n°102 / dÊcembre 2014 / GRATUIT
nord & belgique Cultures et tendances urbaines
La Bûche de Noël © Panique / Autour de Minuit / Beast Animation
Sommaire
LM magazine n°102 - décembre 2014
06 - News
42 - Musique
Happy birthday Blue Note, Sapin écolo, Books dating, Dentifrice nihiliste, La BD pour les nuls, Depeche Mode, Pokket mixer, Bromance, La Barbe ne fait pas le philosophe, Geek food, Etienne Daho…
Julian Casablancas, Little Dragon, Isaac Delusion, Wampire, Laetitia Shériff, IAM, Metronomy, Marianne Faithfull, Aubert chante Houellebecq, The Dø
12 - Style Dominique Persoone : Showcolat
14 & 24 - Portraits Germain Dapsence : Le Père-Noël à scooter Richard Coles : Ex-Communards devenu prêtre
52 - écrans Le Studio Ghibli, Vincent Patar & Stéphane Aubier (La Bûche de Noël), God Help the Girl, Calvary, Tiens-toi droite, Be film festival
66 - Exposition
Alessandro di Giuseppe : Le Pap’40
Des Animaux et des Pharaons, Camille Claudel, La Braderie de l’art, L’Autre de l’art, Hans Op de Beeck… Agenda
20 - Reportage
84 - Théâtre & Danse
The Sunday Assembly
Peeping Tom (interview), Yoann Bourgeois, Les 10 ans des maisons Folie, Le Petit Prince, Don Giovanni… agenda
16 - Rencontre
28 - Portfolio Yeaaah! Studio
34 - Jeux Supinfogame : Silicone Valenciennes
98 - Le mot de la fin (de l’année)
Sébastien Dujardin sur un plateau
Stéphane Casier habillé pour l’hiver
LM magazine France & Belgique
28 rue François de Badts 59110 La Madeleine - F tél : +33 362 64 80 09 - fax : +33 3 62 64 80 07
www.lm-magazine.com* www.facebook.com/magazineLM twitter.com/LM_Letsmotiv
Direction de la publication / Rédaction en chef Nicolas Pattou nicolas.pattou@lastrolab.com
Direction artistique / Graphisme Cécile Fauré cecile.faure@lastrolab.com
Rédaction Julien Damien redaction@lm-magazine.com Marie Pons info@lm-magazine.com
Couverture Yeaaah! Studio, Raccoon www.yeaaah-studio.com Publicité pub@lm-magazine.com
* A Responsive Web Design
Administration Laurent Desplat laurent.desplat@lastrolab.com Réseaux sociaux Sophie Desplat Impression Imprimerie Ménard 31682 Labège Diffusion C*RED (France/Belgique) ; Zoom On Art (Bruxelles)
Ont collaboré à ce n° : Thibaut Allemand, Pierre Bérenger, Elisabeth Blanchet, Madeleine Bourgois, Stéphane Casier, Julien Collinet, Hugo Dewasmes, Marine Durand, Nicolas Jucha, Marie Tranchant et plus si affinités.
LM magazine France & Belgique est édité par la Sarl L'astrolab* - info@lastrolab.com L'astrolab* Sarl au capital de 5 000 euros - RCS Lille 538 422 973 Dépôt légal à parution - ISSN : en cours L’éditeur décline toute responsabilité quant aux visuels, photos, libellé des annonces, fournis par ses annonceurs, omissions ou erreurs figurant dans cette publication. Tous droits d’auteur réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par quelque procédé que ce soit, ainsi que l’enregistrement d’informations par système de traitement de données à des fins professionnelles, sont interdites et donnent lieu à des sanctions pénales. LM / Let'smotiv est imprimé sur du papier certifié PEFC. Cette certification assure la chaîne de traçabilité de l’origine du papier et garantit qu'il provient de forêts gérées durablement. Ne pas jeter sur la voie publique.
Papier issu de forêts gérées durablement
Des idées Hotte
Hotte Hotte !
mAillo vitAl années 1970
chapitre SiX
Donald Byrd à Paris, 1964.
BLUE NOTE RECORDS
Le maiLLon vit
6 news
Blue Note, le meilleur du jazz depuis 1939 Fallait-il être passionné ou inconscient pour créer une maison de disques à une époque où des mastodontes comme Columbia Records régnaient sur la planète ? Sûrement un peu des deux. Aidé par l’écrivain Max Margulis et rejoint par le photographe Francis Wolff, Alfred Lion démarre l’aventure Blue Note en 1939 : il choisit les musiciens tandis que Francis gère l’image. Dans les années 1950-60, le label finance les répétitions juste avant les enregistrements. Forcément, les meilleurs se bousculent au portillon (Miles Davis, Art Blakey ou Thelonious Monk…). Ce mécénat déguisé, combiné à l’arrivée de l’ingénieur du son Rudy Van Gelder et ses célèbres gants blancs, donne naissance au mythique « son Blue Note ». En 1956, Reid Miles les rejoint et crée une identité graphique reconnaissable entre toutes. Sous la plume de Richard Havers, cette histoire devient un roman intelligemment chapitré, nourri par une incroyable richesse iconographique : planches contact originales et intimité des studios, on sent l’odeur de cigarette qui plane au dessus des micros… Ces 400 pages racontent 75 ans d’un label visionnaire, une hisoire sans équivalent dans le monde du jazz. Un objet précieux, de ceux que l’on prendra éternellement plaisir à feuilleter. H.D. Richard Havers, éd.Textuel, 416p., 59€
Mon beau sapin
Sauvez un arbre ! Le vrai sapin écolo est en papier... Il s’accroche au mur et ne perdra jamais ses aiguilles. La version Noël est même déjà décorée. Quatre punaises et le tour est joué ! 17€, www.atypyk-e-shop.com
Books Dating Vous hésitez entre lire et rencontrer l’âme sœur… Et pourquoi pas les deux en même temps ? C’est ce que propose la Librairie Dialogues Théâtre, à Lille, en organisant son premier Books dating. Le principe ? 14 célibataires sont sélectionnés et ont 7 minutes pour présenter des livres à leurs vis-à-vis. Et plus si affinités… littéraires. 12.12, 19h30, 5€ (+concert) // 21h, concert de Trois quarts d’heure américain, 5€, www.dialoguestheatrelaboutique.com
Le Petit Livre De La Bande Dessinée Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sans avoir... pensé à le demander. Hervé Bourhis et Terreur Graphique racontent l’histoire du neuvième art, de la tapisserie de Bayeux à 2014. On butine l’ouvrage au gré du hasard, apprenant 1001 anecdotes et redécouvrant des œuvres oubliées. Le tandem passe en revue cases et bulles, des comics aux mangas en passant par la fameuse BD franco-belge – et invitant 70 auteurs à revisiter les couvertures d’albums historiques. Indispensable. T.A. Herve Bourhis et Terreur Graphique, éd. Dargaud, 200p., 19,99€
Émail Néant
Depeche Mode live in Berlin
Si même en période de fêtes vous ne croyez plus en rien, il vous reste le dentifrice nihiliste : sans goût, sans couleur et sans odeur. Après vous être brossé les dents, rendez-vous tout de même p.14, histoire de retrouver une lueur d’espoir.
Quoi de mieux que Berlin pour accueillir le son industriel de l’illustre groupe anglais ? Ce coffret reflète la performance des quinquas durant le tournée Delta Machine (CD + DVD live). Avec en prime un set acoustique filmé dans un bordel de Berlin par Anton Corbijn qui signe aussi l’artwork (et connaît le groupe depuis 1986).
5,95€, mycrazystuff.com
Columbia Records/Sony Music, 28,42> 22,99€
8 news
Pokket mixer Vous redoutez un traquenard le soir du réveillon ? Attirez-donc le DJ vers le bar et reliez cette mini table de mixage aux téléphones (ou lecteurs mp3) de vos meilleurs amis. Elle tient dans la poche tout comme votre cher LM magazine ! www.pokketmixer.com, 89,95€
Homieland Pour les trois ans de Bromance, Brodinski s’est fait un petit plaisir avec cette compil’ qui donne carte blanche aux artistes du label. Homieland s’avance comme un objet sonore reflétant l’esprit de la maison : rivé sur le dancefloor, inventif et hyper-éclectique. Du rap sans concesion Can’t Help Myself à la witch-house de Suicideyear, en passant par la deep-house de Louisahhh !!!, ces 19 titres redistribuent les cartes des musiques électroniques pour 2015. Bromance Records / Parlophone / Warner, 23€
La Barbe ne fait pas le philosophe Et si derrière toute frivolité se cachait une authentique liberté d’esprit ? Et si la soif de superflu différenciait l’homme de l’animal ? Avec humour (« la mode est une grand-messe où, comme tout bon croyant, nous aimons recevoir l’eucharistie sous la forme d’un it-bag et pas d’une hostie »), Sophie Chassat réhabilite des notions jusque-là méprisées par nos sociétés. Au détour d’une soixantaine d’entrées, référencées sans être verbeuses, la normalienne se penche sur l’acte de naissance de la cellulite, convoque Pénélope et Athéna pour défaire nos préjugés sur le maquillage, et nous apprend que le farniente n’est décidément pas chose aisée. Un Abécédaire philosophique du superficiel enrichissant et décomplexant. M.D. Sophie Chassat, éd. Plon, 266 p., 16€
10 news
Geek Food Faites vos jeux ! Des parties de Tetris à coups de sablés et une bûche en forme de Game Boy... Des consoles aux fourneaux, le retrogaming envahit la cuisine et donne des boutons à la pâtisserie. Pour une fois qu’on peut jouer avec la nourriture. 11,90€, commentseruiner.com
être là, avec Amnesty International Des rues de Buenos Aires au camp Rom de Grigny, en Essonne, les membres d’Amnesty International tentent d’être partout où les droits de l’homme sont bafoués. Christophe Dabitch a rencontré des chercheurs de l’illustre ONG et aussi ceux qui se battent dans leur pays pour le respect de la vie humaine. Il en a tiré 13 reportages, traités sous la forme d’une BD, qui ne cèdent jamais à la facilité, à la simplification. Même en abordant des thèmes aussi complexes que la vente d’armes ou le droit d’asile. Les illustrations, très réalistes ou plus oniriques, sont à la hauteur des textes : édifiantes et engagées. M.B. Christophe Dabitch, éd. Futoropolis, 184 p., 24€
Étienne Daho On l’imagine timide, réservé, discret. OK, Etienne Daho est tout cela. Mais le Rennais est également une remarquable bête de scène. Ce septième album live (en comptant Bienvenue à la Maison, 1998, extrêmement rare) le prouve encore une fois. Réarrangés et toujours habités, tubes ancestraux et Chansons De L’Innocence Retrouvée se marient à merveille lors de ces concerts estivaux donnés à la Cité de La Musique et à la salle Pleyel en juillet. T.A. Diskönoir, (Polydor/Universal), 17,99€ (CD double), 15.99€ (simple)
Dominique Persoone Showcolat
Texte Julien Damien Photos DR
Courons le risque de ne pas vous surprendre : c’est en Belgique que l’on trouve le chocolatier le plus allumé de la planète. Voilà pour le cliché. Pour le reste, il ne sera question que de pâtisserie. Et de rock’ n roll.
The Chocolate Line, 19 rue Simon Stevinplein, Bruges & 50 Palais du Meir, Anvers, mar>sam, 9h30>18h30 & dim>lun, 10h30>18h30 The Chocolate Factory (atelier), Vaarstraat 75, Bruges Sint-Pieters Cacao - les racines du chocolat, une expédition au Mexique, de Dominique Persoone et Jean-Pierre Gabriel, éd. Françoise Blouard (élu « Best chocolate book of the world » en 2009), 256p., 29,95€ — www.thechocolateline.be —
13 style
Son nom est Persoone. Dominique Persoone. Et il se revendique « Shock-O-Latier ». Mais on peut aussi le qualifier sans l’offusquer d’explorateur tant il découvre de contrées gustatives insoupçonnées, à la frontière du sacré-sulé, ou du sucré-salé si vous préférez. Un terme galvaudé dites-vous ? Mais avez-vous déjà goûté du chocolat au choufleur ? à l’huître ? à l’huile d’olive, au chanvre, au wasabi ? Eh bien c’est le genre de confiseries que l’on peut dénicher dans l’une des deux boutiques du quadragénaire. Baptisées The Chocolate Line, on les trouve dans le cœur historique de Bruges où il s’est installé en 1992, ou au Palais Royal d’Anvers où il expose aussi ses œuvres depuis 4 ans (réalisées avec de la peinture au chocolat). Mais ce ne sont pas là les seules extravagances du Flamand. L’ancien cuisinier se distingue également par d’audacieuses créations qui ne manquent jamais de faire le buzz : le rouge à lèvres goût choco, la praline à l’hélium (qui s’envole quand on ouvre le ballotin) ou encore le Chocolate Shooter, fameux kit de chocolat à sniffer (!) qu’il a présenté lors de la fête d’anniversaire de Charlie Watts et Ron Wood, des Rolling Stones. Willy Wonka peut bien aller se rhabiller.
