Cabotages Magazine No4 Hiver 2012

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CABOTAGES

CABOTAGES le magazine du nautourisme

Trimestriel - n°4 Hiver 2012

Destination

N O L TOU une rade un port une ville Escales Mortagne-sur-Gironde Hyères-les-Palmiers L’Île Rousse

Flâneries Le Petit Train de la Côte Bleue



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SOMMAIRE 6-14

BLOC-NOTES DE LA MER

La mer, dans toutes ses couleurs :

Escales

MORTAGNE-SUR-GIRONDE HYÈRES-LES-PALMIERS L’ÎLE ROUSSE 17-38

LE PETIT TRAIN

Flâneries

DE LA CÔTE BLEUE

Une croisière insolite, par la terre et par la mer

39-61

30-39 Destination

TOULON

Une rade convoitée un port multiple, une ville qui bouge

62-79

LES PORTS : 90-95 HISTOIRE : 81-83

NATURES : 84-87

PLONGER : 88-89

LE NAUTIBLOG : 102

L’AGENDA DU NAUTISME : 103-105 SÉCURITÉ : 96-97

BATEAUX : 99-101

LES LIVRES DE BORD : 106


L’Hérault, département marin !

crédit photo : conseil général de l’Hérault

Plus de 10 000 anneaux répartis dans 19 ports, près de 90 km de littoral, le nautisme est au cœur du patrimoine et de la culture héraultaise.

Gestion des ports départementaux, développement de la plaisance, soutien aux filières professionnelles, préservation de l’environnement, tourisme : le Département de l’Hérault entretient son identité méditerranéenne.

herault.fr


Cabotages est édité par la SARL Bastaque Editions, 16 rue Garenne, 34200 Sète Alain Pasquet, gérant Tél : 04 67 17 14 30 / Fax : 04 67 17 14 32

Administration, service commercial : Alain Pasquet, Directeur de la publication direction@cabotages.fr Julia Chaine, Assistante de direction et gestion intranet : contact@cabotages.fr Partenariat-publicité : Pierre Arnaud : pierre.arnaud@cabotages.fr Thierry Dutto : thierrydutto@cabotages.fr Antoine Penot : antoine.penot@cabotages.fr Imprimerie : Tugrupografico - Espagne ISSN : 2112-4868 / CPPAP : 0613 K 90890 Dépôt légal : Janvier 2012 Date de parution : Janvier 2012 Encre : SunChemical Papier : PEFC libre de chlore

ÉDITO

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Direction de la rédaction : Christophe Naigeon : redaction@cabotages.fr Rédacteurs navigateurs : Djinn et Christophe Naigeon Emma et Bastien Chazelles Guy Brevet, Claude Roger Ont collaboré à ce numéro : David Bocquelet, Emmanuel Van Deth, Nikita Tronc, Julien Collet Copyright : Cabotages Tous droits de reproduction même partielle, par quelque procédé que ce soit, réservés pour tous pays. Fabrication, iconographie : Emmanuelle Grimaud, maquette, infographie : studio@cabotages.fr Michel Léo Ménella : dessins Site web www.cabotages.fr Claude Despretz, webmaster claude@cabotages.fr Abonnement magazine : 16 rue Garenne - 34200 Sète 04 67 17 14 30 - abonnement@cabotages.fr Diffusion : MLP Service des ventes : CAURIS MEDIA Stéphane LELUC Tél : 01 40 47 65 91

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L’équipe de Cabotages vous souhaite une bonne année et vous rappelle que le plus dangereux en mer, c’est la terre.


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e s s a p r i a d a n a C e L ! s n a b u a h s e d s a au r

M

Une croisière côtière tranquille. Et tout à coup, c’est comme une attaque aérienne : un bombardier d’eau fonce vers l’eau pour écoper sans avoir, selon toute apparence, vu un voilier à moins de cent mètres de nous !

i-août 2011, faute de vent suffisant, nous naviguons au moteur le long de la côte ligure, proches du rivage, à deux milles environ à l’Ouest de San Remo. Si notre génois est enroulé, notre grand voile et notre tape-cul sont déployés, marque de notre indéfectible optimisme quant au retour hypothétique d’une brise... Nous ne sommes que quelques bateaux à caboter ici, dans un sens ou dans l’autre. Il y a notamment un Grand Soleil 40, qui fait route

devant nous, un peu plus près du bord. Le temps est beau, nous ne voyons rien de spécial dans le ciel, pas de panache de fumée, pas de trace brun-rouge dans le ciel, pas d’odeur de pin brûlé. Le canal 16 de la VHF est ouvert, pas de message particulier. C’est alors que nous voyons passer un premier Canadair, et un second quelques minutes plus tard. Ils ne font aucun signe d’ailes. À demi-mille plus au large que nous, sur une trajectoire parallèle à la nôtre et à la côte, ils écopent

une première fois. Nous les regardons faire, tranquilles et curieux. Ils disparaissent ensuite derrière la chaîne de montagnes côtière et, selon toute apparence, vont opérer dans la vallée, de l’autre côté, hors de notre vue. Nous poursuivons notre route, intéressés et attentifs, l’appareil photo en batterie en attendant une éventuelle prochaine rotation. C’est alors que, à peine visible sur le fond de collines boisées, surgit l’un des deux bombardiers d’eau, sur une trajectoire perpendiculaire

à la nôtre. Nous pensons qu’il va faire une boucle et passer derrière nous comme tout à l’heure (voir photo 1 ci-dessus). Mais sa trajectoire s’incurve au contraire sur sa droite et nous comprenons qu’il va passer devant nous. Nous mettons le moteur au point mort, pour nous tenir prudemment le plus possible à distance. Au lieu de virer pour un écopage au large et parallèle à nous, l’avion pique vers l’eau dès les derniers immeubles du bord de mer survolés.


BLOC-NOTES DE LA MER Le voilier devant nous le voit arriver sur son travers tribord sur une trajectoire qui pourrait bien mener à une collision. Tout va se passer très vite. Les sept photos de cette page ont été prises dans un laps de temps de dix-neuf secondes ! À sa vitesse de 110 km/h, le Canadair aura parcouru 550 m entre la première et la dernière photo. Au moment où l’avion commence à écoper, le Grand Soleil poursuit sa route, même cap (photo 2). Puis le Canadair s’approche et le skipper comprend qu’il y a vraiment danger. Il commence à virer à tribord toute (photo 3). C’est ensuite une course contre la montre entre la rapidité du virement et celle de l’avion (deux secondes entre les photos 3 et 4). Sur la photo 5, le virement est presque fini et le Canadair, sorti de l’eau, est encore très bas. Deux secondes après (photo 6), le voilier est parallèle à l’avion qui s’élève à trois ou quatre mètres au-dessus de l’eau. La photo suivante (n°7, agrandie), est celle de la seconde de vérité pour l’équipage. L’appareil jaune et rouge passe au ras des haubans du voilier, les extrémités des ailes (28,60 mètres d’envergure) plus bas que les barres de flèche. Encore une seconde et nous sommes rassurés, la collision a été évitée. De très peu.

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14 h 08 ‘ 09”

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14 h 08 ‘ 18”

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7 14 h 08 ‘ 28”

14 h 08 ‘ 27”

Impossible de savoir exactement à quelle distance des haubans l’aile est passée. Mais il est évident que si le skipper n’avait pas viré à temps, c’était la catastrophe. Sur la photo 7, il n’y a peu d’effet d’écrasement des perspectives qui serait du à un téléobjectif puissant. Les clichés ont été tirés avec une focale de 150 mm. Le voilier a eu chaud. Très chaud. Sans ses voiles, n’a-t-il pas été vu du pilote ? Nous ne le savons pas et ne le saurons jamais. Ce que nous savons avec certitude est qu’il n’y a eu aucun avertissement préalable par radio, ni en Italien ni en Anglais, et que le changement à 90° de l’axe, soudain transversal, de l’écopage a eu de quoi surprendre tous les bateaux qui faisaient route à ce moment-là et avaient maintenu leur cap en fonction des premiers passages, parallèles à la côte. Moralité, si vous voyez tourner des Canadair, hissez une voile bien visible et faites route vers la côte, le plus près possible, là où il y a moins de chances que l’appareil vienne écoper. Ce n’est peut-être pas suffisant, mais c’est toujours mieux que rien quand la VHF ne transmet aucun message. En France, les sémaphores envoient au moins un avertissement aux bateaux. Nous n’avons jamais entendu parler d’accidents de ce genre, mais nous avons bien failli en photographier un... Vous en trouverez quelques vidéos édifiantes sur le web ! C.N.


: e c n a s i a l p a l ! e e d v é a t r i r g u . . c . e d Sé a r g é d Les statistiques des accidents e s a ç en mer font apparaître une inquiétante C

augmentation des accidents : 36 morts en 2011 pour 24 en 2010 ! Les équipements et les lois ne font pas tout, les hommes, les mentalités et certaines pratiques “consuméristes” sont largement en cause. Ajoutez à cela quelques pratiques bizarres...

omme tous les ans à la mi-octobre, les différentes parties prenantes à la sécurité en mer se sont réunies à Toulon pour faire le point sur la saison écoulée. Le bilan n’est pas fameux : les 1958 opérations  de  sauvetage  coordonnées par le Cross Med pour la saison 2011 représentent une augmentation de 8% par rapport à l’année précédente, elle même en hausse dans les mêmes proportions par rapport à 2009... Le Cross Med, qui souligne que 89% de ses interventions concer-

nent le sauvetage des personnes et l’assistance aux biens pour la plaisance et la pêche, donne un bilan encore plus sombre lorsqu’il s’agit des victimes : 36 décès en 2011 contre 24 en 2010, soit un tiers en plus ! Année noire, donc pour la Méditerranée qui apparaît plus que jamais comme souffrant de son image de “baignoire tranquille”, fort trompeuse. À la rédaction de Cabotages, nous nous doutions bien que le millésime allait être particulièrement

mauvais : tout l’été, les communiqués de la Préfecture maritime de la Méditerranée ont fait état d’accidents, notamment de plongée. Les chiffres confirment cette impression d’annus horribilis ! L’exploration sub-aquatique est en première ligne : 10 plongeurs “bouteille” et 3 apnéistes sont morts, soit le tiers des victimes de la mer ! Mauvaise forme physique,  manque  de  préparation, progressivité  insuffisante...  la consommation d’un loisir à la mode est désormais un vrai problème de sécurité publique. Autre phénomène en pleine croissance,  l’“homme à la mer”  :  5 victimes. Sans savoir exactement si ces chutes sont accidentelles ou si elles ont été provoquées par un

malaise, leur nombre inquiète et met plus que jamais en avant la nécessité des harnais et des gilets dès que l’on fait l’acrobate hors du sécurisant cockpit. On dit que les cap-horniers ont le droit de pisser au vent, mais le récent accident survenu à une navigatrice  chevronnée  montre qu’un seau à 5 € peut vous sauver la vie, et pas seulement quand les pompes de cale sont en panne... Le kite-surf n’a tué “que” deux fois, le démâtage une fois, les malaises cardiaques trois fois. Mort exemplaire, un homme en panne de moteur, a cru s’en tirer en nageant... La mer a enfin été témoin d’un suicide et d’un homicide, un chef d’entreprise assassiné sur son yacht au mouillage.

t du Var constiLe départemen t, r départemen S: tue le premie talité LES RECORD to la de % 26 avec plus de AR coordonnées JUIN ET LE V des opérations liè r l’ensemble cu su rti a été pa par le CROSS le Le mois de juin de rranéen. Sur s autres mois littoral médite on gi rement dense, le ré s la Le l, . ta es en bl t été sta littoral contin la saison ayan génère s de fort vent Languedoc-Roussillon de rio pé s ue long contre s ns ce io ur at so ont été % des opér 19 en juillet et août CA en gion PA . s opérations 55% pour la ré de nombreuse é accidents gr al surprise, m typologie des La début (effet de t) régions est difd’avertissemen entre les deux les bulletins de itu on observe proence (lass férente. Ainsi, et en fin de séqu adavantage ér op t s en m Le rs). portionnelle des plaisancie se La e en nguedocde septembr d’échouements tions du mois s nd -e is que les acek nd we r les Roussillon ta concentrent su im gée se concen s variations cidents de plon provoquant de s le ur . po tivité trent en PACA portantes d’ac à l’autre. ur jo un d’ s os Cr


BLOC-NOTES DE LA MER

Les sémaphores sont les seuls à avoir en visuel les accidents côtiers. La VHF est seule à permettre un repérage rapide et une communication ouverte à tous. Alors, pourquoi le CROSS Med se prive-t-il de tels outils, éprouvés et efficaces, quand il privilégie le téléphone portable ?

HISTOIRES VÉCUES : regrettables dérives...

Nous étions sur la passerelle du sémaphore de Porquerolles avec les guetteurs de la Marine nationale. Le vent montait et la mer moutonnait dans la baie d’Hyères. Les bateaux au mouillage devant les trois plages de l’île tiraient sur leurs chaînes. Inévitablement, sur le canal 16 de la VHF est arrivé un message : « nous sommes la jonque Lorelei, au mouillage plage d’Argent. À côté de nous, un voilier, apparemment vide, est à la dérive, son ancre dérape. » À la jumelle, on a pu voir la jonque et le petit voilier qui s’en éloignait, d’abord par à-coups puis rapidement avec le fond qui descendait. Comme il le fait toujours, le sémaphore a donc signalé l’incident. Après un moment, arrive la réponse du CROSS (Centre régional opé-

rationnel de surveillance et de secours) : le propriétaire du navire n’est pas là, pas de demande d’assistance, pas de “Pan-Pan” enregistré, donc pas de remorquage possible du bateau vide par la SNSM. Alors, le bateau continue de dériver. Il passe la zone des bouées, entre dans le chenal des navettes qui relient l’île au continent. Avec ce vent, dans une heure, il s’échouera sur les rochers ou la plage de la Courtade où se baignent les vacanciers, après avoir semé la pagaïe dans les bateaux au mouillage. Le sémaphore appelle alors les pompiers en faction sur la plage d’Argent et qui disposent d’un zodiac. Négatif. Leur travail est de surveiller la crique, pas d’aller au-delà des bouées. Le Lorelei rappelle : « nous avons retrouvé le propriétaire qui s’apprêtait à partir à la nage pour récupérer son bateau. Nous le faisons

monter à bord de notre annexe et le conduisons à son bateau ». À la jumelle, nous suivons l’opération. Le capitaine monte enfin à son bord et met en route. Bateau sauvé, baigneurs hors de danger. La solidarité des gens de mer s’est substituée aux intervenants institutionnels qui, refusant de prendre la responsabilité de remorquer un navire sans demande formelle, pouvait transformer un banal incident un potentiel accident. D’accord, les bateaux sont domaine privé et on n’a pas le droit d’y entrer sans permission. D’accord, trop de plaisanciers, une fois sauvés au prix, parfois, de quelque dégât collatéral, poursuivent maintenant leurs sauveteurs en justice pour un balcon arraché par l’aussière de remorquage... Mais pourquoi des braves gens qui n’appellent pas leur avocat avant d’aller porter secours devraient prendre seuls les risques civils de leur sens marin ?

Plus tard, appel d’un bateau en panne de moteur près des rochers où le vent le rabat. Le sémaphore transmet l’info au CROSS qui contacte la vedette : « quel est votre numéro de téléphone portable ». Silence radio. Le sémaphore est mis hors-jeu alors que de là où nous sommes, nous voyons la scène à la jumelle. Et les plaisanciers en veille sur le canal 16 qui pourraient porter assistance ? Ce n’est pas un cas isolé. De plus en plus souvent, le CROSS communique par portable alors que tout est fait pour populariser la VHF. Interrogé, son patron reconnaît cette dérive et annonce qu’il lutte contre. Un cellulaire est fragile, soumis à l’eau et aux coupures de réseau, il n’est entendu que d’une seule personne à la fois, rend difficile le repérage. La VHF est robuste, entendue de tous, ne demande pas de composer de numéro, permet le repérage par triangulation. Alors quoi ?


Enzo Maiorca, recordman du monde de plongée en apnée, participe à de nombreuses actions humanitaires, en Italie et en France. Lors de sa visite à Banyuls en septembre dernier, il a été intronisé “parrain” du Parc par le président de Région, Christian Bourquin, et Hermeline Malherbe, présidente du Conseil général des Pyrénées-Orientales.

n i a r r a p , a c r o i a n i r Enzo M a m c r a p u d Le célèbre plongeur sicilien

en apnée est venu de son village de Sicile pour visiter le site du futur Parc marin du Golfe du Lion qui va transformer l’actuelle réserve naturelle en véritable territoire protégé. C’est une bonne fée sur ce berceau bleu. Certains disent Parc marin des Pyrénées-Orientales, d’autres Parc Marin catalan, ou de la côte Vermeille... peu importe, l’essentiel est qu’un immense territoire vient d’être mis à l’abri de ses prédateurs. Après quatre années de concertation avec l’ensemble des acteurs

locaux et une enquête publique en 2010, Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, a annoncé le 13 octobre dernier la création officielle du Parc naturel marin du golfe du Lion, premier parc naturel marin de Méditerranée.

Au large des côtes des PyrénéesOrientales et de l’Aude, le Parc naturel marin du golfe du Lion couvre 4 019 km² d’espace marin pour environ 100 km de côtes. Le parc sera piloté par un Conseil de gestion réunissant 60 membres, qui devra élaborer le programme de travail pour les années à venir,

qu’on nomme “plan de gestion”, en s’inspirant des huit orientations de gestion figurant au décret publié au Journal Officiel (voir le bloc-notes). La création du parc repose sur trois objectifs : connaître le milieu marin, le protéger et aider les activités maritimes professionnelles


(pêche, plongée...) et de loisir (plaisance, pêche, plongée...) à se développer durablement. Le golfe du Lion occidental offre une biodiversité et des paysages sous-marins remarquables : plus de 1 200 espèces animales - corail rouge, mérou brun, grand dauphin...- et 500 espèces végétales. On y trouve l’ensemble des habitats naturels de la Méditerranée occidentale : un plateau continental relativement étendu (rare en Méditerranée), des fonds rocheux et sableux, des vallées sous-marines (canyons). Près de la côte, le coralligène et les herbiers de posidonies se développent à faible profondeur ; sur les fonds sableux, on trouve l’un des plus importants gisements de gravelles à amphioxus de Méditerranée et la côte rocheuse est bordée de trottoirs à lithophyllum. Plusieurs espèces de mammifères marins sont également présentes dans le périmètre, en particulier le grand dauphin et le dauphin commun à bec court. Sur les quatorze espèces marines protégées au niveau national (hors mammifères marins), au moins huit sont présentes dans le périmètre du parc : parmi elles on peut citer les posidonies (plantes marines),

la grande nacre et la datte de mer (mollusques), la grande cigale de mer (crustacé), l’oursin diadème et la tortue caouanne. Cet espace marin est aussi le théâtre d’une histoire et d’une culture maritimes extrêmement riches et, aujourd’hui, le champ d’exercice de nombreuses activités professionnelles et de loisirs en plein essor et en pleine transformation. Les activités maritimes traditionnelles et les usages de loisirs sont très présents et dépendent de la bonne conservation du patrimoine naturel. S’y exercent, en effet, une activité de pêche professionnelle vivante, des activités de transport maritime (commerce  et  passagers),  une activité de nautisme importante (notamment les sports de glisse, la voile, la plongée, la pêche de loisirs), un secteur touristique littoral très développé mais également des initiatives de préservation et de promotion du patrimoine et de la culture maritime. Le littoral du Parc naturel marin accueille environ 2,5 millions de visiteurs par an - ce qui représente pour  les  Pyrénées-Orientales 60 % de leur fréquentation touristique - avec une nette concentration durant la période estivale.

Le Parc marin est aussi la prise en compte de l’espace marin dans la vision du territoire qui ne s’arrête désormais plus au trait de côte. Photo Alain Pasquet.

BLOC-NOTES DE LA MER LES 8 CO MMAND EMENTS • Faire DU PARC du parc MARIN n aturel ma pour la c rin une zo onnaissan n e c d e et le su e référen ses écosy ivi du mil ce stè ieu profonds, mes, (plus particu lièrement marin, de le platea u contine les canyo herbiers, ntal, le c ns etc oralligèn s’y dérou .) et des activités e, le lent ; socio-éco • Protég nomiques s er le patr qui imoine na canyons p turel mari ro fo n d n s d • Préserv u littoral aux er et amé lio • Souten ir et favo rer la qualité des e ri a ser un dé ux activités é veloppem ent durab • Favori conomiques mariti le des ser une g mes estion de naturelles l’ensemb le des re • Favori ssources ser un dé veloppem nautique e nt des acti durables vités de to • Contrib urisme uer à la p rotection trimoine et la mise culturel m en valeur • Envisa du pager une c aritime oopératio n avec l’E spagne.

La région Languedoc-Roussillon connaît la plus forte croissance démographique de France métropolitaine. Sa population a augmenté d’environ 13 % de 1999 à 2008 et la bande littorale accueille, à elle seule, plus de la moitié des habitants de la région. Les espaces littoraux du périmètre du Parc naturel marin comptaient 36 890

habitants en 1968, contre 66 628 habitants au dernier recensement de 2006. Le Parc marin devrait exister légalement avant les élections. Sauf si une certaine lettre du Préfet se faisait attendre. À l’heure où nous mettons sous presse...


Pollut i on de Bonne nouvelle ! la mer du mi Selon les derniers : eux, m rapports des scientifiques, ais... l’état de santé des eaux de la mer Méditerranée s’améliore, mais 20 % du linéaire côtier reste encore dégradé sur le littoral français. Beaucoup reste encore à faire, notamment dans les baies, rades et golfes où les pollutions s’accumulent. En attendant, bonne baignade !

L

es points de suivis de la qualité des eaux marines méditerranéennes sur le littoral français indiquent des améliorations significatives depuis les années 80. Pour autant, les zones altérées représentent encore 20 % du linéaire méditerranéen, concentrées notamment au niveau des grosses agglomérations et des zones industrialo-portuaires. C’est la conclusion de la conférence technique organisée par l’Agence de l’eau Rhône- Méditerranée et Corse et la Direction InterRégionale de la Mer Méditerranée, le 8 juin à Marseille, dans le cadre des Journées de la mer. Les résultats des réseaux de surveillance montrent que la présence de contaminants chimiques décroît régulièrement depuis 25 ans. Aujourd’hui, une grande majorité des eaux côtières est en bon état (voire de très bonne qualité en Corse) contrairement aux lagunes, milieux plus sensibles et fragiles. Sur l’ensemble du littoral, les grosses agglomérations (Rade de Marseille et de Toulon), les zones industrialo portuaires (Golfe de Fos) et les secteurs confinés comme le goulet de Bonifacio affichent des altérations de la qualité des eaux marines. Les principaux polluants mis en cause sont des pesticides et des produits chimiques utilisés dans les peintures antisalissures des coques de bateaux. Ces progrès sont dus à des opé-

rations de protection engagées depuis les années 1980, 1990 puis 2000. A titre d’exemple, un contrat de baie “rade de Toulon” lancé en 2002 avec l’aide de l’Agence de l’eau a permis d’améliorer l’assainissement audelà des obligations réglementaires et d’engager des opérations “ports propres”. Les résultats de la surveillance

biologique, établis à partir d’indicateurs de pollution tels que les posidonies, les macro-algues et le benthos de substrat meuble (faune présente dans les sédiments marins), montrent que les zones altérées ne représentent pas des surfaces importantes. Elles sont là encore concentrées au niveau des grosses agglomérations (golfe de Fos, littoral niçois, baie d’Ajaccio), dans des secteurs fermés

(golfe de Porto Vecchio, de Saint Florent...) ou de façon moindre dans quelques secteurs littoraux comme Banyuls, Frontignan ou Menton. Pourtant certains secteurs altérés chimiquement restent en bon état biologique. La protection et la non dégradation des habitats sont une priorité absolue car leur restauration est délicate et souvent même quasiment impossible (posidonie).


BLOC-NOTES DE LA MER Toutefois, sur certaines zones altérées, une réhabilitation biologique peut être envisagée. C’est le cas avec l’opération expérimentale PRADO 2006 en rade de Marseille où des récifs artificiels ont été immergés pour permettre de nouveau l’installation d’une vie marine florissante (opération de 8 millions d’euros, 10 années de préparation). Les efforts des années passées ont porté des fruits mais demandent à être poursuivis, affirme le rapport de la conférence technique. Maintenant, il faut prendre en compte les grands vecteurs d’apports à la mer (le Rhône, les cours d’eau côtiers et le ruissellement pluvial) et ainsi assurer la continuité Terre-Mer, un objectif phare du Grenelle de la Mer. La surveillance en mer s’exerce également  sur  les  nouveaux risques liés au développement d’espèces marines toxiques et à la présence de molécules récemment identifiées dans l’eau. Une étude engagée en 2010 avec l’IFREMER permettra d’acquérir d’ici 2012 les premiers éléments de cette contamination dans la chaîne trophique et ses effets sur le vivant. Avec les nouvelles directives la ligne de conduite européenne évolue. Les obligations ne portent plus sur les moyens à mettre en œuvre (équiper les villes du littoral d’une station d’épuration des eaux usées) mais sur des obligations de résultats, le but à atteindre étant le bon état écologique de toutes les eaux côtières à l’horizon 2020.

RÉPAR TITIO N DE LA PRESS I ON ENVIR ONNE M E NTALE SUR L A MER

• 36 % usages (mouill ages fo rains, p gées, p lon êc aquacu he aux traina nts, lture) • 31 % aména gement • 19 % s apport s minant de con tas à la m er • 14 % espèce s invas ives

LES PRINCIPALES SOURCES DE POLLUANTS EN MÉDITERRANÉE FRANÇAISE Cadmium, plomb, mercure, cuivre, zinc, nickel, arsenic, chrome. 88% des apports à la mer proviennent du Rhône et des fleuves côtiers • 6 678 tonnes : apports du Rhône • 1 947 tonnes: apports des cours d’eau côtiers

• 1 044 tonnes : apports des bassins versants de proximité (ruissellement) • 189 tonnes : apports des rejets industriels • 5,43 tonnes : activités portuaires de plaisance • 5,13 tonnes : apports des stations d’épuration


Photos Marine nationale / Maêl Prigent

r de u e t a r fédé ollution , M P p Le GI contre la ns moye

De l’incident portuaire à l’accident environnemental grave, une association loi 1901, le GIPM, (Groupement d’intervention sur les Pollutions Marines), fédère les professionnels de la lutte contre les pollutions marines. Derniers cas en date, quatre yachts brûlés à Golfe-Juan et, bien sûr, le TK. Bremen.

L

a tempête Joachim a jeté le cargo TK. Bremen sur la plage d’Erdeven (Morbilhan) le vendredi 16 décembre dernier. Deux heures après, les opérations de lutte contre la pollution se mettaient en place. Le scénario : en fonction d’une convention avec les services de l’État, le GIPM, une association loi 1901, chargée de la coordination des moyens professionnels a été mandatée par une réquisition de la Préfecture pour engager les opérations de pompage. Vendredi

14 - Cabotages magazine

30 décembre, les 250 tonnes de fuel de propulsion du navire sinistré avaient été évacués. En mai dernier, quatre yachts brûlaient dans la baie de GolfeJuan. Neuf mille litres de carburant se trouvaient à bord des bateaux dont certains avaient coulé à 400 mètres de la plage. Réquisitionné, le GIPM a envoyé sur place les entreprises à même d’intervenir le plus vite possible. Du plus petit incident à l’accident grave, la méthode est toujours la même.  Un  partena-

riat  public/privé peut se mettre en route de manière automatique grâce à une sorte de “club” d’institutionnels, administratifs et entrepreneurs, qui ont décidé de passer des accords préalables pour que, au moment où il y a urgence, aucun obstacle bureaucratique ne vienne ralentir ou gêner l’action. La gestion des crises relève des services de l’État. En cas de catastrophe, le plan POLMAR se met en place. Mais, pour les pollutions de petite et moyenne am-

pleur, le plan Infra-POLMAR a été créé en 2002. En 2004, à la suite d’une pollution importante dans le port de Cannes, à l’initiative de la Lyonnaise des Eaux (devenue ensuite Suez) un premier partenariat public/privé met en lumière la bonne coordination des moyens terrestres mais les carences techniques et organisationnelles des moyens maritimes. C’est à la suite de cette première expérience que les Affaires maritimes, la Marine nationale, les


BLOC-NOTES DE LA MER services littoraux et de la mer élaborent une sorte de plan InfraPOLMAR “privé” mais sans but lucratif, le GIPM, qui coordonne l’intervention des entreprises membres, qui facturent directement leurs services aux autorités.

Le GIPM n’est pas seulement un “pompier” de l’environnement, mais développe aussi des procédures et des systèmes de prévention qui utilisent notamment des moyens électroniques embarqués à bord d’avions.

Prévention contre la pollution à la suite de l’incendie de quatre yachts à Golfe-Juan.

Pompage d’un navire de fruits de mer (en haut) et pose d’un barrage anti-hydrocarbures à Cannes


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sur-Gironde C elles, vives, des oranges qui sont les boules de noël de Hyères en hiver et brillent devant les façades à l’italienne,

Hyères

les-Palmiers E t le roux, chaleureux, qui se détache sur la palette des bleus de l’île où Pascal Paoli rêva d’une certaine Corse, plus anglaise que française pour échapper à Gènes...

L’Île Rousse

Escales

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Mortagne-sur-Gironde

Textes et photos Djinn et Christophe Naigeon

de l ’eau de vie, de la farine et des moines Mortagne-sur-Gironde est à la fois un port de plaisance moderne et accueillant dont une grande partie n’est pas soumise à la marée grâce à un bassin de rétention, mais c’est aussi une escale où on reviendrait bien hors-saison.

L

es amarres larguées à Royan, c’est dans la rythmique apaisée de la marée montante que nous remontons la rivière des marins saintongeais. Le flot s’y propage, décalé, jusqu’à cent soixante dix kilomètres en aval. Certes moins fougueux et désordonné que dans de la zone dite du chaudron sur laquelle veille le phare de Cordouan, mais suffisamment vif pour mériter toute l’attention du barreur. Deux fois par jour, l’immense bec verseur de la Gironde, un des plus grands d’Europe et le plus vaseux de tous, est le théâtre d’un magistral combat alors que s’affrontent et s’enlacent, les eaux salées de l’océan et les fluviales douces.. Imaginez un peu : par coefficient de marée lambda, plus d’un milliard de mètres cubes d’eaux atlantiques force les flux mêlés de la Garonne et de la Dordogne, pressés depuis les Pyrénées et le Massif Central de gagner leur embouchure commune et qui se sont rejoints au Bec d’Ambes, éloigné de soixante quinze kilomètres.

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Si la coloration prune du courant est révélatrice des riches accumulations en suspension formatrices du “bouchon vaseux”, elle témoigne aussi de la superposition des couches d’eau en présence. De densités différentes, elles ne se mélangent pas. Eau douce en surface, eau salée en profondeur. Au milieu, la couche de contact, saumâtre. L’infatigable sculpteur de ce singulier paysage modèle également ses bancs de sable, certains erratiques, d’autres institués en îlots. Sur la rive droite, alternent plages de sable fin, baies et pointes, écrins millénaires des conches, plages minuscules ou immenses, toutes ombrées de pins et logées aux pieds de falaises blanches. La mer a creusé de cavités les plus tendres d’entre elles, bien avant la taille de l’homme troglodyte de Regulus et de Matata à Meschers-sur-Gironde (les mauvaises pierres). Partout, de nombreux carrelets déployant leurs pattes comme des échassiers dans la vase, penchent leur tête de bois carrée au-dessus des flots pour y tremper leur filet.


