N°
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JUILLET AOÛT 2020
DÉCRYPTAGE
POST-COVID
L’EXODE URBAIN ?
SOLUTIONS
COUV
BIEN PORTER SON BÉBÉ
AUTONOMIE
NATURISME TOUS À POIL ?
OCÉANS DOSSIER
ALERTE ET SOLUTIONS
1 BEL/LUX 7,20 € - CH 11 FS - ESP 7,40 € DOM 7,40 € - TOM 850 XPF MAR 80 MAD - TUN 11,90 TND
Éditeur SARL EKO LIBRIS au capital de 98 913 € Siège social 74A, rue de Paris - 35000 Rennes info@kaizen-magazine.fr www.kaizen-magazine.com
EDITO
Magazine bimestriel numéro 51 Juillet-août 2020 Imprimé sur papier certifié PEFC Fondateurs Cyril Dion, Yvan Saint-Jours, Patrick Baldassari et Pascal Greboval
NOS ÂMES
Secrétaire de rédaction Emmanuelle Painvin
ÉDITOAMÈRES
Journaliste multimédia Maëlys Vésir
«
Directeur de la publication Patrick Baldassari Rédacteur en chef Pascal Greboval Rédactrice en chef adjointe Sabah Rahmani
Community manager Faustine Lobbé Stagiaires pour ce numéro Clara Jaeger Marius Matty Laure du Mesnildot Directrice administrative et financière Céline Pageot Gestionnaire service abonnements Cyrielle Bulgheroni Abonnements et commandes 74A, rue de Paris - 35000 Rennes abonnement@kaizen-magazine.fr Tél. 02 23 24 26 40 Direction artistique, maquette et mise en pages • www.hobo.paris hobo.paris - hobo@hobo.paris Tél. 06 12 17 87 33 Photo de couverture © George Karbus - Plainpicture Prépresse Schuller-Graphic 18, rue de l’Artisanat 14500 Vire Tél. 02 31 66 29 29 Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (Imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières-les-Vallées SIRET : 539 732 990 000 38 • APE : 5814Z Commission paritaire : 0322 K 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. 05 63 94 15 50 Distribution MLP Vente au numéro pour les diffuseurs Destination Média • Tél. 01 56 82 12 00 contact@destinationmedia.fr Aucun texte ni aucune illustration ne peuvent être reproduits sans l’autorisation du magazine. Merci.
Pascal G reboval R édacteu r en ch ef
L
a mer c’est dégueulasse, les poissons baisent dedans ! », chantait Renaud en 1983. Près de quarante ans plus tard, l’heure n’est plus à la copulation des êtres marins, mais aux multiples pollutions dont ils sont les victimes : plastiques, papiers, polymères, pétrole prolifèrent dans les profondeurs et sur les plages des océans. Mais la pire des pollutions n’est-elle pas cette vision de trois personnes perchées sur des poteaux pendant des plombes au-dessus de l’eau ? Ça vous dit quelque chose ? Bienvenue aux îles Fidji, dans KohLanta 2020 ! Nos « héros » tremblants sur leurs perchoirs sont le parfait symbole de l’esprit de compétition mortifère qui tue le vivant. Ils s’affrontent pour 100 000 euros au cœur d’un écosystème marin, emblème même de la coopération [lire notre dossier, et François Sarano, page 24]. Quelle image, quel symbole ! Notre société marche décidément sur la tête ! Cette année, la finale de Koh-Lanta a réuni sept millions de téléspectateurs. Sea Shepherd, Longitude 181, Surfrider Foundation réunissent quelques milliers d’adhérents… Alors, qui de l’œuf ou de la poule ? Les producteurs qui exacerbent nos instincts primaires ou les téléspectateurs passifs ? J’entends déjà les arguments : « On a bien le droit de se divertir. » Oui. C’est vrai. Mais revenons un instant à l’étymologie. À l’origine, « divertir » signifiait détourner à son profit une part de l’héritage, puis, plus tard, détourner le regard. Comme le dit Pascal dans ses Pensées, le divertissement nous éloigne de la quête de sens. Nous sommes donc dans cette époque où une chaîne TV réussit l’exploit de conjuguer les deux sens du mot divertissement : détourner, à son profit, des millions d’euros en publicité et détourner des millions de paires d’yeux d’une question vitale : la sauvegarde des océans, premiers poumons de la Terre. Loin de nous cependant l’idée de ne pas se divertir. Alors, en cette période estivale post-confinement, conjuguons sens et plaisir. Prenons un masque et un tuba et observons la vie sous-marine, à quelques mètres du bord, comme le fait mon ami Mathieu, en Bretagne. Marchons pieds nus [lire page 74] sur l’estran. Et si la mer est trop loin, et que les écrans vous manquent, pourquoi ne pas télécharger une appli pour apprendre à reconnaître le chant des oiseaux ? Vous verrez : c’est aussi joli que le chant des baleines, en plus accessible. Car, in fine, on ne prend soin que de ce que l’on connaît : « Homme libre, toujours tu chériras la mer ! La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme », nous souffle Baudelaire.
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SOMMAiRE ACTUALITÉ Après le Covid-19, l’exode urbain ? RENCONTRE Virginie Maris CHRONIQUE Quitterie de Villepin Reconnaître
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GOÛT DE L’ENFANCE Porter son bébé, un choix tout-terrain
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CHRONIQUE Christophe André Interdépendance
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EN QUÊTE DE SENS Fabien Cambi, le temps de vivre
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D.I.Y. 70 La seconde vie des joujoux
SOMMAIRE 10
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EN CHIFFRES 16 Fret maritime : quel trafic ! ENQUÊTE 18 La compensation carbone, solution ou illusion ? LA NATURE MISE À NU La guêpe, une parfaite alliée !
OCÉANS ALERTE BLEUE, SOLUTIONS VERTES
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CRÉATEURS DE CULTURE 58 L’Echalier, la culture pour faire revivre les villages VENT D’AILLEURS 62 Inde Digital Green, les paysans indiens en mode 2.0 MOTS CROISÉS Naturisme, tous à poil ?
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BD Benoît Guillaume Créer un supermarché coopératif
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JE VAIS BIEN, LE MONDE VA MIEUX 74 Pieds nus pour renouer avec la terre EN CHIFFRES 79 La glace : un péché mignon ? VIVRE EN OASIS Terr’Azïl « Grandir ensemble naturellement »
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BD Mathilde Stento Au potager ! Arrosage & paillage
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CUISINE En mode zéro déchet ! La tomate Cet ingrédient bio, j’en fais quoi ? Le petit épeautre
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KRUCIVERBONS
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SÉLECTION KULTURELLE
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DOSSIER
CHRONIQUE 98 Dominique Bourg Pessimisme ou optimisme ? Répondre à l’Anthropocène
PORTFOLIO
Jean-Marie Ghislain & Leina Sato 42 RENCONTRE 4
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Origine du papier : pages intérieures : Belgique ; encart : Allemagne ; couverture : Pays-Bas. Taux de fibres recyclées : 0 %. Ce magazine est imprimé sur un papier issu de forêts gérées durablement. Eutrophisation : Ptot = 0,018 kg/t. Pour les abonnés : une relance de fin d’abonnement.
ACT U A LIT e
ACTUALITÉ
Tian a S a l l es
APRÈS LE COVID-19,
L’EXODE URBAIN ?
EXODE U
À l’annonce du confinement, ils seraient plus d’un million à avoir quitté la région parisienne 1. La ville est subitement passée de haut lieu culturel et social à contrée redoutée du béton et de la promiscuité. Qu’ils aient goûté à la vie à la campagne ou subi l’enfermement en appartement, certains citadins ont alors mûri, confirmé, voire accéléré un projet d’exode urbain. Pour eux, la ruralité est devenue une nécessité.