14 portrait
SaCnlatuaser Prémonition
on Les enfants avaient rais d’y croire
Arrestation
-t-il Le Père Noël pourra ? fiterminer sa tournée
Le Père Noel
EXISTE !
la Il sillonne le nord de France en scooter tes de tournée Exclusif : anecdo
ps… Et pendant ce tem
Ses rennes aperçus à Colorado
Aspen,
Germain Dapsence
Scoot toujours ! Texte Julien Damien Photos Julien Damien / DR
à Vieux Condé (près de Valenciennes), tout le monde connaît le secret le mieux gardé de la planète : l’identité du Père Noël. Celui-ci habite à environ 2000 km au sud de la Laponie, dans une petite maison située au fond d’une impasse. Et fait sa tournée en scooter ! Germain Dapsence, 58 ans, nous accueille avec bonhomie. Tandis que la Mère Noël commente le 9 763e épisode des Feux de l’Amour*, le quinquagénaire nous dévoile sa drôle de double vie. Ancien cariste, puis déclaré invalide, il s’est vite investi dans le milieu associatif. « Un jour, au Secours Populaire, ils ont eu besoin d’un Père Noël. à l’époque j’avais une barbe, les cheveux longs, et un gros ventre ! » Forcément, il a décroché le rôle. Germain a commencé sur les marchés, avant de se rendre dans les écoles, les crèches... Son succès fut tel que la demande a suivi. Depuis 11 ans, le soir du réveillon, il se déplace donc bénévolement chez les particuliers du secteur. Pas en traîneau tiré par des rennes, mais en scooter de 50 cm3 – « ben oui, j’ai pas le permis ». Et cela qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige. Papiers s’il vous plaît Les gens l’appellent un peu en avance, et il débarque en costume pour distribuer les cadeaux (généralement planqués dans le garage). « Il faut voir la tête des gamins ! Souvent, c’est un membre de la famille qui fait le Père Noël : le papa, le tonton, le papy… Mais là, ils sont tous autour de la table. Alors ils se posent des questions ». L’année dernière sa tournée – interrompue par un contrôle de police – s’est achevée à 3 h du matin. Pas refroidi pour un sou, Germain est déjà en train de préparer la prochaine. Au programme : une trentaine de rendez-vous à honorer. « Noël dernier, j’en ai raté trois », regrette-t-il. Sûrement des enfants pas assez sages. *Diffusé le 6 novembre sur TF1
17 rencontre
Alessandro di Giuseppe
Mes bien cher frères Propos recueillis par Nicolas Pattou & Marie Pons Photos DR
On a recueilli la parole du Pap’40 de l’Eglise de la Très Sainte Consommation, Messie des nantis, adorateur du culte de l’argent et du pouvoir d’achat. Avec l’intuition que derrière le bandeau Nike et le bling en toc palpitait un vrai cœur de militant. Et, quand en pleine interview Alessandro di Giuseppe lâche la soutane et le second degré pour défendre ses convictions, on se dit que l’habit ne fait vraiment pas le moine. Amen. Qui êtes-vous Alessandro di Giuseppe ? Je suis le fils du Capital qui prêche la bonne parole sur Terre : Travaille, Obéis, Consomme. Avec mes fidèles brebis, mon banquier, mes femmesobjets nous nous agenouillons dans les places marchandes pour prier au nom de la Sainte Croissance et du Saint Profit.
Qu’est-ce que l’Eglise de la Très Sainte Consommation ? C’est la première religion sur Terre : des milliards d’adeptes qui vouent un culte à la consommation. Et si l’on détient déjà les rênes de la société, on en veut toujours plus, nous les dominants. On est décomplexés. Alors, on descend dans la rue pour dire ce qu’on pense, même si ça ne plaît pas
Retrouvez l’interview en intégralité sur lm-magazine.com
>>>
5 commandements « Résignez-vous ! » « La culture ça fait mal à la tête. » « TF1 sur toutes les chaînes. » « Nous sommes tous des enfants d’héritiers. » « Les générations futures, elles avaient qu’à être là avant. »
au peuple : il va falloir travailler plus pour consommer plus. Le message est-il bien accueilli ? Au-delà de nos espérances. Surtout en cette période de fêtes de fin d’année ! Réunir les familles et partager des valeurs comme la solidarité ça va bien deux minutes. Essayons plutôt de faire repartir cette croissance en berne. Allons la chercher avec les dents. Notre but est que toutes les familles s’offrent des Iphone 7 le jour de Noël. En quoi vos actions consistent-elles ? On descend dans les rues de Lille, Cannes ou Paris et on se prosterne
devant le Saint McDonald’s. Nous prions, nous chantons Croissance revient ! ou La Marchandaise, notre hymne officiel. Nous réservons d’ailleurs notre prochaine grand-messe au magasin Apple à Lille*. Et le jour du Téléthon nous organisons le Téléthune. Et comment peut-on rejoindre votre église ? Sur une simple souscription de 15 000€. On tient à ce que les gens s’endettent. Vous vous êtes présentés aux élections municipales, quel était votre programme pour la ville de Lille ? Raser le Grand Stade tous les cinq ans pour le reconstruire immédiatement, au nom de la Sainte-Croissance. Construire l’aéroport Britney Spears International à la place de Lille Sud puisque les pauvres sont économiquement inutiles. Et un golf 18 trous à Fives. Concernant l’éducation, il faut que les enfants mangent de la nourriture industrielle à chaque repas. Depuis quand l’église est-elle active ? Depuis 2010, c’est un travail à plein temps. Attention, là je passe du côté obscur de la force... (Il devient sérieux). Il faut écrire des scènes, on a fait deux campagnes municipales, monté un spectacle… On veut mettre en exergue toute forme de domination et d’oppression. Notre Eglise est un miroir tendu à la société, autant vers les puissants que les consommateurs.
19 rencontre
à visiter / www.amentonpeze.org www.consomme.org
Ce discours décalé pointe donc un problème concret… Oui, je viens du militantisme, de l’ « artivisme » et du clown. On a transformé notre engagement en campagne artistique avec un spectacle (Amen ton pèze) et on aimerait toucher des publics différents. Le message passe beaucoup mieux avec l’humour. On allie l’absurdité du rire de résistance au sens profond des idées. Notre société est régie par l’amour du fric, la compétitivité et le productivisme, alors on appuie là où ça fait mal. On se revendique de l’écologie politique radicale. On ne sauvera pas le monde mais on dénonce la farce démocratique. Certains prennent-ils les choses au premier degré ? Oui et c’est inquiétant, la compréhension de l’humour est un signe de bonne santé dans une société. Pour comprendre notre message, il suffit de retourner tout ce qu’on dit. En
prônant l’ultra-compétition, on dénonce évidemment ce poison qu’on sert aux enfants dès le plus jeune âge. Vous sentez-vous proches des décroissants ? Oui, et des objecteurs de conscience. On nous taxe parfois d’utopistes alors que l’utopie est de l’autre côté, de ceux qui vantent la croissance infinie dans un monde de ressources finies. Nous sommes pour le progrès mais pas celui qui consiste à asphyxier la planète. Ce qu’on dit, derrière la comédie, c’est sérieux. On a comparé votre action à celle de Coluche… On s’en inspire, bien sûr. On est des bouffons au sens noble du terme, de ceux qui balancent la vérité à la face des puissants. Pour l’instant on est petits, on ne dérange pas trop mais rien ne nous empêche de briguer la présidentielle (rires). * le 6 décembre à Lille, 1 rue Faidherbe
21 reportage
The Sunday Assembly
Une église sans Dieu Texte & Photos Elisabeth Blanchet
Dimanche matin, 11h. L’heure de la messe. Des souvenirs mitigés reviennent à la mémoire de ceux qu’on a forcés à aller à l’église. On va encore se geler, se planter avec les gestes rituels, lutter contre les fous rires, se moquer des enfants de chœur… La liste est longue mais ne correspond pas du tout à ce qui attend le « paroissien » de la Sunday Assembly. Rendez-vous sur le banc d’une chapelle pas comme les autres.
D’
abord, ce n’est pas une église mais une salle de spectacle : le Conway Hall (une organisation membre de « l’union internationale humaniste et éthique », NDLR), en plein centre de Londres. Ensuite, il n’y a pas de Dieu, pas de prêtre, et aucun pré-requis. On est tous les bienvenus. Il y a même un coin enfants. Et c’est gratuit. Toutes les deux semaines, Sanderson Jones et Pippa Evans dispensent un show très spécial. Chaque Sunday Assembly a son thème, ses intervenants. Aujourd’hui, elle est dédiée à la Première Guerre mondiale. On commence en chanson : It’s a long way to Tipperary, un standard du music-hall écrit en 1912. La salle pleine à craquer la reprend en chœur tandis que Pippa mène la danse. Cela nous rappelle certaines images d’église américaine. Ensuite, Sanderson prend la parole. Avec son allure de jeune Jarvis Cocker chevelu, ses talents de comédien (il vient, comme Pippa, du milieu du spectacle), il captive la foule. Il parle de tous ces hommes morts au combat. Pour qui, pourquoi ? Son discours touchant fait réfléchir tout comme celui de Deborah Lavin, historienne, qui qualifie la guerre >>>
22 rencontre
de 14-18 de crime légalisé. « Nous sommes les petits-enfants, les arrièrepetits enfants des survivants. Et nous sommes là pour célébrer la vie ! ». Telle est la mission de la Sunday Assembly. Son slogan ? « Vivre mieux, aider souvent, se poser plus de questions ». Tradition populaire. Comment est né ce phénomène ? Tout simplement sur les bancs de l’école primaire britannique. Depuis leur plus jeune âge, les enfants sont habitués aux « assemblies ». Dans chaque établissement, une fois par semaine, on leur réserve un moment pour se retrouver, chanter, préparer des spectacles… La Sunday Assembly en est donc une version dominicale. « On voulait organiser quelque chose de semblable à l’église, en entretenant l’idée d’une communauté, mais sans
« On voulait organiser quelque chose de semblable à l’Eglise mais sans le discours sacré » le discours sacré », explique Sanderson. Leur expérience du spectacle a fait le reste. Et c’est ainsi que la première Sunday Assembly eut lieu un matin de janvier 2013. Depuis, elle sévit un dimanche sur deux et grandit de manière exponentielle. Tandis que les religions traditionnelles chrétiennes bataillent pour recruter, cette « Église sans dieu » a inspiré 27 congrégations réparties sur plusieurs continents. La plupart se trouve dans les pays anglosaxons, probablement parce que le
mouvement est né dans le berceau de l’Église anglicane, et qu’il lui emprunte ses codes. Cela dit on en trouve aussi une en France, en Belgique ou en Allemagne. De la suite dans les idées. Peut-on craindre un virage sectaire ? « Ce n’est pas parce que quelqu’un prend la tête d’une congrégation qu’il devient pour autant un gourou du jour au lendemain ! Regardez les groupes de boy scouts, surenchérit Sanderson. Mais au cas où, on est en train de mettre des systèmes d’accréditation des leaders pour éviter le risque… » Et maintenant ? « Vous m’auriez posé la question il y a un an, je n’aurais jamais pensé qu’on en serait là ! En tout cas, notre projet a du sens à l’heure où les visions du futur sont si déprimantes ».
C’est sur les paroles de Zombie des Cranberries que la cérémonie se termine. Ces drôles de « paroissiens » achèvent leur communion dans le chant, contre l’horreur de la guerre. Puis vient le temps du silence, du recueillement. à la sortie de la messe, Marie, 22 ans, confie : « Je viens ici depuis l’été dernier. Depuis je ne rate pas un office. Je ne suis plus croyante, mais l’atmosphère, les rituels de l’église et l’esprit de groupe me manquaient un peu ». Grâce à la Sunday Assembly, elle s’est fait des amis et avoue ne jamais manquer les festivités qui suivent chaque messe : le pub du dimanche midi en guise de vêpres !