Mais plus loin, vers Talmont-sur-Gironde, le paysage se transforme, nous entrons en “petite Camargue” saintongeaise. Une large frange marécageuse, en partie poldérisée depuis à la construction d’une digue, s’est installée au pied de l’ancienne muraille naturelle calcaire. Repoussant loin de l’eau les falaises désormais mortes, ces nouvelles terres sont tramées par un important réseau d’irrigation. Dans ce maillage d’une grande diversité biologique se côtoient zones humides sauvages et parcelles plantées de vigne ou de céréales. Celle dévolue au pâturage, la vaine pâture d’autrefois des éleveurs de vaches et moutons de pré-salé (jouissant librement des terres appartenant à l’État), la Grande Roselière est encore fréquentée par quelques troupeaux. Mais ceux-la ne sont plus comme autrefois familiers des traversées de l’estuaire en gabares. Les transhumances maritimes vers le Médoc n’existent plus depuis les années 20… Une bouée rouge signale enfin Mortagne-sur-Gironde. Derrière, au milieu des roseaux, une avancée en bois posée sur le polder, un Balcon sur la Mer1, offre aux promeneurs une vue en Panavision sur ce singulier milieu. Au phare de positionnement ruiné par la tempête qui laisse paraître les ruines de son soubassement à marée basse, on arrondit pour embouquer l’étier, nom local de l’achenau, traduisez chenal naturel. Après un léger coude, il s’étire tout droit, sur plus d’un kilomètre vers l’avant-port. Marais à bâbord, cultures et zones inondées à tribord. Face à nous, au lieu de collines douces c’est une falaise morte, abrupte,  couronnée  de  chênes  d’où  émergent quelques toits rouges. Haute d’une trentaine de mètres, elle ferme le port et clôt la ville basse. Alors que nous nous préparons pour la manœuvre d’accostage, nous apercevons, en arrière-plan des petites maisons, les bateaux à sec du Port de la Rive, chantier nautique de Mortagne. Nous franchissons l’écluse qui, lorsqu’elle sera fermée, nous permettra de rester à flot à marée basse. Les autres bateaux s’amarrent à flanc et s’enfoncent dans la souille quand le niveau baisse dans l’étier, bien appuyés contre le quai. 1 - Film de Nicole Garcia, 2009.

MAURITANIE-SUR-GIRONDE Maures, Normands et Cie Mortagne, l’ancienne Mauritania doit son nom à une colonie Maure. Ancien castrum, pillé par Pépin Le Bref, envahit par les Normands. Le plus ancien texte, en latin, se rapportant au havre Mauritania date du XIIe siècle : « Nous accordons le tiers de tous les droits sur le pays de Buch (les salins de captalat de Buch) et pour un navire la franchise de tous droits depuis Mortagne jusqu’à Langon… ». À cette époque les bateliers remontent la Dordogne et la Garonne, convoyant des huîtres, les grains, le sel et toutes marchandises de mer.

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L’écluse du bassin du port qui sert aussi de chasse pour la vase qui s’accumule dans le chenal d’accès dont certains ne connaissent pas tous les pièges...

Les autochtones font cela tout naturellement, mais, si les règles qu’imposent les vasières ne sont pas respectées, on est bon pour un bain de boue personnel ou, plus ennuyeux, un chavirage à “sec”. Lors de notre passage en aval de l’écluse, un quillard (immatriculé à Marseille, photo en vignette) luttait à grand renfort de perches et d’aussières contre un “déssalage” dans la pente molle du chenal. Pour promettre peu de dégâts au bateau, ce naufrage vaseux aurait asssurément garanti une grande blessure d’amour propre et une franche rigolade dans le port... Notre bateau est amarré sans risque au ponton articulé flottant, côté rive droite où s’alignent des maisons bourgeoises en pierre, sobres mais prospères. Elles racontent les belles heures de Mortagne. Avant la Révolution, grâce aux nombreux négociants de Cognac installés ici, le commerce des eaux de vie battait son plein. Plusieurs milliers de barriques – bon an mal an un million de litres –, quittaient le port pour... l’Irlande. Le French Brandy avait plus de succès que l’Irish Whiskey ! Port de rupture de charge des bateaux de commerce lestés à Bordeaux, la petite ville a compté un bon nombre d’hôtelleries et sociétés de routage. Passagers et marchandises – céréales en plus des

Le succès

et la marée...

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vins et spiritueux – rejoignaient par la route l’arrière-pays charentais et le Nord de la France. Mais le commerce s’accomode mal d’insécurité et d’instabilité politique. Les années qui suivirent 1789 virent se raréfier goélettes et gabares pendant que la nature continuait sans trève son travail d’envasement. Et, quand la navigation reprit son cours sur la Gironde, Mortagne avait perdu la bataille contre l’envasement. Il fallut attendre la IIIe République pour que Mortagne se désenlise, à l’instigation de son maire qui obtînt que la technologie moderne vienne à son secours. L’idée – comme dans toute la région – était de créer en amont un bassin de retenue et une “chasse” qui, rapidement ouverte à marée basse, repoussait les dépôts d’alluvions vers l’estuaire de la Gironde. À Mortagne le bassin de retenue où se trouve aujourd’hui le port de plaisance fait 35 000 m3, alimenté par la source de Fondevine, la même qu’utilisaient les deux grandes minoteries qui tournaient avec le blé arrivé en bateau. Le plaisancier “étranger” toujours inquiet à l’idée de s’échouer entre des berges aussi peu acorres et des fonds invisibles tant l’eau est boueuse, on a quelque peine à imaginer qu’entraient, manoeuvraient et accostaient ici de si grands navires. Et pourtant, grâce aux aménagements peuvent être accueillis chaque mois plus de cinquante navires à


Bons baisers de ... Mortagne-sur-Gironde

plient avec leurs filets capturent des fameuses civelles, alevins de l’anguille. Après cette pause gastronomique, nous marchons dix minutes vers la falaise blanche, à la rencontre des moines-sauveteurs. Là, dans la verdure, se trouve un ermitage monolithe, sans doute parmi les premiers lieux de culte Chrétien. Dédié à Saint Martial, il accueillit des moines-marins quand les flots baignaient encore la falaise au deuxième siècle de notre ère. Ces passeurs faisaient traverser l’estuaire aux pèlerins, en route sur le chemin secondaire de Saint Jacques de Compostelle. Chanoines réguliers de l’Ordre de Saint Augustin ils portaient secours aux marins perdus. En attendant la marée qui nous ramènera vers Royan, nous rendons visite à l’ancienne gare, devenue musée de la photo ancienne de Mortagne (d’où nous avons tiré les illustrations d’archive de cet article) et, pour finir notre voyage dans l’histoire, nous réglons le compteur sur les années 1960 et, plus précisément sur l’heure de l’apéritif quand, au gîte de l’ancienne minoterie s’organise le championnat quotidien de flippers vintage ! Avec une préférence pour le modèle “Navy”, et son marin à bob blanc et pantalon à pont patte d’eph’. Forcément.

...ça va

et ça vient

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Escales

voile de gros tonnage puis les grands vapeurs. En 1843, un débarcadère permet de prendre le bateau à aubes qui assure la liaison Bordeaux-Royan. La machine à vapeur ne révolutionne pas seulement la navigation. Le charbon débarque ici en quantité, et fournit l’énergie aux minoteries qui tournent à plein régime, tout comme les locomotives qui arrivent depuis 1895. Une cimenterie s’implante à côté, à la Gravelle, en 1905. La même année, consécration, c’est la Marine Nationale qui installe des contre-torpilleurs et... des sous-marins. Le déclin s’amorce avec la grande Guerre et le port s’endormira au pied de sa falaise morte à l’orée de la seconde guerre mondiale. Que reste-t-il de tout cela aujourd’hui ? Des friches industrielles qui se transforment progressivement en un habitat à l’architecture audacieuse et la maison du meunier, muée en un confortable gîte, accueille désormais des hôtes de passage. À considérer de près, hors-saison. Pour l’instant, nous savourons notre déjeuner sur l’une des terrasses de quai en regardant vaguement les canards du bassin de plaisance et, avec plus d’attention, un menu où s’alignent les bizarres produits de cette étrange mer : anguille, maigre, lamproie... caviar ! (voir Cabotages été 2011). Dans le chenal, nous avons croisé les pibaliers, bateaux papillons dont les ailes, quand elles se dé-


AU TEMPS DE LA PROSPÉRITÉ Longtemps, la tonnellerie est florissante à Mortagne, tout comme le commerce des pommes de terre et celui des eaux de vie échangées contre du charbon avec la Grande-Bretagne. La pêche aussi est dynamique et rentable. Des mariniers s’installent.

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Les bateaux de pêche s’agglutinent dans le chenal et, au XVIe siècle, on embarquait ici pour les grands bancs de Terre Neuve. L’activité est intense et la ville prospère. Un relais permanent de chevaux se tient aux halles. En 1860, le transit de 26.000 tonnes de marchandises donne lieu à la modificatin du tracé de la route dite du Fer à Cheval pour réduire la pente.

L’important trafic et la dangerosité de l’embouchure de la Gironde suscitent la construction du phare de Cordouan et la constitution du corps des pilotes. Déjà en 1545, un pilote de Jacques Cartier écrivait : « on suyt la vray route pour aller en la très dangereuse rivyère de Gironde jusqu’en la noble et puyseante ville de Bourdeaulx en Guyane».


Bons baisers de ... Mortagne-sur-Gironde

Grands voiliers, vapeurs, pêcheurs, dockers, tout cela est à voir dans le minuscule mais très riche musée de la photo ancienne qui se trouve sur le quai, dans l’ancienne gare. Passionnant et gratuit !

LA LUTTE CONTRE LA VASE draguer, contenir, chasser...

Les

archives

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Escales

de Mortagne

Le 1er Germinal An XII (31 Mars 1804), Sorel, le premier maire de Mortagne appelle à l’aide le “Citoyen Préfet de la Charente Inférieure”: « Le Maire de la commune de Mortagne, observe, dans l’intérêt du commerce que le chenal du port de Mortagne qui communique avec la Gironde est Maintenant impraticable hors les temps des fortes Marées par les bateaux caboteurs qui ont accoutumé de Navigué de ce Même port à Bordeaux et ailleurs que cette difficulté par L’importance de ce port préjudicie Beaucoup au Commerce et est augmentée par l’ éboulement des Bords de ce chenal qui la presque comblé, et par le Défaut d’entretien Depuis très longtemps que les Plus intéressés à son rétablissement sont tout Ceux qui font le Commerces des Denrées Comestibles porté et Rapporte de Bordeaux en Saintonge. Les Bateliers et notamment les Négociants à eau de vie de diverses communes de l’arrondissement précité ». Selon Noëlle Gérôme, ethnologue du CNRS et figure locale, l’intention est alors délibérée « d’implanter une ville-port, en ordonnant les rapports harmonieux au pied de la falaise, entre la surface consacrée à l’eau, les alignements des maisons et des entrepôts, les cordons de végétation ourlant les contacts entre la terre et l’eau ».


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Hyères-les-Palmiers,

toutes les couleurs, toutes les folies

Hyères-les-Palmiers a un port moderne et pratique sur un exceptionnel plan d’eau. Inconvénient, il est loin de la ville. Et pourtant, la vieille cité mérite l’effort de prendre le bus. Elle porte les marques de ses vies antérieures : l’Antiquité avec la Via Olbia, le Moyen-Âge avec un château, des remparts et des portes à grille, et, plus caractéristique, le XIXe siècle présent à tous les coins de rue et fait ressembler Hyères à un décor d’opérette. Les curistes Anglais, les princes d’Europe de l’Est et autres excentriques riches qui passaient l’hiver ici y firent des villas à l’architecture folle. Textes et photos Bastien Chazelles

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L’APPROCHE De loin, si l’on vient de l’Ouest, on croit d’abord que c’est une île. La langue de sable qui relie Giens à Hyères est si basse qu’on ne la voit pas. C’est le fameux double tombolo qui porte son nom et dont les professeurs de géographie nous ont rebattu les oreilles à l’école. Mais, en doublant la pointe d’Escampobarriou pour contourner vers Hyères, on peut en être fiers : c’est l’un des cinq doubles tombolos du monde.

S

ur les cinq doubles tombolos du monde, trois se trouvent en Méditerranée occidentale et deux et demi en territoire français. Pour la Méditerranée, en plus de Giens, il y a Orbetello en Italie et Ifach-Calpe en Espagne. Pour la France, l’un est en Atlantique Nord (le seul de toute la zone). Il réunit à Saint Pierre et Miquelon, l’île de Grande

Qu’est-ce qu’un tombolo ? C’est une forme d’isthme. Un isthme ? Une étroite bande de terre, entre deux étendues d’eau, qui connecte deux grandes étendues de terre. Le plus célèbre relie l’Afrique à l’Asie, c’est celui de Suez, qui n’en est plus un depuis le creusement du canal. Un autre est le Panama, auquel le même sort a été réservé. La définition courante indique que “un tombolo est un cordon de sédiments reliant deux étendues terrestres. Le plus souvent, il s’agit d’un cordon littoral entre une île ou un îlot et la côte d’un continent ou d’une autre île. Le dépôt sédimentaire (généralement sableux) est le plus souvent causé par la réfraction du train de vagues due à l’île”. Réfraction du train de vagues ? C’est le changement de direction imposé par un obstacle. Exemple : un vent d’ouest et une houle “dans la mer du vent” vous

Le célèbre double-tombolo de Giens Miquelon à la Petite (Langlade) sur 12 km. L’autre se trouve aux Caraïbes, dans l’île de Saint Martin. L’un de ses tombolos en France, l’autre en territoire Hollandais… Les Bretons en revendiquent deux (minuscules) dans les zones très ensablées du côté de Brest, mais ceux-ci ne sont pas homologués au niveau international…

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Bons baisers de ... Hyères

poussent de Toulon vers Porquerolles. Arrivé à la Petite Passe, vous quittez votre cap au 90 pour arrondir au 55. Regardez, vous avez toujours la vague perpendiculaire à votre bateau alors que vous passez de vent arrière à grand largue. Le train de vagues, ralenti sur sa gauche par la presqu’île, s’incurve en éventail comme un défilé tournant à un carrefour. Et là, l’élan est cassé, le vent ne pousse plus dans le même sens, l’énergie de la houle se perd dans le mouvement tournant, la mer lâche prise et tout ce qu’elle transporte tombe au fond. De coup de vent en coup de vent, les sédiments s’accumulent, forment un talus qui ralentit de plus en plus le flux… et finit par créer un rivage. Forts de cette observation, les ingénieurs ont inventé les enrochements parallèles à la côte pour créer ces tourbillons, retenir le sable qui passe, augmenter la longueur des plages et la charge de touristes. Revenons à Giens et son double tombolo. Les sédiments ont été déposés par des vagues obliques engendrant des courants latéraux liés au Mistral, au Ponant ou à la Traversière du côté ouest et à la Lombarde, au Grec ou au Marin côté est. En fait, la presqu’île de Giens se trouve à la limite de deux domaines aux régimes hydrauliques distincts : le Golfe de Lion à l’ouest et le Golfe

de Gênes à l’est. Mais les influences ne sont pas égales. Résultat, côté est, la bande de sable est large de 400 m. C’est là que passe la route et qu’il y a des maisons, des campings, un hippodrome, un bois de pins, etc. Côté ouest, elle n’est que de 25 à 50 m, il n’y a pas de végétation solide, beaucoup de touristes, des automobiles… et des brèches qui se forment régulièrement. Si les engins de terrassement ne les rebouchaient pas régulièrement il n’y aurait aujourd’hui plus qu’un seul tombolo, plus de marais salants au milieu de la presqu’île. Pourquoi ? Manque de protection : les vagues ne sont plus ralenties par les herbiers de posidonies et se fracassent en pleine force sur la plage côté golfe de Giens. Manque de matériaux : trop de goudron et de béton, trop peu d’alluvions se déversent dans la mer. Le Gapeau, qui autrefois se déversait à l’ouest, a maintenant son embouchure à l’est… Inégalité météo : le vent d’est apporte la pluie, grossit les rivières qui apportent encore des sédiments. Le vent d’ouest est sec. Trop de fréquentation : malgré les efforts du Conservatoire du Littoral, il est délicat d’interdire l’accès au site. Il faut faire vite. Ou bien laisser faire la nature. Le niveau de la mer va monter, on n’y pourra rien. Et nous arrivons maintenant au port d’Hyères.

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LA VILLE BASSE : Bien sûr Hyères a été un site préhistorique, un village antique, une place forte massaliote, un port romain, un bourg moyenâgeux… De tout cela, il y a des traces, des vestiges, des ruines, des monuments ici et là qui rappellent que l’histoire de la cité d’Olbia remonte bien avant les Césars traceurs de voies et continue bien après les Louis, bâtisseurs de forts. Mais Hyères est surtout une ville du XIXe siècle.

C Quelques vestiges de la ville balnéaire du second Empire et des années folles, quand Hyères bruissait des conversations mondaines dans la langues d’Oxford et des beaux quartiers de Londres.

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e qui frappe dès que l’autocar du port passe la gare et le rond-point de la via Olbia, c’est cet air d’opérette d’Offenbach. Balayés les quelque vingt-cinq siècles de civilisations qui se sont succédées sur la presqu’île, il ne reste que l’omniprésence désuète du second Empire, de la IIIe République, d’une fin de XIXe siècle très chic. Remontez l’avenue Gambetta. Si les palmiers vous ont caché les immeubles bourgeois, vous ne pourrez pas éviter, en haut, le monument à la gloire du commerce, les Dames de France, réplique locale des Galeries Lafayette. Zappez les enseignes du Mac Do pour détailler cette grande meringue vitrée construite en 1884 par Pierre Chapoulard. Signe de la prospérité cosmopolite de l’époque, un rayon de ce grand magasin proposait « des installations complètes de villas » et « des interprètes dans toutes les langues ». Ces réclames en disent plus long que tous les discours d’historiens : sous Napoléon III, Hyères construisait à tour de bras des villas somptueuses et les people du monde entier y accouraient. Mais qu’est-ce qui a bien pu faire la fortune de cette bourgade qui stagnait avec ses 6.500 habitants, sans port de commerce, sans industrie, sans chantiers navals, sans Arsenal, sans rien de ce qui remplissait les caisses de communes plus grosses comme Toulon ou Marseille, plus petites comme La Seyne ? C’est justement qu’il n’y avait là rien d’industriel et que les industrieux qui faisaient fortune ailleurs aimaient à disposer de lieux tranquilles, beaux et au climat aimable où ils pouvaient se retrouver entre eux, dépenser sans compter, se faire du bien. L’impératrice Eugénie avait lancé la vogue des bains de mer, le thermalisme devenait, avec les casinos, une activité sociale. Hyères fut donc une ville climatique desservie par la gare du PLM, reliée au centre-ville par des artères droites bordées de palmiers, préférés aux platanes provençaux qui abritent les boulistes.


Bons baisers de ... Hyères

leurs fantasmes, se font bâtir des villas mauresques, grecques, romaines, andalouses... De véritables châteaux aussi, comme San Salvadour, incroyable chef d’œuvre de l’art pompier. L’école des BeauxArts de Paris lance des concours pour concevoir des palaces de cent chambres avec des salles à manger de plus de deux cents couverts, des salons en enfilade, un jardin d’hiver… La saison bat son plein d’octobre à mai. Après, on a trop chaud. On ne s’étale pas encore sur les plages, on ne cherche pas à avoir la peau comme un cigare de Cuba, on cherche à passer un hiver bien tempéré en excellente compagnie. Et puis, un jour, le vent tourne. Les Anglais s’en vont pour Cannes ou Nice, où il y a moins de mistral, peut-être, et où il y a la mer, un port pour les yachts. Hyères perd de sa superbe mais garde ses maisons folles, ses palmiers, ses orangers, ses couleurs.

Godillot trace les rues

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Escales

Ici, on ne joue pas à la pétanque comme à La Ciotat, mais au golf, comme en Angleterre, on se montre sur les larges trottoirs, on se salue sur les esplanades. Les Anglais, parlons-en. Après avoir vainement tenté à au moins trois reprises d’investir Toulon en établissant des bases navales dans la baie d’Hyères, ils sont revenus en masse : en 1860, ils représentent 25% de la population. En 1877 arrive le capitaine Corbett, héros de la marine anglaise contre Napoléon 1er, qui draine avec lui la bonne société britannique et même la reine Victoria, crée trois grands hôtels : Ermitage, Albion et Costebelle. Une église anglicane de style néogothique revu par Walt Disney est consacrée en 1884 par l’évêque de Gibraltar. Fleurissent les architectures les plus folles. Pierre Chapoulard, l’auteur des Dames de France, se fait construire une villa patch-work de tous les styles, indescriptible, dont les morceaux auraient autant leur place à Strasbourg qu’à Vienne, à Nice où à Montparnasse… Alexis Godillot, le baron Haussmann local, trace des rues, construit des édifices publics, crée de nouveaux quartiers. Les riches, selon leur plaisir et


Ceux qui auront le courage de monter les pentes raides qui conduisent au château pourront profiter de la vue exceptionnelle qu’offre la table d’orientation. En contrebas, le vieux quartier autour de l’église Saint-Paul où se trouvent d’exceptionnels ex-votos (voir page de droite) qui racontent une partie de l’histoire maritime de la Provence à travers ses dangers et ses accidents.

LA VILLE HAUTE :

De la ville-basse et ses villas cossues, il faut monter vers la ville-haute et ses ruelles à l’intérieur des anciennes fortifications. Pour se protéger des invasions et des pirates, Hyères s’est dotée d’imposantes murailles et de hautes tours qui restent encore en grande partie debout, surtout la première enceinte. Sur le sommet de la colline escarpée, restent des tours à moitié démolies, mais, de là-haut, on profite d’une vue unique sur la ville et la baie.

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C

’est un magnifique livre d’images que la collégiale Saint-Paul de Hyères. Quatre cent trente deux tableaux tapissent ses murs et racontent la vie quotidienne des Hyérois, du XVIe siècle à nos jours. Ce sont les Ex-voto suscepto (selon le vœu formulé), autrement dit les ex-votos que les pieuses personnes ont offertes à la vierge Marie ou aux saints pour les remercier de les avoir sauvés ou d’avoir épargné un de leurs proches de la maladie, d’un accident, d’une guerre, d’un naufrage… La collection de Saint Paul de Hyères est l’une des plus belles qui existent en Provence. Beaucoup sont des images très naïves, certains sont de vrais tableaux d’artistes, tous sont touchants et, surtout, ils constituent une extraordinaire bande dessinée sur la vie quotidienne au cours des quatre siècles passés. Peu remontent à l’Ancien régime. La révolution est passée par là, mais, surtout, le temps a fait son œuvre, détruisant ces objets populaires dont les supports n’avaient pas la qualité de ceux qu’on accordait aux chef-d’œuvres. C’est surtout au XIXe siècle, alors que la religion revenait en force, que la pratique a repris. Le pic s’est trouvé entre 1830 et 1875.

Bons baisers de ... Hyères

Les ex-votos de l ’église

Saint-Paul

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Escales Escales

Montez jusqu’à la collégiale, d’abord parce que la vue y est très belle, ensuite parce que le bâtiment lui-même et son environnement architectural méritent l’effort, enfin parce que cette chronique de «l’accidentologie» du passé est passionnante. Noyades, chutes, accidents de charrettes, de voiture ou de chasse semblent avoir été de véritables fléaux. Et les naufrages ! Même si les ex-votos représentant des accidents maritimes sont relativement peu nombreux (6%) ceux-ci valent qu’on s’y arrête. Les peintures marines y sont les plus belles. Ce qui explique en partie leur petit nombre car les voleurs savent depuis longtemps que ceux-ci ont une haute valeur marchande. Leur nombre augmentant à partir de 1825, on peut mesurer le développement considérable des échanges maritimes au cours de la seconde moitié du XIXe siècle. Avant, la société était essentiellement rurale et la navigation a été longtemps freinée par les différents blocus imposés par la flotte anglaise.


LA ROUTE DU DÉPART : Notre tour en ville terminé, nous avons repris la route du port avant l’heure du retour des plages qui provoquent des embouteillages impressionnants. Nous avons retrouvé notre bateau dans la marina où vont bientôt s’installer des marchands ambulants un peu trop bruyants pour nous. Nous reprenons donc la mer vers les îles d’Or et la Corse.

L

a météo est bonne. Avitaillement et pleins faits, batteries à bloc, moteur ronflant puis voiles gonflées, cap au 110° pour les 140 milles de la traversée entre Porquerolles et Calvi. Mais, à peine une heure après avoir franchi la Grande Passe, le sondeur déclare forfait. On se dit «l’électronique tombe en rade, ça commence bien…» Non. C’est seulement qu’on vient brusquement de prendre 2.000 mètres d’eau sous la coque. Jusqu’à destination, on naviguera au-dessus d’une plaine abyssale. Limitée au Sud-Est par le talus Corse et au nordouest par le talus provençal, cette vaste zone océanique s’est creusée quand la Corse, la Sardaigne et

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les îles d’Hyères se sont détachées du continent entre moins trente et moins quarante millions d’années. Certaines séparations laissent de grands fossés ! Mais l’histoire ne s’arrête pas à ce départ de nos îles à la dérive vers les cieux italiens. Le paysage côtier et sous-marin a changé bien des fois au cours des temps géologiques. Refroidissement, réchauffement, refroidissement climatiques… la mer n’a cessé de monter et de descendre. Par trois fois, la glaciation a retenu les eaux douces sur les calottes polaires et les immensités des continents gelés sur des épaisseurs phénoménales, les empêchant de couler vers les océans. Par trois fois, les frimas ont contracté l’eau de mer en la refroidissant (1 km d’épaisseur d’eau de mer dont la température moyenne baisse de 1°C perd environ 25 cm de hauteur). La conjonction de ces deux phénomènes a fait baisser le niveau de la mer sur toute la planète. À Hyères, elle s’est retirée de plus de cent mètres, au point de permettre de passer à pied sec des îles d’Or au continent. Les plissements sud-nord de l’écorce terrestre sont venus ajouter leur patte au modelage de la baie d’Hyères. De -300 à -6 millions d’années, des Pyrénées au massif des Maures, les poussées d’origine alpine ou ibérique n’ont pas cessé, provoquant jaillissements et effondrements dont la résultante est un relief composé de plissements et de failles Est-Ouest.


Bisons, glaces et abysses

Vue d’artiste (Grenet, CNRS) de bisons et de chevaux sauvages qui pouvaient vivre dans les fonds de la rade d’Hyères alors que le niveau de la mer (voir schéma ci-dessus) était une centaine de mètres plus bas qu’aujourd’hui.

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Escales

Du continent aux îles d’Hyères, on trouve les mêmes roches disposées dans le même ordre. Les îles d’Or constituent le pli le plus méridional dont seuls les sommets sont visibles aujourd’hui. Au-delà vers le sud commence la plaine abyssale. Ces canyons ont des parois abruptes et certains à-pics et peuvent dépasser 800 mètres. Les fonds (talwegs) de ces canyons sont à des profondeurs allant de 2.200 à 2.400 mètres. Voici pourquoi quitter Porquerolles pour la Corse c’est se lancer dans le survol de pics et de gouffres vertigineux. En revanche, les fonds de la rade d’Hyères sont un vaste plateau deltaïque, au relief monotone, dont la profondeur n’excède guère 50 m. C’est une chance pour les plongeurs car l’endroit est plein d’épaves. À distance du rivage, l’érosion a tracé des couloirs longitudinaux parallèles au littoral. Une prospection sismique acoustique entreprise par le CNEXO a montré la présence de chenaux enfouis sous les sables actuels et correspondant à des écoulements préhistoriques. Ainsi, en rade de Hyères, se poursuivent les cours fossiles enfouis du Gapeau et du Pansard avec leurs méandres. Ces lits dessinent un delta

sous-marin avançant au nordnord-ouest de l’écueil des Mèdes. Aujourd’hui, la rade de Giens et la baie de Hyères ainsi que les abords des îles d’Or sont formées de fonds sableux assez grossiers fixés par des mattes de posidonies. C’est le plus grand herbier de la côte méditerranéenne française. Autrefois, il y avait de l’herbe à aurochs, ce sont maintenant des pâturages à poissons. Attention quand vous jetez l’ancre !


Île Rousse, Point d’arrivée des car-ferries et de bien des bateaux venus du continent, verte te tê à blanc l’Île Rousse est un haut lieu de l’histoire corse où n phare e et so génois r u to , sa e ss u o R s’illustrèrent le nationaliste Pascal Paoli, le Français de l’Île illou” Le “ca Bonaparte et l’Anglais Nelson. Rien que ça ! Entre Saint-Florent et Calvi, entre maquis et désert des Agriates, c’est aussi une belle escale.

L

’aube pointe, vingt quatre heures de traversée derrière nous depuis Porquerolles. Changement de décor, fini les vallons, la forêt ombragée de chênes-liège et de chênes verts, de grands pins et de pins parasols, terminée la vigne et les eucalyptus des îles d’Or. Ici, le silence encore, l’envie et l’appréhension de l’arrivée. La Punta de la Revellata, sombre, abrupte, emblème de la Corse granitique solitaire, se dessine à l’Ouest. Seulement du maquis, dru, ras, surplombant la mer. Son phare blanc et noir à éclats nous appelle depuis quelques heures déjà. On y est presque, sur la Isula, la Corse ! Nous longeons la côte, cap sur l’Île Rousse. A l’est, La citadelle de Calvi la fidèle, longtemps la protégée des Génois, grandit, se dessine, majestueuse, imprenable. L’escale est tentante, difficile d’y résister, il y a tant de splendeurs dans cette petite ville !

34 - Cabotages magazine

Quand nous serons arrivés à destination, il sera toujours temps de prendre le petit train de côte qui, de plage en crique, nous ramènera dans ce bastion militaire où cantonne aujourd’hui la Légion étrangère, succédant à tant d’autres garnisons chargées de le défendre. Nous restons à distance, peut-être à l’endroit où, lors du siège de la ville où il voulait établir sa flotte chassée de Toulon, l’amiral anglais Horatio Nelson gagna la bataille, mais perdit un œil. Quatre ans plus tard, ce sera son bras à Santa Cruz de Tenerife. Les nôtres ne quittent pas la terre de vue. Le golfe est immense, jusqu’à la Punta di Spano. À peine dix nœuds de vent, calmement, Skywalker, notre voilier de 34 pieds glisse sur l’eau. La brise légère, gonfle le génois. Bleu-rosé, le soleil s’élève au-dessus du mât. Plus que douze mille nautiques, environ deux heures de navigation. .../...

Calvi, en approchant par l’Ouest


joli pied de nez

!

Une correspondance de Nikita Tronc

GUY DE MAUPASSANT Corbara : “ Le paysage est grandiose et mélancolique ”

L’église de Corbara, un très beau baroque sur la hauteur au-dessus de l’Île Rousse.

