LM magazine 157 - Décembre 2019

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n°157 / décembre 2019 / GRATUIt

Art & CulturE

Hauts-de-France / Belgique



sommaire

Cleaning Windows © Lexicon Love

LM Magazine #157 – Décembre 2019

news – 06 style – 10

musique - 30 Muddy Monk, Weval, Motorama, Fat White Family, Hot Chip, L'épée, Daho, Mika, Mahalia, Oxmo Puccino…

Cook'n Roll Cuisine et dépendances

écrans – 48

De la vigne aux platines Mariage de raisin

Irresponsable, Gloria Mundi, Notre dame, L'Orphelinat, La Vie invisible d’Eurídice Gusmão, Chanson douce

La Cave se rebiffe Punkovino, Vigneronnes, Glou Guide 2

portfolio – 22 Lexicon Love Tranches de vie

rencontre Sébastien Chassagne & Frédéric Rosset - 48 La famille s'éclate Pablo Mira - 84 Satire de partout !

exposition – 58 Punk Graphics, Devenir Matisse, Lesage, Simon, Crépin, Kasimir Zgorecki, Instagraf, Jean Jullien...

théâtre & danse – 84 Pablo Mira, Outwitting the Devil, Cria, Mémoire de fille, Traces, La Fin de l'homme rouge, Théâtre du Centaure...

le mot de la fin – 106 Dan Cretu


Magazine LM magazine – France & Belgique 28 rue François de Badts 59110 La Madeleine - F tél : +33 (0)3 62 64 80 09

www.lm-magazine.com

Direction de la publication / Rédaction en chef Nicolas Pattou nicolas.pattou@lastrolab.com

Direction artistique / Graphisme Cécile Fauré cecile.faure@lastrolab.com

Rédaction Julien Damien redaction@lm-magazine.com Tanguy Croq info@lm-magazine.com

Couverture Gale and her Glossy Balls Lexicon Love www.lexiconlove.com

Publicité pub@lm-magazine.com

Administration Laurent Desplat laurent.desplat@lastrolab.com Réseaux sociaux Sophie Desplat Impression Imprimerie Ménard 31682 Labège Diffusion C*RED (France / Belgique) ; Zoom On Arts (Bruxelles / Hainaut)

Ont collaboré à ce n° : Selina Aït Karroum, Thibaut Allemand, Rémi Boiteux, Marine Durand, François Lecocq, Lexicon Love, Grégory Marouzé, Raphaël Nieuwjaer, Marie Pons et plus si affinités.

LM magazine France & Belgique est édité par la Sarl L'astrolab* - info@lastrolab.com L'astrolab* Sarl au capital de 5 000 euros - RCS Lille 538 422 973 Dépôt légal à parution - ISSN : en cours L’éditeur décline toute responsabilité quant aux visuels, photos, libellé des annonces, fournis par ses annonceurs, omissions ou erreurs figurant dans cette publication. Tous droits d’auteur réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par quelque procédé que ce soit, ainsi que l’enregistrement d’informations par système de traitement de données à des fins professionnelles, sont interdites et donnent lieu à des sanctions pénales. LM / Let'smotiv est imprimé sur du papier certifié PEFC. Cette certification assure la chaîne de traçabilité de l’origine du papier et garantit qu'il provient de forêts gérées durablement. Ne pas jeter sur la voie publique.

Papier issu de forêts gérées durablement



News

Groupe F © DR

News Calais, 27 > 31.12, Le Channel, 1 spectacle : 3,50 € > gratuit, lechannel.fr ●●● Sélection / Groupe F : Théâtre de feu • Cie Carabosse : Installation de feu Compagnie Gorgomar : Le Grand orchestre de poche • Yann Frisch : Le Paradoxe de Georges…

La Braderie de l'art

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Rien ne se perd, tout se recycle ! Tel pourrait être le mantra de cette braderie pas comme les autres. Le principe ? 150 artistes et designers s’enferment durant 24 heures à la Condition Publique. Ils y conçoivent une quantité d’œuvres et d’objets hétéroclites (meubles, lampes, sculptures…) en puisant dans un stock de 2 000 m3 de matériaux de récupération. Les pièces, uniques, sont ensuite vendues entre 1 et 300 euros. Vous savez où faire vos emplettes de Noël... Roubaix, 07 & 08.12, La Condition Publique, sam : 19 h-2 h dim : 8 h 30-19 h, gratuit, www.labraderiedelart.com

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© La Cuisine

News

News

News

Feux d'hiver C'est un microclimat propre à Calais. Durant l'hiver, au Channel, la température grimpe étrangement. En cause : cinq jours de spectacles où l'on joue (littéralement) avec le feu. à l'image des maîtres de la pyrotechnie du Groupe F ou des installations abrasives de la compagnie Carabosse. Entre le concert de ukulélés du Grand orchestre de poche, les tours de magie poétiques de Yann Frisch et autres clowneries flambées, la chaleur humaine fait le reste – on brûle d'y être.


Effets de manche

© Serra Thomson, Buckwild, Tps9x

Après les pulls moches, les t-shirts moches ? à l'heure du réchauffement climatique, il faudra creuser le concept... Perso, on a déjà garni notre dressing pour Noël. Parce qu'on aime Céline Dion et le metal, Snoop Dogg et les gros bonnets, et qu'on a toujours vu Donald Trump plutôt que Jim Carrey dans le rôle du Grinch. Make Christmas Great Again ? Pas sûr. www.redbubble.com/fr

Noël underground Pour Noël, laissez tomber les marrons chauds, privilégiez les champignons de Paris ! Ces petites douceurs poussent allègrement dans les grottes de Wonck, et constituent l'encas favori des visiteurs de ce surprenant marché de Noël. Ici, producteurs et artisans exposent le long de 700 mètres de galeries souterraines. Forcément, au bout d'un moment, ça creuse...

Bassenge © Syndicat d’initiative de

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Bassenge, 13 > 15.12, Grottes de Wonck, ven : 19 h 30-23 h • sam : 11 h-23 h • dim : 11 h-20 h, 1 jour : 4 €, pass week-end : 7 € (gratuit -13 ans), www.bassenge.be


News L'Année du loup (BMG) L'album, enfin ! En 2014, Alma Forrer avait signé un EP paru dans un relatif anonymat. Compagne de route d'artistes aussi divers que Baptiste W. Hamon ou Jean Felzine (Mustang), la Française possède une voix mutine façon Adjani, propice à toutes les rêveries (N'être que l'hiver et Tout n'est pas perdu). Issue d'une scène folk portée sur les guitares en bois, elle s'ouvre aux sons synthétiques sans opportunisme, et aligne des hits potentiels tels L'Année du Loup (très Aline) ou 120 (très New Order). Des classiques instantanés, donc. Thibaut Allemand

Nick Cave & The Bad Seeds Ghosteen (Ghosteen Ltd.) Après un Skeleton Tree lugubre, reçu à la lumière noire d’une tragédie personnelle (bien qu’écrit avant la perte de son fils), Nick Cave poursuit une mue d’une rare puissance. Comme The Tree of Life de Terrence Malick, cet album est une œuvre hantée, conciliant l'intime à l 'ampleur du cosmos, telle une prière. Le son peut désarçonner les fans du bluesman, mais ces nappes synthétiques confirment le virage entrepris depuis deux disques. Entendre ainsi cet immense écrivain et performer transfigurer une douleur insondable tient du prodige. Rémi Boiteux

Hip Hop Family Tree - Tome 4 Ed Piskor (Papa Guédé) Initiée en 2012, cette bible du hip-hop raconte avec force détails (et humour) les débuts du mouvement, façon comics des seventies – en 64 couleurs sur papier jauni. Consacré aux années 1984-85, le quatrième tome montre, entre autres, les premiers jams de Will Smith, ceux des Beastie Boys lors de la tournée de Madonna, la montée en puissance du label Def Jam et de Dr. Dre – qui vend ses disques au marché aux puces de Compton ! Richement documentée, cette saga s'apprécie d'autant mieux en écoutant la playlist dédiée sur Youtube. 112 p., 26 €. Julien Damien

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Alma Forrer



Audrey Basset © Se Faire Food

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Cook’n Roll A priori, associer légendes du rock et gastronomie n’avait rien d’évident. Audrey Basset transforme l’essai comme une cheffe dans le livre Cook’n Roll, tout juste sorti du four. En réunissant « 50 recettes pour cuisiner la musique, de David Brownie à Mötorbread », cette Bretonne conjugue toutes ses passions : le fooding, le rock et les jeux de mots « capillotractés, parfaits pour les métalleux à cheveux longs ».

| Batterie de cuisine |

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n aurait bien aimé rencontrer Audrey Basset à l’adolescence. « Je faisais du air guitar, j’avais des cheveux gras et des jeans déchirés, et j’écoutais Nirvana et Freddie Mercury », rit-elle. Chez la Rennaise à la longue chevelure auburn et au bras droit entiè« En rement tatoué, France, la nourriture, le goût du rock est venu avant c’est celui des bons encore assez petits plats. « Je sérieux ! » n’avais jamais vraiment cuisiné avant d’y être obligée. Mais étudiante déjà, j’étais plus nouilles sautées aux légumes que pâtes bolo », remarque cette graphiste de formation.

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Les feux de l’humour

Dans ses deux domaines de prédilection, Audrey prend plaisir à explorer. Du punk, du hard, du death metal côté musique. Des recettes véganes ou sans gluten côté fourneaux, parce que « la malbouffe est le fléau de notre société ». •••

Top of the Rock La playlist idéale d’Audrey pour cuisiner David Bowie – Space Oddity (1969) Freddie Mercury – Don’t Stop Me Now (1978) System of a Down – Toxicity (2001) Rammstein – Sonne (2001) The Interrupters – Take Back the Power (2014) et Got Each Other (feat Rancid, 2018)



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Qu’est-ce qu’on écoute de Placebo en cuisinant ?

Contrairement au glam rock, le look androgyne et romantique de Brian Molko reflète le désir de sexualiser et renverser les normes genrées, qu’on retrouve également à travers ses textes. Placebo est d’ailleurs choisi par le plus glam des parrains, David Bowie, pour faire sa première partie en 1994. On peut facilement suivre la chronologie des albums de Placebo rien qu’en observant les changements capillaires plus ou moins de goût de son leader ! On se lève de bon matin avec Pure morning (1998).

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gourmand. « Un jour où je préparais des brownies chez moi, la musique à fond, j’ai eu l’idée de les appeler "David Brownie" ». Pour le reste, Audrey trouve généralement le jeu de mots seule ou « pendant un apéritif entre potes », avant d’imaginer la recette correspondante. Cocktail Gin Morrison, frites à l’ail Van Haleine, houmous de betterave Dip Purple pour les pages "Apérosmith" ou cheesecake salé Salmon & Garfunkel pour le chapitre "Plat c’est beau"... Le spectre musical et culinaire est large. Fan de Courtney Love, l’auteure, qui se rêvait en « meuf rock star », n’oublie pas les figures féminines, Lassée de son boulot dans la pub, entre cookies Griotte Grrrl et muffins elle lance en 2015 son entreprise Craneberries – dans les pages "AC d’impression 3D de moules à bis- Desserts". Cerise sur le gâteau, elle cuits. poste, parallèle, ses ré- indique à chaque page la chanson Qu’est-ceEt qu’on écoute en de Placebo en cuisinant ? quand on met la main à la pâte cits de voyage, recommandations de Molkoidéale ement au glam rock, le look androgyne et romantique de Brian reflète de sexualiser et renverser les normes genrées, qu’on retrouve également à de jouer les dur(e)s à cuire ! restaurants et recettes sur son blog, – histoire

es textes. Placebo est d’ailleurs choisi par le plus glam des parrains, David our faire sa première "Se partie Faire en 1994. Food". On peut facilement Marine Durand baptisé « Il y suivre avaitla chronologie ms de Placebo rien qu’en observant les changements capillaires plus ou moins oût de son leader ! On se lève de bon matin avec Pure morning (1998). un truc à faire en mêlant l’humour et

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AC Desserts

Cook’n Roll, dont elle signe, excusez du peu, les textes, photos, recettes et hilarants graphismes, est un panthéon personnel aussi drôle que

à lire / Cook’n Roll Audrey Basset (éditions Ouest-France) 120 p., 14,90 €, editions.ouest-france.fr à visiter / sefairefood.com à écouter / playlist Cook’n Roll sur Deezer, Spotify et YouTube 14

la cuisine, détaille la jeune femme de 36 ans. En France, la nourriture, c’est encore assez sérieux ! ». 51


Le menu de fête d’Audrey Basset

– Apéritif –

Rancidre « Un cocktail épicé à base de cidre brut, whisky et orange. à déguster devant un feu de cheminée, en écoutant Rancid, bien sûr ! » – En guise d’entrée –

Assortiment d’Apérosmith « Découpez votre Alice Coppa, une base de pizza fourrée aux olives et à la coppa, en forme de sapin de Noël. » – Plat –

Sans-Jacques White « Une

recette veggie à base de champignons eryngii revenus dans du beurre et un peu d’eau salée, pour la saveur iodée (sans Saint-Jacques, donc). » – Dessert –

Griotte Grrrl 15

« Un dessert fruité qui se mange sans faim, et un groupe qu’on écoute sans fin ! »


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Jean-Bernard Pouy Black Rebel Motorcycle Club x Morgon - Domaine Jean-Marc Burgaud "Grand Cras" © Alex Horn


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interview

De la vigne aux platines Rock-pop et pinard, l’accord parfait ? Il faut croire. Dans De la vigne aux platines, Fabien Korbendau et Christophe Mariat ont décanté 50 couples "album-vin". Ces alliances ont ensuite été dégustées et traduites en mots ou images par quelques fines plumes, de Bertrand Belin à Gaëtan Roussel, en passant par Enki Bilal… En résulte une somme inédite de sens et de saveurs. Pas un livre de spécialiste ni d’œnologue, non. Plutôt une expérience synesthésique détonante, où les gammes se marient naturellement.

| Accords parfaits |

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Pourquoi avez-vous associé musique et vin ? Né en 1968, je suis fan de rock et de pop depuis l’âge de dix ans. En réécoutant certains disques comme The Queen is Dead des Smiths ou Dolorès de Jean-Louis Murat, des évocations propres au vin me venaient en tête et en bouche : des textures, arômes, couleurs, gammes… Ça ne s’argumente pas, c’est un constat de l’ordre de la synesthésie. Un jour mon beau-frère, Christophe Mariat, et moi, avons réalisé que nous partagions cette passion, en buvant un Côtes-

du-Roussillon sur L’Imprudence de Bashung. Ce fut l’album clé de notre démarche, sa complexité poétique a tout déclenché.

