KAIZEN 60 : Ecologie des raisons d'espérer

Page 1

60

JANVIER FÉVRIER 2022

ÉCOLOGIE COUV

DES RAISONS D’ESPÉRER !

EMMANUEL MACRON QUEL BILAN ?

INTERVIEW

JEAN-LOUIS ÉTIENNE « ON NE REPOUSSE PAS SES LIMITES, ON LES DÉCOUVRE » BEL/LUX 7,20 € - CH 11 FS ESP 7,40 € - DOM 7,40 € TOM 850 XPF MAR 80 MAD TUN 11,90 TND

1


EDITO Éditeur SCOP SARL à capital variable La Maison écologique Avenue des Trente – 35190 Tinténiac www.kaizen-magazine.com Magazine bimestriel numéro 60 Janvier-février 2022 Imprimé sur papier certifié PEFC Directrice de la publication Nadia Guillaume Rédacteur en chef Pascal Greboval Rédactrice en chef adjointe Sabah Rahmani Secrétaire de rédaction Emmanuelle Painvin Directrice administrative et financière Céline Pageot Attachée commerciale Aurore Gallon Gestionnaire service abonnements Delphine Le Louarn Abonnements et commandes 9, rue de la Bégassière - 35760 Montgermont abonnement@kaizen-magazine.fr Direction artistique, maquette et mise en pages • www.hobo.paris hobo.paris – hobo@hobo.paris Tél. : 06 12 17 87 33 Photo de couverture © Grégory Dubus - istock Impression Imprimerie SIEP ZA des Marchais – Rue des Peupliers 77590 Bois-le-Roi SIRET : 438 943 235 000 46 • APE : 5814Z Commission paritaire : 0322 K 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. : 05 63 94 15 50 Distribution MLP Vente au numéro pour les diffuseurs Destination Média • Tél. : 01 56 82 12 00 contact@destinationmedia.fr Aucun texte ni aucune illustration ne peuvent être reproduits sans l’autorisation du magazine. Merci.

DIX ANS

D ÉDITO

ix ans que Kaizen explore des solutions écologiques et sociales. Dix ans, l’heure du bilan ? Un bilan en forme de page qui se tourne. Il y a dix ans, nous nous lancions dans une aventure humaine plus que dans une démarche entrepreneuriale. Il n’y avait ni business plan ni stratégie marketing. Le projet reposait sur l’envie naïve mais sincère de « changer le monde pas à pas ». Être encore présent après dix ans, dans le contexte actuel, c’est plutôt une réussite… Mais à quel prix ? Il serait imprécis de dire que l’humain a été consumé par le modèle économique, mais soyons lucide : beaucoup de bonnes énergies ont été consommées. À commencer par celles des personnes qui ont contribué à cette première décennie de Kaizen. J’ai une pensée sincère pour elles toutes, qui se sont engagées pour une cause qui leur semblait juste. Une débauche d’énergie au travail peu cohérente avec l’invitation à ralentir que nous proposons [lire Kaizen n° 59]. Une débauche qui altère les liens. Notre expérience est à l’image de la société : comment changer de paradigme dans le système actuel, en préservant les liens humains ? La course au temps tue le lien ! Mais bonne nouvelle, selon Chateaubriand, « les moments de crise produisent un redoublement de vie chez les hommes ». Nous l’expérimentons. Nous avons changé de modèle entrepreneurial. Nous sommes à présent un acteur de l’économie sociale et solidaire (ESS), nous avons intégré la Scop La Maison écologique en novembre 2021. Certes par contrainte, mais aussi parce que notre volonté de proposer des solutions pour faire face au dérèglement climatique – qui s’est accentué en dix ans – est intacte. Page qui se tourne ou signe de re-naissance ? C’était l’intention originelle d’Yvan Saint-Jours, alors rédacteur en chef de La Maison écologique : éditer Kaizen au sein de cette Scop. Car, rendons à César ce qui est à César, c’est bien dans son cerveau qu’a germé la graine du magazine. Et, pour être plus précis, cette graine a germé à la suite d’une interview de Pierre Rabhi pour La Maison écologique [n° 44, mai 2008]. Une autre page qui se tourne. Pierre Rabhi est décédé le 4 décembre 2021. Il avait guidé notre ligne éditoriale : autonomie et respect du vivant. Sabah Rahmani lui rend hommage page 98, mais je voudrais ajouter un mot : comment certaines personnes, qui ne le connaissaient pas, peuvent-elles aujourd’hui cracher sur sa tombe avec autant de certitudes ? Qu’il fût imparfait, assurément ! Mais comme tout le monde, non ? Ce comportement me questionne surtout sur notre rapport à l’altérité : Pierre ne cessait de rappeler la nécessité de sortir d’un manichéisme mortifère, et voilà que même des écolos convaincus se font les apôtres d’une vision binaire ! La complexité également chère à Edgar Morin envoyée aux oubliettes… Alors Kaizen doit-il aussi renoncer à cette approche complexe, et devenir binaire ? C’est une vraie question à l'aube de cette deuxième décennie, cette nouvelle année. Nous attendons vos avis sur redaction@kaizen-magazine.fr. D'ici là, nous vous souhaitons de bonnes fêtes, et une année 2022 aussi agréable et joyeuse que possible. Pascal, p our t out e l ’équ ipe de l a Scop

3

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

3


SOMMAiRE RENCONTRE Jean-Louis Étienne

K AI ZEN N° 6 0 - JA NV IER - F ÉVR IER 2 0 2 2

6

CHRONIQUE Quitterie de Villepin Une heure par semaine

13

EN QUÊTE DE SENS Paul Huguen De la fonction publique au travail du bois

62

65

BILAN MACRON Emmanuel Macron, quel bilan écologique ?

15

CHRONIQUE Gilles Farcet « Comme un puzzle »

66

LA NATURE MISE À NU L’écrevisse de Californie, quelle histoire !

28

VENT D’AILLEURS Danemark Den grønne Friskole, à l’école de la transition BD Aude Picault La low-tech

70

D.I.Y. La spiruline, tonique de la peau

SOMMAIRE

PORTFOLIO Tiina Itkonen Entre ciel et glace 30

72

JE VAIS BIEN, LE MONDE VA MIEUX 76 Plus vivant avec l’apnée EN CHIFFRES L’œuf a la cote

81

VIVRE EN OASIS Magnyéthique, créer un écosystème résilient

82

BD Mathilde Stento Au potager ! Le tunnel de forçage

84

CUISINE En mode zéro déchet ! Le pain sec Cet ingrédient bio, j’en fais quoi ? La chicorée

86

SÉLECTION KULTURELLE

93

CHRONIQUE 95 Dominique Bourg Doit-on manger de la viande ?

DOSSIER

HOMMAGE À PIERRE RABHI 98 Ouvrir son cœur à la terre…

Dix ans de forces vives 40 Un don ponctuel ? Un don mensuel ? * www.okpal.com/soutenir-kaizen-magazine * Dons déductibles d’impôt à 66 %

4

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

4

Origine du papier : Allemagne Taux de fibres recyclées : 0 % - Ptot : 0,017 kg/t Pour les abonnés : une relance de fin d’abonnement.

Collecte de dons

Soutenir KAIZEN,

c’est s’engager dans un monde de solutions


R e ncon t r e

DÉCRYPTAGE

Pascal G reboval et Sabah R ah m an i

JEAN-LOUIS RENCO ÉTIENNE Médecin, explorateur, Jean-Louis Étienne est le premier homme connu à avoir atteint le pôle Nord en solitaire. Amoureux des pôles et des océans, ce défenseur de l’environnement alerte avec pédagogie sur le réchauffement climatique et invite les citoyens à faire leur part avec optimisme et autonomie.

