Cabotages, le gastronaute Var - Alpes-Maritimes , 14 escales au fil des bons produits de la mer

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Cabotages

CABOTAGES LE GASTRONAUTE

14 escales au fil des bons produits de la mer et du littoral. Édition Var - Alpes-Maritimes

GRATUIT, NE PEUT ÊTRE VENDU

2013

Destination

BANDOL - LES EMBIEZ - TOULON HYÈRES - PORQUEROLLES - BORMES LE LAVANDOU - SAINTE-MAXIME - FRÉJUS SAINT-RAPHAËL - CANNES - ANTIBES NICE - MENTON 1


du 28 juin au 22 septembre 2013

Le salon de Lily

ENTRÉE LIBRE

Hommage à la comtesse Pastré, mécène.

Adagp, Paris, 2013, André Masson , « Marseille-La cité », 1941, crayon gras sur papier , 24.5 x 31.5. Collection particulière

GALERIE D’ART DU CONSEIL GÉNÉRAL DES BOUCHES-DU-RHÔNE Balthus - Cecil Beaton - Brassai - Christian Bérard - Rudolf Kundera Man Ray - André Masson - Alexander Serebriackov Hôtel de castillon, 21 bis, cours Mirabeau 13100 Aix-en-Provence - 04 13 31 50 70

cg13.fr

Ouvert tous les jours (sauf le lundi) 10h30 - 13h / 14h - 19h


Gérant, directeur de publication Christophe Naigeon, christophe.naigeon@wanadoo.fr Assistante de direction et gestion intranet Julia Chaine : contact@cabotages.fr Directeur du développement Alain Pasquet : alain.pasquet@cabotages.fr Partenariats Thierry Dutto : thierrydutto@cabotages.fr

Cabotages de gastronautes

D

bon, c’est de saison epuis le lancement deC’est Cabotages c’est le Languedoc-Roussillon de France en 2007, nous affirmons queSudles plaisanciers sont des touristes exigeants, curieux de ce qu’il y a sur, dans et sous la mer, dans le ciel et de ce qu’ils voient de la côte qui défile, de ce qu’il y a à découvrir en arrivant à l’escale.

Cabotages

notre marque

Les six précédentes éditions annuelles de Cabotages Méditerranée ont voulu répondre à leur envie de déchiffrer le paysage, de connaître et de comprendre les villes portuaires où ils atterrissaient.

Rédactrice en chef Djinn Naigeon : djinn.naigeon@wanadoo.fr Équipages rédacteurs navigateurs : Djinn et Christophe Naigeon Emma et Bastien Chazelles Guy Brevet, Claude Roger, Mathilda Couzinié Copyright : Cabotages Tous droits de reproduction même partielle, tout procédé, tous pays.

Fabrication, iconographie : Emmanuelle Grimaud, Nicolas Pasquet maquette, infographie : studio@cabotages.fr Imprimerie : Rotimpres - Espagne ISSN : en cours Dépôt légal : juin 2013 Date de parution : juin 2013 Papier : PEFC libre de chlore Régie publicitaire : contact@akajoumedia.com Applications mobiles :

Site web www.cabotages.fr Claude Despretz, webmaster claude@cabotages.fr

Les plaisanciers sont aussi des voyageurs à la découverte de bonnes choses, de ce qui croît sur la terre, de ce qui vit dans la mer ou qui vole dans le ciel et qui peut éventuellement, pour leur plus grand plaisir, finir dans leur verre ou leur assiette. Comme nous avions inventé le nautouriste, ce numéro est destiné aux gastronautes, les navigateurs gourmets.

CERBÈRE - BANYULS - PORT-VENDRES COLLIOURE - ARGELÈS - SAINT-CYPRIEN CANET-EN-ROUSSILLON - SAINTE-MARIE-LA-MER PORT BARCARÈS - PORT LEUCATE - LA NOUVELLE GRUISSAN - NARBONNE-PLAGE - GRAU DE VENDRES GRATUIT, NE PEUT ÊTRE VENDU

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Cabotages

2013 21/05/13 10:29

CABOTAGES LE GASTRONAUTE

14 escales au fil des bons produits de la mer et du littoral Édition Hérault - Gard

GRAU DE VENDRES - VALRAS-SÉRIGNAN LE CAP D’AGDE - MARSEILLAN - MÈZE BOUZIGUES - BALARUC - SÈTE - FRONTIGNAN PALAVAS - CARNON - LA GRANDE MOTTE LE GRAU DU ROI - PORT CAMARGUE GRATUIT, NE PEUT ÊTRE VENDU

Cabotages

2013

CABOTAGES LE GASTRONAUTE

14 escales au fil des bons produits de la mer et du littoral Édition Bouches-du-Rhône

Ces pages sont, de port en port, la découverte des produits, des mets et des lieux que chaque escale évoque et qui a un lien avec la mer. Ce lien est parfois tout proche car la mer en est le lieu de vie. Souvent aussi la mer les a transportés dans les cales des navires ou en a propagé la recette en faisant voyager les marins. Parfois, le lien est plus lointain, c’est un amer, un coteau, un sommet, une lagune presque invisible qui évoque une plante, un plat, un vin.

LE GASTRONAUTE

14 escales au fil des bons produits de la mer et du littoral Pyrénées-Orientales - Aude

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CABOTAGES

• Photos © Laurent Villarem • Avril 2014

Cabotages est édité par Bastaque Éditions, 16 rue Garenne, 34200 Sète 04 67 17 14 30

PORT GARDIAN - PORT SAINT-LOUIS PORT-DE-BOUC - MARTIGUES - CARRO SAUSSET-LES-PINS - CARRY-LE-ROUET LA REDONNE - L’ESTAQUE - MARSEILLE LA POINTE-ROUGE - CASSIS - LA CIOTAT GRATUIT, NE PEUT ÊTRE VENDU

Cabotages

2013

CABOTAGES LE GASTRONAUTE

14 escales au fil des bons produits de la mer et du littoral. Édition Var - Alpes-Maritimes

Tout en Méditerranée a la mer pour berceau ou comme histoire.

BANDOL - LES EMBIEZ - TOULON HYÈRES - PORQUEROLLES - BORMES LE LAVANDOU - SAINTE-MAXIME - FRÉJUS SAINT-RAPHAËL - CANNES - ANTIBES NICE - MENTON GRATUIT, NE PEUT ÊTRE VENDU

2013

Destination

Retrouvez aussi les anciens numéros du trimestriel Cabotages sur : www.laboutiquedecabotages.fr


Sommaire

3 SAINTE-MAXIME

BANDOL

Au jeu des sept familles, on gagne de grands crus

Arbre à saucisses et pissaladière

7 FRÉJUS - SAINT RAPHAËL

LES EMBIEZ Le petit jaune, le blanc, le rouge, le rosé

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TOULON

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Découverte : coquillages et poissons du Lazaret

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Les romains aimaient les coquillages Un apéritif visité par un ange

CANNES

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19 Le péché de gourmandise des moines de Lérins La ville d’oranges, de palmes et de sel ANTIBES 35 PORQUEROLLES 21 L’ail, allium, pour le meilleur et pour le pire ?? NICE 37 BORMES ET LE LAVANDOU 23 Anchoïade et tapenade sont dans un bateau… 2 bonbons, 2 liqueurs et une soupe au pistou MENTON 39 SAINT-TROPEZ 27 La terre et le port du citron Hyères

?

Convoyage...

de l’ Étoile de France

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Flânerie...

dans le sillage du commissaire Maigret

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Vennez dégustez les vins d’un vignoble tiré au cordeau sur ces terres de cailloux, juste assez ingrates pour donner du caractère aux vins que la douceur du climat pourrait amollir. Au contraire, les rouges ne sont pas de capiteux ”vins de soleil“, mais s’expriment tout en finesse, profonds, longs en bouche, magnifiquement équilibrés. Les rosés et les blancs, jouent aussi dans la cour de l’excellence.

Ouvert 7/7 jours 9h - 12h30 / 14h -18h30

Vente et dégustation au Domaine Sur la RD 559 Entre Bandol et Saint Cyr sur Mer Tel: +33(0)4 94 32 57 57 Route de Bandol - 83270 Saint Cyr sur mer


BANDOL B

Bandol est une station typique de la Côte d’Azur avec un port entouré de mille boutiques à touristes. Les rues “derrière” sont plus tranquilles.

andol est aussi célèbre que Cassis pour ses vins. Mais ici ils sont surtout rouges et ont constitué la première AOC de France en 1941. En approchant du port, on passe devant l’île de Bendor qui appartient comme les Embiez à Paul Ricard et a été consacrée aux artistes. Au XIXe siècle, le chemin de fer a amené ici Thomas Mann, Aldous Huxley, Marcel Pagnol, Catherine Mansfield, Raimu… En 1923, Bandol est classée “station climatique”. Le port accueille aujourd’hui plus de 1.600 bateaux, voiliers et yachts à moteurs de toute taille. Deux projets sont en cours : regrouper sur un même quai les barquettes, bettes et autres pointus traditionnels, réaménager un autre quai pour les grosses unités de croisière.

Bandol is a typical Côte d’Azur resort with a harbour surrounded by a million tourist shops. The streets that lie “behind” are quieter.

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andol is as famous for its wine as Cassis is. But the wines here are mostly reds, and were the first in France to be officially designated (AOC) in 1941. As you near the harbour, you pass in front of Bendor island which, like Les Embiez, belongs to Paul Ricard and is dedicated to artists. In the 19th century, the railway brought Thomas Mann, Aldous Huxley, Marcel Pagnol, Catherine Mansfield, Raimu etc. here. In 1923, Bandol was classified as a “climate resort”. The harbour currently accommodates more than 1,600 boats, yachts and motor yachts of all sizes. The town has two projects underway: one to group all the fishing vessels (“barquettes”, “bettes” and traditional “pointus”) along one quay; and the other to redevelop a second quay for the large cruise ships.

BANDOL 43°08,0’ N – 005°45,4’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 29 42 64 www.bandol.fr

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Au jeu des sept familles, on gagne de grands crus

ue l’on vienne de la Ciotat ou du cap Sicié via les Embiez, on ne voit qu’une chose en direction de Bandol : les barres d’immeubles blancs démesurément allongées, incrustées comme des pans de falaises stratifiées dans le vert des collines qui dominent la baie. Ils affichent la vocation de Bandol : accueillir une population nombreuse pour dynamiser la commune. Douze mille habitants l’été mais quand même pas loin de neuf mille le reste de l’année. Ce qui, pour une station balnéaire, est une proportion raisonnable. Il faut dire que ce fut longtemps un désert. Depuis la fin de l’Empire romain, l’ancien Bendorium, livré aux envahisseurs et aux pillards barbaresques, avait vu ses habitants fuir vers la Cadière (Cathedra). Ils ne sont revenus que quelque mille deux cents ans plus tard, en 1715. Et pas en masse : sept familles pionnières installées là sous la protection du seigneur du lieu, François Boyer de Foresta dont l’ancêtre, Antoine Boyer, avait été anobli par Henri IV pour sa bravoure au cours des guerres de religion. Il se vit également attribuer le fort de Bandol. LA PÊCHE À LA MADRAGUE

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Destination

Les sept familles pionnières qui ont fondé Bandol au début du XVIIIe siècle et leurs descendants ont créé le vignoble de Bandol dont le vin est servi à la table de Louis XV ! C’est la réussite. Le port, qui était déjà un bon abri naturel, voit sa sûreté renforcée par un môle de neuf mètres pour abriter les bateaux et leur précieuse cargaison. Alors que la révolution éclate, à peine deux générations après celle des pionniers, il y a déjà 1 200 Bandolais. En réalité, Bandol n’a jamais été un grand port de pêche, à part une activité saisonnière de capture des thons rouges quand ces grands prédateurs passaient près des côtes.


BANDOL vité portuaire. L’arrivée du chemin de fer en 1859, ruine le commerce maritime. Les grandes tartanes restent en rade. Bandol est au bord de la ruine. Mais, sous l’impulsion de quelques vignerons avant-­ gardistes, le vignoble est arraché, replanté, amélioré, se lance dans la recherche de la qualité. Le jeu en vaut la chandelle. Il savent que ces terres, entre la mer et les montagnes, exposées au Sud avec trois mille heures de soleil pas an, sont un trésor. Peu d’extrêmes de température, juste ce qu’il faut de pluie, peu de mistral… Mais comme il faut que la vigne souffre un peu pour donner le meilleur, les sols pauvres de marnes et calcaires bien drainés sont là pour assurer ce qu’il faut de stress au bénéfice du fruit. Mais, on l’a vu trop souvent dans le Sud de la France à une époque, la tentation est forte de faire “pisser la vigne”. Dès le début, les vignerons de Bandol ont choisi de limiter les quantités pour que la vigne concentre ses qualités sur un plus petit nombre de raisins. C’est pourquoi le décret du 11 novembre 1941 qui crée l’appellation et fixe son cahier des charges, limite la production à 40 hectolitres à l’hectare. Aujourd’hui, la moyenne est de 35 hectos. LA TENTATION DES ROSÉS

Daniel Vernet, peintre des ports pour Louis XV, a représenté une de ces pêches à la madrague, long filet destiné à capturer les poissons migrants et qui a donné son nom à la cabane de pêcheurs où on les entreposait. Dans la commune de Saint-Cyr-les-Lecques, près de la Pointe Grenier, un charmant petit port porte le nom de Madrague, comme la villa de Brigitte Bardot à Saint-Tropez. BANDOL, SAUVÉ PAR SON VIN La principale activité de Bandol était l’exportation des produits de l’arrière pays, l’huile d’olive, mais principalement le vin. Sous le second Empire, Bandol exporte près de dix mille fûts et fait travailler trois cents tonneliers. Du coup, quand la crise de la vigne surviendra avec le phylloxéra, puceron ravageur de la vigne, ce sera le coup de grâce pour l’acti-

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Une bon

Maison des Vins de Bandol 238 chemin de la Ferrage 83330 Le Castellet Tél. +33 (0)4 94 90 29 59

Associé au Cinsault et à la Grenache, le Mourvèdre, cépage-roi et majoritaire de l’appellation Bandol, contribue par sa nature à cette faible production. Il évite aussi que de pareille conditions d’ensoleillement ne donne des vins trop lourds, en tirant l’assemblage vers des arômes de griotte, framboise, violette Bandol, surtout réputé pour ses rouges de garde, fait peu de blancs et, de date plus récente, des rosés. Sur une côte d’Azur où le rosé est un “vin de soif” à allonger de glaçons, les rosés de Bandol jouent la carte des bons vins sur la carte des restaurants. Il est vrai qu’ils ont de quoi réconcilier avec ce produit qu’on connaît plutôt vendu en jerrycans… mais n’est-ce pas un risque que de vouloir jouer dans cette cour aussi mal fréquentée ? Alors, quand vous faites escale à Bandol ou à Saint-­Cyrsur-Mer, avec un carton d’un excellent rouge pour accompagner les plats riches de l’automne, tentez pour l’été un rosé frais avec une daurade aux petits légumes. Glaçons interdits !


Bienvenue au Port de Bandol Welcome - Benvenuti

Abri naturel connu depuis l’antiquité, le port de Bandol, avec ses 160 places, est aujourd’hui le 9e port de France de par sa capacité. Cent soixante place de passage sont mises à la disposition des bateaux en escale, et ce pour des unités jusqu’à 40 mètres de long. Fortement fréquenté en période estivale, il reste très actif toute l’année avec une station carburant ouverte 24h/24 et 7j/7 nouvellement équipée d’une pompe gas-oil à gros débit pour une distribution plus rapide aux grosses unités, une zone de carénage pouvant accueillir des bateaux jusqu’à 35 tonnes. Tous les corps de métiers sont représentés sur ce site qui tourne été comme hiver.

Lauréat du Pavillon Bleu depuis 1998, le port dispose des équipements requis pour vidanger les eaux noires, grises et les huiles moteur. Le Quai d’Honneur dispose de nouvelles installations électriques avec des bornes délivrant 125 ampères par prise, plus en adéquation avec l’accueil régulier de grosses unités. Les 17 hectares du port sont couverts par le WIFI et une vingtaine de caméras assurent une vidéo surveillance 24h/24.

Le port accueille depuis 18 ans le « Salon du Nautisme de Bandol » qui reste, après ceux de Marseille et de Cannes, la plus importante exposition, à terre et à flot, de bateaux de la région. Port situé en bordure de la ville il offre plus de 200 commerces ouverts toute l’année, dimanche inclus, ainsi qu’un Grand Casino …

Capitainerie du Port - 83150 Bandol tél. +33 494294264 fax +33 494299320 e-mail :

port-bandol@wanadoo.fr www.bandol.fr

Destination


L’île de Bendor à Bandol (Var) L’île de Bendor, plus petit port-abri de Méditerranée. Entrepreneur, visionnaire, Paul Ricard qui a acheté l’île en 1950, était aussi bâtisseur et mécène. Il a façonné cette île dont il a dessiné les plans et fait surgir un véritable hameau, avec ses plages, ses boutiques et son petit port-abri. Séparée de Bandol par un fi let de mer, l’île de Bendor dispose de l’emblématique et majestueux hôtel DELOS, des restaurants, des musées de l’île et des petites boutiques des créateurs. De nombreuses manifestations artistiques y rassemblent peintres et sculpteurs.

A Bendor en saison, l’amarrage de votre bateau est réservé pour tout séjour à l’hôtel DELOS. Les petites villas, dépendances du DELOS, disposent chacune d’un jardin privatif et d’un accès direct à la marina.

L’île des Embiez à Six-Fours les plages (Var) L’île des Embiez est une étape idéale pour se reposer et avitailler sur la route de la Corse. Ou encore un but de croisières pour tout ceux qui aiment la terre ferme et qui peuvent profi ter des infrastructures de loisirs estivals proposés sur l’île de Paul Ricard. Le port des Embiez garantit une qualité d’accueil que tous les plaisanciers savent reconnaître et dont profi tent les 700 chanceux qui ont une place à l’année. Pavillon Bleu, Label Port propre, le Port St Pierre des Embiez est le premier du Var a avoir la certifi cation ISO 14 001 grâce à sa politique environnementale.

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Le port des Embiez est à 10 milles de la Ciotat et de 4 milles de Bandol. Attention en prenant le raccourci entre les Embiez et l’île du Grand Rouveau, le chenal est étroit entre les cailloux. En approche, joindre la capitainerie canal VHF 9 (24/24 – 365) ou au 04 94 10 65 21. Longueur maxi : 40 m tirant d’eau maxi : 3 m.

www.lesilespaulricard.com

Crédits photos Sté PAUL RICARD S.A © Copyright

Bienvenue sur Les Îles Paul Ricard


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LES EMBIEZ

Les Embiez, étape parfois un peu trop «animée» le soir mais magnifiquement préservée le jour, est une escale à envisager quand il y a des enfants à bord.

LES EMBIEZ 43°04,8’ N – 005°47,1’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 10 65 21

’île des Embiez est une étape appréciée des caboteurs : parce qu’arriver sur une île nourrit l’imaginaire, parce que le port bien protégé est tout le contraire d’un parking à bateaux, parce que ces 95 ha sans voitures imaginés à échelle humaine laissent la part belle aux espaces naturels. On y trouve 90% des essences végétales méditerranéennes et des oiseaux en quantité : hérons cendrés, cormorans, martins-pêcheurs…Ce complexe touristique écolo surgi ex-nihilo sur un îlot inhabité, est indissociable du nom de Paul Ricard. Pour “le roi du pastis”, la diversification touristique a commencé dès 1940 avec l’achat du domaine de Méjanes en Camargue, suite à la décision du gouvernement de Vichy d’interdire les apéritifs de plus de 16°.

Les Embiez can be a little “frantic” at night, but during the day it is wonderfully protected, and should be a planned port of call if you are travelling with children.

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oasters appreciate stopping at Les Embiez island because arriving at an island fuels your imagination, because the well-protected harbour is not at all a parking area for boats and because its car-free 95 hectares which have been developed on a human scale are the perfect showcase for its natural spaces. Here you’ll find 90% of the Mediterranean’s plant species and an abundance of birdlife: grey herons, cormorants, kingfishers etc. This eco-tourist complex built from nothing on a deserted island cannot be separated from one man: Paul Ricard. For the “king of pastis”, tourist diversification began in 1940 with the purchase of the Méjanes estate in the Camargue, after the Vichy government’s decision to ban alcoholic aperitifs in excess of 16°.

