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séisme Haïti 2Opération
Dossier OPEX 2009
LESOUTIEN MÉDICAL DES OPÉRATIONS
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L’engagement opérationnel en 2009 est resté soutenu. Même si certains théâtres ont évolué de manière significative ce qui s’est traduit par la réduction du volume des forces françaises, le théâtre afghan s’est renforcé. Le nombre de blessés pris en charge par la chaîne santé est identique à celui de 2008, ce qui témoigne de l’intensité de l’engagement des forces et de l’impérieuse nécessité de disposer d’un soutien médical performant.
En Côte d’Ivoire, le recentrage de la force Licorne sur Abidjan a permis de fermer l’antenne chirurgicale. Au Tchad et en République centre africaine, le transfert d’autorité de l’EUFOR vers la MINURCAT a amené un désengagement de la France et la fermeture de l’antenne chirurgicale de Birao. Présents au Tchad depuis 1986, les éléments français de l’opération Epervier, déployés sur N’Djamena, Abéché et Faya Largeau restent en place avec leur soutien médical dédié. En République centre africaine, un poste médical reste en activité jusqu’en mars prochain en soutien de la MINURCAT. En Europe, le départ de la majorité du détachement français de Bosnie a entraîné la fermeture du role 1 d’Astrée. Le service de santé des armées aura été présent dix-huit années en Bosnie. Le passage en Deterrent presence de la KFOR au Kosovo à compter du 31 janvier 2010 avec une réduction de moitié du contingent français, a amené la fermeture du GMC de Plana en octobre. Le nombre de postes médicaux déployés sera également réduit en proportion. L’opération Daman au Liban est la seule qui n’a subi aucun mouvement d’effectif.
En Afghanistan, le recentrage des troupes françaises en Kapisa et Surobi pour former la Task Force La Fayette nous a amenés à adapter notre dispositif médical. Par ailleurs, à l’été 2009, la France s’est engagée à former la police afghane. À cet effet, la gendarmerie nationale a déployé sur le théâtre afghan quatre Police-OMLT
HMC KAIA avec un infirmier inséré dans chacune d’elles. Enfin, à la demande de l’OTAN, le Service assure depuis le 8 juillet 2009 le rôle de «lead nation » du nouvel hôpital de l’aéroport de Kaboul. Remplaçant le GMC français de Warehouse, l’HMC KAIA est reconnu comme un role 3 par l’OTAN depuis le 1 er décembre 2009.
Au total, 1 347 personnels du service de santé des armées ont été engagés sur les théâtres d’opérations, soit 33 % de moins qu’en 2008. En instantané, quarante-deux postes médicaux (Terre, Air, Mer et Gendarmerie), quatre équipes MEDEVAC HM et deux équipes chirurgicales sont désormais déployés. En moyenne, 4 % des personnels en opérations extérieures appartiennent à la fonction santé, proportion stable au fil des années.
EULEX
1PM
LICORNE 3 PM
Les théâtres d’opérations en 2009
TRIDENT 4 PM DAMAN 6 PM HERACLES 1 PM
PAMIR 21 PM 1HMC
FAN
7 Éq. méd.
BOALI
1PM EPERVIER 4 PM 1AC
MINURCAT
1 PM jusqu'à mars 2010
LES CHIFFRES
1 347 personnels santé sur l’année, dont :
109 réservistes
406 personnels santé déployés en permanence 2 équipes chirurgicales simultanément (depuis novembre 2009)
18 équipes chirurgicales
42 équipes médicales 6 COMSANTÉ
Ce chiffre monte cependant à 6 % pour le théâtre afghan. La fermeture des 3role 2 (Birao, Abidjan et Plana) a permis de réduire significativement l’effort demandé aux hôpitaux. Le nombre d’équipes chirurgicales projetées est passé de trente-huit équipes en 2008 à dix-huit en 2009. Ce nombre va encore diminuer en 2010 du fait du passage des mandats à trois mois pour les unités médicales opérationnelles de niveau 2 et 3. L’État-major opérationnel santé (EMO-S) de la DCSSA a été créé au 1 er septembre 2009. Cette nouvelle structure remplace l’ancien bureau opérations et préfigure déjà l’organisation opérationnelle du Service à l’horizon 2014. Organisé en M-codes à l’image des autres étatsmajors opérationnels d’armée, l’EMO Santé a pour mission d’être l’interlocuteur privilégié du CPCO et des différents EMO d’armée.
