N°
55
MARS AVRIL 2021
DÉCRYPTAGE
QUALITÉ DE L’AIR
COUV SOLUTIONS
LANGAGE INCLUSIF
AUTONOMIE
SE METTRE AU FOOTING
ÉCOFÉMINISME
LA PLANÈTE AU CŒUR
BEL/LUX 7,20 € - CH 11 FS - ESP 7,40 € - DOM 7,40 € TOM 850 XPF - MAR 80 MAD - TUN 11,90 TND
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Éditeur SARL EKO LIBRIS au capital de 98 913 € Siège social 74A, rue de Paris - 35000 Rennes info@kaizen-magazine.fr www.kaizen-magazine.com
EDITO
Sabah R ah m an i et Pascal G reboval
Magazine bimestriel numéro 55 Mars-avril 2021 Imprimé sur papier certifié PEFC Fondateurs Cyril Dion, Yvan Saint-Jours, Patrick Baldassari et Pascal Greboval Directeur de la publication Patrick Baldassari Rédacteur en chef Pascal Greboval Rédactrice en chef adjointe Sabah Rahmani Secrétaire de rédaction Emmanuelle Painvin Journalistes multimédias Maëlys Vésir Marius Gouttebelle Directrice administrative et financière Céline Pageot Attachée commerciale Aurore Gallon Chargée de communication Marie Geffroy Gestionnaire service abonnements Delphine Le Louarn Stagiaire pour ce numéro Claire Birague Abonnements et commandes 74A, rue de Paris - 35000 Rennes abonnement@kaizen-magazine.fr Tél. 02 23 24 26 40 Direction artistique, maquette et mise en pages • www.hobo.paris hobo.paris - hobo@hobo.paris Tél. 06 12 17 87 33 Photo de couverture © Duet Postscriptum / Stocksy United Prépresse Schuller-Graphic 18, rue de l’Artisanat 14500 Vire Tél. 02 31 66 29 29 Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (Imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières-les-Vallées SIRET : 539 732 990 000 38 • APE : 5814Z Commission paritaire : 0322 K 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. 05 63 94 15 50 Distribution MLP Vente au numéro pour les diffuseurs Destination Média • Tél. 01 56 82 12 00 contact@destinationmedia.fr Aucun texte ni aucune illustration ne peuvent être reproduits sans l’autorisation du magazine. Merci.
UNIQUES
ÉDITO ET UNI·ES U
n homme peut-il parler d’écoféminisme ? Certaines diront que c’est aussi peu crédible que de laisser le clavier à Emmanuel Macron pour parler d’écologie. Alors, avec Sabah, nous avons décidé de faire moitié-moitié. Comme le philosophe Patrick Viveret, nous pensons que ce serait une erreur de remettre en place le pouvoir d’un genre sur un autre. En tant que « mâle cisgenre », j’ai conscience que le patriarcat et tous ses avatars doivent être abolis. Les femmes doivent trouver une place juste, à égalité avec les hommes. Je n’ai pas l’ombre d’un doute là-dessus. La difficulté pour moi – pour nous ? (les hommes) – est de parvenir à s’émanciper de la posture patriarcale, sexiste, être lucide quant à nos privilèges et accepter de les perdre pour faciliter, favoriser la juste place des femmes. Je suis, nous sommes aussi le fruit de siècles de stéréotypes difficiles à gommer. Les mouvements féministes et, à présent, l’écoféminisme bousculent notre histoire, notre intimité ; et, comme tout changement, celui-ci est complexe. C’est une danse à mener à deux. Ou chacune, chacun doit se sentir libre et joyeuse, joyeux. Libre d’être femme, libre d’être homme. À quel prix ? Car lorsqu’on observe l’histoire de l’humanité, la liberté a souvent été le fruit d’une lutte, généralement violente, cruelle, mortelle. Le colonialisme, l’esclavage et les guerres ont non seulement abusé de millions de femmes, d’hommes et d’enfants, mais aussi de la Terre et de ses ressources. Maltraitant le vivant dans toutes ses beautés. Je suis issue de cette histoire. Suis-je pour autant écoféministe ? Peu importe l’étiquette… Aujourd’hui, je vois l’écoféminisme comme un ultime combat, parfois radical, mais pacifiste, pour une réconciliation entre toutes les espèces, entre tous les genres. Alors pourquoi associer l’écologie au féminisme, me direz-vous ? Pour des raisons à la fois symboliques et sociologiques, à découvrir dans notre dossier. En ayant toujours à l’esprit que l’écoféminisme n’aspire pas à reproduire une guerre des sexes – stérile – mais à livrer un combat fertile pour notre Terre commune, cette planète au cœur du vivant. Libre d’être telle qu’elle est. Alors soyons tel·les que nous sommes. Uniques et uni·es. n
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SOMMAiRE RENCONTRE Lucie Pinson
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CHRONIQUE Quitterie de Villepin Pas de justice, pas de démocratie
ET SI ON LE FAISAIT ENSEMBLE ? 48 Le Rocher, construire la solidarité au cœur des cités
D.I.Y. Conserves alimentaires, la récup qui déboîte
CHRONIQUE Christophe André Terriennes et Terriens
JE VAIS BIEN, LE MONDE VA MIEUX 76 Courir, et ne plus s'arrêter
SOMMAIRE
EN CHIFFRES Mille-feuille territorial, recette d’une complexité française
DOSSIER
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EN QUÊTE DE SENS 54 Sylvère Chaponet et David Chable, apiculteurs bio pour résister en conscience
EN CHIFFRES L’épineuse empreinte des fleurs
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ENQUÊTE 14 Pollution de l’air, comment respirer sans suffoquer ?
GOÛT DE L’ENFANCE L’empathie, ça s’apprend aussi
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VIVRE EN OASIS 82 La Forge du Vallon « Libre d’être soi-même »
LA NATURE MISE À NU 18 Les processionnaires du pin, en rang serré
ROUE LIBRE 60 Vélo-écoles, tous en selle !
BD 84 Mathilde Stento Au potager ! Lasagne de pommes de terre
VENT D’AILLEURS 64 Nouvelle-Zélande Les Maoris, gardiens de l’eau MOTS CROISÉS Langage inclusif, en avant toustes !
