KIBLIND Magazine NumĂŠro Dans ma rue
La Gaîté Lyrique Musiques & futurs alternatifs
Établissement culturel de la Ville de Paris
3 bis rue Papin, 75003 Paris gaite-lyrique.net @gaitelyrique
Festival international de films sur la musique 18–25.02.2021
Une quinzaine de films inédits à découvrir sur MK2 Curiosity
@GL Gaîté Lyrique
En partenariat avec :
r le jeu vidéo ose un autre regard su op pr m co ft. so bi s.u tiatives, storie ent à travers des ini em ss rti ve di du r eu et le sect et ceux qui font moignages de celles des analyses et des té de demain. i et construisent celle hu d’ ur ujo d’a ie str du l’in
SCANNEZ CE QR CODE POUR VOYAGER DANS L’UNIVERS DE STORIES IMAGINÉ PAR RUNE FISKER
De haut en bas : Magali Brueder, Atelier Bingo, Maria Medem, ZĂŠbu, Virginie Morgand et Hel Covell.
KIBLIND Store Illustrations à emporter
Pour une belle et heureuse nouvelle année illustrée, retrouvez une sélection de posters de nos artistes préférés imprimés avec amour en risographie par KIBLIND Atelier. www.kiblind-store.com
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Notre rue, c’est notre premier contact avec le monde extÊrieur. L’annÊe passÊe, elle fut même parfois le seul. Elle est ce paysage qui s’affiche tous les matins au rÊveil, celui que nous regardons quand nous faisons semblant de rÊflÊchir, celui qu’on scrute sans s’en apercevoir. Elle nous appartient et nous lui appartenons. Bien souvent, nous ne l’avons pas choisie, mais hÊ, elle est là , il faut faire avec. Avec ses immeubles louches, ses poubelles qui se dÊversent, ses voitures mal garÊes. Avec ce qu’elle nous offre aussi. Ses habitants, ses commerces, ses beautÊs bizarres. Elle nous identifie, nous oblige, nous fabrique. Elle est ce que nous en faisons et nous sommes ce qu’elle fait de nous. Qu’on vive à Paris, Londres, SÊoul ou Saint-Mamert-Deux-Grosnes, le rÊsultat est le même : quand on pousse la porte de chez soi, on est encore un peu à la maison. Si elle n’est pas tout à fait un doux foyer, on y met toujours un peu de soi-même, autant qu’il est possible. Parfois beaucoup, parfois peu. Ce n’est pas pour rien que les artistes en font des films, des livres et des chansons. Certains, on en connaÎt, passent leur temps à les dessiner. C’est à ce chez-soi partagÊ que nous dÊdions ce numÊro, et aussi un peu au chez-nous lyonnais, joliment reprÊsentÊ par Thibaud HÊrem en couverture.
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Directeur de la publication : JÊrÊmie Martinez / Direction Kiblind : JÊrÊmie Martinez - Jean Tourette - Gabriel Viry ComitÊ Êditorial : Maxime Gueugneau - Elora Quittet - JÊrÊmie Martinez Team Kiblind : Marie-Camille Alban - AlizÊe Avice - Guillaume Bonneau - Agathe Bruguière - Alix Hassler Justine Ravinet - Charlotte Roux - Jean Tourette - Olivier Trias - Gabriel Viry Contributeurs : Atelier Choque Le Goff - Thomas Durel - Yann François - Frederic Hojlo - Festival Bien Urbain RÊviseur : RaphaÍl Lagier Direction artistique : Kiblind Agence Imprimeur : Musumeci S.p.A. / www.musumecispa.it Papier : Le magazine Kiblind est imprimÊ sur papier Fedrigoni / Couverture : Symbol Freelife E/E49 Country 250g / Papier intÊrieur : Arcoprint Milk 100g, Arena natural Bulk 90g et Symbol Freelife Gloss 130g Typographies : Kiblind Magazine (BenoÎt Bodhuin) et Lector (Gert Wunderlich) ÉditÊ par Kiblind Édition & Klar Communication. SARL au capital de 15 000 euros - 507 472 249 RCS Lyon. 27 rue Bouteille - 69001 Lyon / 69 rue Armand Carrel - 75019 Paris - 04 78 27 69 82 Le magazine est diffusÊ en France et en Belgique. www.kiblind.com / www.kiblind-store.com ISSN : 1628-4146 Les textes ainsi que l’ensemble des publications n’engagent que la responsabilitÊ de leurs auteurs. Tous droits strictement rÊservÊs. Merci à Matthieu Sandjivy. THX CBS. Contact : magazine@kiblind.com
đ&#x;‘€ SOMMAIRE — 8 KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
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Édito / Ours
8
Sommaire
10
In the mood
20
intro Dans ma rue
24
invitation FrĂŠdĂŠric Hojlo : Dans ma case rue
28
En couverture : Thibaud HĂŠrem
34
CrĂŠations originales Dans ma rue
43
Citations
44
Dossier - Welcome to my hood
50
Invitation Yann François : Le jeu vidÊo dans la rue
54
La bibliothèque idÊale : Festival Bien Urbain
56
Playlist Back 2 Back : Vikash Dhorasoo & Sabine Quindou
58
Imagier - Street View Journey
69
SĂŠlection Kiblind
Iván Navarro in collaboration with Courtney Smith, Street Lamp (Yellow Bench), 2012, Courtesy de l’artiste et Galerie Templon, Paris-Bruxelles. © Iván Navarro/ADAGP, Paris 2020. Photo : Isabel Penzlien
lieu infini d’art de culture et d’innovation direction José-Manuel Gonçalvès
09 janv. > 28 fév. 21 arts visuels installation
Iván Navarro Planetarium
avec la Galerie Templon
đ&#x;‘€ IN THE MOOD — 10 KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
IN THE M D Vous croiserez dans cette entrĂŠe quelques objets illustrĂŠs rencontrĂŠs par bonheur ces derniers mois lors de nos pĂŠrĂŠgrinations visuelles. Vous serez accompagnĂŠs par les figures libres de Donald et Yoann du bel Atelier Choque Le Goff.
đ&#x;‘€ 11 — IN THE MOOD
HORLOGE â– Tim Alexander pour Jumbo Press instagram.com/hello.timalexander / jumbo-press.com DISQUE â–
Phylax Society de Sutja Guttierez (Lumière Noire Records) → Artwork by Matthieu CossÊ instagram.com/cossematthieu / sutjagutierrez.com
VESTE â–
David Mendez Alonzo pour Outsiders Division davidmendezalonso.com / outsidersdivision.com
MAGAZINE â–
NUVOL → Artwork par Ana Galvan instagram.com/anagalvan_comic2 / nuvol.com
NOUVELLE GRAPHIQUE â–
Moms de Yeong-shin Ma (ed. Drawn & Quarterly) drawnandquarterly.com
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AFFICHE ■→ Par Yeye Weller instagram.com/yeyeweller
đ&#x;‘€ IN THE MOOD — 12
DISQUE â–
Sauna de K.A.Z → Artwork par Oscar Raùa oscaranha.tumblr.com L’illustrateur espagnol Oscar Raùa nous en met plein la vue avec chacune de ses illustrations à la gÊomÊtrie et à la composition folles. Nous avons ÊtÊ subjuguÊ.e.s par la prÊcision et la beautÊ de cette pochette de disque qu’il a rÊalisÊe pour le groupe KAZ, alors on en a papotÊ un peu avec lui. Quel Êtait le brief quant à la rÊalisation de cette pochette de vinyle ? La libertÊ absolue, ce qui n’est pas vraiment habituel. Le groupe m’a contactÊ par mail pour me parler de leur musique, basÊe sur l’improvisation et une forme vraiment libre de jazz. Ils voulaient m’inviter à rÊaliser leur artwork de la même façon. Ils m’ont fait totalement confiance et j’avais le temps de le faire à ce moment-là , donc c’Êtait vraiment apprÊciable. Comment est-ce que tu as procÊdÊ ? J’ai commencÊ par improviser une composition rapide avec les ÊlÊments essentiels de l’image. J’ai ensuite travaillÊ plus consciencieusement, en payant attention aux motifs que le design demandait à la volÊe. J’ai pensÊ aux couleurs à la toute fin : j’ai commencÊ à en appliquer beaucoup (peut-être avec un peu trop d’entrain), et après ça, j’ai rÊduit la palette en utilisant une rÊfÊrence trouvÊe sur internet. Est-ce que la musique t’inspire quand tu crÊes ? Oui, j’Êcoute toujours de la musique quand je travaille. Pour cet exemple prÊcis, j’ai ÊcoutÊ KAZ tout du long. Ça faisait partie de l’expÊrience : permettre à la musique de pÊnÊtrer le dessin. Pour toi, quelles sont les plus belles pochettes de tous les temps ? J’en aime tellement ! J’adore les collages des premiers albums d’Ariel Pink, les pochettes d’Andrew Savage pour Parquet Courts, et beaucoup d’autres comme celle du premier album de Cluster, celle d’Hiroshi Yoshimura pour Green et celle de A. G. Cook pour 7G, pour n’en citer que quelques-unes.
PAILLASSON â–
Exit enter safe → Charlene Man pour Lazy Press lazypress.net
MAGAZINE â–
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The Walrus jan/fev 2021 → Artwork par Holly Stapleton thewalrus.ca instagram.com/_hollystapleton_
MAGAZINE â–
Plan de Biyo no Keiei → Artwork par Nori Okawa instagram.com/nori_okawa / j-mode.co.jp
ð&#x;‘€ 13 — IN THE MOOD
SINGLE â–
Falling in Between Days de Margot (Full Time Hobby) → Artwork par Nick Dahlen nickdahlen.com margotbanduk.bandcamp.com
LIVRE â–
Les Dynamiteurs de Benjamin Whitmer (ed. Gallmeister) → Artwork par Marta Orzel martaorzel.com / gallmeister.fr
AFFICHE ■→ Par Poster Lad / Vratislav Pecka posterlad.com
CHAUSSETTES â–
Blandine Pannequin blandinepannequin.com / Label-Chaussette-Illustration
ÉCHARPE MALVIN PEACE â–
Floor van het Nederend floorvanhetnederend.com
LIVRE â–
The Women's Suffrage Movement de Gloria Steinem (ed. Sally Roesch Wagner / Penguin Classic) → Artwork par Hanna Barczyk hannabarczyk.com / penguin.com
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CAHIER DE COLORIAGE â– Jammes Coloriage instagram.com/jammes.coloriages
đ&#x;‘€ IN THE MOOD — 14
DISQUE ■Layer Cake de NO_ON → Artwork par Miki Kim instagram.com/_miki__kim soundcloud.com/no_on_music
MAGAZINE â– THE SMUDGE Thesmudgepaper.com
Clay Hickson et Liana Jegers ont eu l’excellente idÊe de lancer le journal The Smudge il y a de ça quatre ans. Depuis, celui-ci est autoÊditÊ chaque mois dans la tradition DIY et regorge de trÊsors visuels et rÊdactionnels. Clay nous en dit un peu plus juste ici.
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Comment est nĂŠ The Smudge ? The Smudge est nĂŠ dans les semaines mornes et effrayantes qui ont suivi les ĂŠlections prĂŠsidentielles amĂŠricaines de 2016. Quelle est la volontĂŠ derrière ce journal ? Ă€ la base, nous voulions juste crĂŠer une plateforme qui permette aux gens de s’exprimer en ces temps incertains. Mais le journal papier a ĂŠvoluĂŠ, en mĂŞme temps que son but. Aujourd’hui, nous espĂŠrons pouvoir ĂŠduquer, distraire, motiver et connecter les personnes entre elles. Comment est construit le magazine et qui y prend part ? Le magazine est ĂŠditĂŠ, imprimĂŠ et distribuĂŠ par mon ĂŠpouse, Liana Jegers, et moimĂŞme. Nous travaillons avec plusieurs artistes et auteur.rices qui sont des contributeurs rĂŠguliers. Mais nous sommes toujours Ă l’affĂťt de nouvelles personnes avec qui travailler. Comment choisissez-vous les sujets des articles ? Les sujets et thèmes du magazine sont gĂŠnĂŠralement des rĂŠactions Ă ce qui se passe dans l’actualitĂŠ du moment, mais de temps en temps, on aime bien expĂŠrimenter et renvoyer la balle aux lecteurs. AFFICHE â–
Les Puces de l'Illu 8ème Êdition → Par Laho laho.eu / pucesillu.campusfonderiedelimage.org
OÚ puisez-vous vos inspirations ? D’un paquet d’endroits, mais notre source première d’inspirations est la presse underground des annÊes soixante et soixante-dix.
đ&#x;‘€ Rue Saint-Louis en L'ĂŽle de Benjamin Biolay & Juliette Armanet → Artwork par Thomas Hayman thomashayman.com benjaminbiolay.com instagram.com/juliettearmanet
15 — IN THE MOOD
AFFICHE â–
DISQUE â–
InBach de Arandel (inFinÊ) → Artwork par Gol3m instagram.com/_gol3m / arandel.bandcamp.com
SINGLE â–
GOURDE â– Abbey Lossing pour Papaya Reusables abbeylossing.com / papayareusables.com
AFFICHE â–
Festival Les Nuits de l'Alligator → Artwork par FrÊdÊric RÊbÊna costume3pieces.com/talent/12/frederic-rebena / nuitsdelalligator.com/
MAGAZINE â–
Kostar - oct/nov 2020 → Artwork par Alexis Grasset instagram.com/alexis_grasset / kostar.fr
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Golden Promises de Alfa Nova → Artwork par Ben Saville instagram.com/bnsvl facebook.com/alfanovaband
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TAPIS ■LES TAPIS DE STÉPHANE HOPPLER instagram.com/stephanehoppler
DISQUE â–
music on hold
Depuis quelques temps, l'illustrateur belge StÊphane Hoppler s'est pris de passion pour le  punch needle  et nous en fait profiter sur Instagram. Il nous explique en quoi ça consiste sans jamais se prendre les pieds dans le tapis. Comment as-tu procÊdÊ pour rÊaliser ce tapis illustrÊ ? Pour faire ce tapis, j’ai utilisÊ la technique qui s’appelle  punch needle , c’est une grosse aiguille creuse que le fil de laine traverse et qui permet de broder sur une toile assez Êpaisse et tendue sur un cadre. C’est un processus très long mais très relaxant ! D’ailleurs, ce tapis Êtant mon premier, j’ai pas mal utilisÊ des matÊriaux que je trouve à droite à gauche, le cadre pour tendre la toile n’est autre qu’un cadre photo, la toile de fabrication, je la trouve dans une petite boutique à côtÊ de chez moi (qui fait très bien l’affaire), et les laines que j’utilise proviennent majoritairement d’une chouette friperie à Bruxelles. Comment l’idÊe t’est venue ? Clairement grâce à CurrieGoat, un crÊateur de vêtements qui publie sur sa chaÎne YouTube des tutoriels, dont plusieurs qui nous apprennent de A à  Z comment punch-needler, très pratique pour commencer sans faire d’erreurs et qui donne très envie d’essayer. À part ça, je crois que j’avais besoin de faire quelque chose que je n’avais jamais fait, qui me sorte un peu de ma zone de confort, surtout que mon rapport à l’illustration est très liÊ au monde numÊrique et je voulais m’en Êloigner afin de faire des projets plus concrets, dans le sens oÚ à la fin, j’ai un objet entre les mains dont je suis fier. Le monde de la broderie Êtait très Ênigmatique à mes yeux, et je suis content de me surprendre à faire rentrer mon travail sous forme de tapisserie.
30 Minutes of de Music On Hold (Born Bad Records) → Artwork par Nebojťa BeŞanic musiconhold.bandcamp.com / instagram.com/ nbezanic
CALENDRIER 2021 â– Alan Fears / Faux Tableaux alanfears.com
Comment travailles-tu ton image quand tu sais qu’elle va se retrouver sur un tapis ? (couleur, forme, etc.) Je dirais que j’ai travaillÊ mon image comme à mon habitude, mais bien sÝr, il faut prendre en compte les contraintes supplÊmentaires propres à la tapisserie, comme par exemple les couleurs limitÊes des pelotes de laine. DÊjà , comme en gravure, l’image est inversÊe côtÊ tapis, ensuite ce qui me donne du fil à retordre, c’est de penser en Êpaisseur et non plus en trait comme dans un dessin normal. Mon image du côtÊ de la broderie (donc au final le dos du tapis) est ce qui se rapproche le plus de mon illustration de base, or, ce sont les petits bouts de laine de l’autre côtÊ qui comptent vraiment. Il vaut mieux les oublier et aller au plus simple. En ce qui concerne la forme de mon tapis, je ne voulais pas faire un tapis strictement carrÊ, mais jouer avec le hors-champ, comme une case de bande dessinÊe.
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Combien de temps ça t’a pris ? Je n’ai pas comptÊ ! Ce tapis, c’Êtait comme un bouquin que j’ouvre de temps en temps avant d’aller me coucher, ou avant d’aller travailler à mon job alimentaire. C’est clairement un passe-temps qui me permet de faire une pause, de me relaxer et de rÊflÊchir à des choses très importantes. Mais si je fais une estimation, je dirai que ça m’a pris 50 heures environ. D’ailleurs, une fois que je l’ai fini, j’Êtais un peu dÊçu de savoir que je ne pourrais plus me remettre dessus quand j’ai un moment de flottement. Est-ce que d’autres sont en route ? J’ai vraiment ÊtÊ piquÊ par la confection de tapis, j’y pense tout le temps, et oui, je suis en train de finir mon deuxième à l’instant, il est un peu diffÊrent, mais je continue d’apprendre et c’est très stimulant ! Une commande personnalisÊe est dÊjà en route pour un projet plus grand, et je peux vous dire que j’investis de plus en plus dans cette passion qui fera sÝrement partie de mon travail artistique dans les prochaines annÊes.
PORTE BAGUES â–
Atelier Radar instagram.com/ atelierradar
REVUE ■Paysageur 04 → Artwork par Beya Rebaï instagram.com/beya_rebai / paysageur.com
17 — IN THE MOOD
DISQUE ■
Loubards Sensibles de Syndrome 81 → Artwork par Freak City instagram.com/freakcitybdx syndrome81.bandcamp.com
MYRIORAMA ■ Une Folle Journée de Anne-Hélène Dubray (ed. L'Agrume) annehelenedubray.fr / editionslagrume.fr DISQUE ■ Le tigre et la grue de Vitess → Artwork par Francis & Marcel instagram.com/francisetmarcel soundcloud.com/vitess1
AFFICHE ■ ANTWERP POSTER FESTIVAL https://apf.design
Le Antwerp Poster Festival fait office de référence dans le milieu et permet de révéler chaque année les designers graphiques les plus aguerris. Dennis Janssens & Tom Tiepermann, les boss de l’agence ssnn et fondateurs du festival ont répondu à quelques unes de nos questions. Comment l’idée de créer un festival consacré uniquement au poster vous estelle venue ? Nous avons été sélectionnés pour le concours de posters de Graphic Matters à Breda et nous avons vraiment aimé l’atmosphère du festival. Sur la route du retour, on a commencé à se dire que ce serait très fun d’organiser quelque chose comme ça à Anvers. Avant même d’avoir franchi notre porte, nous avions déjà décidé de lancer l’Antwerp Poster Festival !
Comment peut-on participer ? Le concours est gratuit et tout le monde peut participer (les étudiants, les amateurs, les professionnels...). Nous lançons un appel via notre site www.apf.design et nous le relayons sur notre page Instagram @antwerpposterfestival. Il suffit juste alors de remplir les informations et de télécharger votre/vos poster(s) ! Quel est le secret pour réaliser un poster parfait ? Trouver le juste dosage entre l’imagerie et la typographie, mais surtout, faire en sorte qu’il se démarque des autres ! Si vous êtes capables de faire un poster dans lequel les gens reconnaissent votre style et votre signature, alors vous êtes en bonne voie !
→ Les figures présentes sur ces pages ont été réalisées par l'Atelier Choque Le Goff. → choquelegoff.com
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Qui a gagné cette année et pourquoi ? Balmer Hahlen de Suisse, Aurane Loury et Clara Degay de France et Smile Initial Plus d’Allemagne. Chaque année, notre sélection est très variée et cette année, les trois ressortaient vraiment parmi tous les posters. C’était un dosage parfait entre composition, typographie et couleur.
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L’ÉCO LE D ES M ÉTIER S D U D ESSIN
> formation initiale - Un cursus en 5 ans pour se spécialiser en illustration multimédia, cinéma d’animation ou jeu vidéo - Un parcours en 3 ans pour se spécialiser en infographie 3D - En fin d’études, les étudiants accèdent à un job dating réunissant 60 entreprises de l’image
> cours du soir et stages - dessin académique - illustration - infographie et dessin 3D
Truite > Florent GOBET, étudiant de 5e année édition multimédia
> formation des professionnels Des formations de 70 heures, conventionnées par l’Afdas, pour développer ses compétences ou se reconvertir - le personnage en illustration jeunesse - la création de décors sous Photosphop - l’illustration vectorielle sous Illustrator - le character design : acting et posing - la mise en couleur en bande dessinée
1 rue Félix Rollet, Lyon 3e métro ligne D - Monplaisir Lumière tél. : 04 72 12 01 01 www.cohl.fr
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La rue s’oppose à l’espace domestique et devient un espace symbolique ; là oÚ on se montre, oÚ on dÊfile, oÚ on paraÎt et se pare. Elle devient aussi lieu de revendication oÚ on se rassemble pour manifester, pour montrer son opposition ou son soutien.