« L’écoute attentive d’un album provoque des sensations olfactives et gustatives. » En quoi cette démarche consiste-t-elle ? Un peu à l’ancienne, nous apprécions un album dans son intégralité, sans piocher des morceaux ici ou là et sans rien faire d’autre. •••


frais, chambrés… de même que certains styles musicaux sont glaçants comme la cold wave. Il existe des disques et des breuvages élégants, tels les vins de Vienne, propices à l’élévation spirituelle comme Treasure de Cocteau Twins. D’autres plus terreux, abrasifs, plus rock comme les albums de BRMC.

« à chaque disque correspondaient plusieurs bouteilles. »

Pour nous un disque reste une œuvre globale comme un livre ou un film. Il s’agit de le déguster pour en redécouvrir sans cesse les subtilités, comme une bonne bouteille de vin ! Dans les deux cas, il y a une progression. Une écoute attentive provoque des sensations olfactives et gustatives. En quoi la musique et le vin se marient-ils si bien ? Les termes habituellement associés au vin fonctionnent aussi avec la musique. Les deux offrent des gammes très riches, variées. Le vin possède ainsi son propre rythme : il y en a des lents, des rapides. C’est aussi une histoire de température : tantôt

Comment avez-vous sélectionné les bouteilles ? Nous avons noté, façon "écriture automatique", tous les termes nous venant à l’esprit en lien avec le vin : "fleuri", "poivré", "charnu", mais aussi des notions de saison ou des adjectifs plus libres comme "baroque", "volcanique". Nous avons également sollicité des amis cavistes

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Gaëtan Roussel - The Velvet Underground & Nico x Tavel, Domaine de l’Anglore © Clarisse Fieurgant

Comment avez-vous déterminé ces accords "œno-acoustiques" ? Dans un premier temps, nous en avons fixé 50, tel un Top 50 (rires) ! La première étape fut de sortir tous les albums de nos discothèques respectives. On a dû en réécouter un millier. L’association fonctionne bien avec la pop et le rock. Nous nous sommes d’ailleurs limités à ces deux esthétiques, même si ça marchait aussi avec le blues ou la soul, mais il a fallu restreindre notre sélection sinon on y serait encore !


avant d’établir un lexique. à chaque album correspondaient plusieurs bouteilles. Il a ensuite fallu déguster tout ça pour trouver la bonne, avec des amis le week-end… Ça nous a pris trois ans !

disque, Bowie ne buvait quasiment que du Riesling ! Plus fort, et ça devient délirant : il avait jeté son dévolu sur celui de notre choix, issu du domaine Bott-Geyl ! Une coïncidence très troublante…

Ensuite, vous avez choisi des goûteurs, n’est-ce pas ? Oui, nous avons proposé ces "couples" à des chanteurs, journalistes ou dessinateurs, partageant notre passion pour les mots, la photo, la BD…. Nous avons offert à chacun d’eux la bouteille correspondante au disque qu’ils avaient choisi, en leur demandant de transcrire leur expérience d’écoute-dégustation à travers un texte ou un dessin.

Quel serait votre "couple" idéal pour les fêtes ? Je vous suggère de remplacer le champagne par un vin pétillant naturel : le Gewurztraminer, domaine Brand & fils, associé à Night and Day de Joe Jackson. Il s’accorde parfaitement avec ce disque, très festif. C’est une explosion aromatique !

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Avez-vous des exemples à nous donner ? Citons An Electric Storm de White Noise, album de 1969 choisi par Sylvain Vanot. C’est un ovni, les prémices de l’electro, qu’on a associé à un vin hallucinatoire, subversif : la Coudée d’or. Il est élaboré par des vignerons un peu barrés, inventeurs du concept de "cosmoculture", plaçant les énergies telluriques au service de la vigne. Vous associez aussi Station to Station de Bowie à un Riesling… Oui, le texte est de Philippe Auliac qui fut son photographe entre 1976 et 2003. Il m’a d’ailleurs avoué qu’à l’époque de l’enregistrement du

Propos recueillis par Julien Damien

Christophe Mariat et Fabien Korbendau © DR

à lire / De la vigne aux platines, Fabien Korbendau et Christophe Mariat (éditions de l’Epure) 222 p., 22 € www.epure-editions.com à lire / La version longue de cette interview sur lm-magazine.com L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. à consommer avec modération.


Punkovino Eloi Cedó Perelló © Iko

Après les punks à chiens, les punks à vin ? C'est tout le principe de cette web-série décantée par Tina Meyer. Chaque épisode de sept minutes suit un "dissident" de la viticulture, sur des musiques signées Flavien Berger, Arnaud Rebotoni... Du breuvage RAF ("rien à foutre") mais sans sulfites de Raph Baissas au pinard produit dans son garage par Brendan Tracey, chanteur punk de The Insults, en passant par les vignerons à dreadlocks du Collectif Underground squattant des caves troglodytes, voici dix portraits de "pificulteurs" anarchistes – et de bon goût. J.D.

Glou Guide 2

Existe-t-il un vin "féminin" ? On n'en sait rien. Par contre, des productrices de vin, il y en a quelques-unes. Sandrine Goeyvaerts en a rencontré 100 en France. De la Corse à la région Champagne, elle dresse autant de portraits de vigneronnes passionnées, aux parcours parfois tumultueux et rarement médiatisé (si ce n'est la fameuse "femme derrière chaque grand homme"...). En guise de clin d'œil, chacune délivre sa devise (« Quand rien n'est certain, tout est possible »). Un juste éclairage sur ce matrimoine vivant. J.D.

Le vin, un jus élitiste ? Sans doute. Partant du constat que la plupart des grands crus « ne valent pas le dixième de ce qu'ils sont vendus », deux journalistes ont écumé les routes de France à la recherche de cavistes indépendants. Cette petite bible carafée avec humour guide les papilles néophytes vers 150 vins naturels à portée de bourse (15 euros maxi la bouteille). Avec, en prime, un accord idéal pour chaque bouteille (le P'tit Barriot se marierait bien avec Pulp Fiction) histoire d'y boire plus clair. J.D.

Vigneronnes - 100 femmes qui font la différence dans les vignes de France, de Sandrine Goeyvaerts (Nouriturfu), 168 p., 18 €, nouriturfu.com

Glou Guide 2, d'Antonin Iommi-Amunategui et Jérémie Couston (Cambourakis), 192 p., 15 €, www.cambourakis.com

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Vigneronnes

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. à consommer avec modération.

De Tina Meyer, web-série de 10 épisodes, disponible sur www.arte.tv



When Push Comes Stanley, to Shove the Dog


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| Recette miracle |

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Lexicon Love

Jouer avec la nourriture, c’est mal. Mais apparemment, ça amuse beaucoup Lexicon Love (et nous aussi). Depuis 2017, cette collagiste installée à Sydney plaque des aliments sur des portraits, principalement féminins. à la faveur de ces joyeuses collisions, elle déconstruit les canons de la beauté. Au menu, on trouve un visage sur œufs de lump (souriant sans en faire des tartines) ou cette femme garnie de crevettes en tenue de cocktail. Plus loin, notre cheffe remet le couvert avec cet homme-dinde dressé à la perfection. « Je suis d’origine grecque, notre attachement à la bonne chère est profond. Cela constitue notre identité culturelle, la base de nos relations », confie-t-elle. Inspiré des dadaïstes, de l’absurde Maurizio Cattelan « Je n’incorpore ou encore du génial John Stezaker, ce travail jamais plus de trois ingrédients, (réalisé sans excès numérique) est un grand mezze d’humour et de tragédie, deux notions intipour atteindre mement liées selon l’Australienne. Le tout saucet équilibre entre l’harmonie poudré comme il se doit d’une pincée de folie : et le chaos. » « Je veux perturber le regard du spectateur, et susciter de l’empathie pour mes sujets et leurs potentielles histoires »... à la recherche de pépites, Lexicon Love arpente régulièrement les rayons des banques d’images. Sa matière iconographique favorite provient du milieu du xxe siècle. Une fois sélectionnée, elle imagine instantanément les combinaisons "photos-objets" idéales. « Mais attention ! Je n’incorpore jamais plus de trois ingrédients, pour atteindre cet équilibre entre l’harmonie et le chaos. Le plus compliqué étant de préserver de légères imperfections, le caractère fait-main de chaque œuvre ». Un festin visuel à déguster sans modération. Tanguy Croq

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à visiter / www.lexiconlove.com, Q @lexicon_love à lire / L’interview de Lexicon Love sur lm-magazine.com


Invitation Only


Whip Myself


Hegemony


This is not a Mushroom


Do You Think of Me


Doing it my Way


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Muddy Monk

© Hugo Comte

| Hors-piste | Ce nom un peu trompeur (pas de jazz ici) circule depuis cinq ans chez les amateurs de synthpop exigeante. Biberonné à la bossa nova de Gilberto Gil et d'Antônio Carlos Jobim, Guillaume Dietrich a signé quelques instrus imparables pour Myth Syzer (Le Code) ou Ichon (l'obsédant Si l'on ride). Pourtant, le natif de Fribourg n'a sorti son sublime premier album, Longue Ride, qu'en novembre 2018. Ce fut aussi l'année de ses débuts sur scène – lors du Montreux Jazz Festival ou du Pitchfork, excusez du peu ! Grand fan de moto, Muddy Monk a tiré de ses "longues rides" contemplatives à travers l'Europe des ballades mélancoliques, pavées de synthés rétrofuturistes et de rythmes lancinants (ben oui, il est Suisse…). à mi-chemin entre les hymnes à la conduite maîtrisée de Kavinsky et la nonchalance d'un Sébastien Tellier (une influence assumée), cet Helvète trace sa route hors des sentiers battus. Julien Damien Bruxelles, 04.12, Botanique, 19 h 30, 19 > 13 € www.botanique.be


Weval © Bibian Bingen

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Kompromat + Weval | Supersonique |

On a déjà dit tout le bien que l'on pensait de Kompromat, ce tandem atomique fondé par Julia Lanoë (Sexy Sushi, Mansfield.TYA) et Vitalic. Sur disque comme sur scène, ce groupe germanophile fait mouche à chaque fois. Mais ce soir à l'Aéronef, il s'agit d'arriver à l'heure pour découvrir un autre duo, aussi précieux que méconnu : Weval (également attendu à Anvers et Liège). Voici une petite dizaine d'années, Harm Coolen et Merijn Scholte Albers se rencontraient sur les bancs de l'école d'arts d'Utrecht, section cinéma. Le premier cherchait un étudiant pour l'aider à réaliser son clip. Merijn s'est pointé, Weval était né. Dans leurs besaces, des goûts différents mais ancrés dans les années 1990 : trip-hop, acid-jazz, house… Des musiques propices à la contemplation et à la rêverie, certes, mais nos Bataves ne rechignent pas à faire vrombir de très, très lourdes basses le temps de montées libératrices. Soudée et surdouée, la paire fut rapidement repérée par l'insigne maison Kompakt. à l'écoute de Doesn’t Do Anything ou Someday, on comprend que le patron Michael Mayer fonde à chaque fois ! Thibaut Allemand

Weval : Anvers, 11.12, De Studio, 20 h 30, 19 €, www.destudio.com Liège, 12.12, Reflektor, 20 h, 19 €, www.reflektor.be

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Kompromat + Weval : Lille, 05.12, L'Aéronef, 20 h, 25 / 19 €, www.aeronef.fr



© Irene Parshina

Motorama Héritiers de quelques légendes britanniques (Felt, The Wake…), les membres de Motorama ont d'abord percé parce qu'ils étaient russes. Vue d'ici, cette origine leur confère un exotisme certain et abaisse considérablement la température d'une wave déjà bien cold. Alors, oublions ce look un brin austère, l'affreuse coupe au bol de l'un, les lunettes Sécurité Sociale de l'autre. Car ces chansons se suffisent à elles-mêmes, mêlant instruments acoustiques et électroniques, nuages de synthés et guitares tranchantes… La bande de Vladislav Parshin dessine des paysages en noir et gris libérant un romantisme désuet, mais ô combien précieux. T.A. Bruges, 05.12, Cactus (Villa Bota), 20 h, 15 > 5 €, www.cactusmusic.be // Tourcoing, 06.12, Le Grand Mix 20 h, 14 > 5 €, www.legrandmix.com // Arlon, 07.12, L'Entrepôt, 21 h, 18 / 16 €, www.entrepotarlon.be

Bruxelles, 05.12, Botanique, 21 > 15 €, 19 h 30, www.botanique.be Tourcoing, 11.12, Le Grand Mix, 20 h, 14 > 5 €, www.legrandmix.com

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Il y a 12 ans, avec une guitare acoustique et un alto pour seuls alliés, la Californienne Emily Jane White composait de subtiles ballades mélancoliques (Dark Undercoat). Aujourd'hui, l'Américaine n'a rien perdu de sa grâce et a gagné en profondeur. Elle fustige, entre autres, la dévalorisation de la femme, le capitalisme sauvage et la destruction de la nature… Tandis que les fainéants invoquent Cat Power, on entend ici la sensibilité d'une Billie Holiday – le pathos en moins. T.A.

