#67 | 58e prix 1,50 euro
mai 2014 année | avril-
BELGIE-BELGIQUE P.B. 1/9352 BUREAU DE DÉPÔT BRUXELES 7 P006555 AVR-MAI 2014
sommaire
#67
née prix 1,50 euro | 58e an avril-mai 2014
3 Edito par La Gauche Elections 2014: Trois scrutins, un enjeu par Daniel Tanuro 4
Marche et meeting pour un plan d’urgence sociale: un beau succès! 7 Qui sont les candidat.e.s de la LCR-SAP pour le 25 mai? 8 par Mauro Gasparini Revendiquer la Charte de Quaregnon par Mathieu Desclin 1 0 Entre maximalisme et minimalisme, quelle stratégie? 1 2 par La Gauche Dossier: analyse critique du programme du PTB 1 3 Aidez-nous! 1 6 Dossier: analyse critique du programme du PTB 1 8
2 0 Réduction généralisée et radicale du temps de travail! par Denis Horman 2 3 Bosnie-Herzégovine: réinventer la démocratie! par Matilde Dugaucquier 2 6 Il y 40 ans, la révolution portugaise enflammait nos espoirs par Guy Van Sinoy 3 0 A l’action! Agenda / Lectures 3 1
cover photo: Guy Van Sinoy
back cover photomontage: Little Shiva
photo source d'Olivier Besancenot: MILO photo source de Ken Loach: www.filmladen.at
Ont contribué à ce numéro: Sébastien Brulez, Céline Caudron, Mathieu Desclin, Matilde Dugaucquier, Pauline Forges, Mauro Gasparini, Els Goeman, Denis Horman, Rafik Khalfaoui, Freddy Mathieu, Little Shiva, Daniel Tanuro, Guy Van Sinoy La Gauche est le journal bimestriel de la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR), section belge de la Quatrième Internationale. Les articles signés n’engagent pas forcément la rédaction. Adresse et contact: 20 rue Plantin,1070 Bruxelles info@lcr-lagauche.org Tarifs et abonements: 1,5 € par numéro; 8 € par an étranger: 18 € par an Abonnement de soutien: 15 euros A verser sur le compte ABO LESOIL 20, rue Plantin, 1070 Bruxelles IBAN: BE93 0016 8374 2467 BBAN: 001-6837424-67 BIC: GEBABEBB mention “La Gauche” La Gauche est éditée par la Formation Léon Lesoil
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Football panique au Boulevard de l'Empereur par Guy Van Sinoy 6
photomontage: Little Shiva
✒ par La Gauche
du capitalisme en crise fait peser un danger majeur sur le monde du travail.
Le 25 mai prochain, la gauche a une chance d’élire des représentant∙e∙s dont les actes seront conformes à leurs paroles. Des représentant∙e∙s qui s’opposeront à l’austérité. Des représentant∙e∙s qui relaieront les luttes et les revendications des 99%. Des représentant∙e∙s qui oseront s’attaquer aux diktats de la troïka. Des représentant∙e∙s qui se battront pour que la facture de la crise soit payée par les riches et les capitalistes qui en sont responsables. Cette chance peut se concrétiser en votant pour les listes PTB-GO! (Gauche d’Ouverture). Ne la gaspillons pas. A celles et ceux qui hésitent parce qu’ils craignent de faire le jeu du MR, de la N-VA ou de la droite extrême, nous disons: ne vous laissez pas endormir par des promesses, ni intimider par des menaces. Oui, il y a le danger d’un gouvernement plus à droite, oui il y a le danger d’une régression sociale encore plus dure, oui il y a un danger de scission du pays et de la sécurité sociale… Mais ces dangers-là ne seront pas conjurés en votant pour le "moindre mal", car c’est le "moindre mal" qui les nourrit. Quand la gauche mène une politique de droite, elle désespère son camp et fait le lit de la droite. Le "moindre mal" devient alors le "moindre moindre mal", puis le "moindre moindre moindre mal", et ainsi de suite jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de différence entre la politique de la "gauche" et celle de la droite: elles sont toutes deux néolibérales, et ont toutes deux pour résultat que les riches deviennent plus riches et les pauvres plus pauvres. On en est là. En Espagne, au Portugal, en Grèce, en Allemagne, en Grande-Bretagne cette politique a abouti à la formation de gouvernements de droite homogènes. Ceux-ci ont alors profité du gâchis et de la démoralisation pour aller plus loin dans les attaques, s’en prendre aux libertés syndicales et remettre en cause les droits des femmes. Ces expériences – et celle de la France, qui se déroule sous nos yeux! – ne laissent aucun doute: loin d’être un "moindre mal", la gestion social-libérale
Il est nécessaire et urgent que la gauche envoie des élu.e.s dans les parlements
Face à ce danger, il est non seulement nécessaire mais urgent que la gauche envoie des élu∙e∙s de gauche dans les parlements. Petite organisation, la LCR a reconnu très vite l’importance du début de percée du PTB lors des élections communales et provinciales d’octobre 2012. Elle en a tiré les conclusions, en fonction des intérêts des travailleurs et des travailleuses. Ceux-ci ont été clairement et courageusement exprimés par la FGTB de Charleroi-Sud Hainaut qui, dès le premier mai 2012, appelait au rassemblement pour créer une alternative anticapitaliste à gauche du PS et d’Ecolo. C’est dans cet esprit que la LCR a œuvré activement au regroupement PTBGauche d’Ouverture, avec des personnalités indépendantes et le PC. Nous assumons ce bilan. Mieux: nous en sommes fiers. Nous sommes fiers d’avoir apporté notre pierre à ce rassemblement qui, malgré ses imperfections, rend l’espoir aux exploité∙e∙s et aux opprimé∙e∙s. Nous sommes fiers d’avoir ainsi contribué à faire en sorte que les revendications immédiates des 99% – pour la justice sociale, la justice fiscale, l’emploi, le refinancement du secteur public, notamment – soient pour une fois au cœur du débat politique. Nous sommes fiers de participer à une campagne électorale dans laquelle la gauche fait prise, pour la première fois depuis longtemps. Nous comptons bien, par cette politique, poser un jalon vers l’émergence d’un nouveau parti large du monde du travail, un parti aussi fidèle aux intérêts du monde du travail que les partis traditionnels sont fidèles aux intérêts du capital. En même temps, la LCR ne met pas son programme en poche. Sur un certain nombre de questions, le PTB nous semble trop timoré. Nous sommes pour les 32h sans perte de salaire, avec embauche compensatoire et réduction des cadences. Nous sommes pour la création d’une seule banque publique par la nationalisation de
édito
Votez LCR sur les listes PTB-GO! la finance sans indemnités ni rachat et sous contrôle démocratique de la collectivité. Nous défendons l'abrogation des traités européens néolibéraux, et la régularisation de tous les sans-papiers. Pour sauver la planète, nous soulignons l’urgence d’une rupture avec le productivisme qui a trop longtemps contaminé la gauche. Enfin, face à la vague réactionnaire des tenants de la morale bourgeoise, nous levons plus que jamais le drapeau de la lutte autonome des femmes pour leur émancipation. Pour celles et ceux qui partagent notre engagement, voter LCR sur les listes PTBGO! est ainsi un vote doublement utile. ■
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élections 2014
Trois scrutins, un enjeu ✒ par Daniel Tanuro A en croire les sondages, les élections du 25 mai prochain déboucheront sur un sérieux recul global des partis traditionnels (au sein desquels on range désormais Ecolo et Groen!), sur une perte importante du PS ainsi que sur une polarisation gauche-droite accrue. Ce sont les seules quasi-certitudes à un peu plus d’un mois du scrutin.
Flandre, Wallonie, Bruxelles…
En Flandre, les trois partis de la majorité fédérale font ensemble à peu près 45% dans les sondages, ce qui est un peu moins qu’en 2010 (46, 6%). Le CD&V ne parvient pas à repasser la barre des 20%: il reste stationnaire à 17,6%. Le sp.a (14,6%) progresse très légèrement par rapport aux précédents sondages, mais reste 0,8% sous de son score de 2010. Même tendance pour les libéraux de l’Open VLD: très léger progrès (0,4%), mais résultat inférieur à 2010. A droite de la droite, le Vlaams Belang se maintient autour de 10%, tandis que la Liste De Decker disparaît aussi vite qu’elle était apparue. La N-VA continue à dominer le paysage politique au Nord du pays. Selon le sondage RTBF/La Libre de février dernier, le parti de Bart de Wever recueillerait 32,3% des suffrages. Moins que les 40% pronostiqués par certains, mais plus que les 30% nécessaires, selon son chef, pour que le parti soit incontournable, y compris au fédéral. De Wever a compris qu’en restant une nouvelle fois dans l’opposition au niveau fédéral il risquait d’être perdant à terme. La ligne politique de la N-VA a été adoptée en conséquence: les nationalistes flamands mettent surtout l’accent sur leur programme socio-économique ultralibéral. Sur le plan communautaire, ils disent se contenter du "confédéralisme"… pour le moment. Leurs rivaux des partis traditionnels, de leur côté, semblent prêts à monter une nouvelle fois dans un gouvernement fédéral qui ne disposerait pas d’une majorité en Flandre. Van Quickenborne (Open VLD) l’a déclaré ouvertement… En Wallonie, les sondages mettent surtout en évidence un recul très sévère du PS. Evalué à 28% des suffrages, le PS reste le premier parti au niveau de la région,
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mais il perd près de 10% par rapport à son score de 2010 (37,6%). En progrès de 2% par rapport au sondage précédent, le MR vient en deuxième position, autour de 24%. Le Cdh perd 2% environ et passe juste derrière Ecolo, crédité de 10,6% d’intentions de vote… en dépit d’un léger recul également. A Bruxelles, les cinq partis traditionnels reculent dans les sondages. Le PS passe sous la barre des 20% et confirme qu’il perd la première place, donc la présidence de la Région, au profit du MR. Celui-ci recule également, mais de façon plus modérée. Le Cdh, Ecolo et le FDF sont au coude-à-coude autour de 10% des intentions de vote.
Partis traditionnels en recul
Globalement, l’emprise des partis traditionnels recule dans les trois régions du pays, mais dans une mesure différente et selon des modalités différentes. En Flandre, le fait dominant reste bien sûr l’hégémonie de la N-VA, bien installée dorénavant dans le paysage. Construite aux dépens du Vlaams Belang (qui avait siphonné une bonne partie des voix de la social-démocratie dans la période précédente) et aux dépens du CD&V (ce qui accentue la perte de poids politique du "pilier" ouvrier-chrétien dans ce parti), cette hégémonie convient très bien au patronat flamand. Celui-ci mise sur une accentuation de la politique néolibérale couplée à une mise hors-jeu des organisations syndicales, transformées en "facilitateurs" de l’austérité. En Wallonie et à Bruxelles, le MR reste largement dominant sur le flanc droit du libéralisme, mais s’effrite notamment au profit du Parti Populaire de Modrikamen (autour de 5% dans les sondages), de "La Droite" (3,5%) et de "Wallonie d’abord". Ensemble, ces trois groupes totalisent plus de 10% des intentions de vote mais seul le PP semble avoir une chance de décrocher un élu.
Barre à gauche!
Heureusement, le mouvement de mécontentement ne s’exprime pas seulement à droite mais aussi à gauche, principalement à travers les intentions de vote en faveur du PVDA en Flandre et des listes PTB-GO! en Wallonie et à Bruxelles.
Là aussi, il convient de faire un certain nombre de distinctions selon les régions. En Flandre, les listes PVDA+ sont la seule possibilité pour les électeurs et électrices d’émettre un vote de refus de l’austérité, un vote en faveur d’une politique qui prend l’argent là où il est. Les sondages sont encourageants: de 1,4% en 2010, le PVDA+ passerait à 3,7% selon le sondage RTBF/La Libre de février 2014 et pourrait même décrocher un siège dans la province d’Anvers. A Bruxelles, les perspectives sont encore plus favorables. Le PTB-PVDA faisait 1,6% lors des élections de 2010 ; les listes PTB-PVDA+-Go seraient entre 6 et 7% dans les derniers sondages. Même tendance en Wallonie: de 1,9% pour le PTB en 2010 à 7,6% pour les listes PTB-GO! Les sondages sont toujours à prendre avec des pincettes, mais il est frappant que, à Bruxelles et en Wallonie, les intentions de vote ont fait un bond de 4,2% et de 3,5% respectivement, tout de suite après la conférence de presse du 26 janvier, au cours de laquelle le PTB a révélé l’existence du rassemblement GO (Gauche d’Ouverture) avec des personnalités indépendantes, le PC et la LCR. A gauche de la gauche toujours, le nouveau venu VEGA a fait son entrée dans les sondages avec 0,9% des intentions de vote. En même temps, le Mouvement de Gauche a disparu dans l’anonymat de la rubrique "autres partis". Les deux groupes occupent un terrain sensiblement équivalent sur l’échiquier politique, et seront présents dans la campagne avec des listes. L’électeur aura sans doute du mal à les distinguer l’un de l’autre. Le décollage du PVDA+ dans les sondages et l’envolée des intentions de vote pour les listes PTB-GO! accentuent une dynamique de "vote utile à gauche de la gauche". Cette dynamique aussi se concrétise différemment au Nord et au Sud du pays. En Flandre, on l’a dit, le vote pour le PVDA+ est la seule manière pour les électeurs et électrices de s’exprimer clairement contre la politique d’austérité et pour un changement de cap social, dans le contexte d’une société très largement dominée par la droite, la droite de droite et l’extrêmedroite. Il est probable que pas une voix de
badge: Rafik Khalfaoui – illustration: Little Shiva
Débat de stratégie
En Wallonie et à Bruxelles, le contexte général est différent: l’enjeu majeur est clairement de présenter une alternative de gauche au PS dominant qui s’est couché devant la droite. L’heure des comptes a sonné avec Di Rupo. Le Premier ministre prétendait agir pour couper l’herbe sous les pieds de De Wever, sauver l’unité du pays et par conséquent la sécurité sociale. Pour ce faire, il a appliqué une partie du programme de choc de De Wever, et quel est le résultat? Sur le plan social, une catastrophe. Sur le plan politique, De Wever est plus fort que jamais... Le PS veut faire croire que, demain, il réparera tout ce qu’il cassé en 25 ans de participation gouvernementale [lire notre article en page 6]. Onkelinx et Magnette se déchaînent verbalement contre Michel et Reynders, qui leur rendent la pareille. C’est du cinéma. Loin de ces gesticulations électorales, le Fonds Monétaire International a déjà fixé l’objectif budgétaire de la Belgique pour la prochaine législature: de nouveau 13 milliards d’économies à réaliser, cette fois pour "faire face au coût du vieillissement"… La Sécu est plus en danger que jamais! Le débat, du coup, devient un débat de stratégie qui concerne tout le mouvement ouvrier: quelle alternative? Il faut donner un coup de barre à gauche, c’est clair. A court terme, les listes PTB-GO! (Gauche d’Ouverture) sont le meilleur moyen de le faire avec une chance de succès. C’est pourquoi un nombre croissant de syndicalistes sortent du bois et, tout en restant dans le cadre de l’indépendance syndicale, font des déclarations ou prennent des initiatives en faveur des listes PTB-GO!
heureux de ce rassemblement PTB-Gauche d’Ouverture. Mais nous sommes aussi inquiets. Vous portez une responsabilité. Au-delà du 25 mai, vous devez continuer ce rassemblement des forces, le faire vivre et le développer". Le mouvement syndical n’a plus rien qui ressemble à un relais politique, ni de près ni de loin. Complètement converti au néolibéralisme, le PS sert à imposer le programme de la classe dominante au monde du travail. Surtout dans le contexte actuel, où le chômage massif et la précarisation de l’emploi dégradent terriblement les rapports de forces sur le terrain, les travailleurs et les travailleuses ont besoin d’un nouveau parti de classe. Un parti des 99%, un parti pour combattre le capitalisme et la désespérance. C’était le sens de l’appel lancé le premier mai 2012 par la FGTB de Charleroi. A travers la campagne et au-delà du 25 mai, continuons à rassembler les forces pour progresser dans cette direction. C’est l’enjeu commun des trois scrutins. "En avant, il n’y a pas d’avance!" ■
élections 2014
la gauche syndicale à la base ne manquera au PVDA+. Voter pour des candidat.e.s de gauche sur les listes de Groen! n’est vraiment pas une alternative: la direction de ce parti est convertie au "capitalisme vert" néolibéral, ce qui se traduit notamment par une politique d’alliance sans principes au niveau communal.
