n°104 / Février 2015 / GRATUIT
nord & belgique Cultures et tendances urbaines
Les Petits Pas, La Belle © Marine Drouard
Sommaire
LM magazine n°104 - Février 2015
06 - News
46 - Disques
Une marche pour les Monty Python, Trousse Pita, Poissons sous X, Complètement foufoot, Cybernaïveté, Joli coup de pompe, Métro à l’eau, Face aux clubs, Foire du Livre de Bruxelles
Champs, Motorama, Ostyn, Simian Ghost, John Carpenter
10 - reportage
50 - écrans
Soho : quartier libre !
Vincent n’a pas d’écailles, The Smell Of Us, Southcliffe, Festival International du Film d’Amour de Mons, Imitation Game
16 - Style Dries Van Noten au bout du fil
20 - Portfolio Esra Røise, beauté fêlée
28 - Interview Diabologum
32 - Musique Ariel Pink, Soirées rap au CECU, Antra’Zik, Jessie Ware, Allah-Las, Radulovic & Kurt Cobain, Tricky, TV On The Radio, Pigalle, Curtis Harding, Ibeyi… Agenda
48 - Livres Nina Allan, Louis Lanher, Peter Ackroyd, Sylvain Pattieu, Justine Lévy
58 - Exposition Colin Delfosse, Putain de guerre, Art Up !, Aloïse Corbaz, Body Talk, Les Invasions de Charles Pétillon… Agenda
78 - Théâtre & Danse Medúlla, Festival Prise Directe 2, Le bruit des os qui craquent, On est tous des quelqu’uns, Le Petit Chaperon Rouge, Festival Les Petits Pas, 80 000 000 de vues, Michael Clark, M Festival, Festival de Liège… Agenda
98 - Le mot de la fin Beau oui comme Bowie
LM magazine France & Belgique
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Ont collaboré à ce n° : Ont collaboré à ce n° : Thibaut Allemand, Elisabeth Blanchet, Rémi Boiteux, Julien Bourbiaux, Madeleine Bourgois, Julien Collinet, Mathieu Dauchy, Marine Durand, Nelly Haroux, Nicolas Jucha, Thomas Lansoud, Benjamin Leclerc, Raphaël Nieuwjaer, Clément Perrin, Marie Pons, Esra Røise et plus si affinités. LM magazine France & Belgique est édité par la Sarl L'astrolab* - info@lastrolab.com L'astrolab* Sarl au capital de 5 000 euros - RCS Lille 538 422 973 Dépôt légal à parution - ISSN : en cours L’éditeur décline toute responsabilité quant aux visuels, photos, libellé des annonces, fournis par ses annonceurs, omissions ou erreurs figurant dans cette publication. Tous droits d’auteur réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par quelque procédé que ce soit, ainsi que l’enregistrement d’informations par système de traitement de données à des fins professionnelles, sont interdites et donnent lieu à des sanctions pénales. LM / Let'smotiv est imprimé sur du papier certifié PEFC. Cette certification assure la chaîne de traçabilité de l’origine du papier et garantit qu'il provient de forêts gérées durablement. Ne pas jeter sur la voie publique.
Papier issu de forêts gérées durablement
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© Radek Mica - Getty Images
news
News
Monty Piéton Tout le monde connaît les Monty Python. Il y a les fans, les inconditionnels, et puis il y a les Tchèques... S’inspirant d’un sketch diffusé dans les années 1970 sur la BBC, ils sont des dizaines à défiler chaque mois de janvier dans les rues de Brno, imitant la démarche grotesque adoptée par John Cleese et ses comparses dans ce sommet de la série télévisée « Flying Circus ».
La trousse Pita
© Logg Design Studio
Encore un objet rigolo mais inutile ? Eh bien détrompez-vous. Car la trousse Pita, en plus de son design alléchant, est vraiment pratique. Souple, fabriquée en tissu de coton à Jérusalem, la « Ashtanur - pencil case » (argot local pour « pain plat ») assure le maintien de dix crayons (ou autres), est munie d’un compartiment pour clé USB, et permet une ouverture facile avec son onglet Velcro. Seul problème, elle donne constamment faim… 22€, www.etsy.com
7 news
Poissons sous X
Une étude réalisée par des chercheurs américains a mis en évidence la présence de drogues dans les rivières situées à proximité du site où se tenait un festival de musique, à Taïwan. MDMA, kétamine, etc. C’est près d’une quinzaine de substances qui ont été détectées dans l’eau. Si les conséquences sur la faune et la flore ne peuvent pas être encore déterminées, les spécialistes estiment que des pics de présence de ces produits dans l’eau pourraient « aggraver leurs effets ». Pauvre Nemo. arstechnica.com
Les pires mots de passe Alors que le piratage de données informatiques s’apprête à devenir une discipline olympique, le site SplahData révèle que le mot de passe le plus couramment utilisé dans le monde serait « 123456 », juste devant « password »… Une étude réalisée sur plus de 3 millions d’utilisateurs, quand même. www.splashdata.com
© Play-Ground.fr, cf Thetruth1777
Coup de pompe
Foufoot Lille en sang et or contre Lens en bleu et grenat ? Bordeaux en violet contre Toulouse en bordeaux. Le PSG en ciel et blanc comme Marseille ? S’inspirant d’une idée développée en Angleterre, le site Play-ground.fr a inversé les couleurs des logos de clubs rivaux de Ligue 1. De quoi voir ces derbys (ou classico) sous un œil décontracté, et surtout de rendre complètement vert les supporters les plus acharnés ! www.play-ground.fr
Ne jetez pas vos vieilles baskets! Faites plutôt comme Mac DeMarco. Le musicien a revendu les siennes sur Ebay pour 21 000 dollars, précisant bien qu’elles « puaient ». Cette somme est destinée au programme Willie Mae Rock Camp for Girls, qui promeut l’émancipation des femmes par la musique. Ouf, la morale est sauve ! williemaerockcamp.org
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Next Station Atlantic © Stephen Mallon
news
La photo du mo
is
Prochain arrêt, l’Atlantique
© Pierre Gauthier
New York’s Paradise Garage © Pablo Benito
Le métro, une boîte à sardines ? à New-York, l’expression n’a rien de galvaudée. Surtout depuis que la ville a décidé de balancer ses vieilles rames (préalablement dépolluées) au fond de l’Atlantique où elles feront office de récifs pour des millions de poissons. Un projet écologique suivi par le photographe Stephen Mallon, dont voici ici un cliché. www.stephenmallon.com
Face aux clubs
Foire du Livre de Bruxelles
En général, tout le monde veut y entrer sans poireauter. Pas Pablo Benito, qui préfère rester à l’extérieur pour mieux leur rendre hommage. Ce graphiste croque les façades des plus célèbres clubs du monde : Le Fabric de Londres, le Berghain et le Trésor de Berlin, le Paradise Garage de New-York... Des illustrations épurées qui révèlent ces temples de la nuit sous un autre jour.
Durant cinq jours, le site historique Tour et Taxis se mue en une immense librairie. Entre rencontres, débats, et expositions, plus de 1 000 auteurs sont attendus – notamment Frédéric Beigbeder, David Foenkinos, Danny Laferrière. Et une littérature à découvrir, celle du Québec, invité d’honneur de la 45 e édition de cette foire qui défend avant tout la langue française.
pablobenito.es
26.02>02.03, Bruxelles, Tour et Taxis, jeu, sam, dim, 10h>19h // ven, 10h>22h30 // lun, 10h>18h,9/8/5€
10 reportage
Palace Theatre (Soho)
11 reportage
Save Soho Texte & Photo Elisabeth Blanchet
Soho est en péril. Un danger d’embourgeoisement qui pourrait bien réduire à néant son caractère multiculturel, excentrique, louche, empreint de liberté sexuelle et d’expression. Madame Jojo’s, l’un de ses night-clubs phare, ou plutôt « stroboscopique », a fermé en décembre. Ce bâtiment qui, durant une cinquantaine d’années, a accueilli du cabaret, des shows déshabillés, des nuits gays et des performances de DJs va être remplacé par un grand hôtel. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase, et qui a poussé des artistes à se battre pour sauver l’esprit de ce si singulier quartier de Londres.
« L
ondres ne serait pas Londres sans Soho », proclame l’acteur Stephen Fry* dans la vidéo “Save Soho” lancée par le groupe d’activistes du même nom. Ceux-ci sont bien décidés à préserver ce quartier et son identité « interlope, bohémienne, non conventionnelle et centre de la communauté homosexuelle et transexuelle » poursuit-il. Un lieu unique jusqu’à
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son nom, qui dénote de ses voisins Bloomsbury, Marylebone et Mayfair... Soho viendrait du cri de ralliement de chasseurs du xviie siècle alors que le bitume des environs n’était encore qu’un champ. Malgré la volonté des aristocrates d’en faire un endroit riche et à la mode, il s’est toujours démarqué en accueillant des immigrés, notamment les huguenots (français protestants) fuyant l’édit De Nantes. Ce quartier négligé par rapport à ses voisins chics, cultive sa différence en multipliant les lieux de plaisir et de « débauche » au xixe (maisons closes, théâtres, music-halls…). Un siècle plus tard, il devient le QG des intellectuels, des artistes et des poètes. Parmi eux, Dylan Thomas, Francis « Soho est la soupape Bacon, Lucian Freud et plus tard, Damien Hirst, Jarvis Cocdes “24 hour party ker… Sans oublier les exilés de la France Libre qui soignaient people”. Il y a le « mal du pays » à la fameuse House sur Dean Street. toujours un club, French Aujourd’hui encore, Soho est un troquet ouvert » la soupape des “24 hour party
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Bar Italia
people”. Il y a toujours un club, un troquet ouvert. Comme le fameux Bar Italia que Jarvis décrit si bien, au petit matin, dans sa chanson du même nom… Des Stones à Benedict Cumberbatch. Mais Soho, ce n’est pas seulement la fête et une industrie du sexe qui fleurit dans les années 1960 et 1970 sous l’ère Paul Raymond (propriétaire ici de nombreux clubs de strip-tease et créateur du premier magazine de pornographie, Men Only !), « C’est aussi un lieu, des bars, des clubs, où les artistes peuvent s’exprimer et démarrer », explique le musicien-compositeur Tim Arnold, qui a lancé la campagne “Save Soho”. C’est dans des clubs locaux, comme le fameux Marquee, que les Rolling Stones ou les Yardbirds ont fait leurs armes. Tim a un excellent carnet d’adresses et s’est allié à des pointures (Benedict Cumberbatch, Stephen Fry, Pete Townshend… ). « Nous avons aussi écrit à Boris (Johnson), le maire de Londres pour qu’il soutienne la campagne ». Premier succès : il a promis de faire son possible pour que “Save Soho” participe aux projets de régénération du quartier menés par le Council de Westminster.
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Raymond Revue Bar
Madame Jojo’s
Village. Emma a grandi à Soho dans les années 1980 : « Pour une concentration moi, c’est un village, avec une concentration incroyable de incroyable de nationalités, haut en couleurs ! Lorsque j’allais à l’école, je nationalités, haut en trouvais que certaines femmes dans la rue accostaient mon couleurs ! » père d’une manière très amicale… Je ne réalisais pas que c’étaient des prostituées ! L’école était entourée de sex-shops et de cabarets. Mais dans ma tête d’enfant, rien de choquant, c’était l’environnement dans lequel je grandissais ». Emma se souvient d’une école progressiste, avec peu d’élèves où des fils d’acteurs côtoyaient des enfants d’émigrés chinois, bangladais… « On fêtait Diwali, le Nouvel An chinois, on appelait les enseignants par leur prénom. Je me rappelle aussi des “performers” de Madame Jojo’s qui venaient nous faire un show pour la fête de fin d’année dans le petit parc de Wardour Street… ». « Je ne suis pas contre la régénération de Soho, assure Emma. Il y a de nouveaux restos très sympas, des choses positives, mais il faut respecter son passé
« C’est un village avec
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Ronnie Wood, The Rolling Stones
et son héritage culturel », conclutelle. Et il semble que le monde du spectacle emmené par Tim soit sur la bonne voie. Ce joyeux (mais déterminé) collectif qui défend l’existence des clubs, des bars, des endroits où l’on pourra s’exprimer en toute liberté remporte déjà un beau succès médiatique. Vive Madame Jojo’s ! Vive la résistance ! * Stephen Fry : Peter’s Friend (1992), Moi, Peter Sellers (2004), Le Hobbit (2013 et 2014)...