à visiter : sundayassembly.com
24 portrait
Richard Coles Le Miraculé
Texte & Photos Elisabeth Blanchet
C’est dans les Midlands, à une bonne heure au nord de Londres, que le révérend Richard Coles a sa paroisse. Derrière sa soutane et son air bonhomme, il est difficile de l’imaginer près de trente ans plus tôt en pop-star, aux côtés de Jimmy Somerville dans The Communards. Retour sur un chemin de croix.
«O
n va s’installer dans la cabane de jardin. On y sera tranquille », propose Richard. L’obsession des Britanniques pour leur « shed » est bien connue... C’est donc devant un feu de bois, entouré de ses quatre chiens et
de son compagnon (prêtre lui aussi), que Richard revient sur son parcours : « J’ai grandi tout près d’ici, dans un milieu « middle class ». Ado, je me suis enfui à Londres ». Très vite, il y rencontre Jimmy Somerville, qui a déjà créé Bronski Beat et cherche un
musicien pour l’accompagner lors d’un concert. « On faisait partie d’une sorte de gang, un groupe d’une soixantaine d’homos. Entre autres, on animait des soirées dans un pub d’Islington à coups de disques punk et disco. Et au-delà de la musique, on avait aussi une conscience politique… » Entre le fort taux de chômage, la grève des mineurs, les Falklands, chacun se souvient de ces années comme d’une période propice à la création et au combat. Avec un ennemi de taille au centre : Margaret Thatcher ! Up and down. Richard suit donc Jimmy en tournée le saxo en bandoulière, et ils ne se quittent plus pendant trois ans. Tous les deux amoureux de Paris, ils découvrent le mur des Communards au Père-Lachaise. « Un nom que nous avons récupéré stupidement quand j’y repense... Après tout, on reprenait surtout des hits Motown »*. Quoi qu’il en soit, le groupe connaît un succès international, puis se sépare au bout de trois ans. « On ne s’appréciait plus vraiment et nous étions tiraillés par des situations contradictoires : le succès, notre lutte contre la Dame de fer et surtout le sida... » Richard laisse la conversation en suspens. « Notre groupe d’amis a été littéralement décimé par ce virus. Il fallait aussi se battre contre la stigmatisation… ». à la fin des années 80, revenu de la vie en groupe, il voit tout en noir : « Prendre des drogues me semblait la meilleure chose à faire, et ça a duré pendant un an, sans que je réalise vraiment ». >>>
[ Bio express ]
Début des années 80 : Il rejoint
un groupe nommé « Alternative Gay Scene » par certains sociologues. Boy George en fait aussi partie.
1983 : Il accompagne Jimmy
Somerville lors d’un concert caritatif dont le but est de collecter des fonds pour un village de mineurs du Pays de Galles en grève. Cette histoire a inspiré le film Pride, de Matthew Warchus.
1985 : Création de The Communards et sortie du single You are my world. 1986 : reprise de Don’t Leave Me This Way de Harold Melvin and the Blue Notes, dans un style très Hi-NRG. Single le plus vendu de l’année au Royaume-Uni. 1988 : Fin de The Communards. 2005 : Richard est ordonné Prêtre de l’église Anglicane.
26 portrait
Fathomless Riches : Or How I Went From Pop to Pulpit par le Révérend Richard Coles, sorti le 16 octobre 2014
Du choeur à l’ouvrage. Puis soudain, l’ex-Communards qui a aussi un passé d’enfant de chœur, se « reconnecte » à l’église. Par hasard, alors qu’il est à Edimbourg, il aperçoit de la lumière dans la cathédrale et reconnaît un de ses chants religieux favoris. « Je suis entré, j’ai rejoint les gens pour chanter. Quelque chose s’est produit », confiet-il. Cependant, il faudra encore une dizaine d’années avant de franchir
le pas de l’ordination. Une décennie durant laquelle il mène une belle carrière de journaliste, éditorialiste à la radio. Pour la BBC, il anime des magazines pour les jeunes puis d’autres, dédiés à l’art. Richard est finalement ordonné en 2005. Depuis, il n’a jamais douté de l’existence de Dieu, mais constamment de lui-même. « Je ne suis pas un très bon prêtre et je suis un très mauvais Chrétien », confesse-t-il. Désormais, une autre passion le gagne : celle d’écrivain. Il vient de publier son troisième ouvrage, Fathomless Riches. Et poursuit à tous les niveaux son combat contre les inégalités : « Je défends toujours l’homosexualité au sein de l’église. Aujourd’hui, la position du clergé est plus doctrinale et refuse le mariage gay alors que les Britanniques l’ont adopté sans faire de vagues…». Cette double carrière permet à Richard de « mettre son grain de sel », de donner un autre son de cloche, grâce à des écrits et des émissions très suivis. Et, contrairement à il y a 25 ans, ce personnage pas si orthodoxe sait exactement ce qu’il veut : du temps. Avant de rejoindre bien plus tard un petit cottage sur la côte ouest de l’écosse. Avec son compagnon et ses chiens.
à lire / Autobiographie de R. Coles : Fathomless Riches : Or How I Went From Pop to Pulpi, Weidenfeld & Nicolson, 288 p. à écouter / The Best of Bronski Beat, The Communards & Jimmy Somerville, 2001, London Records. à voir / Pride, de Matthew Warchus, sortie DVD le 21.01.2015, Pathé, 19,99€
29 portfolio
Yeaaah! Studio
Haut la main ! Texte Julien Damien Illustration Usagi © Yeaaah! Studio
C
ela peut paraître bizarre, mais c’est grâce au Club Dorothée que Stéphane Casier s’est découvert une vocation d’artiste. « Comme beaucoup de gosses de ma génération, j’ai grandi devant Dragon Ball, les Chevaliers du Zodiaque, Nicky Larson... Et je passais mon temps à les dessiner ». On l’aura compris, la première influence du trentenaire vient du manga. Son bras, tatoué des créatures d’Akira Toriyama (le papa de Sangoku) en est d’ailleurs un bel hommage. Tout comme la palette qu’il utilise, réduite à celle des grands maîtres du genre : noir, rouge, brun. Mais son univers est bien plus vaste : années 1950, époque victorienne, comics… « J’oscille entre l’ancien et le moderne ». Avec une constante : « mes illustrations sont réalisées à la main. Je n’utilise que le stylo noir et, si j’ajoute de la couleur, c’est sur ordinateur mais de façon très subtile. Sans oublier un supplément de textures qui donnent un peu plus de cachet. J’aime les choses qui ont du caractère, un peu sales ». On remarque aussi le trait très tattoo, fait de points - « pour les ombres » - et l’effort sur le lettrage - « de l’écriture embellie » - résidu d’une passion pour le graffiti. Originaire de Rouen, Stéphane Casier a étudié le graphisme à l’école Brassart (Tours), avant de créer Yeaaah! Studio avec un ami, en 2006. Installé à Paris, il est depuis deux ans la seule patte de l’agence (en fait, un petit bureau dans le salon) où il réalise t-shirts et pochettes d’albums. Avec un certain succès : « on me propose de nombreux projets, j’ai la chance de pouvoir choisir. Mais j’aimerais me consacrer à un travail plus personnel et préparer une exposition ». On ne peut qu’acquiescer. à voir / www.yeaaah-studio.com
Supinfogame
Silicone Valenciennes
Texte Julien Damien Photos Ridebowl, 2014 © DR / Serre numérique © OIII Architecten / Laure Casalini, Supinfogame © Julien Damien
35 jeux
Il sera encore l’une des grandes stars de la hotte du Père Noël : le jeu vidéo. Mais quels sont les secrets de fabrication de cette florissante industrie ? Reportage à Valenciennes, au sein de Supinfogame, l’une des écoles les plus réputées au monde. L’endroit ressemble moins à une salle de classe qu’au poste de commandement d’une station orbitale. Derrière des dizaines d’écrans d’ordinateurs, les étudiants de 5e année sont répartis en six équipes et travaillent à l’élaboration d’un jeu vidéo unique, sorte d’examen de passage qui, peutêtre, deviendra un succès planétaire. Autour de cette table par exemple, sept jeunes gens s’échinent sur un concept de First person shooter, dans le style de Doom, mais où cette fois l’avatar du joueur ressent… la peur. Celui-ci tremble, son rythme cardiaque s’accélère... Une jeune fille modélise les créatures effrayantes dessinées par son collègue, qui dit s’inspirer de Francis Bacon. Eh oui : ici, les maîtres-mots sont créativité et croisement des disciplines. On se dit alors que l’emploi du concept wagnerien d’œuvre totale n’est pas usurpé - et que Pacman ou Mario ont pris un coup de vieux. Opéra. « Le jeu vidéo, c’est l’opéra du xxie siècle : il réunit tous les métiers artistiques », assure Laure Casalini, directrice de Supinfogame - Valenciennes. Créée en 2002 à l’initiative de la CCI locale, cette école privée (comptez 8 000 euros l’année quand même) fait partie du groupe Rubika, qui comprend aussi Supinfocom, (animation en 3D), et l’ISD (design numérique). Toutes les trois déménagent ce mois-ci au sein d’une « Serre Numérique » de 17 hectares, aux côtés d’un centre de recherche, de startups, d’un studio de motion capture… pour former une Silicon Valley à la française, et une locomotive économique pour la région. Au sein de Supinfogame, près de 200 étudiants sont formés chaque année aux métiers « vidéoludiques ». Ils sont répartis en trois filières : le game design (la vision complète du jeu), le game art (son graphisme) et la programmation (sa réalisation physique). 95 % d’entre eux trouveront un emploi un an après avoir été diplômé (bac +5), dont une grande partie à l’étranger. Car les Français sont très appréciés. >>>
36 jeux
Lapin crétin. Dans le bureau de Laure Casalini, une figurine à l’effigie d’un « Lapin Crétin », célèbre création d’Ubisoft, nous rappelle que le 1er game designer à avoir travaillé sur ce jeu « est un ancien de Supinfo », tout comme le jeune homme qui valide le contenu de la série Assassin’s Creed. Y aurait-il une French Touch dans les jeux vidéo ? « De part la richesse de notre culture, mais aussi notre esprit critique, oui, il y a une vraie sensibilité française, qu’on ne trouve pas en Asie ni aux états-Unis, et qui est très demandée ». L’industrie du jeu vidéo n’a jamais été aussi florissante, générant en 2013 un chiffre d’affaires mondial de près de 70 milliards d’euros. Et la France se positionne, derrière les USA, comme le deuxième producteur de la planète. Laquelle se « gamifie ». « Les petits jeux sur smartphone ont élargi la cible, bien au-delà de celle de l’ado de 15 ans. Aujourd’hui on joue énormément, de plus en plus, et de 3 à 103 ans » conclut madame Casalini. Une filière loin d’être « game over ». à visiter / rubika-edu.com
38 jeux
Sébastien Dujardin
Sur un plateau Propos recueillis par Marie Pons Photos Pearl Games
C’est l’histoire d’un ingénieur qui a tout plaqué pour faire de sa passion un métier. Au sein de Pearl Games, située à Frasnes-lezBuissenal (près de Tournai), Sébastien Dujardin crée et édite des jeux de stratégie sur fond de références historiques. L’entreprise qu’il a fondée et dirige seul fait parler d’elle depuis Troyes, paru en 2010. En octobre, le Belge a présenté DEUS, son dernier bébé, dans la capitale mondiale du jeu à Essen*, en Allemagne, où il a écoulé ses 20 000 boîtes en deux jours ! Rencontre.
Quel est le principe de votre société ? Au départ, se faire plaisir en créant des jeux qui distraient les gens, pas d’en vivre ni en faire un métier. L’accueil de Troyes fut tel que j’ai poursuivi l’expérience dans ce secteur d’activité. J’ai été le premier surpris. Aujourd’hui, l’objectif est de sortir un jeu chaque année. Vous conciliez travail et passion... Oui ! Même si j’ai commencé à jouer relativement tard, avec mon épouse, au début des années 2000... Et enfant je jouais, comme tout le monde, au Monopoly, à Puissance 4 ou à Qui est-ce ?, les grands classiques ! Jouez-vous toujours pour le plaisir ? Bien sûr ! Je m’amuse énormément avec les jeux des autres. Considérant ce domaine comme une science, j’effectue aussi une veille technologique. Là je suis rentré d’Essen avec une cinquantaine de nouveautés à tester.
