KIBLIND 46

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automne 2013

— CULTURE   VISUELLE   &  VISION   CULTURELLE

colorfoule technologie mr. propre nobrow baroud spam moon cdi

— andrew B. myers

GRATUIT kiblind.com





Andrew B. Myers

e n Co uv e rt u r e Roommates de Andrew B. Myers

www.andrewbmyers.com

A 01 légo

02 Fruit

03 Candy

04 Balloons

05 small Flags

ndrew B. Myers est un frais photographe vivant et travaillant à Toronto, ville à la skyline décapante et au bon vivre réputé. Diplômé depuis trois ans de la Ryerson University School of Image Arts, il est déjà appelé au four et au moulin, par d'aussi remarquable clients que Vice, Wired, Le Monde, Saatchi & Saatchi, Toyota, Universal Music, GQ, Time Magazine, etc. Si Andrew B. Myers est un Torontois bon teint, cela ne l'empêche pas de faire de la photographie, et de la belle. Il n'est en effet pas le genre d'artiste à se laisser dicter son propos par pure allégeance à une technique ou à un outil. Féru d'œuvres stylisées, Andrew B. Myers ne considère pas la photo comme la fin de toute chose : elle est pour lui une étape pour atteindre des sommets tout personnels. Le détournement, la pastellisation ou la chorégraphie sont autant de moyens à sa disposition pour faire que les images ploient dans son sens. Roommates, utilisée sur notre couverture, suit parfaitement cette ligne de conduite. Issue de ses tout derniers travaux, Roommates reprend la nouvelle obsession de sieur Myers qui semble bien s'éloigner encore plus de la photographie classique. Jouant ces temps-ci sur la reproduction et le bazar organisé, Andrew B. Myers s'amuse du chaos raisonné des choses. Des fourmis aux bonbons, en passant par les fruits ou les ballons, il range le désordre et le prend en photo. En résulte des œuvres à la plasticité étonnante, au réalisme utopique, qui ne laisse à l'observateur qu'une bouche bée, des bras ballants et une tête qui tricote. Car, à voir toutes ces fourmis se balader sur ce beau paysage, on a envie nous aussi de partir en baroud.

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é DI to - SommaI re

Data

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texte : M. sandjivy

La nouvelle vient de tomber. Si j’ai bien compris, Moon aurait chopé un dossier avec tout un tas d’infos lors du dernier « dèj » et du coup, c’est branle-bas de combat dans le bataillon car c’est une opportunité qu’on ne peut pas manquer. Opération « Charrette du désert ». Y’en a qui manque pas d’humour au siège. J’en peux plus. 3 jours sans dormir, j’ai chaud, j’ai faim, je pue et j’ai mal aux yeux. D’un revers de la main j’essuie une goutte d’encre qui perle. Procter s’avance et me tend un mouchoir blanc, immaculé. Je ne sais pas comment il se débrouille pour être toujours nickel dans ce merdier. Les gars l’ont surnommé « Clean », pourtant c’est pas le dernier à mettre les mains dans le cambouis. Il te change deux toners que les autres se demandent encore dans quel sens ca se tient. Et sans une tâche. Oui monsieur. Je range mon Backpack et vérifie mon chargeur qui s’avère à sec. Gamble me tend sa dernière cartouche de cyan. - « Tiens mon vieux. Quand on va y aller, faudra pas se rater. Tu sais quoi faire mais vas-y par petite touche. » C’est pas mon premier projet, mais la pression est toujours là. Je lève la tête et jette un œil en face, vers les chefs. Entre eux et nous existe une ligne invisible qui nous sépare : la deadline.

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On nous a filé quelques nouveaux et dans leurs yeux je lis la même peur qu’on partage tous. La crainte de la page blanche. À ma gauche Nobrow est surexcité et me spam de conneries. La nouveauté le met toujours dans cet état mais faut avouer qu’il n’a pas son pareil pour dénicher les talents du moment. En face de moi, Myers regarde une dernière fois la photo de chez lui avant de la ranger dans son casque. Avec cette routine, le calme revient. Dehors le ciel est bleu et mes idées s’éclaircissent. Je me sens prêt. Prêt à donner un dernier coup de collier, à m’y coller une fois de plus. Prêt pour un dernier baroud. Un baroud d’honneur.

— colorfoule

Po rt ra It

15 — noBrow

PaG eS B l a nCH eS

21 —

toM clohosy cole 22 Atelier Müesli 23 MAxiMe Mouysset 24 Benedetto BufAlino 25 MArine rivoAl 26 MArtin lord 27 icinori 28 viviAne dAlles 29 Jurgen MAelfeyt 30 cAcheteJAck 31 iker spozio 32 eMily MAye 33

sTAFF Directeur de la publication : Jérémie Martinez Rédacteurs en chef : Jean Tourette - Gabriel Viry - Jérémie Martinez Rédacteur en chef Mode : Baptiste Viry

Rédaction Kiblind : Maxime Gueugneau Gabriel Viry - Jean Tourette - Jérémie Martinez Olivier Trias - Simon Bournel-Bosson Matthieu Sandjivy - Marlène Cottin.

Relecture : Frédéric Gude

Cahier Mode : DA / Baptiste Viry - Assistante / Alizée Lagé Photographe / Morgan Roudaut Styliste / Alix Devallois

Direction artistique : Agence Klar (www.agence-klar.com)

Merci à : Baptiste Alchourroun Simon Chambon-Andréani - Margot Chauvin


revue De Pr eSSe

r éCl a me

— technologic

— Mr. propre

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12 r ePo rtaGe Gra PH IQ ue

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— rencontres internAtionAles de lA photogrAphie d'Arles

DoSS Ier

Ca H Ier mo D e

— spAM

— Moon

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41 CD I

55 — ABri 55 BiBliothèque 56 guidon 57 luff 58

luMière 59 MégAteuf 61 pAnorAMA 62 proBABilité 63

représentAtion 64 trésor 65 usine 66

InFOs Le magazine Kiblind est imprimé par : DEUX-PONTS Manufacture d'histoires - 5, rue des Condamines 38320 Bresson - www.deux-ponts.fr Il est édité à 40 000 exemplaires par Kiblind Édition & Klar Communication. SARL au capital de 15 000 euros 507 472 249 RCS Lyon .

Kiblind Magazine - 27 rue Bouteille - 69001 Lyon 04 78 27 69 82 - www.kiblind.com Le magazine est diffusé à Paris, Lyon, Marseille, Montpellier, Bordeaux, Toulouse, Rennes, Nantes, Lille, Strasbourg et Bruxelles. Ce numéro comprend un cahier supplémentaire de 32 pages pour la région Rhône-Alpes.

ISSN : 1628-4146 // Les textes ainsi que l’ensemble des publications n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Tous droits strictement réservés. THX CBS. Cherche nounou d'enfer. Contact : redaction@kiblind.com


COLOrFOULe, MArKeTInG & COULeUrs

Data sujet : J. Martinez & M. cottin graphisme : Margot chauvin

O

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n aime une couleur, non pour sa matérialité mais pour ce qu'elle représente. De ce fait bien admis, les marques ont fait leur beurre, jouant subtilement sur la colorimétrie de leurs logo. Après un bref sondage sur les couleurs préférées de l'espèce humaine, les malignes ont misé sur le bleu quand les plus finaudes ont pris le pack tout compris. Une stratégie qui marche plutôt bien et qui nous pousse à poser la question suivante : pourquoi diable Yahoo ! a-t-elle choisi le violet, une couleur viscéralement détestée par la moitié de la planète (les hommes).

Les COULeUrs dÉTesTÉes

Les COULeUrs APPrÉCIÉes

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30 41% des marques n’uitlisent que du texte dans leur logo

APPrÉCIATIOn des COULeUrs PAr TrAnCHe d’ÂGe Les + aimées

Les - aimées 01-18

95%

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des marques utilisent une ou deux couleurs seulement dans leur logo

36-50 51-69 70+ 100

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Le CLAsseMenT MOndIAL des 30 enTrePrIses Les PLUs PUIssAnTes 1

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COULeUr eT MArKeTInG

COULeUr eT BrAndInG

lors de la commercialisation d’un nouveau produit, les consommateurs placent l’apparence visuelle et la couleur au-dessus des autres facteurs.

la couleur accroît de 80% la reconnaissance de la marque qui est liée à la confiance des consommateurs.

93% apparence visuelle

Les COULeUrs Les + UTILIsÉes cette étude se base sur l'analyse des logos des 100 premières marques du monde.

80% d'augmentation de la notoriété

85% couleur

12%

27%

28% 15% autres

6% texture

33%

Technologie

cu r Sé

rit

it Nu t an Né

De Si ui l Pr enc l es e Él t ig ég e Di sti anc e nc t ion Ab an do Re spe n ct

Santé

té ili ab s on e sp sm e Re cif nc Pa nfa é Co aut y Lo u rt Ve esse g Sa me Cal é ert Lib

ité

Fidélité Innocen ce Puret é Silen ce Lég èret é Ver tu Bo nté Ch ast eté Vir g Sp inité iri tu ali té

Monotonie Mélancolie e Tristess de Solitu iété Sobr i arro Dés sion res e Dép anc e lm Ca i nu En g Élé

COULeUr eT sIGnIFICATIOn

é

1% son /odeur

Prov oca tion Puis sanc e Fascin ation Danger

Finance

Transport

lgie Nosta e Tristess Mystère

Foi

Passion

Spiritualité Mélancolie

Colère

Énergie

Agriculture

Religion Connaiss ance Mode stie Magie

Virilité Courage ivité Agress iction Interd

Énergie

In tim

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Industrie alimentaire

ièr e No Gaïté ble sse Jeu nes se Foi Éne rgie Motiv ation Fécon dité Richesse Positivism e

Lu m Automobile

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ce ion an rat Ch né gé Ré élité d Inf ité ond Féc ure Nat e Calm sie Jalou Repos Instabilité Naissance

Industrie textile

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ité ce lid an So sist Ré

Luc idit é Dé gra da Te tio rre n Élé Ne ganc e ut Pr ra Fo évo lité ya Si rce nc m e pl ic ité

rgie Éne oie J ité tiv a é té Cr ali Vit sme sia eur ou al n th Ch tio il En a e in cu e ag c A ism Im d Lu

Habitat

reTrOUVeZ Les sOUrCes en dÉTAIL sUr www.KIBLInd.COM

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r ev ue De P r eSSe texte : M. gueugneau

TeCHnOLOGIC

PRENDRE LA PRESSE POUR CE QU’ELLE EST : UNE SOURCE D’INFORMATIONS ET D’INSPIRATIONS. PROFUSION DE SAVEURS DE NOS PARUTIONS NATIONALES, SOUS LA FORME D’UN COURT RÉCIT, RÉSULTAT DU FUMET DÉGAGÉ PAR NOS LECTURES.

01 . stEEl n°6 Automne-hiver 2013 www.steelmagazine.fr

02. Paris tonKar n°8 Juillet/Août/septembre 2013 www.paristonkar.com

03. rEgards n°27 été 2013 www.regards.fr

« Mes petits amis, je dois bien vous l'annoncer, Dieu est mort. Et si " La table est une porte d'entrée pour débattre des questions de générosité, de distributions, d'inégalité " 02 , aussi suis-je au bon endroit. » C'est avec ces mots que le professeur Sonedi engagea un discours qui allait compter parmi l'un des plus importants de l'Humanité, ce jour d'avril de l'an 1983. « En effet, continua-t-il, certains prétendent que " les progrès de la robotique permettent aujourd'hui d'imaginer des robots sex friends afin de répondre aux désirs sexuels les plus excentriques " 05 , j'affirme moi que le progrès va bien au-delà de simples désirs lubriques et que le mot de robot n'a plus cure. Messieurs, j'ai recréé l'être humain ». Ébahis, les douze convives ne soufflèrent mot. Certes, le professeur Sonedi était l'un des esprits les plus brillants de notre époque, c'est un fait. « C'est un caméléon ultime, il se transforme luimême. C'est un travailleur rapide et très organisé » 07 , capable d'inventer les objets les plus fous et faire passer la plus prolifique imagination humaine pour un scénario de sitcom. Mais de là à prendre la place du Créateur, il y a un pas que nul homme de chair et de sang ne peut franchir. Il enchaîna : « Je me

répète, mais " en ces temps difficiles, il n'est pas vain de rappeler que l'intelligence, la solidarité et la justice sont les seules voies qui nous mèneront vers un monde plus apaisé " 01 et malheureusement « on n'empêchera jamais des personnes de se comporter en voyou, de mentir ou de tricher » 02 . C'est pourquoi, j'ai choisi de refaire moi-même la nature humaine, débarrassée de tous ses vices ».