Cabotages magazine - 35

Escales

Voulant aller à Corbara serrer la main du P. Didon, j’ai choisi, pour m’y rendre, le chemin des montagnes. (...). Après avoir traversé les immenses forêts d’Aïtone et de Valdoniello, le val du Niolo (...) et une partie de la Balagne, le pays des oliviers, j’ai retrouvé la mer auprès de Corbara. Le paysage est grandiose et mélancolique. Une plage immense s’étend en demi-cercle, fermée à gauche par un petit port presque abandonné des habitants (car la fièvre ici dépeuple toutes les plaines), et terminée à droite par un village en amphithéâtre, Corbara, élevé sur un promontoire. Le chemin qui me conduit au monastère est à mi-côte et passe au pied d’un mont élevé que couronne un paquet de maisons jetées dans le ciel bleu si haut qu’on pense avec tristesse à l’essoufflement des habitants contraints de remonter chez eux. Ce hameau s’appelle Santo-Antonino. On découvre, à droite de la route, une petite église du treizième siècle, de style pur, chose rare en ce pays sans monuments et sans aucun art national. Cet édifice a été élevé par les Pisans, me dit-on. Plus loin, dans un repli de montagne, au pied d’un pic élancé en forme de pain de sucre, un grand bâtiment gris et blanc domine l’horizon, les campagnes inclinées, la plaine, la mer : c’est le Couvent des Dominicains. (…) Longtemps après, quand j’eus gagné dans la plaine la route qui serpente au bord des flots, je me retournai pour jeter un dernier regard au monastère et, levant les yeux plus haut, vers le pic élancé dans l’espace, j’aperçus au pied de la croix, devenue presque invisible, un point blanc immobile détaché sur le bleu du ciel : c’était la longue robe du P. Didon regardant la mer et les côtes de France. 5 octobre 1880


Bons baisers de ... l ’Île Rousse

Sant’ Ambroggio puis Algajola défilent, seuls toits rouge-brique au milieu du maquis garanti pur-corse : des boules buissonnantes où se mêlent asphodèles, cyclamens, myrtes, bruyères, genêts, buis et arbousiers à quelques chênes verts, très secs. Presque toujours fleuri, il est drôlement citoyen ce maquis ! Les espèces semblent solidaires entre elles. Lorsque la bruyère fane à la fin du printemps, c’est au tour du myrte de prendre le relais, puis vient l’arbousier en automne; même l’aloès aux feuilles épaisses et charnues ou le ciste résistant s’appliquent souvent à colorer ce dense et vert tableau d’un panache de bouquets rouge vermeil à rose incarnat. Puis, haut perché et surplombant la mer, se dresse le village de Corbara. Son couvent, témoin de l’alliance entre l’île et la religion est un symbole vivant de deux mille ans de foi ardente. Enfin, nous apercevons l’îlot de la Pietra, la lumière a envahi le porphyre rouge qui devient ocre, le phare blanc nous éblouit presque. La tour génoise en ruine apparaît à son tour. Édifiée au XVe siècle pour scruter la mer et avertir la terre de la voile ennemie qui approche, elle fait place aujourd’hui à un sémaphore sur la colline. Là haut, sur sa passerelle, quelqu’un nous observe et veille sur nous. Notre abri approche, juste derrière la roche, enfin le repos... Voilà, n ous y sommes : 42°38’50’’N– 08°56’40’’E. Le golfe est bien plus petit que celui de Calvi, des dizaines d’embarcations oublieuses des consignes sont venues s’agglutiner à l’entrée de la ville, longeant la plage de sable blanc; difficile de s’y faire une place. Mais comment espérer en trouver une au port, minuscule et surpeuplé ? Nous avions oublié, à terre, c’est le mois d’août ! Heureusement, le temps est beau, la mer est calme, la manœuvre facile, le chenal lui-même est envahi. Les bateaux de promenade qui relient matin et soir SaintFlorent à la réserve naturelle de Scandola se faufilent entre les voiles en râlant pour la forme. Venu de Toulon bien plus vite que nous, un navire bouton-d’or de la Corsica-Ferries entre et s’amarre à la digue de l’avant-port. Un flot de piétons, touristes et indigènes, se déverse et se dilue dans la ville. Un autre, motorisé, va encombrer les routes de l’arrière-pays. Son escale est vite interrompue par un autre géant, le bleu-blanc de la SNCM, venu de Marseille. Il est déjà temps de lever l’ancre et de presser les derniers retardataires à l’embarquement. Ainsi observons-nous au fil des heures, amusés et songeurs, les invasions successives des Phocéens, Niçois, Ligures à la langue audacieuse. .../...

Pietra de porphyre

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Les ferries occupent les deux grandes digues du port, reléguant les bateaux de plaisance au mouillage en bord de plage. Au fond, les hauteurs du Cap Corse et la baie de Saint-Florent, cachée par les pointes et les sommets du Désert des Agriates.

QUAND PASCAL PAOLI JOUAIT LA CARTE ANGLAISE France s’en trouvèrent récompensées et anoblies. C’est le cas de la famille Bonaparte dont le fils Napoléon pût entrer dans une académie militaire et entamer la carrière que l’on connaît... De nationalité française, c’est tout naturellement qu’il défendra Toulon contre les Anglais et y gagnera quatre grades en quatre mois, de capitaine à général. Chassés de Toulon, les Anglais se rabattirent sur la Corse. L’amiral Nelson fit le siège de Calvi qu’il remporta avec l’appui de Pascal Paoli à qui la Couronne avait fait miroiter une bonne place. Mais le “royaume anglo-corse” nomma un Écossais - le seul parlant italien - comme vice-roi. En 1795, profondément déçu, Paoli dut se ré-exiler à Londres où il mourut en 1807. Son cénotaphe se trouve dans l’abbaye de Westminster...

Cabotages magazine - 37

Escales

Paoli était un nationaliste. Corse. Dans les années 1750, l’île, à défaut d’être prospère était un lieu hautement stratégique dans une Méditerranée fort troublée. Pour les Corses, l’ennemi numéro 1 était l’occupant de toujours, le Génois qui écrasait l’île sous les taxes. Pour les déloger, toutes les alliances étaient bonnes puisque la Corse n’avait ni flotte ni armée. Mais c’est sans bataille que la Corse se débarrassa de Gènes qui, exténuée par les dettes (déjà...) dut la donner à la France à titre d’hypothèque en 1768, au traité de Versailles. Ce n’était qu’un changement de puissance colonisatrice et ils s’aperçurent très vite qu’ils étaient tombés de la poêle dans le feu... Les partisans de Paoli furent pourchassés, roués, leurs corps exposés. Certaines familles qui avaient toutefois pris parti pour la


Bons baisers de ... l ’Île Rousse Le peuple Corse, depuis toujours objet d’enjeux stratégiques, d’incursions barbares, sarrasines, génoises, anglaises, françaises, d’alliances et de traîtrises, pourra-t-il cesser un jour de reculer dans les montagnes pour protéger sa culture et son patrimoine, sans regarder d’un œil méfiant l’étranger venu de la mer ? Ici, comme sur toutes les côtes de Méditerranée, les ports ne se sont développés qu’aux périodes de paix et de sécurité maritimes. Entre Monticello et Corbara, l’Île Rousse est passée d’un statut d’abri pour les barques à celui de port et de ville en 1765, à l’instigation de Pasquale Paoli, général en chef de la Nazione Corsa. C’était non seulement une audace, un pari sur l’avenir de cette cité sans murs ni fortins, mais aussi un pied-de-nez à Calvi la génoise. Après une sieste méritée et bercée par le trafic incessant du port, quand le soleil baisse à l’horizon et qu’un frisson nous parcourt, nous quittons notre havre flottant pour assaillir à notre tour la ville. Tous les chats de la ville nous accompagnent, la place Paoli, immense, s’impose et ses platanes tracent la piste vers les cafés toujours assaillis malgré l’heure tardive. Nous flânons au hasard. Aucun guide n’est nécessaire. L’église de l’Immaculée Conception de Marie cerne un des côtés de la place et ses palmiers dattiers délimitent un terrain de boules. Celui peut-être où Jacques Dutronc descendu de Monticello vient sabrer le champagne avec

Pied-de-nez aux Génois

PASCAL PAOLI le despote éclairé du siècle des Lumières

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ses amis pour l’International à Pétanque, chaque 17 et 18 septembre. Hélas, nous ne serons plus là. Les nombreux passants se distillent entre les petites rues pavées, peuplent rapidement les restaurants en espalier et nous suivons, curieux, ses chemins tortueux jusqu’à celui qui nous offrira la table la plus goûteuse avec vue sur la mer, toujours un œil sur Skywalker à l’ancre parmi l’armada de voiliers colorés qui se transforme en cité fantôme, sombre, sur la mer d’huile. Seules les mouettes dessinent maintenant un tableau impressionniste changeant : taches blanches coté ville, silhouettes noires coté mer. Retour en annexe dans la fraîcheur et l’humidité, à la lueur de la lampe de poche et de la lune montante. Sommeil. Mais la Méditerranée ne dort jamais que d’un œil. Au milieu de la nuit, la chaîne d’ancre rague et réveille l’équipage qui, lui, ne dort plus que d’une oreille. L’aurore grise montre un ciel orageux. La brise monte. Nous activons la manœuvre et délaisser ce bel écrin peu abrité de ce vent-là pour Saint-Florent, un vrai port avec des pontons... Vingt milles à parcourir le long de la côte. Un regard en arrière, je vois disparaître la roche toujours obscure et les premières lucioles de la ville qui se lève. La brume se dissipe. Le désert des Agriates apparaît dans la lumière chaude qui exhale tous ses parfums : sève des pins et des plantes de sable qu’on devine, partiellement ensevelies. Un dernier coup d’œil, nous allons de l’avant, comme Maupassant, « perdus dans la contemplation, presque sans idée, admirant par la sensation plutôt que par la pensée »…

Paoli ! Impossible de l’éviter. Quand on déambule dans l’Île Rousse on tombe toujours nez à nez avec lui. Il est partout. On le rencontre d’abord, dominant de son buste imposant, la grande place ombragée, démesurée à l’image de son ambition pour la Corse. Puis il nous surprend dans la vieille ville, le long de ses rues pavées, quasiment rectilignes, orientées Nord-Sud, dont l’une d’elles porte son nom. On l’aperçoit encore en se tournant vers la caserne Pasquale Paoli, où siège aujourd’hui encore l’hôtel de ville. Enfin, retour à la case départ, on s’assoit à sa table au restaurant gastronomique étoilé qui porte son nom, place Paoli, bien évidemment. Et, si vous fréquentez les librairies et les maisons de la presse, vous ne compterez plus les ouvrages qui traitent de ce héros national. U babbu de a patria, le père de la patrie, ce général, lecteur de L’Esprit des Lois, a donné à la Corse une constitution et aux femmes le droit de vote. Les philosophes des Lumières y ont vu le type même du “despote éclairé” fondateur du premier état démocratique d’Europe, modèle pour l’Amérique. Sa statue nous souhaite : « bon’ viaghju è campàtevi », autrement dit bon voyage et régalez vous bien !


LE PETIT TRAIN DE LA CÔTE BLEUE Un double cabotage, par le fer et par la mer Que fait un train dans un guide du cabotage ? Tout simplement parce que c’est un magnifique moyen de visiter la Côte Bleue, de Marseille au golfe de Fos, quand il est si difficile de trouver une place dans un port ou un mouillage dans une calanque. Alors, faites un premier passage en bateau le long de cette superbe côte, puis cherchez une place à Marseille ou au Frioul et, de la gare Saint-Charles, faites le voyage par la terre. C’est aussi une belle idée de voyage en hiver, en s’arrêtant là ou bon vous semble car beaucoup de ces endroits sont bien agréables hors-saison, quand on peut profiter de la Côte Bleue - presque - pour soi tout seul ! Textes et photos de Djinn et Christophe Naigeon

Jacques Prévert, “En sortant de l’École” Cabotages magazine - 39

Flâneries

En sortant de l’école Nous avons rencontré Un grand chemin de fer Qui nous a emmené Tout autour de la Terre Dans un wagon doré Tout autour de la Terre Nous avons rencontré La mer qui se promenait Avec tous ses coquillages Ses îles parfumées Et puis ses beaux naufrages Et ses saumons fumés Au-dessus de la mer Nous avons rencontré La lune et les étoiles Sur un bateau à voiles Partant pour le Japon Et les trois mousquetaires Des cinq doigts de la main Tournant la manivelle D’un petit sous-marin Plongeant au fond des mers Pour chercher des oursins Revenant sur la terre Nous avons rencontré Sur la voie de chemin d’fer Une maison qui fuyait Fuyait tout autour de la Terre Fuyait tout autour de la mer Fuyait devant l’hiver Qui voulait l’attraper Et nous sur notre chemin d’fer On s’est mis à rouler Rouler derrière l’hiver Et on l’a écrasé Et la maison s’est arrêtée Et le printemps nous a salué C’était lui le garde-barrière Il nous a bien remercié Et toutes les fleurs De toute la Terre Soudain se sont mises à pousser Pousser à tort et à travers Sur la voie de chemin d’fer Qui ne voulait plus avancer De peur de les abîmer Alors on est revenus à pied A pied tout autour de la Terre A pied tout autour de la mer Tout autour du soleil De la lune et des étoiles A pied à cheval en voiture Et en bateau à voile.


Flâneries avec le petit train de la Côte Bleue

V

ous avez appelé sur la canal 9 tous les ports du coin. Complets. Vous longez la côte bleue avec le regret de ne pouvoir vous arrêter dans l’un de ses petits ports. Pas de problème ! Allez voir dans le Vieuxport de Marseille, il y a presque toujours une place. Sinon, au Frioul. Et, de là, vous pouvez gagner la gare SaintCharles et prendre le Petit Train de la Côte Bleue, direction Miramas par le littoral. Tous les arrêts sont alors possibles pour toutes les envies : jouer au casino de Carry le Rouet, dîner sur le petit port d’Ensuès – La Redonne, plonger à Niolon, parcourir le chemin des peintres à l’Estaque, chercher un ami à la Couronne. Sans bouger votre bateau, prenez l’un des plus beaux trains du sud de la France. Oh, ce n’est qu’un très banal TER ! Mais non content de desservir des petits endroits splendides, la vue qu’il offre sur la rade de Marseille est unique. De Carro à Marseille Saint-Charles, c’est quarante minutes de spectacle. Alors, plutôt que de chercher un hypothétique loueur de vélo et de pédaler en plein cagnard sur des routes encombrées, dangereuses et pentues, prenez l’un des quatorze omnibus qui passent chaque jour et partez à la découverte de la Côte Bleue.

En plus, ce train a toute une histoire. À l’origine, en 1835, trois tracés avaient été étudiés pour aller de Marseille vers le nord-est. Juste avant que Louis-Napoléon ne prenne la couronne d’empereur et le numéro III du nom, fut inauguré le tunnel de La Nerthe, long de près de cinq kilomètres entre le Pas des Lanciers et l’Estaque, exploit technique pour l’époque. S’ouvrait alors une grande ligne vers Avignon exploitée par la célèbre compagnie ferroviaire ParisLyon-Méditerranée connue sous son acronyme de PLM. Un second empire, une troisième république et une première guerre mondiale plus tard, les affaires reprenant, la PLM songea à doubler la ligne en passant par la côte, l’un des deux anciens tracés non retenus, qui permettait de disposer d’une voie de secours en cas de panne ou d’accident dans le tunnel de la Nerthe. Les délais entre l’idée et la réalisation étaient déjà ce qu’ils sont encore : en 1871 le projet était imaginé, en mai 1883 l’État français et la compagnie signaient une convention d’étude, en juin 1904 le Parlement votait la loi d’utilité publique du projet, en 1908, les travaux commençaient, en 1915 la ligne Port de Bouc – Marseille était ouverte. À peu près un kilomètre par an… .../...

un travail de titan

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Flâneries avec le petit train de la Côte Bleue L’ingénieur en chef Paul Séjourné, surnommé le “Gustave Eiffel des ponts en maçonnerie”, fut chargé des travaux. Un autre exploit. De la mer, on voit très bien les viaducs. Entre eux, très peu de terrain plat découvert. Dès qu’elle quitte un pont, la voie s’enfonce sous terre : 18 viaducs et 23 tunnels Quand il n’y avait pas de roche dure à percer dans des conditions acrobatiques, il fallait retenir les pentes de marnes noires qui s’effondraient. Certaines gares, comme celle de la Redonne, durent être carrément suspendues en haut de falaises artificielles. Heureusement, les ingénieurs trouvaient sur place les pierres nécessaires à la construction des renforts et des ponts, les composants pour fabriquer le béton et produire les ballasts. C’est ainsi que les carrières de la Vesse et de la Redonne furent créées. En désenclavant tous les petits ports de la Côte Bleue, cette ligne lança le développement économique et touristique de Carry le Rouet et de Sausset les Pins. Aujourd’hui, pour beaucoup de Marseillais, c’est un train de banlieue bien pratique et, pour ceux qui ne s’en lassent pas, un enchantement de chaque jour.

Vue de la terre, vue de la mer, vue des cabanons d’aujourd’hui sous l’un des multiples viaducs, et les mêmes vus par le peintre Georges Braque en 1906. Et , en haut, une locomotive de la ligne au temps de la vapeur et l’actuelle gare de La Couronne.

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V

Histoire de thons et de sardines

L’Estaque

attachant port d’attache Port des peintres, des écrivains et des cinéastes, l’Estaque est aussi une ville industrielle au caractère bien marqué où se mélangent fort bien les gens, les métiers et les bateaux. De la gare ou du port de plaisance, tout converge vers cette ville qui porte le nom d’une amarre et sait si bien nous attacher.

Cabotages magazine - 43

Flâneries

ous venez à peine de quitter la gare Saint-Charles. Les premiers kilomètre ne sont guère romantiques, comme dans toutes le périphéries ferroviaires des grandes villes. Mais très vite, passée la nouvelle tour de verre en forme d’étrave de bateau, on a de la voie ferrée une vue insolite sur les bassins du port de Marseille, d’un point de vue plus élevé que celui que l’on a en voiture depuis la voie rapide. Et sans souci de conduire... Le premier arrêt arrive très vite : l’Estaque. La gare est dans la partie haute de la ville, au-dessus du premier bassin de plaisance. Si vous étiez arrivé en bateau, l’Estaque aurait été reconnaissable à l’église qui domine le port. Une fois au port, sous l’église, votre regard tomberait forcément sur les troquets qui le surplombent… quelle émotion, certains sont là depuis très, très, très longtemps et ont vu passer des générations de marins, pêcheurs, touristes et autres buveurs de tout poil. Ici, c’est encore un quartier de Marseille mais vous entrez sur la Côte Bleue. L’Estaque (prononcez l’Estaaqueu) est un “village” maritime au caractère bien… trempé. En provençal l’estaco veut dire l’attache, celle qui permet d’amarrer les bateaux à un pieu. Attache également sentimentale… Robert Guédiguian a fait de ce quartier populaire et extraordinairement vivant, une magnifique série de portraits dans presque tous ses films, avant et après le plus connu, Marius et Jeannette (1997). Du fait de sa situation naturellement protégée des vents violents d’ouest et de nord-ouest, la vocation maritime de l’Estaque est ancienne. Grecs et Phéniciens en auraient fait un port “pinardier” où transitaient des milliers d’amphores. La vigne y fut cultivée jusqu’au XVIIIe siècle, mais l’activité essentielle a longtemps été, bien sûr, la pêche à la sardine et la seinche au thon, laquelle nécessitait une main d’œuvre abondante. La deuxième activité qui s’est développée pour atteindre son apogée à la fin du XIXe siècle est la fabrication de tuiles. Briques et tuiles faites avec l’argile du bassin de Séon (lieu qui portait également le vignoble) sont renommées depuis l’antiquité. Les tuiles étaient transportées sur des tartanes malonières (barques à fond plat) jusqu’au port de la Joliette pour être exportées vers les colonies. La Tuile de l’Estaque a occupé une place importante dans l’architecture coloniale, en Indochine notamment. Parallèlement aux activités artisanales, le quartier a connu un fort développement industriel à partir de 1885, avec l’arrivée de diverses usines liées à la chimie, l’industrie minière, la réparation navale. La population est passée de moins de trois cents habitants en 1872 à près de quatorze mille en 1931 ! L’architecture de style industriel de la gare où vous avez peut-être débarqué est remarquable de cette époque faste. Malheureusement, toutes les petites tuileries ont disparu dans les années 1930-1940 et le déclin de toutes les activités industrielles qui a suivi ont fait de l’Estaque une zone économiquement sinistrée comme en témoignent les friches industrielles qui ne sont esthétiques que dans les films. Elles sont actuellement en pleine transformation. L’Estaque, c’est aussi la mer et les vacances. L’EstaquePlage s’est construite autour du port. De grandes plages de sables occupaient son littoral et étaient le lieu de diverses activités, pêche, petits commerces, restaurants… lieu de week-end fréquenté par les Marseillais pour y


Flâneries avec le petit train de la Côte Bleue d­ éguster oursins, sardines et panisses. Le village est resté à l’écart jusqu’au début du XXe siècle, quand la route est arrivée et que la voie ferrée Marseille-Miramas a été mise en service. Lieu populaire, l’architecture diversifiée révèle une belle mixité sociale. Les petites maisons où résidaient les ouvriers des usines côtoient les bastides et les villas de bord de mer construites par les riches Marseillais.

La Côte Bleue merveille sauvée de justesse

Ces ”folies“ architecturales révèlent toute la fantaisie de ceux qui les ont bâties. A l’Estaque-Plage, tout près de l’Office de tourisme, la “Palestine” est une magnifique villa de style mauresque construite au début du XXe siècle par un amoureux de l’Orient, Pierre Leclerc (voir page 43). Un dernier “chichi” acheté sur le quai et vous voilà reparti vers la gare pour le prochain train. Une autre aventure.

La Côte Bleue, merveille depuis la mer, est pleine de surprises vue de la voie ferrée : après de longs tunnels ou des gorges profondes, éclate la mer, éblouissante.

Alors que les premières marinas commençaient à se construire à la fin des années 70, les élus ont décidé de faire de la Côte Bleue et de sa bordure subaquatique une zone protégée. Acceptant un développement modéré des constructions et des ports, ils en ont fait un site aussi beau que les calanques de l’est de Marseille.

C

arro, La Couronne, Sausset les Pins, Carry le Rouet, Ensuès La Redonne, Niolon… des noms qui s’égrènent sur la carte marine autant que sur les horaires des chemins de fer, quelques amers faciles à repérer comme l’immeuble de Carry, la villa de Sausset, les viaducs du train… La Côte Bleue s’étend des confins de Marseille au Cap Couronne. Aussi se trouve-t-elle prise entre deux repères symboliques de la civilisation : les barres d’immeubles de Marseille à l’est et les quatre cheminées de Lavéra à l’ouest. La ville et l’industrie prennent en tenaille ces trente kilomètres de littoral rocheux qui s’abaisse doucement en abordant le delta du Rhône jusqu’à n’être plus qu’une dalle plongeante à Carro, bonheur des véliplanchistes, malheur des capitaines dont les épaves jonchent les fonds.

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Danger de pollution ici, risque de bétonnage là, menace de surpâturage touristique et d’incendie partout, la Côte Bleue a su résister autant que faire se peut à la destruction. Depuis 1980, le Conservatoire du Littoral a commencé à acquérir des terres pour les protéger. Aujourd’hui, avec plus de 3 300 ha, c’est le plus vaste site du conservatoire en France continentale. En mer, un Parc marin prend le relais et assure sa part de protection. D’abord, il y eût, dans les années qui ont suivi la première guerre mondiale, un premier afflux de Marseillais, touristes du dimanche : l’ouverture de la ligne Marseille – Miramas par le percement de tunnels et la construction de viaducs nombreux a ouvert la voie à la fréquentation du massif, de ses ports et de ses calanques où ne vivaient même pas 3 000 personnes.


Puis, dans les années 70, le développement de la plaisance a donné l’idée aux promoteurs de bâtir des marinas autour de ces abris naturels splendides que sont les calanques et les baies de la Côte Bleue. Une première route d’accès à un futur lotissement de 12 m de large et de 3,5 km de long été construite mais jamais utilisée... Les élus ont eu l’audace de résister aux sirènes tentatrices qui faisaient tinter l’or venu de la mer. Bleue, sans doute, la côte. Mais au printemps, avant que juillet et août n’aient fait entrer la nature dans sa longue sieste estivale, le massif est un enchantement de couleurs tant les fleurs y sont nombreuses. Point n’est besoin d’être un naturaliste chevronné pour apprécier, la plus petite âme de poète suffit. Par le train qui longe la côte mieux que n’importe quelle route ne le fait, ou mieux encore avec votre bateau quand les petits ports de pêche des calanques de la rade nord de Marseille ont enfin une place libre pour vous, revenez en avril quand les goélands préparent leurs nids au milieu des coquelicots, quand la roche la plus âpre offre des bouquets jaunes et mauves.

La réserve marine belle “usine” de vie

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Flâneries

rois ans après les premiers achats de terrains par le Conservatoire du Littoral, en 1993 a été créée le Parc Marin de la Côte Bleue qui, entre autres, gère deux zones strictement défendues, à Carry le Rouet et au cap Couronne. L’enjeu est d’importance : la Côte Bleue recèle d’immenses richesses. L’idée n’est pas de créer un sanctuaire pour scientifiques ni un musée pour amateurs de belle nature. C’est de préserver cette “usine” de produits de la mer que le pêcheur professionnel peut vendre et le touriste manger. Cette fabrique est un ensemble d’outils qui travaillent en harmonie. Il y a d’abord les herbiers de posidonies. Ce n’est pas une algue, c’est une herbe qui fleurit jaune chaque année. Dans les fonds sableux, en été, les jeunes rougets, soles, grondins, pageots et daurades se nourrissent de petits vers, crustacés et mollusques en fouillant le sable. En hiver, les sardines s’y regroupent avant de gagner la pleine mer. Au printemps, des bancs de lançons frayent à leur bordure. Les petits fonds rocheux, permettent à de nombreuses algues de se développer sur la partie éclairée alors que les animaux fixes prédominent sur la zone ombragée. Ces zones rocheuses servent aussi d’habitat et de refuge pour la faune invertébrée et vertébrée. Elles sont le lieu de prédilection des juvéniles des espèces de poissons, en zone superficielle. Ceux-ci y trouvent une nourriture abondante, un milieu peu profond, bien oxygéné et une multitude de cachettes pour échapper aux prédateurs. De nombreux poissons sont présents : 200 espèces appartenant à 77 familles y ont été référencées dont la roussette, la baudroie, la sole et le mérou (espèce protégée), mais aussi loup, muge, saupe, corb (espèce patrimoniale), daurade royale, sar commun, sars tambour, vérade, sparaillon, charax, girelles, serrans, rougets, merle, lasagne, crénilabres et rascasses. La plupart de ces espèces ont un intérêt commercial pour la pêche.


Flâneries avec le petit train de la Côte Bleue

Niolon

small is beautiful

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La crique de la Vesse

près l’Estaque, le train passe dans un long tunnel et ressort au ras de l’eau, entre la mer et les friches industrielles en plein chantier. Devant les fenêtres défilent des pins et des villas accrochées à la roche, face au grand bleu. Encore un tunnel, un pont, un tunnel... et une minuscule crique, la calanque de la Vesse (photo 1) avec quelques petits bateaux à moteur au mouillage et des kayaks tirés au sec. Une envie de bain... Puis arrive Niolon, un tout petit port accessible à des bateaux en harmonie avec sa taille. Il se cache derrière une petite pointe surmontée de blockhaus de la dernière guerre repeints en blanc. Ce fort fut, lors de la dernière guerre, occupé par l’armée allemande, ce qui explique que le lieu soit doté de ces disgracieuses bonbonnières en béton surarmé. Ces casemates, ainsi qu’un ancien fort militaire construit en 1860, abritent le Centre de plongée de l’UCPA. Les fonds sous-marins en effet réservent de belles plongées sur cette portion de côte en particulier vers la petite île de l’Elevine. On trouve près du port quelques commerces, bars, restaurant. Sur le Chemin du port, on trouvera l’Auberge du Mérou où on se régalera de produits de la mer et d’une vue sur toute la rade de Marseille. En montant au dessus du village par le chemin longeant la voie ferrée vers l’ouest et en prenant, à droite, le sentier qui monte vers le fort militaire avant le viaduc, on bénéficiera d’une vue remarquable sur toute la rade de Marseille et les différentes sortes de navires qui y croisent : porte-conteneurs, vraquiers, cargos mixtes, ferries et autres monstres de ferraille plus ou moins rouillés ou étincelants de peinture (photo 2).

La Redonne Le petit port de Niolon

Le port de La Redonne

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modeste et charmante

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e petit port de La Redonne se repère facilement du large grâce au viaduc à six arches qui le surplombe. De là, on a une vision panoramique de la rade. Y entrer demande d’être à la barre d’une unité de taille très modeste (la modestie n’altérant en rien la valeur affective et le sentiment d’orgueil ressenti par le propriétaire de ladite unité). Cette calanque très boisée a vu au fil du temps ses cabanons cachés sous les pins se transformer en villas. C’est, on peut le dire, quasiment un petit paradis. Quelques petits restaurants le long du quai pourront vous accueillir. Un sentier des douaniers permet de longer la côte sur environ 5 km et de découvrir une infinité de criques qui appellent au bain. Au retour vers le petit port (très peu de places de passage), on peut admirer ce village abrité du Mistral comme des vents d’est, dans un repli rocheux surmonté par la chaîne de l’Estaque. De petits restaurants, plus simples qu’à Niolon, pourront vous retenir encore un peu sur le quai devant lequel dansent les pointus des pêcheurs.


CARRY LE ROUET

le port de Fernandel

Carry-le-Rouet est indissociable de Fernandel qui en tomba amoureux et y fit construire une villa en bord de crique en 1939. Toute sa vie, elle sera son refuge.

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De Carry, Fernandel a toujours été le voisin : Fernand Joseph Désiré Contandin, né à Marseille en 1903, pouvait, dès 1915, aller le dimanche à la découverte des villages côtiers grâce au chemin de fer de Miramas. Les abris sous les roches où, vingt mille ans plus tôt, venaient s’abriter des nomades lors des dernières glaciations, gardaient ainsi au frais les familles marseillaises, leurs pique-nique et l’anisette. Venu au monde dans celui du spectacle, Joseph a très tôt le goût des planches. Il débute très jeune dans un drame historique, Marceau ou les Enfants de la Révolution d’Anicet Bourgeois. Ces débuts sont interrompus par la mobilisation du père en 1914 qui oblige le jeune homme, « maigre comme un stoquefiche » (stockfisch, poisson aplati en conserve), à occuper toutes sortes d’emplois. Après l’Armistice, the show must go on. Il rencontre Henriette sa future épouse dont la mère, en le voyant lance : « Vé ! Voilà le Fernand d’Elle ! ». Son nom de scène est trouvé. L’Odéon l’engage en 1926 en remplacement de la vedette parisienne conspuée par le public. .../...

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Flâneries

ne maison de rêve au bord d’une mer du même tonneau. La Villa des Mille Roses que fait bâtir l’acteur Fernandel à Carry le Rouet en 1939 est, pour l’époque, hollywoodienne : au milieu d’un parc planté d’essences méditerranéennes, quatre cents mètres carrés face au lever du jour sur Marseille et le Frioul. Les romains avaient appelé cet endroit In Carus Positio, autrement dit le mouillage dans la carrière. Fernandel en a fait en quelque sorte le port d’attache de la sienne. Un lieu de calme indispensable dans sa vie d’acteur extrêmement bien remplie. À gauche des Mille Roses, on accède directement à la place du bateau dans le petit port de Carry et, en bas des escaliers, se trouve une crique d’eau transparente, aujourd’hui appelée plage Fernandel. On pourrait presque croire que le blason de la ville parle de la villa : “d’azur à une tour carrée d’or sur une mer de sable”. Mais il s’agit d’une autre tour, construite au XVIe siècle, quand les seigneurs de Jarente dotèrent Carry de son premier château.


