PARCOURIR L’ESPACE PUBLIC MARSEILLAIS EN TANT QUE NON-VOYANT.
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Léa Metlaine S9 - H21 - Vivre Ensemble Encadrante : Nadja Monnet Janvier 2018 1
Couverture : © Evgen Bavčar, El fluir del mundo, 2009.
SOMMAIRE Introduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 1. Appréhender la cécité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.1. Motivations personnelles et outils de ma recherche
1.2. L’accessibilité, un débat d’actualité
2. Prendre contact : les entretiens. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
2.1. Liliane Rolly, dans un équipement public, à l’Alcazar
2.2. Au domicile de Reimond Filippi
3. Observer et décrire : un parcours commenté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
3.1. « Le parcours du combattant » : aides et obstacles
3.2. « Affronter la rue » : inaccessibilité et signalements
Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 Glossaire
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
4
L’accessibilité étant un enjeu actuel dans notre société. Il est intéressant d’analyser la confrontation, ou bien, la cohabitation entre la réglèmentation et les pratiques urbaines des différents usagers. Existe-t-il une autonomie pour les personnes en déficience visuelle dans la chaîne de la mobilité de nos villes ? Comment s’inscrivent-elles dans ce réseau ? L’objectif est donc d’observer et d’analyser les déplacements d’un non-voyant dans l’espace public marseillais, afin de mieux comprendre la perception spatiale que s’en font les personnes atteintes de cécité. Quels sont les éléments qui les aident et, au contraire, ceux qui apparaissent comme des obstacles ? Par le biais d’entretiens et d’un parcours dans le 1er arrondissement de Marseille, il a été possible de retenir des enseignements dûs à l’action expérimentale, où trois dimensions ont été convoquées : la dimension fonctionnelle, la dimension sensible, et la dimension sociale. RÉSUMÉ /
MOTS-CLÉS
Cécité Parcours Espace public Accessibilité Mobilité 5
« Les yeux sont aveugles, il faut chercher avec le coeur » Le Petit Prince, Antoine de Saint-Exupéry, 1943.
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Introduction Le corps humain nous permet de nous situer dans le monde. Il entre en mouvement dans l’espace et se met à créer des interactions avec les objets environnants. Nos différents sens, quant à eux, permettent de nous engager dans diverses dimensions mentales, telles que celles de l’imagination, du rêve ou du désir. Des dialectiques s’établissent alors, confrontant espaces externes et internes, physiques et spirituels, matériaux ou mentaux, inconscients ou conscient. Dans notre société actuelle, s’est imposée une domination de la vision. L’œil est devenu un témoin de compréhension. En réalité, cela est plus complexe car « la vue est le seul sens assez rapide pour se maintenir à la vitesse croissante du monde technique» (Pallasmaa, 2010 : 24). Aujourd’hui, nous vivons, évoluons et nous nous transformons, en permanence en consommant des images, qui mettent à mal nos autres sens. Avec la télévision et internet, nous nous projetons dans un autre espace, qui est virtuel. Le toucher, le goût et l’odorat sont alors délaissés, plaçant l’individu en simple spectateur passif, « l’éloignant d’une implication et d’une identification émotionnelle » (Pallasmaa, 2010 : 27). Mais qu’en est-il des êtres humains pour lesquels faire appel à tous ces sens n’est pas une option? La cécité instaure dès lors l’identification de deux mondes : celui de ceux qui voient et de ceux qui ne voient pas. Il semble alors intéressant de se questionner sur l’inclusion des personnes déficientes visuelles dans notre société et notamment au sein de nos villes. L’espace urbain comme support peut alors donner 7
des clés de compréhension sur l’expérience spatiale qu’en font ces personnes. Existe-t-il une dualité entre la confrontation d’une règlementation comportant des normes strictes, avec des expériences sensorielles? Dans La production de l’espace (1974), Henri Lefebvre exprime l’idée d’une triplicité de l’espace, où il distingue l’espace perçu, l’espace conçu et l’espace vécu. Il met également en garde sur le fait qu’une « telle distinction doit se manier avec beaucoup de précaution. Elle introduirait vite des dissociations, alors qu’il s’agit au contraire de restituer l’unité productive » (Lefebvre,1974 : 53). Quels liens existent alors entre techniciens de l’aménagement (architectes, urbanistes et économistes) et usagers? Afin d’engager des pistes de réflexions, c’est au sein de la ville de Marseille, que j’ai décidé de confronter des données théoriques avec la pratique. C’est par le biais d’entretiens, d’échanges et d’un parcours dans la ville avec un non-voyant, nommé M. Reimond Filippi, que j’ai souhaité essayer de comprendre les mobilités spatiales au sein des aménagements urbains, en tenant compte des non-voyants. De leur logement à des infrastructures, dans leurs parcours, comment pratiquent-t-ils l’espace public urbain? Pour comprendre ma démarche, il me semble important d’énoncer les motivations qui m’ont menée à ces questionnements, les outils dont je me suis servie pour essayer de les comprendre, ainsi que de situer cette thématique dans notre société.
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1.
Appréhender la cécité
1.1.