Au-delà du 25 mai
Le 25 mai au soir, nous espérons, avec celles et ceux qui auront fait la campagne, fêter l’élection de représentant.e.s qui, dans les assemblées, dénonceront l’austérité, relaieront les luttes et proposeront des alternatives. Mais la question se pose déjà: que faire au-delà? Comme l’a dit et répété récemment Sandra Goret, secrétaire interprofessionnelle de la FGTB de MonsBorinage: "Beaucoup de syndicalistes sont la gauche #67 avril-mai 2014
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✒ par Guy Van Sinoy En mai prochain, au moment des élections, cela fera 26 années continues que le PS participe au gouvernement fédéral. Il s'agit de la plus longue participation gouvernementale du PS dans notre pays. Évidemment en 26 ans, le PS a dû faire avaler au monde du travail pas mal de couleuvres pour garder ses portefeuilles ministériels. Du plan global (1993) à la loi-programme du gouvernement Di Rupo (décembre 2012), en passant par le Pacte des Générations (2005), le PS a trempé dans tous les mauvais coups contre les salarié.es et les allocataires sociaux.
Quel est le nom du capitaine?
Et depuis qu'Elio est Premier ministre, le PS est en première ligne. Quand le paquebot Costa Concordia s'est lamentablement échoué sur les côtes italiennes, les autorités ont tout de suite recherché le capitaine car il était le responsable suprême à bord. Eh bien dans le gouvernement sortant qui mène la politique néolibérale, le capitaine s'appelle Elio Di Rupo. Pas étonnant qu'une frange de plus en plus large de l'électorat ouvrier entende faire payer au PS ses trahisons.
Le baromètre électoral annonce la tempête
Le baromètre politique de La Libre (22 février) annonce pour le PS un score de 28% en Wallonie (contre 32,8% aux élections de 2009), et un score de 18,1% à Bruxelles (contre 23,3% en 2009). Et le même baromètre annonce un score de 7,6% en Wallonie pour PTB-GO! (contre 1,2% en 2009) et à Bruxelles un score de 6,5% (contre 0,9% en 2009). Évidemment il n'y a pas que le PS qui trinque. Écolo est
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pronostiqué à 10,6% en Wallonie (contre 18,5% en 2009) et à 10,1% à Bruxelles (contre 17,9% en 2009). Il n'empêche que les prévisions électorales donnent des sueurs froides aux caciques du Boulevard de l'Empereur qui, dans une séquence délirante de football panique commencent à promettre tout et n'importe quoi.
"Repas chauds et gratuits dans les écoles!"
Plus fort que le PTB! "Des repas chauds et gratuits le midi dans les écoles maternelles et primaires", annonce le programme électoral du PS. Coût estimé: 231 millions d'euros. On se demande comment le PS va financer tout cela, car il ne dit pas un traître mot de la nécessité de refinancer l'enseignement. Autre promesse électorale fumeuse: Paul Magnette propose d'instaurer la gratuité de la garderie de midi dans les écoles... alors qu'à Charleroi (où il est bourgmestre) les tarifs des surveillances des temps de midi et des garderies du matin et du soir ont été augmentés en début d'année scolaire.
"Rediscuter des modalités du chômage récemment entrées en vigueur"
Autre ténor du PS, Willy Demeyer, bourgmestre de Liège, proposait sur les ondes de la RTBF début février de rediscuter (après les élections bien entendu!) des modalités qui excluront du chômage plusieurs dizaines de milliers de jeunes le 1er janvier 2015. Di Rupo a tout de suite mis les choses au point: la suppression des allocations de chômage qui affectera des milliers de personnes dès janvier prochain est une conséquence des mesures inscrites dans
l’accord de gouvernement. "Il y avait, durant les 541 jours de négociations gouvernementales, la volonté de plusieurs partis flamands de dire ‘on paye les allocations de chômage pendant 2 ans et puis terminé’. On est très loin de cela. Il a fallu faire des compromis, mais surtout il y a la volonté de sortir le jeune de sa situation. L’essentiel pour cela, c’est la création d’activité". Autrement dit, pour devenir Premier ministre, il fallait bien sacrifier quelques dizaines de milliers de victimes du chômage, et le PS ne reviendra pas sur cette mesure!
Promesses écœurantes
Lancer à quelques semaines des élections des promesses électorales mirifiques est une pratique écœurante. C'est prendre les électeurs pour des imbéciles et donner de la politique une vue peu ragoûtante. Bien sûr, le PS n'est pas le seul à faire de la sorte. Ainsi Charles Michel promet maintenant de baisser les impôts. Ah bon? Mais alors pourquoi Didier Reynders ne l'a-t-il pas fait pendant les 15 années où il était ministre des Finances?
Relancer l'Action commune socialiste?
Jean-Pascal Labille, le ministre fédéral des Entreprises publiques pour quelques semaines encore, ne sera pas candidat le 25 mai. Les barons du PS de Liège n'ont pas voulu de lui sur les listes électorales. Il vient de recevoir une mission: tenter de recoller les morceaux de l'Action commune socialiste (PS, Mutualités socialistes et FGTB). Pour les mutualités, dont Labille est l'ancien patron, ce sera fastoche. Par contre dans certaines régionales FGTB, ce sera une autre paire de manches… ■
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élections 2014
Football panique au Boulevard de l'Empereur
photo: LCR
✒ correspondant Le dimanche 23 mars, la liste bruxelloise PVDA*PTB-GO! organisait une marche pour un plan d’urgence sociale avec près de 1.500 personnes. Derrière la banderole "GO! Gauche d’Ouverture", la LCR/SAP y a participé en nombre, aux côtés du Parti Communiste et des indépendant∙e∙s qui soutiennent les listes. Le parcours initialement prévu à travers Molenbeek n’a pas été autorisé par les autorités communales qui nous ont redirigés le long du canal. Qu’à cela ne tienne! Les habitant∙e∙s des quartiers les plus populaires étaient là, avec nous. Parce qu’ils et elles sont les premiers/ ères à connaitre ce qu’est la précarité et la pauvreté, à travers des jobs pourris, des allocations inférieures au seuil de pauvreté, des logements insalubres, des soins de santé inaccessibles… Ils et elles sont les premiers/ères à subir les discriminations sociales et racistes, la répression de la police au mépris de leurs droits. Ils et elles sont les premiers/ères à constater la déconnexion de la plupart des élus des partis "traditionnels" avec ces réalités, à constater que ces élus ne nous représentent pas! Oui, un plan d’urgence sociale est plus que nécessaire! Oui, nous avons besoins d’élu∙e∙s qui soient aussi fidèles aux exploité∙e∙s que les élu∙e∙s des partis "traditionnels" le sont aux patrons! La manifestation s’est clôturée par un meeting enthousiaste à Tour & Taxis. Une manière de rappeler clairement que pour nous à la LCR/SAP, composante des listes PTB-GO!, si on a bien besoin aujourd’hui d’une victoire politique, c’est avant tout dans les rues que ça se passe. C’est avant tout par nos luttes dans la rue, les quartiers, les écoles et sur les lieux de travail, qu’on pourra obtenir de réelles victoires sociales. C’est aussi dans ce sens que s’est exprimée notre camarade Pauline Forges, 8e candidate effective sur
à l'action!
Marche et meeting pour un plan d’urgence sociale: un beau succès! la liste PVDA*PTB-GO! pour le Parlement bruxellois dont nous publions ci-dessous l’intervention en intégralité. Comme elle l’a répété, le 25 mai nous enverrons des élu∙e∙s anti-austérité dans les Parlements pour relayer les luttes, pour redonner de l’espoir dans une alternative de gauche, et surtout pour redonner confiance dans nos propres forces! Adelante! ■
Intervention de Pauline Forges (LCRSAP), 8ème candidate sur les listes PTBGauche d’Ouverture au Parlement de la région bruxelloise, lors du meeting du 23 mars à Tour & Taxis "Cette année, les élections ont une saveur particulière. Pour la première fois depuis longtemps, on a la possibilité d'envoyer des élus de gauche au Parlement. Et pour la première fois aussi, on a la possibilité de concrétiser l'appel lancé le 1er mai 2012 par la FGTB de Charleroi à travers les listes PTB-GO! Ces listes, c'est un beau pas en avant. Mais, dans l'optique de l'appel de la FGTB carolo et de son plan d'urgence, ce n'est que la première étape pour construire un nouveau relais politique des 99%. Et ce nouveau relais politique, il est urgent de la construire! Le PS au pouvoir, sans qui ce serait soi-disant pire, poursuit et aggrave les mesures antisociales que la majorité de la population, en particulier les femmes et les migrants, endurent depuis 30 ans. Près de 60 % des 50.000 chômeurs qui seront exclus d'un coup en janvier 2015 sont des femmes! La chasse aux sans-papiers, elle aussi, bat son plein. Je salue au passage le courage et la résistance des Afghan.e.s mobilisés depuis des mois pour faire valoir leurs droits que la Belgique piétine. Avec le PS, les inégalités continuent d'augmenter. Et ça commence bien avant la recherche d’un emploi: ça commence avec la bataille pour avoir une place dans une crèche (et il faut voir à quel prix!). Ça continue avec l’école. Je suis prof, et ça me permet de voir ces inégalités tous les jours! Non, l’école n’est pas gratuite: une activité par-ci, un voyage scolaire par-là, et on voit bien que ça pèse plus sur certains. Non, tout le monde n'a pas les mêmes chances, parce qu'il y a le tri des élèves, entre les différentes écoles et aussi à travers les filières et les sections (latin-grec ou sciences-éco?): on n’envoie pas tout le monde en professionnel! Et, à l’inverse, l’université n’est pas accessible à tous… Après l'école, on arrive à la recherche d’un job et les discriminations se poursuivent. Pas seulement sur le plan économique: il y a aussi le racisme, le sexisme, l'homophobie. Ces inégalités sont révoltantes! On a besoin de politiques concrètes pour les combattre sérieusement." ■ la gauche #67 avril-mai 2014
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✒ par Mauro Gasparini Pour les élections régionales, législatives et européennes du 25 mai, la LCR-SAP présente une bonne trentaine de candidat∙e∙s en Flandre, en Wallonie et à Bruxelles. Petit tour d'horizon de ces femmes et hommes résolument engagé∙e∙s dans le mouvement social, pour faire gagner la gauche d'ouverture, la gauche combative… et faire entendre des voix anticapitalistes dans cette campagne!
blog (linksfeminisme.wordpress.com) et contribue aussi à notre site web néerlandophone, www.sap-rood.org. Elle est 4ème sur la liste PVDA+ en Flandre orientale pour le Parlement flamand. Ida Dequeecker, quant à elle, est une personnalité importante du mouvement féministe-socialiste depuis les années 1970 au nord du pays. Aujourd'hui encore, elle lutte elle aussi pour un féminisme anticapitaliste et antiraciste, notamment dans "BOEH!" (Baas over Eigen Hoofd), un groupe d'action contre les discriminations visant les femmes qui portent le foulard. Ida est 17ème sur la liste PVDA+ à Anvers, pour le Parlement flamand.
Pas de féminisme sans socialisme, pas de socialisme sans féminisme.
Commençons par les candidat∙e∙s d'ouverture, avec Michèle Dehaen, ancienne déléguée CGSP des hôpitaux IRIS, 66ème effective sur la liste PTB*PVDAGO! au Parlement bruxellois. Freddy Bouchez, bien connu comme militant syndical et coordinateur de l'asbl CEPRé (Centre d'éducation populaire régional), et très actif dans la lutte contre la chasse aux chômeurs, sera 3ème suppléant à Soignies pour le Parlement wallon. En Flandre, ce sont deux figures des luttes féministes qui ont accepté d'être candidates indépendantes: Evie Embrechts et Ida Dequeecker. Evie a été active dans une série de mouvements sociaux (antiracisme, altermondialisme, etc.) mais c'est dans le mouvement féministe, notamment dans le groupe FEL (Feministisch en links) à Gand, qu'elle s'investit à 200% depuis plusieurs années. Elle tient également un
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Près de la moitié de nos 33 candidat∙e∙s sont des femmes. En plus d’Evie et Ida, déjà citées, d'autres camarades symbolisent avec force les revendications et luttes féministes sur nos listes. Ainsi, Pauline Forges, enseignante et 8ème effective sur la liste PTB*PVDAGO! au Parlement bruxellois, a été active depuis des années dans plusieurs collectifs féministes, comme VAMOS (antimasculiniste), le MDF (contre l'exclusion des jeunes musulmanes qui portent le foulard), et dans les mobilisations pour le droit à l'avortement. Elle a également participé à la fondation d'une organisation de jeunesse autonome, les Jeunes anticapitalistes ( JAC), solidaire de la LCR, et est active à la CGSP-enseignement. Céline Caudron est une personnalité connue de notre organisation. Historienne, elle est également très impliquée dans ces mouvements féministes et antiracistes. Elle a travaillé des deux côtés du mouvement ouvrier, FGTB et Mouvement ouvrier chrétien. Céline est 4ème effective sur la liste PTB-GO! au Parlement européen. AnneMarie Obbiet, garde-malades, complète ce trio féministe côté francophone et se présente à la 4ème place effective de la liste PTB-GO! à la Chambre pour le Brabant wallon.
Des candidatures écosocialistes: ni nucléaire, ni effet de serre!
A la LCR-SAP, nous faisons de l'écologie anticapitaliste un des piliers de notre programme. Daniel Tanuro, ingénieur agronome et environnementaliste, membre du réseau écosocialiste international, l'un des cofondateurs de l'ONG Climat et Justice Sociale, poussera à Namur la liste PTB-GO! pour le Parlement fédéral. Auteur de L'impossible capitalisme vert, Palme de l'environnement 2011 d'Inter-Environnement Wallonie, Daniel utilise son... énergie à défendre la transition énergétique et la nécessaire rupture anticapitaliste qui l'accompagne. Il est l'une de nos deux candidatures du mouvement écosocialiste avec Léo Tubbax , sociologue, fonctionnaire et délégué syndical CGSP-AMIO/IRB-BIG, également porte-parole de Nucléaire STOP Kernenergie et l'un des animateurs de la manifestation antinucléaire du 9 mars 2014. Activiste de Climat et Justice Sociale, il a participé aux trains Climat vers Copenhague et vers Varsovie. Ancien sidérurgiste, ancien postier, les restructurations n'ont plus de secret pour lui. Léo est 2ème candidat suppléant sur les listes PTB-GO! au Parlement wallon, pour l'arrondissement Huy-Waremme. Fabienne Raindorf , enseignante et ancienne candidate Ecolo, complète ce trio et se présente aussi à Namur, comme 5ème candidate effective sur les listes PTB-GO! au Parlement wallon.