Un triomphe. Les contrats s’enchaînent, avec les salles Paramount où il anime les entractes. Puis Bobino et les cinémas Pathé. La famille s’installe à Paris en 1930 et s’agrandit avec un deuxième enfant. Son emploi du temps s’emballe : il tourne la journée et chante le soir. Douze films en 1932, huit en 1933 ! C’est à la veille de la guerre qu’il se souvient de la petite station balnéaire de son enfance.  Assez  riche  pour  réaliser  son rêve, il fait construire sa villa. Carry-leRouet vient d’être dotée de l’eau courante et de l’électricité, les premiers lotissements sont attribués. Après la guerre, les bobines se remettent à tourner avec frénésie : Naïs, Topaze… et bien d’autres. C’est la célébrité.

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Plus que jamais, la villa de Carry le Rouet est son abri. Chaque année, l’acteur et sa famille y passent les mois d’été. Il pêche à bord de son bateau, baptisé Caméra, hommage à l’instrument de son succès et de sa fortune. Au village, Fernandel anime de sa bonne humeur les parties de pétanque suivies du traditionnel pastis. Les carryens apprécient sa légendaire bonhomie. Sa collaboration avec Marcel Pagnol, pour lequel il joue dans presque tous ses films, débute avec le personnage de Saturnin dans Un de Beaumugne. Après l’immense succès du film Angèle, il raconte : « C’est à Pagnol que je dois d’avoir pu prouver que j’étais un vrai comédien ». Il incarne des personnages forts comme dans Le Mouton à Cinq Pattes (1954) et La Vache et le Prisonnier (1959), d’autres plus faciles comme dans la série Don Camillo et, dans les années 60, à part Crésus de Giono, il enchaîne navet  sur  navet.  Le  film d’Henri Colpi Heureux qui comme Ulysse… en 1969 marque sa dernière apparition cinématographique. Il a fait un beau voyage en effet notre Fernandel national. Mais son Odyssée ne l’a pas ramené dans son havre de Carry : mort à Paris, il n’a pas pu se faire enterrer dans le parc de la Villa des Mille Roses. À Carry-leRouet ne reste de Fernandel qu’une statue devant l’espace culturel qui porte son nom. La famille a vendu la maison dans les années 80.

Mille Roses pour un stockfish


SAUSSET LES PINS

père industrieux, fils prodigue Tous les navigateurs connaissent l’amer le plus visible de Sausset-les-Pins : un “château” blanc édifié par l’industriel Charles Roux au XIXe siècle. Son fils Jules, un notable généreux et mécène, reste une figure incontournable de l’histoire de la ville.

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vant-dernière escale et gare sur la côte Bleue, Sausset-les-Pins. C’est un petit port de pêche entouré de pinèdes et de garrigues, seulement à quarante kilomètres de Marseille. Autrefois un hameau de deux cents habitants, le village est devenu, notamment grâce au train, une station balnéaire familiale. Un imposant «château» la domine, blanc dans le vert des pins. C’est une sorte de symbole pour la ville, le vestige d’une époque industrielle révolue. En 1854, le riche Marseillais Jean-Baptiste CharlesRoux, propriétaire d’une savonnerie et d’une huilerie achète une pinède de 300 ha sur la commune de Saussetles-Pins. Il y fait construire cette “folie” en 1855. La bâtisse est si haute et si visible de loin qu’elle sert d’amer aux bateaux en approche. Ostentation, certes, mais aussi visibilité recherchée : le capitaine d’industrie Jean-Baptiste Charles-Roux veut voir son château depuis son bureau à Marseille ! Si Jean-Baptiste a pu se rendre visuellement inoubliable, c’est son fils Jules Charles-Roux qui reste dans les coeurs de Sausset-les-Pins grâce à sa générosité. Ce dernier a offert à la municipalité le champs d’oliviers qui borde la petite anse naturelle de Saussetles-Pins, emplacement de l’actuel port. Les Saussétois jouissent encore aujourd’hui d’autres largesses foncières de Jules Charles-Roux : la parcelle où s’élève l’école primaire de Sausset et le terrain du Cercle SaintPierre, le lieu de rencontre incontournable du 3e âge, la Ferme Neuve, ancien bâtiment agricole qui abrite désormais les services municipaux et des salles de réunion… De nos jours, Jules Charles-Roux fait parler de lui.. L’histoire : deux parcelles sur le port où se trouvent l’école de voile et le parking public Jean-Jaurès, offertes officiellement à la ville par le fils prodigue dans les années 1920, ont été oubliés par le bureau des hypothèques à Aix-enProvence. Selon la loi, ils étaient toujours la propriété des Charles-Roux. En 2007, après les démarches sinueuses qu’on imagine, le témoignage de vieux Saussétois témoins du don, a réussi à faire, enfin, inscrire ces biens au bénéfice de la commune. Mais personne ne fait jamais l’unanimité. Surtout dans sa propre famille. Un historien, René Tellène, raconte que Jules, ami des artistes, recevait fort généreusement au château des peintres et des écrivains dont Frédéric Mistral, et soutenait Félibrige (mouvement qui désire restituer au provençal son rôle de langue littéraire) : « Jules Charles-Roux est un poète désintéressé. Il aide les artistes. Ces derniers séjournent dans son château. Sa générosité déplaît à certains de ces descendants. Ainsi,

l’écrivaine et présidente du Prix Goncourt Edmonde Charles-Roux (ndlr : sa petite fille) ne veut plus entendre parler de Sausset les Pins ». Après la disparition de Jules, la famille vend le château en 1931 sous forme de copropriétés. La bâtisse n’a subi depuis aucune transformation et les appartements ont gardé toute leur authenticité. Un escalier monumental en marbre accueille les visiteurs à l’entrée. Ce qui explique un prix à la vente “élevé” : plus de dix mille euros le mètre carré… Une partie des 300 ha de la propriété est morcelée en 1978. Trois lotissements naissent dans la pinède, Aujourd’hui une rue de Sausset-les-Pins porte le nom du bienfaiteur. Le “château” visible jusqu’à Marseille

Jules Charles-Roux ami des artistes

Flâneries

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Flâneries avec le petit train de la Côte Bleue

La Couronne

des guetteurs et des traceurs Pour les plaisanciers, La Couronne, c’est un sémaphore et ses guetteurs qui veillent sur eux. C’est aussi un phare à tête rouge qui leur indique une côte rocheuse un peu traîtresse. Pour ceux qui viennent par le petit train, c’est la dernière étape de la Côte Bleue, une belle plage pour se baigner, des roches plates pour pêcher.

L La plage du Verdon, sa falaise calcaire, ses récifs affleurants et son sésmaphore qui régule le trafic des navires de commerce du golfe de Fos et de la rade de Marseille.

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’incessante alternance des ponts et des tunnels se termine (ou commence) ici. À La Couronne, la voie de chemin de fer passe de la chaîne de l’Estaque aux abords plats du fond du golfe de Fos et de l’étang de Berre. Si vous venez en bateau et que le vent ne souffle pas du sud, vous trouverez un joli mouillage devant la plage du Verdon, sous le sémaphore blanc d’où des guetteurs auront l’oeil sur votre bateau. Mais sachez qu’ils ont bien d’autres chats à fouetter avec la surveillance des dizaines de navires de gros tonnage qui mouillent et manœuvrent dans le golfe de Fos. Attention aux roches plates affleurantes sur les bords, mais le mouillage est sûr.


C’est aussi une des rares grandes plages de cette côte qui a surtout des cailloux. De l’autre côté du phare blanc à tête rouge (respecter les balises pour ne pas taper), il existe une autre crique propice à la baignade et surtout à la plongée PMT (palmes, masque, tuba) car moins fréquentée. Attention au ressac... Si vous arrivez par la gare, il suffit de marcher un peu pour gagner au centre du bourg. À vrai dire, le point d’attrait touristique de La Couronne est modeste mais charmant. C’est la petite place devant l’église. Ombragée l’été, c’est un lieu tout à fait sympathique où l’on peut déjeuner sur des tables installées autour du monument aux morts, avec une jolie vue sur la façade de cette église dédiée à Saint Jean Baptiste et édifiée en 1664 sous le nom de chapelle des Traceurs de pierre. Dedans, une petite vitrine sombre contient les outils des ouvriers, les “queyrouns” qui extrayèrent des blocs des petites falaises littorales pour construire, notamment, la Vieille Charité de Marseille. La carrière continue ponctuellement d’être exploitée pour les travaux de restauration.

L’église Saint Jean Baptiste et la maison du curé, occupée par les services du Littoral. La gare et les cheminées de Lavéra, repère des Marins qui marque la limite du golfe du Lion.

Carro

paradis des planches

Flâneries

La Couronne fait partie de la commune de Martigues, tout comme Carro dont on voit l’entrée du port de la plage du Verdon. Une balade à pied mène à ce petit port charmant (mais peu de places d’accueil et pas de gare) et à son marché aux poissons très vivant pourvu que vous arriviez le matin tôt. Carro est aussi un site (dire spot !) de planche à voile célèbre car le mistral y souffle souvent et lève des vagues qui “montent” vite sur les dalles calcaires affleurantes. Sur le parking devant la mer, les camping-cars s’y accumulent comme sur les plages à surf de Californie... presque !


Flâneries avec le petit train de la Côte Bleue

Martigues et Port-de-Bouc

deux bouts du canal de Caronte Après avoir longé les raffineries et passé sous leurs torchères, le train s’engage sur le très long pont qui saute par dessus le canal de Caronte reliant le golfe de Fos à l’étang de Berre. En haut, la gare de Martigues, dessous, la gare de Port de Bouc, vues du train comme le pont, à travers la vitre de la locomotive.

Les gares de Martigues et de Port-de-Bouc sont trop loin des centres-ville touristiques pour que cela vaille la peine de descendre du train. Mais la traversée du canal offre une vue insolite sur les deux villes et leurs abords nautiques (voir les photos de la page de droite) que l’on n’a pas en prenant l’autoroute. ort-de-Bouc pourrait s’appeler le port du bout, le bout du golfe de Fos, une extrémité à oser visiter. Si vous ne retenez de Port-de-Bouc que ce que vous en avez vu de la voie rapide, vous ne serez guère tentés par l’aventure qui consiste à risquer sa coque dans le couloir des cargos. Et pourtant... Il est non seulement très émouvant et peu dangereux (moins que de leur couper la route !) de naviguer dans l’antre des mastodontes, mais la vision qu’on a de la mer est toute différente de celle de la terre. Port-de-Bouc, avec son immense tour de contrôle maritime, avec son port où l’on croise des barquettes en bois

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et des remorqueurs géants, des quais populaires et son ambiance bon enfant, n’est pas celle que vous croyez. À voir pour changer. artigues est à la sortie du canal de Caronte. Le port de ville n’est que l’un des sept ports de Martigues qui offrent un total de 1.500 places à flot. Sur les sept, les plus beaux sont ceux de Ferrières, du Miroir aux Oiseaux, du Canal Saint-Sébastien ou côté étang de Berre, de Joncquières. Une fois amarré, vous allez oublier l’industrie, la circulation, le bruit et les parfums raffinés des environs pour vous retrouver dans un havre de calme, une ville propre et riche d’histoire, animée tout l’été – mais sans flons-flons intempestifs – qui a reçu le label Station Touristique Balnéaire. Un autre atout de Martigues est d’être ouverte sur l’étang de Berre, magnifique terrain de jeu pour le nautisme, la voile en particulier. Un bon coup de vent sans vagues, quel plaisir !

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En haut, des “deux” Martigues, le pont de l’autoroute et le débouché sur l’étang de Berre. En bas, Port-de-Bouc et le canal vers le golfe de Fos.

Flâneries

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EDF acteur de la réhabilitation de l’Étang de Berre La chaîne de la Durance et du Verdon représente la première source d’énergie renouvelable en région PACA et le canal EDF qui alimente les centrales hydroélectriques sécurise son approvisionnement en eau potable, industrielle et agricole. concentrations de matières en suspension et des sondes de mesures enregistrent en continu la salinité. Un innovant programme de suivi scientifique physique (eau, limons, salinité) et écologique (moules, herbiers de zostères, macrofaune benthique, poissons) de l’étang est mis en œuvre, en partenariat avec le GIPREB. Audelà des suivis réglementaires, les services de R&D d’EDF sont fortement impliqués sur le suivi du milieu pour comprendre le fonctionnement du système au travers du développement de modèles hydrodynamiques et biogéochimiques.

En amont : Serre-Ponçon

Communiqué

L’aménagement hydroélectrique de la Durance et du Verdon représente près de 50 % de la production d’électricité de la région PACA et 15 % du potentiel hydroélectrique national. 2 000 MW d’énergie renouvelable sont mobilisables très rapidement face à des pics de demande et jouent un rôle indispensable pour la sécurité de l’alimentation électrique de la région PACA. Le canal EDF, long de 250km, de la retenue de Serre-Ponçon jusqu’à l’Étang de Berre, permet de produire de l’énergie renouvelable à partir des eaux de la Durance et de sécuriser l’alimentation en eau potable et en eau brute de la région PACA. Limiter les impacts sur l’Etang de Berre Cet aménagement, qui permet d’utiliser tout le potentiel d’énergie renouvelable de la Durance et du Verdon en toute sécurité, a cependant conduit à perturber l’écosystème de l’Étang de Berre. L’application, dans les années 1990, du Plan Barnier pour sa réhabilitation a conduit à fixer des valeurs annuelles limites en eau douce et en limons rejetés dans l’étang. Ces dispositions, appliquées par EDF, ont conduit à rediriger les eaux du canal EDF vers la Durance, après la centrale de Mallemort, limitant le potentiel de production. Plus  récemment,  conformément  aux  exigences d’un arrêt de la Cour de Justice Euro-

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péenne du 7 octobre 2004, l’exploitation des aménagements a de nouveau été modifiée pour renforcer l’amélioration de l’état écologique de l’étang : limitation et lissage des volumes turbinés au pas de temps hebdomadaire, nouvelle réduction du quota de limons, taux minimum de salinité à respecter, contrôle de la qualité des eaux rejetées. Ces nouvelles dispositions, mises en place à titre expérimental pour 4 ans (2006-2010), se sont accompagnées de la création d’un Comité d’experts, de contrôles et d’une évaluation  sur  la  base  de  bilans ­périodiques. Une situation sous contrôle EDF a intégré ces dispositions dans sa gestion de la chaîne de production d’énergie renouvelable Durance Verdon. Les quotas sur les apports en eau et limons (1,2 milliard de m3 d’eau et 60 000 tonnes de limons), ainsi que les objectifs de salinité ont été totalement intégrés à la gestion de l’aménagement. EDF s’est aussi doté des outils et des dispositifs de mesures nécessaires pour contrôler finement ces paramètres.  Des  turbidimètres sont implantés en amont sur l’aménagement  pour  connaître  les

La fin de la période expérimentale La période expérimentale arrivant à son terme, et face à ce constat d’une situation maîtrisée et en voie d’amélioration, la Commission Européenne a décidé le classement du contentieux. Elle a considéré que la problématique de l’Etang de Berre était dorénavant correctement prise en charge par les services de l’Etat et pris acte que la concertation en place, en lien avec le GIPREB assurait une bonne gouvernance locale. Les dispositions telles qu’elles ont été prises à titre expérimental en 2006, ont donc été confirmées dans la durée. EDF est aujourd’hui engagé dans l’élaboration du Contrat d’Étang et participe à cette démarche de concertation au service de la réhabilitation de l’image de l’Étang, du développement des usages nautiques et de l’amélioration des écosystèmes.

En aval : Saint-Chamas


Flâneries avec le petit train de la Côte Bleue

L’ÉTANG DE BERRE une surprenante mer intérieure La côte méditerranéenne française recèle deux petites mers intérieures navigables, le bassin de Thau près de Sète et l’étang de Berre près de Marseille. Le premier a eu la chance de rester apte à l’ostréiculture, le second, après avoir traversé une période de sévère pollution, renaît à la vie.

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Une nature qui revient au galop

réduite par des sécheresses (1990, 2005), la salinité remonte autour de 30mg/l et que la vie au fond et dans l’eau repart… Une condamnation de l’Europe facilitera les choses, obligeant la France à de sévères mesures. Du coup, l’étang de Berre retrouve ses attraits touristiques. Depuis 1990, les rejets d’eaux douces par EDF sont contrôlés, les stations d’épuration se multiplient et la qualité de l’eau est sous surveillance. Des plages rouvrent d’année en année. Le GIPREB (Groupement d’intérêt public pour la réhabilitation de l’étang de Berre) veille, publie bilans et études. Et un projet ressort périodiquement de l’eau comme le monstre du Loch Ness : rouvrir le canal du Rove… Les actions du Conservatoire du Littoral et ce qui est entrepris au titre de Natura 2000 convergent avec les efforts des communes riveraines pour sauver et mettre en valeur ce site naturel superbe mais aussi ce qui reste des vestiges romains et féodaux, des vieilles maisons provençales. Claude Roger

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Flâneries

assé Port-de-Bouc, descendez à Istres. Il y a une navette pour aller au port (voir page 58). Surprise ! Ni raffineries, ni d’entrelacs d’autoroutes… Juste un paysage méditerranéen au petit air de calanques, des rochers et des plages, des grands pins verts, des villas ocres… et une belle eau bleue transparente, des ports tranquilles ! L’étang de Berre n’a pas la réputation qu’il mérite. Chacun pense que l’industrie – qui parfois sent un peu du côté de l’aéroport… – a pollué les eaux. Or, malgré les attaques de l’industrie et de l’urbanisation, l’étang de Berre est en train de redevenir un petit paradis nautique grâce aux militants, aux communes riveraines et à l’Europe. Le site de Berre, déjà économiquement hautement stratégique dès l’antiquité, l’était aussi au Moyen-Âge et plus encore à partir du XIXe siècle : en 1863 puis en 1874 et en 1925, le canal de Caronte sera approfondi jusqu’à 9m, mettant l’étang en communication permanente avec la mer : les eaux de l’étang deviennent salées. Elles le sont d’autant plus après la mise en service en 1925 du canal-tunnel du Rove qui ouvre un accès au port de Marseille, apportant de l’eau “neuve” et créant un courant favorable à la vie aquatique. Hélas, il s’effondre en partie et est fermé en 1963. Les choses s’aggravent en 1966 quand EDF met en service une centrale électrique alimentée par le canal de Cadarache qui dérive un peu de la Durance vers l’étang de Berre. Non seulement les apports d’eau douce explosent pour représenter près de quatre fois par an le volume d’eau de l’étang avec ses 23 milliards de mètres cubes annuels, mais apportent 520 000 t d’alluvions qui s’accumulent et ont des répercussions hydrologiques et écologiques jusqu’en Camargue. La vie au fond va s’éteindre sous les effets de la baisse de salinité, de la stratification des couches d’eau et de sédiments, de l’eutrophisation de l’étang. Côté pollution, c’est au cœur de la crise de 1929 que Shell s’installe au bord de l’étang pour diversifier ses activités vers la pétrochimie. À la Mède, Total rivalise de torchères, de réservoirs et d’odeurs. À tel point qu’en 1957 il faut interdire la pêche dans l’étang à cause de l’accumulation chimique dans la chair des poissons. Elle ne sera à nouveau autorisée qu’en 1994, sous surveillance. Avec le développement économique, vient l’explosion démographique et la pression urbaine : Marseille et Aix sont proches, ainsi que Fos et son complexe sidérurgique, créateur d’emplois. Autant de bonnes nouvelles économiques, mauvaises pour l’environnement et le paysage. Mais les pressions militantes augmentent d’autant que les aléas climatiques montrent que dès que l’hydraulicité est


Flâneries avec le petit train de la Côte Bleue

ISTRES

Heures-Claires... l’eau aussi Istres, port sud-ouest de l’étang de Berre, est noyé dans la verdure qui plonge dans la mer. Une escale où l’on supporte facilement d’être bloqué par la météo !

V

enir en train, c’est bien, mais c’est de la mer (de l’étang qu’on appelle ici la “mer de Berre”) qu’on imagine le mieux ce qu’on va bien pouvoir faire à terre. En longeant cette côte élevée et très verdoyante de l’étang de Berre, on devine un sentier de douaniers (de contrebandiers ?) qui serpente, tantôt sous les pins maritimes, tantôt dans les cannes de Provence et les roselières littorales, tantôt sur la hauteur entre deux strates de falaise de couleur paille, tantôt le long des criques et des plages où les tempêtes de Sud-Est (le vent des Dames) déposent des monceaux de coquillages. En venant en bateau depuis Martigues, la première envie de jeter l’ancre vient dans la petite baie du Ranquet, entre trois et cinq mètres de fond, face à un ancien hameau de cabanons qui sont peu à peu devenus de petites villas pomponnées à moitié perdues dans la végétation. Tout y est : une plage, une gargote pieds-dans-le-sable bien sympathique, une eau claire, sans oublier des concerts sur la plage pour lesquels, de son bateau, il n’est pas nécessaire de réserver ! De là, prenez le sentier littoral ou en bateau longez la berge d’assez loin pour ne pas taper dans les cailloux qui prolongent les avancées de la falaise qui sépare le Ranquet du port des Heures-Claires. Dès l’entrée, vous ne pourrez pas rater le marché aux poissons, directement sur le quai des “petits métiers” de l’étang (ouvert le matin). Ce petit port de 200 anneaux loue ses 15 places de passage à un tarif calculé au mètre carré. Rassurez-vous, pas la peine de se souvenir de la formule de la surface de l’élipse... Il suffit de multiplier la longueur hors-tout pas le maître-bau et par 0,66 Euros en pleine saison. On y trouve tout – plus proche et plus convivial – ce qu’on a ailleurs dans les grandes marinas. Savoureuse anecdote : devant le bureau du port, une pancarte indique  “square  des  menteurs” ! Il ne s’agit pas des pêcheurs qui galègeraient la taille de leurs prises mais des récits de rentrée quand les plaisanciers racontent leurs croisières lointaines… alors qu’ils ont passé l’été tanqués au Frioul ! Authentique. On dit aussi que lorsque le Maire vient faire un discours sur le port, on masque la plaque… Le ton est donné. Ici, tout près de la Crau, avec une vue lointaine sur le massif de la Sainte Victoire et, plus près mais toute petite dans le paysage, l’étrange géométrie des industries de Berre, l’ambiance est joyeuse et bon enfant. Sportive quand même. Avec un club de voile bien équipé et des régates fréquentes et fort disputées sur ce bassin venté où la connaissance des vents et tourbillons locaux est gage de victoire sur les “étrangers” fussent-ils champions ailleurs, Istres est un spot de voile remarquable. Les amarres enroulées, vous pouvez prendre la serviette et, par un chemin piéton, joindre la plage de la Romaniquette, haut lieu de baignade dans un cadre de plantations pour assurer le confort car, partout dans le Sud, ce qu’on aime du soleil, c’est l’ombre qu’il produit… Un peu plus loin, au milieu des roseaux s’ouvre un tunnel taillé dans la falaise. À travers, on voit le jour. À l’autre bout se trouve un autre plan d’eau, le lac de l’Olivier, bassin d’eau douce dont le trop-plein se déverse dans l’étang. C’est d’ailleurs un bel itinéraire de balade que de monter sur la colline où la vue est splendide sur les deux étangs et la nature bien plus abondante qu’on le soupçonne d’habitude. Mais pour cela, il faut louer un vélo, donc prendre le bus du port vers la vieille ville d’Istres qui mérite la visite.

Vos criques et vos lacs...

En haut, la “mer” de Berre vue de la colline, le port des Heures-Claires, le centre de la vieille ville.

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MIRAMAS

le terminus au fond de l’étang Miramas est le terminus du petit train de la Côte Bleue, aussi appelé “Petit train de Miramas”. Terminus, mais pas fin de la balade, car on repart vers Marseille en faisant le tour de l’étang de Berre par l’autre rive.

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Flâneries

a gare de Miramas n’a pas été désignée comme centre du monde par Dali, mais le site officiel de la ville la désigne comme celui de deux cercles concentriques : Marseille, Nîmes, Avignon et Arles, Aix, Fos. Pourtant, le rond le plus intéressant est sans aucun doute celui qui, après le tronc commun Marseille - l’Estaque fait le tour de l’étang de Berre, soit via la Côte Bleue et Port-de-Bouc, soit par Rognac et le Nord de l’étang. Hélas, le plus intéressant à voir à Miramas - quand on est un touriste - est l’ancienne cité de Miramas-le-Vieux, inaccessible à pied depuis MiramasGare. Depuis les années 1890 quand le transfert du chef-lieu communal de l’une vers l’autre provoqua des émeutes locales, cet ancien castrum perché à 92 mètres au-dessus de la “mer” de Berre, est le plus haut-lieu du tourisme local. Historiquement propriété de l’Abbaye de Montmajour, ce village fortifié remarquablement conservé offre au promeneur un joli retour en arrière autour des années onze-cents et des poussières. Remparts, ruelles fraîches en été, petits détails de pierres sculptées à découvrir par l’oeil curieux... tout cela aboutit à une table d’orientation ouverte sur toute l’étendue de l’étang et, en premier, la falaise et le port de Saint-Chamas, prochaine étape.


Fl芒neries avec le petit train de la C么te Bleue

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Certaines villes ont un fleuve pour colonne vertébrale. Saint-Chamas a une longue falaise, comme la dorsale d’un dinosaure. Il y en eût ici, comme des hommes des cavernes qui habitèrent ces roches tendres.

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uand on voit la falaise de Saint-Chamas, lorsqu’on grimpe le long de ce mille-feuilles aux couches dures et friables, que l’on remarque les trous creusés par l’érosion, ceux qui ont été agrandis de la main de l’homme pour que l’architecture s’imbrique dans ces dépôts calcaires multi-millénaires déposés là au gré de Théris, la mère des mers, on comprend facilement pourquoi

SAINT-CHAMAS

accueillant mille-feuilles

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Flâneries

Saint-Chamas est l’habitat naturel des humains depuis... De la petite gare du centre-ville ou du port tout proche, il faut marcher un peu dans les rues du bourg très XIXe siècle et pleines de charme d’époque, passer sous le grand aqueduc portant curieusement une horloge sur un clocher laïc, en grimper les escaliers, le franchir le long de son canal toujours en eau et finir de s’élever par le petit sentier vers le sommet. En haut, on est payé de sa sueur. Vers l’Ouest, c’est le hameau perché de Miramas-le-Vieux, vers l’Est, c’est la ville basse presque intouchée au pied de la muraille naturelle, le port et sa petite digue (les tempêtes les plus violentes ne lèvent que peu de vagues ici) et tout l’étang de Berre, en direction d’Istres et de Châteauneuf-les-Martigues. Un bon petit restaurant populaire, bon et pas cher finit de convaincre que l’escale en vaut le peine.


Flâneries avec le petit train de la Côte Bleue

BERRE L’ÉTANG

hautement poétique et sportive Berre l’Étang a une forte personnalité.... c’est le genre de beauté pas accessible à tous et ceux qui aiment les cartes postales “jolies” en seront pour leurs frais. La ville rendue célèbre par les hydravions et la société Shell, ne dévoile pas ses charmes à tout le monde.

C

ertaines poésies ne sont pas accessibles à tous. Ici, érudits et pédants s’abstenir. Il faut juste aimer. Aimer ces oeufs de métal géants déposés à côté de montagnes de sel, ces oiseaux de mer sur des îlots inaccessibles devant des flûtes de pan d’acier qui crachent le feu, des cygnes mièvres comme des petits rats d’Opéra minaudant devant des usines fumantes, les avions qui rentrent et sortent leurs roues sans cesse... et, partout, cette eau bleue et ces plantes salines vertes et rouges.

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Aucun milliardaire ne viendra y construire de villa, personne ne spéculera sur ces terrains, aucun yacht n’y creusera d’irrespectueux sillage. Tant mieux. Les guinguettes au bord de l’eau, les bateaux, les cabanons, les plages resteront comme elles sont. Comme on aime. Berre l’Étang n’a pourtant ni le culte ni la nostalgie de l’industrie du pétrole et du gaz, des odeurs et des nuisances obligatoires pour gagner sa vie. On s’en aperçoit dès qu’on arrive dans le port tout neuf.


Le front de mer a fait l’objet d’aménagements qui paraissent considérables pour une commune de quelques treize mille habitants : un bassin de plaisance et de petite pêche, une base nautique active et bien équipée, une zone technique... Il est vrai que le plan d’eau est propice à la pêche-promenade, à la voile légère ou à la petite croisière de faible tirant d’eau pour en profiter au mieux. La plupart des plaisanciers d’ici considèrent leur “mer” comme un monde de navigation en soi. Martigues, Istres, Saint-Chamas et Berre l’Étang forment un carré d’as pour de jolis week-ends ou de petites vacances entre baignades et gastronomie. Les mouillages sont faciles. Peu de bateaux sortent dans le golfe de Fos, sauf les quelques “gros” qui peuvent trouver là un refuge hivernal. Les conditions météorologiques sont aussi une bonne école de voile : le Mistral s’engouffre avec une particulière violence dans ce couloir géologique qu’est la plaine de Miramas et le golfe de Fos. Mais la mer n’est jamais forte. Seulement casse-bateaux, comme sur un lac. Alors, les navigateurs de Berre sont de vrais marins “à la provençale”, soucieux du vent, prêts à toutes ses sautes d’humeur, qui ne bronzent que d’un oeil... Alors, que vous soyez en train ou en bateau, vous avez compris que Berre l’Étang n’est pas seulement un lieu à forte teneur poétique mais aussi un spot à haute valeur nautique.

CHÂTEAUNEUF -LES-MARTIGUES il faudra attendre encore un peu...

L

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Flâneries

e voyage prend bientôt fin. Le train termine le tour de l’étang en contournant les pistes de l’aéroport de Marignane. Le dernier arrêt avant qu’il ne s’enfonce dans le très long tunnel de la Nerthe pour boucler la boucle à l’Estaque est Le Pas des Lanciers. La voie passe loin du bord de l’eau, déjà attirée vers la rade de Marseille. La gare n’est pas à proprement parler une desserte pour le dernier port de l’étang, Châteauneuf-les-Martigues, ou plus exactement La Mède. Abrité par un épi enroché et un caillou naturel qui émerge, ce petit port n’a pas de capitainerie. Qui saurait quelles sont les places disponibles ? Il y a bien un important projet de développement et d’aménagement des abords mais, en l’état actuel, nous ne pouvons pas recommander d’y faire escale. De la même manière, les efforts importants menés en lien avec le Conservatoire du Littoral pour réhabiliter l’étang de Bolmon, sauvage mais pollué, feront bientôt de cet endroit qui a beaucoup souffert de la trop grande proximité de l’industrie et de l’autoroute, un lieu de nature insolite. En attendant, plongeons sous la roche de la chaîne de l’Estaque et allons rejoindre notre bateau qui attend dans le Vieux-port de Marseille. Nous reviendrons. Promis.


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Toulon


une rade, un port, une ville On peut passer devant cent fois sans s’arrêter. Entre le cap Sicié et la petite passe de Porquerolles, s’écarter de sa route pour aller à Toulon, c’est un détour de presque quinze milles allerretour ! Et puis on se dit que c’est une grande ville pleine d’autos, que les places d’accueil ne sont pas très nombreuses… On a tort. La rade, le port, la ville, sont sans faute à découvrir.

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Textes et photos Emma et Bastien Chazelles


Un grand tour dans la petite rade La rade de Toulon est un monde en soi. Plan d’eau très réglementé à cause du passage des ferries, des paquebots, des navettes maritimes et surtout de la présence de zones militaires, c’est tout de même un magnifique plan d’eau. Avant d’arriver au port de la Darse vieille, nous ne résistons pas à l’envie d’en faire un tour rapide Les mas conchylicoles sur pilotis de la baie du Lazaret, bientôt une escale thématique “produits de la mer”.

La base de Saint-Mandrier Quarantaine puis formation des marins Face à Toulon, vers 1670, fut construit par les bagnards l’hôpital Saint-Louis, destiné à accueillir les équipages des navires mis en quarantaine. Le bâtiment est resté un hôpital jusqu’en 1936, date à laquelle il abrite les Écoles des Mécaniciens, Chauffeurs et Scaphandriers de la Marine nationale.