L
a crise sanitaire a été décisive. Confinés avec nos deux enfants, on a réellement ressenti toute l’absurdité de vivre à Pantin (Seine-Saint-Denis). On avait vue sur un mur en briques, pas un seul arbre à l’horizon. » Pour Lucile, journaliste, et David, salarié dans l’industrie automobile, c’est sûr, l’avenir s’écrira à la campagne et aussi rapidement que possible. La famille ne s’estime pas du tout « à plaindre » et Lucile, Francilienne, avoue même avoir été très attachée à sa vie citadine, mais le manque de nature et d’espace enduré pendant deux mois aura été déterminant : changement professionnel pour lui, tra-
vail à distance pour elle, et l’envie d’offrir un autre avenir à leurs enfants de 2 et 5 ans. Un projet partagé par Hicham. Pendant le confinement, depuis son appartement du 20e arrondissement de Paris, ce producteur de théâtre a cherché des terrains agricoles. Une réflexion menée depuis trois ans, qui s’est accélérée. « Le déclic a été le constat des ruptures d’approvisionnement dans les supermarchés parisiens. J’ai repensé aux théories de l’effondrement de Pablo Servigne 2. » Pour Hicham, l’heure est avant tout à l’autonomie alimentaire. Son projet ? Se partager entre théâtre et agriculture. Une décision d’autant plus motivée que l’incertitude est grande quant à son devenir dans le milieu culturel
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LA CAMPAGNE, UN CHOIX DE SOCIÉTÉ ? Cet exode urbain est le cheval de bataille de Claire Poirrier-Desmares. Pour cette néorurale, agricultrice et fondatrice de L’Amante Verte (infusions bio et café-librairie-jardin sensoriel), installée en Bretagne, près de La Gacilly, depuis une dizaine d’années, il s’agit d’un choix à la fois personnel et sociétal. Diplômée de Sciences Po, ex-conseillère politique, Claire vient de publier Exode urbain. Manifeste pour une ruralité positive. Elle voit dans la crise actuelle l’opportunité d’un mouvement des villes vers les campagnes. Le 12 mai dernier, elle a posté sur le site de Libération une « Lettre d’une néorurale aux candidats à l’exode urbain ». Pour elle, habiter en zone rurale va de pair avec changer de société : « Le chemin de la ville est celui de la consommation, avec un certain individualisme, et donc du capitalisme. »
R e n c on t re
BIO EXPRESS 1978 Naissance 2006 Docteure en philosophie, université de Montréal 2009 Chargée de recherche au CNRS, Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive (CEFE) de Montpellier 2010 Philosophie de la biodiversité. Petite éthique pour une nature en péril, Buchet Chastel 2018 Médaille de bronze du CNRS La Part sauvage du monde, Seuil
DÉCRYPTAGE
Au rore Val ade
VIRGINIE RENC MARIS
Chercheuse au CNRS et philosophe de l’environnement, Virginie Maris questionne le processus de domination de l’homme sur la nature. Elle propose de mettre fin à la domestication de la planète et de « laisser la nature sauvage en paix ». Vous militez pour éveiller les consciences à « la disparition, dans sa diversité, de la nature sauvage ». Que désignez-vous sous cette terminologie ? La nature sauvage est cette part du monde que nous n’avons pas créée. Plus précisément, c’est tout ce qui, dans le monde, en particulier dans le monde du vivant, advient par soi-même. Cette vie qui jaillit, puis s’épanouit, à l’extérieur de l’intentionnalité et de l’intervention des êtres humains. Cette nature sauvage est présente, de façon grandiose, dans les espaces qui n’ont pas encore été colonisés. C’est-à-dire soumis à un régime d’extraction, d’exploitation, de production (minière, énergétique, agroalimentaire, etc.) ou d’habitation par les sociétés industrielles. Et, de manière plus discrète, dans notre vie quotidienne, via tous les êtres vivants avec lesquels on coexiste, sans pour autant les avoir domestiqués. Quels chiffres devraient nous alerter sur les dangers de la « domestication du monde » ? La première estimation concerne la « défaunation », la disparition de populations dans le vivant sauvage. Selon le dernier rapport « Planète vivante » du Fonds mondial pour la nature
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Au de R au x
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(WWF), paru en 2018, en l’espace de quarante ans (entre 1970 et 2014), 60 % des vertébrés terrestres sauvages ont disparu à l’échelle de la planète. Il y en a ainsi de moins en moins, en nombre. Cette mortification du vivant sauvage concerne même des espèces communes qui n’étaient pas, jusqu’à présent, en danger, comme les chevreuils ou les renards. La seconde estimation est emblématique, elle, de l’homogénéisation du vivant. Dans son résumé à l’attention des décideurs, dévoilé en 2019, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a évalué à un million le nombre d’espèces menacées. La situation est telle que nous sommes face à une sixième extinction de masse. C’est la diversité du vivant, particulièrement à l’échelle des espèces, qui s’effondre. Et ce, à un rythme que l’histoire de la vie sur Terre n’a pas rencontré depuis 65 millions d’années, soit depuis l’extinction des dinosaures survenue lors de la crise Crétacé-Tertiaire. Enfin, j’évoquerais la problématique de la surdomestication liée à la suroccupation de la planète par les humains et leur bétail. En recoupant plusieurs publications scientifiques, on
“IL EST ESSENTIEL DÉCRYPTAGE DE NE PAS HOMOGÉNÉISER LA RESPONSABILITÉ HUMAINE."
CONTRE
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Quitterie de Villepin DÉCRYPTAGE
C h r o n ique
EXPLOR AT R IC E EN DÉMOC R AT IE
Ba st ie n D u b o i s
RECONNAÎTRE CHRONIQUE Quitterie de V
J «
e me suis trompé.e », « J’ai commis une faute. » Pourquoi ces mots sont-ils si rares dans la bouche des responsables ? Pourquoi cela n’arrive-t-il même jamais ? Nos instances collectives ont un gros problème de reconnaissance du réel. Notre système de responsabilité est fondé sur le déni. C’est la principale cause qui nous empêche de reconnaître les problèmes et de les prendre en charge. Assumer de s’être fourvoyé.e. Individuellement bien sûr, mais aussi collectivement. Le corollaire de la responsabilité et du pouvoir : rendre des comptes. Reconnaître qu’on a fait une erreur libère tout le monde. L’inverse empêche de réparer les dommages. Aujourd’hui, nos organisations, qu’elles soient religieuses, entrepreneuriales, politiques, associatives, font tout pour s’exonérer de leurs res-
« Le corollaire de la responsabilité et du pouvoir : rendre des comptes. » ponsabilités concernant les harcèlements, les violences sexuelles proférés en leur sein, alors qu’elles ont le devoir de protéger leurs membres. Combien de victimes ne peuvent se réparer en l’absence de reconnaissance de ce qu’elles ont subi ? L’omerta est la norme malgré leurs signalements. Cela a un coût immense en termes de santé publique. Les responsables des agressions ne sont pas pris en charge ni soignés, et le nombre de victimes croît de façon exponentielle, multiplié par l’impunité des agresseurs, rarement condamnés. Les masques manquants pour les soignantes et les soignants au début du confinement, voici une 14
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autre illustration. Nier le réel renforce la colère et la défiance. Lors de la pandémie, nos responsables politiques semblaient plus occupés à cacher la pénurie de masques qu’à dire le manque pour mobiliser les réseaux de production. Nous avons perdu de précieux jours, semaines ; cela s’est payé en vies. Comment ne pas parler aussi ici des violences policières, de ces histoires et images insoutenables ? Malgré les preuves visuelles, leur négation mine mortellement notre cohésion sociale. Si elles ne ramènent pas à la vie les morts de ces violences, les images des policiers américains genou à terre devant les manifestant.e.s sont puissantes. Nous avons tant besoin que les membres des institutions prennent publiquement position. Mettre genou à terre, c’est reconnaître que ces crimes existent et s’en désolidariser. Affirmer cela dans l’espace public peut modifier radicalement la culture de l’institution. Une affirmation aussi puissante qu’étaient indignes les paroles de responsables politiques jetant de l’huile sur le feu ou empêchant le débat public de se tenir. Partout, des dirigeants nient jusqu’au bout, font tout pour échapper à leurs responsabilités, « se couvrir » comme ils disent. En tant que parents, nous exhortons nos enfants à dire lorsqu’ils ont fait une faute, car nous savons que c’est la seule manière de les aider à réparer. L’engrenage du mensonge provoque des catastrophes en chaîne. Nous devrions accorder une valeur à la reconnaissance des fautes commises. Nous devrions remercier, dans chaque institution, celles et ceux qui signalent les fautes ou les abus ; nous devrions aussi valoriser celles et ceux qui disent qu’ils les ont commises et qui les signalent. Reconnaître, c’est permettre de réparer. n
DÉCRYPTAGE Fret maritime : quel trafic !