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BD Benoît Guillaume Passer à l’autopartage
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CUISINE En mode zéro déchet ! Restes de biscuits Cet ingrédient bio, j’en fais quoi ? Agar-agar
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SÉLECTION KULTURELLE
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CHRONIQUE Dominique Bourg Affreux, sale et méchant
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ÉCOFÉMINISME LA PLANÈTE AU CŒUR 20 PORTFOLIO
Origine du papier : pages intérieures : Belgique ; encart : Allemagne ; couverture : Pays-Bas. Taux de fibres recyclées : 0 %. Ce magazine est imprimé sur un papier issu de forêts gérées durablement. Eutrophisation : Ptot = 0,018 kg/t. Pour les abonnés : une relance de fin d’abonnement.
Peau neuve 38
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Collecte de dons
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LUCIE RENC PINSON DÉCRYPTAGE
R e n c on t re
Pascal G reboval Math ieu Gén on
En recevant le prix Goldman 2020, considéré comme le « Nobel de l’environnement », Lucie Pinson prouve qu’il est possible de protéger la planète en « s’attaquant » aux acteurs de la finance. Avec sa toute jeune ONG Reclaim Finance, elle a réussi à convaincre ceux-ci de stopper leurs investissements dans le charbon. Rencontre avec une femme pleine d’énergie.
BIO EXPRESS 1985 Naissance à Nantes (LoireAtlantique) 2013 Débute sa carrière aux Amis de la Terre 2020 Lance l’ONG Reclaim Finance et reçoit le prix Goldman pour l’environnement
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Comment vous est venue l’idée de fonder l’ONG Reclaim Finance, qui incite les acteurs financiers à stopper leurs investissements dans les énergies fossiles, en particulier le charbon ? Lorsque l’on parle de dérèglement climatique, on va souvent s’adresser aux États, s’intéresser aux grandes multinationales de l’industrie et, bien entendu, aux industriels des énergies fossiles. À Reclaim Finance, on prend le pari inverse en sensibilisant les acteurs financiers à leur responsabilité directe. Tout simplement parce que la finance est le pilier de notre société. Et la transition ne se fera pas s’il n’y a pas d’alignement des flux financiers avec les objectifs adoptés par l’accord de Paris. Dans le même temps, on produit une expertise que l’on met à disposition des acteurs financiers pour s’assurer que les mesures, lorsqu’ils s’en emparent et les adoptent, sont les plus ambitieuses possible. Pourquoi le charbon ? Parce que les gens ne savent plus que l’économie mondiale repose sur le charbon. [Selon Reclaim Finance, le charbon représente 38 % de l’électricité produite dans le monde et 40 % du CO2 émis par le secteur énergétique dans le monde.] Le charbon, en France, renvoie à Zola, à Germinal ! Il faut rappeler cette réalité aux Français et aux décideurs financiers. Reclaim Finance n’a pas
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vocation à se concentrer uniquement sur les énergies fossiles. On s’intéresse à tous les autres aspects de la responsabilité des acteurs financiers dans le dérèglement climatique, et notamment à la déforestation. Comment agissez-vous auprès des acteurs financiers ? Quels sont vos leviers pour les faire changer ? Le plus important est de très bien connaître nos dossiers. Quelles sont les entreprises impliquées ? Quelle est la réalité des impacts ? Quelles sont les alternatives au charbon ? Il s’agit de démontrer que le charbon n’est pas une solution pour le développement du pays, qu’il n’est pas nécessaire pour apporter de l’électricité aux populations en situation de précarité énergétique. Il s’agit ensuite de rencontrer les acteurs financiers. Parce qu’il ne suffit pas de leur demander d’arrêter le charbon. Il faut également leur présenter un panel de mesures spécifiques, leur proposer d’autres arguments, environnementaux, sociaux, humains. Repolitiser et réhumaniser la finance, faire prendre conscience de son impact humain. Parler concrètement, au-delà des chiffres, des problèmes en termes de populations impactées, d’émissions de gaz à effet de serre rejetées dans l’atmosphère, de pollution des sols, etc. Rappeler l’impact de
DÉCRYPTAGE
“DE L’IMPOSSIBLE, ON EST PASSÉ À DES ENVISAGEABLES, AVANT D’AVOIR DES MESURES VALIDÉES."
CONTRE
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DOSSIER
Aud rey Gui ller et Nolwenn Wei ler Jérômi ne Deri g ny, collect i f Arg os
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ÉCO-
FÉMINISME LA PLANÈTE AU CŒUR Mobilisées aux quatre coins du monde contre le nucléaire, l’extractivisme minier ou l’agriculture intensive, les écoféministes défendent les droits des femmes et ceux du vivant. Pour sortir du capitalisme et du patriarcat, elles proposent des solutions et inventent de nouveaux modèles de cohabitation entre hommes et femmes, entre pays du Nord et pays du Sud, entre humains, animaux et nature : plus horizontaux, plus solidaires et plus égalitaires. Elles nous invitent aussi à nous reconnecter à nous-mêmes, à nos émotions et à notre intuition.
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DOSS
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SIER
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PASSER
DU POUVOIR DOSS À LA PUISSANCE
A
Coopérer et partager : en privilégiant la prise de décision collective, les écoféministes revendiquent une autre façon d’exercer le pouvoir. Un changement radical de leadership qui inclut la remise en cause, et le droit à l’erreur.