Motivations personnelles et outils de ma recherche
C’est lors de la rédaction de mon rapport d’étude en troisième année d’école d’architecture, en 2016, que j’ai pu entrer en contact avec un non-voyant. Mon mémoire de licence avait pour titre Architecture et silence, vers une introspection. Par choix, ce travail excluait tout édifice religieux afin de se concentrer plutôt sur des expériences architecturales dites « profanes » et non « sacrées », car le silence est de rigueur dans ces dernières dès lors qu’on en franchit le seuil. Pour cette étude, j’ai donc rencontré un non voyant de naissance à l’Unión Nacional de Ciegos del Uruguay, à Montevideo: Daniel. Cet entretien a changé ma perception du déplacement dans la ville où j’ai effectué un échange scolaire. Daniel m’a fait remarquer que, des lieux qui me paraissaient agréables au sein de Montevideo, étaient en réalité un calvaire pour lui. Il a su mettre des mots poétiques sur des atmosphères, nommer des émotions, des ressentis. Avec l’appui du livre de Juhani Pallasmaa, Le regard des sens (2010), cette rencontre m’a fait prendre conscience de la place de la vision dans notre société, et de l’importance de nos autres sens. Renforçant l’idée que je me faisais de l’architecture qui est un moyen pour générer des sensations, des émotions et des expériences grâce à différents jeux de matières, de textures, de sonorités, de lumières, de températures et d’odeurs. Ensuite, en décembre 2016, j’ai effectué un Workshop visant à mieux comprendre l’accessibilité 9
en ville via une application mobile (J’accède) ; en collaboration avec des étudiants de la faculté d’ergonomie de Marseille. Cette journée d’échanges, de partages et de simulations m’a alors confortée dans l’idée de penser la ville pour des personnes en situation de handicap. Ces expériences m’ont amenées à me questionner sur la place des non-voyants dans l’espace urbain pour mon travail de séminaire en cinquième année. Ayant le désir de mêler données théoriques avec la pratique, je me suis donc appuyée sur différentes lectures: des articles de lois concernant la réglementation en termes d’accessibilité, des ouvrages généraux, ainsi que des témoignages. Il est intéressant de noter que j’ai été, maintes fois, confrontée à de la documentation hispanique concernant la cécité, n’ayant trouvé, dans la littérature française bien souvent que des articles généraux. Dès lors que je recherchais une dialectique sensible, émotionnelle, je trouvais bien plus d’ouvrages ou de films en espagnol. D’ailleurs, ces recherches m’ont permis de faire la lumière sur deux photographes non-voyants : Gerardo Nigenda et Evgen Bavčar. Le premier étant mexicain, et le second slovaque, mais qui a oeuvré au Mexique. En effet, il est le fondateur du Laboratoire de l’Invisible à l’Institut des Études Critiques de Mexico. Cette découverte a alors affirmé l’idée qu’il existait un plus grand intérêt pour les personnes à déficience visuelle dans les pays hispaniques, plutôt que dans le nôtre. Si nous faisons un saut dans l’histoire, il est aussi possible de se rendre compte que jusqu’au XIXe siècle, les aveugles n’étaient pas inclus dans la société française, mais bien exclus. Il suffit de s’intéresser à la définition de la cécité en 1848 : « aveuglement de l’esprit, absence de cœur, état d’une personne qui ne voit pas, ne comprend pas, ne sent pas certaines choses. » (Centre National de Ressources Textuelles 10
et Linguistiques (CNRTL), site internet consulté le 3 octobre 2017).
Toutefois, en 1749, on peut voir le premier ouvrage
français s’intéressant aux non-voyants avec le livre de Diderot, Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui
voient, où cet auteur les considère comme des humains à part entière et non comme des animaux. Un
ouvrage étant alors révolutionnaire pour l’époque, car
il a amorcé un processus amenant une nouvelle perception concernant ces personnes et, un changement de jugement moral. 1.2.
L’accessibilité, un débat d’actualité
Depuis 2005, la loi française a mis en place une réglementation stricte concernant les normes d’accessibilité. Les édifices recevant du public, les voiries, ainsi
que les transports ont fait l’objet de nouveaux objectifs à atteindre, avec un cahier des charges à respecter plus précis. En effet, avant cette date, l’accessibilité d’un édifice, de l’espace urbain ou des transports
en commun était considérée par leur capacité à sub-
venir aux besoins de personnes à handicap moteur. Dès 2005, les nouvelles normes d’accueil concernent 1. « La loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, renforce les obligations incombant aux constructeurs et propriétaires de bâtiments publics ou privés, d’ERP ou de logements. Elle étend la notion de handicap afin de prendre en compte tous les types de handicaps, qu’ils soient physiques, sensoriels, cognitifs, mentaux ou psychiques » (Le Bloas, 2016 : 9).
un public plus large, englobant tout type d’handicap.1
Depuis le 22 octobre 2017, « les gestionnaires d’établissements recevant du public (ERP) doivent mettre
à la disposition du public un registre public d’accessibilité. Outre la liste des prestations proposées par l’établissement pour l’accessibilité des personnes handicapées, le registre contiendra :
- la liste des pièces administratives et techniques relatives à l’accessibilité de l’établissement aux personnes handicapées ;
- la description des actions de formation des personnels chargés de l’accueil des personnes handicapées.
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Les gestionnaires d’ERP sont libres de choisir la
forme du registre, sous version papier ou numérique. » (https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/actualites/A12056 consulté le 17 décembre 2017). La réalité étant plus complexe que la théorie, beaucoup d’édifices publics ne sont toujours pas aux normes depuis 2005, de nombreux projets font appel à des « dérogations pour éviter des normes qui leur apparaissent comme des contraintes », comme l’explique Joelle Parra, responsable accessibilité et handicap de la Métropole Aix Marseille Provence (2017). Il est à souligner qu’en 2013, la ville de Marseille était classée, en termes d’accessibilité, 83e sur 96 villes en France selon l’Association des Paralysés de France (AFP). Le 18 novembre 2017, à Aix-en-Provence, dans le cadre du festival Image de ville, s’est tenue une table ronde réunissant élus, architectes et urbanistes pour débattre sur le thème de l’accessibilité dans nos villes. L’évènement avait pour titre « Handicap et exclusion de la ville? » avec pour principale problématique: « la ville appartient-elle vraiment à tout le monde? ». À l’issue des échanges, différents questionnements ont alors émergés, tels que: comment les collectivités, et en particulier la métropole, se saisissent-elles de la question du handicap? Comment appréhendent-elles ses responsabilités? La région PACA est-elle exemplaire ou mauvaise élève dans ce domaine? Il est intéressant de souligner qu’au début de la table ronde, Michel Chiappero2 a ouvert le débat par cette remarque: « la table ronde a lieu dans un bel équipement, mais malheureusement, la moitié n’est pas accessible aux personnes handicapées. Cet édifice est donc dans l’illégalité au vu de la loi de 2005 » (2017). Cette entrée en matière annonce dès lors tout l’enjeu du débat actuel. Paradoxe poussé à l’extrême, par un évènement qui, voulant débattre du thème de 12
2. Architecte-urbaniste, organisateur et modérateur de la table ronde « Handicap et exclusion de la ville? », Aix-en-Provence, 2017.
l’accessibilité, se déroule dans un lieu non accessible à tous. Malgré une volonté de loi datant d’il y a treize ans, l’accessibilité semble être encore un sujet problématique dans nos villes. Des essais de solutions ont été apportés mais la mise en pratique en est toute autre, voire inexistante dans beaucoup de cas. En plus de mes lectures, j’éprouvais le désir de mêler des enquêtes de terrain pour aborder la thématique de cet article. J’ai donc rencontré des personnes à déficience visuelle à plusieurs reprises.
13
2.