Reflet de notre engagement opérationnel au profit des militaires français, 63 évacuations médicales stratégiques ont été réalisées en 2009, soit autant qu’en 2008 où il y avait eu deux évacuations stratégiques avec le système MORPHÉE. 796 RAPASAN ont été réalisés en 2009. Ce chiffre est plus faible qu’en 2008
AC : Antenne chirurgicale Éq.méd. : Équipe médicale HMC : Hôpital médicochirurgical PM : Poste médical
sans que l’on puisse établir un lien de causalité avec la réduction de format des forces déployées.
2010 a dès à présent vu la projection d’une antenne médico-chirurgicale après le séisme en Haïti. Cette antenne est constituée d’une antenne chirurgicale aérotransportable et d’un renfort en hospitalisation. Dans le cadre de cette opération, les moyens médicaux prépositionnés aux Antilles ont contribué à l’Évacuation médicale (MEDEVAC) des ressortissants blessés. 2010 verra le maintien de notre engagement en Afghanistan où les médecins et infirmiers des postes médicaux restent et demeurent en première ligne comme en témoignent les blessures souvent graves de personnels de la fonction santé et plus récemment, le décès d’un infirmier.
Médecin général inspecteur Ronan Tymen Sous-directeur organisation, soutien et projection
Dossier OPEX 2009 première mise en condition avant projection pour l’HMC KAIA
Le personnel désigné pour armer, en décembre, l’Hôpital médicochirurgical de Kaboul (HMC KAIA) a participé, pendant trois jours à la première Mise en condition avant projection (MCP) organisée par le service de santé. Cette MCP est pilotée par le Centre de préparation aux opérations extérieures (CPOPEX) qui s’appuie sur le 3 e Régiment médical (RMED) de La Valbonne.
Les conditions d’engagement en Afghanistan rendent indispensable, pour le personnel hospitalier, une MCP calquée sur les modalités mises en place par l’armée de terre. La première journée au CPOPEX permet, à travers plusieurs conférences, de découvrir le contexte géopolitique du conf lit afghan, l’articulation de la Force internationale d’assistance et de
Évacuation médicale à l’HMC KAIA sécurité (FIAS) et de l’OTAN, les nouvelles missions du bataillon français au sein de la Task Force La Fayette, le dispositif santé et son évolution.
Les présentations faites par les médecins des postes médicaux (bataillon français, OMLT) rentrant d’Afghanistan donnent au personnel hospitalier une approche réaliste du sauvetage au combat et des nouvelles conditions d’exercice de la médecine de l’avant. Il se familiarise avec les concepts de prise en charge du blessé de guerre, SAFE-ABC et MARCHERYAN (1) , appliqués sur le théâtre afghan. Un des objectifs du stage est de présenter les techniques médicales utilisées dans le cadre du sauvetage au combat, soulignant ainsi la continuité de l’action de tous les maillons de la chaîne santé. Les deux jours suivants se déroulent au 3 e RMED et sont centrés sur l’acquisition des savoir-faire militaires. L’Instruction sur le tir de combat (ISTC) est sanctionnée par l’obtention du Certificat d’aptitude au tir (CATI) pour le pistolet automatique. Le temps imparti ne permet ni de valider
© ICaS Lopez
le CATI pour le fusil FAMAS, ni d’utiliser les moyens de transmissions. La présentation de l’équipement de combat, du Véhicule de l’avant blindé sanitaire (VAB SAN) armé, de la trousse individuelle du combattant en dotation pour l’opération Pamir et du cathéter intraosseux complète l’instruction. Afin de savoir réagir face à un incident provoqué par un engin explosif improvisé (IED), une sensibilisation, avec cas pratique, est menée par une équipe du 1 er Régiment étranger du génie (REG). Elle initie le personnel à la prévention et aux réflexes vitaux à appliquer.