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Le petit jaune, le blanc, le rouge, le rosé

e port de Saint-Pierre-les-Embiez est la première marina créée en France. Paul Ricard en est le propriétaire et le fondateur. En 1963, c’était une véritable nouveauté. Techniquement, le chantier aussi a été innovant : pour minorer les nuisances sur l’environnement marin, le port a été creusé à sec dans les anciennes salines pendant qu’une digue provisoire contenait la mer. Ces salines avaient été créées par les moines de l’Abbaye de Saint-Victor de Marseille en 1068. Le sel était le seul moyen de conserver les aliments, autant dire de l’or. Sur cette côte de Provence abrupte cet archipel en partie marécageux s’y prêtait. Pour embarquer la récolte, un petit port avait été aménagé. Il n’y avait pas de village. C’est Six-Fours, au XVe siècle, qui reprit ces salins et un de ses notables y planta des vignes. Le reste de l’île servait de pâturage, les bêtes ne risquant pas de s’en aller. En 1934, les dernières huit cents tonnes de sel ont été récoltées, avant l’abandon du site. BLEU + JAUNE = VERT

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Destination

Les deux couleurs fétiches du propriétaire, le bleu et le jaune, ont permis de faire de ce tas de cailloux et de marais un havre pour les marins et un sanctuaire de nature ouvert à tous. Car ici, c’est un site écologique exemplaire, prouvant si c’est nécessaire que le bleu et le jaune ensemble font du vert. Un peu fous de père en fils, les Ricard n’ont jamais lésiné sur leurs rêves. Ni sur ce qu’il faut faire pour les réaliser, depuis que le pasticchio, bricolé avec un alambic clandestin après l’interdiction de la sulfureuse absinthe, est devenu “Le vrai Pastis de Marseille” en 1932. Cet héritier assagi de l’absinthe qui “rend fou”, alcool « qui cachait ses 72 degrés dans la candeur d’une eau fraîche


LES EMBIEZ légèrement sucrée» (Marie-Claude Delahaye, Le Livre du Pastis, “Z” Editions), interdite en 1915, est né ici, en 1951, grâce à la loi qui autorisait les alcools à 45°. Surfant sur la frustration qu’avait fait naître la disparition de la mortelle “fée verte”, les marques se sont ruées sur cette occasion d’apporter à nouveau de la fraicheur au goût d’anis. Pernod fut l’un des premiers avec son “51” commémorant l’année de promulgation de la nouvelle loi et qui devint ensuite Pastis 51 affichant la recette « cinq volumes d’eau, un volume de Pernod ». Il y eut aussi le Casanis, qui affiche ses origines corses par le bandeau noué sur le front du Maure. Mais la saga la plus fameuse est celle de Ricard. L’histoire du Pastis est une partie flamboyante de celle du marketing et de la publicité. Avant la loi Evin de 1991, les marques d’alcool pouvaient s’afficher et parrainer des manifestations sportives. Ce fut l’occasion d’un débordement d’imagination pour accompagner les fêtes sportives populaires, notamment le Tour de France dont le Pastis, en tout cas pour les spectateurs, était un dopant autorisé. Paul Ricard alla même jusqu’à assurer ses livraisons en dromadaire alors que les transporteurs étaient en grève. Il en fit une campagne de publicité, utilisant l’animal comme symbole de la soif…

Le rosé (vin de plaisir aux arômes fruités), le blanc (vin aromatique aux notes d’agrumes) et le rouge (vin intense de cépage Merlot, à la robe rubis) sont amoureusement soignés par, Laurent Martinez le maître de chai. Ces vins peuvent se déguster à la cave du domaine, ouverte tous les jours en juillet/ août, sauf le jeudi. Une bonne idée est de faire escale aux premiers jours de septembre, au moment des vendanges.

LES VINS DES EMBIEZ

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Une bon

Domaine des Embiez Ile des Embiez 83140 Six Fours les Plages 04 94 10 65 20 dtarpi@paul-ricard.com Inscription dégustation: Tél. 06 09 11 69 55

Les Ricard ont aussi été des vignerons. Les premières vignes plantées sur l’île des Embiez l’ont été vers 1600. Lorsque Paul Ricard devient propriétaire de l’île en 1958, la vigne couvre dix hectares. Mais elle date de... 1901. Il replante tout. Depuis 1978 les vins y sont classés en AOC Côtes de Provence et Vins de Pays du Var. Aujourd’hui, l’île continue de produire bon an mal an cinquante mille bouteilles de rouges, blancs et rosés à partir des variétés typiques du Sud, le merlot, le cabernet sauvignon, le grenache, le cinsault, l’ugni blanc, le rolle, le syrah et le sauvignon blanc qui poussent sur des sols argilo-calcaires et schisteux. Certaines parcelles sont exposées aux embruns salés, d’autres soumises à la sécheresse ou aux vents, ce qui donne du caractère aux productions de l’île.

DEUX MÉCÈNES DE LA MER Si les gens de mer ont la réputation de ne pas lésiner sur les produits de distillation qui se marient si bien avec le sel des embruns, ce n’est pas le “petit jaune”, ni les cognacs ni les vodkas du groupe Pernod-Ricard qui nous arrêtent ici au pied du cap Sicié. La seconde couleur de l’étiquette porte l’amour de la dynastie Ricard pour la “grande bleue”, la faune et la flore des fonds comme la population navigant en surface. La fortune de l’un a largement servi la seconde. Les Ricard – Paul et par contagion son fils Patrick et une large part de la famille – ont été des mécènes de la mer.

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Destination


LA SEYNE-SUR-MER

V i l l e é ta p e d u ToUR dE FRANcE

à LA VoILE depuiS 2009

24 & 25 JUILLET

2013 10

www.la-seyne.fr


TOULON

Un port de plaisance très abrité, avec une ligne d’immeuble pour rempart, et un musée de la marine à ne pas rater.

TOULON DARSE-VIEILLE 43°07,1’ N – 005°55,7’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 42 27 65 www.maritime.var.cci.fr

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e qui surprend vu du bassin, c’est cette “barre” d’immeubles qui fait muraille le long du quai, autrement dite “la Frontale du Port”, décriée pour l’écran opaque qu’elle interpose entre ville et mer. C’est oublier qu’avant sa destruction pendant la seconde Guerre mondiale, il existait ici une autre ligne d’immeubles qui ne présentent pas la même homogénéité architecturale. Derrière, se trouve le vieux quartier chaud appelé Chicago aujourd’hui retapé. En restant sur le quai, un regard pour la statue de Cuverville (Néverlo par les Mocos) qui tend le bras vers le large et, au bout, le Musée de la Marine qu’il ne faut pas rater. Vous entrez dans le port de plaisance de la DarseVieille, très abrité, avec les quelques bateaux de pêche qui existent encore à Toulon.

A well-sheltered marina with a row of buildings for its rampart, and a must-see maritime museum.

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he most arresting sight from the basin is that “bar” of buildings forming a wall along the quay, called the “Forehead of the Port”, lambasted because it places an opaque barrier between the city and the sea. But that is forgetting the previous line of buildings that stood here before its destruction in WW2, and that one was not nearly as architecturally harmonious. Behind lies the old red-light district known as Chicago, nowadays revamped. Stay on the quays and take a glance at the Cuverville’s statue (a pun meaning “Backsideto-town”, or, Néverlo, “Nose-to-sea”as the “Mocos” (Toulon residents) refer to it) stretching his arms out to the open sea. At the end is the Maritime Museum which is unmissable. You enter the well sheltered Darse-Vieille marina with some of the few fishing boats Toulon still has.

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ans la rade de Toulon, vous avez le choix pour faire escale : Saint-Mandrier, à l’entrée, le premier abri, port facile, aimable et silencieux ; Toulon Darsevieille, en plein centre d’une ville qu’on n’arrête pas de visiter (voir l’article en pages suivantes) ; la Seyne-sur-Mer, tout au fond de la rade, ancienne cité de chantiers navals qui a réussi sa reconversion. De n’importe lequel de ces trois ports, grâce à un système de bateaux-bus fréquents, rapides et pas chers, vous pouvez à tout moment et fort tard dans la nuit (vers une heure du matin) vous rendre dans n’importe lequel des autres si l’envie vous en prend. C’est pourquoi l’escale de Toulon est à prendre comme un ensemble avec trois balcons qui sont autant de points de vue sur cette rade unique en Méditerranée française.

Découverte : coquillages et poissons du Lazaret

QUARANTAINE À LA BAIE DU LAZARET

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Destination

La navette pourra vous conduire vers un quatrième site, la baie du Lazaret. Cette baie n’a pas toujours existé et la rade de Toulon n’a pas toujours été fermée. Cépet a été une île jusqu’au milieu du XVIIe siècle quand s’est formé l’isthme qui réunit maintenant la Seyne à Saint-Mandrier et porte maintenant, côté large, la plage des Sablettes et un agréable restaurant pieds-dans-le-sable. Au fond, Port Pin-Rolland. C’est un port de plaisance récemment équipé pour les unités de faible tirant d’eau, une large cale de mise à l’eau des «transportables» et un grand parking gardé de stockage des remorques. C’est aussi une très grande et très moderne zone technique de plaisance capable d’accueillir de grands yachts. Devant, un mouillage organisé permet à des bateaux de taille moyenne – dont de magnifiques F40 – trouvent place dans cette baie tranquille qui était autrefois, comme son


TOULON Le bateau-bus pourra vous déposer tout près du chapiteau de l’école du cirque et à deux pas de la plage des Sablettes, là où se trouvent aussi, côté rade, les mas des aquaculteurs et conchyliculteurs du Lazaret, regroupés dans des petits bâtiments récents. LES COQUILLAGES DE CÉLINE Le plus visible s’appelle le Ponton. C’est aussi un restaurant de fruits de mer et tapas froids avec une très belle terrasse sur la baie, au milieu des barques et des filets. Céline Fraissard, la maîtresse des lieux, y sert cinquante couverts par jour, tous les jours du 15 juin au 15 septembre, et vendredi et samedi le reste de l’année. Attention, c’est souvent complet ! Dans ce cas, vous pourrez toujours emporter un plateau à bord (voir les coordonnées dans l’encadré en marge). Au milieu du plan d’eau, la cabane rose et blanche sur pilotis est la sienne. Autour, les superstructures métalliques qui portent les cordes où poussent les moules et les huîtres qu’elle y élève. Élevage ! Il faut nuancer car ici – les avis divergent sur les causes – les coquillages ont du mal à pousser. Pas possible d’y faire grandir moules ou huîtres à partir de naissains. Ici, les coquillages sont simplement «finis». Pour les huîtres, une immersion en «poches» pendant deux à quatre semaines suffit à donner une saveur propre au bassin : à raison d’une moyenne de 15 litres filtrés par huître et par heure, un mois au Lazaret fait passer plus de cinq mille litres de cette eau nouvelle dans le mollusque bivalve servi dans notre assiette. PROVENANCE BOUZIGUES ET CARTEAU Celles que Céline sert au Ponton ont été achetées dans le bassin de Thau, près de Sète, à l’âge adulte, transportées à Toulon et immergées. Pour ceux qui connaissent bien les huîtres de Bouzigues, la différence est saisissante. Moins salé, plus doux, plus facile d’accès pour les conchylivores débutants. Tant mieux, la diversité exerce nos palais. Du coup, grâce à cet affinage, la “Bouzigues” peut devenir une “Tamaris”. Les producteurs du Lazaret sont en train de mettre au point un cahier des charges pour un label de qualité Tamaris et faire reconnaître la spécificité de l’affinage à Toulon. Le risque est la dépendance envers les cours de l’huître de la Bouzigues adulte. À cause d’une mortalité encore inexpliquée, les cours ont presque triplé en dix ans. Ce voyage régulier à Sète pour en rapporter les 15 tonnes

nom l’indique, une zone de quarantaine pour les bateaux soupçonnés d’être porteurs de maladies contagieuses. Le quartier Pin-Rolland doit son nom à un pin abattu par la foudre en 1845 sur la très grande propriété de JeanBaptiste Rolland. Cet arbre, immense, servait d’amer aux navigateurs. CABANES COLORÉES SUR PILOTIS Côté Est, c’est Saint-Mandrier, ses bateaux de la marine échoués pour servir de protection et de zone d’entraînement pour les grandes écoles de la Royale. Côté Ouest, c’est la corniche Michel Pacha, avec ses superbes villas du XIXe siècle. Et, au centre, c’est chose curieuse que de voir, au milieu de la baie, ces cabanes sur pilotis, aux couleurs vives, et ces parcs aquacoles et conchylicoles qui semblent incongrus dans cette rade où manœuvrent les navires-immeubles de croisière, les cargos et les bateaux de guerre. Bien au contraire, les eaux de la baie du Lazaret, contrôlées par l’Ifremer dont une base importante se trouve à la Seyne, sont, pour l’essentiel, aptes à l’élevage des coquillages en catégorie “B” (passage obligatoire en bassin de décantation), certains même, plus près de l’entrée de la rade, en catégorie “A”.

annuelles, Céline en a l’habitude. Son affaire est familiale mais il fallait des diplômes pour exercer. Le lycée de la Mer à Sète a permis de les obtenir, celui de la Seyne n’ayant pas la corde conchyliculture à son arc. Quant aux moules, Céline les achète à Carteau (Port Saint-

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ne peut être obtenu si l’ensemble de la zone n’est pas bio. Quoi qu’il en soit, l’idée est de respecter les normes bio en ne forçant pas sur le métabolisme du poisson : en grandissant plus lentement, il est moins gras, il résiste mieux aux maladies et sa chair est de meilleure qualité. Quant à la densité de poissons dans les cages, la norme “bio” habituelle est de 25 kilos par mètre cube d’eau. Mais ici, dans une baie un peu loin des eaux vives du large, Olivier se limite à 10 kilos.

Louis-du-Rhône), à la moitié de leur maturité car, contrairement aux huîtres, elles acceptent, à ce stade, de finir leur croissance au Lazaret. La production annuelle atteint 100 tonnes. Juste à côté du Ponton, nous rencontrons Olivier Otto. Lui, c’est les poissons. Loups et daurades d’élevage. Mais aussi, chose rare, le maigre. Ce poisson, originaire du golfe de Gascogne, est réputé pour être un “poisson chantant” à cause de son cri que les pêcheurs peuvent entende depuis leur barque. Très peu gras, ce poisson à la chair ferme peut atteindre deux mètres de long. Mais, ici, on le commercialise à deux kilos et demi. Comme Céline, Olivier se fournit sur le bassin de Thau, à Mèze, berceau de l’aquaculture marine. De l’entreprise pionnière Les Poissons du Soleil, proviennent ses alevins. La nourriture pour ces trois poissons carnivores est achetée à de grandes entreprises françaises de Provence : uniquement de la farine de poisson additionnée de céréales, pas d’OGM. Ici, pour les loups, l’élevage dure trois ans pour atteindre la taille-portion de 300 grammes. Pour les daurades, il ne faut que deux ans. Le maigre, lui, est vendu après trois ans. Mais les trois espèces ne sont pas strictement calibrées à la norme de 250 / 300 grammes. Selon les clients, la taille vendue varie de 200 grammes à un kilo. LES POISSONS D’OLIVIER

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Une bon

La Jetée Restaurant de plage 71 avenue de la Jetée Saint-Elme 83500 La Seyne-sur-Mer 04 94 94 18 07

Destination

Pollution ? Olivier reconnaît volontiers que les poissons, comme les coquillages, par leurs déjections, finissent par créer une couche de sédiments. Mais, ajoute-t-il « avec la faible densité que nous avons ici et l’effet venturi que les cages créent en accélérant le courant, ce phénomène est très peu important par rapport à ce qu’apportent les poissons au Lazaret, du point de vue écologique et économique». Autrefois, avant que l’isthme n’ait été bétonné, les vagues passaient par dessus les jours de tempête et l’eau du large infusait en permanence vers la baie à travers le sable et les marais. Aujourd’hui, on ne compte plus que sur les courants intérieurs pour renouveler l’eau de la baie, devenue un peu plus verte qu’auparavant. L’entreprise d’Olivier, Cachalot Scea, est partie de l’amour pour la pêche d’une bande de copains pêcheurs à la ligne. Ils avaient pris l’habitude de venir dans les cabanes sur pilotis, avec leurs barques, et de faire cuire sur place leurs prises. Aujourd’hui, les pêcheurs à la ligne continuent de participer, grâce à leur connaissance des poissons, de surveiller et contrôler les installations, ajoutant  leur savoir-faire  aux

Label bio ? Ici, on parlerait plutôt d’aquaculture “raisonnée” comme cela existe en agriculture. Mais l’idée est que les six producteurs du Lazaret (un seul est encore réticent) se lancent ensemble dans ce type d’élevage car le label


TOULON observations des plongeurs. Car la surveillance est indispensable. Ces poissons c hasseur s aux d e n t s   a cé ré e s savent venir à bout des filets qui les emprisonnent. Et, précise Olivier, «ces animaux-là sont intelligents, ils se relaient pour ronger le filet, tous au même endroit». Avec 100 tonnes produites bon an mal an, Olivier fournit trois hypermarchés “qui ont appris la poissonnerie“, quelques supermarchés qui font des animations “mer”, quatre grossistes, des restaurants. Rien ne part en congélation.

Alors, coquillages ou poissons, votre prochaine escale pourra être sous le signe des produits de la mer et d’une belle découverte qu’est cette baie du Lazaret. Dans les parcs, les cordes sont tendues à bloc. Cinquante kilos de moules serrées forment de grands serpents noirs. Dans les bassins d’élevage, les cages se succèdent avec leurs mailles et leurs poissons de plus en plus gros, faisant frénétiquement bouillir l’eau dès qu’ils voient un visiteur qui pourrait leur apporter à manger. On aimerait rester là, devant une cabane, pour déguster des coquillages ou faire griller un loup. Profiter du silence et de la vue, d’un côté sur Toulon et le mont Faron, de l’autre sur la corniche Pacha et le Cap Sicié. On rêverait de venir là en bateau, de s’amarrer à un ponton et de dîner sur place à cet endroit privilégié, comme dans tant de beaux endroits touristiques du monde, Sri Lanka, Thaïlande, Cachemire, Bénin… Mais, comme les virus tuent les huîtres, les règlements tuent parfois les rêves.

La vieille ville “made in mare nostrum”

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êtes arrivé dans la Darse Vieille, à cette capitainerie de village, sympathique après tant de lieux d’arrogance plaisancière. Et là, de votre place, pas loin d’un port de pêche encore plus modeste (quai du Parti !), le spectacle est étonnant. Ce que vous avez vu en premier pendant la longue navigation d’approche, sont les monts Faron et Coudon, deux massifs calcaires qui dominent du haut de leurs quelque 550 et 700 mètres respectifs. Le Coudon est, certes, le plus haut, mais à la sortie est, vers Hyères. Ici, on lui préfère le Faron, dossier de ce grand trône géologique sur lequel la ville est assise. Royale. Les maisons sont parties à l’assaut de ses pentes depuis longtemps. On les comprend, la vue y est superbe. Contrechamp de ce que vous avez contemplé pendant une heure de votre poste de barre, le panorama sur la rade mérite que vous mettiez dans vos projets de prendre le téléphérique. Un tour sur la corniche Marius Escartefigue s’impose, rien que pour le nom, trop beau pour être vrai. Savez-vous qu’un projet fou voudrait faire venir le téléphérique jusqu’eu centre-ville, même jusqu’au port ! On adorerait.

et le musée de la Marine symboles de la vocation militaire séculaire de cette ville-port et port-arsenal. Mais c’est une autre histoire. Arrêtons-nous au quai d’honneur, non pas pour regarder les quelques yachts – qui se pavanent ici moins qu’ailleurs – mais pour jeter un œil à la statue Le Génie de la Navigation qui montre du doigt un point… quelque part vers la mer. Sculpté par le natif Louis Joseph Daumas, il honore les marins en général et en particulier le commandant de la flotte en Méditerranée en 1895, le vice-amiral de Cuverville. Facétieux, les Toulonnais, en raison de la position et du fessier dénudé de l’Homme de Bronze, l’ont surnommée aussi bien Néverlo que Cuverville… Si vous traversez la barrière d’immeubles et la rue pour mettre cap au nord, vous arrivez à Chicago. C’est aujourd’hui un bien grand mot tant ce quartier n’est plus que l’ombre de ce qu’il était : le Red Light district, comme l’appelaient les matafs américains en goguette. C’était un vrai vivier de filles à matelots où les gens honnêtes ne mettaient pas les pieds. Aujourd’hui, subsistent encore provisoirement quelques boîtes borgnes et quelques sex-shops mais la rénovation de ce typique quartier, miraculeusement épargné par les bombes, fait partie des

PASSEZ LA FRONTALE DE MAILLY photo : Eleassar

L’autre étonnement – parfois répulsion pour qui aime les horizons dégagés – est une autre barrière minérale qui barre le paysage : la « frontale De Mailly », les immeubles en muraille quais de la Sinse et de Cronstadt, donnant à ce port ce look suranné de Crise du Logement de l’aprèsguerre (1953). Sans doute un jour les trouvera-t-on beaux. Pour l’instant, ils rappellent que Toulon a été rasée à 45% par les bombardements de la seconde guerre mondiale et ont le mérite d’isoler la darse du bruit de l’avanue de la République et faire du port une zone piétonne. Au bout du quai se trouvent les arsenaux, la Préfecture maritime

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efforts de la ville qui se pomponne le museau pour plaire à un autre genre de touristes… Ce “carré du port” est le noyau originel, la première ville moyenâgeuse. Pour une balade plus épicurienne, depuis les quais de la Sinse et de Cronstadt qui ferment le port vers la ville, passez par la première brèche dans la barre d’immeubles et partez à la découverte de la vieille ville. Là, vous arrivez dans un autre monde, celui des villes de la Méditerranée : un mélange de peuples, un cocktail de couleurs et de saveurs, de sourires et de rumeurs, de mots parfois inconnus, de produits “made in Mare Nostrum”. Remontez le cours Lafayette, c’est tout les matins jour de marché (sauf lundi) et laissez cette ville vous prendre par la main pour vous guider dans une Provence qui ne ressemble pas aux cartes postales, plus belle, plus vivante, plus vraie. LE TCHÉ-TCHÉ DE MÉSOPOTAMIE Les miels de toutes les fleurs du Sud, les huiles d’olive de toutes les variétés, les vins de tous les crus et de toutes les robes, les savons et les produits de beauté naturels pour toutes les peaux et tous les goûts. Toutes les cuisines, tous les ingrédients se sont retrouvés à Toulon, ville magnifiquement interlope. Les équipages du monde entier y ont apporté leurs spécialités et leurs produits. Parmi eux, le pois chiche. Le pois chiche (du latin Cicer devenu Cece – prononcer tché-tché – en italien, qui a donné Chi-chi) est une fève antique typiquement méditerranéenne, dont on retrouve mention en Mésopotamie sous le nom de hallaru 3 000 ans avant J.-C. Elle a conquis ensuite le monde occidental et on en retrouve le nom latin déformé en Allemagne (Kichererbse) en Grande-Bretagne (Chick pea)

et aux pays-Bas (Kikkerwt). Bien avant l’arrivée de l’arachide et du maïs, la fève était aussi servie grillée et des marchands ambulants romains en vendaient comme du pop-corn ou des cacahuètes lors des représentations théâtrales. À Toulon, elle a donné la Cade, galette de farine de pois chiches. On retrouve la recette sous le nom de Socca à Nice et de Panisse à l‘Estaque. La Cade toulonnaise se déguste en apéritif ou en entrée, et se mange chaude, salée et poivrée. La Cade, deux fois centenaire, est arrivée à Toulon avec les charpentiers génois amenés par les armées napoléoniennes pour travailler dans les chantiers navals. Ils y ont fait le commerce de la Cade, préparée dans les nombreux fours à bois alimentés par les déchets des chantiers. Il n’en reste aujourd’hui, à Toulon, que deux exemplaires, place Hubac et rue Charles Poncy. Son nom, la Cade toulonnaise le doit au mot italien “­caldo” qui signifie “chaud” et aux femmes qui, dans les rues du quartier populaire de Besagne, un plateau de cades déposé sur la hanche, haranguaient la foule en criant « Caldo ! ».