à visiter (et pour signer la pétition) / www.savesoho.com
Pétitions pour sauver le quartier de Soho et Madame Jojo’s, Le musicien Tim Arnold (The Soho Hobo) fondateur du mouvement de soutien à Soho interviewé par la BBC, Benedict Cumberbatch et Stephen Fry dans la vidéo “Save Soho”.
16 style
Show 85 Men Summer 2014
17 style
Dries van Noten Au fil du temps
Texte Marine Durand Photos Ann Vallé / Mathieu Ridelle
Women Summer 2007
Attention, événement ! Conçue par le musée des Arts décoratifs de Paris en 2014, l’exposition Dries van Noten - Inspirations prend naturellement ses quartiers au MoMu d’Anvers, dans une version renouvelée par le couturier, spécialement pour la ville où il est né. Une première rétrospective (difficile à croire, non ?) à la scénographie enchanteresse, qui nous entraîne dans les coulisses de la création.
18 style
Show 30 Women Summer 2000 © Patrice Stable
Q
ue se passe-t-il dans la tête d’un styliste au moment d’imaginer son prochain défilé ? Quels souvenirs, influences, sensations convoque-t-il pour accoucher d’une nouvelle collection ? Loin de se contenter d’un choix de silhouettes, Dries van Noten a sondé son univers intime, puis rassemblé, à la façon d’un collectionneur, une incroyable diversité d’objets d’art présentés en regard de ses pièces de mode. Cabinet de curiosités. D’une vitrine à l’autre, chaque thématique est l’occasion d’une explosion de couleurs, d’un dialogue entre une étoffe et un extrait de film, d’un clin d’œil à une œuvre majeure de Hirst, Rothko, Picasso autant qu’à des références de la culture populaire. L’artiste rend aussi
Dries Van Noten, 2013 © John Dolan
hommage à un modèle comme Christian Dior, dont on découvre l’iconique tailleur Bar. « Le lien peut être direct entre les silhouettes et les œuvres, comme avec les tableaux graphiques de Vasarely, ou relever davantage de l’évocation, résume Kaat Debo, directrice du MoMu. Dries a réussi le challenge de représenter, de façon visuelle, son processus de création ». Dans ce fourmillement de petits trésors, dont de nombreux inédits liés aux collections printemps-été 2015 du couturier, chacun devrait trouver de quoi s’émerveiller. Et repartir convaincu que la mode, selon les mots de l’Anversois, n’est décidément « pas qu’affaire de beaux vêtements ». 13.02>19.07, Anvers, MoMu, mar>dim, 10h>18h, 8/6/3€/gratuit, www.momu.be
Les Arts Décoratifs, Musée de la Mode, exposition Dries Van Noten - Inspirations, 2014 © Luc Boegly
Bubblegum (inspired by Annika Von Hausswolff)
21 portfolio
Le beau bizarre
Esra Røise Texte Julien Damien
D
e son propre aveu, Esra Røise n’est « pas très douée » pour expliquer ses dessins. On peut donc y voir tout ce que l’on souhaite. Au premier coup d’œil : une féminité qui déborde de spontanéité, flirtant avec l’esthétique de la mode, que traduit un coup de crayon précis et virtuose. Des portraits très réalistes dynamisés par des tâches de couleurs vives qui semblent jetées sur la page avec une parfaite maîtrise. Mais c’est un univers un peu fêlé que l’on contemple. à bien y regarder, ces jeunes femmes ont toutes quelque-chose qui cloche : un œil abîmé, le nez qui saigne, un regard âpre… « Je suis attirée par le bizarre, les visages qui ont des traits un peu étranges, en tout cas pas du tout policés, confie la Norvégienne. Une posture dégingandée, un nez proéminent, des dents écartées…, j’adore ça ! » Pour Esra Røise, la beauté - comme le diable - se cache donc dans les détails, et surtout « l’imperfection », dit-elle. Diplômée de la National Academy of the Arts d’Oslo, spécialisée dans l’illustration de mode (elle travaille avec Nike, Levi’s Curve ID, les magazines Vogue, Milk, Vice ou Popshot) Esra Røise en détourne les codes pour mieux sublimer son sujet. Cherchant ainsi à « bousculer la perception conventionnelle que l’on peut avoir de ce qui est beau ». Une quête de contraste que l’on retrouve dans sa technique, qui croise l’analogique et le digital : « J’aime la précision du crayon et la manière dont il se mêle à l’aquarelle et à l’encre : on ne sait jamais ce que cela va donner ». Ce que l’on appelle la beauté de l’incertitude.
Nosebleed
Sunken Treasure
Cameraface
Sugar & spice
Céline, Prefall 2011
à visiter : www.esraroise.com
Feathers
DIABOLOGUM
Le Retour de l’Étoile Noire Propos recueillis par Rémi Boiteux Photos Eric Mulet / Béatrice Utrilla
29 musique
Il y a les rééditions patrimoniales, et puis il y a celles qui font vibrer la corde sensible, qui réveillent des émotions enfouies. #3 est de celles-ci. Diabologum ressuscite cet album culte dans le paysage du rock français - son dernier - sorti en 1996. à cette occasion, qui est aussi pour de nombreux chanceux celle de se prendre pour la première fois ce bloc cinglant en pleine figure, nous avons eu le plaisir d’échanger avec Michel Cloup, qui fut avec Arnaud Michniak l’une des figures de proue de ce groupe originaire de Toulouse. Il est accompagné du bassiste Richard Roman. Souhaitiez-vous cette réédition autant que ceux qui la réclamaient à cor et à cri ? Michel : Depuis plusieurs années, j’essayais de motiver le groupe et notre ancien label, Lithium. Tout était compliqué. Ça me rendait dingue que ce disque ne soit plus disponible depuis dix ans, alors que certaines copies se vendaient jusque 600 euros en vinyle et 100 euros en CD. Finalement, mon nouveau label (Ici d’Ailleurs) a défendu cette idée et trouvé un accord avec Vincent Chauvier de Lithium. Richard : Nous la souhaitions d’autant plus qu’elle était l’occasion de présenter quelques raretés et inédits (11 titres enregistrés entre 1996 et 1997). L’idée courait depuis 2008. Votre regard et votre discours ont-ils changé ? M : Chacun a suivi un parcours différent, artistiquement et dans sa propre vie. J’ai eu deux enfants, ça m’a pas mal bousculé. Mais le monde et la société n’ont pas beaucoup évolué, tout a juste empiré. En réécoutant l’album, j’ai été frappé par l’actualité des textes. R : Nos regards n’ont pas tant divergé. Le mien s’est même durci : les vautours me font encore plus vomir, les pigeons encore plus frémir et les hirondelles encore plus rêver ! >>>
« Ça me rendait dingue que ce disque ne soit plus disponible depuis dix ans, alors que certaines copies se vendaient à 600 € » Avez-vous été sollicités par l’industrie « mainstream » suite à la réputation acquise par l’album ? Entendre Zazie s’extasier sur vos textes lors de votre passage live à Nulle Part Ailleurs vous avait-il amusé ? M : à l’invitation de Noir Désir, nous avons fait quelques grosses scènes. Nous étions parfois très bien accueillis, parfois rejetés. Entre Dolly et FFF, Diabologum c’était un peu bizarre... Mais on aimait bien ça, c’était tellement martien. Zazie nous a fait la bise avant cette émission, je pense que c’est le contact le plus proche que nous ayons eu avec le mainstream français de l’époque. R : Avant de rencontrer Zazie dans le mainstream, je ne connaissais que Zazie dans le Métro, j’ai préféré la première ! Nous étions des ovnis, musicalement et socialement, au sein d’une scène française déjà très policée. Deviniez-vous que ce disque serait le dernier et qu’il marquerait autant les esprits ? M : Son retentissement dès la sortie nous a surpris. Nous pensions qu’il serait rejeté à cause de sa noirceur. Je n’imaginais pas qu’il deviendrait
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une référence du rock français. Quelques mois avant notre séparation, nous parlions encore d’un nouvel album, toujours à écrire, composer et enregistrer – en témoigne le disque de bonus de la réédition. Mais il y avait des tensions amplifiées par la fatigue. Ça n’a pas été facile de construire autre chose ensuite avec d’autres artistes, puisqu’on nous ramenait toujours à Diabologum. Mais, 18 ans plus tard, c’est un plaisir d’en parler avec autant de passion. Le style revêche de #3 a «fait école», pour le meilleur (Dominique A) et pour le pire (Fauve ?)... Quel regard portez-vous sur une certaine descendance ? M : Pas mal d’artistes ont été influencés par Diabologum, certains ont l’honnêteté de le dire. Quand l’influence est bien digérée, au service d’une forte personnalité, ça me fait plaisir. R : Ce qui m’a marqué chez Fauve, c’est la ferveur de son jeune public et le magnétisme existant entre eux. Malheureusement, c’est très pauvre scéniquement, mis à part le spoken guy, et musicalement très éloigné de Diabologum.
à écouter / Diabologum, Réédition # 3, Ici d’ailleurs 2 CD ou 2 LP vinyle, augmentés de 11 titres rares et inédits enregistrés entre 1996-1997), 14€ (version CD), 18€ (version vinyle)
La formation de Michel Cloup Duo a-t-elle représenté un nouveau départ ? M : C’était surtout l’idée de s’assumer sous son propre nom, d’en finir avec cette idée de groupe tel que je l’avais vécu entre 1990 et 2010. Un peu comme se mettre à poil et se balader dans la rue (en moins pénible, quand même). D’ailleurs, je prépare un nouvel album.
Peut-on s’attendre à une tournée ? M : Nous n’allons pas refaire de concerts de Diabologum, mais une performance, pour 6 personnes par soir : « Dîner de cons ». Une soirée intime avec nous, un repas que nous aurons cuisiné, avec des boissons et de la musique que nous aurons choisies. Une alternative à ces reformations ennuyeuses jouant sur le porte-monnaie et la nostalgie des quadras – et, je précise, les cons c’est nous !
33 musique
Ariel Pink
Docteur Maboul Texte Rémi Boiteux Photo Grant Singer
Joie ! Tourcoing et Bruxelles s’apprêtent à accueillir l’auteur du plus bel attentat musical de 2014, le chef-d’œuvre pop Pom Pom. Si l’on ne sait jamais à quoi s’attendre avec Ariel Pink, l’espoir de passer une soirée mémorable est plus que permis. C’est ce dont nous avons le plus besoin en cette période funeste : d’authentiques esprits libres, des fous gentils, des faux méchants, de vrais branques. Des irrécupérables. Et c’est bien ce qu’est Ariel Pink, dernier descendant d’une lignée d’orphelins qui hybride Kim Fowley avec R. Stevie Moore sous le haut parrainage de Frank Zappa. Après une série de CD-R autoproduits et deux LPs plus largement distribués (Before Today et Mature Themes), tous plus ou moins liés à son projet et faux groupe « Haunted Graffiti », Pink signe de son seul nom le monumental Pom Pom, qui se révèle pourtant tout sauf minimal. Un feu d’artifice dont nous ne sommes toujours pas revenus et qui promet de très grands moments sur scène. Vannes ouvertes. Peut-être plus encore que sur disque, le Californien a pour habitude de prendre le public de ses concerts par surprise et à rebrousse-poil. Qu’on l’attende en Philippe Katerine de l’underground yankee, Mickey Mouse junkie lançant blagues foireuses et ballons à l’hélium : le voilà ouvrant grand les vannes de sa sensibilité non feinte, hurlant son désespoir ou pleurant ses amours déçues. Mais qu’on le craigne mûri et assagi, et on le retrouvera sale gosse freak et punk. Bien entouré, Pink n’hésite pas à laisser ses complices improviser sur ses pépites pop déjà bien secouées. Lui pour qui L.A. est « le meilleur endroit pour 01.03, Tourcoing, Le Grand Mix, 18h, vivre, car les gens y sont dingues », devrait 16/13/5€, www.legrandmix.com 15.03, Bruxelles, beursschouwburg, transformer Tourcoing et Bruxelles en capiComplet ! tales des azimutés.