© Kristin Cofer

Emily Jane White



© Sarah Piantadosi

Fat White Family | Nouvelle alliance |

Assagie, la Fat White Family ? Sans doute. Vous n'aurez plus la chance de voir défaillir un membre sur scène. On peut le déplorer. Ou se consoler, car cette attitude un poil plus responsable est mise au service de chansons hors normes.

Bruxelles, 09.12, Ancienne Belgique, 20 h, 22 / 21 €, www.abconcerts.be

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Au vu des trognes ravagées de ces loustics, affleurent souvent les épithètes façon Ettore Scola : affreux, sales et méchants. Laissons cela aux pressés et aux fâcheux. Jusqu'ici réputée pour son hygiène de vie douteuse, et célébrée pour ses concerts rocambolesques, Fat White Family s'est refait une santé – toutes proportions gardées, d'accord. Mais avouez que personne n'attendait un album de la tenue de Serfs Up !, l'un des grands disques de l'année. Une œuvre ouverte à tous les vents, mêlant Library Music, post-punk, funk maladif, proto-techno, mento agonisant… Le genre de recherche formelle que ne s'est jamais autorisé un Pete Doherty, pour rester dans la même patientèle. Finalement, cette évolution est compréhensible : chacun a pris l'air et multiplié les expériences hors de la fratrie : Warmduscher, Moonlandingz, Insecure Men… Moins incestueuse qu'elle en a l'air, la Famille se goinfre de sang frais et, en vampire lettré, cuisine cette sève à sa sauce. Voici quelques semaines, sur Twitter, nos working class heroes s'en prenaient aux zouaves de Shame et aux darons de Sleaford Mods (qui tournent un peu en rond, ces temps-ci…). Et dans cette joute numérique, devinez qui a fait preuve du maximum de finesse, de malice et de sagacité ? Thibaut Allemand



© Ronald Dick


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Hot Chip On peut le regretter, mais c'est un fait : les Anglais de Hot Chip ne seront jamais des superstars. Ils ne rempliront jamais le Zénith sur leur seul nom. Pourtant, en près de 20 ans de carrière, le groupe mené par Joe Goddard et Alexis Taylor a fidélisé un public et, surtout, signé des morceaux en forme d'hymnes de poche. C'est bien le principal.

| Bande à part |

Comme un dernier cadeau, A Bath Full of Ecstasy fut l'un des derniers albums coproduits par le regretté Philippe Zdar. Paru au printemps, ce disque contient toutes les qualités de nos Britanniques flegmatiques : un mariage de recherches électroniques et de simplicité pop, de vague à l'âme et d'humour pince-sans-rire. Bien que passé par les labels les plus en vue (Moshi Moshi, DFA, Domino, sans parler d'EMI et de sa filiale Parlophone), Hot Chip demeura toujours à l'écart des modes et des tendances. Certes, ses ritournelles ne laissent pas indifférents, la plupart se glisse aisément dans un DJ-set, mais la troupe conserve une approche éminemment singulière. ■◆

Mondes parallèles

Cette originalité passe par le bricolage sonore, un anonymat revendiqué, une approche modeste, voire "normcore", qui libère du temps pour… faire autre chose. Citons le duo The 2 Bears de Joe Goddard ou l'incroyable About Group, unissant Alexis Taylor mais également Charles Hayward (This Heat) et John Coxon (Spiritualized). Un éloignement qui permet de jolies retrouvailles. Tous les deux ans environ, ils conjuguent ainsi leur amour pour Inner City et Pet Shop Boys, New Order et Brian Eno, Prince et Timbaland. Et lorsque résonnent les premières mesures d'Over and Over, la magie est toujours de mise. Thibaut Allemand 39

Anvers, 10.12, Trix, 19 h, 32 €, www.trixonline.be


© Richard Dumas

L’épée | Lame de fond |

Drôle de type, cet Anton Newcombe. Souvenir personnel : lorsqu'on le vit pour la première fois sur les planches (Rennes, 2005), le gonze paraissait rincé, dépassé par l'image de loser magnifique véhiculée par Dig !, sorti l'année d'avant. Certes, il abhorre ce documentaire. Mais sans ce film, aurait-il eu cette aura ? Pas sûr. Bref, à l'époque, on ne donnait pas cher de sa peau. Ce fut donc un étonnement constant, et fréquent, de le voir vieillir de plutôt belle manière, livrant des albums jamais terrassants mais traversés de coups de génie. Exilé à Berlin, le désormais quinqua n'a pas chômé, multipliant les collaborations. Ici, c'est en compagnie de la comédienne Emmanuelle Seigner (pas une novice : souvenez-vous de son travail avec Ultra Orange, en 2007) et des Perpignanais The Limiñanas, que l'Américain réinvente la roue. Enfin, façon de parler : disons qu'ici, chaque écrou est à sa place, l'ensemble tourne à merveille. Rien de neuf, mais les fans de garage pop et de psychédélisme acide rehaussé d'effluves yéyé seront aux anges. Thibaut Allemand Lille, 15.12, L'Aéronef, 18 h 30, 25 / 19 €, www.aeronef.fr

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Bruxelles, 12.12, Botanique, 20 h, 29 > 23 €, www.botanique.be



© Jono Luis Bento


iq u e us

iq ue - m

étienne Daho Caprice de star ? Désir enfin assouvi, plutôt. Lorsqu'en 1997 paraît Eden, Etienne Daho a quarante ans. L'heure des bilans. En lieu et place, et comme à son habitude, le songwriter envoie tout valser, se remet en question et signe un disque incompris à l'époque… mais aujourd'hui acclamé.

| Le paradis retrouvé |

Fin des années 1990 : Daho file à l'anglaise, histoire de fuir la célébrité et une sale rumeur sur son compte. À Londres, le Rennais découvre la jungle, la drum&bass et le trio Saint Etienne, qui transformera Weekend à Rome en He's on the Phone. Rebaptisé Saint Etienne Daho le temps d'un EP, le quatuor passe même à Top of the Pops… Mais la France n'entrava pas grand-chose. Et réserva un accueil glacial au fruit de ces multiples expériences. Pourtant, Eden contenait quelques-unes de ses plus belles chansons (Soudain, Au commencement, Me manquer, Les Pluies chaudes de l'été, Les Bords de Seine…) et naviguait entre modernité électronique (la jungle et la drum&bass, donc) et humeur vagabonde (la chanteuse Astrud Gilberto n'y fait pas de la figuration). ■◆

Seconde chance

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En 2019, Etienne Daho est un monument. N'empêche, et on le déclare d'autant plus tranquillement que nous n'avons jamais hésité à lui tresser des lauriers, cette unanimité semble un peu suspecte. Daho ayant passé un cap (la soixantaine) il pourrait signer n'importe quoi, la presse saluerait bien bas. Songez à Nick Cave, Souchon, Dylan… Pas grave. Et tant mieux, si cela lui permet de réparer un affront, en réhabilitant ce disque mal-aimé qui demeure son préféré. Joué en intégralité, légèrement remanié (l'homme est très perfectionniste) et bien évidemment étoffé de tubes inusables issus d'autres périodes, Eden retrouve là une seconde jeunesse… éternelle. Thibaut Allemand Bruxelles, 13.12, Cirque Royal, 20 h, Complet ! // Roubaix, 14.12, Le Colisée, 20 h, Complet ! Anzin, 15.12, Théâtre, 20 h, Complet !


Mika

| Cordes sensibles |

Jadis on prenait Mika pour une star éphémère. On lui prédisait un quart d'heure de gloire entre quelques comètes vite oubliées. Eh bien non. Le Libanais a tenu bon et s'est forgé une œuvre. Pas le genre de chansons qui vous font briller dans les dîners en ville, c'est vrai. Non, celles qui pénètrent l'oreille pour ne plus la lâcher. Ce grand échalas revisite ses totems à sa manière, conjugue la brillance de Jobriath au brio des Bee Gees (toutes périodes confondues) et place, évidemment, Queen audessus de tout. Mais là où Freddie et ses sbires suintaient la prétention et se vautraient dans le ridicule, Mika avance détendu, modeste, simple vecteur d'une pop sans complexes, destinée à faire chavirer les cœurs et les âmes. En s'ouvrant sur son homosexualité, son enfance de gamin harcelé, il peut aider plus d'un ado, c'est certain. Alors, évidemment, avoir révélé quelques tanches chez The Voice (Kendji Girac, Fréro Delavega) demeure parfaitement inexcusable. Mais tant qu'il composera des hymnes tels Grace Kelly, Tiny Love ou Ice Cream, on fermera les yeux. Thibaut Allemand Bruxelles, 14.12, Forest National, complet !

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© Julian Broad

Lille, 15.12, Le Zénith, 20 h, 51 > 44 € www.zenithdelille.com



© DR

© Fifou

Oxmo Puccino

The Briefs

Rappeur, poète, conteur… Faut-il encore présenter Oxmo Puccino ? En 20 ans de carrière, le "Black Jacques Brel" est de ceux qui ont sorti le rap de la rue pour l'amener dans les cours de Français. à l'image de son (très zen) septième album, La Nuit du réveil, l'as des métaphores filées et des rimes croisées dépeint notre bas monde avec lucidité, parfois crudité, réclamant souvent plusieurs écoutes pour saisir tout le sens de ses textes. Sur scène, il pèse chaque mot, joue avec les silences, comme un Bouddha boxeur sûr de ses coups. T.C.

Venu de Seattle mais se fichant de Nirvana comme de Jimi Hendrix, ce quatuor tourne à la strychnine des Sonics. Les doigts branchés dans la prise, il se pose en digne héritier des Buzzcocks. The Briefs fourbit, depuis bientôt 20 ans, une formidable power pop mâtinée de punk-rock (ou l'inverse, on attend les résultats du labo). Hargneuses et mélodiques, euphoriques et violentes, ces chansons sont de celles qu'on fredonne de jour comme de nuit. Grâce soit rendue à ces valeureux hérauts de l'underground. T.A.

Bruxelles, 03.12, La Madeleine 20 h, 33 €, www.la-madeleine.be Lille, 17.12, L'Aéronef, 20 h, 29,80  €, aeronef.fr

Dunkerque, 10.12, Les 4 Ecluses 20 h, 12 / 9 €, www.4ecluses.com

Mahalia

Tourcoing, 14.12, Le Grand Mix, 20 h, 20 > 5 €, legrandmix.com Bruxelles, 19.12, Ancienne Belgique, 20 h, 26 /25 €, abconcerts.be

© DR

La perfide Albion a vu naître quelques-unes des plus belles voix de la soul contemporaine : la regrettée Amy Winehouse, plus récemment Jorja Smith ou Celeste… Il faudra désormais compter avec Mahalia. Née dans une famille de musiciens au cœur des Midlands, à Leicester, elle fut repérée par une major à seulement 13 ans ! Huit ans plus tard, elle chante ses états d'âme ou ses amours perdues avec une maturité digne des plus grandes, et signe déjà des collaborations spectaculaires, notamment avec Little Simz – tout est dit. T.C.



éc r a ns

cran

Julien

Le pere

interview

Irresponsable Julien, trentenaire un peu flemmard, revient vivre chez sa mère à Chaville, dans la banlieue parisienne. Il y croise son amour de jeunesse, disparue il y a 15 ans sans explication. Pour cause, Marie lui apprend qu'elle a eu un fils de lui... Julien est bien décidé à la reconquérir et assumer son rôle de père auprès de Jacques (« Ah ouais, c'est chaud comme prénom ») même s'il a le même âge mental... écrite par Frédéric Rosset, alors étudiant au sein de la première promo "série télé" à la Fémis, portée par Sébastien Chassagne, parfait dans le rôle de l'adulescent hirsute, Irresponsable dénote par sa qualité d'écriture et son propos – comment devient-on parent ? Qu'est-ce que la famille ? à la veille de la diffusion de la troisième et ultime saison de ce petit bijou de comédie sur OCS, rencontre avec son créateur et son attachant héros.