« J'y MeTs MOIns de PAnACHe AUJOUrd'HUI, MAIs Je TrAqUe TOUJOUrs ! » Paris Tonkar, n°8, Juillet/Août/septembre 2013

« C'est amusant, poursuit-il, car figurezvous que l'origine de mes recherches fut le parcours que je fais tous les matins jusqu'au village. En effet, à mon âge, " c'est un challenge de rouler sous la chaleur et j'ai l'habitude d'emporter au moins un camel bag ou 2 bouteilles d'eau " 04 . J'ai donc pensé à une aide robotisée bien qu'un vélo motorisé ou


" une voiture électrique m'intéresserait beaucoup aussi. Mais [vous voyez] que je ne suis pas dans ces objets très techniques ou très complexes ". 04 De plus, " il y a des savoir-faire particuliers que tu n'as pas. Tu peux les amener à toi, mais tu ne les as pas et tu dois faire confiance, travailler avec d'autres gens " 01 ce que je ne ferais à aucun prix. J'ai donc conçu et réalisé moi-même un petit bijou d'artefact qui est allé un peu plus loin que sa fonction initiale : elle n'est autre qu'une nouvelle forme de vie prête à croître et à se multiplier. Messieurs, ce que je vais vous montrer " c'est beaucoup plus global que l'idée de message ou de sens " 08 , ma création n'a plus de but, de visée, elle est la création même ! Suivez-moi ».

« MAIs Les InsTInCTs sOnT Là POUr êTre IGnOrÉs » The Gourmand, n°1, 2013

Les invités se levèrent de table et suivirent le génial inventeur jusque dans son antre. « Derrière une imposante porte en chêne de plus de 350 kg s'ouvre un salon baigné de lumière et un immense parquet de chêne blanc » 07 et, là, disposés en vrac, des inventions, des expériences en cours, des bidules et autres merveilles technologiques. « J'y mets moins de panache aujourd'hui, mais je traque toujours ! » 01 , plaisanta Sonedi. Nous arrivèrent enfin devant un drap noir recouvrant une forme a priori humaine. « Si, ces dernières années, entama le professeur, nous avons été

envahis d'androïdes en tout genre, " en revanche, nous avons été déçus par le manque d'innovation dans la recherche esthétique " 03 et force est de constater que " du côté des évolutions technologiques récentes, on peut déplorer quelques aberrations " 05 . J'ai donc remédié à tout cela. » Prenant une stature magistrale, le professeur nous dicta sa leçon : « Autrefois, " l'homme éprouvait une certaine familiarité envers la mort, qui était perçue comme un élément inéluctable et donc mieux acceptée " 05 . Aujourd'hui, notre instinct de survie bloque toute aventure humaine " mais les instincts sont là pour être ignorés " 06 , n'estce pas ? L'être que vous avez devant vous est donc un défi à toutes les maladies, toutes les malformations, un défi au temps. Bien sûr " il sera peut-être nécessaire de lubrifier l'ensemble, attention à choisir le bon produit en fonction des matériaux " 03 , mais, audelà de cet entretien, c'est l'immortalité qui se tient debout devant vous. » Puis, regardant attentivement l'un des compères les plus richement vêtus, il lui tint ces mots, le sourire en coin : « Je vois que vous portez du Yuji Yamamoto, " monsieur est donc chic et raffiné, recherche élégance et touche de singularité, notre sélection saura pour sûr combler vos exigences. " 04 » Enfin, il dévoila son homme nouveau. Et, s'adressant à toute la compagnie : « " En 1963, Roy Lichtenstein a peint un hot-dog et a appelé ça de l'art " 06 . En 1983, j'ai créé l'homme nouveau et j'ai appelé ça Frank Ribéry. »

reTrOUVeZ LA sÉLeCTIOn en dÉTAIL sUr www.KIBLInd.COM

04. soldats du FEu magaZinE n°57 Juillet/Août 2013 www.soldatsdufeu.fr

05. tanK n°5 été 2013 www.facebook.com/ TANKLarevue

06. tHE gourmand n°1 2013 www.thegourmand.co.uk

07. WallPaPEr n°174 septembre 2013 www.wallpaper.com

08. ZyVa n°28 septembre/octobre 2013 www.zyvamusic.com


r éC l ame texte : J. tourette visuels : © procter & gamble

Mr. PrOPre

TOUJOURS IMPECCABLE, SOURIANT ET MUSCLÉ, MR. PROPRE FAIT FIGURE DE CHAMPION INCONTESTÉ DU MÉNAGE DEPUIS 55 ANS. UNE BONNE RAISON POUR CHANTONNER ENCORE UN MOMENT DANS LA CUISINE.

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I

l serait connu par 95% des Français (étude Procter & Gamble). Et en musique : « Mr. Propre rend tout si propre, que l’on peut se voir dedans (bis) ». Mais plutôt que d’interroger son essence « propre », rechercher ses origines ou analyser les raisons de ce succès d’estime (et commercial), la question lancinante qui hante les forums et échauffe le bout des doigts est davantage orientée sur… son identité sexuelle : « Mr. Propre est-il gay ? » La base de l’enquête est très mince et la liste de ses attributs semble suffire à pousser massivement les détectives vers l’affirmative : un grand garçon bodybuildé, entièrement glabre (si l’on exclut ses sourcils bien apparents), une boucle à l’oreille, bien moulé dans son petit tee-shirt blanc nickel, et qui respire la propreté et le soin de soi… CQFD, en somme. À plus forte raison quand la légende veut que Mr. Propre trouve ses origines dans un univers de voile ou de vapeur. Encore une fois, une logique implacable et une argumentation minutieuse auront permis de résoudre l’une des plus grandes questions depuis la controverse sur le sexe des anges. Comme si l’on ne pouvait se baser que sur ce que l’on voit ; ou pas ! Surtout dans la publicité. Mister Clean 01 – ou encore Maestro Limpio (au Mexique), Don Limpio (en Espagne), Mastro Lindo (en Italie), M. Proper (en Allemagne), Mister Proper (dans les pays de l’Est et au Moyen-Orient), Monsieur Net (au Canada) – est apparu à Cincinnati

à la fin des années 50, dans les laboratoires de produits nettoyants Procter & Gamble (P&G). À cette époque, le préfixe « Mister » était très en vogue pour caractériser un talent ou un trait de personnalité, tels que « Mr. Muscle », « Mr. Baseball », voire « Mr. Republican », et son utilisation pour décrire un produit capable de nettoyer n’importe quelle surface a surgi presque naturellement. Sans compter que l’idée de faire entrer un homme dans la cuisine des ménagères américaines des Trente Glorieuses était, à bien des égards, révolutionnaire. Restait à lui trouver une silhouette. P&G se tourna vers l’agence TathamLaird & Kudner pour imaginer à quoi pourrait ressembler ce personnage, dont le nom et les exigences sémiotiques liées à la propreté étaient imposés. Chargés de l’affaire, Harry Barnhart et Ernie Allen trouvèrent un modèle adéquat en la figure d’un marin de L’U.S. Navy basé à Pensacola : ce type de caractère combinait à la fois des compétences athlétiques avantageuses et un idéal de blancheur attesté par une tenue immaculée. Parallèlement, P&G sollicita des artistes pour explorer une autre piste, afin d’affirmer le côté « magique » de son produit. Le brief présenté était clair et précis : Mr. Clean devrait ressembler à un génie, posture et attirail populaire compris, complètement chauve et avec trois boucles dans le nez (pour le côté exotique), tout en étant entièrement vêtu de blanc (pour le côté


impeccable). Richard Black, un artiste de Dayton, releva le défi en suivant ces indications à la lettre ; mais il ne fut pas très convaincu du résultat. Il proposa alors une variante, en atténuant l’aspect « génie » et en limitant les boucles à une seule dans l’oreille gauche… Le résultat plut à P&G. Un marin génie était né, en même temps qu’une icône mondiale de la publicité dont les traits devaient se fixer durablement dans le temps. En 1958, la première apparition sur affiche de Mr. Clean dévoila un homme grand, fort et souriant, caricature de l’homme de ménage idéal 02 pour lequel récurer la maison de la cave au grenier peut sembler aussi simple que de briquer le pont d’un navire, ou de formuler un vœu. Le résultat commercial fut à la hauteur des ambitions de communication et dès la première année Mr. Clean rafla 14% de parts de marché aux États-Unis. Évidemment, P&G ne s’arrêta pas à ce succès et s’intéressa à un medium particulièrement efficace pour rentrer dans les foyers américains : la télévision. Thomas Scott Cadden fut le premier réalisateur à donner vie à Mr. Clean sur le petit écran. Il est aussi l’auteur de la musique et du jingle entêtant qui reste encore aujourd’hui inséparable du personnage, bien que revisité dans toutes les langues : « Mr. Clean gets rid of dirt and grime and grease in just a minute ».

« Mr. PrOPre rend TOUT sI PrOPre, qUe L’On PeUT se VOIr dedAns » Chose étonnante pour une première mise en mouvement, le Mr. Clean de Cadden a délaissé sa tenue blanche pour lui préférer un costume noir : incarné par le comédien House Peters Jr. 03 , c’est en véritable représentant de commerce qu’il vient vanter les mérites de son produit à une ménagère fatiguée. Sans pour autant avoir ôté sa boucle d’oreille ! L’effet est immédiat.

Et en six mois Mr. Clean devient le favori des ménagères. Mr. Propre arrive en France en 1966 04. Face à lui, un concurrent de taille : Ajax. Pour livrer bataille, l’Agence Grey va orienter ses spots et ses annonces sur les thèmes « Puissance », Brillance », « Génie », usant de l’attitude charismatique et de l’opulente musculature du « champion du nettoyage ». Mais aussi avec élégance, puisqu’à partir de 1972 l’athlète s’accompagne d’une fragrance citronnée qui le distingue du sillon d’ammoniaque laissé par tous ses concurrents. Il brille. Et il plastronne en se hissant à la tête des ventes, en 1980, avec 34 % des parts de marché. Si Mr. Propre a véritablement du génie, P&G n’en eut pas moins pour dynamiser son image. En 2000, une campagne d’affichage décalée, à base de slogans sur des thèmes d’actualité chers aux consommateurs fut lancée : la SaintValentin, « Son seul amour c’est votre intérieur » ; la Fête des pères, « Comme les papas, il est musclé, mais lui il aime faire le ménage » ; le Festival de Cannes, « Besoin d’aide pour faire le ménage dans la sélection ? » ; RolandGarros, « Pas terrible sur terre battue, moyen sur gazon, mais admirable sur carrelage », etc. Et ça marche 05 & 06. Au total plus d’une vingtaine d’interventions ponctuèrent cette année, redonnant un coup de neuf à la marque et délivrant un message limpide : Mr. Propre est bien au cœur de la vie des Français. Mais depuis 2001 Mr. Propre subit le même sort que grand nombre d’icônes. La 3D étant passée par là 07 , il a pris du volume, tout en se lissant, se modernisant, se coolisant… Certes, le travail est remarquable ; et le film d’animation qu’a signé l’agence Leo Burnett en juin dernier – Mr. Clean, The Origin – en atteste. Pourtant il manque quelque chose. Alors heureusement, il reste les forums et les vraies déductions : « Il ressemble à Bernard Lavilliers chauve, donc je dirais hétéro qui s’assume. » (signé Darkshine, sur Slappyto.net). Comme quoi !

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P o rt ra It

nOBrOw

texte : o. trias visuel : richard hunter

DEPUIS SA CRÉATION IL y A 5 ANS, L'ÉDITEUR INDÉPENDANT NOBROw A PRIS DE L'ENVERGURE. RETOUR SUR LE DÉVELOPPEMENT DE CETTE MAISON D'ÉDITION QUI SAIT OFFRIR à DE BELLES PRODUCTIONS D'ARTS GRAPHIQUES LES SUPPORTS QU'ELLES MÉRITENT. prenant conscience du potentiel, se positionne davantage en France : « Nous avons rapidement réalisé que la France était un marché énorme pour nous et nos livres. La première fois que nous sommes allés à Angoulème, nous étions stupéfaits de voir à quel point nos bouquins étaient populaires, comment ils se vendaient et combien les réactions étaient positives. À ce moment là, il est devenu évident pour nous de publier nos livres en français ». Nobrow s'étend, donc, mais se diversifie aussi. Il y a un peu plus d'un an, ils lancent une nouvelle branche, Flying Eye Books, qui propose avec la même sensibilité artistique des ouvrages pour les enfants de 3 à 11 ans. Sam résume : « c'est comme Nobrow, mais pour les enfants… » Preuve de leur succès, leur bureau à Londres est passé en cinq ans de deux à douze personnes, et une autre antenne vient d'ouvrir à New-York. La clé de cette réussite selon Sam : « une combinaison du contenu, du design et de la fabrication de nos livres, qui se remarque dans les rayons ». Un travail d'éditeur de qualité, tout simplement.

