LM magazine 125 - Janvier 2017

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N°125 / JANVIER 2017 / GRATUIT

HAUTS-DE-FRANCE & BELGIQUE Cultures et tendances urbaines




sommaire magazine

LM magazine n°125 - Janvier 2017

NEWS – 10 REPORTAGE – 14

Sur les pas d’Emir Kusturica

PORTFOLIO – 22 Giacomo Bagnara, Le fond et la forme

RENCONTRE – 50

Edouard Baer, De la tchatche dans les idées

DOSSIER LE VRAI DU FAUX Eric Yung, Escroqueries légendaires Guy Ribes, Authentique faussaire

– 64

Ceci n’est pas une copie, Design en grande pompe Künstendorf © Elisabeth Blanchet

– 60

– 70

ÉVÉNEMENT – 86 Vivat la danse ! a 20 ans

LE MOT DE LA FIN – 106 Davit Gyumishyan, Game of rock



sommaire sélection

LM magazine n°125 - Janvier 2017

MUSIQUE – 30 Trentemøller, Lee Fields, Vincent Delerm, Vaudou Game, Cécile McLorin Salvant, Vitalic, Rae Sremmurd, An Pierlé, Pone, The Radio Dept., L’Orchestre du Belgistan, Rachid Taha, Agenda...

EXPOSITION – 70

Magazine Queen © Estate Jeanloup Sieff

Ceci n’est pas une copie, Jeanloup Sieff, VinThoMax, William Klein, Miroirs, Adoption, Poison, Agenda...

THÉÂTRE & DANSE – 86 Vivat la danse !, Les Bienveillantes, Espæce, Un jour en plus, Rêves de lecture, Week-End Poil à Gratter, Être humain, Daral Shaga, Liker, Vangelo, Agenda...

DISQUES –

46

Foxygen, Flo Morrissey & Matthew E.White, Margaret Catcher, The XX, Sohn

LIVRES –

48

Paul Verhoeven, Total Spectacle, Petites histoires des grandes œuvres, L’Etrange questionnaire, Mélancolie de gauche, Retour sur l’accord du participe passé…

ÉCRANS –

50

Ouvert la nuit, Fais de beaux rêves, Diamond Island, The Birth of a Nation, Entre les frontières



LM magazine France & Belgique

28 rue François de Badts 59110 LA MADELEINE - F tél : +33 (0)3 62 64 80 09 - fax : +33 (0)3 62 64 80 07

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Ont collaboré à ce n° : Thibaut Allemand, Flora Beillouin, Elisabeth Blanchet, Rémi Boiteux, Mélissa Chevreuil, Mathieu Dauchy, Marine Durand, Raphaël Nieuwjaer et plus si affinités.

LM magazine France & Belgique est édité par la Sarl L'astrolab* - info@lastrolab.com L'astrolab* Sarl au capital de 5 000 euros - RCS Lille 538 422 973 Dépôt légal à parution - ISSN : en cours L’éditeur décline toute responsabilité quant aux visuels, photos, libellé des annonces, fournis par ses annonceurs, omissions ou erreurs figurant dans cette publication. Tous droits d’auteur réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par quelque procédé que ce soit, ainsi que l’enregistrement d’informations par système de traitement de données à des fins professionnelles, sont interdites et donnent lieu à des sanctions pénales. LM / Let'smotiv est imprimé sur du papier certifié PEFC. Cette certification assure la chaîne de traçabilité de l’origine du papier et garantit qu'il provient de forêts gérées durablement. Ne pas jeter sur la voie publique.

PAPIER ISSU DE FORÊTS GÉRÉES DURABLEMENT



© Vincent Bal

NEWS

Marche à l’ombre Mais que fait le réalisateur Vincent Bal lorsqu’il quitte la lumière des plateaux de cinéma (La Vie est belge, c’est lui) ? Eh bien il agit dans l’ombre… Plus précisément : il place celle des objets au service de saynètes tordantes. Pour preuve cette image où un gentil canard en plastique se retrouve dans le sac de ce brigand qu’il a engendré malgré lui. www.instagram.com/vincent_bal

Voilà une mode qu’on avait un peu oubliée : les patchs. Mais si, ces écussons qu’on coud ou thermocolle avec un fer à repasser sur nos fringues déchirées. Les métalleux en raffolent, au point d’en recouvrir leurs vestes à la gloire de Slayer ou Motörhead. Le photographe Melchior Tersen, touché par le phénomène, leur a dédié un livre. Ses clichés révèlent une esthétique fantasque, transformant un petit bout de tissu en véritable fresque. Killing Technology, de Melchior Tersen (Headbangers Publishing), 509 p., 59 €, www.killingtechnology.com

Killing technology © Melchior Tersen

Sous toutes les coutures


© Roman Fedortsov / Twitter

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Poisson pilote Des cyclopes, des bestioles aux dents acérées… Oui, le monde de Nemo version Roman Fedortsov est un peu effrayant. Ce matelot russe est devenu une star des réseaux sociaux en postant les photos de monstres marins pris dans les filets de son chalutier, qu’il remonte des tréfonds de l’Arctique, au nord du Groenland. Certes ils sont vilains, mais espérons tout de même qu’il ne les tue pas tous…

© L. Patsinashvili / D. Babiashvili

www.instagram.com/roman_fedortsov

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Abolition de l’esclavage aux USA

Faire parler les chiffres Voici une idée qui pourrait inspirer quelques enseignants en mal de résultats. Les designers Levan Patsinashvili et Davit Babiashvili mettent en scène des chiffres pour illustrer 50 dates historiques : du naufrage du Titanic à la naissance de Microsoft en passant, comme ici, par l’abolition de l’esclavage aux USA en 1863, où le «huit» a cassé ses chaînes. Vous avez saisi l’astuce ? www.boredpanda.com

C’est le nombre de journalistes tués dans le monde en 2016, selon Reporters sans frontières. Un chiffre en baisse, au regard des 101 décès dénombrés en 2015, mais trompeur à bien y regarder. « La violence à leur encontre est de plus en plus délibérée, selon l’ONG. Ils sont clairement visés et assassinés ». De ce fait, ils fuient les pays trop dangereux. La Syrie, l’Irak, ou la Libye deviennent ainsi « des trous noirs de l’information où l’impunité règne ». rsf.org


© François Dourlen

SmARTphone Dingue ce qu’on peut faire avec un smartphone. Rester éternellement connecté, se faire reluire l’ego à coups de selfies... mais aussi saupoudrer ce monde de brutes d’un peu de malice. Tenez : François Dourlen. En invitant des héros de la pop culture dans notre quotidien, ce photographe cherbourgeois obtient des scènes hilarantes. Après avoir affolé les réseaux sociaux, ce prof de Lettres et d’Histoire a tiré un livre de ses photomontages, le bien nommé SmArtphone.

Capture écran You Tube

The Art of Banksy © DR

SmArtphone, de François Dourlen (Omaké books), 96 p., 15€, omakebooks.com

Ikea démonte les djeuns Laissez tomber vos séances de karaoké. La nouvelle tendance est aux soirées pyjama sauvages chez Ikea ! Cette mode a été popularisée par Bram et Florian, deux p’tits plaisantins belges qui ont filmé puis diffusé sur YouTube leur nuit clandestine chez le géant du meuble en kit, à Gand. 1,7 million de vues plus tard, l’enseigne suédoise lance un appel aux jeunes du monde entier, leur priant de cesser ces intrusions nocturnes... en leur faisant de la pub.

Banksy à Anvers Après Amsterdam, c’est au tour d’Anvers d’accueillir la grande rétrospective consacrée au street-artist britannique, The Art of Banksy. Quelque 80 œuvres du plus célèbre des inconnus sont dévoilées à partir du 14 janvier au Stadsfeestzaal d’Anvers, un vaste centre commercial. On y verra des photos inédites, son portrait warholien de Kate Moss ou encore cette célèbre petite fille au ballon en forme de cœur. Oui, il y a toujours de l’espoir. ANVERS – 14.01 > 19.03, Stadsfeestzaal, tous les jours : 11 h > 19 h, 19,50 > 8,50 €, stadsfeestzaal.com



Société – Reportage 14


KUSTURICA DREAM Texte Elisabeth Blanchet Photo E. Blanchet / Festival Kunstendorf © Slobodan Pikula

En janvier se tient le dixième festival du film et de la musique de Küstendorf, au cœur du village bâti par le réalisateur Emir Kusturica, dans les montagnes du sud-ouest de la Serbie. Une belle occasion de découvrir l’univers passionnant et un peu mégalo de celui que, dans les Balkans, tout le monde nomme « le Professeur ».


Société – Reportage 16

Un café qui ne lésine pas sur la déco.

L

a route qui lie Sarajevo à Küstendorf est magnifique. Elle quitte la capitale bosniaque en longeant ses cafés et ses mosquées datant de l’Empire ottoman, avant de grimper dans les montagnes, peuplées de moutons et de sapins. Dans les villages, des minarets flambant neufs rappellent que nous sommes en Bosnie. Très vite, les cimetières musulmans se font plus nombreux. Les tombes renvoient à la même époque : celle de la guerre qui fit rage ici entre 1992 et 1995. Des maisons couvertes d’impacts de balles côtoient des demeures clinquantes, vestiges d’un bon voisinage ayant basculé dans la terreur du jour au lendemain. « Vous êtes assise à la place de Monica Bellucci. Je l’ai emmenée au festival de cinéma du Professeur »

« J’AI PERDU MA VILLE, SARAJEVO, DURANT LA GUERRE... ALORS, J’AI BÂTI MON PROPRE VILLAGE » lance Milos, notre chauffeur de taxi – et celui de Kusturica. Il a dû sentir la tension monter, comme la route qui longe désormais les gorges de la Drina, descendant vers la République serbe de Bosnie*, direction Višegrad. Celle-ci est connue pour son pont qui donne son nom au roman Le Pont sur la Drina du prix Nobel de littérature Ivo Andric. Mais depuis 2011, cette commune de 12  000 âmes

* La Bosnie est truffée d’enclaves serbes qui forment la République serbe de Bosnie ou Republika Srpska.


▲ ▲ Ivo Andric (1892 - 1975) a désormais une statue et même une ville à son nom (Andricgrad). ▲ Oh hisse ! Qui c’est le plus fort ? Évidemment c’est Emir. En tout cas, au fronton du cinéma d’Andricgrad.


« CHACUN DES 30 CHALETS A ÉTÉ ACHETÉ À UN PAYSAN DES ENVIRONS » compte une pièce de plus à son patrimoine : Andricgrad, dernière création du Professeur, une ville dans la ville dédiée à l’écrivain.

Nationaliste ? Édifiée en prévision du film inspiré du roman dont Kusturica sera bien sûr le réalisateur, Andricgrad ressemble à un Disneyland des Balkans : on y trouve des magasins de souvenirs, une banque, un cinéma, une faculté d’art dramatique et des bars dont un arbore une succession de portraits un tantinet déroutante. Dans l’ordre : Mère Teresa,

Gandhi, Fidel Castro, Che Guevara et… Poutine ! Au bout du village, une église orthodoxe… Alors que l’œuvre d’Andric prône la réconciliation entre les religions, la cité qui porte son nom ne laisse aucune place à l’influence musulmane, promouvant une vision serbe de la Bosnie. Cela ne fait pas l’unanimité. Amra, une Bosnienne, y voit « un délire mégalomane effaçant notre histoire ». Quant à Svetlana Cenic, économiste de Banja Luka, centre administratif de la Republika Srpska, elle critique la gestion de ce projet évalué à 15 millions d’euros, pour lequel aucun appel d’offres n’a été lancé et qui met à disposition de Kusturica des fonds publics « alors que le pays est en grave récession ». Après un dernier café sous le portrait de Vladimir, il est temps de respirer


Künstendorf, ses vieilles voitures, ses chalets, son église.

un air plus léger, sans relents de Grande Serbie. On reprend donc la route qui longe la Drina vers la Serbie et Küstendorf, soit le village de Kusturica... La cité en bois Comme Andricgrad, l’endroit devait uniquement servir de décor à La vie est un miracle, sorti en 2004. Mais le projet a évolué : « J’ai perdu ma ville, Sarajevo, durant la guerre. C’est pourquoi j’ai souhaité bâtir mon propre village, annonce le cinéaste en juillet 2004. Je rêve d’un lieu ouvert à la diversité culturelle et qui s’érige contre la mondialisation ». Un projet récompensé en 2005 du prix européen d’architecture Philippe Rotthier. En effet, dans ce domaine perché, chacun des 30 chalets a été acheté à un


Mélanie Laurent et Jacques Audiard ont répondu présent à l’édition 2016.

À visiter

kustendorf-filmandmusicfestival.org

paysan des environs puis démonté pièce par pièce avant d’être réassemblé et transformé en chambre d’hôtel. Les intérieurs « cosy » façon Tyrol sont aussi soignés que les extérieurs où le bois prévaut : de l’Église Saint Sava en passant par la salle de conférence, le gymnase ou le cinéma Stanley Kubrick au-dessus duquel le Professeur a ses appartements. Seule la piste d’atterrissage d’hélico – bien cachée des yeux des visiteurs – fait exception… Les ruelles sont baptisées du nom des héros de Kusturica : Ivo Andric, Maradona, Novak Djokovic, Dostoïevski, Fellini – ne manque que le chef du Kremlin. Ce sont surtout les Serbes qui s’y rendent : familles, groupes scolaires, amateurs de cinéma, entreprises venant « souder les équipes »…

Les affaires tournent à Küstendorf, le maître des lieux peut ajouter une corde de businessman à son arc. Mais c’est aussi pour son festival de cinéma et de musique qui se tient depuis 2008, en janvier, que l’endroit est connu. Ici, Hollywood est banni. Chaque année, on y enterre des bobines de blockbusters américains au cours d’une cérémonie. Des fictions de renommée internationale (Dheepan de Jacques Audiard fut à l’affiche l’an dernier) sont projetées à côté de films et documentaires d’inconnus ou d’étudiants. Le soir, le village vit au rythme des trompettes et guitares. Au détour d’une allée glissante, on peut donc y croiser Johnny Depp ou Mélanie Laurent. En attendant, pendant que le Professeur se repose au-dessus du cinéma Kubrick, ce sont les chats noirs et blancs qui se pavanent sur le parvis de l’Église.