Force est de constater que le Service a pris la mesure de la nécessité d’aguerrir et de préparer son personnel hospitalier au contexte opérationnel, montrant une nouvelle fois sa réactivité et son adaptabilité. Cette préparation encore perfectible bénéficiera des retours d’expérience et des résultats de l’évaluation réalisée en fin de session.
Loin de déstabiliser une équipe très motivée par la mission, cette MCP ne peut être que bénéfique. Elle renforce la cohésion du groupe et prépare chacun à l’engagement opérationnel auquel il sera confronté, sûr de lui, prêt à avoir le bon réflexe au bon moment, sans inhibition.
Médecin en chef Patrick Berlizot Médecin-chef de l’HMC KAIA Janvier à avril 2010
(1) Méthode standardisée et reproductible de prise en charge du blessé de guerre (voir Actu santé 110)
OPEX 2009 Dossier
ÉVACUATION d’un blessé depuis un théâtre d’opérations
• Paris, vendredi 14 h00 :Le COMSANTE (1) PAMIR appelle l’EMO-Santé (2) : un accrochage a eu lieu il y a une heure, entre une section française de la Task Force La Fayette et des talibans aux abords d’un village, en Kapisa. Plusieurs blessés français sont à déplorer. Le médecin du poste médical est sur place. Les blessés sont en cours d’évacuation par hélicoptère vers des hôpitaux. • 14h15 :Le directeur central est averti ainsi que le Ministre. • 17h00 :Le COMSANTE demande l’évacuation médicalisée vers la France, dans les 24 heures, d’un blessé grave, polytraumatisé dont le pronostic vital est engagé. Il est actuellement hospitalisé à l’HMC (3) de Kaboul.
• 17h05 :L’EMO-Santé appelle le Cabinet du ministre de la Défense (CABMINDEF) afin qu’il demande la mise à disposition d’un avion gouvernemental. Il met en alerte l’équipe médicale de la base aérienne de Villacoublay et prévient le réanimateur d’astreinte. Une place est réservée dans le service de réanimation de l’HIA Percy. • 17h45 :Le théâtre précise que le blessé présente des lésions rachidiennes et thoraciques importantes. Il faxe le dossier médical du patient. L’EMO-Santé appelle le service de chirurgie thoracique et le service de neurochirurgie de l’HIA Percy, pour que le blessé soit pris en charge par une équipe multidisciplinaire dès son arrivée.
• 18h00 :Le CABMINDEF informe l’EMO-Santé qu’un Falcon 50 est disponible ; décollage prévu à 21h00. Le réanimateur d’astreinte est prévenu afin qu’il rejoigne Villacoublay. L’EMO-S transmet l’accord oral du CABMINDEF au théâtre. Le COMSANTE envoie le message de demande de STRATAEROMEDEVAC (4) . Il signale que l’état du patient, intubé et ventilé, nécessitera une transfusion en vol. L’EMO-S demande au CTSA (5) de Clamart
Évacuation médicale stratégique de fournir cinq poches de sang au réanimateur et prévient les équipes chirurgicales de l’HIA Percy de l’évolution des lésions. Le chirurgien thoracique souhaite avoir des images avant l’arrivée du patient ; il les recevra par Internet. • 19h20 :Le CABMINDEF confirme la MEDEVAC et donne le plan de vol du Falcon par message. L’EMO-S rédige le message récapitulatif destiné à l’ensemble des acteurs qu’il contacte par téléphone. La STRATAEROMEDEVAC est bouclée. L’EMO-Santé passe la main à l’officier d’astreinte MEDEVAC de la DCSSA pour qu’il suive les éléments du plan de vol du Falcon et en informe les intervenants. Il faxe le dossier médical au médecin régulateur de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) qui transportera le blessé entre l’aéroport d’accueil et l’HIA Percy. • 21h00 :Le Falcon 50 décolle avec l’équipe médicale de Villacoublay et le réanimateur à bord.