La baie du Lazaret Conchyliculture anachronique

Une des maisons flamboyantes de la corniche Pacha, témoin d’un riche passé.

C’est une chose curieuse que de voir, au milieu de la baie, ces cabanes sur pilotis et ces parcs à moules qui semblent d’un autre âge et totalement incongrus dans cette rade où croisent de grands bateaux. On pourrait croire que les moules qui y sont produites depuis la fin du XIXe siècle sont polluées depuis le sabordage de la flotte en 1942. Or, elles sont, au contraire, un bon indicateur d’écotoxicité. Si les analyses des services sanitaires les déclarent bonnes à la consommation, alors… on y ajoute les huîtres, les loups et les daurades qui font le bonheur des initiés !

La corniche Michel Pacha La vie de pacha sur la corniche La vue est superbe de ce bout de route en bordure de la Baie du Lazaret. On y voit ce qu’est, pour les croiseurs, la face cachée du cap Sicié mais aussi la rive boisée de Pin Rolland et les cabanes sur pilotis. Cette route que l’on aperçoit très facilement d’un mouillage dans la baie (attention aux fonds et aux autorisations !) est la partie avancée d’un projet que l’on doit à Michel Pacha, ancien maire de Sanary, célébrité et fortune faite sur le Bosphore qui consistait à imaginer un vrai projet urbain pour cette zone prévoyant notamment d’aménager l’isthme et le passage de la Seyne sur Mer vers les Sablettes. Le témoignage contemporain de ce projet est la persistance de belles villas bourgeoises.

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Toulon

GEORGE SAND “ Une enjambée de l’hiver à l’été ” La côte largement déchirée que l’on suit jusqu’à Toulon, et où l’oeil plonge par échappées, est merveilleusement belle; nous la savons par coeur, mon fils et moi. Nous la revoyons  avec  d’autant  plus  de plaisir que nous la connaissons mieux. Voilà le Bec-de-l’Aigle, le beau rocher de la Ciotat, le Brusc et les îles des Embiez, la colline de Six- Fours, toutes stations amies dont je sais le dessus et le dessous, dont les plantes sont dans mon her-

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bier et les pierres sur mon étagère. Je sais que derrière ces pins tordus par le vent de mer s’ouvrent des ravins de phyllade lilas qu’un rayon de soleil fait briller comme des parois d’améthyste sablées d’or. La colline qui s’avance au delà a les entrailles toutes roses sablées d’argent, l’or et l’argent des chats, comme on appelle en minéralogie élémentaire la poudre éclatante des roches micacées ou talqueuses. Les Frères, ces écueils jumeaux, pics engloutis qui lèvent la tête au milieu du flot, sont noirs comme l’encre à la surface, et je n’ai pas trouvé de barque qui voulût m’y conduire pour explorer leurs flancs. Dans cette saison-là, le mistral soufflait presque toujours. Aujourd’hui, il est anodin, et à peine avons-nous embrassé à la gare de Toulon les chers amis à qui nous y avions donné rendez-vous, que nous sautons avec eux dans un fiacre, et nous voici à trois heures à Tamaris. Soleil splendide, des fleurs partout, nos vêtements d’hiver nous pèsent. Hier, à pareille heure, nous nous chauffions à Paris le nez dans les cendres. Ce voyage n’est qu’une enjambée de l’hiver à l’été.

Le fort de Balaguier Le roi joue la tour contre le fou Les pirates ! Terreur de tous les habitants des côtes de Méditerranée. Ces «fous sanguinaires» qui hantaient l’imaginaire de la population étaient aussi un danger bien réel que les autorités n’eurent de cesse que de combattre par des fortifications, des tours de guet, des forts armés pour se défendre au canon. Le fort de Balaguier, à la pointe du même nom, fut édifié en 1636, sous Louis XIII, sur ordre de Richelieu. Il fait face à la Grosse Tour, sur la pointe de Pipady, construite un siècle auparavant, et termine ainsi le dispositif de défense de l’entrée de la rade. Efficace à l’époque de sa construction contre les «barbaresques», ce système se révèlera insuffisant plus tard, sous Louis XIV, quand ces deux tours, qui n’auront pas été révisées par Vauban, seront de peu d’utilité dans les sièges que la ville connaîtra.

TOULON

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LA TALL SHIPS’ RACE EN 2013 2013, l’armada des grands voiliers mondiaux touchera par deux fois le littoral français. En juin à Rouen, en septembre à Toulon. Port référent sur la Méditerranée, Toulon accueillera donc pour la seconde fois, à l’issue d’une régate au départ de Barcelone, ce prestigieux événement nautique, qui a connu un succès populaire exceptionnel en 2007 avec près d’un million de visiteurs : la Tall Ships’ Race. La ville et son port, animés par une foule de bénévoles, vivront pendant trois jours au rythme des langues et des musiques de trois continents. Cette fois encore la gentillesse et la disponibilité des officiers et des cadets séduiront les visiteurs qui découvriront les mystères des trois mâts barque, des goélettes à hunier ou des brigantines. Pour les passionnés, iI est d’ores et déjà possible de contacter la cellule nautique constituée pour l’événement : 04.94.05.35.41 et cellulenautique@tpmed.org

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Suite de la page 65

La pointe de l’Éguillette Le troisième verrou de Toulon La pointe de l’Éguillette est le troisième point du dispositif de surveillance et de protection de la rade du temps des “barbaresques”. Sur ce petit cap fut construit un fort en 1680 qui, à moins d’un mille de la pointe de Pipady, permettait, sinon de croiser les tirs des canons, en tout cas de croiser les feux et de surveiller la passe la plus étroite de l’entrée de la rade. À défaut de défendre Toulon contre une escadre importante et puissamment armée, ce triangle de surveillance et de protection suffit à dissuader les forbans.

Le Brégaillon Roll-on et Roll-off sont dans un bateau…. C’est la zone dédiée à l’industrie et au commerce. On y verra ces navires rouliers affrétés par les Turcs, aux équipages anglais, qui y ont fait transiter un demi-million de tonnes de marchandises cette année, vers l’Europe occidentale. Tout proches, les câbliers de France Telecom Marine et les installations d’IFREMER dédiés aux robots sous-marins. On y verra parfois, à deux pas des grands yachts à l’entretien, les formes d’un nouvel engin de débarquement ultra-rapide : les CNIM préparent l’avenir…

La Tour royale Vauban n’a pas été écouté Sur la pointe de Pipady, la Grosse Tour fut le premier ouvrage de guet et de lutte contre les pirates. Construite sous Louis XII (achevée en 1524) la Grosse Tour, ou Tour Royale, fut modernisée et munie de 22 canons en même temps que furent édifiées, un siècle plus tard, les tours de Balaguier et de l’Éguillette. Vauban demanda que ces dispositifs soient remis aux normes de la guerre moderne, mais rien ne fut entrepris et ces trois ouvrages fermant la rade ont gardé leur allure de forts du XVIIe siècle.

La grande digue des Torpilles Contre la houle et l’excès de vitesse

En haut, la zone militaire interdite mais bien visible pour la croisière dans la rade. Au milieu, La tour dite “Royale”. En bas, le fort et la digue des torpilles.

La grande digue délimite la Petite Rade. À la fin du XIXe siècle furent construites trois jetées dont la plus grande, d’un kilomètre et demi, se termine par le petit phare qui est est le “bonjour” ou “au revoir” des marins. Elle ralentit les bateaux et brise la houle. À sa base se trouve le môle des Torpilles qui tient son nom de ce qu’après la guerre, on les y essayait. Depuis, il existe d’autres moyens de le faire et l’endroit à retrouvé sa sérénité.

Le fort des Vignettes Héros du siège de 1707 Ce fort construit peu de temps après celui de l’Éguillette venait compléter, dans une version plus moderne, les trois forts anti-pirates. Son but était de défendre l’anse des Vignettes qui aurait pu être un abri pour des navires ennemis. Au cous du siège de 1707 ce fort, grâce à son artillerie et au courage de ses défenseurs, joua un rôle clé dans l’échec de la tentative de prise de Toulon par les angloaustro-savoyards. Détruit, il fut reconstruit presque à l’identique, sous le nom de fort Saint-Louis.

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Joseph Conrad (au centre) David Bone et Muirhead Bone sur le Tuscania

JOSEPH CONRAD “ Certains écrivains ont été marins. Rares sont ceux qui ont été capitaines ” Joseph Conrad a posé son premier sac de marin à Marseille. Il écrivit ensuite sur les mers lointaines mais, dans son avant-dernier roman écrit un an avant sa mort, il trempe à nouveau sa plume dans les eaux de Provence. Dans The Rover, (Frère de la Côte, dans la traduction française), il place l’intrigue à Toulon, la presqu’île de Giens et la baie d’Hyères où mouille la flotte anglaise, toujours prête à assaillir Toulon et, en attendant, en organisant le blocus. La première page raconte l’entrée au port : « Entré à la pointe du jour dans l’avant-port de Toulon, après avoir échangé de bruyants saluts avec un des canots de ronde de la flotte qui lui montra où prendre le mouillage,  le  maître-canonnier Peyrol jeta l’ancre du bâtiment, usé par la mer et délabré, dont il avait la charge, entre l’arsenal et la ville, en vue du quai principal ». Pour comprendre les enjeux stratégiques autant que la vie quotidienne misérable des marins à la charnière du XVIIIe et XIXe siècles, ce livre est un passionnant et émouvant témoignage. « Certains écrivains ont été marins. Rares sont ceux qui, comme Conrad, ont été capitaines », écrit un biographe. Mais Conrad n’est pas un écrivain-navigant, c’est d’abord un marin. En 1896, faute de trouver un bateau à commander, il écrira : « il ne me reste que la littérature comme

moyen d’existence », et avouera écrire pour se nourrir. Il est des écrivains alimentaires moins talentueux ! Pour d’autres biographes, écrire est devenu une passion alternative : « c’est le cas d’un homme découvrant en soi, au cours de son existence, deux vocations, l’une au seuil de l’adolescence, l’autre en pleine maturité, toutes deux également irrésistibles, (…) chacune des deux passions successives a été trop impérieuse pour souffrir aucun partage. » En  Provence,  Joseph  Conrad trouve des embarquements sur des navires de commerce : le Mont Blanc et le Saint-Antoine, vers les Antilles, le Vénézuela, le Mexique. Il apprend le métier. Celui d’aventurier aussi. Il n’a pas vingt ans quand son bateau livre des armes à des révolutionnaires colombiens. Il poursuivra quelques temps le trafic d’armes, notamment pour un prétendant au trône d’Espagne. Mais, en 1878, un duel pour les beaux yeux de braise d’une Espagnole l’incitera à quitter la France, à s’enrôler dans la marine anglaise et à faire de la Grande-Bretagne sa patrie d’adoption. C’est là qu’il deviendra un capitaine au long cours. On a peu de traces de Joseph Conrad en Provence. Il a détruit ses notes et carnets. Son premier domicile fut à la pension Chodzo, 9 Boulevard des îles d’Or à Hyères. Il vécut aussi à Marseille et passa à Montpellier.

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MÉGA YACHTS ET + ENCORE Plusieurs sites de la rade de Toulon, et notamment celui des anciens chantiers de la Seyne, avec ses bassins en eau profonde et ses longs quais ont été reconvertis en port de croisières pour conforter l’offre toulonnaise d’accueil des plus grands paquebots européens et américains opérant en Méditerranée, plaçant Toulon au 4ème rang national en la matière avec plus de 250.000 croisiéristes par an. La rade de Toulon étant particulièrement appréciée comme port tous temps, sécurisé, bien connu des militaires, on y accueille aussi de grands yachts pour hivernage et entretien. plus de 100 unités jusqu’à 60m chaque année. Créé à Toulon il y a dix ans, Le Riviera Yachting Network regroupe 85 entreprises régionales de refit et de services pour la Grande Plaisance, dont le savoir-faire profite à tous les usagers. La plupart d’entre elles collaborent au Pôle Mer à vocation mondiale qu’accueille Provence Alpes Côte d’Azur.

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Le port, sanctuaire convoité Il y a une sorte de paradoxe entre s’ouvrir et se murer. Un port est un abri mais aussi un lieu d’échange, de mélange et de passage, ouvert sur le monde. Toulon est tout autre. C’est un arsenal, un port de guerre, une place forte. Ouverte au monde, la ville l’est d’une autre manière. Toute son histoire est liée à l’Histoire diplomatique internationale.

Q

ue vous soyez arrivé par les Embiez ou les îles d’Or, vous avez observé sur les hauteurs, dans les anfractuosités des rochers, camouflés dans les àpics, des fortins, des échauguettes, des affûts de canons. Vous avez aperçu des portes blindées et des escaliers taillés dans la roche, vous avez deviné des tunnels et des passages dérobés, vous avez même imaginé, tant le lieu porte à le croire, que la construction post-moderne au pied du cap Sicié était la base ultrasecrète du Dr No. La rade de Toulon, parce qu’elle va loin dans les terres, est un magnifique refuge. Contre les vents et les vagues, mais aussi contre l’ennemi. Dès le IIIe siècle, les Romains y stationnaient leur flotte de guerre. Mais, pour les mêmes raisons, il est possible d’en fermer la sortie et de l’attaquer par le haut. Les stratèges vous le diront, une cuvette se tient par ses bords.

C’est là toute l’histoire de Toulon. Sa force est sa fragilité. Vauban, qui visita la ville en 1678 le comprit et munit l’arsenal de fortifications. Très satisfait, il décrivit ce travail comme “le chef-d’œuvre des ouvrages du roi et la plus belle pièce de marine qui fut en Europe”. Il mourut en 1707, l’année du siège de Toulon. En été de cette année-là, les coalisés Autrichiens, Savoyards et Anglais mirent à mal son système de défense en organisant, depuis la mer, un blocus de l’entrée de la rade mais surtout en occupant des positions dominantes avec 40 000 hommes de troupes terrestres et une forte artillerie. La résistance héroïque des Toulonnais les sortit de ce mauvais pas, l’assaillant reflua mais les fortifications et une grande part de la ville étaient en ruines. Toulon fut reconstruite et de nouvelles murailles édifiées. Éternel recommencement. Car Toulon n’a jamais cessé d’être convoitée, principalement par les Anglais qui ont toujours rêvé d’un second Gibraltar. On les comprend. Comme la forteresse de Carcassonne barrait l’accès de l’Aquitaine au Languedoc, Toulon tenait – et tient encore – la route de l’Espagne à l’Italie. Mais Toulon n’est pas une citadelle. C’est un arsenal et un chantier naval qui, depuis la fin du XVIe siècle, construit, abrite, entraîne et envoie combattre la flotte de guerre française sur tous les théâtres de conflits. Prendre Toulon c’est non seulement acquérir une position géographique intéressante, c’est aussi mettre la main sur un outil industriel de premier plan et l’essentiel du potentiel naval français. C’est pourquoi, dès les premiers jours du siège de 1707, M. de Langeron, commandant de la marine, décida de saborder la flotte et d’envoyer par le fond dans la darse vingt-trois vaisseaux du roi : “nous avons noyé ce que l’ennemi avait voulu réduire en cendres”. Ce fut là sans doute une erreur estiment des historiens, car l’armée prouva les jours suivants qu’elle savait défendre la place. Suite page 70

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JEAN-JACQUES BOUCHARD les mœurs des galériens à Toulon en 1630 « Voila ce qu’Oreste remarqua en général de la Provence. Pour Toulon en particulier, c’est une petite ville qui n’a pas plus de 1500 feux, mais qui est bien fortifiée et munie d’artillerie (...). Les habitants sont assez grossiers et rustiques, étant tous ou marchands ou mariniers ou faiseurs de vaisseaux. Outre ce, il y a toujours quantité d’étrangers de passage (...) La ville s’est aussi fort peuplée et augmentée, depuis le séjour des galères en son port, qui demeurant auparavant en celui de Marseille (...), Cela a rempli la ville de gentilshommes, qui suivent le général et commandent sur les galères ; de soldats et officiers de galère, et par conséquent de garces, dont on dit qu’il y a bon nombre à Toulon ; et de forçats qui vont et viennent continuellement par la ville (...) Ils vont par la ville pour le service des galères et pour vendre ce qu’ils ont fait, comme bourses, ceintures, aiguillettes, cure-dents, et bas de soie, laine, poil de chèvre et fil, qu’ils font fort proprement, et en font grand trafic à Toulon, et vendent la paire un écu, quatre et cinq francs. Ils peuvent même aller travailler de leur métier en boutiques ; et vont par les hôtelleries sonnant cornets et violons durant le dîner et souper des passants ; et chaque galère a sa semaine par tour pour cela, dont ils ne retirent pas peu, car chacun à la fin du repas, met sur l’assiette que les forçats présentent au milieu de la table, qui un sol, qui trois, qui quatre et qui cinq. C’était l’un des principaux divertissements d’Oreste à Toulon, de considérer la condition de ces pauvres gens-là, et d’aller les

visiter souvent dans les galères, où se voit toute la misère, ordure, saleté, puanteur et infirmité humaine, de sorte qu’il n’y pas jour qu’il ne meure là-dedans quelqu’un ; et nonobstant tout cela la plus part des forçats, au moins ceux qui gagnent quelque chose de leur métier, mènent joyeuse vie, et y en a beaucoup qui ne voudraient pas s’en aller, quand on leur donnerait la liberté, tant l’accoutumance peut sur nos esprits : buvant, jouant, et même besognant, ce qu’ils faisaient encore plus facilement lors qu’il était permis aux femmes d’entrer dans les galères ; car lors non seulement leurs légitimes femmes, que beaucoup de forçats ont amené avec eux à Toulon, mais encore quantité de garces allaient les visiter, que ces compagnons besognaient devant tout le monde, les couchant sous le banc, sur leur capot. Mais depuis quelques années le général a défendu l’entrée aux femmes. De sorte qu’il ne se pèche plus maintenant là-dedans qu’en sodomie, mollesse, irrumation et autres pareilles tendresses ; car plus ces gens là sont châtiés et traités rudement, plus ils deviennent vicieux et méchants. À les ouïr parler, néanmoins, ils, sont tous saints et disent tous avoir été envoyés en galère, ou pour s’être trouvés à une batterie, ou par injustice. Mais la vraie cause pour laquelle la plus part sont là, à ce que disaient les comités, est le vol et larcin ; aussi y sont-ils tous si experts, que si l’on ne tient continuellement les mains dans ses poches, l’on est sur de perdre tout ce qui sera dedans, lorsque l’on entre dans une galère ».

TOUTES LES VOILES

Trois rades, trois plans d’eau propices à toutes les pratiques vélistiques. Plus de 50 clubs varois y forment chaque année près de cent mille élèves, pour la voile légère ou la glisse. Le Yacht Club de Toulon et le COYCH hyérois faisant partie de l’élite nationale. Côté plaisance, Porquerolles, le Brusc et Saint-Mandrier, ont été les premiers à bénéficier des 10 millions d’euros investis dans le programme de modernisation des ports 2009/2011. Avec leurs 18 sites portuaires, les trois rades forment un ensemble unique autour de la plaisance côtière et hauturière. Leurs plans d’eau le sont aussi, dont celui d’Hyères, choisi par l’Hydroptère pour franchir le premier la barre des 100km/h sur l’eau.

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Jean-Jacques Bouchard, Voyage de Paris à Rome en 1630, publié pour la première fois sur le manuscrit de l’auteur par Alcide Bonneau Edition. de Paris : I. Liseux, 1881 - Pages 149-155

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La rade de Toulon a été l’objet de batailles successives, sur l’eau autant que sur terre. Suffren y remporta sa première bataille à seize ans et Bonaparte y gagna ses galons de général. La ville garde les traces discrètes de terribles destructions. Cours Lafayette, on peut encore voir ce boulet enfoncé dans la façade d’une maison (photo de droite). Ci-dessous, une vue aérienne du sabordage de la flotte en novembre 1942.

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Suite de la page 68

Autre siège, en 1793. Toulon, mal administrée par les Jacobins, était tombée aux mains des contre-révolutionnaires qui avaient fait occuper la ville par mille cinq cents Espagnols, Sardes, Napolitains et… Anglais. Quand, à la tête de l’artillerie, Bonaparte participa victorieusement à la reprise de la ville en pilonnant l’escadre ennemie, participa victorieusement à la reprise de la ville, les coalisés, en fuyant, brûlèrent neuf vaisseaux et trois frégates. L’incendie de l’arsenal, grâce aux efforts des soldats, des Toulonnais et des bagnards, fut arrêté à temps. En novembre 1942, alors que l’armée française était défaite, le pays occupé et que rien ne pouvait empêcher les Allemands de s’emparer des navires de guerre français, la flotte se saborda avec raison et succès, si l’on peut dire. Juste au moment où les chars du Reich prenaient position dans le port, dans un enfer d’explosions et de flammes, 3 cuirassés, 7 croiseurs, 15 contre-torpilleurs, 13 torpilleurs, 6 avisos, 12 sous-marins, 9 patrouilleurs et dragueurs, 19 bâtiments de servitude, 1 bâtiment-école, 28 remorqueurs et 4 docks de levage, ont été sabordés, représentant un total de 235.000 t. Jamais prise, souvent détruite, Toulon garde aussi la mémoire de bien d’autres moments violents de l’histoire : le temps des galères, l’époque coloniale, les explosions de l’atelier des torpilles… et la peste, ennemi contre lequel aucun rempart de pierre ne peut rien.


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HONORAT DE VALBELLE

Les Maures “ leur coupèrent la main droite, les oreilles, le nez et tracèrent une croix au milieu du front ” Honorat de Valbelle, apothicaire et notable provençal a noté pendant quarante ans tout ce qu’il voyait et entendait et qui lui paraissait intéressant. Cette Histoire Journalière (1498-1539), est conservée à la bibliothèque de Carpentras, et a été publiée en 1985 par l’Université de Provence. En voici quelques extraits à propos d’événements qui se sont déroulés aux îles d’Hyères pendant cette période et qui impliquaient des barbaresques musulmans : « La même année (1519), Monsieur de Sollier fit reconstruire la forteresse de Porquerolles, dans les îles d’Hyères, pour empêcher que les Maures n’y viennent comme ils en avaient l’habitude. Sachez que pendant que l’on bâtissait cette forteresse, les Maures s’emparèrent d’une barque pleine de carriers qui étaient allés charger des pierres et les emmenèrent en Barbarie ce qui fut une grande perte... » Au mois de mai de cette année, 24 fustes et une galère bâtarde ornées de Turcs et de Maures arrivèrent aux îles d’Hyères et trouvèrent à quai des navires chargés de sel, ils y mirent le feu et les incendièrent. Pendant qu’ils étaient dans ces îles, arrivèrent, venant du Ponant, trois

nefs bien équipées ; les fustes les attaquèrent et s’en emparèrent. Elles étaient chargées de bonnes marchandises. Ne croyez pas qu’ils les prirent aisément. Si l’on en croit la rumeur publique, ils ne se rendirent point avant d’avoir presque tous péri et, comme vous pouvez le penser, ceux des fustes ne furent point épargnés. Cela fait, les fustes apprirent qu’arrivait, venant d’Espagne, une grosse caraque génoise bourrée de marchandises. Sitôt averties, elles partirent à sa recherche ...elles l’attaquèrent de tous les côtés de telle sorte que n’eut été l’aide du vent, elle aurait été en grand danger d’être capturée. Après cela, la caraque arriva aux îles de Marseille, assez mal en point, car les Turcs lui avaient brisé le gouvernail, déchiré les voiles et blessé beaucoup de monde. Il est à noter que lorsque ces fustes s’emparèrent de ces nefs, comme vous venez de 1‘apprendre, elles y prirent deux chrétiens, un enfant et un Catalan. Ils leur coupèrent la main droite, les oreilles, le nez et ils leur tracèrent une croix au milieu du front, puis ils leur dirent : « Allez vous montrer à vos rois chrétiens ; dites leur que voila la croisade qu’ils ont proclamée ! »

LES ILES D’OR

Parmi les plus beaux joyaux d’insularité méditerranéenne, Porquerolles, Port Cros et le Levant vous réserveront de grands moments de découverte et d’émotion. Face à la Tour Fondue, sur la presqu’île de Giens, le port de Porquerolles, l’un des mieux connus des 18 sites de Ports Toulon Provence, est l’escale la plus pratique pour s’imprégner des trois îles. Savourez la côte nord de Porquerolles aux couleurs envoûtantes, la baie de Port Man à Port Cros, l’anse du Titan sur l’île du Levant. Et si le cœur vous en dit, faites donc un détour vers le continent pour lécher les parages du Cap Nègre et de Brégançon. Espaces naturels préservés grâce au parc national de Port-Cros, parcours sous-marins féériques et luminosités surprenantes de diversité seront au rendez-vous.

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Honorat de Valbelle, Chroniques de Porquerolles 1508 - 1536 Toiles orientalistes de Jean-Léon Gérôme, XIXe s.

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Toulon

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Derrière le port, une cité qui bouge Toulon a eu le plus grand mal à se reconstruire après les destructions de la seconde guerre mondiale et s’est longtemps négligée. Les quartiers périphériques tournés vers le Mourillon, la Batterie-Basse ou le pied du Faron avaient pris le pas sur le centre ancien. Mais, depuis plusieurs années, les choses ont changé et continuent à bouger, très vite. C’est une ville où il fait bon se promener le nez en l’air, même si certains regrettent une nouvelle invasion, celle des “bobos” qui aujourd’hui y investissent...

V

êtes arrivé dans la Darse Vieille, à cette capitainerie de village, sympathique après tant de lieux d’arrogance plaisancière. Et là, de votre place, pas loin d’un port de pêche encore plus modeste (quai du Parti !), le spectacle est étonnant. Ce que vous avez vu en premier pendant la longue navigation d’approche, sont les monts Faron et Coudon, deux massifs calcaires qui dominent du haut de leurs quelque 550 et 700 mètres respectifs. Le Coudon est, certes, le plus haut, mais à la sortie est, vers Hyères. Ici, on lui préfère le Faron, dossier de ce grand trône géologique sur lequel la ville est assise. Royale. Les maisons sont parties à l’assaut de ses pentes depuis longtemps. On les comprend, la vue y est superbe. Contrechamp de ce que vous avez contemplé pendant une heure de votre poste de barre, le panorama sur la rade mérite que vous mettiez dans vos projets de prendre le téléphérique. Un tour sur la corniche Marius Escartefigue s’impose, rien que pour le nom, trop beau pour être

vrai. Savez-vous qu’un projet fou voudrait faire venir le téléphérique jusqu’eu centre-ville, même jusqu’au port ! On adorerait. L’autre étonnement – parfois répulsion pour qui aime les horizons dégagés – est une autre barrière minérale qui barre le paysage : la « frontale De Mailly », les immeubles en muraille quais de la Sinse et de Cronstadt, donnant à ce port ce look suranné de Crise du Logement de l’aprèsguerre (1953). Sans doute un jour les trouvera-t-on beaux. Pour l’instant, ils rappellent que Toulon a été rasée à 45% par les bombardements de la seconde guerre mondiale et ont le mérite d’isoler la darse du bruit de l’avanue de la République et faire du port une zone piétonne. Au bout du quai se trouvent les arsenaux, la Préfecture maritime et le musée de la Marine symboles de la vocation militaire séculaire de cette ville-port et port-arsenal. Mais c’est une autre histoire. Arrêtons-nous au quai d’honneur, non pas pour regarder les quelques yachts – qui se pavanent ici moins qu’ailleurs – mais pour jeter un œil à la statue Le Génie de la Navigation qui montre du doigt un point… quelque part vers la mer. Sculpté par le natif Louis Joseph Daumas, il honore les marins en général et en particulier le commandant de la flotte en Méditerranée en 1895, le vice-amiral de Cuverville. Facétieux, les Toulonnais, en raison de la position et du fessier dénudé de l’Homme de Bronze, l’ont surnommée aussi bien Néverlo que Cuverville… Suite page 74


TOULON

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QUELQUES PAS DANS LA VILLE Lorsque vous quittez le bateau et que vous arrivez sur les quais de la Sinse et de Cronstadt qui ferment le port vers la ville, passez par la première brèche dans la barre d’immeubles modernes et partez à la découverte de la vieille ville. Là, vous arrivez dans un autre monde, celui des villes de la Méditerranée : un mélange de peuples, un cocktail de couleurs et de saveurs, de sourires et de rumeurs, de mots, de produits parfois inconnus. Remontez le cours Lafayette et laissez cette ville vous prendre par la main pour vous guider dans une Provence qui ne ressemble pas aux cartes postales. Elle est plus belle, plus vivante, plus vraie. Les miels de toutes les fleurs du Sud, les huiles d’olive de toutes les

variétés, les vins de tous les crus et de toutes les robes, les savons et les produits de beauté naturels pour toutes les peaux et tous les goûts, les cotonnades de Provence, c’est classique et indémodable. Mais il faut oser explorer les ruelles derrière le port où, à la place des anciennes boîtes à matelots de Chicago ont ouvert les nouvelles galeries des peintres et des sculpteurs, les ateliers des stylistes qui feront la mode de demain, les échoppes des artisans d’art. Et aussi essayer quelques-uns des cafés qui offrent leur terrasse ombragée, ou encore des restaurants inattendus, comme il y en a tant au cœur de Toulon, ville cosmopolite comme l’est la Méditerranée depuis toujours.

FÉLIX MAYOL, De la Cabane Bambou au grand stade

Félix Mayol par Adrien Barrère

Si on chante «Viens Poupoule,...», si on dit « ce soir, je vais au stade» ou «je fais mes courses au centre commercial du centre-ville», quel point commun ? Félix Mayol. Ajaccio a Tino Rossi, Toulon a Félix Mayol. Il y est né en 1872 et il y est mort en 1941. Entre temps, ce fut l’une des plus grandes voix populaires de son époque qui, devenu très riche par les chansons à grand succès qu’il composa et chanta, acheta un music hall à Paris, baptisé Concert Mayol, fit construire un stade, le stade Mayol de Toulon, pour l’équipe de rugby qu’il affectionnait. Quant au centre commercial Mayol, il est à côté du port de plaisance Et tout avait commencé au cabaret La Cabane Bambou...

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LES POINTUS À L’HONNEUR En d’autres lieux on dirait « barque »ou « barquette ». Ici, on dit « pointu ». Les marins bretons, voyant ce drôle de bateau effilé aux deux bouts l’auraient nommé ainsi... Ce qui est plus certain, c’est l’amour porté à ces bateaux de tradition pour lesquels Giens ou Saint-Mandrier sont une sorte de réserve naturelle, et qui pratiquent le vire-vire avec entrain. Moure de Pouar, tartane, tartanon…moins connu est le rafiau (pas rafiot !) : un pointu à l’étrave inversée comme un cygne qui faisait la navette entre la terre et les navires de guerre au mouillage à Toulon jusqu’au début du XXème siècle, sans fracasser son avant sur la coque des bateaux gris. Une poignée de passionnés vient d’entamer la reconstruction à l’identique de ce bateau disparu, et sur l’ensemble des ports, on cherche à regrouper les bateaux de tradition pour une mise en valeur qu’ils méritent bien.