Connaissez-vous votre public ? Des passionnés : pour Troyes, je me suis contenté de mettre les règles en ligne, un gars les a lues et le phénomène s’est emballé. C’est tout ce que j’ai fait niveau marketing. Quels sont les ingrédients pour faire un bon jeu de société ? Il faut que l’ensemble soit cohérent : le graphisme, le niveau de complexité des règles… Le joueur doit avoir le sentiment de vivre une aventure. Il n’y a pas de recette miracle. Je dis toujours qu’il existe un jeu pour chaque joueur. Personnellement je préfère la stratégie pure et je me projette mieux dans l’Histoire que dans un monde imaginaire.
« Il n’y a pas de recette miracle. Je dis toujours qu’il existe un jeu pour chaque joueur ! »
* Essen, la référence des passionnés de jeux de société : 4 jours, 58 000 m2, 150 000 personnes, 41 pays et 850 jeux présentés en 2014, www.internationalespieltage.de
Quelles sont les étapes de la création d’un jeu ? Lorsqu’on tient une bonne idée, il faut rapidement concevoir des prototypes, avec des bouts de papier, du carton, le tout dessiné au crayon. Ensuite on commence à faire jouer les autres, en l’occurrence mon épouse et des amis, des gens en qui j’ai confiance, pour connaître leurs impressions. On écrit les règles, puis après quelques centaines de parties, on précise les paramètres. Le design doit être pris en compte dès le début : la taille des cartes, le type d’illustrations, l’allure du plateau… à quoi ressemble DEUS, votre dernière création ? C’est un jeu de civilisation, le rêve de beaucoup d’auteurs ! Il se déroule dans le monde antique : il faut construire un empire, des routes, exploiter les ressources naturelles… Il faut aussi entretenir de bonnes relations avec les dieux, ne pas oublier
les offrandes et l’élévation de temples fabuleux ! Ça se joue en une heure. Le jeu a cartonné à Essen… Oui, tous les ans on reçoit un excellent accueil, nos créations correspondent bien au public d’Essen. C’est un très bon test. Depuis, j’ai reçu des demandes pour le traduire en six langues ! Et le prochain ? L’Auberge sanglante va sortir courant 2015. D’après L’Auberge Rouge, le film avec Fernandel. C’est un jeu de cartes un peu plus léger. On est les tenanciers de l’auberge et on détrousse et tue les clients pour leur vider les poches. Le thème est décalé et la durée de jeu est courte, autour d’une demi-heure.
à visiter / www.pearlgames.be 28&29.03.2015, Festival du jeu et de la création Ludinord, Mons-en-Barœul, Fort de Mons, www.ludinord.fr
42 musique
Julian Casablancas
Une époque formidable Texte Thibaut Allemand Photo DR
Une pochette horrible. Des looks foireux. Des rogatons de chansons évoquant, dans le meilleur des cas, une face Z des Strokes. Voilà, en quelques mots, où se situe Julian Casablancas. Est-ce si grave ? Non, car Julian Casablancas + The Voidz en dit moins sur lui que sur notre monde. Et c’est pas jojo.
E
n 1975, Lou Reed signait Metal Machine Music et annonçait l’école industrielle. « Ceux qui l’écouteront en entier sont encore plus tarés que moi », lâchait le pervers pépère. Suicide commercial, disait-
on alors. Avec Tyranny, Casablancas réalise-t-il, lui aussi, un suicide commercial ? Pas vraiment, puisque les disques ne se vendent plus. Un vaste foutage de gueule, plutôt ? Sans doute. En fait, ce second essai
43 musique
loin des Strokes (et de son premier essai solo, l’excellent Phrazes For The Young, 2009), reflète notre temps, cette ère du vide (ou void, en anglais) où règnent le relativisme généralisé et le je-m’en-foutisme collectif – la gratuité de la musique joue beaucoup dans l’indulgence criminelle face à des œuvres inaudibles dont on sauvera « de bons moments ». De l’art ou du cochon ? Le gros problème, ou la grande force, de Casablancas, c’est son statut d’entertainer. À l’américaine, c’est-à-dire à l’outrance. Jouant avec les codes (ici, vestes sans manches ei-
ghties et images de VHS pourrie), avec les sons (guitares vaguement metal et incursions vers la musique africaine, garage-rock du temps jadis et synthés d’avant-hier), le New-Yorkais dresse un immense doigt d’honneur à ce que l’on connaît de lui – une certaine idée de la mélodie et de l’élégance. On ne sait pas trop à quoi s’attendre sur scène. Se fichera-t-il du public comme il se moque de l’époque ?
10.12, Anvers, Muziekcentrum Trix, 19h30, 23/20€, www.trixonline.be
44 musique
Little Dragon
© DR
Bientôt une décennie que ce petit dragon (surnom de la chanteuse Yukimi Nagano) survole l’electropop mondiale et qu’il en traverse tous les courants. à la faveur du succès international de Machine Dreams en 2009, il s’est aussi fait de nouveaux amis (collaboration avec Damon Albarn pour Gorillaz, avec David Sitek pour Maximum Balloon...). Tout feu tout flamme, il revient en tournée avec un 4e album sous son aile (Nabuma Rubberband). Incandescent, pétri d’expérimentations mélodiques, l’ouvrage garde un pied sur le dancefloor. 01.12 (+NAO), Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 25€, www.abconcerts.be
Isaac Delusion Armé d’un premier album délicieusement addictif, le quatuor parisien n’en finit plus de tourner. Certes, son arsenal technologique n’a rien de révolutionnaire, l’ensemble peut paraître fragile... Mais Isaac a indéniablement le sens de la mélodie et de la superposition. Les trouvailles sonores et la voix infiniment douce de Loïc Fleury confirment que le charme du projet repose sur ses faiblesses. 03.12, (+Julia Losfelt), Amiens, La Lune des Pirates, 20h30, 12/7€, www.lalune.net
© Andy De Santis
Wampire Derrière ce patronyme qui montre les crocs on trouve deux nerds de Portland fascinés par les productions FM eighties et les compositions barrées d’Ariel Pink. à en croire leur Bazaar sorti en octobre, ils cultivent leur bouillon de culture, toujours plus nombreux : le duo est devenu quintette. Est-il question de psychélofi, garage-pop ? Ni l’un ni l’autre et tout à la fois. 01.12, Lille, La Péniche (Ground Zero Festival), 20h, 15/14/13€, www.lapeniche-lille.com
46 musique
Laetitia Shériff Texte Pierre Bérenger Photo Fabien Tijou
Elle arpente depuis dix ans le circuit du rock « indé » des salles de concert, des résidences de création et des micro-labels. Sur ce chemin souvent souterrain qui l’a menée de son Nord natal à Rennes, la bassiste - chanteuse a longtemps déambulé avec grâce au bras d’Olivier Mellano avant de saisir cette année celui de Thomas Poli (deux géniaux guitaristes ayant pour autre point commun d’avoir joué avec Dominique A). Cette rencontre a donné naissance à un magnifique troisième album paru en octobre qui constitue l’occasion d’accorder à Laetitia Shériff un intérêt à la hauteur de Pandemonium, Solace & Stars, et de décider enfin d’arrêter de convoquer PJ Harvey dès qu’une femme joue de la guitare et chante en anglais. De Pandemonium, la capitale des enfers selon le poète John Milton (et gémonies de l’industrie musicale selon l’artiste ?), aux étoiles, voilà le circuit que mérite bien de fréquenter Laetitia Shériff, dont la voix et les 13.12, Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h30, 9/6€, 4ecluses.com chansons sont, elles, une excellente 11.02.2015, Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, raison de cheminer jusque Dunkerque. 13/10€, www.legrandmix.com
48 musique
© DR
IAM Retour des Marseillais suite à la sortie d’un 7e album sobrement intitulé…IAM. Cette compilation de titres non retenus sur Arts Martiens dresse le bilan d’un groupe qui trace sa route depuis 25 ans. L’écriture de ces piliers du rap est toujours aussi exigeante. Annoncée comme le dernier coup d’éclat d’Akhenaton et ses collègues, cette tournée promet un échange essentiel. 05.12, Lille, Zenith, 20h, 37€, www.zenithdelille.com
Metronomy Cela fait trois ans que l’on attendait la suite du chef-d’œuvre The English Riviera, impeccable bande-son de l’été 2011. Comment poursuivre dignement lorsqu’on fut acclamé de toutes parts ? Entre la redite et la remise en question, le groupe de Joseph Mount a choisi la transition habile. Plus expérimental, un brin mélancolique tout en laissant entrer la lumière, on est tombé sous le charme de Love Letters. De retour aussi sur scène le spleen dansant des Anglais fait mouche. 09.12, Bruxelles, Cirque Royal, 20h, 30€, cirque-royal.org
Dans la catégorie égérie intemporelle, icône des 60’s et petite fiancée du rock on demande l’incontournable muse des Stones. Marianne Faithfull a sorti son 20e (!) album solo au mois de septembre et, à 69 ans, repart sur les routes. Au regard d’une carrière marquée par des hauts et des bas, Give my love to London signe un retour en grâce. La voix fêlée juste ce qu’il faut et les arrangements irréprochables de ce nouveau répertoire saisissent l’auditoire. 20.12, Roubaix, Le Colisée, 20h30, 45/41/37/34/8€ // 06.02.2015, Amiens, Maison de la Culture
© DR
Marianne Faithfull
50 musique
— Agenda — Retrouvez tous les concerts de l’Eurorégion sur
© DR
www.lm-magazine.com
Aubert chante Houellebecq « Chic, Téléphone s’est reformé ! La vache, il a pris un sacré coup de vieux Bertignac… » Mais non. En fait c’est Michel Houellebecq qui remue aux côtés de Jean-Louis Aubert dans le clip d’Isolement. Eh oui : cinéma, théâtre, musique… l’homme à la parka est partout. Cette fois, c’est donc l’ex-rockeur qui s’en inspire, reprenant à la virgule près les poèmes du dernier recueil de l’écrivain (Configuration du dernier rivage). Avec un peu de cuivres, un piano et une guitare acoustique, Aubert offre une relecture inattendue des vers houellebecquiens. Derrière ces ballades mélancoliques jaillit une tendresse insoupçonnée. Julien Damien
The Dø Avec son nouvel album (Shake Shook Shaken), le duo franco-finlandais risque d’en perdre quelquesuns en route. Oubliée la pop-folk un brin agaçante de On my shoulders, Olivia et Dan ont rangé les guitares pour se jeter sur les machines, comme on se débarrasse de son vieux train électrique pour la dernière console à la mode. Ils vont pouvoir jouer avec de nouveaux copains (Goldfrapp, au hasard) et causer boîtes à rythmes. Aussi séduisant soit le coup de fouet synthétique asséné par le groupe, nous ne percevons pas le coup de génie futuriste annoncé par la plupart de nos confrères. J. Damien 13.12, Aéronef, Lille, 20h, 25/20/15€, www.aeronef-spectacles.com // 14.12, Botanique, Bruxelles, 19h30, Complet !
© Alice Moitie
10.12, Liège, Le Forum, 20h, 59/54€, www.leforum.be // 11.12, Bruxelles, Bozar, 20h, 60>35€, www.bozar.be // 12.12, Amiens, Zénith, 20h, 59>39€, www.zenith-amiens.fr
52 ĂŠcrans
53 écrans
Exposition
L’âme du studio Ghibli Texte Nicolas Jucha Photo Ashitaka, Princesse Mononoké © FXP, Studio Ghibli
À la source de chefs-d’œuvre comme Princesse Mononoké ou Le Tombeau des lucioles, il y a d’abord un coup de crayon appliqué. Hayao Miyazaki et Isao Takahata partagent un secret de fabrication : les dessins de layout. Étape cruciale mais méconnue dans les réalisations du studio Ghibli, ceux-ci en portent pourtant l’essence. Visite d’une exposition qui souligne le rôle de ces travaux dans le processus créatif des génies de l’animation japonaise. Cartographies détaillées de chaque plan, les dessins de layout sont esquissés à partir du scénario original de chaque film et déterminent le cahier des charges de la réalisation. Cette pratique est née avant la fondation du studio Ghibli, lorsque le duo travaillait sur la série Heidi, en 1974. à l’initiative de Takahata, mais essentiellement réalisés à la main par le prodigue Miyazaki, des dizaines de milliers de dessins ont joué un rôle clé dans la conception de plus de 20 longsmétrages. Ils sont devenus une marque de fabrique du légendaire studio fondé en 1985. Et constituent une porte d’entrée vers les univers poétiques des deux réalisateurs japonais, une preuve du sacerdoce que représente la création d’un film d’animation culte.