34 musique
Soirées au CECU
En mode rap
Texte Julien Damien Photo Dj Vadim © Blixton Dupont
Du hardcore Gradur au consensuel Abd Al Malik, le rap compte autant d’esthétiques qu’Eminem débite de mots en une minute. Et on n’a pas trouvé meilleur endroit que le CECU pour en faire la démonstration. Inauguré en octobre, et unique en France, ce nouveau temple du hip-hop dédié à la création – danse, graff, musique – prouve qu’il sait aussi recevoir. Honneur aux dames. Ce mini-festival s’ouvre sur une soirée 100% filles. En tête d’affiche, jeudi, l’élégante Gavlyn nous rappelle que la gent féminine occupe une place de choix derrière le mic, loin des potiches qui s’agitent dans les clips blingbling. Depuis 2006, l’Angeleno s’est imposée en façonnant un son old school teinté de soul et de jazz qui ressuscite le « boom bap » des débuts du rap (citons Nas, Mos Def, KRS One). Changement de registre – et de taux de testostérone – vendredi avec la soirée « 1 son, 1 jeune, 1 quartier », initiée par Pépite du quartier sud de Lille, qui met en avant les jeunes talents de la métropole à travers un versant plus « street » du genre. à noter : la présence de Demi-Portion, de Sète, qui trace son chemin dans les pas de la Fonky Family avec des textes revendicatifs et des beats acérés. Enfin, samedi, le Russe DJ Vadim, l’un des maîtres de l’abstract hip-hop, met à profit sa science du rythme et de la mélodie (entre reggae roots et two step anglais) pour un set plus 05.02, soirée rap féminin : Gavlyn + Akela Battle récréatif . Et achève de convaincre les Angel +DJ T-Sia, 20h, 12/8€ 06.02, Demi-Portion + Jarod + Slimane + Rimkhana + plus sceptiques que le rap se déguste « 1 son, 1 jeune, 1 quartier », 20h, 10€ 07.02, DJ Vadim + Symbiz (puppetmastaz), 20h, bien à toutes les sauces. 12/10€, Lille, CECU, www.lille.fr
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Klô Pelgag © Benoît Paillé
musique
Antra’Zik à écouter ce qui passe sur les grandes ondes, on aurait tôt fait de mépriser la chanson française. Le festival Antra’zik dézingue ce vilain poncif. Comment ? En proposant une programmation audacieuse, qui manifeste un goût pour les bons mots et la curiosité. Pour sa 7e édition, la formule de cet événement produit par l’université Lille 2 n’a pas changé : durant trois soirs, deux artistes se partagent l’intimiste salle de l’Antre 2. On recommande le rock lettré de Radio Elvis, les textes barrés d’Askehoug - improbable croisement entre Arthur H et les Beastie Boys (!) - ou encore les mélodies touchantes et décalées de La Demoiselle Inconnue. J. D. 04>06.02, Lille, L’Antre 2, mer : Imbert Imbert + Radio Elvis // jeu : La demoiselle inconnue + Klô Pelgag // ven : Askehoug + Ben Mazue, 20h, 8/5/1€ par soir, www.antrazik.fr
© DR
Jessie Ware Bien identifiée sur la scène anglaise, voilà une autre paire de manches que de situer Jessie Ware sur le grand échiquier musical. Ses remarquables collaborations avec SBTRKT ou Disclosure et le brassage pop-dance-jazz de son premier album, Devotion, nous incitent d’abord à la ranger - un peu paresseusement - dans la case electrosoul, voire RnB futuriste, où l’on trouve déjà FKA Twigs. Mais la Londonienne demeure avant tout une grande chanteuse, une de ces divas modernes comme le furent Sade Adu ou Kate Bush. Ce qu’elle nous rappelle avec une touche de glamour dans Tough Love (2014). Jessie peut décidément tout se permettre. Julien Damien 12.02, Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 27€, www.abconcerts.be
38 musique
Allah-Las
Un peu plus près du soleil Texte Mathieu Dauchy Photo Nolan Hall
Intérieur Jour. Dans un bar devant de larges vitres baignées de soleil, quatre jeunes hommes aspirent en hâte le fond de leur milk-shake et, se levant, laissent nonchalamment tomber quelques dollars sur la table. Direction la plage de Malibu, planches de surf sous le bras et cheveux au vent.
D
ésolé pour le cliché, mais la musique des Allah-Las est un express pour le Pacifique et quelques cartes postales sans âge, où des couleurs vives dopent un entertainment permanent. Los Angeles, cette ville où l’on a pu accoler « surf » à « rock » parce que des veinards excellèrent dans ces deux disciplines dans le rouleau des années 1960. De Laurel Canyon à Pacific Palisades, s’y construisit le mythe sublimé par les Beach Boys d’une attitude cool, traversant la musique avec la fougue juvénile. Dans les rayons du mégastore Amoeba Music, sur Sunset Blvd, les vinyles de Love ou des Byrds sont là pour le prouver. C’est précisément dans cet hypermarché de la galette que se sont rencontrés trois des quatre Allah-Las. Tandis qu’à 30 miles de là, Tarantino se forgeait une culture ciné dans son vidéo-club de Manhattan Beach, Pedrum Siadatian, Spencer Dunham et Matthew Correia avaient tout le temps de débattre des imperfections de tel disque mythique. Gageons qu’ils se sont attardés sur les enregistrements des Zombies, de Brian Wilson ou des artistes sus-cités. Worship The Sun, second album à la savoureuse pop rétro et à la production impeccable, est fourni avec sa 24.02, Lille, L’Aéronef, 20h, 18>8€, www.aeronefpoignée de sable fin. On ne se lasse spectacle.com // 02.03, Gand, Handelsbeurs, 20h15, 20/18,50€, www.handelsbeurs.be jamais des clichés de vacances !
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Nemanja Radulovic © DR
musique
Radulovic (Paganini) & Kurt Cobain Attention, démolition de clichés au Nouveau Siècle ! L’o.n.l. explore une nouvelle approche de la musique classique. D’abord en accueillant celui que l’on surnomme « la rock star » du violon. Tatouages, cheveux longs et énergie brute, le Serbe Nemanja Radulovic propose une interprétation fougueuse du concerto du génial virtuose Paganini. Un esprit rock donc, mais aussi... grunge. En ouverture, l’Orchestre National de Lille joue Ashes (« cendres »), pièce pour 78 solistes créée par Yann Robin rendant hommage à Kurt Cobain. Un morceau symphonique que le compositeur français - en résidence à l’o.n.l. - a écrit en s’inspirant de l’histoire du groupe Nirvana, vingt ans après le suicide de son leader. Rock will never die. Julien Damien 16 & 17.02, Lille, Nouveau Siècle, 20h, 45>5€ // 20.02, Boulogne-sur-mer, Théâtre Monsigny, 20h, 16>5e à écouter aussi / Concert flash, 17.02, Lille, Nouveau Siècle, 12h30, 8/5e
Tricky
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Tricky est de retour sur scène pour une tournée en forme de coming-out. Le Bristolien y défend Adrian Thaws, titre de son nouvel album, qui est aussi son vrai nom… clamant ainsi sa véritable identité comme pour dire : « vous ne me connaissez pas ». Coutumier des expérimentations, l’ancien membre de Massive Attack élargit son spectre musical : du hip-hop, des accents house, en passant par le jazz, le reggae… Bref, il décompose le trip-hop, comme pour mieux s’interroger sur lui-même et ce courant qu’il contribua à créer il y a 20 ans. On peut donc s’attendre à tout, mais Tricky a toujours quelques tricks dans son sac. B. Leclerc 21.02, Lille, L’Aéronef, 20h, 28>15€, www.aeronef-spectacles.com
42 musique
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TV on the radio Question : comment écouter en même temps du rock, du gospel, des musiques électroniques… ? Avec un iPod, certes, ou plus simplement un album de TV On The Radio. Passés maîtres dans l’art du renouvellement - en faisant finalement toujours la même chose - les Brooklyniens auraient pu abandonner après la mort soudaine de leur bassiste, Gerard Smith, en 2011. Mais c’est bien les poches bourrées de tubes psychédéliques qu’ils reviennent, avec Seeds (« graines ») et une tournée mondiale en forme de renaissance. 10.02, Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 26€, www.abconcerts.be
certs Csoén lection Dim 01.02 Idomeneo (Mozart) Lille, Opéra, 16h, 69/49/30/13/5 e Louis Bertignac Lille, Théâtre Sebastopol, 19h, 62>40e Jean-Louis Murat Mons, L’Alhambra, 20h, 18e
Mar 03.02 Idomeneo (Mozart) Lille, Opéra, 19h30, 69/49/30/13/5 e Busdriver + Anna Kova (en solo, ou presque) Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h, 12/10/8e Ennio Morricone Bruxelles, Palais12, 20h30, 98/78/58e
Typh Barrow Bruxelles, Centre Culturel d'Uccle, 20h30, 15/12e
Mer 04.02 Ivory Lake + Tim Fromont Placenti + SaSo Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h, 12/10/8e Louis Bertignac Bruxelles, Cirque Royal, 20h, 49,50/43,50e Nicole Willis & The Soul Investigators Anvers, Arenbergschouwburg, 20h15, 20/17e
Jeu 05.02 Cortez + Ropoporose (en solo, ou presque) Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h, 12/10/8e
busdriver © DR
Konono N°1+ Alo Wala Gand, Vooruit, 20h, 12e
Ven 06.02 I love Rock’n Pop Lille, Théâtre de l'Hôtel-Casino Barrière, 19h30, 35e Idomeneo (Mozart) Lille, Opéra, 19h30, 69/49/30/13/5 e Paul Thomas Saunders + Martin Mey (en solo, ou presque) Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h, 12/10/8e The Afghan Whigs Bruges, Cactus Muziekcentrum, 20h, gratuit Thomas Enhco + Barbara Hendricks Tournai, Maison de la Culture, 20h, 48/46/45e Cortez + Totorro + Earthlings Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h30, 10/7e
Les Wampas + Poncharello Lille, L'Aéronef, 20h, 16/11/8e
Marianne Faithfull Amiens, Maison de la Culture, 20h30, 36>15,50e
Debout dans les cordages Lomme, maison Folie Beaulieu, 20h30, 9/5e
Mademoiselle K Boulogne sur Mer, Espace de la Faïencerie, 21h, 8/6/5e
Sam 07.02 Bojan Z Tournai, Maison de la Culture, 16h, 16>8e Paul Thomas Saunders Louvroil, Espace Culturel Casadesus, 20h, 10/7e Bikini Machine + The arrogants Pérenchies, S. des Fêtes M. Schumann, 20h, Grat. (sur résa)
Corson Lille, La Péniche, 20h, 15/14e Disappears + Inheads Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h, 12/10/8e Barbara Hendricks Béthune, Théâtre, 20h30, 53>33e Set & Match + Ben L’Oncle Rap Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h30, 12/9e
Laetitia Shériff + Baden Baden Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 13/10/5e
Dj Pierre + Tyree Cooper… Charleroi, Rockerill, 22h, 10e
Milky Chance Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 27e
Dim 08.02 The Parrots Lille, La Péniche, 18h, 12/11e
Lun 09.02 Motorama + Durkheym Villeneuve d’Ascq, L’Antre 2, 20h30, 8/5/1€
Mar 10.02 Idir Armentières, Le Vivat, 20h, 21/14/7e Melanie de Biasio Bruges, Stadsschouwburg, 20h, 21/18/12/9e Spain Bruxelles, Botanique/Rotonde, 20h, 19/16/13e
Mer 11.02 Slow Magic + Buvette + Wesh Sound System Roubaix, La Cave aux Poètes, 19h, 12/10/8e
Jeu 12.02 U-Roy & Big Youth Bruxelles, VK*, 19h30, 22e Diagrams Lille, La Péniche, 20h, 12/11e Motorama Bruxelles, Botanique, Witloof Bar, 20h, 16/13/10e My Brightest Diamond + Tim Fite Lille, L'Aéronef, 20h, 15>5e
Bernard Lavilliers Roubaix, Le Colisée, 20h30, 45>8e Emily Loizeau Bruxelles, Théâtre 140, 20h30, 25/22e
Ven 13.02 I love Rock’n Pop Lille, Théâtre de l'Hôtel-Casino Barrière, 00h, 35e Bernard Lavilliers Béthune, Théâtre, 20h30, 39/36e
Pigalle D’abord avec Les Garçons Bouchers et ensuite Pigalle, François Hadji Lazaro a enfoncé une seringue chargée d’un cocktail détonnant dans le bras du rock français au début des années 1980. Un mélange de punk, de chansons réalistes et de musiques traditionnelles portant des textes dont la poésie transpire la rue et quelques rades louches. Quatre ans après sa dernière tournée, le ton de cette fine gueule (ami de grands chefs et vignerons) reste terriblement actuel. Comme le proclame son dernier album : « T’inquiète… ». 13.02, Oignies, Le Métaphone, 20h30, 17>11€, 9-9bis.com
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Fugain & Pluribus © Youri Zakovitch
Michel Fugain + Pluribus Lille, Théâtre de l’Hôtel du Casino Barrière, 20h30, 35€
Pierre Lapointe Bruxelles, Théâtre 140, 20h30, 25/23/21e
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Curtis Harding © Hedi Slimane
Curtis Harding a passé son enfance à chanter du gospel au fin fond de son Michigan natal. Sur les bancs de l’église bien sûr, mais aussi dans la rue aux côtés de sa prêcheuse de mère, où ils répandaient la bonne parole aux clochards, aux toxicos... On ne s’étonnera donc pas de le retrouver aujourd’hui dans le sillage des grands noms de la soul, tels Otis Redding, BB King ou Curtis Mayfield - pour la voix et le groove. L’ancien choriste de Cee Lo Green a pris son envol avec un premier album (Soul Power), et devrait vous donner la chair de poule. 22.02, Lille, La Péniche, 18h, 12/11€ // 23.02, Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 15€
Luce & Mathieu Boogaerts Lomme, maison Folie Beaulieu, 20h30, 14/8e Pauline Croze Marcq-en-Barœul, Théâtre de la Rianderie, 20h30, 9>5e Bal Ah Bon Lille, La Péniche, 22h, 5e
Douglas Firs + Drums Are For Parades + New Rising Sun + Pilod + Ping Pong Tactics + Polaroid Fiction + Raketkanon + Rhinos are people too + Scrappy Tapes… Anvers, Trix, 18h30, 18/15e I Love Rock’N Pop, soirée Saint-Valentin Lille, Théâtre de l’Hôtel du Casino Barrière, 19h30, 40€
Pauline Croze © DR
BRNS Leffinge, De Zwerver, 20h, 14/12e