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Suite de la page 72

Si vous traversez la barrière d’immeubles et la rue pour mettre cap au nord, vous arrivez à Chicago. C’est aujourd’hui un bien grand mot tant ce quartier n’est plus que l’ombre de ce qu’il était : le Red Light district, comme l’appelaient les matafs américains en goguette. C’était un vrai vivier de filles à matelots où les gens honnêtes ne mettaient pas les pieds. Aujourd’hui, subsistent encore provisoirement quelques boîtes borgnes et quelques sexshops mais la rénovation de ce typique quartier, miraculeusement épargné par les bombes, fait partie des efforts de la ville qui se pomponne le museau pour plaire à un

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autre genre de touristes… Ce “carré du port” est le noyau originel, la première ville moyenâgeuse. Puis faites comme la ville, sortez de ces anciennes limites pour remonter encore un peu vers le nord, les halles et la cathédrale, puis le cours Lafayette, ancienne ceinture fortifiée, vers la place Puget et l’Opéra. Ville bourgeoise, architecture d’Empires, d’armateurs et de notables, qui raconte son histoire de rue en rue, en s’éloignant du port puis en y revenant par la place d’Armes d’où l’on retombe sur l’Arsenal. A Toulon, on n’échappe jamais longtemps à la Marine royale, ni au regard du mont Faron....


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RAIMU Le Marseillais de Toulon En 1958, Orson Welles rend visite à Pagnol pour ‘‘voir Mr Raimu’’ qu’il considère comme le plus grand acteur de tous les temps. Mais l’écrivain-cinéaste lui apprend la mort de Jean Auguste Muraire, alias Raimu. Et Orson Welles, l’immense figure du cinéma, se met à pleurer. Lui qui avait mis en émoi toute l’Amérique vingt ans plus tôt en adaptant pour la radio La Guerre des Mondes de H.G Wells, ne rencontrera pas l’acteur français. L’auteur involontaire du canular du siècle qui jeta sur les routes un million de New-Yorkais paniqués par une invasion d’extraterrestres, repartira avec ses projets. Déplacer les foules, ces deux géants savaient faire. On imagine ce que leur association aurait pu donner... En 1900, le jeune Auguste qui n’a que dix-sept ans, s’appelle Rallum et commence sa carrière comme co-

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mique troupier dans les bars à matelots de Toulon. Il multiplie les petits boulots : croupier à Aix les Bains, souffleur au théâtre de l’Alcazar de Marseille. Puis il devient, sous le nom de Raimu, une vedette régionale, grâce au répertoire de chansons de Polin. Mais c’est grâce à Félix Mayol, un autre Toulonnais qui le fait “monter” à Paris que la chance lui sourit, dans les revues du Concert Mayol mais aussi aux Folies Bergères, au Casino de Paris... En 1929 c’est la consécration, au Théâtre de Paris avec Marius, une œuvre marseillaise où il incarne César, un personnage haut en couleur, né sous la plume d’un autre exilé de la Provence, Marcel Pagnol. Adapté à l’écran par le metteur en scène américain Alexandre Korda, Marius devient un des premiers succès du cinéma parlant français. Raimu tourne ensuite Fanny sous la direction de Marc Allégret et César réalisé par Pagnol, bouclant ainsi l’inoubliable Trilogie marseillaise. C’est à Toulon, sa ville natale, dans la douce fraîcheur d’une petite place homonyme que Raimu nous “fend le cœur”, éternellement. On s’y réjouit de la reproduction en bronze de la célèbre partie de cartes, liée à jamais au Bar de la Marine de… Partie de cartes qui faillit ne jamais exister, supprimée par son auteur qui la jugeait trop en gueule. En cachette, Raimu et ses comparses dont le caméraman, répétèrent la scène et l’interprétèrent sous les yeux de Pagnol qui, pour seul commentaire, tracera dans la loge de son acteur fétiche quelques mots qu’il considérera comme le plus beau compliment “Raimu tu es un génie” !

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PESCATOURISME ET TRADITION

Pour ceux qui veulent aller « au-delà du rivage », certains patrons pêcheurs vous invitent pour des sorties en mer en vous accueillant à leur bord pour une journée de pêche traditionnelle. A Saint Mandrier, au Brusc, au Lazaret, ils font figure de pionniers. Ils vous feront découvrir leur savoir-faire, les produits locaux à savourer et partageront leur passion avec vous. Adeptes de la pêche ou séduits par les formes de ces bateaux et du matériel embarqué, leurs passagers d’un jour seront ravis. Pendant quelques heures, vous pourrez faire connaissance avec le milieu marin, la gestion des ressources et les secrets de l’une des plus vieilles activités humaines, grâce à ce qu’on appelle le pescatourisme. Une belle façon de mieux connaître un métier exigeant.

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La ville aux cent fontaines

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a présence de sources nombreuses et abondantes sur le site de Toulon a été l’une des raisons majeures qui ont attiré ici des peuples depuis la nuit des temps. Des fouilles archéologiques ont montré qu’une importante ville romaine avec environ trois mille habitants y disposait de plusieurs aqueducs, de thermes, de bains publics et de multiples fontaines. À toutes les époques, de nouveaux travaux ont été entrepris pour alimenter en eau douce une population de plus en plus nombreuse. Aujourd’hui, au coeur de l’été provençal, le promeneur peut profiter de la fraîcheur des fontaines, à tous les coins de rue, sur toutes les places. Des vestiges romains aux architectures classiques, baroques ou néo-grecques, du style républicain du XIXe siècle aux fastes de l’Empire, il y en a pour tous les goûts. Seul celui de l’eau est unique. L’histoire de ce réseau d’adduction d’eau vaut la peine d’être racontée : ce n’est qu’en 1882, à peu près deux mille ans après l’arrivée des Romains, qu’un système moderne - et surtout sain - a été mis en place pour apporter l’eau potable aux Toulonnais. Très longtemps, les points d’eau sont restés des objets strictement utilitaires. Personne n’avait le souci de leur attribuer une quelconque valeur esthétique. Il a fallu attendre le XVIIIe siècle pour que des sculpteurs en fassent des oeuvres d’art. Toulon en comptait de nombreux qui travaillaient pour la Marine Royale, notamment pour confectionner les figures de proue et les enjolivures des navires du roi. Toulon vit ainsi fleurir de multiples fontaines sculptées en même temps que la ville s’embellissait. La seconde guerre mondiale va provoquer de graves dégâts, mais, dans les années 1980, la ville décidera de restaurer tout ce qui pouvait encore l’être de ce patrimoine original.


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VICTOR HUGO “C’est la ville où toute honte échoue” Aujourd’hui c’est la ville où toute honte échoue. Là, quiconque est abject, horrible et malfaisant, Quiconque un jour plongea son honneur dans la boue, Noya son âme dans le sang, Là, le faux-monnayeur pris la main sur sa forge, L’homme du faux serment et l’homme du faux poids, Le brigand qui s’embusque et qui saute à la gorge Des passants, la nuit, dans les bois, Là, quand l’heure a sonné, cette heure nécessaire, Toujours, quoi qu’il ait fait pour fuir, quoi qu’il ait dit, Le pirate hideux, le voleur, le faussaire, Le parricide, le bandit, Qu’il sorte d’un palais ou qu’il sorte d’un bouge, Vient, et trouve une main, froide comme un verrou, Qui sur le dos lui jette une casaque rouge Et lui met un carcan au cou ! L’aurore luit, pour eux sombre et pour nous vermeille. Allons ! debout ! ils vont vers le sombre Océan, Il semble que leur haine avec eux se réveille, Et dit : me voilà ; viens-nous-en ! Ils marchent, au marteau présentant leurs manilles, A leur chaîne cloués, mêlant leurs pas bruyants, Traînant leur pourpre infâme en hideuses guenilles, Humbles, furieux, effrayants. Les pieds nus, leur bonnet baissé sur leurs paupières, Dès l’aube harassés, l’œil mort, les membres lourds, Ils travaillent, creusant des rocs, roulant des pierres, Sans trêve hier, demain, toujours. Pluie ou soleil, hiver, été, que juin flamboie, Que janvier pleure, ils vont, leur destin s’accomplit, Avec le souvenir de leurs crimes pour joie, Avec une planche pour lit. Le soir, comme un troupeau l’argousin vil les compte. Ils montent deux à deux l’escalier du ponton, Brisés, vaincus, le cœur incliné sous la honte, Le dos courbé sous le bâton. La pensée implacable habite encore leurs têtes. Morts vivants, aux labeurs voués, marqués au front, Il rampent, recevant le fouet comme des bêtes, Et comme des hommes l’affront. Ville que l’infamie et la gloire ensemencent, Où du forçat pensif le fer tond les cheveux, Ô Toulon! c’est par toi que les oncles commencent, Et que finissent les neveux ! (Jersey, 28 octobre 1852. - Les Châtiments)

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OBJECTIF PLONGEE Un record national pour le Var : 400.000 plongées déclarées par an. Et l’agglomération toulonnaise n’échappe pas à cet engouement. Des îles d’Or aux Deux Frères en passant par la Grande Rade de Toulon, de nombreux spots de plongée permettent ici toutes les pratiques, de la randonnée palmée à la plongée archéologique, d’exploration ou de compétition. Pour développer durablement une activité emblématique, le programme SUBMED a équipé 45 sites d’ancrages à vis en accord avec les clubs et les prud’homies de pêche. Nous sommes bien ici chez les “Mousquemers”, le berceau de la plongée en bouteilles et plus récemment des chasses au trésor naturaliste immergé d’ « Objectif Atlantide ». Et si les bouteilles vous font encore un peu peur, pensez aux sentiers sous-marins.

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MUSテ右 DE LA MARINE

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Toulon

À

deux pas du port de plaisance, le Musée de la Marine est une visite o-bli-ga-toire pour tout plaisancier. Le lieu, lui-même est singu-

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& LES PORTS DU LEVANT

se trouvaient dans les bâtiments de la Corderie. Mais c’est à la fin du règne de Napoléon que ceci va prendre la forme d’un véritable mu-

petit détour, grand voyage lier : la grande porte de l’Arsenal. Le contenu est d’une grande richesse et, contrairement à ce que l’on croit souvent, ce n’est pas le Musée de la marine nationale. Ce qu’on y voit se rapporte à la ville de Toulon et à l’ensemble de son activité maritime, également civile et commerciale. Rattaché au grand musée national de la Marine qui se trouve au Palais de Chaillot à Paris, le musée de Toulon est plus petit, mais joue sur l’effet de proximité. Beaucoup de ce que l’on peut y voir trouve un écho dès qu’on en est sorti, en ouvrant les yeux sur la cité et la rade. Tout a commencé en 1796, trois ans après que la ville eut été reprise par les troupes de la république aux coalisés européens qui s’y étaient installés. Après ces troubles militaires et politiques, Toulon reprenait vie. Un maître sculpteur de l’Arsenal, Félix Brun, décida alors de regrouper dans son atelier les sculptures en bois et les maquettes de bateaux qui

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sée patrimonial, doublé d’une école de dessin, gravure, modelage et ornement dirigée par le sculpteur Pierre Puget. Après la seconde guerre mondiale, les collections dispersées sont regroupées et inventoriées et c’est en 1962 que rouvre le Musée Naval. En 1981, il devient Musée National de la Marine de Toulon en réseau avec Paris, Rochefort, Port Louis et Brest pour organiser des expositions temporaires de très haute qualité. Les parcours pédagogiques viennent d’être totalement renouvelés et d’excellents conférenciers arrivent à capter l’attention, notamment des enfants en faisant vivre les objets exposés. Chose utile, car les habitudes des visiteurs de musées ont changé, la muséographie a considérablement évolué, rendant les parcours plus actifs, plus participatifs. Faites ce petit détour jusqu’au bout du quai, vous partirez pour un grand voyage.

PORTS TOULON PROVENCE

Avec ses 6000 anneaux répartis sur 18 ports et localisés sur 5 communes varoises, l’offre d’accueil de la toute nouvelle autorité portuaire de Toulon et ses environs est l’une des plus importantes de France. Ports Toulon Provence fonde l’essentiel de son activité portuaire sur la rade de Toulon, qui sait mailler plaisance et grande plaisance, carferries pour la Corse, croisières ou autoroute de la mer vers la Turquie, en parfaite entente avec la célèbre base navale, port de projection des forces françaises. Et son domaine franchit résolument les limites de la plus belle rade d’Europe pour s’étendre aux ports des Iles d’Hyères, en voisin du Parc National de Port Cros, et à la rade du Brusc, avec l’archipel des Embiez. Autant de portes d’entrée sur un littoral préservé.

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Page de gauche : une partie de la salle des machines d’un sous-marin classique et une galère.

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Arles-Rhône 3 La nouvelle vie d’un chaland romain Fouille, relevage et restauration d’un chaland antique pour son installation dans l’extension du musée - 2011-2013

Exposition

4 juin 2011 - 6 mai 2012

Arles-Rhône 3, le naufrage d’un chaland antique Enquête pluridisciplinaire

Musée départemental Arles antique Presqu’île-du-Cirque-Romain 13200 Arles

arles-rhone3.fr

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Les Romains

ET CÉSAR CONQUIT LA MER Autant ses légions semèrent très tôt la terreur, autant sa marine se ridiculisa longtemps face aux ennemis et aux tempêtes de ce qui n’était pas encore Mare Nostrum. Mais Rome apprît vite et, après avoir copié les autres, inventa une nouvelle façon de combattre en mer et créa les bons bateaux pour cela.

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n demi-siècle avant notre ère, la guerre civile fait rage à Rome. Pompée et César s’affrontent. Le conflit s’étend hors les murs, chacun cherche des appuis dans les villes de l’Empire. La Provence – province chérie de Rome – est au cœur du bras de fer entre ces deux géants, prétendants au poste de Consul. Massalia, devenue romaine depuis le déclin des fondateurs grecs, prend parti pour Pompée. César ne peut laisser faire. Il veut soumettre la ville. Ses légions terrestres l’entourent, mais la mer reste ouverte. Il faut barrer la baie. Il faut des bateaux. César n’en a pas. Pompée les lui a volés. Qu’à cela ne tienne, c’est d’Arelate (Arles) qui le soutient, que la plus incroyable opération de construction navale connue va se dérouler.

Un jour de printemps de –49 av. J.-C., l’officier Decimus Junius Brutus entre dans les navalia, ateliers de charpente de la rive droite et annonce la commande de César : douze galères. On imagine un dialogue à la Astérix avec le maître-charpentier gaulois : « Pour quand, oh, grand Decimus Junius Brutus ? ». « Dans un mois ». « Mais… grand Decimus Junius Brutus, C’est imposs… ». « Labor improdus omnia vincit1. Les arènes d’Arelate viennent de recevoir de nouveaux lions d’Afrique… Avé ! ». L’histoire ne dit pas quelle potion prirent les ouvriers, mais le miracle s’accomplit. Decimus Junius Brutus n’avait pas sous-estimé le talent des charpentiers de marine gaulois. En un temps record, sans même prendre le temps de sécher le bois coupé à la hâte 1 - Le travail vient à bout de tout (Virgile)

dans les forêts qui poussaient dru dans le delta du Rhodanus, ils construisirent douze galères qui devaient mesurer entre cinquante et soixante-dix mètres comme on les faisait à l’époque ! Cette armada de bois vert, peu manœuvrante, menée par des novices et chargée de fantassins et d’armes, résiste à la descize, la descente à la voile des 30 km qui mènent à l’embouchure, cingle vers le Cap Couronne, longe la Côte Bleue et vient s’ancrer devant l’île de Ratonneau dans l’archipel du Frioul. Ces sortes de barges à rame formant une muraille flottante, complètent ainsi le blocus terrestre du Lacydon – le futur VieuxPort de Marseille . Le 21 juin, avec dix-sept navires faits pour la mer et le combat naval, Pompée tente suite page 85

LES UNITÉS OFFENSIVES

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Histoire

Les unités offensives de la flotte de l’Empire romain, selon leur type de vogue – le nombre de rangs de nage ou de rameurs – sont des trirèmes de 35 mètres de long sur 6 mètres de franc-bord, quadrirèmes ou quinquérèmes, assez comparables aux navires de guerre des Grecs dont Rome s’est inspirée. Mais le rostre de bronze que l’on voit à l’avant n’a pour les romains qu’une seule vocation artistique, l’éperonnage restant une manœuvre typiquement grecque. La technique de nage complexe nécessitait quant à elle un entraînement de huit mois par an pour un rameur à plein temps.


Les Romains

DES BATAILLES NAVALES TITANESQUES Les batailles navales antiques étaient gigantesques : Scipion l’Africain engagea 35 000 soldats sur 50 Pentécontores et 400 navires de transport pour livrer la bataille de Zama en l’an -202 contre Hannibal. Plus grandiose encore, la bataille qui eut lieu en Sicile en -256 entre les Romains et les Carthaginois vit s’opposer à nombre presque égal de part et d’autre : près de 300 000 hommes sur 700 navires !

LES DECERIS La Deceris était longue de 45 mètres et large de 8 mètres. Son équipage était composé de 600 marins et de 300 fantassins. Ce navire de guerre avait généralement des tours en bois à l’avant et à l’arrière, pour observer et mettre les archers en position haute. Sous la République, il n’y avait pas encore d’escadre régulière. C’est le chef des troupes terrestres qui commande également la flotte. Sur chaque navire se trouve un capitaine, un pilote et des décurions qui commandent l’équipage. Au début, les capitaines étaient des affranchis grecs.

PENTÉCONTORE Pentécontore

Birème

Trière

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La célèbre Pentécontore, est une des plus vieille galère déployée par Rome pour son propre compte. Cette unité légère, à coque évasée qui mesure 30m de long pour moins de 4m de large est une monoris, c’est à dire qu’elle ne possède qu’un seul rang de 50 rameurs. Elle est utilisée comme navire éclaireur et de liaison et pour le transport rapide des troupes, ordres et dépêches, à l’instar de la frégate ou du croiseur plus tardifs. Elle est abandonnée en 50 av. J.-C. au profit des Liburnes, inspirées de navires pirates Illyriens, plus rapides et plus maniables.

BIRÈME ET TRIRÈME La birème impériale romaine ou Dikrotus, très répandue de -300 à 50 après J.-C., file 6 nœuds. Plus légère et plus puissante que le Pentécontore, elle se distingue par un étagement d’apostis, ouvertures permettant le passage des avirons. Elle est dotée d’un petit auvent, une diacta, et parfois d’une sculpture dorée. En chêne, elle reste plus lourde que son équivalente grecque. La Trirème a deux mâts gréés en permanence, même durant le combat. Sous l’Empire, la grand-voile arbore Aigle, lauriers et le fameux S.P.Q.R. La voile de beaupré s’orne du nom du vaisseau et des insignes du capitaine et à l’arrière se trouve le porteenseigne de la Légion. Elle file 7 à 8 nœuds propulsée par 170 rameurs payés issus des classes sociales les plus basses (pas esclaves comme chez les Grecs) auxquels il faut d’ajouter une vingtaine de marins et une cinquantaine d’hommes de troupe.


NAVIS ONENARIA Le navis onenaria bâtiment de charge affrété au seul transport des denrées et du fret pour l’approvisionnement accompagne la flotte. Ce navire rond, entièrement ponté comme l’Hippago, adapté quant à lui au transport des chevaux est uniquement à voile et ne possède pas de rostrum ou pointe de fer.

Deceris

Onenaria

suite le la page 83

de forcer le blocus. Mais les légionnaires d’élite de César embarqués, capturant les embarcations assaillantes avec des grappins, transforment la bataille navale en un combat au corps à corps où ils excellent. Avec trois bateaux coulés et six capturés, Pompée perd la bataille de Marseille. Une grande partie des terres de Massalia sont confisquées au profit d’Arelate la fidèle. En -46, César pardonnant à ces Gaulois celtoligures d’avoir brûlé Rome en -390, accordera à Arles le statut de Colonie de droit romain et y installera les vétérans de la VIe Légion.

Les romains ne sont pas marins

Un combat terrestre en mer Partis de rien, les Romains ont vite appris. César, dans la Guerre des Gaules décrit sa Galère-Amirale de 70 mètres qui transporte des centaines d’hommes, rameurs et combattants. Elle possède deux tours d’archers, des dauphins, pointes de plomb hissées sur les vergues, des armes de jet lourdes : catapultes et balistes et son pont complet favorise la lutte à l’abordage grâce à cette fameuse invention romaine dite corvus ou corbeau. Ce pont mobile est une passerelle d’assaut articulée à partir du mât qui se fiche par des crocs sur le pont du navire ennemi, empêchant sa manœuvre, notamment le redoutable éperonnage, par ailleurs sans effet sur les impénétrables bordés en chêne que les charpentiers gaulois leur faisaient. Le bateau de guerre romain n’est pas une torpille à rame comme la galère grecque au rostre pointu, c’est une forteresse, un morceau de champ de bataille flottant. Car le Romain, piètre marin, est un as de l’infanterie et un fin stratège. Il utilise sur le navire abordé les techniques de combat du plancher des vaches, comme pour prendre les forteresses en bois des Gaulois d’Armorique (par Toutatis !).

Les romains ont aussi mis au point l’ancre à jas telle qu’on la connaît – presque – aujourd’hui et, pour se protéger des redoutables frondeurs des Baléares qui bombardaient les navires approchant, ils revêtirent leurs coques de cuir, inventant ainsi les premiers “cuirassés”. Si l’incompétence fût à l’origine de la disparition au large de Tunis de la première flotte romaine, et la tempête celle du naufrage de la seconde au large de la Sicile, un lobby de riches propriétaires terriens et commerçants de la province de Campanie, inquiets des menaces carthaginoises sur le stratégique détroit de Messine, finança les quelques centaines de vaisseaux de la troisième. On connaît la suite… Après la conquête de la Sicile, de la Corse, de la Sardaigne et de Carthage contre Scipion l’Africain en -146, Rome se rendra finalement maîtresse de la Méditerranée Occidentale.

Rome apprend de ses échecs Retournement de l’histoire, ceux qui étaient considérés par les Grecs comme des barbares, devinrent ainsi respectables au point d’être invités à participer pour la première  fois  cette  même  année  aux  jeux Olympiques. La nouvelle Civilisation Gréco-romaine voyait le jour. Pouvait commencer la fructueuse Pax Romana, la paix romaine qui tînt à distance non seulement les ennemis de Rome mais les pirates barbaresques qui durent attendre patiemment la chute de l’Empire pour reprendre leur activité, abordages en mer et razzias sur les côtes de Méditerranée. Djinn Naigeon

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Histoire

Trois siècles auparavant, avant sa lutte contre Carthage – conflit en trois épisodes connu sous le nom de Guerres Puniques dont l’enjeu n’était rien de moins que la maîtrise de la Méditerranée Occidentale – Rome ne possédait pas de marine de guerre. Quand Rome voulut s’opposer à la colonisation de la stratégique Sicile par les Phéniciens et mena le premier combat naval de son histoire, elle utilisa les navires et des “consultants” grecs. Quand elle se dota de ses propres bâtiments, en bonne copiste, elle s’inspira des navires étrusques, italiques ou carthaginois qu’elle adapta à ses besoins et à son goût. Cette flotte romanisée était sous commandement d’excellents pilotes, issus des états conquis. Le navire militaire type était conçu pour aller vite : au portant grâce à ses voiles carrées, le reste du temps avec ses rameurs. Long, fin et léger, il pouvait être remisé sur les plages ou tiré sur des rampes de halage.

Il n’en existe pas de vestiges, à la différence des puissants cargos de commerce dont on a retrouvé, conservées dans les sédiments, nombres d’épaves lestées par leurs cargaisons. Mais les sources indirectes écrites et les représentations – mosaïques, bas-reliefs, peintures sur céramique - que nous ont laissés les artistes, donnent à comprendre, mais aussi à rêver.


Rhizostoma-pulmo

Chrysaora Hysocella Š Sophie Fallourd

Cotylorhiza-tuberculata Š Sophie Fallourd PelagiaNoctiluca S.Fallourd - Aquarium Mare Nostrum

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Méduse

BEAUTÉ FATALE, INVASIVE ET IMMORTELLE Le cauchemar des baigneurs ! Elle est répugnante, urticante, parfois mortelle. Mais elle est d’une étrange beauté. La famille des cnidés, autrement dit les méduses, qui était absente des côtes méditerranéennes depuis 1998, est réapparue en 2003. En masse. Certains scientifiques pensent que les populations de ce plancton d’un genre très sophistiqué auront doublé d’ici 2020 et ont découvert qu’une espèce tropicale invasive a même des dispositions pour... l’immortalité !

D

ès que cette masse gélatineuse est à moins d’un mètre, c’est la fuite ! Pourtant, les méduses n’attaquent pas. Même si ses muscles puissants l’aident à se propulser, courants et vagues restent son principal moyen de locomotion. Dommage pour vous, le hasard vous a mis sur son chemin… Aïe ! La baignade est terminée.

Connaître son ennemi

Le réchauffement, elle adore ! En 2006, il a fallu interdire la baignade sur certaines plages à Nice et Marseille. Les années suivantes, d’autres stations balnéaires ont du en faire autant. Les Espagnols ont créé un drapeau pour avertir les baigneurs : méduse bleue sur fond blanc. Allons nous devoir nous y habituer ? De l’avis des scientifiques, le réchauffement climatique leur profite. Elles raffolent de l’eau chaude et ça dope leur libido. De surcroît, la canicule attire les méduses vers la côte car les eaux y sont plus salées. L’action de l’homme n’est pas non plus étrangère au phénomène : plus l’eau est polluée, mieux les méduses se portent. Le plancton animal dont elles se nourrissent en partie prolifère grâce aux excès de matières organiques venues des rejets des usines et de l’agriculture. La pollution les

débarrasse aussi de leur pire ennemi, la tortue. La surpêche fait le reste. Moins de poissons, surtout thons et dauphins, moins de prédateurs. Et, plus de méduses, moins de poissons car la vorace dévore leurs larves. La terrible prédiction de Jules Verne dans Vingt Mille Lieues Sous les Mers où il était question de monstres marins « des océans vidés de leurs poissons et encombrés de méduses » est-elle en train de se réaliser ?

BIEN AVANT LES DINOSAURES Apparues il y a au moins 650 millions d’années, bien avant le dinosaures, les méduses s’apparentent aux planctons. Elles passent toute leur vie en pleine eau. Leurs mouvements sont lents, elles utilisent les courants marins pour se déplacer. Presque toutes les méduses sont marines, elles ne sont qu’environ 1% à vivre en eau douce. Une méduse est formée d’une calotte appelée ombrelle et d’un axe vertical (manubrium), fixé au centre de la face inférieure. Au bord de l’ombrelle sont attachés des filaments. Les mers arctiques abritent des méduses de deux mètres de diamètre dont les filaments peuvent atteindre quarante mètres de longueur !. Certaines méduses pourraient même atteindre trois mètres de diamètre, avec des filaments de dix-huit mètres, c’est le cas pour la méduse Cyanea capillata.

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Nature

On peut la confondre avec un sac en plastique. Pourtant, ce n’est pas simplement une masque visqueuse composée à 97% d’eau. La méduse est un animal, certes bien particulier, mais qui en remplit toutes les fonctions : Pour se nourrir, elle se sert de ses filaments, souvent invisibles. Dès qu’elle touche sa proie, des “ressorts” placés dans ses cellules lancent des harpons microscopiques chargés d’un venin qui immobilise la cible, en général des organismes planctoniques. Les tentacules ramènent alors la proie à la bouche. Pour respirer, pas besoin de poumons, les échanges gazeux se font à travers la peau. Pour agir, pas de cerveau mais un réseau de cellules nerveuses et de fibres si bien “pensé” qu’il a servi de modèle aux scientifiques pour comprendre le passage de l’influx nerveux chez l’humain. Et elle a aussi des organes des sens. Des yeux – ocelles – plus ou moins complexes selon l’espèce, et des organes d’équilibration – statocystes – cellules équipées de sortes de cils qui captent les changements d’orientation. Pour se reproduire, les méduses ont une sexualité. Il y a mâles et femelles, sperma-

tozoïdes et ovules. Les larves ont un début de vie un peu particulier : elles tombent sur le fond, se fixent sur un support pour se transformer en une sorte de tige, le polype. Ces tiges forment des colonies qui vont bourgeonner et donner de petites méduses qui seront lâchées en pleine eau. En trois à quatre mois, une méduse pond des millions d’œufs. Et tout cela arrivera sur nos plages. Il y a toujours eu des “années à méduses”. Au XVIIIe siècle, un marin de Méditerranée écrivait dans son carnet de bord « depuis trois jours, nous naviguons dans une soupe de méduses ». Depuis 2003, on note un retour en force, surtout en Méditerranée. Depuis, Pelagia noctiluca, espèce d’un joli violet bleu est là pratiquement toute l’année.


PICOTEMENTS, BRÛLURES, ALLERGIES !

L

Tel que le décrit le Dr. J.C. Deslandes sur www.urgence-pratique.com, « La sévérité des réactions dépend de l’âge, des antécédents personnels, des antécédents de piqûre, de l’étendue de la surface cutanée atteinte (corrélée avec la charge de venin), de la toxicité du venin, d’un traitement initial négligé ou mal conduit, du terrain allergique. Dans ces cas, s’ajoutent à la douleur et l’érythème, la formation de bulles (véritables brûlures du second degré), un oedème local et une douleur plus intense qui peut irradier de façon centripète à partir des extrémités. Ces lésions dermatologiques peuvent devenir hémorragiques, nécrotiques ou ulcéreuses et évoluer vers une mauvaise cicatrisation ou l’apparition de zones pigmentées définitives. Ces lésions peuvent apparaître 4 à 12 heures après le contact ». On aura compris, le principal danger est

es piqûres de méduses sont statistiquement localisées au niveau des membres, bras et jambes. Rarement sur le tronc ou le visage. Le venin des méduses, éminemment toxique pour ses proies, n’est, généralement que désagréable pour l’homme : une sensation de brûlure ou de choc électrique, puis des démangeaisons, et la zone touchée devient très rouge avec parfois de petits boutons blancs. Rien de plus. Ces effets disparaissent rapidement dans la plupart des cas.

le risque d’allergie que sa piqûre peut provoquer, comme celle d’un insecte. Attention ! Les personnes allergiques doivent avoir avec eux un antihistaminique pour intervenir au moindre symptôme (nausée, maux de tête, vertiges…) qui pourrait conduire à un choc anaphylactique. Premier conseil : ne vous grattez pas ! Vous enfonceriez encore plus profond les piquants. Si des fragments de tentacules sont visibles, ôtez les avec une pince à épiler, sinon, ils continueront à délivrer du venin. Lavez abondamment la zone touchée à l’eau de mer puis séchez sans frotter. Du sable sec pourra servir d’éponge à venin et aider à décoller les cellules urticantes. Appliquez ensuite une crème apaisante et anti-allergique sur toute la surface à traiter, puis laissez à l’air libre. Baignade déconseillée durant deux à trois heures.

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Méduse Turritopsis nutricula © Melastmohican - Fotolia.com

LA VIE, LA MORT, L’IMMORTALITÉ...

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gie de l’université de Lecce, elle mesure à peine 4 ou 5 mm et est originaire de la mer des Caraïbes. Elle serait biologiquement immortelle. L’immortalité biologique avait d’abord été décrite sur les cellules cancéreuses, dont les mécanismes de mort cellulaire naturelle sont bloqués, rendant ainsi la cellule cancéreuse exempte de vieillissement. Mais la méduse, elle, peut “vieillir” et “rajeunir”. En effet, Turritopsis nutricula serait capable d’inverser son processus de vieillissement, et ainsi de retourner à sa forme juvénile après avoir atteint sa maturité sexuelle, et cela indéfiniment. Cette immortalité concerne seulement son développement, lequel aboutit chez la plupart des êtres vivants, à la vieillesse et à la mort. De par ses caractéristiques exceptionnelles, elle fait l’objet d’études par les biologistes et les généticiens puisqu’elle est le seul organisme complexe vivant connu à ce jour capable d’inverser son processus de vieillissement. Cependant, on ne sait pas si elle peut d’elle-même décider d’inverser son processus de vieillissement ou si un environnement spécifique le déclenche.