BIO EXPRESS 1946 Naissance à Vielmur-sur-Agout (Tarn) 1986 Atteint le pôle Nord en solitaire 1989-1990 Expédition internationale avec la Transantarctica 2002 Mission Banquise pôle Nord pour étudier le réchauffement climatique 2010 Première traversée de l’océan Arctique en ballon Expédition Polar Pod, plateforme océanographique « zéro émission » dérivant dans le courant circumpolaire antarctique

6

Vos expéditions vous ont mené vers de nombreux espaces, notamment polaires et marins, aux milieux extrêmes… D’où vous vient ce lien intense à la nature ? Ce lien me vient de mon lieu de naissance et de mon enfance. Je suis né à la campagne dans un village de huit cents habitants. Derrière la maison, il y avait des champs et j’aimais vivre dehors, au contact des oiseaux, que j’apprivoisais parfois, et des bois. J’ai coutume de dire que j’ai fait ma première grande expédition à 8 ans en campant… au fond du jardin ! Il neigeait et je m’imaginais faire une expédition himalayenne. Puis, à 14 ans, j’ai écrit une liste de matériel pour camper dans les Pyrénées l’hiver. Cette envie d’expéditions est très ancienne et associée au souhait de vivre dehors avec la nature. Et votre envie de devenir médecin ? Je suis allé au collège technique, car je n’avais pas les notes suffisantes pour entrer en sixième. Je voulais devenir menuisier, mais il n’y avait plus de place en menuiserie, alors j’ai appris le métier de tourneur fraiseur. J’ai toujours été bricoleur, car on n’avait rien à la maison… à part de l’amour ! J’avais été autonome spontanément ; je réparais par exemple mon vélo, puis ma mobylette, et plus tard ma première voiture d’occasion. Après mon

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

6

CAP, je suis revenu dans le circuit scolaire en seconde et j’ai redécouvert les mathématiques. Une fois le bac passé, j’ai étudié la médecine par goût pour les sciences naturelles et l’implication sociale qu’offrait ce métier. En 1986, vous avez été le premier homme connu à atteindre le pôle Nord en solitaire. Quels souvenirs en gardez-vous ? La tentation de l’abandon. J’étais seul, au sens où il n’y avait ni GPS ni téléphone, rien. Aucun moyen de communication. Je faisais 1 kilomètre à l’heure et j’étais épuisé en fin de journée. Je me suis dit que je n’y arriverai jamais. Je suis alors entré dans une solitude intense et j’étais totalement en apesanteur vis-à-vis du monde, je cherchais une bonne raison d’abandonner. Je rêvais de me casser une jambe et de revenir en héros sur une civière. Mais je pense aussi que j’ai réussi justement parce que j’étais seul. Je suis sûr que si l’on avait été deux, on aurait réussi à se convaincre qu’on était sur une voie dangereuse. Mais il y a des puissances qu’on ignore en soi et la solitude, c’est intense. L’intensité dans la décision, l’intensité dans le choix d’une route. Arrivé au pôle Nord, après soixante-trois jours de marche, ce fut une libération, une nourriture extraordinaire. Ce sentiment que toutes les cellules de mon corps étaient


DÉCRYPTAGE

ONTRE

© Collection J.-L. Étienne

“ON NE REPOUSSE PAS SES LIMITES, ON LES DÉCOUVRE"

7

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

7


BILAN MACRON

L éa D an g L e Cil Ver t

DÉCRYPTAGE

EMMANUEL MACRON

QUEL BILAN ÉCOLOGIQUE ? ENQUÊTE Depuis son élection, Emmanuel Macron s’est positionné à plusieurs reprises comme le « président du climat », de son appel aux chercheurs américains lors du retrait des États-Unis de l’Accord de Paris à son récent discours d’inauguration à la COP26. Mais, dans les actes, qu’en est-il ? Avec la fin de son quinquennat vient le temps du bilan. Le président est-il aussi écolo qu’il le prétend ?

Macron ecolo

« Make our planet great again ! », avait scandé Emmanuel Macron le 1er juin 2017 aux Américains suite à la décision de Donald Trump de retirer les États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat. Avant même d’être nommé en 2018 par l’ONU « champion de la Terre », Emmanuel Macron proposait dans son programme « une rupture profonde avec le modèle productif existant » et faisait de nombreuses promesses en lien avec les enjeux écologiques. Parmi elles : ramener la part du nucléaire dans le mix énergétique à 50 % ou encore fermer toutes les centrales à charbon. Au moment de la première vague de la pandémie, c’est encore lui qui avait exprimé, dans son allocution aux Français du 13 avril 2020, la nécessité de planifier « la sobriété carbone, la prévention [et] la résilience », de « sortir des sentiers battus, des idéologies, nous réinventer » et de bâtir « un autre projet dans la concorde ». Un semblant d’épiphanie qui, en pleine crise sanitaire, donnait presque envie d’y croire. Lors de son discours d’inauguration à la COP26, qui a eu lieu du 31 octobre au 12 novembre 2021 à Glasgow, en Écosse, Emmanuel Macron a réaffirmé que la France « sera au rendez-vous de ses engagements » [en matière de réduction des gaz à effet de serre, N.D.L.R.] S’il affirme aussi qu’il « n’en sous-estime ni l’importance ni la difficulté », ses nombreuses prises de position – publiques – en termes d’écologie tranchent sévèrement avec la réalité. Son discours semble en effet bien loin des mesures mises en place durant le quinquennat. Les associations écologistes sont nombreuses, encore aujourd’hui, à dénoncer ce décalage entre ses propos et les décisions prises par le gouvernement : détricotage de la loi climat, soutien aux multinationales polluantes, promesses

15

électorales non tenues… La France, qui ne respecte toujours pas l’Accord de Paris pris en 2015, n’a de leçon à donner à personne. Malgré ce décalage avéré, Emmanuel Macron s’est encore permis, lors de son discours d’inauguration à la COP26, d’interpeller les « plus gros émetteurs », dont les stratégies nationales ne sont pas conformes à l’objectif du 1,5 degré, à rehausser « leur ambition dans les quinze jours ». Le président aurait-il cependant oublié les deux condamnations du tribunal administratif de Paris et du Conseil d’État pour son inaction en termes de politiques publiques environnementales ? Faudrait-il lui remémorer également les nombreux rappels du Haut Conseil pour le climat à respecter les engagements de l’Accord de Paris ? Cette hypocrisie est arrivée à son comble le vendredi 29 octobre 2021, à l’avant-veille de la COP26 donc, quand a circulé un document confidentiel où la France tente de faire reconnaître dans la taxonomie européenne le gaz et le nucléaire sous le label « énergie verte » pour s’assurer des marchés à l’étranger. Pour ne pas se laisser bercer par les stratégies de communication du président, ce bilan rend compte des mesures phares du gouvernement en matière d’écologie, et en donne le ton. Si Emmanuel Macron n’hésite pas à rappeler l’importance des enjeux écologiques via ses tweets ou ses prises de parole publiques, les actes suivent plus rarement. Nous dressons donc ici un bilan de son quinquennat via une analyse des principales mesures du président depuis son élection, en 2017, jusqu’à aujourd’hui, à quelques semaines de l’élection présidentielle. n

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

15


BILAN MACRON

DÉCRYPTAGE

AGRICULTURE ALIMENTATION

3/13

MESURES POSITIVES

Emmanuel Macron a échoué à interdire les néonicotinoïdes, le glyphosate et l’élevage de poules en cage, qu’il s’était pourtant engagé à supprimer, en plus d’amoindrir les aides aux agriculteurs biologiques. Côté alimentation, des efforts ont été réalisés au niveau de la restauration collective, qui devrait contenir plus de produits « durables », sans pour autant définir très clairement les aliments concernés. Le bilan reste donc mitigé.

UNE RESTAURATION COLLECTIVE PLUS DURABLE ? La loi EGalim prévoit, à partir de 2022, 50 % de produits bio ou durables dans la restauration collective. Ces produits doivent être conformes à la certification environnementale de niveau 21 pour entrer dans ces 50 %. Pourtant les volailles, quel que soit le type d’élevage – donc, potentiellement, d’élevage industriel –, bénéficient de cette recommandation. 1. La certification environnementale est un dispositif de l’État qui se décline en trois niveaux et concerne les exploitations agricoles.

