fr
13 au 17 novembre Centre agroécologique des Amanins (26) Stage : Piloter sa transition… ou l’art du passage Organisé par l’École pratique de la nature et des savoirs Votre situation professionnelle ou personnelle est en désaccord avec vos envies profondes, vos valeurs, vos représentations ? Vous souhaitez changer, faire émerger un projet, réorienter votre parcours de vie ou simplement faire le point sur votre situation et rencontrer d’autres acteurs du changement. www.ecolenaturesavoirs.com 23 et 24 novembre Rennes (35) Stage : Wutao Avec Sandrine Toutard Réveiller l’onde « orgastique » en mobilisant le bassin, puis la colonne vertébrale. Le souffle libéré, le corps s’éveille, et l’âme avec. www.energetiquechinoise.com
et 100 % bénévole propose une riche palette de conférences, dédicaces, bourse aux livres… avec notamment Pascal Picq, Axel Kahn, Jean Ziegler, Xavier Mathias ou encore Claude Gruffat. Les enfants pourront participer à divers ateliers et lectures de contes. www.livresenmarches.com
KAIZEN PRÉSENT ET PARTENAIRE 28 au 30 novembre Lyon (69) Quais du départ : 8e édition Le festival des films & livres voyageurs Journée spéciale Un monde en transition le 29 novembre : projections, débats, tables rondes Palais de la Mutualité www.quaisdudepart.fr 25 novembre au 1er décembre Centre agroécologique des Amanins (26) Stage : Créer son écoprojet Vous êtes porteur d’un projet à l’état d’idée, d’envie, ou dans les premiers pas de sa concrétisation ? Ce stage vous accompagne dans sa mise en œuvre. www.lesamanins.com
DÉCEMBRE
1er au 7 décembre Sur Internet Sommet du cycle menstruel : 2e édition Organisé par Kiffe ton cycle Thème : le syndrome prémenstruel Vingt experts observent ces désagréments du cycle sous toutes les coutures. www.kiffetoncycle.fr 6 au 8 décembre Fatouville-Grestain (27) Stage : Cuisine saine, initiation à la naturopathie et yoga Organisé par L’arbre aux étoiles Apprendre à cuisiner simplement des préparations saines, gourmandes, bio et végétariennes avec un éclairage naturopathique et une touche spéciale « repas de fêtes » ! Pour lier bien-être, énergie, cuisine, partages, gourmandise, échanges, relaxation et nature. www.larbreauxetoiles.fr
23 et 24 novembre Les Marches-Porte-de-Savoie (73) Livres en Marches : 18e édition De la nature à la littérature, en passant par les enjeux de société, ce « festival de rencontres » écoresponsable
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SÉLECTION KULTURELLE AUTONOMIE
FILM
LI VRES LA VIE SAUVAGE
VIVRE INTENSÉMENT AU PLUS PROCHE DE LA NATURE Yann Peucat, Tana Construire une cabane, cueillir des plantes sauvages comestibles, construire un four solaire… Qui n’a jamais rêvé d’expérimenter la vie de Robinson ? Ce guide joliment illustré regorge d’astuces simples pour se lancer dans l’aventure.
cerveau, l’autrice propose des réflexions, des outils, ponctués d’exercices pratiques, pour une éducation positive et confiante.
TOUT EST POSSIBLE
(THE BIGGEST LITTLE FARM) John Chester, 92 min Observation, humilité et collaboration. Tels sont les maîtres mots de cette conversion réussie d’un couple de citadins devenus agriculteurs en permaculture aux États-Unis. Tournée sur près de huit ans, cette fresque dévoile les défis quotidiens d’une ferme en quête d’harmonie. « Les possibilités infinies qu’offre la complexité de la nature, sont des métaphores non seulement de la manière dont on vit, mais également de la façon dont on affronte les obstacles », témoigne l’agriculteur-réalisateur.
SÉLECTION CULTURELLE
MANIFESTE MÉTAPHYSIQUE
Raphaël Liogier et Dominique Quessada, Les Liens qui Libèrent Dans un monde désenchanté, les deux philosophes présentent une « métaphysique nouvelle » comme « antidote puissant au dogmatisme, à la fermeture sur soi et au pessimisme ». Un vrai bol d’air.
RADICALE BISOUNOURS
UNE CITOYENNE À LA PRÉSIDENTIELLE Charlotte Marchandise, Le Hêtre Myriadis La candidate citoyenne à l’élection présidentielle de 2017 propose une vision et des outils pour une autre politique, plus locale, écologique et solidaire.
VOYAGES DU COQ À L’ÂME
PAR-DELÀ LE VISIBLE Jean-Pierre Brouillaud, Aluna Éditions Un témoignage poignant de l’écrivainexplorateur aveugle sur sa quête intérieure. Au fil de ses voyages, il découvre, les beautés du monde. L’humour, les épreuves et les rencontres le mènent vers de nouveaux horizons…
GUIDE DU CERVEAU POUR PARENTS ÉCLAIRÉS
Stéphanie Brillant, Actes Sud Comment quitter le mode « automatique » de l’éducation des enfants ? À partir d’expériences, de recherches et de synthèses sur le fonctionnement du
DIS RACONTE, COMMENT ÇA MARCHE ?
