KIBLIND Magazine Numéro Sugar Sugar
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STORIES, LE MAGAZINE WEB ! Stories, c’est un média en ligne pour découvrir le jeu vidéo autrement, chez Ubisoft, mais pas seulement. Chaque semaine, retrouvez des articles sur les mondes virtuels de demain, des reportages dans les Studios de création, des vidéos sur la reconstitution historique de nos jeux, des interviews de spécialistes des effets spéciaux, ou encore des podcasts sur celles et ceux qui construisent et transforment cette industrie en pleine expansion. Rendez-vous dès maintenant sur stories.ubisoft.com pour découvrir des contenus exclusifs
KIBLIND Store Illustrations à emporter
Pour un printemps illustré, retrouvez une sélection de posters de nos artistes préférés imprimés avec amour en risographie par KIBLIND Atelier. www.kiblind-store.com
De haut en bas, de gauche à droite : Dominic Kesterton, Paul Sirand, Clément Vuillier, Nao Tatsumi, María Medem, et Orane Sigal.
👀 ÉDITO — 6 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Sur le côté, nous avons repéré la petite languette rouge, pas trop loin des indications caloriques et de la liste des ingrédients. Il était temps. Nous la tâtons du doigt gentiment, puis la pinçons soudain entre le pouce et l’index. Elle ne s’est aperçue de rien. On hésite encore. Est-ce vraiment nécessaire ? Est-ce que c’est pas un peu abusé de s’enfiler ça ? Les derniers coups du boutoir de la conscience. C’est trop tard désormais, nous sommes allés trop loin. Il aurait fallu qu’elle soit plus convaincante au moment du passage en caisse. Rien à foutre, maintenant. Et vlan, on arrache tout ça. Il se découvre. Il sort la tête. Son petit minois nous fait coucou. Nous épluchons bientôt totalement l’emballage : il serait dommage de gâcher ça avec un goût de plastique inopportun. La bouche s’ouvre. Les filaments de salive se révèlent nombreux. Tu m’étonnes. Et puis le croc. C’est l’extase, le bonheur, le chocolat, le caramel, la génoise. Le sucre. Encore une fois, il nous a eus. Et c'est parti pour un amoncellement de glucides dans le bidou. À l'image de la couverture de ce numéro qu'Alexis Jamet a comblé petit à petit. Jusqu'à l'overdose ?
Directeur de la publication : Jérémie Martinez / Direction Kiblind : Jérémie Martinez - Jean Tourette - Gabriel Viry Comité éditorial : Maxime Gueugneau - Elora Quittet - Jérémie Martinez Team Kiblind : Marie-Camille Alban - Alizée Avice - Guillaume Bonneau - Agathe Bruguière - Allan Chéron - Alix Hassler Justine Ravinet - Charlotte Roux - Jean Tourette - Olivier Trias - Gabriel Viry Contributeurs : Félix Decombat - Foire du livre de jeunesse de Bologne - Nico Prat - Gregory Vieau Réviseur : Raphaël Lagier Direction artistique : Kiblind Agence Imprimeur : Musumeci S.p.A. / www.musumecispa.it Papier : Le magazine Kiblind est imprimé sur papier Fedrigoni / Couverture : Symbol Freelife E/E49 Country 250g / Papier intérieur : Arcoprint Milk 100g, Arena natural Bulk 90g et Symbol Freelife Gloss 130g Typographies : Kiblind Magazine (Benoît Bodhuin) et Lector (Gert Wunderlich) Édité par Kiblind Édition & Klar Communication. SARL au capital de 15 000 euros - 507 472 249 RCS Lyon. 27 rue Bouteille - 69001 Lyon / 69 rue Armand Carrel - 75019 Paris - 04 78 27 69 82 Le magazine est diffusé en France et en Belgique. www.kiblind.com / www.kiblind-store.com ISSN : 1628-4146 Les textes ainsi que l’ensemble des publications n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Tous droits strictement réservés. Merci à Matthieu Sandjivy. THX CBS. Contact : magazine@kiblind.com
👀 SOMMAIRE — 8 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
6
Édito / Ours
8
Sommaire
10
In the mood feat. Félix Decombat
20
Intro Sugar Sugar
24
Invitation Nico Prat : Verre à sucre : le grand casse
28
En couverture : Alexis Jamet
34
Créations originales Sugar Sugar
43
Citations
44
Dossier - Packaging à collectionner
50
Invitation Grégory Vieau : Songwriting et sucreries
54
La bibliothèque idéale : Bologna Children’s Book Fair
56
Playlist Back 2 Back : Pierre Hermé & Vincent Carry
58
Imagier - Pâtisseries
69
Sélection Kiblind
80 Square2
MAI-JUIN-JUILLET 2021 UN TOURBILLON DE SPECTACLES DANS UNE ŒUVRE MONUMENTALE DE PAPIER
Pendant 3 mois, une quinzaine d’artistes s’emparent tour à tour de cette gigantesque scénographie sous la Verrière des SUBS. AU PROGRAMME : performances, concerts, ateliers-débats, workshops et autres réjouissances.
PROGRAMME À DÉCOUVRIR SUR LES-SUBS.COM 8 BIS QUAI SAINT-VINCENT – 69001 LYON
👀 IN THE MOOD — 10 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
IN THE M D Vous croiserez dans cette entrée quelques objets illustrés rencontrés par bonheur ces derniers mois lors de nos pérégrinations visuelles. Vous serez accompagnés par les dessins du talentueux illustrateur et programmeur Félix Decombat.
👀 LIVRE ■
Printemps Blanc → Par Manon Cezaro Imprimé et édité par Quintal quintalatelier.com manoncezaro.com
11 — IN THE MOOD
TAPIS ■ → Par Hello Numi hellonumi.bigcartel.com
VINYLE ■
Mesures de Simon Provencher (Michel Records) → Artwork par Camille Bertini bertini.ca michelrecords.com
AFFICHE ■
Exposition Todays → Par Hyunjung Huh hyuhyuhuhyu.com
MAGAZINE ■ Hamam Magazine n°2 - Chaleur → Artwork par Okay Karadayilar hamammag.com
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
CD ■ Please Don’t Call Me de ziont → Artwork par Dominic Kesterton instagram.com/ziont dominickesterton.com
👀 IN THE MOOD — 12
POSTER ■ → MOLLY ROSE DYSON mollyrosedyson.cargo.site
La chose que préfère faire Molly Rose Dyson dans la vie, c’est de créer des posters, et on se dit que c’est tant mieux vu les beautés en question. Fascinés par celui dont elle a conçu le design pour le bar-concert Acephale à Cologne, on lui a posé quelques questions sur son travail. Salut Molly, à quel moment as-tu commencé à t’intéresser au design graphique et à faire des posters ? J’ai étudié aux Beaux-Arts mais lorsque j’ai fini l’école, j’ai réalisé que j’étais plus intéressée par l’illustration et le design. J’ai alors commencé à faire des designs de posters sur demande à partir de 2015 et mon travail s’est développé assez vite. Les gens semblaient apprécier ce que je faisais, ce qui était une chouette surprise. Je penchais plus vers l’illustration au départ, mais finalement, j’ai vraiment aimé mélanger illustration et typographie ensemble. Mais ce que je préfère faire dans le design, c’est faire des posters. Peux-tu nous parler du poster que tu as réalisé pour Acephale : quelles ont été les différentes étapes de création pour arriver au rendu final ? J’utilise un logiciel appelé Vectoraster pour créer une variété de grilles en formes d’étoiles. Ce qui m’intéressait là-dedans, c’était d’utiliser différentes combinaisons de ses grilles de motifs pour avoir plusieurs images et motifs les uns sur les autres. L’image de la fleur, par exemple, est encore visible alors qu’il y a un autre motif qui la recouvre. J’ai créé la typographie en utilisant Vectoraster également. Les petits espaces en forme d’étoiles me rappellent aussi la forme de la bactérie qui est souvent utilisée pour représenter le Covid-19. Dans quel but cette affiche a-t-elle été réalisée ? Ce poster a été fait pour le bar Acephale à Cologne où mes amis Neu, Kaputt organisaient régulièrement des concerts avant la pandémie. Le poster a été vendu pour soutenir ce lieu pendant le confinement. Faire des posters pour les concerts organisés par Neu, Kaputt à Acephale a été mon premier travail régulier en tant que graphiste, donc je suis vraiment heureuse d’avoir pu participer à cette levée de fonds. Comment travailles-tu sur la texture et la typographie de tes posters en général ? J’adore m’amuser avec les polices digitales. Je ne suis pas assez entraînée pour espacer et disposer les typographies parfaitement, mais lorsque je crée des typographies, je laisse libre cours à mon intuition pour leur donner plus de personnalité. J’aime surtout utiliser des typographies illustrées et expressives. Dans mon travail en design, je ne priorise pas forcément les choses claires et faciles à comprendre, car je préfère que celui qui regarde découvre de nouvelles informations par lui-même lorsqu’il s’attarde sur mon poster. Quelles sont tes plus grosses influences en matière d’art et de design graphique ? J’en ai tellement, mais je pense que ma plus grosse influence est Mitsuo Katsui. C’était un designer graphique japonais qui était fasciné par les couleurs et qui utilisait beaucoup de logiciels informatiques pour faire du design dans les années 1980 et 1990. Comment décrirais-tu ton style graphique ? Je ne sais pas vraiment comment le décrire, mais je dirais qu’il y a définitivement quelque chose de nostalgique autour de mon travail, il est aussi assez psychédélique et spatial. Je la placerais pile à mi-chemin entre illustration et design graphique.
NOUVELLE GRAPHIQUE ■
Hoops (Sapristi Comic) → Genie Espinosa geniespinosa.com sapristicomic.com
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
VINYLE ■
People on Sunday de Domenique Dumont → Artwork par Edward Carvalho-Monaghan edwardcarvalhomonaghan.co.uk domeniquedumont.bandcamp.com
👀 Montreux Jazz Festival → Artwork par Marylou Faure montreuxjazzfestival.com maryloufaure.com
13 — IN THE MOOD
AFFICHE ■
VINYLE ■
Tako Tsubo de L’Impératrice (Microqlima) → Artwork par Ugo Bienvenu instagram.com/ugobienvenu l-imperatrice.cool
LIVRE ■
The Jaunt Process créatif de 40 artistes ayant voyagé à travers le monde en 324 pages avec Cleon Peterson, Daniel Frost, Lennard Kok, Jean Jullien, Monica Ramos, Tom Haugomat, Olimpia Zagnoli, Hedof, Mike Perry, Niels Shoe Meulman, Atelier Bingo, etc. thejaunt.net/the-book
DOUBLE K7 ■
I & II de La Jungle (Feles Music) → Artwork par Guillaume Ettlinger g-et.info lajungleband.com
VASE ■ → Winneke & Felix We are Out of Office etsy.com/shop/weareoutofoffice KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
PATCH ■ → Patricia Larocque / ffembroidery ffembroidery.bigcartel.com
👀 IN THE MOOD — 14
ZINE ■
LE STRING ZINE instagram.com/lestring_zine À force d’arpenter les ruelles habillées de néons de son quartier de Pigalle, Fanny Vedreine a eu l’envie de retranscrire cette atmosphère si spéciale à travers un zine décomplexé, féministe et illustré. Avec Ana Uru à la direction artistique, forcément, ça donne un bel objet, qui plus est, au nom évocateur. On a voulu savoir ce qui se cachait derrière Le String. Salut Fanfan, peux-tu nous dire comment est né Le String ? Au cours de l’année 2019, j’étais responsable du bar Le Sans Souci à Pigalle ; j’avais obtenu mon diplôme de journalisme trois ans plus tôt et je n’avais pas trop le temps d’écrire des piges, mais l’envie de créer un petit journal qui me ressemble, et directement très inspiré du quartier de Pigalle. Le rock, le sexe, la nuit, la fête, l’histoire culturelle et artistique folle de ce quartier. Je voulais créer un contenu pop et décomplexé, avec un point de vue féministe à chaque sujet. Et seule l’illustration pouvait permettre un rendu original et naïf pour accompagner des textes parfois graves... Tout est plus joli quand c’est dessiné, non ? Quelle est la ligne directrice du zine ? Le féminisme intersectionnel avant toute chose. Parler des femmes, de leur corps, de leurs espérances, de leurs moyens d’expression. Écrire à la première personne et prendre plaisir à littéralement nous raconter une histoire. Mais également la conscience écologique, qui passe aussi par l’impression en France sur papier recyclé avec encres naturelles. Peux-tu nous citer quelques sujets traités dans le dernier zine pour donner une idée du contenu éditorial ? Dans ce nouveau numéro, il a été question de s’intéresser aux injonctions du corps féminin et aux combats menés par le biais de la sororité. Il y a donc une longue enquête menée par Malgo Nieziolek sur les militantes polonaises qui se battent pour la législation de l’avortement dans leur pays. Il y a aussi l’interview de la doula Tamara Godivier, ainsi qu’un sujet autour du post-partum. Et puis un petit bilan sur les nouvelles techniques de drague malgré le Covid-19 et une interview du groupe de rock MNNQNS. Comment sélectionnez-vous vos illustrateur.rice.s/auteur.rice.s ? Tout se fait au feeling, je passe des heures sur Instagram à enregistrer des tas de dessins. Il y a aussi le bouche-àoreille ou les expos. Avec Clara, on s’en conseille pas mal et on échange beaucoup sur nos coups de cœur. Parfois, celles et ceux qui écrivent un texte émettent leur suggestion personnelle. Où trouver le zine ? Quelques librairies en région parisienne, à Bruxelles, Berlin et Nice ont quelques exemplaires. Mais le plus simple est clairement d’envoyer un message privé pour acheter un exemplaire à 12 euros (frais d’envoi compris) et je m’occupe personnellement de faire des missions vers la Poste chaque semaine ! Quid du débat sur le string apparent : reviendra-t-il bien un jour ? Hmm c’est une question complexe car l’idée est surtout de savoir si le jean taille basse façon Britney dans le clip « Slave for you » reviendra à la mode ou pas. Car perso, avec des jeans taille haute, y’a aucun risque !
VINYLE ■
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Yol d’Altin Gün (Ato Records / Glitterbeat) → Artwork par Anne Caesar van Wieren annecaesar.nl instagram.com/altingunband
AFFICHE ■ → Par Ivo Konings instagram.com/ontwierp
👀 Parfois, notre œil est si captivé par une œuvre qu’il arrive difficilement à s’en défaire. C’est ce qui s’est passé quand on a vu pour la première fois l’artwork de l’illustratrice londonienne Alice Bloomfield réalisé pour Libidine, l’EP déstructuré et hypnotique de l’artiste italien Marculedu. Il fallait bien qu’on sache comment était née cette œuvre venue d’un univers parallèle.
MAGAZINE ■
Recreo Magazine (Monoblock) → Couverture par Cel Castella celcastella.com monoblock.tv
15 — IN THE MOOD
VINYLE ■ → ALICE BLOOMFIELD instagram.com/bl00mfield
Coucou Alice. Peux-tu nous dire quel était le brief quant à la réalisation de l’artwork du vinyle de Marculedu ? Le brief était surtout centré sur le concept de l’album de Marculedu. Il m’a dit qu’il voulait que son histoire soit traduite visuellement par un voyage archéologique et intérieur, et qu’on y rencontre des cristaux et des cavernes. Il m’a également demandé qu’il y ait des signes distinctifs le représentant comme la moustache et ses boucles d’oreilles dorées, qui sont ses marques de fabrique. Comment as-tu procédé pour créer cette pochette ? J’ai commencé par faire des esquisses avec plusieurs idées pour avoir un premier aperçu de la composition. J’adorais l’idée de voir le visage de Marculedu à travers les nombreux cristaux de la grotte, ce qui donnait l’illusion qu’il se tenait en face d’eux et que son visage se reflétait à travers eux. Ou alors qu’il était emprisonné à l’intérieur. J’adore que les gens puissent donner différentes significations à mes œuvres. J’aime que la personne qui regarde y ajoute quelque chose de personnel par son interprétation, plutôt qu’on la force à avaler tel ou tel message. Quelles étaient tes références visuelles ici ? Marculedu m’a envoyé toute une collection de références visuelles qui étaient très chouettes. Il y avait beaucoup de grottes à cristaux et beaucoup de textures rocailleuses. Comment décrirais-tu ton style de dessin ? C’est plutôt compliqué de le définir parce que je n’ai pas l’impression qu’il ne se résume qu’à une chose. Mon but dans ce travail est de toujours progresser et changer. J’essaie en général de dessiner des formes de façon semi-réaliste. Même si elles sont très étirées, elles sont tout de même basées sur de réelles proportions. Étant donné que j’adore ajouter des détails tant que je peux, je pense que mon style peut être défini comme semi-réaliste et ultra-détaillé.