Les marins malins, curieux, gourmets, préparent leurs escales avec l’appli

Cabotages

Destination

Disponible avec l’appli Navionics® en App Store et www.cabotages.fr


RAIMU Le Marseillais de Toulon En 1958, Orson Welles rend visite à Pagnol pour ‘‘voir Mr Raimu’’ qu’il considère comme le plus grand acteur de tous les temps. Mais l’écrivain-cinéaste lui apprend la mort de Jean Auguste Muraire, alias Raimu. Et Orson Welles, l’immense figure du cinéma, se met à pleurer. Lui qui avait mis en émoi toute l’Amérique vingt ans plus tôt en adaptant pour la radio La Guerre des Mondes de H.G Wells, ne rencontrera pas l’acteur français. L’auteur involontaire du canular du siècle qui jeta sur les routes un million de New-Yorkais paniqués par une invasion d’extraterrestres, repartira avec ses projets. Déplacer les foules, ces deux géants savaient faire. On imagine ce que leur association aurait pu donner... En 1900, le jeune Auguste qui n’a que dix-sept ans, s’appelle Rallum et commence sa carrière comme comique troupier dans les bars à matelots de Toulon. Il multiplie les petits boulots : croupier à Aix les Bains, souffleur au théâtre de l’Alcazar de Marseille. Puis il devient, sous le nom de Raimu, une vedette régionale, grâce au répertoire de chansons de Polin. Mais c’est grâce à Félix Mayol, un autre Toulonnais qui le fait “monter” à Paris que la chance lui sourit, dans les revues du Concert Mayol mais aussi aux Folies Bergères, au Casino de Paris... En 1929 c’est la consécration, au Théâtre de Paris avec Marius, une œuvre marseillaise où il incarne César, un personnage haut en couleur, né sous la plume d’un autre exilé de la Provence, Marcel Pagnol. Adapté à l’écran par le metteur en scène américain Alexandre Korda, Marius devient un des premiers succès du cinéma parlant français. Raimu tourne ensuite Fanny sous la direction de Marc Allégret et César réalisé par Pagnol, bouclant ainsi l’inoubliable Trilogie marseillaise. C’est à Toulon, sa ville natale, dans la douce fraîcheur d’une petite place homonyme que Raimu nous “fend le cœur”, éternellement. On s’y réjouit de la reproduction en bronze de la célèbre partie de cartes, liée à jamais au Bar de la Marine de… Partie de cartes qui faillit ne jamais exister, supprimée par son auteur qui la jugeait trop en gueule. En cachette, Raimu et ses comparses dont le caméraman, répétèrent la scène et l’interprétèrent sous les yeux de Pagnol qui, pour seul commentaire, tracera dans la loge de son acteur fétiche quelques mots qu’il considérera comme le plus beau compliment “Raimu tu es un génie” !

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La ville aux cent fontaines

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a présence de sources nombreuses et abondantes sur le site de Toulon a été l’une des raisons majeures qui ont attiré ici des peuples depuis la nuit des temps. Des fouilles archéologiques ont montré qu’une importante ville romaine avec environ trois mille habitants y disposait de plusieurs aqueducs, de thermes, de bains publics et de multiples fontaines. À toutes les époques, de nouveaux travaux ont été entrepris pour alimenter en eau douce une population de plus en plus nombreuse. Aujourd’hui, au coeur de l’été provençal, le promeneur peut profiter de la fraîcheur des fontaines, à tous les coins de rue, sur toutes les places. Des vestiges romains aux architectures classiques, baroques ou néo-grecques, du style républicain du XIXe siècle aux fastes de l’Empire, il y en a pour tous les goûts. Seul celui de l’eau est unique. L’histoire de ce réseau d’adduction d’eau vaut la peine d’être racontée : ce n’est qu’en 1882, à peu près deux mille ans après l’arrivée des Romains, qu’un système moderne - et surtout sain - a été mis en place pour apporter l’eau potable aux Toulonnais. Très longtemps, les points d’eau sont restés des objets strictement utilitaires. Personne n’avait le souci de leur attribuer une quelconque valeur esthétique. Il a fallu attendre le XVIIIe siècle pour que des sculpteurs en fassent des oeuvres d’art. Toulon en comptait de nom-

breux qui travaillaient pour la Marine Royale, notamment pour confectionner les figures de proue et les enjolivures des navires du roi. Toulon vit ainsi fleurir de multiples fontaines sculptées en même temps que la ville s’embellissait. La seconde guerre mondiale va provoquer de graves dégâts, mais, dans les années 1980, la ville décidera de restaurer tout ce qui pouvait encore l’être de ce patrimoine original.

L’Œnothèque des Vins de Bandol regroupe l’ensemble des Domaines et Caves de notre vignoble. Véritable vitrine de l’Appellation d’Origine Contrôlée Bandol, vous y trouverez toutes les informations sur nos vins. Vous pourrez les déguster, les acheter et bénéficier des conseils de nos sommeliers.

Située à l’entrée de Bandol, en face du casino de jeux. Parking à 50 m www.vinsdebandol.com

Destination

DEGUSTATION – VENTE Place Lucien Artaud 83150 Bandol 04 94 29 45 03


L’association Métisète présente Théâtre de la Mer - Sète - 21h00 2 août : Disco funk revival

NINA ATTAL . CHIC feat. NILE RODGERS 3 août : Salsa Y Cumbiamuffin

MARACA . SERGENT GARCIA 4 août : Blues du Niger au Mississipi

20 juillet > 8 août 17 édition ème

Communes du Bassin de Thau et Sète - 20h30 20 juillet, Poussan :

LINDIGO . BIO RITMO 27 juillet, Balaruc-les-Bains :

NADARA GYPSY BAND JUPITER & OKWESS INTERNATIONAL

BASSEKOU KOUYATE TAJ MAHAL 5 août : Noite brasileira

CRIOLO JOÃO BOSCO 6 août : Les orientales

LE TRIO JOUBRAN RACHID TAHA 7 août : Atomik balkanik

ZOREOL . CHICHA LIBRE

RODINKA GORAN BREGOVIC

1er août, Sète, La Ola - Route des plages :

8 août : Mali Mali

28 juillet, Marseillan :

DJ RKK & Emile Omar + live guest Brasil Informations et billetterie : 04 67 74 48 44 - www.fiestasete.com Fnac, Carrefour, Géant, www.fnac.com, OT Sète et points de vente habituels

YACOUB AFUNI ROKIA TRAORE


Hyères Hyères-les-Palmiers n’a rien à voir avec sa zone portuaire : c’est ancien, beau, authentique. Une visite s’impose à l’escale.

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e port de Hyères-les-Palmiers présente l’intérêt d’être un grand port moderne et pratique sur un exceptionnel plan d’eau où les îles d’Or sont une destination pour la journée. Inconvénient, il est loin de la ville. Et pourtant, cette ville de Hyères-les-Palmiers mérite un trajet en bus (attention aux embouteillages de fin de journée !). La cité porte les marques d’une vie dans l’Antiquité avec la Via Olbia, au Moyen-Âge avec un château, des remparts et des portes à grille, mais le plus caractéristique est la présence du XIXe siècle à tous les coins de rue qui font ressembler Hyères à un décor d’opérette : des villas d’architecture folle comme les curistes Anglais, les princes d’Europe de l’Est et autres excentriques riches qui passaient l’hiver ici.

Hyères-les-Palmiers has nothing in common with its harbour area: it is old, beautiful and authentic. You simply must visit during your stopover.

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he advantage of the harbour in Hyères-les-Palmiers is that it is a large, practical modern port in an exceptional body of water from where you have to make a daytrip to the Iles d’Or. The disadvantage is that the harbour is far out of town. Still, it is worth catching the bus to the town of Hyères-les-Palmiers (just be wary of the evening rush hour). The town bears the hallmarks of life in ancient times with the Via Olbia, and the Middle Ages are seen in the castle, ramparts and grilled gates, but the 19th century defines Hyères the most, giving it the look of an operetta on every street corner: villas built in folly style like the English spa patients, princes from Eastern Europe and other wealthy eccentrics who came here for the winter.

HYERES – PORT ST PIERRE 43°04,7’ N – 006°09,5’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 12 54 40 www.ville-hyeres.fr HYERES – LA CAPTE 43°03,8’ N – 006°09,1’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 58 02 30

La ville d’oranges, de palmes et de sel

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u-dessous de la fenêtre, commencent les jardins d’Hyères qui seraient beaucoup mieux nommés une forêt d’orangers, de grenadiers, de citronniers ; la vue se termine par la mer où l’on distingue parfaitement les bâtiments dessus : elle est à perte de vue sur la gauche, mais vis à vis sont les îles de Port-Cros et autre qu’on nomme vulgairement les îles d’Hyères » écrivit Diane de Vichy, une des premières hivernantes à venir guérir sa “maladie de poitrine”, pendant l’hiver 1767-1768. Avant la Révolution, l’arbre fruitier est le symbole d’Hyères : figuier, amandier abricotier, grenadier, mûrier… En vous promenant aujourd’hui dans Hyères, vous serez frappés par la quantité d’orangers qui poussent sur les trottoirs. L’oranger, longtemps cultivé pour l’essence de sa fleur, l’est devenu pour son fruit au XVIe siècle. En 1543, sur 200 000 oranges emportées sur les tartanes de la madrague de Giens vers Marseille et à dos d’âne pour regagner Lyon, 150 000 provenaient de Hyères et de Toulon. En 1564, quand Hyères reçut la visite de Catherine Médicis, on en recensait déjà vingt espèces. DES ARBRES VERS LES JARDINS

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Le jardin Filhe, actuel Park Hôtel, en possédait 20 000 pieds. La culture déclina à partir de 1840 alors que Hyères s’attachait plus à ses palmiers. En 1861, ses boulevards en furent ornés et, en 1881, on proposa d’ajouter le palmier au nom de la ville. Mais Hyères-les-Palmiers ne sera jamais officialisé, malgré son million de Phoenix canariensis. Mais, si l’oranger et le palmier se voient, la vigne, le blé et l’olivier assurent l’économie locale depuis le XIIIe siècle. En 1788, Achard, dans sa Description historique des Villes écrit : « le sol est fertile et les productions précoces. On y recueille dès les premiers jours de mars des petits pois, des fèves...»


Hyères

En 1810, le sénateur Comte de Neufchâteau crée la Société d’horticulture qui regroupe six propriétaires. Les travaux d’assèchement des marais, source de paludisme, sont entrepris en 1824 et ouvrent de nouvelles terres à l’agriculture. Le Roubaud est détourné de son cours et les eaux du Gapeau sur une dizaine de kilomètres irriguent la plaine agricole. En 1870, orangeraies et oliveraies sont reconverties en jardins horticoles. À la fin du XIXe siècle, Hyères est reliée à Londres par le train. Les fleurs coupées sont du voyage. En 1922, malgré la perte des domaines de la Crau, de Carqueiranne et La Londe, Hyères restait le premier centre agricole et horticole de la région.

Le vin d’orange de Colette « Il date d’une année où les oranges, du côté d’Hyères, furent belles et mûries au rouge. Dans quatre litres de vin de Cavalaire, sec, jaune, je versai un litre d’Armagnac fort honnête, et mes amis de se récrier : « Quel massacre ! une eau de vie de si bon goût ! la sacrifier à un ratafia imbuvable !...» Au milieu des cris, je coupai, je noyai quatre oranges coupées en lames, un citron qui pendait le moment d’avant, au bout de sa branche, un bâton de vanille argenté comme un vieillard, six cent grammes de sucre de canne. Un bocal ventru, bouché de liège et de linge, se chargea de la macération, qui dura cinquante jours ; je n’eus plus qu’à filtrer et mettre en bouteilles.

LE SEL DES TERRES BASSES Entre Hyères et la mer, une autre exploitation occupe les terres basses, les marais très fortement convoités par les promoteurs immobiliers mais aujourd’hui protégés par le Conservatoire du Littoral. Le sel a été exploité sur la presqu’île de Giens jusqu’en 1945, une des trois fortunes passées de Hyères, avec les céréales et le ferrage (fourrage), et celle de l’olivier. Les Vieux Salins, 350 hectares exploités depuis l’Antiquité, ont connu une grande période de prospérité du MoyenÂge et c’est à ses aires salantes, aerae, que la ville doit son nom. Elles appartenaient alors à l’Abbaye de Montmajour avant leur acquisition à la fin du XIe siècle par la famille de Fos, seigneurs d’Hyères. En 1259, quand Charles Ier d’Anjou mit la main sur les “grands ports du sel”, Hyères était le troisième centre de production de sel en Provence, avec Fos et Berre. Son commerce s’établissait, quasi exclusif, avec Gênes et durera jusqu’au XVIe siècle quand il cèdera à la concurrence du Languedoc et de l’Espagne. Le salin des Pesquiers, somptueuse mosaïque de 550 hectares, est embrassé par le double tombolo. Une œuvre d’art paysager plus tardive, conçue en 1848. Dévolu à l’activité piscicole, le site des Pesquiers fut transformé en salin par Emile Gérard. L’activité employa jusqu’à 500 sauniers et quelques dizaines seulement à la fin du XXe siècle. La Société méridionale Salinière, puis la Compagnie des salins du Midi dirigèrent cette exploitation jusqu’en 1966. L’exploitation a définitivement cessé en 1995. À visiter à l’escale.

Si c’est bon? Rentrez seulement chez vous, parisiennes, à la fin d’un dur après-midi d’hiver ou de faux printemps, cinglé de pluie, de grêle, fouetté de soleil pointu, frissonnez des épaules, mouchez-vous, tâtez votre front, mirez votre langue, enfin geignez : « je ne sais pas ce que j’ai...» Je le sais, moi. Vous avez besoin d’un petit verre de vin d’oranges. » (in Prisons et Paradis)

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Une bon

Le Haut du Pavé Restaurant Place Massillon 83400 Hyères Tél. 04 94 35 20 98

Colette, rêve d’Egypte, 1907 - L. Reutlinger

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PORQUEROLLES

Porquerolles est l’une des belles escales de la côte. Une merveille hors-saison, très fréquentée l’été. On peut réserver en Janvier pour la saison estivale.

PORQUEROLLES 43°00,2’ N – 006°12,0’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 58 30 72

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15 milles de Toulon, venant par la Petite Passe, doublés dans un bel éblouissement le Petit et le Grand Ribaud puis le Petit Langoustier, le port de 600 places accueille les plaisanciers sous la double vigilance du puissant Fort Sainte Agathe et de sa jolie capitainerie de bois. Avant d’entrer dans le port, un dernier coup d’œil loin sur bâbord vers le cap des Mèdes, dentelle de cailloux en équilibre. Au-delà s’ouvre la Grande Passe vers Bagaud, Port Cros et le Levant qui boucle l’archipel : Insulae Areaum, les Îles d’Hyères. L’île a été acquise pour sa plus grande partie par l’État en 1971 et placée sous la protection du Parc National de PortCros et du Conservatoire Botanique National Méditerranéen de Porquerolles. En 2010, il a été agrandi et modernisé.

Porquerolles is one of the loveliest ports of call on the coast. It is marvellous in low season and heavily visited in summer. Reservations for the summer season are accepted in January.

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ifteen miles from Toulon, via the Small Channel, the Petit and the Grand Ribaud and then the Petit Langoustier islands form a dazzling line-up with the 600-berth harbour which welcomes boaters under the dual surveillance of the powerful Sainte Agathe fort and its pretty wooden harbour master’s office. Before entering the port, glance one last time to portside towards Cap des Mèdes, a symmetrical filigree of rocks. Beyond, the Great Channel opens up towards Bagaud, Port-Cros, and Le Levant, which completes the archipelago of the Insulae Areaum: the Hyères Islands. The majority of the island was acquired by the State in 1971 and placed under the protection of the Port Cros National Park and the Conservatoire Botanique National Méditerranéen de Porquerolles. It was to be expanded and modernised in 2010.

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vLes trois domaines de la plus grande île d’Or

ituée pile sur le 43e parallèle – à hauteur de la pointe du cap Corse – Porquerolles est l’escale la plus méridionale de la côte provençale. Protégée des vents les plus violents, les plages et les criques de sa face nord offrent au navigateur d’incomparables mouillages forains. Mais, attention, ces “eaux caraïbes”, bercent une côte escarpée, pas toujours accore, quasiment inabordable sur sa face sud. En revanche, pour ceux qui savent pêcher, cette côte est le site de pêches très techniques et très productives. Un ami italien de l’équipage de Cabotages, Franco Pezzillo, est connu dans tout le port pour les denti énormes qu’il arrive à sortir et qu’il fait partager à ses voisins de ponton et à la capitainerie. Il prend d’abord des encornets dont il se sert pour prendre des orphies qu’il garde vivantes et “fait nager” à la bonne vitesse, la bonne profondeur et… miracle ! FACE SUD, FACE NORD

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Destination

Si, côté sud, on arrive très vite sur des fosses marines, côté baie d’Hyères on reste sur le plateau continental avec des fonds sableux d’une cinquantaine de mètres. Les bâtiments qui ont sauté sur des mines lors de la seconde guerre mondiale y sont autant de sites de plongée. Les autres navires naufragés, en bois, garderont leur mystère. Ils ont débarqué jadis leurs lots de moines, de Sarrasins ou de pirates, car chacun en son temps a abordé ici pour construire, prier ou piller, quelquefois pour y déposer… un trésor. Comme les Grecs y ont laissé le plus beau, en y plantant la vigne. L’île de Porquerolles a trois domaines viticoles : le Domaine de l’Ile, la Courtade, Perzinsky. Tous sont liés à l’histoire commune de cette île, la plus grande des îles d’Or. F­ rançois


PORQUEROLLES

Une bon

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La Plage d’Argent Restaurant de plage Chemin du Langoustier 83400 Porquerolles Tél. 04 94 58 32 48

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suivi et on se trouvait devant une surproduction. La maison Coq fut chargée de monter un alambic, à la suite des écuries. En 1932 on devait distiller 7 000 hectolitres de vin que l’on envoya à l’État par pipes de 200 litres embarquées sur les tartanes. Monsieur Sorin fut chargé de la gestion de cette distillation. D’autre part on créa un excellent marc, vieilli en fûts et mis en bouteilles dans des platels ainsi appelés parce que applats en plateau, ainsi qu’une liqueur de myrte ».