Des candidatures de la jeunesse, de l'antiracisme et pour la démocratie réelle
Parmi nos candidat∙e∙s, plusieurs camarades sont militant∙e∙s aux Jeunes anticapitalistes ( JAC): Esteban Rozenwajn , doctorant en sciences de l'éducation à l'UCL, Axel Farkas, artiste précaire, très impliqué dans la lutte de solidarité avec les sans-papiers afghan∙e∙s depuis l'été dernier, avec ses camarades Charlotte Fichefet , animatrice jeune en milieu socio-culturel et étudiante en sciences politiques à l'ULB, Neal Michiels , étudiant en histoire et
photo: Collectif Krasnyi
élections 2014
Qui sont les candidat.e.s de la LCR-SAP pour le 25 mai?
photo: Little Shiva
Des syndicalistes de combat et des militant.e.s de la solidarité
candidatures de militant∙e∙s solidaires: notre camarade Thomas Weyts, porteparole LCR-SAP côté néerlandophone, et actif dans le droit au logement, est candidat en Flandre sur les listes PVDA+ au Parlement européen. Antoinette Becq, employée dans le non marchand, souhaite se battre contre la marchandisation de la société inscrite dans l'ADN du système capitaliste. Elle est 4ème effective sur la liste PTB-GO! au Parlement wallon, pour l'arrondissement de Tournai-AthMouscron. Enfin, Sébastien Brulez, journaliste pendant plusieurs années au Venezuela, et toujours actif aujourd'hui dans la solidarité internationale avec les pays du Sud, est 5ème suppléant de la liste PTB-GO! à Mons pour le Parlement wallon. Ce petit tour nous a permis de voir que les candidat∙e∙s de la LCR-SAP dans
PTB*PVDA-GO! pour le Parlement bruxellois. Une série de camarades syndicalistes de combat se présentent du côté néerlandophone, comme candidat∙e∙s SAP sur les listes PVDA+, tels que Peter Veltmans (CGSP-Finances), Bruno De Wit (SETCa non-marchand), Els Goeman (CGSPparastataux), Raoul Flies (SETCa) ou
ces triples élections du 25 mai 2014 sont tou∙te∙s des gens de terrain, actifs dans les luttes et partisans d'une pratique politique concrète et démocratique. Vous les rencontrerez aussi après le 25 mai, dans les résistances sociales. Alors, pour un vote doublement utile à gauche, pour la victoire et le rassemblement, votons pour les candidat∙e∙s de la LCR-SAP sur les listes PTB-GO! ■
Pour terminer ce tour, il nous reste bien sûr à faire connaître nos camarades syndicalistes. Freddy Mathieu, ancien secrétaire régional de la FGTB MonsBorinage, originaire de Quaregnon, où fut rédigée la Charte de fondation du Parti Ouvrier Belge (ça ne s'invente pas!), poussera la liste PTB-GO! (18ème place) à la Chambre dans le Hainaut. Serge Alvarez est délégué syndical CSC Transcom. Postier, il défend la lutte syndicale démocratique pour gagner la re-nationalisation de la Poste. Il portera la voix de ses camarades de La Poste comme 24ème effectif pour le Parlement bruxellois sur la liste PTB*PVDA-GO!. Guy Van Sinoy est aussi un militant syndical de longue date, ancien délégué CGSP au SPF Finances. Il est 56ème candidat effectif sur la liste
Jean-Claude Van Nieuwenhuyze
(CSC Bruxelles). Enfin, mentionnons trois
élections 2014
Alexandra Ooms (candidate dans le Brabant flamand). Esteban est 12ème suppléant sur la liste PTB*PVDA-GO! au Parlement bruxellois, Charlotte y est 43ème effective. Axel se présente dans le Brabant wallon. Ensemble, ils défendront à la fois des mesures pour un enseignement 100% public, gratuit et de qualité pour tou∙te∙s, la fin des mesures répressives contre la jeunesse (comme les Sanctions administratives communales), mais aussi le démantèlement des centres fermés, la liberté de circulation et d'installation et la régularisation de tous les sans-papiers. Antiracisme toujours avec France Arets, déléguée syndicale CGSP-Enseignement, bien connue dans la région liégeoise pour son travail de longue haleine au sein du CRACPE (Collectif de Résistance aux Centres pour Etrangers) et dans le collectif de soutien aux sans-papiers contre le centre fermé de Vottem. Elle est 10ème effective sur la liste PTB-GO! à la Chambre, dans la province de Liège. Un autre militant de longue date contre tous les racismes, Hamel Puissant , est présent sur la liste PTB*PVDA-GO! pour la Chambre à Bruxelles. Notre camarade Freddy Dewille, conseiller communal du groupe Gauche à Anderlues et délégué CSC, est 3ème candidat effectif sur la liste PTB-GO! au Parlement wallon dans l'arrondissement de Thuin. Freddy est un partisan de la démocratie par en-bas. Co-fondateur de l'Observatoire citoyen, il se bat au conseil communal d'Anderlues et a obtenu la hausse du nombre de séances du conseil communal annuelles, la possibilité de consulter les PV dans un délai correct et surtout le droit d'interpellation orale directe du conseil par les habitant∙e∙s. Comme il l'écrit: "Tout cela peut sembler anodin pour le commun des mortels, mais pourtant, il n’en est rien, c’est le B.A.BA de la démocratie et de la transparence." Pour défendre une véritable justice, et la fin du tout-répressif, Pierre Reynaert, fonctionnaire au SPF Justice, est 5ème suppléant sur la liste PTB-GO! à la Chambre dans la province du Luxembourg. Véronique Blaze, médecin, est 4ème effective à la Chambre dans le Hainaut sur la liste PTB-GO!. Elle a quitté le Parti "socialiste", pour lequel elle avait fait un excellent score aux élections communales en 2000 à Mons, parce qu'elle veut défendre sans concessions la Sécurité sociale et les services publics.
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✒ par Mathieu Desclin C'est le 26 mars 1894, lors de son Xème Congrès que le Parti ouvrier belge a adopté sous le nom de "Déclaration de principes du POB" le texte appelé aujourd’hui Charte de Quaregnon – du nom de la localité du Borinage où s’est tenu le congrès [lire le texte ci-contre]. Dès 1893, de violentes grèves pour le suffrage universel avaient éclaté et avaient été réprimées dans le sang. La révolte s'était étendue à tel point que les partis bourgeois furent acculés à lâcher du lest et à accorder le suffrage censitaire, à savoir une voix pour ceux qui ne payaient pas d’impôts,
et deux ou trois voix pour ceux qui étaient diplômés ou payaient des impôts. Aux élections suivantes, les socialistes entraient au Parlement avec 28 élus. Ce contexte explique le contenu de la "Déclaration de principes", radical et anticapitaliste dans ses objectifs à long terme, imprécis et incomplet quant aux moyens pour réaliser ceux-ci. Malgré cela, les paragraphes un à cinq du document ne laissent aucun doute sur le refus total d'une collaboration quelconque entre les travailleurs et les capitalistes
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pour instaurer une nouvelle société sans classes. La nécessité de l’expropriation totale et de la collectivisation des moyens de production et des banques au profit de toutes les catégories d’exploités y est affirmée clairement. Seul le paragraphe six, dans sa première partie, est vague et se traduit en bons sentiments.
Une victoire arrachée dans la rue
A ce moment précis, la classe ouvrière peut à juste titre considérer que la victoire a été arrachée par l'action dans la rue, malgré les freinages d'une grande partie de l'appareil politique et syndical du POB. Mais celui-ci peut confirmer par la Déclaration que cette victoire n'est qu'une étape vers la conquête de la majorité absolue, qui sera obtenue au Parlement grâce au suffrage universel par des étapes qui sont à venir. La bataille pour le suffrage universel va se poursuivre jusqu'en 1914. Mais les actions de rue et les grèves pour cet objectif seront chaque fois plus encadrées par une frange de plus en plus large des dirigeants syndicaux et politiques du POB. A cette date fatidique, la donne va complètement changer par rapport à la Déclaration de principes. La Première Guerre mondiale va voir tous les partis sociaux-démocrates – à l’exception des Bolcheviks en Russie et des Italiens – soutenir leurs bourgeoisies respectives dans le massacre qu’elles orchestrent pour le partage du monde. Le POB participe activement à un gouvernement de défense nationale... Mais en 1918, à la fin du conflit, la révolution russe a éclaté, des insurrections révolutionnaires éclatent en Allemagne, en Hongrie et, affolées par le danger de contagion, les classes dirigeantes belges accordent des concessions "sociales" dont le suffrage universel (SU). Mais désormais, la Déclaration de principes va être pieusement mise au rang des reliques, comme si le SU avait été considéré comme le but et non le moyen, même flou, d'instaurer le socialisme. Le POB participera allègrement à une
partie des gouvernements réactionnaires qui se succèderont jusqu'en 1940. En 1938 Paul-Henri Spaak, ministre des Affaires étrangères, ira même jusqu'à reconnaître un des premiers le gouvernement fasciste de Franco comme celui d'une Espagne où la République agonise encore! En 1945, pour la dernière fois, devant la crainte de révolutions issues de la Résistance et des victoires de l’Armée Rouge, on constitue un éphémère gouvernement socialiste-communiste, et on ressuscite la Déclaration de principes sous le nom de "Charte de Quaregnon". Le nouveau PSB devenu par la suite PS et SP conservera jusqu’à nos jours la Charte de Quaregnon comme son programme de base... de manière "silencieuse". En effet, combien de militant.e.s PS en connaissent l’existence, et combien l’ont lue?
Elle demeure nôtre et celle de tous les opprimés!
Depuis, 69 ans se sont écoulés, les réformes se sont raréfiées puis ont disparu, le PS s'est de plus en plus intégré à l’économie de marché mondialisée. Aujourd'hui, le capitalisme est entré dans une crise systémique, il n’a plus rien à négocier. Il ne reste plus au PS qu’à participer activement à la guerre économique impitoyable entre multinationales, à la guerre sociale déclenchée contre les travailleurs, les chômeurs, les exclus de toutes sortes, contre les femmes, les minorités en tous genres. Il accompagne sagement les catastrophiques destructions de l’environnement, l’accélération inexorable du réchauffement climatique, la hausse dramatique de la pollution, la menace très grave de l’énergie nucléaire. Comment des gens qui ont l’inconscience ou le cynisme d’assumer tout cela peuvent-ils chanter l’Internationale à leurs congrès, se dire socialistes et se réclamer encore de la "Charte de Quaregnon"? Lisez ce qu’elle proclame, ce qu’elle nous dit du fond des temps où l’espoir se levait encore! Le PS libéral n’a plus rien qui se rattache à elle, elle demeure nôtre et celle de tous les opprimés! ■
images: LCR / w w w.vangoghborinage.canalblog.com
histoire rebelle
120 ans après, revendiquer la Charte de Quaregnon
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✒ correspondant Le mercredi 26 mars, à l'initiative de la LCR, une trentaine de militants ont symboliquement "rafraichi la mémoire" du président en titre du PS, Elio Di Rupo, par ailleurs Bourgmestre "empêché" et Premier Ministre. L’action s’est déroulée à Mons devant son domicile et visait à rappeler l’existence de la Charte de Quaregnon. Par cette action symbolique, la LCR entendait remettre en avant ce document fondateur du mouvement ouvrier, enterré par le PS. "C’est peu dire que la Charte n’inspire plus la politique du PS depuis des décennies. Mais celui-ci n’a jamais osé la récuser officiellement pour éviter un débat qui aurait montré à quel point ils ont trahi leurs origines" a déclaré Freddy Mathieu, candidat LCR sur les listes PTBGO! à la Chambre. "Ce débat, aujourd’hui, est plus nécessaire que jamais. Des milliers de travailleurs et de travailleuses, écœurés par la politique néolibérale d’Elio Di Rupo, cherchent une alternative à gauche du PS et des Verts. Exhumer la Charte, la diffuser, c’est les aider à retrouver leurs racines, celles de la lutte des classes et du socialisme", a-t-il ajouté. Cette action ludique a été suivie d’une conférence intitulée "Que faire de la charte de Quaregnon?", co-organisée par la Formation Léon Lesoil et les Amis du Monde Diplomatique, avec comme orateurs/trices Céline Caudron (historienne, candidate LCR sur la liste européenne PTB-GO!), Sfia Bouarfa (députée bruxelloise, élue sur les listes PS, signataire de l’Appel PTB-GO!), François D'Agostino (historien, candidat PC sur la liste PTB-GO! à l'Europe), JeanFrançois Tamellini (secrétaire fédéral de la FGTB), Marco Van Hees (tête de liste PTB sur la liste PTB-GO! à la Chambre dans le Hainaut) et Marwa Mahbub (du collectif des Afghans du Béguinage, menacée d’expulsion par Maggie De Block). ■
histoire rebelle
Charte de Quaregnon (1894) 1. Les richesses, en général, et spéciale- 6. ment les moyens de production, sont ou des agents naturels ou le fruit du travail – manuel et cérébral – des générations antérieures, aussi bien que de la génération actuelle; elles doivent, par conséquent, être considérées comme le patrimoine commun de l'humanité.
2.
Le droit à la jouissance de ce patrimoine, par des individus ou par des groupes, ne peut avoir d'autre fondement que l'utilité sociale, et d'autre but que d'assurer à tout être humain, la plus grande somme possible de liberté et de bien-être.
3.
La réalisation de cet idéal est incompatible avec le maintien du régime capitaliste, qui divise la société en deux classes nécessairement antagonistes: l'une, qui peut jouir de la propriété, sans travail; l'autre, obligée d'abandonner une part de son produit à la classe possédante.
4.
Les travailleurs ne peuvent attendre leur complet affranchissement que de la suppression des classes et d'une transformation radicale de la société actuelle. Cette transformation ne sera pas seulement favorable au prolétariat, mais à l'humanité toute entière; néanmoins, comme elle est contraire aux intérêts immédiats de la classe possédante, l'émancipation des travailleurs sera essentiellement l’œuvre des travailleurs eux-mêmes.
5.
Ils devront avoir pour but, dans l'ordre économique, de s'assurer l'usage libre et gratuit de tous les moyens de production. Ce résultat ne pourra être atteint, dans une société où le travail collectif se substitue de plus en plus au travail individuel, que par l'appropriation collective des agents naturels et des instruments de travail.
La transformation du régime capitaliste en régime collectiviste doit nécessairement être accompagnée de transformations corrélatives: dans l'ordre moral, par le développement des sentiments altruistes et la pratique de la solidarité; dans l'ordre politique, par la transformation de l'État en administration des choses.
7. Le socialisme doit donc poursuivre
simultanément l'émancipation économique, morale et politique du prolétariat. Néanmoins, le point de vue économique doit être dominant, car la concentration des capitaux entre les mains d'une seule classe constitue la base de toutes les autres formes de sa domination.
Pour la réalisation de ces principes, le Parti ouvrier déclare: 1. Qu'il se considère comme le représentant, non seulement de la classe ouvrière, mais de tous les opprimés, sans distinction de nationalité, de culte, de race ou de sexe; 2. Que les socialistes de tous les pays doivent être solidaires, l'émancipation des travailleurs n'étant pas une œuvre nationale, mais internationale; 3. Que, dans leur lutte contre la classe capitaliste, les travailleurs doivent combattre par tous les moyens qui sont en leur pouvoir, et, notamment, par l'action politique, le développement des associations libres et l'incessante propagation des principes socialistes. ■ la gauche #67 avril-mai 2014
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✒ par La Gauche Celles et ceux qui connaissent le PTB depuis vingt ans ou plus peuvent en témoigner: ce parti s’est toujours caractérisé par son maximalisme. La surenchère était parfois de gauche – dénoncer le "réformisme" de l’impôt sur la fortune, parfois de droite – traiter le Che "d’agent de l’impérialisme russe"… Mais le but principal était toujours d’occuper la position la plus extrême, pour dire: "Seul le PTB défend ceci ou cela…" Le PTB nouveau est aux antipodes de ce maximalisme. Selon Vincent De Coorebyter (CRISP), le PS, s’il était dans dans l’opposition, défendrait le même programme que Raoul Hedebouw. Ce n’est pas exact: de Coorebyter sous-estime la profondeur de la conversion socialdémocrate au néolibéralisme. Même dans l’opposition, Di Rupo ne prendrait pas le risque de défendre le bouquet de mesures anti-austérité mis en avant par le PTB… Ce qui est vrai, par contre, c’est que le programme du PTB aurait pu être porté par un parti social-démocrate il y a 30 ou 40 ans. Le programme de l’Union de la Gauche française en 1981, par exemple, prévoyait la nationalisation des banques et la dissolution de l’OTAN – deux revendications que le PTB ne porte pas dans son programme pour le 25 mai. Dans notre pays, le congrès de 1959 du PSB adopta le programme de réformes de structure de la FGTB – nationalisation de l’énergie, du crédit, et service national de santé – qui était, par certains côtés, plus radical que celui du PTB aujourd’hui. Certains partis de gauche considèrent que la participation aux élections sert à faire de la propagande pour le socialisme. Ce n’est pas notre conception.