« Dream Act est une boutique en ligne de produits éthiques et écologiques. Travailler souvent à domicile permet à Diane Scemama, cofondatrice, de diriger son entreprise tout en étant aux côtés de son nouveau-né.
ctuellement, en politique et dans les entreprises, le leadership est encore très viriliste, relève Eva Sadoun, entrepreneure française, cofonda trice de la plateforme d’investisse ment dans des projets à impact social et environnemental LITA.co 1 : « Un bon leader ne doit jamais montrer sa vulnérabilité, il impose sans discuter, il pose ses couilles sur la table. » Fautil y opposer un modèle de dirigeante douce et compréhensive, qui rendrait la vie plus belle ? Pas vraiment. « C’est encore l’idée de la femme
“superwoman”, qui doit tout assumer, et rassurer, soupire Eva Sadoun. Mais les femmes ne sont pas naturellement capables de faire tout ça. Cela met la barre beaucoup trop haut ! » Pour Petra Kelly, qui a été députée verte en Allemagne, la percep tion des féministes écologistes comme des « mères Nature » aimables et bienveillantes est « un stéréotype trop facile. Nous ne sommes pas dociles, nous ne sommes pas faibles. Nous sommes en colère, pour nousmêmes, pour nos sœurs et nos enfants qui souffrent et pour la pla nète entière. Et nous sommes déterminées à pro téger la vie sur Terre 2. »
SE RECONNECTER AU « POUVOIR DU DEDANS » Pour les écoféministes, il s’agit de mettre en pra tique leur conception d’une société émancipatrice, en s’efforçant d’exercer un pouvoir partagé qui viendrait remplacer le pouvoir patriarcal. En images, cela donnerait des cercles concentriques et/ou entremêlés, en lieu et place de la tradition nelle pyramide. « Il s’agit de sortir du “pouvoir sur”, qui est un pouvoir d’oppression qui mène à toutes les crises sociales et environnementales, afin de se reconnecter au “pouvoir du dedans” », pense Alice Jehan du collectif Les Engraineuses [lire page 26]. Popularisé par Starhawk, activiste féministe amé ricaine, autrice de Rêver l’obscur : femmes, magie et politique, ce « pouvoir du dedans » incite à puiser son énergie dans les éléments : la terre, l’air, le feu et l’eau. Il devient alors inutile, pour se sentir puissant·e, d’écraser les autres. 36
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Au bureau, Diane Scemama forme Stacy, assistante en contrôle de gestion en alternance chez Dream Act. Loin du modèle patriarcal pyramidal, les écoféministes font le choix d’un leadership partagé, où les organisations en cercles sont valorisées.
SIER Le pouvoir du dedans invite à se reconnecter avec son humanité, à assumer d’être traversé·e d’émo tions, soit le contraire de ce que valorise le leader ship patriarcal. « Il y a cette image d’un homme droit, posé, qui parle lentement, qui ne recourt que très rarement et de manière contrôlée à ses émotions », évoque Eva Sadoun. Les écofémi nistes proposent au contraire de se reconnecter à ce qu’elles sont, réellement, à ne pas être hors sol. « Les gens me disent souvent que je suis très passionnée quand je m’exprime, constate Eva Sadoun, et je sens que ce n’est pas exactement un compliment. Comme si ma passion m’empêchait d’être rationnelle. » En défendant d’autres registres que l’abstraction rationnelle, les éco féministes élargissent le cadre. Elles offrent d’autres modèles, qui manquent cruellement aux leaders et leadeuses désireux de sortir de rela tions de domination. « À moins d’avoir reçu une culture alternative, qui remet en cause les idées de hiérarchie et de pouvoir, comment faire autre ment ? », s’interroge Eva Sadoun. « Nous souhaitons aller vers un modèle qui ne soit pas dans la compétitivité, mais plutôt dans le soin à tout le monde », décrit Véronique Moreira, présidente de la branche française du WECF [lire page 27]. De ce point de vue, les femmes ont sans doute une longueur d’avance, due à leur expérience d’opprimées. « Parce que nous portons les stigmates du pouvoir que les hommes ont exercé sur nous, nous avons davan tage conscience des précautions à prendre quand
nous l’exerçons », pense Caroline Lucas, députée écologiste anglaise. « Notre expérience du monde patriarcal nous permet de nous identifier à une cause oubliée », ajoutet elle. Par exemple, l’environne POUR ALLER PLUS LOIN ment, la protection du vivant ou le partage du pouvoir. n • Marie-Cécile Naves, La Démocratie 1. fr.lita.co 2. Extrait de l’ouvrage collectif Pourquoi les femmes vont sauver la planète, Marabout, 2020.
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féministe. Réinventer le pouvoir, Calmann-Lévy, 2020 • Pascale d’Erm, Sœurs en écologie, La Mer salée, 2017
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Myr iam Attaf
GoU^t de l'enfance
In gr id B ail l eu l
SOLUTIONS
L’EMPATHIE, GOÛT DE
ÇA S’APPREND AUSSI À Trappes, depuis bientôt sept ans, l’école élémentaire Henri Wallon abrite une classe pas comme les autres. Récitation à trois voix, dictée à plusieurs au tableau : ici, on bouge, on parle avec son voisin pendant les exercices et surtout, on apprend à mieux vivre ses émotions et à comprendre celles des autres. Reportage.
O
n s’imagine souvent qu’avoir de l’empathie, c’est savoir se mettre à la place de l’autre et comprendre ce qu’il ressent. Or l’empathie est une disposition certes innée, mais qui exige d’être entretenue, comme un muscle. À Trappes (Yvelines), au sein de l’école élémentaire Henri Wallon, quatorze élèves de CE1 expérimentent l’éducation à l’empathie par le corps. Encadrés par leur maîtresse, Valérie Licha, qui enseigne ici depuis bientôt vingt-sept ans et applique cette pédagogie depuis sept ans, Imrane, Maeva, Ladji, Amina et leurs camarades apprennent à lire, écrire, compter, mais aussi à apprivoiser leurs émotions. Dans la salle de classe, les enfants bougent et échangent en faisant leurs exercices, sous l’œil bienveillant mais vigilant de leur institutrice. Fini les séances de travail où l’on reste assis à écouter la maîtresse parler : ici, les écoliers ont le droit de jeter un coup d’œil au cahier du voisin, de l’aider à faire ses exercices, et même d’aller au tableau ensemble pour corriger la dictée du jour. Justement, ce matin, trois enfants s’y rendent pour une dictée en équipe. Hamza est chargé de lire une phrase à voix haute et Amina de l’écrire au tableau tandis qu’un troisième élève campe le rôle du Joker chargé de… souffler la bonne réponse à ses camarades ! Et autant dire que chacun prend son rôle 56
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très au sérieux, notamment Hamza, 7 ans, qui ne lésine pas sur les moyens pour donner un coup de pouce à ses copains quand vient son tour d’écrire. « Quand je suis au tableau, j’écris gros. Comme ça, j’aide les autres et ils s’améliorent. »
LE JOKER, CHAMPION DE LA CLASSE ! Le Joker fait partie intégrante de la pédagogie appliquée par l’enseignante. Il est présent à chaque exercice et chaque enfant peut tenir ce rôle. Seule condition : connaître sa poésie, son texte ou ses règles de conjugaison par cœur. Car le Joker, qui est là pour aider, doit avoir toutes les bonnes réponses sous le coude. « Ils aspirent tous à être le meilleur Joker », se réjouit Valérie Licha. Résultat : chaque élève apprend ses leçons par cœur avec l’espoir d’être choisi par ses camarades pour tenir le rôle le plus convoité de la classe. Au départ, les enfants ont tendance à faire passer les affinités avant les connaissances, mais ceci s’inverse rapidement : « au début, ils choisissent leurs copains, puis ils finissent par comprendre qu’il faut choisir quelqu’un qui sait. Par exemple, un groupe de garçons va choisir une fille parce qu’elle connaît les réponses d’un exercice. Il n’y a plus de différences », observe l’enseignante. Cette méthode pédagogique, qui semble si bien fonctionner, a été élaborée il y a plusieurs années par Omar Zanna, docteur en psychologie et
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L’ENFANCE
1. 3.