« Les secrets du layout pour
ADN. Au départ, il y a une simple feuille blanche, avec comprendre l’animation de un cadre au centre, la menTakahata et Miyazaki » tion Studio Ghibli CO.LTD en haut à gauche, des codes indéchiffrables pour les profanes en haut à droite. Puis le dessinateur y insuffle l’ADN de l’œuvre en gestation : personnages, décors, ambiance… Le dessin comporte également les indications sur le positionnement de chaque objet, leur éventuel mouvement, mais aussi la façon dont ils s’intègrent au sein d’une séquence complète. Sur une même page peuvent ainsi cohabiter la représentation détaillée d’un personnage - comme la Princesse Mononoké montant fièrement son loup géant - et des signalétiques très techniques comme les annotations « in » et « out » qui distinguent les éléments
>>>
54 écrans
qui entrent ou sortent du champ pendant une séquence. Des contours rouges dissocient simultanément la partie « mobile » - relevant de la responsabilité du département « animation » - de « l’immobile » - gérée par l’équipe « décor ». S’ils sont nés d’une nécessité pratique, les dessins de layout connaissent aujourd’hui une seconde vie et sont considérés comme des œuvres d’art à part entière. Un cadeau supplémentaire de Miyazaki et Takahata à la postérité. Jusqu’au 01.03.15, Paris, Art Ludique, lun & jeu, 11h>19h, mer& vend, 11h>22h, sam & dim, 10h>20h, 15,50€>10€ (4>12 ans), www.artludique.com Le Château ambulant © FXP, Studio Ghibli Le Château dans le ciel © FXP, Studio Ghibli
Ponyo sur la falaise © FXP, Studio Ghibli
Le Vent se lève © FXP, Studio Ghibli Chihiro © FXP, Studio Ghibli
56 écrans
Vincent Patar & Stéphane Aubier
Bûcherie chevaline Texte Julien Collinet Photos La Bûche de Noël © Panique, Autour de Minuit, Beast Animation / Patar & Aubier © Kris Dewitte
Après le succès d’Ernest et Célestine, Patar et Aubier reviennent en salle avec un nouvel épisode déjanté de Panique au village. Les deux génies belges du film d’animation nous livrent leurs secrets de fabrication. Dans leur bureau à Saint-Gilles, Vincent Patar et Stéphane Aubier travaillent déjà au prochain épisode de Panique au Village. Les deux dessinateurs griffonnent le scéna-
rio sur des feuilles de papiers dans un joyeux bordel. Des figurines, des jouets et divers brols trônent aux quatre coins de la pièce. Sur un mur est placardé le nouveau story-board.
57 écrans
« Ce sera sur le thème de la rentrée scolaire », s’enthousiasme Stéphane Aubier. « Comme avec La Bûche de Noël, on aime les sujets fédérateurs.»
« Un acteur en plastique ne se plaint jamais » Vide-greniers. Les enfants ne sont pas les seuls amateurs de leur travail. Depuis Pic Pic André, un cartoon aux graphismes épurés rappelant Tex Avery, jusqu’à Panique au village, les créations du duo dégagent un côté surréaliste et absurde typiquement
belge. « Lors de la projection d’un de nos films à Toulouse, il y avait autant de gosses que de barbus tatoués », se marre Vincent Patar. Avant d’être porté sur grand écran, Panique au village se présentait comme une série de 20 épisodes courts diffusés sur Canal+, en 2002. L’histoire raconte les aventures burlesques de trois figurines en plastique : Indien, Cheval et Cowboy. « On les a chinées dans des brocantes. On a choisi ces personnages parce qu’ils étaient les plus courants. » Les jouets sont alors repeints, et le duo s’amuse avec leurs positions. En fouillant dans un grand seau en plastique, Stéphane pioche un Indien avec une étoffe sur l’épaule. « Avec celui-ci j’imagine déjà une scène. On dirait qu’il part >>>
58 écrans
se coucher. » Pour La bûche de Noël, le scénario a exigé des attitudes plus compliquées. 350 figurines ont ainsi été fabriquées. Les Oscars. Le film est animé en stop motion (image par image) à l’aide d’un appareil photo. Les décors sont à l’échelle et ressemblent à des maisons de poupée. Le résultat est à mille lieux des standards de l’animation où la 3D règne en maître. « Pour de l’eau, on va utiliser du silicone. Du coup il y a toujours un côté solide et le spectateur le ressent, ça donne de la chaleur », poursuit Vincent. « On revendique ce côté artisanal, insiste Stéphane. On ne serait pas à l’aise avec une grosse équipe ». Le duo a pourtant connu une notoriété planétaire avec Ernest et
Célestine, nommé aux Oscars cette année. Le succès ne donne toutefois pas à Patar et Aubier des envies de cinéma traditionnel. « On serait frustrés. Avec l’animation, les scénarios les plus fous sont possibles. Et puis un acteur en plastique ne se plaint jamais ».
Chronique
La bûche de Noël Pour se faire pardonner de leurs sempiternelles gaffes, Cowboy et Indien partent en quête d’une bûche, dessert indispensable pour le réveillon de Cheval. Les aventures des deux héros sont aussi barrées que dans les précédents épisodes et sortent du ronron habituel des films de fin d’année. « Notre Père-Noël ressemble à Lemmy de Motorhead », s’amuse Vincent Patar. Et les voix détonnent toujours autant. « Depuis le début on bosse avec les mêmes potes, notamment Ben (Poelvoorde) et Bouli (Lanners) ». à voir / Panique chez les jouets, 3 films d’animation : La Bûche de Noël (26 min), de Vincent Patar et Stéphane Aubier / Macropolis (8 min) de Joël Simon et Le Petit Dragon (8 min) de Bruno Collet. En salles.
60 écrans
God Help The Girl
Songes d’une nuit d’été Texte Thibaut Allemand Photo Findlay Productions Limited
« Je ne laisserai personne dire que vingt ans est le plus bel âge de la vie », grinçait Paul Nizan. Le premier long-métrage de Stuart Murdoch lui donne tort et raison à la fois. En portant les turpitudes adolescentes à l’écran, l’Écossais signe l’un des plus beaux films de l’année.
L’
adolescence au cinéma ? Vaste sujet. De Blackboard Jungle (1955) à Bande de Filles (2014) en passant par les tristes American Pie ou l’ennuyeux Larry Clark, cette période fondatrice fut traitée sous tous les angles, sur tous les tons. En contant l’amitié, le temps d’un été, d’une anorexique échappée de son hôpital, d’un guitariste gringalet et aigri et d’une jeune fille de bonne famille totalement à l’ouest, Stuart Murdoch choisissait un sujet casse-gueule (l’anorexie...) et éculé (la jeunesse, la musique...). Pourtant, cette (fausse) comédie musicale réussit son pari. Et ce, grâce à la justesse de ses trois acteurs principaux, sa bande originale (ah oui, Stuart Murdoch est la tête pensante de Belle And Sebastian) et sa mise en scène. Entièrement tourné en 16mm, God Help The Girl laisse la part belle au songe. L’intrigue est légère et le film constitué de petites saynètes brouille les pistes. Loin des clichés, l’œuvre se pique également d’un humour absurde et magnifie la cité de Glasgow. Alors, vingt ans ou presque, le plus bel âge de la vie ? Pas sûr. Mais pas le pire non plus. On aurait voulu vivre cet été-là. À vrai dire, Stuart Murdoch, avec Emily Browning, Olly on l’a tous un peu vécu, et c’est pourquoi De Alexander, Hannah Murray... Sortie le 03.12 ce film touche en plein cœur.
62 écrans
Calvary
Comment certains vivent Texte Thibaut Allemand Photo Fox
Dans le confessionnal d’un petit village irlandais, un paroissien annonce au prêtre qu’il l’exécutera dans sept jours. Une vengeance pour les abus sexuels dont il fut victime, enfant, d’un autre curé. Voici le récit de cette ultime semaine. Calvary, ou Golgotha, en anglais.
L
a confession – ou plutôt, l’avertissement - fut anonyme. Le Père James connaît-il l’identité de son futur assassin ? Sans doute. Le spectateur la découvrira peut-être durant le film. Qu’importe, l’important est ailleurs : dans ces 7 derniers jours accordés à l’homme d’Église. Cet affable barbu doit se mettre en règle avec Dieu – et avec ses ouailles. Alors, on suit la soutane pas à pas. À l’hôpital, où sont prodigués les derniers sacrements. Au pub, bien sûr. Chez un nouveau riche jouant l’épate. Ou sur les plages du comté de Sligo, lors de promenades avec sa fille – née avant qu’il entre dans les ordres. Tous ces lieux et ces rencontres sont l’occasion de pénétrer dans l’intimité de chacun, du boucher au policier. Peu à peu, les langues se délient, les rancœurs affleurent et surtout, la foi est constamment remise en cause. Contemplatif et sous tension, Calvary est un film existentialiste, interrogeant la portée de nos actes. Le tout est servi par d’excellents comédiens, dont Brendan Gleeson (In Bruges, 2008), et par des dialogues où les aphorismes sont rois mais où jamais ne pointent la théâtralité ou De John Michael McDonagh, avec Brendan Gleel’esbroufe. Bref, cette œuvre secoue. Nos son, Chris O’Dowd, Kelly Reilly, Dylan Moran... En salle. convictions, comme nos doutes.
64
© Céline Nieszawer
© Denis Erroyaux
écrans
Tiens-toi droite
Be Film Festival
Une mère de famille oppressée par son foyer, une reine de beauté cherchant dans les regards masculins l’amour que son père ne lui a pas donné, et une gérante de pressing qui piétine dans sa nouvelle entreprise. Devant la caméra inspirée de Katia Lewkowicz, trois formidables actrices virevoltent, se croisent et se débattent avec leur condition. La mise en scène séduisante donne à voir des « états de femmes » parfois bouleversants. Trois destins qui se rejoignent autour de la fabrication d’un nouveau modèle de poupée. Loin des mensurations irréelles de l’indétrônable Barbie... Le propos se veut féministe, assurément. Mais pourquoi la cinéaste enferme-t-elle ses héroïnes dans des situations initiales aussi caricaturales ? Les scènes horripilantes succèdent aux moments de grâce, et le procédé laisse perplexe, longtemps après la projection. Marine Durand
Le BE Film Festival fête ses 10 ans et donne un coup de projecteur sur une année de cinéma 100% belge. Parrainée par Fabrizio Rongione, acteur fétiche des frères Dardenne, cette édition souligne la belle vitalité du plat pays en matière de 7e art. Ainsi, on peut découvrir ou revoir le délicat Henri de Yolande Moreau ou le plus sombre Alleluia de Fabrice du Welz. Cette programmation qui fait fi des communautés linguistiques favorise la rencontre entre public néerlandophone et francophone. Les équipes des films présentent les avantpremières, et à l’issue des projections tout le monde se retrouve au Be bar, aménagé au Palais des beaux-arts pour commenter les bobines (autour d’une bière belge, forcément). Marie Pons
De Katia Lewkowicz, avec Marina Foïs, Laura Smet, Noémie Lvovsky… Sortie le 26.11
26>30.12, Bruxelles, Cinematek et Bozar, 10/7€ (soirée d’ouverture) 7/4€ séance, 25/18€ pass 31.12, Soirée Be there !, Bruxelles, Comic’Art, 23h>5h, 55/45/35€ Programme : www.befilmfestival.be
05.12 - 20h30
Impro Fight (Théâtre d’improvisation par Lille Impro)
13.12 - 20h30
Comment va le monde? (Théâtre par le Théâtre du Prisme)
14.12 - 17h
Eric Navet Trio (Concert proposé par Jazz à Védà)
268 rue Jules-Guesde 59650 Villeneuve d’Ascq Tél : 03 20 61 01 46 facebook.com/fermedenhaut.vda www.villeneuvedascq.fr/feh
66 exposition
Stèle cintrée de Renpetmaa / détail, Bois peint. H. 27,5 ; l. 17 ; ép. 3,8 cm 3e Période intermédiaire, 22e dynastie (vers 945-715 avant J. C.) ? © Musée du Louvre, Dist. RMN-Grand Palais / Benjamin Soligny / Raphaël Chipault
Simulacres de vases canopes / détail, Bois stuqué et peint. H. de 29 à 32,5 ; l. de 13,6 à 13,8 cm Troisième Période intermédiaire (vers 1069-664 avant J.-C.) © Musée du Louvre, Dist. RMN-Grand Palais / Christian Decamps
67 exposition
Des animaux et des pharaons Texte Marie Tranchant Photo DR
Consacrée à l’égypte, la nouvelle exposition du Louvre-Lens propose d’aborder la civilisation ancienne à travers ses rapports avec la faune. Aquarelles, objets et momies racontent comment les égyptiens expliquaient le monde grâce aux bêtes.