Mais cette immortalité potentielle inquiète les scientifiques, car elle contribuerait à la prolifération de ces méduses à travers toutes les eaux du globe. Partie des Caraïbes, son aire de répartition s’étend en effet un peu plus chaque année. Est-ce la raison unique ou principale ? Difficile de répondre. Selon le Pr. Battaglia de l’université de Lecce en Italie qui a mis en avant son “immortalité” potentielle, celle-ci, n’est pas la vraie raison de sa prolifération. On sait que de nombreuses autres espèces de méduses se multiplient un peu partout dans le monde à cause du réchauffement du climat et de l’activité humaine. La surpêche des principaux prédateurs des méduses - thons, tortues, dauphins est une possibilité. Une autre hypothèse est que les navires et sous-marins ramènent involontairement dans tous les ports ces minuscules méduses qui se répandent quand on vide l’eau des ballasts. Un espoir : ses aptitudes au rajeunissement perpétuel ne sont ni véritable immortalité ni invulnérabilité : Turritopsis nutricula n’est ni indestructible, ni exempte de maladies, de prédations ou d’accidents.

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Nature

icroscopiques ou géantes, bien cachées au fond des océans, elles ont survécu à toutes les extinctions de masse que la planète Terre “terrestre” a connues. Les scientifiques ignorent encore beaucoup de choses sur elles, mais ce qu’ils nous apprennent sur leur vie et leur mort a déjà de quoi étonner. D’abord, il faut savoir que leur reproduction est liée à leur mort. Belle métaphore... C’est en mourant, et seulement à ce moment fatal, que la méduse mâle libère ses spermatozoïdes qui vont alors se disperser dans l’eau à la recherche de leur âme soeur formant alors des polypes qui se fixent sur les fonds marins. Pour que le “bébé” méduse soit libéré, il faut qu’un événement important se produise, tempête, foudre, refroisissement ou réchauffement de l’eau... Cela peut prendre jusqu’à un demi-siècle ! Mais, bien plus étonnant encore est la capacité de certaines espèces à se régénérer, à inverser le processus de vieillissement des cellules, se rendant ainsi immortelles ! C’est le cas de Turritopsis nutricula, méduse de la famille des hydrozoaires. Découverte par des chercheurs en biolo-


RÉUSSIR VOS IMAGES Le monde sous-marin offre des perspectives, des décors, des ambiances propices à la photographie. C’est entre la surface et cinq mètres que la lumière est la plus éclatante, les couleurs les plus intenses, la vie la plus foisonnante. Voici quelques conseils de base qui vous permettront de tirer le meilleur parti de votre appareil numérique étanche (à 5 ou 10 mètres de fond ou équipé d’un caisson étanche), par notre spécialiste Julien Collet . Le mode

Regardez si votre appareil possède un mode de prise de vue « sous-marin ». Essayez néanmoins d’autres modes (notamment les modes « lumières artificielles »), certains peuvent vous offrir des rendus plus proches de la réalité. Si vous disposez d’un mode « manuel », utilisez-le ! Avec une ouverture standard (5.6) vous pourrez jouer sur la vitesse (60, 125, 250e de seconde) pour gérer la luminosité (par exemple pour obtenir des bleus plus profonds en contre-jour : plus le temps d’exposition est rapide, moins la scène sera éclairée).

La focale

Vous obtiendrez toujours de meilleurs résultats en restant au plus grand angle (en ne zoomant pas). L’eau est rarement complètement transparente, il faut donc essayer d’être le plus proche de votre sujet ou de votre premier plan (pour éliminer, en quelque sorte, le plus possible d’épaisseur d’eau entre le sujet et vous). Cela implique de s’approcher du sujet plutôt que de zoomer pour le faire « grossir » dans le cadre. Le rendu sera plus clair et plus net.

L’angle

L’angle de prise de vue modifie la profondeur et le relief de l’image mais aussi la quantité et la qualité de la lumière. Les images prises du haut vers le bas peuvent manquer de relief; l’éclairage uniforme est un avantage (pas de zones trop claires ou trop sombres) comme un inconvénient (image « plate »). Les images prises à l’horizontal permettent d’intégrer un décor, mais l’éclairage vertical n’est pas facile à mettre en valeur (évitez le zénith et placez le soleil derrière vous).

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Les images prises du bas vers le haut donnent souvent de bons résultats. La surface, en haut de l’image, donne une ambiance, une perspective, et souvent de beaux effets lumineux. Il vous faudra composer avec toute cette lumière et l’éventuel contraste de vos premiers plans.

Le contre-jour

Le bon effet ne sera pas facile à obtenir. Vous risquez d’avoir trop de lumière et une image « brûlée ». Vérifiez l’allure générale de votre photo sur l’écran et recommencez en modifiant un paramètre! Placez le soleil sur le bord de l’image et non en plein centre. Essayez de descendre plus profond. Attendez que le soleil ait un peu infléchi sa course. Modifiez légèrement votre angle de visée. Vous finirez par obtenir un résultat qui rendra la magie du monde sous-marin.

Le flash

Il est à proscrire ou à utiliser avec une grande parcimonie. À moins d’avoir un flash déporté, (que l’on peut brandir à bout de bras pour modifier l’angle de l’éclair) mieux vaut s’en passer. Le petit flash incorporé à votre appareil numérique va envoyer un éclair parallèle à l’angle de visée de votre objectif : toutes les particules en suspension dans l’eau vont être éclairées face à l’objectif et se traduire par une multitude de taches blanches qui viendront polluer votre image (les écailles des poissons argentés provoquent un effet miroir tout aussi désastreux). Mais alors, que faire quand le sujet n’est pas assez éclairé ? Utilisez autrement le soleil, changez de sujet ou changez de matériel !


Photo

SOUS-MARINES L’étanchéité

Pour les appareils étanches, soyez prudents : pas plus de 2 ou 3 mètres de profondeur pour ceux garantis à 5 ; pas plus de 5 pour ceux garantis à 10. Laissez-les ensuite tremper dans de l’eau douce avec une goutte de liquide vaisselle pendant au moins une heure. Evitez le jet du robinet en direct sur l’appareil.

Pour les autres, ne plaisantez pas avec la fermeture du caisson ou du sac étanche. Les joints doivent être irréprochables, souples, éventuellement graissés avec du silicone (en tube). Soyez attentifs: un cheveu, un grain de sable, sur le joint ou dans la rainure, peuvent suffire à provoquer une funeste entrée d’eau?

Plonger

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Marseille

LE VIEUX-PORT “PIÉTONISÉ” The Old-Port pedestrianized… pourrait-on dire avec l’accent de la Canebière car le projet britannique l’a emporté sur l’équipe locale d’architectes, plus radicale dans l’adieu aux voitures mais moins accommodante avec les nécessités de “Marseille 2013”. Quoi qu’il en soit, c’est un changement très profond pour les touristes et les plaisanciers qui arriveront dans ce mythique bassin.

T

ous ceux qui connaissent le bonheur de “lever la voile”, connaissent aussi cet étrange sentiment qui nous envahit à l’entrée d’un port après un temps en mer… Appréhension de devoir échanger la musique du vent par le bruit de la ville, la solitude et les espaces sans limites contre les rues étroites et les immeubles, un pont mouvant contre une terre ferme. Mais il y a aussi les moments inoubliables comme atterrir à la Rochelle porté par la marée, ou à Bonifacio quand l’hiver l’a délivré des foules. Et Marseille ! Passer la Darse où les galères désarmaient autrefois, dans l’alignement des forts Saint-Jean et Saint-Nicolas… Que de changements depuis qu’il fut fondé il y a 2600 ans ! Passé les forts Vauban et ses canons tournés vers la ville rebelle, le Vieux-Port a été remodelé à bâbord par une dernière guerre qui en avait détruit un pan entier. Depuis, sous prétexte d’urbanisation, ses alentours ont été abîmés, ses quais soumis au remplissage automobile frénétique alors que c’était là que battait le cœur de Marseille.

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Alors, ironie de l’Histoire, c’est aussi sous prétexte d’urbanisme et de “modernité” qu’il a éré récemment l’enjeu d’une joute politique : sa piétonisation est devenue la nouvelle sardine dont les arrêtes restent en travers de quelques gorges... Un Vieux-Port 100% piéton ! Cela devait être pour Marseille 2013 un bien plus grand défi que d’avoir osé toucher à la Canebière pour y réinstaller le “trolleybus” qui est en fait un tramway. Une compétition entre les plus grands architectes internationaux dont le cahier des charges fixé par l’AGAM (Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaise) tenait en une phrase : « Faire en sorte qu’on ne puisse plus faire le tour du Vieux-Port en voiture ». En d’autres termes, exit les autos des quais Rive-Neuve, des Belges et du Port.

Un vrai choix de vie Le site du Conseil général des Bouches-duRhône, disait alors : « La piétonisation, no-

tamment celle du Vieux-Port, c’est le symbole d’une ville conçue pour les Marseillais, d’une ville reconquise par l’habitant. Il s’agit d’un choix de qualité de vie, d’un renouveau profond de l’espace urbain ». Deux projets se sont retrouvés en finale. Celui de l’architecte marseillaise Corinne Vezzoni associée à Christian Devillers, qui avait remporté l’engouement d’un premier jury contre celui du duo Norman Foster / Michel Desvigne qui fut finalement le choix des autorités locales. Le premier se distinguait par une piétonisation plus volontaire, faisant du quai des Belges une immense “place de la fraternité”. Le second prévoyait de réserver seulement la moitié du quai des Belges aux piétons, mais avait l’avantage de présenter une première étape fin 2012 (livraison complète pour 2017) et permettre ainsi de garantir un Vieux-Port sans travaux pour la fameuse année 2013 ! C’est donc ce dernier qui fut désigné… ou choisi bien avant la compétition, disent les mauvaises langues !


Le duo so british, tout en libérant à la promenade la bordure des quais, a donc oublié en partie la zone piétonne, de même qu’il n’a pas touché au délicat sujet des activités associatives et de la capacité d’accueil. Le Vieux-Port est en effet l’un des seuls ports d’Europe à ne pas offrir aux piétons un accès à l’eau du bassin. Historiquement, les clubs de plaisanciers ont toujours défendu les fameuses barrières, qui longent 80% du site, sous des motifs de sécurité pour leurs biens. Mais l’équipe envisage, après concertation, un « quai toujours libre, avec un rapport direct à l’eau ». Ils ont aussi, pour leur défense, mis l’accent sur la façade maritime en imaginant une chaîne de parcs arborés reliés par des promenades.

Eau, végétal, minéral

Des estacades et des pontons mobiles accueilleront des bateaux et les événements exceptionnels. La création d’une zone de carénage mutualisée et la mise en situation du marché aux poissons et des zones d’embarquement pour transports maritimes publics sous les grandes ombrières du Quai des Belges clôturera le tout.

Et le plan d’eau ? Quant aux quais du Vieux-Port, ils seront résolument minéraux et pavés de granit. L’éclairage évoquera par de grandes mâtures la destination du lieu. Mais seul un projet architectural permettra, toujours d’après les concepteurs, de donner la cohérence et la grandeur attendues. Ils ont donc imaginé de vastes ombrières à l’architecture rigoureuse, contemporaine et presque abstraite, abritant de petits pavillons destinés à l’activité nautique associative. Concentrer aussi le mobilier et les objets avec ces architectures pour libérer de vastes surfaces destinées aux manifestations et événements métropolitains. Maintenant la vraie question reste : verrons-nous les parcs ? Et pour les gens de mer : le projet s’arrêtera-t-il à l’espace minéral ? That’s the question …. Anne Imbert

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Les ports

L’hypothèse est de transformer l’ensemble des forts et terrains militaires en un vaste parc. Faisant le lien entre cette façade maritime et le décor minéral du port proprement dit, l’actuelle zone occupée par le bassin et l’échangeur du carénage deviendra à terme une prairie en pente douce autour d’une calanque. Quant aux quais, l’équipe lauréate mise sur le mélange du végétal et du minéral et sur une diminution progressive de la voiture.

L’idée se veut être « une conquête progressive d’un ensemble de lieux composant une chaîne de parcs reliés par des promenades continues depuis la ville vers la mer » La restauration du glacis du fort Saint-Nicolas rejoignant ville haute et port en couvrant l’échangeur de sortie du tunnel offrira une vaste prairie accessible au public en pente vers le port. Il sera creusé d’une petite calanque donnant l’accès aux bateaux et autour de laquelle s’installera un village nautique en lien direct avec l’aire de carénage et les quais. Un ponton périphérique, promenade publique prolongeant le port, desservira commerces et services spécialisés ainsi que des cafés et restaurants. Mais l’image maîtresse à l’entrée du port, sera le fort St Jean qui qualifiera puissamment le port. Le projet de la darse du J4 en sera aussi sûrement un vrai challenge ! Maintenir et développer l’activité du port tout en rendant accessible les quais au public oblige à une recomposition des structures du plan d’eau. Le déplacement des aires techniques sur des estacades d’une part et l’installation des clubs nautiques sous les ombrières du quai d’autre part, laisseront un large passage continu du public autour du plan d’eau. Celui-ci sera rendu visible grâce à la création de pontons maîtres qui libéreront les rives et à des estacades publiques qui offrent un accès inédit au centre du port.


En haut, le Quai des Belges, au fond du port, haut lieu des embouteillages marseillais qui deviendra une grande esplanade piétonnière, certainement très fréquentée. Pour que cet hectare et demi de pavés soit un lieu vivant, la ville devra certainement faire appel à des projets festifs et culturels. À gauche, le Quai Rive-Neuve sans les barrières qui ferment actuellement le bassin. En bas, la partie Est du quai des Belges où est prévue une ombrière. À l’angle, le quai de départ des navettes vers le Frioul et le château d’If sera réaménagé et le marché aux poissons sera maintenu là où il se trouve depuis... toujours .

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Marseille

LA DARSE J4 : POUR LE PATRIMOINE Il ne s’en cache pas : le projet du port de Marseille est un projet urbain pas portuaire. Parmi les regrets des usagers du bassin, la diminution - provisoire ? - du nombre d’anneaux. En revanche, l’aménagement de la darse J4 pourrait bien faire la part belle aux bateaux de tradition et au patrimoine marin de la ville.

S

culier; le lieu servant de “miroir à l’oeuvre architecturale” et de l’autre une proposition où le patrimoine maritime méditerranéen pourrait se trouver en résonnance avec son environnement. Le projet le plus cohérent avec la ville, son histoire, mais surtout une logique économique et culturelle serait d’en faire le « port de la tradition marine ». Un projet défendu par Pass’Mer qui mettrait en avant la création d’une vitrine vivante du patrimoine maritime méditerranéen, afin d’apporter une extension maritime tangible et animée au Mucem, de créer une continuité entre trois espaces en devenir : musée / Vieux-Port / Centre Régional de la Mer et surtout qui pourrait être un lieu de rendez-vous et une contribution pertinente à Marseille 2013 capitale européenne de la culture. La proposition repose sur la création d’un pont flottant, qui accueillerait les bateaux classiques de la Méditerranée : bettes, barquettes, pointus, gourses, mourres de pouar, catalanes, ménorquines, tartanes... Plus qu’un musée flottant, ce serait une vitrine vivante du patrimoine marin. De plus, l’idée est de permettre aussi bien des reconstitutions historiques que des écoles de voiles traditionnelles, des régates et parades nautiques, ou un lieu de balade à travers l’historique et le patrimoine vivant.

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Les ports

ite emblématique de la métamorphose urbaine de Marseille, la darse dite J4 accueillera dès 2013 un ensemble d’équipements culturels, commerciaux et urbains. Cet ancien Domaine public Maritime longtemps occupé par les activités du port (notamment le hangar J4) et cerné par des bâtiments emblématiques comme le Palais du Pharo et la cathédrale de la Major est un des plus beaux sites de la ville. Conçu comme un prolongement du VieuxPort, il se veut une liaison entre le port autonome et le Vieux-Port grâce à la création du boulevard du littoral. Situé sur le môle J4, à l’ombre du fort Saint-Jean et à proximité du futur Mucem, (Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée) le CeReM (dédié à la Méditerranée contemporaine et dessiné par l’architecte Stefano Boeri) aura vocation à devenir un lieu d’échange pluridisciplinaire entre les peuples du bassin méditerranéen. A ses pieds, une nouvelle darse verra le jour. D’ici 2012, le réaménagement du J4 sera terminé avec la remise en eau du fort Saint-Jean grâce à deux darses, qui sépareront le Mucem et son futur voisin, le Centre Régional de la Méditerranée, du fort Saint-Jean et c’est autour de l’exploitation de cette darse que se situe un débat. Il y a d’un côté une absence de projet parti-


La Roche-Bernard

CONTRATS ≠ FORFAITS D

epuis juillet 2011, la société privée SAGEMOR s’est vue confiée pour 10 ans la gestion du port de plaisance de La Roche-Bernard, Férel, Marzan et envisage d’y investir 542 000 € dans le but de « valoriser les lieux de vie, accroître les services aux plaisanciers et contribuer à l’essor économique de la “petite cité de caractère” . Face au problème universel du manque de places de port, l’idée est de favoriser la mobilité des bateaux par le remplacement de la gestion des places de port à l’année par un forfait qui offre des services sans pour autant augmenter le nombre de places à flot : Garantie de services Navi+ : nouveau contrat longue durée qui prévoit des places à terre. Les plaisanciers titulaires du contrat peuvent ainsi déposer leur bateau à terre en dehors des périodes de navigation.

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Pass’escales : formule qui permet aux plaisanciers abonnés, sous contrat à l’année avec le port de La Roche-Bernard, de faire escale gratuitement dans l’un des 43 ports de la côte Atlantique membres du réseau. Pass loueurs : les loueurs adhérents font bénéficier d’une remise de 50% sur les frais d’escales à leurs clients pour encourager la location de bateaux. Latitude Morbihan : accessible à partir de 255 € par an, ce forfait permet aux plaisanciers, sous contrat à l’année avec le port de La Roche-Bernard, de faire escale gratuitement les deux premières nuitées dans 16 autres ports du département tout en bénéficiant des principaux services. Port fonctionnel de Marzan : en complément du port à flot, une cale sera créée sur la rive Marzan pour le stockage à sec, garantissant au plaisancier de disposer d’un emplacement à flot ou à terre à l’année.

Port d’été en rive Férel : pour répondre à la forte affluence estivale, le port de Férel sera aménagé pour accroître la capacité d’accueil pendant la saison. Un ponton à usage mixte est envisagé pour assurer une protection en période hivernale avec un ponton déflecteur. Accueil : réservation en ligne, applications gratuites sur smartphone. Escale Vilaine : nouvelle offre touristique pour concilier navigation et découverte du territoire. Pour ce dernier point, à quelques pas du cœur historique et commerçant du VieuxPort de La Roche-Bernard, la place de la Voûte va être aménagée pour valoriser le patrimoine ancien de la « Petite cité de caractère » et répondre au projet de port d’été en rive Férel. Prolongement de l’espace piétonnier, embellissement des abords, création de places de parking... En lien avec l’office de tourisme, de nouvelles offres de services verront le jour pour promouvoir le territoire, notamment par des escales “art de vivre et saveurs”, escales culturelles, escales “nature et découverte”.


Brèves de pontons HENDAYE : nouvelles bornes

Renouvellement de pontons : Changement complet du ponton C, ainsi que des travaux d’amélioration sur le ponton D (changement des catways coté pair) sur le ponton F (changement des catways) et sur le ponton G (changement des bornes de distribution d’électricité et d’eau). Dans un souci environnemental et de maîtrise d’énergie les bornes électriques du ponton C et G seront équipées d’un temporisateur. Dans les années à venir les autres pontons seront eux aussi équipés de ces nouvelles bornes. KERNEVEL : carburant moins cher

Mise en service de la nouvelle station carburant au port du Kernével depuis avril 2011. Composée de 2 pompes avec 4 points de distribution, il y a possibilité d’accueillir plusieurs bateaux en même temps avec plus de confort pour les utilisateurs. Le plus qui fait toute la différence, une diminution des prix à la pompe Point important, un système plus efficace de maîtrise du feu a été mis en place. De plus des kits complets de lutte contre les pollutions comprenant des barrages et des feuilles absorbantes sont disponibles pour le public. LA ROCHELLE : confortement du sol

Les travaux de confortement du sol, à l’arrière du quai de l’Anse viennent d’être effectués. Pourquoi ? Cette partie du terminal doit pouvoir supporter une charge de 6 tonnes au mètre carré, uniformément réparties, exactement comme pour le quai lui même, une capacité qui correspond aux descentes de charges de la grue mobile opérant sur site. LORIENT : manutention et carénage

Les plaisanciers peuvent désormais effectuer certaines manutentions au port de Lorient BSM. Le service portuaire propose la mise à l’eau et la mise à terre pour les bateaux de moins de 4,5 tonnes. Attention : le port ne dispose pas de zone de stockage ni de carénage. La potence de levage se situe sur le terre-plein Papin. Grutage sur rendez-vous uniquement. Renseignements à la capitainerie : 02 97 87 00 46. Au Cap Lorient les plaisanciers ont la possibilité d’utiliser une nouvelle aire de carénage. De nombreux aménagements ont été réalisés dans le domaine de la protection de l’environnement (carénage, déchets, hydrocarbures...)

Hoëdic : nouveau ponton dédié aux pêcheurs et plaisanciers pour la saison 2011

Île de Hoëdic

PÊCHE + PLAISANCE Depuis juillet 2011, le nouveau ponton du port de l’Argol à Hoëdic est en service après plusieurs semaines de travaux. Destinées aux pêcheurs professionnels et aux plaisanciers, ces nouvelles installations du port d’Hoëdic, offrent désormais 19 emplacements sécurisés et abrités sur catway. Des conditions d’accueil qui facilitent le quotidien des pêcheurs qui s’amarraient jusqu’à présent sur l’enrochement et les plaisanciers qui peuvent désormais se rendre sur l’île sans avoir besoin de leur annexe ou du service de rade du port. Depuis la création du port de l’Argol, dans les années 1970, les pêcheurs gagnaient leur embarcation à l’aide d’une annexe amarrée sur l’enrochement. Par mauvais temps et/ou par grandes marées, cette opération devenait vite périlleuse. Un ponton “pêche” était donc très attendu. L’accueil des bateaux de plaisance de passage se faisait jusqu’ici sur 3 tonnes d’amarrage (bouées métalliques sur corpsmort), complétées par quelques possibilités de mouillage entre les corps-morts des pêcheurs et des résidents permanents. Le nouveau ponton permet aussi d’accueillir entre 6 et 10 bateaux de passage sur catway (suivant les places disponibles), ainsi qu’une dizaine de petites embarcations à moteur à l’intérieur du ponton, côté

enrochement. Au vu de la fréquentation estivale, en saison, les tonnes vont rester le principal mode d’amarrage des bateaux de passage. Au nombre de quatre - une nouvelle tonne a été installée dans l’est du port pour les bateaux à fort tirant d’eau - elles permettent d’accueillir entre 60 et 80 bateaux par nuitée, selon la taille des bateaux et les conditions météos. Pour parfaire l’accueil cette saison, un désensablement du port a été réalisé ce printemps afin de rétablir les profondeurs sur les différentes tonnes. Par contre, en arrière-saison, la possibilité de bénéficier d’un emplacement sur ponton va permettre de favoriser la venue de plaisanciers de passage. En plein hiver, par vent de nord - nord-est, l’escale abritée sur catway au port de l’Argol devrait être appréciée. Afin de valoriser cet accueil en basse saison, des prestations “à la carte” vont être mises en place mais aussi d’autres nouveaux services destinés aux plaisanciers, en partenariat avec la commune d’Hoëdic (douche chaude, une pièce pour sécher les vêtements, machine à laver...). Toutes ces nouveautés seront relayées dès leur mise en service sur le site Internet du port d’Hoëdic. www.sagemor.com/hoedic.html

PORT NAPOLEON : ++ pour multicoques Port Napoléon a doublé sa capacité d’accueil de multicoques en 2011 pour atteindre 75 emplacements à la demande des propriétaires de catas et trimarans.

Envoyez vos infos à Julia@cabotages.fr.

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Les ports

Agrandissement du site, développement des installations, implantation de nouvelles bornes électriques et de points d’eau, sécurité accrue. Sorties, mises à l’eau et manutentions automatisées sont assurés par des équipes spécialisées de Port Napoléon avec 2 systèmes de levage spécifiques aux unités de grande largeur.


Formations SNSM Ne s’agit-il que de formations initiales qui s’adressent à des jeunes ?

DES BÉNÉVOLES TRÈS “PROS” Il ne suffit pas d’être un marin de bonne volonté pour être un bon sauveteur. C’est pourquoi la SNSM organise des formations très pointues, pour tous les âges et à tus les niveaux, diplômantes ou non. Nous avons rencontré Didier Moreau, responsable des formations lors du salon nautique de Paris.

Les sauveteurs de la SNSM sont pour la plupart des gens de mer. Cela en fait-t-il pour autant des sauveteurs ? DIDIER MOREAU : Non, bien entendu, si connaître la mer et les bateaux est indispensable, cela ne suffit pas. Comme vous le savez, les opérations de sauvetage de la SNSM sont entièrement assurées par des bénévoles. Cela ne veut pas dire des amateurs, bien au contraire ! Du surveillant de plage au “patron” de la plus grosse de nos vedettes, tous sont non seulement des sportifs accomplis ou des marins aguerris mais aussi des secouristes spécialement et régulièrement formés à cette sorte de sauvetage particulier qu’est le sauvetage en mer, au large comme dans les vagues du rivage. C’est pour atteindre le niveau “professionnel” que requiert notre mission que la SNSM a créé il y a deux ans et demi le Centre de Formation Opérationnelle que je dirige. Ce centre est en charge de former l’ensemble des sauveteurs, surveillants de plage ou embarqués sur les canots et les vedettes.

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DIDIER MOREAU : Non, tous les âges et tous les parcours personnels sont pris encompte. Nous proposons des formations qualifiantes qui permettent d’accéder aux qualifications SNSM par le biais de stages nationaux ou régionaux par le biais de la valorisation des acquis de l’expérience (VAE). Selon les stages, les sauveteurs embarqués peuvent ainsi prétendre au postes de patron, sous-patron, canotier, nageur de bord, sauveteur en semi-rigide, etc. Nos formations s’adressent bien entendu aussi aux nageurs-sauveteurs qui sont au nombre d’environ 1400 sur 273 postes de secours sur les plages françaises. Nous offrons aussi en supplément des formations de base, des formations particulières comme l’hélitreuillage ou être nageur-sauveteur dans les zones particulièrement dangereuses, pilote de jet-ski dans une mer forte ou dans les courants, ou sur des matériels récents comme l’IRB (inflatable rescue-boat) ou le paddle board. Pour des baigneurs en difficulté, une approche de sauvetage avec de tels matériels, tout en étant aussi performante, est moins stressante qu’une intervention avec un bateau à hélice sur lequel le sauveteur apparaît dans une position haute sur l’eau.

Comment cette formation est-elle organisée ? DIDIER MOREAU : Non, pas une école mais un système qui s’appuie sur un référentiel de qualification que nous avons établi et qui est la grille de toutes nos formations. Sur cette base, nous organisons des formations générales qui s’adressent à nos bénévoles, qu’ils soient impliqués de manière opérationnelle ou non : management et gestion, utilisation des outils informatiques, questions juridiques, communication, de crise, ou encore gestion du stress Certaines formations sont diplômantes et sont le plus souvent réalisées avec les lycées de la Mer et les écoles Hydro. Elles s’appliquent aussi bien au secteur maritime (Capitaine 200, CRO, CRR, permis hauturier ou côtier, radar...) qu’au sauvetage proprement dit - ce qu’on appelle SAR pour Search and Rescue - (secourisme, BNSSA, Survie, Sécurité incendie, OSC, voie d’eau...) ou encore à la maintenance (moteurs, pneumatiques, jets, horsbord...)

Vous avez créé une école ? Non, nous nous appuyons sur les trentedeux centres de formation et d’intervention que nous avons créés dans les principales villes de France. Dans le domaine de la formation, ces centres s’adressent directement aux bénévoles mais le Centre de Formation Opérationnelle ne forme que des formateurs. Je conseille à tous ceux qui sont intéressés de se reporter à notre site www.snsm. org.


Règles de base

10 CONSEILS POUR NAVIGUER TRANQUILLE

Cela va paraître superflu ou inutile à beaucoup qui, à tort ou à raison, connaissent tout cela par coeur... ou le croient. Mais, si on se réfère aux statistiques, les accidents de la plaisance et les victimes sont de plus en plus nombreux chaque saison (voir pages 10 et 11). FAIRE SA MÉTÉO : Renseignez-vous sur la météo avant de sortir en mer. Elle est affichée à la capitainerie, mais vous pouvez aussi recevoir les bulletins de MétéoFrance sur une application gratuite pour les téléphones et les tablettes. Les bulletins peuvent aussi être écoutés sur le téléphone portable ou sur le canal 16 de la VHF à heure fixe. AVERTIR SES PROCHES : Avertissez vos proches de votre destination et de l’heure prévue de votre arrivée. N’oubliez pas de les informer que vous êtes à bon port ou de vos changements de projets. Quand vous passez à proximité d’un sémaphore, signalez-vous, donnez le nom de votre bateau, le nombre de personnes à bord et votre destination. VÉRIFIER LE MATÉRIEL : Votre matériel de sécurité doit être en bon état et rapidement accessible par tous les membres de l’équipage qui doivent savoir s’en servir. VÉRIFIER LE MATÉRIEL : Vérifiez son bon état et apprenez son mode d’emploi. En cas de problème vous gagnerez un temps précieux et augmenterez vos chances de survie.

TENEZ-VOUS AU BATEAU : Une main à la manoeuvre, une main au bateau ! Et, quand il faut lâcher les deux mains, le harnais doit pouvoir s’accrocher à une ligne de vie, un étai, n’importe quoi de fixe et solide. Combien de chutes du pont pour un imprudent pipi par-dessus bord ! De récents exemples rappellent que ça peut être une mort peu héroïque ! UTILISEZ UNE VHF : Équipez-vous d’une VHF. C’est le moyen le plus fiable pour prévenir les secours (canal 16). Contrôlez-la avant de prendre la mer en appelant la capitainerie ou le sémaphore en quittant le port. Si on vous répond “fort et clair”, partez tranquille. A défaut, composez le 112 sur un téléphone portable - sous réserve qu’il y ait couverture par votre réseau. Mais attention au portable, il n’est reçu que par une seule personne et permet difficile-

ment le repérage de l’appelant. En revanche, la VHF est reçue partout à a ronde, y compris d’autres bateaux dans les parages, et permet votre localisation immédiate par triangulation. ATTENTiON À LA CONSOMMATION : Connaissez la consommation de votre moteur et votre rayon d’action compte tenu de vos réserves en carburant. Ne stockez pas d’essence plus que nécessaire et ventilez systématiquement avant son emploi. NE SOYEZ PAS SEUL À SAVOIR : Soyez au moins deux à savoir naviguer. Sinon indiquez à vos passagers comment stopper les moteurs, mouiller l’ancre et appeler les secours sur la VHF. Plus vous leur apprendrez de choses sur la conduite du bateau, plus la sécurité sera assurée. LE BATEAU EST VOTRE SÉCURITÉ : En cas de problème, ne quittez votre navire qu’en dernier recours. C’est-à-dire si elle coule. Jamais avant. Si vous chavirez, restez accroché à votre bateau en attendant les secours. Une embarcation se repère plus facilement qu’un homme à la mer. Après des tempêtes, on a souvent retrouvé des bateaux vides... et des noyés qui n’avaient pas assez fait confiance à leur embarcation. et peut-être trop à leur radeau de survie !