2.
1. Dans la classe de CE1 de Valérie Licha, à l'école Henri Wallon, les élèves corrigent eux-mêmes la dictée et vont au tableau par trois pour s’entraider. 2. S’ils ont le droit de se déplacer librement dans la classe, ils savent aussi se concentrer quand il le faut. 3. Après la pause du midi, lecture à voix haute, et en relais.
Seule consigne imposée : faire en sorte que tout le monde lise au moins une fois. « Cette façon de faire permet aux élèves de développer leur empathie. Je les amène à se regarder, à s’écouter », explique l’enseignante qui, depuis le fond de la classe, observe la joyeuse troupe se relayer en toute autonomie. sociologie, professeur en sciences de l’éducation à l’université du Mans. Le chercheur a développé une pédagogie qui repose sur trois principes : travailler ensemble dans un même lieu pour pouvoir « entrer en empathie émotionnelle », observer les autres et pratiquer à son tour, et « verbaliser ce que l’on voit et ce que l’on perçoit » pour atteindre l’empathie mature, combinaison parfaite de l’empathie émotionnelle et cognitive. C’est en suivant ces préconisations que Valérie Licha stimule l’empathie de ses élèves. Notamment en leur proposant des séances de lecture un peu particulières comme celle qui se déroule en cette fin de matinée avant la récréation : pendant la lecture, la maîtresse n’intervient pas et chaque élève prend la parole de son propre chef avant de la céder, presque instinctivement, à un autre enfant.
UN REMÈDE CONTRE L’EXCLUSION Non seulement ces techniques d’apprentissage favorisent l’écoute et l’observation mutuelles, mais elles encouragent l’entraide et la solidarité. Tant et si bien qu’il est impossible au sein du groupe d’identifier un élève en difficulté ou de détecter une quelconque trace d’animosité. On chahute, on se taquine, mais personne n’est mis de côté, pas même les élèves qui ont plus de difficultés que les autres. « J’ai un élève qui est censé être en ULIS (unité localisée pour l’inclusion scolaire). Il a fait une année de CP blanche. Quand il est arrivé dans ma classe, il a vraiment été pris en charge par les autres. Petit à petit, il s’est investi, a pris sa place. Et comme il faisait partie d’un groupe, il était tout aussi responsable de l’échec que de
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ROUE LIBRE
Au r ian e L atrém ol ière
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L au ren t G u izard
VÉLO-ÉCOLES
TOUS EN SELLE !KRÉ
O ROUE
Une honte, un tabou… Parfois, ne pas savoir faire du vélo est vécu comme une épine dans le pied. 2,1 % des Français sont concernés, et 20 % de la population déclare ne pas être à l’aise à vélo. À Rennes, l’association Roahzon Mobility remédie à ce problème en proposant à tous, enfants comme adultes, une vélo-école pour se (re)mettre en selle. Une démarche en plein essor partout en France.
S
amedi, 9 h 30. Le rendez-vous est pris. Derrière la Cité judiciaire, sur la grande esplanade du mail AnneCatherine, à Rennes, les instructions du moniteur résonnent, engouffrées par les immeubles : « Vous passez à chaque fois entre les portes. Les yeux qui regardent bien la cible. Quand la roue avant arrive au premier plot, je regarde le deuxième plot. » Thomas Lejeune, moniteur vélo à Roahzon Mobility, a installé un petit slalom entre des lampadaires et des plots en plastique de couleur pour apprendre à ses élèves à manier le guidon. Créée en 2015, l’association propose tous les samedis des cours collectifs ou individuels pour adultes ou enfants pour (ré)apprendre à faire du vélo. Après avoir versé leur cotisation de 15 euros à l’association, les adhérents ont accès à un ensemble de formations pour un coût de 20 à 120 euros, suivant le nombre de séances. Depuis juin 2020, la Ville de Rennes a décidé d’encourager l’initiative et subventionne l’association dans le cadre de l’opération « Remise en selle » , des cours gratuits pour réapprendre à faire du vélo.
(RÉ)APPRENDRE LES BASES Sur le terrain légèrement en pente, parfait pour s’élancer, Nicoleta, 42 ans, et sa fille, 10 ans, s’engagent sur le parcours. Depuis début septembre, elles se lèvent tous les samedis matin pour faire 60
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du vélo en famille. D’origine roumaine, les parents de Nicoleta, ne sachant pas eux-mêmes faire du vélo, ne lui ont pas transmis ce savoir-faire. « En ayant des enfants, je me suis rendu compte que c’était extrêmement important, en tant que parent de savoir faire du vélo et d’acheter un vélo à ses enfants pour leur apprendre l’autonomie et l’écologie », explique Nicoleta. Première étape, la phase de formation pure, où les apprentis cyclistes apprennent à pédaler et s’équiper. Deuxième étape, les moniteurs leur expliquent comment maîtriser sa vitesse et manier le vélo. Troisième étape, c’est le grand bain ! Les participants sont amenés sur un circuit dans la ville. « Faire le tour du pâté de maisons, c’est du concret ! Il y a des voitures près de nous, des piétons. On peut faire dix fois le même circuit en fonction de l’heure à laquelle on passe, c’est toujours nouveau. Ça enrichit leur bagage technique et ça leur permet d’être plus à l’aise », garantit Thomas Lejeune.