Selon nous, un programme électoral doit répondre aux problèmes de l’heure d’une manière qui soit accessible par les 99%. 12 la gauche #67 avril-mai 2014
Nous ne sommes pas "réformistes" mais nous sommes pour des réformes. Dans le contexte actuel – dégradation des rapports de forces, chômage massif, précarité et emprise de l’idéologie dominante – le PTB a raison de développer surtout des revendications immédiates bien concrètes, et d’organiser son programme autour de l’idée simple qu’il faut un changement de cap social. La LCR est d’accord avec cette démarche. Mais, selon nous, cela ne suffit pas. En effet, ces revendications immédiates n’offrent pas de solutions structurelles aux grands problèmes. Le chômage par exemple: il frappe 24 millions de personnes en Europe, 600.000 en Belgique. Face à cela, le PTB demande le remplacement des prépensionnés par des jeunes et des investissements publics pour créer des emplois publics. C’est excellent, mais ça ne donnera pas un job à tout le monde. "Le capitalisme ne peut apporter de réponse fondamentale au problème de l’emploi", dit le programme du PTB. C’est exact. Il faut donc oser mettre en avant des réformes de structures franchement anticapitalistes. Dans notre jargon, nous appelons cela un "programme de transition". L’idée est de créer, par la lutte, une dynamique de rupture avec le capitalisme, de jeter un pont entre les revendications immédiates –insuffisantes– et l’alternative de société –qui paraît aujourd’hui inaccessible. De ce point de vue, et quoiqu’ils couvrent moins de thèmes, les "10 objectifs" de la FGTB de Charleroi nous semblent plus convaincants que le programme électoral du PTB. En effet, ces "10 objectifs" incluent les 32h, la nationalisation des banques et celle de l’énergie. Ces trois revendications sont à notre avis incontournables. Le vide entre le programme minimum et le programme maximum doit être comblé, sans quoi le maximalisme risque de céder la place au minimalisme et d’entraîner la perte de toute boussole stratégique – comme dans la socialdémocratie. On nous rétorquera que le "programme de transition", en soi, n’est pas la panacée. C’est exact: s’il est conçu comme un dogme, indépendamment du
mouvement réel, il peut devenir aussi stérile que le programme maximum. Mais les "10 objectifs" de la FGTB de Charleroi prouvent qu’anticapitalisme ne rime pas nécessairement avec marginalité, même dans les circonstances difficiles d’aujourd’hui… Maximalisme et minimalisme: entre ces deux écueils, la voie est étroite. Il est à espérer que la collaboration au sein de PTB-GO! favorisera à ce sujet un débat fraternel… Nous en avons toutes et tous le plus grand besoin. Ecrits par des candidat.e.s LCR sur les listes PTB-GO!, les articles qui suivent dans ce dossier n’ont d’autre but que d’y contribuer… La suite dépendra en dernière instance de la lutte des classes. ■
photo: Little Shiva
analyse critique du programme du PTB
Entre maximalisme et minimalisme, quelle stratégie?
✒ par Denis Horman, 5ème suppléant
FGTB Charleroi-Sud Hainaut
sur la liste PTB-GO! au Parlement wallon – arrondissement de Liège Le chapitre 2 du programme du PTB-GO! "Chasser le chômage, pas les chômeurs" est construit autour d’une des questions de l’enquête électorale du PTB: "Comment garantir l’emploi pour tous". Et, comme pour les autres chapitres, la méthode est de partir des constats pour déboucher sur les propositions. Le constat est décrit de manière précise et percutante: chômage massif, surtout chez les jeunes, "une génération perdue"; des gouvernements – fédéral et régionaux – qui poussent, à coup de lois, de décrets, des milliers de personnes dans la précarité, la pauvreté ou encore à la surexploitation dans le travail, l’allongement de la carrière, tout en "chouchoutant les grandes entreprises" (retentissement des études du PTB sur les cadeaux fiscaux). Dans la série des constats, le programme dégage une réflexion centrale: "Les uns cherchent désespérément du travail, les autres se crèvent au boulot en raisons des cadences infernales et de la flexibilité". Et les travailleurs âgés sont les plus vulnérables: "Près de la moitié des travailleurs entre 55 et 65 ans ont des affections du système musculaire…" D’où découle la revendication phare avancée par le PTB, dans la campagne PTB-GO!, pour maintenir et créer des emplois: "Emplois-relais, les jeunes au boulot, les plus âgés au repos. Droit à la prépension à 58 ans avec remplacement obligatoire par un jeune". Certes, ça tombe sous le sens! La situation actuelle est absolument irrationnelle, souligne le texte (chapitre 2): "Nous avons un problème de société". Nous estimons cependant que cette revendication "phare", tout à fait légitime, est loin d’être suffisante pour répondre à la fois aux deux questions: "Comment garantir l’emploi pour tous" et alléger la souffrance et l’usure au travail, pour imposer le droit à un "mieux vivre"? Notons toutefois que, pour répondre à ces questions, une autre revendication est
présentée dans le vaste programme PTBGO! (chapitre 2): "Nous voulons qu’il y ait une réduction du temps de travail, par semaine, avec maintien du salaire, sans hausse du rythme du travail et avec des embauches supplémentaires". Dans la campagne les listes PTB-GO! pour les élections du 25 mai, la LCR et ses candidat∙e∙s avancent onze mesures d’urgence sociale, dont la première s’intitule: "Droit à l’emploi, travailler moins, travailler tout.e.s, vivre mieux". La revendication phare que nous avançons est la réduction collective et radicale du temps de travail, par l’imposition des 32 heures par semaine, sans perte de salaire et avec embauches compensatoires. Nous en expliquons l’urgence et l’importance dans un article de ce numéro de La Gauche [lire pages 20 à 22]. Tout plaide – et d’abord la convergence avec le PTB et plus largement avec d’autres organisations de la gauche de gauche – pour que, ensemble, avec le mouvement syndical et social, nous mobilisions sur cet objectif. ■
Brider les banques ou les nationaliser? ✒ par Freddy Mathieu, pousseur de la liste PTB-GO! à la Chambre dans le Hainaut Pas la peine de revenir longuement sur le déroulé de la crise de 2008-2009.
Même à droite on s’accorde à dire que les banques et leurs dérives spéculatives sont au centre du tourbillon qui a failli emporter le monde... Après la panique généralisée et l’intervention massive des Etats pour sauver les meubles, on allait voir ce qu’on allait voir! Pour un peu, Sarkozy, Reynders, Baroso et Di Rupo auraient driblé Besancenot et Hedebouw par la gauche... Tout cela est assez bien décrit dans le document programmatique du PTB. "Malgré les appels réitérés en faveur d’un capitalisme ‘éthique’, les grandes institutions financières multinationales continuent à spéculer. C’est logique. A l’ère actuelle du capitalisme financier, où les activités industrielles et spéculatives sont étroitement imbriquées, investir et spéculer vont main dans la main. C’est dans l’ADN du système". Au-delà des constats, le document aligne un certain nombre de propositions qui sont loin d’être à la hauteur des enjeux. Si la financiarisation du capital est au cœur du système et de ses crises, les solutions anticapitalistes doivent s’attaquer au cœur. On ne peut se contenter de la revendication branchée d’une "banque publique 2.0" qui pourrait "mettre un terme à la témérité des banques, attisée par la concurrence". Des mesures radicales sont nécessaires. Le document laisse supposer que cette "banque publique 2.0" pourrait coexister à côté des "requins de la finance" qui ont profité des largesses de l’Etat – leur Etat – pour rebondir et amasser à nouveau des montagnes de bénéfices. A la revendication ambiguë d’une "banque publique 2.0", nous préférons la formule des syndicalistes de Charleroi qui renouent avec le programme des réformes de structures anticapitalistes des Congrès de la FGTB en 1954-56. Dans sa brochure "10 objectifs d'un programme anticapitaliste d'urgence" la FGTB de Charleroi préconise en effet de "mettre toutes les institutions financières sous le strict contrôle de la société par constitution d’un grand pôle bancaire public par socialisation des banques, sans indemnité ni rachat (sauf petits actionnaires)". Elle ajoute qu’il faut "interdire la spéculation aux banques de dépôts" et "mettre sous contrôle public les agences de notation" [Télécharger la brochure en ligne: www. lcr-lagauche.org/d/10-objectifs-web.pdf] ■
analyse critique du programme du PTB
Chasse au chômage, droit à l’emploi, réduction du temps de travail!
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✒ par Daniel Tanuro, pousseur de la liste PTB-GO! à la Chambre en province de Namur Le PTB ne croit pas aux solutions de marché. Pour sauver le climat, il veut que "la collectivité ait en mains les leviers de la transition énergétique": "L’énergie est trop importante pour la laisser à la merci de la soif de profit", "La révolution verte n’est possible que si nous mettons hors-jeu les multinationales de l’énergie", "Nous voulons un secteur public de l’énergie". Le PTB veut "retirer de la route autant de trafic que possible". Pour les transports de marchandises à longue distance, il se prononce pour l’obligation de recourir au rail et aux voies d’eau. Pour les personnes, il plaide pour "un vaste plan de développement de transports publics" plus fréquents, plus confortables et meilleur marché. Il ne demande pas la gratuité. Le PTB ne revendique pas l’entreprise publique d’isolation/rénovation des logements – qui figure au programme de la FGTB wallonne. Il prône plus modestement un "soutien de la collectivité" à l’isolation des habitations récentes, par "un système de tiers payant". Problème: ce système n’est incitatif que pour les propriétaires. Le PTB se prononce pour la fermeture des centrales nucléaires conformément à la loi Deleuze. Il réclame des "entreprises publiques communales de production d’énergie verte bon marché" et veut que les conseils d’administration de celles-ci soient élus par les consommateurs. Quoique positif, le texte est ambigu sur certains points clés. En dépit des affirmations sur le service public de l’énergie, on ne sait pas au final si le PTB propose d’exproprier les multinationales ou de les contourner par l’investissement public local dans les renouvelables. Le terme "nationalisation" n’est pas utilisé. A certains moments, on a le sentiment que le PTB redécouvre "l’économie mixte". Le programme cite en exemple les municipalités allemandes qui ont rompu avec les grosses entreprises comme RWE ou E.on pour créer leur propre compagnie publique d’énergie. Cette expérience est intéressante, mais il n’est pas vrai que la ville de Munich soit un modèle de passage
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aux renouvelables: l’électricité produite provient à 30% du charbon importé de Colombie (et à 37% du gaz naturel). Le PTB pense que la transition énergétique est possible sans réduire la production matérielle et les transports. Il évite ainsi la question la plus difficile: comment sauver le climat tout en supprimant le chômage? Selon nous, cette question ne peut être résolue que par une stratégie anticapitaliste, incluant notamment les 32h sans perte de salaire ainsi que la suppression des productions inutiles et nuisibles (avec reconversion des travailleurs). Un texte intéressant mais qui mérite d’être approfondi et clarifié par le débat. ■
"Une autre politique de la dette pour enrayer la crise des États" ✒ par Freddy Mathieu, pousseur de la liste PTB-GO! à la Chambre dans le Hainaut Sous ce titre, intégré au chapitre "Europe", on trouve les constats et les propositions du PTB sur la problématique de la dette. Quelques morceaux choisis: "Dans les pays du Sud, la dette n’est pas liée aux investissements réalisés au profit de la population" (p.64) ;
"Si nous combattons les comportements parasitaires ainsi que la spéculation structurelle, la dette publique pourra être ramenée à des proportions raisonnables" (p.63) ; "Pour réduire la dette qui pèse sur tous les pays d’Europe, ce n’est pas la voie des restrictions et de la régression sociale qu’il faut suivre. Et ce ne sont pas les victimes qui doivent payer, mais les responsables. Il faut un audit approfondi, transparent et démocratique pour faire la clarté sur les véritables causes de la dette des pays européens, et ainsi déterminer quelle sera la part à rembourser par la population" (p.63-64). C’est une des premières fois que le PTB se prononce en faveur de l’audit sur la dette et de l’annulation des dettes illégitimes. On ne peut que se féliciter de cette évolution. Il y a cependant des nuances et des contradictions dans le texte. D’abord sur les constats: dans la vision du PTB, la dette illégitime n’est pas une notion politique. Il ne s’agit pas d’amorcer une dynamique unifiante et mobilisatrice de contrôle ouvrier et populaire, partant de l’arnaque de 2008-2009, pour déboucher sur l’annulation pure et simple de la dette. Pour le PTB, la dette illégitime semble plutôt une notion assez technocratique de droit international ("De nombreux textes juridiques, comme la Charte des Nations Unies à la base du droit international, confirment que les droits de l’homme priment sur les droits des créanciers" – p.64) permettant de faire le tri entre les dettes illégitimes, qui seront annulées, et les autres, qui seront honorées. Plutôt qu’un électrochoc pour sortir de la logique infernale de la dette, on nous propose de la gérer de manière graduelle, en bon père de famille: "L’objectif premier étant de réduire le montant et le rythme des remboursements" (p.64). Dans les solutions proposées sur la question de la dette, le programme se limite à indiquer: "Nous voulons réduire le montant et le rythme du remboursement et diminuer les taux d’intérêt. Nous exigeons la remise de toutes les dettes illégitimes des pays du tiers monde et du sud de l’Europe". Pourquoi couper ainsi l’Europe en deux? Les milliards que notre gouvernement a engouffrés dans la crise des banques sontils "légitimes"? Pour nous, sur la question de la dette comme sur celle des banques (et plus généralement sur tout ce qui sert de prétexte à des politiques d’austérité), il est
photo: mediActivista
analyse critique du programme du PTB
Energie et climat: casser les fossiles ou les contourner?
Union européenne: ne jeter que Lisbonne et le TSCG?
En plus de déboucher sur des revendications qui entraineraient au mieux des aménagements de surface, une telle posture met de côté la perspective de construire une autre Europe – internationaliste, égalitaire, et basée sur une démocratie réelle et solidaire – dont le PTB se réclame pourtant. C'est aussi laisser le terrain de l'euroscepticisme à la droite et à l'extrême droite plutôt que de l'investir et de batailler pour braquer à gauche toute. Pourtant, il y a urgence à s'engager ouvertement en faveur d'une rupture à gauche avec cette Union européenne étant donné la montée en puissance des forces réactionnaires qui récupèrent la colère légitime des peuples d'Europe. Cette montée en puissance, l'analyse du PTB la néglige largement malgré les attaques et les reculs engrangés contre les droits des femmes et des immigrés; et malgré la violence de plus en plus visible et assumée des groupes néofascistes dans les rues comme dans les enceintes parlementaires. ■ [Lire la suite du dossier en page 18.]
analyse critique du programme du PTB
impératif de développer un programme de rupture avec le système capitaliste car c’est lui la cause de tous nos malheurs. A 50 jours des élections, la socialdémocratie est bien capable de durcir le ton et d’essayer de récupérer telle ou telle revendication pour donner le change. Il serait erroné de faire croire aux travailleurs que l’austérité est seulement "absurde" et que quelques mesures raisonnables permettront de remettre le capitalisme dans le droit chemin. Plus que jamais la gauche de gauche doit propager un projet alternatif global, partant du bon sens des gens, avançant des revendications radicales: cela ne veut pas dire maximalistes ou illusoires mais qui vont à la racine des problèmes. ■
✒ par Céline Caudron, 4e candidate
image: Little Shiva
sur la liste PTB-GO! pour le Parlement européen Comme la plupart des organisations de gauche, le PTB dresse des constats justes à propos des désastreuses conséquences sociales, environnementales et démocratiques des politiques européennes mais entretient l'illusion qu'un changement de cap reste possible dans le cadre de cette Union européenne. Quand le PTB souligne à juste titre que l’UE s'enfonce de plus en plus dans la voie néolibérale, il oublie de situer la ligne de départ. Ainsi, le programme revendique l'abolition du Traité de Lisbonne, du pacte Europlus, du sixpack, du Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) et des autres mesures qui renforcent la "gouvernance économique" mais sans remettre en cause ni les Traités fondateurs ni les institutions de l'UE capitaliste. En négligeant la complicité de tous les gouvernements à travers ces politiques européennes pour pointer le modèle allemand comme l'ennemi à abattre, en imaginant le Parlement européen comme un outil démocratique, équivalent supranational des parlements nationaux, le PTB mise sur l'augmentation du poids des Etats et du Parlement européen pour construire des garde-fous contre les politiques européennes actuelles. la gauche #67 avril-mai 2014
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aidez-nous!
Je soutiens la campagne de la LCR sur les listes PTB-GO!
Campagne pour les élections du 25 m
Je voudrais aider: ❍ Je vote pour les candidat∙e∙s LCR
Chambre – Parlement wallon – Parlem Région Bruxelles-Capitale – Parlement
sur les listes PTB-GO! ❍ Je veux récolter ___ voix dans mon entourage pour les candidat∙e∙s LCR ❍ Je veux devenir membre de la LCR ❍ Je veux m’abonner à La Gauche
A mon rythme: ❍ Je voudrais distribuer des tracts dans mon quartier ❍ Je voudrais aider à la campagne sur le net (Facebook, Twitter, courriels) ❍ Je veux soutenir financièrement la LCR et je verse ___ € pour le fonds de lutte sur le compte BE58 0016 6284 0179 (rue Plantin 20, 1070 Bruxelles). ❍ Autre (spécifier):
En équipe : ❍ Je voudrais distribuer des tracts en équipe ❍ Je voudrais aider à l'organisation d'événements ❍ Je voudrais participer à l'envoi de mailings ❍ Autre (spécifier) : nom........................................................... prénom...................................................... tél............................................................... rue et numéro........................................... ................................................................... code postal et localité................................ ................................................................... e-mail........................................................ facebook..................................................... twitter......................................................... entreprise/école......................................... syndicat...................................................... ................................................................... Renvoyez-nous cette page dûment complétée à : LCR Campagne Rue Plantin 20, 1070 Bruxelles
16 la gauche #67 avril-mai 2014
La LCR sur les listes PT Il est rendez-vous qu'il ne faut pas manquer !