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| Glandeur nature |


Marie

La mere

Sébastien, comment avezvous rejoint Irresponsable ? S. Chassagne : C'est Irresponsable qui est venu à moi. La série était d'abord un pilote de la Fémis porté par Frédéric. On m’a proposé le rôle de Julien, en précisant que je pourrais retravailler les dialogues… à la lecture du scénario, j'ai pensé qu'il y avait éventuellement deux ou trois choses à rendre plus marrantes. Fred a tout de suite accepté...

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Frédéric Rosset : On a effectivement écrit en pensant à Sébastien. C’est un super acteur, très drôle et il nous a apporté beaucoup d’idées.

On croit que c’est un glandeur mais en fait il est ultra-actif ! Qu'est-ce qui vous a séduit dans cette histoire ? S.C. : Chaville me rappelait le village où j'ai grandi dans l'Essonne. Je connais donc très bien les zones périurbaines, ce mélange de ruralité et de préfabriqués absurdes, et j'y suis profondément attaché. Comment présenter le personnage de Julien ? F.R. : J’avais en tête un archétype du trentenaire un peu glandeur, mais il fallait éviter les clichés. •••


Julien développe énormément d'énergie pour continuer à ne rien faire. Il a aussi des convictions, adore l’idée d’être père, lui-même ayant été abandonné par le sien. Enfin, il passe son temps à trafiquer la vérité, se plaçant dans des situations rocambolesques.

« J'ai mis du temps à me débarrasser de mon second degré. » En quoi est-il irresponsable ? F.R. : C’est la société qui le considère comme tel. Moi je ne cherche pas à le juger ni à stigmatiser les chômeurs (rires). Julien défend juste l’idée de pouvoir vivre comme il l'entend. S.C. : Je ne crois pas que les gens soient irresponsables dans la vraie vie. Disons qu'on fait parfois des mauvais choix après une journée de merde (rires). En quoi lui ressemblez-vous ? S.C. : J’apporte toujours des éléments personnels dans mes rôles,

Sylvie

La grand-mere

ce sont mes "petits secrets". Dans la chambre de Julien par exemple, on trouve mes propres mangas, une Dreamcast plutôt qu'une PlayStation 2 (rires). On a aussi beaucoup travaillé les impros pour qu'il me ressemble. Julien a mon phrasé et ma rythmique, il devait paraître le moins "fabriqué" possible. En tout cas, vous semblez bien savoir rouler les joints… En réalité, je ne fume pas ! J'ai essayé plein de trucs, comme tout le monde, mais je n'aime pas ça. Pourtant, comme je ne voulais pas faire bande à part au lycée, j'ai menti en prétendant que je savais rouler ! Tout le monde sortait des tulipes ou des hélicoptères, et moi je galérais sur mon petit cône (rires). C'est vraiment un truc de comédien... Comment avez-vous traversé l'adolescence Sébastien ? C'était très compliqué, car j'ai mis beaucoup de temps à me débarrasser


de mon second degré. J'avais l'air intelligent mais en même temps j'étais une quiche à l'école.

« Les questions de réussite et d’échec n’ont aucun intérêt.»

La série est drôle, certes, mais aborde aussi des sujets plus "graves"... Quels sont les enjeux de la saison 3 ?

Sébastien, vous êtes désormais papa d'un petit garçon. Avez-vous des conseils à nous donner, en tant que paternel irresponsable ? S.C. : Ne pas mettre la pression à ses enfants, éluder les questions de réussite et d’échec qui n’ont aucun intérêt, et surtout rigoler le plus possible. Mon fils doit-il être bon à l’école ? Honnêtement, on s'en fout un peu... sauf s’il devient alcoolique à huit ans (rires) !

F.R. : J’aime mélanger les genres, ancrer la comédie dans le réel en y injectant du drame. Tous les personnages s’interrogent sur leur avenir, l’ironie étant que le premier à se poser la question est le plus jeune, Jacques. à peine le BAC en poche, il s'apprête à voyager au bout du monde, se découvrir lui-même. Car il redoute de finir comme ses parents, paumés à 35 ans.

Propos recueillis par Julien Damien Photo Saison 3 © Thomas Balay pour OCS Saison 1 © Tetra Media Fiction

saisons 1 et 2 disponibles à la demande

S.C. : On questionne aussi le désir de paternité, le refus de maternité... Des sujets sensibles du moment. Une nana n'a pas forcément envie d'avoir des enfants, et ce n'est pas forcément synonyme d'échec.

une série

à voir / Irresponsable

saison 3 inédite le 5 décembre 20:40

De Frédéric Rosset (réalisé par Stephen Cafiero), avec Sébastien Chassagne, Marie Kauffmann, Théo Fernandez, Nathalie Cerda... Saison 1 & 2 disponible sur OCS Saison 3 dispo. le 05.12 sur OCS

Sélection officielle

Sélection officielle

Festival Séries Mania 2019

21e Festival de la fiction TV de La Rochelle

Jacques

Le fils

à lire / La version longue de cette interview sur lm-magazine.com


ÉC R A NS

CRAN

Gloria

Un enfant arrive. Tout ne devrait être que bonheur, et pourtant le quotidien reprend vite le dessus, avec ses angoisses et ses tracas matériels. Dans une Marseille sinistre, Robert Guédiguian dresse le portrait d'une société de plus en plus brutale, où les plus défavorisés luttent désormais entre eux...

Nicolas et Mathilda viennent de donner naissance à une petite Gloria. Ils ne sont pas tout à fait dans la galère, leur situation pourrait même s'améliorer. Il suffirait qu'il réussisse avec son boulot de chauffeur Uber, et qu'elle soit enfin embauchée à la fin d'une période d'essai. Mais

cet horizon est un leurre. Le système promeut la volonté et la réussite individuelles, mais repose sur le "précariat", voire la concurrence de tous contre tous. Les anciennes solidarités (familiales ou de classes) n'y changeront rien... À travers deux générations et trois couples, Robert

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| États précaires |


© Ex Nihilo

Mundi Guédiguian montre comment l'argent et la libido, devenus indissociables, corrodent les rapports humains.

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Ruptures

Gloria Mundi ne craint pas d'accueillir la violence contemporaine et sa profonde obscénité. Cela ne va certes pas sans lourdeur. Ce n'est pas un problème d'écriture, mais la contrepartie d'un cinéma social affrontant de façon systématique le présent. À la manière de ces travellings montrant tantôt des exilés abandonnés sur le trottoir, tantôt

des groupes de touristes étrangers, Guédiguian et son scénariste Serge Valletti essaient de tout embrasser. Le risque est de réduire la fiction à une juxtaposition de situations ou de discours d'époque. Pourtant, en laissant au spectateur le soin de saisir ce qui se transmet ou se perd, dans cette famille comme dans la classe ouvrière, Gloria Mundi se révèle d'une terrible justesse.

Raphaël Nieuwjaer De Robert Guédiguian, avec Gérard Meylan, Anaïs Demoustier, Robinson Stévenin, Ariane Ascaride... En salle


© Rectangle Productions - France 2 Cinéma Scope Pictures - Les Films de Françoise

é c r a ns

Notre dame | Du cœur à l'ouvrage |

Pour son cinquième longmétrage, qui fit l’ouverture du 20e Arras Film Festival, Valérie Donzelli s’offre le rôle principal. Comédie burlesque et romantique, Notre dame déborde d’énergie, d’inventivité et serre le cœur dès qu’apparaissent les images de la cathédrale aujourd'hui meurtrie. Magistral !

De Valérie Donzelli, avec Pierre Deladonchamps, Valérie Donzelli, Thomas Scimeca, Bouli Lanners, Virginie Ledoyen, Philippe Katerine... Sortie le 18.12

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Valérie Donzelli est insaisissable. La comédienne-réalisatrice peut aussi bien tourner une autofiction brindezingue (La Reine des pommes) qu’un mélodrame autobiographique (La Guerre est déclarée, co-écrit avec son ex-compagnon Jérémie Elkaïm) ou filmer un scénario destiné à François Truffaut (Marguerite et Julien). Dans Notre dame (titre à double lecture), la Vosgienne incarne Maud Crayon. Cette architecte, mère de deux enfants, divorcée aux histoires de cœur complexes, remporte (sur un malentendu) le concours lancé par la mairie de Paris pour réaménager le parvis de Notre-Dame. Voilà le point de départ d’un film au rythme effréné, ne s’embarrassant d'aucun psychologisme. Et tant mieux ! En mélangeant les genres (comédie romantique, musicale, fantastique) Donzelli livre son œuvre la plus ambitieuse et accomplie. Nourri de références parfaitement digérées (Jacques Demy, Jacques Tati, voix off truffaldienne), Notre dame est un petit bonheur apte à séduire les cinéphiles comme un large public. Quant aux images de Notre-Dame de Paris, intacte, vaillante (le film fut tourné avant le tragique incendie du 15 avril), elles restent en mémoire longtemps après la projection. Décidément, le cinéma est une belle invention. Grégory Marouzé

cra


Au moment où le film débute, en 1989, l'Afghanistan est une république communiste où les réformes vont bon train. Les exubérances du cinéma de Bollywood égayent la population, tandis que garçons et filles bénéficient du même programme d'alphabétisation. En transposant une nouvelle fois, après Wolf and Sheep (2016), les souvenirs d'enfance de son ami Anwar Hashimi, la cinéaste Shahrbanoo Sadat évoque un tournant majeur de l'histoire de son pays. Elle ne le fait cependant pas de manière frontale, mais à travers les émois et les aventures de quelques adolescents des rues accueillis dans un orphelinat. Plaçant ainsi le regard à hauteur des jeunes personnages, elle n'écrase pas son propos avec un contexte général menaçant... Un point de vue qui constitue tout le charme de ce film. Raphaël Nieuwjaer

© Virginie Surdej

De Shahrbanoo Sadat, avec Qodratollah Qadiri, Sediqa Rasuli, Anwar Hashimi... En salle

© Bruno Machado

L'Orphelinat

La vie invisible

d’Eurídice Gusmão L'une se rêve pianiste, l'autre aspire au grand amour. Elles ont 18 et 20 ans et sont sœurs. Inséparables, elles seront pourtant séparées, mais ne renonceront jamais à se retrouver... Dans le Rio des années 1950, l'indépendance des femmes n'est pas à l'ordre du jour. Ou alors dans les replis d'une société préférant briser des existences que de contrevenir à l'autorité des hommes. Pur mélodrame, le film de Karim Aïnouz inscrit cette violence jusque dans les rapports les plus intimes. Sans fausse pudeur, sans fétichisme non plus, il laisse place à tout ce qui travaille les corps de ses héroïnes – humeurs, désirs, angoisses. Cette dimension organique n'entame en rien l'ampleur de son récit, au contraire. Car il en faut, des rides, pour comprendre que le temps n'existe pas. Raphaël Nieuwjaer De Karim Aïnouz, avec Carol Duarte, Julia Stockler, Gregório Duvivier... Sortie le 11.12


© Studio Canal, Jean-Claude Lother

Chanson douce | Affaire de nurse |

Récit glaçant de l’assassinat de deux enfants par leur nourrice, Chanson douce est l’adaptation du second roman éponyme de Leïla Slimani. Prix Goncourt en 2016, le livre est lui-même tiré d’un fait divers qui a secoué les Etats-Unis en 2012. Lucie Borleteau en tire un drame social haletant et offre un rôle de choix à Karin Viard, troublante en nurse tueuse.

De Lucie Borleteau, avec Karin Viard, Leïla Bekhti, Antoine Reinartz… En salle

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Myriam et Paul, couple trentenaire parisien dans le vent, ont deux bambins. Lorsque Myriam reprend sa carrière d’avocate, ils recrutent Louise. Cette super nanny devance les désirs des parents tout en imposant ses règles, s’immisçant toujours plus loin dans leur intimité. Jusqu’au point de non-retour... Lucie Borleteau a su traduire en plans éloquents l’écriture clinique de Leïla Slimani. L’intelligence du montage tient en haleine (situations-miroirs, l’élément eau en filigrane) avec en prime quelques citations : Shining pour la folie domestique ou Tully côté burn-out parental. Le fantastique rôde derrière cette réalisation tout en sobriété, évitant l’écueil du thriller connoté. Le sourire carnassier, Karin Viard souligne le rôle glauque de la nounou psychorigide et borderline. Sa silhouette désuète évoque Vivian Maier (photographe culte et nourrice maltraitante...). Ici, Louise est avant tout une femme à la dérive, torturée sous ses dehors parfaits, devenant une Médée par procuration. Sur fond de lutte des classes (pensons aux sœurs Papin), cette tragédie interroge le vivre-ensemble à travers ce couple aisé qui n’assume pas sa fonction d’employeur, et s’enlise dans le déni... Selina Aït Karroum



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© Mad Museum - Jenna Bascom

Punk


| Lignes de crête |

Né au milieu des années 1970 dans un monde malade, entre menace d'apocalypse (la Guerre froide) et crises économiques traitées avec un remède de cheval (Thatcher, Reagan), le punk fut une réponse aussi outrancière que spontanée. L'exposition présentée à l'ADAM de Bruxelles ne s'intéresse pas tant à la musique qu'au graphisme véhiculé par cette contre-culture. Affiches, pochettes de disques, fanzines… Punk Graphics. Too fast to live, too young to die dévoile des pièces rassemblées par Andrew Krivine, un collectionneur no future pour toujours !