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www.nOBrOw.neT

©Robert Hunter. Visuel issu de La carte des jours, parution le 15 octobre 2013 chez Nobrow editions.

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ortis tous deux diplômés de la prestigieuse université d'art londonienne Central Saint Martins mais avec 10 ans d'écart, Alex Spiro et Sam Arthur, fondateurs de Nobrow, se sont trouvés autour d'un autre point commun de leurs parcours personnels : « Nous avions tous les deux atteint un moment dans notre carrière où nous voulions faire quelque chose de nouveau ». Partant d'un simple constat, ils choisissent alors de se lancer ensemble dans l'édition : « on sentait qu'il y avait un trou dans le marché au Royaume-Uni, contrairement au reste de l'Europe, car aucun d'éditeurs ne faisaient de bandes dessinées graphiques et des livres d'images ». Les deux acolytes décident donc de créer une maison d'édition à travers laquelle ils pourront exprimer leur passion pour « la sérigraphie et les beaux livres » tout en donnant aux images un rôle prépondérant : « On voulait faire de l'illustration une priorité, à la différence d'autres éditeurs qui ne le font pas autant, et donner beaucoup d'attention à la production de nos livres, car nous voulions aussi bien créer de beaux objets que de belles histoires ». Point de départ : le premier numéro du magnifique magazine Nobrow, paru en 2008. Imprimé en tons directs, cette parution (qui en est à son 8e numéro) présente des travaux originaux d'illustrateurs spécialement créés selon une thématique imposée. Autour de ce premier numéro, Nobrow édite quelques très petits tirages de livres sérigraphiés, qui vont venir donner un peu plus de poids à leur projet : « Au tout début, ces livres nous ont permis de faire plus de titres, de gagner de la visibilité sur internet via notre site web, et de travailler avec davantage d'artistes »… S'en suivent alors le tirage d'une édition limitée d'Abécéderia de l’honorable français Blexbolex, et le lancement de la série 17x23 avec Ouroboros de Ben Newman, format dans lequel verra le jour la première collaboration avec Luke Pearson, pour Hildafolk (Hilda et le Troll). McBess, Micah Lidberg, Golden Cosmos, Robert Hunter, Brecht VandenBroucke, Jon McNaught (Prix Révélation 2013 à Angoulême)…, les choix éditoriaux sont séduisants, et peu à peu, l'entreprise prend de l'ampleur. Nobrow commence à diffuser ses livres aux quatre coins du monde et,


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r e P ortaG e G raPH I Q u e texte : M. gueugneau visuel : s. Bournel-Bosson


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pages b l an c h es

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— toM Clohosy Cole Space Race tomclohosycole.co.uk & nobrow.net


— Atelier Muesli Explorateur www.ateliermuesli.com


— MAxiMe Mouysset Sans-titre maximemouysset.tumblr.com


— benedetto bufAlino La caravane dans le ciel benedetto.new.fr


— MArine rivoAl Galaxie marinerivoal.blogspot.com


— MArtin lord Combat martinlord.info


— iCinori Tortue (issue de Issun Boshi ©Icinori/Actes Sud Junior) icinori.com


— viviAne dAlles Terra Nullius vivianedalles.com & signatures-photographies.com


— jurgen MAelfeyt routeN16 Poster jurgenmaelfeyt.be


— CAChetejACk Money money, optical illusion cachetejack.com


— iker spozio The massacre begins ikerspozio.net


— eMily MAye Tour de France emilymaye.com


dossier Texte : G. Viry Visuel : Baptiste Alchourroun

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spAM Après 35 Ans de (dé)loyAux services, c'est selon, le spAm est-il devenu un sujet de ringArdise numérique ou un objet culturel, fréquentAble pAr tous, à lA lisière du pop Art ? réponses en AvAlAnt du porc précuit devAnt sA messAgerie.

«

Je vous écris dans le but d’obtenir votre coopération et votre confiance en vue d’effectuer une affaire urgente avec vous, c’est une proposition sincère et noble que je vous fais. Je souhaite solliciter votre aide dans la migration et l'investissement dans votre pays de l’héritage qu’a pu me léguer mon père. » Dans la suite du message, long comme un fleuve et enclin aux fautes d'orthographe, Chantal Kouakou nous apprend que son père, le Dr Kouakou Bah Théodore, était


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directeur d'une société d'extraction d'or au Sierra Leone. Nous pourrions donc l'aider, c'est évident, à rapatrier une caisse métallique, bourrée de dollars, en échange d'une commission de 15 %. Malgré le bon plan, la sollicitation est un scam, une variante du spam également appelée « fraude 4.1.9 » (ou arnaque à la nigériane), en référence à l'article concerné dans le code pénal local. Malgré un contenu très absurde, généralement agrémenté d'une phase terminale ou d'un conflit armé, certains destinataires se laissent quand même piéger. « Sur Internet, il y a des publics plus vulnérables que d'autres, notamment chez les plus âgés, explique Christine Goubert, fondatrice de l'Association des Victimes d'Escroquerie à la Nigériane en Europe (AVEN). » Si les

affaires se raréfient pour les propositions les plus grossières, elles explosent en revanche dans le cas des romance scam (se faire titiller sur un site de rencontres pour une amourette peu rentable) et des arnaques à la webcam (se faire titiller pour enlever le haut devant un maître-chanteur qui a la bande) : « Le Nigeria et la Côte d'Ivoire se sont partagé le marché, anglo et francophone, mais il fait de plus en plus de victimes : nos 400 adhérents se sont fait escroquer, en moyenne, à hauteur de 20 000 euros, sans compter tous ceux qui n'osent pas témoigner ! » L'association, qui dispose de moyens limités, les écoutent, les conseillent, parfois jusqu'à l'étape judiciaire. « Mais dans la plupart des cas, il ne se passe rien, car la loi française est difficilement applicable. Et puis, vous savez…


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la Côte d'Ivoire, c'est une ancienne colonie… » Pas sûr qu'on ait envie de comprendre. Pas sûr, non plus, que Christine Goubert, elle-même victime, soit l'invitée surprise de Gary Thuerk pour le 35e anniversaire de son bébé éternel : en 1978, cet ancien commercial de la DEC (Digital Equipement Corporation) utilisa le réseau Arpanet, ancêtre d'Internet, pour promouvoir un nouveau produit informatique auprès de 600 prospects. Le premier spam était né : un message non sollicité, envoyé par e-mail. Trente-cinq ans après les faits, Thuerk porte des chemises brodées « Father of Spam » et se retrouve toujours bien placé dans le classement des 40 personnes ayant changé la face de l'Internet (comprenez : le monde) ; son invention, quant à elle, a connu l'échappée belle pour devenir un méta-phénomène du web, représentant aujourd'hui plus de 72 % du trafic mondial d'e-mails. Évalué à plus de 130 milliards de messages quotidiens, le spamming recouvre un magma protéiforme, composé d'envois publicitaires, plus ou moins louables (Viagra, Rolex, faux diplômes et produits pharmaceutiques illégaux), d'arnaques en tout genre ou d'usurpations d'identités sur fond d'hameçonnage. Bref, que du joli, sans compter l'organisation nébuleuse du système, ses « machines zombies », ses spammeurs en cavale, ses serveurs offshore et son économie parallèle, estimée à plusieurs centaines de millions de dollars chaque année (revendeurs d'adresses, routeurs). À la tête de Spamit, spécialisée dans la promotion de pharmacies en ligne, le russe Igor Gusev, surnommé le « Roi du spam », aurait ainsi généré plus de 150 millions de dollars en trois ans, avant de disparaître, en 2010, traqué par les autorités ; sa fuite entraîna une baisse instantanée de 20 % du volume mondial d'envois. Cela étant, de nouveaux royaumes apparaissent à chaque évolution de l'éco-système. « Le spam classique, type Viagra, est assez stable, explique Capucine Roche, chef de projet marketing à Mail In Black, un des leaders français du blocage, mais les

e-mails à caractère informatif, non assimilés à des spams, sont en pleine explosion. C'est le cas, par exemple, d'une newsletter non sollicitée ». Le système MIB permet justement de les limiter, grâce à une authentification personnalisée de l'émetteur. Et si la solution semble autant séduire les professionnels, c'est que le spam a un coût, car il consomme de la bande passante et du temps ; certains calculs évalueraient d'ailleurs à 2,5 jours, par actif et par an, la durée consacrée à la consultation et la suppression des messages. Les spammeurs n'ont pas non plus la main verte, puisque la consommation électrique annuelle, induite par l'envoi des e-mails et les logiciels anti-spam, serait aussi polluante que trois millions de voitures. Un vrai pourriel, comme on dit au Québec…

en quelques Chiffres 17 M

de tonnes emission Annuelle de co2 induite pAr lA consommAtion électrique nécessAire Au spAmming. soit 0,2 % des rejets mondiAux de gAz à effet de serre.

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euros prix moyen du mArché pour l'Acquisition de 1 000 fAux comptes twitter, à l'ère 2.0 du spAmming, cArActérisé pAr une diffusion mAssive des messAges sur les réseAux sociAux. mitt romney en AurAit Acheté près de 117 000 lors de lA cAmpAgne présidentielle de 2008.

Culture de MAsse — Malgré les discours de Cassandre et une lutte anti-spam, devenue acharnée, sur le plan logiciel et judiciaire mondial, il serait exagéré de penser que l'objet ne fait pas rigoler. Connu et reconnaissable par tous, il se retrouve même, avec la société numérique, dans une sorte de nouvelle culture populaire, relayée par le web, qui s'amuse de tout, même de ses faiblesses. À l'origine, le terme « spam » n'a d'ailleurs pas été inventé par un anti-virus larmoyant : il a été repris d'un célèbre sketch des Monty Python. Diffusé en 1970, la scène se déroule dans un restaurant où la serveuse ne propose que des plats à base de Spam, la célèbre marque américaine de jambon en boite, qui a fait la fortune de son inventeur et l'infortune gastrique des GI's durant la seconde guerre mondiale. Mrs. Bun déteste la petite « cochonnerie », mais la serveuse la bombarde de spams, aidée par un choeur improbable de Vikings, sur la table voisine. Selon la légende, de mieux en mieux établie, les premiers geeks, grands amateurs des Monty Python, auraient massivement diffusé le sketch sur le web, au moment où le médium

0 chAnce, en frAnce, de mourir du spAm, contrAirement à lA chine, où plusieurs spAmmeurs ont déjà été condAmnés à mort. Au deuxième trimestre 2013, lA chine est le troisième pAys producteur de spAms, derrière les étAts-unis et lA biélorussie.

300 000 le nombre moyen de signAlements reçus, chAque mois, pAr lA plAteforme frAnçAise signAl spAm, regroupAnt, depuis 2004, les AssociAtions professionnelles, les entreprises privées et les Autorités publiques concernées pAr le spAm.

10 % proportion des internAutes AyAnt déjà Acheté un produit sur le web, suite à l'envoi d'un spAm (bAromètre sophos)

1/100 000 une cAmpAgne de spAmming est estimée rentAble, en moyenne, si 1 destinAtAire sur 100 000 Achète le produit.