Le 25 mai 2014, pour la première fois depuis longtemps, la gauche de gauche aura la possibilité de faire élire des représentant∙e∙s au Parlement fédéral et dans les régions. Aujourd’hui, la fracture sociale qui mène jusqu’à la pauvreté et la destruction de l’environnement nous impose un choix radical. Face à la montée des inégalités et du chômage et aux attaques contre les droits sociaux, fruits de décennies de luttes et de sacrifices, face à l’absurde politique de rigueur imposée par la commission européenne avec l’aval de tous les gouvernements nationaux, une autre voix doit se faire entendre dans les enceintes parlementaires. Une voix qui propose des alternatives sociales et écologiques et relaie les luttes sociales sur le terrain. Le premier mai 2012, la FGTB de Charleroi appelait au rassemblement autour d’une alternative anticapitaliste à gauche du PS et d’Ecolo. D’autres secteurs syndicaux, comme la CNE, se montrent ouverts à cette perspective. Les lignes bougent. La LCR s'est engagée dans cette dynamique des listes PTB-GO! (Gauche d’ouverture) qui regroupent autour du PTB des personnalités indépendantes, des militants syndicaux et associatifs et des candidat∙e∙s de la LCR et du Parti communiste.
Aidez-nous!
Pour mener à bien cette campagne la LCR a besoin du soutien de tous: militant∙e∙s, membres de soutien, sympathisant∙e∙s, abonné∙e∙s à La Gauche. Car dans la compétition électorale du 25 mai, c'est comme dans la vie: deux poids, deux mesures! Les lois électorales et les réglementations diverses ne sont pas équitables à l'égard des "petits" partis, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas (encore) représentés au Parlement.
Vous voulez des exemples? Le tirage au sort des numéros de liste se fait d'abord pour les partis représentés au Parlement (sans aucune justification). L'accès aux "grands" médias (télévision, radio) est discriminatoire pour les "petits" partis. Bon nombre d'administrations communales ne réservent qu'un espace minimum (voire parfois rien du tout!) pour les affiches électorales des petites listes. Un seuil électoral de 5% a été instauré (pourquoi pas 10% comme en Turquie, tant qu’on y est?)
Dimanche 11 mai à 14h30 Meeting électoral de la LCR La Tentation
rue de Laeken 28, 1000 Bruxelles (Metro De Bouckère) avec :
Olivier Besancenot (NPA) Pauline Forges (LCR-SAP) Neal Michiels (LCR-SAP) Céline Caudron (LCR-SAP) Daniel Tanuro (LCR-SAP) Aurélie Decoene (PTB)
un.e candidat.e du PC
Irène Pêtre
(signataire de l’appel PTB-GO!) Notre camarade Olivier Besancenot (NPA) sera à Bruxelles le 11 mai prochain pour soutenir les candidats LCR sur les listes PTB-GO! et participer à la campagne pour faire élire des député∙e∙s de gauche en Belgique.
aidez-nous!
mai 2014
TB-GO!
ment de la européen
Lundi 5 mai à 18h Grand débat électoral entre les partis de gauche: PS/SP.A, Ecolo/Groen, PTB-PVDA-GO! Modérateur : Rudy Janssens, secrétaire fédéral CGSP-ALR BRU Salle A, rue du Congrès 17-19 1000 Bruxelles Organisé par : CGSP- ALR et CGSP-Cheminots de Bruxelles
Vendredi 11 avril à 19h30 Rencontre-débat avec des candidat.e.s PTB-GO! Espace Marx
4 rue Rouppe, 1000 Bruxelles (M° Anneessens) avec :
Roland Nyns (PC) Marie-France Deprez (PC) Yves Pierseaux (PC) Benjamin Pestieau (PTB) Pauline Forges (LCR)
www.lcr-lagauche.org
Nos vies valent plus que leurs profits! la gauche #67 avril-mai 2014
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✒ par Céline Caudron et Pauline Forges, respectivement 4e candidate sur la liste européenne et 8e candidate sur la liste PTB-GO! pour le Parlement bruxellois Si le féminisme est absent du programme du PTB en tant qu'alternative de société basée sur l'égalité des droits entre tou∙te∙s, un chapitre du programme reconnait "une inégalité structurelle entre les femmes et les hommes" et propose une série de bonnes revendications pour la corriger. Mais force est de constater que la dimension "genre" ne bénéficie pas d'une place d'honneur dans le programme, avec un chapitre en 13e position des priorités (sur 17) et surtout, sans intégration réelle
à travers l'ensemble des analyses et revendications du programme. Dommage parce que, sans décliner l'ensemble des propositions à partir de la situation particulière que vivent les femmes, elles ne pourront pas toujours en bénéficier concrètement. Par exemple, il est évidemment nécessaire, comme le propose le PTB, d'augmenter les salaires et de veiller à une application stricte de la convention collective de travail n°25 sur l'égalité salariale entre hommes et femmes. Mais si, en même temps, on ne prend pas de mesures concrètes pour améliorer la mixité de tous les emplois (secteurs et fonctions) et pour empêcher les négociations individuelles de salaire (primes au mérite, avantages extralégaux, etc.) au détriment des négociations collectives, les femmes continueront à se retrouver dans les catégories de travailleurs/euses les moins bien payés. Le titre du chapitre "Mettre l'égalité des genres à l'ordre du jour" pose aussi question. S'agit-il de maintenir des "genres", c'est-à-dire des rôles sociaux distincts en fonction du sexe des personnes en veillant simplement à ce que l'un ne prime pas sur l'autre? Si le chapitre constate l'existence de tâches "genrées" et prône une meilleure répartition, aucune proposition concrète ne va dans le sens d'une déconstruction des rôles sociaux, pour que chacun∙e puisse vivre en bénéficiant des mêmes droits et libertés sans être coincé∙e dans le carcan traditionnel et moral en fonction de son sexe. Dans le même sens, les "normes" hégémoniques en matière de sexualité ne sont pas non plus questionnées. On ne retrouve pas un mot dans le programme sur les droits des personnes LGBT+. Pourtant, les discriminations à leur égard continuent de traverser la société. Enfin, l'égalité des droits entre hommes et femmes commence par une vigilance à travers ses propres pratiques quotidiennes. Pour un parti, ça implique de porter une attention particulière à ne pas véhiculer de stéréotypes sexistes à travers sa communication politique. Ca implique aussi de contribuer à la féminisation du monde politique et, quand on a en la possibilité, des enceintes parlementaires en plaçant davantage de femmes en position éligible ou, du moins, en pratiquant la "tirette" (un homme-une femme) sur les listes électorales. Nous regrettons que les listes PTB-GO! n'aient pas prêté plus d'attention à ces éléments mais espérons que, à l'avenir, ils figureront effectivement "à l'ordre du jour". ■
badge: Rafik Khalfaoui – photomontages: Little Shiva
analyse critique du programme du PTB 18 la gauche #67 avril-mai 2014
Féminisme: encore un effort!
lui la guerre comme la nuée porte l'orage", comme disait Jean Jaurès.
✒ par Guy Van Sinoy, 56e candidat
Concrètement le PTB a 6 propositions:
effectif sur la liste PTB-PVDA-GO pour le Parlement bruxellois S'il y a bien un terrain sur lequel, on lira avec attention les propositions du programme électoral 2014 du PTB c'est bien celui de la paix. Car cela implique de se positionner en tant que parti sur l'actualité politique internationale. Et les lecteurs avertis savent probablement que sur ce terrain le PTB a été amené au fil des ans à effectuer une série de tournants à 180° à couper le souffle. Un seul exemple, après avoir considéré pendant de longues années que les dirigeants de l'URSS étaient des révisionnistes qui avaient rétabli le capitalisme à l'Est et que le "social-impérialisme" représentait le plus grand danger pour la paix, le PTB a changé son fusil d'épaule pour finalement considérer que Eltsine avait été l'un des artisans de la restauration du capitalisme en ex-Union soviétique (et par conséquent que personne ne l'avait fait avant lui!). Mais cela offre-t-il un intérêt de comparer l'évolution du programme du PTB sur une longue période de 20 ou de 30 ans? Comparons donc les différences sur une période de référence plus courte. Lors de son 7e congrès tenu en 2002, le PTB a adopté une série de thèses sur la mondialisation où il est clairement énoncé que l'impérialisme s'oriente résolument vers la guerre comme solution à la crise, que seul le socialisme peut sauver l'humanité et assumer la justice sociale, la démocratie, la libération nationale et la paix. Autre point important, la Belgique doit sortir de l'OTAN. Par contre le chapitre du programme électoral de 2014 ressemble plutôt aux positions défendues par les partis communistes des années 50 et 60, à l'époque de la coexistence dite pacifique. A l'époque, les PC n'avaient que le mot "Paix" à la bouche. "Paix en Algérie!, Paix au Vietnam!" sans préciser si cette "paix" signifiait la défaite du colonialisme ou de l'impérialisme ou si elle était seulement un cessez-le-feu en attendant des jours meilleurs. Vous pouvez retourner dans tous les sens le chapitre "Paix" de l'actuel programme électoral du PTB, vous n'y trouverez pas l'idée que seul le socialisme peut amener la paix, ni même que "le capitalisme porte en
1. Le retrait immédiat des troupes et des avions F-16 belges de l'Afghanistan; 2. Pour une solution négociée pour l'Afghanistan; 3. Pas de participation à des interventions militaires à l'étranger; 4. La Belgique doit ramener au minimum sa contribution à l'OTAN en attendant la révision du rôle de la Belgique au sein de l'OTAN. Pas d'achat de nouveaux avions (F-35); 5. La Belgique doit développer sa propre vision et stratégie de paix; 6. Pour les Afghans: —une évaluation sérieuse de la situation en Afghanistan et des dangers d'aggravation après 2014; —un moratoire sur les expulsions vers l'Afghanistan; —un statut légal pour tous les réfugiés afghans qui séjournent déjà sur notre territoire. On peut sans réserves approuver les points 1 et 3 ainsi que le refus de l’achat des
F-35. Pour le point 2, on peut se demander légitimement ce que signifie "une solution négociée"? Et avec qui? Pour le point 4, notons que le PTB ne revendique plus de sortir de l'OTAN, mais une "contribution minimum" de la Belgique. Voilà qui semble en rupture avec la tradition de toute la gauche en Belgique. Il n'y a pas non plus de revendication de bannir les armes nucléaires entreposées à Kleine Brogel (ce que réclame aujourd'hui le Sp.a!). Pour le point 5, que signifie "développer sa propre vision de la paix"? Dans le cadre du capitalisme? Enfin, le point 6 ne revendique pas la régularisation des Afghans réfugiés en Belgique, mais seulement un moratoire (une suspension) des expulsions et "un statut légal" (lequel?). Voilà un "programme pour la paix" qui manque singulièrement de tonus et surtout qui pose la question de la paix indépendamment du capitalisme. Dans le passé, les partis communistes illustraient souvent leurs publications pacifistes par le dessin ou la photo d'une colombe. Dans son programme électoral de 2014, le PTB a choisi un pigeon. Mais qui est le pigeon? ■
analyse critique du programme du PTB
"Tendre à la paix"?
la gauche #67 avril-mai 2014
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Réduction généralisée et radicale du temps de travail!
✒ par Denis Horman D’un côté, plus de 600.000 demandeurs d’emploi; plus d’un million de personnes totalement ou partiellement hors emploi! Dès janvier 2015, 50.000 demandeurs d’emploi, n’ayant pu trouver un premier job ou n’ayant pas assez de "jours de travail" (travailleur.euse.s à temps partiel, intérimaires…) pour toucher une allocation de chômage, seront exclu.e.s de ce droit. Des milliers d’autres chômeur.euse.s (chefs de famille, isolés) ne recevront plus qu’une indemnité minimale, les poussant en-dessous du seuil de pauvreté. Aujourd’hui déjà, quatre chômeurs sur cinq, un enfant sur quatre, un pensionné sur trois vivent en dessous du seuil de pauvreté (moins de 1000 euros/ mois pour un isolé). Ainsi, à cause de ces deux mesures phare du gouvernement Di Rupo (fin de droit et dégressivité des allocations de chômage), plus de 100.000 personnes iront simplement rejoindre les 15% de pauvres que compte déjà la Belgique, pourtant l’un des pays les plus riches de la planète (17ème mondial en termes de PIB/habitant, 10ème en Europe, devant la France, l’Italie, l’Angleterre et… l’Allemagne!) De l’autre côté, dans le secteur privé comme dans le public, des milliers de
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travailleur.euse.s "perdent leur vie à la gagner", dans des cadences infernales, la dégradation des conditions de travail, le temps partiel contraint, les horaires flexibles et les heures supplémentaires, le stress quasi permanent engendrant les troubles du sommeil et les maladies professionnelles, avec en prime le blocage des salaires! Alors, pour travailler moins, pour travailler tous et toutes et vivre mieux, une revendication phare s’impose: les 32 heures/ semaine (la semaine des quatre jours!), sans perte de salaire, avec embauche compensatoire et baisse des cadences.
Réactualiser la revendication: la semaine des quatre jours!
"De 1880 à 1975, le mouvement ouvrier s’est battu de façon continue pour réduire le temps de travail", rappelle Felipe Van Keirsbilck, secrétaire général de la CNE. "Ce combat a perdu de sa vigueur depuis trente ans. C’est l’un des reculs idéologiques de la gauche depuis la contreoffensive libérale des années 1980." (1) En effet, à partir du milieu des années 1980 jusqu’à aujourd’hui, la durée hebdomadaire des salariés à temps plein n’a quasiment plus diminué (2). Depuis la loi du 10 août 2001, la durée légale du travail est de 38 heures par semaine. Mais, près d’un salarié sur trois déclare travailler plus de 38 heures par semaine (3).
Si, de 1985 à 2011, la durée hebdomadaire moyenne est passée de près de 40 heures à moins de 36, cela est dû, pour l’essentiel, à deux facteurs: d’une part, à des commissions paritaires sectorielles qui ont fixé des normes de travail autour des 36, 35 heures/semaines et d’autre part, au travail à temps partiel, surtout parmi les femmes. Selon l’enquête LFS (4), 46% des femmes salariées ont un statut de travailleuses à temps partiel, contre 10% des hommes. Et pour la majorité (53% des femmes et 59% des hommes), il s’agit d’un travail contraint pour des raisons liées au marché du travail, à l’insuffisance de service de garde ou à des statuts particuliers. D’après le CRISP, "les syndicats reconnaissent que, depuis la fin des années 1990, les négociations sur le temps de travail se sont focalisées sur la question de la flexibilité, sous une forte pression des employeurs. Entre les deux enquêtes menées par Eurofound, en 2004 et 2009, le pourcentage des entreprises belges du secteur marchand, déclarant mettre en œuvre des arrangements de temps de travail flexibles, est passé de 23% à 40%". Aménagement du temps, crédit temps, interruption de carrière, congés thématiques, horaires flexibles, prépension à mi-temps (supprimée depuis janvier 2012!), la réduction du temps de travail
w w w.brasslyon.com/Fun_Clock____Whatever- details.aspx
projet de société
Une revendication phare:
et de la Solidarité, Martine Aubry, sous le gouvernement de Lionel Jospin, entre 1998 et 2002). Sur les 350.000 embauches attribuées aux 35h, beaucoup ne leur furent pas imputées. Elles ont concerné peu les salariés de la production qui ont vu leur travail s’intensifier. La modulation annuelle prévue par la loi a permis d’augmenter la productivité du travail. Les contraintes horaires se sont alourdies: travail en équipe, travail de nuit, du week-end. Les nouveaux modes de travail, le "juste à temps", ont accentué la polyvalence, les changements de rythme de travail, avec l’augmentation du stress. Sur la fiche de paie, la RTT a été prétexte au blocage des salaires… Mais, malgré cela, le patronat a tout fait pour pousser les gouvernements suivants à revenir sur la loi des 35 heures.