• Samedi 16h30 :Le blessé arrive au service d’accueil des urgences de l’HIA Percy.
Médecin principal Xavier Desruelles DCSSA – État-major opérationnel santé
© MP Guerville
(1) COMSANTE : Chef santé interarmées de théâtre
(2) EMO-Santé : Etat-major opérationnel santé de la DCSSA
(3) HMC : Hôpital médicochirurgical (4) STRATAEROMEDEVAC : Evacuation médicalisée stratégique par voie aérienne (strategic aeromedical evacuation) (5) CTSA : Centre de transfusion sanguine des armées
L’HMC KAIA, hôpital multination L’OPS ROOM
Centre névralgique de l’HMC KAIA, l’ops room (1) est le point de contact des centres de régulation des évacuations médicales (PECC) en Afghanistan. Composée de sept militaires appartenant à un régiment médical, cette cellule assure une veille opérationnelle 7j/7 et 24h/24. Ses missions consistent d’une part à recevoir et à diffuser des alertes, d’autre part à traiter les demandes adressées à l’HMC. Elle assure une écoute permanente du réseau radio de la base de KAIA afin d’être alertée des crashs d’aéronefs ou de tout autre problème nécessitant une intervention médicale d’urgence. L’ops room est en liaison directe avec les PECC du commandement régional centre et de la Task force La Fayette pour prévenir les équipes de l’hôpital de l’arrivée des patients évacués. La cellule adresse quotidiennement au commandement les comptes rendus l’informant de l’activité de l’HMC et des capacités disponibles. C’est aussi par son intermédiaire que sont effectuées et transmises toutes les demandes de transferts de patients entre les hôpitaux.
Lieutenant Fabiano Besnou HMC KAIA
(1) Ops room : centre opérationnel
Ops room
© DR
L’Hôpital médicochirurgical implanté sur l’aéroport de Kaboul (HMC KAIA) a ouvert en juillet 2009. Cette unité médicale commandée par la France travaille dans un contexte très multinational.
L’ OTAN a voulu cet hôpital dont il a financé et contrôlé la construction, confiée à une société turque qui a employé des ouvriers afghans. Sa maintenance est turcophone. Les personnels sont majoritairement français mais quatre autres équipes travaillent avec nous, portugaise, allemande, bulgare et belge.
Le service des hospitalisations est à dominante portugaise. Les Belges contribuent au fonctionnement du poste médical, prennent des gardes aux urgences, participent aux astreintes du camp de KAIA et au transport des patients. Le travail quotidien à l’hospitalisation et aux urgences s’effectue donc dans une harmonie très européenne et les conversations, les transmissions se font dans un joyeux mélange francolusitanien et une ambiance méridionale.
L’Allemagne et la Bulgarie fournissent une équipe chirurgicale chacune. Au bloc opératoire, le climat est nettement plus anglophone avec nos amis allemands et parfois intuitif avec les infirmiers bulgares. Des surprises sont
© ICaS Lopez
© ECPAD Un HMC multinational
80 Français 16 Portugais 11 Belges 6 Allemands 5 Bulgares
toujours possibles selon les langues apprises à l’école et l’infirmière de bloc bulgare communique préférentiellement en … espagnol ! Ce qui rend parfois service car la base de KAIA est sous commandement espagnol, la protection est belge et bulgare, et la majorité de la population de KAIA est américaine. Et je ne vous parle pas de la diversité de l’état-major otanien installé face à nous. Nous travaillons bien sûr avec les mêmes médecins interprètes afghans qu’à Warehouse qui parlent anglais et comprennent le français et l’allemand. Les patients militaires qui viennent à la consultation enrichissent le panel, de Géorgiens à Mongols. Les civils sous contrat vont d’Islandais à Australiens et les diverses ambassades et ONG de Kaboul finissent le tour du monde. La chaîne hiérarchique otanienne de l’hôpital est multinationale avec une chefferie santé opérationnelle qui va d’un médecin croate à un chef américain. Le chef santé au quartier général de la Force internationale d’assistance et de sécurité (FIAS) est une générale canadienne anglophone. Il est bien évident que la langue la plus utile est l’anglais, dans les rapports avec les patients comme pour les discussions officielles. Chaque relève amène son lot d’infirmiers surpris et inquiets sur les difficultés de transmission de l’information. Rapidement, chacun vainc ses appréhensions et le travail s’organise assez simplement.