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ment où les connexions se réglaient vidéo commençait à chauffer le réseau ; encore à la minute, et aux cybercafés. l'accumulation de « spams » serait resConcrètement, les scambaiters font tée pour qualifier la petite cochonnesemblant de répondre aux sollicitarie des messageries. Quoi qu'il en soit, tions en cherchant, par dessus-tout, à au-delà de ses fautes d'orthographes ridiculiser leurs interlocuteurs, avec un et ses images ratées, le spam bénéfiprétexte simple : vérifier qu'ils existent. cierait ainsi d'une première identité Si la pratique semble un peu dépassée, culturelle. Elle se retrouve aujourd'hui avec le recul du 56 en sixième position, kbit/s, elle a fait des sur une soixantaine ÉvAluÉ à plus émules, partout sur de cimaises, dans la de 130 MilliArds le web et laissé des collection virtuelle de MessAges quotidiens, empreintes, en forme proposée par The Big le spAMMing reCouvre de « trophées ». Le Internet Museum, un MAgMA protÉiforMe, site 419eater, par loin devant Lycos ou CoMposÉ d'envois exemple, revendique PBJT (la « banana publiCitAires, plus toujours la plus dancing »). ou Moins louAbles (fAux grande communauté « J'ai été l'un des diplôMes, produits de scambaiters au premiers croque-esphArMACeutiques monde et une Trophy croc français », exillÉgAux, etC.), plique, sérieusement, d'ArnAques en tout genre Room bien garnie, qui frise complèteChristine Goubert, ou d'usurpAtion ment l'irréel : on y rappelant qu'il y a d'identitÉs sur fond voit, par exemple, toujours plus absurde d'hAMeçonnAge. un spammeur porqu'un spam. Le scamtant un poisson sur la tête, un couple baiting n'est pas une blague : c'est une d'arnaqueurs en toute petite tenue pratique, répandue sur le web, à tra(une feuille) ou deux hommes en vers laquelle des « scammés » essaient soutien-gorge, soulevant un troisième de piéger, à leur tour, les escrocs. et s'adonnant manifestement à un « Le but était de leur faire perdre du concours suggestif de courgettes. Bref, temps, et donc de l'argent », au mo-

c'est l'éclate, la vraie et une manière, plus générale, d'illustrer l'oisiveté numérique, qu'il s'agisse de contrekemser un spammeur ou de battre le record du plus long visionnage de Nyan Cat sans arrêt (10 heures). Au-delà de ses fonctions immédiates, le scambaiting montre surtout que le spam est devenu un véritable gisement, générant des collections, des concours

Le spam d'Andy Warhol. Aux États-Unis, la marque de viande cuite en boîte est une véritable institution culturelle, doublée d'un empire : sa société inventrice, Hormel Foods Corporation, fait partie des 500 entreprises américaines les plus riches.

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« Ce flux de proMesses est quAnd MêMe Assez fAsCinAnt, CoMMe si l'ère nuMÉrique nous donnAit lA ChAnCe d'Atteindre le point g, de gAgner 25 % sur une Montre et de devenir MillionnAire en MêMe teMps »

ou des relais médiatiques. Sur Rue89, on a par exemple retrouvé le scam « le plus poétique » : une longue histoire, bien pathos, de « bien aimée en Christ » et de « brève maladie de quatre jours », se terminant évidemment par un plan financier à 1 million de dollars. De leur côté, les artistes Richard Airlie et Ian Morrisson ont même lancé une « spam radio » musicale, basée sur un flux audio continu de messages réels, mi-porno, mi-spirituels. « Les spams sont tout simplement hilarants, explique Elliott Burford, directeur artistique et illustrateur australien (Nike, Google, Benetton), établi à New York. Comme tout le monde, j'en reçois beaucoup et j'ai commencé à ré-interpréter leur signification, en m'appuyant sur des contenus récurrents. » En 2009, avec son trait simple, tout en finesse, il réalise une série originale de 20 illustrations, directement inspirées par les titres des e-mails. Son extrapolation dessinée du menu Best Of Big Mac permet, par exemple, d'apposer un message parfait : « Feel great increasing your dimensions » . Même chose pour une bague illustrée, brillant dans son écrin : « Make her your woman with your tool today ». La série a été publiée dans un recueil de cartes postales et exposée à Lisbonne. « Elle est finie, mais ça pourrait être fun de poursuivre l'aventure dans le cadre d'un magazine ».

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Le New-Yorkais Adam Harvey créé des images mosaïques, générées par des dizaines de milliers de spams érotiques. « C'est un hommage à leur dimension poétique et créative, malgré des sujets souvent très banals ». www.ahprojects.com

Si la marque déposée de viande en conserve a déjà son musée (16 000 m2, à Austin) et son Warhol, inspirée des Campbell's Cans, le spam informatique a quelques arguments pour entrer dans l'histoire en mouvement du popart : c'est un phénomène de masse, inspirant de nombreux créatifs. Dans la foulée des scambaiters et autres geeks en mal de vie active, les artistes numériques ont été logiquement les premiers à s'en emparer. Depuis plusieurs années, par exemple, Alex Dragulescu créé des images et des sculptures visuelles à partir d'un programme informatique maison, exclusivement alimenté par les spams. Le résultat donne d'étonnantes compositions florales et autres structures architecturales que l'auteur édite, en série limitée, sur papier : jusqu'à 800 dollars l'unité. De son côté, l'allemand Malte Steiner a inventé une installation interactive, inspirée des jeux de tir subjectif, à travers laquelle le regard évolue dans un univers 3D, entièrement spammé. D'autres performers quittent, un jour, leurs machines pour donner aux spams un peu de plastique, toujours à grand renfort de Viagra et de latex. C'est le cas, par exemple, de Bill Shackelford : connectée à plusieurs adresses e-mail configurées pour ne

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CoMpte pop —


adam guerbuez À FoRCE dE BALANCER dES « PENIS ENLARGEMENT » À GoGo, AdAM GUERBUEz S'EST FAIT CoNdAMNER PAR FACEBoook À UNE AMENdE RECoRd : 873 MILLIoNS dE doLLARS. LE CANAdIEN, AUx VRAIS AIRS dE kIT doTCoM, N'A PoURTANT RIEN PERdU dE SA SUPERBE…

envoyer des MessAges "CoMMerCiAux" est-il seuleMent un business ? Je suis avant tout un entrepreneur. Cela étant, j'ai toujours passé beaucoup de temps à déjouer les normes de sécurité sur des sites et réseaux importants, comme Google +. Je donne mes trucs et astuces aux internautes, notamment sur Twitter (15 000 followers). Ce n'est pas seulement pour raconter mes "exploits": cela rend aussi service car je mets le doigt sur de nombreuses défaillances.

vous Attendiez-vous à l' « AffAire » fACebook ? Pas vraiment. Au printemps 2008, alors que je profitais d'un après-midi ensoleillé à Montréal, j'ai reçu la plainte de Facebook, sans me douter que le montant de l'amende serait de 873 000 000 dollars : c'est la plus grosse amende pour une affaire de spam, elle est même entrée dans le Guinness Book ! Aujourd'hui, je suis ruiné et la prochaine comparution est prévue en 2014 : je vais devoir affronter à nouveau les avocats de Facebook avant, j'espère, que cela se termine. La plupart des gens pensent que l'affaire s'est achevée en 2010, lorsque la Cour Suprême du Québec a confirmé la condamnation du tribunal californien. Mais ce n'est pas vrai.

quel est votre "job" Aujourd'hui ? À vrai dire, j'en ai plusieurs, mais disons que je travaille dans le marketing viral, à la disposition des sites ou des sociétés qui ont des produits à vendre. L'affaire Facebook m'a fait beaucoup de pub : elle a entraîné une exposition médiatique assez incroyable, au niveau mondial, ce qui m'a apporté de nombreuses sollicitations. À part ça, je développe aussi un site spécialisé dans les vidéos issues des "boîtes noires", installées dans les voitures (dashcamdiaries.com). Sur l'une d'elle (2 millions de vue sur Youtube), on me voit avec des policiers essayant de me verbaliser : dès que je leur laisse entendre que la scène est filmée, ils font marche arrière…

qu'est-Ce qu'ils vous reproChent ? d'avoir spammé, massivement, le réseau, même si je n'ai jamais confirmé leurs allégations. J'ai toujours travaillé dans le domaine du web, mais mes activités sont parfois mal comprises. Pour faire simple, mon métier consiste à promouvoir de nombreux produits et services sur Internet, afin de drainer du trafic, en employant notamment des tactiques commerciales agressives.

j'Ai entendu pArler d'un livre ou d'un filM en projet ? J'ai reçu de nombreux projets, mais je n'ai pas encore trouvé la bonne personne pour le faire. Et pourtant, j'ai mené une vie extravagante, avec plein de rebondissements, ce qui ferait un très bon scénario. Si en plus, le récit de mon expérience peut servir à d'autres, j'en serais vraiment très heureux…

recevoir que du courrier non désiré, sa Spamtrap les imprime et les détruit physiquement en petits confettis. Tous ces artistes ont été réunis dans plusieurs expositions thématiques, dont la fréquence reste pourtant aussi épisodique que l'épizootie promise. En 2008, par exemple, Economy of desire, organisée en marge du Sonar festival, à Barcelone, regroupe une large sélection d'œuvres d'art, entièrement composées de messages indésirables. Si l'exposition commence à dater, rien ne laisse présager, pour autant, à une baisse de régime culturel : selon Alessandro Ludovico, rédacteur en chef italien du magazine Neural, à lire sous aspirine, le spam est un nouveau langage, basé sur le désir (avoir sa Rolex) et la frustration (avoir 50 ans), à l'image de la société de consommation. Dans ce

contexte, les artistes n'ont plus qu'à la dénoncer, ou s'en moquer. Chez Elliott Burford, on dit oui, comme Andy : « Ce flux de promesses est quand même assez fascinant, comme si l'ère numérique nous donnait la chance d'atteindre le point G, de gagner 25 % sur une montre et de devenir millionnaire en même temps ». Le spam art aurait donc bon fond. Avec l'image, la couleur et une permission de sortie hors des écrans, certains artistes ont contribué à y mettre les formes pour lui donner une nouvelle allure, résolument pop. Repéré par Charles Saatchi et exposé dans sa célèbre galerie londonienne, James Howard réalise par exemple des collages de visuels, collectés dans les mails, en se mettant dans les conditions d'un spammeur : entre photoshop

douteux, à la charpie et très mauvais goût. Le résultat offre pourtant une série d'images étonnantes, sublimant des petits trésors qu'on n'aurait jamais dû effacer. Également basée à Londres, l'illustratrice écossaise Linzie Hunter s'est fait connaître par la transposition de spams dans un univers très coloré, faussement naïf et entièrement manuscrit. « L'idée m'est venu en travaillant sur la typographie et le lettrage à la main. Les spams constituaient un bon point de départ, car j'avais plein de texte à disposition et les contenus m'ont toujours amusée, avec leurs phrases étranges, mal écrites et leurs objets racoleurs ». Dès 2007, elle réalise ainsi une série d'illustrations dans lesquelles le lexique, assez rugueux, tranche radicalement avec un enrobage multicolore et pastel, comme si ses dessins sortaient d'une confiserie, où même les enfants pourraient lire : « For fun seekers only », « Best possible alternative to dangerous suggery », « There is no big reason for to be a small-size loser ». Éditées par Chronicle Books, les images typographiques de son Spam project s'offrent alors un petit tour du web et imposent une patte, désormais très demandée (Orange, The Guardian, Marks & Spencer, etc.). Comme quoi, le spam n'est pas toujours faux : il peut rapporter grand et gros.

« From now on your small breasts need not be the cause of your embarrassment ». L'un des spams préférés de Linzie Hunter. www.linziehunter.co.uk

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cahi e r m ode

moon Photo : Morgan Roudaut I DA : Baptiste Viry Styliste : Alix Devallois Make-up : Mathilde Passeri Coiffure : Yann Damour Fleury Models : Toma Texte : Jérémie Martinez

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Le sac à dos ou backpack est un concept datant de la fin du 19e siècle. Même si l'on prête de tout temps à l'homme une volonté farouche de transporter des choses avec lui, il a fallu attendre un peu avant qu'il ait cette petite idée derrière la tête, là, juste sous la nuque. Cette histoire généreusement comptée par les nombreuses marques présentes sur le marché du backpack emprunte souvent les mêmes sentiers battus d'un passé savoureusement aventureux…

faire quelque ve partagé de ec une pasrê un et é, et nt et brev ois amis av design innova Seattle, Washington… Tr un monde meilleur]. un , is am s our mour. ence avec de ur sac à dos [p expérience, 67. L'été de l'a «Tout comm C'était en 19 ulaient construire un meille de plan d'affaires, aucune t. en ér ff di ure vo chose de nt, pas ent pas d'arge te pour l'avent ting. Son sion débordan de vrais emplois. Ils n'avai s. e et du marke te amie nt ve s ue la iq pa t de un en s gé char n, peti Ils n'avai ois talent arismatique, [Et enfin], Ja de nommer originale et tr au-parleur ch et au brevet. et e be r juste une idée ic ie tr un ar va ], m rd no se bo l [d'a is à Jan de la conception om à Il l'a fait. Et pr y, a it. ra Passer Yowel y fa ur ra l'a M tissu. Mur ype. Elle le te], Lewis ot r ui ot lle ns pr ai r [e ie av in tr em us et pr co idait à créer le i savait coudre de Murray qu son doux prénom si elle l'a r l'entreprise pa ». 01 JanSport est né