Fournier, né dans une famille modeste en Belgique en 1857 avait fait fortune au Mexique. En 1912, il acheta l’île de Porquerolles pour son épouse, plus jeune de 30 ans. Il s’y installa avec elle début octobre, pour leurs premières vendanges. Leur fille Leila écrira plus tard dans son livre UN BEAU CADEAU DE MARIAGE Une Ile en cadeau de Mariage : « La plaine Notre-Dame est défrichée en 1915 pour permettre d’y planter la vigne. De 1926 à 1930, on défonça et on replanta encore dans la plaine de la Courtade. Il (ndlr : F. Fournier) n’était pas satisfait de la qualité de cette vigne et avait fait venir un expert de La Londe, qui avait conseillé un nouveau cépage. Le vignoble, en 1930, produisit entre 10 000 et 12 000 hectolitres de vin. On décida alors de construire un nouveau hangar pour la mise en bouteille plus moderne. Doria, très artiste, fit le dessin des étiquettes. Le service commercial n’avait pas

Oursins : attention protégés ! Le corail est consommé cru, parfois accompagné d’une goutte de jus de citron, de sel et pourquoi pas d’échalotes. Il peut aussi être ajouté dans une soupe de poissons, une omelette ou une sauce, telle que la sauce à la béchamel et à la crème fraîche que l’on nomme Oursinade. Mais attention, pour les puristes, l’oursinade n’a rien à voir avec cette sauce, c’est une dégustation festive d’oursins !

Dans les réserves sous-marines, le ramassage des oursins est interdit toute l’année, ailleurs la période de pêche s’étend du 1er octobre au 30 avril afin de permettre à l’espèce qui est menacée de se reproduire. La pêche est très réglementée. En période de pêche, les amateurs peuvent prélever quatre douzaines d’oursins par personne s’ils pêchent à pied, mais une douzaine seulement s’ils pêchent au large, quel que soit le nombre d’occupants du bateau. Les professionnels, eux, ne sont pas limités. Appelé Châtaigne de mer ou Hérisson de mer, l’oursin est un régal pour les amateurs de goût iodé qui apprécient ses saveurs à la fois amères et sucrées. La partie consommable de l’oursin sont les cinq glandes sexuelles, les gonades. Il s’agit en fait de ce qu’on appelle communément corail. Si vous décidez d’acheter des oursins, savez-vous les ouvrir ? Utilisez un couteau ou un ciseau à partir de la bouche (la zone molle dépourvue de piquants) jusqu’à mi-hauteur. Pensez, pour ne pas vous blesser, à utiliser des gants ou un torchon plié. Il faut ensuite enlever l’appareil digestif afin d’enlever le corail. Comment savoir si un oursin est frais? Un oursin frais doit avoir des piquants durs et bien dressés. Dans leur coquille, ils se conservent trois jours au réfrigérateur dans un linge humide et seulement un jour ou deux lorsqu’ils sont décoquillés.

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BORMES ET LE LAVANDOU

Bormes-les-Mimosas est plus réputé pour son charmant village qu’il faut voir que pour son port, pourtant exemplaire.

BORMES LES MIMOSAS 43°07,5’ N – 006°22,0’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 01 55 81 www.portdebormes.com

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e nouveau port de Bormes (chez les Bormani) a été construit en 1969 dans le quartier qu’on appelle la Favière, certainement en raison des fèves cultivées ici autrefois. Le plan d’eau de 7 ha dispose de 2 300 m de quais et d’environ 1 000 anneaux dont 100 pour le passage. Géré par le Yacht Club International, Station bleue “écolabellisé” le port de Bormes offre, en plus des facilités pour le pompage des eaux grises et noires, des chariots à roulettes pour le transport des choses lourdes et propose des vélos. Et Bormes qui fait bien les choses propose aussi sur les plages de la Favière et de Cabassson, des fauteuils roulants amphibies, ces “tiralo” si magiques pour les personnes à mobilité réduite. Cela mérite d’être dit.

LE LAVANDOU 43°08,1’ N – 006°22,3’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 00 41 10 www.ot-lelavandou.fr

Bormes-les-Mimosas is better known for its delightful, must-see village than for its harbour, which nonetheless is excellent.

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he new harbour at Bormes (Bormani’s) was built in 1969 in the district called La Favière, no doubt because of the broad beans that were grown here in the past. This 7 hectare body of water has 2,300m of quays and around 1,000 mooring rings, including 100 for visitors. Bormes harbour is managed by Yacht Club International and is an “eco-labelled” Blue Resort, which, as well as providing facilities for pumping out wastewater and lavatory water, has wheeled trolleys for transporting heavy items and bicycles which you can borrow. And, because they think of everything at Bormes, on La Favière and Cabasson beaches, there are “tiralos” (amphibious wheelchairs) – magical for people with reduced mobility. That’s something worth mentioning.

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2 bonbons, 2 liqueurs et 1 soupe au pistou

ormes-les-Mimosas est à la fois un port moderne, pratique, accueillant, qui offre de nombreux services aux plaisanciers et un village – un peu loin – mais une vraie carte postale ! A propos du mimosa, sachez que Joséphine de Beauharnais l’introduisit en France. Elle envoya dans différents jardins botaniques – dont celui de Toulon – des boutures que le capitaine Cook avait rapportées d’Australie en 1770. Il faudra attendre la naissance de la “Côte d’Azur” pour acclimater cet acacia. L’une de ses espèces rustiques, l’Acacia Déalba, fut employée dès cette époque par les parfumeries de Grasse et les savonneries locales. Le mimosa se plaît sur ce sol. Il s’est mis à pousser hors des jardins. On le retrouve à l’état sauvage, érigé, buissonnant, pleureur. Le Tanneron, à la frontière du Var et des Alpes maritimes, en est la plus grande forêt d’Europe. En bas du village, Gérard Cavatore propose 160 variétés agréées par le Conservatoire français des collections végétales. BONBONS JAUNES OU MAUVES

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Bormes-les-Mimosas

Destination

Côté culinaire, on fait de la liqueur avec la fleur jaune : de l’alcool neutre auquel on ajoute un extrait naturel de la fleur (ou un arôme artificiel, souvent), du sucre. Rien d’aussi fin et léger que cette plante délicate. En revanche, les plus âgés de nos lecteurs peuvent se souvenir de leur enfance quand leur grand-mère leur offrait dans une boîte en fer de ces petits bonbons à base de fleurs cristallisées dans le sucre, violette, verveine, rose ou mimosa. Cette méthode de cristallisation de fleurs au sucre candi a été utilisée par des artisans confiseurs en 1818 mais les apothicaires en fabriquaient déjà au XVIIIe siècle. Ces


BORMES ET LE LAVANDOU se

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La Fleur de Thym 2 Rue Pierre Toesca 83230 Bormes-les-Mimosas Tél. 04 94 71 42 72

Le port du Lavandou

bonbons aux saveurs délicates ne sont plus guère à la mode. La fraise Tagada et ses sœurs chimiques ont tué ces désuètes friandises aux fleurs naturelles. Quant au Lavandou, on pourrait croire qu’on continue la croisière botanique et odoriférante pour compléter un joli bouquet jaune et mauve, très Second empire. Non. L’explication du nom Lavandou par la lavande est aussi évidente que peu probable : Lavanda Stoeochas de son nom latin, se dit ici queirélé. L’étymologie a moins discutée est la thèse de Frédéric Mistral, dans Trésor du Félibrige qui défend une origine liée au lavoir, le lavador où les Lavandouraines, femmes de pêcheurs, lavent et battent leur linge sur de larges pierres plates dans ce bassin public. Liqueur (alcool, huile essentielle et un brin de lavande en macération pour faire joli) et bonbons à la lavande – qui existent également – n’ont rien à voir avec cette jolie escale. Le seul produit qui peut paraître naturel issu de la lavande est le miel. Mais attention aux faux miels à base de mélasse parfumée qui envahissent aujourd’hui le marché ! Vérifiez-en le caractère artisanal.

Parvenu en Grèce, ou il devint symbole de fertilité, sa cueillette du Basiliskon fut interdite aux femmes. Revêtu d’habits neufs, et exempt de tout objet en métal, l’élu, généralement un personnage puissant, avait purifié trois fois sa main droite avec une branche de chêne et l’eau de trois sources. Quand il arrive en Provence littorale, après un passage à Gènes, le basilic qu’on appelle “l’herbe royale” ou “l’oranger des savetiers” (on sait qu’il a la vertu d’éloigner mouches et moucherons mais l’explication reste un peu courte), il servira la soupe de fin d’été. On trouve différentes recettes de cette soupe au pistou qui mêle à l’origine haricots verts coupés en morceaux, pommes de terre émincées et tomates hachées cuits. La préparation était versée dans un plat où l’on avait réservé une pommade préparée avec la patience propre aux rituels et comprenant : basilic écrasé sous le pilon du mortier, gousses d’ail écrasées et quelques cuillers à bouche d’huile d’olive. La soupe se doit d’être épaisse aussi y ajoutait-on traditionnellement le vermicelle. Mais vous trouverez des haricots rouges et blancs, la courgette et le céleri et parfois même un supplément de fromage râpé. Pour le pesto, délice ligure, l’herbe “aux sauces”, qui accompagne les pâtes, associe au basilic et à l’ail broyés l’huile d’olive, des pignons et du parmesan.

BASILIC, PESTO ET PISTOU

photo Jason Clevenger

Donc, autant pour le Lavandou que pour Bormes-les-Mimosas, il n’y a pas de spécialité culinaire autre que celles qui relèvent de la cuisine provençale. Alors, puisque nous étions dans les plantes délicates et les fins arômes, nous proposerons ici une spécialité à base du fragile basilic. Attention, ne pas confondre pistou et pesto, deux cousins italiens. Le pistou, c’est le mortier qui sert à piler (pestare) le basilic, cette petite plante qui fleure bon le girofle. Ocynmum basiliciumb est originaire de l’Inde où il porte depuis 4 000 ans le nom de tulsi. Utilisé par les Egyptiens dans les rituels de momification, pour ses qualités anti bactériennes nécessaires à la conservation des corps, on le glissait entre les mains des défunts comme sésame vers l’au-delà.

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e g d a B o Pr rt

Po Pass’ que* i Naut

*toutes les informations et commande de badge sur www.passportnautic.com



SAINT-TROPEZ Saint-Tropez est une escale magnifique de la mi-septembre à la fin mai. La baie autant que la cité sont alors ouvertes à un type de tourisme plus familial.

SAINT-TROPEZ 43°16,3’ N – 006°38,0’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 56 68 70 www.port-de-saint-tropez.com

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aint-Tropez n’est pas le “charmant petit port de pêche” que la rumeur publique véhicule depuis que la station est devenue à la mode après la dernière guerre. Charmant est le village malgré les transformations et les sophistications apportées par le public néo-tropézien. Au XVIIIe siècle, c’était en Méditerranée française l’un des plus grands ports de commerce et de construction navale. Bien avant, c’était un port où venaient se réfugier plus de galères et de bateaux de forbans que de “pointus” de pescadous. Saint-Tropez est un charmant port de plaisance en dehors des mois d’été où il n’y a pas de place pour vous. D’autant que tout le golfe est agité des sillage intempestifs des yachts irrespectueux des traditions marines.

Saint-Tropez is a wonderful port of call from mid-September to the end of May. At these times, the bay and the town are more accessible to families on holiday.

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aint-Tropez isn’t the “charming little fishing port” the public have rumoured since the resort became fashionable after WW2. The village retains its charm despite the transformations and sophistication brought in by the Saint-Tropez’s new natives. In the 18th century, it was one of the French Mediterranean’s largest commercial and shipbuilding ports. Long before that, it was a harbour refuge more for galleys and pirate ships than the “pointu” boats of the “Pescadous” (fishermen). Saint-Tropez is a delightful marina outside the summer months when you won’t find a place to moor. Especially as the Gulf is stirred up by the out of place wake of the yachts that mock maritime traditions.

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La suave Tropézienne fait son cinéma

aint-Tropez n’est pas le “charmant petit port de pêche” que la rumeur publique véhicule depuis que la station est devenue à la mode après la dernière guerre. Charmant est en effet le village, malgré les transformations et les sophistications apportées par le public néo-tropézien. Au XVIIIe siècle, c’était en Méditerranée française l’un des plus grands ports de commerce et de construction navale. Bien avant, c’était un port où venaient se réfugier plus de galères et de bateaux de forbans que de “pointus” de pescadous. Saint-Tropez est aussi l’un des lieux où le vin “rosé de Provence” a gagné sa notoriété. Pour le meilleur et pour le pire. Inconnu dans les années soixante, il se vend maintenant l’été par jerricans entiers et, additionné de glaçons, il fait le vin de soif et de sieste – chronologiquement – de milliers de vacanciers. NE PAS S’EN TENIR AU ROSÉ…

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Destination

Heureusement, la presqu’île produit des vins plus secrets et plus raffinés et l’appellation Côtes de Provence qui va de Toulon à SaintRaphaël, n’échappe pas au grand mouvement de recherche de qualité. Les vins de La Londe et de Fréjus en sont la preuve. Ceux de Porquerolles seraient aussi dans nos coups de cœur si leur prix n’était pas aussi... touristique. Les vins de Provence sont répartis en trois grandes familles, qui regroupent 96 % des vins d’appellation d’origine de la Provence et s’étendent sur environ 200 kilomètres dans les Bouches-du-Rhône, le Var et, un peu, les Alpes Maritimes : les Côteaux d’Aix-en-Provence, au Nord


SAINT-TROPEZ se

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La Tarte Tropézienne 36 Rue Georges Clémenceau 83990 Saint-Tropez Tél. 04 94 97 71 42 www.tarte-tropezienne.com

de Marseille, les Côteaux Varois en Provence, au-dessus de Toulon et les Côtes de Provence, sur trois sites, La Sainte-Victoire, La Londe, Fréjus. Cet ensemble représente six cents producteurs, soixantedouze sociétés de négoce et une production annuelle globale de 170 millions de bouteilles dont 150 millions en rosé... ce qui représente 8 % des rosés du monde ! CINÉMA, VIN ET TARTE À Saint-Tropez, un nom commercial s’est ajouté : les Vignerons de Saint-Tropez. Tout à commencé à la grande époque, en 1964, quand Brigitte Bardot et tout le gratin du cinéma créaient la réputation de la station. Neuf propriétaires se sont regroupés pour ajouter cette marquechapeau à leurs propres noms et mettre sur pied un outil commercial performant. Chacun vinifie chez lui, mais des moyens en commun, notamment le marketing. Et ça marche : chaque année, quarante mille clients passent par le seul point de vente public de Gassin ; 500 000 bouteilles sont vendues et le chiffre d’affaires se monte à 9 millions d’euros... L’autre star venue avec la cinéma, c’est la Tarte de Saint-Tropez ! Comme l’omelette de la Mère Poulard au Mont Saint-Michel, il est impossible d’éviter la tarte tropézienne à cinquante kilomètres à la ronde ! Ce gâteau fourré à la crème pâtissière a été créé par Alexandre Micka, boulanger qui s’installa en Provence au milieu des années 40 et ramena cette recette de son

pays natal, la Pologne. C’est dans la boulangerie qu’il ouvrit sur la place de la mairie à Saint-Tropez qu’il commença à la vendre. Et même le nom de cette tarte a une histoire! En 1955, a lieu, à Ramatuelle, le tournage du film de Roger Vadim, Et Dieu Créa la Femme avec Jean-Louis Trintignan et Brigitte Bardot. C’est Alexandre Micka qui est chargé de préparer les repas pour l’équipe du film, et son gâteau connaît chaque jour un plus franc succès auprès de l’équipe de tournage. C’est Brigitte Bardot elle-même qui suggéra à Micka de baptiser ce gâteau et lui proposa le nom de Tarte Tropézienne! Alexandre Micka décide de passer la main en 1985 à son directeur commercial, Albert Dufrêne, qui rachète alors le célèbre nom et le savoir-faire. Il va multiplier les points de vente dans le Golfe de Saint-Tropez et devenir le traiteur officiel de l’écurie Renault/Williams/Benetton dans les Grands Prix de Formule 1. La Tarte tropézienne, qui est encore fabriquée dans des conditions artisanales, rencontre toujours le même succès auprès des gourmands. Pour preuve, les 4 000 œufs, les 500 kilos de farine et les 400 litres de lait utilisés chaque jour pour la fabriquer en haute saison !

Le transport du vin vers Marseille Feue la revue Le Capian, spécialisée dans l’histoire maritime de Provence, décrivait ainsi le transport du vin vers Marseille : « Les négociants tropéziens possédaient parfois deux à trois bateaux. Les cargaisons de vin sur Marseille étaient débarquées sur l’actuelle place aux Huiles. Le fond de la cale était réservé aux tuiles de l’Estaque et complété  par  des oranges. Comme la majorité des voiliers de charge, la tartane ne pouvait pas naviguer à vide. Il était nécessaire d’embarquer dès la sortie du port un bon tiers de chargement de sable de la première plage venue. On le débarquait dans le port où devait s’effectuer le chargement. Dès le début du XVIIIe siècle s’organise à Marseille et à Nice un négoce de sable par charrettes à bras ou de tombereaux tirés par un attelage de bœufs ou de chevaux. On l’utilise alors mélangé à de la chaux pour le pavage des villes (second Empire). Les portefaix, indépendants de l’équipage, aidaient parfois à la vigne autour de Ramatuelle et descendaient en équipe de quatre à six hommes à la plage de Pampelonne. Paul Carbonne, célèbre bandit de Marseille  en  fait  partie.  Ces hommes dont la force est remarquable, nourris de pain tartiné de morceaux cassonade et imbibée de vin rouge épais souvent ramenée de Marseille déchargent en 6 à 8 heures plus de 80 tonnes de sable »

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SAINTE-MAXIME Sainte-Maxime c’est la voisine d’en face de Saint-Tropez, plus familiale, moins ostentatoire. Un très beau site avec vue sur Ramatuelle et Gassin.

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ainte-Maxime frappe d’abord par sa promenade, plantée de palmiers, le mimosa et l’arbousier et le grand parc sauvage et inquiétant des Maures avec ses pins parasols, chênes liège, cistes, myrtes… et on adore la douceur de son climat. C’est le chemin de fer qui lancera la commune. Alors qu’elle n’avait jamais pu rivaliser avec Saint Tropez comme port de commerce et chantier naval, elle prit enfin sa revanche. À la fin du XIXe siècle, le commerce maritime déclinait tandis que le train apportait vie et prospérité partout où il passait. Et c’est la rive nord du golfe qu’il choisit : d’abord Paris-Fréjus, puis Toulon – Saint Raphaël et Hyères – Saint Raphaël en 1890. La ligne Toulon – Hyères est enfin ouverte en 1905.

Sainte-Maxime is Saint-Tropez’s neighbour across the bay, but it’s more family-oriented and less ostentatious. A really beautiful location with views over Ramatuelle and Gassin.

STE MAXIME – PORT PUBLIC 43°18,4’ N – 006°38,3’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 96 74 25 www.ste-maxime.com

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t first, it’s the promenade in Sainte-Maxime that strikes you, with its planted palm trees, mimosas, strawberry trees and the large interesting Maure wild park containing umbrella pines, cork oaks, rockroses, myrtles etc. We love its mild climate. The locality really took off when the railway arrived. While it had never been able to compete with Saint-Tropez as a commercial port and shipyard, it finally got its revenge. At the end of the 19th century, the shipping trade declined while the train brought life and prosperity wherever it passed through. And it went for the north bank of the gulf: first of all Paris to Fréjus, then Toulon to Saint-Raphaël and Hyères to Saint-Raphaël in 1890. The Toulon-Hyères line finally opened in 1905.

STE MAXIME - PORT PRIVE 43°18,4’ N – 006°38,3’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 96 05 12 (préciser port privé)

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Arbre à saucisses et pissaladière

usqu’au début du XXe siècle, Saint-Tropez avait la vedette : port de commerce, chantiers navals… et Sainte Maxime faisait pâle figure. Puis, en 1905, fut ouverte la ligne ferroviaire complète Paris – Saint-Raphaël vers Menton donnant le coup d’envoi de la revanche et de la fortune de cette petite ville, située de l’autre côté de la baie. Le succès est foudroyant. Dès 1907, le fameux guide Pol décrit les maisons fleuries de Sainte-Maxime mises à la location pour les “hivernants“ venant d‘Europe du Nord. ÇA CASTAGNE À COLLOBRIÈRES

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Destination

Mais l’histoire que nous avons retenue pour cette escale n’est pas liée au train, à la photo ou au tourisme balnéaire. Elle prend ses racines dans l’arrière-pays, les hauteurs qui surplombent la baie, derrière Grimaud, vers Collobrières, là où poussent en masse les châtaigniers. Ici, comme dans tant d’autres territoires du Sud peu propices à la culture céréalière, la châtaigne apportée d’Italie du nord par les moines défricheurs du Xe siècle, a été longtemps la nourriture providentielle des hommes et des animaux. On l’appelle aussi arbre à pain ou encore arbre à saucisses... en souvenir du temps où les pauvres en faisaient de la farine et du pain (vendu aujourd’hui comme une friandise rare) et où on en nourrissait les cochons. Le marron, ne partage pas la bogue bien piquante, c’est le fruit entier, une seule graine dont la coque brune et dure ou tan, ronde et luisante, laisse voir un point d’attache pâle, un hile, son nombril en quelque sorte. La châtaigne, petite virgule ridée, coiffée d’une torche, un vestige de son pistil desséché est quant à elle un quartier du fruit, cloisonné dans sa bogue.