Au-delà des aspects folkloriques de cinq nations qui collaborent et du massacre collectif de la langue anglaise, il y a la découverte et l’adaptation à d’autres cultures et habitudes. Les Allemands et les Bulgares étaient déjà présents avec nous à Warehouse et certains se connaissaient de missions précédentes. La disponibilité, la compétence et la gentillesse des équipes portugaises facilitent énormément la tâche. Travailler avec eux est particulièrement facile. Il faut s’adapter à certaines différences d’attitudes thérapeutiques, de réglementation dans les compétences des infirmiers anesthésistes par exemple, et de réactions face au contexte d’opération extérieure. Habituelle pour certains services de santé, elle est plus exceptionnelle pour d’autres. Les différences de durée de mandat font que l’intégration est plus ou moins réussie. Cette association de plusieurs nations européennes est agréable à vivre et permet de travailler dans de bonnes conditions en découvrant nos voisins.
Médecin en chef Isabelle Ausset Médecin-chef de l’HMC KAIA Octobre 2009 à janvier 2010
Six mois
en Kapisa
Après plusieurs mois d’une intense préparation militaire et médicale, les équipes santé de la Task force Korrigan ont affronté les rigueurs caniculaires d’un théâtre passionnant et dangereux. La Kapisa est constituée d’un enchaînement de vallées peu profondes où s’entrelacent des habitations murées, de nombreux cours d’eau, des champs et des vergers. L’ensemble forme un cadre idyllique et tortueux où il est facile pour les rebelles de s’infiltrer au plus près de la force et de se fondre ensuite dans la population. C’est sur ce terrain que nos sections patrouillent et combattent. C’est sur ce terrain que nous les soutenons. De juin à décembre 2009, médecins, infirmiers
et auxiliaires sanitaires se sont ainsi quotidiennement engagés à l’extrême avant, en soutenant parfois par le feu leurs camarades et en se portant toujours au soutien des blessés. Mais l’histoire que nous avons écrite n’est pas faite que de deuils, de sueur et de sang versé. C’est dans l’accueil quotidien de patients civils, adressés par nos confrères afghans, que se retrouve l’humanité du Service. Que ce soit par des consultations réglées ou d’urgence, les équipes ont activement participé à gagner les cœurs. Ainsi ce sont les 4 000 consultations réalisées et les 130 civils évacués par hélicoptères vers des structures spécialisées qui constituent notre plus beau souvenir de ce pays. Enfants brûlés, mutilés ou tombés aide au commandement, instruction des medics, gestion des effectifs, suivi des véhicules de la compagnie médicale. Le soutien santé de chaque convoi repose soit sur un binôme constitué de l’auxiliaire sanitaire, avec en alternance l’infirmier ou le médecin, soit sur le binôme médecin-infirmier. Après trois mois de séjour, l’équipe a déjà effectué près de 2 000 kilomètres en VAB. Chaque personnel santé est muni d’un sac lui permettant d’intervenir sur des urgences vitales. Il est également équipé d’un Rollpack®, avec le matériel minimum nécessaire pour débuter la prise en charge d’un blessé s’il faut débarquer et se déplacer à pied. d’un arbre. Adultes victimes d’agressions insurgées, d’accidents de la voie publique ou de brigandage. Leur vie n’aura parfois tenu qu’à un fil et aux enseignements remarquables des CITERA. Mission extraordinaire et exigeante, l’Afghanistan donne un sens à notre vocation de médecin ou d’infirmier militaire. Ici plus qu’ailleurs, chacun mesure le prix de l’engagement et la valeur de sa reconnaissance : la fraternité d’armes. Et vous qu’est-ce qui vous a amené un jour à pousser la porte d’une de nos écoles ?