FOULARD EN SOIE ■
→ Par Zoé Coulon faune-studio.com
Est-ce que la musique t’inspire quand tu crées ? Je trouve ça très important d’écouter la musique de l’album sur lequel tu travailles pour comprendre l’énergie et le message du musicien. Le sentiment que procure la musique doit être retranscrit dans l’univers artistique de la pochette et donner l’impression à celui qui le regarde de déjà connaître l’album avant de l’avoir écouté. Par exemple, si on m’avait donné exactement le même brief mais pour un groupe de heavy metal, le dessin aurait été ressenti vraiment différemment. Pour toi, quelles sont les meilleures pochettes de tous les temps ? Wish You Were Here des Pink Floyd est une de mes préférées. L’anecdote folle à propos de cette pochette, c’est que le mec prenait vraiment feu lors du shooting de cette photo. Ce n’était pas photoshoppé. J’adore aussi tout l’univers artistique autour des albums et singles de King Krule. Le design est si puissant… on ressent vraiment quelque chose lorsqu’on les observe.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
👀 IN THE MOOD — 16
VINYLE ■
Volume One de Honey Slides → Artwork par Andrew McGranahan instagram.com/andrew_mcgranahan honeyslides.bandcamp.com
LIVRE DE DESSINS ■
L’homme qui plantait des arbres → Joseph Levacher instagram.com/joseph_levacher
AFFICHE ■
Radio Meuh et Doka Productions présentent
Radio Meuh Circus Festival → Artwork par Sophy Hollington sophyhollington.com radiomeuh.com
COUVERTURE ■
→ Salomé Lahoche instagram.com/salomelahoche
circus.radiomeuh.com
ZINE ■
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Wobby #24 - Déjà Vu → Couverture par Raisa Álava raisalava.com wobby.club
17 — IN THE MOOD
BOUGIE ■
→ AHN YOOJIN instagram.com/spsp88
Avant déjà, l’illustratrice Ahn Yoojin faisait des dessins si doux qu’on avait envie de s’y lover pour l’éternité. Aujourd’hui, l’artiste de Séoul s’inspire de ceux-là pour en faire des bougies à l’effigie de ses personnages. Tout ça accumulé, ça nous rend tout chose. Coucou Ahn Yoojin, on se demandait quand tu avais commencé à faire des bougies… Ces derniers temps, je me suis préparée à participer à une exposition avec plusieurs artistes. L’exposition fait le lien entre les bougies et les œuvres des artistes. C’est comme ça que j’ai commencé à en fabriquer, en lien avec mes carnets de dessins. L’étape de fabrication des bougies est très sympa, car ça ressemble beaucoup à quand je dessine. Peux-tu nous décrire la technique que tu utilises pour faire tes bougies ? Je suis une débutante et je ne suis pas très méticuleuse. Par conséquent, il est très fastidieux pour moi de produire une bougie parfaite. Mais j’ai trouvé la manière qui me convenait le mieux. En Corée, il y a des bougies en espèce de pâte d’argile faites pour aider les enfants à en fabriquer facilement. C’est ma manière à moi aussi de les faire. J’adore leurs formes inachevées. Tu nous as dit que tes bougies étaient inspirées par tes illustrations. Peux-tu nous en dire plus ? Tout est parti d’un de mes livres de dessins. Ça raconte une petite histoire où il faut retrouver le poisson rouge disparu. J’ai dessiné un poisson rouge, un enfant et une tortue dans cette histoire. La nature translucide de la bougie rappelle beaucoup la texture douce de mes peintures. En plus de ça, faire des bougies à partir de ces personnages était simple car ils le sont aussi. Quels sont les thèmes évoqués dans tes dessins ? Ça peut être des histoires courtes, des moments de joie de mon enfance, la curiosité de tous les jours, la complexité et l’ambiguïté des sentiments, les rêves beaux et tristes.
PATCHS ■ → About Evie & Itfilsgood instagram.com/aboutevie instagram.com/itfilsgood
VINYLE ■ Chrysalis de Joon Moon (Les Disques Du Caméléon) → Artwork par H5 instagram.com/h5paris instagram.com/joonmoonmusic
pinbadg.es
AFFICHE ■ Pour l’album Drunk Tank Pink de Shame → Artwork par Dawid Ryski dawidryski.pl
→ Les figures présentes sur ces pages ont été réalisées par Félix Decombbat felixdecombat.com
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
PINS ■
Club Mate vue par Virginie Morgand pour KIBLIND
CLUB-MATE.FR WWW.INSTAGRAM.COM/CLUBMATEFRANCE
👀 Le sucre est une substance de saveur douce extraite principalement de la canne à sucre et de la betterave sucrière. Mais pas que
Sucre, c’est aussi la discrète capitale de la Bolivie (à utiliser pour gagner un camembert au Trivial Pursuit ou lors d’une soirée « le saviez-vous »).
SUGAR SUGAR
Le chimiste allemand Marggraf découvre le principe sucrant de la betterave.
1908
Le sucre est un produit de luxe, consommé dans les cours les plus fastueuses. Louis XIV est un roi « sans dent ».
1747
XVIIe
Au sens figuré, on peut aussi être (fragile), pur (authentique), un (gentil), en ou encore tout (faire preuve d’une fausse gentillesse suspecte afin d’obtenir quelque chose en retour). On peut aussi casser du sur le dos de quelqu’un (critiquer quelqu’un sans qu’il le sache) ou allègrement se er (se faire plaisir en s’octroyant des bénéfices au détriment de quelqu’un).
Restée 4 semaines en première position des charts américain en 1969, elle est la chanson favorite des astronautes d’Apollo 12 en route pour la lune. Reprise par Bob Marley, Claude François et Homer Simpson.
est une chanson du groupe fictif The Archies, issu de la série animée The Archie Show.
IVe siècle av. J.-C
Palmier Cocotier Courge sucrière du Brésil
C’est une molécule de saccharose Le sucré fait partie des quatre saveurs de base avec le salé, l’amer et l’acide
Les Grecs découvrent « un roseau qui donne du miel sans le secours des abeilles »
Sirop d’a gave Canne à sucre Bette r a sucriè ve Sorgo comm re un Sirop d’érable
19 — INTRODUCTION
N O
SUGAR SUGAR
D’OÙ PEUT-ÊTRE NATURELLEMENT Miel EXTRAIT LE SUCRE ?
DÉFINITI
Le premier morceau de sucre emballé individuellement est présenté à Paris.
→ chiffres publiés en octobre 2020
Brésil Inde UE Chine Thaïlande
LA FRANCE FAIT SON SUCRE
25 à 35 kg par personne et par an (chiffre stable depuis 50 ans)
COURS DU SUCRE 0$
395,9
395,90 $ la tonne de sucre blanc
9e producteur mondial 1er producteur européen 2e producteur mondial de sucre de betterave 3,5 milliards d’€ de chiffre d’affaires 2,4 Mt de sucre exporté 25 sucreries dont 6 en Picardie 44 500 employé.e.s par la filière betterave-canne-sucre
XXe
POURQUOI ON AIME
WE E T S CATS & DOGS Les teams chats et chiens n’ont pas fini de se déchirer. Si, comme la plupart des mammifères, le chien a un faible pour les petites douceurs, le chat, lui, comme d’autres félins carnivores ne peut sentir le goût sucré. Le sucré est perceptible grâce à deux protéines situées à la surface des papilles. L’une de ces deux protéines manque au chat, mais aussi au guépard ou au tigre. Au cours de leur évolution, le régime alimentaire carnivore de ces animaux aurait désactivé la sensibilité au sucré. En effet, si on mange des petites bêtes qui bougent, il y a moins d’utilité à percevoir une saveur principalement présente dans les végétaux.
T
?
Claude Marcel Hladi et Patrick Pasquet, tous deux professeurs émérites en primatologie au Muséum d’Histoire Naturelle ont mis en avant que sur le plan cognitif, les saveurs sucrées indiqueraient aux primates humains et non humains la valeur énergétique des végétaux – d’où le plaisir qui y serait associé. En revanche, la plupart des plantes toxiques seraient amères. La douceur du sucre serait donc un choix sans danger qui apporterait de l’énergie. NOTA BENE cette information se vérifie pour les substances naturelles ingérées à l’état sauvage. Peu de chances que cette huitième crêpe vous fasse courir un marathon mais ça peut servir d’excuse.
1973
lien iste israé Le biolog er prouve ein Jacob St pour férence que la pré é est innée cr le goût su és. béb chez les
J’aime le sucre
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
2,2 Mt par an, soit 70 kg de sucre par seconde
Le sucre se démocratise. La consommation par habitant·e passe de 5kg en 1900 à 35 kg aujourd’hui.
LES PLUS GROS PRODUCTEURS DE SUCRE 1 2 3 4 5
CONSOMMATION DE SUCRE EN FRANCE
Le sucre « indigène » issu de la betterave vient concurrencer le sucre « colonial ». D’autres pays européens se lancent dans la production.
TAN
PRODUCTION DE SUCRE
Les Pays-Bas et la France développent à leur tour des plantations de canne à sucre. La production massive est permise par l’essor de l’esclavage.
XIXe
Les Portugais jouent un rôle majeur dans la diffusion de la canne à sucre. La production est à l’origine de la traite des esclaves dans le cadre du commerce triangulaire.
Milieu du XVIIe
XVIe
UNE HISTOIRE PAS TOUTE ROSE ☹ DE LA COLONISATION À LA SURCONSOMMATION
👀 INTRODUCTION — 20
« Juste un morceau de sucre qui aide la médecine à couler. Ça vous rend la vie plus belle ! » Mary Poppins
U
S
Le sucre réussit le tour de force d’incarner à la fois le plaisir, le réconfort, la récompense, la fête et l’exceptionnel.
U C
OD E
A
Le sucre parle à tous nos sens, avec ses couleurs acidulées, ses textures moelleuses ou vaporeuses, ses émanations alléchantes, ses bruissements bien sentis (on vous voit au fond de la salle vous délecter du pétillement de votre soda) … pour venir, inexorablement, chatouiller nos papilles.
RE
Le sucre s’enracine goulûment dans nos imaginaires. L’orgie de bonbons de notre enfance, les bougies soufflées sur un gâteau, la pomme d’amour de la fête foraine ou les churros à la plage, c’est tout ça, le sucre. Le sucre, c’est l’horloge sociale d’une année, de la galette à la bûche. Le sucre, c’est la vie dont le « plus beau jour » se conclue, parfois, en pièce montée.
SEZ
,3
… PÂT
IS
2
D’OÙ VIENT NOTRE PETIT
DEJ’ ?
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Jusqu’au début du XXe siècle, le petit déjeuner n’est pas si répandu ou alors il se compose de restes, de soupe… ou d’un petit verre de rouge. Les professionnel·le·s de la santé tirent alors la sonnette d’alarme : l’absence de petit-déjeuner est responsable de fatigue matinale, d’accidents du travail pour les ouvrier·e·s ou de déficit d’attention des écolier·e·s. Ils préconisent la prise d’un petit-déjeuner « énergisant »… coucou le sucre ! Ces recommandations « santé » se conjuguent avec la mondialisation des denrées, le sucre mais aussi le café, le thé et le chocolat. Les Français·es adoptent alors le petit-déjeuner tel qu’on le connait aujourd’hui, à base de tartines de confiture et de croissants. On n’oublie pas non plus pas le goûter ou « quatre heures » et son bol de céréales au retour de l’école.
1,
LES R E PA S SUCRÉS
Le rêve ultime de gagner son poids en bonbecs
L’île aux délices de Mario Kart
Le royaume bonbons d’Adventure Time
Le clip California Gurls de Katy Perry
Et les néo-musées dédiés aux selfies, comme ici en Malaisie
!
On l’avoue, on s’est peut-être laissés tenter par la saison 9 du Meilleur Pâtissier à la télé, mais qui pourra-bien nous jeter la pierre ? C’est un fait, les Français·e·s aiment la pâtisserie. Un sondage Opinion Way réalisé en 2018 révèle ainsi que, pour 58 % des Français·e·s, un bon repas doit nécessairement se terminer par une pâtisserie. 35 % des personnes interrogées déclarent même se laisser tenter au moins une fois par semaine. Et en moyenne, nous dépensons 350 € par foyer et par an en pâtisseries.
ROXANE Ancienne candidate de l’émission, elle compte près de 4 millions d’abonnés sur sa chaîne YouTube, « L’atelier de Roxane », où elle transmet ses meilleurs tips cupcakes, cake design et cake pops.
AUGUSTE ESCOFFIER Père de la cuisine moderne, référence absolue de la gastronomie française, Auguste Escoffier impose le service « à la russe » : les plats ne sont plus servis tous en même temps mais les uns à la suite des autres, et le dernier est systématiquement sucré ! On doit d’ailleurs au chef quelques desserts fameux, comme la poire Belle-Hélène ou la pêche Melba.
Saurez-vous associer À l’origine, le cronut correctement deux (croissant + donut) pâtisseries pour lancer de Dominique Ansel fait sensation une nouvelle tendance à New-York, en 2013. culinaire ? T PUIS SUIVEN Le Brookie
=
Brownie
+
Cookie
Le Crookie
=
Croissant
+
Oreo
Le Duffin
=
Donut
+
Muffin
Le Puffin
=
Pancake
+
Muffin
Le Creffle
=
Crêpe
+
Waffle
QUI SERA LE PROCHAIN MUTANT SUCRÉ ?
👀 DY , U I VO U U N A M I Q T DU S BI U EN VE
leader mondial
VS
CARAMBAR&CO
challenger (14 marques dont Carambar, Poulain, Lutti)
RÉPARTITION DES VENTES DE CONFISERIES EN GRANDES ET MOYENNES SURFACES EN FRANCE
Le débat est toujours brûlant. À savoir tout de même : une consommation excessive de bonbons à la réglisse peut causer des problèmes cardiaques.
ège Allemagne Norv
LES 5 BONBONS PRÉFÉRÉS DES FRANÇAIS (SELON LES VENTES DE 2018) he Autric 3,5
Fran
ce
fraises Tagada Dragibus Schtroumpfs crocodiles Chamallows
3,3 kg
e iss 3,4 kg
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kg
3,8
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QU'EST CE QU'ON NO
de Suè7, 7k
5,58
kg
« FOR A BETTER START IN LIFE »
g
kg 5,53
Comme le lait maternel qui contient du sucre, le Coca participe au bon développement de votre enfant. On apprécie particulièrement le petit texte explicatif qui indique que le plus tôt sera le mieux et que le sucre ingéré dès l’enfance permettra à l’enfant d’être confiant et de s’accepter lors de son adolescence.
kg
kg 4,9 4,6 k
g
Belgique
Si vous souhaitez perdre du poids et raisonner votre alimentation, le sucre, grâce à son effet rassasiant va vous y aider.
G ! SU
QU'EST CE QU'ON NOUS DIT ? « ARE YOU MAKING YOUR CHILDREN PAY FOR YOUR WEIGHT PROBLEM? »
AR R A G
R US H !
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
!
C’était sans compter sur la Grande Dépression Américaine. Le pop-corn, bon marché, perdure alors que les salles de cinéma ferment. Les industries se demandent comment trouver de nouvelles sources de revenus et apparait le désormais célèbre rayon confiserie.
SH
A l’origine le pop-corn était en Amérique du Sud un aliment sacré posé sur les tombes en guise d’offrandes aux défunts. Il n’arrive que bien plus tard aux États-Unis. Il va être popularisé par un confiseur américain qui, après s’être cassé les dents sur des cacahuètes grillées, réalise que le maïs est beaucoup moins cher et produit moins d’odeur et de fumée à la cuisson. Il n’en fallait pas plus. Il présente sa machine à pop-corn à l’Exposition Universelle de 1893. Un acheteur qui a le nez creux rachète sa licence pour tout le pays. Le succès est presque immédiat et on trouve le petit
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maïs soufflé partout dans les fêtes foraines, les cirques, les événements sportifs… Il est le symbole de la festivité et du divertissement. Mais les salles de théâtre et de cinéma s’y refusent. Le cinéma muet est encore considéré comme une pratique élitiste ; les salles sont luxueuses avec fauteuils et moquettes, la confiserie du pauvre n’y est pas admise.
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Le pop-corn fait partie de l’histoire du cinéma. Que ce soit pour adoucir son palais devant des mélos, pour râler contre les scrounch scrounch agaçants du voisin, il est synonyme de plaisir, de détente, de loisirs et de sorties. Petit retour sur son histoire.
Aujourd’hui, les ouvreuses et leurs « bonbons, caramels, esquimaux, chocolats » ont disparu mais la vente de confiseries représente 15% des revenus des cinémas français et 40% des cinémas américains.
Non seulement vous avez un problème de poids mais en plus, vous êtes un mauvais parent. Les produits sugar free dont vous bourrez vos placards ne vous feront pas perdre de poids et vos enfants manqueront cruellement d’énergie et rateront leur vie. CQFD. Consommez du sucre alors !
SUG H !
RIES des SALLES OBSCURES
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LES CON FISE
QU'EST CE QU'ON NOUS DIT ? « CURB YOUR APPETITE »
RUSH
Lors du championnat du monde de pâtisserie, chaque équipe doit réaliser des pièces artistiques, dont une en sucre avec cuisson (tiré, soufflé, coulé, etc). Les sculptures peuvent atteindre jusqu’à 1,25 m de haut !
Et l’art d ancest u sucre est ra depuis l. Pratiqué le e l’ameza VIII siècle, ik consist u japonais e des an à sculpter im avec d aux réalistes u sucre .
AR ! SUG
(VOUS L’AVEZ ?)
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Le sucre accompagne l’être humain depuis ses origines car il est la source d’énergie disponible dans la nature. Il nous permet de chasser, bouger, danser mais aussi dessiner des Mégaloceros comme ce Monsieur avec un mulet.
LA CONSOMMATION DE BONBONS EN EUROPE, PAR AN/ PAR HABITANT
1,38 milliard d’€ de chiffre d’affaires en France
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US DIT ? QU'EST CE QU'ON NO « GREATEST FORCE ON EARTH »
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73,4 milliards d’€ de chiffres d’affaires
HARIBO
LES BONBONS À LA RÉGLISSE : DÉLICIEUX OU DÉGEUS ?
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145 millions de tonnes produites (contre 163 millions de tonnes en 2014)
LE CHOC DES GÉLATINES
Royaum e Finlande Uni
EN 2018, DANS LE MONDE
21 — INTRODUCTION
DA D
Willy Wonka a beau être le génial inventeur du caramel qui change de couleur toutes les dix secondes, il n’en reste pas moins un humain un peu étrange. Privé de sucrerie par son père dentiste pendant son enfance, il devient littéralement FOU de chocolat le jour où il lui désobéit. Il dévoue sa vie à sa passion et coupe tout contact avec son géniteur. C’était sans compter sur l’intervention du petit Charlie qui lui fera comprendre que mieux encore que le goût du chocolat, il y a la mif bien sûr.
LE S TR S O I BR I GA D S N Trois brigands sèment la terreur en attaquant et dévalisant les diligences de leur région. Lors d’une attaque, il rencontre Tiffany, une orpheline conduite contre son gré chez sa vieille tante. Ils finissent par l’héberger chez eux, où ils gardent leur immense trésor. Sur les conseils de Tiffany, les brigands achètent un grand château pour y recueillir les orphelins et les libérer de l’emprise de la vilaine tante.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
À quelle quantité de morceaux de sucre correspondent les aliments suivants ? 100 g de pétales de maïs • • 4,3 enrobés de sucre 1 yaourt aux fruits
•
• 7,4
1 orange
•
•
1/2 pizza surgelée
•
• 1,7
1 Litre de velouté aux légumes
•
• 3,2
1 barquette de carottes râpées •
3
•
3
100 g de spaghettis
•
• 3,1
1 verre de soda
•
• 0,7
Selon l’OMS, un être humain devrait consommer au maximum 25g de sucre par jour (soit 6 cuillères à café).