Prendre contact : les entretiens
Forte des recommandations du Guide de l’enquête de terrain, de Stéphane Beaud et Florence Weber (1998), j’ai pu comprendre la richesse que pouvaient apporter des entretiens à mon travail. Mais également, que l’observation et la contextualisation des cas étaient les meilleurs outils pour comprendre les données issues d’un échange. Tout en ayant conscience que les entretiens que j’allais effectuer apporteraient des réflexions qualitatives, et non quantitatives. L’entretien dit « ethnographique » implique un rapport au temps qui se veut long car il y a une implication des deux parties dans une même temporalité. Il est également important de saisir le sens des remarques abordées et de ne pas en faire des généralités (Beaud, Weber, 1998 : 198). De plus, comme l’explique Simona Galbiatti: « l’expérience de chaque personne aveugle est différente, et il n’existe pas d’expérience dite typique » (2013 : 8). 2.1
Liliane Rolly, dans un équipement public, à l’Alcazar
En octobre 2017, je me suis alors rendue à l’Alcazar, bibliothèque municipale située sur le cours Belsunce, près de la Canebière, à Marseille. Cet équipement recevant du public met à disposition un service qui se nomme Lire Autrement. Ce dernier, a pour but d’accompagner et de proposer aux personnes à déficience visuelle des livres auditifs, mais également en braille. C’est également un endroit où l’on peut apprendre ce dernier via des cours donnés sur place. Lors dune visite durant le même mois, j’ai pu y 14
rencontrer Liliane Rolly, 70 ans, mal voyante à 80 % de naissance. Ce premier entretien m’a permis d’appréhender certains problèmes auxquels se confrontent ces personnes au quotidien dans leurs déplacements dans la ville. Avant de pénétrer dans l’édifice, j’ai observé les abords de l’entrée. J’ai fait l’inventaire de ce que je voyais, comme le préconise Georges Perec pour décrire et essayer de déchiffrer ce qu’est la ville (Perec, 2000 : 119). J’ai pu constater que pour un non-voyant, l’accès était difficilement repérable, et que l’esplanade était encombrée de nombreux véhicules à deux roues. J’ai également noté la difficulté à différencier la chaussée piétonne avec la voie étant destinée au tramway, car ces deux flux étant très sensiblement de même niveau. Par la suite, Liliane m’a confirmé la dangerosité de cette situation pour les personnes à déficience visuelle.
Fig.1. Faible différenciation entre la voie de circulation dédiée au tramway et la chaussée piétonne. 15
À mon arrivée à l’intérieur du bâtiment, j’ai poursuivi mes observations et j’ai pu remarquer la présence de lignes de guidage au sol qui me menaient aux ascenseurs. Mais ne trouvant pas de panneau indiquant le service Lire Autrement auquel je désirais me rendre, je suis allée me renseigner à l’accueil. La dame qui y travaillait m’a indiqué qu’il se situait au troisième étage. J’ai alors pris l’ascenseur, j’ai pu constater qu’aucune signalisation vocale n’annonçait les étages, mais qu’en revanche les numéros des touches y étaient inscrits en braille. J’ai rencontré quelques difficultés à trouver l’entrée du service, situé dans un coin de l’aile nord- ouest de la bibliothèque. Cela allant à l’encontre d’un propos énoncé dans Le guide des bonnes pratiques sur la gouvernance de la chaine de l’accessibilité d’un bâtiment et ses abords, où au vu de la loi 2005, il est dit que: « toutes les étapes du déplacement doivent garantir la fluidité de la chaine de l’accessibilité. Cette dernière doit permettre à tous d’accéder, d’être informé, de circuler et d’utiliser les différents services avec la meilleure autonomie » (Gaussorgues, Morais & alii, 2011 : 6). Une fois arrivée dans le service, je me suis présentée à la responsable et, lui ai expliqué ma démarche. Au début, elle était quelque peu réticente, mais dès qu’elle a compris l’intérêt de mon intervention, elle m’a mise en contact avec Liliane Rolly, qui était dans une salle de lecture auditive. L’entretien non prévu initialement avec cette dame a alors débuté, et nous avons évoqué les dysfonctionnements apparents au sein de la bibliothèque, ainsi que ses abords. Elle a souligné l’absurdité des lignes de guidage dans la bibliothèque qui mènent au moniteur d’appel des ascenseurs, mais non aux portes d’ouverture de ces derniers. J’avais pourtant remarqué ces lignes de guides, mais mon oeil non formé à penser l’espace en tant que non-voyant n’avait pas su repérer ce que la 16
situation pouvait représenter. La responsable de service vacant à ses occupations, intervenait par moments, et une autre dame malvoyante est entrée dans le service se joignant à nous. La conversation est alors devenue collective, où chacune exprimait son point de vue et ses ressentis sur les différentes thématiques abordées. Lors de cette discussion, j’ai découvert le service Mobimétropole, qui est un service de transports en commun pour personnes en situation de handicap mis en place par la ville de Marseille. Liliane m’a également informée du fait qu’il faille réserver à l’avance, ne permettant pas des sorties spontanées et, que bien souvent il est impossible aux véhicules de se garer devant l’édifice de destination. Dans ces cas là, il en dépend alors de la volonté du chauffeur de les accompagner jusqu’au lieu désiré. La question de l’autonomie étant abordée, Liliane m’a raconté qu’elle estimait pouvoir être autonome dans certains de ses trajets, car étant marseillaise elle connaît bien sa ville, et s’y repère. Mais, elle m’a également confessé, qu’il lui arrivait parfois, d’utiliser une canne pour que l’on fasse attention à elle. Car, selon ses propres paroles, il lui faut « du temps pour se déplacer et la société n’en a pas ». Malgré l’utilisation de cet outil, qui pour elle, est un symbole signalétique et matériel de sa déficience visuelle, bien plus qu’une aide, il lui est tout de même arrivé de faire l’objet d’insultes. Comme l’exprime Benjamín Mayer Foulkes, docteur en philosophie, psychanalyste et théoricien à Mexico: « le grand problème des non-voyants n’est pas leur condition, mais la relation que les voyants instaurent avec elle » (Mayer Foulkes, 2014 : 33). Cette discussion avec Liliane m’a fait prendre conscience du statut social des personnes à déficiences visuelles. Elle a évoqué une certaine « solitude » à différentes étapes de sa vie, bien qu’elle soit née avec son handicap. Elle dit « s’adapter en permanence à la société et non l’inverse ». Outre l’aspect 17
matériel et physique d’un parcours dans la ville qui peut s’avérer difficile, une réelle dimension psychologique et morale est à prendre en compte pour l’inclusion de ces personnes dans notre société. D’un point de vue méthodologique, cet échange m’a permis de cerner la complexité que peut représenter un entretien; quelle posture adopter, et qu’il ne faut pas craindre l’imprévu, ce dernier pouvant être une réelle ressource à exploiter par la suite. Pour mon deuxième entretien, je m’étais préparée, ayant réfléchi à des questions préalables, plutôt des orientations, des axes de questionnements, tout en gardant à l’esprit qu’un « entretien non directif, ne veut pas dire anarchique » comme l’énoncent Stéphane Beaud et Florence Weber (1998 : 215).