Graphics

Affiches Live Stiff Tour, 1977 © Barney Bubbles (designer) et Chris Gabrin (photographe) © Photo : Mad Museum - Jenna Bascom


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Buzzcocks, Orgasm Addict, 1977 Š Linder [Linda Sterling], Malcolm Garrett / DR


Sex Pistols, God Save the Queen, 1977 © Jamie Reid / DR

Andrew Krivine est tombé dans la marmite punk ado, mais a toujours le droit d'y replonger. Comme nombre de gamins de son âge, ce New-Yorkais est happé par cette vague contestataire durant l'été 1976. Il a alors 16 ans et passe ses vacances chez son cousin John, à Londres, qui tient la boutique Boy. C'est là qu'il entend The Clash. « J'en suis tombé amoureux. C'était primitif, drôle, agressif… ». Suivront sur sa platine tous les genres en ayant découlé, du post-punk à la new-wave. Il est fasciné par cette musique mais aussi son aspect visuel. Dès lors, il collectionne t-shirts, posters, pochettes de disques, badges… jusqu'à amasser près de 3 000 « Les punks pièces ! Pour monter cette exposition, l'ADAM de furent Bruxelles en a sélectionné 500. « Franchement, antiracistes, je n’aurais jamais cru qu'en les collant dans ma antimilitaristes chambre avec de la patafix elles finiraient dans un et parmi les musée ! », rit ce banquier d'affaires. premiers à

évoquer les questions de genre… »

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Détournez, c'est gagné !

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Découpée en sections thématiques, cette exposition ne s'intéresse pas à la musique punk, mais à son graphisme. Le maître mot, c'est la débrouille (ou "do it yourself") et son corollaire, la liberté. La technique est rudimentaire : de la colle et des ciseaux. « Le collage demeure une spécificité de ce langage, précise Arnaud Bozzini, •••


le directeur de l'ADAM. Le détournement d'images existantes devient aussi un marqueur ». à l'instar de Jamie Reid, qui s'approprie le portrait officiel de la reine d'Angleterre pour lui coller un bandeau sur les yeux, flanqué d'un "God Save the Queen" avec une typographie digne d'une lettre de rançon. ■◆

1. Movement – LP Poster, 1981, designed by Peter Saville for New Order. Courtesy of Warner Music 2. Unknown Designer, Siouxsie & the Banshees, 1980 Vues d'exposition © Julien Damien

Vous avez un message

Ces graphistes sont libres, donc, irrévérencieux, mais pas déconnectés de l'histoire de l'art. Ils s'inspirent du surréalisme (ce poster "Poster" pour PIL) du pop-art ou du constructivisme russe qui surgit par exemple du lettrage minimaliste de Movement de New Order. Leurs réarrangements évoquent aussi les photomontages des dadaïstes, à l'image de Linder Sterling. Pour illustrer la pochette d'Orgasm Addict des Buzzcocks, elle remplace la tête d'une femme nue par un fer à repasser, dénonçant la domesticité féminine. Car derrière le nihilisme apparent et la provoc pointe aussi un engagement social et politique. « Les punks furent antiracistes, antimilitaristes et parmi les premiers à évoquer les questions de genre… ». L'art de la paix, en somme. Julien Damien

à lire / La version longue de cet article sur lm-magazine.com

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Punk Graphics. Too fast to live, too young to die Bruxelles, jusqu'au 26.04.20, ADAM, tous les jours : 11 h-19 h, 8 > 5 € (gratuit - 6 ans), adamuseum.be


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Elvis Costello, Armed Forces UK Tour, 1979 © Barney Bubbles Photo © Julien Damien


Henri Matisse dans l’atelier d’Henri Evenepoel, Paris, Avenue de la Motte-Picquet, octobre 1897. Musées Royaux des beaux-arts de Belgique Fonds Henri Evenepoel © DR


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o Henri Matisse, Première nature morte orange, 1899 Centre Pompidou, Paris, Musée national d’art moderne / Centre de Création Industrielle, En dépôt au Musée départemental Matisse, Le Cateau-Cambrésis, © Photo Philip Bernard © Succession H. Matisse

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Devenir Matisse | Naissance d'un mythe |

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Comment Henri devint-il Matisse ? à l'occasion des 150 ans de sa naissance, le musée du Cateau-Cambrésis, fondé par l'artiste lui-même en 1952, ausculte les premiers pas et les influences de cette figure (entre autres) du fauvisme. Montée avec des prêts issus du monde entier et de sa famille, cette exposition inédite raconte à travers 250 œuvres du peintre, graveur et sculpteur et 50 autres de ses maîtres (de Cézanne à Goya), la naissance d'un géant. Rien ne prédestinait Matisse à l'art. Né le 31 décembre 1869 au CateauCambrésis, il grandit dans une famille de tisserands, implantée dans cette région rurale depuis plus de 300 ans. Pas vraiment du sérail, donc. Son père est le premier à rompre avec la tradition, s'installant comme grainetier à Bohain. Le travail est difficile. Matisse n’a pas la force de prendre la relève. Il suit donc des études de droit à Paris pour devenir clerc de notaire. •••


Vue d'exposition, Matisse dessinant un kouros au Louvre, vers 1931 © Photo Julien Damien

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Copies non-conformes

Matisse s'installe dans un petit appartement sur les quais de la Seine, mais rate le concours d'entrée à l'académie des beaux-arts. Gustave Moreau l'accepte tout de même dans son atelier. Il lui délivre deux conseils : dessiner dans la rue, pour saisir la vie et les gens.

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Henri Matisse, La Pourvoyeuse, d’après Chardin, Fin xixe (1896) - début xxe (1903) Musée départemental Matisse, Le Cateau-Cambrésis © Photo P. Bernard © Succession H. Matisse

« Il n'a alors même pas l'idée de visiter les musées de la capitale », relate Patrice Deparpe, le commissaire de cette exposition. Comment devientil artiste ? Suite à une banale crise d'appendicite. Le jeune homme est hospitalisé et son voisin de chambre tue le temps avec une petite boîte d’aquarelles. Matisse en réclame une. « C’est une révélation totale ! Dès lors, il persuade ses parents d'étudier les beaux-arts à Paris ». Les thèmes de ses premières toiles sont tout trouvés : des natures mortes avec ses livres de droit !


Vue d'exposition, Nature morte d’après La Desserte de Jan Davidsz de Heem, H. Matisse © Musée Matisse

Le second enseignement est aussi essentiel : s'inspirer des maîtres exposés au Louvre. Parmi les nombreuses copies de Matisse dévoilées ici, citons La Pourvoyeuse d'après Chardin (« la première fois où il s'intéresse au visage humain ») ou cette réinterprétation quasi cubiste d'une monumentale nature morte du Néerlandais De Heem. Hélas, le Catésien vend peu, car « ses copies sont trop personnelles ». Il retourne à Bohain… ■◆

Le choc Goya

Nous sommes en 1903. Matisse est prêt à abandonner sa passion lorsque son père l'emmène aux beaux-arts de Lille, où il tombe sur les tableaux de Goya. « C’est un choc absolu, il décide de rester peintre », soutient Patrice Deparpe. Le Nordiste voyage alors beaucoup, notamment dans le sud de la France, découvrant « non pas la couleur, mais l’importance de la lumière sur la couleur ». Il trouve sa propre voie, et crée le fauvisme. Au fond du trou, l'artiste a su rebondir envers et contre tout : l'académisme, la faim… Le parcours de cette exposition s'arrête en 1911. Matisse est alors entré dans une nouvelle dimension, celle des Intérieurs symphoniques. « à son tour, il est devenu un grand maître ». Julien Damien

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Le Cateau-Cambrésis, jusqu'au 09.02.2020, Musée Matisse, tous les jours sauf mardi : 10 h-18 h 8 > 6 € (gratuit -26 ans), museematisse.fr à lire / La version longue de cet article et des œuvres commentées sur lm-magazine.com


Victor Simon, Composition, 1935. Dépôt du Musée régional d’ethnologie. © DR Photo : J. Hoepffner

Lesage, Simon, Crépin Au milieu du xixe siècle, aux étatsUnis puis en Europe, la communication avec les esprits devint un phénomène de société. Originaires du Nord de la France, Lesage, Simon et Crépin furent guérisseurs mais aussi artistes spirites. Respectivement mineur, cafetier et plombier, ils s'en remettaient aux voix de l’audelà… pour peindre. à partir de ces toiles mystérieuses, minutieuses et un peu magiques, le LaM retrace l’histoire et les secrets d’une pratique aussi fascinante que méconnue.

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| Les Voix du Nord |


Fleury-Joseph Crépin, Tableau Merveilleux n°35, 5 août 1948. LaM, Villeneuve d’Ascq Donation L’Aracine en 1999. © DR. Photo : M. Bourguet

Tout commence dans la nuit du 31 mars 1848, au sein d'une petite ferme dans l'État de New York. Les sœurs Fox prétendent communiquer avec un esprit, qui leur répondrait avec des coups portés sur les murs… Un canular, certes, confessé des années plus tard par ces trois friponnes, mais qu'importe, le spiritisme était né ! « Cette vague submerge vite les états-Unis puis l'Europe », indique Savine Faupin, commissaire de cette exposition. Les guéridons se mettent à tourner, les planches Ouija fleurissent et les esprits les plus cartésiens testent l'écriture automatique… même Victor Hugo !

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Esprit es-tu là ?

C'est dans ce contexte qu'Augustin Lesage perçoit des voix pour la première fois. Nous sommes en 1912. L'homme s'échine au fond d'une mine dans le Pas-de-Calais. Il entend : « Un jour, tu seras peintre ». Impensable, il n'a jamais tenu un pinceau ! « Un collègue l'introduit dans un cercle spirite et, lors d'une séance, sa main dessine toute seule… ». Il peindra sans relâche jusqu'en 1952, avant de perdre la vue. Ancien mineur devenu cafetier à Fouquières-lez-Lens, Victor Simon reçoit la même injonction, en 1933. •••


Anonyme, Portrait d’Augustin Lesage, n.d. Archives du LaM. Photo : N. Dewitte / LaM

« Il avouait ne même pas savoir ce qu'il exécutait, obéissant simplement aux messages ». Pour Fleury-Joseph Crépin, plombier-zingueur à Montignyen-Gohelle, les ordres sont plus précis. En 1939, on lui dit : « Quand tu auras peint 300 tableaux, ce jour-là, la guerre finira ». Il achève sa dernière toile le 7 mai 1945. Puis une seconde dépêche médiumnique lui parvient : « Après la guerre, tu feras 45 Tableaux Merveilleux et le monde sera pacifié ». Il meurt avant le pénultième (dommage…), mais laisse une œuvre foisonnante, collectionnée par Breton ou Dubuffet. ■◆

Autodidactes

Tous dictés depuis l'au-delà, les créations de Lesage, Simon et Crépin partagent de nombreuses caractéristiques, « notamment dans la composition, très symétrique ». On remarque aussi des temples, des visages… et surtout une finesse du tracé impressionnante. « Chez Simon, c'est presque de la broderie ». On observe enfin chez chacun cette répétition obsessionnelle de motifs géométriques. « Ces artistes devaient être en état d'autohypnose quand ils peignaient, leurs toiles sont tellement minutieuses… alors qu'ils n'avaient aucune formation ». Vous avez dit bizarre ?

à lire / La version longue de cet article sur lm-magazine.com

Julien Damien Lesage, Simon, Crépin. Peintres, spirites et guérisseurs Villeneuve d’Ascq, jusqu'au 05.01.2020, LaM mar > dim : 10 h-18 h, 10 / 7 € (grat. -12 ans) www.musee-lam.fr

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Augustin Lesage, L’esprit de la pyramide, 1926 LaM, Villeneuve d’Ascq. © Adagp, Paris, 2019 Photo : N. Dewitte / LaM



Portrait de mineur, Kasimir Zgorecki, 1927 1994 (Tirage moderne), H. 50 cm ; L. 40 cm CRP/ Centre rÊgional de la photographie Hauts-de-France Š adagp / CRP Hauts-de-France


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Kasimir Zgorecki | Saga Polska |

Entre 1922 et 1939, Kasimir Zgorecki a réalisé des milliers de photographies de la communauté polonaise du bassin minier du Pas-de-Calais. Autant de portraits individuels et de scènes familiales, suggérant une réussite davantage idéalisée que vécue. Ces clichés relatent en noir et blanc une histoire à la croisée de l'intime et du collectif. Ils font l'objet d'une exposition au Louvre-Lens et d'un livre rendant enfin hommage à un corpus exceptionnel de 100 tirages, dont de nombreux inédits.