M
A
L
A
CERVEAU Au-delà de l’addiction, l’excès de sucre peut mener à un état dépressif et anxieux voire détériorer certaines fonctions cognitives. PANCRÉAS Si le sang contient trop de sucres, le pancréas produit de l’insuline pour réguler ce taux, jusqu’à épuisement. C’est ainsi qu’est provoqué le diabète de type 2. SYSTÈME VASCULAIRE Consommer du sucre a un effet néfaste sur la pression artérielle et peut causer des maladies cardiovasculaires. CORPS Une consommation excessive de sucre et un régime alimentaire peu équilibré peut mener au surpoids et à l’obésité.
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Les fruits – qui contiennent du sucre à l’état naturel – en contiennent peu comparés aux produits industriels très concentrés. Notre organisme n’est pas apte à métaboliser de telles quantités. De la même façon, la dépendance à la cocaïne serait née de la transformation de la matière – absente au temps de la consommation des feuilles de coca. L’association avec du gras créerait par ailleurs un stimulus gustatif puissant : certaines études de neuro-imagerie montrent que le sucre couplé à du gras amplifie le signal d’activation du circuit de la récompense dans notre cerveau.
ES LIÉES
A
U
S
E
Les maisons en pain d’épice sont des pièges et clairement, l’instinct maternel n’existe pas.
MASQUÉ
R
Hansel et Grethel sont deux frère et sœur élevés dans une famille très pauvre. Sur la suggestion de leur mère, les parents décident de les abandonner dans la forêt afin de ne plus avoir à partager leur nourriture. Perdus, affamés, Hansel et Grethel découvrent une maison en pain d’épice. Ils sont accueillis par une femme qui a l’intention de les manger. Ils parviennent à la tuer, lui voler sa fortune et reviennent auprès de leur père. La mère indigne est morte de faim en attendant et la famille est heureuse de se retrouver.
SUCRE AVANCE
Il existerait une véritable addiction au sucre – comparable à l’alcool ou à l’héroïne d’après Serge Ahmed, directeur de recherche au CNRS. Aux États-Unis, au Canada et en Allemagne, où des études ont été menées, cela pourrait toucher jusqu’à 10% de la population. En effet, le sucre active le circuit de la récompense en libérant de la dopamine et nous apporte donc du plaisir – à court terme. Pour maintenir ce plaisir, l’organisme en redemande toujours plus, ce qui entraine l’apparition de comportements addictifs.
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H A NSE L ET G R ET L E
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La directrice de l’orphelinat est complètement addict aux gourmandises. Elle fait travailler les orphelins dans les cultures de betteraves, en extrait le sucre pour le mettre dans ses gâteaux et leur donne le reste de betteraves. Ironie de l’histoire, elle finira par être transformée en gâteau.
SUCRE ET ADDICTION ADDICTION ADDICTION ADDICTION
S
Le roman de Roald Dahl adapté au cinéma par Tim Burton raconte l’histoire de Charlie Bucket, garçon pauvre vivant avec ses parents et ses grands-parents dans une maison minuscule. Il est fou de chocolat mais ne peut recevoir qu’une tablette chaque année pour son anniversaire. La célèbre chocolaterie Willy Wonka située près de chez lui organise justement un grand concours : les personnes qui trouveront les cinq tickets d’or cachés dans les tablettes de chocolat auront le privilège de visiter la chocolaterie et apprendront une grande nouvelle.
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L A CHO C OLA T ERI E
H I S T O I R E S G O U R M A N D E S B O N B O N S E T F I C T I O N S H I S T O I R E S G O U R M A N D E S B O N B O N S E T F I C T I O NS
👀 INTRODUCTION — 22
CH A RLI E ET
BOUCHE Le sucre devient toxique pour les dents après avoir été transformé par les bactéries de la bouche, cela crée des caries. FOIE Les effets du fructose sont comparables à ceux de l’alcool sur le foie et peut de la même façon provoquer une cirrhose. ARTICULATIONS Une alimentation riche en sucre favorise les inflammations, comme l’arthrite. PEAU L’insuline sécrétée par le pancréas produit des enzymes qui endommagent les fibres de collagène et d’élastine. Cela accroit l’affaissement de la peau et l’apparition des rides.
👀 LE BUT • Associer 3 bonbons de la même couleur pour gagner des points alors qu’une pluie de friandises arrive en continu depuis le haut de l’écran. Combo gagnant pour les geeks gourmands. 14 NOVEMBRE 2012
lancement du jeu d’assemblage de bonbons 2,6%
des joueurs choisissent la version payante du jeu 2015 2019
0€
c’est le prix que coûte l’application
93 MILLIONS
de joueurs quotidiens (en 2015) 5,4 MILLIARDS DE $
23 — INTRODUCTION
→ Textes : MC Alban & A. Hassler avec l’aide d’A. Chéron → Mise en page : A. Bruguière
C A N DY C R U S H HISTOIRE SANS FIN
Gradation de l’addiction BIENVENUE DANS L’UNIVERS DE LA DROGUE !
Chez nos voisins anglo-saxons, les termes argotiques « booger sugar » et « nose candy » font le lien entre sucre et cocaïne.
Rachat par Activision-Blizzard, le leader mondial du jeu vidéo
449 MILLIONS de joueurs 272 MILLIONS de joueurs
« You be doing nose candy on the Bowie coke mirror » Beastie Boys Car Thief
T O P 3 D E S D O C U M E N TA I R E S CASSEURS DE SUCRE 1
SUCRE, LE DOUX MENSONGE de Michèle Hozer
« Yo, your love don't compute, perhaps you need a boost, a magical flute, some nose candy to toot » Jurassic 5 The Influence
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SUG ARLAND de Damon Gameau
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UN MONDE OBÈSE de Sylvie Gilman et Thierry de Lestrade En 2030, la moitié de la planète serait obèse ou en surpoids. Les réalisateurs s’engagent ici à combattre les clichés liés à l’obésité. Grâce à des études financées par les lobbys agroalimentaires, l’idée selon laquelle l’obésité serait uniquement liée au manque d’activité physique a fait son chemin. Accablant du même coup les obèses et dédouanant un régime alimentaire trop sucré. Ce documentaire explore les coulisses de l’industrie de la malbouffe.
« Holla, I got that nose candy, mane » 50 Cent Fully Loaded Clip
Et une référence à la sucette, qu’on retrouve fréquemment dans les clichés, des « sucettes à l’anis » de Serge Gainsbourg à des images plus frontales. S U G A R DA D DY (À NE PAS CONFONDRE AVEC DADDY SUCRE) Le terme « sugar daddy » est utilisé pour désigner une relation dans laquelle un homme offre de l'argent et/ou des biens à une femme bien plus jeune que lui en échange de sa présence et de services en nature. Celle-ci est parfois désignée par l'expression « sugar baby ». En novembre dernier, le Parlement revient sur son vote de 2016 qui visait à interdire l’usage des néonicotinoïdes, cet insecticide tueur d’abeilles. Ce, afin de sauver les producteurs de betterave sucrière, en grande difficulté suite à une généralisation de la jaunisse dans les champs. « Urgence », « souveraineté alimentaire » d’un côté, « alternatives possibles », « nouveau modèle agricole » de l’autre : cette décision a polarisé l’enjeu environnemental contemporain. À noter, en France, près de 30% des colonies d’abeilles disparaissent chaque année. Elles contribuent à la pollinisation de 80% des plantes cultivées.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Le « super size me » version sucre. Un australien teste les effets d’un régime alimentaire comprenant 40 cuilleres à café de sucre par jour – dose correspondant à la consommation moyenne d’un australien. Cerise sur le gâteau, il ne le fera que par le biais d’aliments considérés comme « allégés ». Bilan des courses, deux mois plus tard : +8,5kg, + 10 cm de tour de taille, un foie devenu gras, des troubles de l’humeur et des prémices de diabète de type 2.
« And she hit that booger sugar 'til her nose bleed » Travis Scott Stargazing
50 Cent aime décidément beaucoup le sucre. Il utilise aussi cette image pour parler des femmes et du sexe dans « Candy shop ». Des lyrics très distinguées : « I'll let you lick the lollipop ».
S C A N DA L E
Le documentaire traite de de la manipulation de l’opinion publique sur l’impact sanitaire de la consommation de sucre depuis les années 70. Il décrit une stratégie de l’industrie sucrière proche de celle de l’industrie du tabac à ses débuts. Le plus grand tour de force des lobbys : faire passer la consommation de sucre pour le bonheur même, le confondre avec des moments de joie – insinuant dans le même temps que sa remise en question est une remise en cause de nos modes de vie.
« I got that nose candy » Gucci Mane Dugs like you
👀 INVITATION — 24
Verre à sucre : le grand casse
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Nico Prat partage son amour de la chose pop avec brio depuis maintenant quelques années. D'abord avec la dream team de Rockyrama mais aussi sur Tsugi Radio. Quand il s'ennuie, il écrit parfois des livres sur Michael Jackson, Jurassic Park ou Oasis.
👀 25 — INVITATION KIBLIND KIBLIND Magazine Magazine → → 74 75 → → Dans Sugarma Sugar rue
La scène est connue, vue partout, répétée encore et encore depuis des décennies, aussi bien dans des comédies que des drames, des thrillers que des films d’action purs et durs. Cette scène, elle est préparée, minutieusement. Elle peut être dangereuse, ou drôle, selon l’intention du réalisateur. Enfin, cette scène a besoin d’un ingrédient : du sucre. Beaucoup de sucre. Un homme en poursuit un autre, et plutôt que d’ouvrir une porte, préfère directement sauter à travers la vitrine d’un magasin, répandant autour de lui quantité de bouts de verres tranchants. Autre moment, ou autre film : une femme tente de pénétrer dans une maison. Elle enroule sa main dans un chiffon pour ne pas se blesser, avant de briser d’un coup sec la vitre du salon et le silence de la nuit. Autant de moments de cinéma (auxquels nous pourrions ajouter un verre de whisky fendu au creux d’une main, quelques gouttes de sang perlant sur son bord) que nous connaissons par cœur, rendus possibles grâce à une technique presque aussi vieille que le cinéma lui-même : le verre à sucre, ou sugar glass. Une forme transparente et très cassante de sucre utilisée pour simuler cette matière dure et transparente de notre quotidien. Moins tranchant (mais un peu tout de même), il est beaucoup moins susceptible de causer des blessures que le vrai verre. Surtout, il se brise facilement, et ce de manière convaincante. Le verre à sucre est fabriqué en dissolvant ce dernier dans de l’eau et en le chauffant à environ 150 °C. Le glucose ou le sirop de maïs sont utilisés ensuite pour l’empêcher de cristalliser. Le cinéma étant affaire d’illusion, le verre à sucre en est une résolument parfaite et abordable. Le cinéma, mais également le théâtre. Cette technique, bien plus qu’une simple manipulation de petit chimiste, bouleversa en effet bon nombre de codes, permettant davantage d’intensité, de dramaturgie. Un exemple particulièrement frappant est la pièce Un Tramway Nommé Désir, mettant en scène un homme violent, prompt à passer ses nerfs sur vitres, cadres et assiettes. Durant la pièce, le personnage de Blanche, sur le point de se faire violer, utilise une bouteille cassée pour se défendre. Là encore, la séquence a été vue des centaines de fois : prenant le récipient par le haut, on brise le culot sur une surface dure, fabriquant ainsi une arme redoutable. Comme le rappelle Katie Pontsler sur son blog The Museum of Modern Theatre en 2013, « sans l’invention du verre cassable, de nombreuses pièces ne pourraient être jouées avec le réalisme nécessaire pour partager l’intensité du drame. Sans
👀 INVITATION — 26 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
cette création remarquable, des pièces comme Un Tramway Nommé Désir ne seraient pas possibles. Vraiment, cette invention a bouleversé le monde du théâtre ». Le cinéma donc, le théâtre, mais aussi bien évidemment les séries. En 2017, quatre ans après l’épisode final, Breaking Bad, série scrutée et commentée plus qu’aucune autre création à l’antenne au moment de sa diffusion (20 janvier 2008 – 29 septembre 2013), fut mise à l’honneur dans les colonnes du site de Vice. Non pas pour ses personnages, quoique, mais bel et bien pour ces étranges morceaux de blue sky, drogue fabriquée par Walter White et revendue dans les rues d’Albuquerque. Là encore : du sucre, rien de plus. Debbie Ball, 65 ans, tient dans la région un magasin de sucreries depuis 1980, et a appris le métier aux côtés de sa maman. Après avoir travaillé brièvement pour le cinéma, sur un film de Steven Seagal (où sans aucun doute, pas mal de verre et de tronches furent brisés), elle fabrique de la meth pour la série Showtime Shameless, puis est embauchée pour les deux premières saisons de la création de Vince Gilligan. Aujourd’hui, elle vend à sa clientèle des morceaux de sucres bleus, comme ceux que l’on peut voir dans la série. Et le business est florissant. Grand ou petit écran, scène ou non, le sucre est donc tout autant outil narratif qu’élément de décor, pièce maîtresse de la narration, support dramaturgique, et fait partie du décorum. Le sucre comme instrument marketing, produit dérivé dans la boutique de Debbie Ball, comme compagnon de l’acteur ou de l’actrice, comme moteur en somme. L’histoire du cinéma, et par extension, de la télévision, est donc liée à cette molécule de saccharose (glucose + fructose). Sans lui, l’industrie du spectacle (dans le domaine du catch, la chose est également très répandue) ne serait sans doute pas la même. Moins de dramaturgie, moins de violence, moins de cascades. Mais le verre à sucre est, comme l’action à l’ancienne face à des CGI toujours moins chères (rien de bien nouveau sous le soleil hollywoodien, certes), en voie de disparition, remplacé par certaines résines synthétiques telles que le Piccotex. Moins onéreuses et plus maniables, ne nécessitant aucune laborieuse fabrication. Pour nous, la différence n’est pas visible, la raison d’être même du procédé étant justement de ne pas être vu, de créer l’illusion. En 2019, quelques semaines après la sortie de Spider-Man : Far from Home, énième déclinaison des aventures du célèbre super-héros, Marvel mettait fièrement en ligne
👀 KIBLIND KIBLIND Magazine Magazine → → 74 75 → → Dans Sugarma Sugar rue
Visuels dans l'ordre d'apparition : James Bond, Die Another Day, MGM Distribution Co, 2002 John Wick Parabellum, Metropolitan, 2019 A Streetcar Named Desire, Warner Bros, 1951 Breaking Bad, 2008 - 2013 Debbie Ball Kill Switch, Millennium Films, 2008 Shameless, 2011 - [...] Spider Man, Far from Home, Marvel, 2019 Interstellar, Warner Bros, 2014 Toxic Avenger, Troma, 1984
27 — INVITATION
quelques images du tournage. Stupeur (ou non), on découvrait alors que Tom Holland et Jon Favreau n’avaient aucunement tourné une des scènes du film au milieu des tulipes, mais sur une simple pelouse – scène somme toute peu spectaculaire, une conversation presque lambda entre deux personnages. La paresse est ici époustouflante : un champ de tulipes imaginé dans le confort d’une salle de post-production. Exemple opposé : Christopher Nolan et les champs de blé d’Interstellar. Les scènes se déroulant à la ferme du héros et dans ses plantations ont été tournées à Calgary, au Canada, là où aucune production de ce type d’agriculture n’existe. Pour les besoins du film, il a donc fallu faire pousser un immense champ de maïs. Le cinéma n’est plus le même, mais ici et là, quelques irréductibles ne baissent pas les bras et croient encore au pouvoir de la vue, de l’écran et de tout ce qu’on souhaite y mettre réellement, refusant la facilité, la norme de l’époque. Le verre à sucre, aujourd’hui, n’est guère plus utilisé ailleurs que dans quelques productions amateures, totalement indépendantes, et disons-le, totalement fauchées. C’est une bonne nouvelle. Une technique presque centenaire et presque disparue, au service d’une jeune génération qui a vu en Troma, Peter Jackson et les VHS New Line des années 1980 une source d’inspiration. Le sucre comme outil de création est en passe de disparaître, alors même que celui que nous mettions dans nos pop-corn n’a plus le même goût, alors que chez nous, nous tentons de recréer un semblant de normalité face à une télévision bien trop petite, ne parvenant pas réellement à créer l’illusion d’un cinéma bel et bien ouvert. Mais demain, de nouveau, nous pourrons remplir notre pot, tandis que des gamins, quelque part dans le monde, suivront un tutoriel en ligne pour fabriquer une vitre qu’ils prendront un malin plaisir à briser, filmant le tout avec leur caméra bon marché. L’espoir est permis.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Coup de vent, Editions Cacahuete, 2019.
Portrait : George Booth-Cole.
Alexis Jamet
EN COUVERTURE — 28
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Coup de vent, Editions Cacahuete, 2019.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Alexis Jamet a d’abord goûté au graphisme à travers sa passion pour le skate : habillage vidéo, magazine, dessin de boards, identité de magasin, tout est alors sujet à expérimentation et à l’expression d’une singularité déjà bien affirmée. Né à Tours il y a trente ans, le jeune graphiste s’est fait lui-même une idée du métier qu’il a développé au gré de ses nombreuses expériences. Formé très jeune par une école de peinture en lettres, qui peut expliquer sa passion pour les trames et les textures, il a su approfondir son savoir-faire lors de ses voyages et de diverses expériences au sein de studios américains, anglais ou barcelonais. Ce sont sans doute ce savoirfaire, cette histoire, ces rencontres, qui lui permettent aujourd’hui d’aborder la sphère artistique avec humilité, dans un univers qui lui appartient, avec une esthétique minimale visuellement chargée en émotions. 29 — EN COUVERTURE
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Le Bruit des Pétales, Poster sérigraphié, FP&CF, 2021.