I
l y a d’abord un constat : l’égypte fascine. « La faune est un très bon prisme pour exposer la civilisation égyptienne car elle permet d’aborder tous les domaines : du quotidien jusqu’au spirituel », commente Hélène Guichard, commissaire de l’exposition. Mais l’égypte est aussi mal connue : « Il y a une idée fausse selon laquelle les Egyptiens adoraient les animaux, déplore-t-elle. Il fallait casser ce mythe ». La figure animale est surtout devenue l’élément multiple d’un langage codé car les égyptiens utilisaient des associations d’idées, des symboles pour expliquer le monde...
Déshabiller les momies. Le parcours permet de comprendre comment les animaux ont pu être observés, mangés, utilisés. On note que leur représentation servant un discours profane, religieux
ou politique, est toujours fondée sur une observation minutieuse de la nature. La question des formes mixtes et hybrides est aussi abordée. Cette exposition révèle, entre autres, pourquoi des statuettes d’hommes ont des têtes animales... 430 œuvres, dont beaucoup viennent du Louvre – les fameux babouins de Louxor en sortent pour la première fois – sont présentées : aquarelles, objets du quotidien, ou encore momies. L’une d’elles, un crocodile embaumé, a d’ailleurs été restaurée au LouvreLens, fin octobre, pour l’occasion. Un dispositif multimédia permet même au public de « déshabiller » virtuellement des momies pour en percer les secrets. Plutôt bien gardés… 05.12>09.03.15, Louvre-Lens, tlj sf mar, 10h>18h, 9€/gratuit -18 ans, www.louvrelens.fr
68 exposition
Camille Claudel
Entre génie et passion Texte Julien Damien Photo Camille Claudel, La Petite Châtelaine, 1892-1896, Marbre Escudier, apr. 1898 ?, Collection Particulière, Courtesy Jérôme Le Blay
De ses amours contrariées avec Rodin à son internement, l’œuvre et la vie de Camille Claudel se confondent. à travers une exposition qui rassemble ses plus importantes créations, la Piscine célèbre les 150 ans de la naissance de celle qui fut à la fois symbole du féminisme, héroïne dramatique et, surtout, sculptrice avant-gardiste.
A
rtiste précoce, surdouée, Camille Claudel est âgée de 18 ans lorsqu’elle rencontre Rodin, qui en a 44. Elle devient son élève, son amante, et rejoint l’atelier du maître qui lui confie la réalisation des pieds et des mains de ses statues. « C’est une période de fusion totale entre eux », relate Bruno Gaudichon, conservateur du musée. C’est ici que la jeune femme accouche de son premier chef-d’œuvre, La Valse, qui défie les lois de la pesanteur… et de la morale. Choqué par sa crudité, l’état la juge obscène. La sculptrice enveloppe alors d’une draperie de bronze la nudité de ses personnages. Et signe son génie. Lumière. Camille Claudel se distingue de Rodin avec La Petite Châtelaine, qui annonce l’Art nouveau. « Le buste est creusé. Le bloc de marbre qui, normalement, doit refléter la lumière, ici l’absorbe avant de la réfléchir. C’est l’œuvre qui rayonne… » En 1898, lassée de ce rôle d’élève (et de maîtresse) Camille Claudel quitte Rodin. Et vit sa période la plus féconde. Elle explore de nouveaux horizons - l’extrême Orient - et matières - l’onyx - avec lesquels elle immortalise l’intensité de l’instant, à travers Les Causeuses - qu’on entend toujours chuchoter. Mais cette indépendance cache aussi une souffrance, que l’on perçoit dans l’implorante de L’Âge mûr, autoportrait d’une femme qui supplie Camille Claudel. Au miroir d’un art nouveau, jusqu’au son amant. Et qui nourrissait 08.02.2015, La Piscine, Roubaix, mar>jeu, 11h>18h, ven, 11h>20h, sam & dim, 13h>18h, 10/7€/grat -18 ans, l’art avec sa vie. >>> www.roubaix-lapiscine.com
Camille Claudel
Œ uvres es comment é chon, par Bruno Gaudi sition l’expo commissaire de
Les Causeuses Marbre-Onyx, bronze (1897) H.45; L.42,2; P.39 cm, Paris, Musée Rodin Photo Christian Baraja
« Camille Claudel a eu l’idée de cette sculpture en voyant un groupe de femmes qui chuchotaient entre elles dans un wagon de train. Elle travaille sur l’anecdote, approchant le récit des naturalistes : représenter le quotidien avec le plus de vérisme possible. En même temps, elle se passionne pour l’art d’Extrême-Orient et notamment pour les okimonos, ces petites statuettes en ivoire qui décrivent la réalité japonaise avec fantaisie. Ici, elle utilise l’onyx. C’est l’œuvre qui à l’époque a été la plus commentée. Et qui renferme le plus de variations ».
L’âge mûr Bronze, fonte Thiebaut Frères, Fumière et Gavinot (1902) H. 114 ; L. 163 ; P. 72 cm, Paris, Musée d’Orsay © RMN-Grand Palais / Thierry Ollivier
« Cette œuvre réalisée entre 1890 et 1899 est le récit de la séparation entre Camille Claudel et Rodin. Elle est une sorte de « prescience » car on sait que ce groupe de 3 était déjà en chantier début 1890, ce qui veut dire que, dans le temps de sa relation fusionnelle avec Rodin, elle met déjà en œuvre une sculpture qui raconte l’inexorable rupture. Dans la 1ere version, en plâtre, on voit que le groupe est encore soudé : Rodin est écartelé entre sa fidélité pour Rose Beuret et sa jeune maîtresse qui essaie de le retenir. L’implorante - qui est donc un autoportrait - n’est pas encore résignée. Mais dans cette version, les doigts des deux personnages ne se touchent plus. Ils sont totalement séparés ». Retrouvez plus d’œuvres commentées sur lm-magazine.com
72 exposition
Braderie de l’art
Made in Roubaix Texte Marie Pons Photo Philippe Bousbib
Haute teneur en créativité exigée, débrouillardise et sens du bricolage indispensables : ce rendez-vous annuel est un laboratoire bouillonnant. Durant 24h non-stop, près de 150 artistes se prêtent au jeu et donnent libre cours à leurs talents pour façonner des pièces à emporter entre 1 et 300€. Que mijote l’édition 2014 ?
à
Roubaix, artistes et designers internationaux s’essayent à la récupération et au détournement d’objets le temps d’un week-end. Leur matière première : 2 000 m3 de déchets en tout genre récupérés via le label Re-collecte auprès d’entreprises de la région. Chaque artiste sélectionné vient avec un projet et livre « une vraie performance », souligne Sabine Duthoit, de l’équipe d’Art Point M. Ils œuvrent en public, sans dormir ou presque, et tout est fabriqué sur place, « une obligation » nous précise-t-on. L’événement fait cette année la part belle au design et s’inscrit dans l’air du temps, tant d’un point de vue technique que philosophique. Ainsi, Grégory Sant de l’atelier All Trends, allie art du recyclage et technologie numérique en fabriquant des pièces de A à Z grâce à des imprimantes 3D grand format. On retrouve aussi le Lillois Julien Kieffer, les activistes urbains des Saprophytes ou le collectif de designers valenciennois Faubourg 132 qui « agit en faveur de la production d’objets dont les coûts de fabrication et l’impact écologique sont réduits au minimum ». Comme le veut 06 & 07.12, Roubaix, La Condition Publique, le tout premier slogan cette braderie 19h>19h, gratuit place « l’art à la portée de tous ».
L’Autre de l’art
Interview de Savine Faupin commissaire de l’exposition Propos recueillis par Marie Pons / Photos Joan Miró, Tête © Musée national d’art moderne / Centre de création industrielle / Centre Georges Pompidou (dépôt au LaM), Photo : P. Bernard. © Successió Miró / Adagp Paris, 2014 / Anonyme (aux visages), Sans titre, n. d. Collection L. Bonnafé (dépôt au LaM), Photo : C. Dubart. © DR
Le LaM ouvre une perspective sur les origines de l’art en se tournant vers « l’Autre », celui qui en fait sans le savoir. Par nécessité, de manière spontanée ou compulsive, des anonymes dessinent, sculptent et gravent, parfois toute leur vie. L’accrochage fait la part belle à ces œuvres produites hors cadre, dans la rue, les écoles ou les hôpitaux. Savine Faupin, commissaire de l’exposition, nous invite à porter un Autre regard sur les autres, sur soi et sur le monde. Qui est cet « autre » de l’art que vous présentez ici ? L’autre est celui que l’on regarde comme un étranger. Et celui-ci reflète une part de nous-mêmes, comme un alter ego : l’autre c’est un peu moi. Ce parcours propose de découvrir différents personnages, les œuvres d’artistes connus ou anonymes, dans des contextes où l’on ne soupçonne pas que l’art puisse exister. Ces hommes et femmes font-ils de l’art sans le savoir ? On peut se poser la question. Pourquoi à un moment donné quelqu’un s’empare d’un crayon et trace quelque chose ? Augustin Lesage par exemple : il est mineur, et un jour en 1912 il entend des voix lui dire qu’il va devenir peintre. S’il était à côté de nous, il nous dirait sûrement que c’était une obligation, il a simplement répondu aux ordres. Les productions d’anonymes cherchent sans doute à nous transmettre quelque chose de leur vie. Peut-on aussi parler d’art « Une invitation à brut ? Sinon, quelle différence ? regarder autour de soi Il y a une part d’involontaire avec un regard neuf » dans l’art brut mais chez certains artistes les choses se structurent et s’organisent au fur et à mesure. Prenons Adolf Wölfli. Il dessine et écrit des milliers de pages entre 1899 et 1930. à l’hôpital il fait preuve d’organisation : il assemble ses dessins sous forme de livres, il les range dans des armoires peintes. Manifestement, il cherche à composer une œuvre. >>>
Quel est le point commun entre un graffiti et l’art Gutaï ? Ces œuvres ont quelque chose à se dire. C’est tout l’intérêt d’un projet d’exposition : instaurer un dialogue à partir d’une matière qui semble très hétérogène. Cela permet d’exposer un dessin de Picasso à côté d’un dessin d’enfant, par exemple. L’exposition s’articule-t-elle autour d’époques marquantes ? Oui, d’une part le début du xxe siècle : les artistes fauves peignent d’une façon inédite, s’intéressent à des formes d’art primitif. Quelque chose change alors dans le regard des médecins sur les productions de leurs patients. La Seconde Guerre mondiale entraîne aussi un bouleversement. Des artistes commencent à travailler des matériaux pauvres, au Japon les artistes du mouvement Gutaï font feu de tout bois et se jettent sur les toiles. Qui s’intéresse en premier à ces formes d’art autres ? Les médecins, Benjamin Pailhas à Albi ou encore Auguste Marie qui a ouvert un musée à l’hôpital de Villejuif en 1905. Puis les artistes eux-mêmes. André Breton, étudiant en psychiatrie pendant la Première Guerre mondiale, s’est intéressé aux écrits des soldats revenus du front complètement perturbés. Les surréalistes vont jouer un rôle important. Ils ne séparent pas cette production « autre » du reste de l’art. Cette pratique les intéresse car elle traduit la façon dont l’inconscient s’exprime. Votre accrochage revient-il sur les sources de la création ? Oui, ce thème court à travers l’exposition. Notamment avec Picasso qui observe les dessins d’enfants à la recherche d’un geste spontané. Cette exposition oblige aussi à accepter qu’il y a des choses qu’on ne saura jamais. L’important est de regarder ces œuvres, sans forcément connaître leur auteur et leur contexte. C’est une invitation à regarder tout autour de soi avec un œil neuf. Jusqu’au 11.01.2015, Villeneuve d’Ascq, LaM, mar>dim, 10h>18h, 10/7€ Jusqu’au 17.12, Graphzines (04.12, Soirée, 18h>22h30, gratuit), www.musee-lam.fr
Retrouvez l’intégralité de l’interview sur lm-magazine.com
Hans Op de Beeck
La nuit lui appartient
L
Amusement park by night, 2014, a nuit, il y a ceux qui mentent et prennent des black and white watercolour trains à travers la plaine. De son côté, Hans Op de Beeck préfère peindre. De ces heures passées en solitaire dans son atelier bruxellois, l’artiste belge en a retiré dessins et aquarelles en noir et blanc qui décrivent un univers nocturne et poétique. Aujourd’hui, il transforme le museum du Botanique en « drawing room » à la faveur d’une exposition inédite, placée sous le signe de l’introspection. Plonger le regard dans ses tableaux, c’est en effet entreprendre un voyage étrange, achromique, à l’écart du monde. C’est ressentir la quiétude qu’inspire ce paysage enneigé, se surprendre à deviner les rêves de ce poupon aux yeux clos, ou encore ressentir, devant cette fête foraine au bord de l’eau, toute la fragilité de notre condition humaine. Autant de scènes intimistes et de lieux à la fois familiers et surréels (tous fictifs, donc universels) qui trouvent ici un écrin idéal. « Notre espace est fermé, sans lumière naturelle et beaucoup de projets ne peuvent y être montés, explique la commissaire d’exposition, Marie Papazoglou. Mais Hans a tout de suite été séduit par l’endroit car il voulait reproduire un cabinet d’estampes intimiste, propice au voyage intérieur ». Figure majeure de la création contemporaine, le Bruxellois demeure un artiste complet. Mais qu’elle soit sculpture, installation monumentale, vidéo ou peinture, son Jusqu’au 04.01.2015, Bruxelles, œuvre provoque toujours le même trouble : elle Museum du Botanique, mer>dim, 12h>20h, 5,50/4,50/3,50/2€, place le spectateur face à une réalité décalée. Et botanique.be ouvre le champ des questions… Julien Damien
80 théâtre exposition & danse
Agenda
Mark Leckey à l’heure où la consommation régit notre quotidien, Mark Leckey cultive son obsession pour les objets qui nous entourent. L’artiste anglais est capable d’exhiber une boîte de conserve de pâtée pour chat ou de donner vie à un réfrigérateur robotisé. à travers cette exposition rétrospective, l’être humain n’existe plus - sinon sous une apparence monstrueuse - pour laisser place aux machines.