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Sécurité

PORTEZ VOTRE BRASSIÈRE : Portez votre brassière. Cela, presque personne ne le fait, surtout l’été. On voit même des

enfants agrippés au balcon avant des vedettes, secoués par les vagues, sans gilets... Par temps calme, si on reste dans le cockpit, si on est plusieurs à bord à se surveiller, on a des circonstances atténuantes. Mais si ça bouge un peu, qu’on est en équipage réduit, qu’on va brasser de la toile à l’avant, il serait coupable de ne pas porter un de ces gilets-harnais automatiques, légers, et pas trop désagréables à porter même torse nu...



BATEAUX Trois voiliers d’occasion que vous pouvez acquérir en déboursant entre 3 000 et 13 000 € pour vous faire plaisir et caboter en sécurité.

P

Adorable Sun 2000

Fiche technique : Chantier Jeanneau Architecte : Olivier Petit Longueur de coque : 6,20 m Longueur à la flottaison : 5,95 m Largeur : 2,55 m

Poids lège : 1 150 kg Lest : 350 kg Surface de grand-voile : 14,10 m2 Surface de génois : 9,00 m2 Prix : 18 840 € Prix occasion : 11 000 €

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Bateaux

our l’heure, le Sun 2000 figure encore au catalogue du chantier Jeanneau. Mais ces jours semblent comptés. Ce serait bien dommage : après la disparition du Sun 2500, la gamme du constructeur vendéen démarrerait à 30 pieds ! Du jamais vu chez le constructeur du Sangria, du Microsail ou encore du Tonic 23… Lancé en 2000 comme le laisse entendre son vocable – qui rappelle également sa longueur de 20 pieds, le plus petit des Sun est un dériveur intégral sobre et efficace. Large cockpit – et long aussi, il mesure 2,50 m -, accastillage ultra simple, gréement élancé avec un foc sans recouvrement, ce bateau sait simplifier la vie de son équipage. Et celle du chantier : la pelle et la cage de safran sont empruntée au First 211. En navigation, malgré son centre de gravité haut perché, il est plutôt raide à la toile. Capable de bien caper au près grâce à sa dérive profilée, le 2000 est également à l’aise au portant. Établir son petit spinnaker de 32 m2 amuré sur un bout-dehors est un jeu d’enfant, ne vous privez donc pas de l’envoyer. Du côté des performances, l’état de la surface de la galette en fonte et du joint qui fait la liaison avec le polyester est primordial… et pourtant trop souvent négligé. Rien ne sert de commander des jolies voiles si la carène n’est pas nickel. A l’intérieur, quatre couchettes, une table, une petite cuisine et quelques rangements vous motiveront à passer quelques nuits à bord. La spécialité du Sun 2000 ? Vous emmenez au fond des petites criques, là où plus aucun quillard ne s’aventure. Un joli programme de cabotage pour un prix qui gardera vos finances à la flottaison...


BATEAUX

V

ous rêvez d’être propriétaire d’un Pen Duick ? Le 600 est fait pour vous ! Conçu en 1976 par Éric Tabarly et Gérard Petitpas, le fidèle lieutenant du navigateur, ce petit quillard répond à un cahier des charges original : le voilier doit être marin, très costaud, mais accessible au plus grand nombre. Un mini Pen Duick pour tous, en quelque sorte.

À l’intérieur, la hauteur sous barrots se limite à 1,27 m. On compte quatre couchettes – la pointe avant est forcément un peu étroite –, un bloc cuisine qui coulisse sous le cockpit et une petite table. Les vaigrages ? Ils sont le plus souvent approximatifs… Alors au boulot ! Pour environ 3 000 € au prix moyen de l’occasion offrez-vous un caboteur indestructible !

Increvable Pen Duick 600 La construction en aluminium est inédite. C’est un mode de fabrication qui, souvent, fait monter les prix. Pas dans le cas du Pen Duick 600. Afin de simplifier l’assemblage, le bateau est constitué de cinq tronçons. L’avant, tout comme l’arrière, le pont et le tableau arrière sont élaborés à partir d’une simple tôle – développable. Seul le milieu du bateau nécessite un travail de chaudronnerie plus complexe. Bilan, le 600 hérite d’une étrave très pincée, d’une carène très ronde et d’un maître-bau reculé. Des caractéristiques qui lui vont bien par petit temps, aux allures près du vent et dans la clapot. En revanche, le bateau est gîtard dès 15 nœuds de vent. Le lest peu profond – moins d’un mètre - mériterait 50 ou 100 kg de plus. Alors pour compenser, rappel obligatoire… ou réduction de toile. Le plan de pont flush est bien pensé, tout comme le cockpit à un seul étage.

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Fiche technique : Chantier : Le Guen & Hémidy Architecte : Dominique Presles Longueur de coque : 6,00 m Largeur : 2,25 m Déplacement : 700 kg Lest : 225 kg Tirant d’eau : 0,90 m Surface de grand-voile : 7,50 m2 Surface de génois : 10,50 m2 Prix occasion : 3 000 €


Vaillant Arpège

Tirant d’eau : 1,35 ou 1,50 m Poids lège : 3,30 ou 3,60 t Lest : 1,20 ou 1,50 t Surface de grand-voile : 17,00 m2 Surface de génois : 31,50 m2 Prix occasion : 13 000 €

eter son dévolu sur un voilier de plus de 40 ans n’est pas une affaire évidente… On craint de tomber sur un loup, et il faut reconnaître qu’ils sont parfois au rendezvous. Autant les débusquer tout de suite. On se méfiera avant tout des ponts délaminés, une faiblesse fréquente sur ce modèle du sandwich balsa/polyester. Réparable (injection d’époxy ou carrément remplacement du balsa par des pains de mousse), mais à grands frais. Autre bête noire : les moteurs d’origine, pour la plupart à bout de souffle. Pour le reste, l’Arpège, diffusé à 1500 exemplaires, est un excellent choix. D’abord il est particulièrement élégant. Ensuite il marche plutôt bien sous voiles – nette prédilection pour le près, surtout dans la brise, où il tient tête à des voiliers bien plus récents. Enfin il se révèle très confortable en navigation. Ses emménagements cloisonnés offrent une grande table à cartes, une cuisine opérationnelle même à la gîte, un carré pour six personnes et des vraies couchettes… de mer. Pas de grande banquette double pour un couple, mais des toiles anti-roulis. Les premiers modèles construits jusqu’en 1969 sont sensiblement moins toilés et portent un lest un peu plus court. On les reconnaît à leur tableau classique, alors que la version construite jusqu’en 1976 présente un tableau inversé. Les tous derniers modèles profitent d’un plan de pont plus moderne et d’un lest augmenté. A vous de choisir le modèle qui vous convient !

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Bateaux

Fiche technique : Chantier : Dufour Architecte : Michel Dufour Longueur de coque : 9,25 m Longueur à la flottaison : 6,70 m Largeur : 3,00 m

J


LE NAUTIBLOG

www.cabotages.fr modératrice julia.chaine@cabotages.fr

LA VOILE LATINE : DU CARRÉ AU TRIANGLE Voici un article que nous avions écrit dans l’une de nos éditions gratuites de l’été et qui a suscité une réaction de lecteur sur notre site web www.cabotages.fr VOILES ET VENTS, DU CARRÉ AU TRIANGLE Comment est-on passé de la voile carrée de l’Antiquité à la voile latine triangulaire ? Toutes les parties du monde et toutes les époques ont eu leurs voiles. Avec les moyens du bord et les matériaux disponibles, les navigateurs ont cherché à utiliser au mieux les vents dominants de leur zone de navigation. Ce qui est adapté ici ne convient pas là. En se sophistiquant, la voilerie s’est aussi adaptée aux programmes des navires et aux soucis de leurs armateurs : traversées hauturières, cabotage lourd, guerre de manœuvres, course commerciale… La carène est, certes, un élément déterminant. Mais un même plan de bateau avec des voiles plus appropriées sera plus performant. Ce fut par exemple le cas des schooners (goélettes) américains qui portaient de gréements auriques : par leur agilité à louvoyer entre les îlots, les goélettes battaient les navires anglais qui faisaient le blocus des côtes du Massachusetts. Leurs navires gréés carré pour traverser l’Atlantique au portant étaient patauds entre les bancs de sable de la côte ouest-américaine. En remontant plus loin dans le temps, l’archéologie a révélé que les premières voiles étaient rectangulaires. Des “draps” portés en haut du mât par une vergue en “T” sur les gros navires, une livarde sur les petits. Toute la Méditerranée est pleine de représentations ou d’épaves de tels bateaux. Et pourtant, la voile improprement dite “latine” est triangulaire avec une antenne inclinée vers l’avant comme un étai de foc qui serait réglable en angulation. Question : comment est-on passé de l’une à l’autre ?

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Non, aucun génial inventeur ne s’est dit un jour, en étendant son linge, comme Newton ou Archimède « bon sang, mais c’est bien sûr ! ». Une réponse possible – fort vraisemblable – est donnée par Robert Roman, docteur en archéologie, spécialiste  d’archéologie  navale antique méditerranéenne au CNRS d’Aix-en-Provence. Il explique que les voiles, à la manière des stores vénitiens, étaient manœuvrées par

(pas de plis) pour les allures contre le vent, mais un triangle pointe en bas offre moins de surface au vent portant qu’un vrai carré. Mais un bateau est toujours un compromis ! À cet article, Mathieu, assidu lecteur et fin observateur, nous a fait remarquer la chose suivante : « il doit y avoir une erreur dans le schéma du CNRS, car la partie “roulée” de la voile carrée transformée

Maquette Musée de l’Éphèbe Le Cap d’Agde

des cargues, cordages passés à travers des anneaux. En bordant inégalement ces cargues, certaines parties de la voile se relevaient plus que les autres. On pouvait ainsi relever totalement la toile à une extrémité de la vergue et la laisser entièrement déployée à l’autre, créant ainsi une forme triangulaire. Ce triangle pouvait ensuite pivoter en inclinant la vergue. Et enfin, en abaissant cette dernière le long du mât, on obtenait ce qui ressemblait de très près à une flèche de voile latine (voir les 4 dessins). Ainsi,  les  navires  de  commerce pouvaient  effectuer  les  grandes traversées au portant avec toue la puissance d’un gréement carré et louvoyer le long des côtes en configuration triangulaire. Certes, une voile latine taillée d’origine en triangle est plus efficace

en voile triangulaire devient alors le bord de “chute” de la voile, celui par lequel s’échappe le vent, entré par le guindant, c’est-à-dire la vergue inclinée. Or, il vaudrait mieux pour une bonne aérodynamique que les plis se trouvent en bas, presque à l’horizontale, en position de “bordure”, ce qui, pas plus que le bas d’une grand voile arisée, ne serait gênant. En revanche, rien ne viendrait troubler le flux du vent du guindant vers la chute » Bravo, bien vu. Mais cela impliquerait qu’à chaque virement de bord, il faudrait redéployer la voile en carré et la “froncer” à nouveau de l’autre côté. On peut imaginer que, pour des bords serrés, on pouvait garder un seul réglage, avec un “bon” et un “mauvais” côté de marche... Le débat reste ouvert : www.cabotages.fr ou par mail : redaction@cabotages.fr


SUR L’AGENDA 10e édition SALON NAUTIQUE LES NAUTICALES – LA CIOTAT Du 17 au 25 mars 2012

4e Salon à flot français, et 1er Salon à Flot du Printemps en Méditerranée, il marque l’ouverture de la saison nautique avec cette année plus de 200 exposants répartis sur quatre hectares d’exposition présentent à terre et en mer leurs produits et nouveautés. Pour ses 10 ans Les Nauticales accueillent un parrain de prestige: Luc Alphand. Côté sports nautiques, ce sera la 2e édition du Trophée des Nauticales. Rens: 04 91 76 16 00 www.salon-lesnauticales.com contact@safim.com 18e édition LES NAUTIQUES DE PORT-CAMARGUE Du 6 au 9 avril 2012

FESTIVAL ARMEN ST TROPEZ

SOLO FIGARO MASSIF MARINE

Du 10 au 18 mars 2012

Du 13 au 17 mars 2012.

Au programme trois épreuves alliant trois thèmes différents :

Classique du calendrier de la Classe Figaro Bénéteau sur la côte Atlantique, la Solo Figaro Massif Marine fête cette année sa 10e édition du 13 au 17 mars 2012 organisée par les Sports Nautiques Sablais. Première course de la saison préparatoire et qualificative à la Solitaire du Figaro. Cette année, l’épreuve est ouverte aux équipages en double qui souhaitent s’entraîner en vue des grandes courses de l’année. Un parcours réduit sera proposé le samedi 17 mars aux solitaires et aux doubles sur les Mini 6.50, classe très appréciée des Sablais depuis la première édition en 2006 de la course Les Sables - Les Açores - Les Sables organisée également par les Sports Nautiques Sablais.

Epreuve nautique : Une régate se déroulera lors du premier week-end au départ de Saint-Tropez jusqu’à Cavalaire avec un retour le lendemain. Epreuve de ski : Entre temps, deux équipiers de chacun des bateaux en lice, devront chausser les skis pour un slalom, mis en place par l’équipe d’Isola 2000 ! Epreuve artistique : La réalisation d’une œuvre d’art autour des thèmes de la mer – montagne, permettra de dévoiler la fibre artistique de chacun des participants.  L’œuvre  ar tistique  des concurrents sera exposée au même titre que celles des professionnels et sera notée par un jury. Rens : Société Nautique de St Tropez - 04 94 97 30 54 - snsttropez@aol. com www.societe-nautique-saint-­tropez.fr

Rens : Sports Nautiques Sablais sportsnautiquessablais@orange.fr 02 51 21 63 00 http://solofigarolessables.blogspot. com

Au programme : 650 bateaux neufs et d’occasion exposés par plus de 100 particuliers et professionnels. Port Camargue est devenu un passage obligé régional pour vendre ou acheter un bateau. Les Nautiques de Port Camargue sont organisées en quatre villages nautiques où les professionnels proposent : accastillage, voilerie, moteurs, permis bateaux, électronique, expertises, loisirs, mode marine, etc... Les Nautiques sont devenues aussi au fil des années un lieu de promenade familiale dans le plus grand port de plaisance d’Europe. Entrée, parking et navettes gratuits. 10 h à 19h. Rens : 04 66 51 81 65 www.lesnautiques.com lesnautiques@wanadoo.fr 22e édition

FESTIVAL DU BATEAU D’OCCASION / MOTONAUTISME MANDELIEU - LA NAPOULE Du 5 au 9 avril 2012

SALONS EN BREF Lyon Salon International des Loisirs d’Eau Du 20 au 22 janvier 2012 www.loisirs-deau.com Nantes Salon Européen des Pêches En Mer Du 27 au 29 janvier 2012 www.salon-peche-mer.com Vannes Salon Nautique Bretagne-Sud 18 au 20 mars Paris JEC Composites Show Du 27 au 29 mars 2012 www.jeccomposites.com Madrid Salon Nautique De Madrid Du 14 au 18 mars 2012 www.ifema.es Paris MAP PRO Le Monde A Paris 2011 Du 15 au 18 mars 2012 www.lemondeaparispro.com Port d’Etel Salon du Bateau Transportable Du 14 eu 15 avril 2012 www.salon-du-bateau-transportable-d-etel.com Lorient Salon Atlantique du Multicoque 18 au 22 avril 2012 www.le-salon-atlantique-du-multicoque.com Hendaye Salon Nautique d’Hendaye Du 28 avril au 1er mai 2012 www.salonnautique.hendaye.com La Rochelle Bateau Passion Bateaux Occasion Du 15 au 17 avril 2012 www.bateaupassion.com

Plus de 80 professionnels et plus de 200 marques, 400 unités neuves ou d’occasion sont attendus. Importateurs, brokers, distributeurs et constructeurs de bateaux, accessoires, équipements, accastillage… mais aussi animations et restauration... Rens : 04 93 93 64 64 – Entrée gratuite www.salondubateau.fr

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EDF PARTENAIRE DU 6ème FORUM MONDIAL DE L’EAU Première des énergies renouvelables, l’énergie hydraulique, souple, compétitive et non-émettrice de gaz à effet de serre, est un élément indispensable à la sûreté et à l’économie globale du système électrique français. EDF produit près de 10 % de son électricité à partir de l’énergie hydraulique. La production hydraulique française d’EDF contribue à placer la France au rang de 1er producteur d’électricité renouvelable de l’Union Européenne. Elle participe à l’atteinte des objectifs nationaux prévus par la directive européenne et par le Grenelle de l’environnement sur les énergies renouvelables, en vertu de laquelle 20 % de l’électricité devra être produite à partir de sources d’énergie renouvelable d’ici 2020.

Organisé tous les 3 ans par le Conseil Mondial de l’Eau, le Forum Mondial de l’Eau se tiendra à Marseille du 12 au 17 mars 2012. Acteur majeur de la ressource en eau en France et dans le monde, EDF s’est associé à l’événement et s’engage comme partenaire dédié de ce 6ème Forum Mondial de l’Eau. EDF, UN PRODUCTEUR ET GESTIONNAIRE SOLIDAIRE DE LA RESSOURCE EN EAU Bien commun à tous, l’eau fait l’objet d’un partage solidaire, destiné à assurer les besoins de plusieurs usages. Au-delà de sa mission première de produire de l’énergie, EDF garantit la redistribution de l’eau sur les territoires où le groupe est présent. En région ProvenceAlpes-Côte d’Azur, la chaîne de production de la Durance et du Verdon et les aménagements situés dans le Var et les Alpes-Maritimes,

représentent un atout fort pour le territoire. Ils constituent sa première source de production d’énergie renouvelable. La gestion multi-usages de la ressource en eau de la Durance et du Verdon est un véritable modèle de partage : production d'énergie, alimentation en eau potable et agricole, tourisme. Au quotidien, EDF concilie l'ensemble de ces enjeux au service de l'intérêt général.

EAU ET ÉNERGIE, UNE ALLIANCE GAGNANTE POUR L’AVENIR La ressource en eau est au cœur des enjeux de production du parc industriel d’EDF. • A l’origine de la production d’hydroélectricité ou utilisée pour refroidir les centrales thermiques ou nucléaires, l’eau est une ressource essentielle pour la production d’énergie. • L’énergie est un moteur indispensable pour les différents usages de l’eau : l’agriculture (pompage, arrosage, irrigation), l’eau potable (dépollution, dessalement, assainissement…) et l’eau chaude sanitaire.

EDF, UN ACTEUR ENGAGÉ DANS LE DÉVELOPPEMENT DURABLE 1er producteur d’énergie renouvelable, EDF est un acteur responsable et engagé dans le développement durable, depuis de nombreuses années. Régulièrement des actions sont menées par le Groupe EDF, en France et à l’étranger pour démocratiser l’accès à l’énergie dans les pays en développement.

CLUBS NAUTIQUES : CLUB NAUTIQUE SAINT-CAST REGATES 2012

02 96 41 86 42 / 02 96 41 71 71

MATCH RACE (Monotype et habitable) : 21 et 22 janvier 2012 : Sélective Match Racing 15 et 16 septembre 2012 : Ameri’Cast Cup Grade 3 Internat. GRAND PRIX DE SAINT CAST (monotype et HN + IRC) : Du 28 avril au 1er mai 2012 EMERAUDE FUN CUP (Fun Board) : 17 juin et 21 octobre 2012

REGATES CLUB (Regates HN et monotype) 25 et 26 février 2012 : Régate de février 24 et 25 mars 2012 : Régate de Printemps 30 juin et 1er juillet 2012 : Régate d’Eté 6 et 7 octobre 2012 : Régate d’Automne 10 et 11 novembre 2012 : Régate de Novembre 15 et 16 décembre 2012 : Régate de Noël

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CLUB NAUTIQUE DE LORIENT

YACHT CLUB CARNAC

LES SABLES D’OLONNE

REGATES VOILES HABITABLES

26e édition EUROCAT 2012 28 avril au 1er mai Quatre jours d’épreuves dont un jour de raid ! L’Eurocat, la grande fête du catamaran de sport réunira près de 300 équipages. Rassemblement du catamaran de sport dans toutes les séries existantes. Parcours techniques et raid, tous les pratiquants, régatiers ou amateurs, se retrouvent durant cette fête du multicoque de sport. Rens : 02 97 52 10 98

SAINT-JEAN-DE-MONTS

02 97 84 81 30 Janvier : 21 – 22 Championnat d’hiver Février : 4-5-18-18 Championnat hiver Mars : 3-4-17-18 Championnat hiver Mars : Lorient Navy Cup 24-25 mars

Coupe De France Des Etudiants 24-25 mars VOILE LÉGÈRE,

AVIRON, KAYAK DE MER 5 Février : Champ. Dép. Slalom Kerguélen C.N. Lorient 12 Février : Champ. Dép. Slalom Kerguélen C.N. Lorient 25 et 26 Février : Interligue de Lasers Kerguélen C.N. Lorient 11 Mars : Champ. Dép. Dériveurs D2 Kerguélen F.L. Lanester 11 Mars : Champ. Rég. Windsurf Glisse Kerguélen - C.N.Lorient

STE NAUTIQUE LAMOR PLAGE 1er avril Régate de ralliement Larmor/La Trinité. Souvenir Philippe Guyban S.N. Larmor-Plage Rens : 02 97 65 42 38 STE NAUTIQUE LOCMIQUELIC 11 au 14 avril Demi-clé 6.50 Rens : www.cnml.eu CN CANET EN ROUSSILLON Régate : 12 février Rens : CNCP BP 210 – 04 68 73 33 95 - cncp66@wanadoo.fr Rens. : 04 67 68 97 38

Photos © Conty Bruno / Martin Patrick A. / Baratier Laurent

EDF, 1er PRODUCTEUR D’HYDROÉLECTRICITÉ EN EUROPE

CHAMPIONNAT DE FRANCE DE VOILE ETUDIANT 3 et 4 mars de 8h à 18h : voile habitable. Port Olona - Tél. : 02 51 21 63 00 www.sportsnautiquessablais.com

INITIATION CHAR A VOILE MERCREDI KID’S 19 février 2012 Initiation pour les 8/12 ans au char à voile de 45 mn sur la grande plage de Saint-Jean-de -Monts. Inscriptions à l’Office de tourisme : 0826 887 887 SAINTE-MAXIME RÉGATE COUPE DU MIMOSA 10 février 2012 L’Euro Master Laser Séries 2012 se déroulera dans le Golfe de Saint-Tropez à Sainte-Maxime. Club Nautique de Ste-Maxime 04 94 96 07 80 cnsm83@laposte.net

Pour faire paraître ici vos informations : contact@cabotages.fr


SUR L’AGENDA

SAINT-RAPHAEL DÉCOUVERTE DE LA PÊCHE PROFESSIONNE Tous les matins, chaque mardi et vendredi, embarquez à bord d’un bateau de pêche traditionnel à la découverte des splendeurs de la côte varoise. Partagez avec le pêcheur toute la passion de son métier, ses connaissances sur l’environnement marin ainsi que toute la culture de son activité ancestrale. Durée de la visite : de 3 à 5h. Réservation nécessaire. Prix : 60€. Rens : Office de tourisme 04 94 19 52 52

SAINT TROPEZ 900 MILLES EN MEDITERRANEE Du 24 au 03 avril 2012 La Société Nautique de Saint-Tropez organise une course au large en Méditerranée de 900 milles sans escale. Cette régate est ouverte aux monocoques ou monotypes en double ou en équipage. Deux parcours différents ont été établis. Un seul sera choisi quelques jours avant en fonction de la météo. Les voiliers prendront le départ de Saint-Tropez le samedi 24 mars, en direction des Baléares (ou de la Sardaigne) avant de remonter la Corse sur le versant Est (ou l’Italie sur le versant ouest). Le retour des voiliers à Saint-Tropez aura lieu au début du mois d’avril. Cette épreuve est l’un des plus beau rendez-vous annuel de la saison de la SNST. Société Nautique de Saint-Tropez 04 94 97 30 54 snsttropez@aol.com www.societe-nautique-saint-tropez.fr

AGENDA NAUTIQUE JANVIER-AVRIL : AGDE - GRAU D’AGDE CAP D’AGDE RÉGATE DES HUÎTRES 22 janvier 2012

RÉGATE DES ZÉZETTES 05 février 2012 RÉGATE DE LA SNSM 04 mars 2012

RÉGATE DU MONT ST-LOUP 15 avril 2012 Lieu : Centre Nautique Avenue du Passeur Challiès Le Cap d’Agde Inscriptions de 8h30 à 9h30. Départ à 11h. Organisée par la Sorac. Plus d’info : 06 87 53 74 96

RAME TRADITIONNELLE manche du champat de France 25 mars 2012 (le matin) Lieu : Sur l’Hérault, face à la Cathédrale Saint-Etienne - Agde Plus de 500 compétiteurs en lice dans cette manche du Championnat disputée sur le fleuve Hérault. Organisée par la Société Nautique des Jouteurs Agathois, sous l’égide de la Fédération Française de Joutes et de Sauvetage Nautique. ANTIBES MEDITERRANEA Du 29 mars au 1er avril 2012 Colloques, projections de films, reportages, documentaires, diaporamas, expositions de peintures, photographies et librairie, voyages, matériels de plongée... Rens : Office de Tourisme et des Congrès 04 97 23 11 11

MARSEILLE

BERCK SUR MER 26e RENCONTRES INTERNATles DE CERFS-VOLANTS Du 7 au 16 avril 2012 Rens : : 03.21.09.50.00 tourisme@berck-sur-mer.com CAP BRETON CONNAISSANCE DES POISSONS 12 avril 2012 Proposée par les pêcheurs de Capbreton et les Toqués de l’Océan. Une présentation des poissons originale. Rens : 05 58 72 12 11 capbreton.tourisme@wanadoo.fr

MED CUP PLANCHE A VOILE Du 24 au 26 février Au départ du YCPR, quelques 150 véliplanchistes sont attendus en rade sud de Marseille pour affiner leur entraînement hivernal et peaufiner leurs objectifs pour la saison 2012. Info : Yachting Club de la Pointe Rouge section voile Tel : 04 91 73 06 75 sport@ycpr.net - www.ycpr.net MASSILIA CUP 2012 Du 22 au 25 mars Rens : CNTL Marseille Vieux Port 04 91 59 82 00 - contact@cntlmarseille.com.

LA GRANDE MOTTE 22 Janvier CHALLENGE JEUNES RAMEURS Avec l’Association d’Aviron de La Grande-Motte, plus de 150 participants sur l’étang du Ponant de 9h30 à 17h. Près de la base d’Aviron (côté Accrobranche) Rens : 04 67 56 42 00 29 Janvier CHALLENGE BAIE D’AIGUES-MORTES Régates sur habitables HN Infos : wwww.ycgm.fr LA ROCHELLE ILE DE REGATE Du 16 mars au 18 mars Pôle Voile 102, rue de Coureille Tél. : 07 60 96 00 17 polevoile@gmail.com

PALAVAS LES FLOTS 22 Janvier 2012 Régate du Cercle Nautique de Palavas “Automnales et hivernales de Palavas”

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LIVRES DE BORD Les Sémaphores de Méditerranée Djinn et Christophe Naigeon Éditeur : Gerfaut 100 pages 22 x 22 cm : 19 € Les phares, tout le monde connaît. Mais qui sait ce que sont les sémaphores, à quoi ils servent et qui sont les guetteurs qui les habitent ? Alors que les phares sont automatiques, dans les sémaphores, 24 h / 24, des équipages de la Marine se relaient pour veiller sur tout ce qui navigue, militaire ou civil, de com-

merce ou de plaisance, du Charles de Gaulle au kitesurf, du supertanker au chalutier, du rafiot des boatpeople au go-fast des trafiquants. Et nous, plaisanciers, ils nous observent avec leurs puissantes jumelles, ils nous écoutent quand nous les appelons sur le canal 16 de la VHF et ils centralisent les informations utiles à tous les services de sauvetage si survient une fortune de mer. Ce livre est une croisière tout le long de la Méditerranée continentale et de la Corse la rencontre des dix-neuf sémaphores et de leurs équipages. Un carnet de bord qui révèle des sites extraordinaires, des histoires de mer, des hommes et des femmes qui font l’étrange métier d’être des marins immobiles.

Sémaphores de Méditerranée Une croisière en Roussillon, Languedoc, Provence, Côte d’Azur et Corse à travers les dix-neuf sémaphores de la Méditerranée française

Je vous écris des bords de mer Sabine Arqué, Marc Walter Editeur : La Martinière 288 pages 28 x 24 cm - 42 € Ce livre est un voyage littéraire autour du monde à travers les récits des plus grands écrivains, illustrés de photographies anciennes, de reportages contemporains, et de pages d’albums de voyageurs : Victor Hugo, Chateaubriand, Maupassant, Pierre Mac Orlan, Dickens, Raymond Dorgelès, Pierre Loti, Hemingway, Jack London, Virginia Woolf, Paul Claudel, Thomas Mann, Hermann Hesse, Marcel Proust, Marguerite Duras, Albert Camus, Michel Tournier, Yann Queffélec, Le Clézio... De tout temps les grands auteurs ont écrit sur la mer, vécu au bord de la mer, trouvé en elle l’une de leurs sources d’inspiration. Les bords de mer – de toutes les mers du globe – sont des lieux privilégiés de villégiature, de mémoire et d’aventure.

Traversées atlantiques ou pacifiques, jours de tempête ou de calme  plat,  vagabondages  dans l’océan Indien, flâneries le long des rivages de la Méditerranée, séjours dans les ports et les grandes stations balnéaires d’Europe et des États-Unis, escales à Madagascar, à Maurice, en Polynésie, aux Antilles, à Coney Island... ce livre propose au lecteur de retrouver quelques-unes des plus belles pages écrites sur ce thème inépuisable. Un voyage en littérature accompagné de photographies “vintage” et actuelles, et de documents touristiques pour revivre en images les belles heures des bords de mer. Nous, on a adoré. Ce n’est pas le genre de “beau livre” qu’on feuillette distraitement et qu’on abandonne. C’est un livre de chevet qu’on grappille au gré des ports... où l’on aimerait aller, le plus souvent. Et, chose rare, il donne envie de lire les originaux intégraux de ces ouvrages. Ne vous en privez pas ! La Côte d’Azur à la lumière de ses régates C. Aubry / Photos de P. Gauthey Modopublishing.com 54 pages, 30 x 30 cm, 600 € Un “livre-bijou” imprimé sur des pages d’argent pur... Le cadeau Bling-bling de la rentrée à 40 € le kilo ! Si les fêtes et la crise vous ont laissé de l’argent à jeter par-dessus bord, allez-y ! Voilà, c’est dit.

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LES SÉMAPHORES DE MÉDITERRANÉE

Djinn et Christophe Naigeon

POUR LES MOUSSAILLONS

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Tentacules de la science à la fiction Pierre-Yves Garcin, Michel Raynal Éditeur Gaussen Collec. Les Musées de l’Imaginaire 144 pages, 20 x 26 cm, 29 € De Jules Verne et son “ Vingt mille Lieues sous les Mers” aux films de série B comme “Méga requins contre Maxi calamars”, les bêtes marines à tentacules fichent la trouille, inspirent les écrivains et scénaristes, intéressent les scientifiques. Ce livre, qui fait la part belle aux oeuvres de fiction, est aussi une enquête sur la réalité de ces animaux à haute valeur fantasmatique. À recommander à tous ceux qui ont gardé un coeur d’enfant !


2011

www.salon-lesnauticales.com


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Conception et réalisation ADT «Var Tourisme», Photos : LCI/ADT «Var Tourisme», C. Raoulison : Six-Fours-les-Plages - Lagune du Brusc

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