Médecin principal Loïc Jousseaume Médecin-chef de la Task force
Équipe santé en OMLT soutien
Le médecin, l’infirmier et l’auxiliaire sanitaire de l’OMLT (1) kandak 35 (2) soutiennent le détachement et les personnels de la coalition installés sur le camp Blackhorse à Pol-e Sharki, ou lors de convois logistiques.
VAB après une attaque par IED
L’ équipe santé participe à l’encadrement quotidien du bataillon logistique afghan :
Korrigan Les deux personnels sont embarqués dans deux VAB. En effet, ils ne doivent en aucun cas être blessés en même temps. Le 13 janvier dernier en Kapisa, lors d’une attaque par IED (3) , l’auxiliaire sanitaire a été blessé. Le médecin, aidé de medics afghans, a pris en charge les autres patients dont un polytraumatisé grave.
Par ailleurs, les routes de montagne sont dangereuses et les accidents fréquents. À l’occasion d’un convoi vers Naghlu, l’équipe a prêté main forte à des medics américains pour mettre en condition cinq blessés civils graves suite à un accident de la circulation, avant leur évacuation vers l’HMC KAIA.
Médecin en chef Christophe Renaud OMLT soutien (1) Operational mentoring and liaison team (2) Bataillon logistique afghan (3) Improvised explosive device :engin explosif improvisé
OPEX 2009 Dossier
Le Centre médical interarmées de Djibouti intervient à Mogadiscio
17 septembre 2009, il est environ midi. Des rebelles somaliens font exploser deux voitures piégées sur l’aéroport de Mogadiscio au sein même de la base de l’African mission in Somalia (AMISOM). Cet attentat fait plusieurs morts ainsi que de nombreux blessés. Le Centre médical interarmées (CMIA) de Djibouti entre en action.
Très rapidement, les Forces Françaises stationnées à Djibouti (FFDJ) sont mises en alerte pour prendre en charge ces blessés de guerre, affirmant ainsi le soutien de la France aux nations déployées en Somalie. Une équipe médicale composée de trois médecins urgentistes, cinq infirmiers et trois auxiliaires sanitaires du CMIA de Djibouti est désignée pour mettre en condition et évacuer ces blessés vers la capitale kenyane, Nairobi. Un C-160 Transall est configuré en version sanitaire. Le matériel est réuni dans l’après-midi et l’équipe est prête à assurer la mission en début de soirée. Le décollage s’effectue dans la nuit à partir de la base de Djibouti. Après trois heures trente de vol, l’avion se pose sur l’aéroport de Mogadiscio au lever du soleil, pour des raisons de sécurité. Le lieu est étrangement calme et rien ne laisse à penser que, dans les heures qui ont précédé, le secteur a été la proie des flammes et des nuages de fumée.
Après quelques minutes d’attente, les blindés sanitaires de l’AMISOM déposent les blessés sur le tarmac à proximité de l’avion. Plus de douze heures s’étant écoulées depuis l’attentat, seuls les patients stables sans atteinte vitale ont survécu. Douze blessés couchés sont pris en charge, pour la plupart polycriblés, blastés et conditionnés de manière sommaire. Pour trois d’entre eux, un blast abdominal est suspecté. Cinq autres patients assis présentent essentiellement des blessures fonctionnelles de la face nécessitant un traitement spécialisé. L’embarquement des blessés est effectué "moteurs tournants" en vingtcinq minutes.