Assez tôt, je voulais faire quelque chose dans l’image mais je n’étais pas très bon à l’école. À 15 ans, j’ai donc dû prendre une décision tout en étant un peu paumé car on me déconseillait la filière générale. Puis j’ai trouvé cette formation de peintre en lettres dans ma région. Ils nous faisaient faire de grandes enseignes en peinture, mixant du lettrage et de l’illustration. C’était juste avant que le métier s’éteigne au profit de la découpe. D’ailleurs l’année qui a suivi celle où j’ai eu mon diplôme, l’école arrêtait cette formation. Travailler sur ce genre de format m’a un peu manqué par la suite. Heureusement, j’ai depuis peu un atelier plus spacieux à Montreuil et j’essaie de revenir justement vers des formats plus généreux, comme il y a 15 ans. Bref, suite à ça, j’ai fait un bac pro et un BTS que je n’ai pas fini car j’ai été déçu de cette formation. En parallèle, les responsables de mon
Et ta formation ?
Gamin au tout début oui, j’ai commencé le skate assez tôt, vers 11-12 ans. Mon père faisait de la peinture mais je voyais son travail comme quelque chose de cocasse et amusant. Il est musicien de profession et faisait des peintures de son groupe de gospel avec ma mère qui y apparaissait comme chanteuse. Il peignait aussi des paysages maritimes et tropicaux avec nos noms sur les bateaux. Il est à la retraite maintenant, j’essaie de le remettre à la peinture. Les premières images auxquelles j’ai donc été confronté et qui m’ont marqué étaient sans doute des images imprimées sur des planches ou des animations dans des vidéos de skate ou encore dans certains magazines. La première chose à laquelle je me suis essayé, c’était mon skyblog je pense. Pour le « graphisme », si on peut appeler ça comme ça, qui comprenait une bannière et quelques images, je me servais d’une alternative à Paint je crois. On faisait aussi des vidéos de skate avec mes potes et je me chargeais de faire des petits titrages animés. Il y a cette petite similitude avec ce que je fais aujourd’hui car j’y ajoutais déjà une petite vibration dans le mouvement, inconsciemment. J’ai un peu du mal avec le fait d’avoir un simple calque qui glisse sur une image dans une animation. Après mes études – aussi courtes aient-elles été… –, j’ai fait un stage chez une marque de surf/skate sur la côte basque et je me suis retrouvé à faire des patterns pour eux, c’était marrant. Et puis j’ai rencontré là-bas un mec qui bossait dans le skateshop d’en face. On s’est bien entendu et on a monté un shop à Tours, dans ma ville natale. Puis un autre à Nantes. En parallèle de ça, mon pote Quentin Chambry faisait un fanzine qui s’appelait Black Out à Rennes. Il m’a donné envie de faire de même sur ma scène locale. J’ai donc créé cette petite revue Dusty avec mon copain Jo. Je faisais la mise en page, les articles et interviews et je réalisais les titrages, principalement à la main. En gros un peu tout, sauf les photos où les gens contribuaient. C’était très chargé, avec beaucoup de textures scannées et de dessins, et une très mauvaise gestion du texte.
Le skate a-t-il été important pour ta pratique artistique ?
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
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Nike John McEnroe building in Portlan, 2020.
Le Bruit des Pétales, FP&CF, 2021.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
" Puis j’ai trouvé cette formation de peintre en lettres dans ma région. Ils nous faisaient faire de grandes enseignes en peinture, mixant du lettrage et de l’illustration. C’était juste avant que le métier s’éteigne au profit de la découpe. D’ailleurs l’année qui a suivi celle où j’ai eu mon diplôme, l’école arrêtait cette formation. "
J’aime bien bosser à plusieurs quand le contexte s’y prête. Mais oui, Manon est sans doute la personne avec qui je collabore le plus. On a commencé à travailler ensemble sur un petit livre qui s’appelle Baie Vitrine quand j’étais encore en Angleterre. C’était une petite correspondance qui consistait à s’envoyer des dessins de fenêtres, et qui a fini en une petite publication. À la même période, j’ai commencé à collaborer avec Matías Enaut, un artiste musical qui est devenu un bon pote quand je suis arrivé à Paris. J’ai fait un premier clip pour lui depuis l’Angleterre et ensuite on a pu développer plusieurs autres projets ensemble.
Justement, tu travailles beaucoup en duo avec Manon… Tu apprécies de bosser en équipe ?
En 2015, après avoir ouvert un shop à Nantes, on a défini ensemble que j'allais m’occuper de la communication des shops. Ça ne me prenait pas trop de temps, ce qui me permettait de développer ma pratique en même temps. Les vêtements et les planches qu’on a faits ensemble ont commencé à être repostés sur Internet et suite à ça, une compagnie américaine m’a contacté pour venir bosser pour eux à Los Angeles. C’était vraiment absurde comme expérience. J’avais 24 ans et je me suis retrouvé « creative director » d’une marque de vêtements alors que je faisais juste des illustrations sur des planches quelques semaines auparavant... Je me suis retrouvé à gérer une petite équipe de designers, le tout avec un anglais assez limité. Mais bizarrement, ça s’est super bien passé. Aujourd’hui, ils continuent d’utiliser l’identité visuelle que j’ai mise en place et font des rééditions d’anciens prints. Après cette expérience, je suis rentré en France en ayant envie de bouger. J’ai donc envoyé des mails à des studios à Barcelone et il y en a un qui m’a proposé de venir chez lui. Je suis resté un an là-bas. Barcelone, c’était cool mais un peu trop mouvementé, trop intense, et je me suis rendu compte que j’étais pas non plus super fan de la culture espagnole. J’ai alors trouvé une agence en Angleterre, Lyon&Lyon, plutôt spécialisée en identité. J’y suis resté un an aussi. C’était une superbe expérience, enrichissante et surtout assez variée. Ensuite, je suis rentré en France et je me suis installé à Paris pour essayer de travailler en tant qu’indépendant et entre autres pour rejoindre Manon [Cezaro].
Tu as beaucoup voyagé ?
stage m’ont confié mes premiers projets en freelance, ce qui m’a permis de faire des économies et d’investir un petit peu d’argent dans ce projet de boutiques. Après comme je n’ai pas fait de formation en école supérieure, j’ai un peu appris à penser et exécuter mon travail par moimême mais aussi grâce à mes potes qui, eux, avaient eu l’opportunité d’aller dans de bonnes écoles et m’ont fait découvrir pas mal d’ouvrages d’artistes ou de graphistes. Techniquement, j’ai toujours été un peu curieux de tester des choses digitales et manuelles dans mon coin.
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Le projet du flip book avec les éditions Cacahuète a une importance particulière pour moi. C’était la première fois que je développais vraiment cette technique de trames animées. Mais je le mentionne toujours beaucoup... Si on part sur un autre projet éditorial, je dirais justement Le Bruit des pétales qui vient de paraître chez FP&CF. C’est un bon exemple de collaboration avec Jad Hussein au design graphique et à la mise en page et Matías Enaut pour les textes. Je bosse aussi en ce moment sur l’identité du Magma, un nouveau festival de musiques électroniques qui aura lieu en septembre si les conditions le permettent. J’ai pu travailler un peu différemment de ce qu’on peut me demander d’habitude car l’équipe est très ouverte et me fait relativement confiance.
Même si l’exercice est un peu compliqué, peux-tu nous partager quelques projets qui t’ont marqué ?
Je voulais simplement suggérer l’idée du distributeur à bonbons sans le rendre trop figuratif. On pourrait même juste y voir des boules de chewing-gum, ou juste des boules tout court... J’aime surtout l’idée que le magazine lui-même est le distributeur de quelque chose, d’illustrations, de textes, d’interviews, de contenu en général. Pour les couleurs c’était plutôt rapide et instinctif. Avant de dessiner, je prépare des planches avec du contenu assez varié autour de la thématique et je me suis sans doute imprégné de cette ambiance générale qui incluait des images de packaging de bonbons. Le rouge revient aussi souvent dans mon travail.
J’en profite pour te demander comment tu as travaillé sur notre couverture…
J’aime bien rester sur une esthétique simple, et exploiter au mieux ce potentiel sans trop en rajouter. J’ai jamais essayé de trop compliquer les choses, déjà parce que je pense que je n’y arriverais pas, mais aussi parce que je suis plus sensible à ces formes simples pour faire passer un message. Pas mal de gens me demandent comment je travaille, comment j’ai réalisé telle ou telle image. On ne me demande pas d’explications de contexte ou de commande, plutôt une méthodologie détaillée sur la construction d’une image. Le fameux « comment c’est fait »...
Que peux-tu dire de ton esthétique ? De ta technique ?
Il a par exemple écrit de courts textes pour mon dernier livre qui s’appelle Le Bruit des pétales, édité par FP&CF. Il m’arrive de bosser avec des animateurs aussi. J’ai appris tout seul à faire des animations simples, mais pour des projets plus conséquents, j’ai parfois besoin d’aide extérieure. Pour le dernier film pour Hermès par exemple, c’était chouette de pouvoir compter sur Armand Beraud et Tom Noordanus. J’ai donc pu me concentrer sur le storyboard et les dessins et simplement déléguer la partie animation.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
« J’aime bien rester sur une esthétique simple, et exploiter au mieux ce potentiel sans trop en rajouter. »
EN COUVERTURE — 32
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Matías Elichabehere, poster and music video, 2018.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
New York Times, Animation and graphic design, 2020.
On part en résidence avec Manon une semaine chez Anaïck Moriceau pour faire des sérigraphies, et nous donnerons une conférence aux Beaux-Arts de Saint-Brieuc pendant cette même semaine. Je bosse aussi pour un label japonais, Childhood Records, que j’aime beaucoup, pour l’artiste Too Smooth Christ. Et je travaille aussi sur une petite campagne pour le Mucem, à Marseille, avec le studio Spassky Fisher.
Et quelques projets à venir ?
Pour citer un projet plus commercial, je dirai la murale que j’ai réalisée pour Nike à Portland. Une agence à New York, dont une ancienne connaissance de l’école travaillait là-bas, m’a contacté et m’a proposé d’habiller un étage du siège de Nike, en hommage à John McEnroe. C’était super intéressant de travailler sur ce personnage agressif, ce gringalet qui sortait du cliché du sportif. L’idée, c’était que l’étage lui ressemble, donc j’avais essayé de représenter cette énergie, ce caractère à travers mes illustrations. Ça a été imprimé en mai-juin 2020 et je n’ai malheureusement pas pu y aller vu le contexte. Pour finir, je suis assez content des collaborations avec le New York Times, surtout la commande pour une chronique de livres sur le sujet du changement climatique.
→ Interview : J. Martinez → alecsi.com 33 — EN COUVERTURE
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👀 CRÉATIONS ORIGINALES — 34
CRÉA TIONS ORIGI NALES Le sucre c’est méga-bon, ok, mais comme le disent les petits messages du gouvernement : en manger trop, c’est chaud. Alors comment qu’on se débrouille avec cette tentation géniale et ses conséquences moins bonnes ? On fait ce qu’on peut, comme d’habitude. Et ce qu’on peut, généralement, c’est en bâfrer un maximum.
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Bienvenue, donc, dans cette orgie de glucose mise en images par huit de nos illustrateurs et illustratrices préférés du moment. Chacun.e y a mis sa patte, nous a offert un peu de sa relation avec ce diable délicieux, nous a donné sa propre définition de ce plaisir immédiat au long terme plus ambiguë. Le thème était donc « sugar, sugar » et nous avons laissé chaque artiste en faire ce qu’il a voulu, dans les seules limites imposées par le format du magazine et les coulures de la crème glacée. Pour un résultat, même si nous vous en laissons juge, qui fait du bien comme une grande bouchée de Snickers. Remercions donc les huit dessinateurs et dessinatrices qui ont participé à ces créations originales : Vanilla Chi, Vladimir Hadžic, Klaus Kremmerz, Sugino Giinos, Lisa Blumen, Adèle Verlinden, Natsumi Kachi et Ono-Chan.
35 — CRÉATIONS ORIGINALES
vanilla-chi.com
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Vanilla Chi | Fragile People Fragile Lie
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KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Vladimir Hadžic | Chocolate System
instagram.com/vlddmrr
CRÉATIONS ORIGINALES — 36
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37 — CRÉATIONS ORIGINALES
klauskremmerz.com
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Klaus Kremmerz | Sweet
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KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Sugino Giinos | Candyhead
instagram.com/sugino_giinos
CRÉATIONS ORIGINALES — 38
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👀 39 — CRÉATIONS ORIGINALES
instagram.com/superlisablumen
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Lisa Blumen | Comtesses coquines
👀 CRÉATIONS ORIGINALES — 40 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Adèle Verlinden | Portrait à la canne à sucre adeleverlinden.fr
41 — CRÉATIONS ORIGINALES
natsumikachi.com
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Natsumi Kachi | Overflow
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Ono-Chan | I'm back
instagram.com/mgm_ono
CRÉATIONS ORIGINALES — 42
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«Pour votre santé, « Et un peu de sucre en
évitez de manger poudre ?
trop gras, NON !!
trop sucré, Ah, bon... » in Le Gâteau
trop salé»
Empoisonné, Jacques
– Mention sanitaire Ballutin & Bernard
Lavalette, B.O. Astérix
août 2004)
et Cléopatre, 1968
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
obligatoire (loi du 9
👀 DOSSIER — 44 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Q
u’est-ce qu’il faut pas faire pour séduire le chaland, quand même. Le consommateur est un papillon, capable de voler d’une marque à l’autre en fonction des signaux qu’on lui envoie. Car avant la bouche, c’est l’œil qu’il s’agit de flatter. Il suffit d’aller faire un tour au magasin et de mater les paquets de bonbons en tout genre, bardés de couleurs criardes et de petits personnages sympathiques. Si on peut y trouver parfois un manque de subtilité certain, il est possible de trouver dans cette explosion graphique matière à fascination. Il arrive même que les basses besognes du marketing se marient joliment avec la grande création. Si on est très vieux – il faut probablement être un arbre –, on peut se souvenir de l’affiche de Leonetto Capiello pour les chocolats Klaus, réalisée en 1903. Si on est moins vieux – et moins mort –, on peut aussi se
rappeler du subtil relooking de Monsieur Malabar par Gil Formosa en 2004. Tout cela entraîne, vu de l’autre bord, une certaine fascination des illustrateurs et illustratrices pour les packagings, qu’ils en soient à l’origine ou qu’ils les reproduisent comme objets de culte. Comme vous pouvez le deviner, nous sommes allés creuser cette relation ancestrale entre le dessin et le sucre, en bavassant avec les principaux intéressés. Ceux qui s’en occupent et ceux qui les admirent.
Au dessus : « La 2CV » illustrée par Cachetejack pour une tablette Le Chocolat des Français
Dès le lancement du Chocolat des Français en 2014, ses fondateurs Matthieu Escande, Paul Masson et Vincent Muraire avaient pour objectif d’associer l’univers du chocolat avec celui des arts graphiques, dont Matthieu et Paul sont issus. « On s’est lancé au 20e Salon du Chocolat. On avait demandé à des artistes de dessiner et de peindre directement sur des étiquettes vierges de tablettes de chocolat ». Depuis, c’est près de 500 illustrateur.rice.s qui ont participé au projet, entre les emballages et les divers événements de la marque. Avec toujours une grande liberté laissée au créateur : « On a un brief assez succinct parce que travailler sans brief, y a rien de pire pour un artiste.
à des « On avait demandé et er artistes de dessin ent em de peindre direct sur des étiquettes s vierges de tablette de chocolat » Premièrement, tous les artistes qu’on va choisir vont travailler à la main, comme pour le chocolat. On a aussi une palette de couleurs qui nous est propre. Et puis après, ça va être troisquatre mots autour d’un thème type France ou chocolat ». Parmi les contributeurs, il y a bien quelques stars type Zep ou Charlotte Lebon. « Mais ce qu’on aime aussi, c’est de travailler avec les talents de demain, trouver les perles rares et leur donner un coup de pouce », ajoute Matthieu Escande. Ainsi en est-il de Marine Belkebir, la dernière invitée en date. Bien sûr, Le Chocolat des Français s’y retrouve aussi. Avec ce parti pris graphique très fort, la
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En dessous : Diverses tablettes illustrées pour Le Chocolat des Français
👀 LA SÉLEC DE JONNY TRUNK
x A & BC Cet emballage de chewing-gums britannique sous licence américaine (avec Topps je crois) avait pour but de vendre des cartes de Star Trek aux enfants anglais qui auraient vu les premiers épisodes de la série à la télévision. Mais beaucoup d’Anglais n’avaient pas la télévision quand cet emballage a été produit, en 1969. L’emballage a été imprimé en trois couleurs sur du wax.
marque a pu sortir du lot immédiatement. « En 2014, personne ne faisait ça. Les autres étaient noirs, marron, blancs et c’était hyper-chiant. C’est pour ça qu’on a amené toute cette couleur ».
ne ne « En 2014, person es faisait ça. Les autr ron, étaient noirs, mar rpe blancs et c’était hy ’on ça qu chiant. C’est pour tte a amené toute ce couleur »
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On ne sait pas si la marque écossaise Coco a jeté un œil du côté de la France avant de se lancer elle aussi dans l’art chocolaté. Maxime Prou et Adèle Favreau, le duo Atelier Bingo, ont réalisé pour eux une série de trois tablettes. Là aussi, le brief est bref. Voire un peu plus que ça. « Ils sont arrivés vers nous avec une demande qui était plutôt simple et très respectueuse de notre travail. Avec beaucoup de liberté. On était un peu sur une carte blanche ». Et effectivement, ils ont rendu ce qu’ils voulaient. « On n’a pas du tout pris
Au dessus : « Le crocodile » illustré par Rob Hodgson pour une tablette Le Chocolat des Français
👀 DOSSIER — 46
👀 LA SÉLEC DE JONNY TRUNK
x Lyons Maid Il n’y a pas tant de marques qui ont su voir le potentiel marketing de Star Wars au départ. Mais l’entreprise anglaise Lyons Maid, elle, a flairé l’affaire et a lancé une campagne à grand succès pour vendre des glaces très basiques dans des emballages Star Wars X-Wing. Ils sont super-rares maintenant et très recherchés et collectionnés par les fans de Star Wars.