« FAIRE SAUTER LES BARRIÈRES » Sur le parcours, Nicoleta avance progressivement, jusqu’au moment où elle doit faire le tour d’un lampadaire. Quasiment à l’arrêt, elle vacille et évite de peu l’accident. « Ce qui vous manque encore, c’est de parvenir à lâcher un peu l’appréhension. Tout va bien… », rassure le moniteur. Le plus gros du travail pour ces adultes, c’est en effet
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ÉAKU OU E LIBRE de reprendre confiance en eux. « On essaie de faire sauter les barrières. Plus ils sont adultes, plus ils pensent au regard des autres, à la chute. Alors qu’un enfant, il va jouer », explique Thomas. Pour la plupart des participants adultes, c’est une mésaventure sur la voie publique, une frayeur qui les a conduits à ne plus faire de vélo. Les deux salariés de l’association doivent donc faire preuve de patience et de bienveillance pour les remettre en selle. « Tous les deux ont un brevet d’État dans les activités du cyclisme, mais la principale qualité pour être formateur ici, c’est d’avoir de la sensibilité, de prendre le temps de regarder les gens, d’analyser comment ils sont sur le vélo », relève Sébastien His, président de Roazhon Mobility. « J’avais fait des tentatives avec mon conjoint, mes amis, mais ça n’avait jamais abouti. Ici, j’ai vite repris en confiance parce que c’est très bien expliqué. Maintenant, c’est un vrai plaisir ! », s’extasie Nicoleta. Pour Mireille, 37 ans, ce sont d’autres raisons qui l’ont convaincue de prendre des cours de vélo. « Je suis d’origine africaine, c’est culturel. Les hommes
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1. Thomas Lejeune, moniteur à Roazhon Mobility, vérifie la taille du vélo pour Nicoleta, 42 ans. 2. Olivia, 10 ans, slalome entre les plots sous le regard attentif de Thomas. 3. Ultimes instructions à Mireille et Célia avant de partir en balade.
font du vélo et pas les femmes. On n’a pas cette chance. » Voyant ses trois enfants faire du vélo tous les dimanches avec leur père, Mireille a décidé de se lancer. « J’ai fait un pari avec ma grande qui a 12 ans : “Maman, si d’ici décembre tu ne montes pas sur un vélo, tu me fais un chèque de 100 euros.” Elle n’y croyait pas ! » Sauf que depuis le mois de septembre, Mireille sait tenir sur son vélo et pédale aisément parmi la circulation. Les femmes ne sont pas seules à être mises à l’écart de cette pratique. Les habitants des quartiers populaires le sont également, comme l’explique Thierry Rolland, vice-président de l’association : « La problématique des quartiers, c’est surtout “où stocker les vélos ?” On n’a pas forcément de local. Il y a des vols ou ils sont abîmés. » Apprendre à faire du vélo, c’est aussi devenir plus autonome. Des personnes n’ayant pas les moyens de s’acheter ou d’entretenir une voiture, aux horaires trop décalés pour prendre les transports en commun, se retrouvent avec comme seules alternatives de mobilité la marche ou le vélo. Ainsi l’association s’est rapprochée des services
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D.I.Y. Auré l ie A i m é J é rô m in e D e r i g ny, c o l l e ct if A rg o s
AUTONOMIE
CONSERVES ALIMENTAIRES
LA RÉCUP QUI DÉBOÎTE
D.I
Il y a un peu plus de deux cents ans, les conserves métalliques révolutionnaient le secteur alimentaire. Outre leur praticité, ces boîtes possèdent de nombreux atouts écologiques. Aisément recyclables, elles sont aussi une matière première facile à détourner pour nos projets créatifs.
O
uvrir une boîte de conserve est un geste commun. C’est à l’inventeur Nicolas Appert que nous devons cette méthode de conservation répandue dans le monde entier. Soixante ans avant Louis Pasteur, à l’aube du xixe siècle, cet autodidacte découvrait que traiter les aliments par la chaleur et les mettre à l’abri de l’air permettait de les conserver et consommer ultérieurement en toute sécurité. Aujourd’hui, l’appertisation a toujours le vent en poupe : chaque Français consomme en moyenne 50 kilos de boîtes de conserve par an [source : UPPIA].
RECYCLABLES À L’INFINI En acier ou en aluminium, les conserves sont écologiquement vertueuses. Elles sont recyclables à 100 % et à l’infini, sans jamais perdre leurs propriétés techniques. Elles peuvent donc se « réincarner » en divers objets métalliques. Ces boîtes sont aussi faciles à trier : souvent faites de monomatériaux, elles sont récupérées automatiquement sur les tapis de tri. Ainsi, en France les emballages métalliques présentent un taux de recyclage encourageant : 78 % pour l’acier et environ 60 % pour l’aluminium. Afin de limiter la consommation de matières premières, les chercheurs ont réduit de 14 % en dix ans leur poids moyen. À la clé, une économie de 23 000 tonnes d’acier chaque année ! Par ailleurs, l’absence de chaîne du froid pour préserver les aliments
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appertisés limite considérablement la consommation d’énergie : pas de camion frigorifique ni de réfrigérateur. Dans cette quête d’une moindre consommation d’énergie, la filière dispose d’un autre atout : la proximité entre les lieux de production et ceux de mise en boîte. Il ne s’écoule en moyenne que quatre heures entre la cueillette et l’appertisation, et outre l’intérêt nutritionnel que cela représente, les émissions de CO2 liées aux transports en sont considérablement réduites.