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Nom de rue le plus rÊpandu en France : Rue de l’Église avec 7 965 occurrences, amen ! PersonnalitÊs qui ont le plus de rues à leur nom en France. Et le prix est attribuÊ à : 1 Le gÊnÊral de Gaulle
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MARIE CURIE 2 Prix Nobel, le refus de la LÊgion d’honneur et la une ironique de l’hebdomadaire  Les hommes du jour 
Quand on prend de la hauteur, on observe le grand bal des trottoirs qui dessine le plan de nos villes. Quelques exemples :
2 Louis Pasteur
3903 RUES
3354 RUES
3 Victor Hugo
(dont 161 impasses, pas cool) 2555 RUES
LA RUE LA PLUS COURTE Ebenezer Place (Écosse) et ses 2,06m de long. C’est bien simple, cette rue n'a qu'une seule adresse ! LA RUE LA PLUS ÉTROITE la SpreuerhofstraĂ&#x;e Ă Reutlingen (Allemagne), seulement 31 cm de largeur par endroits. On notera ĂŠgalement la belle perf de la Rue de l’enfer aux Sables d’Olonne, avec ses 40 cm de large. LA RUE LA PLUS PENTUE Baldwin Street en Nouvelle-ZĂŠlande, 350 m de long et une pente de 35 % en moyenne. Un seul conseil : vĂŠrifier son frein Ă main. LA RUE LA PLUS LARGE 91,44 mètres pour l’Avenida 9 De Julio Ă Buenos Aires (Argentine). Il faut plusieurs minutes pour la traverser. LA PLUS LONGUE RUE l’Avenida de los Insurgentes Ă Mexico et ses 28,8 km de long. Un km Ă pieds, ça use, ça use ! 2015
LOUISE MICHEL Figure majeure de la Commune de Paris, DÊportÊe, Anarchiste, FÊministe
L’association Osez le fÊminisme lance l’opÊration FÊmicitÊ en rebaptisant les rues de Paris par des noms de femmes remarquables. L’opÊration veut attirer l’attention sur le fait que 97,4 % des rues portent des noms d’hommes dans la capitale. Aujourd’hui CAMILLE CLAUDEL Pied de nez de l’Histoire, il y a aujourd’hui en France plus de rues  Camille Claudel  que de rues  Auguste Rodin 
Les collectivitÊs, conscientes de cette inÊgalitÊ essaient de rÊtablir l’Êquilibre. C’est ainsi que sont nÊes à Paris en 2020 les rues, chemins ou jardins Nicole Fontaine, Marie-ThÊrèse Auffray, Marie de Roumanie, Martha Desrumaux et Françoise HÊritier.
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LE PLAN HIPPODAMIEN, avec ses rues rectilignes et ses croisements en Êquerre. Un schÊma adoptÊ par les Grecs et les Romains‌ jusqu’aux big cities amÊricaines ou encore aux centres villes français reconstruits après-guerre, comme Le Havre.
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La rue c’est aussi un espace social ; là oÚ l’on vit, qu’on soit très entourÊ (dans les villes) ou un peu moins (dans les campagnes), les commerces que l’on frÊquente, les rencontres que l’on fait. C’est un lieu de vie, de partage, de solidaritÊ mais aussi de mÊfiance et d’exclusion parfois.
Parmi les 200 personnalitÊs qui ont le plus donnÊ leur nom à des rues françaises, les femmes ne sont que 15. Focus sur trois d’entre elles.
LE PLAN RADIOCONCENTRIQUE, très IN au Moyen-Âge, avec une organisation des quartiers en cercles successifs. Les boulevards entourent la ville tandis que les avenues rayonnent du centre vers la pÊriphÊrie.
odonyme \ .d .nim\ masculin
(Cartographie, Toponymie) Nom propre dĂŠsignant une voie de communication.
TÉ
S M
LE VILLAGE-RUE, un classique de la France rurale, dans lequel toutes les constructions se succèdent de part et d’autre de la rue principale.
E D
SO
C
TA RU
URBANISME La rue, c’est l’organisation et l’amÊnagement des espaces. Ce qu’on voit : la vie collective qui s’organise autour des voies de circulation rÊservÊes à chacun¡e et ce qu’on ne voit pas mais qui facilite bien la vie : les approvisionnements en eau, en ÊlectricitÊ, en gaz et en tÊlÊphonie et cette chose non nÊgligeable que l’on nomme les Êgouts. Ces agencements Tetris donnent à la rue une forme.
19 — INTRODUCTION
N O
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Dans sa rue, on habite son studio, son appartement, sa maison. Le logement est le refuge du privÊ, le lieu de l’intimitÊ. Puis, peu à peu, on met le nez dehors, on s’approprie l’extÊrieur. Selon l’architecte Nadège Leroux,  en plus de la demeure, on habite le quartier. Le quartier dÊfinit les rapports de voisinage, les trajets quotidiens, les rapports avec les commerçants, et la connaissance des lieux qui donne le sentiment d’être sur son propre territoire, même s’il est partagÊ. 
À COTÉ DE LA PLAQUE (DE RUE)
Signalisation historique, politique ou cocasse
8 400 pharmacies
4 019 boulangeries
22 977 ĂŠpiceries
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LES COMMERCES LES PLUS FRÉQUENTS DANS
NO
Il y avait eu dans les annÊes 80 en Espagne une grande campagne de dÊboulonnage de monuments ou de plaques à l’effigie de Franco. Mais il aura fallu attendre 2017 pour que la mairie de Barcelone fasse dÊfinitivement retirer les derniers insignes portant le symbole de la dictature franquiste.
S
E
INTRODUCTION — 20
 Quand on arrive dans une ville, on voit des rues en perspective. Des suites de bâtiments vides de sens. Tout est inconnu, vierge. Voilà , plus tard on aura marchÊ dans ces rues, on aura ÊtÊ au bout des perspectives, on aura connu ces bâtiments, on aura vÊcu des histoires avec des gens. Quand on aura vÊcu dans cette ville, cette rue on l’aura prise dix, vingt, mille fois. Au bout d’un temps cela vous appartient parce qu’on y a vÊcu.  Auberge Espagnole – CÊdric Klapisch
RU
Source ↓ donnÊes INSEE 2019
Au Moyen-âge - notamment parce que beaucoup de personnes ne pouvaient pas lire - les rues avaient des noms fonctionnels, faciles à reconnaÎtre et repÊrer, c’est ainsi qu’il reste aujourd’hui nombre de rues de l’Êglise, de places du marchÊ et de rues des bouchers.
Florilège des noms de rues les plus cocasses à  travers la France : rue des crottes à Marseille, rue du Chat qui pêche à Paris, rue de la gerbe à Lyon, et le fameux chemin de Lanusse à Toulouse. La mÊdaille revient à la plus poÊtiquement mÊlancolique :  l’impasse de l’avenir .
Selon une Êtude de 2007 de l'ONU, plus de 2,5 milliards d'individus consomment quotidiennement de la cuisine de rue ou street food. En France, au Moyen-Âge, on mangeait dÊjà dans la rue. Depuis le dÊbut des annÊes 2010, on se rÊapproprie à vitesse grand V ce mode de consommation
Dis-moi ce que tu manges et je te dirai dans quelle rue du monde tu es !
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Rien n’Êchappe à l’internet alors il faut être honnête, rares sont les coquilles sur les panneaux de signalisation. Il y a tout de même un petit plaisir farceur à en trouver une parfois. Comme à Auxerre oÚ Django Reinhardt est dÊcrit comme un cÊlèbre Chef d’orquestre. On a cherchÊ, aucun lien avec Morgoth ou Willy.
50 Food Trucks
700 Food Trucks
sur le territoire en 2013
sur le territoire en 2017
FAIT NOUVEAU
De la baraque Ă frites au camion gourmet, le food truck, comme la rue, se gentrifie.
un tacos
•
• ​Allemagne
un bubble tea
•
• ​Chine
une saucisse
•
• Mexique
une brochette de scorpions
•
• ​Espagne
un gâteau cheminÊe
•
• Taiwan
un churros
•
• RÊpublique Tchèque
đ&#x;‘€ ENSEMBLE POUR LE MEILLEUR La fĂŞte des voisins
 Le voisinage est un lien par le lieu. , HÊlène L’Heuillet, philosophe et psychanalyste CONNAISSEZ-VOUS VRAIMENT VOS VOISINS ?
CrĂŠation en
1999
Selon l’expÊrience quotidienne (et une interview sÊrieuse d’HÊlène L’Heuillet) • le pire voisin est souvent celui d’en haut • avec celui d’en face, c’est compliquÊ, c’est le jeu du miroir, on se toise, on s’envie • on ignore le voisin d’en bas.
RÊseau social de voisinage pour certains, rÊseau de surveillance citoyen pour d’autres
Souvent, on appelle les voisins
250 000 voisins vigilants
12% des français avouent avoir dÊjà espionnÊ leurs voisins Selon l’institut de sondage Harris Interactive, en 2015 Pour la psychothÊrapeute Emma Scali, il y a une forme de normalitÊ :  On aime comprendre comment les autres vivent pour mieux apprÊhender notre propre façon de vivre.  Mais pour tout espionnage intempestif, n’hÊsitez pas à appeler Julien Courbet pour connaÎtre vos droits.
ajout du mot  solidaires  en 2017 100 euros le panneau 3 RÉFÉRENCES POUR APPRENDRE À VOUS CONNAÎTRE ts cre F1 s se isins T t i t Pe e vo r ent
FenĂŞtre sur cour Alfred Hitchcock
Si la rue est à nous, la rue n’est aussi à personne. Ce qui vaut à l’asphalte quelques dÊconvenues quotidiennes‌
Heureusement, il y a une solution : la motocrotte, mise en place par Chirac en 1982.
50 pays
ET POUR LE PIRE
BONUS VERBATIM gentils, les  voisins d’à côtÊ .
VOISIN VOYEUR
30
millions de participants (en 2019)
21 — INTRODUCTION
LES VOISINS
Prendre soin de l’espace public, c’est un mÊtier : cantonnier¡e, Êboueur¡se, ripeur¡se, jardinier¡e, Êlagueur¡se, paysagiste, Êgoutier¡re, balayeur¡se‌
Les chemins de la philosoph ie ÂŤÂ Voisinage Âť France Cu lture
Les voisins, ce sont TOUS les gens qui vivent à côtÊ de nous. Ne les oublions pas. Liste non exhaustive d’associations qui luttent contre l’exclusion : Croix-Rouge, Restos du Cœur, Samu Social, ActionFroid, l’Entourage, les Frigos solidaires ...
il y a dÊsormais plus de plastique que d’animaux sur notre planète ! (humains compris)
8
4
gigatonnes d’animaux
1 100
gigatonnes de bâtiments
900
gigatonnes d’arbres
QUI DOIT S’ENGAGER LE PREMIER OU LA PREMIĂˆRE ? Le piĂŠton - le code de la route
A donne toujours la prioritĂŠ aux
La trottinette - membre du club
B des EDPM (Engin de DĂŠplacement
piÊtons car il les considère comme les plus fragiles. Assez ironique puisque ce dernier se croit souvent le premier moutardier du pape.
C Vive le petit panier pique-nique ! Et les dĂŠchets dans les poubelles appropriĂŠes !
Le vĂŠlo - il a la cĂ´te : mobilitĂŠ douce et ĂŠcologique, il ne se gĂŞne pas pour griller quelques feux et STOP. Sa hype lui fait penser que tout le monde lui doit la prioritĂŠ.
Personnel MotorisĂŠ), les autres vĂŠhicules ne la prennent pas au sĂŠrieux en raison de sa rĂŠcente arrivĂŠe.
D
La voiture - un argument fort en sa faveur : le klaxon le plus puissant.
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
gigatonnes de plastique
đ&#x;‘€ INTRODUCTION — 22
WA L K OF AM E F
La rue accouche d’artistes
Au sens propre avec Edith Piaf, nÊe sur une marche à Belleville, à Paris.
DE PARLER DE LA RUE PARLER DE RAP. Ă€ l’origine furent les Block parties. Dans les annĂŠes 70, ces fĂŞtes de quartier ont vu leur popularitĂŠ augmenter, en particulier dans les ghettos noirs et latinos de New York ; elles sont le berceau de la culture hip-hop et de son expression dans la musique rap. DĂŠjĂ une histoire de rues et de voisins. 1973 organisation de la “premièreâ€? Bloc Party par le DJ jamaĂŻcain Kool Herc Sugar Hill Gang
Puis le rap est arrivÊ en France dans les annÊes 80, importÊ notamment par Dee Nasty. Une musique produite de manière indÊpendante dans les banlieues pauvres parisiennes et marseillaises, avant de connaÎtre son essor public dans les annÊes 90.
NTM
Afrika Bambaataa
Ministère A.M.E.R. Assassin
Kurtis Blow En jouant le rôle de d comme p our GÊrar euxième maison, d Depard du minus ieu, qui s’ cule deux extirpa pièces fa Châteauro milial de ux ‌ lui p rÊfÊrant entre pet l’Êcole de ite contre la rue, bande et autres la rcins.
Lunatic
Eric B. & Rakim
Grandmaster Flash & The Furious Five Public Enemy
s, à l’image nÊes noire n crin des an ue pour so nn co , En Êtant l’Ê ro ie Corine Mas nnut co i qu et , de l’actrice au ri. taine Marle e de sans ab rôle de Capi tion et la vi la prostitu e, gu ro  d la
Les sages poètes de la rue
Run DMC
Wu-Tang Clan
Grâce au rap, un nouveau vocabulaire moderne et quotidien, issu de la rue, s’est valorisÊ. Ces dernières annÊes, on note les entrÊes fracassantes de  Mamène ,  R ,  Faire du sale  ou encore  La Moula .
113 IAM
Doc Gyneco
Autre facette de la culture hip-hop, le graffiti, qui, tel qu’on le connait dans son expression contemporaine, est profondÊment urbain. Sur fond d’un ultime dÊbat entre vandalisme et street art, le graffiti a fait son entrÊe dans les musÊes français en 1992 avec une exposition rÊtrospective au palais Chaillot. Reste que selon Banga, artiste de la première gÊnÊration,  le graffiti est nÊ dans la rue, et il restera toujours dans la rue ‌ même s’il faut reconnaitre, selon le principal intÊressÊ, qu’Instagram aide.
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
BALADE PICTURALE BALADE PICTURALE BALADE PICTURALE BALADE PIC À la charnière du 19/20ème siècle, les peintres dÊlaissent le genre Paysage dans sa version naturelle, au profit du Paysage urbain et de la reprÊsentation de la rue, support idÊal de leurs expÊrimentations plastiques. Mais en une cinquantaine d’annÊes leur apprÊhension de la rue change radicalement. Idyllique chez les Impressionnistes, elle devient inquiÊtante, dangereuse, pour les reprÊsentants de la Neue Sachlichkeit. Claude Monet, Boulevard des Capucines, 1873, Huile sur toile, 60 x 80 cm, MusÊe Pouchkine, Moscou.
Umberto Boccioni, 1911, La rue entre dans la maison, Huile sur toile, 100 x 100 cm, Sprengel Museum, Hanovre.
đ&#x;‘€ U
L’une des raisons du succès et de la longÊvitÊ de Plus belle la vie (PBLV pour les initiÊ¡e¡s), c’est l’ancrage territorial de la sÊrie dans la ville de Marseille - le soap Coronation street en est d’ailleurs une influence directe. Même si la plupart des scènes sont tournÊes dans les studios de la Belle de Mai, il est très frÊquent de croiser les Êquipes de tournage dans les rues du Panier, au Vieux Port ou dans le Parc de BorÊly. Si bien que de nombreux sites de fans partagent les zones stratÊgiques oÚ se poster pour apercevoir une tête de star.
Cap de faire mentir Jean-Pierre Raffarin qui dÊclara en 2003 que  la rue ne gouverne pas , retour sur des rassemblements qui ont changÊ le cours de l’Histoire. 1229 - PARIS En 1229, Êclatent à Paris des ÊchauffourÊes qui embrasent le quartier Latin durant quelques jours. La raison ? Une supposÊe augmentation du prix du vin. Les Êtudiants sont fortement rÊprimÊs par la Police de l’Êpoque - 300 d’entre eux seront jetÊs dans la Seine. Pour montrer leur soutien aux Êtudiants, les professeurs se mettent en grève et rÊclament de nouvelles mesures comme l’autonomie dans la gestion des affaires de l’UniversitÊ. Face au refus de la RÊgente, les professeurs vont s’exiler dans les universitÊs concurrentes d’Oxford et de Bologne. Il faut attendre l’intervention du Pape GrÊgoire IX qui accorde en 1231 le droit de grève aux professeurs. Cela bouleverse les relations entre pouvoir royal et UniversitÊ et permet à cette dernière de lever des censures comme l’Êtude de certains textes interdits par l’Eglise catholique.
1930 - LA MARCHE DU SEL En 1930, le parti politique de Gandhi n’est plus tout à fait convaincu par les mÊthodes non violentes du Mahatma, il envisage de dÊclencher une guerre en faveur de l’IndÊpendance. C’est dans ce contexte que Gandhi quitte son Ashram pour un pÊriple à pieds de plusieurs semaines. Lorsqu’il atteint l’OcÊan Indien il recueille dans ses mains un peu
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de sel dont la rÊcolte est interdite aux Indiens. Il invite tous ses compatriotes à faire de même. Des foules de plusieurs milliers de sympathisants recueillent alors de l’eau salÊe dans des rÊcipients. 60 000 personnes sont mises en prison pour avoir violÊ le monopole d’Etat. Au bout de neuf mois, le vice-roi dÊbordÊ dÊcide de libÊrer tous les prisonniers - marquant alors une Êtape dÊcisive dans la conquête de l’IndÊpendance.
C’est peu dire que la sÊrie The Wire nous fait arpenter Baltimore. Peu de grandes villes amÊricaines ont ÊtÊ aussi profondÊment dÊpeintes par la fiction. Que ce soit au 242 W. 29th Street oÚ se trouve la Police, sur un canapÊ posÊ dehors dans les quartiers pauvres du West Baltimore, ou sur des cartes Êlectorales, les rues sont abordÊes dans toute leur complexitÊ, dans leur entrelacement qui relie et sÊpare les quartiers. Le tournage a d’ailleurs intÊgralement eu lieu dans la ville. Le revers de la mÊdaille ? L’organisation des Wire tour - ou ghetto tour, rÊsultat d’une triste fascination pour le crime et la pauvretÊ.
DE 1987 à 1991 LA VICTOIRE DE LA RÉVOLUTION CHANTANTE
Sherlock Holmes est à Londres ce que Lulu est à Charlie : ÊlÊmentaire. La sÊrie Sherlock en rend compte de scènes en scènes. Si l’œuvre originale s’inspire en partie de lieux rÊels : Baker Street, The Criterion, Le St-Bartholomew’s Hospital. La fiction a aujourd’hui pris corps dans les rues de la capitale britannique. Ainsi au 221 Bis Baker Street, on trouve dÊsormais le Sherlock Holmes Museum et le pub Sherlock Holmes de Trafalgar Square abrite de nombreuses expositions consacrÊes au dÊtective.
Lors de cette rÊvolution, l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie - sous domination soviÊtique - vont lancer une sÊrie d’actions non violentes pour conquÊrir leur indÊpendance. Les manifestants chantaient notamment des hymnes patriotiques en guise de protestation - ce qui donna son nom au rassemblement. C’est cependant la Voie Balte qui marque leur victoire dÊcisive. Le 23 aoÝt 1989, deux millions de personnes se tiennent la main pour former une frontière symbolique face à l’URSS. Cette chaÎne humaine qui commence à Vilnius, traverse Riga et finit à Tallinn est longue de 560 km. La mÊdiatisation de l’ÊvÊnement fut retentissante et permit de donner l’impulsion dÊcisive au rÊtablissement de l’indÊpendance nationale dans ces trois pays.
SPECTACLES DE RUE SPECTACLES DE RUE SPECTACLES DE RUE SPECTACLES DE RUE SPECTACLES DE RUE
CTURALE BALADE PICTURALE BALADE PICTURALE
PICTURALE
George Grosz, Metropolis, 1916-17, Huile sur toile, 100 x 102 cm, MusĂŠe Thyssen, Madrid
Qu’on se le dise, les spectacles de rues sont donnÊs dans le monde depuis l’AntiquitÊ. À notre Êpoque (et sans Covid rodant autour), il y en a encore pour tous les goÝts : Musicien
Sculpteur de ballons
Clown sur ĂŠchasses
Cracheur de feu
Acrobate
Danseur
Homme statue
Femme statue
Magicien
Jongleur
Joueur de bulles
Marionnettiste
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
BALADE
Giorgio De Chirico, Gare Montparnasse (La mĂŠlancolie du dĂŠpart), 1914, Huile sur toile, 140 x 184 cm, Moma, New York.