BACK PACK, ÇA, C'EST PASSÉ Avant de faire l'amour avec votre sac Jansport, petit retour en arrière, back dans les packs… À la fin du 19e siècle donc, ras la casquette des outres, musettes et autres sacoches, voici venu le temps du sac à dos. Littéralement, un espace de stockage que l'on transporte sur son dos et qui fait reposer le poids du matériel qu'il contient sur les épaules, par l'intermédiaire de bretelles rembourrées et ajustables. Si l'usage du terme français est difficile à dater, son équivalent anglais aurait été inventé aux Etats-Unis en 1910. On lui préférait en Angleterre le terme de Rucksack venant de l'allemand der Rücken le dos. Toutes les marques actuelles se félicitent d'un passé glorieux tourné vigoureusement vers l'aventure. En France, la palme revient au couple Millet qui, les premiers, vont diffuser le concept de sac à dos. Travaillant dans la toile à Lyon, ils développent leur premier sac à dos à armature en 1934 avant que leurs enfants ne s'engagent dans la résistance en filant des sacs à dos pour lutter contre les ennemis… Puis l'un des deux frères 02, René, membre du club alpin français d'Annecy, a l'idée de créer des sacs à dos spécialement adaptés à la pratique de la montagne. Et lorsque Louis Lachenal et Maurice Herzog gravissent pour la première fois un sommet de plus de huit mille mètres d'altitude, l'Annapurna (8 091m), c'est avec des sacs Millet. Les autres marques suivent sensiblement les mêmes chemins pentus. Lafuma, auquel appartient aujourd'hui la marque Millet, se targue ainsi d'avoir inventé en 1936 le sac à dos à armatures métalliques dans leur atelier d'Anneyron, dans la Drôme, où se situe toujours le siège social. Cette innovation accompagnera la même année la première expédition française en Himalaya (Karakorum, Pakistan), puis en 1948 le mythique Paul-Émile Victor au Groënland. De l'autre côté de l'Atlantique, les origines oscillent entre vocation militaire et piscicole (Eastpack créé en 1960), simple amour de la randonnée (Northface créé en 1966 sur les plages de San Francisco) ou amour tout court, comme en témoigne la délicieuse histoire de JanSport. Évidemment véridique, elle renvoie invariablement au mouvement de la beat generation, et son auteur étendard Kerouac en tête. Tout ça tient la route. La référence au passé permet de raccrocher l'image de marque à une époque révo-


lue où tout était encore possible. Elle est aussi l'occasion de rappeler la maîtrise d'un désormais célèbre « savoir-faire », présent aux racines de la marque, lorsque l'on prenait encore le temps de faire les choses consciencieusement. Et même si vous n'en aviez jamais entendu parler, l'avènement de la marque Duluth, outre-atlantique, en est la parfaite illustration jusqu'au-boutiste. Le Duluth Pack 03 emprunte son nom à la ville de Duluth dans le Minnesota, où il a été inventé en 1870 par Camille Poirier, un franco-canadien fraîchement débarqué. À son arrivée, Camille ouvrit sur le front de mer une tannerie, un atelier-boutique et créa le « poirier pack sack ». Ce fut une véritable révolution dans le domaine de la bagagerie étant donné les renforts en cuir et en métal qui furent ajoutés au niveau du bas du dos. Breveté par M. Poirier en 1882, l'original Duluth Pack #3, optimisé pour les traversées en canoë, n'a quasiment pas changé depuis l'origine. On loue aujourd'hui dans le monde entier « sa capacité à capturer des histoires et évoquer des souvenirs ». Sa forme emblématique et son attachement territorial en font une valeur sûre. Surfant sur le succès du non moins célèbre « made in » (USA dans ce cas), les sacs Duluth font du bruit, jusqu'à atteindre 100 000 $ pour les véritables sacs d'origine sur les sites d'enchères. Plein le dos des retours en arrière, soyons rassurés, de jeunes marques peuvent encore émerger, en s'appuyant sur le culte du… passé. Créée en 2009, Herschel, ou Herschel Supply Co. 04 se targue ainsi de commencer son histoire au début du 20e siècle, en Écosse, lorsque Peter Alexander Cormack et sa femme préparent leurs affaires pour partir au Canada dans la petite ville d'Herschel, qui compte alors 30 habitants. La forme du sac d'origine développée par les arrière-petits- enfants Cormack est même largement inspirée des sacs à dos du début du siècle. Mais, dans le cas de cette jeune marque, point de revendication du « made in » (puisqu'ils sont fabriqués en Chine), ni d'un savoir-faire particulier. Les clés de la réussite : un design simple, original (la doublure en motif Peisley), décliné à l'infini, des collaborations artistiques, quelques co-branding et autres collections capsules. Et la marque explose chez les jeunes adultes. Les ventes ont ainsi augmenté de 900% entre 2010 et 2011 puis de 350 % en 2012 pour atteindre encore cette année près de 60% d'augmentation. Une bien belle aventure qui s'appuie là encore sur l'imagerie passéiste où le jeune passe son temps à chasser, pêcher et escalader des montagnes afin de découvrir en toute liberté de nouveaux territoires inconnus. Mais pour Vincent Grégoire du très suivi cabinet de tendance Nelly Rodi, ce phénomène nostalgique va se terminer. Il s'exclamait en janvier 2012 dans le Magazine M - Le Monde à propos des acteurs de la mode en général et du luxe en particulier : « Il faut qu'on arrête avec ces références à la tradition, à l'héritage, aux icônes éculées, au fait main ancestral ! S'ils continuent à rester à distance du monde réel, ils vont tous crever ! » C'est ce qui s'appelle vider son sac.

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jupe CoTÉLAC X BRECHT EVEnS  manteau LACoSTE # lunettes LoTHo # boots SARToRE




top # TARA JARmon # pantalon ZUCCA


caban H&m « Autumn Collection » # chemise BonHEUR # pantalon CoTÉLAC # boots APC   sweatshirt DRomE # lunettes VInTAGE




veste FILLES À PAPA # pantalon FILLES À PAPA # derbies DoC mARTEnS   longue veste monKI # pullover ToPSHoP # pantalon LACoSTE


poncho BAPTISTE VIRY # chemise BImBA&LoLA # robe AmERICAn APPAREL # boots APC




CEnTRE DE DoCUmEnTATIon ET D’InFoRmATIon rédigé par maxime gueugneau & co

cdi

n.m. (abricari). Lieu protecteur des intempéries ou du danger, où l'on peut se mettre à couvert. Ex : « Les gars, avec la ligne de béton que je vous ai foutue, on est à l'abri pour un moment » - André Maginot. Se dit aussi d'un endroit au sec où l'art s'émancipe.

Fig. 1 : Le Cabanon _

Fig. 2 : auréLien Débat _

[ m u s i q u e ] . Il n'y a pas de beauté exquise sans une certaine étrangeté dans les proportions, nous enseigne Poe. La musique n'est-elle pas, à ce titre, la plus ravissante des femmes ? Évocatrice de mille fantasmes, celle-ci ne nous surprend – et ne nous trouble donc – que lorsqu'elle nous emmène dans ces prairies lointaines où nul homme n'a posé le pied. Et en 2013, c'est à cet endroit-là que nous pouvons croiser un petit abri de fortune où se regroupent quelques hominidés à la recherche de cet esthétisme nouveau. Le Cabanon, collectif d'artistes, a en effet choisi de s'écarter au maximum des basses influences de notre temps, de celles qui pervertissent même les esprits les plus féconds. Ainsi, nous ne retrouvons leur musique que lorsque nous nous sommes, nous, complètement perdus. C'est en cela que les membres du crew sont précieux. La première sortie de ce qui est désormais un label, le prouve à tous les points. La merveille de construction sonore qu'est le Archtiect Method EP du bordelais Bruma emmène effectivement l'auditeur là où il ne pensait pas pouvoir aller. À de délicates mélodies s'impose une rythmique singulière, syncopée, qui ne nous laisse que peu de repères et nous égare tout à fait quand elle se mêle aux erreurs provoquées de la machine. Et avec le même élan qu'en 1969, nous pouvons nous écrier avec joie : l'homme a marché dans Le Cabanon.

[ e x p o s i t i o n ] . En sus d'illustration, Aurélien Débat s'occupe d'urbanisme. Mais d'urbanisme au sens artistique du terme, et cela change tout. À l'aide de tampons (pour Tamponville), de modules en bois (pour Plan de Bataille) ou de simples crayons de couleurs, Aurélien Débat recrée villes imaginaires et fantasques architectures dans le but unique d'inventer son propre monde. Une géographie chimérique du quotidien que nous n'avions pas manqué d'apprécier (cf. Kiblind n°43) et que la formidable galerie My.Monkey de Nancy convoque pour les mois de septembre et octobre. Car oui, n'en déplaise à Booba, les Meurthe-et-Mosellans savent depuis longtemps apprécier le goût de la vie, surtout lorsqu'elle sort de l'esprit génial des graphistes et illustrateurs de notre temps. Il était donc tout naturel qu'Aurélien Débat y présente ses travaux réalisés à Marseille, dans le cadre de ses résidences au Studio Fotokino et pour la galerie La Crémerie : Plan de Bataille et Tamponville. Des œuvres multiples auxquelles s'ajoutera le ludisme d'un atelier-tampons où chacun s'ingéniera à créer le paysage urbain de ses plus perfides pensées. De la créativité, de la fantaisie et de l'inconnu forment la trinité sacrée du travail d'Aurélien Débat, précieux entre tous.

• Bruma, Architect Method EP, sorti le 14.09. Retrouvez   le stand Le Cabanon lors de la In Paradisum Garden Party   sur la Terrasse du Trabendo à Paris, le 29.09.  www.lecabanonrecords.com

• Mon singe habite un pavillon de banlieue, une exposition  d'Aurélien Débat, du 26.09 au 25.10 à la galerie My.Monkey   à Nancy. À cette occasion, la galerie publiera son Mmagazine  spécial Aurélien Débat.  www.mymonkey.fr ; www.aureliendebat.fr

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Fig. 3 : Le SaLon De L'araignée _

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[ p r i n t ] . L'Homme dessine depuis longtemps déjà. Disons, au moins cent ans. C'est ce que suggèrent en effet l'éditeur Michel Lagarde, la graphiste Géraldine Méo et l'auteur Emmanuel Pollaud-Dulian dans l'ouvrage et l'exposition Le Salon de l'Araignée et les aventuriers du livre illustré, le tout prévu pour la fin octobre. Ces trois bibliophiles, passionnés de tout temps par l'illustration de l'entre deux guerres, ont pris leur courage à deux mains et entamé depuis plus de deux ans maintenant la réalisation de la bible sus-citée. Une somme où ne brille que l'amour immodéré du dessin, concentré sur l'un des collectifs les plus ingénieux et les plus méconnus qui soit : L'Araignée. Mené par Gus Bofa, entouré de Chas Laborde, Yan Bernard Dyl, Pierre Brissaud, Lucien Laforge, Jean-Émile Laboureur

ou l'écrivain Pierre Mac Orlan, le collectif ne se fêtait qu'une fois l'an, lors du Salon de l'Araignée, entre 1919 et 1930. À contre-courant des salons fastueux de l'époque, le Salon de l'Araignée ne décerne ni prix, ni récompense et n'œuvre qu'à la présentation d'artistes qui ont en commun le plaisir de dessiner et le goût de l'aventure créative. Ceux-là qui ont influencé Tardi, Morris ou Hergé, inventé pour certains la fameuse ligne claire ou le reportage graphique, ont apposé une marque indélébile dans l'histoire de l'illustration. À l'heure où elle se porte si bien, il est bon de jeter un œil dans le rétroviseur pour voir d'où l'on vient. Parce que, quoiqu'on en dise, les premiers resteront les premiers. • Le Salon de l'Araignée et les aventuriers du livre illustré,  d'Emmanuel Pollaud-Dulian, Éditions Michel Lagarde, 224  pages, 26 euros, sortie le 22.10. Exposition à la Galerie   Michel Lagarde, à Paris, du 24.10 au 20.12.  www.michellagarde.fr

n.f. (βιβλιοθήκη). Meuble ou endroit où sont conservés les livres ; collection organisée de livres. Ex : « Note bien que j'ai toujours adoré les bibliothèques, mais pas chez moi » - Véronique Genest. Se dit aussi d'une liste d'ouvrages à consulter absolument.

DRÔLE DE MAGAZINE POUR ENFANTS

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L'amour du beau touche aussi l'Angleterre et notamment les Londoniens Chris Harrison et Polly Glass, glorieux éditeurs du magnifique Wrap Magazine, dont le numéro 8 bat des records d'épaisseur. Un numéro qui accueille notamment les illustrateur Olimpia Zagnoli, Martin Nicolausosson, David Doran, Natasha Durley et d'autres autour du thème « New Horizons ». Couleurs, 104 pages, 10,50 livres. www. wrapmagazine.com

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Les Poitevins de The Hoochie Coochie ne sont jamais à court d'idées. Leur dernier fait d'arme ? Un livre-enquête de Renaud Farace, Détective Rollmops, admirablement illustré par ce bon vieil Olivier Philipponneau, qui abrite 9 énigmes pour les petits et pour les grands. Couleurs, 28 pages, Éditions The Hoochie Coochie, 17 euros.