Sam 14.02 Big Bang / Happy Day des enfants Lille, Opéra, 12h, 3e Carrefour des Orchestres (Mernier Concerto pour violon, en hommage à 14-18), Chostakovitch Symphonie n°7 (Leningrad)… Lille, Nouveau Siècle, 18h30, 45>5e
Lun 16.02 TR/ST + Jonas Bering Lille, L'Aéronef, 20h, 15>5e
Mar 17.02 Viet Cong Courtrai, De Kreun, 20h, gratuit Oldelaf et Al Villeneuve d’Ascq, L’Antre 2, 20h30, 8/5/1€
Mer 18.02
Intergalactic Lovers Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 23e
Macy Gray Louvain, Het Depot, 20h, 36/33e
Jamie T - Palace Bruxelles, Botanique/Orangerie, 20h, 20/17/14e
Viet Cong + Absolutely Free Bruxelles, Botanique,Witloof Bar, Bruxelles, 20h, 14/11/8e
Mademoiselle K Lille, L'Aéronef, 20h, 22>10e
Oldelaf et Al Villeneuve d’Ascq, L’Antre 2, 20h30, 8/5/1€
Melanie de Biasio + Kris Dane Gand, Vooruit, 20h, 23e Miossec Tournai, Maison de la Culture, 20h, 30/28/26e The Kooks + Bleachers Bruxelles, Cirque Royal, 20h, 30e Retro Acid (party) Gand, Vooruit, 23h, 15€
Jeu 19.02 The Kooks + Bleachers Lille, L'Aéronef, 20h, 33e Véronique Vincent & Aksak Maboul Bruxelles, Les Ateliers Claus, 20h, 15/12e
Dj Shadow & Cut Chemist © DR
Sam 21.02 Orchestre National de Barbès Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, Gratuit Oldelaf + Duel Oignies, Le Métaphone, 20h30, 16>10e
Black Tusk Lille, La Péniche, 20h, 15/14e Dj Shadow & Cut Chemist Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 28e
The Popopopops + Colt Silvers + La Mort de Darius Louvroil, Espace Culturel Casadesus, 20h, 12/10/8/ 5e
Quand je serai petit Roubaix, Théâtre Pierre de Roubaix, 17h30, 6€
Jérémie Ternoy Trio Armentières, Le Vivat, 20h, 7e Pig & Dan Lille, Le Magazine, 23h, nc
Bertrand Belin + Mathieu Boogaerts + Ladylike Lily Bruxelles, Atelier 210, 19h30, 18/15e
Mer 25.02 La Vache Qui Rock Dunkerque, Les 4 Ecluses, 10h, 16h, 6/5e
Willow Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 15e
Sam 28.02
The Black Keys Anvers, Antwerp Sportpaleis, 20h30, 45e
Kitty, Daisy & Lewis Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 16/13/5e
Camélia Jordana Bruxelles, Botanique/Orangerie, 20h, 25/22/19e carl barât and the jackals Bruxelles, Botanique/Rotonde, 20h, 19/16/13e
Archive Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 31e + Jeudi 26.02
Ven 27.02 Blackalicious Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 16/13/5e
25.02, Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 13/10/5€ // 02.03, Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, Complet !
www.lm-magazine.com
© Flavien Prioreau
Ibeyi Filles du percussionniste Anga Diaz (membre du Buena Vista Social Club) Lisa-Kaindé et Naomi sont en train de se faire un nom. En quelques morceaux seulement, ces sœurs jumelles (« Ibeyi » en langue Yoruba) ont secoué la soul moderne, écrivant leurs propres chansons, en espagnol, yoruba, français ou anglais. Une rencontre décisive avec Richard Russell, fondateur du label mythique XL Recordings (Adele, The xx, Radiohead...), les propulse maintenant sur le devant de la scène, et étoffe le son du duo. Un brassage culturel ensorcelant.
Hanni El Khatib Lille, Le Splendid, 20h, 23e The Bony King of nowhere Dixmude, 4AD, 20h30, 12/10/8e
Mar 24.02
Ven 20.02
Chapelier Fou Bruxelles, Botanique/Rotonde, 20h, 16/13/10e
Fink Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 25e Soirée Brava : Brodinski + DJ Slow + Canblaster + Benji.B + Addisson Groove Lille, L'Aéronef, 21h, 26>14e Joey Starr + Friends Lille, Le Magazine, 23h, nc
46 disques
Disque du mois
Champs VAMALA (Play It Again Sam/PIAS)
Il y a un an, nous découvrions avec Down Like Gold les vertus réconfortantes des frères Champion : les chansons pop-folk délicates inspirées par leur île de Wight natale (au sud de l’Angleterre), exhalaient un parfum atemporel. Les Champs connaissent sur le bout des doigts les leçons d’un impressionnant collège de maîtres – des Everly Brothers à Michael Stipe en passant par Morrissey et le Mike Oldfield de Moonlight Shadow – et les réinvestissent avec un naturel désarmant. S’il faut aujourd’hui se ruer sur cet opus plus urbain – et l’offrir à ses amis les plus chers – c’est que, non seulement le miracle se répète, mais aussi que Champs a gagné en ampleur. Détaché de l’air du temps, Vamala est un brillant ouvrage à l’ancienne, radio-compatible et a priori inoffensif. Mais sous cette enveloppe policée vibre un torrent d’émotions, libéré par des mélodies si parfaites qu’elles semblent venir d’un autre monde. Rien de plus simple pourtant que d’entrer dans le pays de Vamala, il suffit de laisser opérer le charme infini de cette collection ininterrompue de tubes en puissance. En sortir est en revanche une autre paire de manches. Peu importe : on n’est pas près de vouloir s’extraire de ce chef-d’œuvre à chérir. Rémi Boiteux
Motorama Poverty (Talitres)
Après Calendar (2012) les cinq Soviets suprêmes de Motorama livrent un album sobrement intitulé Poverty. Des terres gelées de leur Russie natale émerge un son hanté par des influences postpunk, enveloppé par la voix d’outre-tombe de Vladislav Parshin qui rappelle furieusement celles de Paul Banks ou Ian Curtis. La beauté claire de ce nouveau chapitre prend corps au contact de mélodies amples, déployées entre guitares limpides, basse efficace et claviers stellaires. Chaque morceau, de l’électrisant Dispersed Energy au Heavy Wave qui déferle au cœur de l’album, compose une palette dont le spectre oscille entre noirceur sidérurgique et romantisme fleur bleue. Soit cinquante nuances de gris pour un disque avec lequel on passe volontiers la saison, et plus si affinités. Marie Pons
Ostyn
Simian Ghost
No South of the South Pole (PIAS/Le Label)
The Veil (Discograph / Harmonia Mundi)
Dans les interlignes de l’histoire de la pop se glissent des formations souvent oubliées au moment des grands inventaires, mais précieuses à certaines oreilles. C’est le cas des Belges d’Absynthe Minded, dont la carrière s’est écrite presque sans bruit. à leur tête, Bert Ostyn avait encore de quoi ravir les amateurs de singles bien troussés. Cette aventure solo en est la preuve : de la new-wave de Libertine au phrasé dylanesque de The Imposter, il navigue entre les styles, sans prétention mais avec une patte efficace et racée, distribuant quelques pépites (Telling All Your Secrets, Toothache). Cette variété d’approches disculpe d’une superficialité que le Gantois semble de toute façon revendiquer : son album est une bise, qui laisse peu de traces mais vous frôle avec bonheur. Rémi Boiteux
Autant le dire tout de suite, Simian Ghost a très mal saisi l’esprit du temps avec The Veil : pas de postmodernité fatiguée d’elle-même ici, ni la moindre trace de cette mélancolie propre à l’époque (que les Suédois ont donc choisi de recouvrir d’un « voile »). Plutôt des mélodies éthérées, proches de la berceuse et pour lesquelles Sebastian Arnström a abandonné les artifices électroniques pour se concentrer sur le songwriting. Il y a un peu des Beach Boys dans cette pop irradiée de soleil (A Million Shining Colours), mais aussi de Sufjan Stevens (en moins cafardeux), à l’occasion traversée de soul-funk très 80’s (Never Really Knew). Un album qui pioche ses influences dans le futur, le passé, pour accompagner la morosité du présent d’une bande originale très sucrée. Et salutaire. Julien Damien
John Carpenter Lost Themes (Sacred Bones Records / Differ-Ant)
Difficile de ne pas appréhender Lost Themes à l’aune de l’imposante carrière cinématographique du maître de l’horreur. Cette première œuvre sonore de John Carpenter, qui n’illustre pas de films, s’inscrit en effet dans la lignée de ses bandes originales. Et renvoie directement, pour les pièces les plus angoissées (Wraith, Obsidian), à la première époque de son travail. En plaçant la répétition au centre de ses compositions, l’Américain reste fidèle à l’esthétique lugubre et synthétique qu’il a faite sienne depuis une quarantaine d’années. Si quelques remixes bien sentis apportent à l’album une dimension supplémentaire (à l’instar de Vortex revu par Silent Servant), on sort de Lost Themes avec une furieuse envie de le voir mis en images. Clément Perrin
48 livres
Livre du mois
Nina Allan Stardust (Ed. Tristram)
Ruby Castle. Le nom sonne comme un fantasme et un sésame. L’actrice d’épouvante qui le porte est l’étrange clé du singulier livre de Nina Allan. L’auteure n’est pas évidente à cerner : essayez d’imaginer un Rodrigo Fresán british et fleur bleue ! Comme Complications, son précédent livre, Stardust enchaîne les récits autonomes en tissant un réseau de correspondances. Chacune des parties apporte des éclaircissements cachés, mais surtout de nouveaux mystères, formant une toile qui s’épaissit au fil de la lecture. Au cœur du livre, Allan interroge la fiction - et son corollaire : le mensonge - et, discrètement, fait du monde forain la source secrète de nos imaginaires. Les segments s’enchaînent avec un inégal bonheur et Allan se révèle plus brillante dans l’évocation que dans l’écriture même, qui manque parfois de relief. Mais ses labyrinthes, au charme entêtant, donnent « l’impression d’être des structures inébranlables et d’un seul tenant, (…) une illusion car ils étaient construits sous forme de sections modulaires » (La Porte de l’Avenir, un sommet, avec son atmosphère Schnitzler et son final modianesque). Autant de raisons de jouer avec les facettes de son Ruby-cube. 384 p., 21,50€. Rémi Boiteux
Louis Lanher Les féministes n’auront pas l’Alsace et la Lorraine (Au Diable Vauvert)
Si le second degré n’est pas votre fort, passez votre chemin, Najat Vallaud-Belkacem… Car Louis Lanher a fait de vous une figure centrale de son pamphlet, Les féministes n’auront pas l’Alsace et la Lorraine. Avec délectation, l’écrivain, avocat de formation, tire sur tout ce qui bouge : les féministes et les tradis, les machos et les hommes qui se prétendent « modernes ». Il dessine une société où l’égalitarisme est poussé jusqu’à l’extrême, jusqu’à l’absurde, que ce soit à l’école (la fameuse théorie des genres), en famille, en couple, ou dans le milieu professionnel. Louis Lanher joue à merveille le rôle du mâle zélé, porte-parole de l’autre sexe, prêt à renoncer à tous ses acquis « naturels ». On y croirait presque ! 255 p., 18€. Madeleine Bourgois
Peter Ackroyd
Sylvain Pattieu
Trois Frères (Éd. Philippe Rey)
Beauté Parade (Plein Jour)
Les destinées de trois frères dans le Londres de la seconde moitié du xxe siècle. Nés le même jour, à la même heure, à un an d’intervalle... L’un devient journaliste, l’autre professeur et le troisième échoue, errant au cœur du quatrième personnage... Comment cela ? Eh bien Londres pardi ! Narrateur brillant, élevé avec Dickens et Joyce, Peter Ackroyd donne vie et sens à ce labyrinthe qu’est la capitale anglaise. Les intrigues policières, politico-financières et sentimentales sont l’occasion pour l’écrivain prolifique de décrire le clinquant de Mayfair et le peuple grouillant de Limehouse, entre autres. Ackroyd manie l’humour à froid et déploie tout son talent de narrateur, mettant un peu de lui dans chacun de ces trois frères. Magistral. 288p., 19€. Thibaut Allemand
À Château d’Eau, dans le 10 e arrondissement parisien, on trouve des instituts de beauté en pagaille. Mais au n°50, boulevard de Strasbourg, on y rencontre des manucures chinoises et des coiffeuses ivoiriennes en grève. Pourquoi ? Leur patron s’est enfui avec l’argent. Plus de salaires, plus de loyer payé au propriétaire du salon, plus rien à perdre... Madissou, Lin Mei et leurs collègues décident de poursuivre l’activité. Elles occupent les lieux jour et nuit, réclament leurs salaires, revendiquent de meilleures conditions de travail, espèrent des papiers. Sylvain Pattieu compose ce texte en tressant habilement les discours recueillis, les descriptions contextuelles. Il exprime l’agitation joyeuse de cette boutique où des vies parallèles convergent dans une même lutte. 216 p., 18€. Julien Bourbiaux
Justine Lévy La gaieté (Stock)
Ceux qui ont déjà tenu en main un roman de Justine Lévy savent que derrière un titre comme La gaieté pointe forcément une touche d’ironie. Le jour où elle apprend qu’elle est enceinte, Louise, alterego de l’auteur, « décide d’arrêter définitivement d’être triste ». Après avoir raconté sa relation avec sa mère (Le Rendez-vous, 1995), sa rupture (Rien de grave, 2004), sa grossesse (Mauvaise fille, 2008), la « fille de » poursuit son entreprise d’introspection, découvrant l’éventail d’émotions qu’apporte la maternité sous le prisme d’amers souvenirs d’enfance, entre une maman « camée » et un défilé de belles-mères fielleuses. Lâchés comme un cri, de douleur ou d’amour, les mots frappent juste. Même si affleure parfois l’idée que le « moi » n’est pas un sujet inépuisable. 216 p., 18€. Marine Durand
50 ĂŠcrans
51 écrans
Vincent n’a pas d’écailles
L’inconnu du lac Texte Marine Durand Photo Laurent Thurin Nal
Après plusieurs courts-métrages primés, Thomas Salvador passe au long avec un film atypique, baignant dans un genre rarement représenté sur les écrans français : le réalisme magique. Charmant et poétique, Vincent n’a pas d’écailles aurait pourtant mérité un peu plus d’ambition pour complètement nous embarquer.