23 — INTRODUCTION
E
DE
→ Textes : MC Alban & A. Hassler → Mise en page : A. Bruguière
đ&#x;‘€ INVITATION — 24
Dans ma case rue
KIBLIND Magazine → 74 → Dasn Dans ma rue
FrÊdÊric Hojlo, enseignant et rÊdacteuren-chef adjoint du site Actua BD section  bande dessinÊe alternative , prÊpare un ouvrage aux Editions Flblb sur les Êditeurs alternatifs des annÊes 2000 à 2020. Il nous livre ici son regard sur le rapport entre la rue et la bande dessinÊe en s'immergeant dans quatre ouvrages qui sentent bon le bitume.
đ&#x;‘€ 25 — INVITATION KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Comme au cinÊma ou dans la vie, la rue dans la bande dessinÊe est un dÊcor, un lieu de passage, parfois de rencontre, plus rarement de vie. Du Yellowkid de Richard Felton Outcault à la fin du XIXe siècle aux livres de Gilles Rochier dont les personnages Êcument les rues des banlieues françaises, la rue est le biais idÊal pour reprÊsenter la ville et ses habitants. Support de running gags comme dans Quick et Flupke d’HergÊ, de duels dans le Lucky Luke de Morris ou de courses-poursuites dans le Spirou de Franquin, elle est souvent prÊsente, cadre minimaliste et rÊaliste peu valorisÊ. Elle est l’espace impensÊ, incontournable mais nÊgligÊ. On y rejoue – redessine – à l’infini le gag de la peau de banane ou celui de la plaque d’Êgout ouverte. Il est rarissime qu’elle fasse sujet, sinon par à -coups, brièvement, presque par hasard. Restent donc des instantanÊs, dessins, cases et planches inscrits de façon indÊlÊbile dans les mÊninges des lecteurs. Dans ma rue, dont l’atmosphère dÊgage une odeur de poussière, de sueur un peu âcre et de marijuana, tout le monde a les cheveux longs. Les hommes comme les femmes. Grasse ou frisÊe, habillÊe de quelques fleurs ou coiffÊe d’une plume, la chevelure semble être l’atour majeur de la tribu hippie qui dÊambule, fume, chante et se marre. Vaguement crades, les pieds nus ou en sandales, hÊbÊtÊs voire complètement camÊs pour certains, ils s’appuient aux façades de bois ou s’agrippent aux rÊverbères. La plupart d’entre eux ne prêtent aucune attention au landau rangÊ au bord du trottoir, ni au grand sec, veste de travers et pantalon trop court, qui en sort quelques magazines. CachÊ derrière ses grosses lunettes, il tente de faire valoir son travail. Nous sommes en 1968 à San Francisco, au coin de Haight Street et Ashbury Street, à deux pas du free store des Diggers, et Robert Crumb vend le tout premier numÊro de son Zap Comix. Personne ne peut deviner que la revue va connaÎtre seize numÊros et tenir, malgrÊ une parution Êpisodique, jusqu’au dÊbut du XXIe siècle. La culture underground franchit une Êtape et s’apprête à rÊvolutionner la bande dessinÊe. De ma fenêtre, je ne peux pas voir tout ce qui se passe dans ma rue. Suffisamment quand même pour me distraire quelques instants : un croisement, deux immeubles dont les angles semblent coupants et les façades cadenassÊes, la devanture d’une boutique, deux lampes de rue. Selon l’heure du jour, les ombres modifient ce paysage. En face, la rue perpendiculaire disparaÎt dans l’obscuritÊ, comme si le monde s’arrêtait là . Les fenêtres des immeubles sont tout aussi noires, pierres tombales verticales. Des vies pourtant doivent s’agiter là -bas, comme en bas. À l’instant, je compte trois auto-
đ&#x;‘€ INVITATION — 26 KIBLIND Magazine → 74 → Dasn Dans ma rue
mobiles dont un taxi, quinze piÊtons dont un enfant et un vieil homme qui peine à se dÊplacer, un cycliste qui reprend son engin et un homme en chaise roulante. Tout en haut de l’immeuble le plus proche, sur la corniche qui surplombe le carrefour, une tache de couleur accroche mon regard. Le temps de battre des paupières, et tout cela a bougÊ. Une automobile a filÊ, deux piÊtons ont dÊjà disparu, un larron s’empare de la bicyclette. Tous les autres se sont figÊs. StoppÊs net dans leur marche, ils tournent la tête dans la même direction. Au milieu du carrefour, la tache de couleurs s’Êtale à même l’asphalte. Bleu, rouge et jaune : l’homme qui s’est jetÊ du haut de l’immeuble est habillÊ en Superman. Je m’appelle Jimmy Corrigan, je suis the smartest kid on earth, et je tressaille. Je rentrais chez moi après une journÊe passÊe à la bibliothèque universitaire et, en arrivant dans ma rue, peut-être la plus triste de Columbus, Ohio, je suis tombÊ sur le même gars que l’autre jour, dans le bar deux pâtÊs de maisons plus loin. Il cadrait parfaitement avec le dÊcor – dans le bar comme dans la rue. Le troquet miteux oÚ je m’Êtais rÊfugiÊ pour Êviter la pluie sentait l’alcool et le moisi. Impossible de dire si cette odeur doucereuse et un peu Êcœurante venait des trois clients avachis sur le comptoir ou du douteux sol vert olive qui semblait ne pas avoir rencontrÊ de serpillière depuis un lustre. Le gars Êtait perdu dans ses pensÊes, une bouteille de bière à moitiÊ vide posÊe devant lui. La pluie s’Êtait calmÊe rapidement et j’avais avalÊ mon expresso avant que l’un des autres clients ne remarque ma prÊsence. Cette fois, le plein air dissipant les vapeurs d’alcool, je n’ai pas pu Êchapper au regard du gars. Là aussi, il paraissait implantÊ depuis toujours. Sa veste ÊlimÊe, rapiÊcÊe aux coudes et tachÊe au revers, aurait pu sortir de la poubelle du coin de la rue. Elle Êtait de la même couleur que le rare mobilier urbain, entre le gris sale et le vert d’eau. Son pantalon trop large et ses gros godillots prolongeaient sans dÊpareiller les dalles branlantes et inÊgales du trottoir. Sans prendre garde au trafic automobile ni aux nÊons des quelques boutiques de la rue voisine, il trimballait sous son bras une boÎte, qu’il tenait calÊe contre sa hanche. Il avait l’air de s’en foutre, comme du reste. Quelques morceaux de ruban adhÊsif et une somme, cinq dollars, distinguaient son carton. Le prix, inscrit au feutre noir, attirait l’œil. C’est sans doute à cause de ça qu’il me vit. Inutile d’essayer
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Visuels dans l'ordre d'apparition : Robert Crumb, 1992. Ingrale Zap Comix, Stara Comix, 2020. Jimmy Corrigan, Chris Ware, Delcourt, 2002 (intÊrieur). Jimmy Corrigan, Chris Ware, Delcourt, 2002 (couverture). Fante Bukoswki, un poète amÊricain, Noah Van Sciver, L'employÊ du Moi, 2017 (intÊrieur). Fante Bukoswki, un poète amÊricain, Noah Van Sciver, L'employÊ du Moi, 2017 (couverture). Megg, Mogg & Owl ‌ Amsterdam, Simon Hanselmann, Misma, 2016 (intÊrieur). Long Story Short, Simon Hanselmann, Misma, 2020 (couverture).
27 — INVITATION
d’Êchapper à son laïus. Je lui ai donnÊ les cinq dollars qu’il demandait – une somme que j’avais heureusement en poche ce jour-là – pour Êloigner le plus rapidement possible son haleine chargÊe. La publication qu’il me donna en Êchange Êtait mal imprimÊe, mal reliÊe, sans attrait. C’Êtait, selon lui, un recueil de ses poèmes. C’Êtait signÊ Fante Bukowski. Rien que ça ! On a beau habiter dans une banlieue anonyme d’une ville miteuse d’un comtÊ quelconque de n’importe quel État de la soi-disant première puissance mondiale, on ne s’habitue pas à tout. Il y a ainsi une maison – elles sont toutes semblables dans ma rue – qui m’intrigue et m’effraie. Petite, grise, sans ornement, elle est un miroir de sa voisine. De loin en tout cas. En s’approchant, ce qui demande un certain courage, quelques dÊtails la rendent troublante. Ce ne sont pas les touffes d’herbe qui Êmergent du trottoir ni la palissade de bois qui la cache en partie : on peut voir la même chose sur des centaines de mètres, sans doute sur des kilomètres. Il faut oser jeter un œil au-delà . Apparaissent alors des vitres sales, en certains endroits tachÊes. Et derrière, un tableau à faire frÊmir le plus endurci des ripeurs. Le salon est Êtroit, à peine meublÊ – un canapÊ deux places, une table basse, un poste de tÊlÊvision – et dÊpourvu de la moindre fantaisie. Mais si l’on ose s’arrêter, on peut apercevoir des monceaux d’immondices pas tous identifiables, des cadavres de bouteilles de bière par dizaines, un seau au contenu grisâtre et, sur la table, une pipe à herbe dont la fabrication ne peut qu’être artisanale. Le mur derrière le canapÊ est trouÊ et une simple ampoule pend au plafond. On se demande comment trois êtres peuvent vivre au milieu de tout ça. Car ils sont trois, je les ai croisÊs une fois, et je n’ai pas demandÊ mon reste. Non pas qu’ils soient agressifs ou menaçants, mais leur air hagard, leur Êtat d’hÊbÊtude, leurs yeux immenses, rouges et vitreux et la fade odeur de cannabis qui les environnait ne m’ont inspirÊ aucune confiance. Mauvais rÊflexe : j’ai failli changer de trottoir. Ce que je n’ai pas fait. J’ai alors pu entendre la sorcière dire au chat :  Mogg, il te reste combien ? , lequel lui a rÊpondu :  Cinq dollars, Megg, en comptant les trois que j’ai pris à Owl. . Le hibou qui les suivait haussa les Êpaules. J’espère ne plus les recroiser.
EN COUVERTURE — 28
Thibaud Hérem
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Bunjae, encre de chine et aquarelle, 2020.
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Miami beach hut, encre de chine et aquarelle, 2019.
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Thibaud HÊrem a longtemps arpentÊ les rues de Londres avant de revenir à son Niort natal pour mieux parcourir la planète. Car c’est au milieu des façades d’immeubles du monde entier que ce grand voyageur puise son inspiration. Stakhanoviste du dessin, il passe entre 200 et 600 heures pour rÊaliser une illustration ; amoureux  d’architecture et de construction, il aime avant tout transmettre des Êmotions par la finesse et la vibration de son crayon. RemarquÊ par son incroyable interprÊtation du Grand Budapest Hotel, ce portraitiste en bâtiment se nourrit de l’histoire de nos rues pour subtilement donner vie à ces êtres de briques et de ciment. On en a profitÊ pour lui demander de dessiner la nôtre. 29 — EN COUVERTURE
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Soho house, dean street, encre de chine et aquarelle, 2018.
Tout a vraiment commencÊ là -bas. Il y a quelque chose qui se passe au niveau de l’architecture londonienne, qui est vraiment très singulière. Il y a vraiment une certaine forme d’individualitÊ des maisons, des constructions, pas forcÊment de cohÊrence d’une façade à l’autre. Et c’est là oÚ je me suis dit que je pouvais vraiment rÊaliser des  portraits d’architecture  avec tout ce que cela peut vouloir dire : essayer de crÊer de la narration à partir d’une image figÊe. À Londres, chaque bâtiment a sa propre
Et c’est dans les rues de Londres que tout s’est accÊlÊrÊ ?
Un peu pour des questions d’opportunitÊ en rÊalitÊ et un peu par hasard aussi. L’intÊrêt pour l’architecture est venu au fur et à mesure de ma pratique. Je cherchais à faire des dessins très dÊtaillÊs et justement à m’Êchapper un peu des dessins  obligatoires . L’architecture Êtait intÊressante pour moi car elle questionnait la pratique du dessin en lui-même. Toutes ces contraintes techniques, cet aspect dÊtaillÊ m’a beaucoup plu, y compris pour ce côtÊ laborieux que j’affectionne particulièrement. Et puis, finalement dans un second temps, je me suis passionnÊ pour le sujet lui-même, l’architecture.
Comment t'es-tu intÊressÊ à l’architecture en particulier ?
À l’origine, je n’avais pas de pratique vraiment dÊfinie, je dessinais mais je me posais pas mal de questions sur la direction oÚ aller, pourquoi je dessinais, etc. Je ne voulais pas entrer dans l’univers du comics ou de la bande dessinÊe à proprement parler. Je me suis dirigÊ vers l’illustration à l’anglaise, avec un style qu’on qualifierait de plus  classique . Et puis c’est par des rencontres et par mes voyages que les choses ont ÊvoluÊ. Quand je suis arrivÊ à Londres en 2006. J’avais un book personnel très ÊtoffÊ mais un book professionnel quasiment vide. Et j’ai vu une petite annonce de dessin d’architecture à la main et je me suis dit, ça, c’est fait pour moi ! C’Êtait mon tout premier dessin d’architecture et ça a conditionnÊ toute la suite‌
Pourquoi les dessins de façades ?
Je viens du graffiti à l’origine donc la rue a toujours eu une vraie importance dans mon travail. J’ai grandi à Niort et je me suis pas mal entraÎnÊ, lors de quelques escapades, à peindre des fonds, rÊaliser des fresques avec des paysages urbains, la classique skyline qu’on voit souvent en graffiti. DÊjà des bâtiments en rÊalitÊ‌ Dans une petite ville comme ça, à l’Êpoque, le graffiti Êtait parfois le meilleur moyen de rencontrer le milieu de l’art. Et ça m’a aussi permis de faire la connaissance de graphistes, d’illustrateurs qui faisaient ça à côtÊ de leur pratique quotidienne. Ce mouvement a ÊtÊ très important pour l’Êpoque. Et puis, plus tard, il y a eu les rues de Londres‌
Comment la rue t’a-t-elle influencÊ ?
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
EN COUVERTURE — 30
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Against The Machine, encre de chine et aquarelle, 2019.
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Nouveau Redwood, encre de chine et aquarelle, 2020.
Bonsai 1, encre de chine et aquarelle, 2020.
" Et c’est là oÚ je me suis dit que je pouvais vraiment rÊaliser des  portraits d’architecture  avec tout ce que cela peut vouloir dire : essayer de crÊer de la narration à partir d’une image figÊe. "
J’ai une formation assez atypique peut-être‌ J’ai commencÊ par un bac scientifique que j’ai eu pÊniblement. Après j’ai fait une mise à niveau en arts appliquÊs parce que je ne voulais pas rentrer directement en BTS avec mon bac et j’ai enchaÎnÊ avec un BTS en communication visuelle, trois ans à Quimper. J’ai ÊtÊ diplômÊ en 2005. Et je suis parti à Londres ensuite.
Quel est ton parcours ?
Oui, tout à fait ! Dans l’Êlaboration du dessin, je fonctionne aussi par Êtapes successives. Ce sont plusieurs strates qui permettent progressivement de dessiner, de construire le bâtiment. La filiation existe, y compris dans mon rapport à la temporalitÊ. Pour un bâtiment normal, je mets entre 200 et 600 heures donc j’ai le temps de rentrer vraiment dans son histoire. Pendant ce laps de temps, je m’imagine tout un tas de choses‌ Je m’imagine les tailleurs de pierre, les charpentiers, les architectes, l’ambiance sociale Êgalement. L’histoire m’intÊresse beaucoup, le contexte de construction est fondamental car il explique souvent beaucoup de choses sur le pourquoi et le comment de tel ou tel bâti. Pour moi, peu importe l’Êpoque, peu importe le contexte, de toute façon, en y regardant de plus près, je vais toujours trouver quelque chose à quoi me raccrocher.
Est-ce qu’on peut faire un parallèle entre les Êtapes de la rÊalisation de ton dessin et les Êtapes de la construction d’un bâtiment ?
Non, je suis de retour dans ma ville natale, à Niort. En rÊalitÊ, je passe le plus clair de mon temps à l’Êtranger, sauf cette annÊe bien entendu‌ Je voyage beaucoup au grÊ des commandes. Grâce à ma pratique, j’ai la chance d’avoir accès à plein de choses dans plein de pays diffÊrents. Que ce soit dans un tout petit village au fin fond de Chypre, ou en plein centre de Tokyo, je trouve toujours un espace d’Êmerveillement, en lien avec l’architecture ou la nature aussi d’ailleurs. Mais il y a encore plein d’endroits que je rêve de dÊcouvrir. Je suis quand même limitÊ par le temps car je fais entre cinq et dix grands dessins par an‌ Je ne suis pas trop dans le quantitatif du coup‌
Tu vis toujours là -bas ?
personnalitÊ. Dans mon imagination, j’essaie donc de personnifier chaque immeuble en jouant sur son histoire, ses Êtapes de construction et tout ce qui s’est passÊ à travers les Êtapes de sa rÊalisation. Je fais Êgalement beaucoup de recherches et de rencontres avec des spÊcialistes de l’architecture, de l’histoire locale, afin de m’imprÊgner au mieux de ces bâtiments.
31 — EN COUVERTURE
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Liberty London, encre de chine et aquarelle, 2011.
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Grand Budapest Hotel, encre de chine et aquarelle, 2016.
→ Interview : J. Martinez → thibaudherem.com
Pas mal de choses même si c’est jamais facile de parler de travaux en cours. En tout cas, une collaboration avec Conran Shop – une ligne de magasins – en CorÊe. Un travail pour le studio Tomboy. Et puis plein de choses très diffÊrentes en rÊalitÊ. Là je vais travailler sur une ligne de vêtements par exemple. J’essaie aussi de travailler sur un livre mais avec ma pratique du dessin c’est un peu compliquÊ en termes de temps. Je fais des pauses entre les livres parce qu’il me faut pas mal de temps pour en rÊaliser un‌ Je fais pas mal de commandes commerciales ou privÊes en parallèle. Je fais aussi des expositions oÚ je produis pas mal de choses personnelles que je montre dans plusieurs galeries.
Et pour l’annÊe à venir, sur quoi travailles-tu ?
Ça change un peu chaque jour à vrai dire, au grÊ de mon humeur ! Mais les moments clÊs, je dirais Liberty, mon premier dessin personnel sans commande et qui a ÊtÊ mon premier portrait d’architecture rÊellement. Ça a ÊtÊ un tournant fort, dans ma pratique aussi, parce que ça m’a permis de comprendre et de montrer ce que je voulais faire. Et ça a dÊclenchÊ pas mal de choses par la suite. C’est vraiment un symbole très important. Par la suite, dans une tout autre ambiance, il y a eu Le Grand Budapest Hotel qui est devenu iconique dans ma pratique et qui a reprÊsentÊ quelque chose de très personnel et important pour moi et qui a aussi entraÎnÊ tout un tas de choses sympathiques par la suite. Enfin, une exposition à la Albus Galerie à SÊoul il y a deux ans oÚ ils m’ont donnÊ quatre Êtages pour montrer ma pratique et mon travail et ça a rencontrÊ un succès hallucinant auquel franchement, je ne m’attendais pas. Encore aujourd’hui on m’en parle. Depuis, ils sont devenus ma galerie officielle et on prÊpare d’ailleurs une nouvelle exposition. C’est en grande partie cette exposition qui a façonnÊ ma pratique professionnelle actuelle.
Quels seraient les projets qui ont le plus comptÊ pour toi ?
Toujours les grands classiques : SempÊ, Osamu Tezuka, Christophe Blain, et plein d’autres‌ Et puis les amis Jean Jullien et Yann Lebec Êvidemment‌ C’est vrai que les copains sont d’une inspiration quotidienne absolue, une source de motivation gÊniale. Après j’aime bien aussi trouver des ÊlÊments d’inspiration chez des personnes qui ne sont pas des artistes, des gens qui accordent beaucoup d’importance au travail, en particulier dans le monde de l’artisanat oÚ le savoir-faire technique est primordial. C’est quelque chose que je retrouve dans mon travail et dans lequel je me complais aussi parfois : un grand nombre d’heures passÊes à retravailler des dÊtails pour tenter de faire passer une Êmotion particulière. C’est vrai que plus la masse de travail, de dessin, est importante, en fonction de la commande Êvidemment, et plus j’ai tendance à être enthousiasmÊ. Pour revenir à Jean (Jullien), qui, lui a un travail au trait beaucoup plus spontanÊ, on partage pourtant, et ça peut paraÎtre Êtrange, une vision similaire du dessin, justement dans cette volontÊ de faire passer une Êmotion par le trait. Et puis un dessin simple est souvent très compliquÊ à faire car il faut trouver la synthèse absolue pour faire passer son sentiment. Moi, c’est vrai que je peux me cacher derrière des dÊtails, derrière mes heures de travail. Les gens vont d’abord s’attacher à la performance avant de critiquer le sujet même du dessin. Mais que ça soit Jean ou moi finalement, chacun dans nos pratiques, nous avons besoin de dessiner chaque jour, de nous entraÎner, pour rÊussir à faire passer nos sentiments, nos Êmotions. Ma vision du dessin est assez simple en rÊalitÊ. C’est juste un sentiment qui se transmet par le trait. Parfois ça ne s’explique pas plus que ça. C’est ce que j’aime dans ce que je fais, ce simple Êchange de sentiments par la force du dessin, c’est assez gÊnial.
Et cette Êternelle question, quelles sont tes sources d’inspiration ?
EN COUVERTURE — 32
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" Pour un bâtiment normal, je mets entre 200 et 600 heures donc j’ai le temps de rentrer vraiment dans son histoire. Pendant ce laps de temps je m’imagine tout un tas de choses‌"
33 — EN COUVERTURE
Battersea, encre de chine et aquarelle, 2012.