e n c hiffres Fan ny Co s t es J ust in e L e J o n c o u r
Quand on parle de transport, on évoque volontiers voitures, bus, trains ou avions. Mais de navires, il est rarement question. Pourtant le fret maritime est le premier moyen de transport de marchandises. Le bilan économique est donc radieux, le bilan écologique… plus sombre.
INFOG
TRANSPORT MARCHAND PAR EXCELLENCE
80 %
des échanges mondiaux de marchandises passent par le fret maritime.
10,7 MILLIARDS DE TONNES
C’est le volume du trafic mondial en 2017, dont : • Vracs principaux : 3,19 Md t (minerai de fer : 1,47 ; charbon : 1,2 ; céréales : 0,51) • Autres marchandises solides : 4,36 Md t • Produits pétroliers et gaziers : 3,14 Md t
EN 20 ANS, LE TRAFIC MONDIAL A DOUBLÉ.
Plus de 94 000 navires commerciaux (dont navires de croisière et transbordeurs pour passagers) sillonnent les mers, dont environ 50 000 dédiés aux marchandises. Part dans le tonnage total en Tpl (tonnes de port en lourd) :
2017
Pétroliers (pétrole brut et ses produits)
29,2 %
15,2 %
Autres
42,5 % 1997
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13,1 %
Porteconteneurs
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Vraquiers (minerai de fer, charbon, céréales et marchandises analogues)
Col in e de Sil an s
E n q u e^ t e
DÉCRYPTAGE
L e Cil Ver t
LA COMPENSATION CARBONE, ENQ
SOLUTION OU ILLUSION ? Face à la pression des consommateurs et à l’urgence climatique, la course à la neutralité carbone est lancée : Air France, BNP, Total, easyJet… c’est à qui se déclarera neutre le premier ! Solution la plus répandue : compenser ses émissions en finançant des projets de réduction ou de séquestration ailleurs. Mais ce processus, complexe, est-il si vertueux qu’il paraît ?
E
n novembre 2019, easyJet a frappé un grand coup en déclarant qu’elle serait neutre en carbone d’ici un an et compenserait l’ensemble de ses émissions. Concrètement, comment une entreprise, qui émet environ 7 millions de tonnes de CO 2 par an, peut-elle y parvenir ? Pour Jean-Marc Jancovici et son cabinet de conseil Carbone 4, c’est là le principal problème de la compensation carbone volontaire : elle repose sur une conception erronée de la « neutralité ».
COMPENSATION VS RÉDUCTION La compensation carbone est née dans le cadre du Protocole de Kyoto, ratifié en 1997. Celui-ci avait pour objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre des trente-sept pays signataires d’au moins 5 % entre 2008 et 2012, comparativement au niveau de 1990. Chaque pays se vit alors attribuer un objectif chiffré (- 8 % pour l’Union européenne), dont l’atteinte fut facilitée grâce à 18
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des mécanismes de flexibilité : permis d’émission, compensation des surplus d’émission en finançant des projets de réduction ou de séquestration carbone dans d’autres pays signataires (« mise en œuvre conjointe », MOC) ou dans des pays en développement (« mécanisme de développement propre », MDP), grâce à des projets de préservation de forêts primaires, de reforestation, ou encore de transition énergétique. Dans les années 1990, ce processus s’est étendu aux entreprises, prenant alors le nom de « compensation volontaire » via l’achat de « crédits carbone », un crédit étant égal à une tonne de CO2. Premier coup de canif dans le contrat, les entreprises peuvent compenser la totalité de leurs émissions, et non juste le surplus, même si l’Ademe précise bien que la compensation doit intervenir en dernier recours, après des efforts significatifs de réduction 1. Avec le rapport spécial du GIEC, « Réchauffement climatique de 1,5 °C », publié en 2018 2, les impératifs de réduction sont devenus très concrets.
La guêpe
LA na t, ur e mise A nu
DÉCRYPTAGE
U N E PA RFAI T E A L LI ÉE ?
Fran ço i s L a ss e r re C a rol in e G a m o n
LA NA MISE
Voilà typiquement l'insecte de l’été ! Surtout lorsque ses colonies sont populeuses et qu’elles s’invitent à nos repas. Pourtant quand on les regarde de façon apaisée, les guêpes sont presque parfaites !
RAYÉES JAUNE ET NOIR ? Oui et non. Oui pour celles qui vivent en société et s’approchent parfois de nous. Non pour la majorité des guêpes sauvages et solitaires. À noter que beaucoup d’insectes sont pourvus de rayures jaune et noir, qui leur permettent d’inquiéter des prédateurs – dont nous –, et dépourvus de dard (mouches, papillons, coléoptères, etc.)
PIQUANTES ? Non. Certes, les femelles ont un dard et certains humains sont allergiques. Mais les piqûres sont immensément rares eu égard au nombre de guêpes qui nous entourent. Seulement notre cerveau nous trompe : il a enregistré qu’une petite bête rayée jaune et noir pouvait piquer et nous pousse à nous en méfier alors qu’elle ne nous fera rien dans 99 % des cas – de la même façon qu’un humain peut mordre, mais ne le fera
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que dans des circonstances très rares, et précises. Pour les guêpes, c’est la légitime défense : protection du nid ou coincée sous un pied. Ainsi à partir d’une piqûre anecdotique, nous nous méfions de toutes les guêpes alors qu’elles sont quasiment toutes inoffensives et « utiles ». Dès lors, pourquoi accepter la destruction d’un nid, sans raison rationnelle s’il se trouve à plus de 5 mètres de nous ?
DOSSIER
Maëlys Vési r, avec Aude Raux
DOSSIER-PORTFOLIO
OCÉANS
ALERTE BLEUE, SOLUTIONS VERTES
Premiers producteurs d’oxygène, les océans recouvrent 71 % de la surface du globe. Puits de carbone, ils captent également près d’un quart des émissions de gaz à effet de serre de la planète et limitent ainsi le réchauffement climatique. Pourtant, l’alerte bleue est générale. Étouffés par la pollution, la surpêche, l’extraction d’hydrocarbures, nos océans se réchauffent, s’acidifient, entraînant le déclin d’une biodiversité aquatique exceptionnelle. Repenser notre rapport aux océans est donc vital, car sauver les océans, c’est nous sauver nous-mêmes.
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DOSS
DOSSIER-PORTFOLIO
© Gabriel Barathieu / Biosphoto
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DOSSIER-PORTFOLIO
MICROPLASTIQUES
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L’IMPOSSIBLE NETTOYAGE ? Partie immergée de l’iceberg, les microplastiques représentent 94 % de la pollution plastique des océans. Difficile à quantifier et à éradiquer, cette pollution insidieuse fait l’objet d’études attentives de scientifiques et ONG, qui tirent la sonnette d’alarme pour couper le robinet à la source.