P
résenté dans les médias comme « le premier film de super-héros français » (et garanti sans effets spéciaux numériques), cet ovni n’a pourtant pas grand-chose en commun avec les personnages musculeux faisant les beaux jours du box-office américain. Jeune homme taiseux au regard doux, Vincent voit ses forces se démultiplier au contact de l’eau. Parti vivre un été de bohème dans les gorges du Verdon, au plus près de son élément, il tombe amoureux de Lucie à qui il décide de confier son secret.
Le grand bain. Ne cherchons pas ici de destin hors du commun ou d’humanité à sauver, malgré quelques clins d’œil aux canons du genre. Tandis que notre « anti-héros » apprivoise peu à peu ses pouvoirs, entre expérimentations aquatiques et fanfaronnades devant
sa petite amie (Vimala Pons, la « fille du 14 juillet » d’Antonin Peretjatko), les longs plans sur le lac de SainteCroix se succèdent, remplaçant des dialogues quasi absents. Comme dans beaucoup de ses projets, on retrouve Thomas Salvador à l’écriture, à la réalisation et dans le rôle-titre. Mais s’il fait habilement glisser son œuvre vers le burlesque au moyen d’une longue course-poursuite, l’homme-orchestre déroule cet artifice scénaristique jusqu’à épuisement, peinant à garder l’attention du spectateur du premier au dernier plan. Retenons donc une découverte prometteuse, et surtout le nom d’un cinéaste dont on guettera à coup sûr les futures propositions.
De Thomas Salvador, avec Thomas Salvador, Vimala Pons, Youssef Hajdi… En salle le 18.02.
52 écrans
The Smell Of Us
Youth, sex, drugs & rock’n’roll Texte Raphaël Nieuwjaer Photo Larry Clark & Morgane Production
Des skates, des ados nus, du rock. Pas de doute, voilà le nouveau Larry Clark. Depuis Tulsa (1971), son premier recueil de photographies, l’homme se tient au plus près d’une jeunesse aussi désœuvrée que rongée par le désir. Mais, en quittant les états-Unis pour Paris, il a fait de ses kids des anges déchus.
R
etour en gloire pour Clark, après un Marfa Girl (2012) en demi-teinte, et diffusé uniquement en ligne. à l’époque, le cinéaste présentait cela comme un doigt d’honneur à l’industrie. Et une manière de toucher directement les jeunes. Il semble qu’il se soit ravisé. Son dernier long-métrage retrouve les salles obscures. Et vise le grand art. Clark cherche ici moins à documenter la vie qu’à la fantasmer. Ou, mieux : à rendre poreuse la distinction entre réel et imaginaire. Pour cela, il convoque autant Gérard de Nerval que la peinture italienne ou l’art contemporain. Tourné à Paris, le film se déroule dans les beaux quartiers et au Palais de Tokyo. Ses héros sont des skateurs. Des enfants de riches qui se prostituent ou rackettent. Cela semble d’abord une mauvaise greffe entre le « réalisme » de Clark (Bully était adapté d’un fait divers) et un désir de mythologie. Mais, plus que de raconter une histoire, il y a l’envie d’immortaliser des postures, des visages. Aux corps ravagés des adultes, Clark oppose le rose des joues, la blancheur laiteuse des peaux des ados. Apparaissant en clochard, Clark se murmure « souviens-toi que tu vas mourir », tout en célébrant la vie. Ce qui fait de The De Larry Clark, avec Lukas Ionesco, Diane Rouxel, Théo Cholbi, Larry Clark... En salle. Smell of Us un poème doux et déchirant.
54 rie Sé écrans
Southcliffe
Massacre à l’anglaise Texte Thibaut Allemand Photo Sean Harris © Channel 4
Southcliffe, petite ville anglaise morne et triste. C’est dans cette bourgade (imaginaire) qu’en 2011, un solitaire est pris de folie. Et massacre une dizaine de personnes. Dépêchés sur place, les journalistes traquent le moindre indice – et chassent le scoop, surtout. La question du « pourquoi » sera-t-elle résolue ? Ce n’est pas vraiment le sujet. Mais le deuil, lui, demeure le canevas central de cette série étrange.
C
e drame fait trembler la petite communauté remplie de « voisins paisibles », comme toujours. Le réalisateur suit une famille, puis l’autre, scrutant les personnages dans leur triste intimité avant et après le massacre – chacun vit son deuil comme il peut. Ou ses deuils : comme ce soldat revenu d’Irak pas tout à fait guéri de ce qu’il a vu (ou fait) là-bas… À cette vie de l’après, s’ajoute en contrepoint la vision du journaliste David Whitehead. Lui a grandi ici, vivant une enfance pas facile (euphémisme) avant de filer à Londres. Le retour sur ces terres hostiles à plus d’un titre fait remonter de douloureux souvenirs (et quelques démons) à la surface. Pour revenir sur les causes et, surtout, les conséquences de cette tragédie, Tony Grisoni et Sean Durkin emploient le vieux procédé du flashback. Déstructurée et fatalement déroutante, la narration évoque celle de Sergio Leone dans Il était une fois en Amérique (1984). À la fois économe (de mots, de lumière, de gestes) et ambitieuse, cette minisérie ne convainc pas tout à fait. Reste néan- De Tony Grisoni et Sean Durkin. Avec Sean moins une fresque modeste, qui chamboule Harris, Rory Kinnear, Shirley Henderson... (éd. Montparnasse, 15€, sortie le 03.02) plus d’une fois.
56 écrans
© Alain Heymans
© SquareOne Entertainment
Festival
FIFA
Imitation Game
L’amour au cinéma ? Vaste sujet. Il fallait bien un festival pour l’honorer. Mons a franchi le pas, et cela fait 31 ans que ça dure. La cité du Doudou – au cœur d’une programmation déjà foisonnante en cette année de Capitale européenne de la culture – en célèbre toutes les formes avec une centaine de films, en provenance de toute la planète. Un cinéma à l’image de l’amour : engagé et brûlant, comme celui d’Abdellatif Kechiche, invité d’honneur du Fifa, et qui offre l’occasion de revisiter avec lui, notamment, La Vie d’Adèle. Mais amour rime aussi avec humour, comme le montre Carlo Verdone qui représente la comédie italienne. Ou encore L’art de la Fugue, long-métrage de Brice Cauvin au casting impressionnant (Agnès Jaoui, Benjamin Biolay, Nicolas Bedos) qui ouvre cette semaine d’avant-premières. Et de coups de cœur. Julien Damien
Comment briser les secrets d’Enigma, le système de cryptage de données de l’armée nazie ? En montant une fine équipe de mathématiciens, champions d’échecs et autres rois des mots croisés... Avec la bénédiction de Winston Churchill et du MI-6, Alan Turing et plusieurs petits génies s’allient pour neutraliser l’arme secrète allemande et tenter de remporter la guerre. Fort d’une distribution de première qualité, de dialogues parfois savoureux (« je sens que nous allons vivre ensemble une merveilleuse guerre ») et d’une mise en scène rythmée, Imitation Game n’a finalement qu’un défaut : donner trop de place aux bons sentiments, que ce soit à travers la touche glamour de Keira Knightley, ou l’amitié artificiellement construite entre les décrypteurs en herbe. Il n’en reste pas moins l’un des films à voir en ce début 2015. Nicolas Jucha
20>27.02, Mons, divers lieux, 10h>22h, pass : 50e, 7€ la séance, www.fifa-mons.be
De Morten Tyldum, avec Benedict Cumberbatch, Keira Knightley, Matthew Goode… En salle.
58 exposition
Colin Delfosse Objectif lutte
Texte Julien Collinet Photos Les Amazones du PKK, Les Sorciers du Ring Š Colin Delfosse
60 musique
à voir / Les amazones du PKK, jusqu’au 17.05, Charleroi, Musée de la Photographie, mar>dim, 10h>18h, 7/5/4€/gratuit –12 ans, www.museephoto.be
Auréolé de plusieurs prix, co-fondateur du collectif Out of Focus, Colin Delfosse parcourt le monde depuis 10 ans. Ce photojournaliste belge est aujourd’hui mis en lumière via deux expositions de chaque côté de la frontière. L’une à Charleroi, qui a pour sujet les combattantes du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), l’autre en région lilloise, focalisée sur des portraits de catcheurs congolais.