Initiée par l'illustrateur Jérémie Fischer et l'écrivain Jean-Baptiste Labrune, la revue Pan s'attaque à l'indéfectible lien qui unit le texte à l'image. Le premier numéro, édité par les Éditions Magnani, a reçu les contributions de Marine Rivoal, Yann Kebbi, Jean-François Sené, Jessica Galzin, Fabienne Wagenaar ou encore Clément Vuillier. Couleurs et N & B, 96 pages, Éditions Magnani, 15 euros. jeremiefischer.com/ Revue-PAN

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On sait Michel Lagarde friand des revues. Il avait d'ailleurs lancé la sienne, Studio 002, dans les années 2000. Le monde l'attendait, voici le fameux n°6, qui relance la glorieuse série stoppée en 2007 avec le n°5. L'illustration est, bien évidemment, mise à l'honneur, avec Marion Fayolle, McBess, Jean Jullien, Alexis Taïeb, Ugo Gattoni, etc. Couleurs, 72 pages, Éditions Michel Lagarde, Gratuit. www.michellagarde.fr

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Le magazine Georges est sans nul doute la plus belle chose qui soit arrivée à la presse jeunesse depuis bien longtemps. De plus, en 2013, il devient encore plus grand et encore plus beau. Pour preuve ce numéro Dino avec la participation de Cruschiform, Fabrice Houdry, Matthias Malingrëy, Cachetejack, Stéphanie Lasne, etc. Lancements à Artazar le 19.09 et à Sergeant Paper, le 21.09, à Paris. Couleurs, 60 pages, Éditions Grains de Sel, 6 euros.

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Les éditions Cambourakis ont fait le fou et le juste choix d'acheter les droits du chef d'œuvre de Mark Beyer, Amy & Jordan, datant de 1990 et sorti en 2004. Bientôt disponible en France et en français, ce bijou d'absurde et d'humour noir se consomme avec délectation. Noir & Blanc, 304 pages, Éditions Cambourakis, 24 euros. www.cambourakis.com


n.m. (witan). Banderole courte qui sert à faire des signaux ; barre d'acier creux qui sert à diriger certains véhicules. Ex : « Les bidons veulent le guidon, laissez les donc, qu'ils se cassent les dents » - Ill des X-Men. Se dit aussi de ces collectifs ou festivals qui fixent la trajectoire à suivre.

Fig. 1 : Maintenant _

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[ f e s t i v a l ] . Rien ne se créé, tout se transforme, nous a-t-on dit en haut lieu. Quoi de plus vrai quand nous regardons l'activité culturelle rennaise du mois d'octobre. L'éminente association Electroni-k a en effet choisi de lancer le festival Maintenant, en lieu et place de Cultures Electroni[k]. Mais qu'on ne se méprenne pas – et c'est là que l'adage se vérifie – la toute nouvelle manifestation ne trahit pas les idéaux de la précédente : elle les émancipe. Naguère centrée sur la musique électronique et les arts numériques, Electroni-k a choisi de ne plus s'embarrasser des termes et de s'intéresser à la création son et image actuelle dans sa globalité. D'où le terme Maintenant qui pose comme une claque les ambitions du nouveau festival. Et, qu'on se le dise, on est mieux aujourd'hui qu'ailleurs. C'est en tout cas la réflexion de comptoir que l'on peut se faire à la vue du programme concocté par l'association Electroni-k. Des graphistes Vincent Broquaire et Hell'O Monsters à l'éminent artiste Zimoun en passant par les créations du Studio G&M et les performances de Nicolas Bernier, Lesley Flaniguan ou encore Thomas Rutgers & Jitske Blom, la création plastique et sensorielle aura de quoi rendre fière ses contemporains. La musique, elle aussi, pourra pavoiser, représentée qu'elle sera par Delta Funktionen, FunkinEven, Actress ou John Heckle, et sans oublier la Nuit Américaine dédiée à la nouvelle génération de compositeurs classiques au rang desquels nous compterons l'étonnant Jeff Mills, Mason Bates et Nico Muly. Quelqu'un a dit aussi « c'était mieux avant ». On s'inscrit en faux. • Maintenant, du 15 au 20.10 à Rennes.  www.electroni-k.org

Fig. 2 : Sonotown _ [ m u s i q u e ] . On entend certains dire que Paris est une belle endormie. Tant pis pour ces ignorants : n'ayant pas le goût de l'aventure, ils ne risquent pas d'en vivre. Car loin d'être avachie, bavant sur l'oreiller, la capitale s'offre ces temps-ci une petite cure d'insomnie grâce à une nouvelle et très belle génération d'organisateurs de soirées. Parmi eux, il en est un qui sait allier la quantité et la qualité. Une disposition rare que le crew Sonotown a mis au service des nuits de Paris et des nôtres. Responsables des soirées estampillées Sntwn, Release The Groove, Rooms et 75021, les tauliers de Sonotown ne chôment pas à l'heure d'enflammer les pistes de danse. Trempés dans une érudition musicale de haut niveau – qu'ils partagent sur le site sonotown.fr – , ils en profitent pour faire nos nuits plus belles que nos jours. Aux incrédules nous répondrons par les faits en dévoilant quelques-uns des grands noms prévus pour la rentrée. Ainsi, le 28.09, Sntwn invite le

label Delsin (Conforce, R.A.G., Delta Funktionen…) à envahir la Machine du Moulin Rouge ; sous la bannière Rooms, c'est Moderat et Anstam qui joueront au Trianon le 20.10 ; Sntwn, en cheville avec Bastion, présentera Move D et Magic Mountain High à la Machine ; le 22.11, une Release The Groove spéciale 50Weapons (Bambounou, Robert Hood, Benjamin Damage…) se profile à la Machine ; Sntwn fera place nette au label Sheworks (Karenn, The Analogue Cops, Pangaea, Sigha) à La Machine, le 29.11, etc. Si avec ça certains pensent encore à dormir, c'est qu'on ne peut plus faire grand chose. • Autres soirées prévues : Sntwn & Release The Groove  présentent Bicep le 15.11 au Batofar ; Sntwn & Refraktion  présentent Tropic of Cancer et DVA Damas le 8.10   à la Chaufferie du Moulin Rouge.  facebook.com/sonotown.sntwn ; www.sonotown.fr

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n.p. + adj + n.m. + n.m. (Lausanna + under/ground + filmen + festivus). Festival lausannois dédié à la musique inouïe et au cinéma inédit. Ex : « Le monde devrait être beau comme un LUFF ». - John Waters. Se dit aussi d'une expérience culturelle automnale de haut vol.

Fig. 1 : LuFF _

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[ f e s t i v a l ] . La ville de Lausanne poursuit sans anicroche sa route tout au long de l'année. Fière de sa réussite et sagement posée sur le bord du Lac Léman, celle-ci a fait de la cordialité et du savoir-vivre les maîtres mots de sa croisière pluriséculaire. Sur ce chemin pavé de bonne portance, son corps social se ramollit et son esprit se ferme aux nouveaux paysages. Et BOUM, ce qui ne devait pas arriver arriva : le métallique et psychique accident. Cet accident, plein de bruit et de fureur, se répète tous les ans, en octobre. Les gens d'ici lui ont donné un nom : le LUFF. La première escarmouche eut lieu il y a douze ans. Les Lausannois ont d'abord pensé à une erreur, un flottement dans la gouvernance qui les aurait fait momentanément sortir de piste. Et puis, chaque année, le choc prit de l'ampleur, causant toujours plus de bouleversements dans les cerveaux vaudois. À croire que ceux-ci en avaient besoin puisque de fracassement douloureux, l'électrochoc du LUFF s'est peu à peu transformé en bulle d'air intellectuelle et a même pris pour certains des atours salvateurs. Des gens de Lausanne, de Suisse et même de France attendent, comme le messie, sa douzième apparition. Nous en sommes, assurément. Les raisons en sont toutes simples : le LUFF possède une programmation inédite, inouïe et divinement appréciable. Cette 12e édition ne fait certes pas exception, en déroulant une ronde d'œuvres et d'artistes aussi brillante qu'inattendue, aussi étrange qu'indispensable. À la pesante autoroute automnale, le LUFF propose en effet deux voies parallèles aux paysages rares. L'une d'elles est consacrée au cinéma indépendant, pilier fondateur du festival suisse. 2013 ne fera pas mentir la légendaire fibre cinéphile du LUFF avec quelques moments d'exception dont la présentation en avant-première de l'inachevé Bad Film (1995) de Sion Sono, un retour sur la carrière de Katsu Kanai par lui-même, une présentation de quelques pépites de Walerian Borowicz par Daniel Bird, une Carte Blanche à l'acteur et cinéphile leader des Dead Kennedys Jello Biafra ou encore la filmographie complète de F.J. Ossang, poète, cinéaste et punk, par lui-même. L'autre canal est bien sûr celui de la musique, auquel le LUFF donne une note bruitiste pour fêter le centenaire du manifeste de Luigi Russolo « L'Art des Bruits », acte libérateur de la musique moderne. Pour ajouter le son à l'hommage, voici, parmi les grands moments attendus, ceux qui nous font frémir d'impatience : le retour de Smegma sur leurs 40 années d'expérimentations noise, la venue des hypnotiques Anglais d'Haxan Cloak, le pilier du label Subtext, Emptyset, la démonstration danse de Shangaan Electro, le ciné-concert de Vincent Epplay et Samon Takahashi ou encore la performance totale de Leif Elggren. Décidément, le LUFF fait partie de ces accidents qu'on rêve d'avoir. • Le LUFF, du 16 au 20.10 à Lausanne.  www.luff.ch

JULIEn BoDIVIT DIRECTEUR ARTISTIqUE POUVeZ-VOUS, eN qUeLqUeS MOTS, NOUS PRÉSeNTeR Le FeSTIVAL ? Le LUFF est une plateforme de rencontres et de découvertes de cinéastes et de musiciens évoluant dans les marges. La Suisse est très riche en matière de festivals, et si nous avons toujours été friands de ce que certains ont à proposer, nous sentions malgré tout un manque. Il manquait quelque chose de plus radical, plus extrême. C’est pour combler ce manque que nous avons créé le LUFF et ainsi permettre à tous de pouvoir découvrir des artistes que les médias ignorent purement et simplement. C’était un pari un peu fou, mais certains ont décidé de nous donner notre chance, comme la Cinémathèque suisse qui nous accueille depuis le début. De qUOI êTeS-VOUS Le PLUS FIeR DANS Le PROJeT DU LUFF ? D’être encore là ! Il faut savoir que le LUFF est une structure majoritairement bénévole – je le suis moi-même depuis plus de douze ans – et qui n’a jamais fait de concession en terme de choix artistiques. C’est aussi une activité chronophage. Il n’a pas été rare de douter au fil de ces années durant lesquelles nous avons évolué, d’un point de vue professionnel, mais aussi familial. Mais le fait de permettre à des artistes cloisonnés de bénéficier d’une visibilité comme celle qu’offre le LUFF, tout en permettant à des spectateurs avides de découvertes de se rassasier, est notre moteur principal, car ils nous en sont généralement reconnaissants. C’est à ce moment-là que les doutes s’envolent ! qUeLS SONT LeS IMMANqUABLeS CeTTe ANNÉe ? Sans aucun doute Katsu Kanai, un réalisateur japonais totalement méconnu dont l’œuvre se situe quelque part entre les cinémas de Wakamatsu et Terayama. Ses films réalisés entre 1968 et 1973 sont de véritables chefs-d’œuvre surréalistes. Je l’ai découvert il y a 18 mois. Il était évident qu’il fallait lui donner un coup de projecteur. Katsu luimême sera présent à Lausanne. Nous invitons également l’immense Jello Biafra (chanteur des Dead Kennedys) à qui nous avons offert une carte blanche cinéma, car Jello est un grand cinéphile, et sa sélection est excellente ! Il nous gratifiera également d’une performance live avec Le Dernier Cri.


n.f. (luminaria). Ce qui sert à éclairer. Ex : « Quel est le crétin qui a éteint les lumières ? » - Denis Diderot. Se dit aussi de salons de l'édition astraux et de Dieux, petit ou grand.