Faut reconnaÎtre, c’est du brutal !


Portfolio – Portrait 22

Le fond et la forme

À visiter www.giacomobagnara.com

GIACOMO BAGNARA

Texte Julien Damien

Giacomo Bagnara vit à Vérone, au nord-est de l’Italie. « Je suis diplômé en architecture mais j’ai toujours aimé dessiner autre chose que des maisons », confie-t-il. Son violon d’Ingres est ainsi devenu son métier. Tant mieux ! Ce jeune homme pas encore trentenaire travaille désormais en tant qu’illustrateur, notamment pour la presse internationale : The New Yorker, The New York Times, The Wall Street Journal… Bref, de prestigieux clients qui, comme nous, ont été séduits par son style « simple, géométrique, coloré » et, sans nul doute, par la délicatesse de son humour. « Toujours à la recherche de nouvelles combinaisons de couleurs », Giacomo réalise essentiellement ses œuvres via une palette graphique. Il n’aime rien tant que jouer avec les formes et les courbes (c’est flagrant dans cette image représentant un pilote d’autruche), essayant « de raconter des histoires avec le moins d’éléments possible ». Il adore ainsi détourner les petites scènes du quotidien. Cet homme se jetant sur son skateboard ou cette maman pressée de conduire son fils à vélo illustrent avec finesse la course contre la montre qu’est la vie de tous les jours. « Si les gens rient devant mes images, alors je me dis que j’ai fait du bon boulot ». Pas sûr toutefois que Poutine se bidonne devant cette composition où on le voit courir devant une DeLorean soviétique en feu, comme si cette machine à voyager dans le temps avait été sabotée… Vladimir, ce grand nostalgique de l’URSS, serait-il coincé dans le passé ? La forme, donc, mais aussi le fond !



Monday Run


Kayak Club


The Right Watch


Her


Putin’s Time Machine

Runners


Just Lowe


Musique – Sélection 30


Trentemøller Electron libre

Texte Thibaut Allemand Photo Andreas Emenius

Mine de rien, le 16 octobre dernier, Anders Trentemøller fêtait ses 42 ans. Ce n’est pas vieux. Ce n’est plus tout à fait jeune non plus : à cet âge, le King fit son dernier aller simple vers la salle de bains. Il est d’ailleurs question de rock, de vagues et de froid dans le dernier album du Danois. L’ancien petit prince d’une electro minimale, spatiale et léchée revient à ses premières amours. Après tout, ado, Anders Trentemøller tenait la guitare au sein d’un groupe de rock – comme tous les teenagers de l’époque devenus électroniciens depuis. Nous ne sommes donc pas vraiment surpris par Fixion, son quatrième album studio en dix ans. En revanche, on reste soufflé par la qualité des chansons, à la fois hommage à New Order, Siouxsie et The Cure (l’un de ses premiers morceaux s’intitulait The Forest, d’ailleurs). Ici, épaulé par sa guitariste de compagne (Lisbet Fritze, des excellentes Giana Factory), par la divine voix de sa compatriote Marie Fisker et par celui, trop démonstratif, de Jehnny Beth (l’imposture Savages, vous voyez ?), le Danois livre une œuvre générique (entre pastiches et reprises déguisées) et personnelle – car il s’empare de ces sons pour en livrer sa propre version. Melting-pot Une question – toujours la même – demeure : comment transposera-t-il tout ceci sur scène ? Sera-t-il accompagné de musiciens ou avancera-t-il seul ? On lui fait confiance : on a croisé Trentemøller dans à peu près toutes les situations (en club et en “grandes” salles, en live comme en DJ-set), et le natif de Vordingborg s’en est toujours sorti haut la main. Ce sera également un melting-pot dans le public, où devraient se croiser plusieurs générations de mélomanes aux oreilles grandes ouvertes. BRUXELLES – 23.01, Ancienne Belgique, 20 h, 30 / 29 €, www.abconcerts.be


© Free Trade Agency

Sélection – Musique 32

ANVERS – 21.01, Arenbergschouwburg, 20 h 15, 20,50 / 17,50 €, www.arenbergschouwburg.be

Lee Fields À bientôt 66 ans, Lee Fields fait figure de vétéran (plus de 45 ans de carrière) et de débutant, l’Américain n’ayant signé que quatre albums en tout et pour tout (son premier LP date de 2002). Entouré de The Expressions (le groupe maison de Truth & Soul, son label), comptant des pointures ayant bossé avec les Dap-Kings mais aussi Amy Winehouse ou TV On The Radio, Lee Fields porte haut l’étendard d’une soul sans fioriture, gavée d’énergie et carburant à l’émotion. Et à la sueur, aussi. Quelque part entre le funk du Godfather James Brown et la sophistication du Philly Sound, Fields ouvre un infini champ des possibles. Cependant, on n’oublie pas que l’homme est capable du pire : il a tout de même collaboré deux fois (oui, deux fois !) avec l’abominable Martin Solveig. L’horreur est humaine. T.A.



© Fabrice Bourgelle

© Cauboyz Totoutard

Vincent Delerm

Vaudou Game

À ses débuts, Vincent Delerm était insupportable : des références convenues (la Nouvelle Vague, quelle originalité…), un entre-soi au mieux ennuyeux, au pire détestable (les profs de français, Télérama), et cette voix – le grand-père Simpson ! Sauf que depuis quelques albums, le Rouennais s’est calmé, laisse parler sa fibre mélodique, glisse une mélancolie et un non-chant bien moins caricatural que jadis. Sur scène, son music-hall de poche séduit. Entendu, on ne se moquera plus. T.A.

Mal nommé, le tube Pas contente collait le sourire pour la journée. Peter Solo, l’âme de Vaudou Game, ajoute aux a cappella issus des rites de transe vaudou une bonne dose d’afro-funk. Soutenu par cinq compagnons, le chanteur et guitariste togolais confronte le français et la langue Mina sur fond de rythmes afrobeat, de guitares agiles et de basses puissantes, hérités du funk et du rhythm & blues. Un régal pour les oreilles – les hanches suivront, forcément. T.A.

LILLE – 07.01, Théâtre Sébastopol, 20 h, 37 > 31 € BRUXELLES – 07.02 & 22.03, Théâtre 140, 20 h 30, 30 € MONS – 08.02, Le Manège, 20 h, 25 > 18 €

ARRAS – 12.01, Théâtre, 20 h, 10 > 8 €, www.tandem-arrasdouai.eu

Depuis la sortie de WomanChild en 2013, cette Franco-Américaine de 27 ans s’est imposée comme la nouvelle étoile du jazz vocal. Son timbre élastique, dont la légende dit qu’il embrasse trois octaves, s’envole très haut dans les aigus pour atterrir au ras du cœur, pas loin de Billie Holiday ou Barbara (écoutez donc sa reprise du Mal de vivre). Sur scène, la diva chante avec un trio piano-contrebasse-batterie, en anglais comme en français : pari risqué, mais gagné. J.D. AMIENS – 19.01, Maison de la Culture, 20 h 30, 33 > 15 € GAND – 25.01, Handelsbeurs, 20 h 15, 24 > 7 € CALAIS – 28.01, Centre Culturel Gérard Philipe, 20 h 30, 11 > 7 € LILLE – 29.01, Casino Barrière, 18 h 30, 27 > 14 €

© Mark Fitton

Cécile McLorin Salvant



Retour gagnant On pensait le connaître. Mais à la réflexion, qu’a-t-on retenu de Vitalic, excepté quelques souvenirs épars ? Son dernier album et une immanquable série de concerts constituent l’occasion de faire le point – et d’en remettre sur les "i", aussi. D’emblée, nous viennent à l’esprit l’EP Poney chez International Deejay Gigolo Records et le fameux mix des 2ManyDJs où La Rock 01 embrassait goulûment ADULT. Vitalic représente une époque : l’orée des années 2000, l’electroclash (Detroit-Paris-Berlin), la Northern electro (Sheffield-Rennes), une énergie rock’n’roll insufflée aux machines, des amateurs de guitares découvrant les joies du dancefloor… Et après ? Eh bien, on a un peu décroché. Ce fut aussi un label, Citizen, mené de main de maître par le Dijonnais. Il faut l’avouer : depuis OK Cowboy (2005), premier album paru quatre ans après ses premiers maxis (une éternité, donc), on n’avait guère suivi le reste de ses aventures. Certes, sur scène, c’était toujours la claque, mais ses albums s’écoutaient d’une oreille distraite, sans vraiment convaincre. Or, le dernier-né relève de la divine mandale : entouré du décidément incontournable David Shaw (le très, très Depeche Mode Waiting For The Stars), évoquant le Mute des débuts (Hans Is Driving, avec Miss Kittin), Vitalic signe une œuvre généreuse, gavée de techno « efficace » et bardée de piano élégiaque. Et puis, reprendre Supertramp, l’un des meilleurs groupes de l’Histoire à n’avoir pas enBRUXELLES – 26.01, Ancienne Belgique, 20 h, complet !, www.abconcerts.be core été totalement réhabilité, mérite LILLE – 27.01, L’Aéronef, 20 h, 28 > 20 €, notre respect. Thibaut Allemand www.aeronef.fr

© C. le Mindu / D. Hugono Petit

Musique – Sélection 36

VITALIC



© DR

Musique – Sélection 38

Rae Sremmurd Les frères Brown ont littéralement foudroyé la planète avec un morceau. Vous savez, ce titre de rap sombre à souhait, Black Beatles (feat Gucci Mane), qui accompagne le Mannequin Challenge, jeu consistant à filmer des personnes immobiles (qu’on oubliera aussi vite que le Harlem Shake). Certes, les deux loustics de Rae Sremmurd (dites « ré-chrim-eur », vous aurez moins l’air d’une quiche) ont bien profité de ce coup de pouce viral, mais ils affolaient depuis un bail tous les compteurs sur le web. Les singles No Type et No Flex Zone les avaient érigés en hérauts d’une trap sophistiquée dès 2014. Pas si éphémère. J.D. GAND – 26.01, Vooruit, 19 h 30, 26,75 €, vooruit.be

An Pierlé

NAMUR – 21.01, Théâtre Royal, 20 h 30, 24,50 > 8,50 €, theatredenamur.be + SLUMBERLAND : 21.06, Abattoirs de Bomel, 15 h, 9 / 7 €, centrecultureldenamur.be LOUVAIN-LA-NEUVE – 14.05, Ferme du Biéreau, 15 h 30, 16 > 9 €, fermedubiereau.be

© Jan Cnudde

La Flamande n’a jamais eu peur des expériences. Après avoir signé la BO du Tout Nouveau Testament de Jaco Van Dormael puis créé un film musical pour enfants (Slumberland), elle remet l’orgue au goût du jour dans un 7e album (Arches). Souvent comparée à Kate Bush pour son goût du lyrisme, celle qui fut « compositrice officielle de Gand » est accompagnée sur scène de deux chanteuses, délivrant des chansons comme autant de prières. J.D.



LILLE – 17.03, L’Aéronef, 20 h, 22 > 14 €, www.aeronef.fr (+ SUPERPOZE)

BRUXELLES – 27.01, Botanique, 19 h 30, 20 > 14 €, www.botanique.be

© Kid Santo

Sélection – Musique 40

Pone Sous le nom de DJ Pone, on l’a vu réveiller le Svink, s’acoquiner avec Fabe, zoner avec Casseurs Flowters, brouiller les pistes avec Matmatah, arroser Qhuit de ses prods précieuses ou signer l’imparable Trans Boulogne Express avec Birdy Nam Nam, dont il fut l’un des membres fondateurs. Bref, le parcours de Thomas Parent révèle une grande agilité. Mais voilà : la quarantaine venue, Pone lâche son préfixe de DJ et, en compagnie de Superpoze et Boogie Vice, le Français signe un disque à l’élégie contagieuse. Fine, aérienne et introspective, l’electronica de Radiant, digne d’un James Blake, surprend – pour séduire aussitôt. Le genre d’œuvre à déguster à l’horizontale. Ce sera, à n’en pas douter, un sacré challenge pour son auteur que de l’inclure dans un set – se concentre-t-il uniquement sur ce petit dernier, ou nous fait-il voyager à travers sa vingtaine d’années de carrière ? T.A.



Combiné nordique Plus que rare, The Radio Dept. daigne enfin poser ses guêtres sur le sol belge. L’occasion de chanter les louanges de ce mystérieux duo, über-sensible et fort en gueule, à la fois responsable du revival shoegazing en cours, et pourvoyeur de quelques-uns des plus beaux morceaux electropop de ces dernières années. Fortes têtes bien pleines, The Radio Dept. incarne ce qui est arrivé de mieux au revival shoegazing. De fait, ils en furent les initiateurs. Depuis leur trou perdu de Lund, à quelques encablures de Malmö, Johan Duncanson, et Martin Carlson (aidés de Daniel Tjäder) imaginent depuis 2003 une musique noyée dans l’écho, truffée de guitares réverbérées et de chants vénéneux. La formation a le chic pour donner son point de vue, éminemment politique, avec une douceur apparente. Ce discours franc du collier rompt avec une certaine image d’Épinal accolée à la Suède – cette social-démocratie faite de consensus et de tolérance de façade. Annoncé par une poignée de singles au verbe haut et au parti-pris plus électronique (Death to Fascism et This Repeated Sodomy), le dernier essai du groupe, Running Out of Love, est l’occasion pour le tandem de remonter sur scène. À vrai dire, on ne sait trop à quoi s’attendre, la formation étant peu encline à donner des concerts. La dernière fois qu’on l’a applaudie, on eut droit à trois hommes en front de scène – deux guitares, un synthé – et une mise en son appliquée de leurs chansons. Une économie de moyens. Un rendu fabuleux. Thibaut Allemand BRUXELLES – 29.01, Botanique, 19 h 30, 19 > 13 €, www.botanique.be

© Per Vikström

THE RADIO DEPT.



Musique – Sélection 44

L’Orchestre du Belgistan Le Belgistan, quèsaco ? Une région méconnue (car fantasmée) de la Belgique orientale. « Le seul pays qui se déplace à domicile » si l’on en croit les dires de son très officiel orchestre, qui en dessine les contours avec une musique festive et métissée depuis maintenant 15 ans (et fit autrefois résonner ses cuivres et percussions pour les Ogres de Barback). Ce joyeux bazar où se bousculent sonorités balkaniques, nord-africaines, jazz, funk… emporte tout sur son passage, même la plus vilaine morosité. J.D.