Arrivé en 1922 avec sa famille à Rouvroy, Kasimir Zgorecki (1904-1980) fait partie de la diaspora polonaise venue s'installer dans les bassins miniers du Nord-Pas-de-Calais et de Lorraine. Il s'agit de trouver un emploi, un avenir escompté meilleur… Il faut surtout satisfaire aux besoins de main-d'œuvre durant l'entre-deux-guerres, grâce à la convention francopolonaise de 1919 "relative à l’émigration et à l’immigration". « En 1931, ce sont ainsi plus de 500 000 Polonais qui travaillent en France, soucieux de s'adapter à leur pays d'accueil tout en perpétuant leur culture », rappelle Marie Lavandier, la directrice du Louvre-Lens. ■◆

De la mine au studio

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Chaudronnier de formation, Zgorecki est d'abord mineur à la fosse 10 de BillyMontigny. Mais au bout de six mois, il reprend le studio que son beau-frère exploite à Rouvroy. Celui-ci l'initie à une pratique focalisée sur le portrait de studio et en extérieur. Jusqu'en 1939, son succès est indéniable, lié au plein essor de la photographie et à la place de choix qu'il occupe au sein de "la Petite Pologne" du Pas-de-Calais. •••

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Boucherie-charcuterie, Kasimir Zgorecki, 1920 - 1930, 1994 (Tirage moderne) H. 52 cm ; L. 62 cm CRP/ Centre régional de la photographie Hauts-de-France © adagp / CRP Hauts-de-France

Pour donner des nouvelles au pays, Zgorecki immortalise la diaspora sous son meilleur jour. Scènes de mariage, devant une épicerie ou familles endimanchées dans un décor… Il faut suggérer la réussite sociale, tout en occultant les conditions de travail dantesques dans les mines et une intégration rude. ■◆

Trésor caché

Noir et blanc charbonneux, essais colorisés, sens évident de la mise en scène, regards intenses et rectitude des postures servent des images souvent bouleversantes, parfois drôles. Sans oublier les nombreux autoportraits décalés du Polonais. Signalons enfin que cette exposition n'existerait pas sans Frédéric Lefever. Petit-fils par alliance de Kasimir Zgorecki, c'est lui qui, en 1989, a découvert 3 700 de ses plaques de verre dans le grenier du studio de Rouvroy. Un trésor révélé, dans tous les sens du terme. François Lecocq

à lire / Kasimir Zgorecki, photographier la Petite Pologne, éd. Light Motiv, 64 p., 23 € editionslightmotiv.com

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Lens, jusqu'au 30.03.2020, Louvre-Lens, tous les jours sauf mardi : 10 h-18 h, gratuit, www.louvrelens.fr


Portrait folklorique, Kasimir Zgorecki, 1932 2019 (Tirage moderne), H. 60 cm ; L. 50 cm Frédéric Lefever © adagp / Frédéric Lefever


© Nicolas Lee

Instagraf Figure du street-art en France, Nasty s'est révélé dans les années 1990 en graffant son blase sur les trains parisiens. Couleurs acidulées, typographie jouant avec les formes et effets de matière… Ses fresques sont reconnaissables entre toutes. Bien ancré dans son temps, l'artiste joue ici avec l'esthétique d'Instagram – où il compte plus de 19 000 abonnés ! De la toile à la brique, du pinceau à la bombe, ses œuvres croisent nombre de supports et techniques, reproduisant les carrés emblématiques d'un réseau social devenu incontournable pour les créateurs. Un clin d'œil futé, questionnant en filigrane ce nouveau circuit de l'image. J.D. Roubaix, jusqu'au 14.12, La Condition Publique, mer > sam : 13 h-19 h, gratuit, laconditionpublique.com

Connaissiez-vous le mot "pétrichor" ? Cette exposition de Jean Jullien en illustre la définition. à savoir : "une odeur caractéristique accompagnant la pluie et émanant de la terre, en particulier après une période de temps sec et chaud". On l'aura compris, cet artiste s'adresse à nos sens, nos émotions. épurées et colorées, ses peintures de paysages promettent une balade contemplative, une traversée dans le champ de nos souvenirs. T.C. Bruxelles, jusqu'au 11.01.2020, Alice Gallery mer > sam : 14 h-18 h, gratuit, alicebxl.com

© Alice gallery

Jean Jullien



Roger Ballen et Ronny Delrue Beginning and Ending, 2013 © Roger Ballen

Roger Ballen demeure l'un des plus grands photographes contemporains. L'un des plus intrigants, aussi. Volontiers dérangeant, il met en scène l'absurdité de la condition humaine à travers le quotidien de marginaux. Présenté dans l'exposition The Theatre of the Ballenesque, ce fascinant travail dialogue avec un second parcours. Intitulé Correspondances, celui-ci révèle des photographies du Gantois Ronny Delrue. Elles sont rehaussées notamment de dessins, de lettres et de collages visibles à Gand. The Theatre of the Ballenesque & Correspondances Bruxelles, jusqu'au 14.03.2020, Centrale For Contemporary Art, mer > dim : 10 h 30-18 h, 8 > 1,25 €, (grat. -18 ans) // Correspondances : Gand jusqu'au 19.01.2020, S.M.A.K., mar > ven : 9 h 30-17 h 30 • sam & dim : 10 h-18 h, 8 > 2 € (gratuit -19 ans)

Olivier Theyskens. In praesentia

Photographie, arme de classe

C'est l'un des créateurs les plus en vue. Ancien directeur artistique des maisons Rochas et Nina Ricci, Olivier Theyskens se distingue par un style alliant classicisme et modernité, mais aussi par son goût pour la dentelle. Conçue comme une "expérience émotionnelle", entre trompe-l'œil et nostalgie, cette exposition instaure un dialogue fascinant entre les vêtements du couturier belge et les collections textiles et industrielles de la Cité de la dentelle et de la mode.

Marquée par des mouvements politiques d’ampleur, du Front Populaire à la Guerre d’Espagne, l’Europe vit surgir dans les années 1930 une photographie sociale et documentaire, notamment en France et en Belgique. Nourrie d’une centaine de clichés issus des collections du Centre Pompidou, cette exposition thématique (l’antimilitarisme, la lutte contre les colonies…) rapproche de grands noms, tels Cartier-Bresson, Willy Ronis ou Lisette Model.

Calais, jusqu'au 05.01.2020, Cité de la dentelle et de la mode, tous les jours (sauf mardi) : 10 h-17 h 4 / 3 € (gratuit -5 ans), www.cite-dentelle.fr

Charleroi, jusqu’au 19.01.2020 Musée de la Photographie, mar > dim : 10 h-18 h 7 > 4 € (gratuit -12 ans) www.museephoto.be

Teresa Margolles

Charleroi, jusqu'au 05.01.2020, BPS22, mar > dim : 10 h-18 h, 6 > 3 € (gratuit -12 ans), bps22.be

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Née à Culiacán, ville mexicaine rongée par le trafic de drogue, Teresa Margolles dénonce depuis les années 1990 la barbarie qui ronge son pays, entre guerre des cartels et féminicides. Le BPS22 présente la première exposition personnelle de l'artiste aztèque en Belgique. Pour l'occasion, elle dévoile une série de photos, vidéos ou installations symbolisant les violences faites aux femmes mais aussi des œuvres inédites, conçues à Charleroi.



Hesitating beauty © Roland Persson and Courtesy Helsinki Contemporary

Nature morte / Nature vivante Apparue à la fin du xviie siècle, la nature morte désigne un exercice typique de l’histoire de l'art. à l'heure de l'Anthropocène, ce terme prend hélas un tout autre sens… Ces artistes, designers ou architectes interrogent ainsi le rapport ambigu que l'Homme entretient avec son environnement. L'Autrichien Lois Weinberger magnifie par exemple le pouvoir de prolifération des mauvais herbes, quand le Français Michel Blazy recourt au vivant (bois, écorces…) pour façonner des sculptures évolutives. Hornu, jusqu'au 08.03.2020, Centre d'innovation et de design, mar > dim : 10 h-18 h, 10 > 2 € (gratuit -6 ans) www.cid-grand-hornu.be

Kiki Smith

Pologne

Depuis près de 40 ans, l’œuvre de Kiki Smith oscille entre la pénombre et la clarté, l’animalité de l’homme et sa fragilité. Ou encore "entre chien et loup". Cette expression désignant le passage du jour à la nuit est aussi le titre de la première exposition belge que le Centre de la gravure et de l’image imprimée de la Louvière consacre à cette grande dame de l’art contemporain. Le corps humain, la nature ou des figures féminines comme les sorcières ou les sirènes en constituent autant de sujets.

Le 3 septembre 1919, la convention entre Paris et Varsovie « relative à l’émigration et à l’immigration » favorisait l’arrivée de près de 300 000 travailleurs, en particulier dans le bassin minier. à l'occasion de ce centenaire, le Louvre-Lens consacre une fascinante rétrospective à la peinture polonaise du xixe siècle, dévoilant 130 toiles signées Jan Matejko, Józef Brandt ou Jacek Malczewski, entre autres artisans de la "polonité". Ou comment les artistes ont su préserver l'âme d'un pays disparu…

La Louvière, jusqu'au 23.02.2020 Centre de la gravure et de l’image imprimée mar > dim : 10 h-18 h, 7 > 3 € (gratuit -12 ans) www.centredelagravure.be

Lens, jusqu'au 20.01.2020, Louvre-Lens tous les jours sauf mardi : 10 h-18 h 10 > 5 € (gratuit -18 ans), www.louvrelens.fr

Victor Vasarely

Le Touquet, jusqu'au 26.04.2020, Musée du Touquet-Paris-Plage, tous les jours sauf mardi : 14 h-18 h 3,50 / 2 € (gratuit -18 ans), www.letouquet-musee.com

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On attribue la paternité de l'Op Art (ou art optique) à Victor Vasarely, plasticien majeur et populaire du xxe siècle. Alors élève au Bauhaus de Budapest, le Hongrois crée à partir de ses connaissances scientifiques et déclare que l'art est partout et pour tous ! Dans Le Manifeste jaune, il revendique aussi l'unité de la forme et de la couleur. Cette exposition rassemble plus de 70 œuvres, certaines inédites, et retrace le parcours d'un illusionniste de génie.



Entre-deux, l’immigration dans le Bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, 1919-1939 Défiguré par la Première guerre mondiale, amputé de ses forces vives, le Nord-Pasde-Calais (comme la France) organisa une immigration massive pour se reconstruire. Polonais, Italiens, Algériens… plus de 200 000 personnes (de 24 nationalités !) quittèrent leur pays pour s'installer dans le Bassin Minier durant l'entre-deux-guerres. Comment vit-on ce déracinement ? Cette exposition raconte avec force témoignages, archives ou photographies l'histoire de ces hommes et femmes. Lewarde, jusqu'au 31.12, Centre historique miner, lun > sam : 13 h-19 h • dim : 10 h-19 h 6,70 € (gratuit -5 ans), www.chm-lewarde.com

Traverser la lumière

Les Beaux-Arts de Mons se transforment en gigantesque cabinet de curiosités ! Cette exposition reste fidèle à ces assemblages hétéroclites d'œuvres ou d'objets dévoilant les raretés du monde, dans les salons européens du xviie siècle. Le parcours mêle pièces inédites issues des collections historiques montoises et créations contemporaines. Ici, des pots de tabac en tête de singe côtoient les sabliers emplis de semoule de Mehdi-Georges Lahlou. De quoi piquer notre curiosité.

Peintres méconnus d’après-guerre, Roger Bissière, Jean Bazaine, Elvire Jan, Jean Le Moal, Alfred Manessier et Gustave Singier formèrent un groupe soudé. Ils n’étaient pas liés par une esthétique, mais une solide amitié. Toutefois, ces six artistes non-figuratifs partagèrent ce même attrait pour la lumière, qu’ils ont chacun capturée à leur façon : physique, naturelle, symbolique ou mystique. Cette centaine de toiles et de dessins nous dévoilent leurs lumineux secrets.