SAINTE-MAXIME Tout comme la pizza, la pissaladière a pour ancêtre la maze, une crêpe, cuite depuis la nuit des temps, sur une plaque en terre couverte de saumure de poissons et d’oignons. En Provence, le garum connu depuis l’installation des premiers comptoirs grecs et romains tenait encore bonne place sur les modestes tables des Provençaux. C’est de son passage par l’Italie et plus près encore par le port ligure d’Imperia qu’elle gagne de nouvelles saveurs. Le peis-salat ou pissara varois mais pissala à Nice, était autrefois une conserve de petits poissons entiers et salés à base de poutine (alevin de sardine), gobie, mulet, anchois, et blanchaille (autres menus fretins et minuscules appâts) auxquels on ajoutait laitances et embryons de crustacés. Une couche de gros sel gris de mer, une couche d’herbes aromatiques, une couche de poissons et ainsi de suite jusqu’à une dernière couche d’herbes, dans un pot rempli en quelques jours et fermé par une pierre plate, le tout gardé au frais. Une fois le sel fondu la préparation était tamisée et réduite en une purée, laquelle reprenait le chemin du pot sous une couverture de sel. Ce peis-salat, nous dit Mistral dans le Trésor du Félibrige, se mangeait sur une “pompe”, cette galette, ou maze, à l’huile d’olive. La pissaladière ligure y ajouta les oignons, les olives puis viendront les tomates à partir du premier Empire. À Nice on ajoute l’ail, le thym et les câpres... Éternelle Méditerranée.

L’amande longtemps consommée en purée – offrant l’avantage de se passer de moulin pour la réduire en farine. Riche en vitamines et en potassium, elle regorge de glucides. Plus elle est sèche et plus elle est sucrée. MARRON GLACÉ D’ARDÈCHE

Producteur de produits sucrés à base de châtaignes : http://www.clementfaugier.fr

LA SŒUR DE LA PIZZA À Saint-Raphaël finissent les Maures et commence l’Esterel, la riviera française quand on vient d’Italie, déjà italienne quand on vient de l’Ouest. Dirait-on que la rive droite du Préconil est “pissaladière“ et la rive gauche “pizza“ ? Cette dernière est devenue tellement universelle qu’il n’y a plus de frontière. Mais il y a bien quelque part un changement entre Marseille et Naples.

photo : Great British Chefs

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Ce caractère sucré avait déjà attiré l’attention de quelques gourmands. Louis XIV aurait dégusté l’ancêtre du marron glacé du Sieur de Varennes. Mais c’est en 1882 que ce fruit de survie est devenu une gourmandise quasi universelle. On doit à l’Ardéchois Clément Faugier, la première fabrication industrielle du marron confit et recouvert de sucre glace. Dans la région de Collobrières s’est développée une fabrication toujours renommée et très active. À la Garde-Freinet, la fête de la châtaigne est chaque année prétexte à de joyeuses roustides, nom ancien d’une dégustation conviviale de châtaignes grillées qui connaît une nouvelle appellation, terminologie trentenaire, la castagnade. On peut visiter la châtaigneraie Godissard à Collobrières où une famille de castanéïculteurs perpétue les traditions d’entretien et de récoltes d’arbres vieux de plus de quatre siècles. Beaucoup de Châtaigneraies françaises ont été ravagées par deux maladies, l’encre et le chancre et des variétés asiatiques, japonaises et chinoises ont alors été replantées. Le village de Collobrières vous invite les trois derniers dimanches d’octobre au ramassage des châtaignes ainsi qu’à la joyeuse et savoureuse castagnade rituelle.

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FRÉJUS - SAINT RAPHAËL Fréjus, après avoir été ravagée en 1959 par la rupture du barrage de Malpasset, est redevenue une ville coquette.

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réjus, qui, comme son nom à terminaison latine l’indique, est une cité romaine. Fondée cent ans avant notre ère, elle était au temps des Romains une ville aménagée en terrasses et disposait d’un port intérieur relié à la mer par un canal. L’histoire raconte que l’empereur César, sur la route de Marseille occupée par son rival Pompée qu’il partait assiéger, fit halte à Fréjus et fonda (49 av. J.-C.) le ‘‘Forum Julii’’, que l’on peut traduire par le «Marché de Jules’’. Et c’est Tacite qui nous apprend qu’après sa défaite devant Octave, la flotte d’Antoine et de Cléopâtre fut envoyée à Fréjus. Ce passé romain peut justifier l’étape d’autant que les villas du XIXe siècle, le vieux village rénové, avec son circuit des artisans-artistes, le site épiscopal et le batisphère.

Following its devastation in 1959 when the Malpasset barrage burst, Fréjus has reemerged as a charming town.

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réjus, as its Latin-sounding name indicates, is a Roman city. Founded in 100BC, the town was laid out in Roman times into terraces, with an inland port connected to the sea by a canal. History tells us that Emperor Julius Caesar, headed for his rival Pompey’s occupied Marseilles, stopped at Fréjus in 49BC and established the “Forum Julii” (one translation is Julius’ Market). And Tacitus informs us that Anthony and Cleopatra’s fleet was sent to Fréjus after its defeat by Octavian. This Roman past merits a visit as much as the 19th century villas, the renovated old village and its arts and crafts tour, the Episcopal site and the baptistery.

FRÉJUS 43°25,2’ N – 006°45,1’ E Tél. : + 33 (0) 4 94 82 63 00 www.frejus.fr

Les Romains aimaient les coquillages

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solides dont la polenta reste, en Italie du Nord, un vestige culinaire très répandu, mais aussi du pain dont il existait une grande variété. À cela, ils ajoutaient une grande variété de légumes et de légumineuses souvent issus de leurs potagers, et aussi de fruits sauvages ou cultivés consommés crus ou transformés en desserts sucrés. La viande était rare et le cochon, avec la poule, le seul animal élevé exclusivement pour se nourrir. En revanche, ils étaient friands de fruits de mer : poissons et coquillages, sauces comme le célèbre et précieux garum, sorte de nuoc-mam à base de poisson fermenté. Le poisson était cher. En revanche la quantité de coquilles de toutes espèces retrouvées sur les sites, y compris de rivière, attestent le goût des Romains pour les huîtres, moules, coques, Saint-Jacques… Alors, une idée de cuisine romaine facile : une semoule ferme de mais (polenta) dans laquelle on réserve des alvéoles que l’on remplit avec des huîtres chaudes dans une petite sauce aux herbes ou à la tomate-basilic.

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La spécialité de Fréjus est le Pavé du Cloître, bonbon feuilleté aux amandes entourées d’une fine coque caramélisée.

Destination

’approche de Fréjus par la mer n’en donne pas la prémonition, mais la ville – un peu en retrait pour cause de risques d’inondation – a occupé une place de premier plan dans l’Empire romain. La situation de son port dans l’embouchure de l’Argens fait sa sûreté et son originalité. Fondée cent ans avant notre ère, elle était au temps des Romains une ville aménagée en terrasses et disposait d’un port intérieur relié à la mer par un canal. L’histoire raconte que l’empereur César, sur la route de Marseille occupée par son rival Pompée qu’il partait assiéger, fit halte à Fréjus et fonda le ‘‘Forum Julii’’, que l’on peut traduire par la Place ou le “Marché de Jules’’. Tacite nous apprend que juste après sa défaite devant Octave, la flotte d’Antoine et de Cléopâtre fut envoyée à Fréjus. Cette grande base militaire romaine a été un port longtemps plus grand que Massalia : il en reste la seconde concentration de sites romains après Arles. Fréjus, qui nourrissait ici ses légions, perpétue la tradition car, si la base aéronavale a été démantelée au profit de Hyères, l’armé reste le premier employeur de la ville en hébergeant le 21e Régiment d’infanterie de Marine. La romanité du lieu nous incite à disgresser vers la cuisine des Romains, ou plus exactement des Gallo-romains car le contact de ces deux peuples qui n’avaient pas du tout les mêmes habitudes alimentaires donna naissance à une gastronomie mixte. La base alimentaire des Romains était faite de céréales dont il était fait des bouillies liquides ou


FRÉJUS - SAINT-RAPHAEL Saint-Raphaël a de commun avec Hyères un style architectural flamboyant du XIXe siècle. En plus voyant.

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’est à Saint-Raphaël que Bonaparte débarqua en 1799 de retour de la campagne d’Egypte. C’est là aussi que Napoléon rembarqua pour Elbe en 1814 ! Mais il s’agissait du vieux port, où d’importants travaux de rénovation sont en cours. Alors remettez votre sort entre les mains de Santa Lucia, la patronne des pontons du port-neuf.

Saint-Raphaël has a similar flamboyant 19th century architectural style as that seen in Hyères. Only more showy.

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onaparte landed in Saint-Raphaël on his return from the Egyptian campaign in 1799. And it was from there that he once again set sail for Elba in 1814! But that was the old port, where you have precious little chance of getting a mooring. So then, put your trust in Santa Lucia, the patron saint of the new port’s jetties. What is striking is the flamboyant, Baroque style of this 19th century seaside resort. Greek Revival, rococo, Belle Époque, Modern Style, “Noodle” style, Norman-style chalets, and half-timbered façades of sculpted stone, painted stuccoes, forged iron, or glazed tiles, with golds, yellows and ochres, reds and blues, and flowers and palm trees everywhere... everything to amaze the ordinary folk.

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Une bon

Le Bouchon Provençal Restaurant 45 Rue de la République 83700 Saint Raphael Tél. 04 94 53 89 18

Un apéritif visité par un ange

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aint-Raphaël était déjà une ville néolithique, mais le plaisancière qui arrive au vieux port (bientôt totalement rénové !) y voit tout de suite les rêves architecturaux des milliardaires de la Belle Époque et le style baroque flamboyant de la station balnéaire du XIX e siècle. Néo-grec, rococo, Belle époque, Modern style, style ‘‘nouille’’, chalets à la normande, façades à colombages... pierre sculptée, stucs peints, fers forgés, tuiles vernissées... des ors, des jaunes et des ocres, des rouges et des bleus, des fleurs et des palmiers à profusion... Le résultat est très plaisant, c’est comme un musée de l’apogée de l’ère industrielle d’avant que l’Europe ne se déchire par une succession de guerres mondiales et que la plage des milliardaires ne devienne celle des péniches de débarquement. Saint-Raphaël doit sa prospérité à la construction de la ligne de train qui partait de Toulon. Arrivèrent en masse les britanniques, comme en témoignent les églises très british qu’on y trouve. Un peu folles, elles aussi !

Un peu désuet aussi aujourd’hui, est l’apéritif Saint-­ Raphaël. L’invention de cet apéritif, mondialement apprécié en son temps, tient du miracle. Celui-ci s’est produit en 1830. On raconte ici que le docteur Alphonse Juppet, alors qu’il s’appliquait à la mise au point d’un apéritif, perdait la vue. Il se souvint d’avoir lu dans l’Ancien Testament que l’Archange Raphaël avait autrefois guéri de la cécité. Ses prières semblent avoir été entendues puisqu’il recouvra la vue… et trouva la bonne recette de son vin muté, au quinquina. Le quinquina, rubiacée originaire du Pérou aux vertus anti-fièvre (quinine), apparaissait sur les étiquettes mais il fallait en masquer le goût amer (vous avez déjà pris de la Nivaquine contre le paludisme ?). Il ajouta le cacao, les oranges amères, la vanille, le colombo et d’autres ingrédients gardés secrets, se mêlant aux parfums sucrés des raisins. Aujourd’hui et depuis plus de 100 ans, chaque bouteille por te l’emblème de l’Archange, garant de la perpétuité de la tradition.

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CANNES Cannes est un excellent abri à condition de se méfier des cailloux des îles de Lerins et d’éviter la saison des bouchons…

CANNES – MARINA 43°32,1’ N – 006°56,5’ E Tél. : + 33 (0) 4 93 49 51 27 www.ot-mandelieu.fr

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annes revendique avec Port Camargue le statut de premier port de plaisance d’Europe. Nous trancherons d’autant moins que rien n’est comparable entre une marina conçue d’un seul bloc et trois ports distincts au pied d’une grande ville : Cannes-marina, Cannes-la-Bocca et Cannes Vieux-Port. Ce dernier, au cœur de la ville, est presque inaccessible l’été, totalement lors des grands événements mondains qui s’y déroulent : le festival du cinéma, le salon nautique et le grand prix de Formule 1 de Monaco. Le reste du temps, cela vaut la peine d’y faire escale pour profiter de l’indéniable charme de cette ville quand elle vit “normalement”. La Croisette mérite vraiment la promenade et la vieille ville invite à la flânerie.

CANNES – VIEUX PORT 43°32,7’ N – 007°01,0’ E Tél. : + 33 (0) 4 92 98 70 20 www.riviera-ports.com VHF 12 indicatif “ Cannes Port”

Cannes is an excellent shelter provided that you are wary of the rocks of the Lerins islands and that you avoid gridlock season...

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annes, along with Port Camargue, claims to be Europe’s top marina. We’ll leave it by saying that there is no comparison between a marina designed in one block and three separate harbours at the foot of a great city: Cannes-marina, Cannesla-Bocca and Cannes’ Old Port. The latter, in the city centre, is almost inaccessible during summer and completely so during the big global events that take place here: the film festival, the boat show and the Monaco F1 Grand Prix. At other times, it is worth stopping off here to enjoy the undeniable charm of this town when it’s living life “as normal”. It’s definitely worth a stroll along the “Croisette” (Cannes’ promenade) and the old town is made for wandering.

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Le péché de gourmandise des moines de Lérins

n caricaturant l’image “festivals et soirées mondaines” de Cannes, on pourrait dire que la plus grosse production viticole cannoise est le Champagne et que les fruits de mer les plus consommés sur les yachts sont les œufs d’esturgeon… Heureusement, Cannes n’est pas que cette écume dorée des choses mais aussi des ruelles, des places ombragées, notamment au Suquet, sur la hauteur où les moines du Lerins construisirent une citadelle au XIe siècle. Là, il existe des petits restaurants qui proposent une cuisine beaucoup plus populaire et authentique que ce qu’on sert dans les grands hôtels de la Croisette. Signalons aussi le marché Forville où vous pourrez aller tous les matins sauf le lundi. Et, de là-haut, vous aurez une vue imprenable sur les îles de Lerins (attention aux écueils en bateau !). Ce petit archipel est un haut lieu touristique et, l’été, c’est un mouillage très, très encombré aux heures de baignade. Mais le soir, quand tous les bateaux en visite seront rentrés à Cannes ou partis ailleurs, vous pourrez profiter de cet endroit unique. D’où qu’il soit vu, l’archipel du Lerins est beau à voir. Le meilleur à notre avis étant lorsque l’on passe au Sud de l’île Saint-Honorat, près de la balise des Moines. DES ÎLES HAUTEMENT STRATÉGIQUES

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Destination

L’histoire de ces îles, occupant une position hautement stratégique dans la double baie de Cannes et de GolfeJuan, est faite de conquêtes, de batailles, de prises et de déprises, de pillages des pirates Espagnols, Génois, Mauresques… sans parler des raz-de-marée (seisme de 410), des invasions de sepents et de scorpions ! Mais c’est surtout une histoire religieuse. La fameusse année du “tsunami”, Saint Honorat y fonda un premier


CANNES

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Une bon

Salon des Indépendants Restaurant 11 Rue Louis Perrissol 06400 Cannes Tél. 04 93 39 97 06

monastère, qui prit vite une grande importance spirituelle et une dimension considérable car on a pu en dire qu’il avait “plus de cent portes”. Puis, en 660 arrivèrent les moines bénédictins qui eurent à faire face un bon nombre d’invasions, de destructions, de massacres, de déportations, de vente en esclavage…. Mais, au XIe sècle, l’abbaye devint une puissance dont relèvaient 70 prieurés et 80 fiefs dont Avignon, Albenga, Barcelone, SaintFlour, Clermont. C’est aussi une puissance économique grâce à des droits de pêche, droits de “naufrage” qui donne la propriété des épaves, le “franc-salé”, la détaxe sur le sel, et la possibilité de battre monnaie. Riche, le monastère put construire un fort en 1073, un des plus importants ouvrages militaires de Provence, protégeant enfin contre les pirates les pélerins qui y viendront jusqu’à la chute de la monarchie. Mais, peu avant la Révolution, Mazarin retira la “licence” (suppression canonique) au célèbre monastère. Il fallut attendre 1859 pour que reviennent les religieux, notamment le célèbre moineœnologue Dom Pérignon – on y revient – qui, plus tard, transféra en Champagne ce qu’il avait vu faire du côté de Limoux, du vin mousseux.

Sont produites des liqueurs renommées et plus accessibles : la Lérina verte et la Lérina jaune, faites dans le plus grand secret avec, paraît-il, une quarantaine de plantes. Les moines, qui ont le sens du commerce, ont aussi lancé une liqueur de mandarine, le cocktail Mandamarc (marc + mandarine), la liqueur de verveine et… le Lérincello, variation sur le limoncello à base de citrons de Menton. De quoi passer des vignes aux vergers du Seigneur sans changer de place…

L’archipel du Lérins

DU VIN BIO AVANT L’HEURE L’île Sainte Marguerite est la plus grande. Le fort Royal édifié par Richelieu puis renforcé par Vauban a été une prison. On visite les salles de casernement et les cellules dont celle supposée du Masque de fer. Un peu plus loin de belles salles voûtées abrite le Musée de la Mer qui rassemble les trouvailles de fouilles locales et de naufrages. Un sentier botanique balisé et pédagogique apprend à identifier et distinguer les variétés de pins, de chênes et de diverses plantes méditerranéennes. La seconde île, Saint-Honorat, est le domaine privé du monastère qui, en théorie, a été contraint à s’ouvrir aux navettes mais seule la navette de l’abbaye a droit d’accoster. La navigation autour et entre les îles nécessite une bonne carte et de l’attention car les fonds remontent à plusieurs endroits et même deviennent écueils – balisés si non visibles.

Les moines de l’abbaye de Lérins cultivent huit hectares de vigne qui produisent chaque année 35 000 bouteilles de crus de grande renommée, produits avant l’heure en “bio“ et entièrement sur place : vendanges manuelles, vinification, élevage, vieillissement, mise en bouteille. Les vins blancs sont réalisés avec les cépages Clairette (Saint-Pierre), Chardonnay (Saint-Césaire) et Viognier (Saint-Cyprien), et les rouges avec la Syrah (Saint-­Honorat & Saint-Sauveur), le Mourvèdre (Saint-Lambert), et le Pinot Noir (Saint-Salonius). Vers 1890 les moines se lancèrent dans la distillation en alambic de cuivre des moûts de raisins de l’île. Produit en très petite quantité, le marc de Lérins est une rareté. En revanche,

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ANTIBES À l’est du Cap d’Antibes, au pied d’une vieille cité cernée de remparts sous le Fort Carré et des fortifications de Vauban, un des plus grands ports de plaisance d’Europe.

ANTIBES – PORT VAUBAN 43°35,4’ N – 007°07,9’ E Tél. : + 33 (0) 4 92 91 60 00 www.portvauban.net

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as de souci pour repérer l’entrée : le phare de la Garoupe sur le promontoire du Cap signale l’extrémité ouest de la Baie des Anges. Pas de souci de navigation en approche : profondeur, largeur, dimensions des bassins permettent la circulation des plus grands yachts. Antipolis ou la “ville d’en face” : le port est lové dans un site exceptionnel entre deux anses de rêve. Il aurait été créé dès le IVe ou Ve siècle par les Phocéens venus de Marseille la grecque. Plus tard, les Romains en font une cité autonome. Une fois à poste, vous voilà donc à pied d’œuvre pour remonter l’histoire, suivre les traces du Grand Sydney Bechet pour une promenade Dans les Rues d’Antibes ou admirer les panoramas somptueux du Chemin du Littoral dit de Tirepoil.

One of Europe’s biggest marinas lies east of Cap d’Antibes, at the foot of an old town surrounded by ramparts under Fort Carée and Vauban’s fortifications.

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o difficulty finding the entrance: the Garoupe lighthouse on the cape’s promontory marks the western edge of the Baie des Anges. Navigating your approach is stress free also: the depth, width and size of the basins allow even the largest yachts to move around. Antipolis or the “city opposite”: the harbour curls around an exceptional site between two dream coves. It had been established in the 4th or 5th century by the Phocaeans from Greek Marseilles. Afterwards, the Romans made it an autonomous city. Once moored, you’re hard at work going back through time, follow in the footsteps of the great Sydney Bechet Dans les Rues d’Antibes (along Antibes’ streets) or admire the sumptuous panoramas of the coastal path, known as the Tirepoil.