Réduction radicale et collective du temps de travail
Pour contraindre le patronat à ouvrir l’embauche aux milliers de chômeurs, aux jeunes en particulier (en Belgique un jeune sur cinq est au chômage; en Wallonie, un jeune sur quatre et à Bruxelles, un jeune sur trois), une réduction radicale du temps de travail s’impose: compte-tenu de la réduction hebdomadaire moyenne actuelle, les 32 heures sont un objectif réaliste. Pas question "d’annualisation" du temps de travail, qui permet à l’employeur de faire travailler un peu plus pendant une certaine période et un peu moins durant une autre, du moment que la moyenne d’heures est respectée. Une telle flexibilité évacue la nécessité d’embaucher. Pourtant, une nouvelle loi et des accords paritaires (patrons-syndicats), sur le plan sectoriel, entrainent l’application de cette "annualisation" du temps de travail dans les règlements de travail des entreprises qui font parties de ces conventions sectorielles. (8) La "semaine de quatre jours!" Une meilleure garantie pour forcer la création d’emploi avec embauches compensatoires à la réduction du temps de travail? C’est, par exemple, ce que laisse entendre la secrétaire nationale de la CNE Commerce, Irène Pêtre, réflexion faite dans le cadre de la campagne menée par la CNE Commerce pour la réduction collective du temps de travail: "Chaque fois qu’on réduit le temps de travail de façon collective, on constate que l’érosion de l’emploi est moins rapide pendant quelques années. C’est d’ailleurs pour cette raison que la réflexion nous amène vers une réduction du temps de travail sur la semaine plutôt que sur
Travailler moins, travailler tou.te.s, mieux vivre! La réduction du temps de travail figure bel et bien parmi les aspirations des salariés et des demandeurs d’emploi (…). La formule qui recueille le plus de succès est la réduction du temps de travail en fin de carrière. Pour les salariés, viennent ensuite, à égalité, la semaine de quatre jours et les congés spéciaux(…). Les couples avec ou sans enfant, et les isolés avec enfant sont ceux qui accordent les scores les plus hauts à la formule de la semaine des quatre jours. La limitation des heures supplémentaires obtient également des scores plus élevés pour ces derniers, particulièrement parmi les couples(…). Une réduction de salaire en lien avec une politique de réduction du temps de travail est refusée par 45% des salariés et 47,2% des demandeurs d’emploi. Les salariés sont 45,9% à accepter l’hypothèse (…). Les objectifs de qualité de vie sont ceux pour lesquels tant les salariés que les demandeurs d’emploi considèrent le plus que la réduction du temps de travail peut apporter une aide significative. Mais les salariés ont davantage de craintes concernant la qualité de vie au travail: 58,1% d’entre eux pensent que la réduction du temps de travail oblige à faire le même travail en moins de temps et 61,4% qu’elle augmente la flexibilité des horaires. ■
projet de société
s’est faite à travers quelques conventions sectorielles et surtout à travers une flexibilité du travail de plus en plus poussée et des solutions individuelles, laissant d’une part sur le carreau des dizaines de milliers de personnes sans emploi, poussant d’autre part encore plus à la productivité, à l’usure et la détérioration des conditions de travail. Il y a quelques années, c’est la CNE (CSC) qui a relancé le débat, plaidant pour une réduction collective de temps de travail vers les 32 heures et poussant à des accords en commissions paritaires pour les 35 heures (ou 36 avec 6 jours de congés). De son côté, Anne Demelenne, secrétaire nationale de la FGTB, lançait, début 2010, un plaidoyer en faveur de "la semaine de quatre jours." (5) Proposition qui a suscité des réactions en chaîne: le patronat considérant cette proposition tout simplement comme "farfelue"; le CDH, via Joëlle Milquet, à l’époque ministre fédérale de l’Emploi, s’opposant catégoriquement à une réduction généralisée du temps de travail, ajoutant: "Moi aussi j’aimerais bien travailler 32 heures par semaine… Mais qui va payer?" Elio Di Rupo, à l’époque président du PS, avec sa prudence de Sioux bien connue, soulignait l’importance d’une étude et d’un débat autour de cette question, avis partagé par le co-président d’Ecolo, JeanMichel Javaux. Même Claude Rolin, alors secrétaire général de la CSC y allait de sa réserve: "A la CSC, nous n’avons jamais été favorable à des formules linéaires. La semaine de quatre jours, ce n’est pas la panacée. Et puis, il faut aussi se demander comment on financera cette réduction du temps de travail". Heureusement, il y a aujourd’hui dans le mouvement syndical d’autres prises de positions. A titre d’exemple, la FGTB de Charleroi-Sud Hainaut vient de se prononcer pour la réduction collective du temps de travail à 32 heures, sans perte de salaire, avec embauche compensatoire et baisse des cadences.(6) La CNE (CSC) Commerce revendique les 32 heures en 4 jours, sans perte de salaire, avec embauche compensatoire et sans augmentation des cadences. Réunis les 14 et 15 novembre 2013, plus de 200 militants et militantes du secteur Commerce se sont lancés dans une campagne sur cet objectif. (7) Les doutes, les réserves et les craintes exprimés dans l’enquête de la FTU sont certainement alimentés par l’impact, en France, des lois sur les 35 heures, lois dites "Aubry" (de la ministre de l’Emploi
Extraits de l’enquête réalisée en Belgique francophone, au 2ème trimestre 2012, par la Fondation Travail-Université à la demande de la CSC.
La LCR soutient la revendication avancée par la FGTB de Charleroi, par la CNE Commerce. Nous la portons dans les onze mesures d’urgence, défendues par nos candidat.e.s sur les listes PTB-GO pour les élections du 25 mai 2014: 32 heures par semaine, pour toutes les entreprises, sans perte de salaire, sans flexibilité, avec les embauches correspondantes et la baisse des cadences. [Voir notre programme en supplément à ce numéro.] la gauche #67 avril-mai 2014
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Et qui va financer cette réduction du temps de travail?
Non seulement vous voulez une réduction radicale du temps de travail, mais aussi pour toutes les entreprises? Mais, qui va payer cela? Pas les travailleur. euse.s en tout cas! Même si, comme nous l’avons vu dans l’enquête de la Fondation Travail-Université, 45,9% des salariés seraient prêts à accepter cette hypothèse. Il faut croire que "la souffrance au travail" est à ce point insupportable! La réduction du temps de travail (RTT) est d’abord une question de répartition des gains de productivité. La Belgique caracole en tête du classement de la productivité, avec une moyenne de 239.000 euros de chiffre d’affaires réalisé par équivalent temps plein.(11) Depuis 1980, la productivité en valeur a été
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multipliée par 3, alors que la part salariale dans le PIB a diminué des 10% (12). Mais où sont passés ces gains de productivité, ces bénéfices plantureux, fruits du labeur des travailleurs? Pour les investissements? Si peu! Pour la création d’emploi? Que nenni! Dans la poche des actionnaires? Ah ça oui! La FGTB de Verviers – ce que d’autres régionales syndicales pourraient faire – a examiné les comptes publiés par 88 entreprises verviétoises auprès de la Banque nationale. Leurs bénéfices ont enregistré une augmentation et ont été pompés à 60% par les actionnaires en tant que dividendes. "Il s’agit, pour les travailleurs, de récupérer la part des richesses qui a surrétribué les actionnaires pour financer la réduction collective du temps de travail, des politiques industrielles, la transition vers de nouveaux modèles de productions, l’augmentation des salaires bruts, le relèvement de la pension légale, le rattrapage et la liaison au bien-être des allocations sociales…" (Congrès statutaire de la FGTB wallonne, mai 2010 "Les solidarités moteurs de développement", p. 40).
Arrêts des cadeaux, satisfaction des besoins sociaux!
En 20 ans, souligne le programme d’urgence sociale de la LCR, les réductions de cotisations patronales sont passées de 756 milliards d’euros à près de 10 milliards par an… sans la création d’un seul emploi, mais en déstabilisant la Sécu. En 2012, mille entreprises belges ont réalisé ensemble un bénéfice de 50 milliards d’euros et n’ont payé que 6,17% d’impôts sur ces bénéfices. Ainsi, elles ont pu profiter des intérêts notionnels (qui ont coûté, en 2012, 6,2 milliards d’euros à la collectivité) et d’une réduction fiscale de 14 milliards d’euros, tout en baissant leurs effectifs de 7% – soit une perte de 19.646 équivalents temps plein. (13) Il est temps de stopper tous ces cadeaux! Avec l’argent de la collectivité et une fiscalité tout simplement plus décente sur les entreprises, au prorata de leurs bénéfices, et sur les hauts revenus, il y a, pour les pouvoirs publics, suffisamment de besoins sociaux à satisfaire et de création d’emplois à réaliser dans l’enseignement, les écoles, les crèches, les hôpitaux, les logements sociaux, les transports en commun, les énergies renouvelables… Quitte à financer, mais de manière ciblée et sous "contrôle ouvrier", une partie du coût de la réduction du temps de
travail à 32 heures, sans perte de salaire, avec embauche compensatoire et sans augmentation des cadences, dans des PME!
Un enjeu central dans l’affrontement capital-travail
En déterminant et limitant le champ ouvert à l’exploitation, la durée du travail est un enjeu central dans l’affrontement entre le capital et le travail. Vouloir donner au travail une valeur émancipatrice, c’est engager l’affrontement avec la logique de l’exploitation et amorcer la subversion des rapports de production capitalistes. C’est un projet de rupture.(14) La revendication de RTT, telle que nous l’avançons ici, avec plusieurs secteurs syndicaux, est indispensable et urgente pour rendre l’espoir à des centaines de milliers de chômeur.euse.s et pour faire en sorte que des centaines de milliers de travailleur. euse.s ne "perdent leur vie à la gagner". Elle implique un combat interprofessionnel et unitaire, FGTB-CSC, travailleurs avec ou sans emploi, du secteur privé et public. Un combat appuyé par les mouvements sociaux et les organisations politiques de la gauche de gauche. Un combat qui, mené sur le terrain social, puisse déboucher sur l’imposition d’une loi sur les 32 heures, garante d’une application généralisée de cette mesure. A la fin de cette année 2014, doivent démarrer en principe les discussions patronat-syndicats pour le renouvellement de l’accord interprofessionnel. Une occasion à saisir par la gauche syndicale pour commencer à se faire entendre! ■
(1) Le Vif, 15 janvier 2010 (2) Voir le Courrier hebdomadaire du CRISP, "La réduction du temps de travail ", n°2191-92 (3) Voir FTU (Fondation travail-Université), n° 2013 -12/11/2013 (4) Enquête européenne sur les forces de travail, année 2012 (5) Le Vif, 15 janvier 2010 (6) FGTB Charleroi-Sud Hainaut, brochure Changer de cap maintenant: 10 objectifs d’un programme anticapitaliste d’urgence (7) Voir Le Droit de l’Employé, CNE, décembre 2013: Commerce, osons travailler moins (8) Programme du PTB-GO!, Notre avenir est social, p.18 (9) Irène Pêtre, La réduction du temps de travail dans Le Droit de l’Employé, CNE, mars 2012 (10) Ibid (11) Programme PTB-GO!, p.17 (12) Congrès statutaire de la FGTB wallonne, "La solidarité, moteur de développement", Orientations, mai 2010, p.12 (13) Programme PTB-GO!, pp.18-19 (14) Contretemps, dossier "Emploi, comment en créer", 1er trimestre 2014, pp.67-94
http://en.wikipedia.org/wiki/Chipko_movement
projet de société
la journée: non seulement c’est plus confortable pour le travailleur de répartir des heures sur quatre jours plutôt que sur cinq, mais surtout ça oblige l’employeur à créer des emplois supplémentaires pour compenser l’absence de ce 5ème jour."(9) Quant aux travailleurs, surtout travailleuses, à temps partiel contraint dans le secteur commerce (temps partiel = salaire partiel = retraite partielle), la secrétaire nationale CNE poursuit sa réflexion: "La réduction collective du temps de travail est beaucoup plus égalitaire, puisqu’elle rapproche le statut à temps partiel de celui du temps plein, contrairement aux mesures individuelles qui s’accompagnent toujours d’une diminution du revenu et s’adressent essentiellement aux femmes."(10) Il va sans dire que cette réduction radicale, collective et généralisée du temps de travail rejoint l’aspiration généralisée à un travail moins stressant, abrutissant, qui permette de concilier vie professionnelle et vie privée, avec l’envie de souffler, d’avoir d’autres activités… L’application de cette réduction du temps de travail et son impact impliquent des mesures d’accompagnement: le contrôle des travailleurs et de leurs organisations syndicales sur l’embauche, les cadences de travail, sur les heures supplémentaires; la fin des emplois précaires, la suppression des horaires flexibles; pour des emplois statutaires, des contrats à durée indéterminée; l’interdiction des licenciements collectifs; pour les travailleurs âgés, dont la plupart sont "au bout du rouleau", droit au départ à la retraite anticipée, à la prépension à 55 ans.
✒ par Matilde Dugaucquier Tuzla, ville industrielle du nord de la Bosnie-Herzégovine et capitale du canton du même nom. Durant la guerre, les milices serbes qui l'encerclaient se contentaient de rares frappes très ciblées afin de ne pas détruire son complexe industriel fort de 8 usines, un joyau à l'échelle du pays. Pourtant, à partir de la fin des années 1990, les politiques locaux s'engagent dans des privatisations qui mènent peu à peu à son démantèlement; corruption, fraudes et relations clientélistes sont bien sûr de mise. Comme partout en Bosnie-Herzégovine, le taux de chômage y dépasse aujourd'hui les 40%. Alors, le 5 février dernier, plusieurs centaines de mécontents – chômeu∙r/se∙s, travailleu∙r/se∙s d'usines en faillite ou à l'arrêt, étudiant∙e∙s – se réunissent devant l'édifice gouvernemental du canton pour exiger une vie digne. Face à la répression qu'ils subissent, ce sont 6000 personnes qui manifestent le lendemain contre la misère et le chômage. Des rassemblements de solidarité ont lieu à Sarajevo et dans d'autres villes. Le mouvement de révolte est lancé. Le 7 février, le siège du gouvernement fédéral et de la Présidence à Sarajevo est en feu, tout comme le bâtiment qui abrite le gouvernement cantonal de Tuzla. Celui-ci annonce sa démission. À Mostar, les Bosniaques et
les Croates mettent le feu aux sièges de leurs partis nationalistes respectifs – SDA et HDZ. Le gouvernement du canton de Zenica n'attend pas l'incendie pour tirer sa révérence. Les jours suivants, les manifestations massives s'enchaînent et les revendications prennent forme: augmentation des retraites, révision des privatisations, stop à la hausse des prix des services publics, aux prêts du FMI, à la corruption et aux accords de Dayton. Dans chaque ville, le mouvement se structure en "plénums" où s'exerce la démocratie directe.
C'est pour tenter de saisir la portée de ces événements passés largement inaperçus que notre petite délégation s'est rendue à Tuzla les 8 et 9 mars dernier. L'atmosphère y est électrique…
Au parfum de la révolte s'ajoute celui qui émane de la plus grande centrale thermique à charbon de Bosnie-Herzégovine. Épuisé mais ravi, Gordan, avocat d'une trentaine d'années et militant du mouvement de gauche Lijeva, nous explique le fonctionnement du plénum de Tuzla. Le plénum est une assemblée ouverte à toute personne résident dans le canton. Pour le moment, il se réunit sur base irrégulière et rassemble environ 700 personnes – "Si le local mis à disposition le permettait, il y aurait sans doute plus de
reportage
Bosnie-Herzégovine: réinventer la démocratie!
monde." Douze groupes de travail, soit un par ministère, élaborent des propositions qui sont validées en plénum et seront soumises au nouveau gouvernement. Car le cahier de revendications du plénum de Tuzla exige la mise en place d’un gouvernement technique composé d’experts apolitiques n’ayant jamais eu de poste gouvernemental. Il devra diriger le canton de Tuzla jusqu’aux prochaines élections prévues en juin 2014 et soumettre chaque semaine des rapports sur son travail ainsi que des propositions au plénum. Afin de sauvegarder son indépendance et son rôle contre-pouvoir, le plénum ne présentera pas de candidat, ni pour le gouvernement technique ni pour les élections. Trois commissions apportent un soutien technique aux groupes de travail: la commission logistique, la commission légale et la commission média. L’équipe légale fournit en outre une aide aux personnes poursuivies pour terrorisme ou ayant perdu leur emploi suite aux manifestations. La radicalité de cette situation a de quoi nous surprendre. Le plénum de Tuzla a ainsi obtenu un de droit de veto sur la formation du nouveau gouvernement ainsi qu'une première victoire: la suppression des salaires gouvernementaux que les représentants politiques continuaient de percevoir un an après la fin de leur mandat! Mais à Tuzla, l'une des revendications centrales concerne la résolution rapide de toutes les questions relatives à la privatisation frauduleuse de cinq entreprises de la région. Un treizième groupe de travail spécifique a donc été créé et nous sommes invités à assister à son travail dès le lendemain matin. la gauche #67 avril-mai 2014
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Ce matin-là, une dizaine de personnes sont réunies dans un petit théâtre du centre-ville, dont des représentants des entreprises Dita et Polihem, toutes deux à l'arrêt depuis plus d'un an. On nous informe que, tandis certains groupes de travail sont peu fréquentés, d'autres rassemblent des dizaines de personnes. Les discussions vont bon train. Le cas de l'usine de détergents Dita est emblématique de la situation catastrophique de la région. Rachetée pour un prix symbolique par un particulier proche des dirigeants locaux, elle emploie aujourd'hui 120 personnes contre 750 à l'époque yougoslave, quand elle fournissait l'ensemble des républiques en produits nettoyants de toutes sortes. En 2011, du sel a été introduit dans les machines afin de les enrailler et mettre l'usine en faillite. L'entreprise a également cessé de verser les salaires. Les travailleurs ont donc arrêté le travail et occupent l'usine plus d'un an pour contrer son démantèlement. Dans cette situation critique, ils s'en remettent à la solidarité intra-familiale et inter-usines ainsi qu'à l'aide humanitaire.