VEN 06.01 ULTRAVIOLET (NANCY HUSTON & CLAUDE BARTHÉLEMY) Dunkerque, Le Bateau-Feu, 20h, 8e

SAM 07.01 FAWZY AL-AIEDY RADIO BAGDAD QUARTET Lens, La Scène du LouvreLens, 19h, 10>5e VINCENT DELERM Lille, Théâtre Sebastopol, 20h, 37>31€ CASSIUS Lille, Le Magazine, 23h, 8,99e

JEU 12.01 BUCHBINDER INTERPRÈTE BEETHOVEN Lille, Nouveau Siècle, 20h, 50>5e VAUDOU GAME Arras, Théâtre, 20h, 10>8e

VEN 13.01 AGAR AGAR Bruxelles, Botanique, 19h30, 15>9e LE SACRE DU TYMPAN + HUGH COLTMAN

Valenciennes, Le Phénix, 20h, 23>10e BUCHBINDER INTERPRÈTE BEETHOVEN Lille, Nouveau Siècle, 20h, 50>5e ÉCRIRE UNE HISTOIRE (OLIVIER DE SOLMINIHAC) Dunkerque, Le Bateau-Feu, 20h, 8e MR. SCRUFF Gand, Vooruit, 22h, 13,75e

SAM 14.01 BUVETTE + BARBAGALLO Lille, L’Aéronef, 20h, 18>5e

DIM 15.01

© DR

CHARLEROI – 27.01, L’Eden, 21 h, 13 > 7 €, eden-charleroi.be GAND – 03.02, Le Charlatan, 21 h, 5 €, charlatan.be

PATRICE Lille, L’Aéronef, 20h, 30,70e

MER 18.01 ICIBALAO (PRESQUE OUI) Arques, Centre Culturel DanielBalavoine, 15h, 4e UN AIR D’ITALIE (LES SOLISTES DU CONCERT D’ASTRÉE) Lille, Opéra, 18h, 10>5e JEANNE CHERHAL Lille, Théâtre Sebastopol, 20h, 34>29e FRONT 242 + FRONT BY FRONT Bruxelles, Beursschouwburg, 20h30, gratuit

JEU 19.01

ALDEBERT (ENFANTILLAGES 2) Arlon, Maison de la Culture, 14h30, 18h, 25/15e

BLACK HONEY + DAN SAN… Roubaix, La Cave aux Poètes, 19h, 8/6e/gratuit (abonnés)

FLESHGOD APOCALYPSE + CARACH ANGREN + NIGHTLAND Dunkerque, Les 4 Ecluses, 18h, 15 / 12 e

IL TRIONFO DEL TEMPO E DEL DISINGANNO (OPÉRA DE HAENDEL) Lille, Opéra, 20h, 69>5e

SABATON + ACCEPT Lille, L’Aéronef, 19h, 30,80e

MAR 17.01 AARON Beauvais, L’Ouvre-Boîte, 20h, 20>15e

K’S CHOICE Courtrai, Schouwburg, 20h15, 28>23,40e CÉCILE MCLORIN SALVANT Amiens, Maison de la Culture, 20h30, 33>15e JEANNE CHERHAL Lens, Le Colisée, 20h30, 10>5e


VEN 20.01 DAN SAN Louvroil, Espace Culturel Casadesus, 20h, 9/6e POÈME DE L’EXTASE (DIRECTION : JEAN-CLAUDE CASADESUS) Lille, Nouveau Siècle, 20h, 50>5€ THOMAS DUTRONC Béthune, Théâtre, 20h30, 44/40e ROMAIN HUMEAU + SOAN Oignies, Le Métaphone, 20h30, 19>13e

SAM 21.01 LEE FIELDS & THE EXPRESSIONS Anvers, Arenbergschouwburg, 20h15, 20,50 / 17,50e AN PIERLÉ Namur, Théâtre Royal, 20h30, 24,50>10,50e BLACK HONEY + DÄTCHA MANDALA Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h30, 9/6e SINCLAIR Lille, Théâtre du Casino Barrière, 20h30, 35>27e

DIM 22.01 JOSÉ GONZALES & GOTHENBURG STRING THEORY Bruxelles, Cirque Royal, 20h, 34>28e

LUN 23.01 TRENTEMØLLER Bruxelles, AB, 20h, 30/29e

JEU 26.01 LAS AVES + FAI BABA Tourcoing, Le Grand Mix, 19h, 12/5e/gratuit (abonnés) RAE SREMMURD Gand, Vooruit, 19h30, 26,75e PETER HOOK & THE LIGHT Louvain, Het Depot, 20h, 27>21e

VEN 27.01 PONE Bruxelles, Botanique, 19h30, 20>14e PETER HARPER Louvroil, Espace Culturel Casadesus, 20h, 10>6e VITALIC Lille, L’Aéronef, 20h, 28>20e HIPPOCAMPE FOU + DOC MAHDJ Arras, Le Pharos, 20h30, 7>1,50e JOSEPH D’ANVERS + HILDEBRANDT Béthune, Le Poche, 20h30, 8/6e

SAM 28.01 PETER HOOK & THE LIGHT Lille, L’Aéronef, 20h, 22>14e CÉCILE MCLORIN SALVANT Calais, C.C. Gérard Philipe, 20h30, 11>7e

PETER HARPER Béthune, Le Poche, 20h30, 8/6e ARLT Villeneuve d’Ascq, La Ferme d’en Haut, 21h, 7/4€ ALEXANDER KOWALSKI + HEIKO LAUX Charleroi, Rockerill, 22h, 10e

DIM 29.01 CÉCILE MCLORIN SALVANT & AARON DIELH TRIO Lille, Théâtre du Casino Barrière, 18h30, 27>22,40e THE RADIO DEPT. Bruxelles, Botanique, 19h30, 19>13e

LUN 30.01 THE DIVINE COMEDY Bruxelles, Cirque Royal, 20h, 29 / 26 e,

MAR 31.01 SKUNK ANANSIE Lille, L’Aéronef, 20h, 30>19e

MER 01.02 AGAR AGAR + FRENCH 79 Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 13>5e

VEN 03.02 CLARIKA Lens, Le Colisée, 20h30, 25>12,50e

OIGNIES – 28.01, Le Métaphone, 20 h 30, 20 > 14 €, 9-9bis.com

© Marc-Antoine Serra

Rachid Taha L’ex-Carte de Séjour, qui fête cette année les 20 ans de l’inusable tube Ya Rayah, n’a rien perdu de son mordant ni de sa capacité à fédérer punk rock, raï, chaâbi, gnawa ou electro avec une maestria confondante. Complice de Mick Jones (The Clash), de Brian Eno, de Steve Hillage et récemment d’Acid Arab, le Lyonnais, ex-roadie des Cramps et un temps barman du Pulp, a eu mille vies. Mais celle qui nous intéresse s’écrit sous nos yeux : celle d’un infatigable songwriter, figure majeure d’une musique cosmopolite, populaire et exigeante. T.A.


Disques – Chroniques 46

FOXYGEN Hang

(Jagjaguwar / PIAS)

Comment émettre un avis définitif sur Foxygen ? Le groupe a fait suivre We are the 21st Century Ambassadors of Peace & Magic (gorgé de tubes pop sous influence MGMT), par le nettement plus controversé… And Star Power. Voici qu’à ce double-album brouillon, mal fichu (et, rappelons-le, plein d’idées géniales) succède un Hang qui en est l’antithèse. Ici, le son est ample, le groupe convoque un orchestre symphonique sur tous les titres, et l’ensemble excède à peine 30 minutes. Une demi-heure durant laquelle le duo californien fait rimer Queen avec Ween. Il sonne comme une version américaine de Divine Comedy portée par une voix inimitable. Comme si un Lou Reed glam et punk avait avalé Frank Sinatra... D’un bout à l’autre c’est aussi le grand Ray Davies qui nous vient à l’esprit, à la faveur de titres revisitant les productions du début des seventies, quelque part entre le Village Green et la BO du Rocky Horror Picture Show. Vous suivez ? Les chœurs sont irrésistibles (grandiose Avalon), les compositions étourdissent sans jamais nous perdre et ce contre-pied total est surtout… un pied total ! Rémi Boiteux

FLO MORRISSEY & MATTHEW E. WHITE Gentlewoman, Ruby Man (Glassnote / Caroline International)

On n'a jamais tari d'éloges concernant Matthew E.White, pourvoyeur d'une délicieuse country soul, en solo et via son label Spacebomb. On reste circonspect face à Flo Morrissey – une Anglaise dont le premier album, scolaire et passéiste, suintait cette pop folk bien peignée qui nous a flingué la décennie. Aussi, on espérait qu'un album unissant ces deux là permettrait à notre amie de se décoincer un peu… Encore raté. À croire qu'elle stérilise tout ce qu'elle touche. Et l'auditeur de s'ennuyer devant ces reprises trop proprettes et très ennuyeuses de Roy Ayers, Leonard Cohen ou Nino Ferrer. De notre côté, on attend des nouvelles de Georgie, recrue britannique signée chez Spacebomb, au timbre et à la personnalité autrement plus intéressants que la pâle Flo. Thibaut Allemand


MARGARET CATCHER Singularity

THE XX I See You (Young Turks / Beggars)

(MC-2 / Modulor)

Dans ses meilleurs moments, l’album de Margaret Catcher (Xavier Leloux et Pierre Level, deux Nordistes), ressemble à une BO de Terminator qu’on aurait cabossée pour l’écouter en plein carnaval de Rio. La froideur inquiétante d’un univers dystopique accueille ainsi la chaleur de rythmes invitant à une fête apocalyptique ! Les rythmes : voilà bien l'un des points forts de ce disque qui surprend par ses changements de tempo, tandis que s’enchaînent en rafale des titres courts se nourrissant chez Secret Chiefs 3, un Zappa compressé ou un Katerine cyberpunk, sans prendre le temps de digérer. Dans un étrange anglais, les paroles professent les jingles d’un futur qu’on espère conjurer en secouant la tête sur leurs dingueries. Rémi Boiteux

2016 avait commencé avec l’étoile noire de Bowie. 2017 débute avec l’iconique "X" marquant la réunion de Romy, Oliver et Jamie. Ces grands timides ont bossé leur assurance depuis l’épatant Coexist en 2012. Oliver a été le visage d’une campagne de Dior tandis que Jamie (XX) reprenait des couleurs via un album solo explosif (In Colour). I See You entretient cet élan. Le disque nous accueille sur une rythmique garage mâtinée de cuivres, affichant d’emblée le caractère lumineux de ce troisième acte. Tel Joy Division mué en New Order, The XX s’affirme comme un objet pop débarrassé du complexe du nerd. L’épure est toujours au centre du projet, mais ce n’est plus un choix par défaut. Le X marque plus que jamais l'endroit où creuser. Mathieu Dauchy

SOHN Rennen

(4AD)

Sohn fait dans la cuisine moléculaire. Le Londonien, exViennois et néo-Californien, assure un deuxième service avec Rennen. Dans l'esprit de Tremors paru en 2014, la recette est sobre : une electro-soul montée à coup de nappes légères, relevée de quelques rythmes enregistrés avec des ustensiles de cuisine. Dans Conrad, les percussions sont obtenues en frappant des murs, le sol ou des bouteilles de verre vides. Christopher Taylor sait aussi magnifier sa voix, celle-ci n’a pas besoin d'un vieux fond de sauce (ou d’auto-tune) pour nous régaler. À la grande table de James Blake s’installe désormais un nouveau chef confiant en son étoile. Mathieu Dauchy


Livres – Chroniques 48

PAUL VERHOEVEN, TOTAL SPECTACLE Axel Cadieux (Playlist Society)

Paul Verhoeven connaît un retour en grâce mérité. Tandis que Showgirls (1995) est enfin réhabilité à sa juste valeur, son plus récent Elle (2016), avec Isabelle Huppert, fut pressenti pour les Oscars. L’occasion de se repencher sur la carrière du Néerlandais, qui n’aura eu de cesse de nous confronter à la violence et au sexe pour nous faire réfléchir. Sauf que, bien moins épate-bourgeois que le premier Gaspard Noé venu, le "Hollandais violent" jouit d’une filmographie où les chefsd’œuvre se ramassent à la pelle, de Total Recall à Starship Troopers en passant par Black Book (SA réussite absolue). Sous la direction d’A. Cadieux, quatre cinéphiles proposent autant de pistes pour percer le mystère Verhoeven. À commencer par des personnages partagés entre révolte et soumission aux normes. Mais aussi l’ambiguë représentation des femmes : tour à tour ingénues, garces, héroïnes volontaires (ou tout cela à la fois). Sont également abordés la notion d’humanité et le rapport au corps (et comment en sortir) et, enfin, la question de l’ironie, toujours présente, à des degrés divers, dans une œuvre inusable. L’ouvrage s’achève avec un entretien érudit et accessible du maître. En un mot : indispensable. 176 p., 14 €.Thibaut Allemand

PETITES HISTOIRES DES GRANDES ŒUVRES M. Fonta, L. Palet, M-L. Nemo, O. Magnan

(Eyrolles)

Raconter la petite anecdote cachée derrière une célèbre toile ou sculpture. Voilà le chouette principe de ce livre, qui plaira sans doute aux fans de l’émission D’Art d’art de Frédéric Taddéï. Quel message politique véhicule discrètement Le Radeau de la Méduse de Géricault (lequel ne savait pas dessiner les pieds…) ? Comment le Déjeuner sur l’herbe de Monet (et non celui de Manet) a-t-il failli disparaître dans la cave d’un menuisier (non, l’impressionnisme n’a pas toujours eu la cote) ? Quelle femme se dissimule derrière L’Homme blessé de Courbet ? Si on regrette une mise en forme écartelant certains tableaux entre deux pages, ces récits de scandales, plagiats ou autres secrets d’atelier offrent un voyage passionnant à travers l’histoire de l’art. 160 p., 21,90 €. Julien Damien


L’ÉTRANGE QUESTIONNAIRE

MÉLANCOLIE DE GAUCHE

Éric Poindron

Enzo Traverso

(Les Venterniers)