ANTI-GASPI Les boîtes de conserve limitent efficacement le gaspillage alimentaire : du fait de sa très longue durée de conservation et des volumes adaptés aux besoins de chacun, il est très rare de devoir jeter un produit appertisé. Toutefois, un inconvénient – s’il faut en trouver un – réside dans le procédé de conservation : les produits traités par la chaleur sont bien moins riches en nutriments que leurs équivalents frais. La boîte de conserve « dépanne », mais ne saurait donc se substituer aux produits non transformés, ou à d’autres méthodes de conservation telles que la lactofermentation qui, elle, améliore les valeurs nutritionnelles des aliments et leur assimilation. Outre le recyclage, une autre voie pour réduire l’empreinte de nos conserves est de transformer ces boîtes en objets fonctionnels ou décoratifs pour la maison. Voici donc quelques idées, à décliner à l’envi… n
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I.Y
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je vais bien, le monde va mieux
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Véron iqu e B u r y
COURIR
VAISS’ARRÊTER BIEN LE ET NEJEPLUS La course à pied est l’une des activités physiques les plus intéressantes pour la santé du corps et de l’esprit. L’une des plus pratiques aussi. Mais comment s’y mettre en prenant du plaisir ? Et surtout comment ne pas raccrocher ? Coach et passionnés vous livrent leurs conseils…
C Pratiquer la course à pied permet à Mathilde Grange, étudiante en médecine, de « libérer les tensions. »
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’est un rituel. Chaque semaine, qu’il vente, qu’il pleuve ou qu’il neige, Marina court 10 kilomètres, en solitaire. « C’est ma bouffée d’oxygène, je ne peux plus m’en passer, affirme cette responsable de communication de 47 ans qui a découvert la course à pied sur le tard. Non seulement cela me permet de me vider la tête et de penser à autre chose, mais cela me fait un bien fou physiquement parlant. » Et elle n’est pas la seule à être « accro » à ses footings hebdomadaires. Sur les 13,6 millions de pratiquants majeurs que compte la France, 5 millions
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avouent en effet courir au moins une fois par semaine pour se maintenir en forme, mais aussi et surtout pour évacuer le stress. « J’expulse les choses qui m’énervent et je marche dessus en courant », confie ainsi Mathilde Grange, 23 ans, étudiante en médecine, qui a continué à courir en mars dernier alors qu’elle était réquisitionnée, en pleine crise sanitaire. « C’est un peu comme de la sophrologie active, affirme-t-elle. Ça permet de libérer les tensions et après, on se sent plus fort et plus apaisé. » Car oui, la course à pied est une excellente alliée pour chasser l’anxiété ou dénouer ses « nœuds au cerveau ». Mais comment s’y prendre pour débuter ? Pour ne pas se dégoûter avant même d’avoir éprouvé le moindre plaisir ? « En restant à l’écoute de ses propres sensations et en y allant progressivement », conseille Christophe Dacquet, coach athlé santé au sein de l’Amiens université club. Car même si la course à pied reste, avec la marche, l’une des activités les plus naturelles pour l’humain, « on ne court pas 5 ou 10 kilomètres sans s’arrêter du jour au lendemain, prévient le coach. Il faut y aller par palier, progressivement, en respectant son rythme, ses capacités physiques et son histoire. » Un ancien sportif de 40 ou 50 ans aura d’ailleurs plus de facilités qu’une personne non sportive en surpoids de 30 ans. Mais rien n’est impossible. Cyril Berros en sait quelque chose. Il y a cinq ans, cet ancien obèse a réussi le pari fou de perdre 57 kilos en une année grâce au vélo d’appartement, à une alimentation plus équilibrée et à la
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AUTONOMIE course à pied. « La première fois que j’ai couru sur la Corniche, je me suis arrêté, rouge écarlate, au bout d’un kilomètre à alterner marche et course. J’avais l’impression d’avoir couru un marathon », se souvient ce Marseillais de 40 ans qui a pourtant persévéré, augmentant progressivement la distance et la durée, pour parvenir à courir 7 kilomètres sans s’arrêter sept mois plus tard.
MONDE VA MIEUX LES LEVIERS DE LA MOTIVATION « L’alternance marche/course est une bonne manière d’entrer dans l’activité », admet Christophe Dacquet qui propose d’y ajouter « une dimension ludique, en se fixant, par exemple, une distance de 100 mètres entre deux arbres et en commençant simplement par des allers-retours alternant marche/marche rapide/course pendant quinze minutes. » Le fait de délimiter les espaces et de s’autoriser à marcher après avoir couru permet de garder la motivation même si les premiers 100 mètres peuvent s’avérer difficiles. Pas besoin d’en faire plus lors des premières séances. On n’augmentera le temps et la distance qu’au fil des semaines en fonction de ses sensations. « On pourra alors décider de partir sur une boucle pas trop longue en alternant, par exemple, une minute de marche/deux minutes de course », propose le coach. « La progression doit rester très lente » et « l’intensité de l’effort très modérée » [vous devez être capable de parler en courant]. Ceci afin de préserver le plaisir, car « le mental est important, voire essentiel chez le débutant ». Il importe également de privilégier un cadre agréable en évitant le bitume et les terrains accidentés : « une vaste étendue de pelouse ou un parc », conseille le coach. S’entourer est aussi un gage de réussite. « Le fait de courir avec quelqu’un m’a beaucoup aidée », reconnaît Muriel, 42 ans, qui a commencé à courir en 2010 avec des collègues avant de poursuivre avec son mari sur les bords de l’Erdre à Nantes. Mais « il faut trouver quelqu’un qui a le même rythme et les mêmes habitudes de course que soi, prévient-elle, sinon cela ne marche pas. » Marina, elle, a éprouvé tellement de difficultés en solo qu’elle a choisi de rejoindre un club. « J’appréhendais un peu l’effet de groupe, mais c’est ce qui m’a aidée à ne pas raccrocher », assure-t-elle. En plus d’un coaching adapté qui lui a permis de progresser plus rapidement, elle
y a trouvé un soutien et des coéquipiers : « Même quand le coach n’est pas là, on s’entraîne et on s’encourage. C’est motivant. » Se fixer un objectif, voire s’inscrire à une course ou à un évènement sportif, est aussi un bon moyen de booster sa motivation. C’est ainsi que Cécile, 45 ans, a découvert le plaisir de courir, il y a deux ans, sur la plage de Saint-Malo, en se préparant pour un raid féminin multisport en Laponie auquel elle s’était inscrite avec une amie parisienne. Elle n’a pas raccroché depuis et s’est même inscrite à un autre défi sportif pour « le plaisir de partager un bon moment entre amies ». Cyril Berros, lui aussi, est passé par là et a bouclé son premier marathon en 2018. S’il aime participer à des courses avec des amis, il reconnaît que c’est l’activité en elle-même qui le motive tous les deux jours à se lever aux aurores pour filer, baskets aux pieds, sur la Corniche. « Même si c’est dur parfois parce que je suis fatigué ou que j’ai repris quelques kilos, je sais que derrière je me sentirai extrêmement bien. » Apaisé, plus léger et plus serein. Avec ce sentiment de s’être fait du bien. Un shoot d’endorphine sain et efficace. n
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Il y a cinq ans, Cyril Berros a fait siennes les règles d’or du coureur débutant : lente progressivité, cadre agréable… Pour cet ancien obèse, devenu marathonien, courir rime désormais avec plaisir.