O
utre de grandes expositions thématiques, le musée de la photographie de Charleroi a pris la bonne habitude de réserver une salle à de jeunes photographes locaux. Les amazones du PKK se concentre sur la branche armée féminine de ce parti politique, considéré en Occident comme une organisation terroriste. Lié d’amitié avec une journaliste kurde, Colin Delfosse était parti en 2009 à la rencontre de ces guerrières dans le Kurdistan irakien. « Dans les pays arabes, il n’est culturellement pas
accepté que les femmes accèdent à l’indépendance. Pour beaucoup d’entre elles, prendre les armes était une forme d’émancipation », explique le photographe. Kalachnikov à la main, dotées d’un équipement archaïque… le contraste entre ces femmes et leur fusil provoque un profond trouble. Colin au Congo. Mais le terrain de chasse privilégié du journaliste reste le Congo, où il a effectué de multiples voyages depuis le début de sa carrière, il y a une dizaine d’années. Quelques
clichés seront exposés à la maison Folie de Lomme avant un plus large accrochage en septembre. Ce travail révèle des portraits de catcheurs congolais. « Cela n’a rien à voir avec le catch occidental. Les deux adversaires se lancent des sorts, font semblant de s’arracher les yeux ou les tripes, c’est très visuel ! ». Le journaliste a choisi de les faire poser dans leur quartier, principalement à Kinshasa. « Le catch reste le sport des ghettos. On a
l’impression d’être en campagne, pourtant nous sommes toujours en ville. Dans ces quartiers, il n’y a ni eau ni électricité. » Ces sorciers se disputent donc la gloire sur des rings de fortune, dans une performance autant sportive qu’artistique.
à voir / Les sorciers du ring, jusqu’au 30.06, Lomme, maison Folie Beaulieu, mar>ven, 10h>12h & 14h>18h // sam,10h>12h, gratuit, www.ville-lomme.fr
63 exposition
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Putain de Guerre
Aux larmes !
Purple Hearts, Spc. Robert Acosta © Nina Berman 2004 - Coll. Dr Marc Remacle
exposition
« Les vrais vaincus de la guerre, ce sont les morts », disait Ernest Renan. Le devoir de mémoire conduit parfois à des impasses, surtout lorsqu’il s’agit de la Première Guerre mondiale – trop longtemps, des officiels ont commémoré la grande boucherie par le prisme de l’héroïsme. L’objet de cette Putain de Guerre est autre.
A
insi baptisée d’après le chef-d’œuvre de Jacques Tardi et de l’historien Jean-Pierre Verney, cette exposition sort des tranchées pour embrasser l’horreur, où qu’elle soit, jusqu’à nos jours. Prenant pour point de départ la BD précitée, elle présente cinquante pièces signées de 17 photographes, peintres, sculpteurs, plasticiens et vidéastes. Belges ou Afghans, Grecs ou Russes, Anglais ou Palestiniens, ces témoins donnent un point de vue fort différent dans le traitement et la forme, mais se rejoignent sur une condamnation sans appel de la guerre, quelle qu’elle soit. On retient, entre autres, ce cercueil d’où surgit un point levé (Werner Reiterer, 2008), ou ce squelette au pinceau entre les dents signé Leo Copers. Moins conceptuels, certains photo-reportages nous propulsent à Kaboul et l’Anglais Bryan Adams dévoile un livre immortalisant les fameuses Gueules Cassées. Enfin, citons L’Âme En Sang (2011), documentaire poignant sur le retour de soldats américains après la campagne d’Irak. Son réalisateur, Olivier Morel, a scénarisé Les Revenants (2013), traitant de ce sujet et dessiné par Maël (Notre Mère La Guerre). Des tranchées au Jusqu’au 01.03, Charleroi, Musée des Beaux-Arts, Yémen, les causes ont changé, la doumar>ven, 9h>17h // sam, 10h>18h, 5>2,50€/ gratuit, www.charleroi-museum.be leur est la même. Thibaut Allemand
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Art Up !
épater la galerie
Galerie Saltiel, Hip Hop Hip © Krikri
exposition
Huitième édition pour la foire d’art contemporain de Lille, devenue le plus grand rendez-vous d’amateurs et collectionneurs dans le Nord – Pas de Calais. Après le tournant de 2014 (nouveau nom, nouvelle formule), Art Up ! continue de se réinventer. On vous embarque dans les allées foisonnantes du Grand Palais !
A
moins d’un mois de la manifestation, les demandes de galeries – elles seront plus de 100, dont un quart d’étrangères – continuent d’affluer. Autre chiffre aussi, que Didier Vesse, directeur d’Art Up ! tient à mettre en avant : 28 000 visiteurs l’an passé, record battu ! « Le défi constant, c’est d’attirer de nouveaux publics, surtout des jeunes. Il suffit d’un rien pour inoculer le virus de l’art, et transformer un amateur en collectionneur ! » Pour cela, l’excourtier a sa recette. Ecumant foires et musées, il regarde émerger les tendances d’un œil averti. « On remarque un retour de l’abstraction géométrique, populaire depuis toujours dans le Nord de l’Europe. Il m’a paru évident d’en faire un temps fort ». Le reste est un savant mélange : des installations / performances qui séduiront les néophytes, des conférences pointues pour les passionnés. Et comme toujours, les noms reconnus (Jeff Koons, Mr Chat) côtoieront les jeunes pousses : le rendez-vous « Révélation by Art Up ! » s’est resserré autour de cinq talents à suivre, plasticiens, vidéastes ou dessinateurs, arrivant de Bagdad comme de Chambéry. Une édition 2015 12>15.02, Lille, Lille Grand Palais, jeu & multiple, vivante, et plus que jamais aux ven de 12h> 23h // sam & dim, 11h>20h, prises avec son temps. Marine Durand 9/6€/grat – 10 ans, www.art-up.com
68 exposition
Aloïse Corbaz, Ô Bacchus Ô Cérès, 1924-1941. La Cinémathèque française, Paris. Photo © DR Fondation Aloïse, Chigny, 2015
Nu © Zoulikha Bouabdellah
Aloïse Corbaz
Body Talk
Aloïse Corbaz (1886-1964) demeure une figure essentielle de l’art brut : internée dès 1920, la Lausannoise a multiplié les écrits et les dessins. Vivement colorés, ces derniers étaient minuscules (et cousus entre eux) ou gigantesques, tels les quatorze mètres de son Cloisonné de Théâtre, autour duquel s’organise cette exposition. Le parcours se scinde en plusieurs volets, présentant d’abord ses écrits avant de se conclure avec des relectures de ses œuvres par des créateurs contemporains. Entre ces deux balises, on découvre la jeunesse d’Aloïse et son époque, l’alchimie, le pacifisme, ou le mysticisme de ce grand nom dont Dubuffet dira : « Elle n’est pas folle. Très lucide, j’en suis persuadé, retranchée dans son si ingénieux cocon qu’elle s’était fabriqué ». Thibaut Allemand
Six artistes africaines contemporaines placent le corps des femmes au cœur de leurs travaux. Toutes ont démarré leur carrière dans les années 1990, point d’ancrage d’un véritable mouvement féministe noir. Leurs œuvres exposées au Wiels sont autant des prises de position que des pistes de réflexion : sur le genre, la fracture sociale, la place des femmes dans la société ou la sexualité. Le corps nu, peint ou transformé, devient un instrument de protestation et s’érige contre l’oppression, le colonialisme, l’apartheid et toutes formes de domination. On y découvre les Vénus noires brodées de Billie Zangewa, les araignées sculptées de Zoulikha Bouabdellah ou la saisissante performance Fracture de Miriam Syowia Kyambi. Aujourd’hui plus que jamais, des voix à faire entendre. Marie Pons
14.02>10.05, Villeneuve d’Ascq, LaM, mar >dim, 10h>18h, 10/7€, www.musee-lam.fr
14.02 > 03.05, Bruxelles, Wiels, mer>dim, 11h>18h, 8/5/3/1,25€/gratuit -12 ans, www.wiels.org
70 exposition
Là-haut
Charles Pétillon
Texte Marine Durand Photo Invasions © Charles Pétillon
C’est un peu par hasard que Charles Pétillon s’est acoquiné avec le ballon de baudruche, devenu l’élément récurrent de ses mises en scène photographiques. à quelques jours de sa première exposition à Lille, sa ville natale, cet autodidacte revient sur la genèse d’un projet gonflé.
Superpositions
Invasions
U
ne « guirlande » joyeuse flotte au dessus d’une plage, un « nuage » suspend son vol au cœur d’une forêt, un torrent de « bulles de savon » surgit de la façade d’une maison abandonnée. Depuis 2005 et les balbutiements de son travail d’art appliqué, Charles Pétillon parcourt le monde avec sa grappe de ballons immaculés, faisant du littoral dunkerquois ou du désert salé de Bolivie le terrain de ses expérimentations surréalistes. « Le début d’une histoire, cela peut être un lieu, un thème, un ensemble de mots », explique cet ex-assureur, qui a façonné son goût pour l’image auprès de Jean Larivière et officie, à la ville, comme photographe de mode. De l’air ! Mais pourquoi le ballon ? « Parce qu’il est accessible, y compris à un enfant, note l’artiste. Même si tout ça n’est qu’un prétexte ».
Dans un local à poubelles d’une propreté clinique à Dubaï, ses baudruches, baptisées « Outrances », pointent l’absurdité de la course à la consommation. Ou, à l’inverse, saluent l’action de l’homme en jaillissant de la piscine tournesol de Sin-le-Noble (près de Douai). « Ces piscines ont envahi l’espace public dans les années 1970, avec l’objectif d’apprendre aux petits Français à nager. Je voulais garder le souvenir d’un bâtiment emblématique amené à disparaître », précise Pétillon, tout en rappelant humblement sa condition. « Je ne cherche pas à apporter des réponses, je ne suis qu’un gars qui prend des photos. » Et qui vient apporter, de façon salutaire, un peu de légèreté dans notre quotidien. 20.02>22.03, Lille, Maison de la photographie, jeu> ven, de 10h>18h // sam & dim, 14h>18h, 5/3€/grat – 8 ans, www.maisonphoto.com
Play Sation 1 Souvenirs de famille
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Marie-Antoinette d’Autriche, reine de France… © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot
théâtre exposition & danse
Agenda
Le château de Versailles en 100 chefs-d’œuvre Après Roulez carrosses ! place à une sélection de pièces emblématiques provenant du domaine du Roi Soleil. Des chefs-d’œuvre qui pour beaucoup quittent leur écrin d’origine pour la première fois. La scénographie en trompe-l’œil nous projette d’abord dans les fastueux appartements privés puis à l’extérieur du château, entre les fontaines, les bosquets et le groupe sculpté Apollon servi par les nymphes. Arras, jusqu’au 20.03.16, Musée des Beaux-arts, lun, mer, jeu & ven, 11h>18h // sam & dim, 10h>18h30, 7,50/5€/gratuit -18 ans, www.versaillesarras.com
Modern Love
Orange Dreams
Comment les technologies s’immiscentelles dans l’univers de la mode textile et vestimentaire ? Durant un an, la cité de la Dentelle nous dévoile le processus de création d’un atelier de design : Modern Love. Le parcours révèle les secrets de fabrication de cette marque britannique, sa collection printemps-été 2015, et nous invite à devenir apprenti-designer en postant des créations sur le blog de cette exposition - forcément - interactive.
Le design tout plastique est à l’honneur, dans toute sa gloire orangée, au cœur de l’Atomium. Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, cette matière incarne la modernité et le progrès avec ses couleurs vives et sa légèreté. Tout au long de cette exposition, des pièces légendaires (la pomme à glaçons) se mêlent aux œuvres d’art d’Armand. On découvre aussi des objets rares, tel le bureau Boomerang de Calka que Pompidou avait adopté à l’Elysée.
Calais, jusqu’au 31.12, Cité de la Dentelle et de la Mode, tous les jours sauf mardi, 10h>18h, 5/3,50€, www.cite-dentelle.fr
Bruxelles, jusqu’au 25.05, L’Atomium, lun>dim, 10h>18h, 11/8/6e/gratuit - 6ans, www.atomium.be
Garry Winogrand Cet artiste new-yorkais (1928-1986) est connu pour son approche à la fois esthétique et documentaire de la photographie. Woman are beautiful met en exergue son travail sur la femme, dans sa beauté quotidienne, au naturel et sans fard : des courbes que des vêtements peinent à cacher, des seins sous un simple débardeur, un corps nu dans un lac, un sourire, un regard… La sensualité du corps féminin s’expose discrètement. Charleroi, jusqu’au 17.05, Musée de la Photographie, mar>dim, 10h>18h, 7/5/4€/grat –12 ans, www.museephoto.be
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Futur archaïque, ECAL Ristin HREFNA. Milos Ristin, Hrefna - os, résine et laque. Pièce issue du projet «The Iceland Whale Bone» ECAL - 2013. ©ECAL/Nicolas Genta
théâtre exposition & danse
Agenda
Futur archaïque Des sièges aux formes caverneuses, un canapé qui semble creusé dans un fossile… à travers le design, cette exposition fait le lien entre le futur et le passé. Et met en avant la façon dont les créateurs d’aujourd’hui travaillent avec les origines de notre histoire pour donner vie à des objets novateurs. Un retour aux racines qui donne des ailes. Grand-Hornu, jusqu’au 19.04, Centre d’innovation et de design, mar>dim, 10h>18h, 8/5/2€/grat – 6 ans, www.cid-grand-hornu.be
Luc Tuymans - Suspended
Van Gogh au Borinage
Si Luc Tuymans est l’une des figures emblématiques d’une nouvelle génération de peintres figuratifs, il s’est aussi consacré à l’estampe. Fasciné par le monde des images, l’Anversois « s’attache à les réduire jusqu’à n’être plus que la trace ou la mémoire d’elles-mêmes », selon Catherine de Braekeleer, directrice du Centre de la Gravure de la Louvière, qui nous fait découvrir ici une nouvelle face de ce travail passionnant.