A bord du C160 Transall
Une fois embarqués, les patients sont identifiés et nous leur prodiguons les soins pendant le vol vers Nairobi. L’état d’un des patients, qui semble souffrir d’un blast abdominal, s’aggrave et nécessite des soins adaptés. Toutes les fiches médicales de l’avant sont rédigées en anglais afin d’optimiser la continuité des soins dans les hôpitaux kenyans. Ces derniers nous attendent à l’aéroport et une noria d’ambulances achemine les blessés vers l’Aga khan hospital. Une heure est nécessaire pour débarquer l’ensemble des blessés, transmettre
© CMIA Djibouti
© CMIA Djibouti
Accueil à l’aéroport de Nairobi
les consignes et s’assurer de la poursuite des soins. Le lendemain, nous repartons pour Djibouti, satisfaits d’avoir participé à cette mission médicalement intéressante et d’avoir porté assistance à nos homologues de l’union africaine.
Médecin principal Christophe Albert Médecin principal Romain Dupont Médecin principal Cédric Ernouf Centre médical interarmées de Djibouti
Le soutien médico-psychologique des militaires français en Afghanistan
L’ armée française est engagée en Afghanistan pour une mission complexe et psychologiquement éprouvante. Confrontés à un état de guerre dans lequel l’ennemi crée une situation d’insécurité permanente, l’individu comme le groupe militaire sont mis à l’épreuve dans leurs capacités d’adaptation et de résistance.
Une attention des armées à l’équilibre psychique du combattant
L’équilibre psychique du combattant est une donnée opérationnelle essentielle aujourd’hui, prise en compte comme telle au sein des armées de l’OTAN, avec cependant des modalités propres à la culture de chaque État mais également aux moyens mis en œuvre pour cela. En France, les armées se sont adjoint le concours de nouveaux acteurs pour tenter d’aider les soldats à faire face aux contraintes auxquelles les soumettent les situations opérationnelles. Des militaires sont désormais spécialement formés afin de pouvoir conseiller le commandement dans sa gestion du « facteur humain » et mener les actions jugées nécessaires à une optimisation du potentiel du combattant. Ainsi, un officier psychologue, interlocuteur direct du commandement du dispositif français, est aujourd’hui présent sur le théâtre afghan ainsi que des officiers « environnement humain » aux niveaux régimentaires et des « référents section » dans les unités élémentaires. Très clairement distanciés d’un rôle soignant qui, dans les armées françaises est dévolu au service de santé, ces spécialistes contribuent à ce qu’à travers la façon dont ils sont commandés, l’entraînement qu’ils reçoivent, les conditions d’équipement et d’existence dont ils bénéficient, les militaires
puissent trouver les repères et les ressources psychiques qui leurs sont nécessaires. Si des troubles psychopathologiques viennent marquer le dépassement des capacités d’adaptation individuelles de certains, leur rôle est de les orienter vers les formations médicales.
Le rôle du SSA
Le SSA a donc également une fonction essentielle dans le soutien psychologique des militaires. Par sa présence, la technicité et l’efficacité de ses personnels, il est facteur de « sécurisation » du combattant qui sait, qu’en cas de besoin, il pourra être secouru. Les qualités humaines mais également une attention permanente au cadre éthique de son exercice sont essentielles pour créer la confiance et les conditions d’un véritable accès aux soins ! Car, à côté de soins somatiques, les personnels médicaux ont à accueillir et à soigner la souffrance psychique. La notion française de « médicalisation de l’avant », qui place des paramédicaux mais aussi
des médecins au plus près des combattants, permet de repérer au plus tôt tout changement de comportement chez un militaire et de rendre plus simple la mise en œuvre de soins adaptés. Mais en même temps, cette proximité de vie peut rendre difficile la prise de distance nécessaire au diagnostic et au traitement des troubles psychiques. En opération, c’est un des rôles essentiels du psychiatre que de donner au médecin d’unité, par le lien qu’il va établir avec lui, cette possibilité de distanciation.