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ne tortue piégée par un sac plastique, des bouchons retrouvés dans l’estomac d’un oiseau, un hippocampe transportant un coton-tige… Des images-chocs n’ont cessé d’alerter l’opinion publique sur le fléau des déchets aquatiques tuant chaque année un million d’oiseaux et cent mille mammifères marins. « Le plastique est devenu l’ennemi public numéro un de la mer, mais les débris retrouvés sur les plages ou à la surface de l’eau ne représentent que la partie visible du problème », rappelle Henri Bourgeois-Costa, porte-
parole de la fondation Tara Océan et expert en économie circulaire. Mesurant moins de 5 millimètres, les microplastiques représentent plus de 90 % de la pollution plastique. Conséquence de la fragmentation de macrodéchets, ils proviennent également de l’abrasion des pneus, du lavage de vêtements en fibres synthétiques 1 et de cosmétiques contenant des microbilles non filtrées par les stations d’épuration. « De la surface aux abysses, on estime à 5 000 milliards le nombre de particules de plastique présentes dans les océans », rappelle Patrick Deixonne, chef de mission de l’expédition 7e Continent. « Ils composent majoritairement les “continents de plastique” 2, loin de l’image que l’on peut se faire d’immenses plaques de macrodéchets qui flotteraient à la surface. »
© Sergi Garcia Fernandez / Biosphoto
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OCÉANS : ALERTE BLEUE, SOLUTIONS VERTES
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QUELLES CONSÉQUENCES SUR LA CHAÎNE ALIMENTAIRE ? Si elle ne tue pas directement, cette pollution agit comme une bombe à retardement sur la vie marine. « Une fois ingérée, cette pollution modifie la physiologie des animaux et leur fécondité, souligne Henri Bourgeois-Costa. Elle s’insère dans la chaîne alimentaire et remonte jusque nos assiettes. » Des effets sur notre santé encore peu connus, mais non sans risques. « Certains types de plastique contiennent des additifs chimiques comme les phtalates, susceptibles d’avoir un impact sur la fertilité, la grossesse et d’engendrer des maladies », souligne Sylvie Platel, coordinatrice réseau Santé & environnement de la Fédération nationale de l’environnement.
DOSSIER
OCÉANS : ALERTE BLEUE, SOLUTIONS VERTES
DOSSIER-PORTFOLIO
UNE FEMME
AU CHEVET DU CORAIL
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Chercheuse spécialiste des récifs coralliens en Polynésie française, Laetitia Hédouin porte l’espoir de préserver le corail de la « mort blanche » face au dérèglement climatique.
es yeux sont bleu lagon, mais son regard est sombre comme les abysses. Scientifique au Centre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement (Criobe/ CNRS), en Polynésie française, Laetitia Hédouin, spécialiste du corail, s’est engagée à préserver ce « bien commun de l’humanité » menacé par le dérèglement climatique. Son laboratoire est ancré sur l’île de Moorea, dans l’envoûtante baie d’Opohunu. Comme chaque semaine, après avoir enfilé sa combinaison de plongée, Laetitia Hédouin monte à bord d’un Zodiac piloté par son collègue Yann Lacube. L’embarcation traverse un étroit chenal, puis la baie, et met le cap sur une forêt corallienne, que « Nous ne pourrons Laetitia a plantée en 2017 avec équipe, au large des côtes. pas vivre sans son Une bascule arrière, et les voilà le vivant. » au milieu d’un paysage surréaliste : quarante arbres à coraux déploient leurs branches dans l’océan Pacifique. Au total, les chercheurs ont fixé 3 200 boutures coralliennes sur des structures immergées dans la zone des dix mètres de fond. Dans leur pépinière aquatique, ils cultivent des coraux qui ont résisté aux épisodes de blanchissement pour analyser leur capacité de résilience et, in fine, envisager de restaurer des récifs coralliens avec ces « super coraux ».
« SENTINELLE DES OCÉANS » Laetitia Hédouin transmet cet espoir aux habitants de l’île au cours d’une conférence. Après un pédagogique exposé sur cet animal, déferlent d’impressionnants chiffres, dont celui-ci : le corail participe à 25 % de la biodiversité marine, alors 30
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que ses récifs ne représentent que 0,1 % de la surface océanique. Mais sous l’effet du réchauffement climatique, la mort blanche rôde. Comme au printemps 2019, lorsqu’elle a recouvert le sombre océan de son linceul immaculé. Laetitia Hédouin interpelle le public : « Qu’est-ce qu’on fait pour protéger cet édifice ? » Silence. La chercheuse rappelle les funestes prévisions du GIEC : si l’on ne fait rien, les températures vont augmenter de plus de 4,5 degrés d’ici à 2100. Et 70 % à 90 % des récifs coralliens pourraient disparaître. « Le corail, c’est la sentinelle des océans, s’exclame-telle. L’icône de l’état du vivant sur terre. Or nous ne pourrons pas vivre sans le vivant. Il faut arrêter de croire que l’on va réparer les dommages sans s’attaquer aux sources du problème. La science et la technique ne pourront pas nous sauver. La solution est connue : il s’agit de maintenir nos émissions de gaz à effet de serre en dessous de la barre des 2 degrés, d’ici à 2100. Nous sommes à ce point d’intersection où l’on peut encore agir. Pour permettre à nos enfants de vivre sur une planète hospitalière dans un avenir proche, il faut changer de cap. Comment ? En modifiant nos modes de vie, de façon radicale, dès à présent. » Cette femme de 40 ans a elle-même un fils, né de son union avec un chercheur spécialiste, lui, de l’acidification des océans. Elle confie : « Ma prise de conscience écologique date de la naissance de Théo, en 2014. De façon concomitante, je constatais des dégâts environnementaux de plus en plus alarmants et je lisais davantage de publications scientifiques annonçant la catastrophe environnementale autour de 2050. Je me suis alors projetée, de façon très concrète, dans le monde que nous allions laisser à notre fils. J’ai pensé au jugement qu’il allait porter sur moi : “Pourquoi tu n’as rien fait ?” » Cette
DOSSIER
OCÉANS : ALERTE BLEUE, SOLUTIONS VERTES
LA SURPÊCHE, DOSSIER-PORTFOLIO
PLONGÉE EN EAUX TROUBLES Fléau des océans, la surpêche désigne le fait de surexploiter les réserves de poisson disponibles. Conséquence : l’effondrement d’espèces marines qui n’ont plus le temps de se reproduire.
DES STOCKS SUREXPLOITÉS…
DOSS
DANS LE MONDE
171 MILLIONS
33,1 %
des stocks mondiaux de poisson sauvage sont aujourd’hui surexploités.
PRINCIPALES ZONES DE SURPÊCHE : Atlantique Nord-Est, mer Méditerranée, mer Noire et Pacifique Sud-Est.
DE TONNES de produits aquatiques sont récoltées par an en pêche sauvage ou en aquaculture 1
20 %
DES PRISES MONDIALES DE POISSON PROVIENDRAIENT DE LA PÊCHE ILLÉGALE.
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des poissons pêchés n’arrivent pas dans nos assiettes et sont rejetés en mer.
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DOSS © Pascal Greboval
DOSSIER
OCÉAN : ALERTE BLEUE, SOLUTIONS VERTES
SAUVER LES OCÉANS :
COMMENT AGIR À NOTRE ÉCHELLE ?
Sauver les océans passe aussi par nos choix de consommation. S’ils sont multipliés, ils peuvent catalyser le changement. Tour d’horizon des réflexes à adopter pour inverser la tendance.