DISTANCE MINIMALE DES ÉPANDAGES DE PESTICIDES Le 20 décembre 2019, le gouvernement a annoncé que les agriculteurs devront respecter des distances minimales de sécurité entre les zones d’épandage et les habitations. Elles sont fixées respectivement à trois, cinq (pour les cultures basses), dix (pour les cultures hautes) ou, de façon exceptionnelle, vingt mètres (pour 0,3 % des produits phytosanitaires seulement). Ces distances restent, pour les associations environnementales, très i n s u f fi s a n t e s p o u r p r o t é g e r l a population.

16

INTERDICTIONS NON EFFECTIVES POUR L’ÉLEVAGE INTENSIF Emmanuel Macron avait promis d’interdire l’élevage de poules en cage lors de sa campagne pour l’élection présidentielle. Pour l’instant, seules les installations de nouveaux élevages en batterie sont interdites. De même pour la castration à vif des porcelets et le broyage des poussins mâles, interdits depuis le 1er janvier 2022, mais dont l’effectivité sera progressive.

LOI AUTORISANT DE NOUVEAU LES NÉONICOTINOÏDES Les insecticides néonicotinoïdes, connus pour être très toxiques pour les pollinisateurs, et de ce fait interdits en 2018, ont été à nouveau autorisés par le gouvernement en 2020 pour les producteurs de betteraves à sucre.

PROMESSE NON TENUE SUR LE GLYPHOSATE Emmanuel Macron avait promis lors de sa campagne d’interdire le glyphosate, une des molécules les plus utilisées dans les produits phytosanitaires. À la fin de son mandat, cette interdiction n’a pas encore cours, et semble toujours plus lointaine.

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

16

ENQU Macron

INTERDICTION DU DIOXYDE DE TITANE DANS LES PRODUITS ALIMENTAIRES

La loi EGalim prévoit l’interdiction du dioxyde de titane, un minéral composé d’oxygène et de titane, classé comme cancérogène avéré par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) dans les produits alimentaires.

RÉVISION DU PROGRAMME NATIONAL NUTRITION SANTÉ (PNNS) Le gouvernement a ajusté les recommandations nationales en matière de santé alimentaire. Suite à l’avis de l’ANSES, l’État recommande de baisser la consommation de charcuterie et de viande, de privilégier les légumineuses, les fruits à coque et les céréales complètes. Les jus de fruit, quant à eux, passent dans la catégorie « boisson sucrée ».

PLAN PROTÉINES VÉGÉTALES Dans le cadre du plan France Relance, le gouvernement a réservé une enveloppe de 100 millions d’euros pour soutenir la production française de protéines végétales. Il vise à augmenter de 40 % la surface de production de légumineuses sur trois ans, améliorer l’autonomie alimentaire des élevages et soutenir la recherche et le développement. Un budget encore insuffisant, néanmoins, selon les syndicats paysans.

MESURES NÉGATIVES, NEUTRES OU POSITIVES


L A na t, ure m i se A n u Fra n ç o i s L a ss e r re C aro l in e G a m o n

L’écrevisse de Californie DÉCRYPTAGE

Q U E L LE H I S TO I RE !

LA NA MISE

De la même manière que pour leurs cousines américaines, la présence des écrevisses californiennes dans nos eaux a d’abord été favorisée, puis rejetée. Comme c’est souvent le cas avec les espèces dites « exotiques »…

D’AILLEURS ?

Oui. L’histoire des écrevisses californiennes ressemble à celles de nos huîtres, importées d’Asie pour remplacer les européennes décimées par des maladies dès 1870. À partir de 1890 en Europe et 1911 en France, des écrevisses américaines ont été importées pour l’élevage et le repeuplement. Ont suivi les écrevisses californiennes en 1960, puis celles de Louisiane en 1973. Les premières californiennes ont été importées en France à partir de la Suède et ses élevages exempts de « peste des écrevisses » en 1972. Désormais, avec deux nouvelles américaines arrivées plus récemment, on trouve dans nos eaux douces trois espèces autochtones et six allochtones (exotiques), difficiles à distinguer entre elles.

Sources : François Lasserre, Beaux d’ailleurs, Belin, 2020 - francois-lasserre.com

28

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

“UTILES” ?

En partie. Les écrevisses californiennes remplacent à certains endroits les écrevisses malades ou décimées à force de surexploitation, dégradation des habitats, pollution ou encore avec l’introduction de maladies. Elles y broutent, régulent, fertilisent, nourrissent des prédateurs (poissons, hérons, aigrettes, etc.) et tuent des animaux « non désirés », comme des larves d’insectes qui nous ennuient.

28


DRÔLE DE NOM ?

DÉCRYPTAGE EUROPÉENNES ?

Oui. Il viendrait de leur nom allemand Krebiz et de l’ancien français escrevice, « cuirasse formée d’écailles ». L’écrevisse californienne porte aussi le nom « écrevisse signal » en raison des deux taches claires à l’échancrure des pinces, qui évoquent les anciens drapeaux de signalisation des trains.

Oui. Mais combien de temps faudra-til pour que cela soit officiellement reconnu ? Ne pourrait-on pas accorder le droit du sol à tous ces non-humains venus d’ailleurs et désormais chez eux, parfois depuis longtemps ?

ATURE À NUE

GOURMANDES ?

Oui. Le premier lâcher de 1 500 jeunes écrevisses de Californie a eu lieu en 1973 dans le lac de Divonneles-Bains (Ain) pour brouter et limiter la végétation. Dix ans plus tard, les prises annuelles étaient estimées à 100 000 individus. Cette manne a motivé bien d’autres introductions çà et là, notamment en raison de leur taille et de leur qualité gustative.

ENNUYEUSES ?

Pas vraiment. Pour des protecteurs de milieux humides, ces écrevisses entreraient parfois en concurrence avec les espèces originaires d’Europe, et modifieraient certains milieux. Elles ne semblent pourtant pas « prendre la place » de façon frontale des autochtones, plus rares et désormais protégées, mais elles occupent plutôt des milieux dégradés ou moins adaptés aux écrevisses européennes. Comme souvent avec les espèces exotiques, les études ont du mal à prouver les torts attribués ou supposés.

29

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

29


PO R TFOLIO

DOSSIER-PORTFOLIO

PORT

TIINA ITKONEN

ENTRE CIEL ET GLACE Passionnée par les peuples indigènes de l’Arctique et leur culture, Tiina Itkonen part pour le Groenland dans les années 1990. Depuis, la photographe finlandaise n’a jamais vraiment quitté la deuxième calotte glaciaire du globe (après l’Antarctique) apprenant, au fil de ses voyages, les rudiments du langage local, prenant le temps d’échanger avec ses sujets, de les côtoyer et les connaître. Tiina Itkonen n’a de cesse de sillonner ces terres glacées difficilement praticables : traîneau, voilier, hélicoptère… Tous les moyens sont bons pour relier les villages perdus au bout de la glace et documenter la vie du peuple groenlandais. Ce travail lui vaut une reconnaissance internationale. Ses images ont été montrées dans une vingtaine d’expositions, dont le dernier Festival Photo La Gacilly, « Plein Nord ». Aujourd’hui, la photographe se concentre plus sur ces paysages changeant au gré du réchauffement climatique et de l’emprise de l’humain sur cette terre prise entre ciel et glace. n POUR ALLER PLUS LOIN • tiinaitkonen.com

30

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

30


DOSSIER-PORTFOLIO

TFOLIO

Niels, Qaanaaq, 2019. Sur ces terres de glace où l’agriculture n’est pas possible, la chasse au phoque, au morse ou à l’ours polaire est vitale pour de nombreux Inuits. En raison du réchauffement climatique, la banquise rétrécit d’environ dix pour cent tous les dix ans.