À Dita, l'accueil est chaleureux mais les sourires sont amers
Ici, il y a tout ce qu'il faut pour relancer la production et un marché existe bel et bien pour l'écouler. Mais plusieurs obstacles majeurs subsistent: les dettes de l'entreprise auprès des fournisseurs et des employés, la fuite des cadres et ouvriers qualifiés, le vol des câbles électriques et le blocage juridique
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du propriétaire. Il est impossible d'estimer les coûts d'une relance que les travailleurs appellent pourtant de leurs vœux. Seule une décision politique peut les sortir de l'impasse. Nous ne serons pas autorisés à voir les machines mais le responsable du personnel de Polihem, située sur le même complexe, profite de notre présence pour nous faire un état des lieux des destructions occasionnées à son outil. L'après-midi, rencontre avec des membres de Lijeva de Tuzla et Sarajevo. Dans la capitale, ce sont entre 3000 et 5000 personnes, dont de nombreux supporters de foot, qui ont manifesté suite aux événements à Tuzla, et ce malgré la composition différente de la ville: "Ceux qui se sont rassemblés ce jour-là étaient essentiellement issus du sous-prolétariat, des gens qui n’existent même pas pour le gouvernement et n’ont peut-être jamais travaillé... Les policiers en sous-nombre ont jeté des manifestants dans la rivière. Cela a provoqué beaucoup de colère, les gens ont répondu par des jets de pierres. Ils ont fini par brûler le bâtiment du gouvernement fédéral", explique Vuk, reporter présent sur les lieux. La structure du plénum de Sarajevo diffère un peu de celle du plénum de Tuzla: "Nous n'avons pas voulu créer un groupe pour chaque ministère car nous voulons nous concentrer sur les questions de justice sociale. On dirait une grande thérapie collective: les gens viennent parler de leurs problèmes économiques et sociaux, se plaindre des conséquences des privatisations. Environ 3000 propositions ont été enregistrées jusqu'à présent", racontent les militants. Points particulièrement mis en exergue: les Bosnien∙ne∙s en colère ont systématiquement rejeté d'un revers de la main les tentatives d'instrumentalisation communautaire de leur mouvement. Contre ceux qui voulaient le faire passer pour une tentative de déstabiliser
l'autonomie serbe de Bosnie, Banja Luka, principale ville serbe du pays, a rejoint la fronde emmenée par les vétérans de guerre dont les retraites ne sont plus payées depuis des mois. Les accords de Dayton, qui entérinent la structure rocambolesque du pays, sont d'ailleurs en plein dans la ligne de mire des mécontents, car ils ouvrent selon eux la voie à la corruption, à l'inefficacité et à la polarisation de la société sur base communautaire: une fédération, deux entités fédérées – croato-musulmane/ bosniaque et serbe – et 10 cantons – croates, bosniaques ou mixtes – disposant chacun de leur propre exécutif (il faut ajouter à cela le district de Brcko, petite entité autonome faisant la jonction entre les deux parties de l'autonomie serbe) soit 14 gouvernements en tout, la Belgique n'a qu'à bien se tenir! Si de nombreux défis pèsent sur le mouvement des plénums, notamment des tentatives d'infiltration de la part des partis politiques et d'instrumentalisation dans la perspective des élections de juin, celui-ci constitue d'ores et déjà une formidable leçon pour la société bosnienne toute entière: "Les gens ont compris qu'on pouvait obtenir ce qu'on voulait en s'auto-organisant. Du jour au lendemain, des personnes qui étaient apolitiques, voire antipolitiques ou politisées sur une base ethnique, se sont mises à parler de politique, c'est un formidable réveil. Même les syndicats, auparavant alliés du pouvoir, commencent à travailler de façon indépendante au niveau des usines." Les militant∙e∙s avouent cependant que, dans l'euphorie, il est difficile d'envisager une stratégie à long terme face à la baisse de la participation aux plénums et à la perspective des élections. Intrigué∙e∙s par la tournure que prendront les événements, nous nous sommes promis de revenir bientôt. ■
photos p23-25: Chichi Povitch
reportage
Dans chaque ville, le mouvement se structure en "plénums" où s'exerce la démocratie directe
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histoire rebelle
Il y 40 ans, la révolution portugaise enflammait nos espoirs ✒ par Guy Van Sinoy A la fin des années 1960, le Portugal est le maillon faible de la chaîne des pays capitalistes en Europe. La dictature fasciste instaurée par Salazar à la fin des années 20 est toujours en place. Au Sud, les latifundistes possèdent d'immenses propriétés sur lesquelles des journaliers triment pour subsister. Dans l'industrie, les travailleurs sont corsetés dans des dizaines de syndicats corporatistes et les salaires sont très bas (salaire minimum mensuel: 3.500 escudos, soit environ 130 euros). 40 % de la population est illettrée et 2,5 millions de Portugais ont émigré pour fuir la misère. Alors que la plupart des pays d'Afrique sont devenus indépendants, le Portugal mène des guerres coloniales en Angola, au Mozambique et en GuinéeBissau pour tenter de maintenir son empire colonial. 180.000 soldats sont mobilisés pour mener ces guerres et 40 % du budget est consacré à l'armée.
La dictature s'effondre le 25 avril 1974
Le 25 avril 1974, des officiers regroupés au sein du Mouvement des Forces Armées (MFA) se soulèvent et renversent le dictateur Caetano, mettant fin à plus de 40 années de régime fasciste. Le peuple descend massivement dans la rue pour acclamer les soldats révolutionnaires. Les prisons s'ouvrent libérant les prisonniers politiques, les agents de la PIDE (police politique) sont pourchassés dans les rues et arrêtés. La révolution portugaise vient de démarrer à la surprise générale. Y compris à la surprise des militants révolutionnaires de notre génération, celle issue de Mai 68, pour qui le souvenir récent des militaires avait un goût amer: le régime des colonels grecs instauré en 1964 et celui de Pinochet (septembre 1973). Ce qui motive les membres du MFA c'est d'abord la prise de conscience que les guerres coloniales sont sans issues et que
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le retour à la vie civile ne leur offre aucune perspective d'avenir valable. De surcroît, au sommet de la hiérarchie militaire, des généraux conservateurs (Spinola, Costa Gomes) prennent conscience que le régime salazariste est au bout du rouleau et qu'il faut "moderniser" le Portugal.
Premier mai 1974
Un million de travailleurs manifestent dans les rues de Lisbonne et fraternisent avec la troupe. Les dirigeants des partis ouvrier en exil, Mario Soares (Parti socialiste) et surtout Alvaro Cunhal (Parti communiste portugais – PCP), qui s'était évadé de prison après avoir passé de nombreuses années dans les geôles salazaristes, sont follement acclamés. Des dizaines de milliers d'exilés portugais rentrent au pays. La bourgeoisie est bien évidemment prise au dépourvu par la tournure des événements, mais elle va s'efforcer de trouver les hommes capables de canaliser la révolte impétueuse et d'éteindre le foyer révolutionnaire. Le Parti Populaire Démocratique (PPD) de Sa Carneiro est sans doute le parti de droite le plus à même de servir les intérêts de la bourgeoisie, mais dans un premier temps celle-ci va s'appuyer sur des généraux "sûrs" (Spinola, Costa Gomes). Elle prend aussi très vite conscience qu'il lui faudra trouver des alliés politiques dans le camp du mouvement ouvrier.
La gauche portugaise
Dans un premier temps, le PS portugais ne dispose d'aucune force organisée sur le terrain. Son leader, Mario Soares était enseignant à l'université de Vincennes. La Fondation Friedrich Ebert, le très puissant groupe de pression mis sur pied par la social-démocratie allemande (une centaine de bureaux dans le monde) fournira de gros efforts et des fonds colossaux pour former des cadres politiques et syndicaux sociauxdémocrates portugais capables d'affronter
la tourmente révolutionnaire. Le PCP est, par contre, parvenu à maintenir son implantation malgré la répression et il jouit pour cela d'un prestige important. 48 années de dictature fasciste ont créé des illusions démocratiques au sein de la classe ouvrière qui adhère massivement au PSP et au PCP malgré l'orientation opportuniste de ces deux partis. Les forces d'extrême-gauche sont éclatées en de nombreuses petites organisations apparues dans les dernières années de la dictature: le MRPP (Mao-stalinien) s'en prend avant tout au "social-fascisme" du PCP; l'UDP qui fédère plusieurs groupes maoïstes non sectaires, le MES (réformiste de gauche) et la Ligue Communiste Internationaliste (4e Internationale) qui est une très petite organisation née en 1973. Dès la chute du régime, la LCI lance une campagne d'agitation pour la libération de tous les prisonniers politiques, le jugement public des tortionnaires, la liberté de presse, le droit de grève, les libertés syndicales, l'amnistie de tous les déserteurs, l'indépendance des colonies, la convocation d'une assemblée constituante.
Une junte "démocratique"
Comme la politique a horreur du vide, la bourgeoisie presse le général Spinola d'accepter la présidence de la république (15 mai 1974) et de constituer une "junte démocratique" (un gouvernement composé de 15 militaires et de 6 ministres civils). Aux côtés de ministres de droite (Sa Carneiro) et d'autres sans étiquettes, siègent Mario Soares (Affaires étrangères), Alvaro Cunhal (Ministre sans portefeuille). Il suffit de comparer la position de Lénine en février 1917 ("Aucun soutien au gouvernement provisoire!") avec celle de Cunhal (qui devient ministre) pour com prendre que tout au long des deux années que va durer la situation révolutionnaire le PCP va tout faire pour sauvegarder l'ordre bourgeois. Car la première préoccupation de ce gouvernement provisoire est d'arrêter
la vague de grèves qui balaie le pays au lendemain du 1er mai.
Une déferlante de grèves
Alors que le PCP lance une campagne anti-grève et anti-gauchiste, une vague de grèves déferle sur l'ensemble des secteurs avec une force que les initiateurs du 25 avril ne soupçonnaient pas. Le 15 mai les ouvriers de la construction se mettent en grève et organisent des piquets volants pour propager leur lutte. Les travailleurs originaires des colonies occupent une place importante dans ces grèves.
Le Parti communiste contre les grèves Le PCP tente de briser les grèves en rassemblant dans une Intersyndicale 49 syndicats corporatistes. Il organise notamment une manifestation de soutien à la politique du ministre du Travail (Pacheco Gonçalves, PCP), affirmant son appui à la politique d'union nationale, à la lutte anti-grève, et défilant même derrière… un portrait de Spinola! A La Poste où les salaires sont très bas, un millier de postiers se réunissent à Lisbonne le 5 mai pour élaborer un cahier de revendications et mettre sur pied une commission pro-syndicale qui sera élargie à des délégués élus dans des assemblées locales. Un Comité de grève national naît de cette commission prosyndicale. Le gouvernement lance une campagne de dénonciation des postiers grévistes "qui perturbent la vie normale de tous les Portugais". Le gouvernement prépare l'intervention de la troupe pour briser la grève et laisse au PCP le soin de dénigrer la grève. "L'objectif de cette
histoire rebelle
Dans les mines de fer de Ponasqueire, travailleurs immigrés et travailleurs portugais (400 Cap-verdiens sur 1.600 mineurs) partent en grève et arrachent en quelques jours un salaire minimum garanti de 6.000 escudos, un mois de congés payés, le 13e mois, l'assistance médicale gratuite. La Commission ouvrière qui dirigeait la grève était composée de 4 Portugais et de 4 Cap-verdiens. Quasiment tous les secteurs partent en grève: chimie (Pfizer, Bayer, Ciba), l'automobile (Renault, Toyota, Firestone), l'industrie alimentaire, les banques, les assurances, etc. Des formes d'organisation démocratique de la grève voient le jour dans nombre d'entreprises. Des Commissions ouvrières sont élues, notamment au chantier naval de Lisnave (8.400 ouvriers). Dans l'usine de montres Timex, la Commission ouvrière organise l'occupation de l'usine et les piquets, contrôle le stock, empêche la sortie des montres et envisage de remettre en route une production autogérée à la façon des travailleurs de Lip [lire notre article sur la lutte des Lip dans La Gauche n°65, novembre-décembre 2013].
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histoire rebelle
grève est d'opposer les travailleurs au gouvernement provisoire et d'entretenir un climat de mécontentement et de révolte qui profite au fascisme et à la réaction", proclame le PCP le 19 juin. A la suite de quoi le gouvernement envoie l'armée occuper la poste pour briser la grève et "assurer le fonctionnement des services."
Spinola, candidat Bonaparte, démissionne
La droite et l'extrême-droite veulent utiliser la figure de Spinola pour enrayer le processus révolutionnaire et faire obstacle à l'indépendance des colonies. Le 23 septembre 1974 Spinola annonce qu'il désire reprendre en main, seul, toutes les affaires concernant l'avenir des colonies. Le 25 septembre, la droite et l'extrêmedroite mobilisent pour soutenir Spinola. Les travailleurs réagissent le 27 septembre en élevant un peu partout dans Lisbonne des barricades. Le MFA n'intervient pas. L'opération de soutien à la politique de Spinola échoue et celui-ci doit démissionner sous la pression du général Vasco Gonçalves et du major Otelo de Carvalho, un des principaux officiers du MFA et commandant en second du COPCON (Commandement Opérationnel du Continent). Il est important de noter que le MFA, qui avait contribué à casser la grève de La Poste, adopte une position plus réservée dès que les travailleurs sont à l'offensive. A partir de ce moment, on assiste à un basculement du rapport de forces au sein du MFA où le centre-gauche pèse de plus en plus. En l'absence d'instruments politiques traditionnels, le MFA est momentanément la clé de voûte du pouvoir de la bourgeoisie.
Putsch manqué, élection de l'assemblée constituante
Le 11 mars 1975, Spinola revient à la charge en tentant un coup d'État. Dans de nombreuses unités les militaires hésitent. Le Parti communiste sent le danger, mobilise l'Intersyndicale pour organiser des piquets de grève et prend la tête de la mobilisation contre le putsch. Il parvient ainsi à mettre en échec le coup d'État et à faire preuve de sa capacité de mobilisation face à une extrême-gauche divisée. C'est une défaite majeure pour la bourgeoisie. Le MFA sort considérablement renforcé de cet épisode. L'Assemblée constituante est élue le 25 avril 1975. Le PSP de Mario Soares obtient 38% des voix (116 élus), le PPD de Francisco Sa Carneiro 27% (81 élus), le PCP 12,5% (30 élus), le CDS (droite) 16 élus, le MDP (gauche) 7 élus et l'UDP (marxisteléniniste) 1 élu.
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La lutte pour l'indépendance des colonies
Dans les colonies portugaises, les mouvements suivants mènent la lutte armée contre l'occupant: le PAIGC en Guinée-Bissau et au Cap-Vert (Parti Africain pour l'Indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert), le FRELIMO au Mozambique (Front de Libération du Mozambique) et le MPLA en Angola (Mouvement pour la Libération de l'Angola, dirigé par Agostinho Neto). En Angola toutefois le MPLA est concurrencé par le FNLA (Front national de Libération de l'Angola, dirigé par Roberto Holden et soutenu par la CIA). La Guinée-Bissau deviendra indépendante en septembre 1974, le Mozambique en juin 1975 et l'Angola en novembre 1975.