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cui sin e , E N M, O D E ZE R O D E CH ET ! Linda Louis
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RESTES CUISINE DE BISCUITS DONNEZ-LEUR UNE SECONDE VIE ! Avouons-le, il nous arrive encore de laisser traîner des fonds de paquets de gâteaux et de biscuits dans le placard. Résultat : ils tombent en miettes ou ramollissent et plus personne n’en veut. Voici quelques recettes gourmandes pour leur donner une seconde vie !
AVEC DES RESTES DE BISCUITS PÂTE À TARTINER AUX SPÉCULOOS Faites chauffer à feu modéré 300 ml de lait (vache, brebis, végétal, au choix) dans une casserole avec 200 g de spéculoos cassés en morceaux et 50 g de sucre de canne. Mélangez continuellement jusqu’à la formation d’une pâte onctueuse et lisse (environ 15 minutes). Versez encore chaud dans un pot et dégustez sur du pain, des crêpes. Cette recette peut être réalisée avec d’autres biscuits (cookies, Tout d’abord, pensez à bien stocker sablés…) et se conserve vos biscuits dans des bocaux 15 jours au frigo.
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hermétiques pour éviter qu’ils ne ramollissent. Vous pouvez également les stocker dans de jolies boîtes en métal, mais vérifiez-les régulièrement, car les mites alimentaires arrivent parfois à se glisser dedans. Si vous vous retrouvez avec des biscuits ramollis, faites-les sécher 10 minutes dans le four réglé à 50 °C.
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PÂTE À CRUMBLE Écrasez dans un mortier 100 g de biscuits mous et mélangezles avec 50 g de beurre mou et 30 g de sucre roux. PANNACOTTA AUX COOKIES Versez 800 ml de lait d’amande dans une casserole avec 80 g
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de cookies, 80 g de sucre de canne et 4 g d’agar-agar [lire page 88]. Faites bouillir, mixez finement avec le mixeur plongeant, puis versez dans des ramequins. Faites refroidir. AVEC DES VIENNOISERIES RASSISES Passez les viennoiseries sous l’eau. Elles ne doivent pas être trop imbibées, juste mouillées. Faites chauffer le four à 180 °C. Disposez les viennoiseries dans un plat à gratin et recouvrez-les hermétiquement avec un autre plat à gratin. L’objectif est de confiner les viennoiseries dans un environnement chaud et humide. Faites chauffer 7 à 8 minutes, retirez le couvercle et poursuivez la cuisson 1 minute de plus. Sortez les viennoiseries et attendez quelques minutes avant de les déguster. BRIOCHE PERDUE Ravivez des tranches de brioche rassise en les trempant dans un mélange composé de 2 œufs et 400 ml de lait, puis en les faisant dorer à la poêle avec un peu de beurre et en les saupoudrant en fin de cuisson de sucre. Un vrai régal !
INGRÉDIENTS POUR 6 À 8 PERSONNES
AUTONOMIE TEMPS DE PRÉPARATION : 40 MIN
TIRAMISU
REPOS : 8 À 12 H CONSERVATION : 24 H
• 4 œufs frais
• 80 g de sucre de canne • 300 g de mascarpone • 36 biscuits à la cuillère ou bâtonnets de brioche rassise (300 g) • 250 ml de café, cacao en poudre
CUISINE
SAUCISSON AU CHOCOLAT ET AUX RESTES DE BISCUITS TEMPS DE PRÉPARATION : 10 MIN CUISSON : 3 MIN REPOS : 8 H CONSERVATION : 1 SEMAINE INGRÉDIENTS POUR 4 À 6 PERSONNES • 150 g de chocolat au lait • 100 g de chocolat noir • 80 g de noisettes torréfiées • 100 g de biscuits • Sucre glace
1. Faites fondre le chocolat au bain-marie. 2. Cassez les biscuits en petits morceaux au-dessus du saladier et ajoutez les noisettes. 3. Versez ce mélange sur une feuille de papier sulfurisé, laissez tiédir et roulez le tout en forme de boudin d’environ 20 cm de long. 4. Laissez refroidir complètement au réfrigérateur pendant 8 heures. Retirez le papier sulfurisé et saupoudrez de sucre glace. Coupez en tranches, comme un vrai saucisson !