DANS L’ASSIETTE Limiter la consommation de poisson reste l’une des meilleures manières de ne pas participer à la surpêche. Dans l’idéal, pas plus de deux à trois fois par mois. Bien choisir son poisson est complexe d’autant que les labels ne reflètent pas toujours la réalité 1, mais il est important d’être vigilant sur : • la manière dont le poisson a été pêché. Depuis le 13 décembre 2014, les étiquettes des produits 40
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marins doivent préciser l’engin de pêche utilisé. Il est préférable de choisir un poisson pêché en casier, à la petite senne, à la ligne ou à la canne, et éviter ceux remontés avec des chaluts de fond, des dragues, des dispositifs de concentration de poissons (DCP) ; • les zones de pêche, qui doivent être indiquées sur les étals des poissonneries ; • la diversification de sa consommation, en délaissant le saumon et le cabillaud, les crevettes et le
P O R T FOL IO
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jean-marie ghislain Leina Sato
photographe
apneiste
RENCONTRE La réduction extrême de l’espace sauvage rend la rencontre avec un être non humain dans son milieu naturel de plus en plus exceptionnelle. Lorsqu’un animal choisit de nous faire ce cadeau, c’est une expérience dont l’intensité est difficilement explicable tant elle est source de joie. Les prérequis sont simples, mais souvent difficiles à réunir, à commencer par la création de l’espacetemps propice à la rencontre tant sur le plan physique qu’émotionnel. Laisser notre ego de côté pour être pleinement présent en conscience, sans attentes. Si j’aime parler d’apprivoisement, il ne s’agit à aucun moment d’apprivoiser l’animal qui vient
à nous, mais bien d’accueillir sa présence. D’accepter ce qu’il nous offre en toute humilité et de faire preuve de gratitude pour sa présence et son enseignement. J’ai eu la chance de vivre des moments exceptionnels de résonance avec certains d’entre eux, ils sont venus répondre à des doutes, des questionnements profonds sur le sens de ma démarche et c’est grâce à eux que j’ai continué à nourrir et documenter ce lien intime au vivant sous toutes ses formes. Ces images en sont le fruit, elles révèlent le caractère précieux et précaire de ce lien au vivant. Jean-Marie
« O KE ALOHA KE KULEANA O KAHI MALIHINI »
« L’Amour est l’hôte dans les contrées étranges », proverbe hawaïen C’est à Hawaï que j’ai vécu mes premières rencontres interespèces. J’y tombai en amour de l’Océan et de ses « peuples premiers ». Des baleines chantant d’autres mondes et des dauphins aux yeux rieurs ont accompagné mon adolescence pour me prodiguer une éducation à la Joie. Rappelons l’étymologie du mot, qui provient du sanskrit Yuj signifiant « Reliance ». Car c’est bien ce à quoi nous invite la communication interespèces : retrouver notre capacité à nous mettre en lien, à aimer. Au-delà d’une guérison personnelle, ma rencontre avec les animaux marins a fait émerger une conscience écologique profonde. Le souvenir de ce lien à plus vaste que moi vient interroger et bousculer mon identité. Une invitation à élargir
la perception de soi pour embrasser l’Autre – qu’il soit humain ou non humain. Dauphin, baleine, requin… Cet « Autre », pour qui sait pleinement accueillir sa présence, devient un ambassadeur pour la Biosphère. Le sage et écoactiviste Satish Kumar l’exprime très bien : énoncer que l’on veut « sauver le monde » traduit une forme d’arrogance. Et surtout, quelle tâche titanesque ! « Je serais incapable de sauver la planète. Par contre… je peux l’aimer. » Car l’acte d’aimer est à la portée de tous. À mes yeux, cela est l’essence même de ces rencontres : une promesse de réconciliation avec moimême et avec l’Autre, le corps vivant de la Terre, Gaïa. Leina POUR ALLER PLUS LOIN • www.ghislainjm.com • Leina Sato, Jean-Marie Ghislain, L’Enfant de l’océan, Les Arènes, 2015
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PORT
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Attitude de soumission - Même après des années de fréquentation, je ressens toujours une grande humilité en présence des dauphins. Le sentiment de gratitude et de révérence ne fait que s’accroître avec le temps.
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Em m an u el l e Painv in
GoU^t de l'enfance
Marc D evau x
SOLUTIONS
PORTER
GOÛT DE SON BÉBÉ
UN CHOIX TOUT-TERRAIN Sobre et pratique, le portage physiologique présente bien des avantages, tant pour l’enfant que pour ses parents. Développement du bébé, attachement, liberté de mouvement… voici un panorama des multiples atouts de ce choix tout-terrain !
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i je pouvais remonter le temps, je porterais les deux aînés, comme j’ai porté mon dernier enfant. C’est tellement plus pratique, plus facile que la poussette ! », clame avec enthousiasme Anna. Maman de trois enfants, avec dix ans d’écart entre le deuxième et la troisième, elle ne tarit pas d’éloges sur le portage, « surtout en ville, où la poussette devient vite encombrante dans les escaliers, les transports, etc. » Même ton élogieux chez Gaëlle : « Le portage m’a rassurée, en tant que maman. C’est très sécurisant d’avoir son enfant collé contre soi, on ne fait qu’un. » En effet, le portage a un intérêt tant physiologique que psychologique pour l’enfant, qu’il soit né à terme ou prématuré. Ce que confirme Clémentine Luzu, ergothérapeute et monitrice de portage à Carhaix : « Le portage physiologique favorise le développement céphalocaudal. Il aide au bon développement de la position des hanches, une étape importante vers la marche. Il évite aussi de porter la tête du bébé, ce qui est plus confortable pour lui et lui permet de poser les mains près de son visage pour répondre à ses besoins de succion. »
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CONNEXION ET AUTONOMIE Le bébé porté retrouve une partie des sensations vécues au cours de la grossesse et découvre ainsi le monde extérieur en douceur. Lové contre son parent, il entend son cœur et sent son odeur, ce qui l’apaise. Il bénéficie de la chaleur du porteur, limitant ainsi ses efforts pour réguler sa propre température. Il retrouve aussi le mouvement qui l’a bercé pendant neuf mois. Tout cela contribue à le rassurer et lui apporter un sentiment de sécurité et de confiance. Le portage régulier apaise non seulement les peurs, mais aussi les coliques et les reflux des nourrissons et diminue, in fine, leurs pleurs 1 et cris ! « Et un enfant qui ne pleure pas, c’est un parent rassuré », renchérit Clémentine Luzu. Porter son enfant crée une relation privilégiée avec lui grâce à l’expérience du corps-à-corps. Et si le portage simplifie l’allaitement maternel, il est aussi un précieux levier d’attachement paternel. Olivier a porté sa fille dès la naissance. Il avait assisté à un atelier avec sa femme quelques semaines avant. Il se souvient avec émotion : « Dès que mon épouse est sortie de la maternité, je suis allé me promener avec ma fille en écharpe, je
FABIEN SOLUTIONS CAMBI
E n q u e^ t e de sens
Au de R au x
LE TEMPS
DE VIVRE EN QUÊTE
Fabien Cambi, 32 ans, a fait le choix d’un mode de vie décroissant. Cet ancien ingénieur informatique, désormais installé à Roquebrune-Cap-Martin (Alpes-Maritimes), vit dans une sobriété heureuse avec un budget de 450 euros par mois. Un modèle inspirant alors que la crise économique et financière se profile.