18
2.2
Au domicile de Reimond Filippi
Je suis entrée en contact avec Reimond Filippi, 67 ans, non-voyant depuis cinq ans, par le biais de Carolina Garcia, architecte et enseignante à l’ENSAMarseille. Ils ont tous deux un ami en commun qui est le président de l’association du CREEDAT (Centre Régional d’Ergothérapeutes : Études, Diagnostics, Adaptations, Techniques). En septembre 2017, j’ai pu assister à une rencontre avec une ergothérapeute de cette association, qui a fait une intervention au sein de mon école. Lors de cette rencontre, j’ai pu saisir tout l’intérêt de la pluridisciplinarité et des interconnexions à mettre en oeuvre entre différents acteurs, afin de trouver des solutions pour rendre accessibles nos villes, les édifices publics et privés, à tous. Après un entretien téléphonique, nous avions convenu de nous rencontrer à son domicile, et par la suite, de faire une balade. Le 13 novembre 2017, je me suis alors rendue à son domicile, rue neuve Sainte-Catherine, dans le 1er arrondissement de Marseille. Ce jour-là, un vent très violent s’abattait sur la ville, et dès les premières minutes de notre rencontre il m’a avertie que la balade serait impossible, car ce phénomène naturel représente un réel obstacle dans ses déplacements, le privant de tous repères, jusqu’à le désorienter et le mettre en danger. Nous avons alors fait connaissance, et parlé de divers sujets pendant une heure et demie. Il m’a fait part de son implication dans la vie associative concernant la cécité, et de sa participation à de multiples commissions consultatives sur l’accessibilité. Cela étant un point commun avec Liliane, je me suis interrogée sur l’intérêt et le temps qu’accordent les personnes à déficience visuelle au sein de différents organismes et, ce, de manière entièrement bénévole. Par leur implication, et des retours d’expériences, ils essaient d’oeuvrer pour faire évoluer la situation 19
actuelle sur l’accessibilité, dans un but d’améliorer le quotidien de ces personnes. Ces temps dédiés à la vie associative leur permet aussi une implication sociale, et remédie à la solitude et l’exclusion sociale dont ils font bien souvent l’objet et, qu’ils ont, à plusieurs reprises, énoncé en entretiens. Lors de notre échange, Reimond, m’a également fait part de la difficulté à appréhender sa nouvelle vie, et de la lutte constante qu’il mène pour ne pas tomber en dépression face à la difficulté de sa réadaptation. En effet, sa vie a complètement changé depuis qu’il a perdu la vue, ayant une rétinite pigmentaire.3 Étant privé du sens oculaire, il a dû apprendre de nouveaux gestes, comprendre la position de son corps dans l’espace, et se créer de nouveaux repères. Il m’a alors énoncé que parfois il se sentait « ridicule » car, dans ses déplacement en ville, il se prenait bien souvent des panneaux dans la tête, ou bien marchait fréquemment sur des déjections animales. Malgré ce constat, il a su garder le ton de l’humour pour la suite de l’entretien. Nous avons alors abordé le thème de l’autonomie. Il m’a expliqué que sa compagne de vie lui était d’une grande aide dans son quotidien; qu’il s’appuyait sur des appareils électroniques, tels qu’une télécommande activant des signaux sonores aux feux piétons, mais que bien souvent cette fonction étant désactivée, cela ne pouvait donc lui servir d’aide pour traverser les rues. Il m’énonce le fait qu’il a une certaine autonomie mais qu’elle ne peut être totale et, que par exemple, il ne s’aventure pas dans des lieux qu’il ne connaît pas s’il n’est pas accompagné. Cela rejoignant le propos d’Yvette Hatwell, qui explique que : « la qualité de la prise en charge des aveugles et la famille, restent les meilleurs atouts pour que les acquisitions spatiales se fassent dans les meilleures conditions » (2006 : 78). La suite de l’entretien était un peu moins formelle, parfois déviant du thème de la cécité, mais fut 20
3. « La rétinite pigmentaire est une maladie génétique dégénérative de l’œil qui se caractérise par une perte progressive et graduelle de la vision évoluant généralement vers la cécité », définition issue du site orpha.net (consulté le 13 novembre 2017)
tout aussi intéressante afin de mieux comprendre qui est Reimond Filippi. Amateur de voyages, nous avons pu discuter de l’Amérique du Sud, où nous avons tous deux voyagé. Pays où le rythme de vie étant plus ralenti, selon nous, que celui auquel nous nous confrontons en France, où tout le monde semble constamment pressé. Il me dit alors qu’il y aurait peut être eu « plus sa place » car il se déplace lentement. Son ressenti est intéressant car, il a su capter la considération de l’altérité par les cultures hispaniques à l’égard des non-voyants, en forte résonance avec la documentation hispanique que j’ai pu trouver pour mes recherches. Ces deux entretiens m’ont permis une première approche expérimentale dans mon travail. La confrontation d’une démarche spontanée, avec un entretien imprévu et, un autre rendez-vous programmé m’ont permis de faire des parallèles et de trouver des points communs entre les différentes personnes avec lesquelles je me suis entretenue. J’ai pris un réel plaisir à échanger avec ces personnes qui ont su m’accorder de leur temps. Malgré le constat de la difficulté de leurs déplacements et, le fait que de nombreux points négatifs avaient été mis en avant, cela m’a permis de comprendre ce que signifie l’accessibilité au quotidien pour eux. Les entretiens « sont des moments sociaux parfois extraordinaires. Il est possible d’y prendre un grand plaisir et d’en garder de très bons souvenirs» (Beaud, Weber, 1998 : 228).
21
« La Carte n’est pas le monde, mais un regard particulier porté sur lui » Échelle inconnue4
4. Échelle inconnue est un groupe de recherche et de création, un centre de formation aux questions urbaines, numériques et artistiques. Également une maison d’édition, structure de production de films et, un espace d’exposition situé à Rouen, en France. 22
3.