Shibuya Pact, encre de chine et aquarelle, 2020.
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đ&#x;‘€ CRÉATIONS ORIGINALES — 34
CRÉA TIONS ORIGI NALES On ne peut pas y couper, tout le monde porte un regard sur sa rue. Un regard amoureux ou dÊtestable, tendre ou gênÊ. Et ce, qu’on soit du côtÊ de Madrid, SÊoul, Tokyo ou Paris.
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Dans les pages qui suivent, huit illustrateurs brillants ont eu l’occasion de dessiner leur rue. Avec les diffÊrentes conceptions qu’ils peuvent en avoir, ce qu’ils y mettent personnellement et ce qu’elle leur donne en retour. Le thème Êtait  Dans ma rue , et la libertÊ totale, dans les limites du format magazine. Le rÊsultat est non seulement beau, mais aussi fascinant face à un espace qui nous concerne tous tout le temps, qu’on le veuille ou non. Remercions ici Nahum Kim, Ana Galvaù, Quentin Bohuon, LÊonie Boss, Woo Younsik, Jinhwa Jang, Isao Aoyama, Dom Kesterton pour la part d’eux-mêmes qu’ils nous ont donnÊe.
35 — CRÉATIONS ORIGINALES
kimnahum.com
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Nahum Kim | Untitled
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Ana GalvaĂą | Buenavista
anagalvan.com
CRÉATIONS ORIGINALES — 36
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ð&#x;‘€ 37 — CRÉATIONS ORIGINALES
instagram.com/bohuonquentin
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Quentin Bohuon | Le ballet de Brant
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Leonie Bos | Amsterdamse School
leoniebos.nl
CRÉATIONS ORIGINALES — 38
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39 — CRÉATIONS ORIGINALES
instagram.com/wooyounsik
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Woo Younsik | Crushing Jade
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KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Jinhwa Jang | Digital Media City
instagram.com/jinhwajangart
CRÉATIONS ORIGINALES — 40
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41 — CRÉATIONS ORIGINALES
aoyamaisao.com
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Isao Aoyama | Metropolitan tramcar
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KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Dominic Kesterton | Nestled
dominickesterton.com
CRÉATIONS ORIGINALES — 42
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đ&#x;‘€ 43
ÂŤÂ La rue assourdissante autour
 Ma rue est de moi hurlait / Longue, mince,
bourrĂŠe de en grand deuil, douleur
vices. À chacun majestueuse / Une femme passa,
ses dÊlices, à d'une main fastueuse / Soulevant,
chacun sa 8.6  balançant le feston et l'ourlet 
- Doc GynÊco in  Dans ma rue  passante  in Les Fleurs du Mal
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Charles Baudelaire,  À une
đ&#x;‘€ DOSSIER — 44 KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
C
Morgane Fadanelli
’est un fait : les mondes de l’imaginaire n’offrent ni toit sur la tête, ni table de travail, ni promo sur le papier WC. Les illustrateurs, oui, sont bien obligÊs d’habiter quelque part. Et si ce n’est l’artiste le plus ascÊtique, nos amis crÊatifs se doivent de garder un minimum de contacts avec ce qui les entoure. C’est leur survie qui est en jeu. À ce sujet, la sociologie la plus rudimentaire nous commande de dire que l’individu est, au moins en partie, le produit de son environnement. Qu’on le subisse ou qu’on l’embrasse. Les quatre dessinateurs que nous avons rencontrÊs ont choisi le roulage de
patin sans Êquivoque, prenant tout ce que leurs alentours avaient à leur offrir. Nous avons voulu comprendre avec les Marseillais Émilie Seto et BenoÎt Guillaume, la Lyonnaise Morgane Fadanelli et la Haute-Beaujolaise CÊline ThouÊ oÚ ils vivent, ce qu’ils vivent et comment leur ville, leur quartier, leur rue – ou Êventuellement leur route de campagne – ont pris place dans leur art. Pour ces quatre-là , comme le dit Émilie Seto, c’est sÝr,  la ville oÚ l’on vit a une grosse influence sur le travail qu’on produit .
Dans son cas bien particulier, c’est assez difficile de passer à côtÊ. Un coup d’œil sur son compte Twitter et l’affaire est pliÊe. Les images des quartiers marseillais se suivent, revus et corrigÊs par son style reconnaissable immÊdiatement : vif, colorÊ, aux perspectives alÊatoires et avec une grande attention portÊe au bâti et aux traces oubliÊes de notre sociÊtÊ. Émilie Seto, originaire de Lyon, est installÊe depuis seulement deux ans à Marseille dans le quartier des Cinq-Avenues.  C’est pas celui que je dessine le plus. Souvent, quand je dessine, c’est un quartier qui est à cinq minutes d’ici, qui s’appelle La Belle
de Mai.  Tout simplement parce que  le quartier de la Belle de Mai, c’est un quartier un peu fou, même au niveau urbanistique. Je passe souvent par là lorsque je me balade . C’est une ambiance singulière, aussi, que BenoÎt Guillaume est venu chercher quand il a quittÊ Paris
nu ue je suis ve  C’est ce q venant ici. chercher en ailleurs  Être un peu
• TON QUARTIER PRÉFÉRÉ : la Croix-Rousse • TA RUE PRÉFÉRÉE : la rue de l’Alma, un coin cachÊ dans les hauteurs et ma vue prÊfÊrÊe de jour comme de nuit • TON COMMERCE PRÉFÉRÉ : le cafÊ Diploid • UN DÉTAIL DE LA VILLE QUI TE FASCINE : les points de vues sur la ville, les montagnes et les glaciers • UN BÂTIMENT : le musÊe des Beaux Arts et sa cour intÊrieure • UNE OEUVRE D’ART : les carreaux rÊparateurs d'Ememen • LA COULEUR DOMINANTE SELON TOI : ocre •
À gauche : Place Fernand Rey, (Lyon 1er) À droite : Vue depuis Croix-Paquet (Lyon 1er)
đ&#x;‘€ 45 — DOSSIER
En dessous : Les Pentes de La Croix Rousse (Lyon 1er), Morgane Fadanelli.
pour Marseille. ÂŤÂ Moi, j’habite Ă Belsunce qui est un quartier juste en dessous de la gare Ă droite. Ça a toujours ĂŠtĂŠ un quartier d’immigration. Maintenant c’est pas mal maghrĂŠbin, un peu turc, ça commence Ă ĂŞtre un peu chinois. On n’entend pas beaucoup parler français dans la rue. C’est lĂ que je suis depuis sept ans, depuis que je suis arrivĂŠ Ă Marseille.  Et l’auteur du rĂŠcent Bus 83, avec Ramona Bădescu, qui plonge dans le quotidien des usagers de cette ligne fameuse, ne s’en plaint certes pas. Ses lignes enlevĂŠes et son trait chaleureux se plaisent Ă baigner dans une ville aussi vivante et foisonnante que Marseille : ÂŤÂ C’est ce que je suis venu chercher en venant ici. ĂŠtre un peu ailleurs. 
Au dessus : dessin en cours de Morgane Fadanelli
verdure. On a même une petite basse-cour avec des canards, des oies.  Ce cadre de vie lui va comme un gant et nourrit pleinement sa nouvelle obsession pour les paysages, comment ils se forment et comment on les forme. Mais au-delà de ces avantages d’ordre spirituel, elle y a aussi trouvÊ du confort et de l’espace, nÊcessaire à cette illustratrice multitâche. Parce que  pour la gravure et la typo, qui nÊcessite de grands meubles, des presses, etc., on avait besoin de beaucoup d’espace . Morgane Fadanelli n’a pas ce genre de problème. Un crayon à papier, une table lumineuse, de l’encre ecoline et roule. À ce titre, son petit appartement du quatrième arrondissement de Lyon,  à côtÊ du Gros Caillou , lui suffit amplement. Les vues de Lyon et de la Croix-Rousse qu’elle rÊalise depuis le premier confinement n’en sont pas moins saisissantes. PlacÊe devant la nÊcessitÊ impÊrieuse et personnelle de quitter la capitale, elle a choisi au doigt levÊ la capitale des Gaules pour y continuer son activitÊ.  Je me suis retrouvÊe à Lyon par hasard en partant de Paris. J’avais de super bons avis sur Croix-Rousse et j’ai eu la chance d’y trouver un appart direct. 
En dessous : Les boulistes de la Place Sathonay (Lyon 1er), Morgane Fadanelli.
e, ouvÊ du calmiel. r t a n o i, Ic  c l’espace, du du vert, de uvÊ le ciel  On a retro
Au dessus : Rue des Capucins (Lyon 1er) La Croix Rousse (Lyon 4ème)
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Étrangement, c’est le contraire qui a poussÊ CÊline ThouÊ à s’installer au Razay, plus petite commune du Rhône, avec sa soixantaine d’habitants tout juste. Elle et son compagnon sont originaires de la campagne et, s’ils ont côtoyÊ les mÊtropoles durant leurs Êtudes, ils en ont soupÊ.  Avant, on Êtait à Lyon, avec un atelier de gravure et typo. On est partis parce qu’on Êtait fatiguÊs de la ville. Ici, on a trouvÊ du calme, du vert, de l’espace, du ciel. On a retrouvÊ le ciel.  Pour ce retour à la terre, ils n’ont pas fait semblant et pataugent quotidiennement en pleine nature.  Notre maison est en plein cœur de la forêt, en pleine nature, dans la
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BenoĂŽt Guillaume
En dessous : Escaliers Saint-Charles (Marseille), Benoit Guillaume.
• TON QUARTIER PRÉFÉRÉ : le massif de la Nerthe • TA RUE PRÉFÉRÉE: le Boulevard d'Hanoï • TON COMMERCE PRÉFÉRÉ : la boulangerie tunisio-Êgyptienne de la rue Longue des Capucins, fermÊe depuis le confinement, pas pour toujours j'espère • UN DÉTAIL DE LA VILLE QUI TE FASCINE : les pistes cyclables • UN BÂTIMENT : la chapelle de la Vieille CharitÊ • UNE OEUVRE D’ART : les têtes rÊduites de la Vieille CharitÊ • LA COULEUR DOMINANTE SELON TOI : le blanc gabian E • MA RS LL E I
Un choix qu’elle ne regrette pas puisqu’elle y a trouvÊ le mix entre le tumulte et le calme qui caractÊrise son nouveau hood.  Il y a un côtÊ petit village qui est hyper agrÊable. Tu as l’effervescence de la ville quand tu es en bas et dès que tu remontes les pentes, tu vois les gens avec leurs petits paniers. Il y a des maisons, des petits immeubles qui sont charmants.  Un crush que le quartier des Canuts lui rend bien, offrant ses immeubles typiques à son regard aiguisÊ. Pour elle comme pour les autres, l’environnement a eu une influence directe sur son travail et lui a offert de nouvelles perspectives.
artier Un crush que le qu en, bi des Canuts lui rend es bl offrant ses immeu rd ga re typiques à son aiguisÊ Tout comme une relation charnelle, celle que l’on entretient avec son lieu de vie ne dÊroge pas aux Êtapes protocolaires de la romance. En premier lieu, il y a la dÊcouverte. Juste derrière arrive gÊnÊralement l’envie viscÊrale de s’approprier cet inconnu pour le rendre sien. Enfin, lorsque l’histoire est bien installÊe, des habitudes se crÊent et avec elles, des modes de communication
propres à chacun Êmergent. Parfois aussi, la relation s’envenime mais pas tout le temps, bien heureusement. Alors que certains font la tournÊe des troquets de quartier pour s’intÊgrer à leur nouvelle ville, le modus operandi de Morgane Fadanelli a ÊtÊ de la dessiner dans tous les sens (ndlr : les deux mÊthodes sont compatibles). Tout juste sortie d’une relation devenue routinière avec Paris, la jeune illustratrice a profitÊ des outils qu’elle avait en sa possession pour s’ accaparer la ville  de Lyon.  Je trouve qu’il y a un côtÊ hyper graphique dans la ville. Ces couleurs qui reviennent. Les pentes, on dirait des cubes qui s’empilent. Je l’observais et j’avais envie de le retranscrire. C’Êtait une façon de m’approprier certains petits espaces que j’aimais bien.  Lorsqu’elle s’y est alors sentie comme un coq en pâte, l’illustratrice a pris l’habitude de se perdre dans ses ruelles et de se percher sur ses points culminants pour capturer avec son
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
En dessous : À l'est de Marseille, Benoit Guillaume.
Au dessus : Immeubles marseillais dĂŠlabrĂŠs
En dessous : dĂŠtail de rue par Benoit Guillaume
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CĂŠline ThouĂŠ
En dessous : Topographie 54, gouache, 2019, CĂŠline ThouĂŠ.
tĂŠ ÂŤÂ Je trouve qu’il y a un cĂ´ la ns hyper graphique da ville. Les pentes, on dirait Âť des cubes qui s’empilent appareil photo ces vues qui la fascinent tant et ensuite les dessiner. ÂŤÂ Quand je dessine, j’essaie de retranscrire l’Êmotion que j’ai ressentie devant telle vue ou tel bâtiment, pourquoi je m’y suis arrĂŞtĂŠe. . Avec une palette de couleurs restreinte et un don certain pour le trait doux et joli, le Lyon vu Ă travers l’œil averti de Morgane transpire Ă travers son dessin : des rues silencieuses et paisibles, une lumière rĂŠconfortante et une douceur de vivre sans pareille. De son cĂ´tĂŠ, CĂŠline ThouĂŠ est tombĂŠe immĂŠdiatement amoureuse des paysages du quotidien qui dĂŠfilaient sous ses yeux, pour se rendre de sa maison Ă son atelier. Après avoir pris une grande place dans son cĹ“ur, ceux-ci se sont aussi attaquĂŠs Ă son cerveau qui, depuis qu’il les a croisĂŠs, se pose de nouveaux questionnements. ÂŤÂ Depuis que je suis Ă la campagne, je me questionne beaucoup sur la reprĂŠsentation du paysage, ses limites, ses frontières. Mon travail a maintenant un caractère gĂŠologique, topographique.  Chaque matin quand l’artiste typographe se rend au travail, elle ÂŤÂ rentre dans le paysage  en mĂŞme temps qu’elle ÂŤÂ rentre peu Ă
peu dans le travail , tant les deux se nourrissent l’un l’autre. Au bout du chemin : son atelier, une ancienne salle de bal de l’auberge du village, accueille les habitants comme les badauds avec qui CÊline et son compagnon artiste Êgalement ont tissÊ des liens inattendus.  On vit avec notre environnement mais aussi avec les gens qui le composent et qui sont parfois à des annÊes-lumière de nous.  SpÊcialisÊe dans la gravure et la typographie, CÊline propose des ateliers chaque mois et a notamment fait un numÊro spÊcial de sa revue Mecanica avec des locaux qui n’avaient jamais pratiquÊ. La vie à la campagne comme une Êvidence : l’artiste ne reviendrait pour rien au monde en ville.
ÂŤÂ On vit avec notre environnement mais auss i avec les gens qui le composent Âť
• TON ENDROIT PRÉFÉRÉ : une gouache de Varvara Stepanova • TON COMMERCE PRÉFÉRÉ : une librairie • UN DÉTAIL QUI TE FASCINE : la mer de nuage en automne, près du Mont St Rigaud (Rhône) • UN BÂTIMENT : un immeuble de Freddy Mamani • UNE OEUVRE D’ART :  autoportrait 1916  de Sonia Delaunay • LA COULEUR DOMINANTE : vert •
Au dessus : Vue dÊgagÊe sur le paysage alentours et photos de l’atelier de CÊline ThouÊ
En dessous : Landscape is like a bed, gravure sur bois, 2019, CĂŠline ThouĂŠ. En dessous Ă droite : Hors-lieux 2, ĂŠdition limitĂŠe, gravure et typographie, 2017, CĂŠline ThouĂŠ.
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đ&#x;‘€ DOSSIER — 48
Émilie Seto
• TON QUARTIER PRÉFÉRÉ : les ChutesLavie • TA RUE PRÉFÉRÉE : le Boulevard National • TON COMMERCE PRÉFÉRÉ : chez Yassine à Noailles • UN DÉTAIL DE LA VILLE QUI TE FASCINE : les voitures • UN BÂTIMENT : les tours Labourdette à Belsunce • UNE OEUVRE D’ART :  Tchiquita  de Jul
MA
RS LL E I
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 On a une vie vraiment à la mesure de ce qu’on voulait.  Un peu plus au Sud, la rencontre entre Émilie Seto et sa ville d’adoption n’a pas ÊtÊ si paisible. Particulièrement sensible aux modes d’urbanisation de la ville, l’ancienne Lyonnaise a tout de suite ÊtÊ confrontÊe au fouillis architectural de Marseille.  La façon dont cette ville est amÊnagÊe est assez inhumaine. En particulier le 3e arrondissement, c’est un endroit avec des passerelles oÚ les bagnoles passent au-dessus et des gens vivent en dessous. 
ental  C’est assez fondam lle. de s’intÊresser à la vi on l, ai C’est comme le trav  y passe nos journÊes Mais pourtant, ce sont bien ces lieux mal foutus, reprÊsentant une vÊritÊ loin de l’image d’Épinal de la mer et de NotreDame-de-la-Garde, qui sont dignes d’intÊrêt pour l’illustratrice.  J’aime choisir des lieux qui sont massifs en euxmêmes, qui n’ont pas ÊtÊ bien pensÊs, bien rÊflÊchis. Mais pas loin, il y a aussi des endroits paradisiaques ici, c’est ça qui est fou.  Citadine depuis toujours, Émilie reprÊsente naturellement l’urbain dans ses dessins.  C’est assez fondamental de s’intÊresser à la ville. C’est comme le
Au dessus : Sous le Petit Nice (Marseille), Emilie Seto. Rue FĂŠlix Pyat (Marseille), Emilie Seto.
 J’aime choisir des lieux qui sont massifs en eux-mêmes
En dessous : Voitures et port de Marseille, Emilie Seto.
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Ă€ Gauche et au dessus : Quartier des Cinqavenues, Marseille
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travail, on y passe nos journÊes. J’ai même du mal à voir comment je pourrais passer à côtÊ de cet objet.  ArmÊe de ses crayons de couleur, elle alterne entre des dessins à la volÊe croquÊs parfois à l’extÊrieur et d’autres rÊalisÊs à partir de photos prises prÊcÊdemment. Dans tous les cas, ceux-ci retranscrivent le tumulte de quartiers moins reprÊsentÊs artistiquement mais provoquant une Êmotion vive et renforçant le sentiment d’attachement territorial de bon nombre de locaux.
ÂŤÂ Je travaille pas mal sur l’anecdotique, le hasard, des scènes que je vais trouver dans la rue, que je n’aurais pas prĂŠvues  Non loin de lĂ , BenoĂŽt Guillaume dĂŠgaine lui aussi son carnet en pleine rue, parfois simplement pour le plaisir de confronter sa vision artistique de Marseille Ă celles des passant.e.s. Lorsqu’il a franchi le cap de dĂŠmĂŠnager Ă Marseille, l’illustrateur s’est mis Ă la dessiner pour mieux la comprendre. Au dĂŠtour de ses balades, des sujets retiennent son attention allant de la place de la Plaine au gros penchant de Marseille pour les travaux. ÂŤÂ Quand je me dis “tiens lĂ , il y a vraiment matière
à dessin�, j’y vais.  Tout comme Émilie, c’est l’Ênergie unique de Marseille et ses nombreux paradoxes qui fascinent l’ex-Parisien.  C’est vrai que je suis un petit peu attirÊ parce qu’il y a en friche à Marseille. Le contraste entre ce qui est neuf et ce qui est dÊlabrÊ. Il y a d’ailleurs plus de dÊlabrÊ que de neuf. Tout ce qui est vivant, ce qui est foule en mouvement est quelque chose qui m’intÊresse dans mon boulot.  Pour BenoÎt, le dessin est aussi et surtout un moyen direct pour Êtablir une communication avec les locaux. Cette capacitÊ d’observation du milieu qui l’entoure se devine d’ailleurs facilement en regardant ses œuvres.  Je travaille pas mal sur l’anecdotique, le hasard, des scènes que je vais trouver dans la rue, que je n’aurais pas prÊvues.  Ce n’est une rÊvÊlation pour personne, l’artiste, comme tout être humain, est le produit de son environnement. Quand ils se rencontrent, tous deux s’embarquent main dans la main dans un cercle vertueux. Si l’environnement dÊploie ses charmes et dÊvoile ses caractÊristiques les plus intimes à l’artiste, alors celui-ci s’applique pour lire à travers lui et le rÊinventer à chaque coup de crayon. Car comme le dit Émilie Seto pour conclure,  ce ne sont pas les influences graphiques d’un.e illustrateur. rice qui le dÊfinissent mais là oÚ il vit, les endroits oÚ il Êvolue, ce que j’appelle le tableau global .
Au dessus : Le Petit Nice en juillet (Marseille), Benoit Guillaume.
En dessous : Belsunce (Marseille), Emilie Seto.