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as à pas, Fabien Cambi se dépouille pour ne garder que l’essentiel. Après avoir exercé, pendant six ans, la profession d’ingénieur informatique, ce Monégasque de 32 ans a décidé de quitter le salariat et de dépenser le moins d’argent possible pour prendre le temps de vivre. D’une voix douce et posée, il confie : « Suite à une rupture amoureuse, en 2014, j’ai tout remis en question. J’ai réalisé que je ne m’étais jamais vraiment senti à ma place. J’étais un privilégié qui n’avait pas eu besoin de faire des efforts pour obtenir un confort matériel. Conscient des inégalités de richesse, j’étais animé par une profonde quête de justice sociale, mais je ne savais pas comment contribuer à améliorer la société. »
TROUVER UNE PLACE DANS CE MONDE Fabien Cambi vivait alors à des milliers de kilomètres : au Canada, à Montréal, où il travaillait pour un groupe américain. Dans un premier temps, il est parti en vacances. Sac sur le dos, il a découvert le Pérou. Et s’est découvert. « Ce voyage m’a ouvert l’esprit, raconte-t-il. J’y ai trouvé des valeurs différentes. La principale étant que l’on peut être heureux dans une simplicité de vie. » De retour au Québec, il s’est inscrit à un stage de permaculture, sous la houlette de Bernard Alonso, cofondateur de l’Université collaborative internationale de la transition [devenue Permaculture humaine internationale, N.D.L.R.] Il se souvient : « Son approche globale m’a beaucoup inspiré. En nous accueillant, il a indiqué que son objectif était 56
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de nous permettre de tenter, tous ensemble, de trouver une place dans ce monde. » Des mots qui faisaient écho à son propre vécu. Pendant deux semaines, Fabien Cambi a fait l’apprentissage d’un panel d’outils qui allaient se révéler précieux pour sa transition. Parmi lesquels, l’agriculture respectueuse de l’environnement, la gouvernance partagée, l’écoconstruction et les monnaies locales. « Comme nous l’a conseillé l’animateur du stage, j’ai écouté ma voix intérieure et j’ai eu l’envie d’expérimenter, concrètement, toutes ces techniques qui résonnaient si fort en moi. »
CHEMINER VERS L’AUTONOMIE C’est ainsi que le jeune homme a choisi de se reconnecter à l’enfant qu’il avait été en s’envolant pour un nouveau voyage. Cette fois auprès de son grand-père, retraité dans sa maison de campagne qui donne sur un potager ensoleillé de 300 mètres carrés à Roquebrune-Cap-Martin (AlpesMaritimes). « Malgré son grand âge, 92 ans, remarque Fabien Cambi, c’est lui qui, dans ma famille, s’est montré le plus compréhensif par rapport au virage que j’ai pris pour cheminer vers l’autonomie. » Un virage à 180 degrés mûrement planifié : « N’ayant jamais été un consommateur acharné, j’ai toujours réussi à épargner la moitié de mon salaire. Lorsque j’ai démissionné, j’avais ainsi près de 120 000 euros de côté. J’avais de quoi prendre le temps de vivre. Restait à approfondir mes connaissances agricoles, ce que j’ai fait en travaillant bénévolement dans une ferme bio, pendant six mois. » De son séjour au Québec,
NATURISME
MOTS, CROISE S
SOLUTIONS
S a b a h Rah m a n i
Avec 4,7 millions d’adeptes et plus de cinq cents espaces autorisés, la France est la première destination naturiste au monde. Eh non ! le naturisme ne se limite pas à l’été et aux plages. Au-delà des idées reçues, cet « art de vivre » est souvent méconnu. Rencontre avec deux spécialistes pour une mise à nu de cette pratique aux accents philosophiques.
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L’avis de Viviane Tiar,
MOTS C
présidente de la Fédération française de naturisme
© DR
e naturisme n’est pas une pratique, c’est un art de vivre et une philosophie. Il consiste à être en harmonie avec soi et avec les autres. C’est une forme de liberté. Il n’y a pour nous aucune honte à être nus. Nous sommes nés nus et, quel que soit notre corps, il est beau et respectable. Qu’il soit accidenté par la vie ou la maladie, que l’on soit grand, petit, gros, mince… nous sommes tous égaux, en toute transBIO EXPRESS parence. De même, lorsqu’un avocat, un ouvrier ou une infirmière sont nus, leurs catégories socio« Naturiste professionnelles s’effacent. Le naturisme contridepuis bue alors à faire tomber les barrières sociales. toujours » Dans les familles naturistes, on fait en fonction 2018 du ressenti de chacun. On ne Présidente de la FFN (Fédération force jamais la main aux enfrançaise de fants, surtout aux adolesnaturisme) cents pudiques. Certains le 2020 vivent très bien, d’autres ont Première participation à besoin de remettre un mailTourissima, salon lot ou un paréo. Il n’y a aucun du tourisme et des activités nature, souci, car le respect de l’autre à Lille est essentiel. Le naturisme offre aussi une palette de sensations plus large. Lorsqu’on se promène nu en forêt ou en bord de mer, par exemple, nos sens sont au plus près de la nature. Il y a une forme de communion, d’osmose avec notre environPOUR ALLER PLUS LOIN… nement : le corps fait corps avec la nature. Le naturisme est aussi lié pour nous à l’éco• www.ffn-naturisme.com logie et au respect de notre planète et des ressources naturelles. Contrairement aux idées reçues, le naturisme ne se limite pas aux plages et aux régions ensoleillées. Il est présent partout sur le territoire, aussi bien
dans le Midi qu’en Bretagne, dans le Nord, en Alsace, etc. Le climat n’est pas un frein. Il peut se vivre sur les plages, en forêt, au bord des lacs, mais aussi dans des centres de vacances, notamment des campings, et de plus en plus dans des espaces urbains, prêts à ouvrir leurs portes aux naturistes avec le soutien de la Fédération française de naturisme. Nous avons, par exemple, des créneaux ouverts pour une soirée bowling ou dansante, une visite de musée, un spectacle de théâtre, un dîner au restaurant, une séance de yoga ou de piscine, etc. Grâce à ces expressions urbaines, nous pouvons vivre le naturisme tout au long de l’année. La FFN travaille également sur l’image et la visibilité de notre art de vivre auprès du grand public, car il est important de le valoriser dans toutes les régions, en invitant chacun à tenter l’expérience. C’est un échange. Nous ne sommes pas fermés. Le naturisme n’est pas une atteinte à la pudeur ni de l’exhibition sexuelle, punie par la loi selon l’article 222-32 du Code pénal. Nous respectons cette loi, même si nous souhaitons qu’elle soit revue et clarifiée. En effet, certains fonctionnaires assimilent encore naturisme et exhibition, alors que celui-ci n’exprime que la liberté de notre nudité, sans vouloir choquer. Nous ne sommes pas du tout dans la provocation. Nous aimerions lever tous les jugements négatifs pour défendre nos valeurs et faire valoir nos droits, car le droit international et européen protège la liberté d’être nu. Nous sommes très nombreux en France. Nous souhaitons seulement être reconnus. n
« Le naturisme offre une palette de sensations plus large : le corps fait corps avec la nature. »
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TRANSITION
BD REPO
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D.I.Y. Auré l ie A i m é J é rô m in e D e r i g ny, c o l l e ct if A rg o s
AUTONOMIE
LA SECONDE VIE DES
JOUJOUX
D.I
Je joue, tu joues, il joue… Puis on finit par se lasser. Que faire alors des joujoux délaissés ? Si en matière de collecte et recyclage, le secteur du jouet a longtemps été à la traîne, depuis peu, les lignes semblent bouger. Petit inventaire des solutions pour jouer durable…
H