Observer et décrire : un parcours commenté
Un mois et demi après notre première rencontre, nous avions convenu d’une nouveau rendez-vous avec Reimond Filippi, afin de nous balader dans l’espace public marseillais, et que je puisse l’observer dans ses déplacements. Nous nous sommes retrouvés le 20 décembre 2017, à 9H30, dans le café Trianon, à l’angle de la rue Sainte et de la rue Breteuil où il a l’habitude de se rendre. Au préalable, j’avais imprimé un plan du quartier du 1er arrondissement de Marseille, le secteur que nous allions arpenter, afin de pouvoir restituer au mieux par la suite l’expérience de notre cheminement. J’allais me positionner comme un « marcheur-observateur », où tous deux allons « marcher, percevoir et décrire » (Thibaud, 2001 : 84). Dès mon entrée dans le café (lieu que Thierry Pacquot définit comme « prolongement de l’habitat » (2009 : 43)), j’ai pu constater une atmosphère conviviale. Divers sons contribuaient à l’ambiance familiale qui s’en dégageait: bruits de la machine à café, cuillères qui tapaient sur les tasses, radio, rires, etc. Par la suite, Reimond m’a expliqué qu’il aimait cet endroit pour la diversité des univers qui s’y mélangent. Il m’a présenté : Fred, directeur des programmes de radio Dialogue ; Maria, espagnole qui vit depuis 50 ans à Marseille, juste en face du café, où depuis sa fenêtre elle regarde les allées et les venues des personnes ; Vanessa, la jeune serveuse qui parle la « bouche pleine », se faisant gentiment réprimander par 23
Reimond ; l’épicier de nuit du quartier qui s’en va se coucher. Il était important que je saisisse l’atmosphère de notre lieu de départ, tant apprécié par Reimond et, qui pourtant ne comporte aucune norme d’accessibilité au vu de la loi 2005. Il se sent bien dans cet endroit, non pas pour la mise en pratique d’une réglementation, mais car ce lieu représente l’identité de son quartier, avec une chaleur humaine qui lui est chère. Nous buvons donc un café ensemble, il demande à une de ses connaissances de régler la vitesse de lecture de son Dictaphone qui ne fonctionne pas bien depuis quelques jours. Il me confie alors que c’est son « pense-bête », son carnet de notes en quelque sorte. Le problème résolu, nous sortons du café pour une balade. Il est 9h45. Il me demande alors de l’accompagner à la billetterie de l’opéra, et après à la poste. Je comprends dès lors, qu’il a prévu un itinéraire qu’il connait, un trajet de ses pratiques quotidiennes et, que je l’observerai évoluer dans l’espace urbain de son quartier. Selon Jean-Yves Petiteau et Élisabeth Pasquier, « la méthode des itinéraires repose sur un postulat, celui de la reconnaissance de l’équivalence de la parole de l’autre comme analyse » (2001 : 77). C’est donc dans cette optique que j’ai abordé notre « déplacement sur son univers de références » (2001 : 65) où « la subjectivité de la situation d’enquête comme élément central » (2001 : 63) devait être prise en compte.
9
Fig.2. Parcours avec Reimond Filippi, le 20 décembre 2017, de 9h45 à 11h45 1er arrondissement, Marseille 1. Café le Trianon, lieu de départ 2. Obsctacle de la baignoire 3. Changement accoustique : passage entre le mur et un fourgon 24
E F
7 D
5
4
6
3
G
2 1
C
B A
8
10 4. Billetterie de l’Opéra
A. rue Sainte
5. Plots qui s’abaissent, danger
B. rue Paradis
6. La Poste
C. rue de Rome
7. Dangerosité des branches d’un olivier qui dépassent à hauteur des yeux 8. Passage piéton dangereux Arrêt de bus, voitures qui doublent, et pas de feux pour réguler la circulation 9. Domicile de Reimond Fillipi, lieu d’arrivée
50
100 m
Itinéraire parcouru Étapes / Arrêts Obstacles
D. rue Beauvau E. Canebière F. Vieux-Port G. Cours Honoré-d’Estienne-d’Orves 25
3.1
« Le parcours du combattant » : aides et obstacles
Nous empruntons la rue Sainte (cf. A sur la carte) et, passé 20 mètres, nous nous heurtons déjà à un obstacle: une baignoire remplie de déchets, ainsi que des véhicules à deux roues garés sur le trottoir, ne laissant même pas une unité de passage. Il me dit alors que cette baignoire est là depuis déjà quelques mois, et qu’il se questionne sur le fait que la municipalité ne fasse rien. « Les éboueurs ne se sentent pas concernés par ce type de détritus et le laissent donc sur la voirie. » Cette remarque amène alors à la question du vivre ensemble, comment chaque personne se sent concernée ou non par sa fonction et la part de responsabilité qu’elle souhaite investir pour le bon fonctionnement de l’espace public. Il me parle aussi des terrasses qu’il nomme « abusives ». Celle des restaurants et des bars qui s’installent sur la totalité du trottoir, l’obligeant donc à dévier sa course en allant sur la chaussée dédiée aux voitures. Dans ces cas là, « c’est également à la municipalité de réagir ». Nous continuons notre trajet. Passons à l’opéra pour retirer des billets pour un spectacle. Nous arrivons par l’arrière de l’édifice, longeons un mur se trouvant sur notre gauche, et à droite de nous, se situe un camion. La sonorité change en quelques secondes, il me demande ce qui se trouve sur notre côté, et je lui explique que c’est un « fourgon ». Cela ne semble pas le choquer car il m’explique que c’est par cette entrée que le matériel de spectacle est déchargé. Par la description d’un évènement dans notre trajet, la thématique de l’acoustique comme repère a pu être abordée. Un changement sonore radical peut être un support de compréhension pour percevoir l’espace. Je lui ai alors demandé si le bruit de la ville ne le dérangeait pas dans ses déplacements. Et m’a répondu 26
que lorsque l’environnement est trop bruyant cela s’avère fatiguant pour lui, mais un matin comme celuici, avec un flux véhiculaire « normal », selon ses propres termes, cela lui donne de réelles indications d’orientation. Par le bruit des voitures, il comprend le sens des rues, lui permettant alors de se repérer. Ce qui peut être dangereux dans ses trajets, c’est justement l’absence de bruits. Ce phénomène acoustique pouvant entraîner des collisions avec des voitures électriques, par exemple, qui ces dernières sont très silencieuses ; ou bien avec des vélos. Ce qui fut intéressant lors de notre promenade, c’est qu’il m’annonçait où nous nous situions : « nous n’allons pas tarder à passer la rue Grignan ; ici, c’est l’angle de la rue Paradis, etc. ». Parfois il se trompait, mais se reprenait directement afin de rectifier son erreur. Il a une carte mentale du quartier qu’il visualise par l’espace, en comptant les rues, situant ses changements de directions et, par les croisements. Après l’étape de l’opéra, nous nous sommes engagés sur la rue Paradis (cf. B sur la carte) qui a récemment fait l’objet d’une restructuration de la voirie. Ce nouvel aménagement urbain a supprimé les feux tricolores et les bandes de passages piétons. Cette démarche de la commune privilégie une mobilité plus douce, où, les voitures ralentiraient, laissant place aux piétons lorsqu’ils voudraient traverser. La ville de Marseille, ayant la réputation populaire que les automobilistes font souvent preuve d’incivilité, il semble nécessaire de rester prudent avant que cela ne rentre entièrement dans la conscience collective. Concernant la rue Paradis, je lui ai alors expliqué qu’il y avait une différenciation du traitement de sol : par la couleur, beige sur le trottoir et gris à chaque carrefour ; mais également par les pavés plus ou moins resserrés. 27
Grâce à ma description et au toucher de sa canne, il a immédiatement saisit ce dont je lui parlais, et a trouvé cela intéressant car il n’y avait pas fait attention. Cette description orale par ma faculté oculaire, et l’expérience du toucher par l’outil (la canne), lui a permit de créer une nouvelle perception mentale de l’aménagement de la rue Paradis. Cet outil est un réel allié, car il est le prolongement de ses doigts. Il a fait une formation à Paris il y a quelques années, afin de lui montrer comment l’utiliser et la tenir. Il m’avoue que c’est la pratique et l’expérience qui l’ont vraiment aidé. Au début, cela le fatiguait et il avait bien souvent une crispation dans l’avant bras. Diderot, énonçait aussi cette fatigue avec les différentes manières de percevoir : « il eût les doigts aussi fatigués, que nous avons la tête »5 (1749 : 58).