→ Textes et propos recueillis par : É. Quittet & M.Gueugneau → Mise en page : A. Avice
KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Au dessus : Le Petit Nice en juillet (Marseille), Benoit Guillaume
đ&#x;‘€ INVITATION — 50 KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Le jeu vidÊo dans la rue : de la rage à l’amour Ancien critique cinÊma à Chronic'Art, Trois couleurs ou Radio Campus Paris, Yann François a basculÊ dans le monde merveilleux du jeu vidÊo en tatant, il y a quelques annÊes de la manette pour Joystick et VidÊo Gamer. Aujourd'hui chez JV, il est aussi professeur de game studies à l'Êcole ICAN à Paris.
đ&#x;‘€ 51 — INVITATION KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Le jeu vidÊo a ce pouvoir unique de nous tÊlÊporter au cœur d’espaces urbains toujours plus immersifs. De Sim City à GTA, en passant par Assassin’s Creed, la ville et ses artères n’ont jamais ÊtÊ aussi crÊdibles, aussi fascinantes à fouler du pied. Et pourtant, l’histoire entre le jeu vidÊo et la rue n’a rien d’une idylle, mais relève plutôt de l’amour vache. Dans ses vertes annÊes, ses bornes d’arcade voient dans la ville le cadre parfait d’une action nerveuse et sordide, à l’image de ses bas-fonds. Tout comme chez Dirty Harry ou Charles Bronson, la rue devient une jungle urbaine, une Sodome et Gomorrhe oÚ grouille le rebut de l’humanitÊ. Double Dragon, Streets of Rage, Shinobi, tous partagent la vision d’un même cloaque de bÊton et d’asphalte, qu’il faut nettoyer de sa vermine (des gangs, des punks, des ninjas, tout y passe) à la manière d’une Êcurie d’Augias. Mais le jeu de baston n’est pas le seul à jouer avec ce genre d’iconographie urbaine. Il n’y a qu’à se pencher sur Paperboy,  simulation  bon enfant (au demeurant) de livreur de journaux au cœur d’une americana banlieusarde et lisse. En rÊalitÊ, sa rue n’est qu’une enfilade infernale de menaces faussement banales (un chien, une tondeuse à gazon, etc.) sur lesquelles on s’Êcrase en boucle, tels des Sisyphe de la modernitÊ citadine. Faut-il voir dans cette vision cauchemardesque une forme de catharsis, de celles qui compilent nos angoisses et psychoses de la quotidiennetÊ, pour mieux nous laisser les rÊduire en miettes ? Ce qui est certain, c’est que ce pessimisme urbain a la peau dure, bien qu’il sache changer de forme d’annÊe en annÊe. La sÊrie des Grand Theft Auto est devenue cultissime pour avoir fait de la ville un terrain de jeu à l’ampleur romanesque inÊdite, doublÊ d’un enfer pavÊ de mauvaises intentions, oÚ tout est prÊtexte au crime, l’avilissement et la tragÊdie sanglante. Même si nous faisons partie intÊgrante de ces citÊs luxuriantes (nous y avons toujours une  planque  pour changer de tenue ou sauvegarder), la rue n’est qu’une ressource comme une autre, parfois un obstacle à contourner (les guerres de gang, les courses-poursuites avec la police), dans notre ascension vers le trône mafieux. Et que dire d’un Dishonored ?
đ&#x;‘€ INVITATION — 52 KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Dans cette gÊniale simulation d’assassin, teintÊe de culture steampunk, nous nous faufilons dans le gruyère d’une citÊ orwellienne, dÊsertÊe par des habitants fuyant sa tyrannie et son ÊpidÊmie de peste, laissant là leur quotidien, restituÊe avec un rÊalisme et un art du dÊtail jamais ÊgalÊ. Comme vidÊe de sa substance première, la rue devient ici un tombeau, un mausolÊe que l’on visite en archÊologue, cherchant toujours plus à excaver l’intimitÊ passÊe de ses fantômes, comme une relique oubliÊe du temps. Aussi menaçante soit-elle, la rue est aussi cet Êcosystème total et vivant que le jeu vidÊo ne va cesser de sonder pour proposer d’innombrables expÊriences narratives. Un monde à part, dotÊ de ses propres règles et mythologies, que le jeu de rôle, notamment japonais, va même architecturer comme un miroir de ses personnages et, par extension, de ses joueurs. Un des premiers (et plus beaux) à le faire se nomme Mother (Earthbound chez nous), odyssÊe adolescente made in Nintendo à partir de 1989. Dans cet univers parallèle (qui connaÎtra trois Êpisodes), un gamin de 12 ans se donne pour mission de sauver son pays (une reproduction fantasque des ÉtatsUnis) face à une invasion alien. S’il Êpouse clairement la forme d’un conte de fÊes, Mother se diffÊrencie à l’Êpoque de toute concurrence par son choix de troquer le Landerneau fantasy pour celui de la ville  à l’amÊricaine , que l’on arpente sous toutes ses coutures. Les auberges et autres donjons cèdent leur place à une pizzeria, un zoo, une Êcole primaire, et autres jalons de la vie quotidienne. La ville, le quartier d’enfance, le foyer deviennent la nouvelle toile de fond d’un rÊcit hÊroïque, qui se double ici d’un très beau portrait familial, et d’un chemin initiatique vers l’âge adulte. Aujourd’hui, la plupart des RPG marchent dans les traces de cet hÊritage, et font souvent de l’environnement quotidien un havre de paix, une Êchappatoire pour se ressourcer entre deux quêtes extÊnuantes. On peut en retenir deux. La saga Persona tout d’abord, qui se penche à chaque Êpisode sur le destin d’un ado, en se focalisant sur une annÊe complète (un jour = un tour de jeu) de sa vie. Dernier Êpisode en date, Persona 5 (2017) se dÊroule entre Tokyo, plus prÊcisÊment dans une petite ruelle d’un quartier commerçant oÚ rÊside notre hÊros, et son lycÊe, en pÊriphÊrie de la ville. Chaque jour, les cours et les allers-retours Êtouffants en mÊtro s’enchaÎnent de façon quasi militaire. À cette rÊalitÊ harassante, et critique implicite de la sociÊtÊ nippone, s’oppose le monde de ses propres rêves, qu’il visite chaque soir sous la forme d’un cambrioleur aux multiples pouvoirs, qui
đ&#x;‘€ KIBLIND Magazine → 74 → Dans ma rue
Visuels dans l'ordre d'apparition : GTA V, 2008. Double dragon, 1987. Streets of rage, 1991. Paperboy, 1984. Dishonored, 2012. Persona 5, 2016. Yakuza, 2005. Euro truck 2, 2012. House flipper, 2018.
53 — INVITATION
doit affronter et annihiler les chimères de son propre inconscient. Un tel rythme de jeu pourrait s’avÊrer monotone, voire plombant. C’est tout le contraire : jamais un jeu n’a aussi bien montrÊ cette mÊcanique, complexe et triviale à la fois, du quotidien, symbolisÊe entre autres par tous ces endroits familiers que nous arpentons à des centaines de reprise. Si, peut-être un autre : Yakuza, autre saga nippone qui nous plonge dans la rÊalitÊ professionnelle et morale des mafieux japonais. Chaque Êpisode raconte le destin passionnant d’un gangster (au grand cœur souvent), en conjuguant le rÊalisme social le plus sec au romanesque le plus hirsute. Une chose ne change pas, cependant : le dÊcor, celui de Kamuroucho, reproduction plus que fidèle du vrai quartier des plaisirs de Shibuya, dont on finit par connaÎtre par cœur chaque ruelle, chaque boui-boui, chaque bar à karaokÊ. Comme le rappelle Will Wright, le gÊnial crÊateur de Sim City et des Sims : le jeu vidÊo peut aider ses joueurs à voir leur propre ville ou leur quartier sous un œil nouveau, parce qu’il s’offre comme un outil pour rÊinventer leur propre quotidien. Aujourd’hui, nombreux sont les jeux modernes à reprÊsenter la rue pour ce qu’elle est, sans idÊalisme ni diabolisation, mais avec un souci du rÊalisme presque documentaire. Des jeux qu’on nomme job simulators, dont le concept vise à reproduire, sous forme de gameplay, les gestes les plus banals d’un mÊtier de la vraie vie. Des jeux comme Euro Truck Simulator, qui nous demande de sillonner les rues de l’Europe pour dÊlivrer toutes sortes de marchandises, ou encore comme House Flipper qui propose de retaper de vieilles baraques pour rÊembellir un quartier anonyme. Des jeux qui, à la diffÊrence de la tÊlÊ-rÊalitÊ qui fait de ces mêmes espaces quotidiens de vÊritables freak shows pour divertir les masses, rappellent une vÊritÊ essentielle : la rue est à nous, et il appartient à chacun¡e de la modeler à son image.
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Bibliothèque idÊale Dans ma rue Festival Bien Urbain
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Affichage libre de OX – ÉditÊ chez International Neighborhood Verlag, Edition A & A, 2015  Jusqu’à maintenant, je n’ai pas laissÊ beaucoup de traces de ce que j’ai fait.  Dès l’ouverture de sa monographie, l’humilitÊ de OX nous touche. InvitÊ lors de Bien Urbain en 2011 et 2013, artiste associÊ de Bien Urbain en 2017 et ancien membre des Frères Ripoulin, OX est sans conteste un des artistes les plus importants de l’art dans l’espace public. Il trouve depuis toujours son inspiration dans les panneaux de publicitÊ 4 × 3. Il y colle sans permission ses peintures imaginÊes pour le lieu, offrant aux passant.e.s des images libres et malicieuses. OX s’offre une libertÊ d’expression qui dÊpasse les cadres Êtablis grâce à une esthÊtique hors du temps, drôle et foutrement intelligente. En 2015 sort ce magnifique livreimages à la hauteur de la gÊnÊrositÊ du travail.
Urban Interventions – personal projects in public spaces de Robert Klanten & Matthias Hßbner – ÉditÊ chez Gestalten, 2010 L’art dans nos villes ne serait qu’une affaire de graffiti, de peintures murales et de sculptures en bronze ? Loin de là  ! Ce très beau livre ÊditÊ il y a 10 ans ouvre toujours aussi grand notre regard et notre imaginaire. Panneaux de signalisations fondants, châteaux de cartes en barrières de chantier, chewing-gums gÊants ÊtirÊs entre deux rues ou parcmètres tricotÊs : on y retrouve une foule d’artistes des quatre coins du monde, aux sensibilitÊs et revendications variÊes. Poètes, plasticien.ne.s ou activistes, tou.te.s nous invitent à reconsidÊrer l’espace public et à nous amuser de ses règles et contraintes, allant jusqu’à y engager nos corps en nous contorsionnant dans ses interstices, ou en nous balançant accrochÊ.e.s au bras d’une statue historique. Une invitation à la crÊation libre !
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 Reprendre la ville  – Revue Sur Mesure, 2020 (Conception graphique par le studion Chevalvert) Sur revuesurmesure.fr, des urbanistes, designers, philosophes bÊnÊvoles questionnent la fabrique de la ville. À l’issue de cycles thÊmatiques est ÊditÊe une revue papier : un objet synthÊtique, graphique et pÊdagogique qui fait dialoguer diffÊrents points de vue. La revue papier ouvre des pistes pour faire circuler les idÊes au-delà des sphères professionnelles. Dans ce cinquième numÊro oÚ nous sommes interviewÊ.e.s, c’est la rÊappropriation de la ville qui est abordÊe. S’approprier des lieux, les cultiver ou les bâtir, les animer, y crÊer ou s’y rencontrer : reprendre la ville est un travail de longue haleine et des pistes stimulantes sont avancÊes par des thÊoricien.ne.s, artistes et acteur.trice.s de terrain. À travers l’art ou par d’autres moyens, crÊons du commun dans l’espace public !
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Potente di fuoco de Leonardo / Ericailcane – ÉditÊ par Modo Infoshop, 2012 Livre d’illustrations magiques, La puissance du feu nous interpelle dès la couverture abritant une chimère d’oiseau hurlant, à grosses pattes d’ours jaune ! Une lettre Êmue de son père nous raconte l’amour qu’Ericailcane nourrit depuis toujours pour les bestioles rÊelles et fantastiques ; la missive accompagnait un carton de dessins rÊalisÊs autour de ses 5 ans. Ce retour en enfance l’encourage à rÊinterprÊter ses propres dessins 20 ans plus tard, avec son regard d’adulte et sa main d’artiste. Les illustrations parfois politiques d’Ericailcane rÊpondent ainsi aux gribouillages jouissifs du petit Leonardo, et vice versa. En 2017 le MusÊe du temps de Besançon exposait ces merveilles sur des A4, tandis que Leo, devenu Ericailcane, peignait sur une façade deux moutons de 15 m nous parlant de frontières et de libertÊ.
Memory de John Fekner – ÉditÊ par Les Éditions Juste Ici, 2019 Choisissant le pochoir comme outil de prÊdilection dès la fin des annÊes 1960 pour rÊaliser un travail in situ à base de mots peints sur les murs, John Fekner est connu pour ses centaines d’interventions politiques à New York. Contemporain de Keith Haring, il est proche de son travail dans la dimension politique et la mise en exergue des minoritÊs, mais s’en dÊmarque en troquant la dimension pop contre une esthÊtique brute et frontale, et en choisissant les lieux d’intervention pour ce qu’ils sont et non pour leur visibilitÊ. Cette publication hors normes rassemble six objets, pour six chapitres du travail de l’artiste amÊricain : une mÊmoire parcellaire issue de ses archives, mise en valeur à travers trois techniques d’impression diffÊrentes et façonnÊe à la main à l’Atelier Superseùor durant Bien Urbain 2019.
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L’association bisontine Juste Ici œuvre pour redonner sa place à l’art dans l’espace public depuis maintenant 10 ans. Point d’orgue de ses actions territoriales bienfaitrices, le festival Bien Urbain redouble chaque annÊe d’ingÊniositÊ pour transformer la ville de Besançon en un lieu d’expression et d’Êmerveillement constant. On a demandÊ à ces fins connaisseurs leurs ouvrages de rÊfÊrence sur le sujet.
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Asha Bhosle → Dum Maro Dum
Asha Bhosle, c’est une des plus grandes chanteuses indiennes. Elle chante beaucoup dans les films de Bollywood et cette chanson est dans un film très connu, c’est un classique. Je l’ai vue en concert au Châtelet. C’est un endroit assez strict et pourtant, les diasporas indiennes Êtaient rÊunies et dès que les chansons commençaient, tous se levaient et dansaient. C’Êtait fabuleux.
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Zouk Machine → PisimÊ ZoukÊ Celle-ci, elle me rappelle mon enfance, mes potes qui viennent des Antilles.
Jean-Claude Gaspard → Dhobi de Classe Je viens de l’Île Maurice et c’est la musique de mon pays, la musique de mes parents donc c’est important pour moi, c’est ma vie quoi.
NTM → Respire Je suis fan de NTM, c’est des potes.  Respire ou bien le pire est à venir , ce sont des paroles que j’adore. Je les ai vus en concert ; Joey Starr, c’Êtait un de mes soutiens quand je me suis prÊsentÊ aux Êlections municipales. C’est des gens que j’aime beaucoup. Les combats qu’ils menaient, notamment face à la police, sont plus que jamais d’actualitÊ.
Belle & Sebastian → Another Sunny Day C’est un de mes groupes prÊfÊrÊs et cet album est sorti en 2006 pendant la Coupe du monde. Je l’ai beaucoup ÊcoutÊ à ce moment-là .
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Pixies → Here Comes Your Man C’est mon groupe prÊfÊrÊ, j’aime vraiment beaucoup, j’ai un peu grandi avec ça, je les ai vus en concert, etc. C’est mon adolescence, mes premières soirÊes dans des endroits au Havre. Il y avait aussi la pop anglaise, Blur, Happy Mondays, que j’ai beaucoup ÊcoutÊe.
The Velvet Underground → I'm Sticking with You J’aime tout des Velvet, tout ce qui va avec, Lou Reed, Nico... J’imagine toujours Warhol qui traÎne pas loin de tout ça. Ce sont des gens inspirants, cool, qui ont rÊvolutionnÊ leur Êpoque.
Fleetwood Mac → Go Your Own Way C’est mon oncle d’Angleterre qui m’a offert une cassette à l’âge de 13-14 ans et ça a changÊ ma vie. Je vivais dans une citÊ HLM et c’est ce jour-là que j’ai commencÊ à Êcouter du rock’n roll.
VIKASH DHORASOO PNL → Hasta la Vista Ça, c’est pour faire un clin d’œil à mes filles qui grandissent et qui Êcoutent du rap, Jason Derulo, etc. Elles me font dÊcouvrir. Parfois, je ne suis pas très content des paroles qui sont un peu misogynes, vulgaires. Mais c’est leur vie à elles. C’est leur univers.
Elvis Presley → Christmas Song On est fan d’Elvis dans la famille, notamment ma mère. C’est le King quoi, il Êtait aussi moitiÊ indien je crois, et il se trÊmoussait comme personne.
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Les rues que l’on foule quotidiennement pour se rendre au bureau chez Kiblind se trouvent dans le 1er arrondissement à Lyon et dans le 19e à Paris. Parfois, on y croise des personnalitÊs à qui l'on fait un petit signe timide. Sauf que cette fois, on les a alpaguÊs (ou presque) pour savoir ce qu’ils Êcoutaient. DÊcouvrez donc ce qui se cache dans la playlist de notre voisine lyonnaise Sabine Quindou, autrice, rÊalisatrice, journaliste, actuelle prÊsentatrice de Thalassa et Êternelle ex-acolyte de Fred & Jamy dans l’Êmission C’est pas sorcier. Et dans celle de Vikash Dhorasoo, ancien footballeur international passÊ par l’OL, mais plus rÊcemment candidat aux Êlections municipales, consultant sportif et joueur de poker, entre autres nombreuses activitÊs. → Propos recueillis par : É. Quittet → Mise en page : G. Bonneau
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Étienne Daho → Les Chansons de l'innocence retrouvÊe (album) Et notamment  En Surface  co-Êcrit par Dominique A. Un texte qui rÊsonne avec mon expÊrience de vie. Si j’en disais davantage, je deviendrais impudique.
Miles Davis → So What (album) Le gars ne joue pas de la trompette, il s’exprime avec une trompette, il a beaucoup de choses à nous raconter, il faut l’Êcouter souvent pour tout entendre. Certaines musiques m’aident à partir de chez moi, me donnent de l’enthousiasme pour rejoindre mes Êquipes en tournage ou entamer un nouveau projet. D’autres, comme celle de Miles Davis, m’aident à rentrer, à  retrouver de l’Ênergie‌
Aretha Franklin → Amazing Grace (album live)
SABINE QUINDOU Ludwig van Beethoven → 5e symphonie (version salsa, arrangement Sverre Indris Joner, interprÊtation orchestre Kringkastingsorkesteret)
JJ Cale → Everything will be alright (album) L’album qui colle le plus à mon quartier‌  Less is more  disait JJ Cale, quelques accords de blues, simples, authentiques, de la tendresse et du  il fait bon vivre ‌
Merry Clayton → Gimme Shelter (album) La voix qui vient directement des tripes‌ ou de la Nature‌ ou de Dieu. Appelez la source comme vous voudrez, mais cette voix vient de là ‌ Libre, sauvage‌ Je ne chante pas, même dans ma salle de bain, mais dans ma tête, je chante comme elle, surtout chez moi bien à l’abri dans mon quartier.
Jimmy Hendrix → Electric Ladyland (album) dont Voodoo Chile Je l’Êcoute chez moi et partout ! Mêmes Êmotions aux mêmes moments. Sauf quand je l’ai trimballÊ sur le plateau tibÊtain oÚ je l’ai redÊcouvert. Et les Êmotions nÊes à 4 500 mètres d’altitude, je les ai ramenÊes chez moi.
AngÊlique Kidjo → Voodoo Chile Une reprise pleine de respect mais aussi d’imagination et d’africanitÊ. J’adore cette crÊativitÊ inspirante.
Wolfgang Amadeus Mozart → 25e symphonie et 40e symphonie Impossible à dÊpartager ! Que voulez-vous que je vous dise !? OÚ l’on comprend pourquoi un classique est devenu un classique ! Je l’Êcoute en boucle depuis quatre ans que je collabore avec l’Orchestre national de Lyon, surtout quand je dois effectuer un trajet à pied de 30 à 40 min. Typiquement pour aller de mon quartier à la gare Part-Dieu quand je pars en tournage. Ou bien le long des quais. Sur un bateau en mer des Caraïbes, waouh, c’Êtait bien aussi, puissant ! Mais jamais autant que lorsque je les entends en live interprÊtÊs par un orchestre symphonique.