« Ils vont venir chez r, te toi, dans ton atelie est er. C’ rencontrer, te film plus tout un processus et de large de marketing ur communication po leur marque » envie que leurs tablettes ressemblent à des tablettes ». Le rapprochement entre l’art graphique et l’artisanat chocolatier est ici fortement surligné. Mais nous sommes là sur un produit rare, visant un public très précis. Haribo n’a pas le temps pour ces conneries.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Depuis quatre ans, l'artiste Nicolas Barrome, via l'agence MNSTR, s’occupe de transformer les bonbons en petits monstres au moment d'Halloween. Comment, pour l'illustrateur.rice, se sortir du guêpier tendu par les objectifs pharaoniques d’une marque qui vend son produit par millions ? En restant soi-même, pour commencer. « Ce sont des projets très bien payés, mais je ne vois pas l’intérêt de le faire si c’est pour ne pas en être content ». On est sur un chemin de crête. Nicolas Barrome navigue pourtant aisément entre les obsessions de
la commande comme un projet marketing. On l’a travaillé plus comme un projet personnel ». Et Coco fait les choses en grand, avec l’intention de mettre la création artistique au cœur de son discours. « Ils vont venir chez toi, dans ton atelier, te rencontrer, te filmer. C’est tout un processus plus large de marketing et de communication pour leur marque ». Plus qu’un habillage, Coco veut la patte artistique. « Ils voulaient vraiment du collage. Normalement, on a tendance à faire un rendu sur Photoshop, parce qu’il y aura des retours avec beaucoup de changement. Là, on a travaillé en collage à l’échelle réelle et on le leur a envoyé directement ». La démarcation avec la concurrence est ici poussée à son maximum, effaçant même visuellement le produit. « C’est à se demander s’ils ont
À gauche : Tablettes de chocolat Coco réalisées par Atelier Bingo Au dessus : Illustrations d’Atelier Bingo pour Coco
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En dessous : Bonbons Haribo revisités en monstres d’Halloween par Nicolas Barrome
la marque et sa propre touche artistique. « La difficulté c’est la balance entre un vrai style qu’on veut apporter et les considérations commerciales de type “il faut qu’on reconnaisse le crispy de la fraise et le ventre dodu du crocodile" ». S’il peut être étonnant de voir Haribo s’attacher le travail de Nicolas Barrome, lui le voit comme une évidence. « Ce projet, il était taillé pour moi. Me faufiler dans quelque chose de très enfantin, très coloré, mais aussi parler de bonbons pendant la période d’Halloween, ça me permet de convoquer autre chose. Ma mère tenait un vidéo-club et j’ai été bercé par les vieux films de SF, toutes ces créatures type Godzilla, c’est ça mon imaginaire, les bestioles. Haribo, des monstres, bon bah vas-y, banco ». Du coup, le risque pris par la marque n’est pas si grand. Et c’est même très malin. Ça permet d’offrir à Haribo à la fois un moment de folie qui colle très bien avec Halloween mais aussi un épisode marquant pour son
r les « J’ai été bercé pa toutes vieux films de SF, ces créatures type on Godzilla, c’est ça m s. le io imaginaire, les best bon res, Haribo, des monst » bah vas-y, banco En dessous : Le livre Wrappers Delight par Jonny Trunk
histoire visuelle. Ses clients n’ont pas l’air mécontents du résultat : « Les gamins, ils sont comme des balles. Et les garder d’une année sur l’autre ça les éclate ». Genre, comme une collection ? Mais qui s’amuse à collectionner les paquets de friandises, franchement ?
geste « Plus qu’un simple ge est machinal, le déballa ctué fe un véritable rite ef ns le da méthodiquement sacrobut d’atteindre la sainte friandise » Alors qu’on pourrait croire cette méthode uniquement destinée à appâter les enfants, nous savons bien que les collectionneurs et les adultes nostalgiques de l’enfance n’y coupent pas non plus. Prenons le cas de John Townsend, tiens. Aujourd’hui décédé,
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Beaucoup plus de personnes qu’on ne le pense, pardi. Il faut dire que les stratégies marketing de la plupart des grandes marques de confiseries ont toujours été habilement ficelées pour réussir à faire briller les yeux des petits consommateurs en tee-shirt Waikiki. Cartes et figurines à collectionner à l’intérieur d’un Kinder Surprise ou tout au fond d’un paquet de Miel Pops, tatouages soigneusement dissimulés dans l’emballage d’un Malabar… Plus qu’un simple geste machinal, le déballage est un véritable rite effectué méthodiquement dans le but d’atteindre la sacro-sainte friandise. Or, souvent, l’emballage lui-même suffit à aguicher. Car au commencement, c’est bien le packaging du produit qui doit faire de l’ombre à tous ses petits camarades de l’allée 5 de Carrefour. Pour devenir l’élu et
celui qui aura la chance de faire le grand saut de son étagère au panier familial, il s’agira alors de se démarquer par la matière à partir de laquelle il est fabriqué, par sa praticité, sa taille mais aussi et surtout par son design. Plus les couleurs sont chatoyantes, les typographies barrées et les personnages mignons, plus le packaging sera zieuté.
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👀 LA SÉLEC DE JONNY TRUNK
x Nestlé Cette barre chocolatée rose à l’image de La Panthère Rose des studios Mirisch était un grand classique du début des années 1970. C’était une grande nouvelle, ici, en Angleterre ; la pub passait à la télévision tous les samedis avec une musique vraiment entêtante. Il y avait même des modèles réduits de cette incroyable voiture rose à vendre. Je me souviens encore du goût bizarre de la fraise et du chocolat blanc qui était rose, en voyant l’emballage.
cet Anglais atteint d’une collectionnite aiguë a laissé derrière lui un trésor inestimable : une collection de packagings et d’objets publicitaires imprimés entre les années 1950 et les années 1980 si vaste qu’elle remplissait les pièces de sa maison de cinq chambres. Fasciné par cet homme « qui a passé sa vie à n’être obsédé que par les emballages, n’ayant ni le temps de faire le ménage ni la lessive », Jonny Trunk, fondateur du label Trunk Records, en a fait un livre. Dans Wrappers Delight, il rassemble 500 emballages sélectionnés parmi la monstrueuse mine d’or de John Townsend. Nostalgie mise à part, les emballages de confiseries produits ici ou ailleurs ces dernières décennies sont surtout les supports d’un graphisme incomparable. Pour Johnny Trunk, « la différence fondamentale avec les packagings d’aujourd’hui, c’est que ceux d’hier étaient dessinés à la main et souvent imprimés manuellement. Il n’y avait pas d’ordinateur donc tout paraissait plus crafté, plus humain et vivant ». Différents, les packagings le sont aussi selon les pays. Pays
mme Fasciné par cet ho à e « qui a passé sa vi les r pa e n’être obsédé qu ni t le emballages, n’ayan age én temps de faire le m ni la lessive » en haut du classement lorsqu’il s’agit de créer des packagings captivants, le Japon a fait de ces derniers de véritables cartes de visite. On ne rigole pas avec l’emballage dans le pays du Soleil levant et ce, depuis l’ère Heian (794-1192). En effet, dans la culture et l’histoire japonaise, le cadeau tient un rôle très important et l’esthétique de son emballage est indispensable dans
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
En dessous : Packagings japonais de biscuits et bonbons illustrés par Blandine Pannequin
l’appréciation de l’objet offert. Aujourd’hui par contre, il suffit d’une balade dans une épicerie japonaise pour se rendre compte que l’art ancestral du furoshiki – consistant à emballer dans du tissu – est bien loin derrière. Le truc, c’est que le bonbon n’est pas si vieux que ça au Japon, il n’a été véritablement introduit que lors de l’occupation américaine, ce qui fait que le marché des confiseries est toujours en plein essor. Tous les moyens sont alors bons pour se démarquer, pourvu qu’ils soient kawaii. Habillé de mangas, de pop art, de références vintage ou simplement de personnages franchisés, l’emballage japonais a une principale mission qui lui tient à cœur : être tape-à-l’œil. Ça d’ailleurs, la marque Fujiya l’a bien compris. Grâce à Peko, la petite fille squattant les paquets de ses bonbons Milky depuis 1959, la marque est devenue culte et inspire encore aujourd’hui de nombreu. euses illustrateur.rice.s qui ne se lassent pas de reproduire ses produits. Parmi eux, l’illustratrice Blandine Pannequin. Piquée par sa passion pour les emballages japonais depuis qu’elle a mis les pieds au Japon, Blandine s’amuse depuis à dessiner la petite boîte de bonbons Milky offerte par sa sœur à Noël et d’autres packagings étincelants croisés dans les allées des épiceries asiatiques. À l’autre bout du monde, Florencia Fuertes confesse également être de ces passionnées-là. Pour elle, « les illustrations mignonnes sont devenues très à la mode. Beaucoup d’illustrateur.rice.s reprennent ces packagings à leur sauce parce qu’ils sont tellement graphiques et différents des packagings traditionnels avec juste le logo et la photo du produit ». Sans surprise, l’illustratrice argentine avoue également son amour inconditionnel pour les paquets Milky qu’elle a même représentés, il y a peu, sur des tee-shirts. La première chose qui a attiré Florencia vers les packagings
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x Monty Monty, c’était une entreprise néerlandaise très forte pour racheter des licences afin de vendre des cartes à collectionner et des chewing-gums à des enfants comme moi. Les Six Million Dollar Man ont connu un grand succès auprès des enfants car il y avait des cartes à collectionner glissées dans l’emballage.
japonais, c’est leur système de lettrage. « J’adore la forme de leurs kanjis qui est très graphique, nous dit-elle ; en Argentine par exemple, les emballages de confiserie sont très répétitifs dans leurs couleurs et formes, on dirait qu’ils suivent une espèce de charte commerciale ». « Il y a une époque en Argentine où les packagings étaient graphiques eux aussi, incluant des cartoons, mais aujourd’hui les visuels ultra-photoshoppés les ont remplacés », regrette celle qui restera pour toujours nostalgique des bonbons Topollin et des bonbons en forme de cœur Corazoncitos Dorins.
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👀 LA SÉLEC DE JONNY TRUNK
En dessous : Divers packagings et aliments d’ici et d’ailleurs illustrés par Arabella Simpson
« Il y a une époque s en Argentine où le t packagings étaien ssi, graphiques eux au , ns incluant des cartoo els s visu mais aujourd’hui le és les ultra-photoshopp ont remplacés »
À gauche : Tee-shirt inspiré des packagings japonais dessiné par Florencia Fuertes
→ Textes et propos recueillis par : É. Quittet & M.Gueugneau → Mise en page : A. Avice
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Troisième membre du club pas si fermé des adorateurs d’emballages de confiseries, et non des moindres, Arabella Simpson amasse figurines, emballages et divers objets pour les transformer en illustrations. Avouant un penchant pour les biscuits japonais en forme d’animaux « Dream Animals » et pour les « Bubble Yum Gum » américains des années 1980, Arabella Simpson ne se prive pas de représenter toutes sortes de packagings dans ses compositions illustrées fourmillantes de détails. Après tout, n’est-ce pas le rêve secret de tous les graphistes du service marketing de voir leurs créations gravées pour toujours dans la mémoire collective et sublimées des décennies plus tard par des illustrateur.rice.s ? Si plusieurs d’entre eux ont réussi ce pari, on ne doute pas que de l’autre côté, les tablettes de chocolat et marques culte de bonbons habillées par les illustrateur.rice.s d’aujourd’hui deviendront à leur tour, en 2050, des objets de collection et de fascination.
👀 INVITATION — 50 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Songwriting et sucreries : les rockeurs aussi aiment les bonbons Officiant chez New Noise, Arte, Brain et Mowno pour ne citer qu’eux, Grégory Vieau roule sa bosse dans le milieu du journalisme musical. S’adonnant corps et âmes à sa passion pour le rock suintant, il prépare en ce moment son premier livre, Une Histoire de la Presse Rock en France, qui sortira aux éditions Le Mot et le Reste le 19 août prochain. Pour nous, il raconte le penchant de quelques musiciens spécialistes du détournement sémantique pour les textes édulcorés, et bien évidemment, les vices cachés derrière toutes ces friandises.
👀 51 — INVITATION KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Il existe suffisamment de morceaux à base de « candies », « sweets » ou « sugar » pour que vos tympans fondent comme réglisse au soleil. Le rock’n’roll en particulier a puisé avec gourmandise dans cet imaginaire pour conter ses propres obsessions. De savants détours sémantiques autour du fantasme ou de la perte de l’innocence, de la drogue, de ses dépendances, du sexe et aussi, parfois, de l’amour véritable. Et tout a démarré en octobre 1955 avec deux mots scandés par une voix pleine de vices : « Tutti Frutti ». Au départ, un simple mix de fruits confits célébré par les amateurs de crème glacée devenu le premier succès du grand architecte du rock’n’roll, Little Richard. Son single se hisse dans les charts et sa scansion vocale – « A Wop Bop Aloobop Alop Bam Boom ! » – enflamme les jeunes Américains jusqu’à alerter les associations de parents WASP – pour White Anglo-Saxon Protestant – soucieuses de préserver leur progéniture de cette missive du malin. N’oublions pas qu’à ce moment de l’Histoire, les lois de ségrégation raciale sont toujours consciencieusement appliquées dans les États du Sud et que le Ku-Klux Klan multiplie les exactions avec l’assentiment d’une partie de la classe politique. En résumé, pour les conservateurs, il ne faut pas laisser un hurluberlu noir avec des manières de femme corrompre leurs jeunes enfants blancs et bien élevés. Mais cette situation cache une ironie encore plus savoureuse : les paroles de la chanson, au discours implicitement sexuel, ont déjà été censurées une première fois par le label de Little Richard. Car si tout le monde connaît la version originale où le chanteur évoque « son amie Sue », qui connaît « très bien ses goûts » et se balance allègrement d’est en ouest, il en existe une autre version, plus ancienne. L’histoire est révélée dans la biographie officielle La Rockambolesque Histoire de Little Richard. « Tutti Frutti » dépeint à l’origine et sans équivoque un rapport sexuel anal avec un refrain particulièrement salace : « Tutti Frutti, good booty / If it don’t fit, don’t force it / You can grease it, make it easy. » Traduction : « Tutti Frutti, beau cul / Si ça ne rentre pas, ne force pas / Tu peux le graisser, pour que ce soit plus facile. » On n’imagine pas le nombre d’infarctus évités par le producteur de Richard, Art Rupe, en interdisant que ces quelques paroles soient enregistrées. Ni même quel parfum les fruits confits nous auraient laissés en bouche. Devenu un business juteux, le rock’n’roll s’assagit. La fin des années 1950 et le début de la décennie suivante voient l’arrivée massive des boys bands et des crooners du rock’n’roll. Et le lexique des sucreries ne sert plus qu’à doter de surnoms mielleux sa petite amie. Sur les radios américaines, les balades sirupeuses tournent
👀 INVITATION — 52 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
en boucle : « Sugar and Honey » de Roy Orbison, « Candy Girl » des Four Tops, « Sweets for My Sweet » de The Drifters... Curieusement, c’est au pays du général de Gaulle, où le rock’n’roll s’est francisé en yé-yé, que résonne le premier écho aux insanités sucrées de Little Richard. France Gall entonne « Les Sucettes », écrit et composé par Serge Gainsbourg, dont elle ne retient que la vision candide de cette chère Annie qui aime beaucoup les sucettes à l’anis… De toute façon, la révolution sexuelle commence à peine à éclabousser les bonnes mœurs. En Angleterre, les gentils Beatles goûtent au haschisch et à de drôles de bonbons aux effets explosifs. Leurs compositions deviennent sitôt labyrinthiques, comme le magnifique Strawberry Fields Forever sorti sur 45 tours en 1967, dans lequel John Lennon nous conduit dans le quartier de son enfance – Strawberry Fields était un orphelinat proche de chez lui. Mais difficile de pas se sentir porté dans l’un de ses innombrables trips, au milieu d’un champ de fraises, rouges et acidulées comme des tagadas. « Let me take you down / ’cause I’m going to Strawberry Fields / Nothing is real and nothing to get hung about / Strawberry Fields forever. » Avec le Summer of Love, la profusion des mouvements de contestation et le grand barnum de Woodstock, le cirque du rock’n’roll prend des allures de confiserie géante. Les hippies du Grateful Dead façonnent leurs grands succès dont « Sugar Magnolia », chanson d’amour aigredouce aussi célébrée comme une invitation à perdre pied. Sur « Sugar Mountain », Neil Young perçoit les joies de l’enfance comme une montagne de sucre et regrette amèrement le goût des barbes à papa. Mais les lois de la physique sont implacables : tout ce qui monte finit par redescendre. Avec les meurtres de la secte de Manson et la débâcle d’Altamont, le rêve hippie vire au cauchemar. Et pendant que certains migrent à Goa ou Ibiza, d’autres se marrent comme la paire Lou Reed et John Cale. Les deux musiciens n’ont ja-
👀 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Visuels dans l'ordre d'apparition : Little Richard And His Band – Tutti-Frutti, Specilaty, 1955 / Little Richard – Here's Little Richard, Specialty, 1957 / Roy Orbison – There Is Only One Roy Orbison, MGM Records, 1965 / The Four Seasons – The Four Seasons Story, Privat Stock, 1975 / The Drifters – Save The Last Dance For Me, Atlantic, 1962 / France Gall – Les Sucettes, Philips, 1966 / The Beatles – Strawberry Fields Forever / Penny Lane, Parlophone, 1967 / Grateful Dead* – American Beauty, Warner Bros, 1970 / Neil Young – Heart Of Gold, Reprise Records, 1971 / The Velvet Underground – The Velvet Underground, MGM Records, 1969 / The Rolling Stones – Sticky Fingers, Rolling Stones Records, 1971 / Little Richard – King Of Rock And Roll, Reprise Records, 1971.