5. Chapitre L’âme au bout des doigts, à forte résonance avec le film documentaire La fenêtre de l’âme qui traite de la cécité, où la vision n’est pas le seul sens témoin de compréhension. Fig.3. Vue du croisement de la rue Paradis et rue Montgrand 28
Fig.4. Changement du traitement de sol au croisement avec les rues perpendiculaires à la rue Paradis. Fig.5. Dénivelé dû à l’implantation de poteaux amovibles. 29
Sur la rue Paradis, nous avons remarqué un autre danger durant notre promenade: des plots qui s’abaissent pour des voitures ayant un accès télécommandé. Ces plots, sont installés en pente et entourés d’un décaissé, dans l’alignement du bâti. Ce qui est problématique pour Reimond, car il se sert de ce dernier pour se déplacer, en longeant les murs. Ce décaissé peut alors lui occasionner une chute malgré sa prudence. D’autant plus que de nombreuses entraves à temporalité non définie apparaissent dans les trajets qu’il connait bien. Par exemple, durant notre parcours, sur la rue Paradis, un échafaudage était installé devant la devanture d’un magasin et les ouvriers avaient encombré la chaussée. Dans ce cas précis, j’ai dû lui tenir le bras, descendre du trottoir, nous avons donc empiété sur la chaussée dédiée aux véhicules automobiles, et sommes remontés sur le trottoir une fois l’obstacle contourné. La problématique du rôle du service public se pose donc à nouveau. Quelles mesures prennent-ils, bien que les travaux soient destinés à un édifice privé? La mise en place du protocole de travaux laissant des unités de passage obligatoires montrent bien des défaillances par cet exemple. En continuant notre cheminement, il se prenait souvent dans les pieds des sapins installés devant différents commerces (étant en période de Noël). Nous déviâmes souvent également notre trajectoire à cause de poubelles obstruant la chaussée. Je lui ai alors demandé quel est le type de mobilier urbain qu’il déteste le plus, celui qui le dérange dans ses trajets. Il m’a expliqué que ce sont les « forêts de poteaux ». Qu’à Marseille, « le bon sens n’est pas de rigueur ». Des poteaux sont « installés ici et là, on sait pas vraiment pourquoi ». Cela rejoint le propos du géographe François Tomas, qui réfléchit sur la notion d’espaces publics et qui considère que le problème de nos espaces publics viendrait d’une 30
« prédominance de l’automobile sur le piéton, à laquelle s’est ajoutée une juxtaposition de mobiliers différents implantés au coup par coup. Privé de sens, vécu comme coupure, l’espace public, perçu comme un vide entre les pleins du bâti, a souvent été rempli au gré des besoins de la vie moderne, en l’absence d’une réflexion globale » (Tomas, 2001 : 79). Il est alors légitime de se questionner sur la structuration de l’espace public marseillais, dont ses formes actuelles proviennent d’un héritage datant de la Révolution française. Organisée, et pensée par des urbanistes sur le papier, qu’en est-il de la jonction entre une réflexion en amont et, la réalité lors des poses des objets urbains? Pourquoi une anarchie apparait? Nous avons alors discuté des bandes d’éveil par exemple, qui sont obligatoires par la norme devant chaque passage piéton, mais qui bien souvent sont mal positionnées. Selon lui, c’est « un manque de formation de l’ouvrier qui l’installe ». En effet, s’il n’est pas formé et informé, et qu’il ne comprend pas pourquoi et pour qui il fait cela, il n’est pas étonnant que l’objet soit mal positionné. Émerge donc l’importance de communiquer sur ce qu’est l’accessibilité, et quelles peuvent être les aides pour les non-voyants afin de se déplacer dans l’espace public et d’y assurer un bon fonctionnement pour tous. 3.2 « Affronter la rue » : inaccessibilité et signalements Nous avons continué notre parcours sur la rue de Rome (cf. C sur la carte). Reimond a voulu me montrer sa télécommande qui actionne les feux tricolores avec un signal sonore pour lui permettre de traverser les voies en toute sérénité. Sans surprise pour lui, cela n’a pas fonctionné, comme il me l’avait déjà énoncé lors de notre première rencontre. Chaque feu est équipé de cette fonction (obligatoire depuis la loi 31
2005), mais dans la pratique ils ne sont que rarement actifs. Bien souvent, il signale sur internet, au service concerné, le dysfonctionnement des feux. Il reçoit alors des messages de confirmation de prise en compte de sa demande, mais constate les semaines suivantes que rien n’a été réparé. Il se questionne à nouveau sur le rôle de la municipalité. Et se presse d’ajouter: « je suis désolé, je n’exprime que des choses négatives depuis tout à l’heure ». Je lui ai répondu qu’il n’avait pas à s’excuser de cela, ses propos n’étant que le constat objectif des obstacles de ses trajets, de son quotidien, et donc en définitive de sa vie. Pour la suite de notre promenade, nous avons fait un arrêt à la Poste. Dès lors, j’ai constaté un changement de rapport dans notre relation. Durant toute la première partie de notre parcours, j’évitais tout contact et je l’observais se déplacer. Passée cette étape, il s’accrochait à mon bras, me demandait beaucoup plus de choses sur l’espace environnant, et j’ai compris que je lui servais à mon tour de guide. Il se reposait sur mes capacités visuelles ; la balade et les obstacles rencontrés auparavant l’ayant peut-être fatigué. Nous avons poursuivi sur la rue Beauvau (cf. D sur la carte), où il m’expliqua que devant un hôtel 4 étoiles, il y avait un olivier posé sur le trottoir qui lui était très dangereux. Et qu’il y a deux mois, il avait déjà fait un signalement, et qu’il serait intéressant pour lui de voir si les choses avaient évolué en faveur de sa requête. Une fois arrivés devant, nous constatons qu’il y a eu une volonté de prendre en considération sa demande, mais que malheureusement cela n’est pas suffisant. En effet, sa canne détecte le pot où est enterré l’olivier (assez conséquent), mais pas la branche rabotée qui, elle, est à hauteur d’yeux. 32
Haut de tête (de 145 à 200 cm) Détection impossible Hauteur des hanches (de 76 à 107 cm) Hauteur des genoux (de 41 à 57 cm)
Fig.6. Théorisation de l’inaccessibilité. Impact possible avec une branche d’un arbre dépassant de son pot.