Mons, jusqu'au 26.01.2020, BAM mar > dim : 10h-18h, 9 / 6 € (gratuit -6 ans) www.bam.mons.be

Roubaix, jusqu'au 02.02.2020, La Piscine mar > jeu : 11 h-18 h • ven : 11 h-20 h, sam & dim : 13 h-18 h, 11 / 9 € (grat -18 ans), roubaix-lapiscine.com

Picasso illustrateur De Picasso, on connaît les peintures, sculptures, dessins, voire céramiques, pas forcément les illustrations. Pour la première fois, une exposition met en lumière cette dimension méconnue de l'œuvre du génie espagnol. Monté au MUba de Tourcoing en collaboration avec le musée national PicassoParis, ce parcours dévoile ses relations avec les écrivains, poètes ou éditeurs, et rassemble près de 200 pièces dont certaines jamais vues, car issues des ateliers du maître lui-même… Tourcoing, jusqu'au 13.01.2020, MUba, tous les jours sauf mardi : 11 h-17 h 45 • sam & dim : 13 h-18 h 45, 8 > 1 € Tourquennois (gratuit -18 ans), muba-tourcoing.fr

Anonyme (Picasso Pablo (d’après), Affiche Amnistia, 1959, Lithographie en couleurs, éditée par le Comité national d’aide aux victimes du Franquisme © Succession Picasso 2019

Memento Mons



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interview

Pablo Mira | Serial vanneur |

Pablo Mira est un alchimiste. Il transforme la bêtise de ce bas monde en vannes en or massif. Révélé en 2012 avec Le Gorafi et ses infos parodiques, chroniqueur pour France Inter et Quotidien, où il s'amuse de la poésie des "haters", cet ancien journaliste dit désormais "des choses contre de l’argent", pour citer le titre de son one-man-show. Plutôt sales, les choses… Sur scène, il incarne un type un peu réac et franchement cynique, n'épargnant rien ni personne. Petit florilège : « Ce n'est pas aux hommes de réprimer leurs pulsions, c'est aux femmes de courir plus vite »... « On n'a plus les moyens d'accueillir toute la misère du monde, la France n'est pas la mâchoire de Didier Deschamps »... Attention, satire à bout pourtant ! Propos recueillis par Julien Damien / Photo © Aksel Creas - Photographe Aksel Varichon

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Quel est votre parcours ? J'ai d'abord suivi des études de sciences politiques avant d'être journaliste, travaillant sur des documentaires, des enquêtes... Comme j'en avais marre de rester sérieux, je jouais parallèlement dans des cafés-théâtres. Mais, je suis devenu un professionnel de la blague en 2012 avec Le Gorafi, fondé avec Sébastien Liébus. Petit à petit, on a commencé à vivre de ce site

d'information parodique. J'y ai écrit à temps plein jusqu'en 2015 avant de déléguer pour me consacrer aux chroniques sur France Inter, à la télé et à ce spectacle. Pouvez-vous nous rappeler le concept du Gorafi ? C'est une approche satirique de la politique, des enjeux sociétaux ou de la culture. On joue du décalage entre le fond débile, et la forme, très sérieuse. •••


« J'incarne un personnage réactionnaire, inculte et très cynique. » Comment avez-vous décidé de monter sur scène ? Cela m'a pris à 14 ans, devant un spectacle d'Elie Semoun en DVD. J'ai joué mes premiers spectacles à 22 ans mais c'était pesant, avec mon boulot de journaliste à côté... Désormais plus à l'aise grâce à la télé et la radio, j'ai relancé la machine en 2017.

Comment avez-vous créé ce personnage ? J'ai notamment observé les éditorialistes de RMC, BFM TV et d'autres chaînes d'info en continu, pour m'inspirer de leur posture, leur façon de s'exprimer. J'ai puisé des petits éléments chez chacun. En ce moment 86

Quels seraient vos meilleurs "articles" pour ce support ? Le portrait de Benoît, le fameux ami noir de tous les racistes, qu'ils citent systématiquement pour se dédouaner. Sinon, j'aime bien aussi ce titre : "Toulouse : il se fait abattre de 46 balles dans le corps pour avoir demandé un pain au chocolat", et non une chocolatine comme on l’appelle dans le Sud-Ouest…

De quoi parle votre spectacle ? J'incarne un personnage réactionnaire, stupide, inculte et très cynique. Il aborde une dizaine de thèmes comme la fiscalité, le sexisme, l'immigration... Il regarde évidemment d'un œil inquiet Greta Thunberg, il considère Zemmour comme un héraut de la liberté d'expression, juge le voile comme un danger absolu pour l'identité française...


je suis fasciné par cette espèce de folie chez Pascal Praud sur CNews (rires). Il est en train d'amener, pas forcément pour le meilleur, quelque chose de nouveau dans la façon d'animer un débat à la télé.

« C'est épuisant de bouffer de l'actu tous les jours. » Ne vous sentez-vous pas rattrapé par éric Zemmour justement ? évidemment, je présente les choses différemment, en poussant les raisonnements jusqu'à l'absurde. Mais c'est intéressant de parodier des gens comme ça. Avec lui, une toute petite accentuation suffit pour déclencher le rire. Vous devez rester très réactif pour nourrir votre spectacle, n'est-ce pas ? Oui, c'est essentiel de capter l'air du temps, même si c'est épuisant de bouffer de l'actu tous les jours. Les infos sont tellement anxiogènes, emplies de tension et d'agressivité... Le seul fait de l'ingurgiter est un peu pénible pour l'esprit. Malgré tout, je prends de plus en plus de

plaisir à jouer ce spectacle. Au-delà du texte, depuis quelques mois, je cherche à faire marrer la salle par le jeu, le corps. Comment définir votre humour ? Il est un peu fou, absurde, satirique et surtout très écrit. Ça vient de l'école Gorafi, de l'écriture pure et dure t'apprenant à être drôle en peu de mots. Vous vous intéressez aussi aux "haters" dans Quotidien. Pourquoi ? Parce que ces commentaires agressifs et surtout très stupides n'avaient jamais été exploités. Ces messages sont plus drôles si tu devines le personnage caché derrière... à chaque fois que j'interprète un commentaire, j'ai l'impression de livrer une petite annonce d'Elie (rires). Un de ces "aphorismes" vous a-t-il marqué ? Un commentaire affligeant chasse l'autre dans ma mémoire, mais je me souviens bien, quand Notre-Dame de Paris a brulé, du très sobre "RIP la chatesdrale", hommage laissant l'orthographe dans le même état que le toit du monument (rires).

Lille, 08.01.2020, Théâtre Sébastopol, 20 h, 32 €, www.theatre-sebastopol.fr Béthune, 10.01.2020, Théâtre municipal, 20 h 30, 22 / 18 €, www.theatre-bethune.fr

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à lire / La version longue de cette interview sur lm-magazine.com


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© Jean-Louis Fernandez


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Outwitting the Devil | Conte défait |

Akram Khan a toujours aimé raconter, ou plutôt danser des histoires. On se souvient de Desh, solo émouvant narrant son épopée entre le Bangladesh, son pays d'origine, et la Grande-Bretagne où il vit. Citons aussi le lumineux Bahok, ode musicale à la migration. Mais Outwitting the Devil n'a cette fois rien d'un conte de fées. Dans sa dernière création, le chorégraphe met en scène sa vision de l'apocalypse. Un homme surgit des ténèbres, le torse nu et décharné. Dans ses mains, il porte un morceau de terre brûlée, l'air horrifié. D'emblée, le ton est donné. Nous voilà en plein chaos. Durant un peu plus d'une heure, sur une bandeson électronique angoissante, six danseurs des deux sexes, jeunes et vieux se (dé)battent. Ils se contorsionnent sur une scène en clair-obscur, entourée de briques calcinées, évoquant un monde désormais en cendres... On l'aura compris, Akram Khan livre ici une fable sombre sur le désastre écologique à venir.

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L'enfer sur Terre

Ce maître du kathak, danse traditionnelle indienne qu'il croise à l'envi avec des influences contemporaines, marie les genres comme personne. Pour créer Outwitting the Devil ("tromper le diable"), le Londonien s'est inspiré de L'épopée de Gilgamesh, l’un des plus célèbres textes de la littérature mésopotamienne – donc l'un des plus anciens de notre histoire. Plus précisément, il a puisé sa matière dans une tablette en argile retrouvée en Irak en 2011. Ce récit jusque-là inédit relate le combat entre deux demidieux, brûlant dans leur lutte, par ignorance, la plus belle forêt de cèdres du royaume. L'allégorie est puissante. Prémonitoire ? C'est en tout cas pour éveiller les consciences qu'Akram Khan a imaginé sa pièce. Et celle-ci a la beauté du Diable. Julien Damien Namur, 05 > 07.12, Théâtre de Namur, jeu & ven : 20 h 30 • sam : 19 h, 26,50 > 8,50 €, theatredenamur.be 89

La Louvière, 10 & 11.12, Le Théâtre, 20 h, 30 > 10 €, www.cestcentral.be Bruges, 10.01.2020, Concertgebouw, 20 h, 41 > 7 €, www.concertgebouw.be


© Renato Mangolin

Cria | L'âme des favelas |

Depuis une poignée de saisons, Alice Ripoll est de tous les festivals de danse. Avec sa compagnie Suave, la chorégraphe brésilienne offre un regard neuf sur la culture de son pays. Cria, sa dernière pièce, est un shoot de vie et de sensualité au sein d'une nation rongée par la violence.

Gand, 06 & 07.12, Vooruit, 20 h, 16 > 8 €, www.vooruit.be // Charleroi, 14.12, Les écuries, 20 h, 15 / 11 € www.charleroi-danse.be // Douai, 16.12, L’Hippodrome, 20 h, 22 / 12 €, www.tandem-arrasdouai.eu Louvain, 18 & 19.12, Stuk, 20 h 30, 20 / 16 €, www.stuk.be

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Le plateau nu, silencieux, s’embrase soudain. Un premier danseur déboule sur un funk métissé, bientôt rejoint par deux, cinq puis neuf interprètes, traversant la scène tout en jeux de jambes, moulinés de bras et déhanchés. Ces dix corps à moitié couverts de shorts à paillettes, boléros en fourrure ou leggings colorés, dévoilent une capoeira teintée de voguing et de breakdance. En réalité, il s’agit d’une version personnelle de la dancinha, cette danse hybride née, comme la plupart des membres du collectif, dans les favelas de Rio. Alice Ripoll aurait pu se contenter de cette énergie-là, de ce ballet de silhouettes moelleuses ou musculeuses magnifiquement assumées, embrassant le cliché auriverde autant qu’elle le dynamite. Mais ces artistes « ne reproduisent pas seulement une chorégraphie, ils occupent une place dans le monde », insistet-elle. Durant les moments de calme (déambulations silencieuses ou théâtre de geste) introduits après 20 minutes explosives, on entrevoit la personnalité de chacun. Plus drôles, forcément plus fragiles en dehors du groupe, ils cherchent tous dans la création une forme d’épanouissement. Dans un pays où l'art est plus que jamais menacé depuis l’arrivée de Bolsonaro, saluons cette forme de résistance. Marine Durand



© Collectif des Routes

Mémoire de fille | L'aventure intérieure |

Depuis plus de 40 ans, Annie Ernaux se dévoile pour mieux parler de nous. Les Armoires vides, La Place… Dans ses récits autobiographiques, cette « immigrée de l'intérieur », fille de cafetiers devenue enseignante puis écrivaine, livre son enfance, son adolescence ou ses tourments. « C'est une écriture d'intimité publique : elle raconte sa vie pour que les autres s’y reconnaissent », analyse Cécile Backès. Après L’Autre fille, la directrice de la Comédie de Béthune adapte Mémoire de fille. Dans son dernier ouvrage, la Normande replonge dans l’été 1958, celui de ses 18 ans au sein d’une "colo". Elle y vécut sa première expérience sexuelle mais aussi la honte, après que cet homme l’eût repoussée... Cette histoire est ainsi un voyage au fil des souvenirs, à la recherche de cette jeune fille perdue ("elle") et le livre qu’elle écrit ("je"). Au sein d'un décor habillé de projections vidéo, parmi cinq acteurs, deux comédiennes incarnent chacune un état différent de la narratrice : Annie E, qui parle depuis la salle, et Annie D, "la fille de 1958", visible sur le plateau, symbolisant cette scission entre passé et présent. Le pouvoir des mots (maux ?), lui, reste entier. J.D.

Namur, 09 > 15.01.2020, Théâtre, 20 h 30 (sam : 19 h), 21,50 > 10,50 €, www.theatredenamur.be

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Béthune, 18 & 19.12, La Comédie (Le Palace), 20 h, 20 > 5 €, www.comediedebethune.org



© Wim Vandekeybus

Traces Wim Vandekeybus emmène la danse hors des sentiers battus. Après avoir exploré la science-fiction (Mockumentary of a Contemporary Saviour) ou invité le public à un happening collectif (Go Figure Out Yourself), le Flamand nous invite sur ses Traces. Celles qui ont nourri son imagination, ses sensations, « plus anciennes que l’homme et sa mémoire » et laissées par la nature dans notre corps. Inspiré par les dernières forêts vierges d'Europe, il imagine une pièce pour dix danseurs. La bande-son, composée par Trixie Whitley et le guitariste Marc Ribot, accompagne ce retour à l’animalité et à la danse virtuose. J.D. Bruges, 08.12, Concertgebouw, 20 h, 41 > 10 €, www.concertgebouw.be (December Dance) Bruxelles, 13 > 18.12, KVS, 20 h (sauf mar : 18 h), 35 > 15 €, www.kvs.be Villeneuve d'Ascq, 14 >16.01.2020, La Rose des Vents, mar & mer : 20 h • jeu : 19 h, 21 > 6 €, www.larose.fr

Mons, 10.12, Théâtre le Manège, 20 h, 20 > 6 €, surmars.be

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Dans La Fin de l'homme rouge, la Biélorusse Svetlana Alexievitch livrait les témoignages désabusés des ex-Soviétiques ayant subi de plein fouet les bouleversements sociaux à la chute de l'URSS. Emmanuel Meirieu met en scène ces petites histoires qui firent la grande, la parole des bourreaux et des victimes, leurs espoirs et désillusions. Soutenue par une B.O poignante, ce spectacle narre le récit d'un pays disparu, et de souffrances méconnues. T.C.