DÉCOUVRIR ET PENSER LE MONDE AVEC EDGAR MORIN Martine Lani-Bayle et Adélaïde Ronxin, préface d’Edwige Chiroutier, Pourpenser Le « penseur de la complexité » enfin accessible aux enfants ! Sous forme de dialogue philosophique, Edgar Morin les invite à porter un regard ouvert sur le vivant. Une BD qui offre un premier pas vers la réflexion sur soi et son rapport au monde.
LE CRIME EST PRESQUE PARFAIT
L’ENQUÊTE CHOC SUR LES PESTICIDES ET LES SDHI Fabrice Nicolino, Les Liens qui Libèrent Le journaliste, initiateur du mouvement « Nous voulons des coquelicots », enquête sur le nébuleux système des lobbies des pesticides. Un polar didactique et exceptionnel où s’entremêlent des histoires d’hommes et de femmes, des stratégies industrielles, des complicités institutionnelles. Pour l’auteur, la désobéissance civile reste le seul rempart pour contrer l’empire funeste de l’agrochimie.
EXPO MUSIQUE ET NATURE
Médiathèque musicale de Paris, jusqu’au 21 décembre 2019 La nature est animale, végétale, minérale, mais aussi… musicale ! Exposition visuelle et sonore, concerts, ateliers, animent ce cycle qui met en liens sensibles la musique et la nature.
ORBS - FÉMININ
Historiques, symboliques ou mythiques, les figures féminines sondent les mystères de la vie. Ce numéro spécial de la revue Orbs offre une lecture multiple de cette part créative du monde.
LES 4 SAISONS DU CHAMPIGNON
PETIT GUIDE NATURALISTE ET GOURMAND Linda Louis, Alternatives
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C h r o n iq u e
Pierre Rabhi PAYS A N P H I LO S O P HE
Claire Egermont Bastien Dubo i s
NOËL NOUS RAPPELLE À L’ESSENTIEL CHRONIQUE
PIERRE RABHI
Pierre, fêtez-vous Noël ? Oui, nous avons gardé l’habitude de célébrer Noël en famille. C’est une belle occasion de nous réunir et l’opportunité de nous rappeler le message christique quant à la puissance de l’amour. Car, sans être relié à aucune institution, je reste profondément chrétien. « Aimez-vous les uns les autres et aimez même vos ennemis » : c’est absolument ce dont le monde a toujours eu besoin, aujourd’hui plus que jamais, compte tenu de l’état de notre planète où les dissensions ne cessent de s’amplifier. Si l’on appliquait ce précepte avec sincérité, tous les problèmes seraient résolus.
« Les rituels contribuent à la fraternisation. »
Mais je n’oublie pas à quel point cette fête sainte est devenue un extraordinaire business. Je suis désolé de voir que beaucoup d’enfants n’ont plus accès à cette joie que procurent les choses simples, comme je l’ai moi-même connue dans mon enfance. Ils sont blasés devant l’excès et ont perdu la saveur de l’attente et de la patience devant la rareté. On dirait presque que les parents compensent par l’abondance de présents leur absence, voulue ou obligée. Mais cela n’arrange pas les enfants ! Surtout quand il s’agit de jeux virtuels qui inhibent leur imaginaire ! Quels souvenirs gardez-vous des fêtes traditionnelles de votre enfance, en Algérie ? Toutes nos fêtes étaient sacralisées et POUR ALLER PLUS LOIN rythmées par les prières. C’étaient des temps de partage et de convivialité • w w w.pier r er abhi. or g généreuse durant lesquels les maisons étaient ouvertes à tous. Quiconque pouvait entrer, être accueilli et manger à sa faim. Je me souviens des célébrations sacrées en rapport avec la vie du Prophète. Pour marquer 98
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l’événement, nous recevions une nouvelle djellaba et la gardions jusqu’à l’usure. Les hommes ne pouvaient pas accomplir le sacrifice de l’animal s’ils avaient de la haine ou du ressentiment dans le cœur. J’ai ainsi vu mon père aller se réconcilier avec notre voisin avant le rituel sacré ! On peut ainsi comprendre la portée sociale de ces traditions. Les rituels vous semblent-ils utiles à l’équilibre sociétal ? L’être humain a toujours eu besoin de rituels. Dans les groupes initiaux, la majeure partie du temps, les femmes et les hommes étaient concentrés sur les activités de survie : chasser, pêcher, tisser, etc. Mais tout ce qui était subtil et symbolique avait également une place importante. Les chants, les danses, les prières étaient des moyens par lesquels on maintenait les âmes rassemblées. Dans les pow-wows, par exemple, les communautés amérindiennes se réunissaient pour des raisons basiques, comme échanger leurs créations artisanales, leurs savoirs et les nouvelles de leurs territoires, mais aussi pour se connecter ensemble aux réalités non tangibles déterminantes pour l’ordre établi. Dans notre monde moderne, la rationalité a appauvri énormément notre perception du réel et du symbolique. On peut se demander à quel point cela a participé à précipiter notre civilisation dans la dysharmonie. Nous avons oublié que notre corps, habitacle de notre conscience, un jour se dissoudra. Les rituels comme celui de Noël devraient être des opportunités de nous rappeler à l’essentiel, de contribuer à la fraternisation et à la cohésion de nos groupes sociaux. Au-delà de ces temps extraordinaires, n’oublions pas que chaque instant est sacré et peut être l’occasion d’exprimer notre respect pour ceux qui nous entourent et pour la beauté de la Vie dont nous sommes dépositaires. n