Détection partielle Détection correcte
Il me demande alors de le guider jusqu’à l’accueil pour le signaler à nouveau. Le responsable sort avec nous pour voir la situation énoncée. Un échange un peu virulent s’en suit. Reimond Filippi, s’excuse de « jouer les mécontents », mais que pour des personnes dans « sa situation, cela est très importunant ». Le responsable dit qu’il va alors agir. « Une fois de plus, le même discours » soupire Reimond. Nous continuons notre trajet. Arrivons sur la Canebière (cf. E sur la carte), où il essaie à nouveau sa télécommande pour activer la sonorité des feux tricolores. Malheureusement, là aussi, « une fois de plus », ce fut un échec. Passant devant une bouche d’entrée du métro du Vieux-Port, je lui demande alors s’il prend les transports en commun. Il me répond que c’est très rare, et qu’il ne les utilise que lorsque qu’il en a l’obligation et, si possible, accompagné. Nous parlons des bus à vocalisation (obligatoire également depuis 2005) et, que bien souvent, la fonction n’est pas active. A l’intérieur, beaucoup de chauffeurs la mettent, mais il est vrai que je ne l’ai jamais entendu avec le microphone extérieur qui annonce l’arrivée du bus. Il m’a dit que « sur 100 bus, il a dû l’entendre 33
qu’une seule fois ». Ce chiffre énoncé plutôt comme un exemple, a pour symbolique de montrer la rareté de la mise en pratique de cette fonction. Nous arrivons alors sur le Vieux-Port (cf. F sur la carte), lieu qu’il ne fréquente plus et qu’il « déteste ». Il m’avait parlé de cela lors de notre première rencontre. En effet, il y perd tous ses repères, ce lieu lui apparaissant dangereux par le manque de gardecorps, ainsi que par le manque de différenciation du traitement de sol à l’approche de l’eau. Il m’énonce alors sa vision sur les « fausses commissions consultatives d’accessibilité ». Fausses, au sens où elles lui paraissent être une supercherie. En effet, ces commissions publiques sont obligatoires, de nombreux intervenants viennent exposer leur avis, mais peu (ou rien) de ce qui est dit n’est pris en compte. Lors de la restructuration du Vieux Port, la municipalité avait consulté des personnes à déficience visuelle, mais cela n’a rien changé au projet initial. « Ils se donnent bonne conscience en nous invitant, mais en réalité, ils n’en ont rien à faire ! ». C’est avec cette remarque provenant de Reimond, que prend toute l’importance de la question de la considération des personnes handicapées dans nos villes. Nous continuons notre promenade, et décidons de remonter sur le Cours Honoré- d’Estienned’Orves (cf. G sur la carte), afin que je le raccompagne jusqu’à son domicile. Il me raconte alors qu’il « aime marcher lorsqu’il est accompagné, comme ça, il peut marcher d’un pas plus vif ». Par moments, il n’a « pas envie de sortir, mais il se force pour conserver son autonomie ». Et que cela « dépend des jours, selon s’il est fatigué ou non, pour avoir l’envie d’aller affronter la rue ». Nous empruntons les marches du Cours Honoréd’Estienne-d’Orves, menant à la rue de la Paix Marcel Paul. Un autre obstacle vient alors déranger notre trajectoire : un bus à l’arrêt qui ne permet aucune visibilité pour traverser. Il m’indique qu’il aurait dû 34
demander un feu à cet emplacement pour réguler le flux et, que d’autant plus, cela servirait à beaucoup de monde, car il y a une école non loin. Mais qu’il ne l’a pas fait « par flemme certainement », selon ses propres termes. Je me rends compte que sa vie est ponctuée de signalements, car en seulement deux heures de temps passé avec lui, il m’a fait part de nombreux problèmes dont il a donné l’alerte, sans réels résultats. Je le guide donc pour traverser, afin de le prévenir d’une possible voiture qui doublerait le bus. Je prends conscience de la dangerosité de cette situation. Et avec une pointe d’humour, il me dit que sans mon aide, « cela aurait pu durer longtemps avant qu’il ne passe ». Il est 11H45. Nous sommes arrivés devant la porte de son immeuble. Nous nous disons au revoir et, je le remercie de s’être rendu disponible ainsi que de m’avoir accordé de son temps. Il me répond, qu’il reste à ma disposition pour toute autre question et il me remercie également pour les éléments que je lui ai apporté. Par cette expérience, j’ai pu percevoir la bienveillance des gens à son égard. Souvent dans sa vie, des personnes l’aident à traverser et/ou l’avertissent d’un obstacle imminent. Durant notre trajet, bien souvent des personnes s’écartaient dès lors qu’ils voyaient Reimond avec sa canne et ses lunettes (réels symboles à forte connotation signalétique de son handicap). Mais, malgré l’utilisation de la canne pour l’aider dans ses déplacements, elle ne peut lui donner toutes les clés de compréhension de l’espace qu’il pratique. Il doit être à l’écoute, car il peut « trouver des indices : si nous somme observateurs, le monde est rempli de signaux » (Galbiati, 2013 : 7). Sa perception est plurielle et il « utilise divers systèmes perceptifs en même temps » (Galbiati, 2013 : 9). 35
Interroger des pratiques urbaines par « la méthode de l’itinéraire qui est une expérience partagée » (Petiteau, Pasquier, 2001 : 65) m’a permis de mieux cerner les déplacements et la perception d’un nonvoyant au sein de l’espace public marseillais. En l’accompagnant dans un de ses parcours habituel, j’ai pu comprendre un territoire donné en fonction de nos différences. Reimond n’a pas eu de difficulté apparente à décrire ce qu’il percevait, la description faisant partie de son quotidien et de son vocabulaire. Par ce procédé, il a pu témoigner de son vécu, de son expérience culturelle et de ses pratiques sociales.
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Conclusion « Il faut y croire » Reimond Filippi
6. « Devient bien commun où chacun[e] trouve son intérêt individuel. L’individu (échelon de subsidiarité le plus bas) est acteur du bien commun, il est responsable et intéressé directement. » Jean-Marc Huygen, dans son cours Bien commun ou bien public, ENSA-Marseille, département H21, studio « relation&soutenabilité », 2017. 7. Durable au sens de « fonctionnalité pérenne ».
