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Le ravitaillement médical : perspectives à l’horizon 2030
Les évolutions envisagées de la conflictualité et des modes d’action des forces armées pour la prochaine décennie amènent le SSA à engager une refonte complète de sa doctrine du soutien médical opérationnel, refonte en cours de définition pour atteindre l’ambition opérationnelle 2030. Le ravitaillement médical (RAVMED) est ainsi amené lui-aussi à repenser son organisation et son fonctionnement pour s’adapter à ce nouvel environnement militaire. Parallèlement, il devra se conformer aux standards « qualité » du domaine santé afin de garantir la meilleure prise en charge du blessé où qu’il se trouve.
Sur le plan militaire, l’élément prépondérant est la révolution de l’engagement aéroterrestre marqué par une très grande mobilité dans des scenarii d’engagements majeurs face à des ennemis hybrides ou symétriques. Le corollaire pour le SSA est de s’adapter à cette mobilité, notamment au travers de l’allégement des unités médicales opérationnelles (UMO). A titre d’illustration, la nouvelle antenne de réanimation et de chirurgie
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de sauvetage (ARCS) préfigure ce que devraient être les futures générations d’UMO amenant, pour le RAVMED, de nouvelles modalités de constitution avec augmentation des activités de déconditionnement et reconditionnement pour diminuer l’empreinte logistique. De facto, ces UMO perdront en autonomie, ce qui impose de revoir aussi les flux de réapprovisionnement. En terme d’organisation, ces nouveaux modes d’approvisionnement obligent à repenser l’échelonnement du RAVMED sur les théâtres, avec différents niveaux d’unités de distribution de produits de santé (UDPS) tels qu’une UDPS d’entrée de théâtre, qui réceptionnerait les flux d’entrée et les retours vers la métropole, une UDPS de division, avec une mission renforcée sur le flux reverse et des UDPS de brigade à l’avant, mobiles (potentiellement sur roues ?) et réactives. En effet, si le stock n’est pas présent dans l’unité déployée, ou seulement de manière limitée, alors il devra se trouver dans l’unité de soutien qu’est l’UDPS. La pratique actuelle du flux tiré (commande par l’échelon utilisateur) pourrait se voir remplacée par la pratique du flux poussé (déclenchement par l’arrière). Cette capacité d’approvisionner au plus près, à l’avant, avec un flux poussé au juste besoin, sans alourdir les structures, impose de mettre en place un système d’information permettant
une visibilité, en temps réel, sur les stocks dont chacun dispose, allant de la structure arrière de métropole jusqu’à l’utilisateur final (véhicule sanitaire, soignant…). L’utilisation de technologies modernes (internet des objets, RFID…) devrait permettre de mettre en œuvre cet espace collaboratif et connecté pour le partage d’informations (infocentre et infovalorisation).
Parallèlement, ces technologies devraient aussi bénéficier au maintien en condition opérationnel des matériels par l’analyse prévisionnelle. La maintenance prédictive permet ainsi d’anticiper les défaillances avant qu’elles ne surviennent, en indiquant l’état des équipements et en détectant les signes avant-coureurs de pannes. De plus, pourraient être optimisées ainsi la gestion des stocks de pièces de rechanges, ainsi que la mobilisation
au bon moment et au bon endroit des techniciens de maintenance. Enfin, l’impression 3D pourrait renforcer l’efficience de la maintenance en évitant l’absence ou la gestion de stocks trop importants de pièces détachées sur les théâtres.
En amont, au sein des établissements de ravitaillement de métropole voire des UDPS de l’arrière, devront être renforcées les capacités de production et accrue la rapidité de regénération des UMO. L’optimisation et la modernisation des établissements de métropole s’imposera pour suivre cette demande et l’arrivée de nouvelles technologies devrait permettre l’atteinte de cette performance : intelligence artificielle, automatisation, robotisation, drones d’inventaires, etc. Enfin, autre volet des enjeux du RAVMED de 2030, la valorisation complémentaire qui devient un intrant budgétaire primordial. Les contraintes financières des dernières années ont amené le SSA à réfléchir à de nouveaux modes de financements extrabudgétaires et la composante du ravitaillement a débuté dès 2015 la conquête de financements alternatifs reposant principalement sur la vente de ses savoir-faire (contremesures médicales de la pharmacie centrale des armées, plasma lyophilisé du centre de transfusion sanguine des armées, dotations standardisées type UMO fabriquées par les établissements de ravitaillement sanitaire des armées, dispositifs d’optique de l’établissement central des matériels du SSA, droits d’accès sur des marchés publics passés par la plateforme achats finances santé, etc.). Dans un contexte économique difficile, ces actions de valorisation complémentaire associées à l’innovation devront vraisemblablement être poursuivies pour renforcer les capacités d’investissement de la composante. Ceci constitue également un défi pour l’avenir pour concilier l’accroissement d’activité prévisible dans la nouvelle ambition opérationnelle et l’augmentation du volet valorisation.
L’ensemble de ces éléments constitue la base des études qui seront menées dans le nouveau projet de transformation qui vient de débuter « Adaptation de la chaine de ravitaillement sanitaire » pour l’horizon 2030.