L’exposition phare de Mons 2015 s’articule autour d’une étape décisive de la vie de Van Gogh. Le Hollandais arrive dans la région en 1878 (à 27 ans), en tant que prédicateur protestant pour évangéliser les communautés rurales. Mais ce séjour de deux ans amène une vraie remise en question. Van Gogh décide de se consacrer à son art. Et peint ce qui restera l’un de ses sujets de prédilection : la vie ouvrière dans sa réalité la plus brute.
La Louvière, 07.02>10.05, Centre de la Gravure et de l’Image Imprimée, mar>dim, 10h>18h, 7€> grat –12 ans, www.centredelagravure.be
Mons, jusqu’au 17.05, BAM, mar>dim, 10h>18h, 15/12€, www.bam.mons.be
Des animaux et des pharaons Cette exposition propose d’aborder la civilisation ancienne à travers la faune et ses rapports avec les hommes. Elle raconte comment les Egyptiens expliquaient le monde grâce aux bêtes. 430 œuvres, dont beaucoup viennent du Louvre Paris – les babouins de Louxor en sortent pour la première fois – sont présentées : aquarelles, objets du quotidien, momies et même… un crocodile embaumé. Lens, jusqu’au 09.03, Louvre, tlj sf mar, 10h>18h, 9€/ gratuit - 18 ans, www.louvrelens.fr
Toutes les expositions de l’Eurorégion sur www.lm-magazine.com
Medúlla
Humains, trop humains Texte Marine Durand Photo Björk, Medúlla © Inez and Vinoodh, M/M Paris Chœurs de jeunes de La Monnaie © Herman Ricour
Björk, Medúlla
(One Little Indian Records, Polydor, Atlantic Records), Sortie le 25.08.2004
79 théâtre & danse
O En août 2004, Björk livrait l’album Medúlla comme un cri de douleur face aux débordements racistes et nationalistes ayant suivi les attentats du 11 septembre. Une décennie plus tard, La Monnaie choisit de l’adapter sur scène dans un opéra pour chœurs d’enfants et solistes confirmés. En ces temps de bouleversements identitaires, ses enjeux n’ont jamais été autant d’actualité.
« à
l’origine, Björk voulait baptiser son projet Ink (Encre), en référence à ce « sang vieux de 5 000 ans qui est en nous tous ». Puis elle s’est arrêtée sur Medúlla, la moelle, en latin, confie Krystian Lada. Ce terme renvoie à l’essence de la condition humaine, ce qui nous unit par delà nos origines, nos croyances, notre âge, notre nationalité ». Le jeune directeur de la dramaturgie de La Monnaie rêvait d’un opéra depuis sa première écoute de Medúlla. « Au-delà du positionnement évidemment politique, l’album m’a toujours inspiré par sa composition musicale ». Dans sa quête d’un univers ancestral et universel, Björk a entièrement dédié son œuvre à la voix, mêlant mélodies a capella, chants gutturaux, beatbox et vocalises. Un défi supplémentaire pour le dramaturge, qui s’est entouré d’une toute nouvelle équipe artistique pour cette production. 100 enfants sur scène. à la mise en scène, l’Israélien Sjaron Minailo, auteur de plusieurs opéras expérimentaux. Aux costumes, le couturier et décorateur danois Henrik Vibskov, dont les motifs ethniques faisaient joliment écho aux textes de Björk. Mais c’est peut être la performeuse
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80 théâtre & danse
Anat Spiegel, en charge nous souhaitions inviter des arrangements musicaux, qui a relevé le chalnotre public à s’interroger lenge le plus vertigineux : sur notre façon de cohabiter faire chanter les titres de l’Islandaise aux chœurs dans la société de jeunes de La Monnaie – près de 100 enfants sur scène – épaulés par deux solistes expérimentés. « Avec ce projet, nous voulions recréer quelque chose qui n’existe plus dans notre culture : le transfert de connaissances et d’expériences entre générations ». Agrémenté de percussions et de rythmes électroniques mais débarrassé de la sémantique (Björk mêlant anglais, islandais et langages imaginaires, l’équipe s’est concentrée sur les sonorités), ce Medúlla 2015 devrait se présenter comme un rituel sensoriel, une expérience inédite à vivre en commun. « Bien avant les récents incidents de Paris, nous souhaitions inviter notre public à s’interroger sur notre façon de cohabiter dans la société, relève Krystian Lada. Je pense que les gens sortiront avec des avis complètement différents sur ce qu’ils viennent de voir. Ce que ce projet cherche à 04>08.02, Bruxelles, La Monnaie, mer, montrer, c’est précisément la sam, 19h30, jeu, 13h30, sam, dim,15h, 40/20/10€, www.lamonnaie.be multiplicité de l’individu ».
82 théâtre & danse
Prise Directe 2
Foule Contact Texte Julien Damien Photo Manuella Anckaert
L’affiche donne le ton : en noir et blanc, une catcheuse au regard patibulaire semble vouloir en découdre. Avec qui ? Eh bien nous, le monde tel qu’il va et une actualité anxiogène. Voici le deuxième round d’un festival qui veut secouer le public, avec des lectures de textes d’auteurs bien vivants, ancrés dans le réel.
C
omment incarner cette volonté de « théâtre immédiat » ? D’abord, dans la forme. Sur scène, les textes sont lus par des comédiens dans une mise en scène réalisée en deux jours, donc très épurée : « il y a ainsi moins de barrières avec les spectateurs, qui peuvent être plus facilement touchés », indique Eva Sérusier, chargée de production au sein du Théâtre du Prisme, qui a créé ce festival biennal en 2013. Puis, c’est évidemment sur le fond, par le choix des sujets, que « Prise Directe » est percutant. Durant une semaine, dans dix lieux de la métropole lilloise, les thèmes du travail, de la nourriture ou l’adolescence sont convoqués sur le ring. Depuis Bull, de Mike Bartlett (« Deux postes. Trois candidats. C’est vraiment le mauvais moment pour avoir une tâche sur ta chemise ») à Asparagus, de Gianina Carbunariu (l’histoire d’un Roumain et d’un Anglais dans un supermarché avant sa fermeture, en quête d’aliments soldés), ces voix méconnues, contemporaines « nous parlent du réel, dixit Capucine Lange, co-directrice de cette compagnie 07>14.02, Festival Prise Directe 2, 13 spectacles dans 10 née en 1998. Ces auteurs sont en lieux de la métropole lilloise, www.theatreduprisme.com prise directe avec notre monde ». Sélection : American Dream (09.02) / Bull (10.02) / Asparagus ; Nourrir l’humanité, c’est un métier (11.02) / Et risquent de nous envoyer parChaîne de montage (12.02) / Love Letters (14.02) dessus les cordes.
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© Fabien Debrabandere
Sujet, Cie GdRA © Nathalie Sternalski
Le bruit des os qui craquent
On est tous des quelqu’uns
Du sable, des troncs d’arbres coupés, des tissus colorés flottant au vent. Entre ces éléments naviguent deux enfants perdus. Lorsqu’on fait leur connaissance, Elikia et Joseph, 13 et 8 ans, viennent de s’échapper du camp de rebelles qui les avait contraints à prendre les armes, dans un pays indistinct, en proie à une guerre civile. Signé par la grande auteure québécoise Suzanne Lebeau, Le bruit des os qui craquent raconte la fuite effrénée de ces enfants, en pleine forêt, à la recherche d’un village allié. Joseph est animé par l’espoir. Elikia, elle, dévorée par la violence qu’elle a subie ou dont elle fut témoin, se bat contre ses cauchemars. Sombre, le sujet des enfants-soldats est traité au travers d’une scénographie sobre, jouant sur la suggestion et les symboles. M. Bourgois
De ce bon mot de Gilles Defacque est né un festival de théâtre… singulier. Sa particularité ? Donner la parole à des comédiens seuls en scène, pour des récits fondés sur la différence et souvent autobiographiques. Ces « quelqu’uns » nous content des histoires drôles, émouvantes et qui touchent à l’universel. C’est la déclaration d’amour d’Abdel Baraka à sa ville, Hénin-Beaumont (mais pas à son maire FN) sous forme de prière pour la tolérance. Ou encore l’épopée de Rachid Bouali et sa galerie de personnages et d’anecdotes invraisemblables – mais bien réels – du quartier de Hem où il a grandi, en passant par Vancouver et… en croisant John Wayne. Un périple qui résume l’essence de ce temps fort de la saison du Prato, où il s’agit de « découvrir l’autre qui est une montagne, un continent à lui tout seul ». Julien Damien
10.02, Lomme, maison Folie Beaulieu, 20h, 9/5€ // 17.02, Théâtre d’Arras, 20h, 8€ // 20.02, Douai, L’Hippodrome, 20h, 8€ // 08>10.04, Comédie de Béthune, mer & ven, 20h // jeu,18h, 20>6€
03>14.02, Lille, Le Prato, 17/5€/Gratuit, www.leprato.fr
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Le Petit Chaperon Rouge Danse avec le loup Texte Thomas Lansoud Photos Le Petit Chaperon Rouge © erik Damiano / Zzz’insectes © Eric Alloing
Le gentil chaperon rouge, sa galette et son petit pot de beurre, la mère-grand, le loup affamé et un peu crétin, le valeureux bûcheron… Vous croyez connaître l’histoire ? Eh bien rien de tout cela dans ce spectacle chorégraphique au vitriol ! De quoi ravir tous les publics.
S
ouvent édulcoré, Le Petit Chaperon Rouge renoue ici avec la férocité et une certaine amoralité que contenaient les contes de
la tradition orale et le texte original de Charles Perrault. Revisité par Sylvain Huc, il devient avant tout le récit d’une traque. Le petit chaperon
87 théâtre & danse
rouge, l’œil écarquillé, la mine apeurée, scrute nerveusement les alentours. Le loup, le regard noir, l’oreille alerte, rôde. La proie désemparée se lance dans une course effrénée et le prédateur, avide de chair fraîche, la suit à la trace. Bientôt, l’issue inéluctable : le corps musculeux et tentaculaire, toute à sa bestialité, le monstre s’abat sur la frêle silhouette du pantin désarticulé. Du festin qui s’ensuivra émergera une créature hybride, corps emmêlés de danseurs pris dans une macabre chorégraphie. Burlesque. Dans un décor minimaliste, essentiellement habillé d’ombre – surtout – et de lumière – parfois – et dans une ambiance sonore faite de musique mécanique et lancinante ponctuée de cris gutturaux, des êtres énigmatiques s’emparent de l’image d’Épinal de notre enfance et ravivent un sentiment d’angoisse. Le jeu, tout en démesure, les mimiques burlesques et les rires gras des interprètes nous rappellent, bienheureusement, au bon souvenir des vertus cathartiques de l’art.