Chaque entretien fut ponctué d’une note d’espérance, d’optimisme. En effet, chaque personne avec qui j’ai pu m’entretenir m’a affirmé leur profonde croyance à ce que la situation tende à de l’amélioration. La notion de « bon sens » revenait souvent, renvoyant au fait qu’avec de la « bonne volonté de tous et des petites solutions », la vie de nombreuses personnes en situation de handicap pourrait être facilitée. Comme a pu l’évoquer Reimond Filippi lors de notre parcours commenté: « le but de la société, c’est que le gens se sentent bien ». Depuis 2005, la loi a montré un intérêt concernant l’accessibilité de l’espace public. Des normes ont été mise en place pour améliorer les déplacements des personnes à déficience visuelle ; mais j’ai pu constaté par cette expérience avec un non-voyant dans l’espace urbain, que dans la pratique, rien de tel n’en ressort. Comme l’énonce Carolina Garcia, il est primordial que « les architectes et les urbanistes ne voient pas la réglementation comme une contrainte » (2017), de reconsidérer le rapport entre la notion de beauté et la réglementation. En faveur à l’accessibilité, il serait préférable d’appréhender un espace public ou un bâtiment par les qualités spatiales qu’ils ont à proposer. Il ne suffirait donc pas d’appliquer des normes pour rentrer dans des codes, mais donner de réelles clés de compréhension spatiale à différents types d’usagers. Beaucoup de personnes expriment une volonté de bien vivre dans leur intimité. L’espace public en étant le prolongement, il serait intéressant d’en faire autant. 37
Nous y évoluons au quotidien, nous y circulons, l’arpentons, le vivons. En le rendant accessible et praticable par tous, les liens sociaux se verraient consolidés et l’espace public serait alors perçu comme une notion de bien commun6 où tout le monde y aurait sa part de responsabilité et de respect. Dans une société de plus en plus individualiste, où notre façon de voir est conditionnée, il semble intéressant d’« attirer l’attention sur des processus à propos desquels nous n’avons pas coutume de nous interroger. Par là, nous espérons contribuer à développer le sens de l’identité personnelle aux dépens de l’aliénation et à valoriser l’expérience » (Hall, 1971 : 9). Toujours selon Carolina Garcia, l’accessibilité aujourd’hui étant un « problème sociétal » (2017), avec la concertation de différents acteurs, il serait possible de créer des villes durables7 avec une bonne compréhension de la ville pour tous. À mon sens, pour Vivre Ensemble de manière conviviale, il me parait important de penser une ville accueillante, hors de toute discrimination. La compréhension de cela passant par la sensibilisation, la transmission, et l’expérience vécue.
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Glossaire Accessibilité Selon Laurent Chapelon, docteur en Géographie et en Aménagement de l’espace : « l’accessibilité ne renvoie pas uniquement à la seule possibilité d’atteindre ou non un lieu donné, mais elle traduit également la pénibilité du déplacement, la difficulté de la mise en relation appréhendée le plus souvent par la mesure des contraintes spatio-temporelles. De ce fait, l’accessibilité va dépendre également du niveau de service offert par le ou les systèmes de transport utilisés pour accomplir le déplacement. » Cécité Etat d’une personne privée du sens de la vision. Compréhension Faculté et/ou action de saisir intellectuellement les causes et les conséquences, le sens, le fonctionnement, la nature, de quelque chose. Espace public Selon Antoine Fleury, géographe, en s’appuyant sur les travaux de François Tomas et de Richard Sennett (entre autres) : « l’espace public est un terme polysémique qui désigne un espace à la fois métaphorique et matériel. Comme espace métaphorique, l’espace public est synonyme de sphère publique ou du débat public. Comme espace matériel, les espaces publics correspondent tantôt à des espaces de rencontre et d’interaction sociales, tantôt à des espaces géographiques ouverts au public, tantôt à une catégorie d’action ».
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Expérience Épreuve destinée à vérifier une hypothèse ou à étudier des phénomènes par l’observation de faits naturels ou provoqués. Vivre un événement, considéré du point de vue de son aspect formateur. Mobilité Selon Nadine Cattan, directrice de recherche en géographie au CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique) : « la mobilité spatiale est une composante essentielle de l’organisation des espaces par les sociétés. Elle fait l’objet de nombreuses définitions qui renvoient à des registres différents d’observation et de conceptualisation. Dans son acception la plus fréquente, la mobilité est un déplacement, un transfert, d’un lieu à un autre. Ce déplacement peut concerner des personnes, des biens matériels et immatériels, des informations. » Parcours Se déplacer en suivant une direction plus ou moins déterminée, aller dans une, plusieurs, toutes les parties de. Signifie également : embrasser par la pensée ou par la réflexion.
Définitions selon les sites internet : - www.cnrtl.fr, consulté le 3 octobre 2017. - www.larousse.fr, consulté le 4 décembre 2017. - www.hypergeo.eu, consulté le 3 janvier 2018. 40
Bibliographie Ouvrages - BEAUD Stéphane, WEBER Florence, « Préparer et négocier un entretien ethnographique » , « Conduire un entretien », In : Guide de l’enquête de terrain, Paris, La Découverte, coll. Repères, 1998, p.177-230. - DIDEROT Denis, Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voyent, Londres, 1749. Disponible sur : gallica.bnf.fr, consulté le 5 octobre 2017. - LE BLOAS Carole, Accessibilité des bâtiments aux personnes handicapées, Mayenne, Ed. Le Moniteur, 2016. - PALLASMAA Juhani, Le regard des sens , Paris, Ed. Du Linteau, 2010. - PAQUOT Thierry, L’espace public, Paris, La Découverte, coll. Repères, 2009. - PASQUIER Élisabeth, PETITEAU Jean-Yves, « La méthode des itinéraires : récits et parcours », In : M. Grosjean, J.-P. Thibaud (sous la dir. de), L’espace urbain en méthodes, Marseille, Ed. Parenthèses, 2001, p.63-77. - PEREC Georges, Espèces d’espaces, Paris, Ed. Galilée, 2000. - THIBAUD Jean-Paul, « La méthode des parcours commentés », In : M. Grosjean, J.-P. Thibaud (sous la dir. de), L’espace urbain en méthodes, Marseille, Ed. Parenthèses, 2001, p.79-99. - TWITCHELL HALL Edward, La dimension cachée, Paris, Ed. du Seuil, 1971. 41
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Je tenais à remercier l’équipe encadrante du séminaire Vivre Ensemble pour leurs conseils éclairés. Particulièrement Nadja Monnet, pour son attention, et pour m’avoir fait confiance. Je remercie également mes proches pour leur aide et leur soutien infaillible depuis tant d’années. Enfin, je remercie toutes les personnes que j’ai rencontré pour mener à bien ce travail, qui ont accepté de me donner de leur temps et d’échanger avec moi. Merci pour votre gentillesse et, de m’avoir accueillie au sein de votre univers. REMERCIEMENTS /
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