Vue d’exposition Mark Leckey © Sven Laurent
Caritas. Histoires, paraboles et rêves Au départ, il y a une légende : un jour d’hiver, alors qu’il se trouve à la porte de la ville d’Amiens, Saint-Martin donne la moitié de son manteau à un mendiant. Le Musée de Picardie se saisit de l’histoire et du thème du partage, pour proposer une expositionparcours qui envahit la ville. Installations, vidéos et sculptures jalonnent ce chemin en forme d’hommage. Amiens, jusqu’au 18.01.2015, Musée de Picardie, mar, ven, sam, 10h>12h & 14h>18h ; mer, 10h>18h ; jeu, jusqu’à 21h ; dim, 14h>19h, 5,50/3,50€/gratuit -26 ans, www.amiens.fr/musees
Bruxelles, jusqu’au 11.01.2015, Wiels, Centre d’art contemporain, mer>dim, 11h>18h, 8/5/3/1,25€, gratuit 1er mercredi du mois. www.wiels.org
Garry Winogrand Cet artiste new-yorkais (1928-1986) est connu pour son approche à la fois esthétique et documentaire de la photographie. Woman are beautiful met en exergue son travail sur la femme, dans sa beauté quotidienne, au naturel et sans fard : des courbes que des vêtements peinent à cacher, des seins sous un simple débardeur, un corps nu dans un lac, un sourire, un regard… La sensualité du corps féminin s’expose discrètement. Charleroi, 13.12>17.05.2015, Musée de la Photographie, mar>dim, 10h>18h, 6/4/3€/gratuit –12 ans, www.museephoto.be
Ce tant curieux musée du monde Le MAC’s accueille une partie de la prestigieuse collection du Musée royal de l’Afrique centrale de Tervuren, actuellement fermé pour restauration. Masques, termitières géantes, animaux en bocaux… L’occasion de découvrir la richesse de ce musée qualifié d’« universel » par le directeur du MAC’s, Laurent Busine. « Parce qu’il contient et conserve tout ce que l’homme ou la nature ont créé dans une partie du monde : l’Afrique centrale, et en particulier le Congo ». Hornu, jusqu’au 18.01.2015, MAC’s, Grand Hornu, tlj 10h>18h, sf le lun, 8/4€/gratuit -6 ans, www.mac-s.be
82 théâtre exposition & danse
Agenda
Passions secrètes, collections privées flamandes Dix-huit collectionneurs flamands (de la région de Courtrai) révèlent et partagent avec le plus grand nombre quelques-uns de leurs trésors. Soit plus de 140 œuvres signées par 80 artistes internationaux. Ces « passions secrètes » narrent sur trois étages et autant de thèmes (la représentation féminine, le miroir et la découverte d’une autre Amérique) une histoire de l’art des années 1970 à nos jours.
Passions secrètes, Trophy, 1999 © Wim Delvoye
Lille, jusqu’au 04.01.2015, Tripostal, mer>ven, 12h>19h, sam&dim, 11h>19h, 8/4€/gratuit, www.lille3000.eu
A nous York
Sésostris III
« Big Apple » croquée à la sauce hip-hop. Artistes new-yorkais mais aussi régionaux dressent un portrait de la « Ville qui ne dort jamais ». Futura 2000, chef de file de l’abstract graffiti, et Ernie Paniccioli, photographe emblématique du mouvement, inaugurent la salle d’exposition de la maison Folie Moulins tandis que des graffeurs locaux investissent la maison Folie Wazemmes.
S’il n’est pas le plus connu des pharaons, Sésostris III fut l’un des plus ambitieux. Près de 2 000 ans avant J.C., il conquit la Nubie (l’actuel Soudan), délimita les premières frontières de son royaume et réinventa l’état égyptien. 300 œuvres sont ici réunies, dont 200 prêtées par les plus grands musées (Louvre, Metropolitan Museum de New York, etc.), et témoignent d’un règne de cet âge d’or de l’Egypte ancienne.
Lille, jusqu’au 11.01.2015, maisons Folie Moulins et Wazemmes, mer>dim, 14h>19h, gratuit, www.mfmoulins-lille.fr, mfwazemmes.lille.fr
Lille, jusqu’au 25.01.2015, Palais des Beaux-Arts, lun, 14h>18h, mer> dim,10h>18h, 10>7€, www.palaisdesbeauxarts.fr
LUX ! La lumière seule Comment placer la lumière au cœur d’une exposition ? En faisant l’obscurité. Le spectateur est ici plongé dans des ténèbres indistinctes où se déploie, à travers plusieurs œuvres, une mise en scène fluide qui s’organise via des jeux d’intensité. Ni démonstrative, ni théorique, Lux se donne à voir comme une approche sensible et poétique du visible et de ce qui le fonde. C’est à dire de la lumière créatrice. Tourcoing, jusqu’au 04.01.2015, Le Fresnoy, mer, jeu, dim, 14h>19h & ven, sam,14h>21h, 4/3€, www.lefresnoy.net
Toutes les expositions de l’Eurorégion sur www.lm-magazine.com
Peeping Tom
De l’autre côté du miroir Texte Marie Pons Photos Franck Chartier © Herman Sorgeloos / Gabriela Carrizo © Maarten Van den Abeele / Vader © Marie Gyselbrecht / Vader © Herman Sorgeloos
85 théâtre & danse
Depuis Bruxelles, le duo franco-argentin composé de Franck Chartier et Gabriela Carrizo brouille les pistes. Entre théâtre et danse, il crée des pièces où l’on plonge comme dans un rêve. Leur répertoire glisse résolument du côté de l’étrange à la faveur d’une esthétique en trompe-l’œil, volontiers cinématographique. En pleine tournée avec Vader (« Père »), premier volet d’une nouvelle trilogie, Franck Chartier revient sur ce travail kaléidoscopique. Comment est né Peeping Tom ? J’ai rencontré Gabriela alors que nous dansions pour Alain Platel. On a créé Peeping Tom pour développer notre propre ligne, un caractère plus théâtral, et plus profond. Pourquoi ce nom : Peeping Tom, « le voyeur » ? Dans nos spectacles on interroge les non-dits, les choses enfouies, les tabous. En grattant un peu les romans familiaux, en sondant les profondeurs de l’intime. Et puis dans notre première pièce on était enfermés dans un camping-car et le public tournait autour, nous regardait par la fenêtre.
« On interroge les
Pour ce nouveau cycle, comment travaillez-vous ? non-dits, les choses Pour cette trilogie intitulée Père, enfouies, les tabous » Mère, Enfants, Gabriela met en scène Mère, moi Père et un enfant se chargera d’Enfants. Nous écrivons une tragédie familiale pour laquelle il nous importe d’avoir la vision de chacun, à son niveau. Comment abordez-vous la danse ? Pour les danseurs on cherche des virtuoses, capables de prouesses techniques. On travaille en finesse pour trouver des choses jamais vues, casser des structures. De quoi parle Vader ? C’est une pièce légère, en apparence. L’histoire d’un père que l’on découvre à la fin de sa vie dans une maison de repos. C’est un type touchant et qu’on aime bien. Il a oublié une partie de son existence, transforme les aspects les plus sombres en quelque chose de beau.
>>>
86 théâtre & danse
Comment cela se traduit-il sur scène ? En proie à des divagations, il évolue dans une sorte de « monde parallèle ». La pièce est un jeu entre l’espace réel et ces échappées, on ne sait jamais où est la réalité. L’histoire de ce père contraste avec le travail sur la mère qui sera plus intérieur. Qui sont les autres personnages ? Il y a les pensionnaires, 10 personnes âgées que l’on recrute dans chaque ville où l’on joue. On travaille avec eux la veille du spectacle. Le personnel de la maison de retraite est incarné par les danseurs. à quoi ressemble le décor ? Une maison de repos en sous-sol, avec une seule fenêtre placée à 8 m de haut. C’est un lieu enterré entre deux mondes, introduisant une dimension fantastique. Les pensionnaires sont déjà un peu dans l’au-delà… Et puisqu’ils ne peuvent pas sortir, ils s’inventent des histoires, s’échappent par l’imagination. Comment qualifier l’art de Peeping Tom ? On nous range de plus en plus dans la catégorie « théâtre » mais en réalité on essaye de casser les barrières. En présentant d’abord des caractères, des hommes et des femmes en mouvement sur scène qui racontent une histoire. Faire danser les non-danseurs, des enfants ou Leo de Beul (le père de Vader) qui a 76 ans, voilà ce qui nous intéresse. Et quels sujets vous tiennent à cœur aujourd’hui ? La crise, dont on a parlé dans à louer (2011). Le décor est un théâtre brûlé, inspiré par l’histoire d’un lieu équivalent, menacé de destruction à Buenos Aires pendant la crise de 2001. Le combat à mener pour défendre la culture et l’art est primordial, particulièrement en Belgique aujourd’hui.
Vader : 13.12, Genk, C-Mine, 20h15, 18/16/15€, www.c-mine.be // 25.03>27.03, Villeneuve d’Ascq, La Rose des vents, 20h sf jeu. 19h, 21>10€, www.larose.fr // 01>02.04, Théâtre Royal de Namur, 20h30, 22,50>9,50€, www.theatredenamur.be // 21.04, Cultuurcentrum Bruges, 20h, 15/6€, www.ccbrugge.be
88 théâtre & danse
Retrouvez l’interview de Yoann Bourgeois sur lm-magazine.com
89 théâtre & danse
Yoann Bourgeois
L’art de la chute Texte Marie Pons Photo M. Bazi
Yoann Bourgeois est un insatiable curieux qui s’est formé à la croisée du cirque et de la danse. Depuis 2010, il écrit des spectacles abordant le thème de la chute d’une poésie renversante. Virtuose refusant toute démonstration, ce trentenaire défie les lois de la pesanteur mais révèle une grande force d’attraction.