53 — INVITATION
mais cru au fantasme peace and love. D’ailleurs, avec The Velvet Underground, ils prennent un malin plaisir à détourner les mélodies sucrées des sweet sixties pour les pervertir à travers toutes sortes de boucles de distorsions et de dissonances. Dans leurs textes, les jeunes filles s’appellent toujours « Candy » ou « Honey » mais ce ne sont plus les petites provinciales en quête du grand amour. Les voilà paumées, droguées, errant sur les trottoirs de New York. Sur le bien nommé « Candy Says », c’est une jeune femme complètement larguée qui s’interroge sur sa condition à travers les mots de Reed et la voix du bassiste Doug Yule. « What do you think I’d see / If I could walk away from me ? » Pourtant, la charge la plus vénéneuse, et peut-être la plus notable, viendra deux ans plus tard quand les Rolling Stones feront leur retour fracassant avec Sticky Fingers. À lui seul titre d’ouverture, le polysémique « Brown Sugar », donne du grain à moudre à ses contempteurs. Dans ce morceau, Jagger déclare sa flamme à la chanteuse afro-américaine Claudia Lennear, avec laquelle il partage au même moment sa vie, en la désignant comme son sucre brun « au goût délicieux ». Sauf que le sucre brun est aussi le surnom donné à l’héroïne et que dans ses paroles, Jagger multiplie les références à l’esclavage. Alors quand certains y voient la condamnation franche d’un triste passé ainsi qu’une ode à la mixité, d’autres condamnent un texte raciste ou faisant l’apologie de la drogue. Surtout que « Brown Sugar » a été joué la première fois à Altamont en 1969, ce concert où un jeune noir s’est fait assassiner par le service d’ordre du groupe composé de Hell’s Angels. Bref, c’est le grand bazar. Et peu importe que les Rolling Stones, à l’inverse de quantité de leurs homologues, n’aient jamais caché leur tribut aux pères fondateurs du rock’n’roll, la trinité Fats Domino, Chuck Berry, Little Richard. La presse opportuniste ne manque pas cette occasion d’épingler encore les Anglais. C’est finalement Little Richard lui-même qui sort du bois pour éteindre (en partie) la polémique. Comment ? En reprenant le morceau à son compte sur son album King of Rock’n’roll. Le plus bel hommage qui soit pour la bande à Jagger. Et un retournement qui prouve bien qu’entre amateurs de friandises, on sait se renvoyer l’ascenseur. Dès lors, toutes les chansons chargées de glucose porteront une part de débauche. Little Richard, sacré démon.
👀 LA BIBLIOTHÈQUE IDÉALE — 54
1.
2.
Pittau & Gervais, Succulentes Sucreries, Gallimard Jeunesse Giboulées, 2014 Ce livre nous a été présenté comme candidat pour le Bologna Ragazzi Award et a été crucial dernièrement, dans les recherches que nous avons entreprises en 2015 à l’occasion de l’exposition Books & Seeds, organisée par le Bologna Children’s Book Fair l’année de l’Expo Milano dédiée à la nourriture. L’élégance traditionnelle française nous dévoile ici ses succulentes sucreries. Un chef-d’œuvre du couple d’artistes Pittau & Gervais.
Seymourina Cruse, Lucia Calfapietra, Goûters et desserts extraordinaires, Thierry Magnier, 2018 L’occasion rêvée pour devenir des petits chefs pâtissiers et pour cuisiner des gâteaux pour chaque fête ou anniversaire. Sucreries, gâteaux et petites pâtisseries : les 50 recettes offrent un large choix. Le livre est aussi très beau dans sa mise en page et a été réalisé par deux Italiens talentueux qui travaillent à Paris : l’illustratrice Lucia Calfapietra et le typographe et graphiste Nicolò Giacomin.
3.
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Bethan Woollvin, Hansel & Gretel, Two Hoots, 2019 La jolie maison de pain d’épices de la méchante sorcière est rattachée à un conte mondialement connu. Dans ce livre, l’amusement est garanti et la partie est vraiment profanée : la sorcière est extrêmement gentille alors que les enfants sont les plus méchants possibles. L’autrice et illustratrice, Bethan Woollvin, qui est diplômée de la Cambridge School of Art, est connue internationalement pour ses réinterprétations de contes de fées classiques. Dans ce livre, elle nous balade dans un doux banquet afin de contrebalancer avec la fin amère de l’histoire.
Kate Berube, Hannah and Sugar, Harry N. Abrams, 2016 Sugar, c’est le nom d’un chien très gentil, avec lequel beaucoup d’enfants jouent à la sortie de l’école. Tout le monde, sauf Hannah. En effet, elle trouve toujours une excuse : soit elle est en retard, soit elle est attendue. Elle a toujours autre chose à faire. En fait, Hannah est juste effrayée par le gentil Sugar et a honte de ce qu’elle ressent : elle garde donc cette vérité pour elle. Un jour pourtant, lorsqu’elle n’aperçoit pas le chien à sa sortie de l’école, elle décide de partir à sa recherche. Dépasser ses peurs pour recevoir en échange : voilà de quoi traite ce livre si doux.
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Ines Fonseca Santos, Marta Monteiro, Um milhão de rebuçados, Pato Lógico, 2019 Une histoire vraie, un livre qui célèbre Álvaro Justino Matias (1914-2007), le fondateur de l’usine de bonbons Dr. Bayard. Pour les 70 ans de l’entreprise, ce livre raconte une aventure aussi professionnelle qu’humaine. Un enfant, son amour pour les bonbons, la guerre, le travail, la Reconstruction. Du sucre, du miel, un sirop mystérieux, du glucose, des gommes à mâcher : une histoire racontée par la super Marta Monteiro, un des talents de la scène innovante éditoriale portugaise.
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Bibliothè
que idéa le Children’s
Bologna Book Fa ir
👀 55 — LA BIBLIOTHÈQUE IDÉALE
Le Bologna Children’s Book Fair est ni plus ni moins que le plus gros festival dédié aux éditions pour enfants au monde. Qui de mieux, donc, que l’équipe du boss de l’édition jeunesse pour nous conseiller ses cinq livres incontournables sur la thématique « Sugar Sugar » ?
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BACK 2 BACK PI ER HE RE RM É Il y a un morceau que j’adore depuis toujours et que ariano co toujours avec le même plaisir, c’est « Mexico » Luis M → Medexi Luisj’écoute Mariano. Ce n’est pas très moderne mais je chantais ça à tue-tête quand je travaillais à l’époque chez Lenôtre et ça reste mon morceau préféré.
Moon e h a r t t o a t e Sin Frank → Fly M
Pour moi, c’est un morceau emblématique. C’est la chanson de mon mariage avec Valérie, et je trouve que c’est une belle image.
ng Je suis depuis toujours un inconditionnel de Bashu e Alain → Happ Bashung. Il y a ce morceau en particulier qui s’appelle « Happe » et qui fait partie de l’album Osez Joséphine. Je le trouve
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très poétique, imagé et élégant.
Je suis un grand fan des Rita Mitsouko. J’aime bien le titre « C’est comme ça », je le trouve formidable. J’ai toute leur discographie et j’adore toujours autant Catherine Ringer que j’ai encore vue dans une émission il y a peu. C’est un rythme, des paroles qui me parlent beaucoup.
o itsoutkcomme ça M a t i Les R → C’es
son hompd World Pour T e n i de Tears Jasm → Ma
le côté mélodie, j’adore « Mad World » for Fears repris par Jasmine Thompson. La mélodie et le texte sont incroyables.
J’aime beaucoup le rythme et le contenu de la chanson car ça me fait rêver. C’est une des chansons que j’aime bien écouter très fort, en étant tout seul dans un endroit.
n ne Mauman o B ’ n ’ →H Rag
HearIlty a plus de vingt ans, j’ai eu l’occasion de participer r y e M k c n Joe Co → Unchai à une émission de télé qui s’appelait « Télé Caroline » et ce jour-là, il y avait Joe Cocker qui était là et qui chantait « Unchain my Heart » à trois mètres devant moi. Encore aujourd’hui quand j’en parle, j’en ai des frissons tellement ça m’a marqué par la puissance de sa voix et la manière dont il incarne ses chansons.
Cette chanson fait partie des trucs que je peux écouter des milliers de fois tellement j’aime ça.
Beiru→t Nantes
? Christophe Maé, je le connais et c’est un é le bonheurcopain a M que je croise de temps en temps. Quand e oph où Christ → Il et il a écrit « Il est où le bonheur ? », je trouvais que c’était une chanson qui exprimait plein de choses. Elle est tellement entraînante et vraie que c’en est émouvant.
Les paroles de cette chanson sont tellement justes et étant moi-même beau-papa, ça me touche beaucoup. Comme vous le voyez, j’ai des goûts musicaux très éclectiques.
apa ey Viann → Beau-P
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VI N CACE RR NT Y
57 — PLAYLIST
Pour notre back 2 back spécial sucre, on a demandé à deux grands spécialistes du sujet quelles chansons mielleuses ils pouvaient bien offrir à leurs oreilles au quotidien. Le premier, Pierre Hermé, baigne dans le sucre et les macarons depuis sa plus tendre enfance et est aujourd’hui considéré comme un des meilleurs chefs pâtissiers au monde. Le deuxième, Vincent Carry, est le directeur du mythique club lyonnais Le Sucre et des non moins mythiques Nuits sonores. Alors que Pierre Hermé nous donne les 10 morceaux qui le motivent au travail, Vincent Carry, lui, fait grimper notre taux de diabète en flèche avec 10 morceaux édulcorés à souhait. → Propos recueillis par : É. Quittet → Mise en page : G. Bonneau
Retour au Sucre, le lieu culturel niché sur le toit de la Sucrière à Lyon, et dans lequel Laurent Garnier officie régulièrement. Nina Simone étant, à juste titre, au panthéon de sa discothèque de vinyles (plus de 50 000 disques, eh oui), on a eu maintes occasions d’entendre sur le dancefloor, à contretemps, les morceaux les plus légendaires de la chanteuse, pianiste et militante américaine. On pourra bientôt découvrir toutes les références et l’univers du DJ français, lors de la sortie désormais imminente du documentaire qui lui est consacré : « Off the record ».
ar tle Suogwl t i e L n o a im nt B Nina S → I Wa In My
a n Ce n’est pas le titre le plus emblématique de SinatSrugar TowNancy y c n On lui préfère peut-être le légendaire a N → « Bang Bang »Sinatra. retrouvé dans le Kill Bill de Tarantino ou le fameux « These Boots are Made for Walking », morceau également iconique du cinéma puisqu’utilisé dans une dizaine de films, dont le très tendu Full Metal Jacket de Kubrick. Mais bon le thème de la playlist, la commande de Kiblind, étant le Sucre, allons-y pour « Sugar Town » !
Le groupe islandais créé en 1986 donne le ton de ce que sera la conduite de carrière intello-poético-exigeante de sa fondatrice, Björk. Avec quand même une ligne un peu plus enragée et nerveuse. La fée islandaise s’étant, elle, peu à peu perdue dans des créations parfois laborieuses, voire un peu trop sucrées.
s arcubierthday g u S e Th →B
ier n le bacon on est plutôt passé dans le salé, et t Garnrispy Bacnio leAvec n e r titre ni le nom de l’artiste ne font référence au u C La → saccharose. Reste que Laurent Garnier est le résident le plus emblématique de notre beau Sucre à Lyon et son absence dans cette improbable playlist aurait été inacceptable.
ve tes ar Baby Lo t e b u The R → Sug
nes r Bon, bien sûr le titre fait référence, entre autres, ng Storown Sugàal’héroïne i l l o R vraiment au sucre qu’on met encore → B(on est de moinsetenpasmoins The nombreux) dans le café noir. Mais bon, difficile de faire une playlist sur le thème Sucre / Sugar sans placer ce légendaire morceau des Stones. D’autant qu’il est arrivé sur terre avec l’album Sticky Fingers en avril 1971, la semaine de ma naissance.
À voir notamment pour la performance lunaire du très regretté Michel Piccoli et pour la bande originale impeccable de Philippe Sarde, dont le titre éponyme est : Le Sucre.
Là non plus pas de sucre ni dans le titre ni dans le nom de l’auteur. En revanche c’est bien en expliquant comment lui est venue l’idée de l’album Lambs Anger (2008) que Mr Oizo, aka Quentin Dupieux, a fait son court métrage logiquement intitulé Making Lambs Anger. L’auteur de la génialissime série Wrong Cops y montre les musiciens en studio (dont Surkin) se faire masser avec des laitues puis se laisser recouvrir… de sucre. Oui, c’est tiré par les cheveux.
Anger zo Mr. Oi → Lambs
sin Mockaaramel La recette du caramel est presque aussi simple n a n que celle du Pain à l’huile d’Alain Chabat : « Dans une Con → C
casserole, verser le sucre avec l’eau et mélanger sur feu moyen jusqu’à ce que le caramel apparaisse ». Pour Connan Mockasin, la recette est différente : lors de la sortie de l’album éponyme en 2013, il expliquait aux Inrocks : « Je l’ai fait parce que ma mère me l’avait demandé ». Puis : « Étant donné que personne n’avait jamais appelé l’un de ses albums Caramel, je me suis demandé à quoi pourrait bien ressembler un album qui s’appellerait Caramel… ». Bref, du coup on l’avait invité la même année à jouer à Nuits sonores. J’aurais pu dire que c’était à la Sucrière (qui s’en souviendrait ?), mais non ! C’était aux usines Brossette.
Pour info, le sucre candi s’écrit avec un i. Mais bon, à ce stade, on n’est plus à ça près. Et puis j’aime beaucoup ce morceau d’Iggy Pop avec le featuring de Kate Pierson, la chanteuse des B52’s. Tant et si bien que je l’ai mise sur une playlist des 500 morceaux les plus importants de ma vie, que j’ai offerte à ma fille Mathilde (qui est déjà plus calée que moi en musique).
ierson P e t a tK op fea y gI gy P → Cand
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Ce morceau (de sucre) n’a rien à foutre là, à part un clin d’œil à l’autrice Anne Pauly (Avant que j’oublie chez Verdier, prix du livre inter 2020) qui a récemment ressorti à la radio cette « bubblegum pop song » des Rubettes (sorti en 1974, l’année de naissance d’Anne Pauly) en l’évoquant comme l’un de ses doudous énergisants. Et de fait, dans certaines circonstances, ça peut faire son office. Pour réécouter l’émission, c’était le 20 décembre dernier dans « Remède à la mélancolie ».
de e) pe Sar cre Philip → Le Snuale Le Sucr Étrange film de Jacques Rouffio (1978), à revoir car incroyablement d’actualité. On est en plein dérapage e origi (band capitalistique, à base d’escroqueries et de bulles spéculatives.
👀 IMAGIER — 58
IMAGIER
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Les Pâtisseries
Le sucre n’est pas qu’un ingrédient. C’est un dieu. Et l’être humain, dans sa grande ingéniosité, a su en faire des cathédrales. On a même donné un nom à ces architectures dévotes : on appelle ça la pâtisserie. Les prêtres y sont nombreux et la pratique se développe encore et encore. En bons théologiens, les illustrateurs et illustratrices ont également leur mot à dire. Non seulement ils s’en gavent, mais ils font mieux que ça : ils les dessinent. Les travaux présentés ici sont issus de projets déjà existants et font l’objet d’un recueil d’illustrations dédié aux pâtisseries sorti aux éditions Kiblind. Il est disponible en librairie et sur notre site.