(La Découverte)

Quel animal empaillé souhaiteriez-vous posséder ? À quoi pensezvous en regardant le ciel ? Voici deux exemples de colles posées par cet Étrange Questionnaire piquant l’imagination. L’ouvrage vous invite en 60 questions malicieusement formulées à vous creuser la tête. Vous y dénicherez des trésors que vous ne soupçonniez pas. On ne s’étonnera pas que ce livre soit le fruit du beau travail des Venterniers (inestimable éditeur audomarois) et de l’esprit fertile d’Eric Poindron. Ce bibliomane des contre-allées (il connaît de fantastiques auteurs dont l’existence est incertaine) n’a pas pu s’empêcher d’agrémenter son ouvrage d’élucubrations littéraires savoureuses. À ajouter sans faute à votre cabinet de curiosités. 108 p., 14 €. Rémi Boiteux

Les années 1990 semblaient avoir enterré le communisme. Plus d’U.R.S.S., plus de R.D.A. Difficile même de se revendiquer de Marx. L’histoire était finie. La gauche n’avait plus qu’à humaniser les effets dévastateurs du capitalisme. Or, la «culture de gauche» n’en était pas à sa première défaite. Combien, au xixe siècle, de révolutions matées ? N’en est pas moins restée vivace la mémoire des luttes. C’est à la force de cette « tradition cachée » que l’historien Enzo Traverso consacre ce nouvel essai. Avec l’idée qu’il ne faut pas « pleurer l’utopie, mais la reconstruire ». Dans la lignée de Walter Benjamin, il tisse une histoire des vaincus dans laquelle la mélancolie se révèle un puissant affect révolutionnaire. Un livre essentiel. 300 p., 20 €. Raphaël Nieuwjaer

RETOUR SUR L’ACCORD DU PARTICIPE PASSÉ ET AUTRES BIZARRERIES DE LA LANGUE FRANÇAISE M. Rousseau, O. Houdart, R. Herlin

(Flammarion)

Rédigé par trois correcteurs du monde.fr, cet ouvrage revient moins sur l’accord du participe passé (remplacez par un verbe du troisième groupe, et l’affaire est dans le sac) que sur l’évolution de notre langue : le rôle des majuscules, de la ponctuation, les pléonasmes ou les erreurs fréquentes (un "terroriste présumé"... n’est-il pas d’abord "terroriste supposé" et toujours "présumé innocent" ?). Sans parler des tics de langage – la prolifération du terme "assez" (assez passionnant, voire assez unique !), est une absurdité qui laisse songeur… La langue (de bois) politique envahissant le champ médiatique, la langue s’appauvrit, et notre pensée avec. Alarmiste, mais suffisamment drôle et bien écrit pour se dévorer d’une traite. 317 p., 17 €. Thibaut Allemand


Écrans – Rencontre 50

OPEN BA(E)R EDOUARD AU GRAND JOUR


Propos recueillis par Julien Damien Photo Pascal Chantier

Douze ans après Akoibon, Edouard Baer est de retour derrière la caméra. Dans Ouvert la nuit il incarne Luigi, un directeur de théâtre embourbé dans un sacré pétrin. Il lui reste quelques heures pour sauver son affaire. Une nuit pour dénicher le singe que réclame son metteur en scène japonais et trouver le moyen de payer ses employés, tous en grève… Le voilà embarqué dans une improbable quête en plein Paris, accompagné d’une stagiaire bourrue (Sabrina Ouazani), avec pour seule arme une tchatche surnaturelle. Peut-on y voir un autoportrait ? En tout cas, Edouard Baer signe un 3e film fantasque et poétique, agrémenté d’une belle distribution (dont Audrey Tautou ou Michel Galabru, pour son dernier rôle). Rencontre avec un type sincèrement philanthrope.

Quelle est l’idée de ce film ? Je voulais rendre hommage à un personnage évoquant autant les comédies italiennes des années 60 que les comptoirs de bistrots, à certaines heures de la nuit. Entre fiction et réalité, je montre des gens qui ont l’air d’inventer leur vie. Je souhaitais aussi décrire les coulisses d’un théâtre, pénétrer dans les cuisines, derrière la partie lumineuse. Comment le présenteriez-vous ? C’est un road-movie à pied, toujours en mouvement, avec de nombreux plans-séquences. Comme dans les films d’action du type À la poursuite du diamant vert, le héros est animé par une quête.

« JE PRÉFÈRE LES REGARDS, LES MALAISES ET LES SILENCES À UN BON MOT » Vous dessinez aussi un portrait de Paris, n’est-ce pas ? Absolument. Mais il n’est pas question d’un Paris chic ou nostalgique. Ce sont les adresses de Luigi, qui pourraient être les miennes. Je vous emmène dans des endroits qui comptent pour moi. On y croise des personnalités que j’apprécie, un chef de restaurant, un serveur qui me fait marrer, une nana avec qui j’aime discuter dans un bar… Tous ces personnages brossent eux-mêmes le


portrait de la ville. On les a choisis un par un, accordant autant de soin au casting qu’aux décors. Certes fantaisiste, le film est donc aussi réaliste… Oui, parce qu’il se situe au ras des rues, des visages. Quand on est à hauteur d’homme on s’en sort toujours. J’anime le matin une émission de radio* délivrant une forme d’actualité « intime ». On rapporte non seulement l’information internationale, mais aussi celle de votre voisine, de vos gamins, on se préoccupe de savoir si vous êtes amoureux, si vous avez mal aux pieds… Qui est Luigi, votre personnage principal ? Un type qui perçoit la beauté chez les autres. C’est un révélateur, une sorte de Pygmalion. C’est aussi un

équilibriste, un culbuto, un type perpétuellement sur le point de chuter mais qui retombe toujours sur ses pattes.

« JE DÉTESTE L’ESPRIT DE SÉRIEUX » C’est aussi votre personnage fétiche au théâtre, comment l’avezvous adapté au cinéma ? Au théâtre, tout au moins celui que je pratique, le dialogue est roi. Ici, la vérité passe par la caméra, l’œil. On a donc nettoyé tout ce qui relevait de la « punchline », de l’efficacité comique. Les comédies françaises souffrent de cet excès de bons mots qui rassurent les chaînes. Je préfère les comédies de situation, les regards, les malaises et les silences. * Plus près de toi, sur Radio Nova, lun > ven, 7 h > 9 h


OUVERT LA NUIT D’Edouard Baer, avec Edouard Baer, Sabrina Ouazani, Audrey Tautou… Sortie le 11.01

Vous donnez ici à Luigi plus de profondeur. On découvre sa vie familiale désastreuse, sa solitude… La tonalité joyeuse d’un film n’autorise pas un manque de crédibilité, les personnages doivent avoir de l’épaisseur. Sinon cela devient artificiel, comme dans une pub. La vie ne ressemble pas à une sitcom, où l’on serait cantonné à un rôle, celui de la nympho, du bourgeois, du con de service… On est tout cela à la fois. Vous par exemple, vous aimez votre femme mais pour autant je vous ai vu dans un bordel à la frontière belge (rires). L’Homme renferme une somme de contradictions, de misérables petits secrets et si l’on parvient à en effleurer quelques-uns au cinéma, c’est formidable ! Luigi est-il votre avatar fictionnel ? Oui, en pire et en beaucoup mieux !

Qu’est-ce que vous partagez avec lui ? L’idée que les dés ne sont pas jetés, que rien n’est jamais joué d’avance. Qu’en sortant, en se baladant, on peut changer sa vie, celle des autres et le cours des choses…. bref, que l’aventure est au coin de la rue ! C’est aussi un grand enfant… Oui, peut-être, mais c’est un vrai patron. Il règle tout de même 27 salaires par mois… On n’est pas obligé d’être un homme en gris, un technocrate pour que les choses roulent. Rien n’empêche de travailler en restant fantaisiste, drôle ou en montant sur la table. On peut être grave, avoir de la profondeur sans être lugubre. Je déteste l’esprit de sérieux.

OUVERT LA NUIT – D’Edouard Baer, avec Edouard Baer, Sabrina Ouazani, Audrey Tautou... Sortie le 11.01



Écrans – Sélection 55

La mort dans l’âme

Fais de beaux rêves

Texte Raphaël Nieuwjaer Photo Simone Martinetto

Inspiré par le roman autobiographique du journaliste sportif Massimo Gramellini, Fais de beaux rêves raconte l’histoire d’un deuil au fil de trois décennies. Celui d’un petit garçon qui perd sa mère à 9 ans et reste hanté, une fois adulte, par ce passé qui ne passe pas. Après Sangue del mio sangue, Marco Bellocchio réalise une œuvre forte sur le partage des émotions. L’un des plus beaux longs-métrages de 2015 provenait aussi d’Italie et racontait déjà la disparition d’une mère. Mia Madre, de Nanni Moretti, nous confrontait à la mort au présent : à l’agitation des plateaux de cinéma, répondait le silence d’une chambre d’hôpital. À bien des égards, Fais de beaux rêves commence là où finissait Mia Madre. Chez Marco Bellocchio, il s’agit d’apprendre à vivre après la perte. Ou plutôt avec elle. C’est ce qu’il y a de si touchant dans Fais de beaux rêves. La fiction ne cherche pas à consoler ni à surmonter le deuil grâce à un « programme ». Au contraire, elle montre que la douleur persiste, se transforme dans le meilleur des cas. Universalité Le film ne se recroqueville pas non plus sur une souffrance individuelle. Là réside toute son intelligence. Bellocchio donne à son récit une ampleur bienvenue, n’hésitant pas à le confronter à l’Histoire dans ce qu’elle a de plus tragique. Pour exemple, cette scène où un photographe de guerre, en Yougoslavie, place le corps d’un enfant à côté du cadavre d’une femme, obtenant ainsi un cliché plus marquant. À travers cette marchandisation du pathétique, le cinéaste vise l’universalité via une expérience personnelle. Si le deuil est chose commune, il semble impossible à partager.

De Marco Bellocchio, avec Valerio Mastandrea, Bérénice Bejo, Guido Caprino… En salle


Phnom Peine Quatre ans après Le Sommeil d’or, un documentaire remarqué sur la mémoire du cinéma cambodgien, Davy Chou revient avec une fiction, Diamond island. S’entrelacent, là encore, la mémoire et l’amnésie, les blessures du passé et les incertitudes de l’avenir. En apparence, Diamond island rejoue une partition connue. Avec ses plans baignés par la lumière colorée des néons, ses travellings aériens, ses acteurs jeunes et jolis, Davy Chou creuse le sillon tracé il y a quinze ans par Millenium Mambo, de Hou Hsiao-hsien. Depuis, la formule a perdu de son pouvoir de sidération. Le refrain est connu : l’ultra-modernité comporte un revers, une mélancolie vaporeuse s’insinue au détour de chaque distraction. Pourtant, en quittant la campagne pour Phnom Penh, Bora et Mesa vont explorer d’autres sentiments et territoires. La beauté du film repose d’abord sur ce lieu étrange qu’est "Diamond island". La nuit, cette île n’est que halos bleus, roses, jaunes. Un cocon irréel où la jeunesse se love pour imaginer son avenir. Le jour, se déploie un chantier faramineux, où cette même jeunesse se casse le dos pour une misère. Et puis, "Diamond island", c’est aussi le nom d’un exil intérieur. En effet, l’occidentalisation du Cambodge recouvre peu à peu l’histoire du génocide perpétré par les Khmers rouges. Sans donner de leçons à une génération "acculturée", l’œuvre explore avec justesse les lignes de fracture entre campagne et ville, parents et enfants. Le rêve devient une manière de faire face à la réalité dans un pays en (re)construction. R. Nieuwjaer De Davy Chou, avec Sobon Nuon, Cheanick Nov, Madeza Chhem… En salle

© Les Films du Losange

DIAMOND ISLAND



© 20th Century Fox

The Birth of a Nation Fin du xix siècle, trente ans avant la guerre de Sécession. Nat Turner est un esclave érudit et profondément croyant. À tel point que son maître, en pleine débâcle financière, profite de ses talents d’orateur pour amadouer ses sujets les plus récalcitrants. Obéissant mais pas dupe, le prêcheur prépare en silence une révolution… Doublement récompensé au festival de Sundance, favori des Oscars, The Birth of a Nation arrive, certes, après les remarquables Django Unchained ou Twelve Years a Slave, mais sa façon de traiter ce sujet toujours sensible aux USA demeure inédite. Moins irrévérencieux que le film de Tarantino, plus pieux que celui de Steve McQueen, Nate Parker narre avec force l’histoire d’un insoumis pour qui Dieu reste le seul maître. Mélissa Chevreuil e

De Nate Parker, avec Nate Parker, Armie Hammer, Penelope Ann Miller… Sortie le 11.01

Entre les frontières Durant plusieurs années, le metteur en scène Chen Alon et le cinéaste Avi Mograbi ont animé un atelier de théâtre particulier. Au fil des séances, des demandeurs d’asile venus d’Afrique, internés dans un camp en plein désert du Néguev par les autorités, ont rapporté leur quotidien en Israël. De cette expérience est né Entre les frontières. Le titre renvoie d’abord à la situation d’exclusion vécue par les exilés dont le cours de la vie est suspendu. Mais cet "entredeux" est aussi un territoire propice à la rencontre. Pour cela, il faudra inverser les rôles, accepter de se glisser dans la peau de l’autre. Le cinéma donne corps aux utopies dans ces lieux de transit et oubliés, où d’aucuns voudraient confiner les êtres. Raphaël Nieuwjaer Documentaire d’Avi Mograbi. Sortie le 11.01



Le Levrai vraidu dufaux faux––Rencontre Rencontre6060

A lire

Escroqueries légendaires et autres histoires de la délinquance astucieuse Eric Yung, éd. Cherche Midi, 228 p., 14,50 €


Ce sont des artistes du mensonge, des rois de l’esbroufe. Dans Escroqueries légendaires et autres histoires de la délinquance astucieuse, le journaliste Eric Yung dresse le portrait de filous qui ont amassé des fortunes en vendant la Tour Eiffel ou des appartements au Paradis. L’ancien flic de l’anti-gang, au 36 Quai des Orfèvres, traque pour nous ces personnalités hors normes. Surveillez bien vos poches… Comment ce livre est-il né ? J’aime raconter des histoires et pour cela j’ai besoin de beaux personnages. Les escrocs sont souvent des gens extraordinaires qui, même s’ils avaient été honnêtes, seraient connus car ils ont tous un vrai talent. On peut parler de génie pour certains, même si c’est délicat car ils servent le "Mal". Tel Romulus Brinkley… Oui, cet individu né à la fin du xix e siècle nourrissait une obsession : devenir médecin. Il menait une vie aventureuse, vendait des potions magiques embarqué sur un chariot à travers les États-Unis. Il a rencontré

« ROMULUS BRINKLEY A RÉALISÉ 5 000 GREFFES DE TESTICULES DE BOUC » d’autres escrocs qui lui ont expliqué comment devenir docteur sans suivre d’études, et a finalement "réalisé" son rêve. C’est épouvantable car cette escroquerie, et c’est rare, a fait plusieurs morts. Comment ? Il promettait de soigner les hommes manquant de virilité… en leur greffant des testicules de bouc !