31

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

31


DOSSIER

DOSSIER-PORTFOLIO An n e Steiger L au re N ou al h at Sabah R ah m an i

DIX ANS

DOSS

DE FORCES VIVES

© Raphaël Daniel

Loin de la résignation ou de l’éco-anxiété, des femmes et des hommes, des enfants aussi, ont fait le choix de l’action, à l’échelle locale, pour répondre aux défis du dérèglement climatique. Ensemble, ils œuvrent pour un monde plus respectueux de l’humain et de la nature, sans compter sur les promesses d’une classe politique souvent hors-sol. Preuves que les solutions existent sur le terrain, depuis longtemps. À nous d’essaimer !

40

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

40


ÉDUC ATION DOSSIER-PORTFOLIO

CAMINANDO

L’ÉCOLE DE LA NATURE

SIER

Née en 2013, Caminando trace son petit bonhomme de chemin. Préservation de la biodiversité, maraîchage, entretiens des locaux, vie en commun, transmission intergénérationnelle : ici, on prépare de futurs citoyens autonomes et responsables. Kaizen y avait fait un saut en 2015. Pour nos dix ans, on a eu envie d’y retourner.

M

englon, dans la Drôme, au sud de Valence. Notre voiture emprunte un chemin de terre arboré et finit par se garer près d’un porche, devant un vieux château en pierre, celui de Saint-Ferréol. Le brouillard matinal est épais. Il fait un peu froid. Pas de sonnette ni de panneau, on se demande si le GPS ne s’est pas trompé. Une école primaire ici ? Cette bâtisse au naturel, rustique et rurale, ressemble plutôt à une vieille ferme distinguée avec une large cour carrée. Au rez-de-chaussée, trois salles de classe desservies par des couloirs aux murs de pierre peinturlurés et tarabiscotés, de grands tapis de sol, peu de tables à hauteur d’enfants, mais beaucoup de coussins épais et fermes que les premiers arrivés arrangent en cercle sur le sol. À l’étage, la petite cuisine où les parents viennent à tour de rôle faire à manger, et la salle à manger attenante où deux enfants passeront bientôt le balai. « Une école, c’est d’abord un lieu, explique Muriel Fifils, directrice de Caminando, en nous accueillant avec un café. À l’époque, on cherchait un site de plain-pied arboré, avec un espace pour jardiner et de la place pour une petite culture maraîchère. Peu importait l’intérieur du lieu en vérité, seul l’emplacement comptait. » Ce formidable bout de terre à l’ombre du Vercors incarne à lui seul tout un projet pédagogique : « À sept minutes à pied d’un côté, on a la rivière, précise Muriel en levant l’index droit vers la fenêtre. À sept minutes à pied de l’autre, on a la colline. Là-bas, dit-elle en pointant vers la gazinière, on a la clairière. Et là-bas, pointe-t-elle vers la porte, on a les bassins d’irrigation construits par les moines. Regardez par la

fenêtre : sans ce fichu brouillard, vous verriez les montagnes ! C’est ça le plus important. On n’est même pas dans un village : cela donne un sentiment de liberté énorme aux enfants ! »

« TOUT LE MONDE S’Y MET » Caminando est un établissement hors contrat inspecté par l’Éducation nationale. Les frais de scolarité s’élèvent à 180 euros par mois ; or, cette école coûte plus du double et pas un centime n’est déboursé par l’État. « On invente, on se débrouille autrement », dit Muriel. Ici, pas de personnel de ménage, pas de cantine, pas d’ATSEM, pas de gardien ni de factotum, personne d’autre que les enfants, leurs parents et l’équipe pédagogique. Balai, intendance, poubelles, bibliothèque, toilettes, affichage, feux et lumières : chaque enfant, du plus petit au plus grand, a une responsabilité, qui change plusieurs fois dans l’année. « On est capables de nettoyer l’école en vingt minutes ; tout le monde s’y met, et tout le monde sait ce qu’il a à faire, dit Muriel. En ce moment, on a un souci grandissant avec la lumière : plus rien ne marche, il va falloir qu’on se penche sérieusement sur le problème. Dans un cas comme celui-ci, on peut faire appel aux familles ou à un prestataire, mais ce sont les enfants qui lancent le signal. » En participant de si près à la vie de l’école, les enfants se sentent valorisés. Julie, institutrice, confirme : « Chaque situation, chaque problème à résoudre renvoie à ce que les Indiens kogis appellent “l’émergence”, l’imprévu, qui nous force à trouver ensemble des solutions. » Le projet emprunte aux pédagogies Freinet, Steiner et Montessori – mais pas que. L’approche

41

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

41


TERRITOIRES

DOSSIER-PORTFOLIO

EN BOURGOGNE

BIENVENUE DANS SIERL’« AUTRE CALIFORNIE » ! Un hangar-magasin solidaire, un atelier vélo, un autre de revalorisation des matériaux, une friperie, un comptoir numérique, une bâtisse en terre-paille… Le tiers-lieu La Californie illustre à merveille la dynamique humaine, associative et sociale qui fait battre le cœur de la Puisaye dans l’Yonne.

UN LIEU OUVERT ET SOUPLE Même la puissance publique est venue couronner l’initiative. En mars 2021, La Californie, réunie en

© Jérômine Derigny, collectif Argos

L

es week-ends, le site de La Californie – qui réunit trois associations : La Recyclerie, Toucy Entraide et Bonjour Cascade — ne désemplit pas. Les amateurs de petite reine viennent faire réparer leur vélo chez Rustine Bieber, d’autres font du shopping de seconde ou troisième main, apprennent à se servir d’un ordinateur ou s’initient aux méthodes alternatives de construction, Depuis 2018, ce spot pourtant à l’écart du centre-ville de Toucy (Yonne) est devenu central pour le développement des projets de transition sociale et solidaire. On y sent des hybridations très riches entre néoruraux et gens du cru, décroissants et publics défavorisés, tous volontaires pour inventer le fameux « monde d’après » mais… tout de suite ! Colette, les étangs, le château de Guédelon et la poterie, voilà à peu près tout ce que l’on imagine quand on pense à la Puisaye, ce territoire touristique, vallonné, boisé, humide, qui fait office de poumon vert à deux heures au sud de Paris. Ce que l’on sait moins, c’est que ce triangle des Bermudes de la SNCF et autres grands axes est emblématique de ce qui se joue un peu partout en France, du Diois au Périgord Vert en passant par le Centre Bretagne : une revitalisation des territoires sans pareille, une déferlante de nouveaux habitants, donc de porteurs de projets, et des cartes du paysage social rebattues.

consortium, a été lauréate de l’appel à manifestation d’intérêt de l’Agence nationale de la cohésion des territoires. La subvention obtenue 1 a permis d’embaucher Camille Massé, une fille du pays revenue sur ses terres après un long périple à vélo, pour coordonner l’ensemble. « Partage de compétences, transition écologique et sociale, pouvoir d’agir, envie de marier les mondes, le socle de valeurs communes est très fort entre ces collectifs. Mon job consiste à faire en sorte qu’ils se complètent, qu’ils s’épaulent, sans se marcher dessus tout en développant des projets communs. » Sans ce soutien à l’impulsion et à la structuration, le projet marcherait sur trois pattes. « On a besoin des coups de pouce de la puissance publique, c’est évident,

51

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

51


tempère Julia Poulin, une des salariées de La Recyclerie, mais nous dégageons aussi des revenus via les ventes. » En effet, le hangar n’est jamais vide. Au milieu des piles d’assiettes et des canapés (très) vintage, les chineurs remplissent leur cabas pour des montants dérisoires. Le réemploi joue à fond, il est même devenu un sujet d’étude pour les lycéens du coin. Ex-cheffe de projet dans les collectivités locales, Julia trouve enfin « un lieu ouvert, souple, sans le carcan institutionnel où les empêchements sont nombreux ». Le souffle du biotope de La Californie dévoile un territoire à nouveau « énergisé » où se mêlent des publics bien distincts. Les confinements sont passés par là, les derniers biens « de caractère » ont été pris d’assaut à des tarifs souvent inaccessibles pour les locaux Avec le télétravail, les maisons secondaires deviennent principales et l’ancrage sur le territoire plus concret. Ceux qui s’installent veulent s’investir. C’est le cas de Christophe, producteur parisien engagé, qui a signé l’achat de sa maison poyaudine quelques jours avant le confinement. Depuis, il 52