Fig. 1 : SaLon Light #10 _

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[ e x p o s i t i o n ] . Il n'est inconnu à personne l'amour que porte le CNEAI pour l'édition. Sans trop s'avancer, on peut même dire qu'il s'agit là de l'une de ses principales lubies. Alors quand vient l'heure de son Salon Light, le CNEAI se sent tout chose. Et comme cette année couronne dix ans de célébration des micro-éditeurs, l'émulation est à son comble. Et du côté des visiteurs, nous avons en effet de quoi frémir devant la nocturne que nous promet le CNEAI. Car oui, pour ses 10 ans, le centre de Chatou a choisi de s'associer à la Nuit Blanche francilienne pour proposer une nocturne du plus bel effet. Nuit étoilée, sans nul doute, au cours de laquelle performances et lectures

s'enchaîneront dans une ambiance de douce folie que seule l'obscurité permet. Au détour du complexe des Yvelines nous pourront ainsi croiser d'aussi tendres éditeurs et revues que E Il Topo, Lendroit Éditions, Nazi Knife, The Shelf, Shelter Press, Volume, art&fiction, Club Donny et bien d'autres. Et si vous n'avez pas la possibilité de vous bouger vers Paris, un live tweet sera mis en place pour suivre le salon via les journalistes, éditeurs et auteurs présents via le compte du CNEAI. Alors, prêts pour une insomniaque nuit d'amour ? • Salon Light #10, le 5.10 de 19h à 7h   au CNEAI à Chatou (78)  www.cneai.com

Fig. 2 : in goD we truSt _ [ p r i n t ] . Cinq ans après l’immense Pinocchio, récompensé par la plus haute distinction à Angoulême et considéré pour nombre de bédéphiles comme le meilleur livre de la décennie 00, Winshluss revisite le best-seller de l’histoire de la littérature. In God We Trust peut en effet apparaître comme une réinterprétation de La Bible, avec quand même un truc en plus : « Adam et Eve vivaient heureux dans le Jardin d’Eden. Ils ne connaissaient ni le péché ni la faim ; c’était un endroit climatisé ou il faisait bon jouer au badminton… » Tout est dit, dès le commencement. Si Dante avait Virgile et Beatrix pour l’éclairer, le lecteur sera guidé par Saint-Franky dans ce dédale de parodies particulièrement mordantes des épisodes-phares de l’Ancien et du Nouveau Testament. Sorte de « Bible pour les

nuls » avec une tonalité beaucoup plus acerbe, In God We Trust est aussi – et surtout – une nouvelle démonstration de la facilité déconcertante dont dispose Winshluss pour s’attaquer à n’importe quel sujet et en variant sans cesse les styles graphiques : planches classiques, gravures, comics, aquarelles, ou à la manière des pubs des années 50, etc., chaque histoire est toujours dessinée dans un mode parfaitement adapté au récit. Et c’est sans aucun doute cette agilité visuelle qui fait que son auteur peut tout dire, et sur n’importe quoi ; être grossier mais jamais vulgaire. Jean Tourette • Winshluss, In God We Trust, Les Requins  Marteaux, 104 pages, 21 x 26 cm, 25 euros  Sortie prevue à la mi-novembre   www.lesrequinsmarteaux.org

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Fig. 3 : D.M.t. _ [ m u s i q u e ] . Bon ou remue ménage, drogues et musiques électroniques l'ont toujours fait. Dans l'inconscient collectif comme dans celui de Philippe Petit, jeune retraité (nonfunambule mais bien équilibré) du monde sévère de la finance, les psychotropes siéent à la rave et ses adeptes se plaisent parfois à les renier. En dehors de toutes évidences, ce n'est pourtant pas la dyméthyltryptamine – substance hallucinogène surathlétique favorisant la communication avec des émanations non-humaines ou l'étrange expérience de la mort imminente – que DMT vient abréger ici. Decision Making Theory, en lieu et place de ces consonnes initiales, est un label de techno non-déraisonnable dont les airs néophytes n'ont

d'autres desseins que d'emballer les foules sur les pistes de danse, leur faire lever les bras jusqu'au plafond et osciller la nuque jusqu'au petit matin. Aguerri par son expérience à la tête de Knotweed, son entreprise originelle, Philippe l'a édifié à l'improviste et hâtivement il y a six mois à peine, dans l'unique intention d'en découdre avec l'abondance de sa productivité et les débordements de son imagination. Les deux morceaux fondateurs de son premier vinyl, aussi bien que les trois autres – dévastateurs – présents sur le second opus, sont autant de tubes qu'il n'en suffirait à un non-initié pour frôler l'overdose. Belge d'origine, aujourd'hui retranché au calme des montagnes de Chamonix, le quadragénaire affairé se plait à transformer les clubs de France et de Navarre en salles de shoot pour mélomanes ébouriffés. Que les plus dépendants d'entre eux ne s'inquiètent pas : DMT003 contiendra quatre titres à la posologie démesurée. Simon Chambon-Andréani • DMT003 : Philippe Petit - Elements EP, sortie le 15.10.  soundcloud.com/decision-making-theory ; soundcloud.com/ petitp

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n.f. (μέγας + tumfes). Très très grande jouissanceré bliquepu qui se fait en certaines occasions extraordinaires. « Samedi soir, c'est la mégateuf » - Patrick Sébastien. Se dit aussi de soirées et événements à ne pas manquer.

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Booty Call Records fait venir la légende de la ghettotech DJ Funk au Nouveau Casino, à Paris, pour un 21.09 qui promet de rester dans les annales. Il sera accompagné de Kaptain Cadillac, Marvy et DJ Kesmo. 10/12 euros. www.nouveaucasino.net

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Le nouveau club de Lyon, Le Sucre, est assailli de bonne dates : le 21.09 Dawn Records rencontre In Paradisum avec Perc, Mondkopf et Renart ; le 22.09, c'est la Me.018 avec Ben Klock et DVS1 ; le 27.09, la Trkpnp. pl invite ce bon vieux Luke Slater et Dadub. www.le-sucre.eu

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L'association WeArt Together s'occupe une nouvelle fois de clôturer la Fiesta des Suds à Marseille pour une boum pleine de promesse avec notamment Booka Shade, 2ManyDj's et plein d'autres artistes du même tonneau. Le 31.10 au Dock des Suds. www.dockdes-suds.org

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Deux belles soirées à venir au Social Club, à Paris, avec le 26.09 un Petit Social gratuit qui accueille Breton pour un DJ Set, et surtout le 1.11, le génial producteur Araabmuzik sera tête d'affiche de la Soirée F*A*L*D pour seulement 13/15 euros. www. parissocialclub.com

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La Petite, bouillonnante association créatrice du festival du même nom a changé son fusil d'épaule mais promet une fin 2013 du feu de Dieu. Automne sera donc émaillé de soirées mêlant musique et arts numériques, investissant des lieux inédits et proposant avec goût des artistes de talent. 1ère le 16.10 au Lieu Commun à Toulouse www.lapetite.fr

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Sonotown fait briller les nuits françaises avec moult projets. Citons-en deux qui nous tiennent à cœur avec la Sntwn & Bastion présentent MM/KM (live) et Magic Moutain High, le 25.10 à La Machine à Paris, et la Sntwn & RTG présentet Bicep, le 16.11 à l'Iboat à Bordeaux. www.sntwn.fr


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n.m. (παν + όραμα). Vue d'ensemble. Ex : « D'ici, j'ai un bon panorama sur le mur de la cuisine » - Julian Assange. Se dit aussi d'événements ou d'artistes qui permettent d'avoir une belle vue.

Fig. 1 : FanzineS ! FeStivaL _

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[ f e s t i v a l ] . Papier Gâché fait partie de ces maisons d'édition qui traitent la bande dessinée et l'illustration avec un respect plus qu'appréciable. Si la qualité de ses sorties (Bastien Contraire, Romina Pelagatti, Kinrisu, Giacomo Nanni, etc.) le démontre déjà amplement, elle possède une arme secrète qui la fait briller plus haut que de nombreuses autres : le Fanzines ! Festival. Ennuyée par la faible reconnaissance de ce qui est le premier jalon de toute entreprise dessinatrice, Papier Gâché a en effet choisi d'édifier un autel en marbre au fanzine. Loin de se poser en curateur élitiste et insensible, le Fanzines ! Festival a la singularité de ne considérer l'objet que par son intention. C'est donc avec une émotion non feinte que la manifestation parisienne accepte toutes les publications qui lui sont proposées, sans censure d'aucune sorte. Plus de 500 publications du monde entier et de tous les styles en forment ainsi l'exposition principale et la raison d'être du festival. Mais comme ces messieurs-dames de Papier Gâché sont également pourvus de goût, ils gardent une petite place à leurs amours esthétiques, avec cette année des expositions des collectifs allemands Spring, Drops et Treasure Fleet. Le fanzine, enfin célébré pour ce qu'il est : un état riche et indépendant de la création actuelle. • Fanzine ! Festival du 3.10 au 3.11 à la médiathèque Marguerite Duras, Paris 20e.   Le salon Fanzines, regroupant moult maisons d'édition de qualité, prendra place   les 19 et 20.10 au même endroit.  fanzines.papiergache.net

Fig. 2 : huerCo S. _ [ m u s i q u e ] . Quoi de plus beau qu'un artiste qui se perd. Pourquoi, en effet, suivre un chemin que l'on aurait tracé à l'avance ou, pire, que l'on aurait tracé pour nous. La véritable force de l'art musical est celle de nous faire voyager, aussi bien dans les limbes de notre esprit que dans quelque paysage fantasmé. Gloire, alors, à celui qui voyage non pour atteindre un but, mais pour l'essence même du transport. Huerco S. aka Brian Leeds est un de ces égarés essentiels, un de ceux qui marchent sans route, sans objectif : loin de tracer sa route, lui préfère dévier. Sur ces terres inconnues, il plante fièrement son drapeau et dit à qui veut l'entendre « ceci est mon royaume ». Son premier acte souverain, l'album Colonial Patterns, sort sur le label de Daniel Lopatin (Oneohtrix Point Never), Software.

Déjà peu suspect, sur ses sorties précédentes (citons No Jack, Apheleia's Theme et Untitled), de vulgarité club ou d'aspiration vénale, Huerco S. réaffirme ici son souci de créativité et d'expérimentation. S'il pioche dans la généalogie techno ce qu'il faut d'émotion et de goût de l'aventure, il dérive

rapidement vers d'autres cimes plus voluptueuses et enfumées. Un alliage qui nous donne un album en forme de jardin chimérique dont les portails magnifiques que sont « Struck With Deer Lungs » et « Angel » emballent délicatement la beauté. À l'intérieur, l'auditeur découvre une errance magnifique entre ambient (« Monks Mound »), hip-hop (« Fortifcation III ») et IDM (« Quivira ») et quelques autres fleurs au parfum subtil (« Plucked From the Ground, Towards the Sun », « Prinzif », etc.). Une divagation en forme d'évasion sur un continent qu'on a bien du mal à quitter. • Huerco S., Colonial Patterns,   sortie le 23.09 chez Software.  soundcloud.com/huerco_s ;   www.softwarelabel.net


n.f. (probabilitas). Ensemble de règles d'après lesquelles on peut calculer la survenue d'événements. Ex : « Il y a de fortes probabilités pour que je sois le prochain président de la république » - Nicolas Dupont-Aignan. Se dit aussi de manifestations qui prédisent l'avenir avec justesse.