Il a réalisé plus de 5 000 opérations chirurgicales en 16 ans, et n’a jamais été poursuivi, étant soutenu par des réseaux. Plus incroyable : il est considéré aux États-Unis comme un héros, car il fut l’un des premiers grands riches américains. Il possédait une radio nationale, a construit des dizaines de cliniques… Sa maison, située à la frontière mexicaine, est aujourd’hui un musée. Quel serait le personnage le plus pittoresque ? Le Tchèque Victor Lustig, qui a vendu en 1925 la Tour Eiffel en pièces détachées. Il faut dire que l’époque était propice à ce genre d’arnaques : le monument ne faisait pas l’unanimité. Tout le monde voulait le voir disparaître… Quand Lustig est arrivé à Paris, il a discrètement lancé un appel d’offres et l’a revendue à un ferrailleur, qui n’a jamais porté plainte par peur du ridicule…

VE N

D U

Victor Lustig est finalement mort à Alcatraz où était enfermé Al Capone... qu’il a d’ailleurs réussi à escroquer en lui volant 600 000 dollars !

Affaire révélée en 1983 par le Canard Enchaîné.

En France, on se souvient aussi des "avions renifleurs"… Oui, ou quand deux zozos font croire à une compagnie pétrolière nationale, Elf, et au gouvernement français, qu’on peut détecter du pétrole depuis le ciel, grâce à un avion équipé d’un appareil qu’ils ont inventé, d’où le terme d’avions renifleurs. Ils ont réussi à convaincre des experts et le gouvernement de Valéry Giscard d’Estaing ! Pour financer leurs "recherches", ils ont obtenu des commissions colossales, près d’un milliard de francs (soit environ 180 millions d’euros). Quelques arnaques sont "mignonnes", comme celle agrandissant le pénis… Oui, dans les années 1990 on trouvait ces annonces un peu étranges dans des journaux populaires français. Celle-ci promettait aux messieurs mécontents de leurs attributs de voir leur pénis s’agrandir, garantissant un remboursement si l’offre ne donnait pas satisfaction – 500 francs à l’époque. Beaucoup d’hommes se sont précipités sur cette publicité… et ont reçu une loupe !


63

De toutes ces histoires, laquelle a votre préférence ? Il y en a une très poétique. Celle d’une célèbre voyante au Brésil dans les années 1960 : Leonarda Da Silva. Elle a réussi à vendre très chers des appartements au Paradis, en cédant à ses "clients" une clé en mousse.

« PLUS L’ESCROQUERIE EST ÉNORME ET MIEUX ELLE FONCTIONNE »

A-t-elle été condamnée ? La Cour suprême ne pouvait pas la punir. Pour cela, il fallait affirmer que madame Da Silva vendait quelque-chose d’illusoire… en rejetant catégoriquement l’idée du Paradis. Or un tribunal ne peut pas nier l’existence de Dieu ! Elle a ainsi été acquittée. Ces escroqueries fonctionnent car leurs auteurs vendent avant tout du rêve, non ? Oui, mais les victimes sont aussi nourries par l’appât du gain. C’est toute l’ambiguïté de l’escroquerie. La victime est quasiment toujours consentante, devenant même complice. Je dirais que sa punition est presque morale… Quels sont les points communs entre ces escrocs ? Une imagination remarquable doublée d’un bagou et d’un culot fou.

Plus l’escroquerie est énorme et mieux elle fonctionne. Et puis, à l’inverse des autres truands, l’escroc est discret, ressemble à monsieur-toutle-monde. Il jouit d’une certaine "sympathie", n’est-ce pas ? Oui. Quand on en n’est pas victimes, ces escroqueries sont amusantes. Généralement, elles sont réalisées "proprement", sans violence. Peutêtre que, dans notre subconscient, chacun de nous aimerait être un escroc, ce personnage capable de tout. Mais remarquons tout de même que peu d’entre eux ont échappé à la prison… Nuts !, documentaire sur Dr John Romulus Brinkley, réalisé par Penny Lane (2016).



Le vrai du faux – Portrait 65

GUY

RIBES La Grande illusion

Texte Julien Damien Photo Guy Ribes, Un Vrai faussaire © Jean-Luc Leon / Pretty Pictures

Durant trente ans, Guy Ribes a inondé le marché de l’art de toiles qu’il réalisait "à la manière" des grands maîtres. Pas n’importe lesquels : Picasso, Renoir, Dali… Il est sans doute le plus grand faussaire jamais découvert en France. Rencontre avec un peintre voyou. Guy Ribes, c’est un peu Depardieu dans un film de Blier. Pour situer : un type affublé d’une pipe et d’un chapeau, tout en rondeur et en gouaille. À bien des égards, notre homme aurait aussi pu être comédien. Ce qu’il fut un peu d’ailleurs : c’est lui qui prête ses mains à Michel Bouquet dans Renoir de Gilles Bourdos (2013). Mais c’est dans un autre domaine qu’il s’est fait un nom : la peinture.

Dans un registre très particulier… Guy Ribes est sans doute le plus grand faussaire français. Interpellé en 2005 puis condamné en 2010, il a purgé sa peine, comme on dit. Durant trente ans, il fut tour à tour Picasso, Matisse, Chagall, Modigliani, Léger… On en passe. « J’ai imité près de 200 peintres », clame celui qui se définit comme un artiste.


Faux Raoul Dufy. Documentaire Un Vrai Faussaire © Jean-Luc Leon / Pretty Pictures.

« Attention ! Je n’ai jamais réalisé de copies, je créais des tableaux qui n’existaient pas ». Ses œuvres sont exécutées "à la manière de". Comme si les grands maîtres les avaient euxmêmes imaginées. Son talent a dupé les plus grands spécialistes – et même les proches de Chagall ! Son secret ? « Je me documentais énormément, j’arpentais les musées. J’étais aussi en contact avec des galeristes qui possédaient de vraies toiles. J’en empruntais certaines pour m’en imprégner, confie-t-il. Ensuite, je me glissais dans la peau de ces peintres. Plus que la technique, c’est l’âme qui est difficile à saisir ».

Bordel Guy Ribes a pourtant grandi loin des pinceaux. Plus précisément dans une maison close, à Roanne. Un père

proxénète, une mère gitane qui deviendra voyante… « Quand mes parents ont été arrêtés suite à la loi Marthe Richard*, j’ai été placé chez les jésuites. C’est là qu’on m’a initié à la peinture ». À 15 ans, le voilà apprenti dans un atelier de soierie, à Lyon. Il dort à l’occasion sur les banquettes des rades du coin, fréquente le "milieu". « Un jour, des types m’ont demandé de brosser le portrait d’une vieille dame. J’ai découvert ensuite qu’il s’agissait de la mère du parrain corse "Mémé" Guérini ». Il devient alors le peintre des voyous. Quelques années plus tard, installé dans le Sud de la France, il enchaîne les aquarelles. Des marines, des paysages… Mais, les choses sérieuses débutent dans les années 1980, suite à la rencontre d’Henri Guillard. Celui-ci possédait une imprimerie à Paris ou Guy


Faux Marc Chagall Faux Fernand Léger

Ribes tirait ses lithographies. « Une fois je lui ai ramené une gouache de Chagall que j’avais peinte comme ça, puis un Picasso… ». Guillard l’encourage, puis lui présente un certain Léon Amiel. « C’était LE marchand de Chagall ! ». À eux trois, il vont inonder le marché de l’art. Et s’en mettre plein les fouilles… Un Matisse qu’on lui achetait 10  000 euros pouvait être revendu plusieurs millions. Notons que la justice saisira environ 400 toiles… Sans doute la partie émergée de l’iceberg : on estime à plusieurs centaines, voire milliers, le nombre de ces faux en circulation. Certains (beaucoup ?) resteraient accrochés dans des galeries ou des musées… « J’ai gagné énormément d’argent, j’ai tout craqué et j’ai bien fait car on m’aurait tout pris ! ».

* Loi qui imposa la fermeture des "maisons de tolérance".


Le vrai du faux – Portrait 68

Des pieds nickelés Les ennuis commenceront à la disparition de ses complices. « Henri et Léon sont morts à un mois d’intervalle, le rêve était fini… C’étaient des gens qui aimaient l’art, on sortait de la haute qualité, aucun tableau ne nous a jamais été retourné, se souvient-il. J’ai été arrêté parce que les derniers types pour qui je travaillais étaient des rigolos, obsédés par l’argent. Les toiles étaient médiocres, ça a pété de partout ! ». Notre homme n’est pas dupe : « Je savais que la police me suivait depuis un bail, mais elle ne pouvait pas me coincer car je ne vendais pas. Aucune loi ne m’interdit de concevoir un Picasso chez moi, si je n’en fais pas commerce… ». Et puis ce qui devait arriver arriva. Le 5 janvier 2005, tout s’achève brutalement. Les policiers interpellent un de ses clients à la sortie d’une brasserie où ils concluaient une transaction. Dans le coffre de sa

voiture ils découvrent des œuvres signées Dali, Vlaminck… « Quand ils m’ont arrêté, j’étais presque soulagé », confesse l’ex-faussaire. Durant 30 ans, notre homme s’était effacé derrière les grands maîtres, au point de se perdre lui-même. « Je suis devenu peintre le jour de mon arrestation » aime-t-il à déclarer. Douze ans plus tard, à 68 balais, Guy Ribes est rangé des mauvais coups. Il a écrit son autobiographie, vend sa propre peinture, tendance abstraite. Il s’est aujourd’hui fait un autre nom. Le sien.

A visiter : www.facebook.com/guy.ribes.77 A voir : Un vrai faussaire, documentaire

de Jean-Luc Leon (Pretty Pictures), 16,35 €, prettypictures.fr

A lire : Autoportrait d’un faussaire, Guy Ribes & Jean-Baptiste Péretié, Presses de la Cité, 240 p., 19 €, www.pressesdelacite.com Retrouvez l’interview de Guy Ribes sur www.lm-magazine.com

Guy Ribes dans le documentaire Un Vrai Faussaire © Jean-Luc Leon / Pretty Pictures



View of the show - Ceci n’est pas une copie © CID au Grand-Hornu © Photo : David Marchal Fauteuil gauche : Smoke, Studio Maarten Baas / Fauteuil droit : Mal Clapchair, MAL furniture


Le vrai du faux – Exposition 71

Ceci n’est pas une ©opie De la triche dans les idées Texte Julien Damien Photo Assiettes de Mia Grau et Andree Weissert © L’astrolab

« Les bons artistes copient, les grands artistes volent », affirmait Pablo Picasso – dont la citation fut plagiée à tire-larigot ! Mais qu’est-ce que la copie ? Où s’arrête l’inspiration et où commence le pillage ? Derrière un clin d’œil à Magritte, cette exposition pose à travers le design une question plus complexe qu’il n’y paraît.

«À

l’école, on nous interdit de copier… sauf sur le maître ! », s’amuse Chris Meplon, commissaire de cette exposition. Oui, cette journaliste spécialiste du design a l’esprit de contradiction. C’est ce qui l’a poussé à s’intéresser à la question. Pas si simple à bien y réfléchir : où s’arrête l’imitation et où commence l’innovation ? L’influence n’est-elle pas inhérente à la création ? « Je ne veux pas définir précisément la copie, mais démontrer l’impossibilité d’affirmer ce qui en relève ou pas ». Telle une archéologue, la Flamande a épluché l’histoire de nombreux objets, révélant çà et là de troublantes coïncidences. En étudiant les relations Est-Ouest, elle met par exemple à mal la mauvaise réputation des Chinois… Ces assiettes des Allemands Mia Grau et Andree Weissert, arborant des motifs de centrales nucléaires, nous rappellent que les copieurs n’ont pas toujours été du même côté.


Loeschner, Bert, The Dudes, edition limitée, 2011. Polypropylène © BertCollection LoeschnerAW16 Fragmances, Unisex

DES LIVRES, POUR ALLER PLUS LOIN :

Le plus illustré

Copy Paste, de Joe la Pompe (Maison Moderne), 228 p., 39,90 €

Le plus sérieux

Droit d’auteur et Copyright, de Françoise Benhamou, Joëlle Farchy (La Découverte), 128 p., 10 €

Le plus décapant

La Guerre du faux, de Umberto Eco (Grasset), 420 p., 11,65 €

Blank – Visages © DR

Au xvie siècle, les Européens, incapables de percer les mystères de la porcelaine de Chine, l’ont longtemps imitée en produisant des ersatz, telle la faïence de Delft. Idem pour ces chaises de l’époque Ming aux dossiers en forme de fer à cheval… qu’on perçoit 700 ans plus tard dans le travail des frères Bouroullec et plus explicitement dans celui du Danois Hans Wegner. « Voilà une grande référence scandinave qui s’est clairement inspirée de cet archétype oriental…». Bref, l’histoire du design (comme celle de la musique ou de la littérature) est marquée par une longue série d’emprunts.