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

52

DOSS © Jérômine Derigny, collectif Argos

© Jérômine Derigny, collectif Argos

DOSSIER-PORTFOLIO

© Jérômine Derigny, collectif Argos

DOSSIER

10 ANS DE FORCES VIVES

traîne la patte pour remonter à la capitale. Avec sa compagne, Audrey – qui s’est formée au maraîchage et à l’art de la forêt comestible –, ils découvrent les joies incommensurables du calme, du travail à distance, mais aussi d’une surstimulation associative. « Je pensais arriver dans un îlot bien pépère pour mes vieux jours, rigole-t-il. En réalité, j’ai découvert un tissu humain et associatif inouï. J’ai souvent le vertige tant il existe d’initiatives. Il y a ici – depuis longtemps — une vraie toile d’entraide, de résistance, où tout se repense. Il y a plus d’activistes que de militants, de gens qui sont dans le faire qu’à brasser de grandes idées ; ici, on concrétise, on ne blablate pas. » Ce matin pluvieux d’octobre, le couple file à la petite salle des fêtes de Saints-en-Puisaye. Le café est chaud, les petits pains sont délicieux. Ils sont venus assister à la conférence de Valérie Jousseaume, autrice de Plouc Pride. Un nouveau récit pour les campagnes (L’aube, 2021). Chercheuse à l’Institut de géographie et d’aménagement de Nantes, elle parle de la ruralité de 2021 et des défis auxquels elle doit faire face. « La plupart des territoires ruraux connaissent un regain sans pareil. Ils proposent l’essentiel des services publics, un cadre de vie super agréable, le minimum syndical de commerces et de zones artisanales mais surtout un cœur vibrant de relations humaines », explique-t-elle. Pour ceux qui souhaitent désormais vivre et travailler à la campagne, les besoins sont clairs : « Ils veulent une vie moderne au vert, et se sentir comme “en vacances”, ce qui signifie qu’il leur faut une qualité paysagère ET un “autre monde”. Pour la vie moderne, c’est simple, les réponses d’aménageurs existent : équipements, routes, zones commerciales, lotissements, mais pour un “autre monde”, en revanche, c’est un impensé politique en termes d’aménagement. »


DOSSIER

10 ANS DE FORCES VIVES

BI ODIVERSITÉ DOSSIER-PORTFOLIO

RÉENSAUVAGEMENT

LES VERTUS DU « RIEN FAIREDOSS »

Des collines à perte de vue, des bosquets de feuillus sur des pentes revêches, le silence d’un site isolé, voilà qui ressemble à n’importe quel coin boisé du Vercors… Mais celui-ci abrite une réserve de vie sauvage, un espace laissé libre d’évoluer sans la moindre interaction humaine. Une nature à laquelle l’humain fiche la paix ! Une nature libre d’être naturelle en somme.

S

ur ces 500 hectares, cerfs, chamois, sangliers sont libres d’aller et venir sans craindre chasseurs, sylviculteurs ou troupeaux d’animaux domestiques. Cette réserve de vie sauvage (RVS) a été acquise en 2019 par l’Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS), connue pour ses engagements contre la chasse. Elle a réussi à mobiliser près de vingt mille donateurs et quelques fondations privées (Brigitte Bardot, UEM) pour obtenir les 2,3 millions d’euros nécessaires au rachat de la parcelle mais aussi de la concession de chasse qui y était liée. La raison d’être de l’ASPAS ? Que subsiste une nature sauvage au milieu des activités humaines qui artificialisent ou exploitent à peu près chaque recoin de la planète (seulement 3 % des terres émergées seraient « intactes »). Avec la réserve de Lioncel, l’ASPAS en est à sa quatrième partition pour mettre en musique le principe du réensauvagement en France.

L’URGENCE DE RESTAURER LA NATURE Ce terme est apparu dans les années 1990, grâce aux travaux de l’écologiste David Foreman. Il s’agit de favoriser la modification d’un écosystème, grâce à l’action structurante de grands prédateurs ou de grands herbivores, pour lui permettre de s’auto-entretenir et de s’adapter sans intervention ni présence humaines. Pour cela, mieux vaut procéder à grande échelle, selon les principes de la biologie de conservation qui préconise la création de « zones », mais le réensauvagement s’est décliné sous des formes plus modestes comme c’est le cas avec la dernière 60

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

60

parcelle de l’ASPAS, perchée dans la Drôme. « Le réensauvagement, c’est le retour à la nature qui préexistait avant que l’on devienne des destructeurs, explique Gilbert Cochet, naturaliste et coauteur avec sa femme Béatrice de L’Europe réensauvagée. Vers un nouveau monde (Actes Sud, 2020). Le couple sillonne les réserves naturelles du monde entier depuis vingt ans et achète collectivement des terres pour les rendre à… elles-mêmes. « On restaure la nature en la laissant en libre évolution, on la laisse tranquille mais on étudie les effets du “rien faire”. Il ne s’agit pas de simplement sanctuariser des lieux, cela implique nombre de domaines de recherche comme la géologie, la botanique, l’éthologie ou la génétique des populations. » Car l’urgence est là, d’après le scientifique : en 2019, un rapport de l’IPBES – l’équivalent du GIEC pour la biodiversité – avançait qu’un million d’espèces végétales et animales étaient en danger d’extinction, et que 75 % des environnements terrestres étaient « sévèrement altérés » par les activités humaines. Chasse, pêche, coupe de bois, oviculture sont évidemment interdites dans les réserves de vie sauvage. Forcément, le concept ne fait pas que des émules, loin de là… En août 2020, à l’annonce de l’achat de la parcelle par l’ASPAS, des centaines de manifestants – éleveurs, bergers, agriculteurs et chasseurs, autoidentifiés comme « acteurs du monde rural drômois » – ont défilé à Crest contre « la mainmise sur le foncier naturel drômois » craignant la mort des territoires ruraux, du pastoralisme, l’explosion du prix du foncier et une nature


DOSSIER-PORTFOLIO

© Simon Pouyet

SIER « mise sous cloche ». Un risque inexistant pour la présidente de l’ASPAS, Madline Rubin : « Ces îlots sont ouverts au public. Ils ne sont pas figés, ils évoluent librement et d’autant plus que les changements climatiques en cours leur imposent de s’adapter quoi qu’il en soit. » L’ASPAS n’est propriétaire que de 700 hectares de terrains dans la Drôme, soit seulement 0,1 % de la surface du département ! Ce sont des zones boisées, sans cultures, ni bâti. « Tandis que dans le même temps, 2 000 hectares de terres agricoles disparaissent chaque année dans notre département au profit de constructions et de zones commerciales sans susciter le même émoi chez ces acteurs ruraux », déplore l’ASPAS.