uit mois. C’est, d'après la plateforme d'achat-vente de jouets d'occasion ToysLegend, la durée moyenne d’utilisation d’un jouet . Passé ce temps, 10 % des jouets seraient réparés ou recyclés, et 5 % finiraient à la poubelle, selon une étude de l’Institut des mamans. La filière jouet a longtemps été à la traîne en matière de développement durable : chaque année, en effet, pas moins de 120 000 tonnes de jouets sont jetées, et 150 000 tonnes de jeux neufs mises sur le marché 1. Mais les lignes bougent. Début 2020, une loi anti-gaspillage pour une économie circulaire a été adoptée, prévoyant entre autres des mesures relatives au plastique jetable, à l’obsolescence programmée, et à une autre gestion des déchets. Il y est précisé que les acteurs de la filière jouet « seront ainsi incités à mieux concevoir leurs produits et à mettre en place des filières de réemploi et de recyclage ». La loi a donné un an de sursis au secteur pour organiser une collecte, afin de réparer ou de recycler, mais aussi pour développer des lignes de produits responsables. Les jouets collectés pourront donc être remis en circuit, ou recyclés si cela n’est pas possible. Un processus qui reste cependant très compliqué aujourd’hui, les objets étant souvent constitués de plusieurs matériaux ou d’amas de plastiques différents. 70
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Quelles sont alors les alternatives à la poubelle ? Si les jouets sont en bon état, pensez à les donner à une association, ou à les vendre lors de videgreniers ou sur Internet. Initiative anti-gaspi et solidaire à suivre : l’association Rejoué collecte, nettoie, réassemble et rénove les jeux et jouets ayant déjà servi, avant de les vendre. En parallèle, elle accompagne des personnes en situation de précarité vers un emploi durable, et propose des animations pour sensibiliser le grand public au réemploi. Plus de 160 000 jouets ont déjà été vendus par son biais depuis 2012 [lire Kaizen 47, novembre-décembre 2019, « Préparer un Noël écologique »]. Ça et là, d’autres initiatives fleurissent : la marque Hasbro, en partenariat avec TerraCycle, propose ainsi de donner une seconde vie aux jouets usés ou cassés. Les produits de la marque sont récupérés à des points de collecte ou peuvent leur être envoyés gratuitement par la poste : une étiquette est à imprimer depuis leur site. Les jouets recyclés seront transformés en boîtes de rangement, poubelles, bancs publics ou autres 2. Enfin, côté D.I.Y., les âmes créatives peuvent offrir une seconde vie aux jouets, et les transformer en objets de décoration ou utilitaires : une bonne façon de garder ceux auxquels on est particulièrement attaché ! n 1. Source : Ademe. 2. https://csr.hasbro.com/fr-fr/toy-recycling
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I.Y
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je vais bien, le monde va mieux
AUTONOMIE
Am él ie Toref An n e- Soph ie Mau f f ré
JE VAISNUS BIEN LE M PIEDS POUR RENOUER AVEC LA TERRE
À
Il est parfois difficile d’oser se mettre pieds nus pour marcher ou pour courir ! Pourtant, les bénéfices sont nombreux et la pratique, si elle est progressive, comporte peu de risques.
la faveur d’un pique-nique, d’une balade sur la plage, nous avons tous expérimenté le plaisir de mettre ses pieds au contact direct du sol. Un peu inconsciemment parfois, nous avons tous senti à quel point c’était plaisant. Ce dont nous n’avions pas conscience, c’est que nous avons alors pratiqué sans le savoir le earthing 1, ou « connexion à la terre ». « Nos chaussures nous isolent, au sens électrique du terme, et contribuent ainsi à diminuer notre vitalité. Les peuples vivant nus, ou presque, ont toujours eu une vitalité beaucoup plus grande », explique André Van Lysebeth, l’un des pionniers du yoga en Occident 2. Et la liste des bénéfices est longue. D’après le kinésithérapeute Gil Amsallem, « sur le plan énergétique, il a été prouvé que marcher pieds nus était un excellent anti-inflammatoire. À condition d’y passer une bonne heure et un peu plus, cela régénère les tissus, fluidifie le sang, redonne de la qualité à la dynamique sanguine, diminue la fatigue. D’un point de vue biomécanique, on 74
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renforce ses muscles, sa stabilité, et on s’assouplit aussi parce qu’on déroule différemment le pied quand on est pieds nus ou quand on a une semelle. » Qui plus est, en posant ses pieds directement sur le sol, on stimule les zones réflexes du pied et on s’offre, comme l’indique le titre du livre de Gil Amsallem, une séance de « réflexologie naturelle ».
OSER L’EXPÉRIENCE Pourtant peu de gens osent se lancer en dehors de chez eux. Les craintes sont nombreuses : regard des autres, froid, blessures, hygiène. Des craintes assez vite balayées une fois le premier cap franchi. « Moi, je n’aime pas avoir froid aux pieds, surtout le soir quand je me couche, rigole Xavier, qui marche pieds nus depuis plus de dix ans. Mais quand tu marches pieds nus, c’est un froid vraiment différent. Tu t’habitues, ça paraît naturel. » Par ailleurs, on se blesse finalement peu parce qu’on est plus attentif au terrain, et que la peau sous le pied se renforce au fur et à mesure de la pratique.
Gabrielle Paoli
vivre en oasis
AUTONOMIE
TERR’AZÏL
« GRANDIR ENSEMBLE NATURELLEMENT » COL Situé sur un plateau ariégeois, entre la grotte du Mas-d’Azil et le lac de Filheit, Terr’Azïl a pris vie en janvier 2020 avec le concours de la Coopérative Oasis. Cette ferme, comptant 74 hectares de prairies et de forêt et sept bâtiments à rénover, abrite onze habitants âgés de 18 mois à 45 ans. Leur devise : « grandir ensemble naturellement ».
T
err’Azïl se définit comme un environnement « permaculturel au sens large », explique Noémie, cofondatrice. « Nous entendons avant toute chose trouver notre place dans le vivant. Par “nous”, j’entends adultes… et enfants. Je le précise, car les enfants sont souvent les grands oubliés de la permaculture ! Alors que chaque être, quel que soit son âge, doit pouvoir être en condition de s’épanouir, dans le respect de ses rythmes et ses spécificités. » Colibris fait sa part dans l’histoire de En effet, à Terr’Azïl, comme Kaizen ; présent dès l’origine du magadans les écoles dites démocrazine, il l’inspire et l’accompagne au tiques, les enfants ont la liberté de choisir ce qu’ils font de leur quotidien. temps et de leurs journées. Les Envie d’agir ? adultes n’ont envers eux aucune Rejoignez le mouvement : intention pédagogique, mais www.colibris-lemouvement.org sont disponibles pour répondre Une oasis est un lieu de vie ou de à leurs questions et les accomressources qui incarne des valeurs pagner dans leurs activités. Il d’écologie et de partage. ne s’agit pas d’école à la maison, Envie de créer, rejoindre une oasis ? mais plutôt d’apprentissages www.colibris-lemouvement.org/ autonomes et informels. projets/projet-oasis Lesquels partent souvent de Envie d’investir et de soutenir l’observation de la nature, des le travail d’accompagnement interactions et du jeu. Leur de la Coopérative Oasis ? www.cooperative-oasis.org/participer/ moteur ? La soif des enfants de comprendre le monde et 80
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d’expérimenter. « Ici, les plus jeunes sont les bienvenus dans les activités quotidiennes du lieu, et sont inclus dans les prises de décisions les concernant. Nous leur faisons confiance pour savoir ce qui est bon pour eux. Et l’on déconstruit par la même occasion les postures de sachant et d’apprenant. Nous grandissons tous ensemble », explique Jade, habitante du lieu, mère de trois enfants et animatrice nature.
DU RÊVE À LA RÉALISATION Terr’Azïl est né de la rencontre de deux familles. L’une cherchait un lieu pour un accouchement à la maison, l’autre avait un petit cocon à partager. Partageant les mêmes valeurs – minimalisme, liberté, lien à la nature… –, les deux foyers passent du temps ensemble et réalisent que leurs compétences sont complémentaires. « En un an, on a monté ce projet de dingue ! C’est allé très vite, se souvient Blaise, cofondateur et accompagnateur en gouvernance partagée. On a commencé par formuler nos envies, mettre en place une gouvernance… et ce terrain nous est tombé dessus. C’était a priori beaucoup trop tôt pour nous, mais nous avons franchi les étapes petit à petit… » En janvier 2020, le collectif signe l’acte d’achat du lieu pour un total de 530 000 euros. « Nous avions un peu de fonds propres, un prêt de la banque, des prêts de nos proches et de personnes qui nous
BD - au potager !