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katedehler.com
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Kate Dehler | Just dessert
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👀 IMAGIER — 60 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Carole Barraud | Illustration pour Freundin Magazine carolebarraud.com
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jiayi-li.com
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Jiayi Li | Dramacat
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👀 IMAGIER — 62 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Imssn Illo | Happy Birthday instagram.com/illo_imssn
👀 63 — IMAGIER
laurenmartinnyc.com
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Lauren Martin | Breakfast Still Life
👀 IMAGIER — 64 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Nahoko Kumagai | Nice to meet you torinome-kumanote.tumblr.com
65 — IMAGIER
sarahcliff.com
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Sarah Cliff | Cheeky Cherry Cake
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👀 IMAGIER — 66 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Simone Norohna | Christmas Pudding simonenoronha.com
jeu vidéo
animati
o 3D D B n illustratio
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L’ÉCO LE D ES M ÉTIER S D U D ESSIN
> formation initiale - 5 ans pour se spécialiser en illustration multimédia, cinéma d’animation ou jeu vidéo - 3 ans pour se spécialiser en dessin 3D - 2 ans pour se spécialiser en storyboard et layout (rentrée 2021, à Angoulême) - en fin d’études : les étudiants accèdent à un job dating réunissant 60 entreprises de l’image
> formation continue
Floriane BALLESTRA, étudiante de 5e année édition multimédia
Des formations de 70 heures pour développer ses compétences ou se reconvertir - le personnage en illustration jeunesse - la création de décors sous Photosphop - l’illustration vectorielle sous Illustrator - le character design : acting et posing - la mise en couleur en bande dessinée - le stop motion - animation en volume - le storyboard
> cours du soir et stages - dessin académique - illustration - infographie et dessin 3D
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👀 69 — SÉLECTION PRINT
> Sélection Kiblind Print par Maxime Gueugneau
Éveils REGARDS ■ Le plaisir de retrouver Juliette Mancini est
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infini. Plus de quatre ans après le formidable De la chevalerie, la cofondatrice de la revue Bien, monsieur retrouve les éditions suisses Atrabile et sort Éveils, sa deuxième bande dessinée. Mais là où son précédent album prenait le détour de la fiction médiévale pour donner quelques coups de tatanes à la très réelle époque moderne, la ligne est cette fois tout à fait droite. Pour son nouveau livre, la dessinatrice se raconte elle et dessine le nous. Juliette Mancini est une trentenaire, marquée par le onze septembre et Le Pen au second tour, les attentats de 2015 et la lecture effrénée de StarClub. Elle partage les combats de notre temps, sur le féminisme, l'antiracisme et les inégalités. Mais elle est aussi un individu à part entière, avec ses mythes familiaux, son entourage et son vécu. C'est avec ces allers et retours entre l'intime et le commun que se construit peu à peu le propos universel du livre. Celui d'une femme qui a grandi entre la fin du XXe siècle et le début du XXIe. D'une femme qui a du subir l'extérieur pour se construire à l'intérieur, contre et avec le regard des autres, en affrontant les contraintes imposées. La subtilité de la réflexion se retrouve également dans son dessin. Ses coups de crayons de couleurs sont comme les lignes d'un journal intime où les émotions affleurent à chaque trait. Pas de maniérisme, pas d'emprunt, chaque case est le fait d'une autrice en pleine conversation avec son moi. Pourtant, la lecture reste accessible, Juliette Mancini gardant toujours ce qu'il faut de maîtrise pour ne pas se laisser déborder par un je débordant et perdre le regard du spectateur. Le chemin est étroit mais emprunté avec justesse. Les éveils de Juliette Mancini sont à la fois ceux de tout le monde et les siens propres. Dans ce bijou de bande dessinée, l'autrice se regarde grandir et regarde la société qui a tourné autour d'elle. C'est le bilan d'une adulte qui regarde en arrière ce qui l'a façonnée, ses combats, ses échecs, les murs contre lesquels elle a buté, les tournants de sa jeune vie. Qu'est-ce qui vient d'elle, qu'est-ce qui vient des autres ? Qu'est-ce que le « nous » fait au « je », de quoi le « ils » est-il responsable ? Juliette Mancini tire le fil de l'individu dans l'écheveau de la société et tente modestement de démêler quelques trucs. Un coup de boutoir courageux qui nous renvoie sans pitié devant le miroir. N'ayez pas peur, il peut en ressortir du bon. → Éveils de Juliette Mancini chez Atrabile, 128 pages, 18€ → atrabile.org
👀 SÉLECTION PRINT — 70
Sherlock Time
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HALLUCINATIONS ■ Comme tous les matins, Sherlock Time
– c’est le nom du gars, pas « le moment de Sherlock » – s’en va chercher le journal. Et comme tous les après-midi, il sauve le monde d’une invasion extra-terrestre ou d’un truc approchant. Affublé du fameux compère qui ne comprend rien mais qui est bien sympa, Julio Luna, il joue au super-héros omniscient qui voit tout et sait tout mieux que tout le monde. « Impossible de savoir s’il se fichait de moi », résume tout à fait bien l’acolyte devant l’énormité des aventures de nos deux héros, habitants d’une villa dont la tour principale n’est autre qu’un vaisseau spatial. Le recueil Sherlock Time rassemble pour la première fois en français les tribulations du héros créé à la fin des années 1950 par Héctor Oesterheld et Alberto Breccia, le duo responsable ensuite de Mort Cinder. Sous ses atours de feuilleton fantastique, l’œuvre des deux maestros cache un jeu de narration bien plus subtil. Se fichent-ils de nous ? Tout y semble à la fois extraordinaire et terriblement commun, à l’image du duo de choc : un vieux retraité à la candeur confondante et un malabar aussi fort qu’intelligent. Sherlock Holmes et son Watson, dans un univers aux contours terriblement élargis et à l’allure parodique. Tout cela est-il réel ou s’agit-il des hallucinations d’un solitaire dans une maison vide ? Sherlock Time ne raconte-t-il que des conneries ou bien leur maison leur permet-elle réellement de se transporter aux confins de l’univers ? Peu importe, ce qui compte c’est précisément l’entre-deux sur lequel se baladent les deux auteurs. Car quand le scénariste Héctor Oesterheld se joue de notre naïveté, Alberto Breccia en profite pour transformer son trait. Ceci est la première œuvre de maturité du grand dessinateur argentin qui trouve dans les ambivalences d’Oesterheld de quoi s’émanciper d’un art trop mécanique jusqu’alors. D’ouvrier il passe à artisan puis artiste au fil de ces pages où son trait lâche peu à peu la terre ferme pour s’envoler finalement. Le maître du noir et blanc naît là, sous nos yeux, laissant l’instinct et la créativité prendre enfin le pas sur le bête et méchant turbin. Sherlock Time n’est peutêtre pas le climax des deux auteurs, mais il est une étape très recommandable. Et, il faut bien le dire, particulièrement jouissive. → Sherlock Time de Héctor Oesterheld et Alberto Breccia aux éditions Revival, 160 pages, 29 € → editionsrevival.fr
Un
soirde fête
TERRIER ■ Un Soir de fête, de Nina Lechartier, est un sol
glissant. Dès les premières pages, d’ailleurs, nous tombons. Mais qu’on ne s’y méprenne pas, la chute n’est pas dangereuse, bien au contraire. Ici, l’atterrissage se fait en douceur au beau milieu d’un gigantesque pot de peinture. Un mélange pour être plus exact, qui a fait l’objet d’un patient travail sur la couleur et d’une maîtrise sans faille. Alors nous voilà enrobés d’une matière sirupeuse et entourés par ses lumières subtiles. Le moment passé à la lecture du premier livre de l’autrice devient une orgie chromatique où la gouache avoisine l’acrylique et diverses autres peintures brillantes. Subissant les traitements les plus divers – une histoire y est même dessinée sur du tissu – la matière se déploie dans toute sa splendeur et nous y replongeons pour le plaisir des sens. L’esthétique de Nina Lechartier sur Un Soir de fête est détonnante, c’est un fait, mais n’est pas gratuite. Car si nous chutons dans la peinture, nous tombons également dans des récits d’un autre monde. Celui des rêves et des fantasmes, de l’absurdité et de l’hallucinatoire. Le titre complet du livre est Un Soir de fête et autres nouvelles touristiques. Mais oui, c’est bien un voyage en terres inconnues qui nous attend au détour de ces pages. L’esprit de Nina Lechartier semble fait comme aucun autre ; parcourir ses monts et ses vallées est loin d'être une de ces excursions sans âme servies par les touropérateurs de bas étage. Qu’il s’agisse d’une soirée chez le Baron Ranfler-Rantler, d’un « date » avec John Alexander ou de la visite d’une ville mystérieuse, le jeu en vaut clairement la chandelle, la surprise débouchant à chaque case, le bonheur de lecture dérivant de chaque mot. Les choix esthétiques et narratifs forts d’Un Soir de fête en font un album rare, ébouriffant, déstabilisant, et créent une atmosphère à nulle autre pareille. La rechute est recommandée. → Un Soir de fête de Nina Lechartier aux éditions Magnani, 96 pages, 20 €. → editions-magnani.com
👀 CHUTE ■ La question n’est pas tant de savoir ce qu’on aurait
Tunnels GALERIES ■ Ça a quand même pas l’air simple d’être israëlien. ne. Même d’ici, on sent bien. Pourtant, voilà près de 20 ans que l’autrice Rutu Modan essaie de nous expliquer les choses via des tragi-comédies mêlant les histoires intimes aux grandes affaires de l’histoire, de la politique et du social. Alors qu’elles pourraient s’empêtrer dans un bourbier pas possible, ses bandes dessinées parviennent à se tirer de cet écheveau avec un humour et une intelligence proprement confondants. Sans donner de leçon, sans trompetter une quelconque morale, Rutu Modan livre des récits aussi clairs que la ligne avec laquelle elle les dessine. C’est là sa magie. Après les très félicitées Exit Wounds et La Propriété, la dessinatrice israélienne revient mettre les pieds dedans avec ce Tunnels, attendu depuis sept ans. Et quoi de mieux qu’une bonne grosse légende pour soulever les mille contradictions d’une société tiraillée ? Rien, et ici, l’Arche d’alliance fera parfaitement l’affaire. Nilli Borshi est la fille d’un archéologue malade qui décide de reprendre les recherches de son père là où elles s’étaient arrêtées : à deux pas du coffre contenant, à ce qu’il paraît, les tables de la loi édictée par Dieu à Moïse. Elle s’associe alors avec des religieux orthodoxes, un marchand d’art qui négocie avec Daesh, l’armée israélienne, un fils mangé par l’écran, des contrebandiers palestiniens et un frère qui travaille le retournement de veste. Avec tout ça, elle se met à creuser. Creuser la terre, en dessous du mur entre Israël et la Palestine. Creuser l’histoire des peuples qui y vivent. Creuser aussi la société israélienne, son rapport au passé, à la religion et, évidemment à ses voisins. Inutile de dire qu’à force de creuser, on trouve. Mais les tunnels ne sont pas des puits. Ils mènent forcément quelque part. Ils rejoignent même. Les lignes tracées en rejoignent d’autres, superficielles ou capitales, et dessinent une géographie des rapports entre les individus, dans ce pays qui a du mal à se comprendre lui-même. Ici, Rutu Modan, que l’on pourrait penser chargée comme une mule, s’en tire avec une légèreté bluffante. En utilisant l’anecdotique pour traiter le global, en infiltrant le cartoonesque dans le tragique, elle maintient la barque à flot et fait même mieux que ça. Elle fait de sa bande dessinée une œuvre littéraire de premier plan.
→ Tunnels de Rutu Modan, chez Actes Sud, 288 pages, 25 € → actes-sud.fr
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fait en 40. Ou en l’occurrence, ici, en 37. Parce que c’est une question débile. Le principe est de savoir comment tout cela fut possible. Comment, à n’importe quelle échelle de la société, des gens bien sous tout rapport ont aidé le pire régime de l’histoire : le nazisme. Avec Soleil mécanique, l’auteur polonais Lukasz Wojciechowski remonte les manches et plonge ses mains dans la très sale banalité du mal. On suit ici l’histoire fictive de l’architecte tchèque Bohumil Balda, qui subit la présence nazie dans son pays puis s’en accommode largement. Séduit par les principes de grandeur et les contrats juteux que lui apportent d’un même coup les occupants allemands, il lâche peu à peu ses convictions politiques pour foncer à pleine balle dans le mur de la collaboration. La trahison est lente, pernicieuse, mais infiltre inévitablement le regard d’un homme qui croit voir son destin artistique parvenir à son apogée. Jusqu’à l’aveuglement total. Aurais-je omis de dire que Lukasz Wojciechowski est lui-même architecte de métier ? Car derrière l’histoire de son héros, c’est la part sombre de sa discipline qu’il entend mettre à bas. Comme tous les corps de la société, l’architecture a pris part à la montée du nazisme et, peut-être plus qu’une autre, elle lui a offert les symboles éclatants de sa victoire. L’architecture est politique et ceux qui s’y adonnent ne peuvent oublier combien elle a pu se fourvoyer dans ses rêves de grandeur. Si le propos est fort, la manière n’est pas oubliée non plus. Déjà aperçu dans son précédent album La Ville nouvelle, l’art de Lukasz Wojciechowski est pareil à nul autre. On peut être décontenancé par cette bande dessinée réalisée via le logiciel de plans AutoCAD. Mais on peut aussi se dire qu’il tient là l’arme parfaite pour traiter de son sujet. Avec son esthétique géométrique, ses couleurs pauvres et sa mise en page unique, Lukasz Wojciechowski nous met la tête dans le seau. Le fond et la forme se confondent et la critique de l’architecture devient elle-même architecturale. On tient là un objet d’une cohérence absolue et une expérience de lecture du genre inoubliable. → Soleil mécanique de Lukasz Wojciechowski aux Éditions Çà et Là, 144 pages, 16 € → caetla.fr
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Soleil mécanique
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e l l e B s u l P a L d r o N u d e Plag
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EFFACEMENT ■ Si la catastrophe n’est pas évoquée franchement,
c’est qu’il est inutile de s’y appesantir. Peut-être, d’ailleurs, parce qu’elle n’a pas encore eu lieu. On sait simplement que l’annonce d’une montée des eaux a fait fuir la quasi-totalité de l’humanité. Dans La plus belle plage du Nord, ne subsistent que les conséquences : la solitude des êtres et la mélancolie qui les ronge. Dans ce paysage, non pas désertique mais déserté, d’une ville du nord de la France, se jouent les derniers restes d’une relation. Alors que les êtres, les sentiments, l’espoir, autour d’eux, s’effacent peu à peu, les deux héros tentent de renouer des liens qu’on sent forts sans pouvoir les définir tout à fait. Comme la vie de ce monde pré-apocalyptique, cette courte bande dessinée de Sun Bai et Lucas Burtin nous file entre les doigts. Les traits du dessin semblent eux-mêmes s’évanouir dans ce crépuscule d’humanité. L’impression monochrome en risographie du Studio Fidèle vient admirablement jouer de cette disparition en dissipant la couleur, la rendant incertaine, vague. Ne reste pour le lecteur que la contemplation de ce qui est perdu et un regard trouble sur ces eaux qui vont tout avaler après avoir tout donné. Les deux artistes, fondateurs de la petite maison d’édition Soleil d’hiver, sont allés fournir à Fidèle un livre à la tristesse époustouflante. À travers la vaine tentative de ranimer des sentiments perdus, c’est la fatalité s’abattant qui transparaît. Sans tambours ni trompette, sans éclat ni effroi, le destin écrit sa sinistre prose dans ce graphisme froid et d’une élégance rare. On quitte La Plus Belle Plage du Nord avec un petit chat dans la gorge et des yeux ébahis. → La Plus Belle Plage du Nord de Sun Bai et Lucas Burtin aux éditions Fidèle, 76 pages, 20 € → fidele-éditions.com
Dormir C’est Mourir COUSIN ■ Il en est quelques-uns
pour qui dormir relève de l’épreuve. Le sommeil est une frontière qu’ils se refusent à franchir, ne sachant ce qui se trouve derrière. Le héros semiautobiographique de Gabri Molist est de ceux-là, qui se gave de sitcom jusqu’à tomber enfin, pour de maigres heures. Le jour, il est serveur dans un restaurant à volonté et à la qualité douteuse. Un métier dans lequel il s’épuise et se fait houspiller par ses patrons comme par les clients. Puis il rentre chez lui et attend avec anxiété l’heure du coucher, persuadé qu’il va mourir. La vie est belle. Dormir c’est mourir commence au moment où il tente de se prendre en main et s’en va consulter. Ce travail de fond ne lui permet pas immédiatement de guérir mais lui ouvre les portes d’un nouveau monde : des rêves étranges dans lesquels il parcourt son inconscient accompagné d’un drôle d’ami, Oto. Gabri Molist construit ce faisant un pont entre l’imaginaire et le réel qu’il va emprunter avec brio. Il ne fallait pas moins que le trait mouvant de l’auteur espagnol pour pouvoir se débrouiller dans un espace aussi bancal que celui qu’il propose. Jonglant avec les hallucinations, le quotidien et le rêve, Gabri Molist ne fait pourtant tomber aucune balle et frappe juste dans sa description d’une vie tachée par l’angoisse et la solitude. Le dessin est là en béquille, évolutif, créatif et malléable pour coller à cette histoire qui déborde par tous les côtés. La mise en scène n’est pas en reste, brisant le chaînage des cases, alternant le plein et le désert et venant mettre la couleur quand la pression devient trop forte. C’est évident : l’esprit d’un homme ne se contente pas d’un gaufrier de six cases nickels. Gabri Molist maîtrise parfaitement la bride qu’il lâche à souhait quand le besoin s’en fait sentir. En sort une bande dessinée hallucinée, aussi brillante que déroutante et qu’on sent être le fruit d’un long travail sur le medium bande dessinée. Celui-ci, alors lové contre le sujet qu’il traite, n’en ressort que plus fort. → Dormir c’est mourir de Gabri Molist chez Bang éditions, 264 pages, 20 € → bangediciones.com
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👀 SÉLECTION PRINT — 74 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
Shanghai Chagrin ERRANCE ■ On ne nous en dira pas plus. Ça tient en quelques pages d’introduction : Léopold Prudon, sur le conseil de ses proches, part en voyage pour se remettre de la mort de son père. Il débarque à Shanghai, une ville qu’il ne connaît pas dans un pays dont il n’a que les clichés en tête. Puis plus rien. On est lâché au milieu de la mégalopole, suivant les déambulations de l’auteur perdu entre le gigantisme des paysages urbains et la profondeur de sa peine. Pour ce qui est de l’écrit, on en restera là, ou quasiment. Ici quelques bribes de conversations, quelques bouts de vie : ceux de l’auteur dans les derniers jours de la vie de son père ou celles de passants témoignant que le monde n’est pas tout à fait à l’arrêt. Des poèmes, aussi, qu’on sent connectés aux états d’âme de Léopold Prudon. Pas grand-chose en somme mais assez pour nous taper au ventre, nous plonger dans l’immensité de la tristesse. C’est un bien étrange carnet de voyage qui se déploie sous nos yeux. Pas d’agrément dans ce séjour chinois, pas d’enthousiasme non plus. Léopold Prudon nous balade aussi bien parmi les buildings que dans des endroits plus pittoresques. On voyage dans une Chine qu’on ne nous expliquera pas, qu’on ne comprendra pas, pas plus que l’auteur qui imprime dans cette suite de dessins une étrangeté flagrante. Nous sommes à l’extérieur de cette société autant que ce fils en peine se sent extérieur à lui-même. Pourtant, au fil des pages, se crée un lien entre le lecteur et l’auteur de cette bande dessinée pas comme les autres. Quelque chose frappe au cœur et reste bien collé. Les mots, absents, n’auraient rien pu ajouter de plus fort que le silence assourdissant qui règne sur ces pages. Un mutisme vertigineux au milieu d’une ville-monde qu’on imagine bruyante et vivante. Mais l’auteur y reste sourd, piégé par sa peine. Ne restent que ses yeux et le dessin pour continuer à s’exprimer malgré tout. Il faut le dire ici, le trait est magistral. Il reste au moins ça pour se sentir vivant. Sa ligne est précise et les paysages urbains retranscris sont magnifiques, grandioses, intouchables. Si Léopold Prudon ne parvient pas à embrasser sa situation géographique comme mentale, il tente tout de même de capter ce qu’il voit et de le poser sur la page. L’architecture tentaculaire de Shanghai comme ses zones à l’abandon font écho aux chemins empruntés par l’auteur. L’errance se concrétise sur la feuille, le béton devient matière sentimentale. Perdu dans ce chaos, il dessine. Et les images qui défilent devant ses yeux offrent à la fois une porte de sortie et un symbole des tourments qui le traversent. Son travail lui permet d’attraper un peu du tourbillon qu’il ressent et c’est primordial. Shanghai Chagrin est une bouée de sauvetage en même temps qu’un voyage en mélancolie. Un grand livre, surtout. → Shanghai Chagrin de Léopold Prudon chez L’Association, 144 pages, 17 €
→ lassociation.fr
Yahho Japon ! KONICHIWA ■ Il n’est pas inutile de rappeler que,
sauf miracle, on ne connaît rien au Japon. Surtout quand on a sept ans et qu’on habite à 10 000 km du pays susnommé. Alors, dans un souci de rapprochement des cultures, il ne semble pas inconvenant de jeter un œil sur les publications qui s’y rapportent. Et c’est là que Yahho Japon ! arrive. Il faut le dire, cet ouvrage est d’une facture particulière. Déjà, barrez-vous les gars, laissez-nous un peu d’air pour une fois : Eva Offredo réalise ici le portrait de huit Japonaises. Ensuite, barrez-vous les clichés, les sushis, le karaoké, le judo et ces trucs-là : Eva Offredo est partie à la recherche de l’authenticité. De la meunière Tsuyu à la bryologue Uchimizu, l’enfant partira à la rencontre de femmes singulières et passionnées. De cette autre facette du Japon ressortent des saveurs prononcées et un sentiment de toucher au réel plutôt rare dans les ouvrages pédagogiques. La force du livre est également dans son esthétique. Au ton didactique du propos, le graphisme répond parfaitement avec une simplicité quasi logotypique et une épuration qui confine à l’élégance. Yahho Japon ! est un modèle de livre pédagogique dont les adultes aussi ressortiront grandis.