UN MAILLAGE D’ÎLOTS Hors de question de réensauvager le moindre recoin de France, l’association tient à garantir un maillage d’espaces vraiment protégés, alliés à des formes d’exploitations forestières non violentes, des agricultures paysannes hospitalières pour la vie sauvage. Ainsi, tous ceux qui possèdent un bout de forêt, un étang, un terrain ou une rivière, peuvent à leur tour les laisser évoluer au fil des saisons. Le réensauvagement vient compléter la politique nationale ou régionale de préservation de la nature, aux côtés des parcs naturels nationaux ou des réserves naturelles dans lesquels subsistent des activités humaines. Le principe attire de plus en plus ceux qui en ont les moyens. Ainsi, depuis de nombreuses années, l’Américain Douglas Tompkins – fondateur de la marque Esprit — et sa femme Kristine McDivitt

Tompkins rachètent les terres de la Mésopotamie argentine pour les laisser tranquilles. Résultat : fourmiliers, jaguars et autres caïmans se multiplient alors qu’ils étaient jusque-là empêchés par les grandes cultures. Devant la crispation des agriculteurs et des grands propriétaires terriens, Tompkins a promis de léguer sa réserve à l’Argentine dans une vingtaine d’années. Il n’en est pas à son coup d’essai. Il s’est déjà offert des fjords déchiquetés sur les côtes de Patagonie et des forêts sur les flancs de volcans au Chili. Ses parcs publics ou privés représentent aujourd’hui un territoire de la taille de la Corse. Plus modestement, l’acteur et réalisateur belge Bouli Lanners évite à sa façon tout étalement urbain à Liège et fait ainsi la nique aux promoteurs immobiliers prompts à dégainer un projet de lotissement. « Après la maison, j’ai acheté le bois puis les terrains autour pour pouvoir préserver un maximum de surface. Mon voisin, sur la colline en face, a fait la même chose. Donc, on a 10 000 mètres carrés de terrains en ville qui ne seront jamais construits, j’ai mis tout mon argent dedans ! » confie-t-il au quotidien en ligne Reporterre. Des particuliers se regroupent aussi en SCIC pour sanctuariser des bouts de forêt dans le Morvan ou le Périgord Vert. Quant au botaniste Francis Hallé, il souhaite faire renaître une forêt primaire – environ 70 000 hectares — en Europe. Sanctuariser, c’est une chose mais tenir la promesse de POUR ALLER PLUS LOIN « ne rien faire » pendant six siècles, c’en est une autre… n L. N. • aspas-nature.org

61

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

61


TRANSITION

BD REPO

70

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

70


Au de Picau l t

TRANSITION

ORTAGE

71

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

71


Vé ro n i q u e B u r y

je vais bien, le monde va mieux

AUTONOMIE

PLUS VIVANT AVEC

PNÉE JEL’AVAIS BIEN LE M

S’immerger pour mieux se reconnecter avec soi-même, son corps et son esprit. C’est ce que propose l’apnée, une activité où l’on se coupe de l’oxygène pour se sentir encore plus vivant. En groupe et en sécurité.

L

«

À chaque remontée, le pratiquant doit confirmer à ses partenaires d’entraînement que tout va bien d’un signe de la main.

a première chose à retenir en apnée, c’est qu’il faut toujours se surveiller les uns les autres. Si l’on a annoncé que l’on partait pour trente secondes, on ne fait pas plus que le temps annoncé. On se tient la main pendant toute l’apnée ; si on appuie une fois avec le pouce sur la main du voisin, c’est que tout va bien, plusieurs fois d’affilée, c’est qu’il faut sortir. Tu as compris ? » Gaëlle, 44 ans, acquiesce d’un hochement de tête. Autour d’elle, une dizaine de

passionnés en combinaison néoprène sont déjà prêts à se glisser dans le petit bain de la piscine municipale Georges-Tissot, à Bordeaux, pour leur séance quotidienne d’apnée statique. Gaëlle, elle, s’interroge. « Je n’en ai jamais fait. Je ne sais pas si je vais arriver à prendre mon air correctement. » « Ne t’inquiète pas, lui sourit Olivier List, l’un des participants. On commence toujours par une première série d’apnées poumons vides. Cela permet d’entrer dans la séance en douceur en faisant redescendre le rythme cardiaque. » « Et si tu ressens le besoin de respirer, tu sors la tête de l’eau », ajoute Cedrick Magnen, instructeur et président de l’association Apnée 33.

PROGRESSER PAR PALIER Ici, chacun va à son rythme. On ne cherche pas à faire aussi bien que son voisin, juste à avancer en fonction de ses propres capacités et de sa forme du moment. « C’est très important d’être attentif aux autres, mais aussi à soi-même. Le corps nous envoie beaucoup de signaux pendant une séance d’apnée, l’objectif est d’apprendre à les reconnaître pour mieux se connaître et savoir jusqu’où l’on peut aller », explique Olivier. Pas question en effet de se mettre en danger. L’objectif d’une séance d’apnée n’est d’ailleurs pas de rester le maximum de temps sous l’eau à retenir sa respiration. Mais plutôt de progresser vers ce maximum par palier en effectuant des séries (entre six et huit) au cours desquelles on alterne phases d’apnée et phases de récupération. « C’est un peu comme en course à pied, on s’entraîne sur des 76

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

76


AUTONOMIE

MONDE VA MIEUX Au fond de l’eau, le silence aide les apnéistes à se concentrer sur leurs propres sensations. Ici, lors d’une série poumons vides.

durées et des distances plus courtes que notre maximum, que l’on enchaîne en augmentant progressivement, après des phases de récupération réduites. » Après un rappel du programme de la séance du jour, Cedrick Magnen sépare le groupe en deux. D’un côté, ceux qui vont commencer par 1 minute 30 d’apnée, de l’autre, ceux qui commenceront leur série par 2 minutes. C’est parti… Chacun trouve sa place dans le petit bassin, en s’écartant, mais toujours à distance d’une poignée de main de l’autre ; puis au signal, les têtes s’immergent sous l’eau, laissant les corps remonter par le dos à la surface tels des bouts de bois en lévitation. « L’objectif de l’apnée statique est de relâcher au maximum tous les muscles du corps, le visage, les joues, la bouche, les bras, les jambes, de ne plus bouger et de se détendre afin de consommer le moins d’oxygène possible », explique Cedrick Magnen. Pendant ce temps d’apnée, « le cœur se met à ralentir, peu à peu. C’est ce qu’on appelle la bradycardie », détaille le spécialiste. Un réflexe d’immersion bien connu chez les mammifères marins. Sitôt la tête immergée, le rythme cardiaque chute en effet (de 10 à 25 % chez l’homme) et une vasoconstriction périphérique se met en place afin de ramener le sang oxygéné vers les parties vitales, cœur et cerveau, et n’en renvoyer qu’avec parcimonie vers les zones

du corps de moindre importance. C’est pour cette raison aussi que l’on enfile une combinaison lors des séances statiques. « Afin de ne pas se refroidir trop vite. » Mais l’apnée ne se pratique pas qu’immobile en petit bassin. Le mardi midi, c’est en maillot de bain, palmes aux pieds, que les passionnés se retrouvent pour aligner les longueurs, tels des dauphins silencieux et paisibles. Là encore, après une série de trois apnées, poumons vides, les pratiquants enchaînent les ondulations sous l’eau, poumons pleins, à un certain pourcentage de leur maximum et avec une phase de récupération plus ou moins longue. À chaque remontée vers la surface, le rituel est le même. Une main se pose sur le bord du bassin, la bouche s’ouvre pour reprendre de l’air lentement et le regard se tourne vers un camarade observateur afin de lui signifier d’un signe du bout des doigts que tout est OK. La différence avec le statique ? « Comme on consomme plus d’oxygène en dynamique, on doit aussi lutter avec l’acide lactique qui a tendance à durcir les muscles », détaille le coach.

CONNECTER CORPS ET MENTAL « L’objectif est donc de trouver le mouvement le plus juste, relâché et efficace, afin de consommer le moins d’oxygène possible et ainsi aller encore plus loin sous l’eau », ajoute Olivier. Claudia,

77

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

77


cui sin e

AUTONOMIE

, E N M, OD E ZE R O D E CHET ! Linda Louis

CUISINE

LE PAIN SEC … ou comment valoriser le quignon de pain dur, le pain de mie qui arrive à date ou la tranche trop toastée ! Ne perdez pas une miette du pain sec et transformez-le en délicieuses recettes qui sentent bon le blé de nos campagnes.

ACHETEZ-EN MOINS MAIS MIEUX ! Il est vrai qu’une baguette est délicieuse achetée le matin et moins savoureuse en fin de journée, à moins de la passer au grille-pain. Beaucoup l’abandonnent et la laissent durcir. Optez plutôt pour des pains au levain qui se conservent plus longtemps et qui, même après quatre à cinq jours, restent délicieux une fois toastés. Pensez aussi à congeler votre pain, il vous dépannera toujours.