Le Petit Chaperon Rouge, 20.02, Villeneuve d’Ascq, la Rose des Vents, 20h, 12>6€, www.larose.fr
Festival
Les petits pas Sensibiliser les enfants à la danse contemporaine. C’est le pari que renouvelle depuis 10 ans le festival Les Petits pas. Initié par le centre chorégraphique du Gymnase, à Roubaix, celui-ci fut même le premier du genre à voir le jour en France, avant d’être souvent imité. Durant une semaine, cette manifestation jeune public se déploie dans le Nord (et en Belgique) à travers onze spectacles qui mettent le récit en mouvement. 13>20.02, www.gymnase-cdc.com Prog : 13 & 14.02, Au pied de la lettre, Roubaix, Le Gymnase / 14.02, La belle au bois dormant, Armentières, Le Vivat / 15.02, Lectures complices (chorégraphies familiales), Roubaix, La Condition Publique / 17.02, Zzz’insectes, Roubaix, Le Colisée / 18.02, Punky Marie, Lomme, maison Folie Beaulieu / 18.02, La Belle, Roubaix, Le Gymnase / 18.02, Tour du monde des danses urbaines en dix villes, Valenciennes, Le Phénix + 19.02, Escarmain, Salle A. Decaux / 19.02, Slow Sports (Kids), Courtrai, Schouwburg / 19.02, VieLLeicht, Lille, Le Prato / 20.02, Frontières, Roubaix, Le Gymnase
88 théâtre & danse
80 000 000 de vues
La révolution panse ses plays Texte Nelly Haroux Photo Clémentine Chrochet
Le 25 janvier 2011, une jeune femme postait une vidéo sur Internet, appelant ses concitoyens à se dresser face à l’oppression. Quelques heures plus tard au Caire, des manifestants affluent de tout le pays et mettent en marche une révolution inattendue. Mêlant jeu d’acteurs et images d’archives, cette création célèbre la liberté d’expression.
C
ette histoire, authentique, est celle de la jeune Asmaa Mahfouz. Elle est devenue le point de départ de la création de Nathalie Négro et du metteur en scène Eli Commins. 80 000 000 de vues fait entendre les voix singulières des combattantes des révolutions arabes. Et de voix, il est plus que jamais question dans cette forme lyrique unique. Sur les compositions d’Alexandros Markeas, musiciens et chanteuses sont rejoints par six slameuses, narratrices d’un récit historique qui se joue sous nos yeux. Du slam au cœur d’un opéra, un sacrilège ? Loin de disparaître, les codes classiques de l’art lyrique trouvent en cette forme de poésie un outil complémentaire. La parole résonne ici avec une rare intensité, rappelle le souffle initial d’un printemps égyptien qui craint chaque jour de perdre son âme face au radicalisme. L’autre audace réside dans la présence presque exclusive de femmes sur le plateau. En rupture avec les codes traditionnels des opéras du xixe siècle, Nathalie Négro voulait « leur redonner une place d’héroïne forte, 13.02, Dunkerque, Le Bateau Feu, 20h, 8€, www.lebateaufeu.com // 17.02, Douai, en dehors de tout référent masculin ». Un L’Hippodrome, 20h, 20>9€, www.tandemvibrant hommage à des sœurs « courage », à arrasdouai.eu // 19.02, Valenciennes, Le Phénix, 20h, 22>13€, www.lephenix.fr leur capacité à changer le destin du monde.
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Michael Clark
London Calling Texte Marie Pons Photo Le danseur Harry Alexander © Jake Walters
Michael Clark représente la quintessence de l’underground londonien. Proclamé « queer post-punk », le chorégraphe né en écosse secoue la scène contemporaine depuis la création de sa compagnie en 1984. Avec une danse qui se tisse par le mélange des arts, passerelle entre tradition classique et goût certain pour la provocation. So british.
I
l débute sa carrière lorsque sa mère l’inscrit à un cours de danse écossaise à l’âge de 4 ans. L’enfant se révèle très doué et entre à la Royal Ballet School de Londres. Il en sort avec une distinction en 1979 et produit sa première pièce. Il a alors dix-sept ans. Clark impose d’emblée un style décalé, frondeur. Son écriture est branchée sur tous les courants de l’époque, il chorégraphie au son de Bowie ou Iggy Pop, collabore avec le performer déjanté Leigh Bowery. Par contraste, son vocabulaire demande une grande virtuosité et une maîtrise parfaite des codes du ballet classique et de la danse moderne. Let’s Dance. Feu follet touche-à-tout, il chorégraphie plusieurs films de Charles Atlas, met en scène les flamboyants défilés d’Alexander Mc Queen. Il s’entoure d’artistes visuels, sonores et plasticiens pour chaque nouvelle création. En résultent des pièces où les danseurs en justaucorps argentés montés sur pointes se heurtent à la musique de The Fall. Un cocktail détonnant, qui oscille entre grâce et rébellion, humour et rigueur. Pour Animal/Vegetable/Mineral, la bande son est signée Scritti Politti et Relaxed Muscle, formation de Jarvis Cocker. La pièce se divise en trois parties, au cours desquelles le rythme monte progressivement, pour finir « dans une folle énergie, presque un concert de rock ! » explique Julie CunAnimal/ Vegetable/ Mineral 20.02, Maubeuge, La Luna, 20h, 11/8€, ningham, interprète. Un nouveau coup www.lemanege.com d’éclat, à savourer dans toute sa démesure.
92 théâtre & danse
© Cie La Mue/tte
Wunschkonzert © Simon Rauh
M Festival
Festival de Liège
Mais que peut-on bien raconter avec des marionnettes, des ombres, du papier ou des objets ? à peu près tout ! Du mythe de Dédale (Cie Monotype) aux déboires d’une marionnette qui tente de se confectionner elle-même (Dans l’atelier, Tof Théâtre), en passant par l’amour et ses ambiguïtés, le couple et ses mythologies (Le beau genre, Cie la Mue/tte) ou une plongée dans l’univers surréaliste de Magritte... Ce M Festival nous démontre les possibilités quasi illimitées de cette discipline – qui a fait la réputation de la maison Folie Moulins en France – en programmant des spectacles innovants. Certaines histoires s’adressent à toute la famille tandis que d’autres sont réservées aux seuls adultes ou adolescents. Car ce festival tire les ficelles de tous les imaginaires.
En prise avec le bruit et la fureur du monde, le Festival de Liège leur oppose les arts de la scène comme « rempart essentiel », dixit son directeur, JeanLouis Colinet. Comment ? Avec une programmation engagée (sur l’immigration, la misère...) et le regard d’auteurs de toutes nationalités. Mais que peuvent la danse, la musique ou le théâtre face à la violence de notre époque ? L’interroger, la bousculer, à l’image d’Ali et Hèdi Thabet qui signent En attendant les Barbares. à travers cette pièce qui traite de Lampedusa, thème central de cette 8e édition du festival, ces Belges d’origine tunisienne soulignent avec émotion cette inhumaine absurdité. Citons aussi Olivia Carrière, qui a choisi l’ironie pour dénoncer le « développement personnel », nouvelle dictature d’une société en quête de sens. J. Damien
Julien Damien
21.02>08.03, Lille, maison Folie Moulins, 5,5/ 3,50/ 2€ (- 12 ans ) + divers ateliers (12€>grat.), www.mfmoulins.lille.fr
Jusqu’au 21.02, Liège & Mons, divers lieux, 15>5€, www.festivaldeliege.be
94 théâtre & danse
Agenda
Vortex L’après-midi d’un foehn Jongleur devenue performeuse, Phia Ménard interroge l’identité. Dans Vortex, elle joue avec le vent et un immense voile de plastique, nous interrogeant : sous combien de couches nous recouvrons-nous pour paraître au monde ? De ballet aérien il est aussi question dans L’après-midi d’un Foehn, où cette fois elle donne vie – sur la musique de Debussy – à d’étonnants personnages faits de sacs en plastique.
L’après-midi d’un foehn, Cie Non Nova © Jean-Luc Beaujault
Vortex, 03>07.02, Dunkerque, Le Bateau Feu, mer & ven, 20h, jeu, sam, 19h, 8€// L’après-midi d’un foehn, 04& 07.02, 15h, 04.02, 19h, 5€, www.lebateaufeu.com
Fesses
Le Cœur Cousu
Bernadette A. nous parle de cul. Ou plutôt de fesses. Ce qui, pour la Courrièroise, marque une différence fondamentale. Un bon prétexte pour « dire simplement les désirs, les envies, l’impertinence, l’urgence de vivre, et pas que dans sa tête ». Très rabelaisienne, cette nouvelle création nous emmène dans un solo burlesque où se mêlent souvenirs d’enfance, citations de grands penseurs et histoire de l’art.
Le Théâtre La Licorne adapte Le Cœur cousu, roman de Carole Martinez. L’histoire ? Frasquita Carasco habite un petit village espagnol, et a hérité d’un don incroyable : elle recoud les vêtements autant que les hommes et les animaux… Sur scène, les comédiens revêtent les mêmes habits que des « puppets » en ouate et tissu : pour que la frontière entre réel et imaginaire reste floue.
05, 06 & 07.02, Arras, Théâtre, jeu, 20h30, ven, 20h, sam, 18h, 8€, www.tandem-arrasdouai.eu // 17 &18.02, Armentières, Le Vivat, 20h, 21/ 14/ 7€
10>13.02, Béthune, La Comédie de Béthune, 20h, 20>6€, www.comediedebethune.org // 12.05, Roubaix, La Condition Publique, 20h30, 12/ 8€, www.laconditionpublique.com
Carte blanche à Olivier Dubois Le Louvre-Lens offre une carte blanche à O. Dubois dans le cadre de l’exposition Des animaux et des pharaons. Le directeur du ballet du Nord « donne corps à cette égypte ensorceleuse » avec une programmation en trois temps : un atelier de momification de doudous, une déambulation chorégraphique (Ana Masri !) dans la Galerie du temps, avant d’inviter Karima Mansour, « La Callas égyptienne », à y créer un solo. 04>07.02, Louvre-Lens : Doudou III, mon idole !, 04.02, 14h30>16h, 4,50/1,50€ // Ana Masri !, 05.02, 18h30,19h30, 20h30, gratuit // Karima Mansour, 07.02, 19h, 9/5€, www.louvrelens.fr
96 théâtre & danse
Agenda
La Contrebasse Dans un studio de vieux garçon, un musicien dit tout son amour, mais aussi sa rancœur, envers sa contrebasse. Car cet instrument, « le plus grand, le plus grave et le plus indispensable de tout l’orchestre », demeure également le plus encombrant… Après six ans d’absence sur les planches, Clovis Cornillac reprend ici le rôle joué par Jacques Villeret il y a plus de vingt ans, dans cette pièce de Patrick Süskind, à la fois drôle et sombre.
© Bernard Richebé
17.02, Caudry, Théâtre, 20h30, 39/30€, www.scenesmitoyennes.fr // 18.02, Roubaix, Le Colisée, 20h30, 35>8€, www.coliseeroubaix.com
Boxe Boxe
L’odeur des arbres
Anglaise, thaïlandaise, française… quel que soit son style, la boxe, c’est aussi de la danse. Ce que nous prouve avec poésie cette chorégraphie de Mourad Merzouki. Sur scène, les danseurs esquivent les coups – de pied, de poing – et entament un ballet avec des sacs de frappe dans des mouvements toujours gracieux, rythmés par la musique classique du Quatuor Debussy. Aussi retournant qu’un uppercut.
Entre suspense et poésie, cette pièce de Koffi Kwahulé, mise en scène par Isabelle Pousseur, narre le retour d’une sœur aînée dans son village natal, au Burkina Faso, pour enquêter sur la disparition suspecte de son père. Entre un beau-frère dissimulateur, un frère travesti qui ne pense qu’à l’élection de Miss monde et les mauvais coups d’une sœur machiavélique, obtiendra-t-elle la vérité ?
17 & 18.02, Calais, Le Channel, 20h, 6€, www.lechannel.fr
17>28.02, Bruxelles, Théâtre Océan Nord, 20h, sf mer, 19h30 & mar 24.02, 13h & 20h, relâche dim & lun, 12/7,5/5€, www.oceannord.org
Pour ceux qui restent à la mort soudaine de leur ami Antoine, Nicole, Dominique, Simon et Gégé se retrouvent le temps d’une soirée dans son appartement. Mais la tristesse du deuil tourne vite au règlement de comptes. Entre révélations fracassantes et jalousie, l’amitié vacille. Cette pièce signée Pascal Elbé mélange tendresse et humour noir, à travers des personnages égoïstes, détestables mais terriblement humains. Et drôles. 18.02>15.03, Bruxelles, Théâtre Royal des Galeries, 20h15, sf dim, 15h, 28.02 : 15h et 20h15, 29>10€, www.trg.be
Tous les spectacles de l’Eurorégion sur www.lm-magazine.com
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David Bowie, Time May Change Me © Helen Green
le mot de la fin
Helen Green - Célébrant les 68 ans de David Bowie – le 8 janvier dernier –, l’artiste britannique lui a rendu hommage à travers un gif sur-mesure. L’œuvre animée est constituée de 29 portraits qui retracent l’évolution de son style : du bol façon Paul McCartney à la période mullet rose de Ziggy, en passant par la banane des années 1980, etc. Alors, quel look pour 2015 ? http://dollychops.tumblr.com