Buena Vista Social Club → Compay Segundo (album) J’adore les musiques latines en gÊnÊral, cubaines en particulier. Le dimanche au petit-dÊjeuner, quand on a envie que ça groove à l’intÊrieur‌
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La pièce qui me met en joie, tout le destin de l’humanitÊ tel que Beethoven l’entendait (dans sa tête), sublimÊ par les rythmes salsa. Une vraie sublimation, un changement d’Êtat, de la tragÊdie à la rage de vivre. Je l’Êcoute souvent en marchant en ville‌
Je l’ai l’ÊcoutÊ sous toutes ses formes, en vinyle, en CD, dÊmatÊrialisÊ. Heureusement que le film documentaire de Sidney Pollack a enfin ÊtÊ restaurÊ. Je l’ai fait Êcouter aux habitants d’un minuscule village très isolÊ, à l’occasion d’un tournage pour Thalassa dans l’archipel des Trobriand, au large de la Papouasie-Nouvelle-GuinÊe. Tout le monde a pleurÊ, les hommes surtout. Moi aussi du coup. Inoubliable‌
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Street view journey par Nao Tatsumi L’illustratrice Nao Tatsumi a entamÊ en 2017 un voyage sans fin. VissÊe au siège de son bureau japonais, elle parcourt le monde à la recherche de paysages urbains dÊlaissÊs. Un double regard se croise ici : celui, aveugle, du logiciel Google Street View et le sien, qui voit le singulier dans le banal. Nous arpentons avec ses peintures ces rues qui pourraient être en bas de chez nous mais qui se trouvent être à Santiago du Chili, à Tilburg aux PaysBas ou à Flagstaff, dans l’Arizona. Les huit œuvres suivantes sont toutes tirÊes de cette fascinante sÊrie qui suit les pÊrÊgrinations des fameuses voitures Google, dans leur quête fantasmagorique d’omniscience. Bienvenue dans nos rues.
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Street View Journey
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Pacific Coast Hwy, California
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California, USA
Street View Journey
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Street View Journey
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Chihuahua, Mexico
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Street View Journey
Paris, France
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Street View Journey
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San Luis Potosi, Mexico
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Bernal, Mexico
Street View Journey
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Street View Journey
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Lomita, California
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Del Fresno, Mexico
Street View Journey
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22 < 27 fév. 2021
Jan Martens, Flora Détraz, Linda Hayford, Mickaël Phelippeau, Amala Dianor, Kukai Dantza...
MAISONDEL ADANSE.COM 04 72 78 18 00 • numeridanse.tv
Conception graphique et illustration KIBLIND Agence / Licences : 1-1054424, 2-1054425, 3-1054423
FESTIVAL
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Print par Maxime Gueugneau
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> SĂŠlection Kiblind s e g a s Vi du temps
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CATALOGUE â&#x2013; Ă&#x20AC; moins dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŞtre mariĂŠ avec Sammy Stein, il est compliquĂŠ de se procurer lâ&#x20AC;&#x2122;ensemble de ses publications. Ou mĂŞme un nombre consĂŠquent. Entre les introuvables, les ĂŠtrangères et les ĂŠpuisĂŠes, mĂŞme le plus transi de ses fans ne peut les possĂŠder toutes. Oh, bien sĂťr, ci ou lĂ , il est possible dâ&#x20AC;&#x2122;en approcher une paire, Ă lâ&#x20AC;&#x2122;occasion dâ&#x20AC;&#x2122;un festival ou dâ&#x20AC;&#x2122;une exposition fortuite dans le voisinage. Internet, mĂŞme, peut sâ&#x20AC;&#x2122;avĂŠrer utile. Mais avouons que Visages du temps, lâ&#x20AC;&#x2122;ouvrage-recueil publiĂŠ par les ĂŠditions Matières, nous tire une fière chandelle du pied. Regroupant dix-sept histoires courtes de la pĂŠriode 2014-2018, le dernier ouvrage du co-fondateur de la revue Collection nous permet de passer un peu de temps en sa compagnie. Ce qui est prĂŠcieux. Sammy Stein est, il faut le dire, un artiste Ă part. Son dessin, dĂŠjĂ , oscille entre des formes pures, des perspectives mĂŠticuleuses et un trait erratique qui trahit la part vivante de ce transhumanisme graphique. Ă&#x20AC; cela sâ&#x20AC;&#x2122;ajoute un coloriage plein, irrĂŠel, usant Ă foison du dĂŠgradĂŠ issu, sans doute, de son amour pour les encres et les propriĂŠtĂŠs de la risographie. On navigue dans une sorte de perfection accidentĂŠe, une neutralitĂŠ absurde et dĂŠviante, reconnaissable entre mille. Ses constructions narratives ne sont pas en reste, qui viennent elles aussi toucher aux limites du genre. Le gaufrier ĂŠclate et le spectateur doit lui-mĂŞme jeter les ponts entre les ĂŠlĂŠments. Le lecteur est fabuleux, paraĂŽt-il et, ici, particulièrement actif dans sa dĂŠmarche. Sans doute est-ce une façon pour lâ&#x20AC;&#x2122;auteur dâ&#x20AC;&#x2122;agripper plus fort encore sa proie et de sâ&#x20AC;&#x2122;assurer que celleci est bien accrochĂŠe pour la plonger ensuite dans ses mondes imaginaires. Car si Sammy Stein se donne autant de mal, câ&#x20AC;&#x2122;est quâ&#x20AC;&#x2122;il veut ĂŞtre sĂťr quâ&#x20AC;&#x2122;on le suive jusquâ&#x20AC;&#x2122;au bout de ses voyages. Se projetant en avant, en arrière, Ă droite et Ă gauche de la frise chronologique, le dessinateur parisien remue son lecteur Ă coups de dystopies et de dimensions parallèles. Les mondes et les civilisations disparus sont son obsession. Les expositions et les collections sont les indices de ces mondes sitĂ´t inventĂŠs et dĂŠjĂ morts. Lâ&#x20AC;&#x2122;art devient alors un marqueur du temps qui passe, artefact paradoxal, vain et nĂŠcessaire, ĂŠphĂŠmère et intemporel. Visages du temps nâ&#x20AC;&#x2122;est certainement pas un titre au hasard et les portraits qui le composent, aussi divers soient-ils, tĂŠmoignent tous de la passionnante rĂŠflexion de lâ&#x20AC;&#x2122;artiste de bande dessinĂŠe sur ce quâ&#x20AC;&#x2122;il est en train de faire. Dans la forme, comme sur le fond. â&#x2020;&#x2019; Visages du temps de Sammy Stein aux Ă&#x2030;ditions Matière, 280 pages, 29 â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; matiere.org
đ&#x;&#x2018;&#x20AC; SĂ&#x2030;LECTION PRINT â&#x20AC;&#x201D; 70 KIBLIND Magazine â&#x2020;&#x2019; 74 â&#x2020;&#x2019; Dans ma rue
Long y r o St Sh
ADDICTIONS â&#x2013; Tout est bien organisĂŠ,
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agencĂŠ minutieusement pour que nous retombions dans le piège Ă chaque fois. Lorsque le nouveau Megg, Mogg & Owl sort, on afflue en masse. Peu importe quâ&#x20AC;&#x2122;il sâ&#x20AC;&#x2122;agisse cette fois dâ&#x20AC;&#x2122;une compilation de rares et quasi-inĂŠdits. Peu importe que la suite directe de Winter Trauma (qui sâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtait finie sur un cliffhanger, les salauds) nâ&#x20AC;&#x2122;ait toujours pas de date de sortie. Lâ&#x20AC;&#x2122;occasion nous est faite de retrouver nos hĂŠros droguĂŠs, sales et passablement dĂŠprimĂŠs : nous sautons. Notre atterrissage se fait au beau milieu dâ&#x20AC;&#x2122;un Long Story Short dont lâ&#x20AC;&#x2122;allure dĂŠtonne par rapport au reste de la sĂŠrie. Petit, ĂŠpais et imprimĂŠ sur des pages de couleurs diffĂŠrentes, il voit se succĂŠder des strips aux origines diverses, du plus chiadĂŠ au plus instinctif, selon les conditions dans lesquelles ils ont ĂŠtĂŠ rĂŠalisĂŠs. Le nouvel album français de Simon Hanselmann agrège en effet des mini-histoires piochĂŠes dans des fanzines ĂŠpars et rĂŠalisĂŠes entre 2016 et 2020. Mais le patchwork nâ&#x20AC;&#x2122;est pas si dĂŠcousu quâ&#x20AC;&#x2122;il nâ&#x20AC;&#x2122;y paraĂŽt puisque des ĂŠlĂŠments reviennent de loin en loin et constituent tout de mĂŞme une sorte de petite chronologie. Une temporalitĂŠ parallèle, disons, avec celle de la sĂŠrie en cours. Quâ&#x20AC;&#x2122;on se rassure, les colocs Megg la sorcière, Mogg le chat et Owl le hibou y traĂŽnent encore leurs nĂŠvroses, bien soutenus par les montagnes de substances toxiques quâ&#x20AC;&#x2122;ils ingèrent et la prĂŠsence toujours rassurante de Werewolf Jones, la boussole qui leur indique le pire. Le mĂŠlange doux-amer du trash, de lâ&#x20AC;&#x2122;absurde et de la mĂŠlancolie fonctionne une nouvelle fois Ă plein. Mais une fois ce shot de pur bonheur passĂŠ, on sâ&#x20AC;&#x2122;aperçoit que lâ&#x20AC;&#x2122;essentiel nâ&#x20AC;&#x2122;est peut-ĂŞtre pas lĂ dans cet album si particulier. Ce qui frappe dans ce collage dâ&#x20AC;&#x2122;histoires dâ&#x20AC;&#x2122;origines diffĂŠrentes, câ&#x20AC;&#x2122;est lâ&#x20AC;&#x2122;impressionnante facilitĂŠ avec laquelle lâ&#x20AC;&#x2122;auteur australien parvient Ă frapper juste dans toutes les circonstances. Quâ&#x20AC;&#x2122;il sâ&#x20AC;&#x2122;agisse dâ&#x20AC;&#x2122;une bande dessinĂŠe rapide, sans crayonnĂŠ ou de pleines pages grandioses, Simon Hanselmann rĂŠussit Ă faire de son vase clos dĂŠlirant un monde incroyablement rĂŠel. Ces diffĂŠrents ĂŠpisodes mettent en lumière un talent fou, une facilitĂŠ dans le dessin et un sens de la mise en scène sans pareils. Ă&#x20AC; chaque fois et dans nâ&#x20AC;&#x2122;importe quelle situation, la magie opère. Ces 300 et quelques pages nous permettent enfin dâ&#x20AC;&#x2122;en voir quelques trucs. Et de consommer notre addiction avec encore plus de plaisir. â&#x2020;&#x2019; Long Story Short de Simon Hanselmann, chez Misma Ă&#x2030;ditions, 368 pages, 25 â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; misma.fr
Les s n i d r a J de Babylone ARIDE â&#x2013; On ne manque certes pas de dystopies dans une ĂŠpoque oĂš chacun cherche la meilleure façon de se foutre en lâ&#x20AC;&#x2122;air. Mais, allons, qui cracherait sur une histoire de futur proche racontĂŠe par Nicolas Presl ? RacontĂŠe par celui qui est passĂŠ maĂŽtre dans lâ&#x20AC;&#x2122;art dâ&#x20AC;&#x2122;en dire plus en se passant de mots. RacontĂŠe par celui qui ne cesse de se poser des contraintes esthĂŠtiques et narratives pour mieux sublimer le sujet quâ&#x20AC;&#x2122;il touche. Nous, on ne crache pas. De toute façon, on nâ&#x20AC;&#x2122;oserait pas cracher. Les Jardins de Babylone, nouvelle collaboration avec lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠditeur suisse Atrabile, sont ce nouveau plongeon dans lâ&#x20AC;&#x2122;abĂŽme de lâ&#x20AC;&#x2122;humanitĂŠ, offert avec la courtoisie du dessinateur vendĂŠen. Sachez donc que nous sommes en lâ&#x20AC;&#x2122;an 20??, pas trop loin de nous en tout cas, et que lâ&#x20AC;&#x2122;humanitĂŠ a bien cochĂŠ toutes les cases de la stupiditĂŠ promise par le XXe siècle. Il nâ&#x20AC;&#x2122;y a plus dâ&#x20AC;&#x2122;eau douce sur terre et seul un système complexe de dĂŠsalinisation permet la survie de ceux quâ&#x20AC;&#x2122;on a laissĂŠs sur place. Car, oui, certains ont pu sâ&#x20AC;&#x2122;en aller sans trop de vergogne et installer une bulle dâ&#x20AC;&#x2122;ultrarichesse sur la Lune avec envois rĂŠguliers dâ&#x20AC;&#x2122;eau fraĂŽche depuis la Terre. Ceux-lĂ se mettent Ă flipper, parce que chez les Terriens la rĂŠvolte finit inĂŠvitablement par gronder. En haut, des parents, en bas, leur fille. Pour livrer cette critique pas du tout voilĂŠe de notre situation actuelle, Nicolas Presl utilise toute la richesse graphique qui fait son talent. Des couleurs codifiĂŠes, des perspectives biaisĂŠes, des cases composĂŠes Ă la perfection et surtout un sens aigu du rythme qui profite du motif rĂŠcurrent de quatre cases par page pour pouvoir, Ă bon escient, les multiplier ou sâ&#x20AC;&#x2122;offrir un dessin unique. LĂ oĂš la parole nâ&#x20AC;&#x2122;est pas, Nicolas Presl utilise tous les autres langages Ă sa disposition pour porter son discours sur lâ&#x20AC;&#x2122;absurditĂŠ de ce qui nous attend. Et, le moins que lâ&#x20AC;&#x2122;on puisse dire, câ&#x20AC;&#x2122;est que le bruit est assourdissant. Dâ&#x20AC;&#x2122;une beautĂŠ rare et dâ&#x20AC;&#x2122;une narration fine, Les Jardins de Babylone de Nicolas Presl est le type de dystopie qui passe. Qui passe vraiment bien, mĂŞme. â&#x2020;&#x2019; Les Jardins de Babylone de Nicolas Presl chez Atrabile, 328 pages, 29 â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; atrabile.org
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r e k r a P
â&#x2020;&#x2019; Parker â&#x20AC;&#x201C; IntĂŠgrale, de Darwyn Cooke, chez Dargaud, 602Â pages, 45Â â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; dargaud.com
Margue
REGARDS â&#x2013; Au commencement
rite
ĂŠtait Frans Masereel, graveur belge, lunetteux et ĂŠlĂŠgant, qui inventa en lâ&#x20AC;&#x2122;an 1918 le roman graphique sans parole dans son 25 images de la passion dâ&#x20AC;&#x2122;un homme. Avec pour seul outil narratif des images se succĂŠdant, il allait offrir une nouvelle façon de lire un livre et de regarder une image, lâ&#x20AC;&#x2122;inverse restant tout aussi vrai. En 2020, lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠditeur parisien Martin de Halleux, du genre fanatique de Masereel dont il rĂŠĂŠdita glorieusement les Ĺ&#x201C;uvres, remet le couvert sur une table toute neuve et propose Ă des maĂŽtres actuels de la bande dessinĂŠe de suivre les prĂŠceptes du glorieux conteur silencieux. La collection se nomme ÂŤÂ 25 images , parce quâ&#x20AC;&#x2122;il nâ&#x20AC;&#x2122;y en aura pas une de plus, de mĂŞme quâ&#x20AC;&#x2122;il nâ&#x20AC;&#x2122;y aura pas de couleur ni de texte. Elle sâ&#x20AC;&#x2122;est ouverte par le sublime La ForĂŞt de Thomas Ott. Lâ&#x20AC;&#x2122;opus suivant ne lâ&#x20AC;&#x2122;est pas moins, car Joe G. Pinelli nâ&#x20AC;&#x2122;est pas le plus malhabile Ă ce petit jeu et son Marguerite nous a laissĂŠs sans voix. Faisons de nouveau osciller la flèche du temps et retrouvons-nous Ă prĂŠsent en 1934, le 12 fĂŠvrier plus prĂŠcisĂŠment. Six jours après la dĂŠmonstration de force de lâ&#x20AC;&#x2122;extrĂŞme-droite française, la gauche unie dĂŠfile pour scander son rejet du fascisme. Au milieu dâ&#x20AC;&#x2122;un Paris bouillant et dâ&#x20AC;&#x2122;une ĂŠpoque qui lâ&#x20AC;&#x2122;est tout autant, Joe Pinelli nous raconte le parcours dâ&#x20AC;&#x2122;un peintre et dâ&#x20AC;&#x2122;une fleuriste, le premier dessinant de loin la seconde qui prend un malin plaisir Ă le balader dans les rues parisiennes, alors brĂťlantes. Cette romance en devenir est le fil rouge de ces 25 images admirablement fignolĂŠes par Joe Pinelli. Mais lâ&#x20AC;&#x2122;espace et le temps qui lâ&#x20AC;&#x2122;englobent sont au moins aussi centraux que la figure des deux hĂŠros quâ&#x20AC;&#x2122;il faut parfois chercher longuement parmi le tumulte de ce 12 fĂŠvrier. Lâ&#x20AC;&#x2122;auteur belge, figure de la BD alternative et noire, ayant collaborĂŠ avec les grands causeurs que sont Jean-Bernard Pouy, Patrick Raynal et Marc Behm, parvient ici Ă mettre un monde en 25 images. Le Paris des annĂŠes 1930, ses angoisses, ses espoirs, ses craintes, son architecture, ses habitudes, la sĂŠduction, la candeur, la violence, tout est inclus dans ces grandes compositions Ă lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠlĂŠgance raffinĂŠe. Oui, 25 images font un roman et Joe Pinelli le prouve encore en 2020. -
â&#x2020;&#x2019; Marguerite, de Joe Pinelli aux Ă&#x2030;ditions Martin de Halleux, 22 â&#x201A;Ź, 32 pages. â&#x2020;&#x2019; martindehalleux.com
KIBLIND Magazine â&#x2020;&#x2019; 74 â&#x2020;&#x2019; Dans ma rue
COLOSSAL â&#x2013; Tout est mastoc ici. Le pavĂŠ de 600 pages, en premier lieu. Le hĂŠros, aussi, Parker, un braqueur sans cĹ&#x201C;ur et bâti avec des parpaings. Mais aussi les noms qui accompagnent celui de Parker sur la couverture. Le premier, Richard Stark aka Tucker Coe aka Donald Westlake est celui qui releva le roman noir amĂŠricain dans les annĂŠes 1960, alors que la première gĂŠnĂŠration se mourait et que la deuxième peinait Ă montrer les dents. PopularisĂŠe ici en France par la lĂŠgendaire collection SĂŠrie Noire de Marcel Duhamel et par le fanatisme de Jean-Patrick Manchette (quâ&#x20AC;&#x2122;on retrouve avec une chronique et un grand plaisir posthume ici) Ă son ĂŠgard, la sĂŠrie de roman Parker est son bĂŠbĂŠ le plus pur, le plus dur, le plus explosif. Darwyn Cook, le deuxième nom sur la couverture et lâ&#x20AC;&#x2122;unique responsable de cette adaptation en bande dessinĂŠe, est un poids lourd itou. FormĂŠ chez Bruce Timm et son anime Batman, ayant rĂŠalisĂŠ la majeure partie de sa carrière chez DC Comics, il sâ&#x20AC;&#x2122;est frayĂŠ le chemin le plus sombre parmi les hĂŠros de lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠcurie. Au passage, il a glanĂŠ trois Eisner Awards avec sa sĂŠrie Justice League : La Nouvelle Frontière. Mais le casting ne fait pas le chef-dâ&#x20AC;&#x2122;Ĺ&#x201C;uvre. Or, chef-dâ&#x20AC;&#x2122;Ĺ&#x201C;uvre il y a. Et câ&#x20AC;&#x2122;est bien urbain de la part de Dargaud de nous le rappeler Ă lâ&#x20AC;&#x2122;aide de cette intĂŠgrale qui reprend les quatre tomes dĂŠjĂ parus entre 2010 et 2014 et y ajoute un dossier de 60 pages avec interview, dessins inĂŠdits et JP Manchette, donc. Darwyn Cook amène aux personnages et romans stĂŠrĂŠotypiques en diable de Richard Stark son sens de la narration et sa grande copine la noirceur. Tout en monochrome, en jeux dâ&#x20AC;&#x2122;ombres et cassures de rythme, le Canadien parvient Ă ajouter un ĂŠtage aux monuments du romancier amĂŠricain. Alors que les livres avaient dĂŠjĂ grossi jusquâ&#x20AC;&#x2122;Ă la dĂŠmesure les fondamentaux du genre, faisant de Parker un diamant brut, violent, incapable dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠmotion ou presque et dâ&#x20AC;&#x2122;une efficacitĂŠ Ă faire peur, Darwyn Cooke parvient Ă rajouter un vernis plus sombre encore, rendant chaque caractĂŠristique de ses rĂŠcits plus tranchante et plus ĂŠclatante. Le dessinateur a lâ&#x20AC;&#x2122;outrecuidance de faire coup double et de le faire bien : introduire les amateurs du noir Ă lâ&#x20AC;&#x2122;art de la bande dessinĂŠe et les aficionados du neuvième art Ă celui du polar. Et on peut y ajouter les transis du patrimoine, parce quâ&#x20AC;&#x2122;on est face Ă une cathĂŠdrale, lĂ .
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Battu
e
PLONGEON â&#x2013; La chasse est une activitĂŠ pour le moins ambiguĂŤ.