L'affaire República
Un conflit éclate en mai 1975 au sein du journal República, un quotidien appartenant à un groupe privé dont la ligne éditoriale soutient le Parti socialiste. Les chiffres de vente baissent et les travailleurs du quotidien craignent pour leur emploi. Ils s'organisent en Commission de coordination des travailleurs (typos, rotativistes) et remettent en cause la ligne éditoriale du journal, responsable à leurs yeux de la mévente. La confusion s'installe entre la défense de l'emploi et le contenu du journal d'autant plus qu'une assemblée générale de la Société nationale des Typographes vote une motion sur "la lutte pour le contrôle des travailleurs sur l'information". D'où l'épreuve de force. Le personnel occupe le journal et veut censurer la rédaction, puis la séquestre pour imposer ses conditions. Le COPCON débarque au siège du journal, fait évacuer les locaux et les place sous scellés. Les travailleurs se considèrent comme lockoutés par la direction qui refuse leurs revendications. Le PS utilise cet incident pour déclencher une offensive dans le sens du rétablissement de l'ordre et de l'autorité bourgeois dans les entreprises et dans l'État, sous le couvert de l'assemblée constituante. La confusion politique d'une partie de l'avant-garde ouvrière, le sectarisme et la tradition idéologique stalinienne du PCP l'ont puissamment aidé dans ce sens. En juillet, les ministres socialistes quittent le gouvernement pour protester contre la reparution de República sous le contrôle du MFA et des ouvriers de la rédaction.
Le PS passe à l'offensive et rassemble 70.000 de ses partisans à Porto le 18 juillet, en présence des dirigeants de principaux PS européens pour dénoncer "le totalitarisme". Quelques camions militaires et jeeps sont attaqués par les manifestants. Les militants de la LCI, qui distribuent un tract, doivent à la protection des journalistes étrangers de ne pas être lynchés aux cris de "Les cocos à Moscou!". Cette campagne du PS ouvre les vannes d'une offensive réactionnaire. En réponse, le PCP se lance dans une politique aventuriste et sectaire en appelant à élever des barricades pour empêcher une hypothétique " marche social-fasciste " sur Lisbonne (en fait le meeting du PS). Contre ces grandes manœuvres de division, les Commissions de travailleurs de la capitale appellent à un rassemblement " Contre la réaction et le capital, unité prolétarienne ! Ouvriers et paysans, soldats et marins, unis nous vaincrons ! " . Pour la première fois depuis le 25 avril, des centaines de soldats participent à ce cortège. Ceux du Régiment d'Artillerie légère de Lisbonne sont venus avec leurs tanks et leurs auto-mitrailleuses blindées couverts de drapeaux rouges. Cette activité autonome des soldats, leur jonction avec l'avant-garde ouvrière, traduit la fermentation dans les rangs de l'armée.
Triumvirat militaire et polarisation politique
Le 26 juillet 1975, dans l'attente de la formation d'un nouveau gouvernement, un triumvirat militaire se met en place doté de tous les pouvoirs et composé des généraux Costa Gomes, Vasco Gonçalves et du major Otelo de Carvalho. La division entre radicaux et modérés qui traverse le MFA se répercute jusqu'au sein du triumvirat. La politique du PCP oscille de gauche à droite. Après avoir appelé aux barricades contre le PS le 18 juillet, le 8 août il tente une ouverture vers le PS. Puis le 25 août il passe un accord avec la gauche révolutionnaire pour constituer un "front" englobant le PCP, l'extrême-gauche et le MFA... avant de passer un compromis avec le PS quatre jours plus tard. Le 29 août Vasco Gonçalves démissionne. Le front débouchera sur le FUR (Front d'Unité révolutionnaire) qui fédérera un temps la gauche révolutionnaire.
La radicalisation traverse l'armée
Le 6e gouvernement est mis sur pied le 19 septembre 1975. Il comprend 4 ministres PS, 2 PPD, 1 PCP ainsi qu'une
brochette de militaires. Ce gouvernement aura fort à faire pour rétablir la discipline dans l'armée où la radicalisation politique à gauche s'approfondit dans certains secteurs. Les soldats les plus radicaux s'organisent au sein des SUV (Soldats unis vaincront!). Le 15 septembre, 4.000 soldats des SUV et 40.000 travailleurs défilent côte-àcôte dans les rues de Lisbonne aux cris de: "Ouvriers, paysans, soldats, marins, unis nous vaincrons!". Deux soldats membres des SUV ayant été mis aux arrêts la veille pour avoir été trouvés en possession de tracts, les orateurs des SUV demandent aux chauffeurs de bus présents à la manifestation et aux conducteurs de camions militaires de réquisitionner des véhicules dans un dépôt voisin pour amener plusieurs milliers de manifestants à Trafaria où sont enfermés les deux soldats arrêtés. A 2h30 du matin Otelo de Carvalho signe l'ordre de libération des deux soldats.
100.000 travailleurs de la construction partent en grève et assiègent le Parlement. Ils obtiennent gain de cause au bout de quatre jours. La direction du PPD quitte Lisbonne estimant que la ville n'est plus "sûre". Le Conseil de la Révolution donne l'ordre de plastiquer l'émetteur de Radio Renaissance, une radio qui soutenait la révolution. Immédiatement après les parachutistes du régiment qui a procédé au plasticage élisent un nouveau commandant et se mettent "au service de la révolution". Le gouvernement se déclare alors "en grève" puisqu'il n'a plus l'autorité nécessaire pour gouverner. Le 21 novembre, en accord avec le gouvernement, les officiers du Conseil de la Révolution tentaient d’écarter Otelo de Carvalho. Les parachutistes de Tancos entrent en rébellion contre cette décision. Mais les forces conservatrices, les sommets de l’armée et de l’État, les chefs du PS et de la droite, ainsi que leurs conseillers des grandes puissances sont inquiets de la tournure des événements et veulent siffler la fin de la révolution. La reddition
des parachutistes de Tancos est mise à profit pour instaurer l’état de siège et le couvre-feu, contrôler les médias, démettre ou arrêter leurs opposants dans l’armée, dissoudre les unités militaires les plus politisées. Dans les semaines qui suivent, les militaires compromis dans le putsch de Spinola du 11 mars 1975 sont réintégrés dans l'armée. Le gouvernement met fin aux occupations de terres et interdit l'agitation politique au sein de l’armée. Dès janvier, la gendarmerie tire sur des manifestants de gauche, faisant des morts et des blessés. Les usines confisquées sont rendues à leurs propriétaires "légitimes". La révolution portugaise appartient désormais au passé. ■
histoire rebelle
Le 25 novembre clôt la période révolutionnaire
Bibliographie Daniel Bensaïd, La révolution et le pouvoir, Ed. Stock, Paris, 1976. Daniel Bensaïd, Carlos Rossi, CharlesAndré Udry, Portugal: La Révolution en marche, Ed. Christian Bourgois, Paris, 1975. Gérard Filoche, Printemps portugais, Ed. Acteon, Paris, 1984
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✒ correspondant Le dimanche 16 mars, près de 800 personnes ont manifesté devant le centre fermé pour étrangers à Vottem (Liège) pour crier haut et fort: "Vottem, camp de la honte, 15 ans déjà! Je ne l’accepte toujours pas"! Devant les grillages du centre fermé, notre camarade France Arets, animatrice du Cracpe (Collectif de Résistance aux Centres fermés) et du Collectif de Soutien aux Sans-papier a pris la parole, voici un court extrait de son intervention: "A la veille des élections, nous revendiquons un changement radical en ce qui concerne la politique d’immigration, tant belge qu’européenne. Si cette dernière conditionne l’autre, nous constatons néanmoins que la politique menée par Maggie De Block et le gouvernement actuel réduit presque à néant l’accès au droit au séjour en Belgique. Ce qui fait que la Belgique devient la championne de l’Europe forteresse en matière d’éloignements forcés, ou ‘volontaires’ sous pression avec 11.386 personnes éloignées en 2012, soit une augmentation constante depuis 2009 (opération de régularisation): 3847 rapa-
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triements et reprises, 1895 refoulements, 5644 retours volontaires… 6797 personnes ont séjourné en centre fermé, dont 1214 à Vottem. Notre Etat expulse sans état d’âme des personnes vers les pays d’origine qu’elles ont fuis à cause des persécutions, des dictatures, des guerres, de la misère. Des réalités récurrentes auxquelles s’ajoutent aujourd’hui les catastrophes climatiques… Peu importe pour notre gouvernement qu’elles y trouvent la mort à leur arrivée, comme le jeune Aref, expulsé il y a quelques mois, victime des Talibans en Afghanistan!" ■
Manifestation à Bruxelles: fermez les centrales nucléaires! ✒ par Els Goeman et Rafik Khalfaoui
Manif contre les violences policières ✒ correspondant Près de 700 manifestants, principalement des jeunes, sont descendus dans les rues de Bruxelles le samedi 15 mars 2014 pour protester contre les violences policières. Ils répondaient ainsi à l’appel du collectif d’associations lancé à l’initiative de la JOC. L’impunité des policiers qui frappent, harcèlent, insultent est quasi totale. Le Comité P classe plus de 80% des plaintes sans suites, ce qui n’est pas surprenant lorsqu’on sait que les enquêtes sont faites par des policiers détachés. Quand un policier se retrouve malgré tout devant la Justice, il est puni moins sévèrement qu’un citoyen. La population ne se fait donc plus d’illusions et ne porte même plus plainte. Les policiers eux voient qu’ils sont couverts et continuent leurs abus… En période de crise, lorsque les budgets sociaux sont rognés, lorsque la recherche d’un emploi est de plus en plus problématique et les exclusions du chômage pleuvent, lorsque le nombre de personnes sans ressources croît et que les maisons d’accueil pour les sans-abri sont pleines, le pouvoir sort ses matraques. La veille de la manif, deux agents de la police des chemins de fer de BruxellesMidi ont été arrêtés pour avoir humilié et volé un sans-abri, l’obligeant à se dénuder avant de lui voler son GSM. Les deux malfaiteurs se trouvent provisoirement à la prison de Forest, sous mandat d’arrêt pour une période d’un mois. ■
Quelques centaines de personnes ont manifesté dans les rues de Bruxelles, le dimanche 9 mars, pour réclamer la fermeture immédiate des centrales nucléaires de Tihange 1 et 2 et Doel 3. La manifestation coïncidait avec le troisième anniversaire de la catastrophe de Fukushima. "Si des catastrophes nucléaires sont possibles au Japon, elles sont certainement possibles chez nous également", a déclaré Léo Tubbax, porte-parole de Nucléaire Stop. "Le Japon est un des pays les plus développés du point de vue de l’organisation et de la culture de sécurité des entreprises. Un accident peut donc intervenir à tout moment". La LCR-SAP était présente dans la manifestation avec ses slogans, notamment "nos vies valent plus que leurs profits". La LCR-SAP est pour la fermeture des centrales nucléaires et un plan de transition vers un système énergétique basé à 100% sur les énergies renouvelables. Nous n’acceptons pas l’argument qui prétend que les centrales nucléaires sont indispensables pour couvrir nos besoins énergétiques. En supprimant les productions inutiles et en investissant de façon planifiée dans l’efficience énergétique ainsi que dans les renouvelables, il est parfaitement possible de se passer du nucléaire et de ses risques mortels. C’est une question de volonté politique. Une large mobilisation de la population est nécessaire pour l’imposer. ■
photo: indymedia Bruxelles – affiche antinucléaire: Little Shiva
à l’action!
Vottem, camp de la honte, 15 ans déjà! Je ne l’accepte toujours pas!
Au moment même où l’Union Soviétique s’écroulait, la Chine se jetait dans les bras du capitalisme. Le régime bureaucratique chinois ouvrait ses frontières aux investissements étrangers, privatisait des pans entiers de l’économie et maintenait son régime coercitif d’une main de fer. Licenciements et nouvelle pauvreté sont devenus le lot quotidien de centaines millions de Chinois qui ne sont pas restés sans résister. Avant 2020, la Chine sera devenue la première économie mondiale. Ces trente dernières années ont vu des bouleversements colossaux transformer ce pays essentiellement paysan. Désormais la majorité de la population chinoise vit dans les villes. Alors que la chute de l’URSS avait vu la disparition du Parti communiste et l’effondrement de sa mainmise sur la société, la classe bureaucratique chinoise au pouvoir a fait le choix risqué d’entamer un "grand bond en avant" vers le capitalisme tout en maintenant le régime d’Etat-parti unique. Ces évolutions ont profondément transformé la société. Au sommet, des fortunes colossales se sont accumulées et la corruption est devenue endémique, en bas l’exploitation que ce soit dans les entreprises privées ou d’Etat s’est intensifiée, les dégâts sociaux et écologiques sont innombrables. La couche dirigeante, âpre au gain, a organisé l’entrée de capitaux étrangers à son plus grand profit. Elle a méthodiquement pillé les biens de l’État et détourné des fonds publics pour accumuler des richesses.
Entre stalinisme et business, quelle est la vraie nature de ce régime chinois?
L’écrasement à Tiananmen en 1989 du mouvement démocratique initié par le mouvement étudiant, vite rejoint par des centaines de milliers de travailleurs dont certains fonderont un syndicat indépendant, a permis à la couche dirigeante bureaucratique chinoise, profitant de la démoralisation de la société civile née de l’écrasement du mouvement pour la démocratie, de procéder à des contreréformes économiques et sociales qui ont changé les bases mêmes de la République populaire de Chine. Cette sombre période
se clôt. Grèves et révoltes individuelles se multiplient. Un mouvement social se fait jour. La Chine est à la veille de nouveaux bouleversements. L’ouvrage revient sur ces transformations et dresse un bilan détaillé de ces années. Après avoir étudié les réformes mises en œuvre par Deng Xiaoping, il se penche sur les contradictions qui agitent la bureaucratie chinoise et le capitalisme bureaucratique auquel elle a donné naissance. Il analyse également, à partir de cas concrets, les différentes formes de résistance sociale qui secouent, parfois violemment, les entreprises chinoises d’État ou privées et la campagne face aux spoliations des terres. Enfin, il revient sur la politique du Parti communiste chinois à l’égard du Tibet et dénonce sa politique d’assimilation forcée du peuple tibétain. ■ Auteur: Au Loong Yu Editions Syllepse // Collection "Arguments et mouvements" Parution : octobre 2013 Pages : 191 pages Disponible au prix de 10€ (+ 3€ de frais de port). Pour un envoi postal, verser 13€ sur le compte de la Formation Léon Lesoil, rue Plantin 20 à 1070 Bruxelles. IBAN BE09 0010 7284 5157 BIC GEBABEBB Avec la mention "livre Chine".
conférences Organisées par la Formation Léon Lesoil Au Pianofabriek, 35 rue du Fort, 1060 Bruxelles (métro Parvis de St-Gilles) Mardi 8 avril 2014 à 19h30 Il y a 40 ans, l'espoir de la Révolution portugaise…avec Alda SOUSA, députée européenne, fondatrice
La Gauche Où trouver La Gauche? En vente dans les librairies suivantes:
Bruxelles Tropismes
Galerie des Princes, 11 1000 Bruxelles Filigranes
agenda/lectures
La Chine : un capitalisme bureaucratique Forces et faiblesses
Avenue des Arts, 39-40 1000 Bruxelles Couleur du Sud
Avenue Buyl, 80 1050 Ixelles Volders
Avenue Jean Volders, 40 1060 Saint-Gilles Joli Mai
Avenue Paul Dejaer, 29 1060 Saint-Gilles
Charleroi Carolopresse
Boulevard Tirou, 133 6000 Charleroi
Mons Le Point du Jour
Grand'Rue, 72 7000 Mons Couleur Livres
Rue André Masquelier, 4 7000 Mons
Wavre Librairie Collette Dubois
Place Henri Berger,10 1300 Wavre
et dirigeante du Bloc de Gauche portugais. Mardi 10 juin 2014 à 19h30
Août 1914 : Les socialistes trahissent leurs promesses et soutiennent la guerre avec Jean VOGEL, professeur de
sciences politiques, ULB. Infos: formationleonlesoil@gmail.com la gauche #67 avril-mai 2014
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