BRASIL ■ La vie de Gaston, crocodile du Nil, n’est pas tip-top. Entre son minuscule appartement parisien et son boulot de plongeur, il se sent un tantinet à l’étroit. Le voyage le tente mais le courage lui manque. Heureusement, il s’est octroyé une meilleure amie en la personne de Mona, plante carnivore venue du fin fond de l’Amazonie. Malheureusement, celle-ci ne goûte que très peu le climat tempéré, ce qui fait qu’elle ne goûte rien du tout d’ailleurs, refusant de manger et se laissant dépérir. Prenant son courage à deux mains, le brave Gaston va passer outre son angoisse du grand départ. Outre la mignonne histoire d’amitié concoctée par Didier Lévy, on doit avouer que c’est la présence d’Alice Méteignier au dessin qui nous a fait chavirer dans ce Avec Mona. De retour aux affaires jeunesse après Mister Papillon en 2018, l’illustratrice parisienne revient ravir les sens avec son dessin reconnaissable entre mille. Dans ce joli récit, elle fait une démonstration de son style instinctif, coloré et diablement vivant. Ses grands coups de pinceau, ses mises en scène magistrales et sa science de la matière en font un régal pour les yeux des grands et des petits qui, en principe, en redemanderont.
👀
Avec Mona
75 — SÉLECTION PRINT
OIN DES KIDZ C LE
→ Avec Mona de Didier Lévy et Alice Méteignier aux éditions Sarbacane, 40 pages, 14,90 € → editions-sarbacane.com
→ Yahho Japon ! d’Eva Offredo chez Maison Georges, 92 pages, 18 € → maison-georges.com
La
e t i t Pe Famille PÉDAGOGIQUE ■ On va tout de suite poser les
→ La Petite Famille de Sesyle Joslin et John Alcorn aux éditions MeMo, 44 pages, 16 € → editionslesfourmisrouges.com
BALAYETTE ■ Le temps qui passe n’est
pas tendre avec les classiques de la littérature jeunesse. La gifle mise par le duo Anne Dory et Mirion Malle à ce bon vieux Roule, Galette de Natha Caputo et Pierre Belvès, sorti il y a plus de 70 ans et basé sur un conte traditionnel russe, en témoigne une nouvelle fois. Est-ce un taquet immérité ? Pas vraiment. Alors que l’original, toujours édité chez Père Castor, offre une vision plutôt rance du couple et de l’émancipation féminine, Roule, Ginette vient remettre les pendules à la bonne heure : celle d’une femme qui en a ras le cul de faire des galettes pour un vieux qui n’en touche pas une. Alors, Ginette se lève et se casse, sous la forme d’une galette. À chaque page, on sent la jubilation que les deux artistes ont pu avoir à mettre les coups de lattes nécessaires à la vieille histoire. La dessinatrice et autrice Mirion Malle, dont c’est la première œuvre jeunesse, y retrouve la lumière après le sombre C’est comme ça que je disparais. Avec son dessin vivant et expressif et une palette de couleurs chaleureuse, elle offre aux jeunes lecteurs et lectrices un trait bien à elle qui détonne avec le reste de la production jeunesse. Anne Dory, dont c’est le premier livre tout court, vient quant à elle leur glisser quelques premières bases sur l’égalité des sexes, l’autodéfense féministe et la sororité. Le tout dans une ambiance qui fleure bon le bonheur et la fierté d’une liberté retrouvée. Quant au vieux, il peut toujours l’attendre sa galette. → Roule, Ginette d’Anne Dory et Mirion Malle aux éditions La Ville Brûle, 48 pages, 15 € → lavillebrule.com
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
bases : on a pris allemand LV1. Et pour tout dire, que La Petite Famille soit un bon moyen d’éduquer les enfants à la langue anglaise nous importe peu. Certes, il s’agit bien là de la réédition d’un livre de 1964 à destination des jeunots anglo-saxons pour s’acoquiner au français. Certes, il y a un lexique à la fin du livre pour ceux qui auront l’apprentissage précoce. Mais ce n’est certainement pas ces considérations de surdoués qui nous ont fait la drague. C’est plutôt que La Petite Famille est un livre très beau et très drôle. Pour ce qui est des textes, nous les devons à Sesyle Joslin. Quatre petites histoires tout à fait absurdes et que leur forme pédagogique rend d’autant plus délectables. Forçant sur les répétitions de termes et de syntaxe, les récits prennent une tournure à la limite du poétique, embarquant le lecteur de force tout en haut d’un tremplin qu’il dévalera lors d’une fin inattendue. Mais c’est sur les dessins que nous souhaiterions porter l’accent. John Alcorn est un illustrateur de l’après-guerre, sis à New York et frôlant de près ou de loin tout le gotha du milieu, du Push Pin Studios à Fellini en passant par le magazine Esquire. C’est un boss. Et pour La Petite Famille, il donne une leçon de genre pop, aux couleurs éclatantes et impossibles et au trait délicieusement suranné, même pour l’époque. On lui dira également merci pour les typos des titres puisqu’apparemment le bon John savait tout faire. Grâce à lui et Sesyle Joslin, grâce aux éditions MeMo aujourd’hui, nous avons là un livre rare et précieux. Bilingue ou pas, efficace ou pas, La Petite Famille est avant tout le genre de pépite qui fait briller la bibliothèque.
Roule, Ginette
👀 SÉLECTION ANIMATION — 76 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
The Caketrope of BURTON’s team (2012) Melting POP (2015) Gâteau Gato (2018) Freequences (2019) Smart Cake
Les Cour tsMandises e r d n a x e l ’A d Dubosc
MIAM MIAM ■ Alexandre Dubosc réalise des films comme on fait de bons gâteaux. Avec pas mal de fantaisie, de la précision, beaucoup de générosité et, surtout, énormément de gourmandise. C’est pourquoi il ne présente pas ses courtsmétrages comme tout le monde : il les appelle ses « courtsmandises ». A très juste titre d’ailleurs ; car lorsqu’on les regarde, à moins d’être totalement réfractaire aux choses sucrées ou d’avoir un peu trop forcé sur le goûter, on salive un peu sans s’en rendre compte, comme le chien de Pavlov. Il adore ça, provoquer des envies de sucreries ; c’est même à se demander s’il ne le fait pas exprès. Pourtant, alors qu’on l’imagine avoir appris l’animation dans l’arrière-boutique d’un pâtissier, fabriquant les images comme on prépare un entremets, c’est à la prestigieuse Supinfocom de Valenciennes (aujourd’hui RUBIKA) qu’il s’est formé. Puis, après un Master européen en Arts, il s’est vite retrouvé chez Mac Guff – aujourd’hui l’une des boîtes de production d’animation 3D et d’effets visuels numériques les plus renommées de la planète – qui n’était encore à l’époque qu’un studio d’une dizaine de membres. Là, pendant dix ans, il va créer des effets spéciaux devant un ordinateur, en combinant des 0 et des 1 pour modeler des formes artificielles plus vraies que nature à l’écran. Jusqu’à la crise de foie. Au bout de dix ans, il fait une overdose d’images de synthèse, développant une sorte de diabète provoqué par un excès d’alimentation numérique. Il se rend à l’évidence : lui, il lui faut la forme, la plastique, la réalité. Il se fixe alors un régime diamétralement opposé au précédent, alimenté de matières physiques qu’il va d’abord trouver dans la photographie abstraite. Ce passage par le non figuratif lui permet dans un premier temps de renouer avec l’aspect réel des choses : les textures, les structures, les sensations, les effets naturels contenus naturellement dans une image non trafiquée qu’on perçoit particulièrement bien dans la macrophoto. Retrouvant alors le goût petit à petit, il recule progressivement son objectif pour revenir aux objets et à leur figuration. Il fabrique des décors, il construit de petites scénographies en taillant le réel comme un sculpteur face à un bloc de bois ou de pierre, puis les photographie. Et surtout, il s’amuse.
Virtualité VS flamboisier Alexandre Dubosc redécouvre alors son côté joueur et son appétit espiègle pour la fantaisie. Le jeu de mots par exemple, a une place de premier plan dans son processus de création, comme en atteste ses « courtsmandises », ses « making-œuf », son mode d’« alimation ». Alors forcément, quand lui vient l’idée d’un « flamboisier », c’est tout un champ qui s’ouvre à lui : celui de la pâtisserie. A partir de ce mot d’esprit, de cette contraction du « framboisier qui flambe », il cherche un rapprochement visuel, une parenté qui puisse unir la framboise et la flamme. Il la trouve dans la tête d’une allumette qui, si on la multiplie, rappelle la structure agrégée du fruit, en plus de sa couleur. L’illusion fonctionne à merveille. Jouant avec les objets comme avec les mots, il s’aperçoit que la forme circulaire des gâteaux évoque celle du praxinoscope et du zootrope, jouets d’illusions tournantes à l’origine du cinéma. Très logiquement alors, il commence à exploiter la forme naturelle des pâtisseries pour planter le décor de ses films, qui deviennent, par l’entremise nécessaire du stop motion, de véritables gâteaux-animés. Car si le flamboisier était un faux dessert, fabriqué avec de vraies allumettes, l’étape suivante a été de faire de l’animation avec de vrais gâteaux.
Flamboisier
Ce qui est stupéfiant dans l’art culinaire, c’est que l’objet fixe irrémédiablement l’attention, en titillant la sensation. Alors si on ajoute les jeux d’optique de l’animation, on est tout simplement hypnotisés. Et la cerise sur tout ça, c’est de s’apercevoir qu’on est en train de regarder un film qui se mange. → Les films d’Alexandre Dubosc sont visibles sur Kiblind.com → Filmographie gourmande : Food about you (2010) / Alimation (2011) / The Caketrope of BURTON’s team (2012) / Phytophage (2013) / Mecanique au chocolat (2014) / Melting POP (2015) / Gâteau Gato (2018) / Freequences (2019)
Animation par Jean Tourette
Ciné court
Animé 3 - 9 mai 2021
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cinecourtanime.fr
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👀 SÉLECTION MUSIQUE — 78
Musique par Elora Quittet
Tune-Yards Bosco Rogers
EXPLOSION ■ Ça commence
comme du Tune-Yards : des percussions et riffs dissonants qui arrivent sans frapper. Et puis, comme à chaque fois, tout ça se transforme en une explosion parfaitement maîtrisée quand la voix saturée de Merrill Garbus vient redonner de la chaleur à ce tableau foutraque. Tête pensante du projet, la chanteuse américaine fait de chacun de ses albums une épopée artistique où tout est permis. Entre deux mélodies hypnotisantes et épileptiques, Merrill nous nourrit de ses prouesses vocales dans « Under Your Lip » et « Hypnotized » et a même pensé à nous offrir une pause silencieuse pour repartir de plus belle à mi-chemin. Décidément.
→ Sketchy de Tune-Yards • disponible chez 4AD → 4ad.com
Yaya Bey
V/A
À CŒUR OUVERT ■ Le nom de l’EP suggère
déjà une introspection profonde. Avec The Things I Can’t Take With Me, Yaya Bey exorcise ses peines et soigne ses maux grâce à un fabuleux pouvoir qui lui a été donné à la naissance : celui de savoir chanter et bien en plus. Artiste reconnue dans le milieu de l’art new-yorkais, Yaya Bey met ses talents de songwriting au service d’un R&B doux et délicat. Mais ne nous y méprenons pas, sous l’apparente douceur, l’artiste de Brooklyn profite surtout des six titres de cet EP pour libérer sa parole, en évoquant par exemple la moralité douteuse d’un des acteurs de l’industrie musicale et le comportement condamnable de son père, le rappeur Grand Daddy I.U., avec les femmes. → The Things I Can’t Take With Me de Yaya Bey • sortie le 9 avril chez Big Dada → bigdada.com
ELECTRO LIBRE ■
Réjouissance de cette année 2020 (il en fallait bien quelquesunes) : le tout jeune label Omakase sort sa première compilation et c’est une bouffée d’oxygène. Amoureux de la musique électronique au sens large (et non pas seulement de celle qui s’écoute très fort), Kumanope et MBKONG (aka Goldie B) rassemblent en un album les compositions de 12 artistes ayant fait des sonorités électroniques leurs choses. Terme générique parfois réduit à trop peu, l’électro est ici plurielle. Elle s’habille de sonorités orientales dans « Death of the Samurai » de La Dame, de joliesses vocales dans « Lo Fay » de Demar, et s’autorise aussi volontiers des détours par la drum’n’bass et le trip hop avant de faire sa grande sortie ambient, et de nous laisser là, apaisés et heureux.
KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
→ La compilation Omakase Colors vol.1 du label Omakase est disponible via Omakase → omakaserecordings.bandcamp.com
El Michels Affair
HINDI ■ Quand il n’est plus possible de voyager, alors faisons venir Leon Michels à nous. Après plusieurs disques hommages au Wu-Tang Clan et un dernier sous forme de bande originale consacrée à la pop et à la soul des années 1960, le producteur new-yorkais et son groupe El Michels Affair changent de cap pour se laisser voguer vers l’Inde et la Turquie. Avec pour partenaire de voyage la chanteuse indienne Piya Malik qui, grâce à son chant hindi obsédant, a déjà rendu culte le morceau « Unathi », le boss de Big Crown Records dessine les contours d’une véritable cavalcade cinématographique où esthétique Bollywood, ballades au piano, instruments anatoliens, rythmiques traditionnelles et modernes se confondent. → Yeti Season de El Michels Affair • disponible via Big Crown Records → bigcrownrecords.com
CD 2 TITRES ■ « Point trop n’en faut » disait l’autre. Et ça, les gaillards
de Bosco Rogers l’ont bien compris. Après un premier album et un EP, le duo composé du Français Barthélémy et de l’Anglais Delphinium dégaine un double single. Deux titres oui, mais mémorables. Loin de s’arrêter au format, l’originalité est là, partout, dans la liberté des compositions. « Polar Moves » d’abord, avec ses rythmiques et envolées vocales, fleure le rock anglais des années 1960, tout en rappelant une pop plus actuelle à la Foxygen. « Tiramisu » ensuite se fraie un chemin du côté de la bossa latine des 70’s à coups de congas, de boîtes à rythmes vintage et d’harmonies vocales délicates. De la « flower punk », comme ils disent, qui ne fanera jamais. →Polar Moves / Tiramisu de Bosco Rogers • disponible via Bleep Machine → bleepmachine.tumblr.com
Moutarde & Miel
BONNE CUITE ■ D’une pierre deux coups, l’EP Surprise ! du duo Moutarde & Miel vient mettre un pansement sur notre manque de soirées et sur le mal du siècle consistant à ne jamais écouter les albums en entier. Parce qu’ici, l’album, morceau après morceau, raconte une histoire universelle : celle d’une nuit où l’on traîne ses guêtres, à moitié titubant, d’un bout à l’autre de la ville obscure. Grâce à des paroles scandées et à un r’n’b langoureux façon Bonnie Banane, le duo issu du collectif quinze quinze redonne toutes ses lettres de noblesse à la déglingue nocturne. Laissant résonner la soul, la pop, les bruits lointains des boîtes à rythmes, le zouk échappé du poste radio, Moutarde & Miel nous rappelle la nuit qu’on aime, lunaire, extravagante et pleine de rebondissements.
→ Surprise ! (K7) de Moutarde & Miel • sortie le 9 avril chez Grande Rousse Disques → granderoussedisques.bandcamp.com
Augenwasser / Leopardo REFUGE ■ Lorsque le climat anxiogène qui règne un
peu partout dans ce monde étrange nous consume un peu trop, il est bon de se réfugier à un endroit où l’on se sent apaisé. Ce split 45 tours en est un bien douillet, où l’on se reconnaît. Alors que d’un côté, le musicien de Bienne Augenwasser confesse sa fâcheuse tendance à fuir en se laissant aller à des solos saturés de guitare et à des expérimentations électroniques, le groupe voisin Leopardo se lance dans la quête de l’eldorado qu’est le bonheur, aux moyens d’une mélodie lo-fi empruntant autant à la country qu’au rock psyché. Un split aussi libre qu’on a tous envie de l’être. → Running Away / Happiness Paradise (Split 7’’) de Augenwasser & Leopardo • disponible chez We Don’t Make It Records → wedontmakeitrecords.bandcamp.com
Moontype POWER POP ■ Après s’être rencontrés sur les bancs du lycée, Ben, Margaret et Emerson ont la double bonne idée de faire fusionner leurs univers pour créer un groupe ensemble et de s’installer à Chicago. Moontype naît, et avec lui la promesse d’un premier album honnête et enchanteur. Bodies of Water raconte les amitiés qui se délitent, les voyages de l’esprit et les insécurités, rendus tout à coup heureux par le biais de la voix acrobatique de Margaret. Avec des lignes de basse rondes, des détours post-rock lancinants, des rythmiques riches et chaleureuses, et un penchant assumé pour la power-pop des 90’s, le premier album de ceux qu’on compare à Galaxie 500 est un ravissement. → Bodies of Water de Moontype • Sortie le 2 avril chez Born Yesterday → bornyesterdayrecords.com
Graphisme : Clément Sanna / Biennale de Lyon – Photo : Kyle Abraham © Tatianna Wills
labiennaledelyon .com
BIENNALE DE LA DANSE
→ 2021
→ Lyon 26 mai ↳ 16 juin
👀 SQUARE — 80 KIBLIND Magazine → 75 → Sugar Sugar
SQUARE² SQUARE² est une nouvelle BD originale publiée chaque dimanche sur le compte Instagram de KIBLIND. Le principe : Chaque semaine pendant un mois, un artiste que nous avons choisi dessinera un strip qui doit respecter les règles graphiques suivantes : Un carré central / 4 côtés / 4 cases / 4 couleurs imposées. Pour débuter : la talentueuse illustratrice andalouse, María Medem.
SQUARE² • Chapitre 1 - Partie 1/4 María Medem À suivre sur : instagram.com/kiblind_magazine
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