Digital Species
KIBLIND Magazine â&#x2020;&#x2019; 74 â&#x2020;&#x2019; Dans ma rue
OUTREMONDE â&#x2013; Au loin, lâ&#x20AC;&#x2122;horizon devient flou. La rĂŠalitĂŠ
doit alors se colleter avec ces limites vagues, et notre imagination prendre le relais. Quâ&#x20AC;&#x2122;y a-t-il derrière ce brouillard, ces mirages ? Câ&#x20AC;&#x2122;est lĂ que le travail dâ&#x20AC;&#x2122;HĂŠlène Jeudy dĂŠmarre. Car celle-ci nâ&#x20AC;&#x2122;a que faire des pauvres rĂŠfĂŠrentiels de notre quotidien. Le monde, tel que le perçoit la dessinatrice lilloise et co-fondatrice du studio Geriko, est une entitĂŠ modulable qui ne vaut que par sa distorsion. Elle y pioche de lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠnergie, un esprit, des ĂŠvocations et en reconstruit un autre Ă sa mesure au fil de ses dessins. Ainsi, pour ce Digital Species sorti aux Ă&#x2030;ditions FP&CF, nous emmène-t-elle dans ces territoires ĂŠtranges, connus dâ&#x20AC;&#x2122;elle seule qui part en exploratrice dans ces espaces impossibles. Nous voici donc emportĂŠs dans une tribulation aux contours flous oĂš les pages nâ&#x20AC;&#x2122;offrent que de rares points dâ&#x20AC;&#x2122;accroche. Encore nous faudraitil, pour parler de tribulation, quelques notions dâ&#x20AC;&#x2122;espaces et de temps, un dĂŠbut et une fin, un point A et un B. Ici, nous sommes au milieu des volutes, dans une sorte de gestation onirique dâ&#x20AC;&#x2122;un univers parallèle. Le remarquable travail graphique dâ&#x20AC;&#x2122;HĂŠlène Jeudy puise largement dans les mangas dystopiques et les fulgurances offertes par le dessin numĂŠrique. Son Digital Species est le rĂŠsultat de ces recherches graphiques et fantastiques. Il est lâ&#x20AC;&#x2122;imagier de ces mondes nouveaux et essaie dâ&#x20AC;&#x2122;approcher ce fameux point qui va au-delĂ du rĂŠel, autant sur lâ&#x20AC;&#x2122;esthĂŠtique pure que sur ce quâ&#x20AC;&#x2122;il nous raconte. Y surgissent des ĂŞtres, des dĂŠcors, des paysages qui sortent dâ&#x20AC;&#x2122;une autre terre, dâ&#x20AC;&#x2122;un autre temps. Ă&#x20AC; lâ&#x20AC;&#x2122;intĂŠrieur de cette post-rĂŠalitĂŠ, les couches se superposent, lâ&#x20AC;&#x2122;ensemble se modifie et ne trace jamais une ligne claire et concevable. Et nous ĂŠvoluons, bluffĂŠs, dans cet ensemble de choses et de formes impalpables mais donnant la sensation dâ&#x20AC;&#x2122;exister pourtant. Car, oui, nous en sommes persuadĂŠs, quelque part, Ă un moment donnĂŠ, ces spĂŠcimens existent bien. â&#x2020;&#x2019; Digital Species, dâ&#x20AC;&#x2122;HĂŠlène Jeudy aux Ă&#x2030;ditions FP&CF, 36 pages, 30 â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; editionsfpcf.com
En mĂŞme temps quâ&#x20AC;&#x2122;elle rĂŠvèle une certaine forme de fascination pour la nature, elle exalte un sentiment de puissance et de destruction qui flatte lâ&#x20AC;&#x2122;humain en ĂŞtre supĂŠrieur. Et puis, les mecs ont des flingues quand mĂŞme. Choisir ce dĂŠcor pour en faire une bande dessinĂŠe est un choix opportun de la part de la scĂŠnariste et rĂŠalisatrice Marine LevĂŠel et du dessinateur Lilian Coquillaud pour leur album Battue. Elle soulève des interrogations qui sâ&#x20AC;&#x2122;accrochent, tenaces, Ă lâ&#x20AC;&#x2122;individu pĂŠriode XXIe siècle, dans son rapport Ă la nature, dans son rapport Ă lâ&#x20AC;&#x2122;autre, dans son rapport aux traditions. Câ&#x20AC;&#x2122;est dâ&#x20AC;&#x2122;ailleurs un pesant passĂŠ que lâ&#x20AC;&#x2122;hĂŠroĂŻne, Camille Duhamel, a tentĂŠ de fuir. Son père est Ă la tĂŞte dâ&#x20AC;&#x2122;une obscure assemblĂŠe de chasseurs, lĂŠgèrement orientĂŠe politiquement, apprĂŠciant notamment lâ&#x20AC;&#x2122;ordre, la discipline et les rituels immĂŠmoriaux. Mais ce père meurt, comme ça arrive parfois. ChauffĂŠe par un de ses amis journalistes pour intĂŠgrer le groupuscule, elle part jouer la digne hĂŠritière lors de La Grande Battue, le rite initiatique des Blanchistes, le joli nom de la bande. Camille plonge alors dans une nature sauvage, dans une sociĂŠtĂŠ qui ne lâ&#x20AC;&#x2122;est pas moins et dans des atermoiements sur la place quâ&#x20AC;&#x2122;elle doit prendre entre ses origines et ses convictions. Un rĂŠcit comme une aubaine pour le dessinateur Lilian Coquillaud. Câ&#x20AC;&#x2122;est lâ&#x20AC;&#x2122;occasion de faire, certes, quelques planches magnifiques tant lâ&#x20AC;&#x2122;aquarelle lui semble facile, mais aussi dâ&#x20AC;&#x2122;installer autour de ce rite dâ&#x20AC;&#x2122;initiation une ambiance suffocante. Suivant Ă la lettre le rĂŠcit de Marine LevĂŠel, ses envolĂŠes graphiques ĂŠpousent les tensions et les questionnements dâ&#x20AC;&#x2122;une hĂŠroĂŻne aux prises avec les principes qui lâ&#x20AC;&#x2122;ont vue grandir. La libertĂŠ contre lâ&#x20AC;&#x2122;ordre, lâ&#x20AC;&#x2122;obĂŠissance contre lâ&#x20AC;&#x2122;instinct, tout entre ici en rĂŠsonance avec les questionnements de notre ĂŠpoque. Pendant ce temps, il y en a une que ça commence Ă fatiguer : la nature. â&#x2020;&#x2019; Battue de Lilian Coquillaud et Marine LevĂŠel chez 6 pieds sous terre, 120 pages, 24 â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; 6pieds-sous-terre.com
Hors-série SOCIALTER
Baptiste Morizot Rédacteur en chef
Disponible en kiosque et en librairie
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La Solitude du marathonien de la bande des sinĂŠe nous accueillons un nouvel ĂŠlève aujourdâ&#x20AC;&#x2122;hui. fresno, 1982
Allez, Ă toi de jouer. Parle-nous un peu de toi.
Euhâ&#x20AC;Ś je mâ&#x20AC;&#x2122;appelle Adrianâ&#x20AC;Ś
Je dessine et je collectionne les comics.
Tu ne peux pas essayer de nous en dire un peu plus, Adrian ? Tu as des passe-temps ?
KIBLIND Magazine â&#x2020;&#x2019; 74 â&#x2020;&#x2019; Dans ma rue
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SPĂ&#x2030;LĂ&#x2030;OLOGIE â&#x2013; Adrian Tomine est un auteur formidable et reconnu comme tel dans le monde entier. Chacun de ses nouveaux livres est un ĂŠvĂŠnement et les gens sur les rĂŠseaux sociaux rĂŠcoltent un maximum dâ&#x20AC;&#x2122;approbation en partageant ses unes du New Yorker. Mais si, vous savez, lĂ , celle avec le libraire et le livreur dâ&#x20AC;&#x2122;Amazon. Le seul souci, câ&#x20AC;&#x2122;est quâ&#x20AC;&#x2122;Adrian Tomine est une superstar dans un monde ĂŠtrange : celui de la bande dessinĂŠe. Ce spĂŠcialiste de lâ&#x20AC;&#x2122;inadaptation sociale se penche cette fois-ci sur son propre cas et son propre parcours dans les sphères mondaines et mĂŠdiatiques du neuvième art. Une autobiographie en nĂŠgatif, oĂš nous avons beau suivre une carrière brillante sur quasiment 40 ans, nous nâ&#x20AC;&#x2122;y lisons que des moments gĂŞnants, des bourdes, des lâchetĂŠs et des espoirs dÊçus. Il faut dire que lâ&#x20AC;&#x2122;univers dans lequel il ĂŠvolue est particulièrement perfide. BĂŠnĂŠficiant dâ&#x20AC;&#x2122;une image sympathique, ses amateurs sont pourtant rĂŠgulièrement incompris ; très populaire, il nâ&#x20AC;&#x2122;est peuplĂŠ que de quasi-inconnus (la citation dâ&#x20AC;&#x2122;entrĂŠe de Daniel Clowes comparant la cĂŠlĂŠbritĂŠ des dessinateurs Ă celles des joueurs de badminton est, Ă ce titre, nickel) ; censĂŠ ĂŞtre un monde de passion, il est aussi celui oĂš les hiĂŠrarchies pèsent lourd et oĂš le rĂŠseau est primordial. Pour la personne timide, anxieuse et peu sĂťre dâ&#x20AC;&#x2122;elle-mĂŞme que semble ĂŞtre Adrian Tomine, le cheminement sur les routes de la reconnaissance a ĂŠtĂŠ pour le moins fastidieux. Ă&#x2030;laborĂŠ Ă la manière dâ&#x20AC;&#x2122;un carnet de croquis, jusque dans les formats petits carreaux de chaque page, La Solitude du marathonien de la bande dessinĂŠe joue Ă fond la carte de la sincĂŠritĂŠ. Le grand, le cĂŠlèbre Adrian Tomine y livre sans fard ses hontes et ses dĂŠsillusions. Le dessin en noir et blanc, le gaufrier inamovible de six cases par page et le feutre simple avec lequel il a rĂŠalisĂŠ ce livre jouent esthĂŠtiquement de cette mise en scène de lâ&#x20AC;&#x2122;authenticitĂŠ. On peut regretter ce soulignement Ă gros trait et regretter aussi que son auteur et hĂŠros ne semble pas sâ&#x20AC;&#x2122;apercevoir que, malgrĂŠ tous ses dĂŠboires, il a connu une carrière comme il en existe bien peu dans la bande dessinĂŠe. Mais ce serait bouder bĂŞtement un livre qui pointe justement et avec humour les faiblesses dâ&#x20AC;&#x2122;un monde quâ&#x20AC;&#x2122;on pourrait penser enchantĂŠ. Mieux, en ouvrant le lecteur au quotidien des auteurs de bande dessinĂŠe, il fait bien plus quâ&#x20AC;&#x2122;un travail de mĂŠmoire sur sa condition. Il renvoie le lecteur Ă son propre quotidien et donne la possibilitĂŠ Ă tous de se reconnaĂŽtre dans ses dĂŠboires. Les injustices, les humiliations, le cirque de la reprĂŠsentation se retrouvent dans chaque domaine dâ&#x20AC;&#x2122;activitĂŠ. Le champ artistique nâ&#x20AC;&#x2122;est pas Ă part, et sâ&#x20AC;&#x2122;il peut paraĂŽtre plus enviable, on y retrouve les mĂŞmes mascarades que partout ailleurs. Toutefois, lâ&#x20AC;&#x2122;un des avantages quâ&#x20AC;&#x2122;il peut y avoir, câ&#x20AC;&#x2122;est quâ&#x20AC;&#x2122;on peut en faire un excellent livre. â&#x2020;&#x2019; La Solitude du marathonien de la bande dessinĂŠe, dâ&#x20AC;&#x2122;Adrian Tomine chez CornĂŠlius, 166 pages, 23,5 â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; cornelius.fr
Iâ&#x20AC;&#x2122;M BLUE â&#x2013;
Toujours nichĂŠe chez La Joie de Lire, Ă&#x2030;va Offredo poursuit sa petite sĂŠrie de jeux de langage illustrĂŠs. Après Matcha et Kiki, la voici de retour avec Domino. De ce court rĂŠcit en ÂŤÂ o , nous retiendrons forcĂŠment les mots rigolos. Entre ÂŤÂ Ciboulot , ÂŤÂ Tombolo  et ÂŤÂ Illico Presto , on est plein de ces mots qui font des bonds en bouche, qui culbutent le long de la langue pour finir sur des lèvres ouvertes et promptes Ă sourire dĂŠjĂ . Et puis, la belle histoire de cette souris bleue qui veut sauver la planète et trouver lâ&#x20AC;&#x2122;amour ne peut quâ&#x20AC;&#x2122;avoir notre consentement. Si le travail littĂŠraire dâ&#x20AC;&#x2122;Ă&#x2030;va Offredo est admirable, peut-ĂŞtre avons-nous ĂŠtĂŠ plus sĂŠduits encore par lâ&#x20AC;&#x2122;esthĂŠtique choisie. Alternant les lignes, les points et les formes, manipulant les vides et les pleins et ajoutant un peu de matière pour relever le goĂťt, la dessinatrice se joue des contraintes chromatiques fortes du format (ici un joli duel entre le bleu et lâ&#x20AC;&#x2122;indigo). Mais plus que la performance, câ&#x20AC;&#x2122;est le rendu qui nous intĂŠresse. Car, ce faisant, Ă&#x2030;va Offredo offre de splendides compositions graphiques aux enfants et aux parents, de celles quâ&#x20AC;&#x2122;on ne croise que rarement dans la littĂŠrature jeunesse. Une manière dâ&#x20AC;&#x2122;aiguiser le regard avec dĂŠlicatesse et, pour les personnes de plus de six ans, de pouvoir sans lassitude lire et relire ce Domino. â&#x2020;&#x2019; Domino dâ&#x20AC;&#x2122;Ă&#x2030;va Offredo chez La Joie de Lire, 40 pages, 12,90 â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; lajoiedelire.ch
Le Bon Coin
đ&#x;&#x2018;&#x20AC;
pĂŠdagogique aux Voyages extraordinaires dâ&#x20AC;&#x2122;Axel dâ&#x20AC;&#x2122;AurĂŠlien Jeanney. Le petit Axel, accompagnĂŠ de sa besta Soon, de sa chatte Zelda et de son oiseau Archimède, explore les ocĂŠans, lâ&#x20AC;&#x2122;espace, la jungle, la ville et la campagne et sâ&#x20AC;&#x2122;en donne Ă cĹ&#x201C;ur joie pour donner infos et astuces Ă nos chers enfants. HĂŠ, les parents, on vous voit hein : qui savait que le soleil ĂŠtait 330 000 fois plus lourd que la terre ? Ne vous en faites pas, le fun arrive juste après. Les dessins en vectoriel sont le dada du graphiste et ici les formes et couleurs sâ&#x20AC;&#x2122;y rĂŠvèlent rigolardes et luxuriantes Ă souhait. Il a su y ajouter le futur en bonus. Car le voilĂ , le très gros plus du livre : la rĂŠalitĂŠ augmentĂŠe, accessible via le tĂŠlĂŠphone des parents. Et lĂ , câ&#x20AC;&#x2122;est une nouvelle dimension qui sâ&#x20AC;&#x2122;ouvre grâce aux animations choupinettes en diable qui viennent surplomber la chose imprimĂŠe. Lâ&#x20AC;&#x2122;enfant sâ&#x20AC;&#x2122;amuse. Le parent nâ&#x20AC;&#x2122;en revient pas quâ&#x20AC;&#x2122;il y ait ce genre de choses et toujours pas de trace de voitures volantes. Tout le monde rit, tout le monde apprend, tout le monde est content. â&#x2020;&#x2019; Les Voyages extraordinaires dâ&#x20AC;&#x2122;Axel, dâ&#x20AC;&#x2122;AurĂŠlien Jeanney chez Amaterra, 16,90 â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; amaterra.fr
Un Nom de bĂŞ fĂŠroce te SAUVAGE â&#x2013; La vie des enfants nâ&#x20AC;&#x2122;est ni pavĂŠe de chamallows et ni bordĂŠe de murs en mousse. Il leur arrive rĂŠgulièrement de sacrĂŠes tuiles et tout cela doit pouvoir ĂŞtre dit par des mots ou des images. Et mĂŞme les deux, tiens. Câ&#x20AC;&#x2122;est le job rĂŠalisĂŠ par lâ&#x20AC;&#x2122;illustratrice Marine Rivoal et de lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠcrivain Jean-Baptiste Labrune, rĂŠunis pour la première fois sur un mĂŞme album. Un Nom de bĂŞte fĂŠroce met en scène un petit garçon et un chat ayant grandi ensemble mais qui voient leurs chemins sâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠcarter peu Ă peu. Le nouveau livre de lâ&#x20AC;&#x2122;autrice de Cui-Cui et de lâ&#x20AC;&#x2122;auteur des Contes du petit duc (dessinĂŠs par JĂŠrĂŠmie Fischer) est une histoire de liens qui se dĂŠnouent et de proximitĂŠ rompue. On traite ici de souvenirs et de chagrin, on le fait avec franchise et poĂŠsie. Et parlons, je vous prie, des superbes dessins de Marine Rivoal. Dans un noir et blanc tout doux qui se teinte dâ&#x20AC;&#x2122;orange quand la tension monte, lâ&#x20AC;&#x2122;illustratrice lyonnaise joue de la silhouette et des niveaux de gris pour nimber de mĂŠlancolie tout lâ&#x20AC;&#x2122;album et lui offrir ce quâ&#x20AC;&#x2122;on aime beaucoup dans les albums jeunesse : une beautĂŠ ĂŠpoustouflante. Nâ&#x20AC;&#x2122;ayons pas peur des histoires tristes quand elles sont si belles. â&#x2020;&#x2019; Un Nom de bĂŞte fĂŠroce, de Marine Rivoal et Jean-Baptiste Labrune, aux Ă&#x2030;ditions du Rouergue , 48 pages, 16â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019; lerouergue.com
KIBLIND Magazine â&#x2020;&#x2019; 74 â&#x2020;&#x2019; Dans ma rue
APPEL â&#x2013; Une chronique simple et pratique pour dire Ă quel point nous aimons Alexandra Pichard et que si, bon, voilĂ , elle voulait bien ĂŞtre notre amie ben ce serait vraiment super sympa de sa part. Ouf. Depuis tout ce temps quâ&#x20AC;&#x2122;on nâ&#x20AC;&#x2122;osait pas. LĂ , câ&#x20AC;&#x2122;est fait. Il faut dire que ça dure cette histoire. VoilĂ plus de dix ans quâ&#x20AC;&#x2122;elle a sorti son parfait Herman et Dominique qui fait encore les belles heures des ĂŠditions Thierry Magnier. Sâ&#x20AC;&#x2122;ensuivirent masse dâ&#x20AC;&#x2122;autres livres, des illustrations presse dans les endroits les plus chics de la ville (New Yorker, New York Times, magazine George, ce genre) et une marge dâ&#x20AC;&#x2122;erreur toujours proche de zĂŠro. Et lĂ voilĂ qui revient en solo chez Les Fourmis Rouges, pour une deuxième livre chez elles, Le Bon coin. Dans ce thriller haletant, nous sommes aux prises avec un ornithologue qui dĂŠsespère de ne pas pouvoir approcher les canards. Il sâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠchine Ă son atelier pour fabriquer le meilleur appeau et passe ses nuits dehors mais rien nâ&#x20AC;&#x2122;y fait : ses instruments ne sortent jamais le bon cri et le voilĂ suivi par tous les animaux quâ&#x20AC;&#x2122;il a appelĂŠs par erreur. Comme dâ&#x20AC;&#x2122;habitude avec Alexandra Pichard, la drĂ´lerie ĂŠtincelle et la joliesse brille. De la texture, de grands aplats de couleurs vives et un trait ĂŠlastique viennent se lover dans cette histoire dont lâ&#x20AC;&#x2122;absurditĂŠ nâ&#x20AC;&#x2122;a dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠgal que le plaisir quâ&#x20AC;&#x2122;elle procure. Encore une fois, câ&#x20AC;&#x2122;est un grand coup dâ&#x20AC;&#x2122;amour. â&#x2020;&#x2019; Le Bon Coin, dâ&#x20AC;&#x2122;Alexandra Pichard chez Les Fourmis Rouges, 48 pages, 15,90 â&#x201A;Ź. â&#x2020;&#x2019;â&#x20AC;&#x2030;editionslesfourmisrouges. com
INTERRO â&#x2013; On ne va pas vous le cacher, il y a très clairement une vertu
Š Julien Hay
Domino
Les Voyages s e r i a n i d r o extra dâ&#x20AC;&#x2122;Axel
75 â&#x20AC;&#x201D; SĂ&#x2030;LECTION PRINT
LE
ES KIDZ D IN O C
đ&#x;&#x2018;&#x20AC; SĂ&#x2030;LECTION ANIMATION â&#x20AC;&#x201D; 76
VOYAGE VOYAGE â&#x2013; Bastien Dubois est nĂŠ en 1983
Ă Lille, ce qui explique son tempĂŠrament extrĂŞmement sympathique. Il fait sa formation Ă la renommĂŠe Supinfocom de Valenciennes et rĂŠalise AH, un court-mĂŠtrage de fin dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtudes mettant en scène une petite fille devant sa soupe Ă lâ&#x20AC;&#x2122;alphabet, qui plonge dans un univers surrĂŠaliste de lettres ĂŠtranges. Ă&#x20AC; la sortie de lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠcole, il accumule les expĂŠriences dans lâ&#x20AC;&#x2122;infographie et lâ&#x20AC;&#x2122;animation de jeux vidĂŠo.PassionnĂŠ de voyage, et après avoir fait du stop du nord de la France Ă Istanbul, il imagine la crĂŠation dâ&#x20AC;&#x2122;un carnet de voyage animĂŠ.