DONNER DU PAIN DUR AUX OISEAUX ?

Donner du pain aux moineaux, aux canards et aux cygnes n’est pas sans risque pour eux. Cette nourriture est en effet totalement inadaptée à leur métabolisme. À force d’en ingurgiter, ils développent de graves malformations, le syndrome de l’aile d’ange, qui peuvent entraîner leur mort. En revanche, aucun souci pour en donner aux poules, habituées à manger du blé, à condition de tremper le pain dans de l’eau.

86

AVEC DU PAIN DUR N’attendez pas qu’il soit complètement rassis avant de le couper en tranches ou en « cubes ». Sinon, il cassera et sera inutilisable pour certaines recettes. • Chapelure : avant de réunir le pain en fine poudre, assurezvous qu’il est bien sec. Si ce n’est pas le cas, passez-le quelques instants au four (10 minutes à 150 °C suffisent). Disposez le pain dans un sac en tissu et refermez

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

86

celui-ci. Réduisez le pain en miettes avec un rouleau à pâtisserie, puis mixez-le. Tamisez cette chapelure pour un résultat parfait. Conservez-la dans un bocal hermétique. Avec la chapelure, panez des boulettes, des croquettes aux pommes de terre, réalisez des gâteaux [lire recette ci-contre], saupoudrez-en sur un gratin, utilisez-la en mélange dans une pâte à crumble, à financiers… • Croûtons à l’ail : frottez des tranches de pain dur avec une gousse d’ail pelée, coupez-les en cubes, puis toastez-les au four pendant 10 minutes à 180 °C. Surveillez bien la cuisson. • Pain perdu : 400 g de tranches de pain rassis, 2 œufs, 400 ml de lait, 80 g de sucre, beurre Dans un grand saladier, fouettez les œufs avec le lait et 50 g de sucre. Trempez-y les tranches de pain et laissez reposer environ 10 minutes jusqu’à ce qu’elles soient tendres. Faites fondre une noisette de beurre dans une grande poêle. Disposez-y le pain égoutté et laissez cuire à feu modéré 3 ou 4 minutes de chaque côté. Quand le pain est doré, saupoudrezle d’un voile de sucre de chaque côté et poursuivez la cuisson 1 minute. Procédez de la même façon avec le reste de pain. Servez avec du coulis de fruits de saison.


BOULETTES DE PAIN AUTONOMIE AU PARMESAN TEMPS DE PRÉPARATION : 30 MIN CUISSON : 15 MIN CONSERVATION : 3 JOURS INGRÉDIENTS POUR UNE VINGTAINE DE BOULETTES

• 200 g de pain dur • 600 ml de lait

• 3 gousses d’ail hachées • 2 c. à s. de persil plat haché • 1 œuf • 100 g de parmesan râpé • Sel et poivre • Chapelure • Huile ou sauce tomate

1. Cassez et émiettez le pain dans un torchon à l’aide d’un rouleau à pâtisserie. 2. Faites bouillir le lait, puis versez-le sur le pain. Laissez reposer 15 minutes avec une assiette dessus. 3. Pétrissez le mélange pour obtenir une pâte. Ajoutez l’ail, le persil, l’œuf, le parmesan. Salez, poivrez et mélangez à nouveau. 4. Une fois la pâte refroidie, prélevez des boulettes à l’aide d’une cuillère à glace. Faites rouler chaque boulette entre vos mains mouillées pour lui donner une forme bien ronde. Enveloppez les boulettes de chapelure. 5. Pour les cuire, soit vous les badigeonnez d’huile et faites cuire au four 20 minutes à 180 °C, soit vous les pochez dans une sauce tomate bouillante pendant 15 minutes.

CUISINE

MOELLEUX AUX POMMES

ET AUX MIETTES DE PAIN DUR TEMPS DE PRÉPARATION : 20 MIN REPOS : 1 H CONSERVATION : 3 JOURS INGRÉDIENTS POUR 6 À 8 PERSONNES • 4 œufs

• 150 g de sucre blond de canne • 150 g de beurre fondu • 1 yaourt • 50 g de poudre d’amandes • 150 g de pain grillé réduit en chapelure bien fine • 50 g de farine T80 • 1 c. à c. rase de poudre à lever • 1 c. à c. bombée d’épices (cannelle ou mélange pour pain d’épices) • 4 morceaux de gingembre confit hachés finement • 5 petites pommes • Quelques amandes effilées • 1 c. à s. de gelée de pommes • 1 pincée de sel.

1. Préchauffez le four à 180 °C. Cassez les œufs et mettez les blancs de côté. 2. Fouettez les jaunes avec le sucre jusqu’à ce que le mélange blanchisse.

87

3. Ajoutez le beurre fondu, le yaourt et mélangez bien. 4. Incorporez la poudre d’amandes, la chapelure, la farine, la poudre à lever, les épices et le gingembre confit. 5. Battez les blancs en neige bien ferme. Incorporez-les à la pâte. 6. Chemisez un petit moule à manqué ou beurrez-le. Lavez quatre pommes, coupez-les en quatre, retirez le trognon et détaillez la chair en grosses lamelles. Versez un tiers de pâte au fond et lissez la surface. Ajoutez un tiers de pommes, puis un tiers de pâte et ainsi de suite. 7. À l’aide d’une mandoline, coupez en tranches la dernière pomme entière et posez-la sur le dessus. Ajoutez les amandes effilées et faites cuire 45 minutes. 8. À la sortie du four, nappez la surface avec la gelée de pommes et saupoudrez d’épices. Ce moelleux se déguste tel quel ou avec une boule de glace vanille.

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

87


LA CUISINE CHICORÉE

cui sin e

, CET INGRE DIENT BIO, J'EN FAIS QUOI ?

AUTONOMIE

Li n d a L o u i s

Dans le pot à gauche, fines racines de chicorée sauvage (Cichorium intybus) torréfiées.