L’ail, allium, pour le meilleur et pour le pire

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ïe, aië, ail !!! Ah, l’ail ! Peut-il y avoir une cuisine méridionale sans ail ? « Manger de l’ail. Ça rajeunit l’organisme et ça éloigne les importuns » écrivait Alexandre Vialatte dans Petite et grande Histoire du Condiment. Dans la famille botanique des ails (ou aulx), qui compte aussi l’oignon et le poireau, il fut longtemps le thériaque des pauvres, remède et antidote à tous les maux des classes défavorisées. L’allium sativum, condiment emblématique de la cuisine provençale, “panacée” de toute la Méditerranée, est un bulbe formé de caïeux, de gousses. Une liliacée probablement née dans le désert de Kirghiz que les marins, les colporteurs et les vents ont semée depuis des millénaires sur toute la planète. Si les petits Égyptiens le portaient en colliers pour ses vertus vermifuges, les ouvriers bâtisseurs des pyramides en recevaient une ration quotidienne pour son pouvoir tonique, sinon ils refusaient de travailler. On retrouve l’ail dans les sarcophages et sur les bas-reliefs de la pyramide de Khéops à Gizeh où il contribuait à favoriser le passage dans le monde des morts. NOMBREUX SONT LES AILLOPHOBES…

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Destination

Les Hébreux en déploraient le manque durant leur exode, alors que les Grecs ont détesté cette “rose puante”. Homère (-850) reste le premier aillophobe à s’exprimer avant Don Quichotte, héros de Cervantes, qui se plaindra de sa dulcinée, une robuste fille de paysan qui lui « a lancé une bouffée d’ail cru qui a soulevé mon cœur et empesté mon âme. » Aïe ! Il ne semble avoir présenté, comme seuls inconvénients, de faire baisser la vue et de provoquer quelques


ANTIBES

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Une bon

La Civette du Marché Brasserie - Bruschetta Marché Provençal 27 cours Masséna 06600 Antibes Tél. 04 93 34 49 71

photo Schlierner

Les romains l’adoraient Les Romains ont adoré l’ail. Leurs gladiateurs en avalaient quelques gousses s’enduisaient le corps d’une purée d’ail avant le combat. Pline l’Ancien, en vantait les qualités énergétiques et son pouvoir pour écarter serpents et scorpions. Hippocrate, l’avait prescrit, cuit, aux asthmatiques. Dioclès le donnait cuit aux hydropiques, bouilli et dans une figue aux phrénétiques, pilé contre les angines. Praxagore, contre la jaunisse, dans du vin, et tous les Anciens, cru, aux fous. On lui trouve mille guérisons des maladies de peau, érysipèle, lentigo où il est associé à l’origan et appliqué, mélangé au garum et à l’huile d’olive. Miam !

­flatulences mais, pour le poète Horace (-50), victime d’une sévère indigestion de tête de mouton à l’ail, il est plus vénéneux que la cigüe et dédaigné des classes supérieures : « s’il t’arrive de goûter un tel mets, ô folâtre Mécène, que ta maitresse repousse de sa main tes baisers et s’enfuie loin de toi». Aïe ! À Paris au XIIIe siècle, les marchands d’ail arpentaient les rues aux cris de «l’ailliies à grant plenté» Le Roman de la Rose déconseille “l’ail et les lèvres grasses” a celui qui veut séduire. L’ail est aussi banni, un siècle plus tard, par Alphonse X, roi de Castille : les chevaliers qui en portent le parfum étaient écartés de la cour pour une durée minimum de quarante jours ! Une quarantaine comme pour la peste noire… À ce propos, durant la grande épidémie, à Marseille, en 1720, quatre détrousseurs de cadavres, insolemment indemnes, livrèrent lors de leur interrogatoire une recette d’ail et de vinaigre qui les préservait de la contagion. Du coup, les autorités firent porter un tissu imbibé de ce vinaigre à l’ail aux forçats employés à ramasser les cadavres. Ce “vinaigre des quatre voleurs”, inscrit au Codex est toujours en vente.

c’est scientifiquement reconnu, est vasodilatateur et bronchodilatateur. VAMPIRES ET GÂTE-SAUCE L’ail a été de tous temps le recours à toutes les ignorances. Conjurateur de mauvais sorts, c’est une plante magique qui éloigne les sorcières et les démons. En Europe Centrale où il est de croyance que le vampire ne supporterait pas l’ail, on raconte que la légende de Dracula fut inspirée d’une maladie rare, la porphyre, défaillance métabolique sanguine qui rend très sensible à la lumière que l’absorbation l’ail peut exacerber. Il est aussi une poudre de perlimpinpin pour les mauvais cuisiniers. Délicat fumet quand la gousse est fondue en crème, arôme puissant quand il est pilé ou râpé fin, ou mêlé à la mayonnaise de l’aïoli, ou frotté sur le pain, il peut être aussi irrespectueux des saveurs et servir de masque opportun pour tous les plats “à la provençale” que des gâtesauce fourguent aux touristes. Vigilance, à Antibes comme ailleurs !

… ET LÉGION LES AILLOPHILES Les vertus médicinales de l’ail sont nombreuses. Les marins antiques l’emportaient pour se prémunir du scorbut, car, comme l’oignon, il contient de la vitamine C. Ses vertus médicinales sont connues depuis longtemps. En hiver, du XIIe au XVIe siècle, on préparait l’aillée, soupe à base d’une pâte d’ail et d’amades qu’on allongeait d’un bouillon pour soigner les bronches. Durant la première guerre mondiale, comme le pape en avait imposé la culture dans chaque potager monastique, le gouvernement britannique rétribua ceux qui en vendaient aux hôpitaux alors en manque de traitement pour des gangrènes et autres septicémies. À la seconde, les soldats russes l’appliquaient sur leurs blessures, en ersatz de la pénicilline. Les Indiens le trouvent souverain contre les tintements d’oreilles et, en France, encore dans les années 1920, les asthmatiques se le voyaient proposé en tartine, sur du beurre, avant d’aller se coucher. L’ail,

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Ail des ours


NICE L’animation y est assurée par la cohabitation de la plaisance et des ferries . Mais le magnifique bassin Lympia réservé aux caboteurs permet une escale dans la 5e ville France chargée d’histoire et de vie !

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’entrée du port est un peu difficile à reconnaître du large mais une fois le musoir repéré, le bassin est au fond, en contrebas d’une belle promenade bordée de vieux platanes. Nissa la belle, adossée au Mercantour au fond de la Baie des Anges accueillait déjà les bateaux de la Grèce antique à l’abri de son cap. Montagnarde de part sa géographie et son rattachement au Comté de Savoie jusqu’en 1860, elle a toujours été résolument tournée vers la mer. Dès 1748 le bassin Lympia a été creusé au pied du château qui domine à l’est la vieille ville. Une occasion de (re)découvrir les ruelles de la vieille ville et ses belles places, les spécialités culinaires, l’accent sur les marchés… sans oublier la fameuse Promenade des Anglais !

There’s guaranteed drama here with the ferries and boaters having to live together. However, the amazing Lympia basin, for coasters only, lets you stopover in France’s fifth largest city, one that is full of history and life!

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t can be hard to make out the entrance to the harbour from the open sea, but once you’ve located the pier head, the basin is at the back, at the foot of a lovely promenade lined with old plane trees. “Nissa la bella” (Nice the beautiful), backing onto the Mercantour park at the back of the Baie des Anges was already hosting ancient Greek vessels in its sheltered cape. This geographical highlander belonged to the County of Savoy until 1860, but it had always steadfastly faced the sea. The Lympia basin was excavated from 1748 on at the foot of the castle that dominates the old town to the east. A chance to (re)discover the narrow streets of the old town and its pretty squares, the culinary specialities, the accents heard in the markets, not forgetting the famous Promenade des Anglais!

NICE 43°41,5’ N – 007°17,3’ E Tél. : + 33 (0) 4 92 00 42 14

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Anchoïade et tapenade sont dans un bateau…

e port de Nice est tout sauf une marina de plaisance. Tant que vous êtes dans le bassin du commerce – le premier – ou dans le bassin des Amiraux – le second – et que vous n’êtes pas dans le troisième, le bassin Lympia, vous n’êtes pas chez vous et vous devez laisser la priorité aux ferries. Mais le magnifique bassin Lympia permet une escale dans la 5e ville France chargée d’histoire et de vie : Nissa la belle, adossée au Mercantour au fond de la Baie des Anges accueillait déjà les bateaux de la Grèce antique à l’abri de son cap. Montagnarde de part sa géographie et son rattachement au Comté de Savoie jusqu’en 1860, elle a toujours été résolument tournée vers la mer. Dès 1748 le bassin Lympia a été creusé au pied du château qui domine à l’est la vieille ville. Une occasion de (re) découvrir les ruelles de la vieille ville et ses belles places, les spécialités culinaires, les marchés… sans oublier la fameuse Promenade des Anglais. UNE SALADE SOUVENT DÉVOYÉE

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Destination

Et, au moment de se restaurer, viendra l’heure inévitable de la salade niçoise. Laquelle ? Il y en a tant ! Autant que d’eaux à Cologne. Pas de recette officielle, chacun fait à sa manière. Parfois un peu n’importe quoi : on trouve des légumes cuits (hérésie !), des haricots verts (scandale !), du riz (pourquoi pas du couscous ?) ou des tranches épaisses de thon cru. Sérieusement, la salade niçoise est faite sur la basse de crudités mélangées au choix : tomates, poivrons, oignons rouges, févettes, cébettes, céleri, concombre, éventuellement des petits artichauts violets. Sans oublier quelques petites olives noires de Nice. Le tout ultra frais bien entendu.


NICE de légumes le plus souvent crus : céleri, fenouil, carotte, carde crue ou cuite, pomme de terre, betterave, poivron cru, frit ou confit dans le vinaigre de vin, radis, oignon et autre courgettes y sont trempées et accompagné de pain grillé, à la manière d’une fondue. Consommé à l’origine à Montferrat, dans le Piémont, cette préparation se partageait après les rudes journées de vendange ou de moisson. Autour d’un feu sur lequel on avait placé une grille supportant un vase en terre cuite dans lequel était écrasé l’ail et pilé l’anchois, additionnés d’huile d’olive. L’huile et l’anchois qui cheminaient sur le dos des mules depuis le XVIIe siècle par les routes du sel, étaient encore peu consommés à cette époque. C’est aujourd’hui un excellent repas, qui n’a pas été dévoyé, à partager en cercle d’amis, comme une fondue, dans le cockpit en regardant cette superbe ville depuis le bassin Lympia.

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Le Grand Bleu Restaurant 24 Cours Saleya 06000 Nice Tél. 04 93 62 29 51 www.restaurant-legrandbleu.fr/ photo Cyclonebill

Sur ce bel assortiment, la tradition veut qu’on ajoute une source de protéine : normalement de l’œuf dur ou un anchois. Le thon est venu plus tard, comme additif tardif, car le thon, qui se pêchait à plusieurs bateaux avec une grande senne appelée madrague, était un poisson de luxe, plutôt à vendre qu’à consommer.

Le “pain mouillé” du pêcheur Le Pan-bagnat, le sandwich niçois par excellence fit jadis l’ordinaire des pêcheurs. Ce “pain mouillé” parce qu’arrosé généreusement d’huile d’olive, le pane bagnato, italien, était le casse-croute des lève-tôt et des gens de mer. On enfournait ce pain spécial et rond d’anchois, poisson abondant bon marché de l’époque, d’oignons crus et de tous autres ingrédients frais et simples. Le thon, alors rare et cher, n’y a trouvé sa place qu’au milieu du XXe siècle. Un pan-bagnat de luxe en quelque sorte.

UN ANCHOIS BIEN POPULAIRE

photo Rainer Zenzv

En revanche, l’anchois était poisson du peuple, mis en conserve, d’une manière qui en fait presque un condiment tant un seul suffit à parfumer tout un plat. Généralement, en Méditerranée, l’anchois était pêché au lamparo, la nuit avec un feu allumé à l’avant du bateau de manière à attirer les poissons. À leur arrivée au port, ils étaient triés selon leur grosseur, acheminés vers les ateliers de salaison. Ils sont alors salés, étêtés et éviscérés à la main puis placés, pour une phase de maturation de trois à six mois dans des fûts, en couches croisées, en alternance avec une strate de sel. C’est un de ces anchois qu’on pose sur les légumes de la salade niçoise, assaisonnée d’un peu d’huile d’olive, à l’italienne (pas de vinaigrette !) L’anchois a bien d’autres destinations culinaires : en dehors de la pizza napolitaine ou des anchois frais ou frits en chapelure, ils entrent dans la tapenade, l’anchoïade et la Bagna Cauda. La tapenade est une purée d’olives. Verte, elle contient des pignons de pin. Noire, de l’anchois. L’anchoïade est une purée d’anchois épicée, avec de l’oignon, de l’ail et un filet de citron, avec de l’huile d’olive, pour en faire une crème onctueuse, servie froide. La Bagna Cauda est une version d’anchoïade servie chaude. LE “BAIN CHAUD” DES LÉGUMES Ce “bain chaud” où l’on mêle à l’huile d’olive l’ail et l’anchois magnifie les saveurs subtiles

photo Kochtopf

38 photo Clého


MENTON Menton, dernier port avant la frontière italienne est une escale de charme, tranquille après le bling-bling vroum-vroum plus à l’ouest.

MENTON GARAVAN 43°47,0’ N – 007°31,3’ E Tél. : +33 (0) 4 93 28 78 00

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enton a deux ports : Garavan et le Vieux-Port. Bien que Garavan ne soit pas loin du centre, c’est le Vieux Port a notre préférence bien que moins bien abrité des vents d’est violents. L’accueil y est efficace et sympathique, le port est calme, la ville attenante. Et cette ville ! De loin, on aperçoit les clochers de ses églises et ses deux cimetières où une visite s’impose : les noms russes, anglais, américains, allemands qui s’y trouvent en racontent toute l’histoire de cette ville, française par référendum en 1861. La tour à la base du môle est un ancien guet génois transformé en musée Cocteau. Le marché couvert vaut pour ses produits et son architecture. Une belle ville en couleurs, une belle escale..

MENTON VIEUX PORT 43°46,6’ N – 007°30,7’ E Tél. : + 33 (0) 4 93 35 80 56

Menton, the final port before the Italian border, is a delightful stopover, and quiet after the bling and vroom-vroom farther west.

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t can be hard to make out the entrance to the harbour from the open sea, but once you’ve located the pier head, the basin is at the back, at the foot of a lovely promenade lined with old plane trees. “Nissa la bella” (Nice the beautiful), backing onto the Mercantour park at the back of the Baie des Anges was already hosting ancient Greek vessels in its sheltered cape. This geographical highlander belonged to the County of Savoy until 1860, but it had always steadfastly faced the sea. The Lympia basin was excavated from 1748 on at the foot of the castle that dominates the old town to the east. A chance to (re)discover the narrow streets of the old town and its pretty squares, the culinary specialities, the accents heard in the markets, not forgetting the famous Promenade des Anglais!

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La terre et le port du citron

n longeant la côte d’Ouest en Est, le navigateur a pu voir disparaître les vignes qui avaient suivi son cabotages depuis les Pyrénées. Après Vintimille, les serres continuent de couvrir les pentes, serrées entre mer et l’autostrada dei fiori, qui serpente de Gênes à Monaco. À Menton, dans les petites plaines côtières, on cultivait depuis l’Antiquité les céréales et un peu de vigne alors que sur les collines poussaient le pin et le figuier, puis, au milieu du XIVe siècle, l’olivier. L’oléiculture allait transformer le paysage et l’économie locale. Il faudra attendre encore un siècle pour qu’arrive celui qui allait devenir l’emblème de la cité, l’agrume, le citron. SITRONARUIN, LE FRUIT D’OR

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photo OT Menton

Destination

Un premier acte notarié de 1471 fait mention « d’une terre complantée de soixante-sept arbres sitronariorum ». En 1495, une première facture de deux écus d’or réglée par le duc d’Orléans à Charles Grimaldi en paiement de deux charges de pommes d’oranges, renseigne sur la première exportation royale du fruit d’or. De cette bigarade amère naîtra vers le milieu du XVIe siècle une nouvelle variété, l’orange douce, qui deviendra le fruit des Princes et de la cour. Au XVII e siècle, Menton se spécialise dans le fret d’agrumes et les activités connexes comme la confection des tonneaux et des caissettes pour le transport. Parmi les agrumes, le citron est devenu roi. En plus de ses usages culinaires, les savants ont reconnu ses vertus médicinales, notamment contre le scorbut qui sévissait à bord des navires au long cours. Utilisé massivement en pharmacopée et en parfumerie, il est d’un bien meilleur rapport que l’orange et sa culture va progressivement faire l’objet d’une réglementation


MENTON citrons est destinée à la France, la Flandrine de 400 pièces destinés à l’Europe du Nord, et la Messinoise, qui emporte 360 fruits vers les Amériques. Au détours du XIXe siècle, quand s’amorce le déclin de l’agrumiculture et que Menton se tourne vers l’offre touristique, la construction des palaces et des grands Hôtel, tels le Winter Palace, le Riviera Palace commencera juste au dessus de la gare, là où dans ces anciens jardins de la Condamine, on a arraché citronniers et orangers.

Le Winter Palace - photo Miniwark

se

ne adres

Une bon

La Mandragore Restaurant Place aux Herbes 06500 Menton Tél. 04 93 35 43 19

D’où lui vient cette qualité ?

drastique. Exporté d’abord en Provence, il gagne progressivement les pays Scandinaves, le Danemark et la Russie. Conditionné en saumure, dans des tonneaux, il complète un fret de sel de Majorque, débarqué et réembarqué à Menton et d’huile d’olive d’Aix-en-Provence, chargée à Marseille pour être livrée en Hollande.

L’huile essentielle des zestes du citron de Menton se différencie des autres citrons par le taux moins élevé de limonène3 et par la teneur plus importante en paracymène3. Plusieurs variétés de citrons sont cultivées sur le Mentonnais : Santa Theresa, Villafranca, Euréka… Sa forme est elliptique plutôt que ronde, sa couleur jaune vif. Il se caractérise également par des rameaux très fructifères, capables de porter une quinzaine de fruits quand , pour la plupart, les citronniers en comptent moins de cinq par rameau.

LE CITRON POUR LES PRINCES… La seigneurie des Grimaldi percevait alors des droits de mer importants sur tout ce qui y était chargé et déchargé sur place mais également prélevé sur le fret des bateaux navigant dans les eaux territoriales. La route maritime du sel et du citron faisant les riches heures de la principauté de Monaco. Au retour des mers nordiques, les ventres des bateaux se délivraient en Provence des fourrures que les Mentonnais trop pauvres ne pouvaient s’offrir, se rabattant sur le fromage de Hollande et le stockfisch, morue en conserve. Entre 1740 et 1840, c’est l’âge d’or du citron, tourné vers l’exportation. Les agrumes sont cultivés essentiellement sur de petites parcelles qui produisent de 30 000 à 35 000 citrons. Mais en 1811, un certain Jérôme Moléon, maire de la ville, en récoltera 610 000 sur sa seule propriété ! La bigarade, porte-greffe de tous les agrumes, n’est plus exploitée que sur 2 000 arbres, pour la confection de cette marmelade dont les hivernants anglais, déjà nombreux dans la station, sont si friands. Des confituriers s’installent à Menton. Au XIXe siècle, les citrons voyageurs sont conditionnés, selon leur destination, dans des caissettes de trois types : la Lyonnaise qui contient 500

Les recherches menées avec l’I.N.R.A. révèlent que le citron du terroir mentonnais est riche en acides et en essences. Sa peau a une forte teneur en huile essentielle. Mais ce qui fait l’autre partie de la qualité de cet exceptionnel citron c’est le climat particulier de Menton : à moins de deux kilomètres de la mer, les montagnes culminent à plus de mille mètres. De tout le pourtour de la Méditerranée, c’est ici que les températures sont les plus élevées en hiver et les plus basses en été. Menton est la seule ville de la côte qui présente un climat aussi tempéré, avec les températures aussi resserrées. L’idéal pour le citronnier.

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Photos © Caroline Morel Fontaine

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Convoyage

de Lorient à Saint-Malo sur Étoile de France

Textes et photos Emma et Bastien Chazelles Une manière inhabituelle et économique de faire une croisière active s’appelle le convoyage. C’est ce que propose Étoile Marine, une société Malouine qui possède une flotte de vrais et de plus ou moins faux vieux navires pleins de charme pour naviguer à l’ancienne entre deux événements nautiques où ces bateaux sont conviés. Et aussi des bateaux de course réformés qui font accéder aux sensations de l’élite vélistique. Pour essayer la formule, nous avons convoyé l’Étoile de France de Lorient à Saint-Malo dans un vrai temps... breton.


L’ÉQUIPAGE DE L’ÉTOILE

Matthieu Alluin

Jean Horel

Arnaud Goron

Geremy Le Squer

L’ancienne cale de vrac a été transformée en un grand espace entouré des couchettes superposées. Au centre, une lourde table en bois et un poële pour l’hiver.

Habituellement, sur l’Étoile de France, ils sont trois. Cette fois, un autre skipper professionnel et ami de la bande, Jean Horel, s’était invité. Il y avait donc le capitaine, Matthieu Alluin, 34 ans, dont le “jardin” d’enfance est le bassin de Granville ; Geremy Le Squer, 25 ans, Quimperois ancien du lycée maritime de Bastia, fils de marin de la Royale, il navigue sur des vieux gréements depuis ses 19 ans ; Arnaud Goron, Malouin de 27 ans, matelot aussi bien mécano qu’électricien ou menuisier, il vit dans l’Étoile de France. Tous des passionnés de belle marine que se partagent les quarts et les tâches du bord.