KIBLIND Magazine â&#x2020;&#x2019; 74 â&#x2020;&#x2019; Dans ma rue
Madagascar, 2009 Portraits de Voyage, 2013 Cargo Cult, 2013
Les films de Bastien Dubois
Le carnet de voyage, en tant que support dâ&#x20AC;&#x2122;expression artistique, est une forme qui lui correspond bien. Il a grandi dans une famille oĂš beaucoup de gens dessinent, bercĂŠ dâ&#x20AC;&#x2122;aventures graphiques. ÂŤÂ Le carnet de voyage reprĂŠsentait un idĂŠal, le point de rencontre parfait de mes deux passions : le voyage et le dessin.  De cette idĂŠe naĂŽtra son premier film indĂŠpendant, Madagascar, quâ&#x20AC;&#x2122;il rĂŠalise au terme dâ&#x20AC;&#x2122;une annĂŠe passĂŠe sur la grande ĂŽle rouge, court-mĂŠtrage qui reçut immĂŠdiatement un succès colossal en ĂŠtant projetĂŠ dans plus de 200 festivals internationaux et, cerise sur le gâteau, en rentrant dans le club très fermĂŠ des nominĂŠs aux Oscars en 2011. Pourtant, au moment oĂš il embarque pour Antananarivo, il nâ&#x20AC;&#x2122;imagine rien de tout ça : il part, câ&#x20AC;&#x2122;est tout, avec ce projet personnel qui lâ&#x20AC;&#x2122;emballe depuis un moment et quelques ĂŠconomies, sans trop savoir combien de temps ça va lui prendre exactement ni sâ&#x20AC;&#x2122;il va pouvoir le mener Ă bienu. Une fois sur place, il alterne des sĂŠquences voyage/travail : 10 jours ÂŤÂ voyage dâ&#x20AC;&#x2122;observation , Ă se balader sur lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŽle un carnet de dessin dans la poche, un appareil photo et une camĂŠra ; puis 3 semaines ÂŤÂ travail  Ă demeure, sĂŠlectionnant les images quâ&#x20AC;&#x2122;il venait de rĂŠcolter, posant au crayon lâ&#x20AC;&#x2122;idĂŠe sur papier, retouchant le dessin, esquissant un layout 3D assez grossier, qui allait servir de base pour peindre à la gouache ou Ă lâ&#x20AC;&#x2122;aquarelle, crayonnant encore, collant parfois, composant entre le manuel et le digital. Le succès est au rendez-vous. Si bien quâ&#x20AC;&#x2122;Arte lui commande une sĂŠrie de 20 Portraits : dâ&#x20AC;&#x2122;autres voyages, dâ&#x20AC;&#x2122;autres destinations, vues cette fois-ci au travers des yeux des gens quâ&#x20AC;&#x2122;il interroge en MĂŠtropole. En 2013 il rĂŠalise Cargo Cult, fiction qui se dĂŠroule en Papouasie-Nouvelle-GuinĂŠe durant la Seconde Guerre mondiale. ÂŤÂ Au dĂŠpart je voulais faire un documentaire en animation. Mais le sujet ĂŠtait tellement dense, large Ă explorer, que jâ&#x20AC;&#x2122;ai prĂŠfĂŠrĂŠ faire une fable pour montrer ce qui se passe dans ce ÂŤÂ culte du cargo . La fin est dâ&#x20AC;&#x2122;ailleurs ouverte, pour que chacun soit libre de lâ&#x20AC;&#x2122;interprĂŠter Ă sa guise. Souvenir Souvenir, son tout dernier court-mĂŠtrage, est un projet plus ancien : il lâ&#x20AC;&#x2122;a commencĂŠ et abandonnĂŠ cent fois, tellement le sujet le fascine autant quâ&#x20AC;&#x2122;il le dĂŠvore : savoir ce que son grand-père a fait durant la guerre dâ&#x20AC;&#x2122;AlgĂŠrie. ÂŤÂ Câ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtait un carnet de vie plutĂ´t quâ&#x20AC;&#x2122;un carnet de voyage, parti en rĂŠalitĂŠ du dĂŠni de vouloir savoir ce quâ&#x20AC;&#x2122;avait fait mon grand-père pendant cette guerre. Jâ&#x20AC;&#x2122;avais envie mais je nâ&#x20AC;&#x2122;y arrivais pas. Câ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtait trop dur. Câ&#x20AC;&#x2122;est seulement quand jâ&#x20AC;&#x2122;ai compris que le vrai sujet du film nâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtait pas mon grand-père, mais moi-mĂŞme en train de faire un film que je ne voulais pas faire, que jâ&#x20AC;&#x2122;ai rĂŠussi Ă le terminer.  Ă&#x2021;a tombe bien : le 10 novembre dernier le film a permis Ă Bastien Dubois de remporter le Prix Ă&#x2030;mile-Reynaud, remis par les adhĂŠrents de lâ&#x20AC;&#x2122;Association française du cinĂŠma dâ&#x20AC;&#x2122;animation. Souvenir Souvenir est ĂŠgalement en sĂŠlection officielle au Festival du court-mĂŠtrage de Clermont-Ferrand et au festival du Film de Sundance. â&#x2020;&#x2019; Les films de Bastien Dubois sont visibles sur Kiblind.com â&#x2020;&#x2019; Filmographie - Madagascar, Sacrebleu, 2009 - Portraits de Voyage, 20 x 3â&#x20AC;&#x2122;, 2013 - Cargo Cult, 2013 - Souvenir Souvenir, 2020
Souvenir Souvenir, 2020
Animation par Jean Tourette
www.olow.fr
đ&#x;&#x2018;&#x20AC; SĂ&#x2030;LECTION MUSIQUE â&#x20AC;&#x201D; 78
Musique par Elora Quitttet
Bicep
TRADI-RAVE â&#x2013; Trois ans
après un premier disque exceptionnel sorti chez Ninja Tune, les deux Londoniens de Bicep ont concoctĂŠ un deuxième chef-dâ&#x20AC;&#x2122;Ĺ&#x201C;uvre, Isles. Isles ne raconte pas une histoire mais des histoires, celle de lâ&#x20AC;&#x2122;Irlande fracturĂŠe et irrĂŠconciliable dont ils sont originaires mais aussi celles des pays quâ&#x20AC;&#x2122;ils ont pu traverser. Ce carnet de route prend forme Ă travers les vocalises hindi dâ&#x20AC;&#x2122;ÂŤÂ Atlas  et les samples de chanteurs malawiens dâ&#x20AC;&#x2122;ÂŤÂ Apricots . Des ĂŠlĂŠments traditionnels tranchant avec les kicks inĂŠpuisables qui dessinent Isles et en font la destination rĂŞvĂŠe.
â&#x2020;&#x2019; Isles de BICEP - Sortie le 22Â janvier 2021 chez Ninja Tune â&#x2020;&#x2019; ninjatune.net
Chap i Chapo
BRICOLO â&#x2013; Câ&#x20AC;&#x2122;est pas moins de 600 jouets ĂŠlectroniques pour enfants que Patrice ElĂŠgoĂŤt a accumulĂŠs ces quinze dernières annĂŠes. Non par simple collectionnite, mais aussi pour sâ&#x20AC;&#x2122;en servir. Avec des mini-guitares et synthĂŠtiseurs, une DictĂŠe Magique et dâ&#x20AC;&#x2122;autres jouets zinzins Ă souhait, le musicien a fait naĂŽtre Collector, un album ĂŠlectronique qui nâ&#x20AC;&#x2122;est pas aussi foutraque quâ&#x20AC;&#x2122;on pourrait le penser. Grâce aux voix de Maxwell Farrington et Ă&#x2030;milie Quinquis entre autres, et Ă une maĂŽtrise optimale du joujou en tous genres, lâ&#x20AC;&#x2122;album du FinistĂŠrien replace le jouet dans la cour des grands. â&#x2020;&#x2019; Collector de Chapi Chapo et les Jouets ĂŠlectroniques â&#x20AC;&#x201C; disponible en auto-production â&#x2020;&#x2019; chapimusic.com
ls e i r ab
G
PURETĂ&#x2030; â&#x2013; La fusion de
Jacob Lusk â&#x20AC;&#x201C; membre ĂŠmĂŠrite de la LA Gospel Community et choriste ponctuel de Diana Ross â&#x20AC;&#x201C; et dâ&#x20AC;&#x2122;Ari Balouzian et Ryan Hope, tous deux producteurs, ne pouvait quâ&#x20AC;&#x2122;ĂŞtre prolifique. Le mĂŠlange de leurs savoir-faire respectifs donne Gabriels, un groupe envoyĂŠ sur terre pour remplir nos oreilles de sucre. Love and Hate in a Different Time est un bonbon de puretĂŠ et de beautĂŠ. PlacĂŠe au centre du projet, la voix de Jacob Lusk et les diverses vocalises traversant lâ&#x20AC;&#x2122;album nâ&#x20AC;&#x2122;ont besoin que de quelques notes de piano et de claquements de doigts pour ĂŞtre accompagnĂŠs. Un album soul que la Motown ne bouderait pas, on est en sĂťrs. â&#x2020;&#x2019; Love and Hate in a Different Time de Gabriels - disponible en auto-production â&#x2020;&#x2019; gabriels.bandcamp.com
KIBLIND Magazine â&#x2020;&#x2019; 74 â&#x2020;&#x2019; Dans ma rue
CĂ&#x2030;RĂ&#x2030;BRAL â&#x2013; Fermez les yeux,
Serguei Spoutnik
cette ĂŠchappĂŠe cĂŠleste vous est offerte par le Professeur Spoutnik. Subject, Verb, Complement nous emmène lĂ oĂš le temps sâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtire et oĂš les ĂŠmotions en sont rĂŠduites Ă lâ&#x20AC;&#x2122;essentiel. Ce premier EP est une ĂŠpopĂŠe cĂŠrĂŠbrale marquĂŠe par des arrĂŞts dans des paysages tantĂ´t dĂŠsertiques, tantĂ´t habitĂŠs par des entitĂŠs qui viennent susurrer Ă travers les couches infinies de synthĂŠtiseurs. EnregistrĂŠ en une seule prise sur VHS, Subject, Verb, Complement de Serguei Spoutnik oscille subtilement entre ambient, synth pop et spoken word pour un rĂŠsultat aussi grandiose que mystique. â&#x2020;&#x2019; Subject, Verb, Complement - disponible chez SantĂŠ Records â&#x2020;&#x2019; santerecords.bandcamp.com
Alexi Shell
TEUF MĂ&#x2030;DITATIVE â&#x2013; Le premier morceau de lâ&#x20AC;&#x2122;EP dâ&#x20AC;&#x2122;Alexi Schell rĂŠsume Ă lui seul toute lâ&#x20AC;&#x2122;ambivalence de ce qui va suivre. Dâ&#x20AC;&#x2122;abord inquiĂŠtants et calfeutrĂŠs, les chants de sirènes deviennent peu Ă peu limpides et ensorcelants. Ils introduisent quatre morceaux ĂŠlectroniques aux sonoritĂŠs parfois brutes et chaotiques, vite calmĂŠs par des regains dâ&#x20AC;&#x2122;espoir et de douceur. Câ&#x20AC;&#x2122;est tout le paradoxe de la vie qui est concentrĂŠ dans I Wish I Was a Mermaid, ce sont la joie, la tristesse, lâ&#x20AC;&#x2122;euphorie, la violence et la douceur qui dĂŠbarquent sans frapper. Un disque oĂš les longs rĂŠcits ne sont pas nĂŠcessaires tant la musique se raconte par elle-mĂŞme. â&#x2020;&#x2019; I Wish I Was a Mermaid de Alexi Shell â&#x20AC;&#x201C; disponible en auto-production â&#x2020;&#x2019; soundcloud.com/alexiacaunille
Beach Youth
REMĂ&#x2C6;DE â&#x2013; Après deux EP,
place Ă lâ&#x20AC;&#x2122;album. Postcard de Beach Youth vient rĂŠveiller notre morne hiver en nous traĂŽnant dans un flot ininterrompu de vagues de synthĂŠtiseurs et de guitares ramollies par le soleil. Après avoir inondĂŠ le public de leur aura bienfaitrice dans toute la France, les quatre Normands nous donnent lâ&#x20AC;&#x2122;occasion de rapporter un petit bout de vacances et de lĂŠgèretĂŠ Ă domicile. Rappelant par moments les envolĂŠes rythmiques de Jonny Pierce de The Drums, les ballades pop de Postcard sont un mĂŠdicament pour nos âmes en peine hivernales. â&#x2020;&#x2019; Postcard sortira le 19 fĂŠvrier chez Shelflife Records, Music from the Masses et WeWant2Wecord â&#x2020;&#x2019; musicfromthemasses.bandcamp.com/album/ postcard
t Cassette h g i n d Mi BRIT POP â&#x2013; En parallèle du fabuleux groupe Gloria, la chanteuse anglaise Amy Winter sâ&#x20AC;&#x2122;est entourĂŠe de musiciens lyonnais pour former Midnight Cassette. Ils mettent ensemble au monde Castle of My Heart, un premier album oĂš la voix grave et enivrante dâ&#x20AC;&#x2122;Amy vient se poser sur des nappes dâ&#x20AC;&#x2122;instruments vintage lancinantes, lâ&#x20AC;&#x2122;ensemble rappelant les grandes heures de la pop anglaise. Avec un son chaud et pĂŠnĂŠtrant que lâ&#x20AC;&#x2122;on imagine tout droit sorti dâ&#x20AC;&#x2122;une cassette, Castle of My Heart est un disque refuge duquel on nâ&#x20AC;&#x2122;a jamais envie de sâ&#x20AC;&#x2122;enfuir.
â&#x2020;&#x2019; Castle of My Heart de Midnight Cassette - disponible via le Pop Club Records & Archipel â&#x2020;&#x2019; lepopclub.com
Tamburi Ner i
SOMBRE BAL â&#x2013; La couleur est donnĂŠe dès
la lecture du titre : ce sera noir. Ombre est une incantation en provenance de mondes parallèles. Le premier LP du duo milanais Tamburi Neri est un ĂŠcrin aussi sombre que rĂŠdempteur, imprĂŠgnĂŠ de vocalises dâ&#x20AC;&#x2122;outretombe et de textes contĂŠs dans diverses langues. Mais ce nâ&#x20AC;&#x2122;est pas que ça ; pièce ĂŠlectronique poĂŠtique et furieusement moderne, Ombre arrive Ă rendre la noirceur dĂŠlicate et hypnotique grâce Ă la voix quasiment lyrique dâ&#x20AC;&#x2122;Hiroko qui lie les huit morceaux entre eux et vient habiller des rythmiques synthĂŠtiques entĂŞtantes. Un bal inquiĂŠtant et fascinant.
â&#x2020;&#x2019; Ombre de Tamburi Neri - Sortie le 18Â fĂŠvrier 2021 chez Worst Records â&#x2020;&#x2019; worst-records.bandcamp.com
Vi V A
iC néma 27.01.21 02.02.21
festival
MA FÊTE LE CINÉ TAURÉ
R ES RETROUVÉ ET xposition, s, e Spectacle ncontres e r t e s film vier au n a j 7 2 u d r 2021 02 févrie
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olle ctio n Ga um o nt
LUX Scène nationale 36 Bd. du Général de Gaulle 26000 Valence infos et réservations 04 75 82 44 15 lux-valence.com
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đ&#x;&#x2018;&#x20AC; SĂ&#x2030;LECTION JEUX VIDĂ&#x2030;OS â&#x20AC;&#x201D; 80
Jeux vidÊo par Yann François
Th
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PLONGEON â&#x2013; Dans une grande plaine, uniquement peuplĂŠe
Cyberpunk 2077 ATTENTE â&#x2013; Attendu comme le Messie, Cyberpunk 2077 nâ&#x20AC;&#x2122;en finit plus de diviser depuis sa sortie. Mais, quâ&#x20AC;&#x2122;on soit fan ou dĂŠtracteur, on sâ&#x20AC;&#x2122;accorde au moins sur un point : sa direction artistique est Ă tomber par terre. Depuis son avènement littĂŠraire dans les annĂŠes 1980 (avec des chefs-dâ&#x20AC;&#x2122;Ĺ&#x201C;uvre comme Neuromancien de William Gibson) puis sa popularisation au cinĂŠma, le cyberpunk est un genre qui a su imposer son lot de rĂŠfĂŠrents visuels, de la mĂŠtropole verticale et bigarrĂŠe Ă la Blade Runner aux implants cybernĂŠtiques toujours plus intrusifs sur les corps, en passant Ă lâ&#x20AC;&#x2122;omniprĂŠsence du nĂŠon et du fluo en guise de dĂŠco murale. Et le moins quâ&#x20AC;&#x2122;on puisse dire, câ&#x20AC;&#x2122;est que CD Projekt, studio polonais derrière le jeu, fait plus que rendre hommage Ă cet hĂŠritage : il lui offre une forme totale et dĂŠfinitive. Câ&#x20AC;&#x2122;est simple : Night City (la ville du jeu) ressemble, par sa densitĂŠ et sa folie crĂŠative, Ă un musĂŠe du cyberpunk Ă ciel ouvert, dont le moindre panorama devient choc esthĂŠtique. Chaque passant, chaque vĂŠhicule, chaque rue et chaque immeuble respirent lâ&#x20AC;&#x2122;artisanat orfèvre et le souci maniaque du dĂŠtail de vie. Ă&#x20AC; dĂŠfaut dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŞtre le grand blockbuster de lâ&#x20AC;&#x2122;annĂŠe, Cyberpunk 2077 peut au moins se consoler de la palme de lâ&#x20AC;&#x2122;immersion, en sâ&#x20AC;&#x2122;imposant comme une des balades les plus mĂŠmorables au cĹ&#x201C;ur dâ&#x20AC;&#x2122;un urbanisme futuriste et fantasmĂŠ. Câ&#x20AC;&#x2122;est dĂŠjĂ ĂŠnorme.
â&#x2020;&#x2019; Cyberpunk 2077 â&#x2020;&#x2019; Ă&#x2030;diteur : CD Projekt / Genreâ&#x20AC;&#x2030;: RPG / Dispo sur : PC, PlayStation 4, Xbox One, Xbox Series, PlayStation 5 â&#x2020;&#x2019; cyberpunk.net
KIBLIND Magazine â&#x2020;&#x2019; 74 â&#x2020;&#x2019; Dans ma rue
Pathl e e
de tours et sanctuaires en ruine, une jeune archère masquĂŠe galope Ă perdre haleine. AidĂŠe de son aigle, elle doit activer de ses flèches lesdits bâtiments, seul moyen pour elle de libĂŠrer lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠnergie endormie des lieux, et ainsi dĂŠloger le dĂŠmon qui terrorise la rĂŠgion. Petit cousin zen de lâ&#x20AC;&#x2122;illustre Zelda : Breath of the Wild, The Pathless est un jeu oĂš lâ&#x20AC;&#x2122;on court autant quâ&#x20AC;&#x2122;on contemple, les yeux ĂŠbahis, la majestĂŠ de ses contrĂŠes. Une beautĂŠ purement panthĂŠiste puisque, Ă lâ&#x20AC;&#x2122;exception de notre hĂŠroĂŻne, de sa proie et de quelques biches apeurĂŠes, lâ&#x20AC;&#x2122;endroit semble exsangue de toute âme qui vive, si ce nâ&#x20AC;&#x2122;est la prĂŠsence ĂŠthĂŠrĂŠe dâ&#x20AC;&#x2122;un esprit sylvestre remuant les arbres dâ&#x20AC;&#x2122;un souffle assoupi. Avec ses animations de maĂŽtre, sa palette de couleurs sciemment condensĂŠe en quelques fulgurances chromatiques, le jeu rappelle les plus beaux films Ghibli, leur science de lâ&#x20AC;&#x2122;espace et de la plĂŠnitude ĂŠmotionnelle. Par sa nature dĂŠpouillĂŠe et ĂŠsotĂŠrique (un mystère enveloppe constamment notre quĂŞte, sans que cela ne vienne gâcher le trip), le jeu fait aussi penser Ă un autre maĂŽtre du jeu vidĂŠo : Fumito Ueda. Celui-lĂ mĂŞme qui, pour composer des chefs-dâ&#x20AC;&#x2122;Ĺ&#x201C;uvre comme ICO ou Shadow of the Colossus, sâ&#x20AC;&#x2122;est inspirĂŠ des toiles de Giorgio di Chirico, maĂŽtre pictural de la mĂŠtaphysique du temps et de lâ&#x20AC;&#x2122;espace. Une mĂŠtaphysique que le jeu vidĂŠo, Ă lâ&#x20AC;&#x2122;instar de The Pathless, ne cesse de rĂŠinvestir depuis pour faire ses propres tableaux vivants, oĂš chacun¡e vient se perdre pour mieux se retrouver. â&#x2020;&#x2019; The Pathless â&#x2020;&#x2019; Ă&#x2030;diteur : Annapurna Interactive / Genreâ&#x20AC;&#x2030;: Action-Aventure / Dispo sur : PC, PlayStation 4, PlayStation 5, iOS â&#x2020;&#x2019; thepathless.com
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KIBLIND Magazine â&#x2020;&#x2019; 74 â&#x2020;&#x2019; Dans ma rue
đ&#x;&#x2018;&#x20AC;