88

KAIZEN - N° 60 - JANVIER-FÉVRIER 2022

88


C h r o n ique Bast ien D u b o i s

HOMMAGE A Pierre rabhi AUTONOMIE

OUVRIR SON CŒUR À LA TERRE… CHRONIQUE

I DOMINIQUE

l a su redonner vie aux terres les plus ses fardeaux, mais pour raviver des paroles et des arides, proposer de nouveaux chemins de gestes créateurs de joie, lorsque le verbe s’incarne conscience. Homme de terre et de lettres, dans l’action, avec spontanéité. Achillea millefolium Pierre Rabhi a renouvelé la pensée et Urtica Cesdioïca gestes et ces paroles reliés à une humanité unil’action écologiques en France et ailleurs. verselle respectueuse du vivant, Pierre œuvrait à Celui qui a inspiré et soutenu la création les pratiquer et à les transmettre à travers ses icame et ses édconférences de Kaizen, partagé sa sagesse dans nos colonnes actions agroécologiques, mses ntnoupendant plus de huit ans, nous a quittés le livres. Il aspirait ainsi Leàs semer les graines de s • velles consciences, à abreuver les cœurs de ses mes4 décembre 2021. Pourtant son verbe, ses écrits, son rire, sa biensages d’amour pour la Terre-Mère. En proposant de • veillance et son intransigeance vivront encore créer des oasis en tous lieux, où chacun fait sa part longtemps. Il laisse de nombreux héritages. Sans du colibri, à la fois plus autonome et solidaire, il a • Jusqu’à 75 € pris en».ch doute le plus précieux, celui d’ouvrir son cœur à montré la voie des « utopies concrètes par an et par perso arge nne toute On le sait moins, mais a aussi touché la terre. surPierre prescription mé dicale La première fois que j’ai rencontré Pierre en 2010, une génération d’enfants d’immigrés, dont je fais Hodes parts de nous-mêmes, nous avions spontanément parlé de noséracines partie. c e i n d e s coIl réconciliait m méo s ues e m l de son oasis parfois tiraillées communes, en Afrique du Nord, entre deux modèles p athiqculturels, p & l ém natale, des liens sensiblesin etsindicibles qui relient en quête d’harmonie identitaire. Élevé dans sa e une famille musulmane, puis o petite enfance dans confié à une famille chrétienne, baptisé à 18 ans, h é t r o a avant de s’émanciper de tout dogme à l’âge adulte, t p y iqu Ostéopathie s Ph déjouer les pièges des contradictions de t e i , h omiléaosu u pathie, étiopathie, d l’apparence plonger dans les profondeurs c h iro p ra x ie, diététiqpour o pédicure, m uelibre, , d’une identité sans rien rejeter de ses icrokiné sithérapie, auriculothau les communautés rurales traditionnelles corps racines multiples. Toujours avec cet Amour inconéra pie, réflexolo hsobriété gqu’il ypnoth ie, vouait à la Vie. C’était sa force. é ra terrestre, à la source de cette « heureuse » ditionnel p ie , psycholog psychomotr harge ie, nc de la modération »icqu’il ité, acProfondément € pris eet ecette « puissance de n 0 n 8 upuncture, affecté par les violences infligées n 1 o rs ’à e a tu p ro r p a a Jusqu p th le t ie a tant valoriser. Là où la simplicité chante e aimait àg la Terre-Mère, il a titré son dernier livre La , sophrolo par an ription médic ie etc… : sc jusq le silence, là où chaque mouvement dessine un€ Tristesse de Gaïa (Actes Sud, 2021). Sans doute, u’à 140 sur pre par an et n papoésie. r pe rso art de vivre, là où chaque saveur est une Gaïa est-elle triste aussi aujourd’hui du départ de tio remémorions les gestes ancestraux denne l’un de ses plus inous r & de t Nous fidèles enfants… u Micronnos parents et grands-parents, préparant le thé, Sans rompre le cycle de la Vie, ces tristesses nous la cascade de l’eau versée pour ce doux breuvage, invitent à poursuivre le combat, à œuvrer chaque les parfums de menthe poivrée qui éveillaient nos jour avec joie et détermination à changer nos sourires. Le partage du pain, rompu à la main. Les modèles, nos récits et nos visions pour accompafemmes qui égrainent la semoule. Les hommes gner notre inévitable (r)évolution. qui se donnent à l’ouvrage. Les enfants libres de Merci Pierre pour tout ce que tu nous as transmis, jouer dans la nature. Des souvenirs heureux, non dans ta simplicité et ta richesse. Je salue l’ami, le pas pour idéaliser un mode de vie qui portait aussi frère de la terre et du ciel… n Sabah Rahmani

BOURG

les particuliers, les employeurs pour leurs salariés, les artisans, commerçants, professions libérales...

...qui rembourse aussi Le ss

les p r

s

Ancrée en Bretagne et ouverte à tous 98 02 99 72 13 00 98 K A I Z E N - N ° 6 0 - J A N V I E R -F É V R I E R 2 0 2 2

mutuellepaysdevilaine@mpv.cimut.fr - www.mutuellepaysdevilaine.fr

res ai nt

« Pierre a su déjouer les pièges de l’apparence pour plonger dans les profondeurs d’une identité libre. »

izatis.com - stock.adobe.com © Dmitry Maslov, shutterstock.com © ESB Professional, © ArCaLu

Une vraie mutuelle pour :


JE M’ABONNE

SANS HORS-SÉRIES

36 €/an

ENCART JE M’ABONNE ABONNEMENT 6 numéros (formats papier + numérique)

AVEC 2 HORS-SÉRIES À PARAÎTRE

56 €/an

6 numéros (formats papier + numérique) + 2 hors-séries POUR LES PROFESSIONNELS ET LES ASSOCIATIONS

JE M’ABONNE SANS HORS-SÉRIES

40 €/an • JE M’ABONNE AVEC 2 HORS-SÉRIES À PARAÎTRE

60 €/an

ABONNEMENTS HORS FRANCE MÉTROPOLITAINE SUR

www.kaizen-magazine.com

MERCI DE REMPLIR VOS COORDONNÉES EN LETTRES CAPITALES . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Nom

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Prénom

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Adresse

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

CP

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Ville

Tél.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Courriel

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (nécessaire à l’enregistrement de votre commande)

Chèque à établir à l’ordre de SCOP LA MAISON ÉCOLOGIQUE-KAIZEN MAGAZINE Bulletin à envoyer à Kaizen – 9, rue de la Bégassière – 35760 Montgermont – Bulletin valable jusqu’au 31/03/2022

Est-ce un réabonnement ?

oui

non • Souhaitez-vous recevoir notre newsletter bimensuelle ?

oui

non

K60

101


C’EST LA RENTRÉE ! LE DÉSTOCKAGE CONTINUE : -50 % SUR LES HORS-SÉRIES ET BIMESTRIELS SUIVANTS

HORS-SÉRIES

FRAIS DE PORT

OFFERTS À PARTIR DE 30 €

(offre valable uniquement avec ce bulletin)

dans la limite des stocks disponibles

À6€

HS 2 La France en transition HS 6 Je suis heureux et sobre HS 10 Souffle quantique HS 11 Le féminin, au cœur du changement

HS 13 Avez-vous l’esprit nomade ? HS 15 L’âge d’or : vivre mieux, en bonne santé, et plus longtemps HS Spécial Anniversaire Pierre Rabhi - Édition 2018 enrichie

VERSO ENCART ABONNEMENT ÉCHANGE RDV

BIMESTRIELS À 2,95 €

K1 Vers la ville comestible K4 L’économie est à nous K5 De l’eau pour tous, comment faire ? K6 Se soigner sans médicaments K7 Les dessous du vêtement éthique K9 Cosmétique bio, la nature sur la peau K10 Pourquoi a-t-on besoin des arbres ? K11 Plus forts ensemble K12 Faut-il suivre le modèle suédois ? K13 Quelle France ? Demain, un autre monde se lève K14 Tout va vite ! Et si on ralentissait ? K15 Faites la fête autrement

À 3,25 €

K16 Soyons positifs K17 Peut-on encore manger du poisson ? K20 La beauté sauvera le monde K21 Tous en selle ! K23 Demain, comment vivrons-nous ? K24 La terre, source de bien-être K26 Voyager autrement K27 La lumière, clef du vivant, énergie de demain K28 Biomimétisme, le vivant comme modèle K29 Gratuité, le temps du partage

K31 Démocratie, aux actes citoyens ! K32 Transition écologique, l’hymne de nos campagnes K33 Le couple, une quête d’harmonie K34 Vers le zéro déchet K36 Le sport, l’allié de notre bien-être K37 Semences, quelles graines pour demain ? K43 Le rire peut-il changer le monde ? K49 Vers la ville verte K50 Rénovation énergétique, un pilier de la transition K51 Océans, alerte et solutions

RETROUVEZ LES SOMMAIRES DÉTAILLÉS ET COMMANDEZ SUR

https://boutique.kaizen-magazine.com/

SANS OUBLIER NOS INCONTOURNABLES ET NOUVEAUTÉS HS Les 4 saisons végétariennes

À 12 €

HS 3 Comment devenir autonome T. 1 HS 5 Pour une enfance joyeuse T. 1 - 0-6 ans HS 7 Pour une enfance joyeuse T. 2 - 6-12 ans HS 8 Comment devenir autonome T. 2 HS 9 Pour une adolescence joyeuse T. 3 - 12-18 ans HS 12 Santé T. 1. Vers une convergence des médecines HS 16 Santé T. 2. Petit manuel de santé au naturel

HS 17 Comment devenir autonome T. 4 Jardiner à la ville, à la campagne HS En quête de sens. Trouver un travail, une activité qui correspond à vos valeurs HS Numérique responsable. L’informatique peut-elle être écologique ? HS Oasis. Un nouveau mode de vie

À 14,90 € 102 HS 14 Comment devenir autonome T. 3 - Zéro déchet de A à Z Grand Format Mers & océans

✂ ✂

À 9,50 €


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.