Sublimer Mais copier, n’est-ce pas aussi "actualiser" un objet ? Le remettre au goût du jour ? Tenez : cette célèbre lampe


La lampe de G. Carwardine sous toutes ses formes © Photo : Julien Damien

de bureau au bras articulé. Inventée par l’Anglais George Carwardine, en 1932, elle a donné lieu à moult "déclinaisons" adaptées à différentes modes et époques, telle cette version multicolore de Paul Smith, ou encore celle en bois du duo TAF. La dernière salle nous apprend que la copie peut aussi former un hommage. Le Hollandais Maarten Baas s’est ainsi attaqué à la fameuse chaise de jardin en plastique blanc, dénigrée par les designers, mais en la réinterprétant en bois massif. Sa réplique ne sublimet-elle pas l’originale ? N’invente-telle pas autre chose ? En résumé, cette œuvre ne nous invite-t-elle pas à revoir notre… copie ? CECI N’EST PAS UNE COPIE. DESIGN ENTRE INNOVATION ET IMITATION HORNU – jusqu’au 26.02, Centre d’innovation et de design, mar > dim : 10 h > 18 h, 8 > 2 € / gratuit (- 6ans), www.cid-grand-hornu.be

Eames, Charles & Ray, Walnut stool, 1960, Herman Miller, Vitra, bois massif © Charles & Ray Eames © Vitra



Exposition – Sélection 75

Jeanloup Sieff En pleine lumière

Texte Julien Damien Photo Serge Gainsbourg et Jane Birkin. Paris, 1970 © Estate Jeanloup Sieff

Le Musée de la Photographie de Charleroi consacre une rétrospective à Jeanloup Sieff, disparu en 2000. Disposés chronologiquement, près de 180 de ses clichés dévoilent une œuvre foisonnante, nous conviant au milieu d’une pléiade de stars, de modèles exaltant la beauté de la femme, de paysages lunaires… Voyage au cœur des années lumière. On s’est tous un jour ou l’autre arrêtés devant une photographie de Jeanloup Sieff. Ses tirages en noir et blanc de mode, de nus féminins ou ses portraits des icônes du siècle passé restent ancrés dans notre histoire moderne. Citons ce cliché d’Yves Saint Laurent nu et assis en tailleur qui fit scandale en 1971, celui d’un Coluche songeur ou encore de Serge Gainsbourg et Jane Birkin tendrement enlacés. Pour Xavier Canonne, directeur du Musée de la Photographie, « Sieff, c’est le parfum d’une époque ». Celle des Trente Glorieuses, glamour et légères. Pour autant, ce baroudeur qui se prétendait « superficiel et frivole » aura à bien des égards révolutionné la photographie. Dans le cadrage par exemple : « il a imposé dès les années 1960 l’idée que le sujet principal ne devait pas nécessairement se situer en avant-plan ». Halo Au-delà de ses compositions géométriques parfaites, la « patte Sieff » s’incarne aussi dans ce halo blanc habillant ses sujets, tel Alfred Hitchcock poursuivant toutes griffes dehors un mannequin dans le décor de Psychose. Une auréole lumineuse que l’on aperçoit dès 1959 autour des terrils qu’il capture dans le Borinage, lors d’un reportage immortalisant les mineurs belges. Celui-ci lui vaudra le prix Niépce, trois ans après un certain Doisneau. Oui, « il faut beaucoup de talent pour offrir l’apparence JEANLOUP SIEFF. LES ANNÉES LUMIÈRE // BORINAGE. 1959 d’un photographe léger ». CHARLEROI – jusqu’au 07.05, Musée de la Photographie, mar > dim : 10 h > 18 h, 7 > 2 € / gratuit (-12 ans), www.museephoto.be


Extension du domaine de la pub Vincent, Thomas, Maximilien : les trois artistes du collectif VinThoMax ont fait de leurs prénoms une marque, le temps d’une installation questionnant les mutations de la publicité. Voici une exposition conçue pour l’espace d’art contemporain Le Carré (Lille)… à parcourir d’un coin à l’autre. Ville érigée en canettes, réclames tournées dans la lumière blême d’intérieurs cafardeux, panneaux camouflés soulignant la vacuité d’une architecture au rabais… De la vertu des images s’en prend à la pub sous toutes les coutures. Pour bâtir leur réflexion, les trois artistes ont joué de leur complémentarité, dans une joyeuse anarchie. L’installation se révèle ainsi en mosaïque anonyme. « On assiste aujourd’hui à une désaffection des annonceurs vis à vis des supports traditionnels au profit du numérique », explique Vincent Bergerat. Il interroge ainsi les conséquences positives de cette dématérialisation comme le retrait progressif des nuisances visuelles dans l’espace public. Thomas Sabourin préfère le travail du bois et la sociologie. Selon lui, la ville se déploie comme un parcours dédié au commerce de masse : « N’avez-vous jamais remarqué que les panneaux 4 x 3 m sont implantés dans les zones fréquentées par les classes moyennes ? Trop moche pour les riches, trop cher pour les pauvres ». Maximilien Ramoul tourne lui en dérision les injonctions au bonheur véhiculées par la pub dans des vidéos absurdes. Son visage démultiplié n’est autre que celui imprimé sur les bouteilles de bière Vedett, parteLILLE – jusqu’au 29.01, Espace Le Carré, naire de cette exposition... Le paradoxe de mer > dim : 14 h > 19 h (et sur rendez-vous), la récupération ? Flora Beillouin gratuit, www.elc.mairie-lille.fr

Vue d’exposition © DR

VINTHOMAX



Bikini, Moscow, 1959 © William Klein / Courtesy Polka Galerie, Paris / Gallery FIFTY ONE, Anvers

Exposition – Sélection 78

William Klein. 5 Cities Des femmes obèses posent dans un bain public tandis qu’un gamin nous vise avec un flingue... Pas de doute : voilà une expo qui déménage ! Considéré comme l’un des pères de la "street photography", William Klein s’est vite démarqué des préceptes documentaires érigés par Cartier-Bresson. Pris au grand angle et près des sujets, ses clichés en noir et blanc, flous ou décadrés, suintent l’humour noir et la violence. Cette rétrospective révèle des images prises à New-York, Rome, Moscou, Tokyo et Paris, mais aussi des tirages peints (le "bad boy" fut élève de Fernand Léger) et un artiste qui pousse depuis les années 1950 la photo hors de son cadre. J.D.

Miroirs Révélateur ou trompeur, le miroir demeure un objet familier de l’histoire de l’art. Une trentaine d’œuvres issues de l’Antiquité à nos jours en révèlent ici les multiples facettes. Il reste bien sûr l’accessoire de beauté, comme le montre cette eau forte de Marcel Gromaire, mais est aussi synonyme de vérité et surtout d’illusion : citons le facétieux Markus Raetz, dont les glaces font apparaître une image différente de l’objet reflété ! À réfléchir… J.D. LENS – jusqu’au 18.09, Louvre, tlj sf mar : 10 h > 18 h, gratuit, www.louvrelens.fr

Marie-Geneviève Bouliar, Autoportrait en Aspasie, 1794 © Arras, Musée des Beaux-Arts / Bridgeman Images

BRUXELLES – jusqu’au 05.02, Botanique, mer > dim : 12 h > 20 h, 5,50 > 3,50 €, botanique.be



Volledig Beeld © Benoit Lapray

Exposition – Sélection 80

Adoption Quel rapport entre Tarzan, Moïse, Surperman ou Luke Skywalker ? Eh bien ces « héros » ont tous été recueillis. Installé au cœur du plus ancien asile de Belgique, le Musée Dr.Guislain aborde la délicate question de l’adoption. Entre art et science, à travers des œuvres contemporaines, documents ou témoignages réels, cette exposition tisse des liens entre les mythes, la culture populaire et l’histoire d’une procédure ô combien d’actualité. J.D. GAND – jusqu’au 16.04, Musée Dr.Guislain, mar > ven : 9 h > 17 h, sam & dim : 13 h > 17 h, 8 >1 € / gratuit (-12 ans), www.museumdrguislain.be

© IRSNB - Thierry Hubin

Poison Des mygales velues, des serpents de toutes les couleurs, des grenouilles qu’il ne vaut mieux pas embrasser... Répartie dans 24 terrariums derrière des vitres blindées (!), une centaine de bestioles bien vivantes et venimeuses révèle toutes les facettes du poison. Si certaines peuvent nous liquider en moins de deux ou causer des hallucinations, d’autres nous sauveraient la vie. La toxine de ce mocassin à tête cuivrée (une vipère) aurait ainsi le pouvoir d’enrayer le cancer, quand le venin du monstre de Gila régule notre taux d’insuline. Moches, mais sympas. J.D. EN FAMILLE BRUXELLES – jusqu’au 03.09, Muséum des sciences naturelles, mar > ven : 9 h 30 > 17 h, sam & dim : 10 h > 18 h, 9,50 > 4,50 € / gratuit (-6 ans), www.naturalsciences.be



Exposition – Sélection 82

SAUL LEITER Snow, 1960 © The Estate of Saul leiter

Pionnier de la photographie couleur, l’Américain Saul Leiter (1923 - 2013) fut toutefois longtemps méconnu. Son travail personnel, mené dans la rue, fut redécouvert au milieu des années 1990. Depuis, il est unanimement salué. Cette rétrospective rassemblant près de 300 œuvres honore un artiste dont les clichés ressemblent à des peintures (on pense à Rothko), bouleversant notre regard sur la ville. ANVERS – jusqu’au 29.01, Fomu, mar > dim : 10 h > 18 h, 8 > 3 € / gratuit (-18 ans), www.fotomuseum.be

SACREBLEU

L’ART DE LA COUVERTURE

Voilà une exposition haute en couleur. Celle-ci se penche sur l’utilisation du bleu dans l’histoire de l’art, du Moyen Âge à nos jours, à travers des peintures, dessins, sculptures… De Jean Pénicaud à Jan Fabre, en passant par Picasso ou Yves Klein – qui fit breveter le sien – nombre d’artistes furent épris du bleu. Le parcours retrace sur plus de 600 m2 son aspect historique, technique et symbolique, qu’il soit azur, indigo, turquoise, ou lapis-lazuli.

Que l’on ait lu ou non ces albums, on a tous à l’esprit l’image d’On a marché sur la Lune, signée Hergé, ou de La Marque jaune, par Edgar P. Jacobs. Ni chronologique ni exhaustif (tâche impossible), l’accrochage se penche sur les étapes de la conception d’une couverture, du premier jet à l’achèvement, en passant par la composition, le choix des couleurs… Enrichi de vidéos très instructives, il réunit des dizaines de moyens et grands formats qui ont marqué l’histoire de la BD.

ARRAS – Jusqu’au 06.02, Musée des Beaux-Arts, lun, mer, jeu & ven : 11 h > 18 h, we : 10 h > 18 h 30, 6 / 3 € / gratuit (-18 ans), arras.fr

BRUXELLES – jusqu’au 28.05, CBBD, tlj : 10 h > 18 h, 10 > 3,50 €, www.cbbd.be

METAMORPHIC EARTH & PANORAMA Œuvre de Nadine Hilbert et Gast Bouschet, Metamorphic Earth plonge le visiteur dans un monde inquiétant via des vidéos et constructions sonores complexes. Il s’agit d’interroger les métamorphoses de la Terre, à l’heure de l’anthropocène. Soit une ère où l’activité humaine aura modifié plus de la moitié des écosystèmes mondiaux. En parallèle, Panorama magnifie notre belle planète grâce à des créations contemporaines revisitant le genre du paysage. Deux accrochages complémentaires et nécessaires. CHARLEROI – jusqu’au 22.01, BPS22, mar > dim : 11 h > 19 h, 6 > 3 € / gratuit (-12 ans), bps22.be


Mots-Choisir la couleur qui a le mot juste, 2007 © Archives P. A., Bougival / Photo F. Charron

REBEL REBEL Bien plus qu’une exposition dédiée à un courant musical, Rebel Rebel porte un regard politique, économique et anthropologique sur notre société. Il ne s’agit pas ici de se prosterner devant des reliques de l’histoire du rock, mais de convoquer son esprit (punk, révolté, jeune). Peintures, installations, sculptures, photos ou vidéos interrogent notre quête d’identité, posent la question de la dévotion et de notre désir de rébellion ! HORNU – jusqu’au 22.01, mar > dim : 10 h > 18 h, 8 > 2 € / gratuit (-6 ans), mac-s.be

CHRISTIAN VOLTZ. POÉSIE BIDOUILLÉE

ALECHINSKY. MARGINALIA, PLUME ET PINCEAU

Bienvenue dans un monde en fil de fer, carton et bouts de tissu ! Auteur et illustrateur de livres pour enfants, voilà plus de 20 ans que Christian Voltz conte des histoires peuplées de petits personnages conçus avec des matériaux de récupération. Entre les jouets revisités à la sauce bidouille (un aspirateur-fusée, un garage en bidons…) ou ses drôles de bonshommes et animaux, on découvre aussi des céramiques, des gravures… soit les multiples facettes d’un inventeur génial.

Pierre Alechinsky est réputé pour son travail mêlant expressionnisme et surréalisme. C’est toutefois une facette plus méconnue du Belge qui nous est dévoilée ici : son œuvre autour des mots. Un retour aux origines pour celui qui a d’abord étudié l’illustration du livre à La Cambre, à Bruxelles. On découvre ainsi des images accompagnant des ouvrages de Balzac ou Michel Butor, des gravures et lithographies réalisées avec ses amis écrivains ou ces encres inspirées par les vers de Cendrars.