Le contrechamp de la photo de gauche : le “salon” et la table de lecture près du poële. Derrière, le bar et, sous la descente, la cuisine.

Au matin de la première nuit, l’équipe du dernier quart sèche ses cirés en dormant au poste de barre.

L’ÉTOILE DE FRANCE

L’équipe du premier quart du matin prend son poste, mais l’électronique - bien cachée - veille sur l’Étoile.

Étoile de France est un authentique vieux gréement. Cette goélette à huniers du type devenu rare de Baltic Trader – qui avait autrefois trois mâts – a été construit en 1938 au Danemark pour faire du cabotage commercial entre l’Europe du Nord et de Portugal. Avec ses 30 m de coque (40 m hors-tout) et ses 220 tonnes à vide, il est propulsé par 480 m2 de voile ou un moteur de 100 cv des années trente, une merveille. Armé à la plaisance, il peut accueillir 30 personnes en croisière (calme !), 100 à quai pour des événements. C’est le navire-amiral de la flotte.


Convoyage...

de l’ Étoile de France

C

’était le dernier jour de fête. Lorient venait de laisser repartir les coursiers pour la dernière étape de la Volvo Ocean Race. Trois des bateaux de la flotte d’Étoile Marine avaient participé à l’événement et repartaient pour la Fête du Nautisme qui allait se tenir à Saint-Malo, siège de la société. Ensuite, l’armada dans son entier partirait au Sables d’Olonne pour le départ du Vendée Globe, etc... Il y a aussi des convoyages plus lointains, aux Antilles, dans les fjords de Norvège, sur des yachts classiques ou des catamarans de course. Bref, pour tous les goûts.

Ni “Costa” ni les Glénans Le principe est simple : ces bateaux ont leur équipage professionnel capable de les mener n’importe où sans l’aide de personne, mais, comme il y a des places libres à bord lors des convoyages, n’importe qui - avec un certificat médical d’aptitude à la voile - peut partager la vie des marins. Selon ses compétences et toujours sous la surveillance d’un “pro”, chacun est invité à participer aux quarts, à la navigation, à la manoeuvre des voiles, à la cuisine, au ménage. Sans obligation, mais voyager comme un sac à voile n’est pas l’objectif. Ceux qui n’aiment pas les croisières lecturepiscine-casino seront servis. Au fil des heures et des jours, on trouve ses marques, on s’intègre, on apprend énormément sans être à l’école de croisière. Donc, nous quittons Lorient aux derniers flonsflons de la Volvo alors que la soirée s’annonce lumineuse. L’Étoile du Roy, la vraie-fausse frégate à trois mâts vedette de cinéma, et le Renard, réplique du corsaire de Surcouf, nous précèdent. Joli départ au son du moteur de Bête Humaine aux cent chevaux qui poussent les deux centvingt tonnes du baltic trader le long des anciens bunkers de la base des sous-marins, puis des fortifications. Le large s’ouvre sur un ciel contrasté et un vent de sud-ouest force trois.

La nuit va être agitée...

Cabotages magazine - 45

Croisière

Nous sommes trois passagers. Pas de trop pour hisser la grand-voile sur ce genre de navire dont chaque espar est un tronc d’arbre. À se demander comment ils font à trois quand nous ne sommes pas là... Les focs sur le beaupré sont envoyés par l’équipage aguerri et harnaché. Nous doublons Groix, le soir tombe, le ciel se grise, le vent forcit et la houle monte sur notre trois-quarts avant. S’annonce une nuit armoricaine pendant que nous est servi un apéro fruits de mer au Muscadet avant le dîner qui se prépare dans la cambuse : des lasagnes à la mesure de ce volumineux bateau de charge et de l’appétit d’ogres de ses marins. Il fait nuit noire quand nous doublons les Glénans. Avec une route qui s’arrondit peu à peu vers le nord-ouest, la houle nous prend de plus en plus sur le flanc et fait rouler ce vieux cargo sans cargaison stabilisatrice.


L’Étoile du Roy, frégate 3 mâts de 36/47 mètres, réplique d’un navire corsaire de 1745, autrefois armé de vingt canons.

Le Renard, une autré réplique, cette fois du bateau de Surcouf le corsaire. Il mesure seulement 19 mètres mais son immense bout dehors le fait passer à 30 mètres ! Il avait 10 canons.


La nuit a dépassé nos prévisions. La pluie arrive, le vent forcit, la mer finit par venir pile sur notre travers. Pas besoin d’une très haute houle pour faire rouler un bateau rond. C’est une question de rythme, de phase comme disent les physiciens qui n’ont bas besoin d’avoir le pied marin. Les couchettes de skai sans filet et les sacs de couchage en nylon transformaient les matelas en toboggans. Il fallait une bonne expérience du sommeil en mer pour fermer l’oeil en pointillé. D’autant que les passavants, d’époque, laissaient passer tout ce qui ruisselait à flot sur le pont, venu de la mer ou des nuages crevés. Pendant le quart de nuit que nous prenons - deux heures - nous abritons notre tablette électronique dans la niche des instruments pour suivre avec le capitaine l’évolution de Franck Cammas dans les derniers milles de la Volvo. Situation incongrue, comme ce navire-câblier qui surgit dans la pluie, éclairé comme une plateforme pétrolière. Puis retour dans la machine à laver.

Au petit matin, on commence à brasser la toile en prévision de l’arrivée à Saint-Malo.

Nuit en machine à laver Au matin, après avoir ramassé la batterie de cuisine répandue dans la cambuse et la grande table en chêne renversée avec les bancs au milieu du carré, nous prenons notre quart, finalement satisfaits de retrouver la station verticale qui permet plus d’ajustements. Et du café chaud avec d’énormes tartines de pâte à tartiner sur du pain beurré. Soixante-dix milles ont été parcourus et nous frôlons le Raz de Sein. Combien de fois l’Étoile de France, du temps où elle s’appelait Julia af Fäborg, a passé ce mortel tas de cailloux ? Il faudra attendre midi pour que Ouessant puis un cap nord-est et une accalmie atténuent puis arrêtent la balançoire. La goélette se stabilise, on peut retirer les cirés, piquer un somme dans les aussières lovées en tas. Arnaud et Geremy, harnachés, font les singes dans le hunier pour envoyer les phares carrés. Moment inoubliable. D’un rapport voilure-poids plus favorable, les deux faux vieux bateaux que sont l’Étoile du Roy et le Renard nous rattrapent et nous dépassent. C’est vexant mais quel spectacle ! C’est là qu’on s’aperçoit qu’on reste des enfants.

L’arrivée à Saint-Malo

Cabotages magazine - 47

Croisière

La seconde nuit sera sèche et plate. Au matin, nous nous réveillons juste à temps pour préparer le bateau à l’atterrissage. Nous marchons au ralenti, attendant l’heure d’ouverture de l’écluse de Saint-Malo. Voiles soigneusement ferlées, énormes parebattages jetés par-dessus bord, nous nous engageons en premier dans l’écluse, suivis des deux autres navires de la flotte. Un tour dans le port et chacun trouve sa place à quai. Nous quittons à regret ce grand shaker dont il aura fallu bien peu d’heures pour qu’on s’y attache fort. Pour 180 € Lorient – Saint-Malo ou 1 500 € pour 30 jours sur un monocoque de course vers Saint-Martin, c’est vraiment à tenter.

L’arrivée dans le bassin du port Vauban de la cité malouine.


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13.05 m X 3.85 m T.E 1.70 m Polyester / pont bois 55CV Volvo D255 de 2006/300h

Chantier Beneteau

11.82m x 3.91m T.E 1.90m Polyester 40CV Yanmar 80h

Goelette version luxe, coque acier, acajou et teck de birmanie. Celle ci privilegie les grands espaces avec 4 cabines de charme /4 salles d’eau. Pouliage de qualite et hublots bronze. En 2011 la goelette s’habille en beige, invitation au voyage.

Ce grand voyageur allie robustesse et séduction. Son univers de navigation est raffiné et chaleureux. Ambiance vieux gréement lié à son pont bois, omniprésence de l’acajou en intérieur, 3 cabines et moteur neuf. Bateau rénové 2011.

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Sept escales de Fécamp à Cannes au fil les enquêtes du commissaire Maigret

Idée de lecture pour la prochaine croisière ou rêver de mer pendant l’hiver : le recueil des enquêtes du commissaire Maigret* dont l’intrigue se déroule au bord de la mer. Fécamp, Étretat, Les Sables d’Olonne, La Rochelle, Porquerolles, Antibes, Cannes, sont les sept escales de cette croisière imaginaire en compagnie du commissaire qui aimait les quais, des Orfèvres ou d’ailleurs. Une vie où les bateaux et l’eau ont tenu une place importante, de sa naissance dans les brumes du Nord aux îles lumineuses de la Méditerranée. Pierre Assouline, journaliste, écrivain, biographe “simenologue” et auteur de l’Autodictionnaire Simenon*, nous raconte la permanente relation de SimenonMaigret avec l’eau, douce et salée, les ports et les stations balnéaires où les “petites gens” - qu’il affectionne - côtoient les petits bourgeois - qu’il porte moins dans son coeur - et les riches - bons et mauvais - dans les palaces et les yachts. * Maigret à la Mer, et l’ Autodictionnaire Simenon sont édités par Omnibus

Dossier réalisé par Christophe Naigeon


p m a c é F

1931 Au Rendez-Vous des Terre-Neuvas

« Et maintenant Maigret, tout seul, poussait la vitre à porte dépolie d’un café du port : Au Rendez-Vous des Terre-Neuvas. C’était juste en face du chalutier Océan, amarré à quai, près d’une file de wagons. Des lampes à acétylène pendaient aux agrès et des gens s’agitaient dans la lumière crue, déchargeant la morue qui passait de main en main et qu’on entassait dans les wagons après l’avoir pesée. (...) Une odeur rance, écœurante, qui ne s’atténuait pas quand on s’éloignait, s’infiltrait, rendue plus sourde encore par la chaleur, dans le bistrot. »

A

ux antipodes de la France, capitales du poisson conservé au sel, Collioure est à Engraulis encrasicolus ce que Fécamp est à la Gadus morhua. Mais l’anchois s’est fait voler la vedette par la morue et la légende de la pêche au “bacalao” a fait celle de Fécamp. Au Rendez-Vous des Terre-Neuvas n’existe plus – ou pas – mais le sombre estaminet que décrit Simenon est à lui seul le concentré de l’épopée de la morue à laquelle participèrent plus de deux mille cinq cents marins fécampois jusqu’en 1970. Sur les quais de Fécamp, il faut fermer les yeux et, si l’odeur écœurante de la morue salée ne se répand plus dans la ville ni celle, plus épicée, du hareng fumé qui lui a succédé, on peut se figurer ces bateaux et ces marins taillés pour la haute mer.

50 - Cabotages magazine

En quelques mots, Simenon fait apparaître les tôles et les agrès rouillés, les filets humides, les moteurs haletants et les quartiers des hommes qui, selon qu’ils étaient au commandement du navire ou à la manoeuvre des filets de pêche, ne se côtoyaient pas pendant les mois de campagne. Mais son talent est surtout de nous laisser imaginer ce qui est hors-champ : le froid, le labeur, la peur, là-bas... cette île de France glacée qui ferme l’embouchure du Saint-Laurent, ces grands bancs où les eaux glacées et tempérées du Labrador et du Gulf stream, celles, douces et salées, du fleuve et de la mer s’entrechoquent pour faire exploser la vie, ces poissons qui valaient de l’or et ont fait la fortune des armateurs et des négociants, créé une société humaine que Zola ne renierait pas.


Photo Olivier Monge

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dans le sillage du commissaire Maigret

PIERRE ASSOULINE : L’eau est très tôt en relation étroite avec la vie d e  G eo rg es   S imen o n . D’abord, il y a les eaux intérieures. Les fleuves et les canaux. Simenon est né à Liège en 1903 dans le quartier d’Outremeuse, la rive populaire du fleuve. Il n’y est pas très heureux. Ni avec sa mère qui lui préfère son cadet plus docile, ni avec ses maîtres qui trouvent l’adolescent doué mais trop indépendant. Toute son enfance, il se dit «quand j’aurai passé le pont sur le fleuve, j’aurai rompu avec quelque chose». Le moyen de “passer le pont” – aller vers d’autres mondes que l’Outremeuse – est d’abord

d’avoir un métier qui ouvre à la découverte. À la fin de la guerre, en 1918, il a seize ans. Il se pointe à La Gazette de Liège et, au culot, sollicite un emploi de reporter. Ça marche ! Pendant quatre ans, il arpente la ville à la recherche des faits divers. C’est une double école : il y acquiert une riche expérience de la société des humains et la rapidité d’écriture, si grande chez lui que cela lui attirera plus tard quelque mépris de la part des “écrivains” parisiens. C’est à l’âge de 20 ans qu’il passe enfin – symboliquement – le pont qui mène de l’autre côté, à la ville bourgeoise et à la gare où il peut prendre un train pour aller plus loin. Ce fleuve, puis son franchissement, auront une importance considérable dans la vie de Simenon. C’était une rupture, en effet, mais c’était surtout la liberté.

Atmosphère simenonienne dans le port de Dieppe dans les années trente. Photographie tirée du film du Hongrois Bela Tarr L’Homme de Londres (2008), d’après le roman éponyme de Georges Simenon, tirée de La République des Livres, le blog de Pierre Assouline

« Un moment où chacun se trouve devant la nécessité de fixer sa destinée, de faire le geste qui comptera et sur lequel il ne pourra plus revenir »

Flânerie

Le fils, 1957


1932 Liberty Bar

Antibes

« Quand Maigret descendit du train, la moitié de la gare d’Antibes était baignée d’un soleil si lumineux qu’on n’y voyait les gens s’agiter que comme des ombres. Des ombres portant chapeau de paille, pantalon blanc, raquette de tennis. L’air bourdonnait. Il y avait des palmiers, des cactus en bordure du quai, un pan de mer bleue au-delà de la lampisterie. (...) Maintenant, il avait à peu près compris la Côte d’Azur : un long boulevard partant de Cannes et finissant à Menton, un boulevard de soixante kilomètres, avec des villas et parci par-là un casino, quelques palaces. (...) Il contourna un angle, puis un autre. Et soudain ce ne fut plus Cannes, avec ses grands immeubles blancs dans le soleil, mais un monde nouveau, des ruelles larges d’un mètre, du linge pendu sur des fils de fer, d’une maison à l’autre. »

A

vec sa machine à écrire, Simenon ne décrit pas les rues d’Antibes comme Bechet les racontait avec sa clarinette. Dans les Rues d’Antibes il se passe des choses bien diffférentes, côté soleil ou côté ombre. Le lumineux jazz de Sidney n’est pas un blues et le blues de Georges est un roman bien noir. Il n’y a plus de Liberty Bar dans l’arrière-cour de la ville des riches et des villas du “cap”. Les ruelles d’Antibes sont retapées, pomponnées. La vieille ville a pourtant gardé son caractère, même en pleine saison touristique. Le quartier de la halle où l’inspecteur Maigret allait boire un de ses multiples petits blancs sur le chemin du rade sordide de Jaja et Sylvie abrite

52 - Cabotages magazine

quelques bonnes tables qui ont su rester simples et bon marché. Si vous avez trouvé une place pour votre modeste bateau au Port Vauban où se pavanent les mega-yachts, marchez au-delà front de mer. Pas ­seulement pour le patrimoine historique, mais aussi pour le musée Picasso, le musée archéologique, le Marineland, etc. Difficile ici de faire un choix lors d’une courte escale ! Si vous aimez marcher un peu, le Cap Antibes est un promontoire rocheux couvert de pins et de villas de luxe, certes, mais cela vaut la peine de monter pour la vue au phare et à la chapelle de la Garoupe et, pourquoi pas, suivre le chemin du littoral sur 25 kilomètres de côtes !


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dans le sillage du commissaire Maigret

CABOTAGES : Mais traverser un fleuve à pied n’est pas encore naviguer, ni sur les canaux, ni sur la mer… PIERRE ASSOULINE : Cela ne va pas tarder. Quand le train le dépose à Paris, très vite il se distingue des autres écrivains du moment par sa liberté de ton, sa rapidité d’écriture, le foisonnement de sa production. Avant d’être un écrivain, c’est un professionnel de l’écriture qui a déjà écrit – sous dix-sept pseudonymes ! – des feuilletons et des contes galants dans des journaux : Le Matin, Frou-Frou, Paris-Flirt… mais aussi des romans populaires faits à la va-vite, pour apprendre le métier, pour “gâcher du plâtre” comme il dit. Mais, peu à peu, on y voit sourdre, se construire par petites touches un personnage qui pourrait bien devenir un personnage récurrent de policier, qui fume déjà la pipe… La vraie naissance de l’inspecteur aura lieu sur l’eau, pas à Paris. Car, cinq ans après avoir enjambé la Meuse, il décide d’embarquer. Sans aucune expérience de la navigation, il achète le Ginette, un canot à moteur d’à peine plus de cinq mètres. Il y entasse sa femme Tigy, la cuisinière “Boule”, le chien Olaf, le matériel de camping dans l’annexe et, pendant six mois, il parcourt la France par les canaux, écrivant en plein air, sur le pont. Cette expérience où il renoue avec la liberté à la découverte de la vie de la batellerie inspirera de nombreux romans sur la vie des mariniers.

« J’ai acheté le Ginette, un bateau de cinq mètres cinquante, une espèce de grand youyou qui avait du appartenir à un yacht, je lui ai fait faire un toit et, pendant l’été 1928, j’ai commencé mon tour de france par les rivières et les canaux : à ce moment là, c’était encore possible ». Préface à Simenon journaliste, édition de 1975 in « À la découverte de la France » Dans le port de Fécamp, l’une des rares photos de l’Ostrogoth (ci-contre). Collection particulière.

Flânerie


Cannes

1938

mondains qui s’y déroulent : le festival du cinéma, le salon nautique, le Grand prix de Monaco, etc. Le reste du temps, cela vaut la peine d’y faire escale pour profiter de l’indéniable charme de cette ville quand elle vit normalement. La Croisette mérite la promenade et la vieille ville invite à la flânerie. De sa fenêtre de l’hôtel imaginaire Excelsior (qui n’existe qu’à Nice et à Fréjus) l’inspecteur pouvait effectivement voir les îles de « Des quantités de choses merveilleuses étaient rassemblées comme par miracle Lérins, presque désertes dans les à cette minute. D’abord le paysage, que Maigret ne voyait pas, puisqu’il avait années d’après-guerre, devenues les yeux clos, mais qu’il savait là, à portée de son regard : la surface unie de la depuis l’un des mouillages les plus Méditerranée telle qu’on la découvre des grands hôtels de Cannes, avec à droite fréquentés, concurrent dans la catéle fourmillement des mâts de bois vernis du port le plus luxueux du monde et au gorie “embouteillages nautiques de l’été” de la baie de Pampelone. loin, tout au loin, dans l’embrasement de la lumière, les îles de Lérins. Et, pourtant, l’île-abbaye cisterLes bruits mêmes, qui montaient jusqu’à Maigret, étaient en quelque sorte des cienne de Saint-Honorat est, horsbruits de luxe. Les klaxons des autos n’étaient pas les klaxons ordinaires mais, saison, un havre de paix et un pour la plupart, des appels de limousines longues et scintillantes, conduites par bonheur pour les yeux. L’île Saintedes chauffeurs en livrée. » Marguerite est la plus grande. Le fort Royal édifié par Richelieu et annes revendique avec Port-Camargue la renforcé par Vauban fut une prison. On visite les place de premier port de plaisance d’Eu- casernements et les cellules dont celle supposée rope. Maigret qui le qualifiait de “plus du Masque de fer. De cela, Simenon ne dit rien luxueux du monde” ne pouvait admirer les voi- dans cette courte nouvelle. Son sujet est la vie liers “classiques” qu’au Vieux-Port. Ni la Marina d’un palace où les riches clients choyés vivent ni La Bocca n’accueillaient la plaisance des mil- dans une bulle de champagne. Autour d’eux, ils liardaires. Mais ce port est presque inaccessible sont des centaines à les servir mais aussi à les l’été et totalement lors des grands événements voir, les entendre. Alors, quand un cadavre...

L’Improbable Monsieur Owen

C

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Flânerie...

dans le sillage du commissaire Maigret

« Toute ma vie, j’ai aimé le brouillard pour le mystère qui entoure la ville ou la campagne, les rivières ou la mer (…) j’aime quand même le brouillard, probablement parce qu’il déforme assez la réalité pour lui donner une autre dimension et une autre poésie. » Le Prix d’un Homme, dictée du 5 décembre 1977 CABOTAGES : Pour la navigation, Georges Simenon ne semble pas avoir la vocation d’Henry de Monfreid.

Les exergues sont tirés de l’Autodictionnaire Simenon, de Pierre Assouline, Omnibus Ed. 2009

Flânerie

PIERRE ASSOULINE : C’est vrai. Après cette première expérience fluviale, il passe son brevet de capitaine et Tigy devient la mécanicienne du nouveau bateau qu’ils achètent, l’Ostrogoth, un cotre de 10 mètres. Le projet est d’aller naviguer dans le grand Nord. Mais il ne sera en effet ni Monfreid ni Conrad. Pour lui, l’eau, c’est la liberté, mais ce n’était pas un homme au pied marin et à la vocation hauturière. Contrairement aux romans que vous avez choisis, cet homme qui aimait la brume, la pluie, les ambiances grises, n’avait pas la fibre méditerranéenne ou atlantique. C’est véritablement un urbain d’Europe du Nord, pas l’homme des grandes traversées, sauf en paquebot, plus tard, pour aller en Amérique.