Le psychiatre de théâtre
Un psychiatre du SSA est actuellement en Afghanistan. Rattaché à l’HMC KAIA, il y effectue un certain nombre de consultations adressées par les médecins d’unité. S’il est susceptible d’assurer le suivi de militaires temporairement hospitalisés, il ne dispose pas de lits d’hospitalisation spécifiquement dédiés.
Évacuation d’un enfant brûlé
© ICaS Lopez
© Olivier DUBOIS/SIRPA Terre
Mais les principes de psychiatrie de l’avant conduisent à maintenir, autant que faire se peut, un militaire déstabilisé à proximité de son unité. La conformation du dispositif militaire français en Afghanistan rend de toute façon difficiles les déplacements vers l’hôpital et ceuxci sont évités s’ils ne sont pas absolument nécessaires. La mobilité du psychiatre est donc essentielle à sa mission auprès des combattants. Elle doit être absolument garantie par le commandement de la force. Cette mission comprend donc un aspect médico-technique et de conseil auprès des médecins d’unité ainsi qu’un aspect médicopsychologique de diagnostic, de soin et d’expertise pour les militaires qui présentent des troubles psychiques. Elle s’inscrit sans ambiguïté en cohérence avec le dispositif santé opérationnel.
Les diverses facettes du soutien psychologique
Mise en condition et renforcement de la combativité d’un côté, soins de l’autre sont deux domaines très différents. Les responsabilités respectives de l’encadrement militaire et du service de santé des armées ne se recouvrent pas. Il y a lieu de bien délimiter les rôles pour que les acteurs de terrain puissent se repérer. Faute de quoi, les actions menées par chacun risquent d’introduire la confusion chez des militaires éprouvés, en quête de repères, et rendre d’autant plus difficile l’inscription dans des soins lorsque cela s’impose.
Médecin en chef Humbert Boisseaux HIA du Val-de-Grâce
Vol AF 447, prévenir les troubles psycho-traumatiques
Le 1 er juin 2009, le vol AF 447 Rio-Paris s’abîme dans l’océan Atlantique. Des bâtiments de la marine brésilienne et de la marine Nationale française sont dépêchés sur la zone présumée de l’accident. Le 7 juin, l’équipage de la frégate Ventôse, rapidement rejoint par celui du BPC Mistral, se trouve alors confronté à la découverte de cadavres. Les médecins-majors des deux bâtiments doivent prendre en compte l’épreuve que constitue pour les marins le recueil d’une trentaine de corps. C’est en pensant aux familles en deuil et à l’importance que constitue pour elles le retour des dépouilles, que peut prendre sens ce travail éprouvant. À la demande du service de santé des armées, une cellule de soutien psychologique est constituée et dépêchée. Par un travail conjoint avec les médecins sur place, les deux psychiatres du service de psychologie de la Marine qui la composent vont mettre en place un espace de parole et d’écoute permettant de faire un travail de débriefing. Préalablement au retour en France, un temps de « décompression » est organisé avec une escale de quelques jours au Brésil. Le soutien offert a permis de limiter les effets individuels du stress et éviter que ne se développent des troubles collectifs de nature à compliquer le travail en cours. Compte tenu du contexte, une attention particulière a été portée à un dépistage précoce d’éventuels traumatismes psychiques. Il a donc été décidé que les marins exposés seraient revus de façon systématique, trois mois plus tard, par leurs médecins d’unité. Ce rendez-vous n’a pas permis de constater l’existence de séquelle psycho-traumatique. Cependant, et à titre conservatoire, tous ces éléments ont été consignés dans les dossiers médicaux. Ainsi, l’action médico-psychologique entreprise sur les lieux même de la catastrophe a pu s’articuler à la mise en place d’un suivi ultérieur impliquant les différents acteurs de la chaîne santé que sont les médecins d’unité, les psychiatres et les psychologues des Services locaux de psychologie appliquée (SLPA) mais aussi des hôpitaux d’instruction des armées.
Médecin chef des services Patrick Devillières Direction du personnel militaire de la marine - Paris