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B Mathild
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cui sin e , E N M, O D E ZE R O D E CHET ! Linda Louis
LA TOMATE AUTONOMIE
CUISINE
DU SOLEIL DANS L’ASSIETTE ! Il fait chaud, il fait beau et naturellement ce légume-fruit du soleil enchante nos assiettes avec ses couleurs rutilantes ! Alors place à des recettes savoureuses de conserves de tomates dont il ne restera rien, pas même le jus ou la peau !
1. AVEC DES TOMATES FRAÎCHEMENT CUEILLIES KETCHUP LACTOFERMENTÉ ET COULIS DE TOMATES JAUNES On les aime nature, avec une pointe de sel, de la mozzarella et de l’huile d’olive, du basilic, de l’origan, en tartes colorées ou en ingrédient phare de la ratatouille, mais en conserve, les tomates sont aussi un concentré de vitamines et d’antioxydants. Parmi eux, le fameux lycopène, un pigment appartenant à la famille des caroténoïdes, réputé pour ses vertus protectrices de la prostate, des intestins et du cœur. Et bonne nouvelle, c’est bien dans les conserves, telles que le ketchup, les tomates séchées ou le concentré, que le lycopène est le plus présent !
3. AVEC LE JUS DE CUISSON DES TOMATES Vous pouvez le boire, l’ajouter dans un smoothie, cuire avec des pâtes, des lentilles ou du riz par absorption.
TOMATES SÉCHÉES… DANS L A VOITURE ! Avec les étés caniculaires que nous avons, l’habitacle de notre voiture atteint facilement les 45-50 °C. Profitons-en pour le transformer en séchoir géant ! Coupez les tomates en deux, disposez-les sur des grilles et placez-les sur de grands plateaux pour recueillir leur jus. À la fin de la journée, selon la taille des tomates, elles auront séché. Sinon, poursuivez le séchage le lendemain.
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2. AVEC DES TOMATES BIEN MÛRES ET/OU LÉGÈREMENT ABÎMÉES CONCENTRÉ DE TOMATES Le concentré entre dans la composition de biscuits et tartes salés ou permet de corser une sauce tomate jugée trop fade. Pour réaliser un concentré maison, rien de plus simple ! Préparez un coulis [lire page 87], étalez-le sur une plaque recouverte de papier sulfurisé et faites chauffer/déshydrater au four à 150 °C. Selon le degré d’humidité du coulis, la durée varie, de 40 minutes à 1 h 30. Le concentré est prêt quand il forme une pâte épaisse et aromatique. Mettez en pots et congelez ou stérilisez. À savoir : 1 kg de tomates donne 100 g de concentré de tomates.
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4. AVEC LA PEAU DES TOMATES DE LA POUDRE DE TOMATE Selon les recettes et les goûts, il arrive que l’on retire les peaux des tomates. Plutôt que de les jeter, faites-les sécher au déshydrateur, au soleil ou dans la voiture [lire encadré] jusqu’à ce qu’elles soient bien croustillantes. Mixez-les finement et vous obtiendrez de la poudre. La poudre de tomate s’utilise comme du paprika, en guise de décoration sur des toasts, un guacamole… n
LE PETIT ÉPEAUTRE
cui sin e
AUTONOMIE
, CET INGRE DIENT BIO, J'EN FAIS QUOI ? Li n d a L o u i s
CUISINE
UNE CÉRÉALE BIO COMME TOUT ! Ancêtre du blé, le petit épeautre a fait partie du patrimoine alimentaire méditerranéen il y a des millénaires. Sa texture à la fois ferme et fondante, son goût de noisette et sa richesse nutritive font de lui une céréale unique, que l’on devrait inviter plus souvent dans nos assiettes !
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SÉLECTION KULTURELLE LI VRES RÉUSSIR SON POTAGER DU PARESSEUX
EXPO
LA PERMACULTURE MOIS PAR MOIS Catherine Delvaux, Ulmer
HORTILLONNAGES AMIENS 2020 FESTIVAL INTERNATIONAL DE JARDINS Du 14 juillet au 18 octobre
SÉLECTION KULTURELLE
UN ANTI-GUIDE POUR JARDINIERS LIBRES Didier Helmstetter, Tana Éditions Jardiner libre et curieux : telle est la philosophie de l’auteur, ingénieur agronome. L’expert en recherche-action partage ici sa grande expérience pour créer un potager biologique abondant, en coopérant avec le vivant. En fonction du climat, des sols, des champignons, des parasites, etc., il propose de nombreuses solutions qui permettent de jardiner tout en prenant soin de la biodiversité.
L’HOMME ET LA NATURE
COMMENT RENOUER CE LIEN SECRET Peter Wohlleben, Les Arènes Le dernier volet de la série du célèbre forestier, auteur du best-seller La Vie secrète des arbres, nous invite à (r) éveiller nos sens pour mieux ressentir notre lien direct avec la nature. Entre science, philosophie et cas pratiques, l’ouvrage offre un récit pédagogique et optimiste.
J’AGIS POUR LE CLIMAT
MANGER, S’HABILLER, VOYAGER, HABITER, S’ENGAGER : LE GUIDE DÉCALÉ DES FUTURS HÉROS CLIMATIQUES Hélène Binet, Louise Pierga, Marabout
ABÉCÉDAIRE DE L’ÉCOLOGIE JOYEUSE Éric de Kermel, Bayard
ET SI…
ON LIBÉRAIT NOTRE IMAGINATION POUR CRÉER LE FUTUR QUE NOUS VOULONS ? Rob Hopkins, préface de Cyril Dion, Actes Sud
MON CAHIER FÉMININ SACRÉ CE QUE LES PLANTES ONT À NOUS DIRE
RÉVÉLEZ LA NATURE ET LA PUISSANCE DE VOTRE FÉMININ ! Maëva Morin, Solar Editions
François Couplan, Les Liens qui Libèrent « Observez-les, aimez-les, votre vie en sera transformée », nous promet le célèbre ethnobotaniste spécialiste des plantes sauvages comestibles.
TOUT FAIRE POUSSER EN POTS
DES LÉGUMES, DES AROMATES & DES FLEURS SANS JARDIN Alex Mitchell, First Éditions Balcons et rebords extérieurs, toits et terrasses, jardins d’intérieur… L’auteur nous donne ici toutes les astuces ingénieuses pour faire pousser fruits et légumes en tout lieu et en tout pot ! Un beau livre pour des résultats étonnants.
Un voyage artistique et paysager au cœur de 300 hectares d’anciens marais aménagés pour la culture maraîchère. Réparti entre différentes parcelles situées sur l’île aux Fagots à Amiens, et sur l’étang de Clermont à Camon et à Rivery, l’ensemble des jardins flottants se visite aussi bien à pied qu’en barque. Préservation de l’écosystème, fragilisation des berges, ressource en eau, activité nourricière et qualité de l’alimentation, la 11e édition du festival met l’accent sur le changement climatique et le manger sain. https://www.artetjardins-hdf.com/
ÉCOLONOMIE 2 : LA TRANSFORMATION CRÉATRICE
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100 ENTREPRISES S’ENGAGENT Emmanuel Druon, Actes Sud Partout dans le monde, des entreprises se forment au cercle vertueux de l’écolonomie, visant à entreprendre sans détruire et à produire sans polluer. Une utopie concrète portée par l’un des pionniers en France. K A I Z E N - N ° 5 1 - J U I L L E T- A O Û T 2 0 2 0
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