Les projets hauturiers avorteront, mais, sur les canaux de Flandre qui menaient l’Ostrogoth vers les mers froides, il y aura une naissance soudaine, celle de Maigret, en 1929. Il raconte : « comme tous les matins, je me suis levé avant six heures. Tout le monde dormait. J’ai pris ma machine et j’ai commencé à écrire. Il y avait de la brume. Et de cette brume, j’ai vu surgir mon personnage avec son chapeau, sa pipe, son pardessus, un peu enveloppé, parlant peu…». Voilà. Ce fut une intuition d’écrivain que je peux bien comprendre. Rien de construit consciemment. Le personnage s’impose tout seul. Une fois rentré à Paris, Simenon trouve un nom pour son commissaire, Jules Maigret. Il en précise les contours et écrit ses premiers Maigret. Il connaît tout de suite le succès. Trois Maigret sortent d’un coup et sont adaptés au cinéma dans la foulée. Cela n’arrive jamais à personne ! Et ce succès n’a jamais cessé depuis.


1948 Les Vacances de Maigret « La rue était étroite, comme toutes les rues du vieux quartier des Sables-d’Olonne, avec des pavés inégaux, des trottoirs dont il fallait descendre chaque fois qu’on croisait un passant. (...) Il marchait le long du Remblai, en s’arrêtant de temps en temps. Il regardait la mer, les silhouettes multicolores qui devenaient de plus en plus nombreuses dans les vagues du bord. Puis, arrivé à hauteur du centre de la ville, il tournait à droite, par une rue étroite, et atteignait le marché couvert. Il faisait le tour des étals aussi lentement, aussi sérieusement que s’il avait quarante personnes à nourrir. Il s’arrêtait surtout devant les poissons qui frétillaient encore, devant les crustacés, tendait un bout d’allumette à un homard qui le saisissait de sa pince... (...) »

Les Sables d’Olonne S

candale ! La série télévisée “Maigret” la plus récente, avec Bruno Kremer et réalisée par Pierre Joassin, a choisi un triste bourg de Wallonie pour décor aux Vacances de Maigret ! En réalité, l’histoire se passe aux Sables d’Olonne, dans ses ruelles populaires et ses périphéries bourgeoises, mais surtout sur le Remblai qui signe la géographie de la station de Vendée. Il n’y avait pas les bateaux de course du Globe, mais les successeurs des Trains de plaisir qui amenaient la bourgeoisie du Second empire vers

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« la plus belle plage d’Europe », déversaient les congés payés aux Sables. Le soir, on se promène toujours sur le Remblai (ramblas de Barcelone...) construit vers 1515 pour protéger la ville des fureurs de l’Océan et refait sur 550 mètres en 1760 avec les graviers qui lestaient les navires. Rallongé au XIXe siècle, il permettra de créer le quartier du Grand casino. Quand Maigret y enquête sur la mort d’une petite vendeuse de billets de tombola, la municipalité prépare la dernière opération : son élargissement et la construction de trois rotondes pour en faire, avec la plage, le lieu touristique le plus fréquenté de la station.


Flânerie...

CABOTAGES : Jules va donc pouvoir voyager au gré des assassinats, ou plutôt les assassins, au gré des voyages de Georges. La Méditerranée ou l’Atlantique en premier ? PIERRE ASSOULINE : L’Atlantique. Dans les années trente, Simenon choisit de vivre en Charente Maritime. La Rochelle occupe une place très importante dans sa vie. C’est une ville qu’il a adorée. Pourtant, il ne s’est pas installé là, mais dans une gentilhommière du XVIe siècle à environ huit kilomètres de là, La Richardière, entre Nieul-sur-Mer et Marsilly.

Il venait tous les jours à cheval en ville et s’arrêtait au Grand Café. Il était un si bon et si célèbre client que le propriétaire fit sceller un anneau entre deux pavés de la place d’Armes pour attacher son cheval. C’était “l’anneau de monsieur Simenon”, personne d’autre ne pouvait s’en servir. La fille du propriétaire, héritière du café, lorsqu’elle a vendu l’affaire, a fait desceller l’anneau qu’elle garde encore chez elle.

dans le sillage du commissaire Maigret

La Rochelle a notamment inspiré Les Fantômes du Chapelier, qui révèle vraiment l’esprit de La Rochelle. C’est une ville particulière. C’est, entre autres choses, la seule ville de France dont on peut traverser le centre quand il pleut sans se mouiller, en restant sous les arcades qui courent dans toutes les rues. Il y a aussi la couleur des pierres blanches, la lumière du ciel, et ce phare dans la ville… (Ndlr : voir Maigret à l’École qui se passe dans le village imaginaire de Saint-André-surMer, sans doute pseudonyme ou bien transposition romanesque de Nieul-sur-Mer). Mais l’envie du journalisme et des voyages le reprend et, comme grand reporter, il part en Afrique, puis revient en Europe et écrit pour Paris-Soir, des articles qui reçoivent un accueil mitigé en raison de ses investigations et de ses analyses contestables, notamment sur l’Allemagne, l’affaire Stavisky… Alors, pour se mettre à distance, il prend la mer – sur des paquebots – pour traverser les océans vers New-York, l’Amérique latine, les îles du Pacifique, la mer Rouge.

L’affiche de l’adaptation par Claude Chabrol des Fantômes du Chapelier, Une des rues à arcades de La Rochelle, la propriété de Simenon près de Nieul-surMer, La Richardière

« J’ai acheté presque par hasard à Nieul-sur-Mer, près de La Rochelle, une maison (…) où j’aurais aimé, enfant, aller passer des vacances avec une de mes grand-mères. Elles n’avaient, hélas, pas de maison de campagne, et c’est probablement à cause de ce désir refoulé que, bien que n’ayant pas d’enfants, j’aménageai Nieul en “maison de grand-mère” ». La Femme endormie, Dictée du 22 février 1979

Flânerie


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Porquerolles

1949

Mon Ami Maigret « L’auto, après une demi-heure, s’arrêtait sur une pointe rocheuse où on ne voyait qu’une auberge de style provençal et quelques maisonnettes de pêcheurs peintes en rose et en bleu pâle. (...) À mesure qu’on avançait sur l’eau soyeuse, les contours de l’île se précisaient, avec ses caps, ses baies, ses anciens forts dans la verdure et juste au milieu, un petit groupe de maisons claires, le clocher blanc d’une église sortie d’un jeu de construction. (...) Le port était minuscule, avec une jetée à gauche, une pointe rocheuse, couverte de pins maritimes, à droite. Dans le fond, des toits rouges, des maisons blanches et roses parmi les palmiers, les mimosas et les tamaris. (...) La place était vaste et nue, encadrée d’eucalyptus, de maisons en couleur, avec, au sommet, la petite église jaune à clocher blanc. On voyait plusieurs cafés aux terrasses ombragées. (...) La terrasse de l’Arche, sur la place, était plus large que les autres, limitée par une murette et par des plantes vertes. À l’intérieur, il faisait frais, un peu sombre, ce qui n’avait rien de désagréable, et on était saisi tout de suite par l’odeur pointue de la cuisine et du vin blanc. »

ix mille visiteurs par jour ! La navette que prirent Maigret et son acolyte de Scotland Yard Mr. Pyke, aborde à Porquerolles toutes les demi-heures et les plaisanciers font la queue dès sept heures du matin pour espérer y avoir une place. Quant aux mouillages de la plage d’Argent ou de la Courtade... Une fois le bateau amarré, il faut prendre son sac, de bonne chaussures ou un vélo (après onze heures, il n’y en a plus !). Porquerolles offre une arborescence de chemins qui permettent de découvrir les sentiers escarpés et les paysages tourmentés de la face sud, les quatre plaines et les nombreux forts. Le plaisancier, tour à tour caboteur, cycliste ou randonneur a ainsi le privilège de saisir les reflets de cette perle du patrimoine naturel. L’île a été acquise pour sa plus grande partie par l’État en 1971 et placée sous la protection du Parc National de Port-Cros et du Conservatoire Botanique National Méditerranéen de Porquerolles. Grâce à cela, la préservation n’est pas un vain mot, malgré l’afflux de visiteurs. En découvrant ces merveilles on se prend à regretter l’époque où il était possible d’acheter un tel bijou pour un million et cent francs, comme François Joseph Fournier, après enchère à la bougie, et d’en faire cadeau à l’amour de sa vie…


Flânerie...

dans le sillage du commissaire Maigret

CABOTAGES : Il abandonne définitivement le journalisme et la côte Atlantique ? PIERRE ASSOULINE : Non. Pas totalement. Il revient à La Richardière juste un peu avant la guerre. Quand elle éclate, il se trouve coupé de son pays envahi par l’armée allemande. Il s’occupera des réfugiés belges en France, mais restera retiré, non plus en Charente mais en Vendée, à Fontenay-le-Comte, essentiellement préoccupé de littérature. C’est là qu’il écrit La Veuve Couderc. Mais la presse de l’époque, bien évidemment collaborationniste, publie les bonnes feuilles de quelques-uns de ses romans et, surtout pas moins de neuf de ses œuvres seront adaptées au cinéma pendant l’occupation ! Cela lui vaudra quelques ennuis à la Libération. Il sera assigné à résidence pendant six mois dans un hôtel des Sables d’Olonne, ville également choisie parce qu’il souffrait d’une pleurésie. Sans cesse surveillé par le commissaire local, il se baladait sur le remblai et s’ennuyait à mourir (Ndlr : voir Les Vacances de Maigret).

Son dossier “collaboration” sera classé sans suite, mais pour tirer un trait sur ces années sombres, il part en Amérique, en Arizona, dans le Connecticut, en Nouvelle Angleterre, et en Floride où il peut mener la vie sauvage qu’il aime tant et qu’il retrouvera plus tard à Porquerolles...

Le Queen Mary entrant dans le port de New York où Simenon écrivit plusieurs romans, Porquerolles, île “caraïbe” de la Méditerranée

« Je vis ici à peu près nu, au bord de l’eau, dans un décor assez semblable à Tahiti. Je nage et je pêche. Je travaille beaucoup. Je ne vois à peu près personne et il y a des semaines que j’ai oublié comment on porte un veston et une cravate. » Lettre à Frédéric Dard, Bradenton Beach, Floride, 5 novembre 1946.

Flânerie

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1950

Étretat

Maigret et la vieille Dame « Il leva la tête et regarda avec un certain respect les nuages gris qui devaient venir du large. Car la mer, pour lui qui était né et avait passé son enfance loin dans les terres,

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ans l’Aiguille Creuse, Maurice Leblanc avait, cinquante ans avant Simenon, fait d’Étretat le centre d’une des aventures d’Arsène Lupin. Le trésor des rois de France se trouvait dans l’une des aiguilles taillées par l’érosion dans les falaises crayeuses du pays de Caux. Peut-être avait-il été inspiré par les nombreux souterrains qui ont été creusés dans cette roche tendre par la main de l’homme, aidée par les rivières qui s’y sont, depuis les temps géologiques, frayé un chemin vers l’aval. On raconte qu’Étretat, grâce à ses nombreux boyaux secrets, permit à certains personnages importants – voire des monarques déchus – de s’échapper discrètement vers l’Angleterre alors que l’endroit n’est pas le plus proche de la côte britannique. Les Allemands, qui cherchaient tous les moyens de truffer la côte de canons et autres pièges contre le débarquement, firent un inventaire de ces laby-

c’était resté ça : des filets à crevettes, un train-jouet, des hommes en pantalon de flanelle, des parasols sur la plage, des marchands de coquillages et de souvenirs, des bistrots où l’on boit du vin blanc en dégustant des huîtres et des pensions de famille qui ont toutes la même odeur, une odeur que l’on ne trouve nulle par ailleurs (...) Il savait bien que ce n’était pas vrai, évidemment, mais cela lui revenait malgré lui chaque fois qu’il approchait de la mer, l’impression d’un monde artificiel, pas sérieux, où rien de grave ne pouvait advenir (...) Il alla regarder la mer, les falaises blanches des deux côtés de la plage de galets ; il y avait des adolescents, des jeunes filles qui dansaient dans les vagues, et d’autres, derrière l’hôtel, qui jouaient au tennis (...) Étretat apparaissait, candide, innocent, avec ses maisons trop petites, trop jolies, trop fraîchement peintes pour un drame, et les falaises émergeaient de la brume exactement comme sur les cartes postales exposées à la porte du bazar. ».

rinthes souterrains. Tout ces documents ont disparu mais, malgré les éboulements et les colmatages des promoteurs immobiliers, bon nombre de ces passages existent encore, trop dangereux pour être ouverts aux visites. Étretat n’est pas un port. Ni un échouage facile. Sa plage n’est pas de sable et les galets ne sont pas plus agréables aux coques de nos bateaux qu’à nos fesses de petits baigneurs. C’est d’ailleurs une des raisons du relatif retard dans son développement touristique. Mais la proximité de Paris par le train y a apporté beaucoup de monde à une époque où la serviette sur le sable n’était pas le but des vacances à la mer. L’histoire de Maigret et la Vieille Dame se passe en fin de saison quand, bientôt « la plage déserte serait rendue à la mer et aux mouettes ». On n’est pas loin de Fécamp et on y parle beaucoup de pêcheurs. Le dernier a cessé son activité dans les années 1990. Dommage.


Flânerie...

CABOTAGES : L’inspecteur va enfin découvrir les lumières de la Méditerranée ! PIERRE ASSOULINE : Il s’éloigne de la mer, il y revient… mais elle ne quitte jamais son imaginaire. Car en permanence son œuvre est faire de réminiscences. Chez lui, la décantation c’est environ trois ans avant d’écrire sur un endroit où il est resté. Michel Lemoine a fait le tableau : la ville où se déroulent le plus grand nombre de romans est Paris, ensuite Cannes et la Côte d’Azur.

dans le sillage du commissaire Maigret

tout. Il loue, puis achète une maison. Marc Simenon, son premier enfant, en a hérité et l’actrice Mylène Demongeot, son épouse, y habite encore. Ce qui lui plait, c’est la vie animale qu’il peut avoir sur l’île. C’est un homme extrêmement simple. Vivre pieds nus, en short, sur des plages désertes, c’est le paradis. Il y achète un “pointu” avec lequel il navigue et pêche aux alentours. (Ndlr : voir Mon Ami Maigret). Un certain nombre de livres sont situés à Porquerolles, notamment Le Cercle des Mahé dans

« Ensuite, j’ai pêché au filet. Comme on dit dans le midi, j’étais mordu. J’ai pêché des jours entiers, des nuits entières dans le “pointu” que je m’étais fait construire. (…) Et le jour est venu où la vue d’un poisson mort, le geste de le tuer, me sont devenus insupportables. »

©GSFP Ltd, collection John Simenon, tous droits réservés

De la cave au grenier, dictée du 19 novembre 1975

lequel des signes curieux sont dessinés sur le sable… Porquerolles a joué un vrai rôle dans sa vie et dans son imaginaire littéraire. Et puis, ce sera fini avec la mer. Dans les années soixante et jusqu’à sa mort, Georges Simenon habitera en Suisse, mais au bord de la mer helvétique, le lac Léman. Encore des bateaux, de l’eau, alors que ni lui ni son héros Maigret n’en buvaient vraiment beaucoup…

Le Potam, le pointu de Simenon à Porquerolles

Flânerie

Dans les années cinquante, il revient en France. Après avoir été reçu avec les honneurs à Paris au 36 Quai des Orfèvres, il s’installe à Mougins, puis à Cannes (Ndlr : voir L’improbable Monsieur Owen). Mais sa grande passion méditerranéenne sera l’île de Porquerolles. Il faut imaginer Porquerolles à l’époque : c’est deux familles qui en sont propriétaires, quelques bicoques, un bar, un hôtel et c’est


1954

La Rochelle L Maigret à l’École « Cela rappela à Maigret la plage de Fourras, dans le soleil, des huîtres qu’il avait mangées, à cette heure-ci, vers dix heures et demie du matin, à la terrasse d’un petit bistrot, arrosées d’une bouteille de vin blanc du pays dans le fond de laquelle il y avait un peu de sable. - Nous sommes dans le pays des bouchots et des parcs à huîtres. Tout le monde en possède au moins un bout. Cela rapporte gros. Ils sont riches. (...) Maigret le suivit dans la maison de pierre grise. Toutes les autres maisons du village étaient peintes à la chaux, les unes d’un blanc cru, les

autres d’un ton plus crémeux, et les toits roses donnaient à l’ensemble un air guilleret. (...) À quelques kilomètres de La Rochelle, un léger brouillard, qui n’était pas le brouillard de la campagne mais celui de la mer, se mêla à l’obscurité et un phare apparut un moment dans le lointain. (...) La portière à peine ouverte, on sentait une haleine forte et fraîche qui venait du trou noir où les voies avaient l’air de finir et, en regardant avec plus d’attention, on distinguait des mâts de bateaux, des cheminées qui se balançaient doucement, on entendait des cris de mouettes, on reconnaissait l’odeur de la marée et du goudron. »

e roman Maigret à l’École est situé dans un village au toponyme imaginaire. C’est assez rare chez Simenon qui, la plupart du temps, a situé les enquêtes de son commissaire dans des endroits identifiables. Cherchez SaintAndré-sur-Mer, dans le département de Charente-Maritime ou ailleurs en France, il n’existe pas. En revanche, Nieul-sur-Mer où l’écrivain avait acquis une gentilhommière (la Richardière, sur la route de Marsilly, voir l’interview de Pierre Assouline) correspond en grande partie aux quelques descriptions et indications topographiques qui sont faites de “Saint-André” : « à une quinzaine de kilomètres au nord-ouest de La Rochelle, pas loin de la pointe de l’Aiguillon ». On est dans le pays des bouchots et des exploitations ostréicoles, entre sable et vase épaisse, parmi des centaines de cours d’eaux qui se vident à marée basse, au bord de cette mer qui prend des couleurs café-crème, dans cette lumière particulière, pastel lavé. En fait, l’histoire a lieu dans un espace sans rapport avec cet univers marin. C’est un huis-clos rural entre une école et quelques maisons de village où il n’est question que de l’instituteur, du postier, du bistrotier et des gens aux aguets derrière les fenêtres. Comme souvent dans les histoires que raconte Simenon, cette parcimonie incite à imaginer en dehors de la marge des pages et, là, c’est La Rochelle, qui en fait l’arrière-plan invisible. Il suffit que l’inspecteur soit arrivé en train, via Poitiers et Saintes, qu’il décrive en quelques mots (voir l’encadré) la présence de l’océan et des bateaux, pour que cette image persiste tout au long du récit où la mer est effacée au profit des personnages qui occupent tout l’espace. Peut-être parce que dans ces villages la mer n’est présente que lorsqu’elle remonte deux fois par jour, chargée de vase, dans les étiers - ou les achenaux, selon les parlers locaux - ou bien parce que les ostréiculteurs ne sont pas des marins mais des paysans de la mer, ou encore parce qu’il n’y a là ni plages, ni cabines de bain, ni hôtels à touristes, ni vue imprenable sur l’horizon bleu, c’est le moins maritime des sept romans de Maigret à la Mer.

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Christophe Naigeon


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Flânerie...

dans le sillage du commissaire Maigret

Les pipes et... « Je n’ai jamais été fumeur de cigarettes ou de cigares. La cigarette ne fait pas partie de nous. Nous la prenons dans une boîte en carton, nous l’allumons et nous en jetons négligemment le bout. Il en est de même pour les cigares. La pipe est un véritable objet, un objet personnel, qui finit par faire corps avec vous. J’ose à peine dire que j’en possède à peu près trois cents, bien qu’il n’y en ait qu’une vingtaine dans ma petite maison rose. Eh bien, malgré le nombre, je les connais toutes, comme des amies ». De la Cave au Grenier, Dictée du 24 septembre 1975

... les verres de Jules et Georges À cette époque on fumait dans les bureaux et on buvait pendant le service... Simenon et Maigret avaient toujours la pipe à la bouche et souvent le verre à la main. Tabagiques, alcooliques ? Pas plus que les détectives de Chandler et Chase...

« À bord du Ginette, lorsque j’ai fait le tour de France par les canaux et les rivières, j’avais l’habitude, dans le midi, de remplir une bombonne de dix litres à des pompes qui ressemblaient à des pompes à essence. Je buvais lorsque j’avais soif, sans jamais être ivre. À bord de l’Ostrogoth, en Hollande, rarement du vin, trop cher dans le pays (j’en ai fait venir une barrique de France à Stavoren), mais, de temps en temps, un verre de genièvre. C’est vers cette époque, (...) qu’écrivant les premiers Maigret j’ai pris l’habitude de travailler au vin. Et, oui ! Dès six heures du matin. » Quand j’étais vieux, 10 janvier 1961


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