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1. Cassez les œufs et mettez les blancs de côté. Fouettez les jaunes avec le sucre jusqu’à ce que le mélange blanchisse. 2. Incorporez le mascarpone et fouettez vivement. 3. Montez les blancs en neige bien fermes, puis à l’aide d’une spatule souple, incorporez-les à l’appareil au mascarpone. 4. Disposez une couche de 12 biscuits à la cuillère trempés au préalable dans le café au fond d’un moule à charnière de 22 cm (ou d’un plat à gratin). Nappezles d’un tiers d’appareil au mascarpone. 5. Procédez de la même façon avec le reste de biscuits, de manière à obtenir deux autres couches de biscuits et à terminer par l’appareil au mascarpone. Placez au frais au moins 12 heures avant de déguster. 6. Saupoudrez au dernier moment de poudre de cacao.
cui sin e
, CET INGRE DIENT BIO, J'EN FAIS QUOI ? Li n d a L o u i s
AGARAGAR CUISINE AUTONOMIE
POUDRE GÉLIFIANTE MAGIQUE Alternative à la gélatine animale, l’agar-agar transforme et fige n’importe quelle préparation liquide. Issue d’une algue, cette poudre gélifiante est répandue en cuisine et en pâtisserie. Mais quelques conseils s’imposent pour bien l’apprivoiser : suivez-nous, et l’agar-agar n’aura plus de secrets pour vous ! 88
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UN PRODUIT ISSU D’ALGUES Quand on évoque son origine, à savoir les algues rouges (familles des Gélidiacées et Gracilariacées), les sourcils se froncent : « Ça doit donner un goût iodé aux recettes ! » Pas du tout ! Sans odeur et sans saveur, l’agar-agar est en réalité un résidu de mucilage, cette substance gélatineuse présente dans les algues, mais aussi les plantes (graines de lin, racine de guimauve) et le règne animal (bave d’escargot). Après avoir lavé, séché et fait bouillir les algues, on récupère le jus obtenu, on le déshydrate, puis on le réduit en poudre. Son code chez les industriels de l’agroalimentaire est le E406.
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CUISINE
MIRACLES EN CUISINE L’agar-agar fait des miracles grâce à son pouvoir gélifiant huit fois supérieur à celui de la gélatine de porc. Grâce à lui, on prépare facilement et en un rien de temps des entremets légers et sans œufs (pannacotta, crème vanille ou caramel…), des aspics salés, des terrines de légumes, des gelées, des pâtes de fruit, des confitures avec moins de sucre (elles se conservent cependant moins longtemps).
L’ART DE BIEN DOSER Pour que l’alchimie opère, il convient de respecter deux règles d’or : - mélanger l’agar-agar au préalable dans un liquide (ou une compote, une purée de légumes…) ; - faire bouillir le mélange 30 secondes au minimum. Sans quoi, le mucilage ne sera pas « réveillé » et la préparation ne gélifiera pas. Comptez 2 g d’agar-agar pour 500 ml de liquide afin d’obtenir une texture ferme et bien gélifiée. Si vous souhaitez simplement donner du corps à une préparation, 1 g pour 500 ml de liquide suffit. Mais attention, il faut que celle-ci soit refroidie pour apprécier le résultat, contrairement à la fécule d’amidon avec laquelle on voit la préparation s’épaissir sous nos yeux. Si vous souhaitez gélifier des terrines de légumes, avec plus de matières donc, comptez 3 g pour 500 ml de liquide (ici, une soupe épaisse). Pour doser l’agar-agar avec précision, optez pour une balance électronique qui pèse au gramme près, elle vous sera aussi utile pour réaliser des cosmétiques maison. Sinon, utilisez une cuillère à café.
FOIRE AUX QUESTIONS
En poudre, en paillettes ou en filaments, que choisir ? La poudre, elle est plus simple d’utilisation. Ma gelée n’a pas bien pris, pourquoi ? Plusieurs explications à ce phénomène : soit vous n’avez pas fait assez cuire la préparation (comptez 30 secondes), soit celle-ci contient un agent acide (le jus de citron, le vinaigre ont tendance à diminuer le pouvoir gélifiant de l’agar-agar). Dans la mesure du possible, refaites chauffer votre préparation avec un peu d’agar-agar (1/2 c. à c. pour 500 ml). L’avantage, c’est que cette poudre est thermoréversible : les préparations peuvent se reliquéfier en étant chauffées (à partir de 60 °C), puis se regélifier. Mon entremets est trop ferme, on dirait de la jelly anglaise ! Pour limiter le côté « bloc », réalisez des préparations crémeuses, onctueuses, de type béchamel ou soupe pour du salé ou crème anglaise pour du sucré. Pour épaissir une sauce, vous pouvez ajouter un peu de fécule d’amidon (20 g, soit 1 c. à s., pour 300 ml de liquide), l’enrichir avec de la crème soja, de la purée d’amande ou des biscuits [lire page 86]. Combien de temps conserver un entremets avec de l’agar-agar ? Ne dépassez pas 3 jours car les préparations de base, riches en eau, ont tendance à ramollir avec le temps. À LIRE : Clea, Agar-agar, secret minceur des Japonaises, La Plage, 2007.
POUR UNE PRÉPARATION STANDARD 1 G D’AGAR-AGAR
1/2 C. À C.
250 ML DE LIQUIDE
2 G D’AGAR-AGAR
1 C. À C.
500 ML DE LIQUIDE
4 G D’AGAR-AGAR (1 SACHET)
2 C. À C.
1 L DE LIQUIDE
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HORS-SÉRIES EN VENTE À L’UNITÉ SUR WWW.KAIZEN-MAGAZINE.COM HS 3 Comment devenir autonome T. 1 - HS 5 Pour une enfance joyeuse T. 1 - 0-6 ans - HS 6 Je suis heureux et sobre - HS 7 Pour une enfance joyeuse T. 2 - 6-12 ans - HS 8 Comment devenir autonome T. 2 - HS 9 Pour une adolescence joyeuse T. 3 - 12-18 ans - HS 10 Souffle quantique - HS 11 Le féminin, au cœur du changement - HS 12 Santé, vers une convergence des médecines T. 1 - HS 13 Esprit nomade - HS 14 Comment devenir autonome T. 3 - Zéro déchet de A à Z - HS 15 L’âge d’or ! Vivre mieux, en bonne santé, et plus longtemps - HS 16 Santé T. 2. Petit manuel de santé au naturel - HS 17 Comment devenir autonome T. 4 - Jardiner, en ville, à la campagne… [à paraître] - Numéros spéciaux hors abonnement : HS Les 4 saisons végétariennes - HS En quête de sens. Trouver un travail, une activité qui correspond à vos valeurs - HS Numérique responsable. L’informatique peut-elle être écologique ? MERCI DE REMPLIR VOS COORDONNÉES EN LETTRES CAPITALES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prénom
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