LAMBERSART – jusqu’au 26.02, Le Colysée, mer > sam : 13 h > 18 h, dim : 13 h > 19 h, gratuit, lambersart.fr

LE CATEAU-CAMBRÉSIS – jusqu’au 12.03, Musée Matisse, tlj sf mardi : 10 h > 18 h, 5 / 3 € /  gratuit (-18 ans), museematisse.lenord.fr

EN FAMILLE

L’HISTOIRE COMMENCE EN MÉSOPOTAMIE La Mésopotamie – peu ou prou l’Irak – demeure le berceau de l’économie et de l’écriture, là où commence l’Histoire, donc. C’est cette civilisation méconnue que le Louvre-Lens met à l’honneur via 400 objets couvrant une période de… 3 000 ans ! On y découvre ainsi cette figurine en bronze du démon Pazuzu (oui, celui du film L’Exorciste) ou cette tablette dite « de l’Esagil », qui a inspiré le mythe de Babel. Voilà ce qui s’appelle remonter le temps. LENS – jusqu’au 23.01, Louvre, tlj sauf mardi : 10 h > 18 h, 10 / 5 € / gratuit (-18 ans), www.louvrelens.fr


Exposition – Sélection 84

Le Musée du Touquet-Paris-Plage consacre une grande rétrospective à un pionnier du street-art français. Speedy Graphito s’est fait connaître dès les années 1980 avec ses graffs détournant la culture populaire. Celui qui se définit comme un « DJ des arts plastiques », jonglant avec la photo, la peinture, la sculpture, invente un monde où Picsou tague tandis que BlancheNeige croque la pomme d’Apple. Ses œuvres interrogent notre mémoire collective, l’histoire de l’art ou le consumérisme. LE TOUQUET – jusqu’au 21.05, tlj sf mardi : 14 h > 18 h, 3,50 / 2 € / gratuit (-18 ans), www.letouquet-musee.com

GÉRARD GAROUSTE Des corps tortueux hantent les toiles immenses de leurs anamorphoses. Les membres sens dessus dessous, en apesanteur, semblent arrachés aux couleurs magnétiques du fond (violet épiscopal, rouge sang). Des visages angoissés, euphoriques, se mêlent aux bestiaires mythiques... Voici un parcours inédit à travers le monde extatique du peintre français. Rassemblant près de 80 œuvres – huiles sur toile, gravures, dessins, gouaches, sculptures – celui-ci traduit la pensée d’un illustre "intranquille". MONS – jusqu’au 29.01, BAM (+ salle SaintGeorges), mar > dim : 10 h > 18 h, 9 / 6 € /  gratuit (-12 ans), www.bam.mons.be

TRIENNALE INTERNATIONALE DE L’AFFICHE POLITIQUE Rendez-vous incontournable des graphistes de la planète depuis 1978, cet événement donne à voir 115 affiches traitant, souvent avec humour, des sujets en rapport avec l’actualité (le terrorisme, l’immigration ou l’écologie). Disposées sur des murs ou colonnes Morris de façon thématique, ces images "coup-de-poing" dévoilent une belle diversité de techniques : graphisme, dessin, photographie ou création numérique. MONS – jusqu’au 25.06, Mons Memorial Museum, mar > dim : 10 h > 18 h, 3 €, monsmemorialmuseum.mon

GEORGES DORIGNAC (1879 - 1925). LE TRAIT SCULPTÉ Soutenu par Modigliani ou Soutine, Georges Dorignac demeure une figure inclassable du début du XXe siècle. Les dessins du Bordelais, exécutés à la sanguine ou au fusain, semblent avoir été sculptés dans le papier. Ses grandes feuilles montrent des nus ou des portraits, souvent de travailleurs et de paysans. Surtout, elles illustrent le fascinant équilibre entre la lumière, l’ombre ou les volumes que maîtrisait cet artiste méconnu. ROUBAIX – jusqu’au 05.03, La Piscine, mar > jeu : 11 h > 18 h, ven : 11 h > 20 h, we : 13 h > 18 h, 5,50 / 4 € /  gratuit (-18 ans), www.roubaix-lapiscine.com

Sprayground, 2011 © Speedy Graphito

SPEEDY GRAPHITO, UN ART DE VIVRE



Théâtre & danse – Événement 86

Vivat la danse ! Les retrouvailles

Nos Amours © Adrien Selbert


Le Syndrome Ian © Marc Coudrais

Depuis 20 ans, Vivat la danse ! est le meilleur moyen d’engager la nouvelle année à Armentières. Pour cet anniversaire, le festival suspend la thématique qui traverse habituellement sa programmation au profit d’un dialogue enthousiasmant entre prestigieux « anciens » et nouvelle génération.

D

éjà à l’origine de Danse à Lille, Eliane Dheygere a créé Vivat la

danse ! dès son arrivée à la tête du Vivat, en 1994. 1994 ? « C’est vrai, ça fait plus de 20 ans, mais à sa création le festival était biennal, éclaire la directrice de cette institution. Pour la première édition, nous avions réuni 22 compagnies de 22 régions de France. Et cela a failli s’appeler "22, v’la la danse" ! », se souvient-elle dans un éclat de rire. Si ce principe régionaliste a été rapidement abandonné, Vivat la danse ! s’est imposé

comme un festival défricheur, révélant et accompagnant dans la durée de grands chorégraphes. « J’ai voulu réunir tous ces talents que nous avons vu grandir » insiste Eliane. Retour en force Désormais auréolés de carrières internationales, les « compagnons de route » ont tous répondu présent. De Julie Nioche, cherchant les traces des amours passées dans les corps (Nos amours) à Mylène Benoit, concentrée sur nos mouvements involontaires (La maladresse)… ☞


Théâtre & danse – Événement 88

De son côté, Christian Rizzo donne à voir Le syndrome Ian, sorte de transe perpétuelle s’inspirant des codes du clubbing, traversée par la figure de Ian Curtis, le chanteur de Joy Division. Citons aussi Antoine Defoort, qui crée pour le festival la nouvelle pièce de sa compagnie L’Amicale de production (On traversera le pont une fois rendus à la rivière). « Il est question de l’adaptation de nos modes de vie à la révolution numérique, mais c’est aussi une réflexion sur le rôle du spectacle et du spectateur », explique la directrice, revendiquant l’ouverture du festival à plus de performances. Mais ce cru 2017 ne se contente pas d’offrir un écrin aux habitués. Des petits nouveaux s’emparent des espaces armentiérois. Un exemple ? La Coop du lycée Eiffel accueille à quelques jours d’intervalles une proposition

inédite d’Yves-Noël Genod autour de Proust (Remise Venise) et la danse puissante du jeune Syrien Mithkal Alzghair (Déplacement), sur le thème de l’exil. On leur donne rendez-vous dans vingt ans ? Marine Durand VIVAT LA DANSE ! ARMENTIÈRES (ET LILLE) – 21 > 28.01, Vivat, Coop du lycée Eiffel, Hôtel de ville d’Armentières, Maison des Artistes, Opéra de Lille (Le Syndrome Ian, de Christian Rizzo), 7 € / spectacle, pass 11 spectacles : 49 €, levivat.net

Programmation

Remise Venise, Yves-Noël Genod (21.01) / La maladresse, Mylène Benoit (21.01) / Pourquoi mes cheveux avec en poche : danse ton nom, Sabine Macher (21.01) / On traversera le pont une fois rendus à la rivière, A. Defoort, J. Fournet, M. Maillard et S.Vial (21 & 22.01) / Vieil, Jean Le Peltier (22.01) / Improvisation, Boris Charmatz & Médéric Collignon (24.01) / Tapis rouge, Nadia Beugré (24.01) / Déplacement, Mithkal Alzghair (25.01) / (Sans titre) (2000), Tino Seghal & Boris Charmatz (25.01) / Os serrenhos do calderaio, Vera Mantero (26.01) / Nos amours, Julie Nioche, A.I.M.E (26.01) / Le syndrome Ian, Christian Rizzo (27.01) / Avant toutes disparitions, Thomas Lebrun (28.01) / Le jour de la bête, Aina Alegre (28.01)…

Avant toutes disparitions © Frédéric Iovino



Les Bienveillantes

Voyage au centre de l’immonde

Texte Julien Damien Photo Kurt Van der Elst

Dans Les Bienveillantes, Jonathan Littell décrit la Shoah du point de vue du bourreau, nous plongeant dans les mémoires fictives d’un officier nazi. En portant sur scène ce troublant roman, prix Goncourt en 2006, Guy Cassiers donne un visage à l’humain qui se terre dans le monstre. Et inversement. « Je ne regrette rien : j’ai fait mon travail, voilà tout ». Seul face au public, Max Aue nous prend à témoin. « Je suis comme vous » assure l’ex-SS, avant de nous emmener dans ses souvenirs nauséabonds. Pour condenser ce roman de 1 000 pages en une pièce de trois heures et demie, Guy Cassiers s’est focalisé sur trois moments clés du parcours du nazi. On le suit d’abord à Kiev, où il décrit


les massacres des Juifs, puis dans la bataille (perdue) de Stalingrad et enfin à Berlin. C’est là que Max assiste à l’organisation de la « solution finale » avec Eichmann et Himmler. Écho Sur un plateau épuré, traversé par des rails, le metteur en scène flamand dresse le portrait d’un homme aux prises avec ses cauchemars, lesquels sont vidéoprojetés sur un écran descendant du plafond. L’horreur, elle, n’est jamais montrée mais suggérée, notamment par cette montagne de chaussures de morts. Car la violence est ailleurs. Elle réside dans le langage qui déresponsabilise les bourreaux (on ne dit pas « on décide » mais « il a été décidé… ») et déshumanise les victimes, en l’occurrence les Juifs, ces « virus » qui pourraient aussi bien être des migrants… En insistant sur l’identification du spectateur au monstre, Guy Cassiers explique comment un homme ordinaire, cultivé, peut participer aux pires atrocités. Décortiquant les mécanismes du Mal, il nous invite à rester vigilants à l’heure de la AMIENS - 27 & 28.01, Maison de la Culture, résurgence des extrémismes. ven : 19 h 30, sam : 19 h, 29 > 13 €, www.maisondelaculture-amiens.com (en néerlandais, sur-titré français)


Les premiers de la classe Qu’elle est belle, la rentrée du Théâtre du Nord ! Guillaume Deman et Kevin Lévêque, les deux metteurs en scène de la compagnie arrageoise Velum, succèdent au plus expérimenté Aurélien Bory, qui présente sa dernière création. Focus sur ces deux temps forts avec Anne-Marie Peigné, directrice des publics et du développement. Sur le papier, rien de commun entre le spectaculaire Espæce d’Aurélien Bory et Un jour en plus, la troisième création de Guillaume Deman et Kévin Lévêque. Dans le premier il est question d’espace, et dans l’autre du temps. L’un apprivoise le vide à l’aide d’une structure monumentale, d’un acteur, un acrobate, une chanteuse d’opéra, un danseur et une contorsionniste. Les autres inventent une fable futuriste avec trois comédiens. Mais leur programmation à quelques jours d’écart, l’un à Lille, l’autre à Tourcoing, témoigne de l’engagement du Théâtre du Nord envers les artistes innovants. « Aurélien Bory fait un peu partie de la famille, relève Anne-Marie Peigné. Il a travaillé plus de trois ans sur Espæce, un projet polymorphe et poétique à partir d’Espèces d’espaces de Georges Perec ». En accueillant Velum en résidence, la structure reste aussi fidèle à sa mission de Centre dramatique national. Le pitch est séduisant : tandis que la population s’enthousiasme pour la création d’un jour en plus dans la semaine, le gouvernement panique et coupe l’accès aux réseaux ESPÆCE, D’AURÉLIEN BORY LILLE – 04 > 08.01, Théâtre du Nord, mer & ven : sociaux. La résistance s’organise alors à 20 h, jeu & sam : 19 h, dim : 16 h, 27 > 7 € travers ce « vieux média » qu’est la radio. UN JOUR EN PLUS, DE LA COMPAGNIE VELUM TOURCOING – 11 > 15.01, Théâtre de l’Idéal, « Le résultat est une pièce intimiste et mer > sam : 20 h 30, dim : 16 h, 27 > 7 €, haletante ». Vive la rentrée ! Marine Durand www.theatredunord.fr

Espæce © Aglae Bory

THÉÂTRE DU NORD



Nancy Huston © Guy Oberson

Théâtre & danse – Sélection 94 ULTRAVIOLET, DE NANCY HUSTON & CLAUDE BARTHÉLEMY DUNKERQUE – 06.01, Le Bateau Feu, 20 h, 8 €, programme complet : www.lebateaufeu.com

DUNKERQUE – 04 > 28.01, Le Bateau Feu + divers lieux, 8 € > gratuit, www.lebateaufeu.com

Rêves de lecture Vous aimez la littérature ? La musique ? Alors vous adorerez les lectures musicales. Le principe est simple : un comédien interprète le texte d’un auteur (bien vivant) tandis qu’un musicien l’accompagne avec sa partition – au violoncelle, à la contrebasse, à la guitare… Chacune de cette trentaine de lectures n’excède pas 45 minutes. Il s’agit de sublimer la tonalité d’un récit mais aussi de découvrir d’une façon originale les œuvres de six auteurs contemporains. « Déclamés par la voix d’un autre, les mots peuvent révéler un sens, une nuance, que l’on n’aurait pas forcément perçus seul », assure Hélène Cancel, la directrice du Bateau Feu, qui pilote ce festival embrassant toute l’agglomération dunkerquoise : médiathèques, maisons de quartier, musées... Cette sixième édition favorise la transmission : « entre les générations, les membres d’une même famille, de valeurs ou de savoirs ». C’est la Canadienne Nancy Huston qui ouvre le bal. Une particularité : elle lira elle-même sa prose, soutenue par le jazzman Claude Barthélemy – considéré comme le guitariste le plus rapide de la planète ! Le duo sert un récit court, Ultraviolet, soit le journal intime d’une adolescente s’éveillant à l’âge adulte... Frissons garantis. J.D.