L
e Jurassien découvre le cirque au lycée alors qu’il est tourmenté par ses choix d’orientation. Cette révélation marque son entrée dans un monde où il se sentira désormais chez lui. « Plus qu’un métier, le cirque m’est apparu comme un choix de vie, avec des possibilités d’invention infinies ». Il mène alors sa formation tambour battant. Il apprend le jonglage, la voltige et le trampoline entre les grandes écoles et un séjour chez des tziganes en Roumanie. En parallèle, il approche la danse contemporaine, travaille avec Maguy Marin (Description d’un combat, 2009).
Sur le fil. De ces expériences multiples Yoann tire une écriture qui va à l’essentiel, revient aux fondamentaux et se concentre notamment sur la chute. Pour cela il imagine des dispositifs qui défient les lois de la
pesanteur. Dans Celui qui tombe, six interprètes mènent une lutte pour rester debout tandis que le sol se dérobe sous leurs pieds. Tout au long de Tentatives d’approches d’un point de suspension… Yoann Bourgeois ausculte un moment éphémère, nourrit son « obsession » pour le point de suspension. « C’est l’instant avant la chute, qui dure une fraction de seconde. Je recherche cet endroit où les forces s’équilibrent parfaitement. Le présent absolu ». Il y a quelque chose de magique et de profondément humain dans ses pièces, une « poétique de l’abandon » où le temps suspend son vol. 05 >06.12, Tentatives d’approches d’un point de suspension…, Douai, L’Hippodrome, ven, 19h45, sam, 16h45, 5€ // Celui qui tombe, Douai, L’Hippodrome, ven, 21h, sam, 18h, 20>9€ // 08>09.12, Les paroles Impossibles, Théâtre d’Arras, lun, 20h, mar, 20h30, 5€, [Dans le cadre du Festival Les Multipistes] Plus d’infos sur : www.tandem-arrasdouai.eu
90
© Eric Piolet
© Marc Vanappelghem
théâtre & danse
Les 10 ans des maisons Folie
Le Petit Prince
Comme le Tri Postal, les maisons Folie sont nées de la dynamique de Lille 2004. Beaucoup leur prédisaient une existence éphémère mais, une décennie plus tard, elles sont toujours bien ancrées dans le paysage culturel métropolitain. Ceux qui en douteraient (et les autres) peuvent aller faire un tour du côté de Moulins et Wazemmes. Deux maisons emblématiques célèbrent leur 10e anniversaire à travers un programme festif et familial. Noël oblige, des ateliers proposent, à Wazemmes, de fabriquer ses propres cadeaux « en customisant des objets personnels grâce aux conseils d’artistes ». Puis dans la soirée, direction Moulins pour un bal éclectique (rétro, funk, soul…) assuré par les groupes qui ont fait les belles heures des « sœurs jumelles ». Julien Damien
L’Opéra de Lille inaugure le mois de décembre en accueillant la magie du Petit Prince. Le conte de Saint-Exupéry, empli d’une poésie délicate et profonde, est ici mis en scène par Michaël Levinas. Le compositeur crée un monde féérique, sans gommer « la fragilité et la gravité face au réel humain » qui imprègnent le texte original. Un jeune héros tout droit tombé de son astéroïde, son ami le renard, l’aviateur et le mouton dessiné : on retrouve avec plaisir tous les ingrédients familiers de l’histoire de notre enfance. La soprano Jeanne Crousaud prête sa frêle silhouette et sa voix au célèbre blondinet tandis que l’Orchestre de Picardie assure la partie musicale. « L’essentiel est invisible pour les yeux » dit le renard, mais cette œuvre aux multiples interprétations mérite d’être appréciée par tous. Marie Pons
13 & 14.12, Ateliers « Fais tes cadeaux toi-même ! », Lille, maison Folie Wazemmes, 15h>18h, gratuit, mfwazemmes.lille.fr // 13.12, Bal des dix ans, Lille, m.F. Moulins, 19h>03h, gratuit, mfmoulins.lille.fr
03>7.12, Opéra de Lille, mer & sam 18h, jeu 20h, dim 16h, 23/18/14/9/5€ / Réduit -18 ans, www.opera-lille.fr // 16.12, Dunkerque, Le Bateau Feu, 20h, 12€, lebateaufeu.com
92 théâtre & danse
Don Giovanni
Dangereuse séduction Texte Marine Durand Photo Hofmann
Comment s’attaquer à un monument tel que le Don Giovanni de Mozart ? Comment porter un regard neuf sur l’un des cinq opéras les plus joués dans le monde ? Sur le papier, l’enjeu semblait écrasant. C’était sans compter l’audace de Krzysztof Warlikowski, qui s’associe pour la troisième fois à la Monnaie et imagine sa propre version du plus célèbre des séducteurs.
R
appelons d’emblée l’argument : dans le Séville du xviie siècle, Don Giovanni, avec l’aide de son valet Leporello, charme les jeunes femmes à tour de bras avant de les abandonner à leur désespoir. Alors qu’il tente d’emporter la vertu de Donna Anna, le Commandeur, père de cette dernière, s’interpose mais meurt en provoquant l’agresseur en duel. Défiant aussi bien Dieu que l’ordre du monde, le blasphémateur court vers sa chute, jusqu’au final tragique qui voit son orgueil le perdre dans les flammes de l’enfer. En créant son chef-d’œuvre – qualifié « d’opéra des opéras » par Wagner - à Prague en 1787, Mozart élevait le personnage de Don Juan au rang de mythe. Qu’attendre, dès lors, de la proposition de Warlikowski, qui n’hésitait pas à transformer Médée (2008) en clone d’Amy Winehouse ? On penche plutôt vers le grandiose. Rare indication du Polonais : son Don Giovanni se concentre sur l’homme, sa noirceur, sa perversion, son désir jamais assouvi. « Une victime de lui-même, et d’une sexualité qu’il ne contrôle pas ». à noter : tous les chanteurs feront leurs débuts dans leur rôle. De quoi faire souffler un 02 > 30.12, Bruxelles, La Monnaie, mar, jeu & ven vent d’excitation supplémentaire, le 26, 19h30, dim, 15h, Complet !, www.lamonnaie.be soir de la première.
94 théâtre & danse
Agenda
La fin du monde est pour dimanche François Morel
02>13.12
Un vieil homme philosophe avec son petit-fils en regardant l’aurore. Une femme parle à la photographie de Sheila en la remerciant d’exister. Un envoyé spécial de France Bleu Judée couvre en direct la naissance du divin enfant... François Morel imagine des tranches de vie surréalistes dans une ambiance de fin du monde. Seul sur scène, il peint un portrait drôle et poétique de l’humanité. La fin du monde est pour… © Manuelle Toussaint
02.12, Lille, Sébastopol, 20h, 38>32€ // 03.12, Grande Synthe, Palais du Littoral, 20h, 15€ // 09.12, Huy, Centre Culturel // 10&11.12, Bruxelles, Théâtre Wolubilis...
Une journée particulière
La Revue des Galeries
D’E. Scola & R. Maccari, MeS de C. Lidon
MeS de Bernard Lefrancq et David Michels
03&04.12
03.12>25.01.15
Rome, le 8 mai 1938. Toute la ville assiste à la cérémonie qui scelle l’alliance entre Hitler et Mussolini. Antonietta, en bonne mère de famille, doit rester chez elle. Le hasard va lui faire rencontrer son voisin d’en face, Gabriele, un intellectuel homosexuel menacé de déportation. Durant quelques heures ils vont vivre, sur la terrasse de l’immeuble, une bouleversante histoire d’amour.
Entre danse, humour et chanson, ce spectacle revient sur l’actualité qui a émaillé l’année 2014. Pour l’occasion, les auteurs ont aiguisé leurs plumes et toute la troupe est prête à jongler avec les personnages de façon délirante. Une tradition unique en son genre qui ressuscite les grandes heures du théâtre de Boulevard.
03.12, Boulogne-sur-Mer, Théâtre Monsigny, 20h30, 16>5€ // 04.12, Roubaix, Colisée, 20h30, 35>8€
03.12>25.01.2015, Bruxelles, Théâtre Royal des Galeries, 20h15 & 15h, 25>10€, www.trg.be
Let’s Dance Bérénice Legrand
05&13.12
Rejoignez un bal singulier qui mêle danse et gourmandise. La playlist rock de deux danseuses-serveuses (Bérénice Legrand et Sandrine Becquet) attire le public sur le dancefloor. Entre deux titres des Stones ou des Rita Mitsouko, vous participerez, entre autres, à un concours de bulles de chewing-gum tout en vous déhanchant en cadence. Aucune compétence « dansante » n’est exigée ! 05.12, Frelinghien, Béguinage de la Chapelette, 19h30, gratuit sur réservation au +33 (0)3 20 48 22 76 13.12, Roubaix, la Condition Publique, 15h30, gratuit sur réservation au +33 (0)3 28 33 48 33
Agenda
96
Soirée de Gala (Forever and ever)
théâtre & danse
Le Prato /Gilles Defacque
13.12>15.02.15
Cette soirée s’inscrit dans la tradition du music-hall tout en dynamitant les codes du genre. En brillant chef d’orchestre, Gilles Defacque, auteur-conteur et clown à la fois, jongle avec tous les registres : chansons, numéros de corde lisse, de vélo acrobatique et clins d’œil au cinéma muet se succèdent sur la piste. 15 artistes déploient une galerie de personnages soutenus par l’Orchestre du Tire-Laine. Soirée Gala © Bruno Dewaele
13.12, Armentières, Le Vivat, 20h, 21/14/7€, www. levivat.net //15.02, Haubourdin, Centre Culturel Paul André Lequimme, 16h, 10/7/3€, www.haubourdin.fr
Il n’est pas encore minuit
Allez, Ollie… à l’eau !
12>19.12
Cie XY
09>13.12
Mike Kenny /Odile Grosset-Grange
La Compagnie XY confirme ce qu’elle avait déjà montré avec Le Grand C : elle transforme l’acrobatie en art chorégraphié. Cette oeuvre virevoltante rassemble 22 acrobates qui multiplient les double salto du haut de pyramides humaines. Ils se catapultent dans les airs à l’aide de planches sauteuses et dansent le Lindy Hop - dérivé du Charleston - avec une virtuosité époustouflante.
Ollie c’est Oliver, qui a peur de l’eau et rechigne à passer du temps avec son arrière grand-mère. Mais lorsqu’à la piscine, la fragile aïeule se métamorphose en redoutable championne de natation, (elle a participé aux JO de 1948 !) le garçonnet voit les choses différemment. Le tendre propos est servi par une mise en scène astucieuse : plongeoir géant monté sur roulettes et bassin de compet’...
12&13.12, Lille, Grand Sud- Le Prato, 20h, 17>5€, www.leprato.fr // 17>19.12, Valenciennes, Le Phénix, mer &jeu, 20h, ven, 19h, 22>13€, www.lephenix.fr
09>13.12, Béthune, Comédie de Béthune, 20h, jeu 11 et sam 13 15h & 20h, 20>6€ // 18.03.15, Valenciennes, Le Phénix, 15h et 18h30, 13>9€…
Le carnaval des animaux Cie du Tapis noir
19 & 20.12
Tandis que le musée du Louvre-Lens se mue en bestiaire égyptien, la scène accueille un lion, un éléphant, des kangourous… pour un drôle et poétique Carnaval des animaux. La compagnie régionale du Tapis noir s’est saisie de l’œuvre musicale de Camille Saint-Saëns (1886) pour en faire un spectacle de danse accessible dès 5 ans. Une initiation à la musique classique où les caractéristiques zoologiques sont transposées à l’Homme. Quel animal serez-vous ? 19&20.12, Lens, Scène du Louvre-Lens, ven, 14h30, sam, 18h, 17 / 12 /10/9/5€, www.louvrelens.fr
Tous les spectacles de l’Eurorégion sur www.lm-magazine.com
98 le mot de la fin (de l’année)
— www.yeaaah-studio.com —
www.lm-magazine.com