© Nicolas Martinez

La Fin de l'homme rouge



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Centaures,

quand nous étions enfants | Chevauchée fantastique | Camille et Manolo sont partenaires à la vie comme à la scène. Il y a plus de 25 ans, leur rêve commun donnait naissance au Théâtre du Centaure, compagnie de théâtre équestre défendant une belle utopie : vivre en symbiose avec les chevaux, au quotidien comme dans leurs spectacles. Dans sa dernière création, le duo raconte sa propre aventure, entremêlant récits autobiographiques et mythologiques. Camille nous répond les pieds dans l’eau. En combinaison, elle est sur la plage avec ses chevaux dans les calanques marseillaises, pour le tournage d’un nouveau film écrit par Manolo. Le ton est donné. Au Théâtre du Centaure, rien ne se fait sans les équidés. Tout commence par une histoire de destins croisés. à l’âge de cinq ans, Manolo est formel, il veut « vivre dans un château avec des artistes et des chevaux ». Sa passion pour le galop et les contes ne se dément pas, il devient alors champion puis moniteur d’équitation à 19 ans. Camille, de son côté, monte les dadas de son oncle en Camargue, découvre le théâtre très jeune, se forme au Théâtre du Soleil puis en Indonésie. ■◆

Corps et âmes

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Leurs chemins convergent en 1989. Ensemble, ils apprennent à devenir centaures, à vivre sur quatre pattes, faisant corps avec leurs montures. Le Théâtre du Centaure s’implante à Marseille en « On a 1995, entre la prison des Baumettes et le parc les sabots national des Calanques. C’est un havre de bois dans la boue bâti à leur image : généreux, ouvert, tourné vers et la tête dans l’autre et curieux de nouvelles rencontres. les étoiles. » •••


© Martin Dutasta

Ils y réalisent 11 spectacles et une vingtaine de films. « Au quotidien on a les quatre sabots dans la boue et, comme le sagittaire, la tête dans les étoiles », résume Camille dans un sourire. ■◆

Enfants sauvages

Villeneuve-d’Ascq, 17, 18 & 21.12, La Rose des Vents, mar : 20 h • mer : 18 h • sam : 16 h, 12 > 6 € www.larose.fr (festival Les Toiles dans la ville)

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Dans Centaures, quand nous étions enfants, on découvre Camille-Gaïa et Manolo-Indra. Gaïa et Indra étant respectivement le frison et le pure race espagnole qui partagent la scène avec eux, sous une voûte céleste. Leur chevauchée, contée par l’auteur et metteur en « Raconter scène Fabrice Melquiot, est soutenue par la notre histoire, projection d’archives photos et vidéos. De quoi c’est aussi dire ressusciter les souvenirs de ces deux « enfants aux enfants : sauvages » devenus grands. « C’est comme croyez en feuilleter un album de famille en plusieurs vos rêves ! » dimensions. On perce la mémoire, l’imaginaire, les paysages qui constituent Camille et Manolo », rapporte Fabrice Melquiot. « Raconter notre histoire, c’est aussi dire aux enfants : croyez en vos rêves ! », complète Camille. Une épopée poétique, un songe devenu réalité qu’ils nous invitent à partager sans œillère ! Marie Pons



Les Enfants c'est moi © Fabien Debrabandere

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Pour les fêtes, laissez tomber les fadaises animées à la télé... emmenez plutôt vos enfants au théâtre ! Marionnettistes, comédiens, bruiteurs ou musiciens se mettent en quatre pour les plier en deux, les émouvoir ou leur titiller les neurones. Sélection de spectacles à voir en famille. Julien Damien

Loustix en fête à la veille de Noël, le Phénix met les petits plats dans les grands... et les plus petits devant de grands spectacles. Quoique. La compagnie Tourneboulé séduit toutes les générations, en mêlant philosophie et poésie. Dans Les Enfants c'est moi, une clownesse entourée de poupées raconte comment elle est devenue maman, et donc adulte, dans un conte initiatique. Tout aussi tourneboulant, Je brûle (d'être toi) interroge notre humanité à travers les errances d'une petite louve. Les marionnettistes de Zapoï invitent eux les bambins (dès six mois !) à prendre la mesure du temps, en couleur et en musique – pas n'importe laquelle : celle du cœur. Valenciennes, 10 > 15.12, Le Phénix, scenenationale.lephenix.fr mer : 15 h & 19 h, 14 > 10 €) // 11.12 : M. Levavasseur & Cie Tourneboulé : Je brûle (d’être toi) (17 h, 14 > 10 €) 14 & 15.12 : Stanka Pavlova & Cie Zapoï : Piccolo Tempo (sam : 11 h, 16 h & 17 h 30 • dim : 11 h & 16 h, 14 > 10 €)

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●●● Programme / 10 > 13.12 : Marie Levavasseur & Cie Tourneboulé : Les Enfants c'est moi (mar & ven 19 h,


© Christophe Loiseau

© Anthony Abbeloos

Piletta Remix Piletta Remix, c'est une pièce radiophonique jouée sur scène. Du théâtre pour les oreilles ou de la radio pour les yeux, à vous de voir (ou d'écouter). Equipés d'un casque, les spectateurs (dès 7 ans) suivent la performance de cinq acteurs, bruiteurs ou électro-musiciens, donnant vie à 13 personnages. On suit les aventures de Piletta, une fillette de neuf ans (et demi !) qui cherche un remède pour sa grand-mère malade en bravant les dangers d'un monde d'adultes... et les aléas du direct ! Maubeuge, 16 & 17.12, Théâtre du Manège 10 h & 14 h, 12 / 9 €, www.lemanege.com Villeneuve d'Ascq, 29.04.2020, La Rose des Vents, 18 h, 12 > 6 €, www.larose.fr

Quand je serai petit Créé en 2014, ce concert a fait ses preuves au fil de 200 représentations ! Tony Melville à la guitare et Usmar derrière ses machines "zélectroniques" incarnent (littéralement) une quinzaine de chansons, pour autant d'histoires légères ou graves, de petits se rêvant plus grands – et inversement. Comment accepter de ne pas être un super-héros ? Choisir son avenir ? Dans cette version augmentée, des chœurs d'enfants et un orchestre d'harmonie rejoignent la scène, lors d'un final... grandiose. Seclin, 03.12, Salle des fêtes, 18 h, 5 € / gratuit Lille, 21.12, Théâtre Sébastopol, 19 h, 13 > 5 € www.legrandbleu.com

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Raconter la mythologie grecque en manipulant des poupées en tissu, un peu de sable, des plumes et des morceaux de bois ? C'est le pari de Christine Le Berre. Sur scène, elle conte l'odyssée d'Olimpia, fillette de chiffon partant à la rencontre d'ellemême. Sur sa route, elle croise moult créatures (le Minotaure, le Cyclope, Sisyphe…), affronte ses peurs et s'émerveille, embarquant avec elle les jeunes explorateurs dès 3 ans, et même 18 mois dans une version adaptée - mais pas moins haletante. Olimpia : Armentières, 14.12, Le Vivat, 10 h & 16 h, 10 € + Little Olimpia : 15.12, 9 h 30 & 11 h, 10 €, www.levivat.net

© Cie hop!hop!hop!

Olimpia / Little Olimpia


© Isabelle De Beir

La Revue des Galeries Alexis Goslain à l'heure où ces lignes paraissent, la Belgique vit depuis 350 jours sans gouvernement… Rien de franchement dramatique, mais gageons que Bernard Lefrancq, Angélique Leleux ou la petite nouvelle de la bande, Cécile Djunga, sauront s'en amuser… La Revue des Galeries, c'est une tradition du rire bruxellois, une ode à la belgitude. Entre caricatures, chansons et sketchs politiques, ces trublions tirent à boulets rouges sur ce qui fait la "une" des gazettes – mais sur fond de strass et de paillettes ! Bruxelles, 04.12 > 26.01.2020, Théâtre Royal des Galeries 20 h 15 (+ matinées : 15 h), 30 > 12 €, trg.be

Nelken Pina Bausch / Tanztheater Wuppertal Créé en 1982, Nelken demeure une pierre de touche du répertoire de Pina Bausch. La chorégraphe allemande, disparue en 2009, y montrait la quintessence de sa danse-théâtre, entre humour noir et folie visuelle. Pour cause : sur scène, un champ de 8 000 œillets ("nelken", donc) constitue le décor de ce ballet féérique, où s'enchaînent les tableaux. Immigration, nationalité, amour ou folie sont autant de thèmes développés dans cette mosaïque atemporelle et majestueuse. Charleroi, 05 > 07.12, PBA, 20 h, 36 > 19 € www.charleroi-danse.be

Zauberland (Le Pays enchanté) R. Schumann & B. Foccroulle H. Heine & M. Crimp / K. Mitchell De quel pays enchanté s'agit-il ? Un monde merveilleux et sûr, en l'occurrence l'Allemagne, que rejoint une jeune femme enceinte fuyant la guerre et sa Syrie natale. Devenue chanteuse d'opéra à Cologne, elle s'endort et rêve de son traumatisant voyage… Inspirés par le Dichterliebe de Schumann, soit 16 lieder composés sur des poèmes de Heinrich Heine, le compositeur Bernard Foccroulle et l'écrivain Martin Crimp conçoivent autant de pièces, entretenant un dialogue entre passé et présent. Lille, 06 & 07.12, Opéra, ven : 20 h • sam : 18 h 23 > 5 €, www.opera-lille.fr

Our Daily Performance [ Giuseppe Chico et Barbara Matijevic ]

Villeneuve d'Ascq, 06 & 07.12, La Rose des Vents, 20 h, 15 > 8 €, www.larose.fr (Next Festival)

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La quête de performance, quelle aventure ! Surtout lorsqu'elle est brocardée par ces cinq énergumènes. En solo ou en groupe, les voilà qui détournent les fameux "tutos" infestant le web : comment apprendre à se défendre ? Améliorer sa vie sexuelle ? Jouer d'un instrument de musique ? En singeant ces gestes jusqu'à l'absurde, car sortis de leur contexte, ils livrent une chorégraphie rocambolesque. Les coachs et super nounous du Net sont rhabillés pour l'hiver.



Les Hérétiques [ Mariette Navarro / François Rancillac ] 2028. La France est déchirée entre extrémistes religieux et fanatiques de la laïcité. Manifestations, censure, violence… Au milieu de la mêlée, une citoyenne ne sait plus à quel saint se vouer. Un soir, elle rencontre trois femmes étranges (des sorcières ?) préparant un attentat… Adaptant un texte de Mariette Navarro, François Rancillac porte ce débat très actuel dans une salle de classe aux allures de tribunal et une ambiance de conte fantastique. Dès lors, libre à chacun de se positionner… Dunkerque, 11 & 12.12, Le Bateau-Feu, mer : 19 h • jeu : 20 h, 9 €, www.lebateaufeu.com

Les Crapauds fous Mélody Mourey

Joyeux week-end pour petits et grands

1940, en Pologne. Deux médecins sauvent des millions de Juifs de la déportation, grâce à une vaste supercherie : ils inventent une fausse épidémie de typhus, obligeant les nazis à placer la ville de Rozwadów en quarantaine ! Mais le iiie Reich est de plus en plus suspicieux… L'histoire est d'autant plus incroyable qu'elle est vraie ! Mélody Mourey s'en inspire pour mettre en scène une comédie survitaminée, où neuf interprètes incarnent une vingtaine de personnages, pour le meilleur et le rire.

L'esprit de Noël souffle sur le Théâtre de l'Idéal. Au programme ? Des chefsd’œuvre de l'animation russe soutenus par deux musiciens, un solo pour un monocyclotrampoliniste et du cirque hors-piste. Le Terabak de Kyiv entremêle acrobaties, magie et musique. Six performeuses enchaînent ici les numéros, du plongeoir au trampoline, sur fond de rock ou de chants ancestraux. De sacrées cas barrées !

Bruxelles, 12 > 14.12, Wolubilis, 20 h 30, 30 > 20 € (ven & sam : complet !), www.wolubilis.be

Tourcoing, 20 > 22.12, Théâtre de l'Idéal, divers horaires, 1 spectacle : 25 > 4 €, www.theatredunord.fr ●●● Stéphane Ricordel et Dakh Daughters : Terabak de Kyiv (20 & 21.12) // Dimitri Artemenko et Vadim Sher : Florilège au fil des neiges (21 & 22.12) // Benoit Charpe : Les Zèles d'Obus (22.12)

24 février 1848, le roi Louis-Philippe vient d'abdiquer. Dumas veut adresser son soutien à la régence mais son collaborateur, Auguste Maquet, croit en la république… Ils se disputent. Problème : ils ont écrit à deux ces feuilletons qui passionnent tant la France. Qui est donc le vrai père des Trois mousquetaires ? Du Comte de Monte-Cristo ? Durant une heure et demie, Davy Sardou et Xavier Lemaire se livrent une joute sans merci, dans une comédie télescopant la grande histoire et la petite. Roubaix, 20.12, Le Colisée, 20 h 30, 35 > 10 €, coliseeroubaix.com Lens, 07.02.2020, Le Colisée, 20 h, 25 > 12,50 €, villedelens.fr

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© Evelyne Desaux

Signé Dumas C. Gély & E. Rouquette / T. Petitgirard



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© Dan Cretu

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Dan Cretu – Les photomontages pullulent sur les réseaux sociaux. Le Roumain Dan Cretu y a gagné ses lettres de noblesse en mêlant culture pop et œuvres classiques, ou en transformant des aliments en objets du quotidien. Parmi ses créations, c’est toutefois cette image qui nous a tapé dans l’œil, confirmant nos pires doutes : oui, le Père Noël est vraiment une ordure. 106

dancretu.tumblr.com Q @ dan_cretu

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