Fig. 1 : ChroniqueS DeS MonDeS PoSSibLeS _ [ f e s t i v a l ] . Multivers, fantasmes, rêves, uchronies, enfers, utopies, cauchemars, paradis, chimères… Nombreux sont les termes qui désignent l'altérité du vécu. Il ne faut certes pas s'en étonner, l'homme – et c'est ce qui fait sa force – n'a jamais pu se contenter du réel, buvant du quotidien jusqu'à la lie. Enchaînés dans les trop misérables lois physiques et sociales du monde, les individus ne cessent de s'inventer une autre vie, une autre terre, d'autres possibles. C'est à cette propension humaine, trop humaine, que s'attachent Seconde Nature, la Fondation Vasarely et le Muséum d'Histoire Naturelle à l'occasion du festival Chroniques des Mondes Possibles. Nul doute que l'imagination humaine a de tout temps

été la seule et unique responsable de ces pérégrinations alternatives. Pourtant, il est clair qu'aujourd'hui la technologie nous offre des possibilités uniques de les concrétiser de manière confondante. C'est ce constat que nous offre Chroniques des Mondes Possibles au travers d'une narration artistique qui voit se mêler installations, musiques, expositions, performances et spectacles vivants. Un parcours où chaque œuvre se veut espace d'immersion, où chaque artiste crée un univers à part, où chaque découverte se confond avec l'exploration de terres inconnues. Sur la route, nous croiserons ainsi une création originale de Jeff Mills (Chronicles of possibles worlds), Mondkopf & Trafik (Eclipse), Pierre Bastien & Espen Sommer Eide (Electric Folkways), Martyn, Âme, Étienne Rey (Tropique), Ryoji Ikeda, Véronique Cay (Silenzio), Yann Lheureux (Macadam Instinct), entre bien d'autres. Chroniques des Mondes Possibles, ou le récit de l'imaginaire. • Chroniques des Mondes Possibles, du 10.10 au 10.11   à Aix-en-Provence.  www.secondenature.org

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63 Fig. 2 : Jeune Création 2013 _ neur et serviront des thèmes aussi variés que le corps, la pauvreté, la répétition ou bien le voyage. Au bonheur de l'exposition s'ajoutera en outre pour certains artistes la grandeur des prix, quand le public, lui, pourra constater avec ravissement l'excellence des propos artistiques retenus. Pour illustrer la vigueur de cette jeunesse créative, nous noterons avec joie la présence d'Antoine Desailly (cf. Kiblind n°45), Ana Vaz, Sergio Verastegui, Arnaud Lesage, Julien des Moustiers, Elizaveta Konovalova ou encore Jérémie Delhomme parmi les exposants. En novembre, il sera temps de boire nous aussi de cette bonne eau régénératrice. © Elizaveta Konovalova

[ e x p o s i t i o n ] . La fontaine de jouvence semble être le lieu de villégiature de l'association Jeune Création. Alors qu'en 2013 elle fête rondement ses 60 ans, elle reste l'une des figures de la médiatisation des scènes artistiques émergentes. Jamais prompte à la reculade, Jeune Création réédite pour la 64e fois son Exposition Internationale d'Art Contemporain (les statuts de l'association ne furent signés qu'en 1953), laissant toute place à ceux qui font sa raison d'être : les jeunes. Après une rude mais juste sélection (56 projets choisis sur 3 000 proposés), Jeune Création peut une nouvelle fois se targuer de refléter le panorama des pratiques artistiques actuelles. Photographies, vidéos, dessins et peintures seront encore à l'hon-

• Jeune Création 2013, du 9 au  17.11 au Centquatre à Paris.   www.jeunecreation.org


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n.f. (praesentare). Exhibition, exposition devant les yeux. Ex : « Et ben quoi ? Qu'est-ce qu'elles ont mes représentations ? » - Miley Cyrus. Se dit aussi d'expositions ou de festivals qui aiment montrer de belles choses.

Fig. 1 : the MCbeSS horror PiCture Show _ [ e x p o s i t i o n ] . L'illustrateur McBess marche dans les pas de Churchill et du même ton ne nous promet que du sang, de la sueur et des larmes. Féru des ambiances post-mortem et du délicat parfum de la peur, le dessinateur français (que l'on a pu croiser sur les publicités Deezer, entre autres) affectionne particulièrement l'effroi venu des années 50. Attentive aux penchants de nos illustrateurs contemporains, la galerie L'Attrape-Rêve lui a généreusement offert une semaine de résidence pour assouvir sa passion de l'horreur. The McBess Horror Picture Show est le résultat de cette singulière attirance. On ne peut que s'en réjouir. Réjouissons-nous d'affronter nos peurs les plus coriaces, oui, car McBess est un artiste ô combien aimable. Œuvrant depuis quelques années dans les méandres de l'illustration sérigraphiée ainsi que dans le rock indépendant, ce londonien d'adoption brille par son attirance poussée pour la poésie crade et l'élégance de notre animalité. De son esprit principalement versé dans les filles et le rock, McBess tire

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la mœlle d'œuvres toujours belles, toujours surprenantes et in fine en tout point renversantes. Et c'est sans surprise que son interprétation d'affiches horrifiques des années 50 donne bien plus que du sang, de la sueur ou des larmes. On n'en attendait pas moins. • The McBess Horror Picture Show, exposition de McBess,  jusqu'au 31.10 à la Galerie L'Attrape-Rêve à Paris.   www.mcbess.com ; www.lattrapereve.fr

Fig. 2 : FeStivaL bD De CoLoMierS _

Crédits : © Simon Roussin

[ f e s t i v a l ] . Des festivals de BD, il en est comme de la vie : des hauts, des bas, de la béatitude et du dégoût. Loin de toute tendance sado-masochiste, le festival BD de Colomiers a choisi de prendre le versant voluptueux de l'existence. Et pour voir les choses en beau, la recette des midi-pyrénéens est assez simple : belle affiche, expositions de qualité, rencontres avec des auteurs saillants et invitations de quelques-unes des meilleures maisons d'édition. Tout cela dans la joie et l'allégresse caractéristiques des salons de la meilleure tenue. L'affiche annonçait déjà le positivisme accru de la manifestation columérine, puisque celle-ci a fait appel au grandiose Simon Roussin. Ne pouvait découler de cela qu'une suite de merveilles visuelles que le Festival BD de Colomiers ne manque effectivement pas d'offrir. Avec des expositions de Ruppert et Mulot, de Léon Maret, de Sergio Maret, d'Amélie Marchandot ou encore celle des bien nommées « pépites du festival » (qui rassemble les éditions Nobrow, Magnani et Sarbacane), les chakras seront bien ouverts pour les rencontres et stands traditionnels qui regroupent 150 auteurs et 45 maisons d'édition. À croire que l'adage de Baloo vieillit plutôt bien, 56 ans après : il en faut vraiment peu pour être heureux. • Festival BD de Colomiers, les 15, 16 et 17.11 à Colomiers.  www.bdcolomiers.com


n.m. (θησαυρός). Amas d'or, d'argent, ou d'autres choses précieuses mises en réserve, cachées, enfouies. Ex : « Mon honnêteté est le mieux caché de mes trésors » - Bernard Tapie. Se dit aussi d'auteurs ou d'artistes à découvrir.

Fig. 1 : SoiréeS CurieuSeS _ [ m u s i q u e ] . Un crétin de la pire espèce classait il y a peu la curiosité parmi les 7 péchés capitaux. Quelle absurdité ! Mais surtout, quelle vilenie ! En quoi la pure jouissance de savoir pourrait-elle avoir affaire avec le démon ? L'ignorance, plutôt, fait corps avec le mal. Lucide, le Lieu Unique a choisi de se placer aux côtés de la connaissance et de la découverte, pour faire reculer les légions terribles de l'inculture. Pour cela, il a mis en place un plan de bataille des plus efficaces. Tout au long de la saison, les Soirées Curieuses se placent comme autant de bataillons valeureux face à l'effronterie de la bêtise. À l'aide de tarifs engageants, la Scène Nationale nantaise convient en effet les ligériens atlantiques à venir se repaître des derniers atermoiements de la musique.

Si ces sabbats mélomanes se déroulent toute l'année, trois sont d'ores et déjà annoncés pour le premier trimestre. Et du premier ordre. Un temps des rêves est prévu pour octobre avec la venue des délicats Colleen, AUN et Witxes qui partagent avec l'Allemand Atom™, présent en novembre, un certain goût pour le raffinement électronique. Pour décembre, on prévoit de l'orage avec le rock indépendant du label nantais Kizmiaz qui fêtera alors ses 5 ans. Les esprits sont affutés, il est temps de combattre la bête. • Soirées Curieuses, le 18.10 avec Colleen, AUN   et Witxes, le 13.11 avec Atom™ et Temps X   et le 7.12 avec le label Kizmiaz.  www.lelieuunique.com

Crédits : © Marion Fayolle

cdi

Fig. 2 : La tenDreSSe DeS PierreS _ [ p r i n t ] . Les bandes dessinées et illustrations de Marion Fayolle ont l'habitude de se regarder comme on écoute une douce mélodie : bercé par les illusions de son art, notre esprit voyage dans le sien, au rythme des métaphores tracées par son dessin délicat. Pour La Tendresse des Pierres, à paraître aux éditions Magnani, la donne change quelque peu. Les chants sont devenus lamentations et le son des instruments est un poil plus lugubre. Le fait, sans aucun doute, du thème de l'ouvrage : alors que son père se meurt d'un concert, une fille cherche la tendresse qu'il ne lui a jamais portée. Confrontée à un sujet d'une telle force, Marion Fayolle ne se trouve en rien désemparée. Usant de son sens miraculeux de la symbolique et de son dessin à la technique aussi complexe que raffinée, elle traite avec candeur

et fausse naïveté la tragédie qui frappe sa famille. Si la mélopée picturale se fait plus sombre que jadis, il n'en reste pas moins une poésie et une émotion qui frisent l'onirisme. Le lecteur, spectateur d'un drame inconcevable, s'en trouve le témoin du rêve éveillé d'une fille qui comprend peu à peu que l'issue est inéluctable. Le cheminement sentimental de celle-ci est rendu avec une force splendide, ne masquant la réalité que pour la décrire avec plus de justesse, plus d'authenticité. • Marion Fayolle, La Tendresse des Pierres, à paraître le 22.10   aux Éditions Magnani, 144 p., couleur,  25,90 euros.  marionfayolle.canalblog.com ;   editions-magnani.com

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n.f. (usus). Établissement pourvu de machines où l'on travaille des matières premières pour en tirer certains produits. Ex : « François Fillon ? Une usine à blagues » - Nicolas Sarkozy. Se dit aussi de lieux et d'événements propices à produire de l'émerveillement.

Fig. 1 : artS FaCtory : SeSSionS D'autoMne _ [ e x p o s i t i o n ] . En automne, les feuilles tombent, volent et viennent se coller sur les murs de la Galerie Lavignes-Bastille sous la haute férule du studio Arts Factory. Cet assertion poétique n'avait d'autre but que d'annoncer la formidable programmation que nous réservent Effi Mild et Laurent Zorzin pour finir leur période de sédentarisation. De septembre à décembre, quatre événements se suivent et ne se ressemblent que partiellement. Évidemment, nous parlons là d'illustration, amour indécrottable du duo de galeristes parisiens. Encore fallait-il que cet amour soit guidé par l'énigmatique sens du bon goût. Qu'on se rassure, c'est effectivement le cas. Nous en voulons pour preuve la douzaine d'artistes programmés jusqu'à la fin de l'année : Icinori, Caroline Sury, Marie Saarbach, Roxane Lumeret, Hugues Micol, Frédéric Felder, Laurent Impeduglia ou encore Jean Lecointre. Comme nous pouvons le voir, l'exigence artistique guide Effi et Laurent dans leurs choix qui s'en retrouvent être judicieux au possible. Grâce à Arts Factory l'automne est la saison des feuilles tombantes mais surtout celle des œuvres jolies. • Jusqu'au 21.09, C.Sury & L.Impeduglia ; du 8.10 au 9.11, H.Micol & F.Felder ;   du 12.11 au 7.12, N.Choux, S.Dutertre, E.Houdart, R.Lumeret, M.Saarbach, A.Karlson,  L.Scratchy ; du 10 au 22.12, J.Lecointre & Icinori. Le tout à la Galerie   Lavignes-Bastilles à Paris.  www.artsfactory.net

Fig. 2 : CentraL vaPeur #3 _

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[ f e s t i v a l ] . Si Strasbourg bénéficie actuellement d'une belle visibilité dans les domaines de la bande dessinée et de l'illustration, c'est grâce à un puissant alliage d'artistes, d'universitaires, de maisons d'édition et d'associations prêtes à défendre tout cela à la fois. Et à ce petit jeu là, Central Vapeur n'est pas la dernière. Entièrement dédiée à la mise en lumière de l'illustration et de la bande dessinée à Strasbourg et en Alsace, celle-ci s'évertue d'une part à défendre les talents locaux et d'autre part à présenter aux Alsaciens la crème internationale en la matière. Coupable d'événements divers tout au long de l'année, Central Vapeur brille toutefois d'un éclat plus vif au mois de décembre. C'est à cette époque, en effet, qu'a lieu le bien nommé festival Central Vapeur. Initié timidement en 2011, le festival Central Vapeur fait état de toute sa puissance en cette année 2013, pour sa

3e édition. Si nous n'avons pas encore le programme complet, nous pouvons d'ores et déjà nous réjouir du dialogue entre Jean Lecointre et Icinori, du toujours très prolifique concours Central et de la venue exceptionnelle de l'éditrice et illustratrice Rotraut Susanne Berner pour l'exposition consacrée au Tollen Hefte, objet de ses soins les plus attentionnés. Enfin, et pour ne rien gâcher, se tient un salon de l'édition indépendante au détour duquel nous pourrons croiser d'aussi charmants activistes que les Éditions Magnani, L'Association, Chifoumi, United Dead Artists, Biscoto, Psoriasis, Cercle Magazine, Vignette ou les Éditions 2024. Strasbourg et l'illustration, une vraie histoire d'amour. • Central Vapeur #3, du 5 au 15.12 à Strasbourg,   avec aussi des concerts, d'autres expositions, du cinéma, etc.  www.centralvapeur.org


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