Ressacs © Alice Piemme

Week-End Poil à Gratter Le Centre André Malraux confie la 8e édition de son festival pourvoyeur de fous rires au Théâtre La Licorne. Mariant humains et objets, la compagnie dunkerquoise sert pour l’occasion un cocktail de spectacles baroques. Tandis que Macbêtes revisite Shakespeare façon polar avec des insectes, Bestioles de légende convoque d’étranges retraités du cinéma... En sus, on découvre des artistes partageant ce même style fantasque, telle la compagnie Les Petits Miracles, qui dompte une ménagerie de puces voltigeuses ou cracheuses de feu ! J.D. HAZEBROUCK – 20 > 22.01, Centre André Malraux, 10 > 4 €, 4 spectacles : 24 €, www.centreandremalraux.com Sélection : Sweet Home / Macbêtes, Théâtre La Licorne (20.01) // Bestioles de légende, Théâtre La Licorne / Les Puces savantes, Cie Les Petits Miracles... (22.01)

Les Enfants c’est moi © Fabien Debrabandere

Être Humain « Dans chaque être humain vit une colonie entière », disait Picasso. Culture Commune le prend au mot et saisit à travers dix spectacles la diversité de notre étrange espèce. Celle-ci peut être excentrique, telle cette femme perdue entre réel et imaginaire dans un monde peuplé de marionnettes (Les Enfants c’est moi). Triste, comme cet acrobate se soûlant et se lançant des défis insensés (BOI), mais lucide. Ainsi de la cie Les Trois Points de Suspension, révélant les dessous de la Françafrique dans un one-man-show documentaire déjanté. J.D. BASSIN MINIER DU PAS-DE-CALAIS – 10 > 21.01, divers lieux, 12 > 3 €, www.culturecommune.fr // Sélection : BOI, Cirque Galapiat (10 & 11.01) // Le Cri quotidien, Cie Les Anges au plafond (10, 11 & 12.01) // Les Enfants c’est moi, Cie Tourneboulé (12 & 15.01) // La Grande saga de la Françafrique, Les trois points de suspension (12 & 13.01) // Cie HVDZ & Les Tréteaux de France (17 & 18.01)…


© Hubert Amiel

Théâtre & danse – Sélection 96

Daral Shaga C’est l’histoire d’un voyage. Celui d’un père et de sa fille quittant leur pays pour un monde meilleur. Le triste récit d’une tragédie contemporaine : l’immigration et le déracinement. L’originalité de ce spectacle mis en scène par Fabrice Murgia tient dans le fait qu’il mêle à l’opéra le cirque, parfaite traduction du danger et de l’obstination propres aux réfugiés, traversant mille épreuves. Accompagnés de chants et de vidéos, les mots de Laurent Gaudé répondent à la musique de Kris Defoort, tandis que les acrobates de la compagnie Feria Musica escaladent des murs ou des grilles, tant de frontières aveugles les séparant de ce cher eldorado. J.D. BRUXELLES – 11 > 15.01, Théâtre National, mer : 19 h 30, jeu, ven & sam : 20 h 15, dim : 15 h, 31 / 20 €, www.theatrenational.be DUNKERQUE – 24.03, Le Bateau Feu, 20 h, 8 €, www.lebateaufeu.com

Les violences conjugales constituent l’un des thèmes majeurs du théâtre de La Compagnie Maritime. Après Appels en absence ou Amours mortes, Daniel Adam signe ici un spectacle interactif à destination des jeunes adultes. La troupe dissèque leurs rapports amoureux contrariés, entre les situations obscènes favorisées par le Net ou les séries TV parfois sinistres. Voici trois histoires dans lesquelles les spectateurs auront la possibilité de mettre les pieds dans le plat ! J.D. LA LOUVIÈRE – 18 & 19.01, Le Palace, 20 h, 13 >  8 €, www.ccrc.be

© Véronique Vercheval

Liker



© Luca del Pia

Vangelo L’Évangile selon Pippo Delbono ? Un opéra baroque où se croisent Led Zeppelin, Pasolini, réfugiés de tous pays… En filigrane, le metteur en scène italien pose une (vaste) question : que signifie aimer son prochain ? Ce pourfendeur des injustices de notre temps a parcouru le monde, filmant les visages des exilés, racontant leurs souffrances, se demandant ce que ferait le Christ aujourd’hui. Accompagné de sa fidèle troupe (Nelson l’ex-clochard, Gianluca le trisomique et Bobo, microcéphale et sourd-muet), il mêle musiques tzigane et classique, drame et rire, éléments autobiographiques et théâtre, danse et vidéo… Au VILLENEUVE D’ASCQ – 24 & 25.01, La Rose des Vents, 21 h, 21 > 13 €, milieu de ses ouailles, micro en main, Pippo www.larose.fr orchestre une grande fresque et messe DOUAI – 27 & 28.01, L’Hippodrome, 20 h, 22 > 9 €, www.tandem-arrasdouai.eu laïque, il prêche la liberté et pourfend les MAUBEUGE – 31.01, La Luna, 20 h, 12 / 9 €, violences causées par la religion. On ne www.lemanege.com sait pas si sa maman, fervente catholique, (dans le cadre du focus Italie) LIÈGE – 18 & 19.02, Opéra Royal de Wallonie, serait heureuse du résultat (c’est elle qui sam : 20 h, dim : 15 h, 30 > 12 €, lui a demandé de réaliser ce spectacle sur www.operaliege.be son lit de mort, « pour délivrer un message AMIENS – 02 & 03.03, Maison de la Culture, jeu : 19 h 30, ven : 20 h 30, 29 > 13 €, d’amour »). En tout cas nous, on l’est ! J.D. www.maisondelaculture-amiens.com


dr Trodiessoirs les

1ER FÉVRIER – 20H30

SOPHIA ARAM

« LE FOND DE L’AIR EFFRAIE »

THEATRE MUNICIPAL - 34/30/16€

2 FÉVRIER – 20H30

AYMERIC LOMPRET « C’EST TROP POUR MOI » 3 FÉVRIER – 20H30

JOSEPHINE DRAÏ « JOSEPHINE SE POSE » LE POCHE - 8/6€

FNAC, TICKETNET ET DIGITICK WWW.VILLE-BETHUNE.FR


Méduses © Guy Kokken

© Ugo Ponte / onl

Kaléidoscope

Les Petits Pas

Farid Berki sublime le hip-hop en croisant les arts et les cultures. Après avoir remixé L’Oiseau de feu de Stravinsky, le Tourquennois s’attaque aux symphonies de Haydn et Mozart. Pour cette création, six danseurs de la compagnie Melting Spot enchaînent acrobaties et chorégraphies en symbiose avec l’Orchestre National de Lille. Soutenus par les sets du DJ Malik Berki, ils allient l’énergie des danses urbaines à l’harmonie de la musique classique.

12e édition pour ce festival de danse à destination des enfants, qui s’articule cette année autour du thème de la perception. Celle du mouvement que dessine (littéralement) le corps dans Méduses, ou encore de l’espace, comme dans R+O, où deux acrobates défient l’apesanteur. Il s’agit aussi de percevoir la nature autrement : dans Happy Manif, les spectateurs deviennent interprètes d’une pièce jouée en plein air !

LILLE – 14.01, Nouveau Siècle, 16 h, 12 / 10 / 5 €, www.onlille.com, (dans le cadre de «Famillissimo», dès 5 ans).

EN FAMILLE

MÉTROPOLE LILLOISE – 03 > 11.02, divers horaires, 13 > 3 €, pass duo (1 adulte + 1 enfant) : 10 €, Pass 5 places : 20 €, www. gymnase-cdc.com Sélection : Méduses (Glowinski & Roversi) (03.02) // Un Cerf au sabot d’argent (N. Baldo) (05 > 07.02) // À deux mains (N. Ouelhadj) (05 > 09.02) // R+O (K. Dubois) (07.02) // Happy Manif (D. Rolland) (10 & 11.02)…

EN FAMILLE

© Romain Etienne

Le Mouvement de l’air Claire Bardainne et Adrien Mondot avaient démontré leur talent en cosignant Pixel de Mourad Merzouki. Leur dernière création s’avère aussi bluffante. Mariant chorégraphie et art numérique, les Lyonnais donnent cette fois vie... au mouvement de l’air. Ici, trois danseurs s’envolent dans un décor interactif constitué de vidéos. Flottant sur des feuilles de papier ou au cœur d’une tornade, ils brouillent un peu plus la frontière entre réel et virtuel. VALENCIENNES –19 & 20.01, le Phénix, 20 h, 23 > 10 €, lephenix.fr HASSELT – 16.03, Cultuurcentrum, 20 h, 22 € MAUBEUGE – 31.03, La Luna, 20 h, 12 / 9 €

EN FAMILLE



Sélection – Théâtre & danse 102 LA REVUE DES GALERIES

La troupe des Galeries aborde la fin d’année à grand renfort de sketches, chansons et chorégraphies. Ce savant cocktail de cabaret et de music-hall, concocté par David Michels et Bernard Lefrancq, est devenu au fil des ans une véritable institution. La Revue digère ainsi 2016 à la sauce caustique et satirique. Qu’elle soit belge ou internationale, sportive ou musicale : l’actualité est sacrément revue et corrigée ! Une bouffée d’humour salutaire. BRUXELLES – jusqu’au 29.01, Théâtre des Galeries, 20 h 15 + (15 h : 07 / 08 / 14 / 15 / 18 / 21 / 22 / 28 / 29.01), 29 > 11 €, www.trg.be

© Gallone

SEEDS (RETOUR À LA TERRE)

AU FIL D’OEDIPE

Carolyn Carlson

Camille Trouvé et Brice Berthoud / Cie Les Anges au Plafond

Cette pièce dont le titre signifie "graines" en anglais s’adresse aux enfants comme aux adultes. Son héros est un petit bonhomme nommé Elyx. Dessiné par Yacine Aït Kaci, celui-ci nous rappelle les beautés de notre Terre, mais aussi les dangers qui la menacent. Trois danseurs adoptent ses mouvements et sèment l’espoir à travers le monde, dans un spectacle mêlant réel et virtuel, écologie et poésie. ROUBAIX – 10.01, Le Colisée, 20 h 30, 25 > 10 €, www.coliseeroubaix.com BRUGES – 03.02, Espace Culturel Treulon, 19 h 30, 6 €, www.espacetreulon.fr

EN FAMILLE

Après avoir conté l’histoire d’Antigone, Camille Trouvé et Brice Berthoud se penchent sur celle de son père, Oedipe. Ils déroulent avec poésie (et au sens propre) les fils du mythe. Nous voici embarqués à bord d’un radeau secoué par des vagues en papier, au côté de ce roi incestueux qui fuit ses terres pour échapper à son tragique destin (il tuera son père pour épouser sa mère). Grâce à un astucieux système de poulies, les marionnettes froissées tombent du ciel comme de terribles coups du sort… DUNKERQUE – 10 > 12.01, Le Bateau-Feu, mar : 20 h, mer : 19 h, jeu : 14 h 30 & 19 h, 8 €, www.lebateaufeu.com

EDUC’ Jean-Marc Chotteau / La Virgule

Après avoir mis en scène la mémoire des ouvriers du textile (La Vie à un fil, Jouer comme nous) et celle des habitants de HLM (HLM - Habiter La Mémoire), Jean-Marc Chotteau s’est inspiré du témoignage d’éducateurs pour créer cette nouvelle pièce. Dans un décor évoquant les quartiers dits "difficiles", 11 comédiens interprètent ces héros du quotidien confrontés à la souffrance de jeunes à la dérive, restituant avec justesse de bouleversants récits de vie, souvent ignorés ou caricaturés. MOUSCRON – 11 > 13.01, Centre Marius Staquet, mer & ven : 20 h 30, jeu : 19 h 30, 20 > 8 €, www.lavirgule.com



C’EST MOI LA PLUS BELGE ! Nawell Madani

© Franck Glenisson

Ancienne danseuse hip-hop, ex-égérie du Jamel Comedy Club, Nawell Madani raconte son parcours semé d’embûches dans ce premier one-womanshow. De son enfance de garçon manqué jusqu’à la conquête de Paris, en passant par les affres de la puberté, elle nous plie en deux avec son porno version belge ou ses imitations de Mylène Farmer. Un sketch-up (mélange de sketches et de stand-up) ponctué de chorégraphies qui donne la frite. LILLE – 18.01, Casino Barrière, 20 h 30, 37 > 31 €, www.casinosbarriere.com CHARLEROI – 19.01, Spiroudome, 20 h, 36 €, rtl.spiroudome.be SAINT-AMAND-LES-EAUX – 09.02, Pasino, 20 h, 38 > 35 € BRUXELLES – 06.05, Cirque Royal, 20 h, 42 > 29 €

ÉLOGE DU MAUVAIS GESTE

NOUVEAU SPECTACLE

Ollivier Pourriol / Valérie Cordy

Gaspard Proust

Le foot, un sport de bourrin ? Pas aux yeux d’Ollivier Pourriol. Dans son livre, ce philosophe français transfère les héros de la baballe sur le terrain de la réflexion en disséquant six événements qui ont marqué l’Histoire. Le coup de boule de Zidane ou la « main de Dieu » de Maradona servent ainsi la pensée grecque, de Sartre ou de Spinoza. Interprétée par Denis Laujol, qui décortique ces (mé)faits de match sur écran géant, cette conférence-théâtrale est certes hors-jeu, mais hilarante.

Pas le plus doué pour trouver des titres (son nouveau spectacle se nomme… Nouveau spectacle), Gaspard Proust n’a en revanche pas son pareil quand il s’agit d’indigner le public. L’écrivain raté (c’est lui qui le dit) met sa plume au service de textes toujours aussi assassins. Et tout le monde y passe. Au hasard, Benzema : « tu as toujours l’impression qu’il est en train de planifier l’enlèvement de ta grand-mère ». Mais pas Hanouna, car « on ne se moque pas de quelqu’un qui vit avec un AVC permanent ».

CHARLEROI – 24 > 26.01, Eden, 20 h, 14 > 9 €, www.eden-charleroi.be

BRUXELLES – 24.01, Cirque Royal, 20 h, 47,50 > 32,50 € // LIÈGE – 25.01, Théâtre du Trocadéro, 20 h, 45,50 € // MONS – 26.01, Le Manège, 20 h, 42 €

LA BONNE NOUVELLE François Bégaudeau / Benoît Lambert

Ils sont six sur scène : trois hommes et trois femmes. Affublés d’attachés-cases et de beaux costumes, ces quadras font partie de ce que l’on appelle « la classe dominante ». Mais voilà, ces artisans de la mondialisation et du capitalisme, ex-banquiers ou hautsfonctionnaires, ont craqué. Ces « libéraux repentis » nous expliquent dans un séminaire ponctué de sketches et de chansons l’effondrement de leurs rêves, dans une parodie qui ferait rougir Georges "Marché". BÉTHUNE – 25 > 27.01, La Comédie, mer & ven : 20 h, jeu : 18 h, 20 > 6 €, www.comediedebethune.org



Le mot de la fin 106

Guess The Band/Musician L’Arménien Davit Gyumishyan est un graphiste mélomane. Tout naturellement, il a marié ses deux passions via des illustrations minimalistes. Quels groupes ou musiciens se cachent derrière ces rébus ? À vous de jouer ! www.behance.net/gallery/22577459/Guess-The-BandMusician

Réponses : Jack White, The Black Keys, Radiohead, Red Hot Chili Peppers, Queen, The Rolling Stones




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